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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 20 novembre 1995

.1045

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Nous avons le plaisir de recevoir l'honorable Allan Rock, ministre de la Justice et procureur général du Canada. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous entreprenons la révision globale de la Loi sur les jeunes contrevenants, notamment les questions touchant la criminalité chez les jeunes, le système judiciaire pour la jeunesse et l'effet et la mise en application de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Monsieur le ministre, vous avez la parole.

L'honorable Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Je voudrais tout d'abord remercier le comité d'avoir retardé de quelques instants le début de la séance de ce matin car j'avais d'autres engagements. Nous pourrons peut-être rattraper ce temps perdu à la fin de la réunion, si cela vous convient.

Au nom du gouvernement, je tiens à remercier le comité d'avoir entrepris cette étude importante et difficile. La révision globale de la Loi sur les jeunes contrevenants, que vous amorcez aujourd'hui, représente la deuxième étape de la stratégie du gouvernement visant à améliorer et renforcer le système judiciaire canadien pour la jeunesse.

[Français]

Comme vous le savez, la première phase a été consacrée aux modifications contenues dans le projet de loi C-37 qui a été adopté par la Chambre des communes et le Sénat et qui entrera en vigueur dans 11 jours.

Au mois de juin 1994, lorsque j'ai déposé le projet de loi C-37 devant la Chambre des communes, j'ai écrit à ce comité afin de lui demander d'entreprendre une étude en profondeur de la loi telle que modifiée par le projet de loi C-37. Vous commencez aujourd'hui ce travail important.

[Traduction]

Je n'ai pas changé d'avis depuis la lettre que j'ai adressée le 2 juin dernier au président du comité de l'époque, à savoir que le gouvernement est conscient de la nécessité de modifier le système judiciaire pour les jeunes, et le projet de loi C-37 représente des modifications importantes qui s'imposaient. Toutefois, nous avons consolidé la LJC et l'avons rendue plus efficace grâce à un examen de portée plus générale.

Inutile de dire aux membres du comité qui reviennent à peine de leurs circonscriptions que la Loi sur les jeunes contrevenants est une mesure législative très controversée. Certains s'interrogent sur la question de savoir si c'est bien ce qui convient le mieux à la justice pour les adolescents au Canada dans les années quatre-vingt-dix et au-delà. Il importe que nous tenions compte des préoccupations du public au sujet de cette loi et de la criminalité chez les jeunes en général.

Afin de restaurer la confiance aux Canadiens dans leur système judiciaire pour la jeunesse, votre comité devrait entreprendre un examen très public, très approfondi et très ouvert de la loi et de ses dispositions. Lorsque vous aurez terminé votre travail, je vous invite respectueusement à faire un rapport exhaustif sur les faits réels et, si possible, à aider le gouvernement à comprendre ce que le public pense de la LJC et de la criminalité chez les jeunes en général.

Étant donné le très vif intérêt que le public porte aux crimes violents commis par des jeunes contrevenants, il est parfois facile de perdre de vue l'objet de notre discussion. C'est pourquoi je voudrais tout d'abord replacer les questions liées au système judiciaire pour la jeunesse dans leur contexte.

La grande majorité des jeunes Canadiens sont des gens sérieux, productifs et responsables qui contribuent déjà à de nombreux égards à notre société. La grande majorité d'entre eux respectent leur famille, travaillent avec assiduité, qu'il s'agisse de leurs études ou de leur profession, et espèrent vivre plus tard dans un pays prospère. Ces jeunes Canadiens constituent notre avenir et nous devons prendre leurs intérêts très à coeur et les respecter.

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Il n'y a qu'une faible proportion de jeunes Canadiens qui est confrontée au système de justice pénale, et une faible proportion encore qui se livre à des crimes avec violence. À mon avis, nous ne devons pas oublier cet état de chose lorsque nous discutons de questions liées à la jeunesse et au système judiciaire pertinent.

Permettez-moi de dire au comité que, en essayant d'adopter un système judiciaire adapté aux adolescents, nous devons poursuivre un double objectif.

Tout d'abord, l'obligation de rendre compte, dans la mesure où les jeunes, à l'instar de tous les Canadiens, sont responsables de leurs actes et doivent comprendre qu'ils devront en subir les conséquences, le cas échéant. L'obligation de rendre compte donne également un sentiment de justice aux victimes des actes criminels. Elle constitue un facteur de dissuasion des cas de récidive et prévoit la prise de mesures de prévention.

Notre deuxième objectif doit être l'efficacité, à savoir l'adoption d'une stratégie intégrée à laquelle participent les tribunaux et les autres ressources de notre société, de façon à restreindre le nombre d'actes criminels perpétrés par les jeunes, tout en garantissant la sécurité des personnes et du public en général. Nous devons mettre l'accent sur ces deux objectifs, à mon sens, tout en étant conscients de leur différence.

L'examen entrepris par le comité doit viser avant tout à établir la meilleure façon d'atteindre ces deux objectifs et de redonner confiance aux Canadiens dans le système judiciaire pour la jeunesse. Si l'on veut obliger les jeunes à rendre compte de leurs actes, il faut adopter des mesures sévères pour punir les actes très graves; toutefois, il nous faut également comprendre que cela ne suffit pas pour atteindre l'objectif de la reddition de comptes ou de l'efficacité de notre système. Le recours aux tribunaux est de toute évidence encore indispensable.

