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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 17 mai 1995

.1525

[Traduction]

Le président: Je déclare la séance ouverte. Le Comité permanent de la justice et des questions juridiques poursuit son examen du projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes.

Nous avons le plaisir cet après-midi d'accueillir deux groupes de témoins, soit l'Association du Barreau canadien et le Barreau du Québec, nos 65e et 66e témoins au sujet de ce projet de loi depuis le 24 avril de cette année.

L'Association du Barreau canadien est représentée par Thomas G. Heintzman, C.R., le président; Sheldon E. Pinx, C.R., vice-président, section nationale du droit criminel; et Joan Berkovitch, directeur principal, affaires juridiques et gouvernementales.

[Français]

Nous recevons, du Barreau du Québec, Me Claudette Picard, bâtonnière, Me Michel Marchand, membre du Comité en droit criminel, Me Patrick Healy, membre du Comité en droit criminel et Me Annie Chapados, secrétaire du Comité en droit criminel.

[Traduction]

La coutume veut que vous présentiez vos mémoires séparément. Nous allons commencer par l'Association du Barreau canadien et le Barreau du Québec suivra. Nous passerons ensuite aux questions, qui pourront être adressées à l'un ou l'autre des groupes de témoins, ou aux deux. Vous pouvez, si vous le souhaitez, développer les réponses de l'autre groupe.

.1530

[Français]

Mme Joan Bercovitch (directrice principale, Affaires juridiques et gouvernementales, Association du Barreau canadien): Je vais commencer, si vous me le permettez.

[Traduction]

Bonjour, mesdames et messieurs. Je remercie le comité au nom de l'Association du Barreau canadien de nous avoir invités à témoigner cet après-midi.

[Français]

L'Association du Barreau canadien est une organisation nationale qui regroupe plus de 34 000 avocats de partout au Canada.

[Traduction]

Le président: Je demanderais à nos bons amis des médias, du moins à ceux qui ont une caméra, de bien vouloir quitter la salle. Cette séance est télévisée sur la chaîne parlementaire; ils peuvent donc la capter dans leurs bureaux.

Mme Bercovitch: Un des principaux éléments du mandat de l'Association du Barreau canadien est l'amélioration du droit et de l'administration de la justice. C'est conformément à cet objectif que nous présentons cet exposé.

Notre mémoire vous sera présenté par M. Thomas Heintzman, C.R., de Toronto, président de l'Association du Barreau canadien et par M. Sheldon Pinx, C.R., de Winnipeg, avocat criminaliste de la défense et vice-président de la section nationale de la justice de notre association.

M. Thomas G. Heintzman (président, Association du Barreau canadien): Mesdames et messieurs, je vous remercie de nous avoir invités à vous faire part de nos remarques cet après-midi.

Nous avons déposé un mémoire que je n'ai pas l'intention de vous lire dans son intégralité. Je mettrai seulement en relief les éléments que nous voulons signaler au comité.

[Français]

Permettez-moi tout d'abord de féliciter le ministre de la Justice d'avoir présenté cet important projet de loi. L'ABC a examiné la portée juridique du contrôle des armes à feu et nous croyons qu'une telle mesure constitue un moyen légitime d'assurer la sécurité publique et de réduire au minimum l'usage des armes à feu à des fins criminelles.

[Traduction]

J'aimerais commencer par féliciter le ministre de la Justice d'avoir déposé cet important projet de loi.

L'ABC a examiné les conséquences juridiques du contrôle des armes à feu et estime que cette mesure est un moyen légitime d'assurer la sécurité du public et de réduire l'usage d'armes à feu à des fins criminelles.

Je souligne que l'Association du Barreau canadien préconise le contrôle des armes à feu depuis 20 ans. En 1972, nous avons réclamé des lois interdisant la possession d'armes à autorisation restreinte et non enregistrées y compris les armes de poing, et permettant l'émission d'ordonnances judiciaires interdisant à certaines catégories de personnes la possession d'armes à feu. Nous avons aussi exiger l'obtention préalable de certificats attestant la compétence des demandeurs en matière de maniement des armes à feu avant leur enregistrement.

[Français]

En 1990, une résolution de l'ABC exhortait le gouvernement fédéral à renforcer les dispositions existantes du Code criminel relatives au contrôle des armes à feu, et tout particulièrement à prohiber l'importation des armes automatiques et à mieux sensibiliser le public à la législation concernant l'acquisition, l'entreposage sécuritaire et le maniement des armes à feu.

Tout récemment, soit en 1993, notre association a demandé d'interdire toutes les armes de poing au Canada, à l'exception de celles utilisées par les policiers et les Forces armées.

Dans l'ensemble, l'ABC appuie le projet de loi sur le contrôle des armes à feu, mais notre mémoire propose un certain nombre de modifications au projet de loi C-68.

.1535

[Traduction]

Dans l'ensemble, l'Association du Barreau canadien appuie ce projet de loi. Notre mémoire comporte toutefois des suggestions d'amendements. Je vais commencer par des remarques sur six aspects précis contenus dans notre mémoire.

Premièrement, au sujet du système d'enregistrement, nous préconisons un texte réglementaire pour l'enregistrement des armes à feu. Nous sommes aussi d'accord avec l'adoption d'un système rentable d'enregistrement de toutes les armes à feu. Nous estimons que le système d'enregistrement axé sur la sécurité du public permettra d'assurer l'équilibre entre les mécanismes réglementaires et les possibilités de violation des droits civiques.

Deuxièmement, eu égard à la décriminalisation de l'enregistrement des armes à feu, nous croyons que l'enregistrement des armes à feu devrait figurer non pas au Code criminel, mais plutôt dans un texte réglementaire distinct.

Troisièmement, en ce qui concerne l'importation et le trafic, l'ABC approuve les restrictions imposées au transfert et à la vente des armes à feu dans les limites territoriales du pays dans le but de dissuader le trafic illégal d'armes à feu.

Quatrièmement, pour ce qui est d'interdire certains types d'armes, l'ABC appuie la prohibition des armes d'assaut militaires et de certaines armes de poing, des arbalètes et des fausses armes à feu, tel qu'on le prévoit au projet de loi C-68. Toutefois, conformément aux résolutions que nous avons adoptées, nous préconisons aussi que soit prohibée la possession, par des particuliers non autorisés, de toutes les armes à autorisation restreinte, y compris les armes de poing.

Cinquièmement, relativement à l'acquisition des munitions, l'ABC estime que le fait de lier l'achat de munitions à l'enregistrement ne poserait qu'un inconvénient infime aux propriétaires par rapport à l'avantage que serait une sécurité publique accrue.

Sixièmement, concernant la formation obligatoire, l'ABC approuve les progammes de formation obligatoire destinés aux propriétaires d'armes à feu en ce qui favorise le maniement et l'entreposage sécuritaire des armes à feu.

J'aimerais maintenant aborder un autre aspect du projet de loi, à savoir la question des droits individuels par rapport à la sécurité du public.

[Français]

En vertu de la Constitution du Canada, le port d'armes n'est pas un droit. L'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés garantit le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité, ce qui pourrait être invoqué pour contester les restrictions imposées en matière d'armes à feu pour se procurer des moyens de subsistance. L'article 7 serait cependant le fondement constitutionnel d'une réglementation des armes en ce qu'elles représentent un risque pour la vie et la sécurité d'autrui.

[Traduction]

La Constitution du Canada ne garantit pas le droit au port d'armes. L'article 7 de la Charte des droits et libertés garantit à chacun le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité, et on pourrait invoquer cet article pour contester les restrictions imposées en matière d'armes à feu, pour se procurer des moyens de subsistance, par exemple. Toutefois, l'article 7 serait également le fondement constitutionnel d'une réglementation des armes en ce qu'elles représentent un risque pour la vie et la sécurité d'autrui.

[Français]

L'Association du Barreau canadien, et j'insiste fortement là-dessus, s'engage à oeuvrer, de concert avec le Parlement, pour parvenir à un juste équilibre dans les objectifs tout aussi impératifs que sont la diminution de la violence dans notre société et le respect des libertés individuelles.

Thank you. Merci.

[Traduction]

Nous serons maintenant heureux de répondre à vos questions.

Le président: Merci.

[Français]

Je demande maintenant à Me Picard de bien vouloir présenter le mémoire du Barreau du Québec. Madame Picard.

Me Claudette Picard (bâtonnière, Barreau du Québec): Merci, monsieur le président.

Le Barreau du Québec est un ordre professionnel qui regroupe les quelque 16 200 avocats et avocates du Québec. En fait, nul ne peut, au Québec, exercer la profession d'avocat sans être inscrit au Tableau de l'Ordre.

Notre mission, qui nous vient du Code des professions, est la protection du public. Dans cette optique, le Barreau du Québec, par le biais de son Service de législation, fait l'analyse des projets de loi, tant au provincial qu'au fédéral.

Nous vous remercions, monsieur le président, de nous permettre de faire connaître notre point de vue et nous entendons venir, aussi rapidement qu'on nous le demandera, pour faire connaître notre point de vue sur les différents projets de loi fédéraux.

.1540

Le président: Nous avons votre mémoire et tous les députés l'ont aussi.

Me Picard: Je vous remercie de faire distribuer aux députés le guide explicatif sur le Barreau du Québec et notre rapport annuel.

Premièrement, j'aimerais indiquer un petit amendement à notre mémoire, à la page 2. Il y a une coquille au deuxième paragaphe, et nos commentaires quant à l'article 106 du Code criminel doivent être retranchés de notre mémoire, à la page 12 en français.

Le 14 février dernier, après avoir annoncé la mise sur pied d'un programme national d'enregistrement des armes à feu, le ministre de la Justice, M. Allan Rock, déposait le projet de loi C-68. Ce projet a été analysé par le Comité permanent en droit criminel du Barreau du Québec et ses recommandations furent entérinées par le Comité administratif du Barreau du Québec.

Permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent: Me Patrick Healy, professeur à l'Université McGill, Me Michel Marchand, criminaliste et membre de notre Comité, et Me Annie Chapados du Service de recherche du Barreau du Québec.

Le projet de loi a suscité de nombreux débats et de vives controverses au cours des derniers mois. Le Barreau du Québec consacrera la première partie de son intervention à l'objet même du projet de loi et la deuxième partie de son intervention à certaines bonifications ou ajouts qui pourraient être faits au projet de loi.

Je tiens à préciser que le Barreau du Québec s'est prononcé en faveur d'un contrôle accru et plus rigoureux des armes, quelle qu'elles soient. L'idée d'un système informatisé d'enregistrement des armes en circulation au pays nous apparaît donc tout à fait justifiée; justifiée non seulement en regard des objectifs que s'est fixés le gouvernement d'assurer un meilleur contrôle des frontières et de favoriser autant que faire se peut l'endiguement de la criminalité comportant l'utilisation d'une arme à feu, mais également en celui de son devoir d'assurer aux citoyens canadiens ordre, paix et bon gouvernement.

En effet, un tel système permettrait, notamment par l'identification des propriétaires d'armes, une surveillance plus adéquate des importations et exportations en cette matière, de même que de l'utilisation qui est faite de ces armes tout en facilitant la détermination de leur provenance lors de saisies policières.

Le projet de loi nous semble favoriser l'atteinte d'un juste équilibre entre les droits individuels et la protection de la société. Il n'est pas ici de mon intention de reprendre une argumentation exhaustive fondée sur les dispositions pertinentes de la Charte canadienne des droits et libertés. Il suffit simplement de mentionner que sous réserve de nos commentaires en ce qui a trait aux peines, le projet de loi C-68 devrait, selon le Barreau du Québec, être jugé constitutionnel par nos tribunaux.

Quant à nos réserves, elles sont de trois ordres: celles d'ordre général, celles portant sur certaines dispositions et celles d'ordre spécifique.

D'un point de vue général, nous constatons la grande complexité qui prévaudra dorénavant, complexité à laquelle se buteront les propriétaires d'armes et les avocats appelés à assurer la défense de ceux qui commettront une infraction.

Sans remettre aucunement en cause le bien-fondé des mécanismes qu'entend mettre en place le ministre, nous affirmons que ces mécanismes devront nécesssairement faire l'objet, non seulement d'une large publicité, mais également d'une certaine vulgarisation auprès des justiciables.

Quant aux infractions, nous devons être conscients que la répartition des dispositions créatrices d'infractions entre la nouvelle Loi sur les armes à feu et le Code criminel compliquera sensiblement la défense des accusés, puisque le Code criminel ne pourra plus, en cette matière, être appliqué et administré distinctement de cette autre loi.

