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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le vendredi 1er décembre 1995

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[Traduction]

Le président: Bonjour. Pourrais-je ouvrir la séance?

Le Comité permanent des finances de la Chambre des communes est heureux d'être ici à Vancouver et enchanté de recevoir un groupe de témoins aussi distingués dans le cadre des audiences pré-budgétaires.

Sont présents, Alice McQuade, de la Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique; Jock Finlayson, du Business Council of British Colombia; de la Fédération canadienne des étudiants, Michael Gardiner; de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, Jim Facette et John Redfern; de l'Association des éducateurs de l'Institut collégial de Colombie-Britannique, Roseanne Moran et Ed Lavalle; et de la Confederation of University Faculty Associations of British Colombia, Robert Clift et Lee Keener; Harold Daykin, à titre personnel; de l'Institut Fraser, Robin Richardson, de Tourisme Victoria, Lorne Whyte; de la Chambre de commerce de Vancouver, John Hansen, Darcy Rezac et Karen Wilkinson; et de l'Université Simon Fraser, Carole Gerson.

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Est-ce que je me suis vraiment si mal débrouillé que ça?

Bienvenue. Nous commencerons par vous donner à chacun trois minutes pour exposer votre position et à la fin nous vous redonnerons à chacun la possibilité d'en faire un résumé. Entre les deux vous aurez tout le temps possible et imaginable pour nous exposer tous vos arguments pendant la période de questions et de réponses.

Qui aimerait commencer?

Monsieur Gardiner.

M. Michael Gardiner (représentant, Fédération canadienne des étudiants): Je représente la Fédération canadienne des étudiants qui compte actuellement 90 000 membres en Colombie-Britannique et 400 000 pour l'ensemble du Canada, y compris le Yukon.

Je suis ici parce que l'impact des dernières réductions du financement fédéral et des futures réductions qui sont maintenant proposées nous inquiète beaucoup ainsi que la situation financière générale du pays.

Pour ce qui est des réductions déjà faites, le coefficient de la Loi du financement des programmes établis a été gelé au niveau de 1990 et l'impact cumulatif pour la Colombie-Britannique a été de 7,5 milliards de dollars.

Depuis, il y a eu une augmentation spectaculaire des frais de scolarité qui a eu pour conséquence de rendre encore plus difficile l'accès aux études postsecondaires en Colombie-Britannique et partout au Canada, d'en faire décliner la qualité et de provoquer une surcharge des établissements.

J'ai utilisé le terme «accès» et j'ai parlé de réduction de cet accès. L'augmentation de ces droits de participation a des conséquences multiples. Le pourcentage accru des frais de scolarité dans ce qu'il en coûte pour fréquenter un établissement postsecondaire a des conséquences multiples. D'aucuns prétendent qu'il n'est pas nécessaire que ces compressions budgétaires se traduisent automatiquement par une augmentation des frais de scolarité mais ce sera selon toute vraisemblance le résultat parce que, d'après nous, le postsecondaire est un des domaines qui a été, financièrement, le plus durement touché et qui n'a d'autre solution que d'optimiser ses gains d'efficacité.

Nous sommes arrivés à un point où toute réduction supplémentaire menace de se traduire directement par une augmentation massive des frais de scolarité qui aura un impact spectaculaire sur le nombre d'étudiants ayant les moyens de s'inscrire dans des établissements postsecondaires, sur les choix qu'ils feront lorsqu'ils essaieront de déterminer leurs options après l'école secondaire et sur les décisions de ceux et de celles qui sont déjà sur le marché du travail et qui ont besoin de compléter leur éducation ou de se recycler.

Tout le monde est d'accord pour reconnaître l'importance d'améliorer la formation de la main-d'oeuvre et le niveau d'éducation pour que le Canada entre dans le XXIe siècle sur la base d'une économie prospère.

Le genre de réductions proposées dans le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux ne fournira pas l'accès qui sera nécessaire.

La question qui se pose est alors la suivante: quelles sont les solutions qui s'offrent à nous que proposons-nous?

Un certain nombre de suggestions nous ont été proposées sous forme de questions. Je vais essayer de répondre à certaines.

Nous croyons à la nécessité de prendre des mesures pour ralentir la croissance du déficit et de la dette. Nos raisons sont peut-être différentes de celles des autres participants autour de cette table, mais nous croyons qu'à mesure que le déficit s'accroît notre capacité à financer les programmes sociaux diminue et nous rend donc moins justifiés de les réduire.

Nous ne pensons pas que la simple réduction des dépenses soit la seule solution à notre problème du déficit. Nous pensons que les revenus sont un problème majeur et nous croyons que ce sont les dépenses fiscales auxquelles le gouvernement fédéral doit s'attaquer en priorité.

De plus, nous croyons indispensable d'utiliser plus que cela s'est fait jusqu'à présent, la Banque du Canada, créée en 1935 pour tirer le Canada d'une situation de crise financière et le remettre sur le chemin de la prospérité, pour faire descendre les taux d'intérêt et en corollaire la valeur de notre dette. Nous croyons qu'une combinaison de mesures financières et monétaires est indispensable au type de changements nécessaires à notre pays.

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Le président: Merci, monsieur Gardiner.

M. Lavalle parle au nom de la College Institute Educators' Association.

M. Ed Lavalle (président, College Institute Educators' Association of British Colombia): Je suis très heureux d'être ici au nom de notre organisation qui représente les intérêts professionnels et syndicaux de 6 000 membres du personnel enseignant et du personnel de soutien qui travaillent dans les collèges de notre province.

Nous vous avons communiqué un mémoire. C'est celui qui a une couverture bleue. Puisque vous l'avez, et que je suppose que vous le lirez à un moment ou à un autre, je me limiterai à quelques-uns des points majeurs qu'il contient.

J'aimerais commencer par parler du climat créé probablement dans tout le pays par ces propositions de réductions budgétaires. Je ne sais si c'est vrai ou non, mais quelqu'un m'a dit l'autre jour qu'un collègue de l'Est lui avait téléphoné pour lui demander comment trouver où s'inscrire dans un petit collège en Colombie-Britannique. Il lui a répondu de s'inscrire dans un grand collège et d'attendre les résultats de la réduction des transferts fédéraux.

Cela décrit assez bien la situation. Je suppose, étant donné toutes les études fédérales et les travaux du Centre canadien du marché du travail et de la productivité, que nul n'ignore l'évolution du caractère de l'éducation. L'éducation et la formation sont importantes, et 75 p. 100 de la population active devront vraisemblablement compléter leur éducation et se recycler pour conserver leur place sur le marché économique. C'est la clé de la prospérité future tant sur le plan individuel que sur le plan national.

Le soutien du fédéral est essentiel. Il est indispensable que le gouvernement fédéral continue à jouer un rôle dans le financement de la formation et de l'éducation postsecondaire. Les changements structurels qui devront être apportés si ces réductions ont lieu n'ont pas été suffisamment examinés.

Nous croyons également puisque la coupure dans le domaine de la formation n'est pas totale, que les fonds de formation devraient être canalisés dans le système public par l'intermédiaire des gouvernements provinciaux et non pas par l'intermédiaire de particuliers, d'établissements ou de groupes au niveau local.

Cette diminution du financement fédéral nous inquiète vivement. Michael a déjà indiqué l'effet cumulatif des mesures prises par les Conservateurs. Nous estimons, bien entendu, que cela ne fera qu'aggraver la situation. À la page 3 de notre mémoire, nous indiquons qu'en Colombie-Britannique, la participation fédérale par le biais des transferts comptait pour 53 p. 100 du total des subventions pour les collèges et les universités en 1986 et qu'aujourd'hui elle ne compte plus que pour 32 p. 100. Nous ne savons vraiment pas comment la province va pouvoir faire face aux réductions anticipées cette année de 477 millions de dollars par rapport à l'année précédente avec un effet cumulatif pour l'année prochaine de 824 millions de dollars.

À mon avis, le problème est que le transfert social canadien est créateur d'instabilité. À la page 4 de notre mémoire, nous disons que la politique énoncée par le futur gouvernement pendant sa campagne électorale - et bien entendu, il a été élu - dans laquelle il se fixait comme priorité la stabilité et l'absence de surprise à tous les niveaux de gouvernement nous avait paru encourageante. Cela ne s'est pas traduit dans la réalité. Un an plus tard, la transition se fait-elle en douceur comme nous l'avait promis M. Martin? Pas du tout. Pouvons-nous parler de stabilité et d'absence de surprises? Non, nous sommes en situation de crise sans moyens d'adaptation à court terme.

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S'il est nécessaire de redistribuer les responsabilités entre le provincial et le fédéral, il faut que l'atterrissage se fasse en douceur. Il faut soumettre l'éducation postsecondaire à un examen national qui donne au public, de cette province, par exemple, la possibilité de débattre de la nécessité de normes et d'équivalences nationales dans son système postsecondaire. Votre comité devrait recommander au gouvernement de reconsidérer le calendrier et l'objectif principal des réductions qu'il entend proposer dans le projet de loi C-76.

Le président: Merci, monsieur Lavalle.

De la Confederation of University Faculty Associations of British Colombia, Rober Clift et Lee Keener.

M. Lee Keener (vice-président, Confederation of University Faculty Associations of British Colombia): Nous représentons plus de 3 000 enseignants du cycle supérieur de la Colombie-Britannique. Nous vous remercions infiniment de cette invitation à discuter du budget fédéral.

Nous aimerions répondre à une des questions posées: Comment des mesures budgétaires pourraient-elles être utilisées pour créer un climat propice à la création d'emplois et à la croissance? Nous limiterons nos commentaires à un ou deux postes particuliers du budget. Il y en a un qui a déjà été mentionné, le transfert en matière de santé et de programmes sociaux. Nous aimerions également parler du déclin des budgets du Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie et du Conseil de recherche en sciences humaines.

Cette proposition de transfert social nous inquiète vivement, inquiétude que nous partageons avec les étudiants et les collèges de Colombie-Britannique et tout le reste du pays, j'en suis sûr. Nous croyons que les conséquences seront très négatives pour l'économie canadienne, tout particulièrement à long terme et peut-être aussi à court terme. Personne ne croit que les provinces pourront combler le manque à gagner au niveau des paiements de transfert en ce qui concerne le financement des établissements d'enseignement postsecondaire.

Nous croyons que ce manque à gagner aura pour effet de réduire le nombre d'étudiants qui aura accès à notre système d'éducation postsecondaire, comme leurs représentants nous l'ont déjà dit, de réduire la qualité de l'éducation dispensée et de réduire le niveau et la qualité de la recherche universitaire. À terme cela nous mènera à une main-d'oeuvre moins qualifiée, à un déclin de la productivité dans le contexte d'une économie mondiale de plus en plus compétitive, à un déclin de la recherche universitaire et au renforcement de ces conséquences puisque le système éducatif produira de moins en moins de bons enseignants et de chercheurs productifs.

Le déclin des budgets du CRSNG et du CRSH nous inquiète aussi vivement bien que les coupures ne soient pas aussi spectaculaires que dans d'autres secteurs. En particulier, nous estimons que la recherche fondamentale - c'est-à-dire la recherche libre - est spécialement vulnérable. C'est le genre de recherche qui souvent rapporte des dividendes intéressants mais qui a besoin d'être soutenue financièrement à plus long terme. Il n'est pas toujours évident de trouver des partenaires industriels pour ce genre de recherche. Elle est la victime désignée de coupures.

Les preuves que les universités de Colombie-Britannique - c'est certainement vrai presque partout ailleurs - ont une influence très directe sur la santé économique ne manquent pas. Une étude récente, de 1994, démontre que l'impact de la seule université de Colombie-Britannique sur l'économie provinciale représente plus de 3 p. 100 du produit intérieur brut. Une autre étude récente conclut que chaque dollar investi dans l'université de Victoria rapporte 1,26$ à la communauté.

Permettez-nous de vous rapporter une ou deux petites observations faites entre autres par le Conseil des sciences de Colombie-Britannique. Elles sont tirées d'un rapport intitulé High Tech Industries in B.C.: Agenda for Growth:

1. L'excellence des universités de la province à produire des technologiques commercialisables ainsi que des diplômés qualifiés dans les disciplines techniques.

Le samedi 18 novembre il y avait un article dans le Sun sur John Polanyi, un Canadien, qui a gagné le Prix Nobel de chimie en 1986. Il dit que si de son temps la recherche avait été aussi peu financée qu'aujourd'hui il aurait quitté le pays depuis longtemps.

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Le budget nous cause donc de graves inquiétudes. Nous sommes certes prêts à envisager toutes sortes d'initiatives de coopération pour répondre aux diverses difficultés pressantes du Canada, mais nous craignons des conséquences négatives à long terme si les universités en supportent plus que leur part.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Keener.

Nous passons maintenant à Peter McCue de la Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique.

M. Peter McCue (premier vice-président, Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique): Bonjour, et merci de l'invitation. Je crois que vous avez une copie de mes notes.

J'aimerais commencer par dire que pour nous l'éducation est un facteur fondamental de démocratie et d'égalité. Nous croyons également que ces deux valeurs sont menacées par la philosophie de réduction du déficit du gouvernement actuel, philosophie qui menace la viabilité de l'éducation et d'autres services publics.

Bien que l'année dernière nous ayons abordé ces questions de politique sociale avec le Comité permanent du développement des ressources humaines, il nous semble que c'est le ministère des Finances qui pilote les changements proposés au filet de sécurité sociale canadien. Pour les enseignants, l'impact des politiques de déficit sur l'éducation est déjà apparent. Dans notre propre province, le ministre de l'Éducation a décidé de réduire de 80 millions l'année prochaine le budget accordé aux écoles primaires et secondaires. Le ministre attribue cette nécessité au désengagement du gouvernement fédéral.

Notre fédération reconnaît la réalité de la crise des finances publiques du pays. Notre endettement est un problème grave et restaurer plus ou moins rapidement l'équilibre budgétaire est une nécessité. Cependant, fixer des cibles précises nous enferme dans une mentalité réductrice et à pensée unique. Notre capacité à réduire le déficit ne sera pas déterminée par des coupures, mais par la croissance économique et cette croissance ne peut être prédéterminée.

Nous considérons que notre endettement est un problème grave parce que pour commencer quand une part aussi importante des dépenses publiques est consacrée au paiement de l'intérêt sur la dette, la conséquence nette est un énorme transfert de richesses dans les poches des plus riches et dans les coffres des institutions financières qui dépensent proportionnellement une plus petite partie du total de leurs revenus et, par conséquent, sapent les effets stimulants habituels des dépenses gouvernementales.

Deuxièmement, les énormes paiements d'intérêts que verse actuellement le Canada ont un effet terrible sur la redistribution des revenus. Le paiement de milliards sous forme d'intérêts, versés pour la majeure partie aux plus riches, financé principalement par les impôts des contribuables à faible revenu et à revenu moyen est une caractéristique éminemment inéquitable de nos finances publiques.

Troisièmement - et c'est peut-être l'aspect le plus grave de la crise de nos finances publiques - notre dépendance croissante à l'égard de bailleurs de fonds étrangers pour financer nos dettes nous met à la merci des institutions étrangères. Notre capacité à mener notre propre politique monétaire et notre propre politique de taux d'intérêt est sévèrement limitée par la part étrangère de notre endettement public.

Nous sommes intimement convaincus qu'il n'est absolument pas nécessaire de réduire les dépenses sociales - c'est-à-dire la santé, l'éducation et les services sociaux en général - même d'un dollar. La réduction du déficit peut être accomplie d'une manière beaucoup plus efficace et plus juste en recourant à d'autres mesures. Nous estimons même que réduire le déficit en réduisant les dépenses sociales va à l'encontre du but recherché. Nous croyons à l'opportunité des mesures suivantes pour rétablir l'équilibre budgétaire.

D'abord, nous devons considérer comme une priorité nationale de rapatrier notre dette nationale.

Deuxièmement, il faut donner l'ordre à la Banque du Canada de baisser les taux d'intérêt. Si les taux d'intérêt réels - soit la différence entre le taux d'inflation et le taux légal - demeuraient à leur niveau historique de 1,4 p. 100, on estime que le gouvernement fédéral pourrait réduire les intérêts sur sa dette de plus de 6 milliards de dollars au cours de la première année, et de 10 milliards la troisième année.

Un troisième aspect de la crise financière est la réduction de la part que représentent les impôts sur les sociétés par rapport aux recettes du gouvernement. Ces impôts n'ont cessé de diminuer régulièrement depuis la fin des années cinquante. En 1950, les impôts sur les sociétés représentaient environ 25 p. 100 des recettes fédérales. Ils n'en représentent plus que 7 p. 100. M. Neil Brooks, professeur de droit fiscal à Osgoode Hall a montré qu'en percevant de 10 à 15 p. 100 des 44 milliards de dollars du compte des impôts sur le revenu reportés des sociétés, qu'en percevant un impôt minimal sur les sociétés et qu'en mettant fin à des échappatoires suspectes, le gouvernement pourrait récupérer jusqu'à 8 milliards de dollars par année.

Quatrièmement, l'autre aspect de la fiscalité que le gouvernement doit revoir, c'est l'impôt sur le revenu des particuliers. Le Canada est l'un des deux pays de l'OCDE à ne pas percevoir d'impôt sur les successions. Nous pourrions aussi lever un impôt sur la richesse sur les éléments d'actif nets, un peu comme ce que font de nombreux pays européens. À nouveau, Neil Brooks, autorité en matière de fiscalité, a calculé que de modestes augmentations des niveaux d'impôt sur les revenus élevés, la disparition de certaines échappatoires et la mise en place d'impôts sur les successions et la richesse pourraient permettre au gouvernement de récupérer jusqu'à 8 milliards de dollars.