À l'intervention des tribunaux doit s'ajouter un système plus vaste qui tienne compte de l'importance de nombreuses autres ressources de la société pour garantir la sécurité de ses membres. Nous devons mettre au point un système qui fasse appel aux ressources communautaires et les intègre dans le système des tribunaux. Nous ne pouvons plus demander aux tribunaux de trouver seuls des solutions qui seront mieux adaptées grâce à l'appui des collectivités.

Il nous faut compléter notre système judiciaire officiel par un train de mesures prises en dehors des tribunaux et qui obligent également les jeunes à rendre compte du tort qu'ils ont fait aux victimes et à la société en général. Il peut s'agir de ressources d'importance cruciale qui permettront d'atteindre les objectifs non seulement de la justice et de la reddition de comptes, mais également ceux de la sécurité.

Au cours de son étude, le comité pourra se pencher sur l'historique du système judiciaire pour les jeunes au Canada. Il apprendra peut-être que, en 1908, la Loi sur les jeunes délinquants a été adoptée, mais que plus les années passaient et plus on la critiquait. On a surtout reproché à cette loi de ne pas responsabiliser les jeunes en droit pénal.

Le comité apprendra peut-être que, au cours des 20 années qui ont précédé son adoption par la Chambre des communes, la Loi sur les jeunes contrevenants a fait l'objet de nombreuses études. Le comité apprendra que, en 1982, le projet de loi a été adopté à l'unanimité par tous les partis à la Chambre des communes.

En dépit des 20 années de recherche et de l'appui unanime de tous les partis de la Chambre lors de l'adoption du projet de loi, il a fallu au cours des 11 dernières années adopter des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, surtout pour y inclure les cas de crimes avec violence.

En juin dernier, le gouvernement a proposé le projet de loi C-37 qui a été adopté depuis par la Chambre et le Sénat. Ce projet de loi mise sur la politique générale de ce gouvernement en vue de faire une distinction très nette entre les crimes de violence et les autres. Il va sans dire que nous avons essayé d'élargir la portée de la loi en vue d'obliger les adolescents coupables de crimes très graves de rendre compte de leurs actes, de donner plus de pouvoirs au tribunal pour rendre des décisions mieux adaptées aux auteurs de crimes violents graves et pour accroître l'efficacité du système à contrôler ces éléments.

Le comité se rappellera sans doute que, parmi les modifications prévues dans le projet de loi C-37, les jeunes de 16 et 17 ans accusés de meurtre au premier et au second degré, de tentative de meurtre, d'homicide ou d'agression sexuelle grave seront jugés comme des adultes, à moins de convaincre le tribunal que les peines d'emprisonnement prévues par les tribunaux pour adolescents permettront d'atteindre les objectifs de protection du public et de réinsertion sociale.

Les peines imposées aux auteurs de meurtre seront accrues dans le système judiciaire pour les jeunes. Pour les meurtres au premier degré, il y aura une peine maximale de 10 ans comportant jusqu'à 6 ans de garde en milieu fermé, les autres étant purgés dans la collectivité, sous étroite surveillance.

En outre, les adolescents de 16 et 17 ans renvoyés devant un tribunal pour adultes et condamnés pour meurtre devront purger une peine plus longue avant d'avoir droit à une libération conditionnelle.

L'échange d'informations sera autorisé entre les corps policiers, les éducateurs et les autres professionnels s'occupant de jeunes contrevenants, en vue de garantir le respect des ordonnances du tribunal et la protection du public. Il est également prévu de divulguer certains renseignements à certains membres du public lorsqu'un tribunal est convaincu que cette mesure est indispensable pour garantir sa sécurité.

.1055

La nouvelle loi prévoit une utilisation plus souple des dossiers des tribunaux pour adolescents, et notamment la tenue des dossiers pour une période indéfinie dans le cas de crimes plus graves.

Pour les adolescents qui sortent du lieu de garde, la mise en liberté sous condition s'appliquera désormais à toutes les infractions, ce qui permettra la réincarcération immédiate en cas de violation des conditions.

Quant à l'orientation à suivre, monsieur le président, je ne voudrais pas me montrer présomptueux en proposant au comité d'éventuelles modifications à adopter à l'avenir. Le comité entreprend à peine son étude importante en vue de déterminer les modifications souhaitables. Si vous me le permettez, j'aimerais cerner certaines orientations, possibilités et solutions sur lesquelles le comité jugera bon de se pencher.

Vous voudrez disposer au départ d'une bonne base factuelle. Le ministère de la Justice fera son possible pour communiquer au comité et à ses membres la documentation et l'information de base dont ils auront besoin. Le comité s'intéressera sûrement aux statistiques sur l'étendue et la nature des crimes commis par les jeunes, aux tendances de province à province ainsi qu'aux coûts de l'incarcération et aux solutions de rechange.

