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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 13 juin 1995

.0809

[Traduction]

Le président: À l'ordre.

Mes collègues, nous avons ce matin l'occasion de rencontrer des représentants du groupe de travail sur la STbr.

Monsieur Morrissey, je vous souhaite la bienvenue. Je crois comprendre que vous avez quelques mots à nous dire pour commencer et que vous serez prêt ensuite à répondre à des questions sur ce thème.

.0810

Comme vous le savez, nous avons examiné cette question et votre groupe de travail a d'ailleurs été constitué à la suite d'une recommandation formulée dans un rapport de notre comité. Comme vous avez maintenant soumis votre rapport au ministre, nous avons jugé bon de vous demander de comparaître à nouveau devant le comité pour que les membres puissent vous poser des questions sur vos constatations.

M. Brian Morrissey (président, Groupe de travail sur la STbr; sous-ministre adjoint, Direction générale de la recherche, Agriculture et Agro-alimentaire Canada): Merci, monsieur le président.

[Français]

Monsieur le président, messieurs les députés, mesdames, mesdemoiselles, messieurs, permettez-moi, en mon nom et en celui de mes collègues, de remercier le Comité de nous offrir cette occasion de lui faire part de nos observations au sujet de la somatotropine bovine.

[Traduction]

Au début de 1994, comme vous le savez, monsieur le président, le Comité permanent a tenu des audiences publiques sur la STbr. En avril de la même année, le comité déposé un rapport dans lequel il faisait part de ses constatations et formulait une série de recommandations. Parmi ces dernières figurait la proposition d'un moratoire d'un an sur l'utilisation de la somatotropine bovine au Canada; ce sursis laisserait aux intervenants le temps de faire le point et de renseigner davantage la population sur la STbr.

En outre, le comité a recommandé que pendant cette période d'un an, on examine en profondeur les répercussions de l'utilisation de la STb synthétique sur les coûts et les avantages qui en découlent pour le secteur laitier canadien, la santé des animaux, notamment le stress imposé aux sujets traités; la génétique animale; les réactions des consommateurs américains et tout autre aspect lié à la santé humaine.

Le comité permanent a également recommandé la création d'un groupe de travail mixte (gouvernement-secteur) qui serait chargé d'exécuter les tâches ainsi définies pendant le moratoire d'un an. Le comité donnait également à entendre que l'examen effectué par le groupe de travail nécessiterait la collaboration des ministères fédéraux et que les secteurs pharmaceutiques et laitiers devraient être mis à contribution.

En août 1994, le gouvernement du Canada répondait au président du comité permanent par l'entremise du ministre Goodale et acceptait de créer un groupe de travail et d'exécuter les tâches recommandées par le comité. Les deux entreprises concernées ont accepté pour leur part de reporter volontairement la vente de STbr jusqu'au premier juillet 1995.

Dans sa réponse, le gouvernement confiait à Agriculture et Agro-alimentaire Canada la mission d'étudier quels seraient les coûts et les avantages de la STbr pour l'industrie laitière, et notamment d'évaluer les coûts associés à l'établissement possible d'un double système de livraison du lait. Il a par ailleurs demandé à Santé Canada de préparer un document sur l'innocuité de la STBR pour les animaux et la santé humaine. En outre, il a invité Agriculture et Agro-alimentaire Canada ainsi que le Conseil de l'évaluation génétique à examiner l'incidence de la STbr sur la génétique animale. Enfin il a confié à Industrie Canada et à Agriculture et Agro-alimentaire Canada la tâche de suivre la réaction des consommateurs américains à la lumière des tendances de la consommation de lait.

Dans sa réponse, le gouvernement a aussi indiqué que le groupe de travail se composerait d'un représentant par organisme, à savoir du Conseil national de l'industrie laitière du Canada, de la Fédération des producteurs de lait du Canada, d'Agriculture et Agro-alimentaire Canada, d'Industrie Canada, des deux fabricants de la STBR et de l'Association des consommateurs du Canada.

Monsieur le président, ce groupe a été chargé de superviser l'exécution des tâches précitées et de faire rapport au ministre de l'Agricutlure et de l'Agro-alimentaire avant l'expiration du moratoire. Les quatre tâches, qui engloaient la collecte de la meilleure information disponible, ont été répartis ainsi comme le prescrivait le gouvernement dans sa réponse d'août 1994: l'étude sur les coûts et avantages a été confiée à Agriculture et Agro-alimentaire Canada; l'étude sur les répercussions de la STbr sur les animaux et la santé humaine, à Santé Canada; l'analyse de l'incidence de la STbr sur la génétique animale, à un groupe de chercheurs universitaires qui se sont liés par contrat avec Agriculture et Agro-alimentaire Canada; enfin, le suivi des réactions des consommateurs américains à la lumière des tendances de la consommation de lait, à un chercheur de l'Université de Guelph, qui a réalisé son travail dans le cadre d'un contrat le liant à Industrie Canada et à Agriculture et Agro-alimentaire Canada.

.0815

Les membres du groupe de travail qui ont été désignés par leur propre organismes sont les suivants: Dale Tulloch, Conseil national de l'industrie laitière du Canada; Peter Oosterhoff, Fédération des producteurs de lait du Canada; Brian Morrissey, président du Groupe de travail, Agriculture et Agroalimentaire Canada; David Head, Industrie Canada; Terry Clark, Provel; Ray Mowling, Monsanto; et Ruth Jackson, Association des consommateurs du Canada.

Monsieur le président, le Groupe de travail s'est réuni tous les mois entre septembre 1994 et le jour de la parution du rapport final, en mai dernier. De plus, en mars, il a effectué une brève visite dans le nord de l'Etat de New York, où il a rencontré des zootechniciens et des nutrionnistes de l'Université Cornell, des fonctionnaires de l'état et des exploitants d'usine laitière; il s'est aussi rendu dans un supermarché qui fait l'essai d'une gamme de produits laitiers exempts de STbr, ainsi que dans deux exploitations laitières.

Dans son rapport, qui a d'ailleurs fait l'objet d'une vaste diffusion, le groupe de travail renseigne la population sur la STbr, comme le recommandait le comité permanent dans son rapport d'avril. En fait, il nous a fallu faire une seconde impression du rapport.

Voici maintenant un aperçu des divers volets du rapport. Pour ce qui est de l'étude sur les coûts et les avantages, ces auteurs donnent à entendre que dans l'ensemble, les effets de l'utilisation de la STbr devraient s'étaler sur plusieurs années et que le changement des variables sera, dans nombreux cas, de l'ordre de 3 à 4 p. 100 et souvent de moins de 1 p. 100.

Au chapitre des effets sur les animaux et la santé humaine, Santé Canada n'a pas encore remis son rapport étant donné que son étude sur les aspects de la STbr liés à la santé et à la sécurité n'est pas terminé. Ce ministère nous a donc avisé qu'il lui était impossible de se prononcer sur l'innocuité de l'hormone pour les animaux et l'homme dans le cadre du rapport global du groupe de travail. Toutefois, Santé Canada a indiqué que lorsqu'une décision sera prise sur la STbr, il publiera un document pour diffusion publique qui traitera des aspects liés à la santé et à la sécurité.

Les auteurs du rapport sur la génétique animale indiquent que la STbr aura une incidence sur l'évaluation génétique des animaux. Toutefois, comme d'autres variables environnementales ont déjà une incidence sur l'évaluation génétique, il conclut que la décision concernant l'avis de conformité pour la STbr ne devrait pas être conditionnelle à l'incidence possible de cette hormone sur les effets d'amélioration génétique au Canada. Les auteurs du rapport en définissent plusieurs façons qui permettent de réduire l'incidence éventuelle de la STbr et d'autres facteurs environnementaux.

En ce qui a trait à la réaction des consommateurs américains, les auteurs du rapport indiquent qu'au cours de la première année complète d'utilisation de la STbr, la consommation globale de lait nature aux Etats-Unis s'est accrue de 0,6 p. 100.

[Français]

Monsieur le président, messieurs les députés, mesdames, mesdemoiselles, messieurs, c'était là un aperçu des activités du Groupe de travail. Si vous le permettez, monsieur le président, les membres du Groupe de travail essaieront de répondre aux questions que vous pourriez vouloir leur poser sur leurs travaux. Enfin, monsieur le président, si vous le permettez, je demanderai à nos experts qui ont effectué les études et dont les noms sont indiqués dans la description du mandat de répondre aux questions qui visent le contenu de leur travail.

[Traduction]

Si vous le permettez, monsieur le président, je demanderai aux experts de répondre aux questions concernant leurs propres études. Et encore une fois, si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai les membres du club de travail qui sont ici présents aujourd'hui, ainsi que les experts qui ont rédigé les études individuelles qui se trouvent dans le rapport.

Le président: Oui.

M. Morrissey: Je vous présente Ruth Jackson, de l'Association des consommateurs du Canada; David Head, d'Industrie Canada; Ray Mowling, de Monsanto Canada; Peter Oosterhoff de la Fédération des producteurs du lait du Canada; et George Brinkman, de l'Université de Guelph. C'est George qui a effectué l'étude sur les tendances américaines en matière de consommation de lait.

.0820

Je voudrais également présenter Jack Dekkers, de l'Université de Guelph, qui faisait partie d'une équipe de quatre chercheurs qui ont examiné les répercussions potentielles de la STbr sur l'évaluation génétique.

Brian Davey, d'Agriculture et Agro-alimentaire Canada, faisait partie de l'équipe d'économistes à qui, au sein d'Agriculture Canada, a effectué l'analyse coûts avantages.

Je suis Brian Morrissey, d'Agriculture et Agro-alimentaire Canada, et l'on a confié la tâche de présider le groupe de travail. Deux membres du groupe de travail n'ont pas pu être parmi nous aujourd'hui et ils présentent leurs excuses. Il s'agit de Terry Clark de Provel, de Eli Lilly, et de Dale Tulloch du Conseil national de l'industrie laitière du Canada.

Le président: Merci, monsieur Morrissey. Nous allons maintenant passer à une ronde de questions de dix minutes.

Nous commençons par M. Daviault.

[Français]

M. Daviault (Ahuntsic): Merci, messieurs. Je vais faire converger mes questions sur la santé, étant donné que je suis critique adjoint à la santé.

Je suis un peu étonné que votre rapport ne fasse pas mention de certains éléments contenus dans les recommandations préalables du Comité portant soit sur la santé des animaux, soit sur la santé humaine. Vous nous dites qu'il revient à Santé Canada de s'occuper de la question.

Pourtant, je pense que votre rapport aurait dû tenir compte de ces recommandations, qui ne sont toujours pas déposées. Pourquoi avoir déposé votre rapport à ce moment-ci? Si vous avez suivi les débats qui se tiennent dans notre auguste Parlement, vous savez que nous faisons face chaque jour à deux ministres qui se renvoient la balle en nous disant que c'est à Agriculture Canada de prendre la décision ultime, après les études qui seront faites sur la santé. Pourquoi ne pas avoir attendu les études sur la santé avant de déposer votre rapport et de faire une recommandation définitive?

Comment pouvez-vous tirer des conclusions sans avoir les résultats de ces études?

M. Morrissey: Je vois trois questions. Je vais essayer de répondre aux trois, si vous me le permettez.

Premièrement, vous me demandez pourquoi on n'a pas eu de réponse du ministère de la Santé. Je me trouve dans la situation embarrassante d'avoir à répondre au nom d'un autre ministère. Je vais le faire dans la mesure du possible.

D'après ce que j'ai compris, nous n'avons pas eu accès aux documents confidentiels du ministère de la Santé, pas plus que ce Comité permanent. Ces gens sont protégés par la Loi sur l'accès à l'information. La réponse qu'on a reçue du ministère, c'est qu'il n'a pas terminé ses études sur la santé animale, ni sur la santé humaine, ni sur l'ensemble de la question de la santé. Il se trouvait alors dans l'impossibilité de préparer un rapport sur un dossier qu'il n'avait pas terminé.

Pourquoi présenter notre rapport à ce moment-ci? C'est que notre mandat nous obligeait à répondre dans les 60 jours qui précédaient l'expiration du moratoire au 1er juillet. Donc, l'échéance était fixe.

La troisième question, si j'ai bien compris, est: est-ce que la décision finale relève du pouvoir d'Agriculture Canada ou du ministère de la Santé? L'homologation ou le refus d'homologation de la STbr relève du ministère de la Santé, mais Agriculture Canada a entrepris ces études-ci, qui sont d'ordre social ou économique et qui visent surtout à fournir les informations demandées par ce Comité.

