[Enregistrement électronique]
Le mercredi 7 juin 1995
[Traduction]
Le vice-président (M. Shepherd): Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent des comptes publics. Nous n'avons pas encore le quorum, le comité ne peut accepter ni motion ni vote, mais la séance peut se poursuivre en public.
L'ordre du jour est conforme à l'alinéa 108(3)d) du Règlement, étude des chapitres 16 et 18 (services correctionnels) du rapport de 1994 du Vérificateur général.
Conformément à l'accord conclus hier avec M. Laurin, pendant la première partie de la présente réunion, nous continuerons de nous pencher sur les témoignages qui nous ont soumis hier au sujet de l'Office national des transports. Les fonctionnaires du bureau du Vérificateur général ont accepté d'assister à cette partie de notre réunion, et nous pourrons donc les consulter le cas échéant.
Monsieur Laurin, vous avez la parole.
[Français]
M. Laurin (Joliette): La présence des témoins n'est pas nécessaire, monsieur le président, mais je ne vois pas d'objection à ce qu'ils soient là. Je voudrais proposer au Comité un schéma pour le rapport du Comité à la lumière des témoignages que nous avons entendus. Je voudrais suggérer cela au Comité, mais si, pour le faire, nous avons besoin du quorum... Mon intention était de faire ma suggestion verbalement et de remettre mes notes aux recherchistes pour qu'ils puissent s'en inspirer dans la rédaction du rapport.
[Traduction]
Le vice-président (M. Shepherd): Je pense que cela est admissible. Nous pouvons discuter de vos suggestions sans passer à la mise aux voix. Avez-vous un plan général?
[Français]
M. Laurin: Il avait déjà été décidé qu'un rapport serait rédigé après avoir entendu les témoins sur le chapitre 6.
Compte tenu de la nature des témoignages que nous avons entendus, je voudrais que le document de travail préparé par nos recherchistes contienne les éléments suivants. C'est une suggestion que je fais et je pourrais vous laisser une copie de ce que je vais vous dire.
Il devrait y avoir une première partie qui ferait la rétrospective des événements qui ont mené au rapport du vérificateur. Qu'est-ce qui a amené le vérificateur général à se pencher sur ce problème? On pourrait parler des avertissements du vérificateur général faits en 1987 et de la déréglementation de 1988. Ensuite, on a jugé que l'Office national des transports ne pouvait pas refuser les montants proposés. Il y a eu une étude de l'Office national des transports sur les possibilités d'abus, une étude du ministère sur les mêmes possibilités, et l'ONT aurait eu le pouvoir de refuser les montants proposés. On a prétendu que l'abolition du programme par le Budget de 1995... Il y a eu une nouvelle politique mise en place pour contrôler les abus et le rapport du vérificateur général en mai 1995.
C'est un peu l'historique de ce qui s'est passé avant les recommandations du vérificateur général. Ça pourrait constituer la première partie du rapport.
La deuxième partie traiterait de l'inaction, tant à l'Office national des transports qu'au ministère, durant les années 1988 à 1992, puis de la lenteur à agir à la suite de l'étude qui a été faite en 1992. Les coûts de cette inaction pour les contribuables québécois et canadiens devraient aussi être soulevés dans le rapport.
Une troisième partie pourrait faire ressortir le fait que personne ne semble responsable de cette inaction. En fait, l'Office national des transports se dégageait des responsabilités politiques en disant que son rôle était de gérer le programme selon des règles préétablies. Toutefois, puisque c'est justement l'ONT qui gère le programme, on aurait dû signaler tout problème potentiel au ministère si on voulait faire un suivi minutieux de la gestion du programme. Dans cette même partie, on pourrait traiter du rôle du ministère qui, lui, était responsable de la partie politique du programme, et de sa lenteur à réagir aux problèmes. C'était la responsabilité du ministère que de superviser l'ONT pour s'assurer que cet organisme faisait bien son travail.
Une quatrième partie du rapport demanderait qu'un rapport détaillé soit déposé au Comité d'ici le 31 décembre 1995, lequel devrait répondre aux questions suivantes.
Comment l'Office a-t-il évalué les montants de base pour prendre ses décisions relatives aux montants accordés, pour les 30 millions de dollars qui restent à distribuer?
À combien se sont élevées les économies réalisées à la suite de la mise en place des nouvelles mesures?