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Le gouvernement du Canada doit montrer la voie aux autres pays industrialisés en faisant la promotion de l'impôt Tobin pour régir les transferts de capitaux massifs dont dépend dans une si large mesure notre politique économique et monétaire.

Un objectif de plein emploi que le gouvernement chercherait vigoureusement à atteindre constituerait la mesure la plus socialement responsable et la plus avisée sur le plan financier pour vraiment s'attaquer au déficit. On peut dire que c'est la mesure la plus importante pour faire face au déficit et répondre à la deuxième question posée par le comité, à savoir comment des mesures budgétaires peuvent permettre de créer un climat propice à l'emploi et à la croissance.

La réponse à cette question n'est pas bien difficile à trouver. Elle se trouve dans le Livre rouge de la campagne électorale du Parti libéral. Un examen rapide de ce Livre rouge fait ressortir les mesures économiques suivantes: la promesse de grands investissements dans l'infrastructure, un nouvel investissement majeur dans la recherche et le développement ainsi qu'une politique nationale en matière de garde d'enfants.

Mais au lieu de prendre ces mesures, le gouvernement fédéral fait tout le contraire. Une étude du Centre canadien de recherche en politiques de rechange a conclu que 48 p. 100 du déclin économique au deuxième trimestre de 1995 était attribuable aux effets récessifs des réductions de dépenses. Au cours des quatre prochaines années, les mesures budgétaires grossiront le déficit de 9 à 11 milliards de dollars.

Parmi les autres mesures qui contribueraient grandement à la croissance de l'emploi, mentionnons: la réduction du nombre d'heures supplémentaires et la réduction de la semaine de travail; le dénombrement et la stimulation des industries clés; l'établissement d'objectifs de production et de création d'emplois; l'abaissement du seuil autorisé en matière d'investissements étrangers, qui pourrait passer de 20 à 10 p. 100; l'affectation de 25 milliards de dollars à l'investissement au Canada et le lancement d'un vaste programme de logement social.

Nous reconnaissons que le déficit pose un grave problème au Canada. Nous ne pensons toutefois pas que ce problème doive faire oublier tous les autres. Les Canadiens ne le pensent pas non plus. Des sondages effectués en septembre indiquent que 8 p. 100 des répondants considéraient le déficit comme notre premier problème, alors que 35 p. 100 des répondants, soit quatre fois plus, estimaient que c'était plutôt le chômage.

La population est bien en avance sur le gouvernement pour ce qui est de la compréhension de la crise que traverse l'ensemble du pays. Il est tout à fait irrationnel que le gouvernement du Canada, qui est censé être le porte-parole de l'ensemble de la communauté canadienne, se livre à la destruction systématique des programmes sociaux et des services publics.

L'éducation, les soins de santé, le bien-être social, la réglementation environnementale et la gestion de l'économie sont des choses que toute communauté digne de ce nom assure communément. Il est temps que nous réaffirmions notre engagement à respecter ces valeurs communautaires avant qu'il ne soit trop tard.

Le président: Merci, monsieur McCue.

À la lumière de l'exposé de M. McCue, monsieur Richardson, vous faudra-t-il aussi prendre la parole? De l'Institut Fraser, Robin Richardson.

M. Robin Richardson (directeur, International Centre for the Study of Public Debt, Institut Fraser): Merci, monsieur le président. J'espère que les membres ont nos propositions intitulées «How to Balance the Federal Budget and Keep Canada Together».

À l'Institut Fraser, nous estimons qu'il est essentiel d'équilibrer le budget fédéral et de réduire la dette nationale si l'on veut garder le Canada uni. Il est extrêmement important de restaurer la confiance des Canadiens dans la Confédération canadienne. Le meilleur moyen d'y arriver, c'est d'équilibrer rapidement le budget et commencer à réduire la dette nationale.

Un objectif à long terme de suppression de la dette nationale est un objectif sur lequel tous les Canadiens peuvent s'entendre et qui contribuerait davantage à unifier le pays que de sempiternels chamaillages constitutionnels. Le prochain budget fédéral sera déterminant pour établir le cadre financier d'un Canada uni à l'aube du XXIe siècle, et non pas simplement pour les prochaines années.

Cet exposé de l'Institut Fraser place l'objectif financier à court terme dans une perspective à plus long terme. On y montre comment le gouvernement fédéral peut équilibrer son budget en deux ans et comment un plan à long terme visant à éponger la dette nationale pourrait être mis en place dès 1997-1998.

Il est important pour l'unité nationale que tous les Canadiens reçoivent l'assurance qu'il est possible de mettre de l'ordre dans la grande maison canadienne et que le problème de la dette nationale peut être résolu dans l'intérêt de nos enfants et de nos petits-enfants.

D'après certaines des conclusions à court terme de la proposition de l'Institut Fraser, le déficit fédéral serait de 13,1 milliards de dollars pour l'exercice 1996-1997, et l'on enregistrerait un léger excédent de 3,3 milliards de dollars pour l'exercice 1997-1998.

La dette nationale diminuerait au cours de l'exercice 1997-1998, première diminution en 33 ans. Le ratio entre la dette nette et le PIB passerait de 73,5 p. 100 pour l'exercice 1995-1996 à 69,6 p. 100 pour l'exercice 1997-1998.

Le paiement des intérêts sur la dette fédérale - c'est-à-dire les frais de la dette en tant que pourcentage des recettes budgétaires totales - passerait de 37,2 p. 100 en 1995-1996 à 33,8 p. 100 en 1997-1998.

Voici d'autres recommandations et conclusions de cette proposition de l'Institut Fraser: de nouvelles réductions des dépenses de 6,3 milliards de dollars en sus des réductions découlant de l'examen des programmes mené par Ottawa, et ces réductions font l'objet d'une énumération par ministère dans notre proposition; l'identification des 14 ministères et organismes fédéraux où le gouvernement fédéral empiète sur le pouvoir de dépenser des provinces; un proposition de recouvrement des impôts qui viserait les familles canadiennes à revenu élevé et qui servirait au Régime de pensions du Canada, au Régime des rentes du Québec, à la sécurité de la vieillesse et à l'assurance-chômage, ce qui permettrait de percevoir des recettes additionnelles de 6,7 milliards de dollars en 1996-1997 et de 6,9 milliards de dollars en 1997-1998; et une recommandation visant à faire en sorte que le gouvernement fédéral privatise la Société canadienne des postes et d'autres sociétés d'État au cours des deux prochaines années et utilise les produits de ces ventes pour réduire la dette nationale.

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Une autre recommandation, dans la foulée de l'excellent exemple donné par le Manitoba, afin qu'on réduise de 20 p. 100 par année la rémunération du premier ministre et de ses ministres - et nous inclurions même les secrétaires parlementaires - dans le cas où ils ne parviendraient pas à réduire le déficit ni à respecter les objectifs de suppression de la dette.

Nous ferions aussi les autres recommandations suivantes: interdiction statutaire de déficits budgétaires une fois l'équilibre budgétaire atteint, sauf dans des circonstances exceptionnelles spécifiées, comme l'état de guerre; un plan à long terme pour la suppression de la dette fédérale, avec versement de paiements annuels minimaux au titre de l'intérêt et du capital; l'énoncé dans une Loi sur la suppression de la dette d'un objectif à long terme pour la fixation de l'année d'affranchissement de la dette pour le Canada; une disposition statutaire visant à faire en sorte que tout excédent budgétaire annuel et les profits tirés de la vente de biens immobiliers fédéraux et de sociétés d'État soient entièrement versés au compte de la dette fédérale; et enfin la protection des contribuables au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers et des impôts sur les sociétés et la TPS, ou son équivalent, jusqu'à ce qu'on ait supprimé la dette fédérale.

Nous demandons aussi au gouvernement fédéral et au comité...

Le président: Monsieur Richardson, les interprètes vous suivent difficilement. Pourriez-vous ralentir un peu.

M. Richardson: J'ai presque terminé. Je vais ralentir. Merci.

Nous recommandons aussi au comité, et par votre intermédiaire au gouvernement fédéral, dans son prochain budget fédéral ou avant, de déposer son évaluation du coût de la séparation du Québec ainsi que la part de la dette nationale que paierait le Québec s'il fallait malheureusement envisager la séparation. La confusion qui entoure cette question suscite toujours beaucoup d'incertitude sur les marchés financiers.

Le prochain budget fédéral devrait aussi contenir des exemples quant à la façon dont un Québec indépendant aurait à assumer ses obligations envers le Canada sur différentes périodes de remboursement acceptables, soit de 25, de 30, 35 ou de 40 ans. Cette mesure serait nécessaire pour informer comme il se doit les investisseurs, pour montrer l'importance du paiement ordonné de la dette et pour informer les Québécois et les autres Canadiens de l'un des grands coûts de la séparation, s'il devait y avoir un autre référendum au Québec dans les années qui viennent.

Je termine mon exposé en soulignant que six provinces prévoient des excédents budgétaires pour cette année. Chacune de ces provinces a encore une imposante dette à éliminer et certaines ont légiféré pour adopter des plans de suppression de la dette. Le gouvernement fédéral devrait faire de même.

Le Comité des finances devrait recommander au gouvernement fédéral de se concentrer sur la suppression de la dette et d'éviter les déficits. Il devrait recommander que l'élimination de la dette à long terme devienne un objectif officiel du gouvernement du Canada. En équilibrant son budget au cours des deux prochaines années, en commençant à réduire la dette nationale et en fixant aux Canadiens un objectif à long terme de suppression de la dette nationale de même qu'en leur permettant de miser sur une année d'affranchissement de la dette, le gouvernement fédéral pourra restaurer la confiance de la plupart des Canadiens dans la viabilité politique, économique et financière d'un Canada pour tous les Canadiens au XXIe siècle.

Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions et à participer au débat avec les autres interlocuteurs de la séance d'aujourd'hui.

Le président: Merci, monsieur Richardson.

De la Chambre de commerce de Vancouver, nous recevons John Hansen et Karen Wilkinson.

M. John Hansen (économiste principal et directeur adjoint à la gestion, Chambre de commerce de Vancouver): Monsieur le président, merci beaucoup de nous avoir invités à comparaître ce matin. Nous prenons la parole au nom des 4 500 membres de la Chambre de commerce de Vancouver. Karen Wilkinson est la coprésidente du groupe de travail sur le budget fédéral, qui prépare notre exposé pré-budgétaire chaque année. Elle travaille également à la Banque de Hongkong où elle s'occupe des prêts commerciaux. Elle a donc une expérience directe des questions qui intéressent de nombreuses petites entreprises de Vancouver et de la région.

Monsieur le président, nous avons remis un exemplaire de notre mémoire de l'année dernière au ministre des Finances, mémoire que nous avions déjà déposé au comité. J'aimerais attirer votre attention sur un passage de la dernière page de ce mémoire. C'est là où l'on montre les prévisions de déficit des budgets fédéraux qui se sont succédés depuis 1986. On y voit qu'au cours des 10 dernières années, aucun budget n'a permis d'atteindre les objectifs énoncés ni les prévisions formulées. Nous pensons que le budget actuel pourrait cependant atteindre l'objectif qui y est énoncé.

Nous allons brièvement traiter des trois questions qui étaient posées dans la lettre que nous avons reçue.

Pour ce qui est des objectifs de réduction du déficit, nous pensons que l'objectif de 3 p. 100 est réalisable pour l'exercice en cours, dans la mesure où il n'est pas question de puiser dans le fonds de l'assurance-chômage ni dans les recettes excédentaires de ce fonds. Nous estimons qu'il est très important d'en tenir compte.

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Pour ce qui est des objectifs des années subséquentes, nous croyons fermement qu'il est tout à fait faisable d'atteindre un objectif d'élimination du déficit en cinq ans, et qu'il faudrait même y parvenir sur une plus brève période. Nous pensons qu'il serait possible d'atteindre cet objectif en deux ans en faisant en sorte que l'objectif de réduction du déficit qui est actuellement de 3 p. 100 du PIB soit de 1,5 p. 100 l'an prochain et de zéro l'année d'après.

Si nous le recommandons, c'est que plus vite on réglera le problème du déficit et plus vite nous aurons un budget équilibré, plus vite l'effet se fera sentir sur les marchés et les taux d'intérêt. En outre, quand on pense à l'avenir... Personne ne peut le prédire, mais nous pourrions bien connaître une nouvelle récession à un moment donné. Alors, il sera extrêmement difficile de rattraper le temps perdu. Donc plus vite on parviendra à éponger le déficit, mieux cela vaudra.

Deuxièmement, nous pensons que la véritable question, c'est la dette plutôt que le déficit. J'ai déposé un autre passage, monsieur le président, qui montre la répartition des dépenses fédérales et les frais de la dette. Les intérêts sur la dette ont augmenté et alors qu'ils représentaient 10 p. 100 du budget total en 1975, ils en représentent maintenant au moins 35 p. 100.

C'est comme les termites. Je sais de quoi je parle; il y en a chez moi. C'est l'infrastructure même qui est attaquée et tous les autres aspects en souffrent, les autres secteurs de dépenses, les autres programmes que veulent les Canadiens. Comme nous l'avons entendu dire autour de cette table ronde ce matin, il existe de très importants programmes qu'il faudrait maintenir, mais nous pensons que le seul moyen de maintenir ce genre d'activités au Canada c'est de s'occuper rapidement du problème de la dette.

À long terme, nous pensons qu'il faudrait s'efforcer de faire en sorte que le ratio dette-PIB se rapproche un peu plus de la médiane de ces ratios parmi les pays du G-7. Maintenant, nous sommes à l'extrémité supérieure, près de l'Italie. Au niveau national, la dette publique totale représente environ 95 p. 100 du PIB. La médiane pour le G-7 se situe entre 55 et 60 p. 100. Il y a donc là un important écart.

À propos des emplois et de la croissance, puisqu'on pose cette deuxième question, nous pensons que le plus important c'est de mettre de l'ordre dans les finances de la grande maison fédérale. Nous en avons entendu certains dire que si nous pouvions envoyer de bons signaux aux marchés monétaires internationaux, on pourrait améliorer les taux d'intérêt de 1 à 2 p. 100. Cela représente un montant énorme au titre du loyer de l'argent, pour les particuliers comme pour les entreprises, de même que pour les frais de la dette. Nous pensons que si nous pouvions atteindre cet objectif, cela stimulerait beaucoup l'économie.

Deuxièmement, nous ne pensons pas le moindrement que la fiscalité permette de résoudre le problème de la dette ou du déficit. Nous pensons que les hausses d'impôt minent les fondements même de la création d'emplois. Nous devançons déjà la plupart des autres autorités fiscales concurrentes. Nous sommes à même de constater dans cette province qu'à un taux marginal d'imposition du revenu des particuliers de 54 p. 100, il est extrêmement difficile pour les entreprises d'attirer les meilleurs candidats.

Pour ce qui est de la dernière question, monsieur le président, à propose de la commercialisation et de la privatisation, nous recommandons au comité d'examiner de près ce qui se passe à Transports Canada. Nous pensons que ce ministère prend des mesures très intéressantes et très importantes en matière de réduction de ses effectifs, de dévolution de certaines de ses activités à des autorités portuaires et aéroportuaires locales. Je pense qu'en agissant ainsi on donne une orientation beaucoup plus commerciale à ces activités et on allège les responsabilités du ministère en matière d'exploitation.

Le ministère même, en l'espace de quatre ans, verra son effectif passer de 20 000 à 5 000 employés, et je pense que certaines des mesures qu'il est en train de prendre sont un bon modèle pour d'autres ministères.

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À propos du deuxième volet où il est question de dévolution, on constate que le gouvernement du Canada est présent dans de nombreux secteurs. Il empiète sur des secteurs de compétence provinciale depuis des années. Nous croyons qu'il y a de nombreux cas d'empiétement de ce genre, et M. Richardson en a mentionné certains. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait se retirer de certains de ces secteurs.

Le président: Merci, monsieur Hansen.

Du Business Council of British Columbia, Jock Finlayson.

M. Jock A. Finlayson (vice-président, Politiques et analyse, Business Council of British Columbia): Merci, monsieur le président. Au nom du conseil, je vous remercie de nous avoir invités à comparaître.

Notre organisation représente environ 150 employeurs de grandes et de moyennes entreprises, surtout du secteur privé de la Colombie-Britannique, qui emploient environ 25 p. 100 de la main-d'oeuvre de la province.

J'aimerais d'abord relire au comité un paragraphe qui se trouvait dans son rapport de l'année dernière. Je pense qu'il résume bien ce que je vais dire.

Le président: Est-ce que nous devrons nous en repentir, monsieur Finlayson?

M. Finlayson: J'avais pensé lire un extrait de votre rapport de l'année dernière. Je sais que ce n'est pas très orthodoxe, mais j'ai pensé que cela pourrait être utile. Le comité disait alors:

Le danger vient du fardeau combiné de la dette nationale et de la dette provinciale qui approche maintenant les 700 milliards de dollars et qui croît inexorablement. Le service de cette dette accapare une part grandissante de nos ressources financières, réduit nos possibilités et limite notre souveraineté économique. Faute d'une ferme intervention financière, ce fardeau va croître de façon exponentielle - malgré une économie florissante.

Malheureusement, je dirais que le même paragraphe pourrait encore être inclus dans le rapport que vous rédigerez à l'issue de vos délibérations pancanadiennes de cette année, malgré certains progrès accomplis dans le budget de l'année dernière.

Les trois questions qu'on nous demandait d'examiner dans l'invitation qui nous a été faite de comparaître concernait l'objectif de réduction du déficit; comment le budget de 1996 peut-il aider à créer un climat propice à la croissance et à l'emploi; quel secteur d'activités du gouvernement fédéral faudrait-il cibler pour comprimer les dépenses, procéder à la commercialisation ou la privatisation. Je traiterai brièvement de chacun de ces points. Dans notre bref mémoire, nous en traitons de façon plus détaillée.