M. Daviault: Vous aviez donc à analyser les incidences de ce produit. Vous avez décidé de vous rendre aux États-Unis, avec des représentants de la société Monsanto, dans des fermes qui font affaire avec Monsanto, plutôt que d'analyser au moins quelques-unes des 800 plaintes reçues à la Food And Drug Administration des États-Unis à propos de ce produit.

.0825

Ne trouvez-vous pas cela plutôt incohérent?

M. Morrissey: Nous sommes allés visiter l'Université Cornell et des fermes des États-Unis. Au moment de notre visite, l'une de ces fermes avait commencé à utiliser la STbr et une autre, qui l'avait utilisée, avait cessé de le faire. Nous avons visité des laiteries ainsi qu'un détaillant. C'est sur la recommandation de ce Comité que nous sommes allés visiter des fermes américaines.

Nous n'avons pas étudié le dossier de la santé; c'est-à-dire que le groupe ici présent ne l'a pas fait, parce que dans le mandat défini par le Comité, ce n'était pas une tâche qui relevait de la compétence des gens ici présents. La tâche a donc été confiée au ministère de la Santé qui avait et les documents et la compétence. Nous, les autres membres de l'équipe, nous trouvions dans l'impossibilité d'accomplir cette tâche.

M. Daviault: Avez-vous évalué l'impact de ceci sur les producteurs et les transformateurs fonctionnant dans un double système de ramassage du lait? C'est en effet ce qui devrait être instauré si la STbr était homologuée.

M. Morrissey: Ceci faisait partie de notre mandat et a été étudié par Brian Davey et son équipe. Si vous me le permettez, monsieur le président, j'inviterai Brian Davey à répondre à cette question.

[Traduction]

M. Brian Davey (membre du Groupe de travail sur la STbr; directeur, Économie agricole et politique de réglementation, ministère de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Merci, monsieur le président.

Oui, dans notre analyse des répercussions économiques, nous avons examiné les répercussions de la STbr sur les producteurs laitiers canadiens au niveau de l'industrie laitière complète. Nous avons également examiné les répercussions de la STbr à partir de tout un ensemble d'hypothèses de gestion émises pour les producteurs laitiers individuels. Nous avons également effectué une évaluation beaucoup plus qualitative des répercussions d'un système double de collecte de lait au Canada.

Certains de mes analystes économiques ont pu compiler des informations sur le système double aux États-Unis et sur les coûts additionnels d'un tel système. Ils ont fait état de leurs constatations dans l'étude, mais nous n'avons pas pu préparer d'estimations quantitatives des coûts éventuels additionnels que représenteraient la mise en place d'un système double au Canada.

Le président: Dernière question.

[Français]

M. Daviault: Donc, vous n'avez pas pu répondre à cette question, ce qui m'étonne un peu. Ce système devrait en effet être mis en vigueur si ce produit était reconnu. Mon attention se porte sur une des recommandations du Comité que vous auriez dû probablement étudier. C'est la recommandation numéro 4 du rapport du Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire, qui disait:

Est-ce que vous avez étudié cette question de l'étiquetage des produits importés?

M. Morrissey: Je passerai la parole à Brian Davey pour répondre à la question portant sur le double système de ramassage, mais j'aimerais d'abord répondre à la question sur la recommandation numéro 4.

Le Groupe de travail n'a pas étudié le dossier de la recommandation numéro 4, parce que son mandat ne portait que sur les trois premières recommandations, soit le moratoire du ministère de l'Agriculture, la formation d'une équipe et les quatre tâches du groupe.

Je peux peut-être répondre à la question sur l'étiquetage, mais en changeant de chapeau, en mettant celui du ministère de l'Agriculture.

.0830

Lors des recommandations du Comité permanent, les pays qui utilisaient la STbr étaient identifiés et une liste de ces pays a été vulgarisée. Puisque l'étiquetage était déjà obligatoire pour identifier le pays d'origine, il était possible d'identifier les pays de provenance des produits qui étaient susceptibles de contenir de la STbr.

[Traduction]

M. Davey: En ce qui concerne les coûts du système double, nous présentons dans le rapport certains renseignements sur les coûts supplémentaires que représentent la collecte séparée du lait dans les fermes américaines des États-Unis, le coût d'un entreposage séparé et ainsi de suite dans les usines de traitement et certains renseignements sur la vente au détail.

M. Daviault: Pouvez-vous nous en parler.

M. Davey: Pour ce qui est des fermes, on constate des coûts supplémentaires associés à la certification du lait produit par des troupeaux non traités à la STbr, soit environ la moitié d'un cent au gallon, un peu plus d'un dixième de cent par litre. La collecte du lait coûte de 20 à 50c. le litre. À l'usine de traitement, il y a les coûts associés au double entreposage, aux méthodes de dépistage, à l'étiquettage et ainsi de suite, soit environ 0,3c. le litre, ainsi que certains coûts supplémentaires, au stade de la vente au détail, ce qui donne un coût supplémentaire pour le lait provenant des troupeaux non traités à la STbr et allant jusqu'à 20c. au gallon, peut-être soit environ 10 p. 100 du prix au détail pour le lait nature non traité à la STbr aux États-Unis.

Le président: Comment compareriez-vous les deux systèmes? Il y a deux systèmes différents. Aux États-Unis, on ne met pas le lait en commun. Comment compareriez-vous ce système avec le système canadien?

M. Davey: C'est un aspect qui a été également traité dans le rapport, monsieur le président, car les membres de mon équipe ont étudié le système de collecte double à la suite de discussions avec un certain nombre d'entreprises canadiennes de transformation du lait. Nous n'avons pas pu obtenir d'estimation des coûts supplémentaires, mais on nous a dit que les coûts supplémentaires au Canada pourraient être un peu plus importants qu'aux États-Unis. Une des raisons de cette différence tient au fait que les compagnies de transformation canadiennes obtiennent leur lait par l'intermédiaire des commissions de mise en marché du lait qui affecte les quantités de lait à une compagnie particulière alors qu'aux États-Unis, les compagnies de transformation peuvent obtenir directement...

Le président: Obtenir des contrats directs.

M. Davey: ...pour la totalité d'un produit.

Le président: Merci.

M. Steckle (Huron - Bruce): Monsieur le président, c'est un privilège pour moi d'être ici ce matin pour poser, par votre intermédiaire, certaines questions au docteur Morrissey et aux membres du groupe de travail.

Lorsque nous avons commencé notre enquête, une des grandes questions confiées au groupe de travail a été bien entendu celle de la santé. Il s'agit sans doute de la question la plus importante, non seulement pour ce qui est de la santé animale, mais surtout pour ce qui est de la santé humaine. Le groupe de travail a présenté une étude des coûts et des avantages de la STbr. Nous avons ce résultat. Il a également présenté une étude de l'incidence de la STbr sur la génétique animale et nous a fournit un document sur la réaction des consommateurs américains à l'utilisation de la STbr.

Cependant - et mon collègue y a déjà fait allusion - le mandat prévoyait également que Santé Canada présente un document de travail sur l'innocuité de la STbr pour la santé humaine et animale. Dans mes quelques observations liminaires, dans le préambule, j'aimerais simplement soulever la question.

Santé Canada a déclaré au groupe de travail que la STbr, en tant que nouveau médicament vétérinaire, augmenterait la production de lait des vaches laitières. Le ministère a également indiqué que plusieurs compagnies pharmaceutiques ont fait des demandes d'homologation au ministère pour vendre et utiliser le produit au Canada. La lettre du comité précisait les méthodes par lesquelles les nouveaux médicaments sont approuvés.

.0835

Cependant, en ce qui concerne la question de l'incidence la STbr sur la santé humaine et animale, Santé Canada a fait la déclaration suivante: «L'étude n'étant pas terminée, il n'a pas été possible de se prononcer sur le l'innocuité de l'hormone sur les animaux et l'homme dans le cadre du rapport». Toutefois, Santé Canada a indiqué que lorsqu'une décision sera prise sur la STbr, il produira un document public qui traitera des aspects liés à la santé et la sécurité.

Comme le comité essaie de savoir si la STbr ne présente en général pas de danger pour, la santé humaine et non de savoir si les présentations soumises au Ministère pour évaluation répondent à ces normes, nous déplorons le fait que le ministère n'ait pas répondu.

Ce qui rend la chose encore plus troublante c'est que, à deux reprises déjà au moins, les fonctionnaires de Santé Canada ont fait directement référence aux questions liées à la santé.

Lors d'un témoignage devant la Commission de mise en marché des produits agricoles de l'Ontario, les 18 et 19 juin 1990, M. le docteur Bill Drennan de Santé Canada a fait la déclaration suivante concernant l'utilisation de la STbr: «Santé Canada a estimé que la consommation de lait provenant des animaux traités ne présentait pas de risques prouvés pour l'homme».

Le 9 mars 1987, dans une lettre adressée à M. McBride, de l'Université de Guelph, G.A. Mitchell, le directeur du Bureau des médicaments vétérinaires, précisait: «On estime que la consommation de lait provenant des animaux traités ne présente pas de risque pour la santé humaine».

En tant que président du groupe de travail, pouvez-vous expliquer comment Santé Canada a pu être aussi catégorique à deux reprises au moins sur l'absence de risque pour la santé humaine alors que le ministère n'est pas prêt à faire ce genre de déclaration catégorique?

M. Morrissey: Je me trouve dans une position délicate car je ne suis pas habilité pour répondre à cette question, mais je vais répondre en fonction des renseignements dont je dispose.

Le mandat, comme vous le savez très bien, demandait la tenue d'une étude sur les incidences de la STbr sur la santé et la sécurité pour l'homme et pour le bétail. Le groupe de travail n'a pas été en mesure d'accéder à cette information, tout comme vous-même, au Comité permanent, n'avez pas pu y accéder non plus.

Je ne peux pas vraiment faire d'observation sur la déclaration du docteur Drennan selon laquelle il n'y a pas de risque pour la santé sinon pour dire que j'entends les mêmes commentaires publics que vous.

Mais l'autre information dont je dispose est que Santé Canada n'a pas encore émis d'avis de conformité, c'est-à-dire - et c'est une hypothèse que j'émets - que le ministère continue d'étudier les aspects liés à la santé humaine, la santé animale ou l'efficacité du produit, car c'est le mandat qui lui est confié en vertu de la Loi sur les aliments et drogues.

Mais peu importe ce qu'a pu dire le docteur Drennan publiquement, je pars de l'hypothèse qu'il reste encore des questions qui n'ont pas encore été résolues en ce qui concerne la santé de l'homme et du bétail ou l'efficacité du produit.

Supposons un instant que le docteur Drennan ait fait cette observation et qu'à une date ultérieure, il ait eu de nouvelles données sur la santé et la sécurité liées autant à l'homme qu'au bétail. Cela aurait à être étudié.

Je ne sais pas si c'est le cas.

Le président: Monsieur Steckle, comme vous le savez, nous aurons l'occasion d'entendre des témoins de Santé Canada jeudi.

M. Steckle: Je vais poser une autre question qui fait suite à celle que j'ai posée auparavant.

Savez-vous si le ministère de la Santé fait actuellement des études sur cette question? Savez-vous si des études cliniques sont en cours, ou bien n'avez-vous pas accès à ce genre d'information?

M. Morrissey: Je ne suis pas au courant des études en cours à Santé Canada.

M. Steckle: Compte tenu des renseignements qui nous sont fournis et qui vous ont été présentés en votre qualité de président du groupe de travail, pensez-vous que la réponse de Santé Canada est raisonnable par rapport au mandat qui a été confié à votre groupe de travail? Si vous pensez qu'elle n'est pas raisonnable, devrait-on selon vous prolonger le moratoire?

M. Morrissey: La réponse de Santé Canada est-elle raisonnable? Je ne peux parler que de ce que je connais car il y a des aspects qui me sont inconnus et dont je ne peux pas parler. Mais je sais que Santé Canada est lié par la Loi sur l'accès à l'information qui interdit de donner des renseignements qui pourraient présenter un avantage ou plutôt un désavantage financier pour une tierce partie.

.0840

Je suppose également que Santé Canada n'a pas terminé son étude sur la sécurité pour l'homme et le bétail ni sur l'efficacité du produit. En supposant que ces positions se révèlent vraies, il me semble raisonnable que Santé Canada ne veuille pas enfreindre une loi du Parlement qui l'oblige à la confidentialité. Encore une fois, ce sont là des hypothèses de ma part et je ne sais vraiment pas jusqu'à quel point elles sont fondées.

Sur la question de savoir si l'on doit prolonger le moratoire, personnellement, en tant que président du groupe de travail, je n'ai pas d'opinion à ce sujet. Mon rôle en tant que président du groupe de travail était de tenter de présenter, de la façon de la plus neutre possible, les constatations du groupe de travail que nous avons pu produire.

