[Enregistrement électronique]
Le jeudi 27 avril 1995
[Traduction]
La présidente: La séance est ouverte. Bonjour à vous tous.
Avant de commencer, je voudrais expédier certaines autres affaires du comité. J'aimerais rappeler aux membres du comité la question de l'impression des témoignages, étant donné qu'on a posé beaucoup de questions à ce sujet. Le Bureau de régie interne a décidé que les fascicules de comités ne comporteront plus les transcriptions des témoignages, à partir de cette semaine. Vous aurez accès aux transcriptions des témoignages par ordinateur, dans une période d'environ trois jours ouvrables, par l'entremise du réseau PubNet. En fait, tout le monde a reçu un avis à ce sujet.
Je dois vous rappeler à tous que ce processus est nouveau, et il a fallu former les commis à la transcription de la Chambre très rapidement. Il est possible, et en effet il est très probable, qu'ils ne pourront pas respecter le délai de trois jours tout de suite. Je vous demande de faire preuve de patience.
Les séances à huis clos où nous traitons des travaux futurs ne seront pas transcrites, ni par écrit, ni sur ordinateur. Désormais, les membres ne recevrons pas une copie papier des bleus, comme c'était le cas par le passé.
Enfin, afin d'éviter la confusion et de faciliter le travail des commis à la transcription, je vais vous nommer chaque fois que je vous donne la parole, et j'encourage les membres de parler un à la fois. Si vous voulez dialoguer entre vous, auriez-vous la bonté de faire vos remarques à la présidente. Je vous rappelle tout simplement de faire preuve de civilité, une qualité que avez tous.
Je voudrais également demander votre approbation du budget du sous-comité.
[Français]
M. Nunez (Bourassa): Madame la présidente, à propos de votre première déclaration, je dois vous faire part de ma frustration et de mon insatisfaction quant à la décision prise par le Comité.
Je ne suis pas du tout d'accord. Je pense que nous étions bien servis et je ne vois pas de justification à ce changement. Je pense que ça va surtout porter préjudice aux francophones des comités, parce que la plupart des débats se tiennent en anglais. Je devais le dire pour que ce soit bien noté.
La présidente: Je veux aussi que vous notiez que c'est le Bureau de la régie interne, où siège un représentant du Bloc québécois, si je ne me trompe, qui a pris cette décision. C'est quand même enregistré.
[Traduction]
Monsieur Knutson, vouliez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?
M. Knutson (Elgin - Norfolk): Nous demandons... Combien?
La présidente: Il s'agit de 14 600$ pour couvrir à la fois Diminishing Returns, le rapport de l'Institut C.D. Howe ainsi que les frais des conseillers en immigration.
M. Knutson: Le coût principal concerne les témoins à Ottawa pour...
La présidente: C'est 9 000$ et 1 500$.
M. Knutson: Très bien.
La présidente: Si vous voulez des exemplaires, nous en avons.
Tout ce dont j'ai besoin aujourd'hui c'est votre accord pour présenter ce budget. D'accord?
Des voix: D'accord.
La présidente: Nous passons maintenant à notre ordre du jour.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme Avvy Go, la directrice exécutive de la Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic.
Je crois que ce n'est pas votre première visite, madame Go.
Mme Avvy Go (directrice exécutive, Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic): En effet.
La présidente: Dans ce cas, soyez de nouveau la bienvenue.
Mme Go: Je vous remercie infiniment de m'avoir offert cette occasion de venir vous parler d'une question d'une grande importance pour beaucoup de femmes dans ma communauté et dans les communautés desservies par notre clinique.
Comme nous le disons dans notre mémoire, que j'ai transmis à temps pour qu'il soit traduit, cette fois, je limiterai mes remarques ce matin aux questions concernant l'examen des demandes de droit d'établissement pour des motifs humanitaires. Ce n'est pas parce que je pense que les deux autres questions ne sont pas importantes. Nous voulons simplement confirmer notre adhésion aux positions présentées à votre comité par le Conseil canadien des réfugiés. Nous croyons nécessaire de renforcer les arguments déjà présentés par le CCR.
J'aimerais donc limiter mon témoignage au troisième point de votre mandat.
Pour commencer, j'aimerais vous demander de bien comprendre que la discrimination existe toujours dans notre société et que la discrimination fondée sur le sexe et la race, à notre très grande consternation, reste toujours une réalité pour beaucoup de réfugiées et d'immigrantes.
La violence conjugale est une illustration flagrante des diverses formes de discrimination dont sont victimes les femmes. La violence conjugale existe parce que les femmes dans notre société continuent à être désavantagées sur les plans social, économique et politique.
Par conséquent, toute politique visant à aider les femmes victimes de violence conjugale doit reposer sur la reconnaissance de ces désavantages et de cette discrimination. Une telle politique doit, au minimum, reconnaître les diverses formes de désavantages dont sont victimes les femmes. D'une manière plus fondamentale, toute politique gouvernementale sur la violence conjugale ne doit en aucune manière favoriser ou renforcer les désavantages dont les femmes sont victimes.
Malheureusement, comme nous le disons dans notre mémoire, la politique d'immigration actuelle ne prend pas en compte les désavantages des immigrantes et des réfugiées victimes de violence conjugale. Nous disons pourquoi dans notre mémoire.
À la page 3 de notre mémoire, nous soulignons certains des critères utilisés dans le soi-disant examen des demandes de droit d'établissement pour des motifs humanitaires.
Ils se fondent en partie sur l'alinéa 3g) de la Loi sur l'immigration qui énonce certains des objectifs fondamentaux de la loi - la protection des personnes déplacées - et aussi sur un article sur la non-discrimination.
Les objectifs sont repris dans le paragraphe 114(2) qui régit le droit d'établissement des personnes qui, autrement, ne se qualifieraient pas en vertu du programme d'admission.
Ces raisons d'ordre humanitaire ne sont définis nulle part dans la loi. Cependant, avec les années, des politiques précisant les paramètres d'application de ces principes ont été élaborées. Nous en parlons brièvement à la page 4 de notre mémoire - nous parlons de la manière dont les tribunaux ont réinterprété ces raisons d'ordre humanitaire.
Malheureusement, les modifications apportées au paragraphe 114(2) nous obligent à rappeler que la soi-disante révision pour des raisons d'ordre humanitaire ne s'est pas faite le moins du monde de façon humanitaire. Dans le contexte des considérations humanitaires, la question de la dépendance économique tient trop de place.
Nous estimons que cette exigence d'autonomie economique pour avoir droit à cette révision pour des raisons d'ordre humanitaire est fondamentalement discriminatoire car elle ignore les désavantages des femmes victimes de violence.
Nous citons dans notre mémoire un article de Felicite Stairs et de Lori Pope paru dans le Journal of Law and Social Policy. Ce n'est qu'un des nombreux articles écrits sur la question au cours des années. Cet article, comme beaucoup d'autres, montre que globalement les femmes, au Canada comme ailleurs, sont socialement et économiquement désavantagées par rapport aux hommes. D'une manière générale, les chances d'emploi sont moindres chez les femmes et ces dernières ont tendance à être confinées aux emplois les moins bien payés.
Ce sont toujours les femmes qui dans la grande majorité continuent à s'occuper de la famille et pour cette raison beaucoup d'entre elles restent chez elles. Dans notre société, le travail à la maison n'a pas la même valeur que le travail à l'extérieur. L'accès à des garderies étant loin d'être universel, les femmes n'ont pas vraiment le choix entre rester chez elles ou travailler à l'extérieur.
Tous ces problèmes renforcent les désavantages auxquels les femmes sont aujourd'hui confrontées tant sur le plan économique que social. Nous finissons par nous demander combien de fois il faudra rappeler que les désavantages économiques de ces femmes sont directement liés à la violence dont elles sont victimes de la part de leur conjoint. Pendant combien de temps devrons-nous contester ces politiques gouvernementales qui renforcent ces désavantages avant que les choses ne changent?
Avec l'instauration de nouveaux droits exigés pour l'établissement, on ne peut que s'attendre à ce que les femmes éprouvent davantage de difficultés à obtenir l'asile ou toute autre forme de protection au Canada. Ces nouveaux droits sont discriminatoires à l'égard des femmes parce qu'en tant que groupe économiquement défavorisé, elles auront plus de difficultés à obtenir le droit d'établissement au Canada en raison de cette nouvelle taxe.
Je pourrais vous citer de nombreux cas chez mes clientes. Parmi celles-ci, les mères célibataires sont celles qui ont le plus de difficultés à trouver l'argent nécessaire.
De plus, si le gouvernement décide d'instaurer un système de cautionnement pour les parents, les femmes victimes de violence auront encore plus de mal à échapper à cette violence car les coupables auront encore plus de raisons de les en empêcher.
Nous croyons que des solutions à ce problème doivent et peuvent être trouvées. Nous devons trouver une solution parce que la politique et la loi actuelles sont discriminatoires à l'égard des femmes en général et à l'égard des femmes de couleur en particulier.
Beaucoup plus de femmes que d'hommes ont besoin d'être accueillies comme réfugiées et plus d'hommes que de femmes le sont au Canada. La majorité des immigrantes sont parrainées parce que les critères d'admission insistent sur des compétences et des qualités matérielles définies par les hommes. Plus de femmes que d'hommes sont donc assujetties au contrôle de leurs répondants et elles sont plus susceptibles de devenir les victimes de violence conjugale et de problèmes de parrainage.