Le paragraphe 85(2) fait de l'utilisation d'une fausse arme à feu, lors de la commission d'un acte criminel, une infraction punissable d'une peine d'emprisonnement minimum d'un an. Bien que nous soyons conscients que l'impact psychologique est le même chez la victime, qu'il s'agisse d'une arme vraie ou fausse, et bien que nous convenions que l'utilisation d'une vraie arme non chargée n'est pas plus dangereuse que celle d'une fausse arme, nous ne pouvons agréer au fait que l'une et l'autre infraction soient punies de la même façon.

.1545

Reprenant en quelque sorte le même type de considérations que celles présentées lors de l'analyse du Barreau du Québec du projet de loi C-7, le Barreau du Québec recommande qu'une distinction soit effectuée entre l'usage d'une vraie arme et l'usage d'une fausse arme.

Les réserves les plus importantes que nous tenons à exprimer aujourd'hui concernent le droit de visite et les peines. Le projet de loi prévoit un droit de visite avec mandat dans une maison privée lorsque le policier veut vérifier si une personne respecte la loi et les règlements. Le Barreau du Québec croit qu'il est essentiel que le mandat puisse être obtenu seulement si le policier a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise. Ce droit de visite dans des maisons privées doit absolument être encadré.

Quant aux peines, à diverses occasions déjà, les membres de notre Comité ont eu la possibilité de préciser leur opposition à l'endroit des peines minimales. En fait, le problème réside principalement dans le fait qu'elles empêchent toute particularisation des dossiers, c'est-à-dire la prise en compte des circonstances propres à l'affaire.

Les procureurs doivent conséquemment se faire beaucoup plus prudents dans le dépôt d'accusations. Dans ce contexte, les peines minimales créent également une certaine iniquité dans la position de négociation des parties et peuvent, dans certains dossiers, devenir un argument de taille vis-à-vis de l'accusé pour le convaincre de procéder au dépôt d'un plaidoyer de culpabilité à une accusation réduite plutôt que de risquer la peine minimale prévue pour la véritable infraction.

Bien qu'elles constituent une mesure plus répressive, elles peuvent du même coup inviter au dépôt d'une accusation moins grave pour laquelle la peine serait moindre, par exemple une accusation d'utilisation d'une arme lors de la commission d'un acte criminel pour laquelle la peine minimale est d'un an, plutôt qu'une accusation plus grave comme celle d'une agression sexuelle armée à l'égard de laquelle la peine minimale est de quatre ans.

De plus, l'insertion d'une panoplie de peines minimales démontre un manque de confiance dans le système judiciaire. Si un juge de première instance impose une peine trop légère, la Cour d'appel est toujours là pour rectifier le tir.

Nous désirons également attirer votre attention sur certaines peines qui, de par leur caractère excessif, peuvent être jugées inconstitutionnelles. Je retiens deux des dispositions de ce chapitre qui sont identifiées dans notre mémoire.

Tout d'abord, il y a l'alinéa 102(2)b) du Code criminel introduit par l'article 133, interdisant, en cas de condamnation ou d'absolution pour une première infraction, la possession d'une arme à perpétuité. Les ordonnances à perpétuité ayant déjà fait l'objet d'une vive critique de notre Cour suprême, cette disposition fera, sans l'ombre d'un doute, l'objet d'une contestation sur le plan constitutionnel.

Nous croyons que certaines de ces peines sont carrément excessives, et le Barreau du Québec recommande conséquemment une réduction, dans ce cas-ci, du temps d'interdiction.

Le paragraphe 117.01(2) du Code criminel traite de l'omission de remettre certains documents à un agent de la paix ou à un préposé aux armes à feu. La peine d'emprisonnement prévue en ces circonstances est de dix ans. De toute évidence, c'est excessif pour nous, car il ne s'agit ici que d'une infraction de nature plutôt administrative.

En conclusion, le Barreau du Québec est favorable à l'objectif que s'est fixé le ministre, à savoir un contrôle plus rigoureux des armes. Le Barreau du Québec appuie cette initiative, mais conserve à l'esprit qu'une trop grande répressivité ne sert pas nécessairement les fins de la justice. Le Barreau du Québec recommande donc que, tout en adoptant le projet de loi C-68, le gouvernement modifie préalablement certaines dispositions conformément aux commentaires quant aux peines minimales, quant aux peines excessives et quant au droit de visite, tout en respectant une juste proportionnalité pour toutes ces questions.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

.1550

Le président: Merci, madame Picard.

[Traduction]

Nous passerons maintenant aux questions. Selon les règles du Comité, nous commençons par trois tours de dix minutes chacun, un pour chaque parti politique. Ensuite, nous passons à des tours de cinq minutes où nous alternons entre les députés du parti au pouvoir et les députés des partis de l'opposition.

Les députés peuvent poser leurs questions à un membre du panel, soit à l'Association du Barreau canadien ou au Barreau du Québec, ou aux deux groupes. S'il nous reste du temps, évidemment, les autres peuvent ajouter leurs commentaires s'ils pensent pouvoir préciser ou ajouter un bref commentaire à la discussion pour aider le Comité.

[Français]

Mme Venne (Saint-Hubert): Mesdames et messieurs, bonjour. Tout d'abord, j'aimerais parler aux représentants du Barreau du Québec d'une erreur à la page 13, où vous mentionnez que l'interdiction à perpétuité toucherait toutes les armes à feu. Il faut quand même faire la distinction entre les armes à autorisation restreinte et les armes ordinaires. Vous aviez peut-être vu cette erreur, mais il faudrait corriger votre mémoire en conséquence.

J'aimerais maintenant vous poser des questions. Dans votre mémoire, vous soulignez l'inconstitutionnalité de certaines dispositions comme l'alinéa 111(1)b) au sujet des rapports. Pouvez-vous nous donner votre opinion sur les pouvoirs d'inspection des policiers? Vous n'en parlez pas dans votre mémoire. Pensez-vous qu'il est possible que ces pouvoirs puissent violer les dispositions de la Charte qui protègent contre les perquisitions abusives? Voilà ma première question. L'autre s'adressera à l'autre groupe.

Me Michel Marchand (membre, Comité en droit criminel, Barreau du Québec): Premièrement, en ce qui concerne le pouvoir d'inspection en cas de visite, il est exact que cela ne se retrouve pas dans le mémoire, mais cela nous a paru très important. Il y avait eu des discussions au préalable là-dessus, mais il n'y avait pas nécessairement un consensus. Il y a maintenant consensus sur cette question.

Il y a déjà des pouvoirs de perquisition lorsque des infractions à la loi sont commises, pouvoirs qui sont prévus aux articles 117.02 et suivants. Ces pouvoirs prévoient déjà le cas de perquisition lorsqu'il y a des infractions de commises ou lorsqu'on pense qu'il y a des infractions de commises, et couvrent beaucoup de cas qui sont actuellement couverts par le Code criminel. C'est peut-être même un peu plus large. Par contre, dans le cas des visites, c'est vraiment nouveau lorsqu'on parle de visiter les maisons d'habitation.

Il faut voir, et je pense que tous ici en sont conscients, que les nouvelles dispositions permettront aux policiers et aux forces de l'ordre d'entrer dans beaucoup de domiciles de Canadiens puisque les gens vont devoir enregistrer leurs armes. On dit qu'il y a plus de 6 millions d'armes en possession de Canadiens. Donc, il y a un potentiel très grand d'entrée dans les maisons des gens. Compte tenu de ce fait et compte tenu des articles 98 et suivants qui permettent d'entrer pour vérifier si on se conforme à la loi, nous pensons que cela pourrait être jugé contraire à l'article 8 de la Charte, spécifiquement dans le cas des domiciles. On fait une distinction entre les domiciles et les entreprises. On ne fait pas le même genre de remarque pour les entreprises. En ce qui concerne les maisons d'habitation, on voit là des pouvoirs exorbitants. Par conséquent, on recommande qu'on ne puisse pénétrer dans les maisons d'habitation que si on a des motifs raisonnables et probables de croire qu'une infraction à la loi a été commise et que si la preuve pourrait être apportée à cet égard.

Aux articles 98 et suivants, il y a des pouvoirs très larges en ce qui a trait à l'utilisation des systèmes informatiques se trouvant sur place. Est-ce que ce sera conditionné par le début de l'article qui dit que cela a pour but de faire respecter cette loi?

Est-ce que ça va permettre aux forces de l'ordre de vérifier le système informatique des maisons privées? On sait qu'il y a maintenant beaucoup de citoyens qui ont un système informatique chez eux, qui ont des banques de données. Est-ce que ça va permettre de vérifier cela également? C'est un réel problème.

.1555

Également, il y a le fait qu'on va pouvoir rechercher des éléments de preuve pour d'autres choses. Je regarde 99(1)b), par exemple:

b) examiner les armes à feu ou tout objet qu'il y trouve et en prendre des échantillons; On connaît la doctrine du plain view. Je pense que c'est codifié là. Sous prétexte d'entrer pour une visite administrative, on va pouvoir faire des vérifications beaucoup plus larges.

C'est pour toutes ces raisons qu'on pense que ça pourrait être jugé contraire à l'article 8. Et même s'il n'y avait pas contravention à l'article 8, le Comité devrait se pencher sur ce problème-là et faire des recommandations afin que ce pouvoir d'inspection ne couvre pas les maisons privées parce qu'il est vraiment trop large.

Mme Venne: D'accord. Est-ce que l'Association du Barreau canadien aurait des commentaires à apporter sur les mêmes articles?

[Traduction]

M. Heintzman: Je vais demander à M. Pinx de vous en dire davantage, mais nous en parlons déjà à la page 9 de notre mémoire. Notre position, c'est que les pouvoirs de visite doivent être réexaminés et être retirés du projet de loi.

Il s'agit d'un projet de loi de nature criminelle. S'il s'agit d'une loi criminelle, les pouvoirs normaux de saisie et perquisition doivent suffire, conformément aux droits criminels. Les agents de police ne doivent pas pouvoir entrer dans des maisons, des logements ou des commerces autrement qu'en vertu des dispositions normales de saisie et perquisition prévues dans le Code criminel.

Monsieur Pinx, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Sheldon Pinx (vice-président, section nationale de la justice criminelle, Association du Barreau canadien): Au nom de notre association, nous avons exprimé nos craintes au sujet du fait que la loi permet une saisie, tant dans les locaux d'habitation qu'ailleurs, simplement à partir du critère préliminaire du motif raisonnable de croire qu'une arme à feu est sur les lieux. Notre préoccupation, en termes simples, c'est que même si dans le projet de loi, on parle de visite, dans les faits, il s'agira d'une perquisition et d'une saisie possible.

S'il s'agit d'une saisie et perquisition, il faut s'arrêter un moment et se poser cette question: Convient-il d'avoir une disposition qui permette une telle perquisition simplement parce qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'une personne a une arme à feu? S'il n'est pas allégué que la personne est illégalement en possession de cette arme à feu, il faut conclure que la personne est la propriétaire légitime de l'arme à feu.

Par conséquent, on va permettre d'entrer dans des domiciles et ailleurs, chez des citoyens canadiens, non parce qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'un crime y a été commis, mais simplement parce qu'une arme y est et s'il faut déterminer si elle est entreposée de manière sûre, si elle est dûment enregistrée et si son propriétaire est titulaire de permis.

De l'avis de l'Association du Barreau, s'il y a des saisies et perquisitions pour cette raison, il s'agit en fait d'enquêtes criminelles. Si c'est une enquête criminelle, il faut revenir à l'article 487 du Code criminel, qui permet les perquisitions dans le cadre d'enquêtes criminelles, à condition de trouver un juge de paix qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'un crime a été commis, dont les preuves seront trouvées pendant la perquisition.

Ce critère préliminaire est destiné à assurer la protection des droits des citoyens canadiens. Ce n'est ni plus ni moins; la protection de la vie privée dans nos foyers et ailleurs est à notre avis prioritaire.

[Français]

Mme Venne: J'aurais une question à poser au Barreau du Québec. Le Bloc québécois a déposé ce matin des projets d'amendements et, parmi ceux-là, il y en a un dans lequel l'on recommande qu'à l'alinéa 111(1)b) proposé, on retranche le mot «rapports», de sorte qu'on se limitera à la notion de la preuve seulement. J'aimerais savoir si, selon vous, on éviterait ainsi une contestation constitutionnelle.

.1600

Me Marchand: Personnellement, je pense que c'est un pas dans la bonne direction que d'enlever les rapports.

Par contre, il nous semble que la loi ne devrait pas contenir cet alinéa qui stipule: «habite ou a des rapports». «A des rapports», c'est très large. J'abonde dans votre sens et je retrancherais ces mots-là. Je pense qu'on devrait également retrancher le mot «habite» parce que ça peut couvrir une panoplie de situations.