M. Ray Mowling (membre, Groupe de travail sur la STbr; vice-président, Legal and Public Affairs, Mosanto Canada Int.): Si je peux parler au nom de mon entreprise pour un moment, j'ajouterais que nous avons en fait reçu les autorisations nécessaires pour ce qui est de la santé humaine en 1990. Donc, l'essentiel du travail porte sur la santé et la sécurité animale.

Nous n'avons pas été informé de nouvelles données qui pourraient avoir une incidence sur cette question de la santé et de la sécurité humaine. En fait, il existe un nombre impressionnant d'études scientifiques, non seulement au Canada mais aussi à l'étranger. L'Organisation mondiale de la santé et d'autres groupes du même genre rouvriraient le dossier, comme ils l'ont fait dans d'autres cas, s'il y avait de nouvelles données sur la santé humaine. Mais rien de cela ne donnera lieu à une autorisation partielle. Une autorisation sera émise une fois que l'avis de conformité sera terminé pour ce qui est de l'efficacité totale et la sécurité pour le bétail et pour l'homme. L'avis de conformité sera alors accordé.

M. Steckle: Je vais poser ma question à M. Mowling et à M. Morrissey. Si les gens de Santé Canada sont absolument certains que le produit est sûr - je pense que c'est vraiment la raison pour laquelle nous passons par ce processus - pourquoi, dans ce cas, ne pourrions-nous pas obtenir toutes ces autres données? Pourquoi ce rapport ne peut-il pas être rendu public dès maintenant? Ne devrait-il pas être inclus dans les analyses définitives au moment où nous arrivons à la fin de processus?

Je pense que nous laissons planer le doute. Il reste une ombre au tableau. Pour tous ceux qui appartiennent à votre industrie, au secteur agricole et à l'industrie laitière - et en fait pour l'ensemble du public - cela ne devrait-il pas être éclairci avant que l'on ne donne une autorisation finale à ce produit?

M. Morrissey: Vous nous demandez de parler au nom de Santé Canada alors que nous ne sommes pas en mesure de le faire. Dans les documents que vous avez devant vous, vous avez autant de renseignements que ceux dont je dispose, en tant que membre du groupe de travail, sur la position de Santé Canada. Je n'ai pas d'autre renseignement que cela.

M. Benoit (Végréville): Bienvenue mesdames et messieurs.

J'aimerais commencer par l'autorisation de Santé Canada et la délivrance de l'avis de conformité par le ministère.

Le président: Encore une fois, monsieur Benoit, comme vous le savez, les responsables de Santé Canada comparaîtront jeudi.

M. Benoit: Oui.

Je crois comprendre que l'autorisation de Santé Canada, comme vous l'avez déjà dit, pourrait être retardée en raison de préoccupations concernant la santé animale ou l'efficacité - ce produit est-il économiquement valable?

Je ne vois pas très bien pourquoi Santé Canada ou n'importe quel autre organisme gouvernemental empêcherait un produit d'être commercialisé parce qu'il pourrait ne pas avoir un intérêt économique. C'est au rôle des producteurs du produit, de ceux qui l'utilisent et de ceux qui pourraient choisir d'acheter ou non le produit de décider ce qu'ils veulent. Le rôle des organismes de règlementation, dans ce cas Santé Canada, devrait simplement de consister à décider si le produit est sûr ou non.

Je pense que je vais poser cette première question à l'Association des consommateurs. C'est normal que Santé Canada ou tout autre organisme gouvernemental retienne un produit parce qu'ils en étudient la viabilité économique? Pourquoi ne pas laisser le marché...? Tant que l'on dispose des renseignements nécessaires, il existe une règlementation qui permet de divulguer l'information avec exactitude, pourquoi dans ce cas devrions-nous retenir le produit pour des raisons de viabilité économique?

.0845

Le président: Avant de répondre, et M. Morrissey vous pouvez me corriger si j'ai tort, il me semble qu'efficacité n'est pas nécessairement synonyme de viabilité économique. L'efficacité, c'est la capacité de parvenir aux résultats prévus. Santé Canada n'étudierait pas les questions économiques.

Pouvez-vous répondre, monsieur Morrissey?

M. Benoit: Oui, je me suis trompé. C'est en effet la question de savoir si le produit va donner les résultats prévus, ce qui est légitime. Veuillez m'excuser.

J'allais ensuite parler de l'étude économique. Pour ce qui est du fait que Santé Canada empêche le produit d'être mis en marché en raison des questions de santé sur l'animal ou parce qu'il doit en déterminer l'efficacité, il y a déjà eu beaucoup d'essais réalisés par le passé. J'aimerais que vous élaboriez là-dessus puis je passerai à M. Morrissey.

Mme Ruth Jackson (membre du Groupe de travail sur la STbr; Association des consommateurs du Canada): Il est vrai que ce n'est pas le rôle du gouvernement de prendre les décisions qui incombent au marché, mais le gouvernement doit s'assurer que l'information existe et que les forces du marché sont équitables. C'est alors au marché de décider s'il y a une place pour le produit, une fois que sa sécurité a été établie.

M. Benoit: Je vais passer maintenant à l'analyse économique, ce qui est la question que je voulais vraiment aborder. Cette analyse économique était fondée sur l'hypothèse voulant que la gestion de l'offre serait, à l'avenir, ce qu'elle est actuellement. Les résultats de l'étude qui a été réalisée auraient-ils été différents si l'on avait su que le système de la gestion de l'offre allait probablement changer à l'avenir? Nous ne savons pas quand, nous ne savons pas comment, mais que nous le voulions ou non, il va probablement changer. Il y aura probablement davantage de concurrence de la part des Etats-Unis et les agriculteurs canadiens disposeront d'un marché beaucoup plus vaste aux Etats-Unis.

Si cela a été pris en compte, des changements pourraient survenir soit à la suite de nouvelles négociations du GATT après l'an 2000, une fois que le panel aura déterminé que l'ALENA a préséance sur le GATT à ce sujet, ce qui entraînerait alors certainement une plus grande concurrence, soit parce que le Chili viendrait membre de l'ALENA. Il peut y avoir ou non des négociations à ce sujet. Si le système de la gestion de l'offre tel qu'il existe actuellement est modifié rapidement, l'étude qui a été réalisée ne serait-elle pas inutile?

M. Morrissey: Je me demande, monsieur le président, si nous pouvons répondre en deux parties. Je pourrais essayer de répondre à certaines de questions soulevées auparavant après quoi Brian et moi vous répondrons sur la question économique.

En ce qui concerne la question précédente sur les préoccupations liées à la santé et à la sécurité, d'après ce que je sais des processus d'enregistrement, qu'il s'agisse d'un produit pour la santé humaine, d'un vaccin vétérinaire, d'un aliment pour les animaux ou d'un fertilisant, l'étude des présentations prend du temps et bien souvent, le temps nécessaire n'a rien à voir avec les préoccupations particulières. C'est simplement le temps nécessaire à l'examen. Je ne sais donc pas si les gens de Santé Canada ont des préoccupations particulières ou s'ils prennent tout simplement le temps nécessaire pour étudier la documentation qui lui est soumise.

J'aimerais maintenant parler de l'efficacité. Monsieur le président, votre interprétation est tout à fait exacte, dans ce cas, l'efficacité fait la capacité du produit de donner les résultats escomptés. Au cours des années, on a souvent dit que les États-Unis ont tendance à laisser le marché décider si un produit est efficace ou non, que l'acheteur prenne garde.

Au Canada, l'État a tendance à examiner l'efficacité - et cette tendance est parfois intégrée aux lois. Je ne dis pas que nous avons tort ou raison, je dis simplement que c'est un état de fait dans les deux pays. L'argument que j'entends le plus souvent sur le rôle de l'État en matière d'efficacité est que pour éviter un échec du marché, il faut que les acheteurs ou les consommateurs disposent des données nécessaires pour prendre une décision éclairée.

.0850

Certains pourraient donc avancer que, dans les cas où l'information ex ante est nécessaire pour prendre une décision commerciale éclairée, l'état peut effectivement déterminer l'efficacité ou fournir l'information nécessaire.

Je vais m'interrompre ici, monsieur le président, et demander à Brian s'il a d'autres remarques à faire.

M. Davey: Je voudrais simplement expliquer comment nous procédons pour faire ce genre d'analyse économique, car il me semble que cela est pertinent à la question posée.

Pour faire ce genre de travail, nous faisons une prévision ou une projection à partir d'une situation de base, en ce qui concerne l'industrie laitière, et nous supposons que les politiques laitières actuelles ne changeront pas. Nous examinons ensuite le scénario que l'on nous a demandé d'étudier - dans ce cas, l'incidence de l'adoption de la STbr sur l'industrie laitière canadienne. L'incidence est la différence entre les résultats correspondant au scénario et les résultats correspondant à la situation de base, en supposant qu'il n'y ait pas de changement de politique.

Nous pourrions effectivement tenir compte des changements apportés au système de la gestion de l'offre, mais cela modifierait notre base de comparaison. Pour ce faire, il nous faudrait savoir précisément comment le système de la gestion de l'offre serait modifié et nous aurions alors à évaluer l'incidence de la STbr en conséquence.

Il faut séparer les deux. Sans quoi, on ne saurait pas comment la situation évolue ou se modifie ou si cela est dû à un changement de politique, à un changement du système de la gestion de l'offre ou à l'adoption de la STbr. Comme je l'ai dit, nous pourrions faire ce genre d'analyse, en supposant une modification du système de la gestion de l'offre, si l'on nous donnait des détails sur cette modification.

Mais j'ajouterais que nous avons effectivement inclus dans l'étude sur l'incidence économique une petite évaluation ou une comparaison des coûts de production pour les producteurs laitiers de l'Ontario et de l'État de New York, dans laquelle nous avons supposé que la STbr n'était pas utilisée au Canada mais qu'elle l'était utilisée aux États-Unis et que l'écart en ce qui concerne la compétitivité actuelle de 3 p. 100 environ s'élargissait. Ce pourrait être une réponse à la question sur la compétitivité que vous avez soulevée.

M. Benoit: D'accord. Merci.

Aux États-Unis, lors des réunions du comité permanent, lorsque nous parlions de la STbr, certains témoins nous ont dit qu'ils prévoyaient une diminution considérable de la consommation de lait aux États-Unis. Mais l'étude réalisée a montré qu'il y avait eu une augmentation de 0,6 p. 100 de la consommation depuis l'adoption de la STbr. Avez-vous des raisons de croire que la situation pourrait être ou très différente au Canada?

M. Morrissey: Monsieur le président, avec votre permission, je vais demander au professeur George Brinkman de l'Université de Guelph de répondre à cette question.

Dr George L. Brinkman (Département de l'Économie et des Affaires agricoles, Collège agricole de l'Ontario, Université de Guelph): La question que vous posez présente plusieurs volets. Le premier est la situation actuelle aux États-Unis et la comparaison que l'on peut faire avec les conditions au Canada.

J'aimerais revenir un peu en arrière et donner d'abord quelques renseignements supplémentaires sur la situation américaine, car on a indiqué dans un communiqué de presse que les chiffres sur la consommation américaine étaient sans doute plus élevés que ce qu'ils auraient été s'il n'y avait pas eu une campagne publicitaire de plusieurs millions de dollars.

Premièrement, j'aimerais préciser qu'il y a actuellement une campagne publicitaire réalisée à l'intention de l'industrie et de la transformation, qui représente un budget publicitaire d'environ 35 millions de dollars. Cette campagne est destinée essentiellement aux femmes de 24 à 44 ans et promeut le lait en tant que produit sûr. Mais il est très important de se rendre compte que notre étude a étudié la consommation aux États-Unis de février 1994 à janvier 1995, soit la première année complète d'utilisation de la STbr, alors que la campagne de promotion n'a pas commencé avant janvier 1995.

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Il faut habituellement attendre deux à trois mois avant de pouvoir évaluer l'effet d'une campagne publicitaire et j'estime, tout comme les gens de l'USDA à qui j'ai parlé, que cela n'a eu aucun effet sur les chiffres de la première année. Par conséquent, les chiffres que nous avons mentionnés ici ne reflètent pas cette campagne publicitaire et représentent donc la réaction du public.

La réaction que nous avons constatée aux États-Unis est que les consommateurs ont vivement réagi au début et ont soulevé de nombreuses questions. Cependant, à mesure qu'ils se sont habitués à voir le produit et à l'acheter, et lorsqu'ils ont constaté l'absence d'effets négatifs, les inquiétudes des consommateurs se sont appaisées.

L'effet global actuel de tout cela est que moins de 1 p. 100 de toutes les ventes de lait aux États-Unis porte sur du lait sans STbr. Il existe cependant des différences entre le lait nature et le lait traité. Deux pour cent environ du lait nature vendu porte une indication précisant qu'il ne contient pas de STbr alors que c'est le cas de pratiquement tout le lait traité.

