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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 3 octobre 1995

.1533

[Traduction]

Le vice-président (M. Telegdi): La séance est ouverte.

Nous sommes heureux de vous accueillir. Afin de travailler de façon plus efficace, afin d'épargner de l'argent et afin de maximiser nos ressources, nous devrions nous efforcer d'arriver à temps. Ainsi, les réunions commenceraient à temps, et nous éviterons de prendre la mauvaise habitude de commencer en retard.

Il y aura un vote. La sonnerie sera déclenchée à 17 heures, par conséquent, nous devrions nous rendre à la Chambre vers 17h10. Nous n'avons donc pas beaucoup de temps, et il nous faudra procéder le plus efficacement possible afin de profiter le plus possible de notre temps.

.1535

Nous accueillons le vérificateur général, M. Desautels, ainsi que M. Thompson et Mme Pace, du Bureau du vérificateur général. Nous accueillons également M. Palmer, le surintendant du BSIF, et M. Heyes, directeur général du BSIF.

Nous allons commencer avec M. Desautels. Vous avez dix minutes. Ensuite, nous passerons aux questions.

[Français]

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président.

Comme vous l'avez dit, je suis accompagné de M. Ron Thompson et de Mme Crystal Pace. Ils étaient responsables de notre vérification du Secteur des institutions de dépôt du Bureau du surintendant des institutions financières et, soit dit en passant, leur prochaine tâche sera d'examiner les secteurs des assurances et des pensions du Bureau du surintendant des institutions financières. Nous prévoyons communiquer les résultats de ce dernier travail vers la fin de l'année 1996.

Il semble opportun que le Comité des comptes publics considère les résultats de notre vérification du Secteur des institutions de dépôt du Bureau du surintendant. En effet, vers la fin de notre vérification, le gouvernement a déposé un Livre blanc décrivant certaines propositions de réforme du système de réglementation.

En juin, le gouvernement a présenté le projet de loi C-100, dont certaines dispositions découlent de propositions du Livre blanc. Au cours des deux prochaines années, il effectuera un examen général plus approfondi des lois qui régissent les institutions financières au pays. J'espère que nos constatations seront prises en compte par les parlementaires et d'autres parties intéressées lors du déroulement de cet examen.

[Traduction]

Pour ce qui est du projet de loi C-100, notre Bureau a comme politique, pour des raisons évidentes, de ne pas commenter les projets de lois étudiés par la Chambre. Comme vous le savez, nous vérifions essentiellement la façon dont les politiques et les programmes sont mis en oeuvre. Nous n'exprimons pas d'opinion sur les enjeux politiques qui s'y rattachent.

Par exemple, nous ne formulons pas de commentaires. Nous ne disons pas s'il devrait y avoir une assurance-dépôt au Canada ou si les institutions financières devraient être réglementées différemment.

Monsieur le président, nous considérons notre vérification du Secteur des institutions de dépôt du BSIF comme l'une des missions les plus techniques, les plus délicates et les plus importantes que nous ayons réalisées ces dernières années. Nous avons vérifié nos constatations avec grand soin avant de les publier. Notre équipe de vérification comptait un membre ayant 30 années d'expérience des marchés financiers, un autre ayant 20 années d'expérience des institutions financières et d'autres vérificateurs chevronnés.

Notre équipe de vérification était appuyée d'un comité consultatif composé d'experts dans le domaine des services financiers. Parmi eux, on retrouvait des hauts dirigeants de quelques-unes des plus grandes banques et sociétés de fiducie du pays. Ils ont examiné nos constatations et les ont appuyées.

[Français]

J'aimerais maintenant faire quelques commentaires sur les résultats de notre vérification du Secteur des institutions de dépôt du Bureau du surintendant. Essentiellement, le chapitre 5 livrait deux messages principaux.

Premièrement, malgré les tensions qui ont secoué les marchés financiers au cours des dernières années, nous pensons que la confiance du public dans l'industrie des services financiers s'est maintenue. Cependant, le système de réglementation comporte certaines faiblesses auxquelles il faut porter attention.

Deuxièmement, même si le Bureau du surintendant des institutions financières a fait des progrès sur plusieurs fronts en renforçant ses pratiques réglementaires, il doit s'améliorer dans certains domaines afin de relever les défis de l'avenir.

Les faiblesses du système de réglementation que nous avons observées sont de trois ordres.

Premièrement, nous avons constaté que les mandats et les responsabilités des principaux intervenants du système de réglementation étaient imprécis et mal coordonnés. Les initiatives actuelles proposent qu'un mandat législatif soit confié au Bureau du surintendant; elles proposent également de modifier le mandat de la Société d'assurance-dépôts du Canada et les responsabilités du ministre des Finances.

Cependant, on ne sait pas toujours très bien qui est responsable des objectifs de politique publique tels que la stabilité et la compétitivité du système financier, quel rôle le ministère des Finances joue dans le système fédéral de réglementation et comment le chevauchement des responsabilités législatives de la Société d'assurance-dépôts du Canada et du Bureau du surintendant des institutions financières pourrait être rationalisé.

.1540

[Traduction]

Deuxièmement, nous avons observé que dans le système de réglementation, la transparence et l'obligation de rendre compte ne sont pas aussi bien respectées qu'elles le devraient, tant envers les institutions réglementées qu'envers les députés et le grand public. Bien que certaines mesures aient été prises en ce sens, il reste encore beaucoup à faire.

Par exemple, le BSIF pourrait mieux rendre compte aux députés et au public en expliquant comment fonctionne le processus de réglementation et comment il était appliqué aux institutions qui ont fait faillite - une analyse rétrospective (post mortem) publique en quelque sorte. Le BSIF pourrait devenir plus transparent aux yeux des institutions qu'il examine en informant chaque institution de son niveau de risque et de son classement par rapport à ses pairs.

Troisièmement, nous n'avons pu déterminer dans quelle mesure le système de réglementation garantit la sécurité et la santé des institutions de dépôt tout en répondant aux objectifs du gouvernement. Cela tient au fait qu'une évaluation adéquate de l'efficacité du système n'a jamais été réalisé.

L'évaluation est un outil nécessaire pour gérer les résultats, pour assurer la reddition des comptes et pour prendre les décisions quant à l'affectation des ressources. Une évaluation permet de déterminer si un programme ou une politique sert certaines fins utiles, d'établir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, d'évaluer si l'on réalise ce que l'on veut réaliser et si les résultats en valait les coûts.

Nous pensons qu'une évaluation du système de réglementation fournirait de l'information extrêmement utile pour l'examen des lois régissant les institutions financières prévu pour 1997. En d'autres mots, nous pensons que le système de réglementation devrait être évalué, que la politique du gouvernement exige qu'il le soit et que les parlementaires ont le droit de s'attendre à cela.

Qui plus est, nous pensons que l'évaluation ne devrait être ni trop complexe ni trop coûteuse à réaliser. En fait, compte tenu de l'importance de l'industrie pour l'économie canadienne, il est essentiel de s'assurer que les objectifs sont toujours pertinents et qu'ils sont atteints.

[Français]

Outre les questions relatives au système, nous avons également signalé que le Bureau du surintendant peut et doit s'améliorer dans certains domaines.

L'industrie des services financiers est, comme on le sait, très dynamique et continuera probablement à évoluer rapidement au cours des prochaines années. Pour suivre les développements de l'industrie, le Bureau du surintendant doit pouvoir réagir rapidement à l'évolution des risques. Nous pensons que pour y arriver, le Bureau du surintendant doit mettre l'accent sur une surveillance plus souple des institutions plutôt que sur des inspections annuelles plus structurées. Il appert que le Bureau du surintendant a récemment pris des mesures pour renforcer sa fonction de surveillance.

[Traduction]

Les processus de surveillance du BSIF se sont améliorés avec le temps. Cependant, il faut, à notre avis, que le BSIF établisse des règles plus précises à l'intention des inspecteurs qui évaluent la gravité des problèmes des institutions ou qui proposent des mesures d'intervention.

Nous considérons que le Guide en matière d'intervention à l'intention des institutions financières, proposé dans le Livre blanc, est un pas dans la bonne direction. Cependant, les règles plus précises que nous avons à l'esprit seraient fondées sur les facteurs de risque du Guide, sur le système actuel de notation des risques appelé CAMEL, sur les normes de la SADC, et sur d'autres mesures faciles à obtenir.

Par exemple, les quatre étapes d'intervention décrites dans le Guide du Livre blanc pourraient être raffinées pour devenir des catégories de risque. Chaque catégorie de risque pourrait ensuite être liée aux mesures d'intervention à mettre en oeuvre dans un délai donné. Ces mesures pourraient inclure des restrictions aux activités commerciales, l'obligation d'injecter des capitaux, des restrictions sur la déclaration de dividendes et, comme recours ultime, la fermeture forcée.

Même si l'utilisation du jugement sera toujours d'une importance cruciale, des règles plus précises pour déclencher le mécanisme d'alerte rapide et pour proposer des mesures d'intervention aideraient à garantir à la direction du BSIF, aux députés et au public canadien que les décisions importantes sont prises de façon cohérente et sans tarder.