Je pense, par exemple, au jeune homme de 18 ans qui est l'objet d'une interdiction. Son père pourrait certainement avoir des problèmes avec cette disposition si le jeune homme habite encore à la maison. Son père qui va à la chasse d'une manière légitime et qui entrepose ses armes à feu d'une manière conforme à la loi pourrait certainement avoir des problèmes avec ça. Je pense que prévoir «habite ou a des rapports» cause un problème, mais c'est un pas dans la bonne direction que d'enlever «a des rapports. C'est moins large, mais ça couvre quand même beaucoup de personnes.

Mme Venne: Merci beaucoup. Ma question suivante s'adresse à l'Association du Barreau canadien. À la page 19, dans votre première recommandation, vous recommandez «que le projet de loi C-68 soit modifié de façon à prévoir l'émission d'ordonnances d'interdiction temporaires pour la possession d'armes à feu lorsque des accusations ont été déposées dans des situations impliquant de la violence familiale.» On ne parle que d'accusations. C'est avant même d'être trouvé coupable. J'aimerais que vous nous expliquiez cette recommandation.

[Traduction]

M. Heintzman: Encore une fois, je vais demander à M. Pinx de vous répondre puisqu'il a de l'expérience avec ce genre d'ordonnances.

M. Pinx: Essentiellement, cette recommandation a pour objectif de signaler à l'attention du comité la préoccupation de notre association au sujet de la violence familiale, particulièrement lorsqu'une arme ou une arme à feu a été impliquée, lorsque des allégations sont faites.

Toutefois, l'amendement que vous proposez à l'article 111 peut très bien répondre aux préoccupations soulevées. Cet article permet à un agent de la paix de demander à un juge de la Cour provinciale de rendre une ordonnance interdisant à une personne d'avoir en sa possession une arme à feu parce qu'il ne serait pas souhaitable pour la sécurité de qui que ce soit que celle-ci soit autorisée à l'avoir en sa possession.

Ainsi, dans les cas de violence familiale, il existerait déjà, en vertu de l'article 111, un moyen de faire une demande d'interdiction de possession d'armes à feu par l'accusé - avant même qu'il soit condamné - , pendant sa mise en liberté provisoire par voie judiciaire.

Je signale à votre attention, si cela peut vous aider, que d'après mon expérience au Manitoba, c'est une procédure courante dans cette province. Il existe déjà dans le cas de criminels des dispositions comparables, parallèles à l'article 111 du projet de loi, qui permettent ce genre de demande. Nous voulions donc simplement signaler à l'attention du comité l'importance qu'a pour notre association la question de la violence familiale.

M. Ramsay (Crowfoot): Je tiens à remercier les témoins. J'apprécie les mémoires présentés, particulièrement lorsque vous parlez des dispositions du projet de lois qui pourraient faire l'objet d'une contestation en vertu de la Charte ou de la Constitution. Je pense qu'il est très important pour nous de recevoir des avis à ce sujet.

Passons à un autre sujet. L'Association du Barreau canadien prétend que le projet de loi C-68 est un projet de loi sur le contrôle des armes à feu.

Or, au sujet des carabines et des fusils de chasse, ce projet de loi n'est pas destiné à les contrôler mais à les enregistrer. Nous n'avons reçu aucune preuve scientifique, seulement des spéculations, qui nous permettraient de croire que l'enregistrement des carabines et des fusils de chasse inciterait leurs propriétaires à les verrouiller. La Loi sur l'entreposage sécuritaire existe déjà. Les propriétaires doivent entreposer leurs armes à feu de manière sûre. On nous a dit que l'enregistrement de ces armes à feu encouragerait les propriétaires à les verrouiller, sans que rien, pourtant, nous prouve que cette conclusion est fondée.

.1605

On a entendu d'autres spéculations selon lesquelles le verrouillage d'une arme à feu contribuerait à prévenir des cas de fusillade familiale, de même que des suicides. Encore une fois, je n'ai entendu aucune preuve empirique qui corrobore cette affirmation. Est-ce que parmi les témoins, quelqu'un peut nous donner une preuve empirique qui donnerait quelque fondement à ces spéculations?

M. Heintzman: Monsieur Ramsay, nous ne pouvons traiter de cette question qu'à titre d'avocats. Je suis persuadé que vous avez toutes sortes de preuves statistiques fournies notamment par la coalition. Vous pouvez mieux que moi en tirer des conclusions.

En tant qu'avocats, nous avons considéré les aspects législatifs de ce projet. Nous avons essayé de vous dire si le système d'enregistrement établissait un équilibre raisonnable entre la sûreté du public et les droits civils. C'est cette réponse que nous nous sommes efforcés de vous donner.

Un système d'enregistrement crée deux choses. Tout d'abord, il crée une responsabilité. C'est pourquoi nous immatriculons les voitures et nous délivrons des permis de construction. Il y a donc une responsabilité avant l'acte et la capacité d'agir par la suite.

C'est à vous de prendre une décision politique mais nous sommes ici, en tant qu'avocats, pour vous dire qu'à notre avis, le système d'enregistrement règle la question de la responsabilité parce qu'il permet d'agir de manière raisonnable après le fait.

Je ne pense pas que vous puissiez fournir des statistiques prouvant que les permis de construction ont augmenté ou diminué la sécurité dans les maisons ou réduit le nombre d'accidents. Vous pourriez certainement présenter des arguments convaincants, mais je ne pense pas que vous puissiez le prouver au moyen d'une analyse statistique.

Nous disons qu'à nos yeux, ce projet de loi parvient à équilibrer ces deux intérêts.

M. Ramsay: Ne convenez-vous pas que lorsqu'on dit que l'enregistrement des carabines et des fusils de chasse améliorera l'entreposage des armes à feu et, deuxièmement, réduira leur utilisation à des fins criminelles, ces conclusions sont fondées uniquement sur des spéculations et non sur des faits?

M. Heintzman: Je suis avocat et je ne peux pas me hasarder à dire s'il s'agit ou non de spéculation. C'est à vous de le déterminer. Nous disons que si vous voulez créer un sens de la responsabilité dans la société et que vous voulez créer un moyen de retracer quelque chose lorsqu'un acte est commis, l'enregistrement est une solution raisonnable. Nous avons examiné des systèmes partout dans le monde, des systèmes qui ne se rapportent pas uniquement aux armes à feu. C'est une façon raisonnable d'atteindre ces deux objectifs.

M. Ramsay: Je comprends ce que vous dites. Mais si une arme et ses munitions sont verrouillées comme il se doit et que quelqu'un utilise cette arme à feu de manière illicite, cela signifie que cette personne a perdu son sens des responsabilités. Je demande s'il y a un lien entre l'enregistrement des carabines et des fusils de chasse et la réduction ou l'augmentation de ce sens des responsabilités. Autrement dit, comment pourrons-nous protéger la société contre une mauvaise utilisation des armes à feu lorsque le coupable perd tout sens des responsabilités?

M. Heintzman: Je pense que c'est impossible. C'est une des raisons d'être du système d'enregistrement: augmenter ou imposer le sens des responsabilités si vous estimez que le niveau actuel est insuffisant.

.1610

M. Ramsay: Par conséquent, on pourrait conclure que l'enregistrement des carabines et des fusils ne nous permettra pas de mieux protéger la société contre celui qui devient irresponsable dans un accès de colère ou un moment de dépression et qui s'attaque à lui-même ou à autrui avec une arme à feu.

M. Heintzman: Je crois avoir répondu à la question en disant qu'on prévoit une norme de responsabilité. Ceux qui commettent des actes criminels dans notre société s'écartent de cette norme.

M. Ramsay: J'aimerais maintenant aborder un autre sujet.

[Français]

Me Picard: Je voudrais répondre à la question que M. Ramsay a posée aux deux organisations.

Il se pourrait que la preuve empirique de ce que vous demandez provienne de l'enregistrement des armes à feu. Nous croyons que l'enregistrement des armes à feu va permettre une surveillance plus adéquate des importations et exportations en cette matière, tout en facilitant la détermination de la provenance des armes à feu lors de saisies policières. Dans ce sens, il est important d'avoir un système d'enregistrement.

[Traduction]

M. Ramsay: Je vous fais la suggestion suivante. Puisque nous ne pouvons pas garantir que les propriétaires d'armes à feu ne deviendront pas irresponsables, la seule façon de protéger la société contre l'usage d'armes à feu à mauvais escient, c'est de ne permettre aucune arme à feu en leur présence.

Monsieur Heintzman, si je ne m'abuse, vous préconisez l'interdiction de toutes les armes de poing.

M. Heintzman: C'est ce que dit notre résolution de 1993. Je crois qu'on y dit aussi: «Sauf pour les agens de la paix, la police et les clubs de tir», mais c'est en effet, en substance, ce que dit la résolution.

M. Ramsay: Est-ce une mofication à ce qu'on dit ici?

M. Heintzman: Non. Je dis simplement que vous avez raison. La résolution réclame l'interdiction de toutes les armes de poing.

M. Ramsay: Et vous réitérez cette demande aujourd'hui?

M. Heintzman: Oui. C'est ce que dit la résolution.

M. Ramsay: Je présume que vous en acceptez les conséquences, à savoir la prohibition du tir de compétition avec armes de poing, y compris pour nos équipes de la coupe du monde.

M. Heintzman: Il y aurait peut-être des motifs raisonnables de prévoir une dispense...

Le président: Excusez-moi, mais ce n'est pas dans le projet de loi. C'est peut-être la position de l'Association du Barreau canadien, mais cette question ne nous intéresse pas aujourd'hui parce qu'elle ne figure pas au projet de loi.

M. Ramsay: Monsieur le président, je ne suis pas certain que votre intervention soit appropriée.

Le président: Je tente simplement de m'assurer que notre discussion ne s'écarte pas du projet de loi. La proposition du Barreau concernant la prohibition de toutes les armes de poing est peut-être intéressante, mais elle ne figure pas dans le projet de loi. Toute question portant sur une proposition ne figurant au projet de loi n'est pas pertinente.

M. Ramsay: Je crois que si.

Le président: Vous avez déjà posé votre question et M. Heintzman y a répondu. Mais je juge que ce n'est pas pertinent. Si vous tenez à poursuivre sur ce sujet, je devrais vous rappeler à l'ordre. Il vous reste deux minutes.

M. Ramsay: Je passe à une autre question.

Avez-vous examiné le paragraphe 117.15(2) du projet du projet de loi C-68?

M. Heintzman: J'ai lu le projet de loi en entier.

M. Ramsay: D'après l'interprétation juridique qui en a été faite, et la mienne, cette disposition confère au Gouverneur en Conseil le pouvoir d'interdire toute arme à feu. Qu'en pensez-vous?

.1615

M. Heintzman: Le gouverneur en conseil peut adopter des dispositions interdisant certaines armes; il doit alors les déposer au Parlement comme le stipule la loi.

M. Ramsay: Mais ce que je vous demande, c'est si, d'après vous, ce paragraphe confère au gouverneur en conseil le pouvoir d'interdire n'importe quelle arme à feu et exige, bien sûr, que ce décret ou ce règlement soit déposé à la Chambre comme le prévoit la loi?

M. Pinx: Si je peux me permettre de répondre, d'après notre interprétation, le gouverneur en conseil pourrait présenter un règlement en ce sens, mais il ne peut, seul, l'adopter. Si je ne m'abuse, votre comité en serait d'abord saisi.

M. Ramsay: Peut-être, mais, moi, je ne crois pas que le Parlement ait de pouvoir à cet égard. Nous pourrions nous pencher plus attentivement sur cette disposition, si vous le souhaitez, mais il me semble que notre comité ne serait pas nécessairement saisi de ce règlement. Si nous sommes en voyage, ce sera le cas à l'automne, lorsque nous étudierons la Loi sur les jeunes contrevenants, et qu'un règlement est déposé à la Chambre aux termes de ce paragraphe en notre absence, notre comité n'en sera pas saisi. Il suffit que la Chambre soit saisie de ce règlement pendant 30 jours francs pour qu'il ait force de loi. Mais là n'est pas la question. Je vous demande si vous interprétez cet article comme moi, si vous estimez aussi qu'il confère au gouverneur en conseil le pouvoir d'interdire n'importe quelle arme à feu?

M. Heintzman: Tout ce que je peux ajouter, monsieur Ramsay, c'est que nous n'abordons pas cet article en particulier dans notre mémoire.

M. Ramsay: C'est dommage.

M. Heintzman: Nous ne nous sommes pas penchés dessus. Je ne me suis pas préparé à répondre à des questions à ce sujet.

M. Ramsay: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Votre intervention doit se rapporter à cet article, lequel traite de l'interdiction des armes à feu. Alors, sauf le respect que je vous dois, j'estime que votre intervention était irrecevable.