Dans le cadre de la discussion de ce matin ainsi que de votre travail au cours des semaines à venir, il serait important que vous fassiez la distinction entre deux catégories très différentes de crimes: ceux qui comportent de la violence et ceux qui n'en comportent pas.

Il y a passablement d'inquiétude au sein du public au sujet des crimes comportant de la violence de façon générale, et de ceux qui impliquent de jeunes contrevenants en particulier. En tant que père de jeunes enfants vivant dans une collectivité urbaine, je comprends cette inquiétude et la nécessité d'agir. La priorité doit continuer d'être accordée à la protection du public dans le cadre du système de justice pénale de façon générale, lequel inclut le système de justice pour les jeunes.

Nous devons examiner les raisons pour lesquelles le public ne fait pas confiance au système de justice pour les jeunes. Ce système doit être crédible aux yeux du public. J'invite le comité à se pencher sur la question de la perception du public et à faire des suggestions sur la façon dont le système de justice pour les jeunes peut être amélioré sous ce rapport.

Nous devons nous demander si, fondamentalement, la loi actuelle sur les jeunes contrevenants traite d'une façon adéquate les contrevenants qui commettent des crimes graves. Est-elle efficace? Amène-t-elle les contrevenants à prendre suffisamment leurs responsabilités? Combat-elle adéquatement le comportement criminel violent? Y a-t-il d'autres infractions comportant de la violence, en plus du meurtre, à l'égard desquelles nous devrions adopter des approches différentes pour ce qui est des jeunes gardés à l'intérieur du système de justice pour les jeunes?

Le projet de loi C-37 a haussé la peine maximum pour le meurtre, mais y a-t-il d'autres infractions pour lesquelles la peine maximale de trois ans n'est pas adéquate? Y a-t-il d'autres infractions auxquelles les dispositions sur le renvoi pourraient être appliquées? Devrions-nous examiner la possibilité d'un âge minimum plus bas lorsque des enfants de moins de 12 ans sont impliqués dans des crimes comportant une extrême violence? Les enfants de moins de 12 ans devraient-ils être inclus dans la Loi sur les jeunes contrevenants? Ou devrions-nous essayer des approches différentes, comme en arriver avec les provinces à un protocole pour les enfants de 10 et 11 ans à l'intérieur du système d'aide sociale à l'enfance qui concilie la notion de répondre aux besoins de ces enfants et celle de protéger le public?

Le comité entendra des experts, des victimes, des jeunes. J'espère que vous aurez l'occasion de visiter des centres de détention pour que vous vous rendiez compte par vous-mêmes de la portée et des dimensions du sujet.

Le comité doit sûrement se poser ces questions dans le cadre de son étude sur la violence chez les jeunes.

La deuxième grande catégorie de crimes est la catégorie des crimes ne comportant pas de violence. Il m'apparaît important de se rappeler que la grande majorité des crimes faisant l'objet de procédures en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants ne comporte pas de violence; même si les contrevenants qui commettent des crimes graves reçoivent beaucoup d'attention, il nous faut davantage innover dans le cas des jeunes contrevenants qui ne s'adonnent pas à la violence. D'importants facteurs sont à considérer.

J'invite le comité à prendre connaissance de la recherche sur le sujet. Je crois comprendre que vous avez un exemplaire du rapport commandé par le ministère de la Justice et préparé par le professeur Anthony Doob ainsi que d'autres personnes; il fait le point sur ce que nous avons appris jusqu'à présent.

M. Steinhauer de l'Hôpital pour enfants, qui a témoigné au sujet du projet de loi C-37, a également de l'information, comme le groupe de travail fédéral-provincial-territorial qui examine la question.

.1100

Monsieur le président, permettez-moi d'émettre un certain nombre d'idées relativement aux contrevenants qui ne commettent pas de crimes comportant de la violence. Elles pourraient être utiles au comité. D'abord, y a-t-il des moyens efficaces de réduire le recours au placement sous garde pour ces contrevenants? Cette préoccupation ne devrait-elle pas être au coeur de la démarche?

Le taux de jeunes condamnés au placement sous garde au Canada est beaucoup plus élevé que dans de nombreux autres pays, donc l'Angleterre, le pays de Galles, l'Écosse et plusieurs États américains. En 1991, notre taux de jeunes condamnés au placement sous garde était de 447 par100 000. En Angleterre et au pays de Galles, il était de 69. En Écosse de 86. Les gouvernements canadiens, collectivement, dépensent plus de 250 millions de dollars annuellement pour enfermer de jeunes contrevenants dont les crimes les plus graves ne comportaient pas de violence. Cinq jeunes contrevenants sur six sont placés sous garde pour des infractions ne comportant pas de violence.

Y a-t-il de meilleures façons au sein de notre collectivité? Est-il possible de libérer des ressources financières qui pourront être mieux utilisées au profit des jeunes, entre autres, au titre de la réinsertion sociale des contrevenants violents sous garde?

Monsieur le président, placer un jeune sous garde en milieu fermé coûte plus de 100 000 $ annuellement dans 7 juridictions canadiennes et jusqu'à 300 000 $ annuellement dans les territoires. C'est un montant astronomique. En ce qui concerne les jeunes candidats au placement sous garde, il convient de donner beaucoup plus d'options au juge, des options qui assurent une surveillance et une intervention plus efficaces que ce que le nombre de cas des délégués à la jeunesse et des agents de probation nous a permis jusqu'ici.