Une régie d'entreprise (intendance) de qualité est essentielle pour atténuer les risques de perte pour les déposants. Nous pensons que le BSIF devrait communiquer clairement ses attentes aux institutions de dépôt à ce chapitre, puis examiner ou surveiller les institutions pour garantir qu'elles y donnent suite.

.1545

Les représentants de l'industrie à qui nous avons parlé nous ont dit qu'ils souhaitaient vivement connaître les attentes du BSIF.

Dans le chapitre 5, nous avançons d'autres suggestions afin que le BSIF se dote des moyens nécessaires pour relever les défis qui l'attendent, entre autres, s'attacher davantage à l'étude des risques imminents à l'échelle du système et des secteurs spécialisés, et à l'élaboration de méthodes et à la formation.

Nous reconnaissons que la majeure partie des coûts sont attribuables aux faillites d'institutions, mais il ne faudrait pas oublier les gains d'efficience possibles au BSIF.

Nous savons que le BSIF a récemment amélioré sa structure organisationnelle. Cependant, il y a encore place à l'amélioration, par exemple, en partageant des systèmes avec des organismes connexes.

[Français]

Pour terminer, monsieur le président, le Bureau du surintendant des institutions financières joue un rôle essentiel dans l'industrie des services financiers. M. Palmer a pris un certain nombre de mesures au cours des derniers mois pour renforcer son organisation et le système dans lequel elle fonctionne. Je suis heureux que le Comité des comptes publics ait choisi d'étudier aujourd'hui le chapitre 5 et j'ai hâte de discuter plus en détail de nos constatations avec vous et avec M. Palmer.

Je vous remercie, monsieur le président.

[Traduction]

Le vice-président (M. Telegdi): Merci.

Monsieur Palmer.

M. John Palmer (Surintendant des institutions financières): Merci, monsieur le président.

Je suis heureux de comparaître devant votre Comité cet après-midi, avec le vérificateur général, pour discuter de son rapport sur le Secteur des institutions de dépôts du BSIF et de la façon dont nous entendons donner suite aux recommandations qu'il contient.

Avant de traiter spécifiquement du rapport du vérificateur général, il serait peut-être bon que je décrive brièvement le BSIF et son activité.

La principale responsabilité du BSIF consiste à réglementer et à surveiller les banques, les sociétés de fiducie, de prêt et d'investissement, les sociétés d'assurance-vie et d'assurances multirisques, les associations coopératives de crédit et les sociétés de secours mutuels détenant une charte, une licence ou un certificat d'agrément du gouvernement fédéral.

Le BSIF surveille également quelque 1 100 régimes de retraite assujettis à la loi fédérale et fournit des rapports actuariels ainsi que des conseils sur divers programmes de pension gouvernementaux.

En outre, en tant qu'agent de la SADC ou dans le cadre d'ententes fédérales-provinciales, le BSIF surveille les institutions titulaires d'une charte provinciale.

Ainsi que le vérificateur général l'a fait remarquer, le rôle du BSIF n'a jamais été précisément énoncé. L'exposé de principe intitulé Renforcer et assainir le secteur des services financiers canadien, publié par le ministère des Finances en février 1995, proposait une modification du cadre législatif pour donner au BSIF un mandat précis. Comme vous le savez, les propositions incluses dans cet exposé ont été intégrées dans le projet de loi C-100 déposé devant la Chambre des communes.

Le mandat envisagé précisera le rôle du BSIF dans le suivi de la situation des institutions financières fédérales, dans la promotion de politiques pour effectuer le suivi et contrôler les risques et dans la prise de mesures rapides, ou la démarche permettant de s'assurer que les institutions prennent elles-mêmes des mesures, pour régler la situation des institutions en difficulté.

Le rôle confié au BSIF suppose que les surveillants ne peuvent prévenir les faillites et qu'en fait, seuls la direction et les conseils d'administration des institutions financières peuvent le faire. Le système de réglementation vise à préserver la discipline financière, à encourager l'adoption de solutions internes et à permettre une intervention rapide pour régler les problèmes afin de réduire les pertes au minimum pour les déposants, les souscripteurs et les créanciers.

Pour que le BSIF puisse s'acquitter de cette tâche, ses pouvoirs seront quelque peu renforcés, et il aura notamment la possibilité, dans certains cas, de demander une ordonnance de liquidation plus rapidement que le lui permet la législation actuelle. Le surintendant aura également le pouvoir d'opposer son veto à la nomination d'administrateurs dans une institution financière en difficulté.

Parallèlement à la modification du mandat et au renforcement des pouvoirs envisagés, afin de s'adapter aux changements en cours dans l'industrie financière, le BSIF s'est récemment réorganisé en trois grands secteurs: les opérations, la politique et les services intégrés.

Cette réorganisation est en place depuis le début de juillet et, quoiqu'il soit trop tôt pour en évaluer les conséquences, je m'attends à ce que le BSIF soit maintenant une organisation plus solide et mieux équipée pour relever les défis de l'avenir.

.1550

Nous voulons utiliser nos ressources de la façon la plus efficace possible, tout en conservant notre expertise dans le domaine de l'industrie financière, en développant nos compétences spécialisées, en coordonnant mieux nos activités et en réduisant les chevauchements dans les domaines des normes, de la politique et du soutien législatif, en uniformisant les positions sur les questions importantes touchant le secteur des institutions financières et en surveillant plus efficacement les conglomérats financiers.

Monsieur le président, je souscris aux grandes lignes du rapport du vérificateur général. Je crois qu'il est assez élogieux quant au travail accompli par le BSIF en une période extrêmement difficile. Mes collègues et moi-même savons gré au vérificateur général et à son personnel de leurs efforts. Nos observations relatives à chaque section ont été intégrées dans le rapport final. J'ai remis au Comité une copie de ma réponse intégrale au vérificateur général datée du 20 avril, et une copie de la lettre que M. Grant Reuber, président de la SADC, et moi-même avons envoyée à M. Desautels le25 juillet, lettre dans laquelle nous indiquions certaines des initiatives communes que nous avons prises à la suite du rapport.

Le vérificateur général a fait beaucoup de recommandations utiles, et il a été tenu compte de la grande majorité d'entre elles. Par exemple, sur la question des responsabilités du BSIF et de la SADC, le nouveau mandat précise le cadre à l'intérieur duquel le BSIF peut être tenu davantage responsable de ses actes.

Le projet de loi C-100 propose une révision du mandat de la SADC. Le Guide en matière d'intervention à l'intention des institutions financières fédérales qui a été publié à titre d'annexe de l'exposé de principe montre clairement que le système est renforcé par l'action concertée de deux organismes indépendants travaillant en étroite collaboration, mais avec des mandats différents et des perspectives et des priorités nécessairement différentes.

Quant à la place du ministère des Finances dans le système de règlementation fédérale, le ministère joue un rôle de premier plan lorsqu'il s'agit d'établir les politiques générales régissant les institutions financières. Le BSIF jouera un rôle dans les révisions techniques des textes de loi, par opposition aux révisions portant sur la politique et continuera d'effectuer des recherches et des analyses touchant les institutions financières. Le BSIF et le ministère des Finances ont conclu un protocole d'entente qui définit de façon détaillée les secteurs de responsabilités.

Le vérificateur général s'est montré préoccupé du chevauchement des fonctions entre le BSIF et la SADC. Nous convenons qu'il y a dédoublement. Mais nous croyons aussi que cela est positif dans une certaine mesure, en particulier lorsque le BSIF et la SADC doivent traiter avec des institutions de dépôts en difficulté. Les deux organismes abordent ce genre de problèmes de façons différentes eu égard à leur expérience propre et, en mettant leurs efforts en commun, ils sont davantage en mesure de prendre des décisions judicieuses.

Ainsi que je l'ai déjà fait remarquer, le «Guide en matière d'intervention» précise clairement les responsabilités des deux organismes et énonce le genre de mesures que le BSIF et la SADC sont tenus de prendre au cours des différentes étapes du déclin d'une institution financière. Le BSIF a conclu une entente d'alliance stratégique avec la SADC et a créé un Comité de liaison pour encourager la collaboration entre les deux organismes et éviter les chevauchements.

Récemment, nous avons mis sur pied un groupe de travail mixte BSIF/SADC pour trouver des moyens d'améliorer l'efficacité de deux logiciels semblabes, le SDF du BSIF et le MIDAS de la SADC.

Je me permets quelques commentaires au sujet de nos fonctions de surveillance et d'inspection. Mon prédécesseur s'inquiétait beaucoup du processus de surveillance du BSIF et, moi aussi, je lui accorde une très grande priorité. Le cadre d'inspection du BSIF expose les principes et les pratiques du processus d'inspection fondé sur les risques qui comprend quatre étapes: la planification, les travaux sur place, la production de rapports et le suivi.

Ce cadre d'inspection est mis à jour et amélioré constamment afin de suivre l'évolution du secteur des services financiers. Par exemple, en 1994, nous avons mis en oeuvre le Système automatisé de déclaration financière, comme sous l'acronyme de SDF, qui fournit au BSIF des renseignements opportuns au sujet des banques dont il a la surveillance. Ce système a grandement amélioré notre capacité de surveiller le secteur des institutions de dépôts.