Le président: Je vois.

Permettez-moi alors de vous demander - j'allais le faire un peu plus tard au cours de la réunion - d'examiner l'article 117.15 du projet de loi, à la page 98, auquel M. Ramsay vient de faire allusion. Le paragraphe 117.15(2) est ainsi libellé:

Le gouverneur en conseil ne peut désigner par règlement comme arme à feu prohibée... toute chose, qui, à son avis, peut raisonnablement être utilisée au Canada pour la chasse ou le sport.

Autrement dit, aux termes du paragraphe 117.15(2) de ce projet de loi, le gouverneur en conseil pourrait-il prohiber toutes les armes à feu, y compris les fusils et les carabines? Je ne vous demande pas de répondre tout de suite; vous voudrez peut-être y réfléchir pendant l'après-midi et me donner une réponse à la fin de la séance.

M. Wappel (Scarborough-Ouest): Comme toujours, on se prépare à répondre à certaines questions mais ce sont des questions tout à fait différentes qui sont posées.

J'aimerais apporter une précision, si je peux me le permettre. Monsieur Mosley, qui est, je crois, le sous-ministre adjoint, nous a clairement dit, lorsqu'il est venu témoigner, que le paragraphe 117.15(2) proposé peut servir et sert à l'interdiction d'armes à feu précises. La question de savoir si cela permet au gouverneur en conseil d'interdire toutes les armes à feu au Canada est une question juridique intéressante.

À titre d'information, j'ajouterai que le paragraphe 112(6) de la Loi sur les armes à feu proposé stipule clairement que les règlements adoptés en vertu de l'article 117.15 n'ont pas à être examinés au Parlement. C'est un détail technique assez intéressant que je vous signale, à titre d'information.

Mes deux premières questions s'adressent au Barreau du Québec. Je remercie le Barreau d'avoir été, comme toujours, bref et d'avoir attiré notre attention sur les problèmes que semble présenter la version française. Ça nous est très utile.

J'ai des questions à vous poser au sujet de deux remarques que vous avez faites concernant les répliques d'armes à feu. Aux pages 6 et 7 de la version française, vous dites que la logique même veut que l'utilisation d'une fausse arme soit moins «blâmable» que celle d'une vraie arme puisque, à tout le moins, le délinquant n'a pas l'intention de blesser vraiment. Je présume que vous voulez dire ici que le délinquant n'a pas l'intention d'infliger des blessures physiques. Il est certain que la victime pourrait souffrir immédiatement des dommages psychologiques car elle ne pourrait pas distinguer entre les répliques d'armes à feu et les vraies armes à feu. Seriez-vous d'accord avec moi sur ce point?

.1620

Me Picard: Oui.

M. Wappel: Votre argument se limite donc aux dommages corporels n'est-pas?

Me Picard: C'est exact.

M. Wappel: Vous dites à la page suivante qu'on ne distingue pas entre l'utilisation d'une vraie arme à feu et d'une fausse arme, et les criminels pourraient donc avoir recours à de vraies armes à feu. Sauf votre respect, je pense qu'il y a une différence parce que dans un cas on impose une peine minimale.

Par exemple, si l'on utilise une fausse arme, on risque d'être condamné à une peine d'une année, mais s'il s'agit d'une vraie arme, le tribunal pourrait imposer une peine plus longue que la peine minimale d'une année. C'est ainsi que les juges feraient une distinction entre les deux. Est-ce que cela vous semble une possibilité raisonnable?

[Français]

Me Picard: Vous devez rattacher cette partie de notre mémoire à la question des peines minimales. Comme nous ne sommes pas d'accord sur des peines minimales, cela se rattache à cette intervention. Le mémoire est un tout et notre commentaire se rattache à nos commentaires sur les peines minimales.

Me Marchand: C'est exactement cela. C'est pour cette raison d'ailleurs qu'on dit, dans notre mémoire, qu'on est d'accord sur la création d'une infraction de commettre un acte criminel avec une fausse arme. Comme vient de le dire la bâtonnière, on en a contre la peine minimale. Si on prévoit une peine minimale d'un an... Il est clair qu'il n'y a pas de différence pour la victime, sauf qu'il est sûr qu'elle ne sera pas blessée. Comme vous l'avez mentionné, la personne peut avoir des blessures morales. Cependant, au niveau de la turpitude morale de l'individu qui a commis le crime, c'est une chose bien différente. Nous sommes contre le fait qu'il y ait une peine minimale afin que le juge, qui est nommé pour cela, décide de la sentence. S'il décide que cela vaut deux ans, il donnera deux ans, et s'il décide que cela vaut un an, il le donnera. Le problème de cette loi, ce sont les peines minimales. C'est une illustration.

[Traduction]

M. Wappel: Je comprends cet aspect des deux mémoires.

À titre d'éclaircissement, j'ai une question au sujet de l'article 109(2)b) du Code criminel qui se trouve à la page 80 du projet de loi. J'ai de la difficulté à comprendre exactement ce que vous dites à cet égard à la page 13 de votre mémoire.

Vous semblez dire qu'à la première condamnation on perdrait pour toujours le droit de posséder une arme à feu. Après avoir lu attentivement votre mémoire, je vois que vous dites qu'en cas de condamnation pour une première infraction, cette nouvelle disposition interdit à perpétuité au contrevenant d'avoir en sa possession des armes. Il y a là une différence, car on n'interdirait pas à perpétuité à la personne de posséder des armes à feu mais seulement en cas de condamnation ou d'absolution pour une première infraction, d'avoir en sa possession des armes prohibées. Il s'ensuit donc qu'à la première condamnation on perdrait pendant un certain temps le droit de posséder une arme à feu, mais on perdrait à perpétuité le droit de posséder une arme prohibée. J'insiste sur le fait qu'il s'agit d'une arme prohibée. Il ne s'agit pas d'une arme qu'on a normalement le droit de posséder. Nous parlons ici d'une arme prohibée.

Croyez-vous donc qu'il soit abusif et anticonstitutionnel d'interdire à perpétuité à quelqu'un trouvé coupable d'une infraction de posséder une arme prohibée?

[Français]

Me Marchand: Le problème est peut-être au niveau des armes prohibées, mais la disposition est plus large que cela. On parle d'armes prohibées et également d'armes à feu à autorisation restreinte. L'alinéa (2)b) ne vise pas uniquement les armes prohibées à (2)b). Je conviens que le mémoire n'est peut-être pas d'une limpidité à toute épreuve à cet égard, mais il faut voir que c'est plus large que les simples armes prohibées.

[Traduction]

M. Wappel: Si l'on examine la version française à la page 80.

[Français]

a) des armes à feu - autres que des armes à feu prohibées ou des armes à feu à autorisation restreinte...

[Traduction]

On trouve cela dans l'alinéa 109.(2)a). On passe alors à l'alinéa b):

[Français]

b) des armes à feu prohibées...

.1625

[Traduction]

C'est manifestement différent. Celui ou celle qui comment une première infraction et à qui l'on interdit à perpétuité la possession d'une arme prohibée mais qui pourrait toujours posséder d'autres armes par la suite, bénéficie d'un traitement différent.

Je voudrais une précision. Le Barreau du Québec estime-t-il qu'une interdiction à perpétuité en ce qui concerne la possession d'une arme prohibée est excessive ou anticonstitutionnelle?

[Français]

Me Marchand: Pas dans le cas des armes prohibées. Nous voyons un problème au niveau des armes à feu à autorisation restreinte.

[Traduction]

M. Wappel: Oui, et pourtant il n'y a pas de problème à ce niveau étant donné que l'alinéa 109.(2)a) du projet de loi parle d'armes à feu autres que des armes à feu prohibées et précise que l'interdiction n'est pas une interdiction perpétuelle.

De toute façon, j'ai dit ce que je voulais dire.

Je passe maintenant à la page 6 du mémoire de l'Association du Barreau canadien.

[Français]

Me Marchand: Avant de terminer, me permettez-vous un dernier commentaire?

Vous dites que ce n'est pas prévu à l'alinéa b). Pourtant, on y mentionne:

b) des armes à feu prohibées, armes à feu à autorisation restreinte, armes prohibées [...] et ce à perpétuité.

C'est pour cela que nous disons que c'est inclus à cet endroit. C'est peut-être un problème d'interprétation.

[Traduction]

M. Wappel: Peut-être. D'après ce que je peux voir, on fait une distinction entre les armes à feu qui ne sont pas prohibées et celles qui le sont. Sinon, la présence des deux alinéas a) et b) n'aurait pas de raison d'être.

Je m'adresse maintenant à l'ABC. Je vais poursuivre dans la même veine que Mme Venne. Je me demande bien pourquoi vous estimez que la recommandation numéro un est nécessaire.

M. Heintzman: C'est bien possible. Je pense que M. Pinx a déjà dit que nous tenions seulement à attirer votre attention sur un problème que l'ABC entrevoit dans des situations de violence familiale. Comme il l'a dit, il est possible que le problème puisse être réglé en vertu de l'article 111 et c'est peut-être déjà le cas avec l'article 103 du Code criminel.

Est-ce plus clair?

M. Wappel: Oui.

À la page 11, vous faites une réflexion importante, à savoir que les dispositions concernant l'inspection:

ouvrent la voie à des perquisitions à l'improviste de véhicules, de lieux et de locaux d'habitation appartenant à des propriétaires d'armes à feu, même en l'absence de raisons de suspecter la perpétration d'une infraction.

Vous ajoutez que les pouvoirs de perquisition et de saisie doivent relever du Code criminel et vous citez les articles correspondants. Je présume que c'est parce que d'après ces dispositions, il faut avoir des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise.

M. Heintzman: Oui. À ce propos, monsieur Wappel, dans notre quatrième recommandation, il conviendrait probablement d'ajouter «et 487» après «117.02 à 117.06» qui est, si je ne me trompe - et je permets à M. Pinx de me reprendre - l'article contenant les dispositions générales en matière de perquisition et de saisie.

M. Wappel: D'accord.

À mon avis, la partie du projet de loi consacrée aux perquisitions et aux visites renferme un article très inquiétant. Il s'agit de l'article 100, qui se trouve à la page 43. Il est évidemment noyé dans cet article du projet de loi, mais il oblige toute personne se trouvant sur place à accorder au policier toute l'assistance possible; d'ailleurs, l'article 107 stipule que toute personne qui refuse d'accorder toute l'assistance raisonnable à l'agent de police est passible d'un emprisonnement de deux ans.

Ne croyez-vous pas qu'il y ait là une possibilité d'auto-incrimination au cas où, comme vous le dites, on ferait des perquisitions à l'improviste sans motif?

M. Pinx: C'est une question très pertinente. Si l'on part du principe que nous avons des craintes au sujet des pouvoirs conférés par ces dispositions, votre observation nous semble parfaitement logique. Comme vous dites, le fait de conférer ce genre de responsabilité pourrait aller à l'encontre des dispositions de la Charte.

On pourrait ajouter que nous comprenons vos préoccupations au sujet de pouvoirs qui vont parfois trop loin. C'est le même genre de préoccupations qui nous ont incités à faire les observations que nous avons faites au sujet des articles 98 et 101.

Le président: C'est votre dernière question, monsieur Wappel.

.1630

M. Wappel: Je pose la question parce que vous avez demandé que ces articles soient intégrés en bloc au Code criminel. C'est pourquoi je tenais à attirer votre attention sur cet article. J'espérais que vous me diriez «à l'exception de l'article 100» parce que...

M. Pinx: Nous ne demandons pas que l'on intègre les articles 98 et 101 au code. Nous voulons tout simplement qu'ils soient retirés de ce projet de loi. Les pouvoirs de perquisition devraient émaner de l'article 487 du Code criminel et non de l'article 117 du projet de loi.

M. Wappel: Dans votre recommandation, vous ne précisez pas qu'il faut les retirer.

M. Pinx: C'est ce que nous voulions dire. Excusez-nous, si ce n'est pas clair pour vous. C'est en tout cas le sens des recommandations que nous vous faisons.

M. Wappel: Merci, monsieur.

[Français]

Mme Venne: J'aimerais vous demander ce que vous pensez des pouvoirs réglementaires extraordinaires créés par la loi.

Ne croyez-vous pas qu'en vertu des pouvoirs réglementaires, on pourrait modifier substantiellement les règles de fond en se basant uniquement sur ces fameux pouvoirs réglementaires qu'on voit très rarement? Je pense que jusqu'à maintenant, on n'a pas encore vu cela dans les projets de loi présentés ici.

À cet égard, vous pourriez regarder l'article 110.