Tant que notre politique d'immigration et notre politique concernant les réfugiés demeureront discriminatoires en raison du sexe, d'une manière générale, il faudra prêter une attention particulière aux femmes qui comptent parmi les personnes les plus vulnérables du fait de leur absence de statut. Pour chaque femme victime de violence que notre pays accepte comme immigrante pour des raisons d'ordre humanitaire, il y a des centaines de femmes qui sont rejetées pour une question de fait ou de droit en vertu de notre système courant de sélection.
Pour être fidèle au principe des raisons d'ordre humanitaire, nous devons être prêts à protéger ceux et celles qui le méritent le plus. Tout en reconnaissant la nécessité de maintenir un équilibre entre les préoccupations économiques et humanitaires dans le contexte global de la sélection des réfugiés, un tel équilibre perd sa raison d'être, selon moi, lorsqu'il est question de mesures visant à aider les personnes qui ne peuvent pas faire partie de l'équation. Les femmes, et tout particulièrement les femmes victimes de violence dans les cas de parrainage, en sont un exemple.
Il faut aussi prendre en compte la question de la violence contre les femmes dans le contexte de l'immigration puisque nous la prenons en compte dans d'autres contextes. Si la violence contre les femmes est sanctionnée par notre système de justice criminelle, elle devrait aussi être sanctionnée dans notre système d'immigration et d'accueil des réfugiées. Il ne faut pas que dans ce domaine particulier, la violence conjugale soit considérée comme un élément secondaire. Les femmes se sont trop battu pendant des années pour que la violence conjugale soit reconnue comme une question d'intérêt public.
Je cite un certain nombre de déclarations internationales pour indiquer la nécessité de satisfaire certaines obligations internationales, mais elles sont loin d'être les seules obligations à respecter. Les droits des femmes sont des droits de la personne et par conséquent toute protection accordée aux réfugiés et aux immigrants en raison d'obligations internationales doit être également accordée aux femmes.
Enfin, parce que nous estimons que la question de l'autonomie économique ou du manque d'autonomie économique selon les critères d'une société dominée par les hommes n'a pas sa place dans la révision d'une demande de droit d'établissement pour des raisons d'ordre humanitaire. Nous recommandons en conséquence une interprétation très différente de ces raisons d'ordre humanitaire.
Nous recommandons que le comité permanent demande au ministre de l'Immigration d'élaborer des lignes directrices sur la révision des demandes pour des raisons d'ordre humanitaire afin de traiter particulièrement les cas de femmes victimes de violence conjugale. Ces nouvelles lignes directrices doivent prioriser la sécurité des femmes et des enfants, le cas échéant, dans l'évaluation des demandes de droit d'établissement. Nous recommandons que le ministre fasse appel aux diverses organisations féminines, surtout celles qui traitent avec les victimes de violence, afin de déterminer les facteurs qui doivent être examinés pour évaluer le degré de vulnérabilité d'une requérante.
Tant que ce changement fondamental n'aura pas été accepté, il faut que des mesures de transition soient prises pour que les immigrantes victimes de violence bénéficient de protection. À cette fin, nous recommandons que les femmes qui ne sont plus parrainées par leurs maris ou par leurs conjoints, ou qui sont victimes de violence conjugale, se voient accorder un permis ministériel les autorisant à travailler pour une durée de trois ans. Ces femmes pourraient ainsi parfaire leurs compétences et obtenir un emploi afin de satisfaire aux critères d'établissement. Au bout De ces trois années, on devrait octroyer le droit d'établissement à celles qui ont démontré qu'elles peuvent devenir autonomes.
Ce n'est pas cependant la solution qui a notre préférence. C'est une solution de compromis adoptée par de nombreuses autres organisations de femmes depuis des années.
La présidente: Merci beaucoup, madame Go.
[Français]
Nous donnons la parole à l'opposition d'abord. Monsieur Nunez ou madame Debien.
M. Nunez: Merci, madame Go, de votre exposé qui constitue un brillant plaidoyer pour la cause des femmes en général et aussi en matière d'immigration. Vous avez soumis un des meilleurs mémoires qu'a reçus le Comité. Vous avez beaucoup d'expérience, surtout avec les immigrants d'origine asiatique.
Vous avez mentionné que les droits d'établissement de 975$, que j'appelle la taxe à l'immigration, constituent un obstacle additionnel à l'acceptation des femmes comme immigrantes ou comme réfugiées, surtout les femmes seules avec enfants.
Est-ce qu'il y a eu beaucoup de ces cas dernièrement, après l'établissement de cette taxe le 28 février, et comment avez-vous solutionné le problème? Est-ce que vous avez obtenu des prêts du gouvernement, tel que promis par le ministre?
[Traduction]
Mme Go: Nous avons eu deux de ces cas depuis que la taxe d'établissement a été imposée à la fin de février. En fait, ces deux cas concernaient la catégorie de l'ordonnance de renvoi différé, c'est-à-dire le programme spécial que l'on est en train de mettre sur pied pour aider les revendicateurs du statut de réfugié qui n'ont pas réussi il y a trois ans à obtenir le statut de personnes ayant obtenu le droit d'établissement après qu'ils aient été laissés sans réponse au Canada pendant de nombreuses années.
Dans un de ces cas, nous avons présenté la demande la veille du dépôt du budget, mais elle n'a été reçue que quatre jours après l'annonce. Le dossier nous est donc revenu accompagné d'une lettre disant qu'il y avait maintenant cette nouvelle taxe d'établissement, de sorte qu'il fallait trouver les 975$, sinon ils ne pourraient traiter la demande. Comme il s'agissait d'une mère célibataire qui n'avait pas de travail régulier, elle ne pouvait pas payer immédiatement, car elle n'avait pas l'argent. En fin de compte, elle a réussi à emprunter de l'argent de son propriétaire, de membres de sa famille et de ses amis à l'usine où elle travaillait pour pouvoir payer cette taxe.
Dans l'autre cas, il s'agit d'une femme qui n'a pas encore réussi à trouver l'argent. Nous ne savons pas comment fonctionne le système de prêts et nous attendons de recevoir des renseignements à ce sujet. Nous savons, par l'intermédiaire des médias, que la demande de prêt du réfugié algérien a été rejetée. Nous ne savons pas exactement quels critères sont utilisés à l'heure actuelle, sauf que pour obtenir le prêt, il faut pouvoir prouver qu'on est capable de le rembourser.
Je pense que dans le cas de la mère célibataire, elle ne serait sans doute pas capable de le prouver. Le fait qu'elle ne soit pas en mesure de payer la taxe maintenant montre qu'elle ne serait sans doute pas en mesure de la payer plus tard.
Le programme de prêts nous laisse donc fort sceptiques, mais tout d'abord nous sommes d'avis que la taxe de 975$ ne devrait pas être imposée, car ce sont les mères seules ou les personnes défavorisées du point de vue économique qui auront le plus de difficulté à trouver l'argent. Donc ces gens risquent de ne même pas présenter de demande. Le dossier nous a été renvoyé; le bureau d'immigration ne voulait même pas le traiter parce qu'il n'avait pas reçu les 975$.
Si on accepte que certains groupes comme les femmes sont défavorisés sur le plan économique, alors il faut reconnaître que la taxe a des conséquences préjudiciables pour ces groupes qui sont défavorisés.
[Français]
M. Nunez: Vous n'avez pas abordé, dans votre mémoire, l'application des directives de la CISR sur le terrain. On sait qu'au cours des dernières décennies, il y a eu beaucoup de réfugiés du Sud-Est asiatique, particulièrement de Thaïlande. Des fonctionnaires se sont rendus là-bas pour y sélectionner les réfugiés, principalement en se fondant sur des critères d'adaptabilité au marché du travail et non pas en fonction de la persécution dont pourraient être victimes les femmes à cause de leur sexe, par exemple. Est-ce que vous avez eu l'expérience ou la connaissance de l'application de ces directives à l'étranger, sur le terrain? Est-ce que ces directives favorisent réellement les femmes ou si la préférence est toujours donnée aux hommes?
[Traduction]
Mme Go: Je connais beaucoup moins le processus de détermination du statut de réfugié que le système d'immigration. D'après ce que j'ai lu des lignes directrices et des divers mémoires qui ont été préparés sur cette question, et si on regarde tout simplement les statistiques, je crois comprendre que 80 p. 100 de la population mondiale de réfugiés est composée de femmes et d'enfants. Mais si on regarde le nombre de femmes réfugiées que nous acceptons au Canada, c'est loin d'être 80 p. 100.
Comme je l'ai dit, en général, les hommes ont de meilleures chances d'être acceptés comme réfugiés en raison des critères que nous avons adoptés. Cela n'a rien à voir avec la persécution dont une personne risque d'être victime ou les conditions dans lesquelles les réfugiés doivent vivre. Cela dépend davantage de leur capacité de s'établir au Canada, et d'autres facteurs secondaires. Si le comité veut savoir combien le Canada est vraiment efficace lorsqu'il s'agit de protéger les femmes réfugiées dans le monde, je lui conseille de prendre connaissance de la position qui a été présentée par le ICCR sur la question, ainsi que sa critique du programme «Femmes en détresse».
M. Assadourian (Don Valley-Nord): Merci beaucoup. J'ai vraiment aimé votre exposé. J'ai quelques questions, et vos réponses pourront peut-être m'éclairer ainsi que les membres du comité.
Tout d'abord, le gouvernement ontarien déduit 100$ du chèque d'aide sociale des nouveaux immigrants ou réfugiés. Vous avez mentionné, et je suis d'accord avec vous, que la plupart des réfugiés dans la province ou au pays sont des femmes. Qu'allons-nous faire au sujet de cette déduction de 100$?