Pour renforcer la transparence de notre processus de surveillance, le BSIF a collaboré étroitement avec la SADC afin de produire le Guide en matière d'intervention, à l'intention des institutions financières fédérales, dont j'ai parlé il y a quelques minutes. Ce guide expose les cinq étapes pour classer les institutions, de dépôts selon la force ou la faiblesse de leur situation financière. Le BSIF a aussi émis un guide distinct pour les sociétés d'assurances. Ces guides aideront les institutions à mieux comprendre les activités de surveillance et à prévoir les mesures de surveillance qui pourraient être prises si leur situation financière se détériorait.

.1555

Le Guide en matière d'intervention expose certains des critères utilisés pour identifier le profil de risque d'une institution et le moment auquel le BSIF fait rapport de ses préoccupations au conseil d'administration et à la direction de l'institution. Il expose les différentes étapes à suivre lorsque certains seuils sont enfreints. Il est important de noter que nous utilisons ces seuils comme repères plutôt que comme éléments déclencheurs obligatoires.

Dans de nombreuses circonstances, des institutions financières fondamentalement bien gérées, mais aux prises avec des problèmes, ont pu se redresser. L'un des rôles les plus importants du BSIF consiste à favoriser un redressement afin de réduire au minimum les pertes et de maintenir la confiance dans le système.

Pour cette raison, nous devons faire preuve de beaucoup de discernement lorsque nous déterminons quand et comment il faut intervenir. Dans certaines occasions, selon la réceptivité de la direction et du conseil, nous préférons exercer une pression morale plutôt qu'utiliser nos outils de réglementation. La pression morale peut souvent avoir beaucoup de succès.

Ce pouvoir de réglementation ne peut toutefois être utilisé efficacement que sous le couvert de la plus grande confidentialité. Il ne faut pas qu'il y ait un examen public détaillé des mesures que le BSIF prend à l'égard d'une institution donnée. Autrement, selon moi, il y aurait moins de redressements et plus de faillites.

Le BSIF admet qu'il est nécessaire d'évaluer continuellement les risques auxquels sont confrontées les institutions de dépôts. Des mesures ont été prises pour renforcer la surveillance continuelle des institutions de dépôts, grâce à l'établissement d'une division de l'analyse.

Le BSIF continue de revoir sa méthodologie d'inspection afin d'assurer un juste équilibre entre les inspections sur place et le suivi, compte tenu du profil de risque de chaque institution et de l'étendue de ses activités.

Nous convenons qu'il est nécessaire d'avoir une importante fonction d'élaboration de la méthodologie pour nous assurer de l'existence de procédures d'inspection et de suivi cohérentes et à jour et de leur utilisation par les inspecteurs. Le BSIF accorde la priorité à l'élaboration de guides appropriés à l'intention des inspecteurs, et des progrès ont été accomplis à cet égard.

Le BSIF a terminé un examen de son système de notation CAMEL et il l'a comparé avec les facteurs de risques et les étapes d'intervention identifiés dans le nouveau Guide en matière d'intervention à l'intention des institutions financières fédérales. En fait, les étapes d'intervention se comparent favorablement aux cotes actuelles du système CAMEL.

Les interventions du BSIF doivent varier selon le profil de risques de l'institution. Les mesures identifiées par le vérificateur général, notamment des restrictions des activités commerciales, des exigences en ce qui concerne l'injection de capitaux, des restrictions concernant les dividendes, constituent certains des outils que le BSIF a utilisés et continue d'utiliser, mais aucune activité d'une institution n'est identique et, en conséquence, les outils que le BSIF choisit d'utiliser doivent varier selon la situation.

Le BSIF a mis en place des repères de pré-alerte. Des exigences accrues en matière de production de rapports et du suivi sont mises en place pour assurer la surveillance de la mise en oeuvre des mesures correctives. Tous les efforts sont déployés pour assurer que le processus soit aussi uniforme et opportun que possible, compte tenu des différences entre les institutions et les situations dans lesquelles elles se trouvent. Nous rencontrons la SADC afin d'examiner les activités des institutions à risque élevé et de convenir des mesures correctives que chaque institution ou organisme doit favoriser.

La législation fédérale prescrit les fonctions des conseils d'administration et des administrateurs et le BSIF s'est employé très activement à exposer son point de vue au sujet des activités liées à la régie interne. Le BSIF n'a cessé d'insister sur l'importance de la régie interne.

Nous rencontrons les comités de vérification des institutions financières et souvent aussi tout le conseil d'administration après chaque inspection d'une institution financière. Une copie du rapport de la direction est adressée au président du comité de vérification et, au besoin, des points faibles sont discutés en privé avec les administrateurs. Nous continuerons d'entretenir un dialogue constructif avec les administrateurs et les directeurs au sujet de cette question essentielle de la régie interne.

Monsieur le président, le vérificateur général a recommandé la réalisation d'une évaluation intégrale de l'efficacité du système de réglementation. Cette recommandation est compréhensible et elle est conforme avec l'application d'une bonne politique publique.

En ma qualité de surintendant, je suis disposé à examiner les domaines du ressort du BSIF qui pourraient être évalués, compte tenu de la rentabilité de ces évaluations.

.1600

Comme les membres du Comité le savent, les évaluations du programme de réglementation sont complexes et, dans le contexte des contraintes budgétaires actuelles, nous voulons mettre l'accent sur ce qui est utile et pratique.

Enfin, nous reconnaissons qu'il est nécessaire d'évaluer continuellement les risques auxquels sont confrontés les institutions financières pour assurer que notre processus de surveillance continue de mettre l'accent sur les principaux risques. Dans le cadre de nos activités de suivi, nous continuerons d'entretenir des rapports régulièrement avec les institutions dont nous avons la surveillance. Cette année, nous améliorerons aussi notre documentation des procédures de surveillance et des résultats de nos activités de suivi.

Comme l'a précisé le vérificateur général dans son rapport, le BSIF est loin d'être parfait, mais il a accompli de grands progrès depuis sa création en 1987. Selon moi, avec la mise en oeuvre des pouvoirs accrus proposés dans le projet de loi C-100, le BSIF offrira des services meilleurs et plus spécialisés aux industries qu'il supervise et une protection raisonnablement économique aux souscripteurs, aux déposants et aux créanciers.

Monsieur le président, mes collègues et moi seront heureux de répondre à vos questions et à celles des membres du Comité.

Le vice-président (M. Telegdi): Merci beaucoup à vous deux.

Monsieur John Williams.

M. Williams (St-Albert): Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Palmer et monsieur Desautels, ainsi qu'à votre personnel.

Monsieur Palmer, quel est votre budget et combien d'employés travaillent pour le BSIF?

M. Palmer: Notre budget est d'environ 42 millions de dollars et nos effectifs représentent environ 417 années-personnes.

M. Williams: J'ai remarqué ce qui suit dans le rapport du vérificateur général:

Vous avez abordé certaines de ces questions dans vos remarques liminaires. Que vous reste-t-il encore à faire, selon vous, pour avoir un processus de surveillance satisfaisant?

M. Palmer: C'est une bonne question. Je répondrai probablement en essayant de placer la chose dans le contexte suivant: nous ne parviendrons probablement jamais exactement au point où nous devrions être, parce que le contexte dans lequel nous fonctionnons évolue constamment.

L'un de nos plus grands défis consiste à suivre les changements qui surviennent dans le système financier et à mettre à jour constamment nos procédures, à les modifier pour tenir compte des changements survenus. Cela représentera un défi constant. Pour aussi loin que je puisse voir, nous devrons continuellement remettre à jour nos processus en fonction de l'évolution de la situation.

M. Williams: Je suis persuadé que le vérificateur général a tenu compte du fait qu'il s'agit d'un processus en évolution constante, lorsqu'il a fait cette observation. Il critiquait cependant le fait que vous n'aviez pas atteint le niveau qui convenait, étant donné les connaissances et l'expertise dont on dispose aujourd'hui.

M. Palmer: Eh bien, vous avez interprété le rapport du vérificateur général d'une manière un peu différente de la mienne, mais il est ici avec nous et il peut ajouter des précisions s'il le désire.

Pour être un peu plus précis, je diraie que nous concentrons nos efforts, comme je l'ai mentionné dans mes remarques liminaires, sur notre fonction de surveillance. J'entends par surveillance faire un examen régulier des données financières des institutions, plutôt que nous fier uniquement aux visites annuelles dans les institutions financières pour y effectuer un examen des données sur place.

Nous n'abandonnerons pas nos examens sur place, ils continuent d'être très important. Toutefois, on en changera l'objet. Il y a quelques années, en particulier quand le secteur immobilier était en difficulté, nous mettions l'accent sur la qualité de l'actif, en particulier les prêts immobiliers garantis. Nos examens sur place porteront désormais principalement sur la question des contrôles: des contrôles inhérents au système de gestion de l'information, ainsi qu'au système informatique, les contrôles inhérents aux activités de trésorerie, ainsi qu'aux transactions, qui représentent un secteur croissant de risques. Nous tentons donc d'améliorer notre fonction d'examen en nous dotant d'une procédure de surveillance plus efficace.

