[Enregistrement électronique]
Le lundi 27 novembre 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Le Comité des finances de la Chambre des communes est très heureux de se trouver ici, à Toronto. Nous avons devant nous une longue journée d'audiences. Nous avons prévu des séances de 9 heures à 10h45, de 10h45 à 12h30, de 12h30 à 14 heures et de 14 heures à 17 heures. Comme vous le voyez, nous n'avons pas prévu d'interruption, et si les députés doivent s'absenter pendant cinq minutes de temps en temps, les gens comprendront. Nous allons essayer de faire venir des sandwiches pour le déjeuner dans la salle d'à côté, ce qui nous permettra de manger sur le pouce. À part cela, nous avons l'intention de siéger pendant huit heures d'affilée.
Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui plusieurs témoins très importants. De la Ad Hoc Coalition Against the Head Tax, Avvy Go et Tanya Suvendrini Lena. Du Board of Trade of Metropolitan Toronto, nous avons John Bech-Hansen, qui est le sous-directeur, ainsi que Don McIver. De l'Association canadienne pour l'intégration communautaire, Jim Mahaffy et Connie Laurin-Bowie. De l'Institut canadien de la santé infantile, Graham Chance. De l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, Michael Ferrabee. De la compagnie Corporate Moving Services, nous avons Pat Baird. De la Family Service Association of Metropolitan Toronto, Rosemarie Popham. Du Conseil ontarien des organismes de service aux immigrants, Kay Blair, Gordon Moorewood et Sharmini Peries. De la Coalition Ontarienne des organisations d'aînés et aînées, nous avons Morris Jesion.
Qui représente le 2% Solution Network et la compagnie Solvency Analysis Corporation?
De Vision mondiale Canada, nous avons Linda Tripp.
Nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous remercions d'être venus. Qui souhaite commencer? Nous vous proposons de faire des déclarations d'ouverture de trois minutes, après quoi vous aurez tout le temps de vous poser mutuellement des questions et de discuter avec les députés qui sont ici.
Mme Kay Blair (présidente, Conseil ontarien des organismes de service aux immigrants): Bonjour. Je m'appelle Kay Blair et je suis présidente bénévole du Conseil canadien des organismes de service aux immigrants. Je suis également directrice à temps plein d'un centre de formation communautaire à l'intention des immigrants et des réfugiés.
Nous aimerions axer notre intervention d'aujourd'hui sur la nécessité de stimuler l'économie dans l'ensemble du Canada. Nous savons que le gouvernement fédéral s'est lancé dans une politique de restrictions financières pour tenter de juguler la dette croissante. Cette politique se traduit par une réduction des paiements de transfert aux provinces, une réduction des services et en particulier des programmes de formation, et également des coupures au système d'assurance-chômage. Tous ces exemples sont des exemples de restrictions financières.
Au COOSI, nous pensons toutefois que pour encourager un maximum de croissance économique, il est nécessaire de protéger tout particulièrement les programmes sociaux. Nous devons nous assurer que nous comprenons bien l'effet cumulatif de toutes ces coupures sur l'ensemble de la population canadienne et, en particulier, sur les immigrants et les réfugiés.
Le gouvernement a également un rôle crucial à jouer en stimulant l'économie, qui est le seul moyen de briser le cycle de la pauvreté. Nous avons besoin d'une main-d'oeuvre dynamique et concurrentielle pour faire face à la concurrence que nous font les marchés internationaux.
Pour ces raisons, nous lançons un appel au Comité des finances et lui demandons de préserver les programmes sociaux au cours de l'exercice budgétaire. Il convient également de préserver un système de formation de qualité, car c'est le seul moyen d'assurer une participation efficace à notre main-d'oeuvre. Encore une fois, pour nous, c'est un mécanisme essentiel pour briser le cycle de la pauvreté.
Lorsqu'on effectue des coupures, il faut s'assurer qu'elles semblent justes et équitables. Les coupures à la base ne sont pas toujours efficaces lorsqu'il s'agit d'encourager la croissance économique et la pleine participation d'une main-d'oeuvre qualifiée.
À notre avis, il faut combler l'écart qui existe sur le plan de l'imputabilité, c'est-à-dire que la perception des impôts doit se faire de façon équitable et que les impôts doivent être partagés de façon équitable. Cela pourrait permettre au gouvernement de recueillir des fonds supplémentaires qui seraient alors injectés dans les programmes sociaux.
Au COOSI, nous voyons le renouveau économique axé sur une main-d'oeuvre hautement qualifiée et diversifiée comme un atout. Et quand nous parlons de main-d'oeuvre diversifiée, nous pensons en particulier aux compétences et aux connaissances des immigrants et des réfugiés qui arrivent dans notre pays. Je le répète, une main-d'oeuvre agile est un élément crucial, et cette agilité signifie que nous pouvons nous adapter aux changements d'une économie nouvelle.
Pour être en mesure de stimuler l'économie, nous avons besoin d'un système de formation efficace qui forme vraiment des travailleurs hautement qualifiés qui, à leur tour, apportent une contribution précieuse à l'économie du pays. Le gouvernement et ses administrés doivent partager obligations et responsabilités et former un véritable partenariat, et ce n'est pas en abandonnant ses responsabilités que le fédéral y parviendra.
Au COOSI, nous sommes en faveur d'une pleine et égale participation des immigrants et des réfugiés à la société canadienne. Toutefois, on ne peut nier l'existence de facteurs systémiques qui empêchent cette participation égale dans certains secteurs de la société.
Il y a des gens hautement qualifiés dont les compétences restent inutilisées. Si nous voulons stimuler notre économie tout en conservant une société sans dettes, nous devons commencer par exploiter toutes nos ressources d'une façon équitable et juste.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, madame Blair.
Nous écoutons maintenant Michael Ferrabee de l'Association canadienne des restaurateurs.
M. Michael Ferrabee (vice-président des affaires gouvernementales, Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires): Au nom de l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, je tiens à remercier le Comité des finances pour cette invitation à comparaître à l'occasion de cette consultation pré-budgétaire.
Dans son budget pour 1995, le gouvernement a pris des mesures importantes pour réduire le déficit tout en évitant, dans la plupart des cas, d'augmenter les impôts, et c'est une initiative que nous applaudissons. En 1996, M. Martin doit continuer à accorder la priorité à la réduction du déficit, et cela, dans le but de l'éliminer complètement avant la fin du siècle, après quoi on pourra s'attaquer vigoureusement au déficit accumulé.
L'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires s'inquiète de ce qui est devenue pour le gouvernement une question budgétaire - la TPS. La TPS doit être arrangée non pas par l'harmonisation, comme on le propose souvent, mais en en corrigeant les lacunes. La TPS est injuste, complexe à l'excès et inutilement coûteuse. Elle est injuste à cause de ses exemptions. C'est à cause de ces exemptions que le taux de cette taxe est plus élevée que nécessaire, c'est à cause des exemptions que cette taxe est complexe et facile à éviter.
Cette boîte de caviar de 720$ n'est pas taxée.
Le président: Est-ce que nous pouvons la garder?
M. Ferrabee: En voilà une que vous pouvez garder. Ce lait que boivent les enfants est taxé dans nos restaurants. Est-ce que c'est logique?
Nous avons proposé une solution pour arranger la TPS, il s'agit de la taxe sur les opérations commerciales. Ce genre de taxe rétablirait l'intégrité du système fiscal en taxant tous les produits, en facilitant l'application et en économisant au gouvernement des centaines de millions de dollars d'administration.
La TPS a eu un effet dramatique sur la part du marché occupé par notre industrie, comme vous le verrez sur l'affiche qui se trouve derrière nous. Nous avons perdu des dizaines de milliers d'emplois. L'harmonisation coûtera 380 millions de dollars aux consommateurs. C'est au niveau fédéral qu'il faut corriger les lacunes de la TPS, et cela, avant que ces lacunes ne s'amplifient au niveau provincial. Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Ferrabee.
Le témoin suivant est Tony Crawford. Bonjour.
M. Tony Crawford (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je vais commencer par me présenter; je ne représente pas une compagnie, je suis ici de ma propre initiative. Voici les arguments que j'aimerais faire valoir: pour commencer, il devrait être anticonstitutionnel pour nos gouvernements d'accumuler des déficits qu'ils sont ensuite dans l'impossibilité d'assumer.
J'aimerais également discuter des moyens dont nous disposons pour influer sur la planification et sur l'imputabilité gouvernementale et, également, sur une meilleure administration des fonds qui conduiraient à une meilleure administration tout court.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Crawford.
Qui sont nos témoins suivants?
Mme Avvy Go (Ad Hoc Coalition Against the Head Tax): Je m'appelle Avvy Go. Je fais partie de la Coalition spéciale contre la taxe d'entrée.
Vous vous demandez peut-être pourquoi Tanya Lena et moi-même représentons aujourd'hui la coalition, alors qu'il semble s'agir d'une question qui relève de l'immigration.
Entre 1885 et 1923, une taxe d'entrée fut imposée aux immigrants chinois. La décision d'imposer une nouvelle taxe d'entrée est une décision financière, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui.
Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration nous a informés qu'en l'absence d'une taxe d'entrée il aurait été forcé de réduire le financement destiné à l'établissement des immigrants de300 millions de dollars. À notre avis, ce choix qu'il a dû faire n'était pas vraiment un choix.
C'est assez caractéristique des politiques mises en place par le gouvernement libéral depuis son arrivée au pouvoir. En effet, les Libéraux forcent les Canadiens à choisir entre se passer de certains programmes sociaux ou accepter de payer directement certains services, et cela, dans le but de réduire le déficit.
La taxe d'entrée pose de nombreux problèmes sur lesquels Tanya vous donnera tout à l'heure des détails. J'aimerais seulement vous faire part de nos principales préoccupations et vous expliquer que la taxe d'entrée symbolise véritablement tout ce qui ne va pas dans le budget déposé par ce gouvernement.
La taxe d'entrée est un exemple de la façon dont ce gouvernement ignore les coûts sociaux véritables en causant des torts sociaux et économiques à notre population, et tout cela, sous prétexte de réduire le déficit. Il est probablement inutile de vous rappeler que, dans leur Livre rouge, les Libéraux s'étaient prononcés avec éloquence contre le programme conservateur qui tournait exclusivement autour de la réduction des déficits et de l'inflation, et inutile de vous rappeler qu'à l'époque les Libéraux dénonçaient les coûts sociaux de cette démarche.
Dois-je vous rafraîchir la mémoire et vous rappeler les engagements pris par les Libéraux dans leur Livre rouge, des engagements au titre de la diversité et de l'humanité? La véritable crise du déficit à laquelle nous nous heurtons aujourd'hui, ce n'est pas le déficit budgétaire, c'est un manque d'initiative et de volonté politiques. C'est la désintégration de notre réseau social et la destruction de notre environnement.
Notre structure sociale, nos valeurs et nos principes sont ce qui lie les Canadiens. Les principes qui figurent dans la Charte canadienne des droits et libertés, le principe de l'égalité et le principe de la liberté pour tous, doivent figurer dans tous les aspects des décisions prises par le gouvernement, y compris les décisions d'ordre budgétaire.
Tous ces principes sont aujourd'hui menacés par la taxe d'entrée et par d'autres mesures, comme le projet de loi C-76. C'est seulement en respectant ces principes fondamentaux que nous pourrons créer et maintenir une croissance économique favorable à tous les Canadiens, par opposition aux marchés financiers, quand on constate qu'il n'y a pas d'emplois.
Nous avons plusieurs suggestions sur le budget à dresser dans le contexte de ces principes. Nous avons d'autres solutions que la taxe d'entrée et je vais maintenant demander à Tanya de développer ces aspects-là.
Mme Tanya Suvendrini Lena (Ad Hoc Coalition Against the Head Tax): La taxe d'entrée présente certains problèmes que nous aimerions vous signaler. Pour commencer, c'est une taxe imposée à un groupe particulier qui paie déjà un impôt sur le revenu. À notre avis, ce n'est pas la bonne façon de financer le déficit car cela vise certains groupes en particulier.
De plus, pour être logique, si on tient à viser certains groupes en particulier, le groupe des immigrants n'est pas bien choisi car le professeur Ather Akbari a déjà démontré que les immigrants versaient déjà dans le Trésor 2 000$ de plus par année que les familles nées au Canada. Les services d'établissement représentent seulement 400$ supplémentaire par année pendant les premières années d'établissement.