Quelle a été l'utilisation des fonds ainsi récupérés? Là, je parle au passé, parce qu'on sera rendu au mois de décembre, à ce moment-là, et l'Office devrait alors avoir terminé de recevoir les réclamations des transporteurs qui ont un lien avec les expéditeurs.
Est-ce que l'Office national des transports a observé une diminution des taux de transport des entreprises avec lien de dépendance depuis l'annonce des nouveaux pouvoirs de l'Office, en mai 1995?
Combien d'entreprises, sur les 30 p. 100 qui ont un lien de dépendance et bénéficient de subventions, avaient surévalué les montants nécessaires pour leur transport?
À la suite de la déréglementation, depuis 1988, à combien l'Office évalue-t-il les pertes dues aux abus faites par les entreprises avec lien de dépendance, compte tenu des chiffres obtenus en réponse aux questions qu'on a posées précédemment?
La dernière partie du rapport du Comité ferait état du fait que le Comité déplore la décision du gouvernement d'abolir le programme sans avoir étudié les impacts économiques sur les régions touchées.
Le canevas de rapport que je suggère serait donc composé de cinq parties, dont une quatrième pour demander au ministère de faire lui-même un rapport d'ici le 31 décembre. Ce n'est pas nécessairement exhaustif. J'aimerais que ces éléments-là soient traitées par nos recherchistes dans le rapport. Si les recherchistes trouvent quelque chose, c'est très bien, ou si quelqu'un d'autre veut faire des suggestions d'ajouts au rapport, cela pourrait être pris en considération. On verra, lorsque le document de travail sera produit, si cela nous convient ou pas. Je pense que les éléments que je suggère ont tous été traités en comité et j'aimerais qu'ils apparaissent dans le rapport du Comité.
Voilà, monsieur le président.
M. Paradis (Brome - Missisquoi): Monsieur le président, j'ai peut-être un peu de difficulté, tout particulièrement avec le dernier énoncé de notre collègue du Bloc. Je ne pense pas que cela ait été traité en comité, ni que le Comité soit arrivé à la conclusion qu'il faudrait faire une grande analyse avant de mettre fin à ce programme. Au contraire, il en est ressorti qu'il s'agit d'un programme de 100 millions de dollars par année. On a vu, même d'après les questions de M. Laurin, que des gens étaient subventionnés pour transporter leur ménage. On a vu avec quel laxisme ces fonds-là étaient administrés. On n'avait certainement pas pensé à faire une grande étude socio-économique avant de décider de mettre fin à ce programme. Également, cela fait partie d'un ensemble de politiques gouvernementales visant à réduire le déficit, des énoncés budgétaires présentés par le ministre des Finances, ainsi que des crédits qui sont votés. Je ne pense pas que le Comité doive conclure, pour cette partie-là, qu'il y aurait eu lieu de se poser encore des questions avant de penser à mettre fin au programme.
M. Laurin: Monsieur le président, j'en avais parlé et j'ai moi-même fait le commentaire au sujet d'une étude faite en 1983. J'ai demandé à un témoin si l'étude faite en 1983, qui établissait un scénario possible de 12 000 pertes d'emplois, était encore valable en 1995. Mme Greene m'a répondu qu'on ne le savait pas. Je fais allusion à cela. Donc, on ne sait pas si une étude qui date de 1983 peut être appliquée aujourd'hui ou pas. J'ai demandé si on avait consulté d'autre études avant de mettre fin au programme, afin de voir quel serait l'impact de cela sur les emplois. On m'a répondu qu'il n'y en avait pas eu. Je voudrais simplement que cela soit mentionné dans le rapport, puisque cela a été dit. On n'invente rien en disant cela.
M. Paradis: Beaucoup de choses ont été dites et je ne pense pas que le rapport doive être un compte rendu textuel de tout ce qui a été dit ici. J'apprécie les premiers points de votre présentation, monsieur Laurin, mais quand vous arrivez au dernier, vous semblez vouloir atteindre une espèce de conclusion que je ne vois pas. Il y a des gens qui prétendent et qui prétendront qu'il faudrait faire des études pendant trois ou quatre ans avant de décider si on met fin à un programme ou si on en bâtit un autre, si on en a besoin, etc. Notre société évolue plus rapidement que cela. et il y a des principes budgétaires à respecter. Il y a un déficit et on n'a pas deux ans pour faire des études. Ce que j'ai entendu ici et ce que le vérificateur général nous a démontré nous amènent à penser que l'abolition du programme, étant donné ce qui a été subventionné, pose beaucoup de questions sur le fait de savoir si ce programme, pendant ses dernières années d'existence, a servi les fins pour lesquelles il avait été créé à l'origine.