.1605

M. Williams: J'en parlais justement avec des cadres de l'une des cinq grandes banques à charte. Ils me disaient que le BSIF semblait vérifier énormément, parce que cela le préoccupe beaucoup, des choses qui leur paraissent anodines et mineures, étant donné la taille de la banque. Il semblait que le BSIF appliquait simplement les mêmes règles et les mêmes points de repère, avec les mêmes exigences de rapport, que l'institution ait un actif de l'ordre de 100 milliards de dollars ou de quelques millions de dollars.

C'est possible, mais d'après le Globe and Mail d'aujourd'hui, 3 octobre 1995, les pertes de la SADC dans le cas de la North American Trust s'élèvent maintenant à 600 millions de dollars. Le BSIF et la SADC sont très étroitement liés, parce que nous contribuons beaucoup à la surveillance des institutions qui font actuellement faillite et il en a coûté jusqu'à maintenant à la SADC environ 600 millions de dollars pour renflouer North American.

Évidemment, si l'on tient compte de la faillite de la Confederation Life l'an dernier, le nombre d'institutions qui font faillite semble s'accroître. Nous constatons que la SADC engloutit de plus en plus de fonds dans le renflouage de ces institutions, à même l'argent des contribuables. Peut-on s'attendre à ce que cette ponction dans les deniers publics s'arrête? Je suis désolé, la SADC est en fait principalement financée par les institutions financières. Mais peut-on penser que l'érosion de la confiance du public résultant de la faillite des institutions s'atténuera dans un avenir rapproché, ou peut-on s'attendre à voir de plus en plus d'institutions en faillite faire la une de nos journaux?

M. Palmer: Monsieur Williams, votre question générale comporte un certain nombre d'autres questions. Premièrement, en ce qui concerne un élément très précis, je dois dire que le BSIF n'était pas le principal organisme de réglementation dans le cas de North American Trust. Il s'agissait plutôt de l'organisme de réglementation de l'Alberta. Je tiens à le préciser officiellement. J'estime cependant que la principale partie de votre question reste tout à fait valable.

Il serait irréaliste, selon moi, de croire que nous allons voir la fin des faillites d'institutions financières. De fait, le projet de loi C-100, ainsi que le document de principe qui l'a précédé, affirment clairement que les faillites d'institutions financières continueront probablement, que l'organisme de réglementation ne peut pas les contrôler, les empêcher, et que c'est principalement la responsabilité de la direction et des conseils d'administration des institutions. Le défi que nous donne le projet de loi C-100 est de réduire au minimum les pertes découlant de ces faillites.

M. Williams: Mais étant donné les changements apportés à votre organisation, à votre gestion et à vos procédures d'évaluation, pouvons-nous entrevoir le jour où vous pourrez suspendre les activités de ces institutions pour que nous n'ayons plus de pertes de 600 millions de dollars dans une institution qui n'est certainement pas connue partout au Canada? C'est beaucoup d'argent qu'on a perdu. Pouvons-nous entrevoir une réduction de ces pertes grâce à une supervision accrue ou améliorée, quel que soit le qualificatif choisi, étant donné les changements en cours dans votre bureau?

M. Palmer: Je n'accepte pas la prémisse de cette question, à savoir que la surveillance était inadéquate jusqu'à maintenant, monsieur Williams, parce que le système financier a subi un choc extraordinaire. Le déclin dans le secteur immobilier, le changement des hypothèses quant aux éléments inflationnistes, l'ampleur de la récession, constituaient des chocs que le système n'avait pas connus depuis les années trente. Je pense qu'il faut en tenir compte lorsqu'on évalue la façon dont le système a fonctionné.

Cependant, je peux vous dire que nous allons prendre très au sérieux le mandat qui nous est confié dans le projet de loi C-100, s'il est adopté. Nous allons essayer d'intervenir plus tôt. Nous concentrerons le plus possible nos efforts sur la réduction des pertes pour les déposants, les souscripteurs et les créanciers.

M. Williams: Mais c'est certainement lorsque le contexte économique est au pire qu'on a le plus besoin de vous. Quand la situation économique est bonne, on n'a pas besoin de beaucoup de surveillance, parce que tout le monde fait des profits. C'est votre rôle, je pense, d'anticiper ces graves récessions qui peuvent survenir, et de protéger les contribuables canadiens ou les déposants en conséquence.

Au paragraphe 5.91 de son rapport, le vérificateur général parle du manque de spécialistes dans votre service. Je reviens encore à l'exemple des banques à charte, où ceux qui s'occupent des marchés de produits dérivés ont des doctorats en mathématiques ou dans un autre domaine, et ils sont chargés de gérer les facteurs de risque élevé qui existent actuellement.

.1610

Nous avons vu, heureusement pas au Canada, la banque Barings faire une faillite d'un milliard de dollars. D'après le vérificateur général, un capital théorique de 2,7 billions de dollars par année fait maintenant l'objet de transactions de produits dérivés. Ne pensez-vous pas que vous devriez renforcer votre surveillance en employant les personnes les mieux qualifiées pour suivre de près des transactions de cette nature?

M. Palmer: Je peux vite dire oui, monsieur Williams, mais nous devons être réalistes. Les plus grands spécialistes dans ce domaine exigent des revenus dans les sept chiffres et nous ne pouvons tout simplement pas nous payer de tels spécialistes. Il y a donc des limites à ce que nous pourrons faire dans ce domaine.

Nous concentrons nos efforts sur les choses que nous pouvons faire et dans les domaines où nous estimons pouvoir être efficaces. Nous mettons l'accent sur les systèmes de contrôle et nous allons renforcer notre expertise dans ce domaine dans la mesure où les conditions du marché le permettront.

M. Williams: Ma dernière question porte sur la confidentialité. Je remarque que vous voulez assurer la confidentialité totale et le secret dans vos évaluations et vos rapports à l'administration des institutions. D'après les discussions que nous avons eues lors des séances sur le projet de loi C-100, nous avons tous convenu qu'il serait impossible aux institutions de garder secrets les rapports négatifs.

Ne pensez-vous pas que vous avez aussi une responsabilité envers les contribuables et le public canadien en général, de sorte que si vous voyez une institution en difficultés ou près de faire faillite, vous devriez informer les déposants et la population canadienne en général, peut-être au moyen d'un système de cotation semblable à celui qu'on utilise pour les obligations, ou autrement, qu'une institution n'est pas dans la même situation qu'une autre?

M. Palmer: Monsieur Williams, je comprends pourquoi vous posez cette question et je respecte votre point de vue. Je reconnais qu'il est partagé par d'autres personnes. J'estime cependant que si nous agissions ainsi, il en résulterait des répercussions négatives encore plus importantes qu'actuellement et je m'explique, si vous me le permettez.

Nous prenons connaissance de renseignements plus confidentiels que ceux dont disposent les agences d'évaluation des obligations ou n'importe qui d'autre. Face aux préoccupations exprimées par le BSIF, le public réagira probablement d'une manière différente qu'il ne le ferait face aux préoccupations exprimées par une agence d'évaluation des obligations ou quelqu'un d'autre.

En somme, je crois que si nous diffusions largement nos préoccupations au sujet des institutions, même si nos préoccupations étaient relativement mineures, le marché en subirait des répercussions négatives et il est déjà de plus en plus changeant. Vous verriez l'institution perdre énormément de dépôts et de polices d'assurance, ce qui aurait tendance à empirer la situation de l'institution avant même qu'elle ait eu la possibilité de corriger ce qui aurait autrement été des problèmes qu'elle est tout à fait en mesure de corriger.

Fait intéressant, dans ces circonstances, les déposants et les souscripteurs qui fuiraient les premiers seraient les plus avertis, ce qui laisserait les souscripteurs et les déposants les moins avertis payer les pots cassés. Je pense donc que si nous suivions votre suggestion, la possibilité d'une faillite augmenterait et les pertes qui résulteraient d'une telle faillite seraient plus grandes.

Je comprends le raisonnement et le sentiment d'équité qui sous-tendent la recommandation, mais j'estime qu'elle est inacceptable, en pratique.

M. Williams: Merci.

Le vice-président (M. Telegdi): Merci beaucoup. C'était un échange très intéressant.

Monsieur Desautels, j'ai vu que vous écoutiez la réponse. Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Desautels: Non, pas pour l'instant, monsieur le président, je vous remercie.

Le vice-président (M. Telegdi): Bien.

Je voudrais vous poser une question ayant trait particulièrement aux instruments financiers qui deviennent beaucoup plus changeants. On a mentionné que les produits dérivés ont causé tout un fiasco financier. Dans quelle mesure isolez-vous ces types de produits risqués, lorsque vous évaluez les risques?

M. Palmer: Nous passons beaucoup de temps à essayer d'identifier les secteurs qui présentent les plus grands risques pour une institution financière.

Je vais demander à mon collègue de parler un peu plus précisément de ce que nous faisons à cet égard, mais je tiens d'abord à observer en passant qu'en plus du cas particulier des pertes spectaculaires déroulant de transactions de produits dérivés, à savoir la crise de la banque Barings, on a vu plus récemment la banque Daiwa, connaître des pertes très considérables qui résultaient de transactions portant sur de simples bons du Trésor américains.