Par ailleurs, c'est une taxe régressive qui persécute les gens qui sont le moins en mesure de payer. C'est également un obstacle à l'établissement des immigrants pendant les premières années, lequel, au contraire, devrait constituer un objectif économique. En outre, D'autre part, cette taxe n'est pas équitable et on voit mal les avantages qu'elle présente sur le plan des revenus puisque les chiffres cités par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration ne tiennent pas compte des coûts administratifs.
Quant aux autres solutions, nous pensons que le gouvernement devrait reconsidérer les dépenses indirectes, y compris celles qui passent par le système d'imposition du revenu, par exemple les allégements fiscaux accordés pour les déjeuners et divertissements d'affaires.
Mme Go: Dans nos mémoires, nous considérons plusieurs options, par exemple, la nouvelle exemption sur la taxe sur les spectacles et les dépenses dans le domaine de la défense. Si vous êtes obsédés par la dette et le déficit, il y a d'autres options à considérer.
Dans notre intervention, nous avons cherché à étudier les trois questions que vous proposez dans le contexte des réponses à apporter à ces questions. À notre avis, si vous ne comprenez pas le contexte, vous répondrez aux mauvaises questions. C'est comme demander à un juge de prononcer une sentence lorsque l'accusé a été accusé à tort. Que cette sentence soit légère ou sévère, elle ne sera jamais adaptée au crime. Le crime des Canadiens, c'est peut-être leur complaisance, et peut-être aussi leur négligence lorsqu'il s'agit de tenir les hommes politiques responsables de ce qui s'est fait par le passé.
Je m'en tiendrai là, mais je vous prie instamment de considérer d'autres options que celles qui ont été mentionnées.
Le président: Merci, madame Go, madame Lena.
Nous écoutons maintenant Linda Tripp et Mme Sutherns de Vision mondiale Canada.
Mme Linda Tripp (vice-présidente, Relations internationales et gouvernementales, Vision mondiale Canada): Merci.
Monsieur le président, membres du comité, c'est un privilège de prendre la parole ici ce matin, d'autant plus que Vision mondiale Canada est probablement le seul groupe qui comparaisse aujourd'hui à venir discuter du rôle du Canada sur la scène internationale.
En ces temps difficiles sur le plan économique, votre tâche, qui consiste à fixer des priorités et à faire des choix logiques, est particulièrement difficile. Mais lorsque vous fixerez ces priorités, je vous prie instamment de ne pas oublier les engagements pris par le Canada sur le plan du développement international, car c'est un secteur prioritaire dans lequel il n'est plus possible d'effectuer des coupures. En fait, il est même temps de renverser la tendance actuelle et de nous rapprocher de notre objectif de 0,7 p. 100 du PNB.
Si je dis cela, ce n'est pas parce que je ne pense qu'à mes propres intérêts où que je ne vois pas les défis auxquels se heurte le Canada. Si je dis cela, c'est parce que le développement donne des résultats et qu'il est tout à fait avantageux pour le Canada et les Canadiens.
Je ne répéterai pas les arguments de notre mémoire, vous les avez sous les yeux, y compris de nombreuses déclarations tirées de documents gouvernementaux en ce qui concerne la responsabilité du Canada sur la scène internationale. Je préfère mettre l'accent sur les gens, sur les Canadiens qui font des dons et sur ceux qui en bénéficient.
Pour commencer, les Canadiens sont en faveur du développement international. Dans un sondage récent effectué par la compagnie Insight Canada Research, 89 p. 100 des Canadiens approuvent l'aide au développement. Leur générosité confirme d'ailleurs ce message. Les 350 000 Canadiens qui versent une contribution à Vision mondiale Canada donnent généreusement et, très souvent, au prix d'un sacrifice. Notre organisation ne dépend pas d'un financement gouvernemental, mais les contributions de l'ACDI nous permettent tout de même de multiplier les avantages de notre action pour des milliers de récipiendaires. Nos donateurs voient ainsi l'argent de leurs impôts utilisé pour une cause qui leur semble importante.
Les organisations non gouvernementales comme Vision mondiale rendent des comptes très exacts à leurs donateurs, à l'ACDI et à leurs partenaires à l'étranger. Transparence et intégrité sont des caractéristiques importantes des ONG canadiennes.
Deuxièmement, si on considère l'ensemble, l'aide au développement reste une dépense minime. Beaucoup de Canadiens tiennent pour acquis que 10 cents et même 30 cents de chaque dollar d'impôt sont destinés au développement international. Ils sont surpris d'apprendre qu'en réalité, il s'agit seulement d'environ deux cents par dollar d'impôt.
Troisièmement, comme je l'ai dit, le développement donne des résultats. Malheureusement, les médias ne sont pas très pressés de rapporter ces bonnes nouvelles, d'expliquer comment des initiatives de micro-entreprises destinées aux femmes ont des retombées supplémentaires sur le plan de l'alphabétisation, de l'administration commerciale, de la formation mutuelle et de l'éducation au sujet du sida. Ils ne parlent pas des efforts de mobilisation sociale qui favorisent l'immunisation et la santé, comme ce projet en particulier qui a reçu un prix de l'Organisation mondiale de la santé, le prix du projet de santé le plus innovateur en Afrique.
Quatrièmement, un programme de lutte contre la désertification au Sénégal a reçu le prix de l'environnement des Nations Unies, pour avoir permis de récupérer pour l'agriculture des terres désertiques du Sahel.
Ce ne sont là que quelques exemples de ce que les gens peuvent faire eux-mêmes quand on leur donne les compétences et les ressources nécessaires.
Mais le plus grand succès du développement, c'est peut-être l'éducation des filles. D'après un rapport de l'UNICEF, l'éducation des filles est probablement le meilleur investissement du monde. Il n'y a rien de comparable pour améliorer la santé des familles, ralentir la croissance de la population et améliorer l'économie.
Enfin, c'est mon cinquième point, les avantages du développement l'emportent de beaucoup sur les coûts, en particulier lorsqu'il s'agit de prévention. Vision mondiale est en train de mettre en place un programme destiné à introduire des niveaux suffisants de fer, de vitamine A et d'iode dans le régime alimentaire des habitants de quatre pays africains. La Banque mondiale estime que pour combler ces carences de la malnutrition qui en découle, il en coûtera 20$ par personne par année. Le coût des micro-nutrients n'est que de 50¢ par client, et dans ce cas particulier, la prévention coûte40 fois moins cher.
Honorables députés, les Canadiens ont acquis une réputation fondée sur un passé de valeurs et d'action sur la scène internationale. Les organisations non gouvernementales canadiennes et les dollars qu'elles représentent, dans le cadre d'une société civile, jouent un rôle important, non pas d'une façon isolée, mais en partenariat avec l'État et avec le marché. Toutefois, pour maintenir notre influence positive, nous devons continuer à assumer nos responsabilités sur le plan de notre aide à l'étranger. Cela n'est possible que si nous protégeons et augmentons notre contribution au développement international.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, madame Tripp.
De l'Association canadienne pour l'intégration communautaire, Jim Mahaffy et Connie Laurin-Bowie.
N. Jim Mahaffy (membre du conseil d'administration, Association canadienne pour l'intégration communautaire): L'Association canadienne pour l'intégration communautaire est une association nationale qui défend les intérêts des personnes qui ont un handicap mental. C'est une fédération de dix associations provinciales et de deux associations territoriales qui regroupe400 associations locales. Ses 40 000 membres comprennent des personnes qui sont considérées comme ayant un handicap mental, leurs parents, leurs familles, les professionnels et ceux qui sont chargés de la défense de leurs intérêts.
L'ACIC s'inquiète de l'impact négatif possible d'une réduction des transferts dans le domaine de la santé et dans le domaine social et des autres mesures de réduction du déficit qui ont été annoncées dans le dernier budget fédéral. Ces mesures pourraient avoir un impact sur la participation économique et sociale des gens qui ont un handicap.
Plusieurs facteurs viennent étayer cette préoccupation. Pour commencer, l'absence d'initiatives fédérales dans le domaine de la politique sociale et la baisse du financement des secteurs de la santé, de l'éducation postsecondaire et des services sociaux va contribuer à marginaliser encore plus les gens qui ont un handicap. Deuxièmement, en visant les dépenses sociales pour réduire le déficit, on ignore les coûts sociaux et économiques associés à cette inégalité. Troisièmement, les rares stratégies employées par le gouvernement fédéral pour attaquer le déficit sur le plan des revenus, par exemple la création d'emplois et le développement économique, ne tiennent pas compte des besoins de ceux qui sont traditionnellement marginalisés sur le marché du travail, y compris les gens qui ont des handicaps.
Reconnaissant que le gouvernement fédéral s'est engagé à réduire le déficit, notre association propose au gouvernement fédéral plusieurs solutions précises qui nous rassureraient en ce qui concerne la participation des gens qui ont un handicap. D'autre part, en visant ces objectifs de réduction du déficit, le gouvernement fédéral ne doit pas oublier les inégalités qui existent dans le pays.
Nous vous avons apporté un mémoire que nous aimerions distribuer. Dans ce mémoire, nous proposons qu'on fasse jouer à la sécurité sociale un rôle différent, qu'on permette à cet instrument de régler certains problèmes économiques et financiers auxquels se heurtent les Canadiens. Nous sommes convaincus que l'économie canadienne ne connaîtra de véritable croissance et que le gouvernement canadien ne réalisera de véritables économies que lorsqu'on aura réformé de fond en comble nos institutions de sécurité sociale et qu'on soutiendra les gens tout en les encourageant à participer à la vie active et à ne plus dépendre des fonds de l'État.
Le président: Merci beaucoup.
Nous recevons maintenant M. Graham Chance de l'Institut canadien de la santé infantile.
M. Graham Chance (président, Institut canadien de la santé infantile): Avec le mémoire, j'ai distribué des exemplaires d'un document intitulé The Health of Canada's Children, une étude de la santé infantile qui explique en détail les effets négatifs de la pauvreté sur tous les enfants canadiens, et en particulier sur les enfants autochtones, et qui fait le constat de la détérioration de la santé mentale des adolescents et des enfants.
L'Institut canadien de la santé infantile craint que la solution du problème du déficit budgétaire n'aggrave encore le problème du déficit social de notre pays. Il ne faudrait pas hypothéquer notre avenir par une politique à court terme, surtout si on pense aux enfants du Canada dont 21 p. 100 vivaient dans la pauvreté en 1993.
Il est certain que nous devons réduire le déficit, mais l'ICSI ne possède pas les moyens nécessaires pour déterminer un objectif. Toutefois, votre défi, ce n'est pas seulement de concevoir un budget qui supprime le déficit. Le véritable défi, c'est de réduire ce déficit sans sacrifier l'avenir des enfants et la stabilité sociale du Canada.
Des enfants et des jeunes en santé, c'est le capital social futur du Canada, et tout exercice budgétaire doit forcément tourner autour de ce thème. Ce sont les enfants des familles pauvres et des travailleurs pauvres, qui n'ont certainement pas choisi les circonstances de leur naissance ou de leur environnement, qui sont le plus défavorisés lorsqu'il s'agit de préparer leur propre vie.
Toutefois, les enfants de parents chômeurs ne sont pas les seuls à vivre dans la pauvreté et dans la dépendance. Dans notre environnement moderne, les enfants de parents qui travaillent sont souvent pauvres du temps que leurs parents ne leur consacrent pas. Les enfants dont les deux parents travaillent passent 40 p. 100 de temps de moins avec leurs parents que ceux-ci ne passaient avec les leurs.
Pour surmonter ce problème temporel parental, nous pensons que le comité devrait réclamer une distribution plus équitable de l'emploi. Le travail disponible devrait être partagé. Certaines mesures budgétaires pourraient modifier l'environnement de l'emploi, par exemple une organisation flexible du travail qui tienne compte des obligations parentales, par exemple des mesures comme des congés légaux en cas de maladie des enfants, le partage des emplois, la limitation des heures supplémentaires, des droits à la pension pour les ménagères et des activités pour les familles en-dehors des heures de classe. Ce sont des idées qui méritent d'être exploitées.
Comme c'est le cas pour beaucoup de pays européens, les prestations fiscales pour enfants devraient venir renflouer le revenu des familles qui ont des enfants pendant les périodes de récession. À l'heure actuelle, ce n'est pas le cas.