Me Picard: Madame Venne, nous ne nous sommes pas penchés sur cet aspect du projet de loi.

Mme Venne: Merci. C'est dommage.

L'Association du Barreau canadien a-t-elle une opinion là-dessus?

[Traduction]

M. Pinx: Vous pourriez peut-être nous aider. Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par «pouvoirs réglementaires»?

[Français]

Mme Venne: Je vous donne l'exemple de l'article 110. C'est un exemple, parce que dans ce projet de loi, on se réfère fréquemment aux pouvoirs réglementaires tels que prescrits. Ce sont les termes utilisés.

[Traduction]

M. Pinx: L'Association du Barreau canadien a toujours dit que tout cela devait se trouver dans le projet de loi. Cela dit, nous n'avons pas examiné en détail les pouvoirs réglementaires prévus à l'article 110 en particulier.

[Français]

Me Picard: Madame Venne, notre position est qu'il ne faut pas légiférer par règlement. Il faut qu'il y ait le plus possible de dispositions dans un projet de loi. Nous n'aimons pas, généralement, que l'on donne trop de pouvoirs réglementaires, car nous voulons que les règles du jeu soient connues de tous et toutes.

Quant à l'article 110 spécifiquement, nous n'avons pas de commentaires.

Mme Venne: Merci.

Je cède la parole à mon collègue, Me Langlois.

Le président: M. Healy a aussi demandé de répondre à cette question.

[Traduction]

M. Patrick Healy (membre, Comité du droit criminel, Barreau du Québec): J'ai une petite chose à ajouter au sujet de cette question et d'une quetsion antérieure, à savoir, que si je comprends les problèmes qui ont été soulevés, il ne faut pas partir du principe que les dispositions en question - c'est-à-dire les dispositions concernant les visites ou les dispositions réglementaires de l'article 110 dont il vient d'être question - sont des cas uniques. Ce n'est pas la première fois que l'on y recourt dans une loi.

Cela ne veut pas nécessairement dire qu'elles sont bonnes mais qu'elles ne sont pas nouvelles. On trouve des pouvoirs réglementaires extraordinaires dans d'autres lois. C'est notamment le cas dans la Loi sur les explosifs où on trouve également des pouvoirs qui ressemblent beaucoup à ceux dont il est question en matière de visites.

Je le répète, cela ne veut pas dire qu'il n'y a plus de problèmes. Mais quand vous vous demanderez si ces dispositions peuvent être conservées sous leur forme actuelle, il ne faudrait pas oublier que des dispositions analogues existent déjà dans d'autres lois.

[Français]

Mme Venne: Monsieur le président, il faut quand même ajouter que des règlements de cette ampleur, il n'y en a jamais eu dans d'autres lois. Cela, je tiens à le dire.

.1635

M. Langlois (Bellechasse): Ma première question s'adresse au Barreau du Québec, à ceux ou celles qui voudront bien y répondre.

Au quatrième paragraphe de votre chapitre premier, vous entrez de plein pied en faisant le test constitutionnel de l'article 7 de la Charte et, plus loin, si cela devait s'appliquer, vous faites subir le test de Larry Oakes. Vous dites que ça remplit les critères de Larry Oakes.

J'aimerais que vous fassiez un autre test constitutionnel, celui du paragraphe 92(13). On a ici un texte de nature réglementaire à première vue. Est-ce qu'on n'entre pas carrément dans «propriété et droit civil»?

Ma première question porte sur la capacité du Parlement fédéral de légiférer en ces matières.

Ma deuxième question porte sur l'article 100 du projet de loi qui fait obligation à une personne, lorsqu'il y a une inspection, d'accorder au policier toute l'assistance possible dans l'exercice de ses fonctions et de lui donner les renseignements qu'il peut valablement exiger dans le cadre de l'application de la présente loi. Est-ce qu'on n'est pas ici en matière d'auto-incrimination étant donné qu'il y a déjà une infraction au Code criminel qui traite spécifiquement de l'entrave aux agents de la paix? Il s'agit de forcer quelqu'un à accomplir un acte.

Le président: Votre temps est écoulé, mais vous avez posé deux questions et on peut laisser aux témoins le temps d'y répondre.

M. Langlois: Si vous me le permettez, monsieur le président, ma dernière question compléterait mes deux premières.

À l'article 92, donc à la Partie III du Code criminel, on fait une infraction à la personne qui possède une arme à autorisation restreinte sans avoir les permis nécessaires si c'est poursuivi par voie d'acte d'accusation. Je ne crois pas que ça puisse se faire par poursuite sommaire.

La peine maximale est de dix ans, même pour une carabine ou un fusil de chasse. On parle de la proportionnalité des peines. Une personne pourrait se retrouver dans un pénitencier pour avoir été reconnue coupable tout simplement d'avoir eu une arme sans avoir les permis nécessaires, alors qu'une autre pourrait aurait été trouvée coupable de manslaughter et se retrouver en libération inconditionnelle.

Me Annie Chapados (secrétaire du Comité en droit criminel, Barreau du Québec): J'ai pris très peu la parole aujourd'hui. Je pense que ce sera la première et la dernière fois.

À l'égard de l'obligation d'assistance, je vais probablement devoir vous décevoir, mais on a discuté de la disposition en comité. Par ailleurs, vous savez fort bien que le Comité permanent en droit criminel du Barreau du Québec regroupe des avocats qui exercent dans différents domaines, tant en défense qu'à la Couronne et en milieu universitaire.

Le consensus n'est pas toujours facile à obtenir et, quand il n'y a pas consensus, on ne retient aucun commentaire. Dans ce cas-ci, je vous dirai qu'aucun consensus n'a été obtenu à l'égard de cette disposition.

Me Marchand: Un commentaire rapide sur l'article 92. J'abonde dans le sens de ce que vous mentionnez. Cela illustre les peines excessives. D'ailleurs, dans notre mémoire, on parlait justement des peines excessives sans peut-être se référer spécifiquement à cet article-là. Je pense que c'est une illustration d'une peine qui pourrait être excessive. On parle de dix ans de prison pour avoir été reconnu coupable de ne pas avoir un papier. Il me semble que c'est beaucoup.

[Traduction]

M. Heintzman: Si je peux répondre à votre première observation, à notre avis, il s'agit du droit pénal. Les armes sont réglementées par le Code criminel depuis très longtemps. On pourrait prévoir un régime réglementaire, qui ne fait pas partie du code, mais peu importe si les infractions pour violation de ce régime réglementaire ou si les armes elles-mêmes figurent dans le code, il s'agit toujours à notre avis, d'une infraction au droit pénal.

Mme Barnes (London-Ouest): Je souhaite la bienvenue aux témoins; nous apprécions votre expertise et votre aide.

J'aimerais aborder plusieurs sujets. Il me faudrait peut-être un autre tour pour poser toutes mes questions, mais commençons tout de même.

Certains témoins qui ont comparu devant notre comité étaient un peu déroutés à propos du système CIPC et de la prise des empreintes digitales. On nous a dit que dans certaines provinces, on prend les empreintes digitales des personnes poursuivies par procédure sommaire, surtout lorsqu'il s'agit d'une infraction mixte, et cette loi comporte beaucoup d'infractions mixtes.

.1640

Vous qui êtes des experts et qui représentez toutes les régions du pays, pouvez-vous nous dire si, en cas d'infractions mixtes au code ou à la loi, on prend systématiquement les empreintes digitales?

M. Pinx: Mon pays, c'est le Manitoba.

Des voix: Oh, oh!

M. Pinx: Au Manitoba, puisque c'est de là que je tiens mon expérience, on prend effectivement les empreintes digitales dans ce cas. En fait, si je ne me trompe, il est prévu dans la Loi sur l'identification des criminels qu'en cas d'infraction mixte, si la Couronne n'a pas fait son choix, avant de prendre les empreintes digitales, on présume en attendant qu'il s'agit d'un délit pénal.

Cela dit, la prise des empreintes serait probablement obligatoire.

Mme Barnes: Pouvez-vous nous dire rapidement si l'on ne prend pas les empreintes digitales au Manitoba dans les cas de déclarations sommaires de culpabilité?

M. Pinx: Cela dépend des cas. Je ne peux pas donner une réponse bien nette.

Mme Barnes: Le Barreau du Québec aurait peut-être quelque chose à dire?

[Français]

Me Marchand: Au Québec, si c'est une déclaration sommaire, dès qu'il y a une possibilité que ce soit mixte, habituellement, les empreintes digitales sont prises. Elles ne sont pas prises seulement dans le cas d'un crime qui n'est poursuivable que par déclaration sommaire, ce qui est très rare.

[Traduction]

Le président: Y a-t-il un représentant d'une autre province qui voudrait répondre?

Mme Barnes: J'espère que cela ne compte pas dans le temps dont je dispose.

Le président: Je pensais que c'est ce que vous aviez demandé?

Mme Barnes: Oui. C'est bien.

Je vais pousser la chose un peu plus loin. Dans le cas d'une infraction punissable - s'il s'agit d'une infraction mixte, c'est-à-dire dans la majorité des cas, aucune prescription n'est imposée à la Couronne ni pour le procès. Mais s'il s'agit d'une déclaration sommaire de culpabilité, selon ce qu'on recommande pour certaines de ces infractions, il y a prescription au bout de six mois. Je crois que c'est l'article 786 du Code criminel qui le stipule. On dispose donc d'un délai de six mois.

Je tiens à ce que vous réfléchissiez aux répercussions que cela peut avoir car nous tenons manifestement à avoir l'adhésion de la majorité des Canadiens à cette loi et au principe de l'enregistrement. Mais il ne faut pas oublier qu'il y a des adversaires de l'enregistrement. Je vous rappelle qu'il y a deux ou trois ans, toutes les accusations ont été abandonnées à la suite de la décision Ascove. Je crois qu'en Ontario, c'est-à-dire dans ma province, la plupart de ces accusations concernaient des infractions relatives à la conduite de véhicules. On a décidé de laisser tomber littéralement des centaines de poursuites, parce que la Couronne n'avait pas le temps.

Si dans le cas de certaines infractions soit disant mineures qui sont maintenant considérées comme des infractions mixtes et pour lesquelles il n'y a donc pas prescription, on opte pour la déclaration sommaire de culpabilité, ne pensez-vous pas que cela puisse finir par transformer cette loi en une véritable mascarade s'il existe un système universel d'enregistrement que les gens décident de ne pas respecter, et que l'on ne peut pas les poursuivre à cause de la déclaraton sommaire? Cela risque-t-il d'après vous d'être une source de problèmes ou bien est-ce mon esprit qui me joue des tours parce que j'ai fait trop de cauchemars au sujet de ce projet de loi?

M. Pinx: Je dirais, en mon nom personnel et au nom de l'association, que ce n'est pas un problème pour moi. Il ne faut pas oublier que dans le contexte de l'application d'une telle loi, la plupart des types d'infractions relèvent de la catégorie de la possession illégale. La suppression pourrait constituer une infraction au Code criminel si l'arme en question n'est pas bien entreposée, si le contrevenant n'a pas de permis ou si l'arme n'a pas été enregistrée.

L'horloge commencera à tourner dès l'instant où l'on découvre l'arme. Autrement dit, le délai de six mois commence à s'écouler à partir du moment où l'on est censé être en possession de l'arme en question. C'est-à-dire le moment où la police l'a découverte. Je ne vois pas très bien ce qui vous tracasse à propos de la déclaration sommaire parce que l'horloge commence à tourner au moment où la transaction est faite. Normalement, elle se fait au moment de la perquisition et de la saisie, c'est-à-dire au moment où l'on découvre l'arme. Par conséquent, en toute franchise, je ne vois pas de problème.

Mme Barnes: Êtes-vous d'accord?

[Français]

Me Picard: Il n'y a pas de consensus au niveau du Comité en droit criminel du Barreau du Québec. Donc, nous ne prendrons pas position à ce sujet.

[Traduction]

Mme Barnes: Bien. Dans ce cas, je procéderai autrement.

Je voudrais revenir à la question des pouvoirs de visite, parce que je suis certaine que cela a déjà fait l'objet de certaines enquêtes. Un de mes collègues, M. Bodnar, a dit l'autre jour que si les inspections sont vraiment justifiées pour s'assurer que la loi est respectée - et c'est déjà le cas dans certaines lois provinciales concernant les relations locateurs-locataires ainsi que pour des entreprises de services publics qui permettent aux employés de pénétrer dans un logement pour faire une inspection - que penseriez-vous d'un préavis?

.1645

Et si l'on donnait un préavis de 24 heures lorsqu'on veut pénétrer avec justification dans un logement pour faire une inspection? Que diriez-vous de cela?