Ensuite, à la page 7 de votre rapport, vous utilisez trois expressions pour décrire une même chose: la taxe d'établissement, la taxe d'entrée et la nouvelle taxe. Pourquoi ne pourrait-on pas utiliser une seule expression afin que tout le monde comprenne bien de quoi il s'agit? Nous devrions parler d'une taxe d'établissement. Nous savons que ce n'est pas une taxe d'entrée ou une nouvelle taxe, mais tout simplement une taxe d'établissement.
Enfin, vous mentionnez que le nouveau cautionnement qui sera introduit créera des difficultés, mais vous ne nous dites pas comment vous empêcheriez que l'on abuse du système. Ce cautionnement vise à corriger une erreur dans le système. Le cautionnement est remboursé dès que la personne répond à tous les critères. C'est une question de sécurité pour le gouvernement qui veut éviter les abus. Si vous n'aimez pas le système que nous proposons, qu'avez-vous à proposer à la place?
Je suppose que votre organisme, la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, existe depuis longtemps. Depuis combien de temps existez-vous?
Mme Go: Depuis 1987.
M. Assadourian: Je suis certain que vous avez communiqué avec bon nombre de députés de différents partis politiques depuis toutes ces années. Vous êtes un activiste, ce qui est une bonne chose. Ne croyez pas que je vous blâme. Quel parti a, jusqu'à présent, le mieux reflété vos préoccupations en ce sens que vous seriez à l'aise en disant que si on a telle idée et qu'elle est acceptée, ce sera avantageux pour l'organisme que vous représentez?
Mme Go: Je vais essayer de répondre tout d'abord à votre dernière question. Nous nous considérons comme les défenseurs des femmes immigrantes et réfugiées...
La présidente: Je suis désolée, madame Go, Mme Debien invoque le Règlement.
[Français]
Mme Debien (Laval-Est): Je pense que la question posée par M. Assadourian à Mme Go est inappropriée. C'est presque lui demander une opinion politique, alors que ce n'est pas le but de son témoignage.
La présidente: Je vais laisser à Mme Go la liberté de répondre ou non à la question, comme elle le veut.
Je suis d'accord, toutefois, sur le fait que la question se situe en dehors du sujet à l'ordre du jour. Allez-y.
[Traduction]
Mme Go: J'allais tout simplement dire que même si nous sommes un organisme politique, nous n'avons pas de partialité politique. Peu nous importe vraiment quel parti est au pouvoir, ou la position qu'il prend. Aussi longtemps que l'on continuera à ignorer nos doléances, nous continuerons de notre côté à essayer de nous faire entendre. En réalité pour nous cette question ne devrait pas se poser.
Je vais essayer de me souvenir de toute votre question. La première, si je ne me trompe, concerne la déduction de 100$. Elle vise seulement les immigrants parrainés; les réfugiés n'y sont pas assujettis. Nous avons tenu une conférence de presse le 17 avril, soit le 10ème anniversaire de l'entrée en vigueur de l'article de la Charte sur l'égalité; il s'agissait pour nous, lors de cette conférence d'annoncer que nous allons engager des poursuites contre le gouvernement Ontarien sur cette question. Nous estimons que cette déduction de 100$, et plus, désavantage les immigrants parrainés, qui sont très souvent des parents âgés, des conjoints, la plupart du temps d'ailleurs, des femmes et des enfants.
Cette question est une grande préoccupation pour la collectivité que je dessers, car au cours des dix dernières années la plupart des immigrants parrainés qui arrivaient au Canada provenaient des pays d'Asie, des Caraïbes, etc. Les chiffres de 1993 montrent que bon nombre d'entre eux viennent de Taïwan, de Hong Kong et de Chine, et ce sont ces gens que notre clinique dessert directement. C'est donc une question à laquelle nous allons continuer de nous attaquer, mais d'une façon cette question est liée à celle de l'imposition de cautionnement.
Je reconnais que dans certains cas, les répondants décident de ne pas accorder de soutien aux immigrants parrainés. Certains de mes clients - par exemple les parents âgés - sont victimes de violence. Ils sont victimes de négligence, ou les enfants ont tout simplement décidé de les laisser tomber. Dans un cas en particulier, je me rappelle que les parents se faisaient enfermés à clé dans la salle de bain et étaient victimes de violence de toutes sortes.
Ces cas représentent cependant qu'un tout petit pourcentage des cas de parrainage. Dans la plupart des cas, les répondants ne peuvent plus payer pour les immigrants parrainés à cause de la récession économique. Pour bon nombre de clients qui viennent à ma clinique, c'est plus ou moins la même histoire. Avant que les parents viennent au Canada, les répondants avaient deux emplois, travaillaient à plein temps et à temps partiel pour faire vivre la famille et faire venir leurs parents, etc. Puis, une fois les parents arrivés, ils ont perdu leurs emplois, soit parce que l'usine a déménagé aux États-Unis - et aujourd'hui c'est au Mexique - ou en raison d'une autre restructuration économique dans notre société.
Ce n'est donc pas parce qu'ils le veulent que les répondants ne respectent pas leurs engagements de parrainage. C'est plutôt parce qu'ils ne sont plus en mesure d'accorder un soutien, étant eux-mêmes victimes de la récession économique. C'est ce que confirme le rapport qui a été préparé par Immigration Canada lorsqu'ils ont étudié les questions de parrainage dans la région de Peel. Ils ont constaté tout d'abord que le pourcentage de familles parrainées qui retiraient de l'aide sociale était toujours moins élevé que pour les familles canadiennes en moyenne.
Ils en sont arrivés à la conclusion également que dans la plupart des cas la récession économique était responsable de la rupture de l'engagement de parrainage.
Dans ce cas-là, alors si on met en place un système de cautionnement parce qu'on veut mettre fin à l'abus, on utilise le mauvais instrument, car la plupart du temps il n'y a pas de problème d'abus, les répondants n'abusent pas du système. On se retrouvera donc dans une situation où les gens devront avoir de l'argent pour payer leur cautionnement. Je ne sais pas combien d'argent cela représentera. On m'a donné des chiffres qui variaient de 20 000$ à 100 000$. Je n'ai aucune idée du montant que cela pourra représenter. En fin de compte, on parle ici de montants considérables. on va donc exclure bon nombre de personnes qui ne seront plus en mesure de parrainer un immigrant.
Lorsqu'il y a un parrainage en raison de l'abus, je crois que le cautionnement intervient si les immigrants parrainés prennent le large et demandent à toucher le bien-être social. S'ils ne le font pas, on ne saura pas que le parrainage a été interrompu. Ce qui se passera, c'est que le répondant risquera maintenant de perdre ses 100 000$ ou ses 20 000$ ou je ne sais combien, fera tout ce qu'il pourra pour empêcher les immigrants parrainés de demander le bien-être. Cela se fait déjà dans les cas d'abus, mais le répondant y sera d'autant plus incité qu'il risquera de perdre son dépôt si les parents ou l'épouse se mettent à toucher le bien-être.
Je ne pense donc pas que cela réglera la question des abus. Je pense que les abus ou les interruptions de parrainage deviendront quelque chose de clandestin. On ne constatera plus l'interruption de parrainage car cela se passera à la maison.
La présidente: Je vous demanderais de nous donner des réponses un peu plus brèves.
Monsieur Assadourian, vous voulez bien répéter votre autre question.
M. Assadourian: Vous avez utilisé trois termes pour décrire la taxe d'établissement: vous avez parlé de taxe d'établissement, de taxe d'entrée et de nouvelle taxe. Quel est le bon terme?
Mme Go: Je crois qu'officiellement il s'agit d'une taxe d'établissement, mais très souvent les gens parlent de taxe d'entrée.
M. Assadourian: Vous ne trouvez pas cela trompeur? Ce sont deux choses différentes.
Mme Go: C'est une affirmation politique. Nous disons qu'à notre avis cette taxe d'établissement est malencontreuse et qu'elle impose un fardeau aux gens, en particulier aux immigrants et aux réfugiés. Elle s'applique à tous les immigrants et réfugiés adultes. C'est donc clairement une déclaration politique.
[Français]
Mme Debien: Bonjour, madame Go.
Mme Go: Bonjour.
Mme Debien: Bienvenue à notre Comité. Je voudrais tout simplement réitérer ce que mon collègue, M. Nunez, a dit plus tôt quant à la qualité de votre témoignage et de votre mémoire.
À la page 10, vous faites une recommandation très importante. Vous demandez que le Comité recommande au ministre de l'Immigration d'élaborer des lignes directrices concernant la révision des demandes pour des raisons d'ordre humanitaire, afin de traiter particulièrement les cas des femmes victimes de violence conjugale. J'imagine que vous avez bien réfléchi à la question. J'aimerais savoir quelles devraient être, selon vous, ces lignes directrices. Qu'est-ce que vous incluriez dans ces lignes directrices qui devraient être proposées ou recommandées au ministre?
[Traduction]
Mme Go: Je pense que la première chose serait de préciser la raison de la rupture de l'engagement de parrainage: expliquer pourquoi la femme a quitté le répondant, et si c'est en raison de sévices. Je dirais donc que les abus devraient être la première priorité à examiner pour déterminer si la femme mérite une dérogation à la règle générale en matière d'admission.
La question de la définition des abus est sans doute discutable. À mon avis, il faudrait définir cette notion de la manière la plus large possible car bien des femmes se trouvent dans une situation où elles ne sont pas victimes de sévices physiques, mais où elles subissent des pressions affectives et financières énormes qui les empêchent de s'évader.