.1615

Il ne faut donc pas exagérer nos inquiétudes au sujet des produits dérivés.

Jack, pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet de nos enquêtes sur les risques et la façon dont nous étudions ces questions?

M. Jack Heyes (directeur général, Bureau du surintendant des institutions financières): Monsieur le président, j'aimerais d'abord commenter certains des points saillants contenus dans le rapport du vérificateur général sur la croissance des produits dérivés. Il est important de comprendre pourquoi ce secteur est en pleine expansion. Ensuite, si vous le permettez, je vous décrirai certaines de nos activités en matière de produits dérivés.

Les données statistiques fournies par le vérificateur général ne prennent pas en compte les titres donnés en garantie pour certains produits dérivés. De plus, la majorité des transactions impliquant les produits dérivés sont faites avec les banques, ainsi qu'avec les gouvernements, et approximativement 90 p. 100 des transactions de produits dérivés sont transigées avec des institutions ou d'autres parties ayant reçu une cote d'investissement d'une agence de cotation indépendante.

Si vous étudiez les statistiques fournies par les banques canadiennes, et si vous étudiez le type d'instruments transigés dans le passé et en bonne partie encore aujourd'hui, vous verrez qu'il s'agit de produits éprouvés, connus du marché et qui se transigent depuis très longtemps.

Les pratiques et les procédures de gestion des risques ont fait leurs preuves en ce qui concerne ces produits. Cela vous donne une idée de ce qui s'est fait dans le passé. Mais aujourd'hui, le marché est en train de changer, et certaines institutions ont indiqué qu'elles veulent influencer les marchés plutôt que d'en subir l'influence.

M. Palmer a indiqué que notre personnel n'a pas encore les connaissances nécessaires pour comprendre ces produits à risques élevés et très changeantes. Mais nous allons acquérir ces connaissances. Nous allons embaucher des consultants indépendants pour nous aider à étudier des techniques d'évaluation quantitative aussi bien que qualitative. Nous le faisons déjà assez régulièrement, dépendamment du genre de produits, de leur taux de croissance, et du volume des transactions effectuées par les institutions.

Nous allons continuer à étudier les produits financiers spécialisés au fur et à mesure que nous mettrons au point notre méthodologie d'examen pour l'avenir.

[Français]

M. Laurin (Joliette): J'ai une seule question, monsieur le président.

Dans certaines situations, votre organisme ainsi que la Société d'assurance-dépôts du Canada ont l'autorisation d'intervenir. Quand une telle situation survient, lequel des deux organismes a la principale responsabilité? Est-ce que vous en discutez ensemble au préalable pour établir lequel des deux aura le rôle principal à jouer? Est-ce que ce processus vous permet de déterminer qui doit rendre des comptes lorsqu'une intervention est nécessaire ou lorsque des faillites se produisent?

[Traduction]

M. Palmer: C'est une très bonne question et nous avons déjà essayé d'y répondre pour le bénéfice du public et même des institutions financières en publiant le Guide en matière d'intervention pour les institutions financières, qui a été publié en annexe au Livre blanc du ministère des Finances en février.

De façon générale, le guide indique que quand la situation d'une institution financière commence à se détériorer, et lorsqu'il est encore possible de sauver l'institution, c'est principalement le BSIF qui intervient, et ce, de plusieurs façons. La loi ne prévoit pas formellement certaines des étapes d'intervention. Quelques-unes le sont, tel le fait que le BSIF a l'autorisation d'émettre des ordonnances d'observation afin de renflouer le capital.

Mais si la situation de l'institution financière se détériore jusqu'à l'insolvabilité, la Loi sur la SADC prévoit que celle-ci peut intervenir. Un des pouvoirs les plus importants dont dispose la Société est celui d'annuler la police d'assurance-dépôt.

.1620

Récemment, lorsqu'une institution financière était dangereusement sous-capitalisée mais n'avait pas encore atteint l'étape de l'insolvabilité qui aurait permis au BSIF d'intervenir, la SADC est devenue le principal intervenant quand elle a signalé qu'elle avait l'intention d'annuler la police d'assurance-dépôt. Ainsi, les deux institutions peuvent prendre cette mesure en fonction des pouvoirs qui leur ont été confiés. Cependant, dans les circonstances normales, plus les problèmes d'une institutions financière sont grave, plus le rôle de la SADC est grand. J'espère que ces renseignements vous sont utiles.

Vous avez parlé de collaboration et de consultation. Je peux vous assurer que lorsque nous étudions la situation d'une institution financière qui nous inquiète, nous demeurons en contact permanent avec la SADC, et la majorité des décisions sont prises par les deux institutions. Le Guide en matière d'intervention explique quelle institution a la responsabilité première selon les problèmes qu'éprouve une institution financière.

[Français]

M. Laurin: Est-ce que vous vous entendez au préalable? Dans votre réponse, vous semblez nous dire que c'est le Bureau du surintendant qui intervient toujours le premier et que, lorsque les choses s'aggravent, il peut demander l'intervention de la SADC. Est-ce que les choses se passent toujours comme ça?

[Traduction]

M. Palmer: Si j'ai bien compris votre question, monsieur Laurin, vous voulez savoir si le BSIF est toujours le premier à intervenir dans de telles circonstances. Je crois que c'est habituellement le cas.

[Français]

M. Laurin: Il semble y avoir des chevauchements entre les deux organismes. Il n'est pas clair, dans les textes qui nous sont fournis, que chaque organisme ait son rôle bien défini et qu'il sache à quel moment intervenir. Il semble qu'à certaines occasions, vous ayez tous les deux l'autorité d'intervenir. Comment procédez-vous pour éviter qu'il y ait chevauchement?

[Traduction]

M. Palmer: J'ai déjà reconnu qu'il y avait chevauchement. Je crois que ce chevauchement ne coûte pas très cher. De plus, il est à l'avantage du système, et tant que les deux institutions collaborent, ce chevauchement continuera à être à notre avantage. Le chevauchement se produit à diverses étapes. Lorsqu'une institution financière se tire assez bien d'affaire, le BSIF se livre à ses activités normales de surveillance. Il procède à des études, à une surveillance de l'activité de l'institution financière. Lorsque cette dernière éprouve certains problèmes, le BSIF intervient, offrant des conseils et des suggestions à la direction et au conseil d'administration. La SADC joue un rôle plus ou moins passif à cette étape-là. La SADC recueille des renseignements sur le système financier lui-même. Nous présentons à la SADC des rapports à intervalles réguliers conformément à la Loi sur la SADC sur nos examens des institutions financières. Elle joue donc un certain rôle, quelque peu limité, de collecte de données.

Plus l'institution financière éprouve de problèmes financiers, plus la SADC joue un rôle actif et se prépare au jour où elle devra assumer rapidement la responsabilité de toutes les activités de l'institution pour payer les déposants tout en respectant évidemment les limites établies dans la Loi sur la SADC. Par exemple, lorsqu'il devient évident qu'une institution financière devra fermer ses portes, la SADC procède à une étude préparatoire. Elle étudie les livres de l'institution et se prépare à intervenir, pratiquement sans préavis, pour payer les déposants immédiatement. Elle s'acquitte donc de tâches qui ne sont pas les nôtres parce que ses tâches sont clairement décrites dans la loi et découlent de son rôle premier qui est d'offrir une police d'assurance aux déposants.

.1625

[Français]

M. Laurin: Est-ce que vous vous retirez automatiquement lorsque la SADC entre en action ou si vous vous occupez toujours du dossier?

[Traduction]

M. Palmer: Nous ne nous retirons pas automatiquement parce que nous travaillons en parallèle avec la SADC, jouant un rôle différent. Par exemple - nous parlons d'une institution financière qui a des problèmes de solvabilité et qui à notre avis devrait être liquidée - dans la plupart des cas, le BSIF intervient, assume le contrôle de l'institution financière et assure le choix d'un liquidateur, au moment même où la SADC prend des mesures afin de s'assurer que les déposants seront payés. Les deux organismes travaillent donc en parallèle, s'acquittant de fonctions distinctes.

[Français]

M. Laurin: Je suis un peu surpris que vous me disiez que le chevauchement, dans ces cas-là, est bénéfique. Il est rare qu'on accepte de dire qu'il y a chevauchement et que c'est une bonne chose. Habituellement, on essaie de l'éviter. Ce serait exceptionnellement vrai dans votre cas.

J'aimerais que vous précisiez un peu plus votre pensée parce que vous ne m'avez pas convaincu.

[Traduction]

M. Palmer: Oui, je le constate, mais je dois dire que dans le cas qui nous occupe ce chevauchement n'est pas vraiment ce qu'on appellerait un chevauchement parce que les deux institutions ont des rôles bien distincts en ce qui a trait à une institution financière qui éprouve de graves problèmes financiers.