On a aussi mentionné que c'est un programme qui a été modifié avec le temps et à la fin, on se retrouve avec une liste de produits: on subventionne le transport d'à peu près tout dans une région. Il s'agit de 100 millions de dollars par année et on se dit: Pourquoi a-t-on mis ce programme-là sur pied il y a x années?
C'est davantage dans ce sens-là qu'il faut voir les choses. Vous vous demandez peut-être si les programmes gouvernementaux de ce genre devraient être revus périodiquement, compte tenu des impératifs socio-économiques qui changent, qui évoluent avec le temps. Peut-être que oui. Mais si vous arrivez à la conclusion qu'on n'a pas regardé si 12 000 emplois...
Je pense que ce n'est pas l'esprit de la chose. Je suis d'accord sur le fait que vous ayez posé la question, mais ce n'est pas l'esprit dans lequel cela a tourné.
M. Laurin: Excusez-moi. J'aimerais mieux qu'on utilise les mots laxistes que vous avez utilisés.
[Traduction]
Le vice-président (M. Shepherd): Je dois vous signaler qu'il a été convenu au début que notre rapport à ce sujet serait très bref. Vous vous souvenez sans doute que nous avons essayé d'insérer ce point dans notre dernier ordre du jour avant la fin de la session. À ce moment-là il a été convenu que le rapport serait court.
Je crois que nous devrions essayer de donner des consignes d'ordre général à nos attachés de recherche, pour que ces derniers puissent produire quelque chose de plus précis. Avez-vous des commentaires sur cela?
[Français]
M. Laurin: Ce n'est pas mon intention. Je m'excuse, monsieur le président. Je leur laisse cela. Cela a plus que deux pages. Je le leur laisse, ils feront leur travail, puis on jugera par la suite.
Je m'excuse, madame.
[Traduction]
Mme Whelan (Essex-Windsor): Monsieur le président, sauf votre respect, je pense être la suivante sur la liste d'intervenants.
Nous, les membres du Comité des comptes publics, n'avons pas pour responsabilité de calculer le nombre d'emplois perdus dans les divers ministères. À ce sujet, il y a un comité au ministère des Transports chargé de décider si ce dernier a pris de bonnes ou de mauvaises décisions. Nous avons pour responsabilité primordiale de nous assurer que le gouvernement fait preuve de rigueur budgétaire. De ce point de vue, il faut le féliciter d'avoir annulé le programme.
Voilà tout ce que je voulais dire. J'espère que le rapport se limitera au domaine de compétence de notre Comité sans s'intéresser aux responsabilités d'autres. D'autres comités se pencheront sur les diverses activités des différents ministères.
Le vice-président (M. Shepherd): À la lumière du témoignage que nous avons entendu, il faut se demander non pas pourquoi on annule le programme maintenant, mais plutôt pourquoi on ne l'a pas annulé il y a longtemps.
J'aimerais poser une question à nos deux témoins. Votre explication sur les rapports entre les différentes subventions m'a beaucoup intéressé. Le ministère de la Défense nationale versait des subventions au personnel militaire travaillant pour Transports Canada. Est-ce...
[Français]
M. Laurin: J'invoque le Règlement. Je ne veux pas qu'on prenne encore du temps pour réentendre les témoins, monsieur le président. Je ne veux pas non plus faire le travail de nos recherchistes. Je leur donne un document de travail qui m'apparaît être intéressant pour la rédaction du rapport. Ils feront leur travail, puis on discutera pour voir si on doit maintenir un paragraphe ou l'enlever. Si on faisait cela aujourd'hui, on devancerait le jugement porté sur le travail de ces gens-là. Je leur laisse cela. Ils ont entendu les débats et ils ont le compte rendu écrit de ce qui s'est dit ici au Comité. Je leur fais confiance. Je suis prêt à leur donner mes notes. Qu'ils fassent leur travail.
Quand on aura leur document de travail, s'ils ont dit des choses qui ne plaisent pas à M. Paradis, il le dira à ce moment-là et on décidera au vote si on doit les maintenir ou pas.