Vous voulez savoir s'il est possible d'extrapoler cela au Canada. Il est difficile de savoir si les Canadiens accepteraient qu'un pour cent du lait vendu soit du lait ne contenant pas de la STbr mais je pense qu'ils auraient un comportement semblable à celui du consommateur américain dans la mesure où ils s'habitueraient au lait traité et que cela aurait pour effet de réduire leur crainte à ce sujet.

M. Benoit: Vous n'avez donc aucune raison de croire que cela entraînerait une diminution de la consommation au Canada, puisque nous n'en avons enregistrer une légère augmentation de la consommation aux États-Unis, même si nous n'en connaissons pas très bien les causes?

M. Brinkman: Eh bien, cela dépend en partie de votre cadre de référence. Aux États-Unis, les consommateurs ont réagi particulièrement vivement dans deux régions, le Vermont et le Wisconsin. Il s'agissait de savoir s'il y aurait un double système de commercialisation du lait. Avec un double système, les consommateurs ont le choix entre un produit qui ne contient pas de STbr et un produit dont on ne sait pas s'il en contient ou non. Cette façon de procéder a appaisé les craintes des consommateurs et leur a permis de choisir entre deux produits, ce qui était leur but.

L'existence de ce choix a sensiblement réduit les craintes à l'égard des produits contenant de la STbr et il semble que les gens qui s'en méfiaient ont commencé à acheter des produits non différenciés.

Le président: Monsieur Brinkman, je lis ceci dans le rapport - il s'agit de l'augmentation 0,6 p. 100 de la consommation de lait nature - «cette augmentation ne provient pas d'une réduction des prix ou d'une augmentation plus faible de ces derniers, par rapport à l'année précédente, mais par le maintien de demande de produits laitiers». On ne parle donc pas ici de consommation de lait nature. S'agit-il donc d'une augmentation de ces produits ou plutôt...

M. Brinkman: Non, l'augmentation de 0,6 p. 100 concerne le lait nature. Elle ne vise pas tous les produits laitiers; il s'agit uniquement de produits laitiers liquides. Je dois toutefois signaler qu'il faudrait modifier les chiffres concernant la consommation en Californie. Je suis en contact avec la USDA. Ces chiffres vont refléter une légère diminution de la consommation pour la Californie, parce qu'on a mal déclaré certaines ventes de lait qui étaient en fait destinées au Mexique. Néanmoins, je ne pense pas que cela modifie l'effet général sur la consommation pour cette année, parce que vous constaterez qu'il y a eu une légère augmentation dans les autres régions et que cette révision touche uniquement la Californie. Mais nous allons effectivement procéder à une révision des ventes de lait en Californie.

Si vous regardez la tendance pour 1993 et 1994, vous voyez qu'elle indique une augmentation de la consommation du lait alors qu'en 1992 et 1993 il y a eu une diminution de 1,8 p. 100.

C'est une diminution considérable qui reflétait certaines craintes à l'égard des corps gras du lait. En 1994, la consommation a renversé cette tendance à la baisse, de sorte que si l'on en était resté à la même diminution, la variable de tendance en pourcentage aurait reflété une diminution de la popularité de ces produits.

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La consommation enregistrée en 1994 a renversé les tendances de consommation apparues en 1993 et s'est en fait maintenue au même niveau. Il n'y a donc pas eu simple maintien du niveau antérieur. Il a fallu modifier une tendance à la baisse, ce qui est bien souvent difficile à faire.

M. Vanclief (Prince Edward - Hastings): Je remercie les membres du groupe de travail d'être venus aujourd'hui devant le Comité. J'aurai deux ou trois questions auxquelles, je l'espère, vous pourrez répondre rapidement pour que tout le monde puisse prendre la parole. Mais je vais les poser l'une après l'autre.

Nous avons obtenu diverses réponses à la question de savoir s'il était possible de tester la présence de la STbr dans le lait. Pour la formuler en termes concrets, y existe-t-il un test, ou le Comité connaît-il un test permettant de savoir si les vaches qui ont fourni le lait qui se trouve dans le réservoir d'un agriculteur ont été traitées à la STbr? Cela est-il possible à l'heure actuelle?

M. Morrissey: Nous avons étudié trois tests qui ont été présentés au Comité par un témoin il y a quelque temps déjà et nos scientifiques nous ont fait savoir qu'aucun de ces tests ne se prêtaient à l'usage que vous avez décrit.

Nous avons également demandé à M. Bauman de l'Université Cornell aux États-Unis si cela existait et il nous a dit qu'à sa connaissance il n'y avait aucun test permettant de déceler cette différence. On nous a dit - et je parle de mémoire uniquement - qu'ils sont en train d'examiner un autre test mais que nous n'avons pas encore de réponse pour le moment. Je parle de mémoire et je crois me souvenir que l'on effectue encore des études à ce sujet mais qu'à notre connaissance, il n'existe pas actuellement de tests comme celui que vous avez décrit.

M. Vanclief: D'après certains commentaires que nous avons entendus ce matin et des déclarations qui ont été faites il semblerait que Santé Canada ait indiqué par écrit aux fabricants que l'usage de la STbr n'avait aucun effet négatif sur la santé. On a également mentionné que l'industrie avait probablement utilisé ce produit, si elle en avait l'autorisation. Je tiens simplement à préciser...et je sais qu'il s'agit là d'une question de santé mais ai-je raison de penser que les membres du Comité ne connaissent aucune étude récente qui portait sur l'effet de cette substance sur la santé des animaux? A-t-on, à votre connaissance, publié récemment des études sur cette question?

M. Morrissey: Je vais essayer de vous répondre mais si mes collègues du groupe de travail disposent d'autres informations, je suis sûr qu'ils n'hésiteront pas à intervenir.

Pour ce qui est de la santé humaine, on publie régulièrement des résultats de recherche au sujet de la STbr. À ce que je sache, aucune de ces études n'a soulevé de questions importantes dans les pays comme les États-Unis, ceux de l'Union européenne ou le Canada. On publie des résultats presque tous les jours mais je ne pense pas qu'une seule étude fasse état de problèmes graves. Il est possible que Santé Canada dispose d'autres renseignements mais pour ce qui est du domaine public, je ne connais pas d'études faisant ressortir les dangers de ce produit.

M. Mowling: Là encore, j'aimerais ajouter que du point de vue de ma société, il n'existe aucune étude fayant entraîné de telles conclusions. Santé Canada ne nous a pas demandé de fournir des données sur ce point. Pour en revenir à la réponse du président, je dirais qu'il existe beaucoup d'études qui portent sur l'innocuité de cette substance pour les hommes et les animaux.

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Je tiens toutefois à ajouter qu'il y a eu des affirmations, dont certaines étaient fausses, je le dis franchement, ou inexactes au sujet des effets potentiels, mais elles ne s'appuyaient pas sur les méthodes scientifiques acceptables dans notre pays, l'un des premiers au monde dans ce domaine. En effet, renseignements scientifiques doivent être examinés par des pairs avant toute décision.

M. Vanclief: Monsieur le président, j'aimerais poser quelques questions à M. Oosterhoff. J'admets dès le départ que je vais parler de situations hypothétiques, mais je crois que ce sont des questions que nous nous posons tous.

Si l'on accordait à ce produit un avis de conformité - et lorsque je dis cela, je crois que nous savons tous qu'avant d'obtenir cet avis de conformité, le produit doit être conforme à toutes les normes, tests et exigences de Santé Canada - certains prétendent que cela entraînerait une augmentation de la rentabilité. Je crois que l'industrie laitière a toujours fait bénéficier le consommateur des augmentations de productivité ou de rentabilité obtenues dans la chaîne de production.

Je voudrais savoir si, d'après M. Oosterhoff, l'utilisation de ce produit sera avantageuse pour le producteur et pour le consommateur? Je répète qu'il faudrait bien entendu qu'il obtienne l'avis de conformité. Dans le cas où un tel avis serait délivré mais où l'industrie déciderait de ne pas utiliser le produit, est-ce que cela pourrait nuire à la compétitivité des producteurs laitiers canadiens?

M. Peter Oosterhoff (membre du groupe de travail sur la STB; président de la Fédération canadienne des producteurs de lait): Ce sont en fait plusieurs questions mais je crois qu'elles se rapportent toutes à la compétitivité de l'industrie laitière canadienne. Je crois que M. Vanclief a parfaitement raison lorsqu'il dit que l'industrie laitière canadienne utilise une méthode d'établissement des prix, fondée sur les politiques en vigueur actuellement, qui a pour effet de faire profiter les consommateurs les gains de productivité obtenus par l'industrie.

Je préciserai, à l'intention des membres du comité, que notre méthode d'établissement des prix se fonde sur une enquête relative au coût de production, une enquête réalisée auprès d'un échantillon de producteurs des principales provinces productrices. Lorsque nous effectuons cette enquête sur le coût de production, nous écartons 30 p. 100 des producteurs qui ont les coûts les plus élevés. Nous conservons donc uniquement 70 p. 100 des producteurs parmi ceux qui ont les coûts les plus faibles. Nous calculons ensuite le coût moyen de sorte que, si l'on prend la moitié des 75 p. 100 qui restent, il n'y a qu'environ 37,5 p. 100 des producteurs qui réussissent à respecter le coût de production établi par l'enquête. Cela a pour effet d'inciter les producteurs à devenir plus efficaces de façon à pouvoir survivre. Dans notre industrie, les producteurs qui ont des coûts élevés ne peuvent survivre. La gestion de l'offre comporte un volet d'orientation du marché dont on ne tient souvent pas suffisamment compte.

Les producteurs sont obligés de s'intéresser à la technologie et nous le faisons depuis des années. Je crois que je suis un des plus anciens dans le secteur laitier. Nous avons toujours adopté les nouvelles technologies à mesure qu'on y avait accès. Nous étudions la composition des rations, nous utilisons de nouvelles rations, nous utilisons le nouveau maïs, la nouvelle luzerne et tout ce qui existe sur le marché, nous construisons de nouveaux bâtiments, nous achetons le dernier équipement de traite, etc.. Il s'agit-là d'un nouveau produit et s'il est efficace et permet de réduire le coût de production, il est certain que les producteurs vont vouloir l'utiliser, mais il y a le fait que c'est quelque chose de nouveau, c'est une nouvelle bio-technololgie, ce produit suscite une certaine controverse, il va donc falloir examiner l'ensemble de la situation, déterminer s'il a un effet sur la santé humaine ou animale - et cela ne rentre pas dans notre domaine - mais également quel effet il a sur la réaction des consommateurs à l'utilisation de ce produit.

.0910

Vous me demandez, monsieur Vanclief, si les producteurs l'utiliseraient de façon à demeurer compétitifs. Il me semble que cette décision incombe individuellement aux producteurs. Certains suivent de près les nouvelles technologies. Je pense qu'à long terme, ceux qui adaptent les nouvelles technologies seront ceux qui survivront dans l'industrie. Dans la biotechnologie, il y a des choses à prendre ou à laisser.

Il me paraît regrettable que notre rapport ne contienne pas l'avis de Santé Canada sur ce sujet, parce que cela le rend incomplet.

Nous devions respecter un échéancier et on nous avait demandé de faire rapport aux ministres deux mois avant la fin du moratoire volontaire sur la STbr. Nous avons respecté notre échéance. Il est regrettable que Santé Canada n'ait pu, pour des raisons qui lui sont propres, respecter cette échéance et nous attendons toujours le rapport.

Je regrette personnellement que les producteurs, et je crois que cela s'applique également aux transformateurs, étudient une question qui peut avoir un effet positif mais également négatif sur l'industrie et nous n'avons pas toutes les réponses.

Le président: Une dernière question, M. Vanclief.

M. Vanclief: J'aimerais poser une question. Je me demande si un membre du comité pourrait nous expliquer cette situation et la façon dont on utilise la STbr. Je veux parler du secteur de l'Europe que je ne connais pas très bien.

Je n'ai pas de données fiables, mais j'ai entendu dire qu'on avait approuvé ce produit sur le plan de la santé - en d'autres termes, qu'on avait émis un avis de conformité - mais qu'il y avait également un moratoire sur la vente de ce produit ou sur son utilisation. Quelle est donc la situation dans ces pays? Savez-vous comment l'on a abordé cette question là-bas, si ce que j'ai dit ou entendu dire est vrai ou ce qu'il en est de l'utilisation de la STbr? Je pense que nous l'appelons tous l'Europe, Union européenne ou autrement.

M. Morrissey: Si vous le voulez bien, monsieur le président, je vais essayer de répondre à cette question. Si M. Mowling dispose d'autres renseignements, vous lui permettrez, j'espère, de compléter ma réponse.