Il serait possible de fusionner ces activités et de les confier à un seul organisme. Il pourrait y avoir fusion du BSIF et de la SADC, quoique je ne le recommanderais pas. Mais ces deux fonctions devraient quand même être accomplies. Il y aurait toujours deux fonctions distinctes. Il y a celle de la prise en charge de l'institution financière qui éprouve des problèmes et celle du paiement des déposants conformément au régime d'assurance-dépôt dont est chargée la SADC. Il n'y aurait donc pas d'économies au niveau des effectifs, parce que ces deux rôles demeureraient.

Là où on pourrait cependant parler de chevauchement et de double emploi, c'est lorsqu'une institution financière n'éprouve pas vraiment de problèmes, car la SADC joue toujours un rôle de surveillance passif.

Je crois cependant que tout cela est à l'avantage du système. À mon avis, l'attitude de la SADC à l'égard des institutions financières qui éprouvent des problèmes est assez différente de celle que l'on retrouve au BSIF. En effet, au Bureau, nous agissons un peu comme des experts-conseils. Nous donnons un coup de pouce. Lorsqu'une institution financière commence à éprouver des problèmes, notre première réaction est de nous demander comment nous pouvons l'aider, comment nous pouvons la sauver. Comment régler le problème? La SADC, qui travaille avec des institutions qui doivent être liquidées, a tendance à penser immédiatement à la liquidation de l'institution et à limiter dans la mesure du possible les pertes qu'elle encourra. Les deux institutions ont donc une perspective différente, un vécu différent et il y a souvent débat et discussions entre les deux groupes.

Ces discussions sont parfois fort utiles. Je crois qu'on finit par prendre une meilleure décision que si un seul des deux organismes avait eu voix au chapitre.

Comme je l'ai dit, le chevauchement n'est pas très important. Si on éliminait certains postes pour éviter le chevauchement, les économies réalisées ne seraient pas très importantes.

[Français]

M. Laurin: Monsieur le président, j'aimerais demander au vérificateur général si la réponse de...

[Traduction]

Le vice-président (M. Telegdi): Pourriez-vous poser votre question au prochain tour des questions?

[Français]

M. Laurin: C'est ma dernière question. Je voudrais demander au vérificateur général si la réponse de M. Palmer répond à ses attentes.

[Traduction]

M. Ron Thompson (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Je dois avouer que lorsque nous avons procédé à la vérification, nous avons clairement compris le point de vue de M. Palmer lorsqu'il signalait qu'il était avantageux d'avoir deux institutions distinctes dont le rôle se complétait. Cependant, nous avons donné un ou deux exemples précis dans le chapitre pour montrer où le chevauchement pourrait être mieux géré ou même éliminé. Permettez-moi de vous donner un exemple.

Le BSIF émet des lignes directrices pour les institutions financières. La SADC quant à elle prépare des normes à l'égard de pratiques commerciales saines. Il arrive que les lignes directrices du BSIF portent sur les mêmes éléments que les normes de la SADC. Certaines institutions financières reçoivent alors des consignes de deux organismes distincts et je suppose que cela les porte à se demander lesquelles elles devraient respecter et dans quel ordre.

.1630

Il nous semble qu'il serait opportun de déterminer qui devrait établir des lignes directrices et qui devrait établir des normes et sur quoi les unes et les autres devraient porter. Nous pensons qu'il est possible d'y arriver de diverses façons et la question, à notre avis, doit être examinée. Si je ne m'abuse, M. Palmer et son équipe s'en occupent.

Voilà un exemple de chevauchement que l'on pourrait supprimer en demandent à l'une ou l'autre des institutions de préparer des normes ou du moins en convenant d'un ensemble de critères qui indiqueraient quelle organisation s'occuperait de telle ou telle chose et dans quelles circonstances.

Le vice-président (M. Telegdi): Bien entendu, monsieur Palmer, nous comptons sur vous pour communiquer cela au Comité en temps voulu, quand vous aurez démêlé le tout. Nous sommes impatients d'en connaître le résultat.

M. Crawford (Kent): Je suis content de ne pas être le seul à ne pas comprendre. M. Laurin est dans le même cas que moi.

Monsieur Palmer, si j'ai bien compris, vous avez dit que le BSIF intervenait quand une compagnie était encore solvable mais qu'elle courait de graves dangers. Si la compagnie éprouvait trop de difficultés, c'est alors que la SADC interviendrait.

Je me reporte à ce que je connais du monde industriel. Supposons que je sois à la tête d'une ministère et que ça cafouille, il ne faut pas s'adresser à vous, n'est-ce pas? Supposons que je sois le gestionnaire de la SADC et que vous vous présentiez à mon bureau en disant que c'est fini, je vais m'en laver les mains. Tant pis pour vous.

Je ne comprends pas comment deux organisations distinctes pourraient avoir deux mandats ou travailler ensemble ou se chevaucher. Je préférerais qu'il n'y ait qu'une seule organisation de sorte que s'il y avait des difficultés, je pourrais m'adresser à vous, uniquement à vous. Voilà pourquoi je ne sais pas qui blâmer quand les choses vont mal.

M. Palmer: Les deux activités découlent de deux mandats distincts donnés en vertu de la loi. La SADC est un assureur; elle offre des polices d'assurance-dépôt aux déposants. La SADC ne surveille pas les institutions financières.

Le BSIF a pour rôle de surveiller les institutions financières et c'est pourquoi il procède à des enquêtes sur place et supervise. Le BSIF est le principal intervenant quand une institution financière commence à être en difficulté.

Ainsi, en vertu de la loi, la SADC intervient en bout de ligne quand une institution financière s'effondre.

On pourrait donc avoir un système... En fait, avant 1987, les choses étaient telles que la SADC ne pouvait pas intervenir tant que l'institution financière n'avait pas fait faillite. C'est alors qu'elle commençait à donner des chèques à tous les déposants couverts par l'assurance-dépôt. Dans un cas comme celui-là, on pouvait dire qu'il y avait très peu de chevauchements car l'assurance-dépôt intervenait à la fin et il était clair que chaque organisme détenait des fonctions absolument distinctes.

En 1987, on a cru, afin de minimiser les pertes, qu'il fallait que la SADC détienne certains pouvoirs pour se protéger et pour réduire au minimum les pertes éventuelles. Lors de l'examen des lois visant les institutions financières, on a donné, en 1987, plus de pouvoirs à la Société. Voilà pourquoi la SADC exerce actuellement certaines activités très tôt dans le processus. La Société a reçu, par disposition législative, le pouvoir d'établir des normes de pratiques commerciales et financières saines - par exemple, ce dont M. Thompson parlait tout à l'heure - afin d'encourager les institutions financières à faire en sorte de réduire les pertes au minimum. On constate donc que cela découle de la loi en vigueur.

Si le BSIF supervise les institutions financières, les institutions de dépôt, la SADC n'en fait rien. Elle ne se rend pas dans les institutions pour faire des inspections. Pour cela, elle compte essentiellement sur le BSIF. La Société recueille des renseignements quant à elle, mais c'est le Bureau qui est sa principale source de renseignements.

.1635

Le BSIF présente à la SADC un rapport annuel sur les examens qu'il a menés car c'est ce qu'exigent les dispositions de la Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada, et le rapport précise si les institutions financières se conforment aux normes de pratiques commerciales et financières saines.

Ainsi, on peut dire que chaque organisation a des fonctions très distinctes. La SADC en fait surveille alors que le BSIF a un rôle de supervision. La SADC n'intervient en fait qu'en bout de ligne quand elle assume un rôle actif, à savoir rembourser les déposants.

Je pense que la question a été un peu galvaudée et c'est peut-être en partie de ma faute à cause de mes réponses verbeuses.

M. Crawford: J'aurais dû être ici bien avant 1987. J'aime bien avoir sous la main une personne que je peux accuser d'être la cause de quelque chose.

Il y a encore la question du paiement garanti par la SADC. Cela ne change pas. C'est encore 60 000$, n'est-ce pas?

M. Palmer: Monsieur Crawford, la limite garantie est encore de 60 000$.

M. Crawford: Supposons que vous ayez 200 000$ en banque. L'institution fait faillite. On vous garantit 60 000$, mais il faut dire que vous touchez 14 000$ d'intérêts. Les 14 000$ sont déduits de 60 000$ et vous ne les touchez pas du tout. Un peu plus tard, vous devez verser des impôts sur ces 14 000$ de revenus que vous n'avez jamais touchés.

Cela a-t-il été redressé? Cela est arrivé au cours des cinq dernières années. Au moment d'une faillite, on a fait des remboursements et on en a déduit les intérêts qui avaient couru sur la somme déposée. Le fisc réclamait des impôts sur les 14 000$, autrement dit les intérêts, alors qu'il s'agissait d'un revenu jamais touché.

M. Palmer: Monsieur Crawford, je ne suis plus expert en matière d'impôt, mais je me suis occupé de ce genre de questions autrefois. Si cela s'est produit, c'est parce que les fonctionnaires du fisc ne disposaient pas de tous les renseignements nécessaires. Quelqu'un qui n'aurait pas touché les intérêts et qui aurait perdu le droit de les réclamer peut, si je ne m'abuse, faire opposition mais c'est parfois difficile.

M. Crawford: À qui le dites-vous.

Essentiellement, j'estime qu'il faudrait une seule autorité, le BSIF.