Au Canada, les prestations fiscales pour enfants étaient déjà dépassées lorsqu'elles ont été mises en place. Ce maigre financement destiné aux enfants est trop vital pour disparaître.
Au Canada, le taux de pauvreté parmi les enfants s'est beaucoup accrû depuis 1989, année où les Communes avaient juré d'y mettre fin d'ici l'an 2000. Il n'existe actuellement aucune directive en ce qui concerne le soutien des enfants. Les prestations fiscales pour enfants s'effritent de plus en plus. Les dépenses fédérales dans le domaine de la garde des enfants ont atteint un maximum, mais pendant ce temps, les sociétés et les gens riches conservent leurs protections.
Comme cela a été proposé par Campagne 2000, l'Institut voudrait voir la création d'un fonds d'investissement social qui serait là pour faire face aux besoins économiques des familles qui ont des enfants. D'autres mesures pourraient constituer une source de revenu, par exemple l'imposition modeste des héritages et l'imposition sérieuse des investissements étrangers. On se pose des questions quand on voit que dans les circonstances économiques actuelles, 20 p. 100 des REER sont des investissements étrangers. Il faudrait également envisager un rendement modeste mais garanti des investissements canadiens au lieu des bénéfices réalisés grâce à des multinationales dont on sait qu'elles font leurs bénéfices en employant des enfants.
Les services de garde d'enfants. Le Livre rouge libéral considère, et nous sommes certainement d'accord, que des services de garde d'enfants de qualité, des services accessibles, sont un élément positif pour l'économie canadienne. Ces services permettront aux parents de plus d'un millions d'enfants qui dépendent de l'aide sociale de se libérer de leur dépendance du bien-être et des banques alimentaires et en même temps, ils permettrent de créer directement des emplois pour les Canadiens.
En renonçant à une partie de ses responsabilités, le gouvernement central s'affaiblit. Au lieu de suivre cette voie, vous devriez chercher à préserver les programmes centralement administrés qui existent actuellement, par exemple l'assurance-maladie et l'éducation. En privatisant ces secteurs, on ne donne pas les mêmes outils à tous les enfants canadiens, des outils qui leur sont nécessaires pour devenir des adultes en bonne santé et des adultes productifs.
Enfin, et c'est ma conclusion, la télévision et d'autres modèles qui sont donnés en exemple bombardent les enfants et les jeunes de violence pendant qu'une inégalité croissante des chances les conduit et conduit leurs parents à un état de frustration, de colère et de désespoir.
L'ICSI pense que les gouvernements fédéral et provinciaux doivent prendre conscience du danger considérable qu'ils nous font courir en choisissant la responsabilité financière aux dépens de la responsabilité sociale. Les gens qui ont été élus pour nous gouverner doivent absolument considérer que ces deux responsabilités sont inséparables. Les anciennes habitudes ne suffisent plus. Si nous continuons dans la voie actuelle, nous nous exposons à des troubles sociaux.
En adoptant la semaine dernière le projet de loi sur le contrôle des armes à feu, le Canada a réaffirmé au monde que son gouvernement fédéral était encore capable de gouverner de manière responsable ses citoyens et particulièrement ses enfants. Nous sommes convaincus que le Comité des finances est capable d'initiatives positives du même genre.
Le président: Merci, monsieur Chance.
Je donne maintenant la parole à M. Hank Goldberg, de la Coalition ontarienne des organisations d'aînés et aînées.
M. Hank Goldberg, (vice-président, Coalition ontarienne des organisations d'aînés et aînées): Merci, monsieur le président.
La Coalition ontarienne des organisations d'aînés et aînées est une coalition de plus de80 groupes de personnes âgées de tout l'Ontario, qui représente plus de 500 000 personnes du troisième âge. Au nom de notre coalition, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de notre point de vue en prévision du budget de 1996.
Voici quelques-uns des points que nous vous invitons à examiner. Quel devrait être notre objectif de réduction du déficit? Comment peut-on y parvenir? Combien de mesures budgétaires faut-il utiliser pour créer un climat favorable à l'emploi et à la croissance? Quels sont les domaines d'activité pour lesquels il faudrait envisager de nouvelles compressions, une commercialisation, une privatisation ou un transfert à d'autres paliers de gouvernement?
Les Canadiens du troisième âge, comme la majorité de leurs concitoyens, ne refusent pas de payer des impôts. Ce que nous rejetons, en revanche, c'est le régime fiscal du Canada qui est rétrograde et excessivement injuste pour la majorité des Canadiens.
Parmi les dépenses fiscales qu'il faudrait à notre avis examiner, il y a notamment le niveau des exemptions d'épargne-retraite, les fiducies familiales et les exonérations de taxe des entreprises et des sociétés. Ce genre de dépenses a privé le gouvernement de milliards de dollars de recettes, et la question du montant que l'on pourrait récupérer de cette manière est une question politique et non économique.
Il y a 30 ans, l'impôt sur les sociétés représentait environ 30 p. 100 des recettes fédérales. En 1994, il n'en représente plus que 7 p. 100. De plus, pour la seule année 1993, environ 63 000 entreprises rentables n'ont pas payé le moindre impôt.
Pour ce qui est des impôts des particuliers, il faudrait examiner le régime et revoir le nombre de tranches et leur seuil. Les modifications du régime fiscal apportées par le précédent gouvernement ont entraîné de profondes inégalités de ce régime. Entre 1987 et 1989, le nombre de tranches a été ramené de 10 à 3. Le taux d'imposition marginal maximum est tombé de 36 p. 100 à 29 p. 100, alors que le taux inférieur grimpait de 7 p. 100 à 17 p. 100. C'est pour cela que les gens sont devenus réticents maintenant.
Pour ce qui est du refinancement de la dette, on estime qu'un quart de nos impôts est englouti par le service de notre dette fédérale de plus de 40 milliards de dollars. Une bonne partie de cet argent quitte le pays sous forme d'intérêts versés à des étrangers qui sont nos créanciers.
Il faudrait envisager divers mécanismes, notamment mettre en place des contrôles de taux d'intérêt, privilégier les instruments intérieurs à long terme, tels que les obligations d'épargne du Canada, et renégocier le rendement des obligations.
Le gouvernement devrait aussi s'efforcer de rapatrier la dette étrangère. On estime que 25 p. 100 de la dette fédérale est détenue par des étrangers. Cela limite la marge de manoeuvre économique du Canada et nous rend vulnérables aux politiques internationales en matière de taux d'intérêt.
Lorsque le gouvernement fédéral procède à de nouveaux emprunts ou que des obligations détenues à l'étranger sont en vente ou doivent être renouvelées, il faudrait en financer l'achat au Canada par le biais des économies des particuliers et de la Banque du Canada. Il faudrait réduire les taux d'intérêt et prendre d'autres mesures de lutte contre l'inflation. La politique actuelle du Canada pour lutter contre l'inflation consiste à maintenir des taux élevés d'intérêt et de chômage. Cela nous semble inadmissible et en contradiction avec l'engagement du gouvernement actuel de créer des emplois.
Il existe d'autres formules possibles de lutte contre l'inflation.
Premièrement, la Banque du Canada devrait réduire les taux d'intérêt au Canada en finançant une plus grande part des dettes fédérales et provinciales.
Deuxièmement, pour empêcher un gonflement excessif de la masse monétaire, le gouvernement devrait rétablir l'obligation pour les banques à charte de détenir un pourcentage de leurs dépôts en réserve auprès de la Banque du Canada.
En ce qui concerne les économies placées à l'abri du fisc, le précédent gouvernement a adopté des règlements autorisant à formuler jusqu'à 20 p. 100 des actifs de ces régimes en actifs étrangers. Il faudrait changer cette réglementation et exiger que ces économies protégées du fisc soient investies au Canada.
Nous vous suggérons aussi de mettre en place une taxe sur les transactions financières. Le produit intérieur brut du Canada était d'environ 712 milliards de dollars en 1993. Au cours de la même période, on estime que la valeur des transactions financières, y compris tous les chèques, transferts et retraits des institutions financières au Canada, s'élevaient à 27 billions de dollars. Une grande partie de ce montant concernait des transactions financières spéculatives à court terme qui n'apportent rien au produit intérieur brut.
Nous recommandons un prélèvement fiscal modeste. Avec quelque chose de l'ordre de 0,5 p. 100, nous aurions des recettes suffisantes pour remplacer à la fois la TPS et la taxe de vente provinciale et supprimer le déficit fédéral.
Il faudrait prendre des mesures budgétaires pour créer un environnement propice à l'emploi et à la croissance. La réponse à cette question est aussi un élément de la réponse à la précédente qui concernait la réduction du déficit.
À notre avis, le seul mécanisme juste et durable permettant de réduire le déficit et de rétablir la bonne santé financière de notre pays serait d'assurer le plein emploi en cherchant à créer des emplois meilleurs et plus nombreux. Il faudrait envisager de relever le salaire minimum et de modifier la loi sur les normes d'emploi pour limiter les heures supplémentaires. De 1982 à 1993, le nombre d'employés de l'Ontario travaillant 50 heures ou plus a augmenté de 52 p. 100. Durant la même période, la proportion des chômeurs à long terme par rapport à l'ensemble des chômeurs est passée à 16,8 p. 100.
Il y a d'autres domaines d'activités fédéraux dans lesquels il faudrait envisager de faire de nouvelles coupures. En examinant les finances publiques sous l'angle du marché, on a conclu que la seule façon d'équilibrer les budgets ou de réduire le déficit était de comprimer les coûts. On associe forcément ces coûts aux dépenses des programmes sociaux.
C'est ce chemin que semble suivre le gouvernement fédéral depuis un certain nombre d'années. Les programmes sociaux du Canada ont su remonter l'une des pires récessions qui soit. Ils ont fait de notre pays celui où l'on vit le mieux dans le monde. Ils font partie intégrante de l'identité canadienne. De plus, si le gouvernement poursuit sur la voie des coupures et de la commercialisation, de la privatisation ou du transfert des activités fédérales à d'autres paliers de gouvernement, il ne réussira qu'à aggraver la désintégration de l'ensemble du Canada.
L'élaboration du budget de 1996 signifie prendre des décisions qui nous toucheront tous. Nous sommes profondément convaincus qu'il existe des options viables pour surmonter les crises financière, économique et sociale de la décennie en cours. Il faut mettre toutes ces options sur le tapis pour pouvoir les examiner de manière juste et équitable.
Au nom de notre organisation, nous vous remercions d'avoir écouté notre point de vue sur ces questions.
Le président: Merci, monsieur Goldberg.
Enfin, nous accueillons John Bech-Hansen et Don McIver, du Board of Trade of Metropolitain Toronto. Bienvenue, messieurs.
M. Don McIver (président, Comité de la politique économique, Board of Trade of Metropolitan Toronto): Merci. J'ai déjà fait faire des copies de notre mémoire que nous faisons distribuer. Il y en a d'autres exemplaires au fond de la salle si vous en voulez. Je ne vais pas lire tout ce mémoire, je vais simplement me contenter d'en survoler les grands points.
J'ai écouté les autres intervenants et j'ai entendu une seule personne aborder vraiment les questions qui nous étaient posées. Comme vous le savez, ces questions étaient les suivantes: Quel doit être l'objectif de réduction du déficit; quelles sont les mesures permettant d'accroître ou d'améliorer l'emploi; et quels sont les domaines fédéraux dans lesquels on pourrait envisager une privatisation ou d'autres compressions.
Je commencerai par la question la plus importante, celle de la réduction du déficit. C'est profondément ennuyeux et c'est vraiment un exercice de comptabilité, mais c'est incontestablement quelque chose que votre comité a en grande partie la responsabilité de surveiller. Plusieurs d'entre nous autour de cette table aimeraient bien pouvoir aborder toutes sortes d'autres considérations nettement moins casse-pieds et beaucoup plus intéressantes que le problème de comptabilité auquel nous sommes ramenés, mais c'était là-dessus que portait la première question.
Je suis fermement convaincu que la question en jeu n'est pas d'en arriver à réduire le déficit, mais bien à le supprimer complètement. C'est indispensable à mon avis car cela présente certains avantages. En fait, cela représente des avantages dans l'immédiat.