Je crois savoir, monsieur le président, que l'Union européenne avait, il y a quelques mois encore, établi un moratoire sur l'utilisation et la vente de la STbr à l'intérieur de l'Union européenne. Je crois que les autorités compétentes de l'Union européenne avaient déclaré que ce produit ne causait aucun problème sur le plan de la santé et de la sécurité. Le Parlement européen a pris cette décision pour des motifs sociaux et économiques parce qu'un groupe voulait qu'on utilise le produit, alors qu'un autre ne le souhaitait pas, et que les nouvelles technologies ont parfois tendance à favoriser un groupe au détriment d'un autre.

Pour ce qui est de la santé et de l'inocuité, je crois savoir que ce produit n'est pas contesté dans l'Union européenne. Ce moratoire a été déclaré pour des raisons sociales et économiques.

La décision d'imposer un moratoire a été réexaminée il y a quelques mois par l'Union européenne qui a décidé de retarder encore la vente de la STbr. Là encore, je crois que motifs étaient les mêmes que ceux qui avaient été avancés initialement: le produit est acceptable sur le plan de la santé et de l'inocuité; il est efficace; mais il soulève des questions sociales et économiques principalement, si j'ai bien compris, parce qu'il inquiète les consommateurs, sur le plan social, et on s'interroge sur les excédents de produits laitiers, sur le plan économique, et sur l'effet qu'il pourrait avoir sur les petites exploitations.

Je crois également qu'en prolongeant le moratoire, l'Union européenne a accordé la permission d'utiliser ce produit dans un environnement contrôlé, ce qui n'était pas possible auparavant. Par exemple, les Etats membres peuvent, avec la nouvelle décision, procéder à des essais d'utilisation de la STbr pendant le moratoire.

M. Mowling: La seule chose que j'aimerais ajouter est que ce produit a été approuvé dans 36 pays. Il n'est pas utilisé dans tous, principalement pour des raisons commerciales. Aucun pays ne l'a interdit pour des raisons de santé humaine ou animale ou d'efficacité. Il est sans danger, l'Union européenne l'a approuvé il y a des années sur le plan de son inocuité tant pour les humains que pour les animaux, et pour d'autres raisons.

Mme Cowling (Dauphin-Swan River): Ma question concerne les 36 pays qui utilisent vraiment la STbr. Depuis quand utilisent-ils ce produit? Je me demande quel effet il a eu sur le cheptel bovin et combien d'agriculteurs ont éventuellement été obligés de cesser leurs activités. A-t-on étudié cette question ou avez-vous des résultats?

.0915

M. Morrissey: Je n'ai pas de données sur ce qui est arrivé au cheptel bovin dans ces 36 pays.

Si cela vous paraît utile, nous avons toutefois tenté d'évaluer quelles en seraient les répercussions au Canada sur le nombre de vaches sur une certaine période. Nous pourrions peut-être demander à Brian Davey de nous donner ces renseignements.

Mme Cowling: Excellent. Oui, nous aimerions avoir ces renseignements.

M. Davey: Je voudrais commencer par vous parler des répercussions qu'a eues l'introduction de ce produit dans d'autres pays. On a effectué un certain nombre d'études aux États-Unis, et il y en a une en particulier, qui est je crois, la synthèse d'un certain nombre de recherches. Elle a été effectuée par un organisme appelé, je crois, le bureau général de la comptabilité, qui a examiné l'effet global de ce changement.

Je crois qu'il a conclu qu'il y aurait une réduction de 1 p. 100 du revenu total des producteurs de lait aux États-Unis après un certain nombre d'années. Je ne me souviens pas si ce bureau a évalué le nombre de vaches qu'il y aurait à l'échelle nationale mais il a certainement dû prévoir qu'il serait légèrement plus faible qu'il ne l'aurait été autrement, ce qui est d'ailleurs la situation que nous avons prévue pour le Canada.

Si nous choisissons le scénario moyen pour ce qui est de l'utilisation de la STbr, le nombre de vaches laitières diminuerait d'environ 1 p. 100 après la période d'ajustement, par comparaison avec ce qu'il aurait été sans l'utilisation de la STbr. En faisant certaines hypothèses sur la façon dont les agriculteurs décideraient d'utiliser la STbr dans leur exploitation, je crois que cela se traduisait par la disparition de quelque 500 fermes laitières à cause de l'introduction de la STbr.

Il me paraît important de replacer ce chiffre dans le contexte de changement structurel que connaît l'industrie laitière depuis plusieurs années, de nombreuses années en fait, et qui a vu le nombre total des fermes laitières chuter constamment. Le nombre des fermes laitières diminue peu à peu, comme c'est le cas pour tous les autres types de fermes, mais leur taille augmente. Nous estimons que la STbr aurait un effet très faible sur cette tendance générale que connaît le secteur laitier.

Mme Cowling: J'aimerais poser une autre question sur ce sujet. Quel est le modèle que vous avez utilisé? Il arrive parfois que l'on compare des pommes et des oranges. Pourriez-vous nous donner quelques précisions? Je crois en effet savoir qu'aux États-Unis, il y a un marché ouvert, ce qui n'est pas du tout le cas ici.

M. Davey: Nous avons effectué notre analyse en supposant que notre système canadien de gestion de l'offre continuerait à fonctionner comme il le fait actuellement. Bien entendu, les Américains ont effectué leur analyse à partir de la situation particulière de leur secteur laitier.

Mme Cowling: Merci.

[Français]

M. Landry (Lotbinière): Docteur Morrissey, madame...

M. Daviault: Un représentant de la compagnie voudrait parler.

[Traduction]

M. Mowling: Nous vendons nos produits aux États-Unis et nous savons grâce à ces ventes que plus de 55 p. 100 de nos clients sont des fermiers qui possèdent moins de 100 vaches. Cela permet peut-être de répondre en partie à la question de savoir si ce produit est plus avantageux pour les grands troupeaux que pour les petits.

Je crois que M. Oosterhoff veut dire que ce produit est particulièrement efficace lorsqu'un troupeau est bien géré mais que sa taille importe peu. En fait, on a utilisé certains modèles à l'Université de Guelph qui indiquent que l'on peut en retirer certains avantages économiques avec un troupeau de 45 vaches.

[Français]

M. Landry: Docteur Morrissey, madame et messieurs les témoins, il me fait plaisir de saluer la présence de quatre producteurs laitiers de ma circonscription de Lotbinière au Québec. Bienvenue!

.0920

Ma question s'adresse à madame, qui est représentante des consommateurs de lait du Canada. Madame, j'aimerais savoir si un sondage a été fait au niveau des consommateurs de lait et comment les gens réagissent devant une homologation possible de la somatotropine.

[Traduction]

Mme Jackson: Nous avons examiné, je crois, trois enquêtes. L'une a été faite aux États-Unis et les deux autres au Canada. Celle qui a été faite au Canada est toute récente.

Les consommateurs ont beaucoup de mal à dire ce qu'ils feraient lorsqu'on les place dans une situation hypothétique. Sur ce point, il y a lieu de noter que les résultats de l'enquête la plus récente, qui était en fait un sondage effectué par Angus Reid, semble très différents de ceux des deux autres enquêtes.

L'enquête Hoban aux États-Unis et l'étude Optima effectuée au Canada n'ont pas fait ressortir la présence de graves préoccupations chez les consommateurs. L'élément principal qui en est ressorti est que les consommateurs ne connaissent pas très bien la question.

D'après l'enquête Angus Reid, les consommateurs ont déjà entendu ces expressions mais je ne sais pas s'ils les comprennent. Cette enquête, qui a été effectuée à la fin du mois de mai 1995, fait état de préoccupations chez les consommateurs. Ces préoccupations sont plus vives que ce à quoi je m'attendais.

[Français]

M. Landry: Monsieur le président, je désire poser une toute petite question au représentant des producteurs laitiers du Canada.

Quel pourcentage des producteurs laitiers du Canada sont prêts à adopter cette hormone-là et pourquoi?

[Traduction]

M. Oosterhoff: Nous ne savons pas quel pourcentage des producteurs serait prêt à utiliser ce produit au Canada. Nous n'avons pas effectué d'enquête et je me demande même s'il est possible de savoir qui sera prêt à adopter une nouvelle technologie en procédant à une enquête. Je crois que la situation peut évoluer.

Les gens essayent le produit et, en cas d'échec, les voisins ne l'utilisent pas. Lorsqu'un produit donne de bons résultats pour certains agriculteurs, les voisins n'attendent pas longtemps avant de faire la même chose. Je crois que nous sommes dans une phase d'attente. Il est certain qu'il y a au Canada des producteurs qui souhaiteraient utiliser le produit mais nous n'avons aucune idée de leur nombre.

Je crois que les enquêtes et les sondages peuvent être fort trompeurs. Vous savez peut-être que je viens de l'Ontario et que nous y avons tenu récemment des élections. Toutes les enquêtes et les sondages indiquaient un mois avant la date des élections qu'un parti allait former un gouvernement majoritaire. En un mois, la situation a complètement changé et nous avons un gouvernement majoritaire d'une autre couleur.

Je me méfie beaucoup de toutes ces enquêtes, ces sondages. Il n'y a en fait qu'un seul sondage et c'est le test de la réalité.

[Français]

M. Landry: Merci. Comme vous n'avez pas de pourcentage au sujet de vos producteurs, est-ce que vous et votre organisme seriez prêts à adopter la somatotropine demain matin? Oui ou non et pourquoi?

[Traduction]

M. Oosterhoff: Il y a d'après nous encore des questions sans réponse. C'est la position que nous avons adoptée au mois de janvier à Winnipeg au cours de notre conférence sur les politiques. Nous avons manifesté encore une fois notre inquiétude pour ce qui est de l'effet sur le marché et sur les réactions des consommateurs et nous avons suggéré de prolonger le moratoire d'un an.

.0925

À notre assemblée annuelle de juillet, la question sera bien entendu soulevée à nouveau. Notre organisation a l'occasion de l'examiner deux fois par an.

C'est une question en pleine évolution. En dehors de Santé Canada, les choses progressent. Bien entendu, comme vous vous y attendiez, certains producteurs voudront utiliser ce produit, et je m'attends à un débat fort animé à notre assemblée annuelle de juillet à St. John's.

Le président: Chers collègues, il va falloir nous arrêter à 9h30 et deux membres, M. Reed et M. Collins, ont encore des questions à poser.

M. Reed (Halton - Peel): Merci, monsieur le président. Ma question sera très brève.

Ce produit a été accepté dans 36 pays, bien que tous ne l'emploient manifestement pas. Pourriez-vous me dire quelles conséquences l'adoption et l'utilisation de la somatotropine bovine peuvent avoir sur leurs exportations dans des pays qui ont décidé de ne pas utiliser ce produit.

M. Morrissey: Monsieur le président, si vous le permettez, nous pourrions partager les questions entre M. Mowling et moi-même, car il pourra sans doute fournir des détails dont je ne dispose pas.

Le grand marché auquel on songe immédiatement est celui de l'Union européenne. Celle-ci a placé un moratorium sur l'utilisation de la somatotropine bovine dans les limites de son territoire. Elle n'a cependant imposé aucune restriction aux importations de produits qui peuvent en contenir.

Sur le vaste marché qu'elle représente, l'Union européenne a donc laissé progresser les échanges commerciaux, ce qui lui a assuré une certaine protection contre les risques d'une intervention du GATT ou de l'OMC contre elle. Le commerce peut donc continuer à progresser en dépit des restrictions internes imposées.

Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Mowling: Non, ce que vous avez dit est exact.

M. Reed: Merci, monsieur le président.

M. Collins (Souris - Moose Mountain): Je vous pris d'excuser mon retard.

J'aurais deux brèves questions à poser au sujet des remarques de Mme Cowling. Lorsque nous parlons de la somatotropine bovine et des facteurs qui peuvent contribuer à la réduction de la taille des troupeaux, je crois que nous devrions examiner ces facteurs. Je suis certain que c'est pour cela que vous les avez mentionnés. Plaçons-les donc dans le contexte de ce qui contribue à la diminution de la taille des troupeaux et à la disparition de certains producteurs.

Mon autre remarque s'adresse à M. Oosterhoff. Je suis totalement d'accord avec vous. Nous avons d'innombrables sondages et prévisions; on fait pratiquement tourner les tables pour savoir où nous allons. En fin de compte, je me demande si nous n'aurions pas dû également utiliser le jeu de Ouija.

Cela dit, savez-vous s'il y a des membres de votre secteur qui utilisent maintenant la somatotropine bovine d'une façon ou d'une autre, au Canada?