On pourra aussi discuter du genre de preuve à fournir. On m'a dit qu'en Australie, il fallait fournir une preuve de condamnation ou de casier judiciaire quelconque. Je ne sais pas si c'est la bonne formule étant donné que la plupart des femmes hésitent beaucoup à demander l'aide de la police quand elles sont victimes de sévices à la maison. Il faut évidemment fournir des preuves, mais d'autres types de preuves, un rapport de médecin, où le témoignage de travailleurs sociaux, de travailleurs d'agences communautaires qui sont en mesure de confirmer la situation.
Je suis sûre que si les femmes savent que, si elles révèlent les abus dont elles sont victimes, elles seront quand même protégées, il y en aura de plus en plus à venir dénoncer les mauvais traitements dont elles font l'objet de la part de leurs répondants et que, grâce à ces témoignages, le problème s'estompera au fil des ans.
[Français]
M. Nunez: Vous avez mentionné l'élément minoritaire racial, ou la minorité visible, comme un obstacle additionnel à l'obtention du statut d'immigrant ou de réfugié. Vous faites partie des minorités visibles comme tous les gens du Sud-Est asiatique. Comment le fait d'appartenir à cette minorité visible affecte-t-il l'obtention du statut de réfugié ou du statut d'immigrant? Est-ce que vous pouvez élaborer un peu là-dessus?
[Traduction]
Mme Go: D'une manière générale ou dans le contexte des «motifs humanitaires»?
[Français]
M. Nunez: Dans le cas des femmes.
[Traduction]
Mme Go: Globalement, dans le contexte d'immigration, l'aptitude à parler la langue est un des critères pour obtenir le statut d'immigrant. Cela crée un obstacle pour les gens qui viennent de pays non anglophones. La question a été déjà soulevée par des groupes qui s'occupent de domestiques, tels que Intercede. Il y a aussi un problème pour les immigrants en général qui viennent de pays où l'anglais n'est pas la première langue.
La première chose, c'est donc que la langue constitue un obstacle majeur. Mais d'une manière générale, ou dans le cas des demandes de révision pour des raisons d'ordre humanitaire, si les immigrants qui sont là ou qui peuvent être victimes de violence conjugale ou d'une rupture de l'engagement de parrainage appartiennent à des minorités raciales, si en plus ils ne parlent pas l'anglais, ils risqueront alors d'être victimes d'autres formes de discrimination en raison de leur race au Canada: moins de possibilités de trouver un emploi; quelles que soient leurs compétences professionelles, ils ne seront pas reconnus au Canada parce que leur diplôme ne sera par reconnu; leur expérience ne sera pas reconnue, et ils ne trouveront pas de travail correspondant à leur degré de compétence et d'éducation, mais ils devront se contenter d'emplois plus médiocres.
Tout cela a été clairement établi dans divers rapports tels que: Accès: Groupe d'étude sur l'accès aux proffessions et aux métiers en Ontario (1989), un rapport réalisé par le gouvernement de l'Ontario.
Tout cela signifie que les immigrants sont ghettoisés et réduits à accepter des emplois de second ordre. Dans ce cas, vous devez prouver que vous êtes capable de vous établir, et si vous êtes une femme confrontée à ce genre d'obstacle, en plus d'être une femme, vous avez de bonnes chances de ne pas être capable de satisfaire aux conditions économiques puisqu'on exige que vous soyez autonome, capable de vous établir et de faire mieux que de travailler simplement dans des restaurants 60 heures par semaine à 4$ de l'heure.
Beaucoup de mes clientes en sont réduits à cela bien qu'elles aient des diplômes ou un niveau d'éducation tout à fait pertinent. On ne reconnaît pas leur éducation, et elles sont donc obligées de faire ce genre de travail. Le jour où il y a rupture du contrat de parrainage, elles ne respectent plus les critères économiques d'établissement.
M. Dromisky (Thunder Bay - Atikokan): Merci pour votre rapport très complet. Il y a toutefois quelque chose qui me dérange.
Nous parlions du droit à acquitter pour l'établissement, les 975$, mais au fond, si l'on regarde ce qu'il faut payer dans les autres pays pour s'y établir, c'est vraiment très peu de chose en comparaison.
Je ne sais pas s'il y a un rapport direct entre le fait d'imposer ces frais d'établissement et l'augmentation de la violence conjugale. Nous savons que certains conjoints qui ont des problèmes psychologiques ou du mal à surmonter leurs frustrations profitent de n'importe quel prétexte pour faire du mal à leurs proches, leurs épouses ou autres.
Il est faux de dire que notre politique favorise la violence faite aux femmes. Soyons très prudents. Cette violence existait, existe et continuera d'exister, sans égard aux excuses qu'on lui donne.
Pour revenir à votre déclaration sur la taxe d'établissement, je reviens tout juste d'une réunion avec le directeur du bureau de Vegreville, à Edmonton. Les prêts sont traités aussi rapidement que possible. Le mécanisme et son fonctionnement ne semblent pas poser grand problèmes.
Vous avez dit que le demandeur doit prouver qu'il est capable de rembourser le prêt, et je trouve cela un peu étonnant. Il n'est guère possible à un client de Hong Kong, de Singapour ou de Taïwan de prouver qu'il sera capable de payer un prêt une fois au Canada, car nul ne sait ce que l'avenir nous réserve.
Je doute donc de cette affirmation et je ne sais pas dans quelle mesure elle est valide.
Mme Go: C'est une très belle question. C'est exactement ce que l'on demande pour déterminer si la personne a le droit à un prêt. Cela se trouve dans la politique. On y dit que seulement les personnes capables de démontrer leur capacité de rembourser pourront profiter de prêts.
C'est donc une excellent question. Si, au départ, vous n'avez pas l'argent nécessaire, comment pouvez-vous prouver votre capacité de rembourser?
Vous devriez peut-être poser la question au directeur de Vegreville et voir quelle est sa réponse.
M. Dromisky: C'est ce que je ferai. Merci.
Mme Go: Pour revenir à votre première question, je ne parlais pas de la taxe d'établissement dans le contexte de avec la violence conjugale. Je parlais de la taxe d'établissement dans le contexte de la demande de statut d'immigrant reçu. Si une femme est victime de sévices, qu'elle veuille quitter son conjoint et présenter une demande de révision pour des raisons d'ordre humanitaire, où peut-elle trouver les 500$ et les 975$?
Sans cet argent, sa demande ne sera même pas traitée. Il lui sera peut-être impossible de s'extirper de cette situation de sévices, peut-être qu'elle le pourra, si elle rompt les liens - ce qui importe, c'est qu'elle ne pourra pas présenter sa demande pour la simple raison qu'elle est dans l'impossibilité de payer les 975$ qui s'ajoutent aux 500$ qu'elle devrait payer à l'heure actuelle.
M. Dromisky: D'accord. Je n'irai pas plus loin dans cette veine.
M. Peric (Cambridge): Madame Go, merci de votre exposé. Permettez-moi toutefois de faire une observation.
Je ne suis pas d'accord avec votre affirmation. Ce n'est pas parce qu'une personne est agressée quelque part que le Canada est obligé de l'accepter et de la protéger. Ces personnes ont bien sûr le droit de présenter une demande et, si elles répondent aux critères, ces demandes seront acceptées.
D'après ce que j'ai compris, l'argent ne pose pas de problème. Si la personne compte suffisamment de points, elle sera acceptée, et ce sera aux fonctionnaires de l'Immigration de s'occuper du remboursement des frais.
Il faut faire la distinction entre les réfugiés et les immigrants ordinaires. Je connais une mère de deux enfants qui était venue de Bosnie comme touriste. Elle a ensuite présenté ici une demande de statut de réfugiée qui a été acceptée. Tout de suite après, elle a pu recevoir de l'aide sociale pendant trois ans. Puis, après deux ans, elle a présenté une demande pour parrainer l'immigration de son mari. Elle n'habitait pas dans ma circonscription, mais dans celle de Toronto. Elle est venue me voir pour me demander de l'aide.
Il a tenu sur le Canada des propos inacceptables. À son avis, le Canada est le pire pays au monde. Et pourtant, nous lui donnons tout. Elle a réussi à obtenir que son mari vienne au Canada et nous n'en avons plus entendu parler.
Il faut être très juste. On ne saurait affirmer que la politique d'immigration du Canada est injuste et qu'elle ne fonctionne pas bien. Elle fonctionne et elle est équitable. Je ne crois pas qu'aucun autre pays soit aussi généreux que le Canada. Je suis moi aussi un ancien immigrant et je respecte ce pays. Je suis contre le fait que le Canada doive accepter toute personne victime d'agression.
Mme Go: Il y a 20 ou 30 ans, bien des Canadiens auraient été indifférents au fait qu'une femme soit battue par son mari. C'était une situation courante. La société n'avait pas la responsabilité de protéger ces femmes.
Tout cela a changé et ce genre de violence est maintenant devenu illégal dans notre droit pénal, car nous reconnaissons que la violence conjugale n'est pas une question de vie privée. L'État a le devoir de prévenir cette violence et de punir ceux qui s'en rendent coupables. Dans un tel cas, il me semble naturel de reconnaître également que la violence conjugale relève également de l'État dans le contexte de l'immigration.
Dans le cas des réfugiés, je reconnais qu'il faut démontrer que la femme ne pourrait obtenir de protection de son propre pays, etc. Tout cela se trouve dans les lignes directrices sur la persécution fondée sur le sexe, et c'est également vrai des autres genres de persécutions. Ces lignes directrices offrent une protection contre l'argument du raz-de-marrée, selon lequel toutes les femmes viendront au Canada pour demander le statut de réfugié. Les lignes directrices empêcheraient une telle situation.