Si nous retournions en arrière à l'année 1993-1994 et que le même comité se penchait sur la même question, et si nous étions alors passés immédiatement à un budget équilibré, il y aurait une différence de près de 13 milliards de dollars dans les dépenses entre cette année-là et l'année financière à venir. Autrement dit, si vous voulez trouver 13 milliards de dollars grâce aux coupures, je peux vous dire où les trouver: dans le service de la dette. Vous auriez pu, ou plutôt nous aurions - car je ne veux blâmer personne - notre pays aurait pu équilibrer le budget en 1993-1994 et disposer l'année suivante de près de 13 milliards de dollars de plus à répartir.
Il importe également d'examiner la question sur-le-champ étant donné les risques en cause. Or, en tant qu'économiste - et je sais que votre comité a déjà entendu des interventions au sujet de l'exactitude des prévisions économiques - je sais que notre groupe ne peut pas faire de prévisions économiques exactes au moment où l'économie est à un tournant; autrement dit, lorsque nous entrons dans une période de récession. Vous constaterez toutefois que pratiquement tous les économistes canadiens, collectivement, sont conscients de l'existence d'un risque considérable, d'une forte probabilité de récession d'ici la fin de la présente décennie. Pour cette raison, il importe de redresser nos affaires financières de sorte que si les résultats économiques n'atteignent pas les objectifs escomptés, les finances publiques puissent s'y adapter.
Le vérificateur général a fait dernièrement un gros effort, dans son avant-dernier rapport, pour faire ressortir l'importance de la dette, de l'obtention d'un ratio dette/PIB stable si nous voulons créer un milieu financier durable et stable pour notre pays. En réalité, si nous voulons en arriver à un ratio stable et durable entre la dette et le PIB, cela dépend non seulement du numérateur, la dette, mais également du dénominateur, le PIB. En raison du ralentissement économique que nous avons déjà constaté cette année, ce rapport d'importance cruciale est en fait en train d'augmenter plus rapidement, au lieu de diminuer.
Ainsi, si l'on veut stabiliser le ratio entre la dette et le PIB, ce qui, selon le vérificateur général, est la première étape essentielle vers le redressement de nos finances, la façon la plus sûre et la plus évidente de procéder est de supprimer le déficit.
À en juger d'après les conversations que j'ai eues avec des personnes qui travaillent sur les marchés financiers, tant au Canada qu'à l'étranger, je pense qu'il faudrait adopter l'orientation suivante. Il faut atteindre l'objectif de 3 p. 100 promis pour l'an prochain, mais il incombera au ministère des Finances à ce moment-là de nous fournir des prévisions allant au-delà de cette année-là. Il lui faudra alors proposer un objectif de 2 p. 100 ou moins.
Il est également d'importance cruciale de franchir un pas de plus, à mon avis, en établissant des prévisions pour les années ultérieures, dans l'intérêt du pays et de la communauté financière. Il faut que ce rapport soit ramené à zéro avant la fin du mandat du gouvernement actuel. L'année financière 1998-1999 serait un objectif idéal. Le déficit devra alors non pas être réduit mais complètement supprimé.
Permettez-moi d'aborder brièvement les deux autres questions qui nous ont été posées. On s'interroge sur les mesures que nous pouvons prendre ou que peut prendre le gouvernement, sur le genre de milieu à instaurer pour favoriser une croissance économique propice à la création d'emplois dans notre pays. En toute franchise, si regrettable que ce soit, tout stimulant fiscal susceptible d'être utilisé pour atténuer les conséquences regrettables des compressions... cet argent a déjà été dépensé. Nous n'avons pas de fonds disponibles pour des mesures d'incitation économique. La plupart des gens qui examinent les comptes en sont conscients.
Quant à la question des mesures de dépenses précises, nous avons fait certaines propositions détaillées. Je ne vais pas les passer en revue l'une après l'autre. Je pourrais en signaler une ou deux comme questions de principe. Il s'agit fondamentalement des mêmes suggestions que nous avons faites au comité l'an dernier.
Premièrement, le pays ne peut plus se permettre le genre de péréquation financière à laquelle nous sommes habitués. Lors de sa création, notre pays n'était pas censé être un État-providence mais plutôt une confédération de provinces ayant les mêmes intérêts sur le plan politique et commercial. L'un des obstacles les plus insidieux à notre croissance globale a été le transfert continuel de ressources aux économies les moins viables, au lieu de favoriser les migrations de population vers les régions du pays où la croissance économique était plus rapide.
Nous recommandons l'abolition de tous les programmes de stimulants industriels régionaux. Je vous conseiller d'examiner le rapport du vérificateur général pour bien comprendre à quel point ces programmes ont été inefficaces.
Nous proposons une réforme beaucoup plus poussés du programme d'assurance-chômage que ce qui a été déjà envisagé. Au cas où la conjoncture économique se détériorait plus rapidement que prévu - c'est-à-dire plus rapidement que l'ont prévu le ministère des Finances ou les économistes - nous proposons un plan d'urgence, lequel pourrait consister en une réduction générale de 5 p. 100 de tous les paiements effectués par le gouvernement, à moins qu'il ne s'agisse de contrats totalement indépendants.
Nous faisons quelques autres suggestions dans notre mémoire. Pour le moment, je m'en tiendra là et je vous remercie de nous avoir écoutés.
Le président: Merci, monsieur McIver.
[Français]
J'aimerais vous présenter les députés qui sont avec nous. Ce sont, du Québec, M. Pierre Brien et M. Paul Crête;
[Traduction]
de la Colombie-Britannique, M. Herb Grubel; du Manitoba, M. David Walker; de Toronto, Maria Minna; du Manitoba, M. Ron Fewchuk; de Toronto, M. Jesse Flis; de l'extérieur de Toronto,M. Julian Reed; de l'extérieur de la région métropolitaine de Toronto également, Alex Shepherd; et de l'Île Manitoulin, Brent St. Denis.
[Français]
Monsieur Brien, s'il vous plaît.
M. Brien (Témiscamingue): J'aimerais poser ma question aux gens de la Chambre de commerce, mais je voudrais d'abord faire un petit commentaire.
Une des premières mesures suggérées est de remettre en question le système de redistribution de péréquation du régime fédéral. Cela me fait un peu sourire parce que ce système reflète un certain nombre de déséquilibres.
Le jour où l'Ontario sera prête à remettre en question le fait qu'elle reçoit 50 p. 100 des dépenses en recherche et développement et qu'elle est la grande bénéficiaire du Pacte de l'automobile, on pourra peut-être alors discuter des paiements de péréquation ou de transfert aux provinces.
Vous dites, au point 6 ou 7, qu'on doit réduire les subventions aux entreprises. J'ai de la difficulté à comprendre, parce que vos membres, qui sont des entreprises, sont les premiers à frapper à nos bureaux et à nous demander à grands cris des subventions et de l'aide.
Comme représentants de ces membres, vous dites qu'on doit diminuer les subventions aux entreprises, mais individuellement, chacun de vos membres se comporte comme s'il voulait en obtenir. Il y aurait peut-être moyen de mettre de l'ordre chez vos membres à ce niveau-là. C'est ma première question.
Deuxièmement, j'aimerais que vous commentiez une mesure suggérée par la Coalition ontarienne des organisations d'aînés et aînées, qui demande le rapatriement de la dette extérieure au Canada. On entend beaucoup parler de cette mesure, mais il y a des effets à cela. J'aimerais que vous expliquiez la vision de la Chambre de commerce sur ce point. Si M. Goldberg veut répliquer à ce que vous direz, il pourra le faire.
[Traduction]
M. McIver: Merci beaucoup. Je répondrai à votre première question, celle des subventions aux entreprises.
Il va sans dire que si l'on décide d'offrir des subventions aux entreprises, les gens vont vouloir en profiter. La Chambre de commerce de Toronto ainsi que la Chambre canadienne de commerce, intervenant au nom des entreprises de tout le pays, ont toujours eu pour position que les subventions aux entreprises sont un système inefficace et que le fait de les offrir a pour seule conséquence que d'autres entreprises y voient là l'occasion de profiter d'un programme.
Inutile de vous dire - vous avez déjà eu maintes occasions de constater l'inefficacité de ces subventions - que si vous les offrez, si vous dites que le programme existe et que vous encouragez les entreprises à participer, celles-ci ne vont pas s'en priver. Tout cela me paraît tout à fait logique.
Quant au rapatriement de la dette, je répondrai en ma qualité d'économiste. Nous avons souvent une vision trop restreinte des choses. Il est bien beau de dire qu'il faut rapatrier la dette, mais en réalité, ce que nous faisons et que nous avons fait de propos délibéré, sans peut-être en être pleinement conscients, c'est emprunter à des intérêts étrangers uniquement pour maintenir notre niveau de vie actuel.
Comment faut-il faire pour rapatrier la dette? Il a été proposé que la Banque du Canada la rachète, mais c'est donner carte blanche à l'inflation. La Banque du Canada imprime les billets et d'un seul coup, tous ceux d'entre nous qui détiennent une partie de cette dette, soit à titre personnel, soit dans nos régimes de pension ou nos REER, constatent que la valeur, le pouvoir d'achat de cette dette a subitement diminué de 25 p. 100.
Il nous faut donc continuer d'emprunter uniquement parce que nous tenons absolument, dans notre pays, à consommer plus que nous ne gagnons chaque année. C'est aussi simple que cela.
M. Goldberg: À mon avis, si l'on récupérait les 20 p. 100 d'un REER qu'il est possible d'utiliser aux fins d'investissement pour l'investir au Canada, cela contribuerait en grande partie à rapatrier notre dette. En outre, nous pourrions faire appel à la Banque du Canada qui, à ma connaissance, n'a pas fait grand-chose pour essayer de rapatrier la dette. Je ne vois pas ce qui nous empêche de supprimer une partie de l'investissement étranger auquel servent les fonds de nos REER, et notamment cette tranche de 20 p. 100.
[Français]
Le président: Merci beaucoup. Monsieur Grubel, allez-y.
[Traduction]
M. Grubel (Capilano - Howe Sound): Merci, monsieur le président.
J'aimerais dire rapidement un mot à M. Goldberg. Nous avons entendu proposer cette idée à maintes reprises au cours de nos audiences. Nous avons invité à témoigner des experts, pas seulement des économistes du secteur privé mais également des experts en matière financière et tous sont d'avis qu'il n'existe pas de correspondances semblables.
Le problème c'est que les Canadiens, du jour au lendemain, peuvent investir leur argent à l'étranger dès qu'une occasion s'offre à eux. La solution du rapatriement de la dette extérieure ne permettra donc pas de redonner une liberté économique pour adopter une politique différente. Je peux vous donner l'assurance que si c'était une solution réalisable, elle aurait été mise à l'essai.
Vos suggestions en matière de politique me préoccupent vivement. À mon avis, si on les adoptait, nous perdrions à tout jamais toute liberté dans notre pays. Comme on a pu le voir dans de nombreux pays du monde, l'adoption de ce genre de politique a abouti à la création d'un État policier. C'est un énorme sacrifice à faire pour combler le déficit, mais je respecte votre opinion, monsieur.
Si vous me le permettez, j'aimerais poser une question à la représentante de la Coalition contre la taxe d'entrée.
Akbar Said était l'un de mes étudiants. En fait, j'étais l'un de ses directeurs de thèse.
Je sais très bien que, en moyenne, les jeunes immigrants très instruits qui arrivent au Canada - et j'en faisais partie - paient des impôts beaucoup plus élevés que la moyenne et utilisent moins de services sociaux que la moyenne des gens. Les électeurs le savent également et de ce fait, ils estiment que la venue dans notre pays de gens de l'étranger coûte extrêmement cher. Ces immigrants s'attendent à un niveau de vie beaucoup plus élevé que dans leur pays d'origine et c'est pourquoi ils veulent venir au Canada.
Nous traversons une crise financière grave. Tous les témoins que nous avons entendus nous ont parlé des nombreuses causes très nobles auxquelles nous pourrions consacrer des fonds. Mes électeurs me demandent pourquoi, à leur arrivée, ces immigrants ne paient pas une partie des frais qu'ils nous imposent à tous, au détriment de toutes les autres bonnes causes que nous pourrions financer.
J'aimerais que l'une des représentantes de cette coalition me dise ce que je devrais répondre à mes électeurs.