[Français]

À titre d'exemple, mentionnons le Programme de mesures probatoires intensif pour adolescents contrevenants, mené par le Centre de protection de l'enfance et de la jeunesse à Québec. Il s'agit d'un projet pilote destiné aux jeunes de 15 à 18 ans dont le casier judiciaire montre que le risque de récidive est élevé.

L'objectif consiste à instaurer au sein de la collectivité un régime d'intervention intermédiaire efficace et rentable se situant à mi-chemin entre la garde en milieu ouvert et la mise en liberté surveillée. Le soutien est assuré par les membres de la famille, les autorités scolaires, la police et les groupes communautaires de loisirs.

Pendant les deux ans où le projet a été mené, le taux de récidive chez les participants a été de44 p. 100 comparativement à 77 p. 100 chez les membres du groupe témoin.

[Traduction]

Deuxièmement, dans le cas des comportements moins graves, comment pouvons-nous amener les jeunes à prendre leurs responsabilités en dehors du processus judiciaire formel? Le fait de pouvoir traiter plus de jeunes complètement en dehors du système formel et d'avoir recours à des solutions de rechange devrait permettre une meilleure utilisation du système judiciaire pour les crimes graves et encourager la participation des parents et des collectivités.

Monsieur le président, la notion de «solutions de remplacement» ne signifie pas que notre attitude face aux jeunes contrevenants manquera de fermeté. Très souvent, elles en exigent plus des jeunes contrevenants. Travailler pour rembourser les victimes exige plus des jeunes contrevenants que beaucoup des peines imposées par les tribunaux, entre autres, les peines comportant une période de probation ou le placement sous garde pour une brève durée.

Il existe à Ottawa un programme appelé programme de médiation avant procès dans les causes criminelles. Pour des infractions moins graves comme le vol en dessous d'un certain montant ou la possession de drogues en dessous d'une certaine quantité, les jeunes ne passent pas par le système judiciaire normal. Travaillant auprès des victimes et leurs familles, ils sont plutôt sensibilisés directement aux conséquences de leurs actes. C'est beaucoup plus formateur que de se présenter passivement devant un tribunal ou même de servir une brève peine de placement sous garde.

.1105

Dans quelle mesure sommes-nous prêts à traiter les jeunes contrevenants en dehors du système traditionnel au Canada? Il y a des variations importantes. Le taux de mises en accusation au Québec est la moitié de celui de l'Ontario; malgré tout, rien n'indique que le taux de criminalité ou de récidivisme au Québec soit plus élevé que dans la province voisine.

Il y a également des variations appréciables chez les autres pays. L'Angleterre et le pays de Galles traitent 56 p. 100 de leurs cas en dehors du système judiciaire formel pour ce qui est de leurs jeunes contrevenants. En Nouvelle-Zélande, c'est 61 p. 100. En Écosse, 59 p. 100. Dans certains États américains, le taux peut atteindre 50 p. 100. Nous venons loin derrière à cet égard.

Troisièmement, que pouvons-nous faire pour amener davantage de jeunes ayant commis des crimes à faire acte de restitution directement auprès de leurs victimes? Au chapitre de l'acceptation des responsabilités, nous aurions avantage à revoir attentivement le rapport Jasmin de 1995 sur le système de justice au Québec; un des thèmes principaux de ce rapport est l'amélioration des mesures prises à l'égard des victimes.

Quatrièmement, comment pouvons-nous amener les victimes, les collectivités et les parents à participer au processus de décision de façon à accroître l'effet de dissuasion chez les contrevenants à l'avenir?

Ici encore, l'expérience montre que le fait d'être tenus responsables de leurs actes vis-à-vis de leurs victimes, des familles de leurs victimes, de leurs propres familles et de leurs pairs est considéré comme beaucoup plus exigeant par les contrevenants que de comparaître de façon anonyme devant un tribunal ou d'être condamnés à un bref placement sous garde.

C'est également une façon de répondre à beaucoup de critiques au sujet du système actuel. Les groupes d'aide aux victimes se multiplient au pays parce que les victimes se sentent délaissées par le système de justice pénale. Elles ont l'impression d'être mis à l'écart.

N'avons-nous pas l'occasion de réaliser notre double objectif, de rendre le système de justice pour les jeunes moins coûteux et plus efficace tout en répondant aux préoccupations des victimes en leur permettant de participer plus directement à la peine imposée aux jeunes reconnus coupables de crimes ne comportant pas de violence?

Il y a environ un an, un homme est venu dans mon bureau de comté pour se plaindre de la Loi sur les jeunes contrevenants. On avait cambriolé sa maison pendant son absence. Le jeune qui avait commis le vol par effraction a été condamné par la cour à une période de détention; il devait aussi écrire une lettre d'excuses à la victime. La victime a dit qu'il voulait connaître le nom de ce jeune pour pouvoir communiquer avec lui et lui dire quels avaient été les effets de son crime sur lui.