Je suis d'accord avec vous sur le fait que le Canada est un pays merveilleux, mais il ne faut pas penser que nous ne pouvons pas faire mieux. Nous avons des obligations internationales que nous ne respectons pas toujours. Nous avons notre propre Charte des droits et libertés, que les gouvernements, à tous les paliers, ne respectent pas toujours non plus. Tout cela doit changer. Il faut contester les politiques ou les lois. Il faut rappeler au gouvernement quelles sont ses obligations, tant envers le pays qu'envers le reste du monde.
Mon témoignage d'aujourd'hui n'est qu'un rappel que nous pouvons faire mieux et qu'il nous reste encore des obligations légales à remplir.
M. Assadourian: Combien de clients en moyenne voyez-vous par année?
Mme Go: L'année dernière, nous en avons eu 3 700.
M. Assadourian: Combien d'entre eux seraient assujettis à cette taxe d'établissement de 975$?
Mme Go: Les dossiers d'immigration et de statut de réfugié représentent généralement un tiers de tous nos dossiers.
M. Assadourian: Donc, un millier...
Mme Go: Cela ne signifie pas que tous doivent payer la taxe d'établissement, car certains ont d'autres problèmes d'immigration.
M. Assadourian: Combien d'entre eux doivent payer cette taxe, diriez-vous?
Mme Go: C'est très difficile, en fait...
M. Assadourian: Permettez-moi de reformuler ma question. Au cours des deux derniers mois, combien des personnes qui vous ont présenté une demande devaient payer la taxe d'établissement?
La présidente: Pourriez-vous nous fournir cette réponse plus tard, madame Go?
Mme Go: Oui.
M. Peric: Quels honoraires demandez-vous pour vos services?
Mme Go: Nous n'avons pas d'honoraires.
M. Peric: Vous offrez donc des services sur une période étendue.
Mme Go: Non, notre organisme est financé par le Régime d'aide juridique de l'Ontario et nous recevons donc un salaire.
La présidente: Vous avez dit que le cautionnement versé par le parent de l'immigrant est une autre façon de contrôler les femmes dont les demandes étaient ainsi parrainées. À mon avis, on peut voir la chose sous un autre angle. L'existence de ce cautionnement ne renforce-t-elle pas la position de la personne parrainée? Permettez-moi d'expliquer ce que je veux dire.
La femme pourrait dire à la personne qui paie le cautionnement : «Si tu m'agresses, tu renonces à ton droit et devra rembourser le gouvernement». C'est peut-être une autre façon de voir le problème.
Mme Go: Cela n'est vrai que si l'État est en mesure d'empêcher l'agression. Il en va tout autrement en réalité. Dans la vraie vie, l'agression se produit. Par la suite, la femme peut ou non aller chercher de l'aide, puis on est mis au courant des sévices et il faut ensuite en traiter les conséquences. Nous n'avons jamais réussi à empêcher l'agression.
La présidente: Je sais bien, mais convenez avec moi que c'est une autre façon de voir le cautionnement versé par le répondant de l'immigrant.
Mme Go: Compte tenu de la réalité, non je ne saurais en convenir.
La présidente: Merci beaucoup, madame Go. J'espère que notre comité aura de nouveau le plaisir de vous entendre.
Mme Go: Merci.
La présidente: J'invite maintenant Mme Adams, qui représente le Haut Commissaire des Nations Unies, à venir à la table des témoins. Elle est accompagnée de Mme Heather Gibbs.
Madame Adams, à vous la parole.
Mme Lois Adams (représentante adjointe (Canada), Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés): Bonjour. Je suis accompagnée de Mme Heather Gibbs, qui travaille au service juridique de notre bureau d'Ottawa.
La présidente: Bienvenue.
Mme Adams: C'est un honneur pour nous que de venir comparaître devant vous aujourd'hui. Comme vous le savez tous, nous approuvons de tout coeur les lignes directrices adoptées par le Canada à l'égard des demandeurs du statut de réfugié. Le Canada est et demeure un des chefs de file au monde dans ce domaine. Les lignes directrices sont utilisées non seulement au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, mais aussi par d'autres États.
Le HCNUR n'estime pas que ces lignes directrices soient révolutionnaires car elles sont tout à fait conformes aux principes adoptés par le HCNUR et le Canada en ce qui concerne toute la gamme des droits des femmes. Le droit de tous les êtres humains d'être traités également dans tous les domaines ne constitue pas l'opinion ou la norme culturelle d'un État donné. Ce droit est enchâssé dans les instruments internationaux signés par tous les États civilisés, y compris la Déclaration des droits de l'homme et la Charte des Nations Unies. Les États se sont engagés à respecter ce droit.
En outre, à titre de membres des Nations Unies, à l'instar du Canada, ces pays se sont engagés, en signant la Charte, à prendre solidairement ou individuellement les mesures nécessaires pour atteindre le respect universel des droits de la personne et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion.
Malheureusement, toutefois, les droits des femmes n'ont pas toujours reçu l'attention qui leur est due, même au sein du HCNUR, comme on peut le constater aujourd'hui dans le monde, dans la situation insatisfaisante des femmes réfugiées. Il est triste de constater que même si les femmes et les enfants constituent plus de 80 p. 100 de tous les réfugiés au monde, un nombre moins grand de femmes que d'hommes sont reconnues comme réfugiées au titre de la convention. On estime que la convention ne tient pas compte de leurs problèmes. Cela est surtout dû au fait que l'on omet de reconnaître, à dessein ou sans arrière-pensée, que les droits de la personne se fondent sur l'appartenance à l'humanité et non sur le sexe, que les droits de la personne sont universels et qu'ils ne sont dictés ni par la culture, ni par la tradition, ni par la religion.
On craint également qu'en protégeant les femmes victimes de persécution fondée sur le sexe, les pays qui leur donneraient asile seraient inondés par l'arrivée d'un nombre important de femmes. Au contraire, l'expérience montre que 5 p. 100 seulement de tous les réfugiés réussissent à se rendre dans un pays occidental pour y présenter une demande et que, de ce nombre, une faible proportion seulement sont des femmes.
Au cours des dernières années - et tardivement, à mon avis - le HCNUR a fait un effort concerté pour améliorer la situation des femmes qui fuient la persécution. Les directrices adoptées par le Canada nous ont été d'une grande aide, pas seulement pour le personnel de notre siège social, mais aussi pour ceux qui travaillent sur le terrain.
Madame la présidente, l'égalité dans le traitement ne se limite pas uniquement à modifier des textes rédigés par et pour les hommes pour les rendre non-sexistes. Même si les femmes font face à autant de dangers que les hommes, elles sont en plus sujettes à des persécutions en raison de leur sexe.
Ces femmes se heurtent à des difficultés dans leur pays d'origine justement parce qu'elles sont des femmes: ainsi, elles font face à des agressions violentes contre leur intégrité corporelle, telle la mutilation génitale, l'avortement forcé ou le viol. Dans d'autres cas, elles sont persécutées à l'extrême pour avoir enfreint le code vestimentaire ou le code moral.
Au cours de leur fuite, les réfugiées sont également sujettes à la violence sexuelle, au viol, à l'enlèvement ou à des agressions en présence de leur conjoint même ou des membres de leur famille. Le danger est partout dans les camps de réfugiés: elles se font extorquer leurs rations alimentaires, subissent la discrimination aux mains d'autres réfugiés tels les chefs de camps, particulièrement si elles sont chefs de famille. Dans les camps de réfugiés, le viol est également devenu outil de persécution.
Une fois dans le pays d'asile, elles ne sont pas pour autant sauves. En effet, à cause de critères d'auto-suffisance et d'intégration locale, les femmes ont souvent de la difficulté à se faire accepter pour des fins de réétablissement par les pays d'accueil.
Le Haut-commissariat pour les réfugiés s'intéresse à ces difficultés. Le comité exécutif du HCR, organe créé par l'Assemblée générale des Nations-Unies pour établir une politique internationale sur les réfugiés - et organe dont le Canada est un membre important - a formulé plusieurs conclusions novatrices ces dernières années.
Dans ces conclusions, on demande aux États signataires de la convention de tenir compte du problème spécifiquement féminin et de mettre en oeuvre les solutions convenues. Toutefois, comme les conclusions du comité exécutif ne sont pas exécutoires, le haut-commissariat compte énormément sur la bonne volonté et l'appui des États tels que le Canada pour les mettre en oeuvre.
J'aimerais maintenant revenir aux questions dont est saisi le comité, notamment les lignes directrices concernant le sexe pour le traitement de la demande au Canada. Comme la définition de la convention pour les réfugiés n'inclut pas spécifiquement la persécution fondée sur le sexe, l'évaluation des demandes en raison du sexe se heurte à des difficultés d'ordre pratique. C'est particulièrement le cas lorsqu'il faut décider si les préjudices redoutés doivent être considérés comme de la persécution au sens de la convention.
Pour résoudre ce problème, le comité exécutif a encouragé, dans sa conclusion no 39, les États à considérer les revendicatrices d'asile qui se plaignent de préjudices fondés sur le sexe, comme si elles appartenaient à un groupe social particulier. Ce critère convient bien à nos fins puisque les rédacteurs de la convention avaient prévu que cette disposition s'appliquerait aux types de persécution non encore envisagés au moment de la rédaction.
L'autre solution, mais moins pratique, au recours au groupe social, serait de modifier la définition du réfugié au sens de la convention pour qu'elle inclue le sexe. L'avenir pourra nous dire si c'est la solution idéale, mais il faudrait toutefois des années et d'énormes efforts pour faire modifier cet instrument international. Entre temps, on ne pourrait pas venir en aide aux femmes persécutées qui ont besoin d'une protection urgente immédiate.