M. Oosterhoff: J'ai deux remarques à faire, monsieur Collins. Je crois que M. Davey vous a déjà répondu au sujet de la taille de notre secteur industriel et du nombre de producteurs que nous perdons. Le pourcentage est probablement de 1 p. 100 pour les producteurs et le nombre de vaches.

Au cours des 10 ou 15 dernières années, au moins, le taux annuel de pertes dans l'industrie laitière a été de 3 à 4 p. 100. Je parle là du nombre de producteurs que nous perdons.

Il y a environ 45 vaches par troupeau au Canada; aux États-Unis, il y en a environ 67. La différence n'est donc pas très importante. On entend toujours parler des grands troupeaux américains et il est donc certain qu'il existe des différences dans ce secteur entre les deux pays, mais elles ne sont pas énormes.

Nos organisations n'ont jamais eu pour politique de conserver à tout prix tous les producteurs. Je crois que la nature de l'économie veut qu'elle change.

Cela a des effets très marqués sur l'économie rurale; nous nous en inquiétons tous. Pourtant, si nous n'avions encore que des troupeaux de 15 bêtes, le lait coûterait trop cher pour que les gens en achètent. Il faut donc trouver un équilibre dans ce domaine.

Vous m'avez demandé si je connaissais des gens qui utilisaient ce produit. On m'a déjà posé la même question au cours de ma dernière comparution devant le Comité. Je répondrai donc encore une fois sans ambiguïté que je ne connais personne qui l'utilise.

.0930

Je sais qu'il y a beaucoup de rumeurs. En fait, j'ai été approché par votre président qui m'a carrément demandé si je l'utilisais, car le bruit en courait à Ottawa. En fait certains de mes collègues ont été approchés par leurs députés. J'espère que le Comité n'est pas à l'origine de ces rumeurs...

Des voix: Oh oh!

M. Oosterhoff: ...mais peut-être sont-elles parvenues jusqu'à lui. Je peux donc vous déclarer sans ambiguïté que je n'utilise pas ce produit et qu'à ma connaissance, personne ne le fait.

Mais comme je l'ai déjà dit, notre frontière avec les États-Unis est une véritable passoire. Ils nous a été impossible d'empêcher la contrebande d'alcool, de tabac ou de n'importe quoi d'autre. Le danger est que s'il existe un produit que l'on peut se procurer aux États-Unis, mais pas au Canada, il peut y avoir des gens qui l'utilisent. Je tiens à ce que les autorités responsables à Ottawa soient au courant de la situation.

Le président: Je me demande...

M. Morrissey: Monsieur le président, je crois que M. Davey a une remarque à faire, si vous voulez bien l'entendre.

Le président: Certainement.

M. Davey: Permettez-moi de faire une remarque au sujet de l'ampleur de l'analyse sur la situation des divers exploitants de fermes laitières.

Dans la partie de l'étude concentrée à l'incidence individuelle sur la ferme laitière plutôt que sur l'ensemble du secteur, nous avons examiné un certain nombre de cas. Le premier est celui du producteur qui maintient la taille de son troupeau et acquiert un quota supplémentaire pour pouvoir couvrir la production additionnelle de lait. Manifestement, ce producteur aurait tout à gagner à utiliser la somatotropine bovine.

Nous avons également examiné le cas de l'exploitant qui maintient sa production mais réduit la taille de son troupeau à cause de l'augmentation du taux de rendement par vache. Lui aussi en bénéficierait - mais pas autant - à condition d'utiliser les ressources de son exploitation libérées par la réduction de son troupeau pour produire des céréales ou du maïs, ou autre chose.

Nous avons enfin examiné le cas des producteurs qui, pour une raison quelconque, refusent de l'utiliser. Ils sont manifestement perdants dans l'opération car ils vendent le même volume de lait, mais à moindre prix.

Quant aux changements structurels, l'adoption de la somatotropine bovine contribuerait peut-être à réduire le nombre des éleveurs, mais ce serait minimal. Le rapport conclue en effet que cette diminution viserait sans doute le groupe de ceux qui ne l'auront pas adoptée parce que ce sont eux qui seront soumis à une petite pression économique.

Le président: Je vous remercie.

Chers collègues, il est 9h30 et nous allons maintenant passer à l'examen article par article du projet de loi C-86.

Monsieur Morrissey, presque tous les membres voudraient qu'il y ait une seconde série de questions. Il en reste donc manifestement à poser.

Pourriez-vous faire en sorte, au cours des prochains jours, que nos membres puissent vous appeler s'ils ont des questions à vous poser. Peut-être pourriez-vous également leur fournir les numéros de téléphone de vos collègues. Il reste encore beaucoup de questions en suspens.

Chers collègues, après jeudi prochain où nous devons entendre les représentants de Santé Canada, il nous restera encore un peu de temps pour discuter de tout cela en comité. Je crois que nous devrions passer maintenant au projet de loi C-86.

Auparavant, monsieur Mowling, j'aurais une question à vous poser au sujet de votre produit aux États-Unis. Qu'elle est l'importance de la demande là-bas? Est-elle grande? Augmente-t-elle? Diminue-t-elle?

M. Mowling: Eh bien, nous vendons notre produit à quelques 15 000 producteurs laitiers, ce qui équivaut à près de la moitié des producteurs canadiens.

Notre produit est commercialisé depuis février 1994. Contrairement à notre attente, les résultats sont fort satisfaisants.

Comme le faisait remarquer M. Oosterhoff, une fois qu'une nouvelle technologie de ce genre apparaît, on a besoin d'un soutien pour que certains producteurs l'adoptent rapidement. Nous en sommes actuellement à ce stade.

Le produit est vendu dans toutes les régions des États-Unis. Nous avons atteint nos objectifs actuels. Je crois que 18 millions de doses ont déjà été vendues ce qui correspond à nos prévisions.

.0935

Le président: Encore une fois, monsieur Morrissey, merci d'être venu.

Chers collègues, nous allons faire une pause de cinq minutes.

.0935

Le président: Bien, nous pouvons commencer.

M. Benoit: Avant de le faire, je voudrais demander l'accord unanime du Comité afin d'accorder en tout cinq minutes à un ou deux producteurs laitiers - je crois qu'il y a un vétérinaire et un groupe informel; ils sont venus ici de tout le Canada - pour qu'ils nous disent ce qu'ils pensent de la somatotropine bovine.

.0945

Ils regrettent de ne pas avoir été entendus et je crois qu'il est important que notre Comité entende l'opinion de producteurs parlant à titre individuel. Je sais que les groupements professionnels agricoles ont été bien représentés, ce qui est excellent. Mais il y a aussi des producteurs individuels qui voudraient présenter leur point de vue. Je demande donc au Comité de bien vouloir leur accorder, unanimement, ces cinq minutes.

Le président: Monsieur Benoit, comme vous le savez, ce n'est pas ainsi que l'on procède ici. Vous donnez l'impression que nous n'avons pas entendu les éleveurs alors qu'en fait, bon nombre d'entre eux ont témoigné devant nous au sujet de la somatotropine bovine.

Nous en sommes maintenant à l'examen du projet de loi C-86 et non de la question de la somatotropine. D'ailleurs, en regardant autour de moi, je constate qu'il n'y a pas unanimité.

Mes chers collègues, nous avons aujourd'hui avec nous Kempton Matte, du Conseil national de l'industrie laitière.

Soyez encore une fois le bienvenu à ce Comité. Je crois que vous avez une brève déclaration à faire, après laquelle, vous serez prêt à répondre à nos questions.

M. Kempton L. Matte (président et directeur général, Conseil national de l'industrie laitière): Merci, monsieur le président. «Thank you, Mr. Chairman».

Nous sommes en fait venus pour brandir le drapeau de la solidarité en faveur des producteurs de lait avec lesquels nous faisons cause commune. Nous sommes des transformateurs de produits laitiers et nous tenons à assurer au Comité que nous approuvons les amendements au projet de loi C-86 modifiant la Loi sur la commission canadienne du lait afin de réfléter les changements et la réorganisation du système de gestion des approvisionnements de lait.

Nous avons appris, monsieur le président, que certains croyaient que nous étions opposés à ces changements. Ce n'est pas du tout le cas, et je tenais à ce que ce soit bien clair. Voilà la seule raison de notre présence ici, aujourd'hui, encore que j'aurais beaucoup aimé répondre aux questions sur notre SB.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Je m'en doutais, mais comme vous le savez, monsieur Matte, nous abordons maintenant le projet de loi C-86. Malheureusement, votre représentant au groupe de travail n'a pu venir aujourd'hui.

Je vais maintenant prendre la liste. Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Chrétien (Frontenac): Je m'excuse, mais j'étais distrait. Je vais sauter mon tour.

[Traduction]

Le président: Monsieur Benoit.

M. Benoit: Merci, monsieur le président. Nous n'en sommes pas encore à l'examen article par article. Pourrions-nous avoir d'abord un débat général, monsieur le président?

Le président: D'accord.

M. Benoit: Nous allons donc le faire.

Le président: Le Conseil national de l'industrie laitière est un des témoins. Nous passerons ensuite à la Commission canadienne du lait, puis à M. Vanclief, qui représente le ministre.

M. Benoit: Oui, merci.

L'Alberta a exprimé certaines réserves au sujet de l'article 3, mais je crois que d'autres provinces craignent également que cette loi n'empiète sur la jurisdiction provinciale en accordant trop de pouvoir au gouvernement fédéral ou à la Commission canadienne du lait.

On a donc proposé de modifier l'article 9 de la loi pour s'assurer que les compétences provinciales ne seront pas réduites par inadvertance. L'Alberta est convaincue que c'est ce qui se produira avec ce projet de loi. Cette province propose donc la modification suivante: ajouter «sous réserve de» au début de l'article 9, sous réserve de l'accord provincial, sous réserve de l'accord de cette province. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.

.0950

Ce n'est naturellement pas nouveau pour vous, car je crois que la question a déjà été soulevée par plusieurs provinces.

M. Matte: Franchement, ces craintes nous paraissent tout à fait exagérées. Je ne suis certes pas un spécialiste du droit constitutionnel, mais l'objet de ces modifications est de faciliter l'application du système national. Étant donné les recoupements entre le plan national et la loi, il est virtuellement impossible pour la commission d'ignorer les préoccupations d'une province. Rien dans ce qui est proposé ne me paraît pouvoir changer cela.

Je peux comprendre cette crainte générale au sujet d'un transfert de pouvoir ou d'une ingérence dans la jurisdiction provinciale, mais je ne pense pas que cette crainte soit justifiée.

Soit dit en passant, si vous prenez d'autres articles, vous constaterez, par exemple, qu'en ce qui concerne notre secteur de l'industrie, la commission peut exercer une énorme influence sur le secteur de la transformation des produits laitiers, et fort heureusement, elle préfère utiliser ces pouvoirs avec beaucoup de discrétion.

La manière dont le programme national de commercialisation du lait est rédigé et signé par les diverses provinces et les groupes de producteurs de celles-ci fait que les risques d'abus sont extrêmement faibles, pour ne pas dire impossibles.

M. Benoit: À en juger par votre réponse, cette crainte est exagérée. Six provinces vous en ont déjà fait part.

M. Matte: Cela demeure toujours une préoccupation. Je crois qu'on peut dire que tous ceux qui assistent à une réunion de la Commission canadienne de gestion des approvisionnements de lait ne manqueront pas d'entendre ces craintes exprimées par les neuf provinces signataires. Donc, le système de freins et de contrepoids entre immédiatement en jeu.

Sur le plan pratique, je vous dirai très franchement, et même un peu brutalement, que la question ne se pose même pas.

M. Benoit: Pourquoi donc les provinces continuent-elles à s'inquiéter?

M. Matte: Encore une fois, je vais vous paraître peut-être un peu irrévérencieux, mais à mon avis, parmi les personnes qui examinent le système de gestion des approvisionnements de lait, il y en a très peu qui comprennent comment il fonctionne et comment les freins et contrepoids entrent en jeu.

Une fois qu'ils participent à ce processus, ceux qui ont la tâche très difficile d'assister aux réunions du CCGAL se rendent très vite compte de l'importance des pouvoirs réels qu'ils détiennent. N'oubliez pas que parmi les systèmes de régulation de l'offre, celui-ci prend ses décisions à l'unamité et a décidé de continuer à le faire - je parle bien d'unanimité et non de consensus. Dans la pratique, chaque province a donc un droit de veto sur les décisions du CCGAL.

C'est pourquoi je dis que, si je comprends ces inquiétudes, dans la pratique, elles sont totalement injustifiées.