Mme Go: Il vous incombe d'éduquer vos électeurs au sujet de la contribution que les immigrants font à notre pays. Si vous en êtes conscient et si vous savez que les immigrants paient déjà plus d'impôts et de taxes qu'ils ne reçoivent de services, il vous incombe de le leur dire.
Et surtout, l'immigration au Canada n'est pas simplement une question de dépenses ou d'avantages économiques. Nous avons des obligations internationales à l'égard des réfugiés. Nous avons des obligations nationales, internes, à l'égard de la réunion des familles pour permettre aux Canadiens de retrouver les membres de leur famille encore à l'étranger. Tout cela fait partie intégrante de notre politique d'immigration.
Il ne s'agit pas simplement de savoir qui a les moyens de venir et qui ne les a pas. Il faut également tenir compte de toutes les autres questions fondamentales.
Ce qui est totalement inacceptable dans la taxe d'entrée, à l'instar de bon nombre des autres politiques d'immigration adoptées par le gouvernement libéral actuel, c'est qu'elle désigne deux groupes de personnes, les immigrants et les réfugiés, et leur fait porter le chapeau de tous nos problèmes économiques; ou encore on leur reproche de ne pas faire une contribution suffisante, ce qui ne fait qu'exacerber le racisme au sein de notre société pendant que vous êtes assis autour de cette table et parlez de votre électorat... sans remettre en cause les hypothèses sous-jacentes...
M. Grubel: Veuillez m'excuser, madame, mais certains de mes électeurs dont je parle ont un revenu inférieur à la moyenne. Ils vivent au seuil de la pauvreté.
Comme l'a montré M. Axworthy, l'immigrant moyen paie plus d'impôts et de taxes que le Canadien moyen, car son revenu est supérieur à la moyenne. Par définition, cela signifie que ces gens devraient assumer une plus grande partie des frais des services gouvernementaux.
Mme Go: Leur contribution est plus élevée. Comme vous l'avez signalé, ils paient plus d'impôts car ils gagnent plus d'argent. Toutefois, il y a également de nombreux immigrants qui arrivent au Canada sans argent - ils ont des compétences qui ne sont pas reconnues dans notre pays - et certains qui sont ici pour demander l'asile politique car ils fuient la persécution dans leur pays. Qu'allez-vous dire à vos électeurs au sujet de ces personnes?
M. Crawford: Je m'interroge au sujet de la première question. Je suis venu ici - et j'ai eu simplement une séance d'information - après avoir reçu une lettre me demandant d'indiquer mes objectifs en matière de réduction du déficit, les mesures à prendre pour y parvenir, etc. C'était les questions dont j'espérais traiter.
Dans leurs allocutions liminaires, les autres témoins ont tous traité de questions fiscales les intéressant directement, etc.
À mon avis - et je l'ai dit lors de réunions de comité antérieures - si nous fixons un objectif en matière de déficit, il faut que celui-ci soit définitif, compatible avec notre Constitution et que nous prenions les mesures qui s'imposent pour l'atteindre. Je me demande si le comité dispose d'une documentation ou de témoignages qui pourraient me servir de cadre de référence pour me permettre de faire une analyse plus approfondie, au lieu d'entendre toutes les observations faites de part et d'autre et qui n'ont peut-être rien à voir avec la question à l'étude.
Le président: Nous vous remettrons volontiers toute la documentation par la suite.
Tous les autres témoins qui ont comparu ont présenté clairement leur position et compris, d'après la documentation qui leur avait été envoyée, les questions sur lesquelles se penche notre comité.
Mme Tripp: Je voudrais répondre aux questions qui nous ont été posées avant notre comparution.
Bien entendu, dans notre mémoire et dans mes remarques liminaires, j'ai voulu souligner la responsabilité du Canada sur la scène internationale.
Quant aux solutions, il ne suffit pas à mon avis de venir ici dire au gouvernement de ne pas sabrer dans l'APD, mais plutôt d'offrir des solutions concrètes.
Une des solutions que nous proposons - elle est écrite dans notre mémoire - consiste pour le gouvernement à envisager sérieusement d'imposer les gains de casino et de loterie.
Cela représente des sommes considérables. Pour l'Ontario uniquement, cela se chiffre à des centaines de millions de dollars. C'est de l'argent gagné facilement par les Canadiens. Nous sommes l'une des sociétés qui paie le plus d'impôts dans les pays du monde occidental et, pourtant, après un investissement minime, parfois de un dollar pour acheter un billet de loterie, les gens reçoivent des sommes énormes. C'est un secteur où les contribuables canadiens n'auraient rien à redire à ce que le gouvernement prélève un impôt et, selon le genre de régime adopté - on pourrait le calculer en fonction d'une échelle mobile - cela contribuerait du moins en partie à réduire notre déficit.
Une telle initiative permettrait de protéger les intérêts de certains représentants ou certains organismes présents aujourd'hui, et notamment l'APD, grâce aux revenus - de cette source. C'est pourquoi j'aimerais proposer cette solution, au lieu de demander simplement au gouvernement de ne pas effectuer de coupure.
Mme Minna (Beaches - Woodbine): Monsieur McIver, vous avez dit que vous souhaitez que le déficit soit totalement supprimé. D'autres l'ont dit avant vous. Ce que j'aimerais savoir, c'est précisément comment faire pour supprimer le déficit sans entraîner de véritable perturbation sur le plan social, car c'est dans le domaine social que les coupures ont été effectuées jusqu'ici, et à vous entendre, il continuera d'en aller ainsi à l'avenir.
L'autre question porte sur les forces internationales. Certains ont parlé d'une taxe Tobin; les compagnies transnationales et les répercussions... le contrôle total qu'elles exercent... car elles peuvent investir leurs liquidités n'importe où; le marché international, où il semble que quelqu'un joue au monopoly, à la roulette russe, avec les investissements sur les marchés internationaux et les activités de courtage. Le marché n'est pas réglementé à l'échelle internationale. Pour autant que je sache, les pays industrialisés du monde occidental ne semblent pas prêts à examiner l'incidence négative que les marchés internationaux et la mondialisation ont eue sur les pouvoirs ou la puissance de l'État nation.
Je me demande si vous avez réfléchi à cette question, pour voir comment nous pouvons agir équitablement en essayant d'une part de supprimer le déficit, comme vous le proposez, tout en maintenant d'autre part un certain équilibre dans notre société, tant au Canada qu'à l'étranger. Cela nous concerne, mais cela concerne également d'autres pays. Nous ne sommes ni indépendants ni isolés à cet égard.
M. McIver: Je répondrai en premier à votre seconde question. Je serais tenté d'y répondre par une autre question: pourquoi réglementer la communauté internationale? Qu'est-ce qui nous oblige à le faire? Vivons-nous dans une société qui part automatiquement du principe que la libre entreprise...
Mme Minna: Je peux répondre à cette question, si vous le désirez. Puis vous pourrez y répondre également, ce qui favorisera le dialogue entre nous.
D'après moi, nous avons toujours considéré que le secteur privé était parfait. C'est une erreur à mon avis. En fait, mes amis du secteur privé disent que ce n'est pas tout à vrai car nul n'est parfait en ce monde. Nous nous fondons donc sur une fausse hypothèse.
Par ailleurs, ce qui intéresse avant tout les sociétés privées transnationales ou multinationales, et à juste titre, ce sont leurs bénéfices personnels. C'est le mandat qui leur incombe à l'égard de leurs actionnaires. Ce n'est pas le mandat d'un pays. En conséquence, comment faire la part des choses? S'il n'y a aucune réglementation et que l'unique objectif, l'unique vision des marchés soit un bénéfice concret pour les investisseurs, il faut à un moment donné rétablir l'équilibre.
M. McIver: Je vais essayer d'éviter de me lancer dans une discussion philosophique...
Mme Minna: Je dis simplement que je pars de ce principe.
M. McIver: Si l'on voit ce qui se passe dans d'autres pays, d'autres systèmes du monde, et l'effet qu'a produit la disparition de la motivation de bénéfice... je ne vois rien à redire... loin de moi l'idée qu'il faut absolument tout déréglementer. De nombreuses activités doivent absolument être réglementées. Je voudrais simplement dire en passant... Est-il vraiment indispensable de le faire?
Partons du principe qu'il est souhaitable de réglementer la communauté financière internationale. La seule véritable raison qui a empêché les autres gouvernements de le faire, c'est que c'est impossible. C'est là qu'est le véritable problème. L'adoption d'une taxe du type Tobin est une bonne idée, mais on semble oublier que l'on essaie ainsi d'extirper de fortes sommes à la communauté financière internationale. Le ratio est peut-être infime, mais il ne s'agit pas moins d'une somme considérable.
M. Grubel l'a dit lui-même, lorsqu'on commence à tripoter le cadre réglementaire, les Canadiens sont parmi les premiers à investir à l'étranger. Et cela se comprend. Lorsque vous pensez que votre revenu de retraite, votre sécurité de revenu sont en jeu, vous n'hésitez pas à prendre ce genre de mesure.
J'en reviens à votre première question. Vous me demandez comment je procéderais. Il me serait facile de vous dire que vous êtes les représentants élus du peuple et que c'est à vous qu'il incombe de faire quelque chose. C'est normal dans une certaine mesure car notre gouvernement tient les comptes, connaît parfaitement la situation financière du pays et est chargé de choisir, au nom des Canadiens, les programmes qu'il faut maintenir et ceux qui doivent être supprimés.
C'est une réponse factuelle et j'en suis conscient, mais dans notre mémoire, nous signalons certains secteurs qui méritent réflexion. Il y aurait possibilité de réaliser des économies considérables. Merci beaucoup.
Le président: Je signale à Mme Minna et aux autres membres du comité que nous avons reçu une demande de deux autres personnes qui souhaitent témoigner ce matin et qui ont chacune un très bref exposé. Ces personnes n'étaient pas inscrites à l'ordre du jour, mais je propose de leur donner maintenant rapidement la parole. Je le ferai si vous n'y voyez pas d'inconvénient, et si les autres membres du groupe de témoins qui, eux, nous ont avertis de leur présence, sont d'accord également. Ça va?
Des voix: D'accord.
Le président: Je voudrais vous présenter Josephine Grey, du Regroupement des familles à faibles revenus. Madame Grey, pourriez-vous nous dire brièvement l'objet de votre exposé?
Mme Josephine Grey (Regroupement des familles à faibles revenus): En un mot, nous nous opposons au fait qu'aucun organisme sur cette liste ne représente les familles à faibles revenus. C'est l'une des raisons de notre présence aujourd'hui.
Nous tenons également à déclarer que les questions posées par votre comité nous semblent tendancieuses et trop restreintes. On semble partir du principe qu'il n'existe aucune autre solution que...
Le président: Vous avez le droit de nous soumettre toutes les idées que vous voulez. Nous sommes à l'écoute et n'hésitez pas à vous exprimer librement.
Mme Grey: Il existe à mon avis de nombreuses solutions autres que l'orientation actuelle que prend le gouvernement canadien en vue de déléguer aux provinces la responsabilité du bien-être de ses citoyens. Comme en témoigne l'exemple de la province de l'Ontario, le fait de renoncer à toute responsabilité et de refuser d'appliquer le régime d'assistance publique du Canada, qui est toujours en vigueur, a eu des effets catastrophiques pour la population de notre province.
À mon avis, le gouvernement actuel devrait se donner pour priorité la mise en place de mesures de protection équivalentes ou supérieures à celles que prévoyait le Régime d'assistance publique du Canada pour éviter que les gens se retrouvent sans abri et meurent de faim à cause de mesures irréfléchies et brutales de gouvernements comme celui qui tient les rênes de notre province.
Je pense également qu'il existe une foule d'autres façons de rembourser un déficit qui, à mon avis, a été exagéré. Voici quelques possibilités: demander aux sociétés et aux banques de payer leurs arriérés d'impôt; redonner à la Banque du Canada le pouvoir nécessaire pour contrôler davantage notre économie et faire comprendre au gouvernement que le bien-être de ses citoyens est plus important que les versements soi-disant dus à des gens extrêmement riches et qui n'ont pas besoin de mon argent, de l'argent de mes enfants ou de n'importe quel autre membre des familles à revenus faibles ou moyens de notre pays. Merci.
Le président: Merci beaucoup, madame Grey.
Madame Ng, vous représentez le Comité canadien d'action sur le statut de la femme.