Le Haut-commissariat considère les demandes découlant de la discrimination extrême fondée sur le sexe, ou découlant de l'imposition de peines sévères pour avoir enfreint les conventions sociales et découlant de la tolérance manifestée pour les sévices infligés par le conjoint comme relevant de la catégorie du «groupe social», ce qui permettrait d'appliquer le critère fondé sur le sexe dans la sélection à l'étranger des réfugiées.
Le Haut-commissariat pour les réfugiés considère comme essentielles la formation et la sensibilisation de tous les agents qui traitent avec les réfugiés.
Par conséquent, nous estimons que le Canada devrait appliquer les mêmes lignes directrices aux procédures suivies dans la sélection des réfugiés à l'étranger, à savoir les motifs humanitaires et de compassion. Le Haut-commissariat pour les réfugiés encourage les États à accepter les demandeurs d'asile qui ne répondent pas strictement à la définition au sens de la convention mais qui ont toutefois besoin d'être protégés. Ceux qui relèvent de cette catégorie répondent à la définition plus vaste de réfugié que l'on trouve dans des instruments régionaux telles la Déclaration de Cartagène et la Convention de 1969 de l'Organisation de l'unité africaine.
L'acceptation pour des raisons humanitaires et de compassion est de la plus haute importance pour les victimes de sévices sexuels, puisque la persécution sexuelle ne fait souvent surface qu'une fois la première décision prise. Il est par conséquent souhaitable que les agents chargés de l'examen subséquent aux demandes soient formés et comprennent bien comment ils doivent interpréter et appliquer les lignes directrices canadiennes et onusiennes fondées sur le sexe.
Le Canada a été le premier parmi les États signataires à élaborer des lignes directrices explicites sur la façon de traiter les demandes de réfugié présentées pour des motifs de discrimination fondée sur le sexe. Le Canada est donc mieux placé pour s'assurer d'une certaine constance dans les décisions prises, ce qui permet de diminuer le nombre d'appels.
Le Canada pourra donc s'acquitter plus facilement de ses obligations internationales et les femmes sauront que l'on écoutera leurs demandes. D'autres pays examinent la question de façon moins systématique, cependant, tous les grands pays d'asile sont d'accord pour dire que l'on ne peut plus tolérer aucune discrimination dans la détermination du statut de réfugié.
Le HCR espère que d'autres États suivront l'exemple du Canada pour que la jurisprudence internationale sur la question des réfugiés soit plus cohérente.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci, madame Adams.
[Français]
M. Nunez: Malheureusement, votre texte n'est pas en français. Nous parlons des femmes victimes de violence. C'est un problème assez grave dans les pays islamiques. Une cinéaste algérienne, Mme Koudil, n'a demandé qu'un visa pour venir ici, il y a quelques jours et, chose incroyable, le ministre refuse d'accorder un visa à cette Algérienne; il refuse de réviser le dossier.
Elle n'a pas l'intention de demander l'asile ici, mais si elle le demandait, je pense que ce serait le cas le plus net, le plus clair ouvrant droit ici au statut de réfugié. Madame n'a pas l'intention de le faire, elle n'est pas une criminelle et elle n'est pas une terroriste.
En tout cas, je pense que ça soulèverait les protestations de la part de nos invités. J'espère que le ministre reviendra sur sa décision.
La présidente: Monsieur Nunez, je dois vous rappeler, et c'est quelque chose que j'ai déjà dit au Comité, que ce type de question, qui a déjà été posée à la Chambre par l'Opposition, devait rester à la Chambre. C'est un cas particulier et j'aimerais que l'on continue à discuter du sujet que nous avons à l'ordre du jour.
M. Nunez: C'est-à-dire que ce sont des femmes.
La présidente: C'est un cas et j'ai déjà dit aux membres du Comité qu'on ne discutait pas de cas particuliers. Maintenant, vous pouvez poser une deuxième question.
[Traduction]
M. Dromisky: J'invoque le Règlement. À mon avis, nous devrions faire preuve de doigté dans des cas particuliers de cette nature. Nous ne devrions pas oublier que ce sont des cas très délicats. On ne devrait pas dévoiler le nom de la personne revendicatrice du statut de réfugié afin de protéger sa vie privée. Son nom ne devrait pas figurer dans un document public de cette façon ou à un comité.
La présidente: Pour être juste envers M. Nunez, je précise que la question a été soulevée à la Chambre. Donc, le public est au courant de ces questions. On en a parlé dans les journaux.
M. Dromisky: Je le sais.
La présidente: Je voudrais tout simplement préciser une décision que j'ai rendue, et j'espère que le membres ici présents la respecteront. À mon avis, nous ne devrions pas révéler de cas précis ni les détails de ces cas pendant les réunions de notre comité. Les témoins ne sont pas des experts en ce qui concerne le dossier en question, et je serais très reconnaissante aux membres du comité de ne pas soulever cette question à l'avenir lors de nos délibérations.
Alors, continuons avec le sujet que nous étudions à l'heure actuelle.
[Français]
M. Nunez: J'acepte votre décision, mais je la déplore en même temps.
La présidente: Vous me l'avez déjà dit, monsieur Nunez, et c'est déjà noté. Je répète que je ne vais pas vous donner la parole si ça continue ainsi.
M. Nunez: Je pense que vous devriez permettre l'exercice d'une certaine démocratie. Nous avons le droit de nous exprimer et parfois de vivre des choses que vous n'aimez pas.
La présidente: Monsieur Nunez, est-ce que vous avez une question à poser?
M. Nunez: J'ai plusieurs questions à poser.
La présidente: Allez-y, s'il vous plaît.
M. Nunez: Madame, on a discuté ici à plusieurs reprises de la possibilité d'inclure dans la Convention de Genève ce motif pour obtenir le statut de réfugié, à savoir la persécution dont sont victimes les femmes, particulièrement à cause de la violence conjugale, familiale, etc. Est-ce que vous croyez qu'il serait souhaitable de modifier la Convention pour y inclure ce motif?
[Traduction]
Mme Adams: Comme je l'ai déjà dit, nous nous servons déjà du motif de groupe social qui figure déjà dans la convention. Ce motif s'est avéré tout à fait adéquat pour répondre à ce genre de demande. Tout dépend de l'esprit dans lequel les pays d'asile interprètent la convention.
Le comité exécutif a rédigé notre conclusion 39 afin d'encourager les pays qui ont déjà commencé à utiliser ce critère de groupe social à cette fin. Il est toujours possible d'élargir la définition pour inclure d'autres genres de persécutions, mais comme je l'ai dit, il n'est pas toujours facile d'obtenir un consensus international sur les éléments qui devraient entrer dans la définition.
Il convient de noter que les États qui adhèrent à la convention ont le droit souverain de modifier leurs lois nationales de façon à inclure ce qu'ils veulent bien. En d'autres termes, la convention est un minimum, non pas un maximum. Les États sont même encouragés à aller au-delà de ce que prévoit la convention, s'ils le désirent.
Le droit d'asile est un droit souverain pour tous les États. Ils décident librement des motifs qu'ils désirent retenir. Si un pays désire modifier sa loi de façon à protéger explicitement les femmes victimes de persécution fondée sur le sexe, par exemple, il peut très bien le faire. Pour l'instant nous pensons que le critère relatif au groupe social est adéquat.
M. Nunez: Avez-vous la même opinion au sujet de la Loi canadienne sur l'immigration?
Mme Adams: Tous les États ont le droit souverain de prendre leurs propres décisions en ce qui concerne l'asile. La plupart s'en tiennent à la définition de la convention à l'article 1 et appliquent le critère relatif au groupe social, mais ils sont libres de modifier leurs lois nationales, s'ils le désirent.
M. Nunez: Connaissez-vous une loi nationale qui inclut ce motif?
Mme Adams: Je ne connais pas de loi nationale qui fasse directement allusion au sexe. Cependant, certains États établissent leur propre définition de ce qui est la persécution, par exemple, ainsi que leur propre critère en ce qui concerne la reconnaissance.
L'Allemagne, par exemple, utilise sa loi nationale, c'est-à-dire sa constitution, pour décider des revendications de réfugié. Les États-Unis ont inclus dans leur loi non pas seulement la crainte de la persécution, mais également la persécution antérieure. Il y a donc quelques différences, la plupart pour le mieux, dans les lois des États membres en ce qui concerne et les critères donnant lieu aux revendications.
[Français]
Mme Debien: J'abonde dans le même sens que M. Nunez concernant l'inclusion d'un sixième motif dans la Convention. Il y a un certain nombre de témoins qui sont venus nous dire que, compte tenu du contexte international où la xénophobie semble actuellement prévaloir face à l'arrivée de certains immigrants, il valait mieux, pour le moment, ne pas élargir la Convention à ce sixième motif. Qu'est-ce que vous en pensez?
[Traduction]
Mme Adams: Je serais également d'avis qu'il pourrait être très difficile actuellement d'élargir ainsi la définition. Comme je l'ai dit dans mon exposé, ce sera peut-être éventuellement la solution un jour, mais je ne pense qu'elle aurait beaucoup de chance d'être accepté à ce moment-ci.
Selon une autre école de pensée, la définition ne devrait pas être ré-ouverte chaque fois que se présente une nouvelle situation qui n'est pas mentionnée. Il existe une règle de droit selon laquelle ce qui n'est pas explicitement mentionné, n'est pas permis. Ainsi, moins la définition est précise, plus il y a de types de torts inclus. C'est une autre raison pour ne pas rouvrir la définition.
Les rédacteurs de la convention avaient prévu le jour où des motifs autres que ceux sur lesquels ils s'entendaient pourraient être évoqués pour revendiquer le statut de réfugié. C'est pourquoi ils ont inclu le critère relatif au groupe social.