M. Benoit: Merci.

M. Vanclief: Monsieur le président, je voudrais remercier très brièvement M. Matte et M. Nadeau d'être venus ce matin et de nous avoir montré, ainsi qu'à l'ensemble de l'industrie, l'importance du fait que la décision de s'engager sur cette voie a été prise uniquement par le secteur concerné afin de lui permettre d'exploiter au maximum les débouchés qui s'offrent actuellement.

En ce qui concerne les remarques faites au sujet du dernier point, je remercie M. Matte de sa clarté et de sa franchise. Ces craintes existent toujours en effet, mais réponse leur a été donnée, monsieur le président, et dans la pratique, elles n'ont aucune chance de pouvoir se concrétiser.

[Français]

M. Chrétien: Vous êtes des représentants du Conseil national de l'industrie laitière.

Évidemment, en ce qui nous concerne, mon collègue de Lotbinière et moi allons donner notre appui au projet de loi C-86. L'étude article par article de ce projet de loi va bien se dérouler puisqu'on ne présente pas d'amendements. Il y a seulement deux amendements qui nous sont parvenus jusqu'à maintenant. Alors, ça va très bien aller.

.0955

Mais il y a quelque chose qui me «chicote». Nous avons, dans l'industrie laitière, le principe de la gestion de l'offre. Il n'y a pas plus de 15 minutes, nous avions derrière nous un groupe de producteurs laitiers de la région de Lotbinière qui approuvaient l'utilisation de la somatotropine bovine et qui nous disaient que l'usine de transformation de Victoriaville devait importer présentement du lait des États-Unis parce qu'on en manque.

Si cela avait été seulement ce matin, j'aurais peut-être fait semblant de ne pas entendre, mais la semaine dernière, une usine de transformation de l'est de Montréal a fait des démarches à mon bureau pour poser ce même genre de question. On manque de lait. C'est de la classe 5, allez-vous me dire, mais il en manque. Lundi matin, la députée de Drummond, la circonscription voisine de Lotbinière, a rencontré un autre transformateur de lait qui se plaint d'un manque de matière première, le lait dans son cas.

Alors, on fait la gestion de l'offre, soit. Je suis un défenseur de la gestion de l'offre, mais il semblerait que la demande soit plus forte que l'offre.

Trois remarques m'ont été faites en l'espace d'une semaine de la part de transformateurs, peut-être par voie contournée comme ce matin, par un producteur agricole qui me rapportait ce qui se passait à l'usine Lactantia dans le parc industriel de Victoraville.

Évidemment, on s'éloigne un peu du projet de loi C-86, mais c'est quand même relié directement à l'industrie laitière. Est-ce seulement dans cette région qu'on souffre d'un manque de lait ou est-ce chronique partout?

M. Matte: Bonne question! Cependant, soyons très précis: il n'y a aucun lait cru importé au pays pour transformation. Ça ne se produit pas. Que les entreprises disent qu'elles aimeraient en obtenir, ça va de soi.

Le système canadien a été mis en place pour satisfaire à la demande canadienne basée sur la consommation de gras, de beurre. Le débat est constant et ne disparaîtra jamais, à savoir si, effectivement, il y a manque de ressources laitières dans l'ensemble du pays ou sur une base régionale. Il est très clair qu'on peut manquer de matière première sur une base régionale sans qu'il y ait pour autant une pénurie dans le système national. C'est ce qui se produit assez régulièrement, surtout dans les classes résiduelles comme la classe 5 ou les classes du lait évaporé ou du beurre, en particulier. L'autre problème qui fait surface, c'est que les entreprises se concurrencent.

Quand on parle de gestion de l'offre, on parle de la production primaire, de la production à la ferme. La production du produit n'est pas contingentée. Ça se fait par une détermination des directeurs d'entreprises qui décident quel volume de produit ils vont produire dans l'usine a, dans l'usine b, selon leur décision sur les marchés.

Donc, on peut avoir à tout moment une pénurie dans un type de production ou dans un autre. Ça fait partie du système et c'est regrettable. Les entreprises demandent toujours plus de lait, mais ça ne veut pas nécessairement dire qu'il y a un manque dans le système parce que les entreprises se concurrencent pour avoir leur part du marché. Il faut faire attention de ne pas confondre les deux.

M. Chrétien: Vous placez votre tête sur le billot en disant, ce matin, qu'il n'y a aucune importation de lait cru des États-Unis.

M. Matte: Certainement pas.

M. Chrétien: Vous êtes certain de ça? De crème non plus?

M. Matte: Si ça se fait, c'est clairement illégal et ce n'est pas dans le système.

.1000

Je peux vous dire que si le soupçon existe, il sera examiné par les forces de la loi.

M. Chrétien: À votre connaissance, est-ce qu'on a déjà poursuivi des transformateurs qui auraient importé illégalement des camions-citernes remplis de crème 35 p. 100?

M. Matte: Je crois que cela s'est déjà fait, oui.

M. Chrétien: Est-ce que la pénalité est importante?

M. Matte: Je ne saurais vous le dire. Je ne le sais pas. Il y a eu aussi des importations de mélanges de matières premières qui étaient absolument légales, qui ont été reconnues et qui ont été arrêtées, simplement par pression. Ce n'était pas illégal, mais cela a été arrêté.

M. Chrétien: Dans quelle province?

M. Matte: Cela s'est fait dans la province d'Ontario. En général, c'est à l'industrie de la transformation laitière, dans n'importe quelle province, de voir à ce que le système demeure en place. Sinon, cela devient le chaos au niveau du marché.

M. Chrétien: Si on recule de cinq ans et qu'on considère les prévisions les cinq années à venir, on a une balise de dix ans. Pour ce qui est passé, ce serait une rétrospective de l'augmentation ou de la diminution de la consommation de produits laitiers et pour ce qui est des années à venir, ce serait une projection que vous pourriez faire.

M. Matte: L'industrie laitière est une industrie «mature». L'industrie travaille très fort à maintenir un taux de croissance de consommation qui reflète la croissance de la population. Elle y réussit avec difficulté.

Actuellement, par exemple, les marchés de la nature en général, dans les provinces, sont à la baisse, avec quelques exceptions seulement au cours des derniers mois. C'est une bataille constante pour convaincre les consommateurs de la valeur du produit. C'est pourquoi il y a tellement de controverse, par exemple sur la somatotropine. En dépit du fait que les produits laitiers sont une bonne valeur, les consommateurs considèrent qu'ils sont chers. Que ce soit vrai ou non, c'est la perception du consommateur. Aujourd'hui, il faut faire un effort de marketing majeur pour avoir une influence au niveau des consommateurs.

M. Chrétien: Je vous remercie.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Matte, d'avoir bien voulu comparaître ce matin. Nous vous en savons gré. Je suis certain que, dans un proche avenir, vous voudrez bien répondre aux membres de ce Comité qui ont encore des questions à vous poser au sujet de la somatotropine. Malheureusement, nous ne pouvons pas le faire aujourd'hui. Merci encore d'être venu.

Chers collègues, continuons. Nous allons entendre aujourd'hui le secrétaire parlementaire du ministre, monsieur Vanclief, et les représentants de la Commission canadienne du lait. Ils sont venus répondre aux questions que vous voudrez peut-être poser au sujet du projet de loi C-86 avant que nous ne passions à son examen article par article.

Monsieur Benoit, pour commencer, voulez-vous poser à M. Vanclief la même question qu'à M. Matte?

M. Benoit: Je pourrais bien sûr lui demander une réponse sur le même point.

J'ai demandé à M. Matte s'il était possible que ce projet de loi donne assez de pouvoir à la Commission canadienne du lait pour empiéter sur les compétences provinciales. C'est une crainte dont on m'a déjà fait part. Le libellé actuel inquiète les provinces.

.1805

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Je crois que M. Matte a déjà clairement expliqué la situation concernant les préoccupations qui ont déjà été exprimées et qui vont sans doute continuer de l'être au sujet du processus décisionnel du Comité canadien de gestion des approvisionnements de lait. Il nous a expliqué très clairement que, même si certains ont des craintes à ce sujet, leurs préoccupations ne sont ni réalistes, ni justifiées et, par conséquent, il ne faut pas voir cela comme un problème.

M. Prégent voudrait peut-être ajouter quelque chose, étant donné qu'il est très bien placé pour en parler.

M. Gilles Prégent (président, Commission canadienne du lait): Il n'est pas rare que les provinces aient des craintes au sujet du respect de leurs compétences. Nous en sommes très conscients, et c'est la raison pour laquelle nous en avons parlé avec des juristes représentant toutes les provinces.

Nous savons par exemple que le ministre de l'Alberta a fait des observations tout à fait justifiées à ce sujet et que la province de la Saskatchewan a également fait état de ses préoccupations. Je pense que les autres provinces étaient cependant satisfaites de l'information que nous leur avons fournie.

Il faut toujours se rappeler que, quels que soient les pouvoirs prévus dans un projet de loi ou une loi du Parlement, ceux-ci sont toujours limités par les termes des articles 91 et 92 de la Constitution, qui énoncent clairement que le commerce interprovincial est une responsabilité fédérale et que le commerce intraprovincial est une responsabilité exclusivement provinciale.

Il n'est donc pas nécessaire de préciser dans chaque loi du Parlement que tout commerce intraprovincial relève exclusivement de la responsabilité provinciale. C'est sous-entendu dans cette loi, comme dans toutes les lois du Parlement ou des assemblées législatives. Voilà le point de vue juridique.

Sur le plan pratique, le témoin précédent vient de vous expliquer la façon dont le Comité de gestion des approvisionnements de lait prend ses décisions sur l'exercice de ces pouvoirs. Je peux vous assurer que les neuf provinces - comme nous le savons tous, Terre-Neuve n'est pas visée par l'entente - sont représentées autour de la table, y compris par leurs gouvernements. Toute entente doit être unanime, alors vous comprenez bien que, si la commission voulait dépasser les pouvoirs prévus par la loi, neuf provinces ne tarderaient pas à réagir.

Je peux vous assurer que nous attachons beaucoup d'importance à cette question. Nous veillons à ce que le comité non seulement n'outrepasse pas ses pouvoirs, mais ne donne pas l'impression qu'il le fait.

Il reste cependant une responsabilité fédérale qui doit être visée par les mesures que nous avons prises, à savoir le commerce interprovincial qui, comme nous l'avons indiqué lors d'audiences précédentes, représente entre 2 et 3 p. 100 du commerce interprovincial du lait. Il est donc essentiel de pouvoir agir à ce niveau et d'avoir les pouvoirs nécessaires pour exercer ces fonctions au niveau interprovincial.

[Français]

M. Chrétien: Avant de vous formuler ma première question, je dirai que je n'ai pas très bien saisi ce que vous vouliez dire sur l'unanimité.

.1010

Présentement, six provinces ont ratifié l'entente. Il en reste trois à venir. Vous avez parlé de l'unanimité pour prendre une décision. Pourriez-vous reprendre rapidement, s'il vous plaît? C'est nouveau pour moi.

M. Prégent: Deux ententes ont été signées récemment par des représentants des parties autour d'une table. Il faut dire que ces ententes, même si elles ont reçu l'approbation des représentants de toutes les parties, n'ont pas encore été signées par les ministres. Abstraction faite de cela, il y a deux ententes qui ont été signées récemment pour mettre en place les modifications que l'on veut apporter au système. Le système est en place depuis 30 ans.

À la base, il y a une entente interprovinciale qu'on appelle le Plan national qui, elle, a été signée il y a 25 ou 30 ans par toutes les provinces canadiennes sauf Terre-Neuve, bien sûr. Le système, au cours des 25 ou 30 dernières années, a été géré par un comité de gestion qui, lui, requiert des consensus pour agir. Les décisions, lors des réunions de ce comité que la Commission préside - et seulement à titre de président du Comité - sont prises autour d'une table où toutes les provinces sont présentes, de même que les représentants des producteurs et des transformateurs. Les décisions sont prises de façon unanime ou selon des consensus qui reflètent l'unanimité.

M. Chrétien: Ce sont des consensus?

M. Prégent: Oui. Il n'y a pas d'expression d'opinion contraire.

M. Chrétien: L'entente entre les producteurs laitiers de chacune des provinces a été ratifiée par six provinces, à ce que je sache. On semblait dire, jeudi passé, au Sous-comité de l'agriculture, que la Colombie-Britannique était sur le point - je ne sais pas si c'est fait - de signer, si bien qu'il ne resterait que la Saskatchewan et l'Alberta, si ce n'est déjà fait. Si ce n'était pas déjà fait pour les deux ou trois provinces qui restent, pourriez-vous nous dire quelles sont les raisons majeures qui empêchent les provinces de l'Ouest de ratifier l'accord?