Mme Winnie Ng (représentante régionale pour l'Ontario, Comité canadien d'action sur le statut de la femme): Je suis la représentante régionale pour le sud de l'Ontario.
Le président: Nous avons entendu le témoignage des représentants du CCA à Ottawa il y a deux jours à peine. Avez-vous d'autres éléments à nous apporter?
Mme Ng: Voici ce que nous voulons ajouter pour présenter la position de l'Ontario, et plus précisément du sud de la province. Je suis accompagnée d'un groupe de représentantes de divers organismes communautaires qui se battent contre le programme de Mike Harris. Comme vous le savez, nous assistons actuellement en Ontario à une restructuration et à de profondes coupures dans tous les domaines, et ce sont les femmes et les enfants qui en sont les principales victimes.
Je témoigne aujourd'hui pour dire que cela fait partie du programme du gouvernement Harris et aussi de celui du gouvernement fédéral. Nous sommes ici pour dire que toutes ces consultations pré-budgétaires sont une mascarade en vue de ce que vous allez annoncer dans le budget de février prochain.
Nous sommes ici pour dire non au Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. En adoptant ce transfert, vous allez en fait démanteler tout ce qui unissait notre pays. Il est absurde que, au moment où un comité sur l'unité fait tout son possible pour essayer de trouver des moyens de préserver l'unité de notre pays, vous décidiez de mettre en oeuvre le TCSPC et de détruire le tissu social de notre pays.
Nous affirmons que vous renoncez à la responsabilité qui vous incombe, en tant que gouvernement fédéral, de maintenir des normes nationales. Vous laissez une plus grande marge de manoeuvre aux gouvernements provinciaux, comme les gouvernements de M. Harris et de M. Klein, en leur facilitant la tâche. À la suite de ces initiatives, les femmes, les enfants et les familles vivront dans une pauvreté encore plus dévastatrice. C'est inadmissible, à notre avis.
Je crois sincèrement que si vous prenez la peine de sillonner le pays pour entendre les Canadiens et si vous nous revenez ensuite avec les mêmes propositions que vous comptez de toute façon présenter, alors tout cela ne sera que de la rigolade. D'autres viendront s'exprimer ici même.
Nous disons distinctement non au transfert social canadien. Si vous voulez empêcher l'éclatement du pays, le gouvernement fédéral ne devrait pas avoir la mauvaise conscience ou l'hypocrisie politique de présenter une chose pareille.
Le président: Merci beaucoup.
Mme Ng: Il y en a d'autres qui peuvent venir s'exprimer.
Le président: Je m'excuse, j'allais proposer, par respect pour les témoins qui nous ont donné préavis, de prendre des arrangements avec les autres témoins qui n'ont pu comparaître sous votre égide d'intervenir peut-être à la fin de la journée. Nous aurons peut-être le temps de les entendre alors, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. De cette manière, nous respecterons les droits de tous les témoins. C'est assurément avec plaisir que nous entendons vos exposés ce matin.
Monsieur Jesse Flis, vous avez la parole.
M. Flis (Parkdale - High Park): Merci, monsieur le président.
Je voudrais mettre les choses au clair. Dans son exposé, Avvy Go a parlé de la taxe d'entrée.
Je suis violemment contre toute forme de capitation. Si j'ai bien compris, un groupe de Canadiens a déjà été frappé d'une taxe qui les visait spécifiquement; en l'occurrence, il s'agit d'une taxe de service qui est imposée à tous. Nous exigeons un droit pour la délivrance de passeports, par exemple. Par conséquent, je ne pense pas qu'on puisse qualifier cette taxe de capitation. C'est manifestement une taxe sur le service rendu. C'est une politique de paiement par l'usager décrétée par le gouvernement.
Par ailleurs, je voudrais poser une question à Vision mondiale. J'accueille favorablement leur mémoire dans lequel ils invitent le gouvernement à se rapprocher de l'objectif de 0,7 p. 100 du PNB pour l'APD. Cet objectif avait été fixé par le regretté Lester B. Pearson. Malheureusement, nous glissons et nous sommes actuellement très loin de cet objectif.
Par ailleurs, vous nous avez fait une suggestion concrète en disant qu'il fallait taxer les casinos et les loteries. Mais vous savez également que nous avons un déficit annuel ainsi qu'une dette publique totale supérieurs à 500 milliards de dollars.
Quelle serait votre recommandation pour ce qui est d'accroître le montant de l'APD en direction du 0,7 p. 100? Amorceriez-vous ce mouvement après que nous aurions équilibré notre budget et effacé toute la dette publique, ou bien recommandez-vous de commencer dès la prochaine année financière? Dans ce dernier cas, où prendrait-on les fonds additionnels?
Mme Tripp: Monsieur Flis, nous recommandons de ne pas attendre et de nous y attaquer tout de suite. D'ici l'an prochain, le Canada sera tombé à 0,27 p. 100 du PNB, très loin de l'objectif de 0,7 p. 100. Depuis plusieurs années, nous ne cessons de perdre du terrain à cet égard.
Je voudrais seulement rappeler aux gens qu'en dépit de tous les problèmes qui affligent le Canada, notre pays arrive encore en tête de liste pour l'indice du développement humain établi par le PNUD. Cet indice est fondé sur l'accès à l'éducation et aux soins de santé, l'alphabétisation, l'espérance de vie, l'économie, etc. Il ne faut pas perdre cela de vue dans le contexte international.
En plus des loteries et des casinos, nous avons identifié...soit dit en passant, c'est une recommandation qu'avait faite votre propre comité l'année dernière et les estimations quant aux recettes étaient très modestes, autour de 200 millions de dollars. Ce sont des chiffres très prudents et le gouvernement pourrait toucher des recettes très supérieures grâce à une telle taxe.
Il faudrait par ailleurs réfléchir sérieusement à la comparaison entre les dépenses consacrées à la défense par opposition à celles consacrées à l'APD. D'ici l'an prochain, les dépenses pour la défense seront de 5,4 fois supérieures à celles consacrées au développement international.
Nous savons que la sécurité est un dossier important. C'est reconnu au Canada et dans le monde et le Canada a pris des engagements en matière de sécurité. Mais ce n'est pas à coup de dépenses militaires que l'on réalise la sécurité. La sécurité dépend du développement international, qui permet aux gens d'avoir des ressources et les compétences voulues pour assurer leur propre développement et prendre en charge leur propre situation.
Actuellement, les Forces armées canadiennes et les ONG canadiennes constatent qu'elles travaillent de plus en plus côte à côte dans les régions où il y a des conflits. Prenons deux pays comme l'Angola et le Cambodge, où les dépenses militaires du Canada ont notamment été consacrées au déminage, par opposition à d'autres secteurs militaires plus traditionnels. Ces deux pays pourraient amorcer leur lente remontée vers la stabilité économique et n'exigeraient plus alors les interventions d'urgence que nous avons connues dans le passé.
Vous devez bien sûr tenir compte de plusieurs dossiers, mais en voici deux. Les loteries et les casinos, et d'autre part le fait que les dépenses consacrées à la défense devraient être davantage alignées sur l'engagement pris par le Canada d'assurer la prospérité économique dans le monde, au lieu d'être 5,4 fois supérieures à ce que nous dépensons pour l'APD.
Merci.
M. Flis: Je suis député au Parlement de la circonscription de Parkdale - Hyde Park; or il y a beaucoup de petites entreprises familiales le long des rues Queen, King, Roncesvalles, Bloor, etc.
J'aimerais bien entendre ce qu'ont à dire les gens ici présents qui ont personnellement de l'expérience dans la gestion d'une petite entreprise ou qui connaissent des gens qui en ont, ce qu'ils ont à dire au sujet de la TPS et de ce que le gouvernement devrait faire dans ce dossier.
Quand je rencontre des gens dans des assemblées publiques, certains disent qu'ils ont déjà tous les logiciels d'ordinateurs qu'il leur faut et qu'ils peuvent s'accommoder de la TPS puisqu'il faut réduire le déficit. La majorité veulent qu'on supprime cette taxe parce qu'elle nuit à leur commerce. J'aimerais entendre ce que vous avez à dire à ce sujet.
Le président: M. Ferrabee brûle de répondre à cette question.
M. Ferrabee: Nous disons dans notre mémoire que le gouvernement devrait envisager sérieusement d'opérer une refonte de la TPS. Je sais qu'il y a eu beaucoup de suggestions très diverses.
Pour notre part, nous avons proposé une taxe sur les opérations commerciales qui aurait pour conséquence de faire baisser le taux considérablement. Ce serait beaucoup plus facile à administrer et répondrait à certaines de nos préoccupations que j'ai illustrées au tableau derrière moi et aussi dans notre exposé.
Le problème de la TPS, à nos yeux, sont les exemptions qu'elle comporte et qui la rendent inutilement complexe. Nous dépensons à peu près six fois plus qu'un pays comme la Nouvelle-Zélande, par habitant, pour administrer cette taxe, principalement à cause des exemptions. Nous croyons également que le taux pourrait baisser considérablement.
Nous croyons que nous pourrions la rendre beaucoup plus facile à administrer pour les entreprises, mais il est très important que le gouvernement fédéral et le comité commencent par simplifier la taxe au niveau fédéral avant de commettre l'erreur de l'amplifier au niveau provincial sous prétexte d'harmonisation. C'est une taxe problématique dont les problèmes intrinsèques ne disparaîtront pas si on l'harmonise avec la taxe provinciale. On se retrouvera aux prises avec les mêmes problèmes. Nous aurons simplement deux taxes fondues en une.
Nous croyons que le comité devrait prendre le temps d'y réfléchir. Il devrait examiner sérieusement la possibilité d'une taxe sur les transactions commerciales et en faire la recommandation au ministre des Finances.
Le président: Merci, monsieur Ferrabee.
Monsieur Mahaffy.
M. Mahaffy: Nous voudrions répondre aux préoccupations soulevées ici par les gens au sujet du transfert social canadien. Si nous soulevons cette question au comité, ce n'est pas pour défendre des intérêts spécialisés, mais plutôt parce que la mise en oeuvre du transfert social canadien risque selon nous de provoquer le retrait du gouvernement fédéral de nombreuses initiatives visant à établir un cadre social au Canada.
Nous croyons que le transfert a été introduit par le gouvernement à titre de mesure temporaire pour résoudre des problèmes avec lesquels le Comité des finances se débat actuellement. Mais nous vous invitons à considérer que toutes ces questions sont inextricablement liées; la santé économique du pays est inextricablement liée à la santé sociale, etc. Toute mesure financière doit être prise dans le contexte d'un leadership gouvernemental plus large pour ce qui est d'une refonte de tous les programmes et services.
On pourrait économiser beaucoup d'argent et améliorer grandement l'efficacité en réformant les programmes sociaux du Canada et en les rendant non seulement plus efficaces, mais aussi mieux adaptés aux problèmes des gens. Nous estimons que c'est la dualité dont il faut tenir compte dans toute approche de gestion financière.
Le président: Monsieur Mahaffy, cette recommandation est pure musique à nos oreilles. S'il y a des inefficacités dans le système actuel, si nous gaspillons de l'argent et n'en donnons pas pour leur argent aux gens, surtout ceux qui en ont le plus grand besoin, nous sommes tout à fait disposés à travailler de concert avec vous pour trouver les mesures qui s'imposent. Peut-être que notre personnel pourrait s'entretenir avec vous après la séance afin d'avoir plus de détails.
Merci.
M. Mahaffy: Merci.
Le président: Monsieur Moorewood.
M. Moorewood: Dans la foulée de ce que vient de dire Jim Mahaffy et pour revenir aux observations faites par M. Grubel, je précise que le groupe OCASI est une association qui représente 140 organismes qui travaillent au niveau communautaire en Ontario. Ce sont à mon sens des organisations pluridisciplinaires et communautaires comme il y en a d'un bout à l'autre du pays et qui sont très efficaces et efficientes.
M. Flis a parlé de la petite entreprise et de la TPS. Les gens que nous servons se préoccupent peut-être de choses comme la TPS, mais surtout, ils veulent savoir comment utiliser leurs ressources, leurs points forts et leur expérience pour se lancer en affaires.