M. Heintzman: Nos préoccupations seraient les mêmes, en ce sens qu'il faut savoir s'il s'agit ou non d'une loi pénale. Dans le premier cas, il faut y adjoindre des pouvoirs correspondants. S'il s'agit d'une loi de réglementation, on s'embarque dans toutes sortes de problèmes constitutionnels très compliqués.

Je dirais au nom de l'association qu'il faut appeler un chat un chat et qu'il s'agit d'une loi pénale et qu'elle accorde aux citoyens la protection que les lois de ce genre assurent habituellement.

[Français]

Mme Barnes: Madame? Est-ce la même chose?

Me Marchand: Je pense exactement la même chose chose que mon collègue. Nous sommes contre cela dans un cas bien précis, celui de la maison d'habitation, qui a toujours été en quelque sorte le château de la personne. Cela a été repris dans plein de jugements, tant à la Cour suprême qu'en Angleterre. On s'oppose à ce que les forces policières puissent entrer dans un domicile, même avec un préavis de 24 heures, pour aller faire un fishing expedition. Nous pensons que ça ne devrait pas se faire, sauf lorsqu'il y a des motifs raisonnables et probables de penser qu'une infraction a été commise. Même avec un préavis de 24 heures, avec des policiers qui vont rester à la porte pour voir ce qui va se passer dans la maison, nous ne sommes pas tellement avancés.

[Traduction]

Mme Meredith (Surrey - White Rock - South Langley): Je voudrais commencer par faire une observation. Si je comprends bien, vous représentez le Barreau canadien et celui de la province du Québec. Je dois dire que le fait qu'il ne soit pas question de la partie III dans le mémoire de l'Association du Barreau canadien m'intrigue. Il est pour ainsi dire exclusivement consacré à la question de l'enregistrement.

Le Barreau du Québec me donne l'impression qu'il est en faveur du statu quo, qu'il n'est pas nécessairement en faveur de certains changements qui rendraient les dispositions de la partie III plus stricts en ce qui concerne l'usage criminel d'armes à feu.

Ma question s'adresse à vos deux organisations. Savez-vous dans combien de cas les accusations concernant l'usage d'armes à feu pour commettre des délits portées par les forces policières dans diverses localités, sont allées devant les tribunaux? Dans combien de cas ces accusations ont-elles donné lieu à des poursuites en justice? Autrement dit, je voudrais savoir dans combien de cas on a fait un marchandage au sujet des accusations?

M. Heintzman: Je ne pense pas que nous ces chiffres à notre disposition. Je suppose que vous voulez parler de règlement d'une infraction par un marchandage.

[Français]

Me Picard: Tout d'abord, il faut qu'il soit bien clair pour les membres du Comité que le Barreau du Québec ne fait pas partie de l'Association du Barreau canadien. Nous sommes l'ordre professionnel des avocats. Il y a certains membres du Barreau du Québec qui sont membres de l'Association du Barreau canadien. Donc, notre présentation est la présentation des avocats du Québec sur cette question.

Deuxièmement, sur ce que vous avez dit, il est impossible d'avoir ces statistiques. Je vais demander à mon confrère de vous dire pourquoi nous ne pouvons pas avoir ce genre de renseignements.

Me Marchand: On n'a pas de statistiques à ce sujet, mais on voit dans la pratique de tous les jours qu'il y a toujours un marchandage, même avec la loi actuelle, sur les fameux articles concernant l'utilisation d'une arme à feu lors de la commission d'un crime. Régulièrement, il y a des ententes en vue d'enlever l'accusation ou encore de plaider coupable pour une sentence déterminée. C'est du marchandage, du chantage entre les mains de la poursuite. Quand je vois qu'on porte la peine à quatre ans, je pense à la jeune personne de 18 ou 19 ans qui en est à son premier délit dans un dépanneur avec une arme à feu non chargée et qui va nécessairement se retrouver au pénitencier pour au moins quatre ans.

Cela me fait peur, et je pense que la solution à nos problèmes n'est pas de remplir les prisons. C'est ce qu'on va faire avec une série de peines minimales. C'est ne pas faire confiance aux juges qui sont nommés pour cela.

On leur enlève un pouvoir et on les oblige à donner des sentences qu'ils ne voudront pas donner. Je suis totalement contre cela, et le Barreau du Québec est contre cela.

.1650

[Traduction]

Mme Meredith: Je tiens à signaler que les Canadiens ont des doutes au sujet des accusations portées en vertu des dispositions actuelles du Code criminel concernant les armes à feu. Ils pensent que cela fait l'objet d'un marchandage.

Je crains que ce projet de loi n'y change rien parce qu'il s'agira toujours de prouver si une arme est une arme authentique ou une réplique. De ce fait, il y aura toujours marchandage en vue de laisser tomber les accusations parce que c'est une chose que l'on ne peut pas prouver en cour.

Ne voyez-vous pas le problème? N'avez-vous pas les mêmes réticences à propos du libellé de ce projet de loi?

M. Heintzman: Je ne pense pas comme vous que les Canadiens ne font pas confiance aux tribunaux pour ce qui est d'imposer des peines adéquates, mais je ne suis pas criminaliste.

La seule solution dans un système judiciaire pénal consiste à imposer une peine proportionnelle à la gravité de l'infraction et l'on commettra inévitablement des injustices si l'on essaye d'imposer des peines minimum pour d'autres raisons. Plus on commettra d'injustices, plus la population perdra confiance dans le système judiciaire.

Sheldon a peut-être plus de précision à vous donner à ce sujet, parce que c'est sa spécialité.

Mme Meredith: Puis-je vous demander des précisions au sujet de ce que vous venez de dire? D'après vous, il faut non pas imposer de peines ou de peines sévères pour l'usage criminelle d'armes à feu.

M. Heintzman: Non. Ce n'est pas ce que nous voulons dire. Par contre, je crois que si l'on veut imposer une peine minimum...

Mme Meredith: D'un an.

M. Heintzman: ...d'un an, de trois ou de quatre - il existe diverses possibilités - parce que l'on n'a pas confiance dans le juge ou dans la Cour d'appel, on finira inévitablement par saper la confiance de la population dans la système judiciaire.

Mme Meredith: Me reste-t-il encore du temps?

Le président: Vous avez le temps de poser une toute dernière question, madame Meredith.

Mme Meredith: Je voudrais plus de précision. Vous dites donc que dans le cadre du système actuel où l'on a ajouté une peine minimum d'un an - soit disant une peine consécutive - pour l'usage des armes à feu, il n'y avait aucune raison de faire du marchandage, que la plupart des accusations auraient été examinées par les juges et que les Canadiens devraient avoir confiance dans le système lorsqu'il s'agit de déterminer pourquoi on n'a pas eu recours à cette peine minimum d'un an prévue dans les dispositions actuellement en vigueur.

M. Heintzman: Ou si vous avez raison, du fait que l'on n'arrive pas à prouver qu'il s'agit d'une arme authentique et non d'une imitation, il y a moyen de régler le problème en faisant le changement à ce niveau, au lieu d'avoir recours aux peines minimums.

Je crois que M. Pinx a quelque chose à ajouter.

Mme Meredith: Est-ce à ce propos?

Le président: C'était votre dernière question.

Monsieur Pinx, vous pouvez répondre.

M. Pinx: Ma réponse est basée uniquement sur mon expérience et sur mes observations. Je vous signale que dans ma province, lorsqu'on accuse quelqu'un d'avoir utilisé des armes à feu pour commettre des infractions punissables par la loi, les accusations sont maintenues si la Couronne est en mesure de prouver qu'il s'agissait d'armes véritables. Cela semble être la règle, dans ma province du moins. On considère que l'utilisation d'armes à feu au cours de la perpétuation d'un délit est extrêmement grave et l'on essaye d'imposer des peines consécutives.

Je puis donc vous assurer que ces affirmations concernant un marchandage éventuel ne sont pas vraies, en ce qui me concerne du moins.

Mme Meredith: Et ma première question concernant les chiffres?

Le président: Nous y reviendrons peut-être.

Mme Phinney (Hamilton Mountain): Je m'adresse aux représentants du Barreau canadien et ma question se rapporte à ce que vous dites à la page 11 de votre mémoire, dans la section consacrée à la visite, où il est question des articles 98 à 101 du projet de loi.

Ai-je raison de déduire de votre dernière déclaration - et c'est ce que je tiens à vérifier - que vous ne pensez pas qu'il faudrait prévoir des pouvoirs supplémentaires en matière de perquisition et de saisie dans la Loi sur les armes à feu? Est-ce bien ce que vous voulez dire?

M. Heintzman: C'est exact. Je pense que c'est ce que nous voulons dire.

Mme Phinney: Cela veut dire que les fabricants d'armes seraient probablement les seuls au Canada à ne pas faire l'objet d'inspections. Est-ce ce que vous voulez dire? Vous rendez-vous compte du fait que vous soustrairiez les entreprises à la visite?

Je pense qu'au Canada, tous les garages, toutes les épiceries et tous les autres magasins sont soumis à des inspections en vertu d'un règlement ou d'un autre. Vous dispensez en fait complètement les fabricants d'armes des inspections.

.1655

M. Heintzman: Si le Parlement estime qu'il convient de créer un pouvoir d'inspection à l'égard des négociants-revendeurs d'armes à feu, il devrait proposer un projet de loi à cette fin, et nous nous ferions un plaisir de l'examiner à ce moment-là.

Mme Phinney: Mais ce pouvoir y est déjà prévu.

M. Heintzman: Oui, mais il est prévu dans un cadre législatif beaucoup plus large - trop large même, d'après ce que nous avons pu constater en examinant le texte du projet de loi. Si l'intention est de prévoir un pouvoir de perquisition et de saisie vis-à-vis de ceux qui vendent des armes à feu, vous pourriez peut-être le justifier à ce moment-là, si ce pouvoir était bien limité, mais tel n'est pas le cas.

Mme Phinney: Très bien. Merci.

[Français]

Mme Venne: Quelle est votre position sur la décriminalisation du défaut d'enregistrer les armes à feu telles que les fusils et les carabines, et non pas les armes à autorisation restreinte?

Me Picard: Encore là, madame Venne, il n'y a pas eu de consensus sur cette question. Il y a des visions différentes sur cette question et nous n'avons pas élaboré une position du Barreau du Québec sur cette question.

Mme Venne: Merci. L'Association du Barreau canadien a-t-elle une position là-dessus?

[Traduction]

M. Heintzman: Je crois que notre position est déjà claire, à savoir qu'il est tout à fait justifié d'en faire un acte criminel, et que la décriminalisation ne serait donc pas appropriée. Les peines prévues sont... C'est-à-dire qu'on pourrait prévoir des infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité ou des infractions mixtes dans certains cas, mais il n'en reste pas moins que selon nous, cette infraction devrait continuer de relever du droit criminel.

[Français]

Mme Venne: J'aimerais demander au Barreau du Québec pourquoi il fait référence au fait qu'il constitue en quelque sorte un microcosme du monde judiciaire. Je me suis demandé pourquoi vous faisiez cette référence. Je trouve que vous êtes très représentatifs, mais je ne vois pas pourquoi vous teniez à le souligner dans votre mémoire. C'est seulement une question personnelle.

Me Chapados: C'est l'expérience qui nous a fait poser ce geste-là. Je sais que déjà, à la suite de comparutions ici, en comité, il y a eu des imbroglios et une mécompréhension de ce qu'était le Barreau du Québec par rapport à d'autres associations dites plutôt volontaires au sein du pays, du milieu juridique. On aimerait bien que ce soit réglé une fois pour toutes. J'espère qu'avec le dépôt de notre rapport annuel dont vous ferez bonne lecture, l'imbroglio sera réglé une fois pour toutes. Il était relativement important de souligner que le Comité regroupait des gens tant de la Couronne provinciale ou fédérale que de la défense, du milieu de l'aide juridique et du milieu universitaire. Cela peut peut-être expliquer qu'à certains égards, on demeure silencieux quant à certaines parties du projet de loi plutôt que d'avancer des positions qui seraient biaisées en faveur de la défense ou en faveur de la Couronne.

Mme Venne: Tout ce qui vous manque, ce sont des notaires au sein de votre comité.

Me Chapados: Il s'agit d'un autre ordre.

Me Picard: Et d'un autre débat.

Mme Venne: Oui, c'est le mien. Est-ce que mon collègue a des questions?

M. Langlois: Je voudrais d'abord remercier M. Heintzman d'avoir répondu à ma question sur le test constitutionnel. Je l'adressais plus particulièrement au Barreau du Québec quant à la propriété et au droit civil, étant donné la préoccupation plus québécoise que l'on retrouve à cet égard-là. Si on remplace l'arme à feu par l'automobile, peu de personnes diront que c'est de compétence fédérale dans la partie réglementaire.