[Traduction]
M. Paradis: Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
Le vice-président (M. Shepherd): Pour être réaliste, je crois qu'il faut tenir compte des opinions de tous les membres du Comité et les inclure dans la mesure du possible dans notre rapport.
M. Paradis: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Il n'appartient pas à M. Fillion de rédiger ce rapport. Il a été convenu hier soir que nous nous réunirions ici aujourd'hui pour essayer d'établir un canevas pour le projet de rapport. Je veux signaler à M. Fillion qu'à mon avis personne de notre côté n'appuie la référence aux pertes d'emplois. Cela est incontestable. Pourquoi demandons-nous alors aux attachés de recherche de préparer une ébauche de rapport y faisant référence, si nous avons dit dès le début que nous ne sommes pas d'accord? Je pense que c'est important. Ce n'est pas le rapport de M. Fillion; ce sera le rapport du Comité. Pourquoi leur demandons-nous d'écrire quelque chose qui est hors-sujet?
Le vice-président (M. Shepherd): C'est une question de procédure. Je pense que nous demandons à nos attachés de recherche de rédiger un rapport tenant compte du consensus général... Je n'ai pas l'impresson que vous ayez le consensus sur votre argument pour l'instant. Si vous voulez faire ultérieurement une proposition d'amendement au rapport, je pense que ce sera préférable.
[Français]
M. Laurin: C'est ça. Monsieur le président, je ne veux pas proposer des modifications tout de suite, car je ne sais pas ce qu'on mettra dans le rapport. Si ce qui est dans le rapport ne nous convient pas, on suggérera des modifications. Si elles sont refusées, on demandera la permission de faire un rapport dissident, c'est tout.
Pour l'instant, c'est un document de travail pour aider les recherchistes à rédiger. Si tout ce que je leur donne aujourd'hui est dans l'ébauche de rapport, nous n'aurons rien d'autre à ajouter. Si tout n'y est pas, on en reparlera.
[Traduction]
Le vice-président (M. Shepherd): Il y a un commentaire qui m'a semblé assez intéressant, et j'imagine qu'il est intéressant uniquement parce que nous examinons aussi un rapport à l'intention du ministère de la Défense nationale. Je crois que vous avez dit à un moment donné, et nous pourrions peut-être lire ce passage à titre de témoignage, qu'une partie de ces subventions avaient en fait été versées à des entreprises dont la vocation essentielle était de transporter du personnel militaire. Par conséquent, il se pourrait bien que le gouvernement du Canada ait en quelque sorte payé plus d'une fois, une fois sous forme d'un généreux régime de subvention et une autre fois sous forme de paiement des frais réels de transport du personnel. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
M. Hugh McRoberts (vérificateur général adjoint, Direction générale des opérations de vérifications, Bureau du vérificateur général): Certainement, monsieur le président.
Très simplement, vous vous souvenez que lors de son témoignage hier, Mme Greene a précisé qu'on avait trouvé la base de données dans le document d'information. On a constaté que des biens domestiques usagés faisaient partie des marchandises transportées. Elle a aussi précisé de façon parfaitement correcte que cela n'avait été le cas que jusqu'à 1992. En 1992, par suite de modifications budgétaires, on a rayé cette catégorie du programme de transport vers l'Ouest. Nous avons effectivement constaté lors de notre examen de la base de données qu'avant 1992, d'après les dossiers de l'ONT, on subventionnait effectivement le transport de biens à l'intention de l'MDN. Cela n'a sans doute rien d'étonnant car si la subvention existe, il est évident que les gens la demandent, et le MDN est certainement l'un des organismes qui transporte le plus de personnes à destination et en provenance de la zone maritime du Canada.
Le vice-président (M. Shepherd): Nous sommes donc d'accord sur la cadre de ce rapport? Le Comité est d'accord avec le cadre du rapport en ce qui concerne l'Office national des transports?
Dans ce cas, nous allons revenir à notre ordre du jour, qui est essentiellement consacré au rapport sur les services correctionnels. Nous avons eu notre réunion publique, comme convenu hier, et nous allons maintenant poursuivre à huis clos. Essentiellement, cela nous permettra d'éviter la transcription, et par conséquent de réaliser des économies pour le gouvernement. Nous sommes bien d'accord?
[La séance se poursuit à huis clos]