Certains se sont objectés à l'utilisation de l'expression «groupe social» pour les femmes. En effet, avant 1985, un groupe social ne pouvait être qu'une minorité ou une minorité à l'intérieur d'une société quelconque. Comme les femmes formaient la majorité dans la plupart des sociétés, elles ne pouvaient constituer un groupe social. Les tribunaux ont annulé cette décision dans la plupart des pays d'asile, et il est reconnu que les femmes victimes de persécution fondée sur le sexe ont droit à la protection en vertu du critère de groupe social.
M. Peric: Vous avez mentionné que 80 p. 100 des réfugiés étaient des femmes et des enfants. Pouvez-vous nous donner des chiffres sur les pays ou les continents d'où proviennent la majorité des réfugiés?
Mme Adams: Je ne peux pas vous donner de chiffres très précis ou sûrs au sujet du nombre total de réfugiés provenant d'un pays particulier. À l'heure actuelle, les principaux pays d'origine des réfugiés dans le monde sont l'Afghanistan, le Rwanda, le Libéria, la Somalie, l'Eritrée, le Soudan, l'Azerbaïjan, l'Angola, la Sierra Leone et le Burundi.
Il est certain que lorsqu'il y a des vagues de réfugiés - qui traversent la frontière, par exemple - fuyant un conflit interne ou toute autre catastrophe, les femmes et les enfants constituent la majorité, parce que ce sont les personnes les plus exposées. Elles sont incapables de se défendre. Elles n'ont habituellement pas d'armes et elles sont régulièrement persécutées ou blessées par les combattants. Elles doivent emmener leurs enfants avec elles, parce que ces enfants ne peuvent évidemment pas survivre par eux-mêmes.
Par conséquent, lorsqu'une vague de réfugiés traverse une frontière, - spécialement en Afrique, mais aussi en Bosnie, par exemple - les femmes et les enfants constituent habituellement la vaste majorité.
M. Dromisky: C'est un problème très grave et complexe. Des douzaines et des douzaines de pays du monde ont des coutumes, des traditions et des croyances religieuses qui placent les femmes de leur société dans une position très délicate et très précaire. Autrement dit, dans les pays où les sévices infligés aux membres du sexe opposé sont chose courante et sont tolérés, les femmes n'ont aucune protection. À notre avis, les femmes y sont pratiquement déclarées citoyens de troisième classe. Dans bien des cas, elles n'ont même aucun droit.
Il s'agit là de centaines de millions de personnes sur la terre, ce qui me fait vraiment penser qu'en ce qui concerne les rapports entre les sexes, nous n'avons pas vraiment fait beaucoup de progrès depuis les temps préhistoriques où l'homme habitait les cavernes.
Où fixerons-nous les limites? Nous avons des cas qui sont mentionnés à la Chambre, des cas qui font la manchette des journaux parce que des groupes d'intérêt particuliers font un grand scandale au sujet d'une femme d'un pays particulier qui veut venir ici, alors que des centaines de millions essaient de venir ou d'échapper aux sévices dont elles sont victimes quotidiennement.
Nous occupons-nous seulement des personnes au sujet desquelles nous avons la preuve que leur propre société, leur système judiciaire, ne leur offre aucune garantie de sécurité, c'est-à-dire que rien ne sera fait pour elles? Où fixerons-nous les limites?
Le Canada est l'un des rares pays du monde qui accepte des réfugiés et leur permet ensuite de devenir citoyens du pays. Je ne sais pas comment nous viendrons à bout du complexe national de culpabilité que nous sommes peut-être en train d'acquérir parce que nous ne pouvons pas arriver à fournir le genre de services dont tant de personnes ont besoin dans le monde.
Mme Adams: Premièrement, les problèmes auxquels les femmes font face ne sont pas différents de ceux des hommes dans plusieurs pays du monde à l'heure actuelle. Les quatre premiers motifs inclus dans la définition - la race, la religion, les opinions politiques et la nationalité - s'appliquent également aux femmes et aux hommes. Nous n'établissons pas de distinctions pour les hommes, en ce qui concerne la protection contre la persécution fondée sur ces motifs.
On peut raisonnablement dire, je pense, que si les 30 millions de Sud-Africains qui ne pouvaient pas voter avaient demandé asile dans un autre pays, très peu de gens auraient dit qu'il était intolérable qu'on ne puisse les accueillir parce qu'ils étaient trop nombreux et qu'ils n'avaient donc pas le droit d'être protégés. Nous fixons des limites là où il le faut. Nous devons nous acquitter de nos responsabilité face aux organismes internationaux des droits de la personne qui ont été créés pour protéger l'humanité. Ces mécanismes représentent la seule façon pour nous d'arriver, comme vous le dites, à sortir définitivement de l'époque de l'homme des carvernes pour parvenir au progrès et à la civilisation.
Il faut appuyer les mécanismes de défense des droits de la personne, sinon ce sera l'échec complet. Comme nous l'avons vu dans certaines parties du monde où la guerre a éclaté, on n'en a pas tenu compte, on n'a pas respecté les règles de la guerre et nous avons vu un carnage. Nous célébrons le 50e anniversaire de la libération des camps de Bergen-Belsen. Relativement parlant, ce n'est pas une époque tellement lointaine dans notre histoire et l'on ne peut certainement pas nier la possibilité que cela se reproduise si nous ne respectons pas les normes établies dans le domaine des droits de la personne.
La base même des droits fondamentaux de la personne est la non-discrimination. Si vous regardez la Charte des Nations-unies, c'est mentionné dans le préambule, au premier paragraphe, je pense. C'est le fondement même des droits de la personne. Le Canada appuie sans réserve ces droits.
Deuxièmement, la violence conjugale peut sembler sans gravité à ceux qui y sont devenus insensibles, ou qui s'y sont habitués et qui l'acceptent comme une des réalités de la vie. Mais les victimes n'en souffrent pas moins et ses effets ne sont pas moins dévastateurs parce que c'est un phénomène courant.
Si nous n'accueillons pas favorablement les demandes fondées sur la violence conjugale, simplement parce qu'elle fait partie de la culture ou de la tradition, que ferons-nous au sujet des pratiques comme l'esclavage et le canibalisme, fondés sur des traditions culturelles? Nous ne refuserions certainement pas le statut de réfugié à une personne qui craint d'être mangée dans le cadre de rites qui ont leur origine dans une culture ou une tradition. Nous ne refuserions certainement pas une personne qui cherche à échapper à l'esclavage.
Même au XIXe siècle en Angleterre, Lord Mansfield, l'un des juges les plus éminents de la magistrature britannique, proclamait que l'air d'Angletterre était trop pur pour un négrier et que les esclaves arrivant sur les côtes d'Angleterre étaient libres dès qu'ils foulaient le sol anglais. L'air était trop pur pour un marchand d'esclaves.
Je pense que c'est encore plus vrai aujourd'hui, que nous sommes plus éclairés et que nous sommes plus conscients de l'importance des droits individuels de la personne. Je dis donc qu'il faut les limites où elles doivent être fixées.
Deuxièmement, nous n'avons pas été submergés, des foules de femmes ne sont pas arrivées sur les côtes des pays l'asile. L'an dernier, au Canada, seulement 650 demandes sur 20 000 provenaient de femmes qui invoquaient le motif de discrimination fondée sur le sexe, et seulement 68 p. 100 de ces demandes ont été acceptées. Nous ne savons pas combien d'autres ne seraient pas venues si les femmes avaient plus de mobilité, plus d'occasions et aussi la permission de leur conjoint pour voyager.
Il est regrettable que dans une grande partie du monde... Dans mon propre pays, quand j'étais jeune, les femmes mariées ne pouvaient pas quitter le pays sans la permission écrite de leur mari. Même si elles voulaient fuir la violence conjugale, la violence domestique ou toute autre forme de danger, elles devaient aller demander à la personne même qui les persécutait la permission de partir. C'était il y a 30 ans. Je pense que nous avons fait beaucoup de progrès depuis et je ne crois pas que nous devrions reculer devant la possibilité qu'un plus grand nombre de femmes soient protégées. C'est leur droit d'être protégées, en vertu de la convention, au même titre que les hommes.
[Français]
M. Nunez: Dans votre mémoire, vous mentionnez qu'il y a dans le monde 20 millions de réfugiés. Je pense que vous êtes un peu en retard. Nous en sommes déjà à 23 millions et ce sont les chiffres donnés par le ministre, il y a quelques semaines. Bientôt il y en aura 25 millions.
Ma question concerne la mutilation des organes génitaux des femmes. Il y a eu quelques cas au Canada, quoique pas très nombreux. Il y a même eu un projet de loi privé qui a été déposé à ce sujet.
Est-ce que vous connaissez la gravité de la situation dans quelques parties du monde, par exemple dans les pays islamiques ou en Afrique? Est-ce que vous pouvez nous expliquer un peu la situation concernant ce problème?
[Traduction]
Mme Adams: Premièrement, je voudrais vous donner plus de détails sur ce chiffre de 20 millions. Il y a véritablement 20 millions de réfugiés et 3 millions de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Nous utiliserons le chiffre global de 23 millions, parce que ce sont toutes des personnes qui préoccupent le Haut-Commissaire des Nations-Unies pour les réfugiés. Nous avons le mandat de protéger même des gens qui n'ont pas encore traversé la frontière et qui ne peuvent donc pas demander le statut de réfugié au sens strict de la définition contenue dans la Convention.
En ce qui concerne la mutilation des organes génitaux des femmes, les Nations-Unies ont commencé ces dernières années de s'occuper très agressivement de ce problème. Nous considérons la mutilation des organes génitaux des femmes comme une violation flagrante de leur intégrité corporelle et de leurs droits fondamentaux en tant que personne.