Mme Whelan (Essex - Windsor): Permettez-moi de poser une question concernant la lettre au vérificateur général en date du 20 avril. Dans le troisième point que vous développez, on ne s'entend toujours pas sur les faits de 1995. Je voudrais des précisions. Je suppose que nous disposons de procédures de comptabilité normalisées. Pourquoi alors ne pas s'entendre sur les faits et qu'est-ce que cela a à voir avec le rapport final?

M. Palmer: Madame Whelan, je ne pense pas que ce soit un élément particulièrement important pour l'ensemble de la réponse au rapport que vous préparerez. Comme vous avez pu le constater, nous acceptons de façon générale nombre des recommandations et l'orientation globale du rapport.

Il y a bien quelques situations pour lesquelles nous pensions exercer une supervision particulière. Pour répondre au vérificateur général, nous avons pensé présenter les documents en l'absence desquels il aurait été difficile de reconnaître que quelque chose avait été fait.

Dans bien des cas, ce que nous faisons se fait de façon officieuse et je vais vous en donner un exemple: la régie interne. Le vérificateur général voudrait que nous préparions un guide, un guide pratique sur la régie interne. Il s'agit d'une recommandation sincère et tout à fait pertinente et qui offre certains avantages.

Selon nous, nous avons déjà joué un rôle très actif auprès des gestionnaires et des conseils d'administration et nous leur avons prodigué des conseils concernant la régie interne. Pouvons-nous fournir des écrits attestant de tous les discours prononcés à titre de surintendant par mon prédécesseur, discours que je reprends moi-même? Non, absolument pas. Nous ne les avons pas tous réunis dans un dossier étiqueté régie interne. Ainsi nous sommes bien en peine de prouver au vérificateur général la quantité de choses que nous avons faites à cet égard en particulier.

.1640

Je tiens à rassurer les membres du comité, comme je l'ai fait pour le vérificateur général: nous avons été très actifs du côté de la régie interne. À presque chacune des réunions avec les comités de vérification ou les conseils d'administration, la question était à l'ordre du jour et nous en avons parlé. Nous avons rappelé aux conseils comme aux comités les responsabilités importantes qu'ils avaient dans l'ensemble du système.

Voilà donc un désaccord quant aux faits, mais ce désaccord est-il capital? Sans doute que non. Nous comprenons tous que la régie interne est importante. Nous comprenons et convenons que le BSIF devrait jouer un rôle actif. Là où nous ne nous entendons plus c'est sur le degré d'intervention officielle que la question mérite.

Nous ne pensons non plus qu'il nous faille écrire un livre sur le sujet. Il y en a déjà un certain nombre qui ont été publiés, notamment la Bourse de Toronto qui a publié des lignes directrices sur la régie interne, et il y a le rapport Cadbury en Grande-Bretagne. Ce rapport a été lu par un grand nombre de Canadiens et certains cabinets de comptable et cabinets d'experts-conseils ont également publié des brochures sur la régie interne. Nous pensons qu'en ajouter un autre serait superflu. Toutefois, la question est tout à fait à propos et le vérificateur général a fait valoir un point de vue pertinent que nous respectons.

Mme Whelan: Je voudrais vous poser une question sur le fait que le secteur des services financiers fera l'objet d'un examen en 1997. Comment concevez-vous votre rôle à cette occasion? Le vérificateur général est-il conscient du fait qu'il n'y a pas d'évaluation exhaustive permettant de vérifier si le gouvernement atteint ses objectifs? Pouvez-vous imaginer qu'on vous confie cette tâche en 1997? Comment voyez-vous les choses?

M. Palmer: En fait, votre question comporte deux volets.

Pour ce qui est de l'examen de 1997, nous avons un rôle à y jouer. En vertu d'un protocole d'entente avec le ministère des Finances, nous avons pour tâche de préparer des modifications de forme aux modifications adoptées en 1992. Nous sommes en train de préparer une liste des éléments de la loi de 1992 qui n'ont pas porté leurs fruits, qui n'ont pas atteint pleinement leurs objectifs.

Nous aurons donc à jouer un micro-rôle. Le ministère des Finances sera le principal intervenant à l'occasion de la loi de 1997. Quant à nous, nous allons nous occuper des modifications d'orientation. Nous avons déjà rencontré les représentants du ministère des Finances pour comparer les notes que nous avions - en l'occurence, notre liste de modifications de forme nécessaires et la liste du ministère des Finances sur laquelle se trouvent les questions de principe, pour lesquelles le ministère sera le protagoniste.

La deuxième partie de votre question porte sur la définition des rôles des divers intervenants dans le système financier. Selon nous, les dispositions du projet de loi C-100 éclaircissent beaucoup les choses et la situation en est plus claire - peut-être pas parfaitement claire - du fait essentiellement que l'on définit le mandat du BSIF pour la première fois et que l'on explique clairement pour la première fois notre raison d'être. En outre, on fait des rajustements dans le rôle de la SADC, qui n'est décrite que de façon générale dans les dispositions de la loi actuelle. Par exemple, actuellement, on demande à la SADC de promouvoir la compétitivité dans le système alors que c'est une activité que la société n'est pas vraiment en mesure d'entreprendre. Ainsi, cela a été supprimé. Le mandat de la SADC s'en trouve plus précis et nous recevons un mandat pour la première fois. Pour ma part, j'estime que la situation s'est clarifiée énormément.

Mme Whelan: Merci.

M. Williams: Monsieur Palmer, je me reporte au paragraphe 5.99 du rapport du vérificateur général et je cite:

Au paragraphe 5.100, le vérificateur général écrit:

Puis au paragraphe 5.103.

Il poursuit en abordant la question du contrôle de la qualité et des leçons tirées de l'expérience passée. Au paragraphe 5.104, il rappelle que les analyses rétrospectives «post mortem» sont rares.

Si je me reporte à ce que vous avez dit vous-même aujourd'hui:

Tout cela est pour l'avenir. À mon avis, c'est une critique plutôt sévère que vous adresse le vérificateur général puisque votre organisation doit protéger des dépôts des Canadiens et des Canadiennes totalisant un milliard de dollars.

.1645

Je m'inquiète de la qualité des inspections dans le cas d'institutions en difficulté. Je ne m'inquiète pas du tout de la surveillance massive que l'on exerce sur les rapports fournis par les institutions qui s'acquittent quotidiennement de leur tâche. Je constate ici des critiques sévères sur la façon dont nous repérons, cernons, redressons et empêchons des pertes éventuelles.

Quand j'aurai obtenu votre rapport, je demanderai au vérificateur général de se prononcer aussi.

M. Palmer: Monsieur Williams, je ne suis pas du tout d'accord avec vous quand vous dites que ces critiques sont sévères. Je pense que le vérificateur général a pesé ses mots et de façon générale j'accepte ce qu'il dit dans son rapport.

Notre bureau s'est concentré sur la crise financière la plus dévastatrice que le pays ait connue depuis la récession. Nos collaborateurs au bureau - je n'en tire aucune gloire car c'était avant mon arrivée - se sont démenés pour faire face à la crise, dont la gravité, il faut le dire, dépassait ce que le bureau pouvait faire..

À mon avis, il ne s'agit pas d'une critique. Cela étant dit, nous acceptons chacune de ces recommandations et nous convenons avec le vérificateur général qu'il nous faut améliorer les méthodes. Nous sommes d'accord avec lui: il nous faut officialiser nos analyses rétrospectives que nous avons tendance à faire de façon ad hoc.

Ainsi, nous appuyons pleinement les recommandations qu'il nous fait pour l'avenir et nous travaillons sur tous ces plans pour améliorer notre capacité. Mais je ne pense pas que nous aurions pu de façon réaliste faire plus de progrès dans les domaines cités car mes collègues et mes ex-collègues devaient avant tout dès 1987 créer un bureau de toutes pièces tout en réagissant à une série impressionnante de crises financières.

M. Williams: Merci. Monsieur Desautels.

M. Desautels: On ne peut pas dire que nous ayons eu du mal à tomber d'accord avec le BSIF sur ces questions-là. Mme Whelan parlait tout à l'heure de points sur lesquels nous ne serions pas parvenus à nous entendre, mais je pense que mon équipe et l'équipe du surintendant sont tombés d'accord assez rapidement ici quant à ce qu'il fallait faire. On a tout de suite déterminé quelles mesures il fallait prendre. Je pense que nous sommes donc sur la même longueur d'ondes à cet égard.

Actuellement, ce que nous surveillons, s'agissant des autres recommandations du rapport, c'est plutôt l'exécution. Je suppose que vous aurez les mêmes intérêts ici au comité. Ainsi, ces audiences ici en comité, espérons-le, déboucheront sur la production par le BSIF d'un plan de travail plus détaillé qui expliquera comment et quand certaines de ces recommandations seront mises en oeuvre.

En fait, je crois savoir que le bureau a déjà pris des mesures quant à certaines de ces recommandations. Néanmoins, il serait utile d'avoir une analyse de nos recommandations et de savoir où en est le bureau quant à leur exécution et s'il prévoit en avoir terminé bientôt pour l'essentiel.