Voici ce qui s'était passé. Cet homme avait un coffret à bijoux sur la commode de sa chambre. Le jeune voleur a pris les bijoux. Il y avait aussi dans ce coffret une pièce d'un cent que le père de cet homme avait gardée dans sa poche toute sa vie et qu'il avait léguée à son fils à sa mort. Son fils a gardé la pièce qui avait une grande valeur sentimentale pour lui, étant un souvenir de son père.

Le jeune contrevenant avait aussi pris cette pièce d'un cent. Évidemment, elle ne valait rien pour cet adolescent, mais elle était d'une grande valeur pour l'homme qui l'avait perdue. Ce qu'il voulait, m'a-t-il dit, c'était l'occasion d'expliquer à l'adolescent l'énorme effet émotif que ce vol, qui l'avait beaucoup offusqué, avait eu sur lui.

Cela devrait être possible. Cet homme se serait senti tellement mieux si on lui avait donné la chance de rencontrer le jeune contrevenant. Ne pouvons-nous pas concevoir un système qui permette aux jeunes contrevenants de bien saisir les conséquences de leur crime de la bouche même de leur victime? Ne pouvons-nous prévoir une participation plus directe de la famille du jeune contrevenant, de la victime et des membres de la collectivité?

Je crois que oui, et je crois que nous pouvons tirer des leçons des pays qui sont parvenus à le faire.

En Nouvelle-Zélande, le système de justice pour les jeunes met à profit de nouvelles approches. Quatre-vingt-dix-sept pour cent des crimes commis par des jeunes sont réglés en dehors du système judiciaire formel. On en traite plutôt directement avec les victimes et les membres de la collectivité.

Depuis que ce changement a été apporté, il y a six ans, le taux de criminalité et de récidive chez les jeunes a décliné. On a donc fermé 21 des 24 établissements de garde en milieu fermé pour adolescents dans ce pays.

Il est intéressant de noter que cette initiative néo-zélandaise s'inspirait des méthodes des Maoris de ce pays. Nous pouvons donc aussi nous inspirer du modèle autochtone.

Monsieur le président, j'en arrive à la dernière partie de mon exposé car il me tarde de répondre aux questions des membres du comité. J'aborderai maintenant la prévention du crime et les liens et le partenariat qui doivent exister à ce chapitre si nous ne voulons pas considérer isolément les tribunaux, le juge et la police en ce qui concerne la justice, la criminalité et les adolescents.

[Français]

Nous devons nous demander comment renforcer les liens entre le système de justice juvénile et d'autres systèmes responsables des enfants et des adolescents et comment assurer une meilleure prévention du crime.

.1110

Je sais que presque tous les témoins qui ont comparu devant le comité sur le projet de loi C-37 ont proposé des mesures concrètes en matière de prévention du crime.

Comme vous le savez, mon collègue, l'honorable Herb Gray, et moi-même avons créé le Conseil national de prévention du crime. Le Conseil formule des recommandations au ministre responsable en matière de justice.

Le Conseil a décidé de se concentrer principalement sur la prévention du crime par le biais du développement social et a axé ses priorités sur les enfants et les adolescents.

Vous aurez l'occasion d'entendre ses représentants le 23 novembre. Ils cherchent des façons de rendre nos communautés plus sécuritaires en améliorant l'efficacité du système ainsi que l'imputabilité exigée par celui-ci.

[Traduction]

Le système de justice pénale ne peut réussir seul. Ce n'est pas grâce à ce seul système qu'on pourra vivre en toute sécurité, parce qu'il traite des effets et non pas des causes du crime. Une fois que le système judiciaire s'enclenche, les gens sont déjà en difficulté, ils ont déjà commis un crime, les accusations ont déjà été portées.

Certains présument qu'on peut améliorer la situation et rendre les rues plus sûres en augmentant simplement les peines mais cela n'est pas la seule solution. Il ne suffit pas d'envoyer davantage d'adolescents en prison. Ce n'est pas cela qui accroîtra la sécurité du public. Monsieur le président, nous avons du travail difficile à faire et des décisions difficiles à prendre, mais il faut le faire, parce que les lois seules, même meilleures, ne constituent pas la solution miracle. À long terme, la meilleure forme de protection, c'est la prévention du crime.

Je sais qu'il faut respecter le lien entre la justice sociale et la justice pénale. La sécurité dans nos rues dépend autant de l'alphabétisation que des lois, de la solidité des familles que de la longueur des peines, de l'intervention précoce que de la supervision obligatoire.

J'invite le comité à examiner les liens qui existent entre le système social et le système judiciaire, entre le système d'éducation et les familles qu'il dessert, entre les travailleurs communautaires, les professionnels de la santé, la police et les jeunes. J'attire votre attention sur les exemples qu'on trouve dans les provinces.

Récemment, pendant une visite à Winnipeg, j'ai pu voir comment fonctionne le programme de participation des jeunes, un programme de rechange pour 15 jeunes contrevenants à haut risque qui sont en probation. Ce programme répond à leurs besoins particuliers en mettant l'accent sur l'acquisition de compétences et la formation professionnelle grâce à un système de soutien multidisciplinaire incluant des agents de probation, des psychologues, des professionnels de la santé mentale et les services communautaires autochtones.