Depuis 1982, l'Organisation mondiale de la santé a interdit à ses médecins et autres praticiens en général de pratiquer des mutilations des organes génitaux des femmes dans les hôpitaux. Auparavant, on considérait que nous devions tenir compte d'une certaine manière de la culture et de la tradition, mais en nous assurant que les femmes qui devaient être mutilées bénéficient de la sécurité qu'offre une intervention faite par un personnel médical compétent dans des hôpitaux. Depuis 1982, nous interdisons cette pratique. L'Organisation mondiale de la santé réclame depuis deux ans que les États membres rejettent et interdisent la mutilation des organes génitaux des femmes parce que c'est une violation flagrante des droits de la personne.
Le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés est d'avis - et il reconnaît dans la pratique - que les femmes qui craignent de subir la mutilation de leurs organes génitaux répondent vraiment aux critères du groupe social, des femmes qui craignent d'être soumises à cette pratique en raison de leur culture ou de leur tradition.
Je voudrais également citer, comme je l'ai fait dans mon mémoire, un extrait du compte rendu de la dernière session de la Commission des droits de l'homme en mars 1995. Elle demande aux États de
- condamner la violence faite aux femmes et de ne pas invoquer la coutume, la tradition ou les
pratiques au nom de la religion pour se soustraire à leurs obligations d'éliminer une telle
violence.
[Français]
M. Nunez: Je fais allusion, par exemple, à l'avortement forcé tel qu'il existe en Chine, où la politique du gouvernement permet d'avoir un seul enfant et où les femmes doivent avorter par la suite.
Quelle est la politique de votre division du Haut-Commissariat des Nations unies? Quelle est la gravité du problème?
[Traduction]
Mme Adams: La loi concernant l'avortement forcé n'est pas vraiment claire à l'heure actuelle. Du point de vue de la Loi sur les droits de la personne, nous considérons que toute atteinte à l'intégrité corporelle d'une femme est contraire à ses droits en tant que personne.
Je tiens à signaler que le gouvernement de la République populaire de Chine n'approuve pas officiellement la stérilisation forcée ou l'avortement forcé. Il encourage ses membres locaux à décourager les couples d'avoir plus d'un enfant, et certaines mesures sont prises contre des couples qui persistent à en avoir plus d'un. Cependant, la politique officielle ne comprend pas l'avortement forcé ou la stérilisation forcée.
On a signalé que des fonctionnaires locaux avaient eu recours à cette pratique ou avaient menacé de le faire, mais sans l'assentiment officiel du gouvernement chinois.
Je ne peux pas faire de commentaires sur les lois d'autres pays, parce que je n'en ai pas tous les détails sous la main, mais je dirais que toute atteinte à l'intégrité corporelle d'une femme, même en vertu d'une loi d'application générale, serait considérée comme de la persécution, aux termes de la Convention de 1951.
[Français]
M. Nunez: Dans votre document, vous adressez beaucoup de félicitations au gouvernement du Canada et c'est habituel dans le cas de votre organisme.
Est-ce que vous auriez des recommandations à faire? Vous savez que nous étudions ici ce problème et que nous allons probablement, surtout dans notre cas, soumettre des recommandations en vue d'améliorer la situation des femmes persécutées en raison de leur sexe, en vue d'améliorer un peu les politiques gouvernementales à cet égard, la directive de la CISR, etc.
En plus des félicitations, est-ce que vous avez quelques recommandations pour améliorer la situation ici, au Canada?
[Traduction]
Mme Adams: Comme nous l'avons déjà dit, le HCR juge les lignes directrices de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié très utiles pour évaluer les revendications en raison du sexe.
Nous utilisons nous-mêmes ces lignes directrices dans nos bureaux à l'étranger et à notre siège social parce que nous jugeons qu'elles sont assez complètes. Nous aurions très peu de choses à y ajouter. Nous sommes en train nous-mêmes de modifier nos lignes directrices internes pour inclure certaines des choses dont le Canada tient compte.
Je dois dire que notre manuel de procédure, qui a été rédigé en 1978, ne contient malheureusement aucune mention du sexe et que c'est l'une des choses que nous voulons rectifier. J'ignore jusqu'où on en est rendu. Il faut malheureusement demander l'avis et l'approbation des autres gouvernements, mais je pense que c'est une chose à laquelle nous songeons sérieusement.
Quand aux recommandations que nous pourrions faire au Canada, je dois dire que le HCR est très satisfait de la façon dont le Canada aborde en général la question des droits de la personne et des droits des femmes. Selon nous, le processus de détermination du statut de réfugié est très généreux au Canada. Tout se fait de façon très méthodique et efficace. Le taux d'acceptation du Canada est de beaucoup supérieur au taux d'acceptation de n'importe quel autre pays, y compris dans le cas des revendications fondées sur le sexe.
Nous sommes en contact étroit avec la Commission. Nous la conseillons et nous lui fournissons les renseignements à notre disposition et la Commission à son tour nous consulte ou nous invite à participer à certains de ses comités. Nous pouvons donc formuler directement nos recommandations à la Commission lorsqu'une question quelconque est soulevée.
Dans l'ensemble, nous aurions très peu de choses à ajouter aux lignes directrices parce que nous trouvons qu'elles sont vraiment très complètes.
M. Assadourian: Je voudrais vous demander un service. Votre bureau peut-il nous fournir le manuel du HCR sur les réfugiés?
Mme Adams: Bien sûr.
La présidente: Les témoins nous ont apporté des exemplaires de ce manuel, M. Assadourian. Nous devons cependant les photocopier et nous devions pour cela obtenir l'autorisation vu qu'il y a le droit d'auteur. Nous allons tous en avoir un exemplaire.
M. Assadourian: Merci.
La présidente: Si les ministériels n'ont pas d'autres questions, je voudrais en poser une à madame Adams.
Vous savez que le Canada participer au programme Femmes en détresse. Le HCR aussi. On nous a signalé que lorsque des femmes sont en danger immédiat, le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés demande à d'autres pays qui font partie du programme d'intervenir plutôt qu'au Canada parce que notre procédure de traitement des cas est tellement lente.
Pouvez-vous nous en dire plus long là-dessus et nous proposer des moyens d'améliorer le système?
Mme Adams: Si je ne m'abuse, il y a maintenant quatre pays qui participent au programme Femmes en détresse, y compris l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis. Nous avons constaté que, lorsqu'il faut trouver un pays où une femme en détresse peut aller se rétablir de toute urgence, les délais sont beaucoup moins longs dans d'autres pays, ce qui est très utile dans les cas urgents.
D'autre part, pour l'instant, le Canada détient le record absolu du nombre de femmes acceptées puisqu'il en a admis 394 depuis 1988 alors que tous les pays d'Europe ensemble n'en ont admis que 333. Nous sommes très heureux du taux d'acceptation général du Canada, mais en contrepartie, il y a malheureusement le problème des délais. Le Canada a été le premier à participer à ce programme et à encourager d'autres pays à suivre son exemple et, jusqu'à tout récemment, il acceptait un nombre de réfugiés qui aidait beaucoup le HCR.
Les délais posent un problème dont nous discutons encore avec le gouvernement. Nous espérons pouvoir en arriver à une solution de compromis quelconque. Les critères utilisés pour l'acceptation des femmes posent aussi un problème dans les cas où l'on juge que les femmes ne sont pas capables, par exemple, de rembourser un prêt pour leur transport ou de subvenir à leurs propres besoins. Nous en discutons encore avec le gouvernement et nous espérons pouvoir en arriver un jour à une entente pour résoudre le problème.
Dans l'ensemble, je dois dire que le gouvernement s'efforce de comprendre notre point de vue et d'en arriver à des arrangements satisfaisants.
La présidente: Merci beaucoup.
Y a-t-il d'autres questions?
[Français]
M. Nunez: Est-ce qu'il y a également une politique concernant les homosexuels? Est-ce que vous avez élaboré une politique, dans votre organisme, concernant les homosexuels qui demandent la statut de réfugié en se basant sur leur orientation sexuelle?
[Traduction]
Mme Adams: À mon avis l'homosexualité répondrait certainement au critère du groupe social. Nous n'avons pas nous-mêmes inclus dans notre propre système de détermination que nous utilisons au nom de certains gouvernements qui n'ont pas une procédure à eux... Autant que je m'en souvienne, le HCR n'a été saisi d'aucun cas d'homosexuels demandant le statut de réfugié, mais je sais que dans les cas de réfugiés acceptés, par exemple, par les gouvernements des Pays-Bas et du Canada, la méthodologie et les arguments utilisés pour accepter ces réfugiés ont l'approbation du HCR.
Selon nous, toute personne menacée à cause du groupe social dont elle fait partie pour des raisons indépendantes de sa volonté ou immuables, par exemple à cause de caractéristiques qu'elle ne peut pas changer et pour lesquelles elle n'est pas à blâmer et qui est, à cause de cela, victime de discrimination grave ou de violation des droits de la personne mérite d'être protégée.
Ces critères comprennent l'homosexualité et tout autre caractéristique qu'une personne ne peut pas changer ou qui est indépendante de sa volonté.
[Français]
M. Nunez: Merci.
La présidente: Merci, monsieur Nunez. Mesdames Adams et Gibbs,
[Traduction]
je vous remercie beaucoup d'être venues et de nous avoir présenté cet exposé très instructif. Nous vous en sommes très reconnaissants et nous espérons que vous reviendrez nous voir à une autre occasion. Vous faites un excellent travail. Continuez!
La séance est levée.