Je vous demanderais si vous avez soumis la première partie du projet de loi au test constitutionnel du paragraphe 92(13).

Quant au pouvoir réglementaire, j'abonde dans le sens de ma collègue, Me Venne. L'article 110 contient à lui seul 22 pouvoirs réglementaires. Il y en a un sur lequel j'achoppe particulièrement et je ne dis pas que je n'achoppe sur aucun autre. C'est 110t) et vous me permettrez de lire le texte. C'est à la page 48.

110. Le gouverneur en conseil peut, par règlement:

t) prévoir selon quelles modalités et dans quelle mesure telles dispositions de la présente loi ou de ses règlements s'appliquent à tout peuple autochtone du Canada et adapter ces dispositions à cette application;

.1700

C'est ce qu'on appelle généralement, en termes parlementaires, la clause Henri VIII qui permet au pouvoir exécutif de légiférer.

Est-ce que vous acceptez que dans une société de droit, le gouverneur en conseil puisse exclure une catégorie de citoyens de l'application de la loi et même, à la limite, légiférer autrement pour une catégorie de citoyens? C'était ma deuxième question.

Me Picard: Nous n'avons pas examiné spécifiquement cette question, mais le Comité en droit criminel du Barreau du Québec, dans d'autres présentations devant ce Comité, avait indiqué que la loi devait s'appliquer à tout le monde sur le territoire. Le Barreau du Québec n'a pas pris position sur cette disposition précise du projet de loi, mais je vous dis que dans des présentations sur d'autres projets de loi, le Barreau du Québec avait dit que les lois devaient s'appliquer à tous ceux qui habitent sur le territoire.

M. Langlois: Et sur la première partie, le test constitutionnel de 92(13)?

Me Picard: On n'a pas non plus discuté de cette question, parce que c'est dans une optique particulière. Comme le projet de loi est très complexe, que nous ne sommes pas attachés à cet aspect-là.

M. Langlois: Merci.

Le président: C'est tout?

[Traduction]

J'ai un certain nombre de questions à poser. Je voudrais en revenir au point soulevé par M. Ramsay. Ce dernier a demandé s'il ne serait pas possible d'interdire toutes les armes en vertu d'un article du Code criminel, à savoir le projet d'article 117.15 qui se trouve à la page 98. Certains témoins que nous avons reçu devant le Comité prétendent que le gouvernement pourrait interdire toutes les armes, y compris les armes couramment utilisées pour la chasse, tel que les fusils et les carabines.

Quand je regarde l'article 117.15, j'ai l'impression, cependant, que le paragraphe (2) prévoit certaines limites qui exclueraient cette possibilité. Certes, ces limites sont assez vaguement définies, mais il me semble que si on dit que le gouverneur en conseil ne peut désigner par règlement comme arme à feu toute chose qui peut raisonnablement être utilisée pour la chasse ou le sport, c'est tout de même une limite.

Je vous demanderai pas conséquent de l'examiner et de me donner votre interprétation de cet article. À mon sens, le gouvernement n'aurait pas le pouvoir, en vertu de cet article, de décréter du jour au lendemain que toutes les armes à feu au Canada, y compris les fusils de chasse, les armes de calibre .22, et les carabines, sont désormais interdites. Il me semble que ce serait contraire à l'esprit, sinon à la lettre, du paragraphe en question.

M. Heintzman: Je tiens à préciser, tout d'abord, que ni l'Association ni aucun de ses comités ou organes ne s'est penché sur cette disposition précise. Je vais donc me contenter de dire que si ce paragraphe est vraiment vague, comme vous semblez le dire, il conviendrait de le clarifier. C'est tout ce que je peux vous dire, étant donné que nous ne l'avons pas examiné en profondeur.

Le président: Très bien.

Madame Picard.

[Français]

Me Picard: Mêmes commentaires, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: D'accord. Je vais passer à autre chose.

Ma question fait suite à une question posée précédemment au sujet des peines prévues pour le non-respect des règlements - autrement dit, si vous n'entreposez pas correctement vos armes à feu, si vous ne remplissez pas bien les formulaires, si vous n'enregistrez pas votre arme à feu, etc - on se demande s'il est préférable de prévoir ces dispositions dans la Loi sur les armes à feu ou dans le Code criminel. La Loi sur les stupéfiants établit un certain nombre d'infractions criminelles, avec les peines qui s'y rattachent, sans qu'elles soient incorporées dans le Code criminel proprement dit, et nous savons très bien que ces actes sont tout aussi criminels que s'ils faisaient l'objet de dispositions distinctes dans le Code criminel. Donc, à votre avis, si des peines étaient prévues dans la Loi sur les armes à feu, plutôt que dans le Code criminel, pour des actes tels que le non-enregistrement d'une arme à feu, ces dernières risqueraient-elles d'être jugées inconstitutionnelles, ou seraient-elles plus difficles à appliquer ou considérées moins graves pour autant?

M. Heintzman: À mon sens, ces dispositions seront jugées comme relevant du droit pénal, qu'elles soient inscrites dans le Code criminel ou non. La décision de les inclure ou non dans le Code criminel est une décision qui relève plutôt du Parlement et du pouvoir législatif, même si l'objectif de ces dispositions et les antécédents dans ce domaine indiquent bien qu'elles font parties du droit pénal.

.1705

Quant à savoir si elle devrait ou non être prévue dans la réglementation, nous n'avons pas exprimé une opinion ou cherché à vous donner des conseils à ce sujet; nous nous sommes contentés de dire qu'il est tout à fait approprié, à notre avis, de prévoir la procédure d'enregistrement dans la Loi sur les armes à feu proprement dite. Quant à savoir si les infractions doivent être prévues dans le Code criminel ou dans la Loi sur les armes à feu, nous ne nous sommes pas prononcés là-dessus. Comme nous n'avons pas examiné ce point précis, nous préférons vous laisser le soin d'en décider.

Le président: Certains témoins nous ont fait cette recommandation, car ils estiment que ce sera moins une atteinte à leur réputation s'ils sont jugés coupable d'une infraction à la Loi sur les armes à feu, qu'au Code criminel. Nous savons tous très bien que cela revient au même. C'est une simple question de perception.

[Français]

Madame Picard, avez-vous une opinion sur cette question?

Me Picard: Non, monsieur le président. Je n'ai rien à ajouter.

[Traduction]

Le président: Enfin, plusieurs témoins ont affirmé devant le Comité que certaines dispositions du projet de loi autoriseront les autorités à confisquer des armes à feu sans dédommagement. Par exemple, les armes à autorisation restreinte deviendraient des armes prohibées, de même que certains types d'armes de poing.

Aux termes du projet de loi, la personne qui les possède actuellement jouira de droits acquis, mais lorsque cette dernière décédera, si les armes en question n'ont pas été vendues, elles feront partie de sa succession, et un fils, une fille ou un neveu pourrait en hériter. Eh bien, cette personne ne pourrait pas continuer à les posséder, car elles deviendraient à ce moment-là des armes prohibées. Cela reviendrait à confisquer ces armes sans dédommagement.

Je me demande si vous pourriez nous dire si, selon vous, cela serait contraire aux principes généraux de notre système judiciaire, qui exigent une forme quelconque de dédommagement dans de telles circonstances?

M. Heintzman: Je voudrais préciser, tout d'abord, que la Charte ne prévoit aucune protection à l'égard de la propriété. De plus, n'importe quelle loi de ce type constitue jusqu'à un certain point une atteinte aux droits de propriété qui peut être justifiable dans des limites raisonnables.

Encore une fois, nous ne nous sommes pas penchés sur cette question précise, mais je dirais que ce genre d'effet secondaire serait justifié dans le contexte d'une disposition réglementaire qui vise à protéger le public.

[Français]

Me Picard: M. le président de l'Association du Barreau canadien, dans son style inimitable, a bien résumé la question, et nous sommes d'accord sur cette façon de voir les choses.

[Traduction]

M. Ramsay: Dans le même ordre d'idées, d'après ce que j'ai pu comprendre, si le possesseur légal d'une arme à feu décède, l'État a le droit de lui confisquer cette arme à feu. Ai-je bien compris?

M. Heintzman: C'est-à-dire que cette personne pourrait toujours la détruire ou...

M. Ramsay: Ce serait difficile si elle est déjà morte.

M. Heintzman: Oui, c'est vrai; mais elle pourrait toujours être détruite par l'exécuteur testamentaire ou quelqu'un d'autre. Par exemple, si les conditions dans lesquelles une voiture a été immatriculée changent, on ne peut plus se servir de la voiture en question tant qu'elle ne répond pas aux exigences de la réglementation. C'est la nature même de ce genre de disposition.

M. Ramsay: Donc, si les héritiers ou l'exécuteur n'ont pas le droit de posséder l'objet en question, ce dernier est confisqué et vous trouvez cela tout à fait normal.

M. Heintzman: Écoutez, on ne peut pas s'en servir si l'objet en question ne répond pas...

M. Ramsay: Et comme les héritiers n'ont pas le droit de le posséder, l'État le saisit.

Le président: C'est-à-dire qu'il s'agirait à ce moment-là d'une arme à feu prohibée, alors qu'elle n'était pas désignée comme telle auparavant.

M. Heintzman: C'est exact.

M. Ramsay: Et vous trouvez cela tout à fait normal.

M. Heintzman: Je pense qu'il est normal de s'attendre à ce qu'il y ait une période d'application progressive dans le cas d'armes à feu qui ne vont plus être permises.

M. Ramsay: Mais comme elles ne sont plus permises, on ne peut non plus les donner à ses héritiers.

M. Heintzman: C'est exact.

M. Ramsay: Par conséquent, ce projet de loi crée une situation où la propriété d'un particulier est prise en charge ou confisquée par l'État à un moment donné. Ne s'agit-il pas à ce moment-là d'une confiscation sans dédommagement?

.1710

M. Heintzman: Comme je vous l'ai déjà dit, on peut le voir de cette façon, mais je pense que toute disposition réglementaire qui repose sur ce genre de régime va nécessairement viser certaines choses et en exclure d'autres.

M. Ramsay: Je sais déjà comment je qualifierai ce genre de disposition; ce qui m'intéresse, c'est de savoir comment vous la qualifiez.

[Français]

Me Picard: Monsieur Ramsay, je pense que la clause grand-père devrait s'appliquer à une seule génération, et non pas ad infinitum. Donc, il ne devait pas y avoir...

[Traduction]

M. Ramsay: Autrement dit, vous êtes du même avis que vos collègues.

M. Heintzman: Monsieur Pinx voudrait peut-être faire des observations à ce sujet.

Le président: L'autre possibilité, c'est que la succession essaie de vendre l'arme en question à l'étranger. Autrement dit, une arme qui est considérée prohibée au Canada peut ne pas l'être aux États-Unis. S'il s'agissait d'une arme à feu de valeur, il serait possible de la vendre dans un pays où elle n'est pas considérée comme une arme prohibée.

M. Pinx: Aux termes de la loi actuelle, par exemple - là je parle du régime législatif actuellement en place - si vous possédiez une arme à feu pour laquelle vous aviez payé, mettons, 500$, sans vous rendre compte qu'il s'agissait d'une arme à feu prohibée, et si la police venait vous confisquer cette arme à feu, pensez-vous qu'il serait normal qu'on vous rende vos 500$?

M. Ramsay: Non, pas du tout.

M. Pinx: Dans ce contexte-là, vous trouveriez normal qu'on vous prenne votre arme à feu, n'est-ce pas? Autrement dit, il n'y aurait pas de dédommagement, même si vous n'aviez pas vraiment pu posséder cette arme à feu.

M. Ramsay: Si j'ai acheté quelque chose qui était illégal...

M. Pinx: Sans le savoir.

M. Ramsay: ... sans le savoir, je sais très bien que je ne pourrai pas invoquer comme excuse que j'ignorais la loi. Mais ce n'est pas du tout ce à quoi je faisais allusion.

M. Pinx: Oui, je le sais. Si j'en parle, c'est parce que M. Heintzman, si je comprends bien ses interventions, essaie de vous expliquer que les dispositions de la loi ne sont plus les mêmes. Autrement dit, la loi a été modifiée pendant que possédiez l'objet en question.

Ce faisant, l'État a décidé - comme il pourrait très bien le décider dans le cas où vous ne sauriez pas que l'objet en question était interdit, qu'il trouve raisonnable de ne pas vous dédommager, mais simplement de vous accorder une longue période de possession. Quant à la cession éventuelle de cette arme à feu, vous avez la possibilité de vous adresser aux autorités ou alors d'essayer de la vendre à l'étranger, comme l'expliquait M. Allmand.