À Edmonton, l'organisation cadre des «Des Partenaires pour la jeunesse» regroupe plus de30 organismes municipaux, provinciaux et fédéraux qui collaborent à un guichet unique pour aider la police qui doit s'occuper des jeunes en difficulté ou ayant commis un crime et pour lesquels il serait plus efficace de ne pas avoir à comparaître devant un juge et des avocats.

L'initiative sur la sécurité communautaire du Service jeunesse Canada est un autre exemple de projet dans le cadre duquel les adolescents collaborent avec des policiers pour répondre aux besoins des jeunes qui risquent le plus de commettre des crimes.

Avant de terminer, monsieur le président, j'aborderai brièvement le partage des coûts. Les délibérations que votre comité amorce aujourd'hui revêtiront une grande importance puisqu'elles constitueront la base des ententes de partage des coûts qui seront renégociées par les gouvernements fédéral et provinciaux.

Actuellement, le gouvernement fédéral verse aux provinces des sommes pour financer le système de justice juvénile. Presque tout cet argent est affecté à la détention. Nous voulons renégocier ces ententes de sorte qu'un jour, presque tous les fonds fédéraux servent aux mesures de remplacement comme celles que j'ai décrites. Nous aurons de meilleurs résultats, particulièrement avec les jeunes contrevenants non violents, il y aura moins de récidives et les coûts baisseront si nous adoptons cette approche. Je compte sur votre comité pour qu'il m'appuie dans cette initiative et j'ai hâte de travailler avec les membres du comité au cours des mois qui viennent à la réalisation de cet important objectif.

Merci beaucoup de votre attention.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Il y aura maintenant une période de questions et de remarques.

[Français]

Monsieur Deshaies.

M. Deshaies (Abitibi): Monsieur le ministre, je voudrais tout d'abord excuser le retard de Mme Venne qui, malheureusement, est prise dans un bouchon à Montréal. Elle devrait arriver sous peu.

.1115

J'ai deux courtes questions. Premièrement, vous parlez beaucoup de réinsertion; vous faites référence également à la diminution de coûts et à l'augmentation de bénéfices qui découlent de la réinsertion ou des solutions de remplacement. En regard de cette philosophie, comment pensez-vous pouvoir criminaliser davantage les jeunes contrevenants violents responsables de meurtres ou d'agressions physiques graves? Et quelle serait l'orientation que devrait prendre le comité face à ce genre de crimes?

M. Rock: Monsieur le président, est-ce que la question concerne seulement les crimes violents?

M. Deshaies: Non.

M. Rock: Pour ce qui est de mon approche face aux différentes mesures possibles et comme en font foi mes commentaires de ce matin, je crois fermement qu'il est possible de développer au Canada une façon de réagir aux crimes des jeunes contrevenants, particulièrement aux crimes non violents.

J'ai fait référence au rapport Jasmin préparé par le gouvernement du Québec cette année. Ce rapport établit le défi de responsabiliser les jeunes contrevenants par des moyens other than simply imprisonment.

Il est possible d'instaurer, en dehors du processus officiel de la cour, un système pour les victimes et leurs familles, de même que pour les familles des jeunes contrevenants, un système dont les résultats seraient plus tangibles.

[Traduction]

Je suis fermement convaincu que nous pouvons tirer des leçons de ce qui a été fait à l'étranger, notamment dans certains États américains. Nous pouvons adopter des approches différentes de celles du passé. Trente pour cent des jeunes contrevenants se voient imposer une peine prévoyant le placement sous garde. Cela signifie qu'ils se retrouvent dans un centre de détention ou dans un autre établissement où ils sont placés sous garde, sous supervision. Or, 83 p. 100 de ces jeunes sont condamnés pour des crimes qui ne sont pas violents.

Cela nous coûte une fortune et donne de piètres résultats. Comme le bon sens nous le dicte, si nous pouvons trouver une façon de dépenser moins, ou même de dépenser les mêmes cents plus efficacement, avec de meilleurs résultats et moins de récidives, nous devrions certainement l'examiner. C'est ce que j'encourage le comité à faire.

J'espère avoir répondu à la question du député.

[Français]

M. Deshaies: Est-ce que vous pouvez, monsieur le ministre, faire le parallèle entre votre orientation et la Loi sur les jeunes contrevenants au Québec? Est-ce que vous voulez une politique ou une loi qui serait plus restrictive, ou est-ce que le Québec utilise moins de méthodes de réinsertion ou de méthodes de remplacement que vous ne voulez en utiliser?

M. Rock: Je pense que, de façon générale, le Québec possède actuellement un système plus efficace pour créer des liens entre le système judiciaire et les autres systèmes dans la société. Il est, dans une certaine mesure, un modèle canadien d'intégration des services disponibles.