Je suis troublé par les propos de M. Grubel, quand il regarde autour de lui et qu'il dit qu'il y a beaucoup de bonnes causes. À mon sens, ce ne sont pas simplement de bonnes causes. Je pense que ce sont des activités fondamentales, des programmes et des initiatives qui contribuent fortement à assurer la santé collective et économique.
S'il est au courant de l'apport de la fiscalité et de la faible utilisation des fonds sociaux, je sais qu'il est également conscient des obstacles auxquels les gens se butent pour ce qui est de faire bénéficier la collectivité de cette expérience et de cette compétence. Il faut mettre de l'argent et concentrer ces programmes sur les compétences, afin de libérer ces trésors de compétences que recèle notre collectivité.
Deuxièmement, il y a des organisations qui ont mis 20 ans à bâtir l'infrastructure communautaire et les réseaux de bénévoles. Voici qu'on nous dit qu'il faut se décharger de nos responsabilités sur les bénévoles. En même temps, on coupe les structures permettant aux gens de s'organiser, qu'il s'agisse du développement économique communautaire, de la prestation des services sociaux ou du soutien pur et simple.
Il faut trouver le moyen de réaffecter et de maintenir ces dépenses au niveau communautaire. C'est un investissement économique extraordinairement important.
Le président: Merci, monsieur Moorewood.
[Français]
Je donne la parole à M. Crête, qui aimerait vous poser quelques questions.
M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): J'ai bien aimé les dernières interventions sur le rôle des gouvernements provinciaux et celui du gouvernement fédéral. Je suis un peu étonné qu'on me dise que ce n'est certainement pas le niveau de gouvernement où se trouvent les gens qui fait qu'ils sont plus ou moins humains. Il n'y a pas automatiquement de rapport. On ne peut pas dire que quand quelqu'un est au gouvernement fédéral, il est plus humain, alors qu'il n'aurait pas nécessairement la même réaction s'il était dans une province.
Cela nous ramène à notre problème de structure: il y a un gouvernement qui a le pouvoir de taxer et le pouvoir de dépenser dans tous les secteurs, et un autre gouvernement, le gouvernement provincial, qui, lui, est sur la ligne de feu et n'a pas ces pouvoirs.
Si j'étais fédéraliste, j'envisagerais de corriger les structures de façon profonde pour être certain que lorsqu'un gouvernement pose des gestes, il sera évalué sur sa capacité de remplir à ces conditions. Il y aurait donc des champs de compétence et de taxation clairs. N'est-ce pas cela, la source du malaise qu'on vit partout au Canada actuellement?
Le président: Qui aimerait répondre?
Mme Connie Laurin-Bowie (coordonnatrice et liaison avec le gouvernement, Association canadienne pour l'intégration communautaire): Puis-je répondre, monsieur le président? Je vais répondre en anglais.
[Traduction]
À titre d'association nationale, nous avons examiné les dossiers de la décentralisation et nous avons discuté de la réforme des structures. Vous remarquerez dans notre mémoire que nous avons présenté un argument. Au lieu d'en discuter sur le plan du rôle des gouvernements fédéral et provinciaux, nous avons traité la question sous l'angle du besoin de réformer l'ensemble des programmes sociaux.
À nos yeux, le problème du transfert social canadien est double. Premièrement, le montant que l'on transfère, comme vous le savez pertinemment, est une perte nette par rapport à ce que les provinces touchaient aux termes du RAPC et du FPE. Par conséquent, elles seront moins en mesure de s'attaquer aux réformes sociales qui doivent être entreprises. Comme les gens derrière nous pourront en attester, en Ontario, ces transferts ont entraîné partiellement ce que Mike Harris appelle sa révolution du bon sens.
La question, pour nous, ce n'est pas de savoir quel gouvernement doit se charger des programmes sociaux; c'est plutôt de savoir quelles normes il faut mettre en place au Canada, quel que soit le gouvernement qui est chargé de les faire respecter. Donc, nous avons proposé une vérification sociale qui permettrait aux deux niveaux de gouvernement de rendre compte aux Canadiens à l'égard des programmes sociaux à un niveau que nous jugeons acceptable dans notre société.
Nous avons tenté d'aborder d'autres questions. Si vous examinez la façon dont fonctionnent nos programmes sociaux à l'heure actuelle, pour recevoir n'importe quel genre de soutien, les personnes ayant une incapacité, à titre d'exemple d'un groupe marginalisé, doivent dépendre de l'assistance sociale. Dès qu'on sort de ce système d'aide sociale et qu'on essaie de trouver un emploi, on perd tout, si l'on a une incapacité. Il y a des exemples de cela du côté du soutien des enfants, et aussi dans toute une gamme d'autres programmes sociaux.
Les problèmes qui nous affligent au Canada sont attribuables au fait que les gens sont exclus. Donc, oui, il faut réformer tout le système et dans certains dossiers, le gouvernement peut s'en charger plus efficacement. Nous appuyons les initiatives économiques locales, mais nous croyons qu'il faut une discussion nationale en vue d'établir les principes et objectifs de base de notre société.
[Français]
M. Crête: Ainsi, vous ne faites pas de distinction entre des normes canadiennes et des normes fédérales. Les normes, dans une vision fédéraliste, pourraient être celles de l'ensemble du Canada, mais ce ne serait pas nécessairement la vision du gouvernement fédéral. Cela pourrait être la vision de l'ensemble de ce que pourrait être le Canada.
[Traduction]
Mme Laurin-Bowie: Nous reconnaissons qu'il faut faire une distinction entre les objectifs nationaux et fédéraux, comme vous l'avez signalé. Aux yeux de notre association, ce qu'il importe de retenir, c'est que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à l'égard de ces principes et objectifs nationaux; il doit les établir et amener les gens à en discuter. Tout au moins, il devrait agir à titre de catalyseur pour que les localités et les provinces discutent et décident de ces objectifs nationaux.
Le président: Monsieur Chance, vous avez la parole.
M. Chance: Monsieur le président, j'ai été offusqué d'entendre la suggestion de M. Grubel qui a dit que nous représentons de bonnes causes autour de cette table aujourd'hui. Les enfants du Canada sont bien plus qu'une bonne cause, monsieur Grubel. Ils sont notre avenir et votre avenir.
Essentiellement, vous avez écarté du revers de la main et sans faire de détails toutes les suggestions faites par M. Goldberg. Il a donné certaines suggestions que vous avez rejetées sous prétexte qu'elles sabraient la liberté des Canadiens. Ceux d'entre nous qui sont à l'aise jouissent certainement de liberté.
Est-ce être libre, monsieur Grubel, que d'avoir 1,47$ par personne par jour, sans compter le logement, la nourriture et les vêtements? C'est ça, le seuil de la pauvreté. Beaucoup de Canadiens vivent bien en deça du seuil de la pauvreté. Au Canada, en 1993, 41 p. 100 des couples âgés de 30 ans et moins qui ont des enfants vivaient sous le seuil de la pauvreté; 91 p. 100 des femmes seules avec enfants vivaient sous le seuil de la pauvreté, 8 000$ en-dessous de ce seuil.
Je vous dis, monsieur Grubel, que ce n'est pas ça, la liberté.
Le président: Merci.
Monsieur Crawford.
M. Crawford: Je voudrais revenir sur un certain nombre de points, surtout sur ce que M. Flis disait au sujet de la petite entreprise que je peux me targuer de représenter. Mon observation est une critique en fait. Je trouve que ce serait utile relativement à ce que l'on vient de dire au sujet du chômage.
Je suis arrivé au Canada à titre d'immigrant reçu. Je suis citoyen canadien depuis une vingtaine d'années et j'ai essayé de diriger des entreprises; en fait, j'aime à croire que j'ai un certain succès dans la gestion d'entreprises.
Ce qui ne va pas à mon avis, et j'en arrive à votre question, c'est qu'il y a des lacunes fondamentales dans les structures financières qui semblent nous être imposées alors même que nous essayons de faire marcher une entreprise et d'embaucher des gens. Ces lacunes fondamentales deviennent punitives au point que j'évite d'embaucher des gens. Je ne peux tout simplement pas me le permettre parce que le régime fiscal fait en sorte qu'il devient avantageux de ne pas embaucher.
Au lieu de cela, nous les employons, ce qui est différent. Je crois que les politiques d'embauche pourraient être soutenables dans le sens qu'elles seraient valables pour les gens. Pour ma part, j'aimerais assurément avoir un emploi qui me soutiendrait, moi et mes enfants. Je ne peux pas le faire, les taxes sont punitives.
Quant à votre autre question sur la TPS, Michael a fait des observations là-dessus.
Pour autant que je sache, quand la TPS est imposée à une compagnie, c'est un autre coût punitif. Je pense que c'est une réflexion des structures fondamentales dont on parle et qui sont également pleines de lacunes. Il me semble que la perception de la TPS est un coût non seulement pour nous, mais aussi pour vous. En outre, le coût en est plus élevé que les avantages. Autrement dit, vous payez plus qu'un dollar pour chaque dollar que vous percevez. Je trouve que c'est insoutenable également et cela reflète le mauvais état des structures financières.
Le président: Merci, monsieur Crawford.
[Traduction]
Monsieur Shepherd, avez-vous une question?
M. Shepherd (Durham): Je pose ma question à l'Association canadienne de vie communautaire. On a beaucoup parlé du transfert social. Dans vos recommandations, vous faites remarquer qu'il existe peut-être bien un niveau de ces transferts au-delà duquel, pour une raison ou pour une autre, les provinces refuseraient de négocier l'établissement de normes nationales, etc.
Avez-vous cherché à préciser ou à définir ce niveau, pour savoir si c'est fondé sur la population ou sur le montant global accordé?
Mme Laurin-Bowie: Nous nous sommes déjà penchés sur cette question. Je crois que nous avons utilisé le terme «non négligeable». C'est un terme assez vague, et je sais qu'il y a des gens au sein de notre organisation et pour le gouvernement qui essaient de préciser le montant qu'il faudrait prévoir afin d'encourager les provinces à venir à la table pour discuter des «principes et objectifs». Je pense que c'est l'expression que le ministre a utilisée dans son allocution budgétaire.
La réponse très courte est que nous n'avons pas de chiffre exact. Nous croyons que dans le cas de certaines provinces, les transferts actuels sont très proches de ce montant négligeable. Nous savons qu'en vertu du RAPC, les transferts diminuent. Nous parlons du Transfert social canadien et de nos préoccupations, mais il ne faut pas en conclure que nous proposons le RAPC comme la solution à ces problèmes. Tout comme le gouvernement, nous savions que le RAPC posait problème, et nous avons toujours préconisé qu'on le modifie.
Je crois que le gouvernement fédéral pourrait au moins nous promettre de ne pas réduire le montant en-dessous d'un certain niveau, et là aussi il faut préciser ce montant pour que les provinces voient que c'est dans leur intérêt de venir à la table des négociations. Si ces dernières savent qu'on va réduire le montant demain et qu'on va continuer de couper à l'avenir, elles concluront, quel que soit le montant qu'elles reçoivent, qu'il n'est pas de leur intérêt de venir à la table des négociations. Elles diront tout simplement non, car il s'agit d'une mesure provisoire.
Le président: Merci, monsieur Shepherd.
Nous en sommes maintenant venus au moment où je demanderai à tous nos participants de prendre 15 ou 20 secondes pour résumer leurs points de vue.
Nous avons deux nouveaux participants à la table. Représentez-vous deux autres groupes?
Nous avons Lorraine Michael, représentant la Coalition oecuménique pour la justice économique. Aimeriez-vous faire une déclaration très courte? Je suis désolé, mais il nous reste très peu de temps.
Mme Lorraine Michael (représentante, Coalition oecuménique pour la justice économique): Oui, j'aimerais faire une déclaration très courte.
Le président: On vous écoute.
Mme Michael: Je travaille pour la Coalition oecuménique pour la justice économique. Je comparais aujourd'hui en tant que membre du personnel.
Cette année, nous n'avons pas reçu d'information portant sur les consultations. Nous avons fait des exposés par le passé.
Cependant, même si nous avions reçu l'information et présenté un mémoire, nous n'aurions eu rien de nouveau à ajouter, mais je vous enverrai quand même, monsieur le président, nos deux derniers rapports sur la justice économique, qui traitent des questions économiques que votre comité devrait examiner, et en particulier, et je sais que vous détestez cela mais je vais le dire quand même, des taux d'intérêt et de la nécessité d'établir des politiques de rechange. Nous vous ferons parvenir notre rapport.