À propos de l'objectif de réduction du déficit, je reprendrai les observations qu'a faites l'orateur précédent, M. Hansen. Nous pensons en effet que le gouvernement peut facilement réaliser son objectif de réduction du déficit fixé à 3 p. 100 du PIB par M. Martin dans son budget l'année dernière. En fait, selon nos propres projections, le gouvernement dépassera cet objectif de 3 milliards de dollars ou 4 milliards de dollars peut-être.

Les perspectives à l'échelle du pays sont raisonnablement bonnes pour 1996. Selon l'ensemble des prévisions économiques, nous connaîtrons un taux de croissance ferme, sinon remarquable, de l'ordre de 2,5 p. 100 à 3 p. 100, de même que des taux d'intérêt raisonnablement stables et peut-être même une baisse de ceux-ci.

Tout ceci nous donne à penser qu'il serait à la fois souhaitable et réalisable de réduire plus rapidement le déficit. L'objectif de 3 p. 100 du PIB doit être considéré comme une étape plutôt qu'une destination. Il est impératif que les efforts de réduction du déficit soient accélérés pendant que la conjoncture économique canadienne est plutôt favorable. La perspective d'un ralentissement économique vers la fin de la décennie est à notre avis un argument convaincant en faveur d'une approche plus dynamique de la gestion financière, non pas simplement dans le prochain budget mais aussi dans le suivant.

Plutôt que de s'en tenir à cet objectif de 3 p. 100 en 1996-1997, nous invitons le comité à presser le ministre des Finances et le gouvernement à viser un objectif moindre et à établir un plan de suppression du déficit d'ici la fin du siècle.

Nous sommes également d'accord avec ce qu'ont dit M. Hansen et d'autres organisations, à savoir qu'il faut s'attacher davantage à gérer le fardeau de la dette qui, au niveau fédéral, représente environ 73 p. 100 de notre produit intérieur brut. Ce ratio est trop élevé et, comme vous l'avez dit dans votre rapport de l'année dernière, le Canada se trouve ainsi dangereusement exposé aux variations défavorables des taux d'intérêt et de la conjoncture économique.

Pour ce qui est de la création d'un climat propice à la croissance et à la création d'emplois, il me semble que le meilleur moyen que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour y arriver serait d'avoir un budget crédible et, surtout, de faire ce qu'il peut pour réduire le fardeau que les taux d'intérêt représentent pour notre économie. Différents intervenants l'ont déjà dit.

La dette des ménages au Canada atteint maintenant un niveau record en tant que pourcentage du revenu disponible. Bien sûr, le secteur public aussi est affligé d'une dette considérable. Les avantages économiques qui découleraient d'une baisse des taux d'intérêt pour les ménages endettés et le secteur public stimuleraient fortement l'économie et la confiance en celle-ci si nous pouvons parvenir à concevoir un bon ensemble de politiques qui entraînera une baisse des taux d'intérêt.

Enfin, pour ce qui est des possibilités qui s'offrent eu égard aux réductions de dépenses, à la privatisation et à la dévolution, dans le mémoire que nous avons présenté au comité l'année dernière, nous relevions une liste de mesures qui, combinées, permettrait de réaliser des économies annuelles de l'ordre de 10 milliards de dollars.

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Nous sommes heureux que dans son budget de l'année dernière le ministre des Finances ait pris des mesures dans plusieurs des secteurs que nous avions identifiés, notamment les opérations gouvernementales, les subventions aux entreprises, les paiements en matière de transport, les programmes de soutien aux agriculteurs, la défense et l'aide à l'étranger.

Quant au budget de 1996, nous estimons qu'il faudra prendre de nouvelles mesures de restriction pour que le déficit soit même inférieur à 3 p. 100 du PIB et pour que le gouvernement fédéral commence à équilibrer le budget d'ici la fin de la décennie. Le mémoire que nous vous présentons cette année vise simplement à rappeler certaines de nos recommandations de l'année dernière, étant donné qu'il y a encore beaucoup à faire dans la plupart des secteurs que nous avons soulignés. Nous nous ferons un plaisir d'en discuter au moment de la table ronde.

Mme Carole Gerson (témoignage à titre personnel): Je suis heureuse de prendre la parole au nom de mes collègues du secteur de l'éducation.

L'année dernière, j'ai comparu au comité à titre de représentante de la Fédération canadienne des études humaines. Cette organisation représente quelque 6 000 professeurs, 2 000 diplômés et 50 000 étudiants à plein temps au niveau du baccalauréat dans des études aussi diversifiées que la littérature, les langues, la linguistique, la philosophie, l'histoire, l'art, les études religieuses et le reste. J'avais alors dit que la recherche était une composante essentielle de l'enseignement universitaire et que si l'on réduisait encore davantage les budgets des organismes qui financent ces travaux de recherche, en particulier le Conseil de recherches en sciences humaines, on ne ferait que détériorer notre système d'enseignement supérieur.

Comme la Fédération canadienne des études humaines est en voie de restructuration, je comparais d'abord et avant tout à titre personnel et bon nombre de mes observations découlent donc de mon expérience personnelle.

La première chose que j'aimerais dire brièvement - et je m'appuie sur ce qui a déjà été dit autour de cette table - c'est qu'on sent un climat de découragement dans tout le pays à mesure qu'on réduit les budgets universitaires suite aux réductions des paiements de transfert.

La recherche innovatrice est une composante essentielle de l'enseignement universitaire si nous voulons conserver des établissements de grande réputation, mais comme les professeurs sont de plus en plus accablés de nouvelles grandes responsabilités en matière d'administration et d'enseignement, parce qu'on ne les remplace pas et parce qu'on s'attend à ce qu'ils enseignent à au moins autant d'étudiants qu'auparavant, ils ont de moins en moins de temps et de motivation pour se consacrer à leurs recherches. Il y a de moins en moins de jeunes professeurs, sur qui repose pourtant l'avenir de la recherche et de l'enseignement dans nos universités. Je pense que nos universités risquent de devenir des installations de recyclage de deuxième catégorie des recherches menées par d'autres pays, et cela pendant que nos talents les plus prometteurs vont ailleurs.

Je prie donc instamment le comité du budget de maintenir les budgets actuels des trois grands conseils subventionnaires fédéraux afin que la communauté universitaire puisse à nouveau croire que le gouvernement entend respecter le rapport étroit qui existe entre l'avancement des connaissances, la prospérité et la qualité de vie qu'a récemment mis en lumière le rapport du Conseil consultatif national des sciences et de la technologie intitulé Healthy, Wealthy and Wise. Selon ce rapport:

Quand j'ai dit au président de mon université que je comparaissais ici, il a dit que je devrais souligner le fait qu'il semble exister un moyen de compenser certaines des réductions des paiements de transfert, soit, selon lui, de faire appel à ce qu'il considère comme des trésors de richesses intergénérations qui pourraient être orientés vers les secteurs à but non lucratif afin de remédier aux effets dévastateurs des compressions. Je suggère donc que le gouvernement envisage d'apporter des changements au régime fiscal de manière à inciter les détenteurs de cette richesse à en faire profiter les universités et les autres établissements méritants du pays.

Toutefois, et je parle ici à titre personnel, j'aimerais dire - et il est intéressant qu'une seule personne l'ait mentionné jusqu'à maintenant - que la question de l'unité nationale est absolument cruciale. Il n'y a pas d'économie s'il n'y a pas de pays. Ce qui me frappe, c'est que la plupart de mes étudiants n'ont jamais vécu ni travaillé à l'extérieur de la Colombie-Britannique. Récemment, j'étais à une conférence à l'Université Brock, où le président a dit que la plupart des étudiants n'étaient jamais sortis de la péninsule du Niagara.

Comment un pays que vous ne connaissez pas peut-il vous tenir à coeur?

Je propose donc - et il s'agit là d'une suggestion personnelle - que le gouvernement mette sur pied un programme qu'on pourrait appeler «apprenez à connaître votre pays» pour l'été prochain; dans le cadre de ce programme, il pourrait offrir des encouragements concrets aux Canadiens pour les inviter à visiter une région du Canada qui se trouve à au moins 1 000 milles de chez eux. Dans un climat d'incertitude, ceux qui ont des sous les mettront probablement de côté pour leurs enfants plutôt que les dépenser pour les loisirs ou des biens matériels. Si vous voulez créer un climat qui favorisera la création d'emplois et la croissance économique, ce qui est la deuxième question abordée dans votre lettre, vous devez vous attaquer au climat d'incertitude qui existe partout au pays en ce moment.

J'aimerais enfin vous parler de mon secteur de recherche, comme universitaire. Mes propos sont liés aux réductions opérées dans les systèmes de soutien des maisons d'édition canadiennes. Ma spécialité est la littérature canadienne, et j'oeuvre également dans le secteur de l'édition au Canada.

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L'Association of Canadian Publishers prévoit que la diminution de l'appui offert à ce secteur s'accompagnera d'une diminution de 22 p. 100 du nombre d'ouvrages canadiens publiés, d'une baisse de 19 p. 100 du nombre d'emplois directs dans le secteur de l'édition et d'une baisse de 40 p. 100 au titre de l'emploi de pigistes dans ce secteur. Il ne faut pas oublier que les petites maisons d'édition ont joué un rôle primordial au chapitre de notre identité culturelle. Les premiers ouvrages de nos auteurs de renommée internationale, nos récipiendaires de prix littéraires comme Margaret Atwood et Carol Shields, ont été publiés par de petites maisons d'édition. C'est une de ces très petites maisons d'édition qui a publié le roman de l'auteur qui a mérité le Prix littéraire du Gouverneur général cette année. Les petites maisons d'édition sont mieux en mesure de prendre des risques, et sont plus disposées à le faire, et ce sont elles qui ont permis à la littérature canadienne de s'épanouir et d'obtenir une renommée internationale.

Comment évaluer les investissements à long terme dans le secteur culturel? Que valent aujourd'hui Margaret Atwood et Carol Shields pour leur maison d'édition et pour le Canada? J'exhorte le comité à ne pas faire des économies de bouts de chandelle et à ne pas détruire les facteurs plus importants mais moins mesurables, comme le potentiel humain et le développement culturel du Canada.

Le président: Merci, madame Gerson.

Nous accueillons maintenant Jeremy Kon et Jim Facette de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada.

M. Jeremy Kon (vice-président, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada): Monsieur le président, mesdames et messieurs, je tiens à vous remercier de m'avoir offert l'occasion de participer à ces consultations pré-budgétaires. Malheureusement, je devrai vous quitter sous peu car j'ai un engagement de longue date à Saskatoon; Jim Facette pourra cependant participer à la discussion. J'ai l'intention moi aussi d'y participer le plus longtemps possible.

Nous vous avons présenté un texte. J'aimerais simplement vous faire part des points saillants du document.

Je suis heureux, au nom de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, d'appuyer vos efforts visant à discuter avec les Canadiens des diverses options que devrait envisager le ministre des Finances au moment de la préparation du budget. La réorganisation des priorités du gouvernement fédéral est nécessaire si l'on veut que l'État fédéral évolue suffisamment pour être en mesure de répondre aux besoins du Canada dans les années 1990 et au-delà. Cependant, il existe des secteurs où le pouvoir fédéral doit non seulement continuer à jouer un rôle mais en fait y assumer le rôle de chef de file. Par exemple, nous croyons que le système d'autoroutes national ferait partie de cette catégorie.

J'aimerais dire quelques mots sur la composition et la raison d'être de la Coalition. Depuis plus de dix ans, l'infrastructure dans le secteur des routes, des égouts et de l'alimentation en eau se détériorent de façon importante. Il se pourrait donc qu'un investissement de quelque 100 milliards de dollars dans le secteur routier soit détruit simplement en raison de cette négligence prolongée. En raison du mauvais état des routes, les Canadiens gaspillent du combustible, du temps et de l'argent, mettent en péril leur santé et l'environnement, et deviennent de moins en mois concurrentiels dans la nouvelle économie internationale. La détérioration de l'infrastructure coûte beaucoup trop cher aux entreprises canadiennes et nuit à notre position concurrentielle, entraînant une réduction de la demande de produits canadiens.

Ce sont ces préoccupations qui ont suscité il y a environ quatre ans la création de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada. Nos membres sont des entreprises canadiennes bien en vue, oeuvrant dans une grande diversité de secteurs économiques, représentés par les principaux fabricants, usagers, fournisseurs, constructeurs et concepteurs. Nous avons rapidement établi qu'il est urgent de renouveler nos routes nationales; c'est une tâche prioritaire pour l'économie canadienne.

Actuellement, l'investissement fédéral dans notre réseau routier se fait essentiellement par l'entremise du programme stratégique d'amélioration des routes et d'autres programmes de développement régional. Cette méthode d'investissement a laissé pour compte beaucoup d'éléments de notre réseau routier. Il n'existe aucune politique de route nationale semblable à celles qui existent pour le transport aérien, ferroviaire ou maritime. Il y a des ententes bilatérales qui se sont révélées inefficaces et qui sont ternies par l'apparence d'influences politiques. Le Canada a besoin d'une politique nationale efficace régissant l'investissement dans notre réseau routier national, une politique qui reconnaîtrait l'importance des routes dans l'économie et qui s'accompagnerait d'une stratégie d'investissement à long terme.

L'étude sur le réseau routier national menée entre 1987 et 1993 a fait ressortir que 38 p. 100 des 25 000 kilomètres de grandes routes désignées sont inférieurs aux normes et que 22 p. 100 des ponts exigent d'importants travaux de renforcement ou de remise en état. L'étude a permis de conclure que l'investissement dans les routes comporterait d'importants avantages sur divers plans: sécurité routière, emplois (directs et indirects), augmentation du revenu personnel, réduction du nombre de bénéficiaires de l'assurance-chômage, accroissement des recettes gouvernementales par l'impôt sur le revenu, plus grande compétitivité et capacité du Canada de rivaliser avec ses concurrents internationaux, et enfin accroissement du tourisme. Un dernier point, non négligeable: un tel effort pourrait contribuer positivement au débat sur l'unité nationale.

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Beaucoup des avantages énumérés dans cette étude sont d'ailleurs l'apanage du programme lancé par le gouvernement dans le domaine des travaux d'infrastructure. Le programme se concrétise par des ententes tripartites mettant en cause les municipalités et les gouvernements fédéral et provinciaux et s'est révélé une initiative efficace permettant aux localités de renouveler leur infrastructure qui en avait grandement besoin.

Le Programme canadien de travaux d'infrastructure a démontré que l'investissement dans l'infrastructure entraîne des retombées intéressantes sur le plan économique. Les 11 000 projets ont créé 97 000 emplois d'un bout à l'autre du pays. Les localités obtiennent des installations dont elles avaient grandement besoin: usines de traitement des eaux, nouvelles routes, immeubles publics, et des emplois sont créés non seulement dans le secteur de la construction, mais dans d'autres domaines comme le génie, et l'architecture, et parmi les fournisseurs.

Toute initiative du gouvernement fédéral visant à établir une orientation politique et à régir l'investissement dans nos routes nationales devra nécessairement traiter spécifiquement des sources de financement. La réduction du déficit fédéral impose des choix difficiles et les priorités doivent être réévaluées en tenant compte de la réalité.

En 1995, le gouvernement fédéral percevra 4,2 milliards de dollars en taxes sur le carburant versées par l'ensemble des Canadiens, mais on prévoit que les dépenses consacrées au réseau routier national du Canada seront inférieures à 200 millions de dollars. Cela veut dire que moins de 4 p. 100 des recettes versées par les usagers de la route sont réinvesties dans le réseau routier. En fait, la contribution du Canada est constamment restée en deçà de 5 p. 100. Dans des pays comme les États-Unis, l'Allemagne, l'Italie, l'Australie, l'Espagne, la France et le Royaume-Uni, cette contribution oscille entre 30 p. 100 et 100 p. 100.

Le transport routier est et demeurera le mode de transport dominant pour l'activité économique du Canada. Les transporteurs routiers représentent environ 42 p. 100 du chiffre d'affaires de tous les transporteurs et le trafic voyageur se fait essentiellement par la route au Canada, environ 90 p. 100 de tous les déplacements se faisant en automobile.

Compte tenu de cela, le gouvernement fédéral doit envisager de consacrer une plus grande part des recettes provenant des taxes sur le carburant au réseau routier national du Canada.

Le groupe de travail libéral de 1990 a recommandé d'examiner des solutions de rechange pour le financement et de consacrer les recettes de la taxe sur le carburant à la construction et à l'entretien des routes. La Coalition croit qu'il n'est plus acceptable d'écarter du revers de la main l'idée de consacrer l'argent de ces taxes exclusivement aux dépenses fédérales pour les routes. Des taxes à affectation spécifique permettront non seulement de remettre en état notre réseau routier, mais aussi de rendre compte aux contribuables de l'utilisation de leurs impôts.

En 1993, le gouvernement actuel a pris un engagement à l'égard de l'infrastructure du Canada et a reconnu l'importance de son rôle dans l'économie. On s'est rendu compte que l'investissement dans l'infrastructure crée des emplois de qualité et que cet investissement est payant pour les gouvernements. On peut en dire autant de l'investissement dans le réseau routier national du Canada.

Le président: Merci, monsieur Kon.

Monsieur Harold Daykin, vous avez la parole.

M. Harold Daykin (témoignage à titre personnel): Merci.

Je voudrais d'abord demander si chacun a reçu copie des deux documents que j'ai fait distribuer. Il y a une feuille volante qui existe également en version française. Elle a été fournie par les gens d'Ottawa et est intitulée «Secteurs candidats à la dévolution aux provinces - Le cas des pêches de l'Ouest».

Il y a ensuite un supplément de quatre pages intitulé «L'administration des pêches de l'Ouest devrait-elle être transférée d'Ottawa à Victoria?»