[Traduction]

Dans mes remarques liminaires, j'ai indiqué que le nombre d'accusations portées contre des jeunes au Québec est de beaucoup inférieur à celui de l'Ontario. Personne ne prétend pour autant que la criminalité juvénile constitue un problème plus grave au Québec qu'ailleurs au pays. Au contraire, cela nous indique que les mesures prises au Québec ont porté fruits. D'ailleurs, c'est au Québec que les gens font le plus confiance au système de justice pour les jeunes. Votre comité devrait peut-être examiner l'expérience québécoise pour voir ce qu'elle peut nous enseigner.

.1120

Cela relève en grande partie des liens qui existent non seulement aux fins du système judiciaire, mais aussi au sein des services sociaux. J'ai visité le centre de détention...

[Français]

le Centre Jeunesse Montréal Cité des Prairies, à l'est de Montréal. J'y ai rencontré les directeurs et le conseil d'administration. J'y ai rencontré aussi les jeunes contrevenants. J'ai étudié l'approche, les principes de ce centre de détention.

[Traduction]

Nous y avons trouvé un système très impressionnant, bien intégré comprenant l'instruction de jeunes détenus, dont certains avaient été condamnés pour meurtre. Ils suivent un programme d'études très rigoureux de niveau secondaire. Ils peuvent compter sur une gamme complète de services de santé, y compris de santé mentale, s'ils ont besoin d'aide pendant leur incarcération. Ce qui est tout aussi important, c'est qu'il y a un suivi rigoureux. Ainsi, lorsque le Centre libère un jeune, il maintient des liens avec la famille qui l'accueille et surveille ses progrès. On s'assure que tous les efforts sont faits pour que l'adolescent ne récidive pas. Cette approche m'apparaît exemplaire et devrait nous inspirer.

En réponse à votre question, oui, j'estime que les politiques et les pratiques adoptées par le Québec sont à bien des égards exemplaires pour nous tous. Nous devrions les examiner attentivement.

Je n'ai eu aucun égard pour la personne qui m'accompagne, car je ne vous l'ai pas présentée. Mary-Anne Kirvan est avocate au ministère de la Justice, à la section qui s'occupe de la justice pour les jeunes et de la Loi sur les jeunes contrevenants. De temps à autre, je l'inviterai comme maintenant à vous fournir des réponses plus complètes compte tenu de ses vastes connaissances de la question à l'étude.

Le président: Monsieur le ministre, nous n'avons aucune objection à ce que vous l'invitiez à répondre à certaines des questions.

M. Rock: Mary-Anne Kirvan pourra peut-être vous en dire plus long au sujet du système québécois.

Me Mary-Anne Kirvan (avocate-conseil, Section de la famille, des enfants et des adolescents, ministère de la Justice): Je n'ai qu'une observation à ajouter: au début de votre question, vous avez parlé du principe de la réinsertion sociale. Le ministère a fait des suggestions en vue de modifier les comportements de bien des façons. Certaines de ces suggestions sont tout à fait conformes aux approches axées sur la réinsertion sociale qu'a adoptées le Québec.

Par exemple, la participation directe de la victime est l'élément fondamental du processus de réinsertion sociale pour bien des jeunes qui sont incarcérés pour avoir commis des crimes sérieux. Pour ceux dont l'infraction est moins grave, on envisage de faire participer la victime à la réinsertion sociale du contrevenant afin que l'adolescent comprenne bien les conséquences de son comportement. Ces propositions ne remplacent pas le processus même de la réinsertion sociale, mais viennent en complément lorsqu'on estime nécessaire de modifier le comportement sous-jacent à la perpétration d'une infraction.

Le président: Merci.

Monsieur Ramsay.

M. Ramsay (Crowfoot): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre témoignage.

J'ai quelques questions à vos poser. Vous nous avez demandé de mener cet examen décennal. En fait, il ne s'agit pas véritablement d'un examen décennal, la loi ayant été modifiée deux fois avant l'adoption du projet de loi C-37, la dernière fois, en 1992. Il me semble que cet examen a surtout pour objet de déterminer l'incidence qu'a une Loi sur les jeunes contrevenants sur les adolescents du pays qui ont des démêlés avec la justice.

Vous avez déposé le projet de loi C-37 avant que nous ne puissions amorcer notre examen approfondi de la LJC. Or, le projet de loi C-37 a modifié la loi, mais nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour en évaluer les effets. Le projet de loi C-37 a reçu la sanction royale il y a trois mois à peine.

Je dois donc vous demander - je trouve un peu frustrant de devoir examiner la Loi sur les jeunes contrevenants alors qu'elle vient d'être modifiée - pourquoi vous avez déposé le projet de loi C-37 avant l'examen décennal.

.1126

M. Rock: Je l'ai fait pour trois raisons.

Premièrement, en 1993, pendant la campagne électorale - qui me semble maintenant bien loin - le parti dont je suis membre s'est engagé à apporter des modifications précises à la loi, notamment à doubler la peine maximale pour meurtre au premier degré et à s'attaquer plus efficacement à la violence chez les jeunes. Nous avons jugé impératif de remplir cet engagement, et c'est ce que nous avons fait grâce au projet de loi C-37.