M. Ramsay: J'insiste simplement sur le fait qu'un objet particulier faisant partie de la succession d'une personne serait confisqué par l'État. Voilà le point sur lequel je sollicitais votre point de vue, et vous avez tous les deux convenu que j'avais raison.

Je suis donc content de connaître vos conclusions à ce sujet.

M. Pinx: Nous vous avons évidemment exposé les faits, mais il s'agit évidemment de savoir si c'est une violation de la Charte ou non. Ça, c'est une toute autre question.

M. Ramsay: C'est exact.

Je voudrais en revenir au point soulevé par les membres du Bloc concernant les pouvoirs réglementaires prévus dans le projet de loi. Il y a au moins 75 dispositions différentes qui font allusion à une méthode prescrite, c'est-à-dire un règlement, un décret ou quelque chose de ce genre.

J'étais très heureux d'entendre vos deux groupes indiquer que, dans la mesure du possible, les contraintes devraient être énoncées dans le projet de loi. Or, ce dernier comprend 75 dispositions qui autorisent les autorités à prendre des règlements ou des décrets; par conséquent, nous ne voyons qu'une partie de la loi. Nous ne savons pas vraiment à quoi va ressembler la loi définitive. Donc, comment est-ce qu'on peut s'attendre à ce que nous appuyions un projet de loi qui n'est pas complet? Pour l'instant, nous n'avons vu que 60 p. 100 des dispositions.

Cela me rappelle un peu l'Accord de Charlottetown. Ce document était à ce point vague qu'on nous demandait en fin de compte d'accepter quelque chose sans savoir quoi. Ne pensez-vous pas qu'on nous demande de faire la même chose ici, puisque le gouverneur en conseil, le ministère de la Justice ou le Cabinet auront le pouvoir de pratiquement doubler le projet de loi? N'y voyez-vous pas un risque ou un problème?

.1715

Le président: Maintenant votre question est complète.

M. Pinx: Je crois que l'Association du Barreau a exprimé sa position dans son mémoire, à savoir, en bref, qu'il convient de donner le plus de précisions possible dans la loi.

M. Ramsay: Et pourtant vous appuyez toujours le projet de loi.

M. Pinx: Nous espérons, en fait, que le comité fera des recommandations pertinentes et que le Parlement finira par nous écouter et par suivre nos recommandations. C'est pourquoi nous ne sommes pas partis du principe que le projet de loi serait adopté sous son libellé actuel. Nous espérons en fait qu'après nous avoir entendus, nous et les autres témoins, on estimera que certaines préoccupations sont fondées...

M. Ramsay: Je crois que c'est juste.

M. Pinx: ...et que le Parlement a certaines questions à examiner et régler.

M. Wappel: Ma question s'adresse à l'Association du Barreau canadien. À la page 16 de votre mémoire, vous recommandez que les délits mineurs soient sanctionnés uniquement par procédure sommaire. Les articles que vous citez font tous partie de la future partie III du Code criminel.

Pourriez-vous examiner l'article 105, à la page 44 du projet de loi. Vous constaterez qu'il concerne les peines, pour 12 infractions à la Loi sur les armes à feu ainsi que d'autres infractions qui n'ont pas encore été définies parce qu'elles le seront par voie de règlement. Ces infractions actuelles et futures, qui ne sont pas encore déterminées, seront passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de cinq ans ou punissables par procédure sommaire.

J'ai trois questions à vous poser. Avez-vous examiné l'article 105? Dans ce cas, considérez-vous qu'il s'agit d'infractions mineures en ce qui concerne les articles énumérés? Dans l'affirmative, recommanderiez-vous de supprimer le paragraphe 105(a)?

M. Heintzman: Nous avons essayé d'adopter un point de vue global en disant qu'il faut considérer les délits mineurs comme des infractions punissables par procédure sommaire. Nous sommes certains que les Canadiens respecteront la loi et que par conséquent la procédure sommaire suffira pour les délits relativement mineurs.

Nous n'avons pas procédé à une analyse systématique de tous les articles, monsieur Wappel. M. Pinx peut certainement donner des précisions, mais je ne pense pas que nous ayons examiné chaque disposition pour déterminer quels délits sont mineurs et lesquels ne le sont pas. Nous estimons que c'est votre tâche.

Nous venons de vous signaler que nous estimons qu'il ne faut pas imposer de peines minimales. Il ne devrait pas y avoir de délits considérés uniquement comme actes criminels. On devrait avoir des délits qui sont à la fois criminels et punissables par procédure sommaire. Les délits qui sont relativement mineurs devraient être considérés comme des infractions punissables par procédure sommaire. Nous croyons qu'ainsi la population serait plus favorable au projet de loi.

M. Wappel: J'apprécie la réponse. Nous essayons en fait d'obtenir de l'aide et des conseils et à qui d'autre pourrait-on s'adresser qu'à des avocats pour rédiger les projets de loi?

Vous avez, par exemple, cité l'article 91 qui fait de la possession d'une arme à feu sans le permis nécessaire ou sans le certificat d'enregistrement un délit mineur punissable par procédure sommaire. L'article 102 concerne les fausses déclarations, l'article 103 la falsification d'un permis et l'article 104, la possession non autorisée de munitions. Êtes-vous d'accord que les infractions à ces trois articles seraient des délits mineurs et analogues à ceux que vous avez cités?

M. Heintzman: Je pense qu'il faut examiner chaque article séparément. Celui qui nous préoccupe le plus est l'article 91 concernant la possession sans permis. Si vous décidez que c'est cela qui sera l'infraction de référence, vous voudrez peut-être prévoir une peine plus sévère. Mais à notre avis, certaines des peines minimales prévues pour une rédicive sont trop sévères.

.1720

À mon avis, il s'agit là d'une question législative. Notre rôle est d'attirer votre attention sur les éventuelles difficultés, et de vous laisser le soin de trouver une solution.

M. Wappel: Merci beaucoup.

[Français]

M. Langlois: Tout d'abord, monsieur le président, j'ai déposé une motion lundi afin que nous réentendions les chefs des Premières nations, étant donné qu'ils n'avaient eu droit qu'à une audition de cinq minutes par parti politique, ce qui me semblait nettement insuffisant eu égard aux préoccupations que les chefs autochtones ont soulevées. Je vous demande si nous pouvons disposer de cette motion aujourd'hui.

Le président: Où est mon greffier? Je reviendrai à cette motion immédiatement après les dernières questions. Avez-vous une question?

M. Langlois: Oui. Je vais l'adresser au Barreau du Québec et à l'Association du Barreau canadien.

Vous avez soulevé des points importants dans vos mémoires respectifs. Si je comprends bien, vous appuyez le projet de loi tel qu'il a été déposé en deuxième lecture. Si ce Comité devait ne pas tenir compte des amendements que vous suggérez ou de la majeure partie de ceux-ci, maintiendriez-vous votre appui au projet de loi tel que libellé en deuxième lecture? Votre appui est-il conditionnel aux amendements que vous nous suggérez d'apporter?

Me Picard: J'imagine que tout projet de loi peut être bonifié. Je pense que c'est une question hypothétique, parce que je ne peux pas croire que tout cet exercice de consultation ne fera pas en sorte que le projet de loi ne sera pas bonifié. Nous espérons, évidemment, qu'il y aura des amendements pour bonifier le projet de loi. C'est toujours le cas. Maintenant, est-ce que notre appui dépend de ce qui serait là ou de ce qui n'y serait pas? Je ne peux pas répondre à cette question noir sur blanc.

M. Langlois: Lorsque vous dites, maître Picard, que c'est une question hypothétique et que vous préférez ne pas répondre à une question hypothétique, il vous semble tout à fait invraisemblable qu'un projet de loi qui comporte tellement d'erreurs ne puisse pas être amélioré.

Me Picard: Ce projet de loi nous paraît important et nécessaire, et nous espérons qu'il sera bonifié pour que les éléments dont nous avons parlé soient corrigés et que nous puissions y adhérer sans aucune arrière-pensée.

[Traduction]

M. Heintzman: À mon avis, c'est tout à fait la bonne réponse de la part d'avocats, car rappelez-vous que nous ne sommes pas législateurs. Vous nous avez demandé de nous prononcer sur un certain nombre de questions d'ordre juridique, et nous avons fait de notre mieux pour vous fournir des réponses satisfaisantes à ce sujet.

Le président: J'aimerais vous remercier infiniment de votre contribution.

J'ai demandé aux membres du Comité de rester quelques minutes afin que je puisse répondre à la question de procédure soulevée par M. Langlois.

Je voudrais donc remercier les représentants de l'Association du Barreau canadien...

[Français]

et le Barreau du Québec pour leurs présentations de cet après-midi. Vous avez fait des recommandations très spécifiques qui seront très utiles.

[Traduction]

Dans de nombreux cas, vos propositions étaient complémentaires, et ces dernières seront certainement extrêmement utiles au Comité. D'ailleurs, le ministre nous a demandé de trouver des solutions de rechange, surtout pour les dispositions relatives à l'inspection. Il reconnaît qu'elles ne sont pas optimales, et il a donc demandé au Comité de trouver quelque chose de plus acceptable. Je pense que vous nous avez beaucoup aidés, non seulement pour cette question mais pour d'autres aussi, et je tiens à vous en remercier.

Lundi après-midi, lorsque le Comité a reçu les témoignages des représentant de l'Assemblée des Premières nations, M. Langlois a proposé une motion - et je vous préviens que là, je vais devoir me fier à ma mémoire; c'est justement là le problème - demandant au Comité d'organiser une autre réunion, puisque nous n'avons pas eu assez de temps pour poser autant de questions aux représentants de l'Assemblée des Premières nations que nous l'aurions souhaité.

.1725

Aux termes du règlement, il n'est pas nécessaire de présenter une motion par écrit. Le plus souvent, nous encourageons les députés à le faire, mais maintenant, j'ai un petit problème. Vu le retard qui existe dans la rédaction du procès-verbal, je n'ai plus la formulation exacte de la motion de M. Langlois, et ce dernier n'a pas non plus présenté de motion écrite au greffier.

Nous pouvons certainement régler cette question aujourd'hui. Si M. Langlois le souhaite, il peut lui-même mettre sa motion par écrit. Je ne sais pas s'il se souvient ou non de la formulation exacte. Je suis vraiment désolé, mais nous aurions dû recevoir le procès-verbal depuis neuf jours déjà.

[Français]

Si vous écrivez exactement ce que vous avez dit ce jour-là, nous pourrons décider ce soir.

M. Langlois: Je vais le dire lentement. Monsieur le président, je propose que l'Assemblée des Premières nations, qui a comparu devant nous lundi dernier, soit entendue à nouveau afin qu'elle puisse compléter son audience, et ce avant que le Comité n'entreprenne l'étude du projet de loi article par article.

[Traduction]

Le président: Nous allons donc traiter de votre motion ce soir.

[Français]

Pouvez-vous nous confirmer que c'est bien exact? Je vais demander au greffier de lire la motion pour que vous puissiez nous confirmer qu'elle est exacte.

Le greffier du Comité: Que l'Assemblée des Premières nations soit réinvitée devant le Comité afin de poursuivre sa comparution avant que le Comité ne s'engage dans l'examen article par article.

M. Langlois: C'est exact, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Très bien. Quarante-huit heures se sont déjà écoulées.

M. Wappel: Monsieur le président, étant donné qu'il s'agit d'une motion importante et qu'il ne reste plus beaucoup de membres du Comité, ne serait-il pas possible de l'aborder demain matin, quand tous les députés seront présents?

Le président: Nous n'allons pas en discuter tout de suite; c'est pour ce soir.

M. Wappel: Oui, j'en suis conscient. Je propose simplement que nous l'examinions demain matin.

Le président: Nous pourrions le faire si M. Langlois est d'accord, car il a le droit d'exiger qu'on règle la question après 48 heures, c'est-à-dire ce soir.

M. Wappel: Je vois.

Le président: S'il veut...

[Français]

On a demandé si vous préfériez que nous disposions de la motion demain matin ou ce soir.

M. Langlois: Si cela peut accommoder les membres du Comité, je suis tout à fait prêt à donner mon consentement pour que nous en disposions demain matin.

[Traduction]

Le président: Le seule problème, c'est que nous avons prévu recevoir, à raison de cinq minutes par personne, toute une série de députés. Il faudrait donc le faire à la fin de la matinée, car si nous changeons notre programme, nous allons automatiquement éliminer un certain nombre de députés... Il va donc falloir le faire à la fin de la matinée.

[Français]

Très bien. Ce sera à la fin de la matinée de demain. Merci.

La séance est levée.

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