M. Prégent: Si vous me le permettez, j'aimerais préciser auparavant que toutes les provinces, sauf Terre-Neuve, ont signé un accord en vue d'établir l'amplitude du pool. On a une entente de base signée par neuf provinces - je mets de côté la Colombie-Britannique qui ne sait pas encore à laquelle des deux ententes elle va adhérer - qui permet d'établir un pool et des nouvelles classes spéciales partout. C'est accepté par tout le monde. Il n'y a pas de problème. L'entente des six, c'est pour aller plus loin que ce pool de base, pour faire un pool pour tout le lait. C'est la seule différence entre les deux, mais il faut bien préciser que même l'Alberta et la Saskatchewan ont signé l'entente de base et vont se joindre au pool de classes spéciales.

.1015

M. Chrétien: Le fait que l'Alberta et la Saskatchewan ne veuillent pas aller plus loin dans le pool commun des autres provinces peut-il donner un croc-en-jambe aux six ou sept autres provinces dans le sens où cela pourrait être un frein à leur façon actuelle de procéder?

M. Prégent: Je ne crois pas que cela empêche les six ou les sept provinces d'accomplir ce qu'elles veulent faire. Les six provinces sont bien conscientes de l'attitude des autres provinces. Elles savent que l'berta et la Saskatchewan ne se joindront probblement pas pour les quelques premières années à un pool total, mais elles vont mettre en place leur système de toute façon. Elles ont pris l'engagement de le faire et elles vont avoir les moyens de le faire à compter du 1er août.

M. Chrétien: Monsieur Prégent, en tant que président de la Commission canadienne du lait, ne croyez-vous pas que cela pourrait nuire à la production laitière des provinces qui refuseraient d'y adhérer?

M. Prégent: Il est bien certain qu'il serait préférable, comme la Commission et les six provinces le reconnaissent d'ailleurs, que toutes les provinces fassent partie du même pool, un pool visant tout le lait. C'est sûr que l'on préférerait avoir des règles semblables partout.

Cela étant dit, cela ne nous empêche pas du tout d'atteindre les buts que nous recherchons et qui nous permettent de remplir nos obligations vis-à-vis de nos accords internationaux. Même si l'Alberta, la Saskatchewan et peut-être la Colombie-Britannique décidaient de ne jamais - je ne fais qu'une hypothèse - se joindre au groupe des six et qu'elles participaient seulement au pool des classes spéciales, cela nous paraîtrait suffisant pour remplir nos obligations en vertu des traités internationaux. C'est pourquoi on fait tous ces changements et ces nouvelles ententes.

M. Chrétien: Les six provinces produisent quel pourcentage de lait produit au Canada?

M. Prégent: 80 p. 100.

M. Chrétien: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

M. Vanclief: Je voudrais faire une dernière observation en guise de récapitulation. Je tiens à répéter que nous avons longuement discuté de ce projet de loi, des changements à faire au sein de l'industrie laitière, du système actuel des prélèvements par rapport à un système de mise en commun de sorte qu'on atteigne le même objectif de manière différente, mais sans effectuer un prélèvement auprès des producteurs et avoir ensuite à leur verser un remboursement, etc.

En ce qui concerne une certaine proportion du lait, à savoir les classes spéciales utilisées par l'industrie de la transformation et de la surtransformation pour les produits d'exportation, tous sont d'accord pour mettre en commun la totalité du lait dans toutes les provinces. Mais six provinces sont d'accord pour aller encore plus loin. Quant aux autres, l'une d'entre elles envisage de le faire, selon la situation dans cette province.

Toutes les provinces sont toutefois d'accord sur la question principale qui fait l'objet du projet de loi C-86, mais je vous fais remarquer que ce projet de loi permet à l'industrie d'aller encore plus loin lorsqu'elle sera prête à le faire pour la mise en commun de tout le lait.

Le président: Merci, monsieur Vanclief.

Chers collègues, êtes-vous maintenant prêts à examiner le projet de loi?

.0915

L'article 1 est adopté

Article 2

M. Vanclief: Monsieur le président, lors de la dernière réunion, nous vous avons remis deux amendements de forme visant l'article 2. Je crois qu'on a déjà fait circuler les documents en question.

Il s'agit d'amendements de forme qui modifient légèrement la formulation pour la rendre plus claire. Je recommande donc que le comité procède immédiatement à l'adoption de ces amendements, monsieur le président.

Le président: Quelqu'un voudrait-il proposer les deux amendements en question?

[Français]

M. Chrétien: Voulez-vous aller porter les deux amendements à l'interprète, s'il vous plaît?

[Traduction]

Le président: M. Collins propose que l'article 2 du projet de loi C-86 soit modifié par substitution, à la ligne 21, page 1, de ce qui suit:

Est-ce que tout le monde a reçu une copie de l'amendement?

Tous ceux qui sont pour?

[Français]

M. Chrétien: Monsieur le président, j'aurais une question à poser sur l'amendement. Je ne voudrais pas ralentir les travaux, mais c'est bien celui où il est proposé que l'article 2 du projet de loi C-86 soit modifié par substitution, à la ligne 21, page 1, de ce qui suit:

Tout d'abord, monsieur le président, vous allez me dire une chose une fois pour toutes. Au sujet du projet de loi C-86, puisque c'est de cela qu'il s'agit, est-ce que c'est la version anglaise ou la version française qui prédomine ou si les deux sont sur le même pied?

[Traduction]

M. Vanclief: Comme les deux langues officielles sont sur un pied d'égalité, monsieur le président, il me semble important de s'assurer que le sens des versions anglaise et française soit le même. Si tel n'est pas le cas, s'il y a un glissement de sens, il me semble important d'y apporter les corrections nécessaires.

[Français]

M. Chrétien: Ici, pour le bien du projet de loi C-86, je propose - je ne sais pas si je suis conforme aux principes du Comité de l'agriculture - qu'on ajoute quatre mots et qu'on biffe le mot «pour». Alors, je répète:

[Traduction]

M. Vanclief: Monsieur le président, j'aimerais demander à M. Prégent, à M. Barton et à nos juristes de nous dire ce qu'ils en pensent. Je ne suis pas en mesure de porter un jugement sur l'équivalence des deux versions, mais j'insiste une fois de plus, monsieur Chrétien, sur le fait qu'il importe que les deux versions soient aussi proches que possible. Je suppose que c'est justement votre intention.

.1025

Monsieur Chrétien est donc d'avis que la version française ne correspond pas à la version anglaise; c'est bien cela?

Une voix: Non.

Le président: Peut-être pourrions-nous demander à nos attachés de recherche de réagir à la proposition.

[Français]

M. J.-D. Fréchette (recherchiste du Comité): Je comprends votre amendement, mais si vous poursuivez la lecture en français, on dit:

Une voix: C'est pour être plus sûr.

M. Fréchette: En fait, quand on dit «de ces produits l'argent provenant de la commercialisation», il s'agit bien des revenus de la commercialisation et de la mise en commun du lait et de la crème. Alors, on dit deux fois la même chose dans la même phrase.

M. Chrétien: Est-ce que vous voyez un mal à cela?

M. Fréchette: Je n'y vois aucun mal. Tout ce que je peux dire, c'est que je ne pense pas qu'il serve à grand-chose de répéter deux fois qu'il faut mettre en commun l'argent ou les revenus, pour reprendre votre expression, de la commercialisation. En anglais, on fait une distinction. M. Vanclief peut me corriger. Premièrement, on met en commun le lait.

[Traduction]

D'abord, on parle de la mise en commun du lait et de la crème, et ensuite de la mise en commun des revenus.

[Français]

Et ensuite on met en commun les sommes d'argent.

[Traduction]

C'est ce qu'on dit en français. D'abord on met en commun le lait et la crème, et ensuite on met en commun les revenus.

M. Vanclief: Oui, c'est exact.

M. Fréchette: Le texte de la version française est exactement le même. Il faut d'abord mettre en commun le lait et la crème, et ensuite, mettre en commun les revenus.

[Français]

On distribue aux producteurs de ces produits l'argent provenant de la commercialisation.

[Traduction]

On pourrait le traduire ainsi: «On distribue l'argent provenant de la mise en commun du lait et de la crème, qui constitue un revenu mis en commun».

M. Vanclief: qui provient de la commercialisation des produits.

M. Fréchette: Oui, c'est exact.

Le président: Monsieur Chrétien, est-ce que cette explication vous satisfait?

[Français]

M. Chrétien: Écoutez, je préférerais que ce soit plus clair et, pour cela, je souhaiterais grandement voir ces quatre mots remplacer le mot «pour». Je ne suis pas un linguiste chevronné, bien sûr, mais si on me garantissait formellement que cela veut dire exactement la même chose, monsieur Fréchette, je me plierais volontiers à votre jugement.

M. Fréchette: Je ne peux pas vous donner de garanties formelles. Tout ce que je peux vous dire, c'est que si vous proposez l'amendement en français, vous ne mettrez plus en commun le lait et la crème; vous allez seulement mettre en commun les revenus. Votre amendement va faire que dans tout le texte français, on ne va avoir que les revenus; jamais le lait et la crème ne seront mis en commun.

M. Chrétien: On va le biffer, à ce moment-là.

[Traduction]

L'amendement est adopté

M. Vanclief: Il y en a un autre, monsieur le président.

.1030

Le président: M. Steckle propose que l'article 2 du projet de loi C-86 soit modifié par substitution, aux lignes 20 à 22, page 2, de ce qui suit:

M. Vanclief: On ajoute ici les mots: «dans le commerce international et». Il s'agit simplement de clarifier de quoi on parle.

[Français]

M. Chrétien: Donnez-moi quelques instants pour que je me situe parce qu'il y a un mot qui, en français, m'apparaît encore une fois très douteux. C'est le mot «dans», à la deuxième ligne. C'est à la ligne 20. Je me réfère à:

Voici ce que j'aurais à suggérer. J'aimerais avoir l'avis de M. Fréchette, si vous me le permettez, monsieur le président. Alors, je reprends la lecture de l'amendement:

M. Fréchette: Peut-être qu'il faudrait demander à un linguiste ou aux interprètes. Je dois avouer que cela fait un petit peu bizarre de lire le texte en français. Je ne sais pas si c'est un problème de traduction, mais «pour assurer la compétitivité des produits laitiers dans le commerce international», c'est douteux comme formulation française.

Est-ce que je peux me permettre une remarque? Est-ce qu'on ne pourrait pas plutôt dire: «sur la scène internationale»? Il y aurait deux formulations possibles: «pour assurer la compétitivité internationale des produits laitiers et pour promouvoir» et on éliminerait alors «dans le commerce international», ou encore «pour assurer la compétitivité des produits laitiers sur la scène internationale».

M. Prégent: Quant à moi, je préférerais votre deuxième proposition: «sur la scène internationale».

[Traduction]

Le président: Chers collègues, si vous êtes d'accord pour examiner un sous-amendement, nous allons demander à nos attachés de recherche de préparer quelque chose et nous y reviendrons tout à l'heure. C'est-à-dire que nous allons sauter l'article 2 et y revenir par la suite. Je tiens à remercier nos interprètes de leur contribution.

L'amendement est réservé

L'article 2 est réservé

Article 3

M. Benoit: J'ai déjà posé mes questions et exprimé mes préoccupations à ce sujet. J'ai l'intention d'intervenir encore à l'étape du rapport, et par conséquent, je vais m'en tenir là pour l'instant. Je n'ai pas d'amendement à proposer.

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Les articles 3 à 8, inclusivement, sont adoptés.

Le président: Nous allons faire une minute de pause.

Le président: Nous avons maintenant un projet d'amendement à proposer aux membres du comité.

[Français]

Le greffier du Comité: Le sous-amendement, monsieur Chrétien, se lirait comme suit. Il est proposé que l'article 2 du projet de loi C-86 soit modifié par substitution, aux lignes 20 à 22, page 2, de ce qui suit:

M. Chrétien: Parfait! Est-ce que cela conviendrait à tout le monde?

[Traduction]

M. Charles Birchard (directeur, planification stratégique, politique et communications, Commission canadienne du lait): Monsieur le président, avez-vous dit que c'est à la page 3?

Le président: Non, à la page 2.

M. Vanclief: Aux lignes 20 à 22?

[Français]

Le greffier: Aux lignes 20 à 22 en français.

M. Birchard: Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît?

Le greffier: L'amendement se lirait comme suit, et j'inclus le sous-amendement qui a été fait:

M. Chrétien: C'est bon.

[Traduction]

Le sous-amendement est adopté

L'amendement est adopté

L'article 2, modifié, est adopté

Le président: Le titre est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Le projet de loi est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Dois-je faire rapport du projet de loi, modifié, à la Chambre?

Des voix: D'accord.

Le président: Chers collègues, je vous remercie. Nous avons réussi à finir notre travail beaucoup plus rapidement que nous pensions pouvoir le faire.

La séance est levée.

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