Je voulais intervenir à titre particulier parce que cette année j'ai été membre de la délégation canadienne, en tant qu'observateur représentant le secteur des ONG, à la conférence de Beijing et aux derniers pourparlers préparatoires à la conférence de Copenhague, qui se sont tenus en janvier à New York. J'ai donc eu cette année deux occasions de faire partie d'une délégation canadienne en tant qu'observateur des ONG, et d'écouter notre gouvernement lors de conférences internationales s'engager à protéger la population, les enfants et les femmes du Canada.
À titre particulier, je milite dans ce domaine depuis presque 30 ans. Je suis fatiguée de devoir répéter les mêmes choses. Si notre coalition faisait partie de votre forum aujourd'hui, nous dirions sans doute les mêmes choses, mais je suis fatiguée de les répéter et de voir que les différents paliers de gouvernement n'écoutent pas. Et cela vaut également pour les gouvernements fédéral et provinciaux. On ne peut pas nier le rapport qui existe entre les deux paliers. Même s'il y a des domaines de compétence différents, les décisions prises à un niveau ont une incidence sur l'autre.
Au nom de tout le monde réuni dans cette salle, au nom des gens que j'ai représentés pendant des années, je dois dire que je suis fatiguée de nous entendre parler constamment de ces problèmes sans que personne n'écoute.
Des voix: Bravo!
Mme Michael: C'est pourquoi je ne me comporte plus de façon polie et courtoise. Je suis fatiguée.
Le président: Et bien, je suis content que malgré votre fatigue, vous ayez quand même décidé de comparaître ici.
Je demanderais à tous nos participants de résumer brièvement leurs points de vue en réitérant les points principaux qu'ils voulaient souligner.
Madame Blair.
Mme Blair: Le Canada fait l'envie de beaucoup de ses partenaires commerciaux qui nous voient comme un pays progressiste et humanitaire. Cependant, compte tenu de l'absence d'équité et de justice dans notre pays, nous ne pouvons pas continuer de nous présenter ainsi sur la scène internationale.
Même s'il y en a qui pensent que les immigrants et les réfugiés représentent un fardeau pour notre société, il faut reconnaître que ces derniers possèdent des compétences et des aptitudes qui sont actuellement sous-utilisées. Leurs pays d'origine ont investi dans ces gens, et nous devons reconnaître la contribution qu'ils peuvent apporter au Canada.
Pour assurer le renouveau économique et créer une économie durable, il faut faire appel aux aptitudes et aux compétences de tous les Canadiens. C'est dans cet esprit que je vous demande aujourd'hui de bien vouloir lire notre mémoire. Nous y avons fait des recommandations précises que nous vous invitons à examiner.
Le président: Merci, madame Blair.
C'est dommage que nous n'ayons pas plus de temps. J'aimerais discuter plus longuement de ces questions avec vous, mais nous avons d'autres témoins non prévus.
Monsieur Ferrabee, s'il-vous-plaît.
M. Ferrabee: Le message principal que nous voudrions transmettre à votre comité est que le gouvernement fédéral doit réfléchir sérieusement à la possibilité d'abolir cette taxe et, comme nous l'expliquons dans notre mémoire, de la remplacer par la taxe sur les opérations commerciales. Cela réglera le problème des exemptions qui ont tant contribué au déclin de notre marché, que nous décrivons ici, et corrigera aussi la situation absurde où on ne paie pas de taxe sur 727 dollars de caviar alors qu'il faut en payer une dans un restaurant pour acheter un carton de lait à un enfant.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Farrabee.
Monsieur Crawford.
M. Crawford: En guise de conclusion, j'aimerais juste réitérer qu'il faut établir une règle interdisant l'accumulation de déficits. Il faut mettre en place une infrastructure financière fixant des objectifs mesurables et réalisables.
Les programmes gouvernementaux doivent faire l'objet d'un examen plus poussé qu'ils ne semblent l'être à l'heure actuelle avec ce genre de comité. Il me semble, mais je n'ai pas les faits...
Le président: Merci, monsieur Crawford.
M. Crawford: Je vois que cette machine magique...
Le président: Monsieur Chorostecki, s'il-vous-plaît. Je regrette que vous n'ayez pas eu l'occasion d'intervenir plus tôt.
M. Jim Chorostecki (témoignage à titre personnel): J'aurai peut-être de la difficulté à faire mon exposé en quinze secondes, mais je ferai de mon mieux.
Tout d'abord, j'aimerais présenter mes excuses aux autres témoins ici aujourd'hui. Je ne voudrais pas prendre une partie du temps qui vous est imparti, mais vous devez comprendre que je n'ai aucune organisation pour me représenter comme tel.
Je suis père d'un enfant sérieusement handicapé. C'était seulement tard hier soir que j'ai appris que cette réunion devait avoir lieu, quand un ami qui avait lu un article dans The Toronto Star traitant de notre situation difficile, m'a téléphoné pour m'en informer.
La situation difficile dans laquelle nous nous trouvons découle directement des décisions de votre comité et du gouvernement. Je dois essayer de vous expliquer en très peu de temps que vos décisions en matière de financement des soins accordés aux enfants sévèrement handicapés comme mon fils ont une incidence directe sur sa vie et sur celle de notre famille.
Il faut se pencher sur les problèmes réels de notre économie, mais il faut aussi tenir compte des répercussions de ces décisions sur les familles, les gens les plus vulnérables de notre société, les enfants, mon enfant...
Dans cette situation, il faut tenir compte des conséquences de vos décisions. Quand vous parlez de réduire le budget des services de soins de santé ou de le transférer du gouvernement fédéral aux provinces, la réalité est que vous envisagez de réduire les services qui maintiennent mon fils en vie.
Je ne suis qu'un parent parmi d'autres. Je préférerais que nous soyons mieux organisés, et peut-être que vous nous obligerez à le faire. Peut-être que vous nous obligerez à nous organiser pour que nous puissions être certains d'être invités à comparaître devant ce genre de réunion.
Le président: Vous serez le bienvenu à l'avenir.
Mme Tripp: J'aimerais me reporter au titre de notre mémoire, «International Assistance is a Sound Investment» (L'aide internationale est un bon investissement). Je suis contente d'entendre dire que les enfants du monde entier, et non seulement ceux du Canada, représentent notre avenir.
Il faut que le Canada respecte cet engagement. Le Canada s'est engagé à consacrer 0.7 p. 100 de son PNB à l'aide publique au développement. Cet investissement dans un monde prospère et sécuritaire n'aidera pas seulement ceux qui le reçoivent directement, mais aidera à bâtir un meilleur avenir pour les Canadiens aussi.
Nous pouvons commencer par imposer le produit des gains de loterie et des jeux de casino. Nous pouvons examiner nos dépenses au chapitre de la défense pour qu'elles répondent mieux aux besoins de l'aide internationale.
Je crois que les Canadiens appuient le développement international et les valeurs que le Canada a toujours représentées tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de notre pays.
M. Mahaffy: Le message que nous avons entendu ce matin est que nous ne constituons pas un groupe d'intérêts divergents, mais que nous nous préoccupons tous du genre de société que nous voulons créer au Canada. Dans ce contexte, nous comprenons que la sécurité sociale et l'équité sont essentielles à une croissance économique stable, et que le fait de se concentrer uniquement sur la réduction des dépenses entraînera à court terme des coûts économiques et sociaux plus importants.
Les programmes et les mesures budgétaires du gouvernement fédéral doivent viser à faire participer un plus grand nombre de Canadiens à la vie et à l'économie de notre société. À titre d'exemple, empêcher les personnes handicapées d'avoir accès au marché du travail coûte environ 4,6 milliards de dollars à l'économie.
M. Chance: En guise de conclusion, je dirais que beaucoup de jeunes Canadiens, y compris les jeunes et les enfants, sont contrariés et estiment que le gouvernement ne tient pas compte de leurs besoins. Il y a de moins en moins d'égalité des chances dans la société canadienne.
Pour éviter le chaos social à l'avenir, il faut bâtir une société qui fasse appel à son capital social. La jeunesse contrariée ne constitue pas une bonne base de capital social. Je vous prie de tenir compte de leurs intérêts et de ceux des enfants dans vos consultations budgétaires. Essayez de trouver une méthode plus équitable de répartir le fardeau fiscal, comme celle que M. Goldberg a proposée, et la richesse de demain. Mais surtout, ne faites rien pour affaiblir le pouvoir du gouvernement fédéral et pour permettre à des gens comme le premier ministre Harris de faire la sourde oreille aux besoins des enfants.
M. Goldberg: Quoique je représente les personnes âgées de l'Ontario, nos recommandations s'appliquent à la population dans son ensemble.
Pour nous, la solution idéale ne serait pas de réduire les services sociaux mais plutôt de mettre en place un régime fiscal juste et équitable qui aurait pour effet d'augmenter les recettes gouvernementales.
Je ne peux partager une opinion exprimée plus tôt, selon laquelle toute tentative de contrôler l'économie, et surtout de réduire le recours à des refuges fiscaux à l'étranger, mènerait à un État policier. Une telle conclusion est tout à fait absurde et n'a aucun rapport avec les efforts qu'un gouvernement fait pour contrôler l'économie.
M. McIver: Je vous demanderais tout d'abord de bien vouloir lire notre mémoire. Nous l'avons écrit pour qu'on le lise.
En deuxième lieu, je constate ici une contradiction apparente entre la besoin en investissements sociaux et la réalité comptable.
Si je peux faire une suggestion au comité, je vous demanderais d'avoir recours à votre propre personnel de recherche ou bien au ministère des Finances pour calculer l'écart qui nous sépare du plein emploi. Une fois cela établi, nous comprendrons le contexte dans lequel il faudra prendre les décisions extrêmement difficiles qui s'imposeront à l'avenir.
Le président: Merci beaucoup.
À nos témoins, permettez-moi de dire ceci. Personne n'a dit que nous ne devrions pas nous préoccuper du déficit ou de la dette. Ce que j'apprécie, c'est que la plupart d'entre vous nous ont fait des suggestions sur une approche possible autre que d'effectuer des coupures dans les secteurs que vous représentez. Vous avez parlé avec éloquence et force du déficit social auquel nous faisons face au Canada - les personnes handicapées, les enfants vivant dans la pauvreté, les prestataires d'assistance sociale - et vous avez parlé du déficit social qui existe à travers le monde de façon générale.
J'aimerais dire à Lorraine Michael que si vous aviez été là l'an dernier, vous auriez su que nous allions nous réunir cette année et que nous nous réunirons l'an prochain.
À ceux et à celles qui ne reçoivent pas d'invitation spéciale, vous n'en n'avez pas besoin. Demandez-nous de comparaître, si vous le voulez bien, la prochaine fois.
Certaines des solutions proposées ont été très intéressantes. Nous avons le point de vue avancé par M. Goldberg, appuyé par M. Chance, selon lequel la politique monétaire représente une solution facile et sans douleur: la banque peut imprimer de l'argent et peut porter la dette.
Je regrette, mais vous avez bel et bien dit imprimer de l'argent, car si la Banque du Canada prend en charge plus de dettes, c'est ce que cela veut dire. C'est la réalité des choses.
Mais s'il y avait une façon d'agir sans douleur, vous supposez que ces voies-là en politique monétaire ne sont pas empruntées délibérément. Je serai heureux d'obtenir plus d'informations auprès de vous-même et des économistes qui vous appuient, parce que vous n'êtes pas le seul à nous dire cela, et s'il y a une solution sans douleur pour nous sortir de ce gâchis, je serai certainement le premier à vouloir l'entendre.
On nous a fait de nombreuses suggestions pour réduire la dette et le déficit, les plus importantes étant une réduction des dépenses au chapitre de la défense; l'élimination de la déduction relative aux repas d'affaires et aux frais de représentation, ce que le groupe des restaurateurs n'aimeraient pas; la taxe Tobin; une restriction sur les investissements; et ainsi de suite. On nous a suggéré des façons d'envisager l'emploi et le partage des emplois à l'avenir. Vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion. J'espère qu'en essayant d'atteindre ces objectifs de réduction du déficit et de la dette, personne n'oubliera les personnes les plus défavorisées au pays.
Au nom de tous les membres du comité, je vous remercie.
Nous allons prendre une pause. Cette partie de la séance est levée.