M. Williams: On en a parlé quelque fois, le BSIF a dû traverser une grave crise économique - je trouve le mot «crise» un peu fort et je préférerais dire plutôt un grave ralentissement économique - qui a eu des conséquences graves pour les institutions financières. Je tiens toutefois à rappeler que c'est seulement dans des circonstances comme celles-là que le rôle du BSIF devient manifeste et c'est pourquoi je pense qu'il vous faut tenir compte... On doit envisager que cela pourra se reproduire de nouveau et faire le nécessaire pour ne pas être pris de court, sans planification et sans le personnel qu'il faut, pour avoir négligé de prévoir un nouveau ralentissement économique.

Je remarque que vous avez hésité à faire l'évaluation qui avait été demandée par le vérificateur général. Pour ma part je pense que si on ne peut pas mesurer une chose, on ne peut pas la gérer. Je pense que le BSIF devrait envisager de se pencher sur la portée générale de son rôle suivant les cycles économiques, afin que si nous vous retrouvons devant le comité encore une fois, vous ne pourrez pas prétexter que vous avez été pris au dépourvu parce que personne n'a pu prévoir l'ampleur du cycle économique. Comme je l'ai dit, c'est là qu'il faut intervenir, et il vous appartient de prévoir les choses et de prendre des mesures correctives dès que possible afin de minimiser les pertes.

.1650

Prenez-vous cela au sérieux et envisageriez-vous de faire l'évaluation recommandée par le vérificateur général?

M. Palmer: Je conviens de façon générale que le BSIF doit planifier ses activités sachant qu'il y a des cycles économiques, des périodes de ralentissement et des reprises. C'est tout à fait vrai mais je vais vous dire une chose. Les ralentissements ne sont pas tous aussi importants et sérieux. Si vous considérez les cycles économiques des quelque 200 dernières années, vous constaterez qu'il y a une récession presque toutes les décennies et qu'il arrive parfois que cela soit une véritable crise. Nous en avons eu deux ou trois au cours de ce siècle et peut-être quelque chose du genre au cours de la première décennie.

Ma question est donc la suivante. Devons-nous nous préparer et nous doter du genre de ressources qui sont nécessaires pour les cataclysmes économiques les plus graves ou devons-nous au contraire maintenir les ressources voulues pour ce que l'on peut considérer comme un ralentissement plus typique ou plus normal?

Il est très coûteux de conserver des ressources supplémentaires dont on risque de n'avoir besoin que deux fois au cours du siècle. Il faut donc prévoir les choses et faire certaines suppositions quant à l'ampleur et au type de crises économiques que nous risquons de rencontrer.

M. Williams: J'aimerais dire quelques mots à ce sujet, monsieur le président. Je ne pense pas que l'on se prépare et que l'on se prémunit contre le pire cataclysme possible, mais je dirais que vous avez la responsabilité de prévoir un plan à mettre en oeuvre dans de telles circonstances.

Ce que je veux que vous reconnaissiez, c'est que vous avez une responsabilité. Grâce à une évaluation globale des programmes telle que suggérée par le vérificateur général, vous devez pouvoir dire quel plan vous mettriez en oeuvre le jour où vous estimeriez que nous allons traverser une crise économique très grave. C'est à ce moment-là que votre bureau va devoir intervenir et jouer un rôle très important. Ce sera beaucoup plus que ce que vous ne faites aujourd'hui à l'occasion de reprises et ralentissements économiques normaux. Si vous n'êtes pas prêts, vous ne vous acquittez pas de cette responsabililité.

M. Palmer: J'accepte cette observation.

M. Williams: Merci. Je vous remercie de cette honnêteté.

Passons à autre chose - il y a peut-être là quelque confusion avec le projet de loi C-100 - je sais que vous estimez qu'être propriétaire d'une institution financière est un privilège plutôt qu'un droit. Toutefois, je m'inquiète, là encore dans le contexte d'une société libre et ouverte, lorsque vous vous arrogez le droit d'ordonner la fermeture d'une institution qui, essentiellement, conserve certains éléments positifs, ainsi que le droit de véto sur la nomination d'administrateurs d'institutions financières.

Reprenons chaque élément individuellement. Vous décidez de la fermeture d'une institution viable qui, à votre avis, peut-on supposer, n'a pas d'avenir, même si elle est toujours viable au moment où vous donnez cet ordre. Qu'est-ce qui à votre avis vous donne le droit dans la Constitution d'agir ainsi?

M. Palmer: Monsieur Williams, je ne suis pas un expert en droit constitutionnel.

M. Williams: Mais vous devrez peut-être répondre à cette question rétrospectivement.

M. Palmer: C'est possible. Nous fondrions nos décisions au BSIF sur les dispositions du projet de loi C-100 qui exigent, pour ce qui est tant de notre mandat général que des pouvoirs spécifiques qui nous sont attribués, que nous intervenions avant qu'une institution soit légalement déclarée insolvable, par exemple. Vous soulevez une question tout à fait valable.

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Ce que l'on nous demande de faire, en fait, c'est de juger de la capacité de cette institution à s'en sortir. Dans un sens, on nous dit que lorsque la prépondérance des probabilités nous porte à croire que cette institution a peu de chances de réussir - sachant que les institutions, en période de difficulté, font tout ce qu'elles peuvent pour élaborer et mettre en oeuvre des plans de redressement - le BSIF est tenu d'intervenir.

Il ne fait aucun doute que cela à des implications sur les actionnaires et la direction. Essentiellement, leurs droits sont considérés comme secondaires par rapport aux droits des déposants, des assurés et des créanciers qui, nous dit-on dans notre nouveau mandat, sont les premiers que nous devons protéger.

Je crois que l'on peut dire qu'il ressortira de tout cela une certaine justice élémentaire. Nous devrons évaluer les situations, prendre des décisions qui seront, dans bien des cas, fondées sur des facteurs qualitatifs aussi bien que quantitatifs. Nous devrons juger si la direction est capable de mener à bien un plan de redressement.

Il est toutefois important de signaler que les actionnaires ne perdront pas tous leurs droits dans ces circonstances. Ils ont toujours le droit de poursuite pour dommages et intérêts s'ils estiment ou peuvent prouver que le bureau a agi trop hâtivement ou n'a pas fait preuve de diligence raisonnable.

C'est le point essentiel du projet de loi C-100, c'est un compromis entre les droits de deux groupes économiques dans notre société, compris qui permet de réaliser ce que l'on considère être bien pour le système financier considéré dans son ensemble.

M. Williams: Je comprends l'équilibre que le bureau essaie de réaliser entre la protection des droits des déposants, la protection de l'État, qui protège les déposants, et la protection des droits des actionnaires. Il en va de même pour le droit de véto que s'arroge le bureau sur la nomination d'administrateurs.

Je lui suggérerais simplement de se montrer très prudent parce que je ne vois absolument pas pourquoi ce gouvernement et les contribuables devraient assumer les risques d'une situation qui présente un grave problème constitutionnel.

Le vice-président (M. Telegdi): Je suis sûr que nous débattrons beaucoup de cela lorsque la Chambre sera saisie du projet de loi.

Avant de terminer, j'aimerais donner le dernier mot au vérificateur général. Nous devrons ensuite aller à la Chambre.

M. Desautels: Tout d'abord, j'aimerais revenir sur ce qu'a dit M. Williams. Je crois qu'il a en effet bien souligné la nécessité d'un BSIF actif et vigoureux et nous sommes absolument d'accord. Vous comprenez certainement tous que le coût des faillites des institutions financières est habituellement beaucoup plus élevé que le coût de fonctionnement du BSIF. Il ne faut évidemment pas oublier cela.

D'un autre côté, nous savons que le secteur que surveille le BSIF devient de plus en plus complexe, avec les dépôts dérivés et autres instruments, la volatilité des marchés, la révolution dans le domaine des communications et la rupture des barrières traditionnelles entre différents types d'institutions. Les choses ne se simplifient pas nécessairement et je crois qu'il est important d'avoir un organisme vigoureux et dynamique comme le BSIF.

Je crois pouvoir dire, monsieur le président, que M. Palmer envisage de mettre en oeuvre un certain nombre de nos recommandations. Comme je l'ai dit un peu plus tôt, il serait peut-être utile pour nous tous qu'il présente à un moment ou à un autre au comité un plan d'action détaillé. Je pense que cela pourrait aider le comité à examiner un chapitre assez technique. Cela nous aiderait certainement dans notre suivi de la question.

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Je serais également tout à fait disposé à collaborer avec M. Palmer et ses collaborateurs si cela peut être utile.

Le vice-président (M. Telegdi): Merci beaucoup. Nous allons attendre avec impatience tous ces rapports. Nous pourrions réexaminer toute la question.

Il ne fait aucun doute que le secteur financier devient de plus en plus complexe. À bien des égards, le gouvernement demande aux institutions financières de mettre de l'argent à la disposition d'une économie nouvelle qui n'opère pas selon les mêmes règles que l'ancienne. Dans de nombreux cas, nous leur demandons d'aller jusqu'a créer des marchés.

Merci beaucoup. Nous reprendrons demain. La séance est levée.

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