Je n'ai pas l'intention de lire ces documents. Je vais me contenter de mettre en relief les faits saillants. Je vais parler sans notes, mais tout ce que je dirai se trouve dans la documentation.

Si vous jetez un coup d'oeil sur la carte, vous verrez que ce que je propose est logique sur le plan géographique.

Soit dit en passant, je ne prétends nullement être bien placé pour recommander fermement que cela se fasse, je veux dire que Victoria obtienne d'Ottawa la fonction des pêches, mais je dis seulement que ce secteur est un excellent candidat et qu'il faudrait envisager sérieusement de le faire. Voilà ce que je dis.

J'ajoute que mon analyse n'est nullement fondée sur une quelconque expérience dans le secteur des pêches, car je n'en ai aucune. Je suis simplement une personne âgée qui lit beaucoup. Depuis trois semaines, j'ai pas mal fouillé cette question de la dévolution de ce secteur d'Ottawa à la Colombie-Britannique.

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Je vous invite donc à regarder cette carte. Le point intéressant, c'est que l'espèce de poisson la plus importante en Colombie-Britannique est à la fois un poisson marin et d'eau douce. Quand les Pères de la Confédération ont établi la liste des fonctions fédérales et provinciales, ils ont créé une catégorie étiquetée «Les pêcheries des côtes de la mer et de l'intérieur». Dans leur sagesse, ils ont décidé que cette rubrique serait une fonction fédérale exclusive. C'était logique en 1867, parce qu'il y avait la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard, etc. Il y avait au moins trois provinces, et aujourd'hui il y en a quatre, ayant des eaux contiguës et il était donc de la plus élémentaire logique que cela relève du gouvernement fédéral.

Il n'y a qu'une seule province qui a un secteur des pêches sur la côte Ouest, à moins de compter le territoire du Yukon, qui a un littoral de quelques milles sur le Pacifique. C'est donc un premier point: La côte Ouest est fondamentalement différente de la côte Est à cet égard.

Le deuxième point, c'est que l'espèce la plus importante, qui représente près de la moitié de toutes les prises en Colombie-Britannique, c'est le saumon. Or le saumon est une espèce migratoire, comme on dit dans le jargon. Il naît dans des endroits comme Adams River sur un lac près de Kamloops dans l'intérieur de la Colombie-Britannique. Après un an dans l'eau douce de cette région, il descend vers l'océan et dans sa quatrième année, il revient. C'est donc un poisson intégré et il faut une administration intégrée qui, logiquement, devrait se trouver sur la côte Ouest.

Dans mon deuxième petit document, j'énumère quelques cinq considérations dont la plus étonnante, dont j'affirme qu'elle pourrait justifier le déménagement de cette fonction d'Ottawa à Victoria, est la fonction environnementale.

L'élément clé à ce sujet est que la législation fédérale sur les pêches est un outil législatif très puissant. Si l'on veut bloquer un projet de développement, il suffit de s'adresser aux tribunaux et, au bout du compte, à la Cour suprême du Canada et de dire que le projet est nuisible pour les poissons. J'exagère un peu, mais pas beaucoup. En fait, la législation fédérale sur les pêches est à peu l'équivalent de la Loi fédérale américaine intitulée Clean Water Act.

Je ne mentionnerai qu'un seul petit désastre, qui a coûté un demi-milliard de dollars, et dont j'affirme qu'il a été causé au moins en partie parce que l'administration des ressources relève du gouvernement provincial. La propriété et le contrôle ultime relèvent du gouvernement provincial, mais les pêches, qui sont en cause dans presque tout projet de développement, à cause de cet aspect environnemental, sont également intéressées.

Le petit désastre dont je parle, c'est le projet Kemano. Ceux qui connaissent le dossier peuvent s'y reporter. Le problème est dû essentiellement au conflit entre Ottawa, plus précisément le contrôle des pêches, et le gouvernement provincial, qui est propriétaire des ressources et est censé les contrôler.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Daykin.

Enfin, M. Jacob Rempel.

M. Jacob Rempel (témoignage à titre personnel): Je renonce à mon droit de parole, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Rempel.

[Français]

Le président: Nous allons nous tourner vers les députés qui vont nous adresser leurs questions et commentaires. Nous avons parmi nous M. Pierre Brien, qui est du Québec;

[Traduction]

M. Herb Grubel, du Parti réformiste, de Colombie-Britannique, est accompagné du Dr Hélène Bertrand, qui est ici pour réformer les Réformistes.

.1305

Une voix: Oh, oh!

Le président: Du Manitoba, nous avons M. David Walker et M. Ron Fewchuk, et du nord de l'Ontario, nous avons M. Brent St. Denis.

[Français]

Monsieur Brien.

M. Brien (Témiscamingue): J'ai plusieurs questions ce matin. Ma première s'adresse à la Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique. La première suggestion contenue dans votre mémoire est qu'on devrait rapatrier la dette nationale.

Cela signifierait que le gouvernement canadien devrait canaliser toute l'épargne des contribuables. En conséquence, les entreprises canadiennes devraient se tourner vers les marchés extérieurs pour obtenir leur financement.

Comme il en coûte moins cher au gouvernement d'emprunter sur les marchés financiers internationaux que cela n'en coûte à l'entreprise privée, nous en sortirions perdants, et nos entreprises privées connaîtraient une dépendance financière plus grande envers les marchés internationaux.

Pensez-vous que ce soit réellement une bonne solution pour le Canada?

[Traduction]

M. McCue: La nécessité de s'adresser aux marchés étrangers est une option. Je pense que nous pourrions envisager d'autres options. Nous pourrions adopter la méthode des euro-obligations et faire appel au sentiment de patriotisme des Canadiens pour que ces derniers rachètent la dette étrangère sur une certaine période, tout comme nous avons émis des obligations pendant la guerre. Dans notre histoire, nous avons eu recours à diverses mesures. Cela pourrait être une option. Nous pourrions lancer un appel aux Canadiens. Nous ne sommes pas obligés d'emprunter sur les marchés étrangers.

[Français]

M. Brien: Il y a une quantité limitée d'épargne disponible. Si à la fin de l'année, j'ai 3 000$ d'épargne que je place, soit dans des obligations du gouvernement, soit dans des investissements pour l'entreprise, les entreprises qui investissent se trouvent à emprunter avec une partie de l'épargne des Canadiens. Si cette épargne est retournée en plus grande partie vers le gouvernement, les entreprises canadiennes qui veulent investir et qui empruntent pour investir n'auront plus accès au capital sur le marché canadien. Elles devront alors emprunter à l'extérieur du Canada à un coût plus élevé. Les bénéfices et les retombées économiques dus à la rentabilité de cette entreprise avantageraient alors les marchés extérieurs.

Finalement, j'essaie d'expliquer que cela ne m'apparaît pas être une solution parce que le problème en serait aggravé. On se rendrait encore plus dépendants de l'économie extérieure qu'on ne l'est présentement et à un coût plus élevé.

[Traduction]

M. McCue: Je répète qu'à mon avis, ce n'est qu'un élément. Je pense qu'il faut envisager toute une gamme de possibilités. On pourrait faire une refonte complète du régime fiscal; on pourrait aussi se pencher sur les taux d'intérêt, mais ce n'est là qu'un élément isolé.

[Français]

M. Brien: D'accord.

Je passe maintenant à mon témoin préféré de l'Institut Fraser. Nous avons eu l'occasion de nous rencontrer l'an passé. Nous n'étions pas d'accord et nous ne le serons pas cette année non plus.

Je me permets d'abord une remarque. Dans votre mémoire, vous faites référence au coût de la séparation du Québec, et je ne peux passer cela sous silence. Vous avez d'ailleurs fait une étude, si je me rappelle bien, sur laquelle je suis en total désaccord et qui est très peu cohérente avec celles qui ont été faites au Québec, même sous la direction de fédéralistes québécois, dans le cadre de la Commission Bélanger-Campeau sur la question de notre part de la dette et du déficit d'un Québec souverain.

Vous utilisez une méthode assez peu fréquemment utilisée en économie, c'est-à-dire celle de considérer la dette comme une hypothèque devant être remboursée sur 25, 30, 35 ou 40 ans. Je n'ai jamais vu qui que ce soit, où que ce soit, utiliser cette méthodologie pour évaluer l'impact financier d'une dette.

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Ma remarque consiste donc simplement à vous dire que je suis fortement en désaccord sur la méthodologie de votre étude et que, par conséquent, je n'en partage pas les conclusions.

Dans votre cinquième suggestion ou recommandation, vous parlez d'un plan à long terme pour éliminer la dette. Éliminer le déficit, c'est une chose; éliminer la dette en est une autre.

Pour mon compte personnel, j'ai une dette parce que je n'ai pas payé ma maison comptant. Donc, il est normal d'avoir une dette. C'est acceptable. Pourquoi, pour un gouvernement, ça ne le serait pas?

[Traduction]

M. Richardson: Vous avez posé une série de questions auxquelles je vais essayer de répondre.

Bien sûr que je me rappelle de notre dialogue de l'an dernier, monsieur Brien. Je ne suis fondamentalement pas d'accord avec la méthodologie utilisée par Bélanger-Campeau. De nouveau, les conseillers de l'actuel gouvernement du Québec utilisent la même méthodologie pour mettre à jour ce travail. Systématiquement, ils surestiment l'actif et sous-estiment le passif du gouvernement du Canada, ce qui fait qu'ils arrivent à une part beaucoup moins importante que j'appelle dans mon mémoire «l'obligation d'un Québec séparé envers le Canada».

Ma méthode consiste à utiliser la population comme valeur d'imputation et je pense que la plupart des économistes et d'autres aussi s'entendent là-dessus. La différence entre mon estimation - l'estimation de l'Institut Fraser - et l'estimation officielle du gouvernement du Québec est de plus de 55 milliards de dollars. Nous n'avons pas encore vu l'estimation du gouvernement du Canada. Dans notre mémoire, nous réclamons que le gouvernement fédéral divulgue son chiffre. Nous savons qu'il a fait cet exercice et fixé un chiffre. Pourquoi ne pas le publier, en précisant quelle méthode doit être appliquée à son avis? Au cas regrettable où le Québec se séparerait - et je sais que nous divergeons d'opinion là-dessus - , la position de départ pour les négociations pourrait être quelque peu inférieure. Néanmoins, il faut publier ce renseignement.

Le recours à l'analogie de l'hypothèque n'est qu'un exemple destiné à illustrer... Dans mon étude, vous vous rappellerez peut-être - car je suis certain que vous l'avez lue - que j'ai examiné diverses possibilités. J'ai donné l'exemple de l'hypothèque pour illustrer le fait qu'il doit y avoir un point de départ et un point d'arrivée. La plupart des Canadiens peuvent comprendre cela, y compris vous-même, puisque vous faites allusion à votre propre hypothèque sur votre maison.

L'objectif ultime, et j'insiste pour dire que c'est un objectif à long terme, serait l'élimination totale de la dette nationale, et nous recommandons que le gouvernement se fixe cet objectif dans son prochain budget. La réalisation de cet objectif serait prévu en une année donnée au cours du XXIe siècle. Les gens peuvent comprendre cela. Quant à savoir quels seront les mécanismes précis pour résorber la dette d'une année à l'autre, cela reste à définir, mais je pense que la plupart des gens peuvent comprendre cette notion qu'il suffit de leur présenter et de répandre. Les gens veulent connaître la date à laquelle ils pourront enfin brûler leurs papiers d'hypothèque. Cela peut prendre 20 ans, 25 ans et même 30 ans. Dans notre cas, ce sera peut-être un peu plus long, puisque la dette fédérale est tellement énorme.

Je pense que c'est également un facteur d'unité, et c'est d'ailleurs ce que nous disons dans notre mémoire. S'il y a une chose sur laquelle les Québécois sont d'accord, autant les séparatistes que les autres, c'est la dette fédérale qu'ils abhorrent tous également. L'ancien ministre des Finances du Québec, M. Campeau, a dit avant le référendum que si les Québécois décidaient de se séparer, ils pourraient se laver les mains de la dette fédérale et laisser le reste du Canada pris avec 144 milliards de dollars, soit l'obligation de séparation du Québec.

[Français]

M. Brien: Monsieur le président, je veux revenir sur ces points-là.

Je vais préciser l'erreur que comporte votre approche. Dans mon cas, si je veux payer mon hypothèque, c'est parce que j'ai un horizon de vie qui est défini. Je ne vivrai pas indéfiniment, ce qui n'est pas nécessairement le cas d'un pays. Peut-être que le Canada ne vivra pas dans sa forme actuelle, mais quand même... Si j'étais sûr que mes enfants, mes petits-enfants et leurs descendants habiteraient tous ma maison, je pourrais amortir mon hypothèque sur 100, 150 ou 200 ans sans que l'institution financière ait quelque problème que ce soit.

Donc, l'erreur que vous faites, c'est de demander qu'un pays fonctionne de la même façon qu'un individu par rapport à une hypothèque. C'est là que le raisonnement ne tient plus. C'est impossible, car il n'y aura jamais de consensus dans la population sur l'objectif de ramener la dette à zéro, ce que vous suggérez. Cela voudrait dire que le gouvernement paierait toujours toutes ses immobilisations comptant, ce qui est à mes yeux un non-sens.

J'ai fait mes études en économie et je connais très peu d'économistes qui prônent une telle approche. Tout le monde s'interroge sur le niveau optimal d'endettement par rapport à l'activité économique, mais tout le monde est d'accord qu'il existe un niveau d'endettement acceptable.

.1315

On s'entend sur le fait qu'à l'heure actuelle, il ne l'est pas. Mais vouloir ramener la dette à zéro et utiliser cette méthode dans certaines analyses que vous faites par rapport à la séparation du Québec m'apparaît tout à fait incorrect. C'est ce que je voulais vous dire.

Je suis convaincu qu'on peut examiner d'un point de vue théorique comment on pourrait payer la dette fédérale sur 25 ans, mais que jamais il ne serait possible d'établir un consensus parmi la population pour l'amener à la payer au cours des 25 prochaines années. Je vous mets au défi de vous engager en politique avec un tel programme.

[Traduction]

M. Richardson: Notre proposition est bien sûr impraticable si le gouvernement fédéral continue d'empiler les déficits année après année. La dette est constituée par l'accumulation des déficits, le total de tous les déficits - et quelques rares excédents - enregistrés depuis la Confédération. En fait, nous avions coutume d'enregistrer des excédents très régulièrement et je devrais donc nuancer mes propos, mais c'est bien de quoi il s'agit. En tout cas, depuis 30 ans, nous enregistrons surtout des déficits.

La clé, c'est d'éliminer rapidement ce déficit. Nous proposons une façon de le faire, non pas seulement par des compressions de dépenses, mais par cette proposition de récupération fiscale fondée sur le revenu familial. Nous vous recommandons instamment d'examiner les tableaux contenus dans notre mémoire, car ils ont été établis à notre intention par le ministère fédéral des Finances, même si c'est notre proposition.

Une fois que le déficit aura disparu, vous devrez légiférer pour interdire tout nouveau déficit, sauf en certains cas précis. Il y a à peine un mois, le gouvernement du Manitoba a présenté une loi en ce sens, comportant un plan d'élimination de la dette à long terme pour cette province, soit 30 ans. Ce plan comporte des pénalités sévères qui seraient infligées au premier ministre et aux membres du Cabinet pour non-conformité à la loi et il s'agit du programme le plus rigoureux au Canada pour ce qui est de l'équilibre budgétaire et de l'élimination de la dette et je crois que c'est un programme éminemment faisable. Le gouvernement fédéral pourrait assurément s'inspirer de l'exemple du Manitoba à ce chapitre.

Dans une perspective internationale, j'examine la situation du Canada parallèlement à celle de 172 autres pays du monde que nous étudions à l'Institut Fraser. Il n'y a aucune notion communément acceptée quant à ce qui constitue un endettement normal ou raisonnable, mais je place les pays qui ont un ratio d'endettement de moins de 20 p. 100 du PIB dans la catégorie des pays les moins endettés. Le Canada, malheureusement, se place dans la catégorie des pays gravement endettés. Nous avons rejoint le tiers monde. Il y a seulement deux autres pays industrialisés, l'Italie et la Belgique, qui figurent sur notre liste des pays malades, dans la catégorie des pays gravement endettés. Notre situation empire et c'est le gouvernement fédéral qui est le principal coupable. Les provinces sont en train d'assainir leurs finances, mais le gouvernement fédéral doit poursuivre ses efforts et aller plus loin qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant.

[Français]

M. Brien: J'aimerais poser une dernière question, monsieur le président.

Nous pourrions tenir un long débat là-dessus, mais on se reprendra. Vous tenez de nombreux forums. À un moment donné, j'irai y assister pour qu'on puisse avoir une bonne discussion.

Voici ma dernière question. Plusieurs personnes ont parlé du monde de l'éducation. Nous avons eu, hier, une organisation d'étudiants, différente de la Fédération canadienne des étudiant(e)s, qui suggérait des normes nationales en éducation.

J'ai entendu à quelques reprises ce matin des références à des normes nationales. J'aimerais que le représentant de la Fédération canadienne des étudiant(e)s me dise si son organisme partage cette position. Est-ce que les associations étudiantes du Québec sont aussi partie à cette position qui voudrait des normes nationales en matière d'éducation?

Le président: Je pense que les normes nationales ont été suggérées par M. Lavalle.

M. Brien: Oui, mais je veux connaître la position de la Fédération canadienne.

Le président: Ah, bon.

[Traduction]

Monsieur Gardiner.

M. Gardiner: Eh bien, je ne peux pas parler au nom des membres de l'Association des étudiants du Québec. Depuis longtemps, nous considérons l'Association des étudiants du Québec comme une organisation nationale autonome.

Pour ce qui est de notre position sur les normes nationales, je dirai toutefois que nous préconisons depuis longtemps des normes nationales dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. Nous croyons que les compressions budgétaires fédérales ont entraîné une dégradation de ce qui constituait depuis longtemps un jeu de normes établies artificiellement par le biais du financement. Nous craignons que des provinces comme Terre-Neuve, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard, et d'autres provinces qui n'ont pas la croissance économique dont jouit actuellement une province comme la Colombie-Britannique, voient leur système d'éducation gravement compromis, beaucoup plus que le nôtre en Colombie-Britannique.

.1320

Je crois donc qu'il est vital de mettre en oeuvre des normes nationales et je pense que ces normes doivent être relevées par rapport à la situation actuelle, sauf peut-être le Québec, où il existe des normes relativement à l'accès et à l'aide aux étudiants et à d'autres aspects du système d'éducation qui sont supérieures à celles des autres provinces. On pourrait s'inspirer du Québec pour établir ces normes nationales.

[Français]

Le président: Monsieur Lavalle, aimeriez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

M. Lavalle: Oui, je voudrais ajouter quelque chose. C'est moi qui ai soulevé la question des normes nationales. Je veux seulement préciser sans équivoque, étant donné mon respect du droit du Québec à l'autodétermination, que quand je parle de normes nationales, je parle des neuf provinces, exception faite du Québec et des territoires. Parce que l'éducation est un champ de compétence provincial, la question des normes ferait l'objet de négociations entre le Québec et le gouvernement fédéral.

Par normes nationales, je voulais dire essentiellement une série de principes et d'objectifs. Ces derniers ne s'appliqueraient pas au Québec parce que cette province est dans une situation spéciale, elle a des exigences spéciales, et, de mon point de vue, c'est une nation. Pour le reste du Canada, les normes faciliteraient grandement le passage des étudiants d'une province à l'autre et d'une maison d'enseignement à l'autre.

Le CMEC, le Conseil des ministres de l'Éducation au Canada, n'a pas vraiment réussi à garantir un niveau minimum d'accès et de capacité dans les institutions publiques, peut-être exprimé en pourcentage ou par habitant; à garantir un niveau minimum de qualité pour ce qui est de l'aide aux étudiants et des programmes d'aide aux étudiants; et enfin, à garantir des ressources en matière de bibliothèques et de recherches.

Le président: Merci, monsieur Brien.

Monsieur Grubel, vous avez la parole.

M. Grubel (Capilano - Howe Sound): Je tiens à remercier tous les témoins d'être venus nous faire part de leurs points de vue. Je suis particulièrement heureux de voir qu'il y a une aussi forte présence du secteur de l'éducation. Comme vous le savez, j'ai travaillé dans ce domaine pendant 30 ans, jusqu'à ce que je sois frappé de folie temporaire et que je me présente aux élections, avec le résultat que je suis député.

Je voudrais seulement dire, en mon nom personnel et au nom de tous les membres du caucus réformiste, mais particulièrement de M. Manning, que nous sommes d'accord avec toutes les préoccupations exprimées quant au fait que les compressions que l'on fait actuellement au Canada sont mal venues. Je trouve qu'il est très peu souhaitable que les sciences humaines subissent pareille coupe sombre dans leurs ressources. Je trouve qu'il est très peu souhaitable - et nous sommes tous d'accord là-dessus au sein du caucus réformiste - que l'on demande aux étudiants d'assumer une part plus lourde du fardeau financier. Je trouve qu'il est épouvantable que les universités subissent pareil ralentissement du taux d'accroissement de l'argent qui leur est accordé par le gouvernement.

Mesdames et messieurs, nous avons entendu beaucoup de témoins. J'en ai écouté 600 au cours des dernières années. Ils disent que si nous ne faisons rien, ce que nous devrons faire à ces bonnes causes à l'avenir sera encore pire que ce que l'on prévoit pour les deux prochaines années. C'est précisément pour sauver ces programmes, pour que les compressions à long terme soient moins pires, pour revenir à la croissance des ressources, que nous devons agir maintenant.

Nous avons fait tous les efforts au comité pour entendre toutes les solutions de rechange pour ce qui est d'assainir nos dépenses et d'éliminer la nécessité d'opérer des coupes sombres dans toutes ces bonnes causes. Nous avons écouté les gens. Nous avons entendu des experts nous présenter toutes les histoires qui nous ont été rapportées par la Fédération des enseignants de la Colombie-Britannique, nous avons entendu M. Neil Brooks nous parler de son dada, la fiscalité.

Laissez-moi vous dire que quand les experts sont venus nous entretenir de tout cela, ils ont tous dit que si nous faisons cela, les conséquences seront terribles pour d'autres Canadiens. C'est une vision étroite de ce qui se passe. Nous avons reçu des experts de nombreux domaines d'activité, y compris l'appareil gouvernemental, nous dire qu'il serait contre-indiqué d'abaisser les taux d'intérêt. Si la Banque du Canada adoptait dès demain une politique monétaire assouplie, du jour au lendemain, les taux d'intérêt à long terme augmenteraient brutalement. Cela irait totalement à l'encontre du but recherché.

.1325

C'est facile pour les gens de venir nous dire qu'ils ont de belles théories qui sont partagées par une dizaine d'autres personnes au Canada, mais que nous ne les prenons pas au sérieux et que nous faisons fausse route. Les décideurs politiques ne peuvent pas se fonder sur des théories qui ont l'air valable mais qu'il faut accepter globalement, ce qui nécessiterait de changer la nature même de la société.

Je peux vous assurer que nous avons tout fait pour essayer de trouver une solution facile au problème. Il n'y en a tout simplement pas. Il nous faut tous nous rendre à l'évidence que les temps sont très durs.

On n'a pour s'en convaincre qu'à regarder les chiffres que M. Hansen nous a présentés. Quel est le problème? C'est la croissance de la dette. À moins de mettre un frein à cette croissance, les compressions budgétaires qui devront être effectuées dans deux ans seront pires que celles-ci.

Je vous rappelle que c'est parce que le gouvernement actuel, lequel est représenté au comité, a décidé d'y aller avec le dos de la cuillère pour réduire ses dépenses que le service de la dette s'élève maintenant à 10 milliards de dollars au bas mot. Il s'agit exactement de la même somme que celle qui est consacrée à l'éducation dans ce pays. Depuis deux ans, on remet toujours au lendemain les décisions difficiles qui s'imposent en matière de compressions budgétaires.

Ce que de nombreux témoins réclament, c'est que le gouvernement procède rapidement à ces compressions budgétaires pour qu'on en finisse une fois pour toutes; sinon, ces compressions paraîtront demain dérisoires, étant donné surtout que presque tous les spécialistes s'entendent pour dire que nous connaîtrons une autre récession dans quelques années.

J'aimerais maintenant demander à MM. Hansen et Richardson de débattre entre eux la question du niveau optimal d'endettement. Selon M. Richardson, le niveau d'endettement devrait être nul. Je comprends certaines des raisons, dont l'équité entre les générations, qui le poussent à faire ce raisonnement. M. Richardson affirme que le niveau d'endettement du Canada ne devrait pas excéder le niveau d'endettement moyen des membres du G-7.

Monsieur Richardson, comment avez-vous calculé la moyenne d'endettement des membres du G-7? Comment en êtes-vous arrivé à un niveau d'endettement nul? Sur quels critères objectifs doit-on se fonder pour fixer le niveau d'endettement et pour faire des recommandations à cet égard au ministre des Finances?

M. Richardson: Voilà une excellente question. Une partie du dernier rapport du vérificateur général du Canada porte d'ailleurs sur la question de l'endettement. Il y est fait mention du fait qu'il est nécessaire de se fixer des objectifs à cet égard étant donné que, comme M. Brien l'a fait remarquer, il n'existe à l'heure actuelle aucun consensus sur le sujet. Pas plus les membres du groupe du G-7 que d'autres pays n'ont adopté de normes à cet égard. Chaque pays est libre de choisir le niveau d'endettement moyen qui lui plaît.

L'Institut Fraser est d'avis que l'objectif à long terme - et j'insiste sur le fait qu'il s'agit bien d'un objectif à long terme - devrait être l'élimination totale de la dette. Si c'est ce que les Canadiens veulent se donner pour objectif, il est possible de l'atteindre. Il faudrait cependant pour cela prévoir les contraintes législatives et les sanctions que nous proposons...

Si les discussions actuellement en cours à la Chambre des communes en ce qui touche la reconnaissance d'une société distincte au Québec aboutissaient à la réouverture de la Constitution, je crois qu'il faudrait profiter de l'occasion pour inscrire dans la Constitution une disposition de nature budgétaire portant sur le niveau d'endettement et la taille du déficit comme celle qui existe en Allemagne et en Suisse, par exemple. La Constitution d'autres pays comporte également une disposition semblable. Si les discussions qui se déroulent à la Chambre des communes devaient donc aboutir à des modifications constitutionnelles, je crois qu'il faudrait attacher la priorité à une modification de cette nature.

M. Hansen: Je suis d'accord avec M. Richardson là-dessus. Un niveau d'endettement nul serait idéal si nous pouvions atteindre cet objectif au cours de notre vie. Je crois cependant qu'il nous faudra être très très patients. Ce serait évidemment épatant si nous pouvions réussir.

Si nous proposons un taux d'endettement qui correspond au niveau d'endettement moyen de nos concurrents, c'est parce que nous vivons dans un monde international et que notre capacité à fournir des biens et des services à la population - et cela vaut tant pour les gouvernements que pour les entreprises - dépend de notre compétitivité. À l'heure actuelle, le fardeau de la dette du Canada se compare à celui de ses concurrents les plus endettés. Nous devrions nous fixer comme objectif d'avoir un niveau d'endettement qui se rapproche davantage du niveau d'endettement moyen de nos concurrents.

.1330

M. Grubel: L'un des arguments qui militent en faveur d'une telle approche, c'est évidemment que ceux qui, autour de cette table, grisonnent ou perdent leurs cheveux vont, de façon très irresponsable, léguer aux générations futures une dette tellement élevée qu'ils ne pourront jamais en voir le bout, et cela simplement parce que nous avons dépensé davantage que ce que nous pouvions nous permettre. Je crois qu'on peut dire qu'il s'agit d'une redistribution très injuste des revenus entre notre génération et les générations futures qui, soit dit en passant, n'ont aucun moyen de nous faire savoir ce qu'elles choisiraient pour elles-mêmes. Comme je le disais, c'est un argument qui milite en faveur de cette approche.

Certains soutiendront cependant que nous avons le droit de leur léguer cette dette puisque nous leur léguerons également des actifs importants tant dans le domaine des sciences que de la culture, du patrimoine et des installations.

Comment décider si nous devons poursuivre l'objectif d'un niveau d'endettement nul compte tenu de ces deux arguments presque contradictoires?

M. Murray Dobbin (agent de communications, Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique): M. Peter McCue a dû subitement partir.

Il est intéressant de voir autant de partisans du vaudou en économie autour de cette table - M. Grubel étant le principal - et de la théorie de la percolation qui a évidemment échoué dans les années trente comme elle échoue maintenant.

L'argument voulant que c'est en donnant plus d'argent aux riches qu'on stimulera la croissance économique a été infirmé par les faits depuis dix ans et continuera de l'être pendant dix ans encore. Le fait est que les riches investissent leurs économies à l'étranger pendant que les gens qui appartiennent à la classe ouvrière et à la classe moyenne dépensent leur argent au pays et stimulent ainsi l'économie. Donc, de cette façon, les bien nantis minent la croissance économique plutôt que de contribuer à la lutte contre le déficit.

Dans son budget de 1994, Paul Martin a annoncé la création de 400 000 nouveaux emplois par année. En janvier 1995, nous n'avions atteint que la moitié de cet objectif, et le budget de 1995 de M. Martin a presque complètement stoppé la croissance économique et la création d'emplois. Entre janvier et août de cette année, 19 000 nouveaux emplois seulement ont été créés. Le budget de M. Martin est responsable de ce ralentissement spectaculaire, ralentissement que ne feront qu'aggraver les compressions budgétaires supplémentaires qu'on propose dans le domaine social.

En réduisant les dépenses sociales, nous sommes en train de mettre un frein à la croissance économique.

On semble croire dans ce pays que les emplois du secteur public ne sont pas de vrais emplois, mais quand on songe aux 45 000 postes de fonctionnaires qui ont été supprimés dans le dernier budget de M. Martin, c'est un peu comme si on fermait toutes les usines de Ford, Imperial Oil, IBM, John Labatt et Domtar. C'est de la folie économique, et le fait de laisser entendre que la mise à pied de 45 000 personnes qui stimulent l'économie par leurs achats est un moyen de résoudre la crise du déficit est une insulte à notre intelligence.

Le président: Nous recommandez-vous d'annuler ces compressions budgétaires? Faut-il comprendre que vous nous recommandez d'engager plus de fonctionnaires?

M. Grubel: Il faut faire diminuer le déficit.

M. Dobbin: L'adoption d'une politique nationale en matière de services de garde constituerait une très bonne idée. Je ne suis pas sûr si cela représenterait 45 000 postes de plus, mais l'impression qui est donnée que les recommandations de notre groupe sont seulement...

Le président: Je vous ai posé une question au sujet de la fonction publique. Recommandez-vous que nous annulions les réductions de postes prévues dans la fonction publique?

Étant donné que vous croyez que tous ces emplois sont nécessaires, recommandez-vous aussi que nous recrutions plus de fonctionnaires?

.1335

M. Dobbin: Je vous prie de me laisser répondre à la question... Tout dépend du type d'emplois qu'on créerait. Je crois en effet qu'on devrait créer des emplois qui permettraient de mettre en oeuvre une politique nationale de services de garde puisqu'une telle politique aurait toutes sortes de retombées positives, notamment en permettant aux pauvres de pouvoir se payer les services de garde qui leur permettront d'occuper un emploi plutôt que de devoir compter sur l'aide sociale.

M. Grubel: Puis-je poser une question à M. Dobbin? Combien d'emplois ont-ils été créés au Canada au cours des trois dernières années?

M. Dobbin: Je crois qu'entre 1994 et le début 1995, on a créé 200 000 nouveaux emplois, mais depuis lors, on n'en a créé que 19 000.

M. Grubel: Permettez-moi de vous remettre après votre comparution un article de Statistique Canada, en fait, il s'agit du résumé d'une de leurs publications, dans lequel il est dit que depuis trois ans 800 000 emplois ont été créés par cet affreux secteur privé.

M. Dobbin: Et combien de milliers d'emplois ont été perdus?

M. Grubel: Il y a eu environ 100 000 emplois perdus à la suite des mises à pied dans la fonction publique. La machine à créer des emplois qui s'appelle la libre entreprise a cependant permis de créer un nombre net de 700 000 emplois.

M. Dobbin: Ce n'est pas un chiffre net, monsieur Grubel.

M. Grubel: Oui, il s'agit bien d'un chiffre net. Des centaines de milliers d'emplois ont été créés.

Permettez-moi de ne pas partager votre avis sur la question. Les gens comme vous répètent toujours le même point de vue. Vous avez vraiment besoin de retomber sur terre. Vous m'avez traité d'économiste vaudou. Sauf le respect que je vous dois, je crois que vous, vous devez retomber sur terre.

Le président: M. Rempel veut participer au débat.

M. Rempel: Je pense comme l'Institut Fraser ainsi que M. Grubel qu'il nous faut de toute urgence éliminer le déficit et la dette nationale. Lorsque je les entends cependant débattre la question avec des intervenants comme les membres de la Fédération des enseignants et des enseignantes de la Colombie-Britannique, j'ai l'impression que c'est l'incompréhension totale et que personne ne répond aux questions qui lui sont posées. Je ne pense pas que cela fasse progresser le dialogue. Que je regarde la chaîne parlementaire ou que je lise les journaux, c'est toujours la même impression que j'ai.

Je crois, par exemple, qu'il serait utile que des gens appartenant à l'association anti-pauvreté soient représentés ici pour participer au débat. Lorsqu'il est question de déficit et de dette, on en vient éventuellement à parler de dépression. On peut dire qu'un pays connaît une dépression qui a quelque chose à voir avec l'argent, lorsque la pauvreté est installée à demeure. Ce genre de déficit et ce genre de dette sont parmi les plus graves qui soient. Au Canada, un million de personnes sont démoralisées et n'ont pas les mêmes chances d'accès à l'éducation. Voilà un déficit dont l'Institut Fraser et M. Grubel ne parlent pas. Voilà le déficit réel.

Il n'y a pas de correspondance entre l'éducation, l'emploi, un niveau de revenu assuré pour tous et la civilisation et de nouvelles voitures, des tapis plus épais, de nouveaux matelas ou de grosses maisons. La civilisation ne veut pas dire simplement un produit national brut plus élevé. Parlant de la façon dont il entendait faire augmenter le produit national brut, je me souviens avoir entendu Lester Pearson dire ceci: «Il ne faudrait cependant pas devenir un peuple national brut», expression qu'on pourrait résumer par les mêmes trois lettres.

Je m'inquiète donc de l'orientation que prend le dialogue et du fait que l'Institut Fraser ne répond pas aux questions soulevées par l'association anti-pauvreté et que celle-ci et la Fédération ne nous disent pas comment résoudre le problème que pose le service d'une dette aussi énorme.

Le président: Peut-être pourrions-nous leur demander de répondre très brièvement aux problèmes que posent ceux qui vivent dans la pauvreté.

Messieurs Richardson et Hansen.

M. Richardson: Dans le cadre de mon travail à l'Institut Fraser, je compare la dette du gouvernement du Canada à celle d'autres gouvernements au monde. Nous demandons comment notre situation se compare à celle d'autres pays qui ont laissé leur dette augmenter de façon effrénée. La Nouvelle-Zélande est l'exemple qu'on donne le plus souvent, mais il y a aussi la Suède, l'Italie et d'autres pays. Songeons à certains pays du Tiers monde qui ont été acculés au pied du mur au cours des 15 dernières années. Les personnes les plus gravement touchées sont les plus démunies et ceux-ci se retrouvent dans une situation bien pire après la crise financière qu'avant celle-ci. Nous voulons éviter que cela se produise au Canada.

.1340

Nous soulignons également dans notre mémoire qu'il nous faut faire un lien entre cette crise et la crise de l'unité nationale qui a pris plus d'ampleur depuis le 30 octobre.

M. Rempel: Pourvu que nous puissions éliminer la dette.

Le président: Monsieur Hansen, voulez-vous répliquer brièvement?

M. Hansen: Il nous faut évidemment prévoir des programmes à l'intention des plus démunis.

Le président: Je propose que nous prenions une pause de cinq minutes.

.1341

.1349

Le président: Le comité peut-il reprendre ses travaux?

Je vous remercie, monsieur Grubel. La parole est maintenant à M. Walker.

M. Walker (Winnipeg-Nord-Centre): Monsieur le président, avant d'aborder la question principale qui m'intéresse, j'aimerais m'écarter un peu du sujet mais je ne voudrais pas perdre le fil de ma pensée.

Pour ce qui est des compressions budgétaires, en particulier de celles qui touchent les étudiants, on entend toutes sortes de sons de cloche. Je ne nie pas le fait que nous procédions à des compressions budgétaires. Je ne voudrais pas vous induire en erreur. Nous ne pouvons pas vraiment nous faire une juste idée de ce qui se passe en suivant le sentier qui mène du gouvernement fédéral aux gouvernements provinciaux et de ceux-ci jusqu'aux universités et vos salles de classe.

J'ai enseigné à l'université pendant 20 ans. Lorsque les gens parlent de normes nationales, je ne comprends honnêtement pas ce que cela signifierait pour moi comme enseignant. Je n'ai jamais pu comprendre ce que le gouvernement national pourrait me dire au sujet de ma relation avec mes étudiants et de mon travail de chercheur.

.1350

Le président: Permettez-moi de répondre à cette question. Si nous avions des normes nationales, vous n'auriez jamais été engagé comme professeur.

Des voix: Oh! oh!

M. Walker: C'est trop vrai pour être drôle.

Vous avez fait allusion à l'impact des compressions budgétaires. Ce que vous avez dit vaut peut-être particulièrement pour les Prairies mais risque de ne pas s'appliquer à la Colombie-Britannique. Les recettes provinciales augmentent, et il faut s'assurer que les ministres des Finances les partagent avec vous. En Saskatchewan ou au Manitoba, les compressions budgétaires représentent environ 60 millions de dollars au cours des deux prochaines années pendant que les recettes de la province augmentent de un milliard de dollars. Les décisions des provinces en matière de dépenses reflètent donc non seulement les compressions budgétaires qui leur sont imposées par le gouvernement fédéral, mais aussi leurs propres priorités.

Revenons au sujet principal qui m'intéresse. On a soulevé à plusieurs reprises la question de la politique monétaire. Je crois que les gens ont beaucoup de mal à comprendre la politique monétaire du gouvernement fédéral et son rapport avec la dette fédérale.

L'un des mémoires qui nous a été présentés soutient que le gouvernement fédéral pourrait économiser 6 milliards de dollars par an et qu'il n'aurait pas ainsi à procéder à ces compressions budgétaires. En chiffres ronds, le gouvernement fédéral dépense environ 50 milliards de dollars par année pour rembourser sa dette. Excuser ces chiffres ronds. Contrairement à M. Richardson, je ne suis pas un spécialiste du sujet. Environ 60 p. 100 de notre dette est à court terme. Chaque année, nous nous attaquons donc seulement à l'élimination de 60 p. 100 de notre dette. Le reste de la dette est à long terme, ce qui signifie entre 5 à 30 ans. La politique monétaire peut donc avoir une incidence sur 30 milliards de dollars en intérêts.

À l'heure actuelle, les emprunts à court terme portent un taux d'intérêt qui varie de 6,52 p. 100 à 6,75 p. 100 selon le jour de la semaine où l'emprunt est fait et l'instrument choisi. Pour ce qui est des 300 milliards de dollars dont on peut s'occuper sur une période de 18 mois, le coût d'emprunt est donc de 18 à 21 milliards de dollars. Pour réduire le coût d'emprunt de six millions de dollars, cela signifie qu'il faut réduire la dette de 12 milliards de dollars à 14 milliards de dollars. Il faut aussi ramener le taux d'intérêt à entre 4 p. 100 et 5 p. 100.

Ces taux d'intérêt sont inférieurs aux taux des bonds du trésor américain. Vous pouvez être d'avis que c'est de l'arnaque, mais qui s'en préoccupe? La dette est bien réelle. Les titres d'emprunt appartiennent bien à quelqu'un qui sont les banques la plupart du temps et qui décident d'acheter des obligations canadiennes. Il suffit de dire aux banques qu'elles doivent accepter 4 p. 100. Voilà une décision qui serait très populaire.

Après les banques, ce sont les compagnies d'assurance-vie qui achètent le plus d'obligations. Dans leur cas, ce sont les assurés qui seraient les plus touchés par une baisse des taux d'intérêt. Il faudrait peut-être être prudent.

Viennent ensuite, en troisième place, les régimes de retraite. Il suffirait donc de dire aux régimes de retraite qu'ils doivent acheter des obligations du gouvernement du Canada qui leur seraient offertes à un taux d'intérêt de 2 p. 100 inférieur à ce qu'ils pourraient obtenir pour d'autres investissements. En Ontario, le plus gros régime de retraite est le régime de retraite des enseignants de l'Ontario. Vous allez dire aux gestionnaires du régime qu'ils devront acheter des obligations du gouvernement canadien à 2 p. 100, ce qui serait inférieur de 3 p. 100 au taux du marché, afin de permettre au gouvernement d'économiser 6 milliards de dollars. Je crois que c'est une décision qui ne plairait pas à beaucoup de gens.

On peut se poser la question de savoir comment empêcher cet argent de sortir du pays. Il faut alors songer à imposer des contrôles sur les devises. Je sais que Neil Brooks songe bien à cette économie de 6 milliards de dollars, mais il ne faut pas oublier que c'est nous qui achetons les obligations du gouvernement. Il s'agit donc de notre propre argent. On ne se demande jamais vraiment si les gens sont prêts à accepter cette perte.

Moi j'aimerais qu'on en discute. Tout changement à la politique monétaire n'intéresse pas seulement les gros méchants étrangers qui achètent notre devise. C'est une question qui nous intéresse tous. Cette année, nous avons offert ce que nous considérions comme un taux d'intérêt généreux pour les obligations d'épargne du Canada et nous n'avons réussi à n'en vendre que pour 3,2 milliards de dollars alors que nous aurions voulu en vendre pour une valeur de 50 milliards de dollars. Ce n'est pas beaucoup. Le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique a vendu davantage d'obligations parce qu'il a offert un taux d'intérêt plus élevé.

.1355

Le fait est que les gens vont essayer d'obtenir le meilleur rendement pour leur argent. Réclamer des changements à la politique monétaire et des taux d'intérêt en-deçà des taux du marché revêt des conséquences pour chacun d'entre nous.

Je voulais simplement attirer votre attention sur ce point.

Le président: Qui voudrait répliquer à M. Walker.

Monsieur Finlayson.

M. Finlayson: Je crois que M. Walker fait ressortir un excellent point. Certains ont la fausse impression qu'il suffit d'appuyer sur quelques boutons à la Banque du Canada, rue Sparks, pour que les taux d'intérêt diminuent miraculeusement. Malheureusement, ce n'est pas possible. On peut dire qu'il nous faut gagner ces taux d'intérêt en ayant la confiance des marchés. Au Canada, la question de l'unité nationale pose un problème. Il en est de même pour sa situation budgétaire qui s'améliore cependant. Notre compétitivité laisse aussi à désirer si on la compare à celle d'autres pays.

Cela étant dit, nous connaissons depuis de nombreuses années des taux d'intérêt réels très élevés. Le fait que le taux d'inflation soit moins élevé au Canada qu'aux États-Unis ne nous a pas avancés beaucoup. Heureusement, cela est en train de changer. Je crois qu'avec une politique budgétaire appropriée, nous pouvons jouir de taux d'intérêt réels et nominaux moins élevés, ce qui sera avantageux pour les consommateurs étant donné le niveau élevé d'endettement des ménages et, ce qui revêt encore plus d'importance, de nos institutions publiques.

Le président: Je sais que MM. Dobbin et Gardiner ne partagent pas du tout votre avis là-dessus.

Monsieur Gardiner, vous préconisez une dévaluation du système monétaire.

M. Gardiner: Je crois que la politique suivie pendant les années 1980, soit celle qui consistait à ramener à zéro le taux d'inflation, est la principale cause de l'augmentation de la dette. En outre, on peut aussi lui attribuer les taux d'intérêt excessivement élevés qu'on a connus à la fin des années 1980, lesquels ont entraîné une croissance phénoménale des paiements d'intérêt et de la dette elle-même.

Le président: Si je vous ai bien compris, vous avez recommandé aujourd'hui qu'on dévalue le système monétaire.

M. Gardiner: C'est effectivement ce que j'ai recommandé. J'ai pressé le gouvernement d'abandonner sa politique en vue de ramener le taux d'inflation à zéro parce qu'elle est responsable de la stagnation de la croissance, alors que c'est de cette croissance que dépend l'élimination de la dette. Soyons honnêtes. Je suis sûr que l'Institut Fraser ainsi que la Chambre de commerce de Vancouver savent que, sans croissance économique, nous n'éliminerons jamais la dette quelles que soient les mesures budgétaires qu'on prenne.

Le président: Et pour vous, inflation et croissance sont synonymes.

M. Gardiner: Je considère qu'une inflation contrôlée grâce à la politique monétaire constitue un élément d'un programme axé sur la croissance.

Le président: Le taux d'inflation est actuellement de 2 p. 100. Où devrait-il se situer selon vous?

M. Gardiner: Il devra se situer à entre 3,5 et 4 p. 100.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Dobbin.

M. Dobbin: Je suis d'accord avec ce qu'on vient de dire. À mon avis, la Banque du Canada n'a pas seulement pour mandat de lutter contre l'inflation, mais de prendre aussi des mesures qui touchent la croissance, l'emploi et les taux d'intérêt. Or, elle a abandonné la partie pour ce qui est de la croissance et de l'emploi.

M. Walker a raison lorsqu'il dit que le gouvernement n'a pas pu lever autant d'argent qu'il aurait souhaité le faire par la vente des obligations d'épargnes du Canada. Ça m'amène à dire deux choses. Premièrement, je crois qu'on pourrait faire appel au patriotisme et au sens du devoir civique des Canadiens comme on l'a fait durant la guerre et les inciter à acheter des obligations d'épargne du Canada. Je crois que c'est une première mesure qui pourrait être prise.

Deuxièmement, en offrant un taux d'intérêt plus élevé sur les obligations, on peut ainsi rapatrier une partie de la dette. Je crois que c'est très important. Il ne fait aucun doute que notre capacité à faire baisser les taux d'intérêt est réduite du fait qu'un pourcentage aussi important de notre dette est détenue par des étrangers.

Vous nous mettez en garde contre les conséquences d'une baisse des taux d'intérêt. Le fait de ne pas abaisser les taux d'intérêt comporte aussi des conséquences. Faut-il en conclure qu'un taux de chômage qui oscille entre 9 et 10 p. 100 et un taux d'inflation de 1 p. 100 sont acceptables alors qu'ils pourraient être respectivement de 6 p. 100 et de 4 ou de 4,5 p. 100. C'est un jugement de valeur. Si l'on opte pour un taux d'inflation de 4 ou de 4,5 p. 100 et un taux de chômage de 6 p. 100, on met l'accent sur les besoins de la communauté et, dans le cas contraire, on privilégie les questions économiques au détriment des questions humaines.

M. Walker: J'aurais dû penser à cela il y a six ans lorsque nous étions dans le creux de la vague. Je crois que la stratégie adoptée par le dernier gouvernement a été dévastatrice. Je crois que nous avons beaucoup souffert du fait que les taux d'intérêt étaient élevés, que l'inflation était basse et que le dollar était fort.

.1400

Les gens ont donc manifesté de plusieurs façons leur confiance et on peut dire que la stratégie a changé de façon générale. On a imposé une limite au taux d'inflation et la banque du Canada fait en sorte que les taux d'intérêt diminuent aussi rapidement que possible, mais ces problèmes continuent de se poser tant dans notre pays que dans le reste du monde.

Un taux d'inflation de 4 ou 5 p. 100 semble anodin. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur le journal de ce matin. Le marché d'exportations est le moteur de l'économie de notre pays. Si l'on permet aux taux d'inflation d'atteindre 4 ou 5 p. 100, ces marchés d'exportation disparaîtront très rapidement et on va se retrouver à la case de départ.

Si le Canada ne peut pas exporter ses produits aux États-Unis, notre économie va s'immobiliser.

Le président: Mais monsieur Walker, M. Dobbin n'est pas d'accord avec vous. Selon lui, si le taux d'inflation était de 4, 5 ou 6 p. 100, le taux de chômage ne serait que de 6 p. 100.

M. Walker: Je comprends.

Le président: C'est ce qu'il nous promet.

M. Dobbin: Notre politique économique ne prête guerre d'attention à l'économie intérieure. Or, le Canada a l'une des plus importantes économies intérieures du monde et le fait d'accepter un taux de chômage de 10 p. 100 en contrepartie d'un taux d'inflation peu élevé nie tout simplement l'importance de l'économie intérieure.

Bien entendu, l'économie d'exportation est extrêmement importante, mais sa croissance n'a pas produit autant d'emplois que nous l'avions espéré.

M. Walker: Monsieur Dobbin, vous êtes un universitaire. Je vais vous donner autant de semaines qu'il vous faudra pour trouver une document quelconque disant que le gouvernement du Canada considère un taux de chômage de 10 p. 100 comme étant acceptable. Pour ma part, je peux vous montrer d'ici une heure un document disant exactement le contraire.

M. Dobbin: Quand j'entendrai le premier ministre et le ministre des Finances, M. Paul Martin, dire que nous considérons le chômage comme une priorité nationale, comme si nous étions en guerre...

Quelqu'un a dit plus tôt que le gouvernement n'appliquerait pas nécessairement les mêmes politiques si nous étions en guerre. Pourquoi ne pas dire que nous sommes en guerre contre le chômage? Quand j'entendrai le gouvernement affirmer une telle chose, je le croirai.

Le président: M. Lavalle veut ajouter quelque chose.

M. Lavalle: Je comprends ce que vous dites, monsieur Walker, mais je voudrais que vous répondiez à une question.

La question l'équité est en jeu. Vous dites qu'on pourrait ne pas faire certaines choses et vous avez mentionné quelques instruments qui pourraient disparaître à cause de leur effet compensateur. Je ne suis pas économiste, mais il me semble que vous ciblez certains groupes. À mon avis, les groupes que vous ciblez sont probablement ceux qui seraient le plus en mesure d'assumer un tel fardeau.

Le Centre canadien de recherche en politiques de rechange attribue 2 p. 100 de l'augmentation de la dette aux majorations des programmes sociaux. Le reste vient des taux d'intérêt élevés et de la baisse des taux d'imposition des sociétés apportés par M. Turner dans les années 1970.

Il me semble que, s'il y a un déficit, nous pouvons malgré tout rétablir l'équilibre. Nous pouvons adopter une politique qui réduira la dette en faisant payer sur une certaine période ceux qui ont le plus profité de la création de cette dette.

Les mesures proposées, dont les conséquences vont être aggravées par certaines initiatives provinciales, ciblent les groupes qui ont le moins profité de la politique financière du gouvernement dans le passé qui n'ont aucun espoir pour l'avenir. C'est ce que va se passer et nous commençons déjà à en voir les conséquences.

M. Walker: Nous en revenons toujours à la même question, et c'est pour cela que nous avons une table ronde. Personne ne prétend qu'il existe de solution magique. Pour ma part, je ne veux nullement contester votre affirmation selon laquelle les intérêts composés et les taux d'intérêt élevés payés sur les emprunts à compter des années 1980 jusqu'à 1993-1994, avant que les taux ne commencent à baisser, ont eu d'énormes conséquences.

Par ailleurs, une politique de taux d'intérêt plus faibles, même s'ils sont encore trop élevés en réalité, comme l'a signalé M. Hansen, en même temps que les restrictions imposées pour les dépenses auront l'effet contraire. Le problème s'atténuera graduellement à mesure que nous reprendrons les choses en main. C'est pour cela que je suis optimiste.

.1405

Du côté de l'impôt des sociétés, nous avons instauré un impôt minimum sur les sociétés, un impôt sur les immobilisations et toutes sortes d'autres choses. Une bonne partie des évaluations du centre se fondent sur des chiffres d'affaires au plus creux de la courbe de la récession, à une époque où les recettes des entreprises étaient très faibles. Nous attendons de voir exactement ce qui se passera d'ici quelques années pour voir si cela a changé ou non.

Vous rappelez-vous à peu près le montant de l'impôt des sociétés, monsieur le président? Est-ce environ 7 milliards de dollars?

Le président: C'était 8 milliards de dollars, mais cela augmente très rapidement parce que le chiffre d'affaires des entreprises a été plus élevé pour une raison ou une autre l'année dernière.

M. Walker: Très bien. Disons que ce soit 8 milliards de dollars et qu'une hausse de l'impôt des sociétés produise 4 milliards de dollars de plus. Je voudrais savoir ce que les autres en pensent, mais cela me semble être un montant important pour l'impôt des sociétés.

Quelqu'un d'autre a proposé de relever les impôts des contribuables qui se situent dans la tranche supérieure de revenu pour avoir un régime fiscal plus juste. Pour obtenir 10 p. 100 de plus ou 6 milliards de dollars des tranches supérieures de revenu il faudrait augmenter le taux d'imposition de ces contribuables d'environ 50 p. 100.

Il y a cependant les solutions plus simples. Par exemple, une TPS intégrée produirait des avantages pour les familles à faible revenu. Avec la participation des gouvernements provinciaux, cela produirait beaucoup de recettes et compenserait certaines pertes, par exemple la perte de 75 millions de dollars pour l'enseignement dans les écoles publiques dont certains enseignants ont parlé.

Si nous avions une meilleure taxe à la consommation au Canada, nous pourrions faire beaucoup plus pour financer ces programmes.

Le président: Je voudrais faire une mise au point, monsieur Walker. Je vous ai menti. En 1993-1994, l'impôt sur le revenu des sociétés s'élevait à 9,8 milliards de dollars. Je regardais les pourcentages. L'année suivante, le montant est passé à 13 milliards de dollars et, cette année, il atteint 15,6 milliards de dollars. Cela continue donc d'augmenter.

Vous vouliez ajouter quelque chose, monsieur Keener.

M. Keener: Merci.

Je ne suis pas économiste moi non plus et détenir un tel emploi, surtout à notre époque, doit être vraiment affolant.

Si l'on examine la façon dont la dette s'est accumulée depuis 25 ou 30 ans, nous constatons que cela a eu un effet composé et que des déficits relativement faibles certaines années ont eu plus tard des conséquences très graves et néfastes pour l'économie du Canada et les contribuables canadiens en 1995.

En ce qui a trait aux dépenses au titre des mesures sociales, et c'est l'une des choses qui nous préoccupe le plus, surtout dans le cas des universités, qui représentent un pourcentage relativement faible de ces dépenses, il ne faut pas oublier que ces dépenses constituent en réalité un investissement.

Il y a un calcul que personne n'a fait jusqu'ici. Si nous n'avions pas investi tout cet argent pour diverses mesures sociales depuis 30 ans, quelle serait notre situation à l'heure actuelle? Aurions-nous vraiment une dette moins importante?

À mon avis, nous ne serions probablement pas en meilleure posture. Du simple point de vue financier, cet investissement était donc très sage.

Je voudrais faire quelques autres citations. Je m'intéresse à la recherche pure et c'est un secteur qui serait probablement un grand perdant si le Transfert social réduisait les fonds versés directement aux universités.

J'ai déjà parlé de l'article de John Polanyi. Je voudrais en lire un autre passage. Le voici:

Je pourrais aussi citer un passage d'une monographie rédigée pour l'Institut Fraser par le professeur d'affaires, de l'Université Queen's, Kristian Palda. L'auteur parle surtout de l'appui à la recherche pure. Il ne s'agit pas uniquement de recherche financée par le CRSNGC et le CRSHC. Une bonne partie de la recherche est financée directement par des subventions provinciales versées aux universités et, bien sûr, ces subventions étaient auparavant financées en partie par les paiements de transfert. Voici ce que dit le professeur Palda:

.1410

Le président: D'après ce que m'a dit Mme Moran, certains de nos témoins du secteur de l'éducation devront nous quitter vers 14h20.

M. Lavalle: À 14h15.

Le président: Voulez-vous lever la main? Qui va nous quitter? Aviez-vous levé la main, monsieur Gardiner?

M. Gardiner: Oui.

Le président: Dans ce cas, si vous voulez bien terminer, monsieur Keener, je voudrais que vous ayez tous la chance de résumer avant de partir.

M. Keener: J'ai seulement une autre chose à dire.

Je reviens au rapport du Conseil des sciences de la Colombie-Britannique dont j'ai parlé tantôt. Dans une autre partie du rapport, on dit ceci:

La production constante de technologies prometteuses par nos universités et nos grandes entreprises.

À ma propre université, l'Université du nord de la Colombie-Britannique, nous commençons seulement à mettre au point les programmes embryonnaires de concert avec l'industrie. Nous sommes vraiment très effrayés à l'idée que les programmes de ce genre et la qualité de l'enseignement que nous offrons à nos étudiants perdraient beaucoup à cause de la réduction des paiements de transfert.

Le président: Merci, monsieur Keener.

Monsieur Grubel.

M. Grubel: Je vais céder mon tour vu que nos témoins sont pressés. Je dirai quelques mots plus tard.

Le président: Merci.

Voulez-vous chacun nous faire un résumé de 30 secondes avant de partir? Vous pouvez commencer, monsieur Gardiner.

M. Gardiner: Tout d'abord, je remercie le comité d'avoir pris le temps de nous écouter aujourd'hui.

Je signale d'abord que les provinces n'ont plus de marge fiscale. Comme le dit M. Walker, si les recettes des provinces augmentent de nos jours, c'est uniquement parce que l'activité économique augmente. À cause de cela, le gouvernement fédéral continue à avoir un rôle de financement essentiel à jouer pour tous les genres de programmes, mais surtout pour l'enseignement postsecondaire, la santé et l'aide sociale et ce besoin ne fera que s'accentuer à mesure que les fonds vont diminuer. L'incidence sur le déficit de l'absence de croissance économique et du genre de dépenses qui accompagne les programmes de santé, l'enseignement postsecondaire et de bien-être social pourraient dépasser de beaucoup l'incidence de réduction de dépenses et des économies que vous espérez entraîner par les diminutions que vous avez entreprises.

Le président: Merci, monsieur Gardiner.

Madame Moran.

Mme Roseanne Moran (représentante du personnel, College Institute Educators' Association of B.C.): Nous remercions aussi le comité de nous avoir entendus aujourd'hui.

Je n'ai qu'une seule observation à faire. Ce n'est pas vraiment un résumé, mais c'est une chose dont nous avons parlé dans notre mémoire.

Quand le comité a déposé son rapport sur l'incidence du projet de loi C-76 l'année dernière, il a reconnu le bien-fondé de l'inquiétude des Canadiens au sujet du fait que l'aide financière pour l'enseignement postsecondaire n'est pas accompagnée de principes ou d'objectifs et que cela rend l'enseignement postsecondaire particulièrement vulnérable à cause de la façon dont le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux est structuré. Cela nous inquiète de voir que l'on n'a pas fait grand-chose depuis un an pour élaborer de tels principes et objectifs et nous regrettons de n'avoir pas eu l'occasion d'en parler un peu plus longtemps au comité.

L'autre chose que signalait votre comité l'année dernière, c'est que le transfert social devrait continuer de comprendre un versement en espèces à l'avenir. D'après les analyses que nous avons vues depuis un an, il n'y aura probablement pas de versements en espèces à moins que les programmes de financement fédéraux-provinciaux soient restructurés et nous espérons que le comité se penchera là-dessus pendant ses consultations.

Le président: Merci.

Monsieur Lavalle.

M. Lavalle: Je n'ai rien d'autre à dire. Merci beaucoup.

Le président: Avez-vous autre chose à ajouter, monsieur Keener?

M. Keener: Je pense avoir déjà fait mon résumé, mais je pourrais encore ajouter quelques phrases.

Nous remercions le comité de nous avoir invités et nous sommes heureux d'avoir eu l'occasion de vous parler.

Ce qui nous inquiète, c'est que l'on considère les paiements de transfert social comme des investissements. Pour ma part, j'espère qu'on ne considérera pas toujours qu'il s'agit uniquement d'un investissement économique. À mon avis, cela reflète une perception quelque peu étroite de la situation, mais même de ce point de vue, c'est un investissement extrêmement sage.

Rob Clift, directeur exécutif de CUFA B.C., voudrait, je pense, vous lire une brève citation.

.1415

M. Robert Clift (directeur exécutif, Confederation of University Faculty Associations of British Columbia): Très rapidement:

Le président: Je suis ravi que vous soyez membre du Parti libéral. J'imagine que vous vous faites le porte-parole de tous les témoins aujourd'hui.

M. Clift: Non. En réalité, monsieur le président, je suis votre porte-parole à vous puisque c'est une observation que vous aviez faite en 1989 au sujet de l'importance de la recherche pour l'économie.

Le président: Voudriez-vous me la remettre? Je voudrais l'envoyer à ma mère.

M. Dobbin: Je tiens aussi à remercier le comité. Certains ici ont l'impression que vos audiences de comité ne sont pas très utiles, mais je ne suis pas d'accord. Je sais que vous rendez compte d'habitude de ce que vous entendez. J'espère que vous ferez la même chose cette fois-ci.

La dernière chose dont je voulais parler est une étude menée par Ekos Research selon laquelle les 20 p. 100 des contribuables qui se situent dans les tranches supérieures de revenu au Canada sont de moins en moins engagés envers le contrat social. Autrement dit, d'après les sondages effectués auprès des Canadiens ordinaires et de l'élite - , c'est-à-dire des hommes d'affaires importants, des politiciens, et autres, - les gens semblent tenir de moins en moins aux principes d'un contrat social. C'est en partie pour cela que les propositions que font les organismes comme le mien sont prises tellement à la légère. C'est parce que les riches refusent de payer plus d'impôts et les entreprises aussi.

Si nous voulons être une nation, ceux qui ont les moyens de payer doivent considérer que c'est une obligation pour eux. Sans cet engagement envers le contrat social, nous ne pourrons plus être une nation.

Merci.

Le président: Si je peux prendre un instant pour résumer...

Une voix: Quelques autres personnes voulaient partir.

M. Finlayson: Je dois moi aussi vous quitter.

Le président: Qui d'autre doit partir?

Mme Gerson: Je dois partir aussi.

Le président: Je m'excuse. Faites votre résumé.

Mme Gerson: Je trouve fascinant d'écouter la discussion au sujet des chiffres et des nombres. Il est très facile de perdre de vue le fait que les chiffres portent sur des êtres humains et qu'il est beaucoup plus facile de mesurer des dollars qu'un investissement en ressources humaines, puisque c'est de cela que nous parlons quand nous discutons d'éducation. On ne peut pas vraiment mesurer l'avenir de la même façon que l'économie. C'est facile de l'oublier.

Par-dessus tout, pour revenir à ce que je disais à propos de l'unité nationale, si les membres du public n'ont pas tellement confiance dans l'avenir de leur pays au niveau psychologique individuel, ils vont préférer garder leur argent au lieu de le réinvestir dans un pays instable et incertain.

Le président: Madame Gerson, je vous remercie d'être revenu encore sur les rapports qui existent entre notre avenir économique et la question de l'unité nationale.

Je regrette que vous soyez parti, monsieur Dobbin, mais je suis certain que les Canadiens tiendront compte de votre appel à acheter des obligations du gouvernement du Canada même si elles produisent des intérêts moins élevés que d'autres genres d'obligations. Je suis certain que vous avez donné l'exemple en en achetant vous-même lors de la dernière émission.

Pour ce qui est de la recherche pure, je m'en tiens toujours à ce que j'avais déclaré en 1989. L'année dernière, notre comité avait recommandé que l'on ne réduise pas le budget des trois conseils subventionnaires. À mon avis, cela représente un investissement essentiel pour bâtir notre avenir.

Pour ce qui est de fixer des objectifs et des buts nationaux à l'enseignement postsecondaire, ce qui est très intéressant comme possibilité, je voudrais savoir ce que les provinces ont fait pour s'entendre à ce sujet parce que le gouvernement fédéral ne peut rien imposer dans ce domaine. Nous le savons.

Vous avez mentionné le versement en espèces dans le cadre du Transfert social. Nous avions recommandé l'année dernière qu'il y ait un versement en espèces dans le cadre du transfert social pour atteindre certains objectifs nationaux.

Monsieur Gardiner, je comprends votre point de vue au sujet de la nécessité pour les Canadiens d'avoir accès aux établissements de haut savoir. Nous n'avons pas parlé aujourd'hui de l'obligation pour le gouvernement de fournir en cas d'augmentation des frais de scolarité au moins un certain financement grâce à des prêts aux étudiants dont le remboursement serait probablement établi en fonction du revenu subséquent.

.1420

J'ai aussi du mal à convenir que nous en profiterons tous si l'inflation augmente. L'inflation veut dire que cela prend plus d'argent pour acheter les mêmes produits et services et je ne suis pas certain que cela créera un climat suffisamment propice à l'investissement pour produire des emplois, maintenir les taux d'intérêt à un niveau raisonnable et nous permettre de bâtir notre avenir. Peut-être que le monde des affaires ne tiendrait pas compte des taux d'intérêt plus élevés qu'il en résulterait et considérerait l'inflation avantageuse et investirait davantage, mais je ne le crois pas.

Le haut-savoir et l'enseignement postsecondaire sont un aspect critique de notre avenir. Nous savons que c'est un investissement et vous avez présenté des arguments très éloquents aujourd'hui. Merci beaucoup.

Monsieur Grubel, vous aviez une chose à ajouter avant que nous poursuivions.

M. Grubel: Ceux qui auraient peut-être voulu entendre ce que d'autres témoins nous ont dit sont tous partis. Merci beaucoup.

Le président: Nous avons réussi à vider la salle très rapidement, n'est-ce pas?

Monsieur St. Denis.

M. St. Denis (Algoma): Merci, monsieur le président. Je voudrais poser une question à la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, mais je voudrais auparavant faire une brève observation sur la discussion à propos de la dette, que j'ai trouvée très intéressante.

La Chambre de commerce de Vancouver a tout à fait raison de dire que nous devrions nous préoccuper davantage, du moins à court et à moyen terme, de notre position par rapport aux autres nations industrialisées. Je suis aussi sans doute d'accord avec mon collègue Pierre Brien qui a noté que très peu d'entreprises n'ont absolument aucune dette à notre époque. Une dette constitue une façon de financer de l'expansion et certaines autres activités commerciales. Si nous considérons que le Canada devrait être administré comme une entreprise, il faudrait tenir compte du fait que 99,9 p. 100 des entreprises ont des dettes. Nous pouvons convenir que le montant de la dette est trop élevé, mais nous n'avons pas besoin de dire qu'il faudrait que la dette disparaisse entièrement. Nous finirons peut-être par trouver un juste milieu entre le montant actuel et zéro.

Pour revenir à la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada il y a une chose qui m'intéresse beaucoup parce qu'un tronçon important de la route transcanadienne traverse ma circonscription d'Algoma dans le nord de l'Ontario. Je vois d'ailleurs que Manitoulin Transport, l'un des principaux employeurs de ma circonscription, est membre de votre coalition. Le programme de deux ans des infrastructures fédérale-provinciale et municipale a reçu énormément d'appui jusqu'ici, et surtout maintenant qu'il est presque terminé. J'espère que nous pourrons le rétablir plus tard.

Votre organisme et l'Association canadienne de l'automobile, la CAA, avez parlé d'un réseau national routier. Vous-mêmes et l'Association avez signalé, je pense que les recettes produites par les taxes sur l'essence ne sont pas toutes investies dans l'entretien des routes. Ce n'est sans doute pas nécessaire d'investir la totalité de cet argent dans l'entretien des routes. Il y a de bonnes raisons à cela.

Je me demande qu'elle serait la réaction de la coalition si le gouvernement acceptait de mettre de côté des fonds pour un réseau routier national. La coalition serait-elle d'accord si le gouvernement décidait, et je choisis un chiffre au hasard, de mettre de côté quelques cents de la taxe sur un litre de gaz pour le réseau routier national. Vos membres trouveraient-ils que c'est une bonne idée vu qu'ils achètent beaucoup d'essence et croyez-vous que les Canadiens en général seraient d'accord pour payer 1 ¢ ou 2 ¢ de plus le litre d'essence si cet argent était versé dans une caisse pour entretenir le réseau routier national.

M. Jim Facette (président-secrétaire, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada): Merci, monsieur St. Denis. En un mot, si le gouvernement fédéral pouvait mettre de côté ou réserver plus d'argent pour investir dans le réseau routier du Canada, nous serions tout à fait d'accord avec cela et c'est ce que nous disons dans notre mémoire.

Dans la deuxième partie de votre question, vous avez dit que, l'année dernière, nous avions recommandé à votre comité de proposer au ministre des Finances d'augmenter la taxe d'accise sur l'essence de 1 ¢ et de verser cet argent dans une caisse pour l'entretien du réseau routier national du Canada. Nous avons appris par la suite dans le cadre de diverses activités que, d'abord, le ministère des Finances ne croyait pas que le public canadien accepte une augmentation des taxes sur l'essence et, deuxièmement, qu'il était impossible de songer à réserver une partie de ces taxes pour quelque chose de précis. D'ailleurs, dans une communication que nous avons reçue en novembre du ministre des Finances, il nous dit que c'est encore le cas et que ce ne serait pas possible de mettre de côté les recettes produites par certaines taxes pour l'entretien des routes. Nous ne sommes pas d'accord là-dessus. Selon nous, ce sont les utilisateurs qui paient pour le réseau routier et nous avons besoin d'y consacrer plus d'argent.

.1425

Quant à la deuxième partie de votre question à savoir si le public accepterait de payer plus de taxes sur l'essence, c'est difficile à dire. En février dernier, le public a probablement protesté un peu au départ, mais pas tellement par rapport à ce qui s'était fait dans le passé. Le public a maintenant accepté la situation. Nous avons cependant beaucoup de mal à accepter la décision du ministre des Finances de ne pas réinvestir une partie de cet argent dans le réseau routier. Nous savons que les utilisateurs obtiennent seulement 4 p. 100 en retour de leurs investissements et que, dans certaines provinces comme la Colombie-Britannique, ils ne reçoivent que 1,7 p. 100 pour leurs investissements.

Pour vous répondre brièvement, nous serions tout à fait d'accord pour que l'on réserve davantage d'argent pour l'entretien des routes du Canada, mais nous devrions réfléchir davantage avant de vous dire s'il faut pour cela d'abord augmenter les taxes sur l'essence.

Le président: M. Daykin avait quelque chose à dire à ce sujet.

M. Daykin: Ce n'était pas vraiment là-dessus. J'attendrai.

Le président: Dans ce cas, nous pourrions revenir à M. St. Denis pendant quelque temps. Je vais vous donner à chacun l'occasion d'intervenir sur les sujets qui vous intéressent.

Monsieur St. Denis.

M. St. Denis: Nous n'avons pas eu l'occasion de lire votre mémoire au complet, mais dites-vous que vous seriez d'accord pour une taxe de 1 ¢ le litre?

M. Facette: L'année dernière, nous avions déclaré à votre comité que nous accepterions une hausse de taxe de 1 ¢ si cet argent était versé directement....

M. St. Denis: Oui, je l'ai trouvé.

M. Facette: Si l'on jugeait que le public canadien accepterait une telle idée, nous appuierions une augmentation de la taxe sur l'essence.

M. St. Denis: Et vous n'avez pas changé d'avis cette année.

M. Facette: Non.

M. St. Denis: Si je ne m'abuse, la ligue d'automobile a proposé une taxe d'environ 2 ¢ le litre. Je ne sais pas si c'était seulement à l'échelon fédéral ou si cela comprenait la participation des provinces. Les provinces auraient probablement l'impression que ce serait le seul moyen de financer une telle chose. Je me demande donc si nous risquons de nous trouver avec des taxes de 4 ¢ le litre dans un tel cas. Est-ce possible?

M. Facette: Je suppose qu'il y aurait un certain risque à augmenter les impôts dans le présent contexte économique, mais pour ce qui est de savoir si l'augmentation devrait être de 1 ¢ ou de 2 ¢, nous pourrions en discuter plus tard.

En 1994, le ministre fédéral des Transports a mis les provinces au défi de trouver des fonds et a indiqué qu'il recommuniquerait avec elles pour leur préciser le niveau de soutien auquel il serait lui-même prêt à s'engager. En 1994, vous vous en souvenez peut-être, les provinces, à l'exclusion du Québec malheureusement, ont réussi à trouver 2,6 milliards de dollars sur une période de cinq ans, et ces fonds provenaient en grande partie de leurs budgets existants. Elles ne seraient peut-être pas en mesure d'en faire autant aujourd'hui, mais il me semble qu'il appartiendrait aux provinces de déterminer comment elles s'y prendraient pour égaler la contribution fédérale - qu'elles le fassent par les taxes sur l'essence ou par d'autres moyens.

M. St. Denis: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur St. Denis.

M. St. Denis: Ai-je le temps de poser une autre question, monsieur le président?

Le président: Bien sûr.

M. St. Denis: Certains des participants qui sont déjà partis ont parlé de normes nationales. Dans le secteur de l'éducation, on est d'avis qu'il faut absolument avoir ces normes en ce qui concerne l'enseignement postsecondaire.

Dans une optique plus générale, je pose la question suivante à ceux qui sont toujours là et qui ne sont pas du secteur de l'éducation: avez-vous une idée de ce que pensent les gens avec qui vous traitez - pas les politiciens provinciaux, mais les groupes et les particuliers avec lesquels vous travaillez - du rôle du gouvernement fédéral pour ce qui est d'établir des normes nationales, qu'il s'agisse de services de santé, d'enseignement postsecondaire, de services sociaux ou de l'infrastructure routière, le sujet qui nous occupe ici, étant donné qu'on semble proposer en quelque sorte qu'il joue un rôle à cet égard? D'après vous, que pense le Canadien moyen du rôle que devrait jouer le gouvernement fédéral, sinon sur le plan de l'administration au jour le jour d'un programme en particulier, du moins dans l'établissement de certaines normes nationales quant à la prestation des programmes? Ou pensez-vous que le taux devrait être laissé aux provinces?

.1430

Je suppose que cela revient à la question du transfert de responsabilités du gouvernement fédéral aux provinces.

M. Hansen: C'est une question très importante à laquelle nos membres s'intéressent énormément: quel est le rôle qui convient au gouvernement canadien en cette période de décroissance de la participation fiscale.

Nous estimons qu'il a un certain rôle à jouer. D'abord, il devrait exister une certaine uniformité minimale dans les différentes régions du pays grâce à des normes communes en matière d'éducation et de soins de santé.

La participation du gouvernement canadien est importante et son rôle devrait comporter deux volets. Il devrait, d'une part, conserver des statistiques quant aux normes qui sont appliquées, statistiques qu'il mettrait à la disposition des provinces, et, d'autre part, travailler de concert avec les provinces et jouer un rôle de chef de file afin de déterminer quelles devraient être ces normes. Ainsi, même si le gouvernement canadien n'aura peut-être pas à l'avenir une participation financière importante dans certains de ces domaines, il n'en reste pas moins qu'il a un rôle important à jouer pour ce qui est d'élaborer les grandes orientations, de conserver les données et de tracer la voie aux provinces.

Le président: Monsieur Fewchuk.

M. Fewchuk (Selkirk - Red River): Quelqu'un a dit quelque chose ce matin au sujet de la réduction de la semaine de travail. Personne n'a parlé du nombre d'heures à laquelle la semaine de travail pourrait être ramenée ni de la possibilité qu'on soit prêt à accepter un salaire moindre. Pourriez-vous nous en dire un peu plus long là-dessus et nous éclairer un peu quant à votre raisonnement?

Le président: Je crois que le témoin en question est parti. Mais peut-être que M. Finlayson voudrait répondre à la question.

Comment vos membres réagissent-ils à la possibilité d'une semaine de travail plus courte? Seraient-ils prêts à payer le même salaire hebdomadaire, ou voudraient-ils que le salaire soit réduit? Sont-ils prêts à limiter les heures supplémentaires?

M. Finlayson: La plupart de nos membres sont déjà soumis aux normes relatives à l'emploi qui sont énoncées dans la législation provinciale en ce qui concerne les heures supplémentaires. Il existe donc déjà un mécanisme de règlement.

La plupart des gens que je connais voudraient bien travailler moins d'heures par semaine, mais j'en connais assez peu qui seraient prêts à accepter un salaire moindre. Je pense donc qu'il serait mal vu que le gouvernement intervienne pour leur abaisser d'une façon générale le nombre d'heures de travail hebdomadaire. Toute mesure que prendrait le gouvernement fédéral en ce sens ne s'appliquerait qu'aux industries qui relèvent de la compétence fédérale, qui ne représentent que 10 p. 100 de la main-d'oeuvre ici en Colombie-Britannique.

Les conventions collectives en Colombie-Britannique indiquent une certaine tendance à la réduction de la semaine de travail. Dans l'ensemble, cependant, le nombre d'heures de travail n'a pas augmenté de façon importante en raison de la récession. Il y a eu un léger gonflement à un moment donné, du fait que beaucoup d'entreprises avaient recours aux heures supplémentaires au lieu d'accroître leurs effectifs. Je crois toutefois qu'elles y auront de moins en moins recours au fur et à mesure que la reprise prend corps.

Bref, nos membres ne sont guère enthousiastes à l'idée que le gouvernement intervienne encore davantage pour réglementer la relation employeur-employé sur le plan des heures de travail.

Le président: Merci, monsieur Finlayson.

Nous sommes maintenant au moment de la récapitulation. Je sais que les participants ont quelques observations à ajouter. M. Rempel, vous voulez bien commencer?

M. Rempel: Quand il s'agit de réduire la dette, seuls ceux qui ont des épargnes, qui ont de l'argent, peuvent y contribuer. Ceux qui n'en n'ont pas ne pourront tout simplement pas le faire. Si nous pouvions en prendre un peu plus dans les poches de ceux qui ont de l'argent... Certes, l'histoire nous montre que les gouvernements savent en extraire toujours plus des pauvres. Les pyramides en sont un bon exemple. Cependant, dans le contexte économique moderne, il me semble que seuls ceux - qu'il s'agisse de fonds de retraite, comme l'a dit M. Walker - qui ont de l'argent sont en mesure de faire quelque chose à cet égard.

Le président: Merci, monsieur Rempel.

Monsieur Daykin.

M. Daykin: Deux choses sûrement. Tous les secteurs de la société devraient être prêts à faire leur part dans le prochain budget. C'est une proposition qui recueille l'assentiment général presque - même si bien souvent on l'accepte à contre coeur. Les aînés sont de ce nombre - et je vous parle aussi en tant qu'aîné.

J'ai une dernière chose à dire à ce sujet. Le couple qui est à la retraite et qui a un revenu de 30 000$ par an a les moyens de s'offrir tous les deux ou trois ans des vacances assez luxueuses à l'étranger. Pas besoin donc de vous tourmenter pour savoir jusqu'où vous pouvez abaisser le seuil à partir duquel les prestations devraient être récupérées par l'impôt, à condition qu'il ne soit pas de beaucoup inférieur à 30 000$.

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Je vous donne ici un autre chiffre qui saura sûrement vous intéresser. Le gouvernement social démocrate de la Colombie-Britannique, dans sa grande sagesse, vient de décider que le couple qui a un revenu de 19 000$ n'est pas pauvre. À partir de ce seuil de revenu, on n'a droit à aucune réduction des cotisations à l'assurance-maladie, qui, soit dit en passant s'élèvent à 800$ par an pour un couple. Ainsi, avec un revenu de 19 000$, on n'est plus pauvre.

Le président: Ils repoussent vraiment les limites de la pingrerie, ne trouvez-vous pas?

M. Daykin: Il en est de même depuis longtemps.

M. Facette: Au nom de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant vous ce matin.

Nous avons fait trois recommandations que le comité pourra peut-être inclure dans le rapport final qu'il fera au ministre. Tout d'abord, nous invitons le comité à reconnaître l'importance de l'infrastructure routière pour l'économie canadienne. Deuxièmement, la part de 4 p. 100 du revenu des taxes et accise qui est réservé à l'infrastructure routière est insuffisante. Troisièmement, le comité devrait recommander au gouvernement de songer sérieusement à élaborer une politique nationale sur l'infrastructure routière canadienne, dans laquelle on prévoirait des plans d'investissement à long terme.

Le président: Monsieur Finlayson.

M. Finlayson: Je tiens à remercier encore une fois le comité de m'avoir invité à témoigner et je remercie les membres du comité d'être venus d'Ottawa jusqu'à Vancouver pour entendre nos vues.

Nous avons deux observations à faire en guise de conclusion. D'abord - et je suis désolé que M. Dobin soit parti, puisque c'est en partie pour lui que je dis cela - , on a semblé laisser entendre ici aujourd'hui que les Canadiens à revenu élevé, quelle que soit la définition qu'on retienne, trouvent systématiquement le moyen d'éviter de payer leur juste part d'impôt sur le revenu. Ayant moi-même travaillé dans ce domaine et ayant examiné les statistiques de Revenu Canada, je puis vous donner l'assurance qu'il n'en n'est pas ainsi.

Nous pourrions débattre de la question de savoir s'ils devraient devoir payer davantage, mais le fait est qu'ils payent déjà beaucoup.

Je vous cite une statistique qui le montre bien. En 1992, les contribuables qui, d'après leurs déclarations d'impôt, comptaient parmi les 10 p. 100 de Canadiens ont le revenu le plus élevé ont payé 50 p. 100 de tous les impôts sur leur revenu perçus par tous les paliers de gouvernement, fédéral et provincial. Certains diront peut-être que la proportion devrait être encore plus grande, mais je soutiens pour ma part qu'elle représente déjà une part assez importante de leur revenu.

Dans le rapport que vous devez remettre au gouvernement à l'issue de vos délibérations, je vous encourage à commencer en examinant le bon travail - d'après moi - que vous avez fait l'an passé. En le lisant hier soir, il me semblait que l'analyse était encore valable. L'occasion que vous avez d'agir en accélérant la consolidation financière existe encore. Nous devons continuer à nous aventurer encore plus loin dans cette voie. Certains secteurs précis pour ce qui est d'agir sur les dépenses - la privatisation et la commercialisation - que vous avez identifiés dans votre rapport l'an passé sont, d'après moi, aussi valables.

Ne rejetez donc pas le travail que vous avez effectué l'année passée alors que vous tentez de rédiger ensemble un nouveau rapport à l'issue de ces consultations.

Le président: Monsieur Hansen, ou madame Wilkinson, ou les deux.

M. Hansen: Monsieur le président, merci de nous avoir donné l'occasion de comparaître. Nous allons vous soumettre un rapport écrit officiel d'ici deux semaines, j'imagine.

Nous avons entendu de nombreux commentaires autour de la table ce matin à propos de l'inflation et de la capacité de relancer l'économie en accroissant l'inflation. Nous ne sommes pas du tout d'accord avec cette notion.

Le président: Je suis tellement étonné.

M. Hansen: Nous représentons beaucoup de petites et moyennes entreprises. L'incertitude économique est l'ennemi de leur croissance. Nous croyons qu'un taux d'inflation faible est l'un des domaines qui doit former une base solide pour la certitude, pour l'investissement économique et la croissance.

Dans notre mémoire, nous allons nous concentrer à fixer des cibles réalisables pour résorber le déficit, et ensuite, à plus long terme, pour réduire la dette. Nous croyons que la réduction de la dette est l'élément clé si l'on veut que nos programmes sociaux continuent d'exister.

Enfin, nous allons faire des recommandations pour qu'on n'augmente pas les impôts, en n'oubliant pas que nous vivons dans une économie mondiale.

Enfin, nous émettons une réserve à propos des REER. On a songé, ces dernières années, à imposer les REER. Nous croyons que les REER forment l'un des derniers refuges pour les Canadiens, d'assurer leur bien-être au déclin de leur vie.

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Le président: Merci, monsieur Hansen.

Monsieur Richardson.

M. Richardson: Merci, monsieur le président. Au nom de l'Institut Fraser, j'aimerais vous remercier - vous et les députés - de cette occasion de vous présenter de la documentation concernant un programme visant à équilibrer le budget d'ici deux ans.

Mais auparavant, j'aimerais faire un seul commentaire. Sur les quatre documents publiés l'an dernier, l'une portait sur la situation financière. C'était une excellente analyse, l'une des meilleures que j'ai vue quant au rapport entre la dette, les impôts et le chômage. Je crois qu'il faudrait encore le souligner dans votre rapport de cette année. Dans ce but, on a besoin de voir le rapport entre la dette, les impôts élevés qui continuent d'augmenter, et le chômage élevé qui continue d'augmenter.

Nous vous recommandons de l'équilibrer d'ici deux ans, car il s'est passé quelque chose de fondamental le 30 octobre de cette année, avec le référendum au Québec. La situation a changé. Nous devons donner confiance aux Canadiens pour qu'ils sachent que nous avons la situation financière bien en main, que le déficit sera équilibré plus rapidement que le gouvernement ne le prévoit en ce moment, et qu'il existe une perception à long terme et une espérance que la dette sera éliminée.

Dans notre étude effectuée par l'Institut Fraser, nous vous recommandons de vous pencher sur certaines propositions fiscales précises, parce qu'on y propose des augmentations d'impôt, ainsi que des compressions supplémentaires de dépenses dans chaque ministère. Nous vous recommandons de l'examiner et, grâce à votre sagesse collective, de l'intégrer dans votre rapport.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Richardson.

Nous avons participé à un débat vigoureux dans certains domaines aujourd'hui, et je suis désolé de voir que la moitié de ces gens soient partis.

Personne n'a dit que nous n'avions pas à nous inquiéter à propos de la dette et du déficit. Certains d'entre vous qui sont encore ici nous ont fait part de cibles très précises. Ce que j'apprécie avant tout, monsieur Richardson, monsieur Finlayson et monsieur Hansen, c'est que vous nous avez donné des domaines précis à examiner. Vous n'avez pas agi comme tant de témoins qui ont comparu devant nous qui nous ont dit: «Il faut résorber le déficit et la dette mais nous n'allons pas vous dire comment le faire. À vous de décider.»

Oui, en fin de compte ce sera à nous de trancher, mais nous avons besoin de votre aide pour ce qui est des détails, parce que si on ne vous consulte pas et qu'on ne mobilise pas le soutien de chaque secteur, nous n'allons pas pouvoir le faire de façon constructive.

Jock, vous nous avez même donner des détails précis à savoir comment réduire les pensions et l'assurance-chômage, deux de nos dépenses les plus importantes.

M. Daykin a dit que nous ne devrions pas avoir peur de réduire les pensions, mais qu'il faut tout réduire. Ce serait une façon juste de procéder.

M. Facette a trouvé une manière d'entreprendre un programme limité d'infrastructures qui aura certainement des retombées positives pour ce qui est de notre infrastructure de transport.

Monsieur Remple, je suis content que vous soyez venu parler au nom des pauvres, parce que je ne crois qu'il y ait quiconque ici autour de cette table de quelque parti que ce soit qui croit que nous devrions atteindre nos buts sur le dos des pauvres.

J'aimerais parler d'un autre point qui a été soulevé aujourd'hui. Mme Gerson a parlé d'une taxe ayant trait à un transfert de richesses entre les générations. Ce serait une possibilité, pour ce qui est de créer plus d'équité entre les générations et d'obtenir une partie de ces fonds.

Enfin, monsieur Daykin, vous avez le soutien unanime de ce comité lorsque vous réclamez le transfert de la gestion de la pêche au saumon d'Ottawa à Victoria, dans la mesure où vous assumeriez la gestion, l'exploitation et le subventionnement de la pêche à la morue et au flétan noir sur la côte est.

Des voix: Oh, Oh!

Le président: J'aimerais vous remercier, tous, pour vos mémoires réfléchis et détaillées. Il nous fait toujours plaisir de venir à Vancouver.

La séance est levée.

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