Deuxièmement, quand j'ai présenté le projet de loi C-37, je croyais et je crois encore qu'il touche et répond à des préoccupations réelles du public, qui a exigé que l'on cesse de parler pour prendre des mesures concrètes. Il y avait des préoccupations au sujet des jeunes de 16 ou 17 ans qui commettaient des crimes très violents, des agents de police qui pourraient partager des informations avec les écoles, qu'il s'agisse des directeurs ou des enseignants. Il s'agissait de dire aux jeunes capables de violence que l'on pouvait mettre en place des systèmes de sécurité. Cela n'était pas possible avant le projet de loi C-37. On voulait conserver plus longtemps les dossiers des jeunes contrevenants violents afin de pouvoir les consulter si les intéressés récidivaient une fois adultes.

Il est vrai que nous aurions pu attendre - et je sais que certains des témoins ayant comparu devant le comité ont dit que nous aurions dû attendre - mais tout bien pesé, j'ai estimé que nous devrions agir, effectuer ces changements et demander au comité d'étudier la nouvelle version de la LJC, afin que l'on puisse déterminer si des changements supplémentaires sont nécessaires.

La troisième raison, si je puis dire, est que nous sommes en train de nous positionner pour renégocier les ententes de partage des coûts avec les provinces. Le projet de loi C-37 répond en partie à cette exigence, car il stipule clairement que la détention doit être une solution de dernier recours dans les crimes non violents, et si un juge doit imposer une telle sentence, il doit donner les raisons pour lesquelles il n'a pas envisagé d'autres sanctions. Le projet de loi C-37 définit donc le cadre dans lequel nous devons renégocier le partage des coûts avec les provinces pour essayer de mettre l'accent sur des solutions de rechange à la détention en ce qui concerne les contrevenants non violents.

Monsieur Ramsay, je sais que certains auraient préféré que nous attendions tout simplement. Cette démarche a ses avantages, mais tout compte fait, nous avons conclu qu'il valait mieux tenir nos engagements, effectuer les changements nécessaires et aller dans la direction que nous voulions.

M. Ramsay: Oui, mais vous reconnaissez qu'il y a ici un paradoxe.

M. Rock: En effet.

.1130

M. Ramsay: D'une part, il semble que le ministère de la Justice ait décidé de proposer des modifications sans procéder à un examen, et vous l'avez expliqué, ne serait-ce qu'en partie, quand vous avez comparu devant nous en juin et ce matin.

En tant que comité, comment pouvons-nous évaluer l'incidence de ces amendements trois mois seulement après la sanction royale de ce projet de loi? Il semble que, d'une part, vous n'avez pas eu besoin d'un examen de la loi pour proposer des modifications et, d'autre part, vous dites que le comité doit travailler dans tous les autres domaines, y compris la partie qui a été modifiée par le projet de loi C-37 afin que vous puissiez effectuer des modifications supplémentaires.

M. Rock: S'il y a lieu, c'est-à-dire si vous pensez qu'elles sont nécessaires.

Voici ce que je dis. En fait, il est très difficile - voire impossible - d'évaluer immédiatement l'incidence des modifications apportées dans le projet de loi C-37, car on vient de les mettre en vigueur. Mais nous avons encore beaucoup à apprendre sur la loi et sur la façon dont elle a été appliquée au cours des 10 dernières années.

En plus des questions abordées dans le projet de loi C-37, il y a encore beaucoup de choses que vous devez examiner. Comme je l'ai dit ce matin, qu'en est-il des tranches d'âge? Il n'en est pas question dans le projet de loi C-37; nous avons voulu qu'elles fassent l'objet d'un examen. La Loi sur les jeunes contrevenants devrait-elle viser les personnes âgées de 16 et 17 ans? Devrions-nous faire en sorte que les dispositions relatives au renvoi s'appliquent à une vaste gamme de crimes comme on le prévoit dans le projet de loi C-37? Qu'en est-il des jeunes âgés de 10 et 11 ans? Il n'en est pas question dans le projet de loi C-37. Qu'en est-il de la peine maximale de trois ans que prévoit la Loi sur les jeunes contrevenants dans le cas des infractions autres que le meurtre? Est-ce suffisant? Le projet de loi C-37 ne le dit pas. Qu'en est-il des questions importantes comme l'admissibilité des déclarations en vertu de l'article 56?

J'ai passé l'été avec des policiers dans toutes les régions du pays. J'ai visité sept services de police dans diverses villes canadiennes, j'ai rencontré des policiers dans leur salle de rassemblement, je suis allé en patrouille avec eux dans leurs véhicules. Ils ont dit à quelqu'un qu'ils étaient frustrés par le fait que l'on considère des déclarations comme preuve en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants. Il est très important que le comité se penche sur cette question.

Comme je l'ai mentionné, la façon dont nous traitons les contrevenants non violents... nous pouvons faire un travail nettement meilleur. Vous pouvez nous proposer des mesures visant à améliorer le système.

Monsieur Ramsay, je conviens avec vous qu'il s'agit d'une anomalie. Je conviens aussi qu'en ce moment, il est impossible de mesurer l'incidence des modifications que l'on veut mettre en place, mais je puis vous dire qu'il y a encore énormément de choses que ce comité peut examiner, il y a des questions très importantes à étudier dans l'ensemble. Je préférerais mettre vigueur le projet de loi C-37 le 1er décembre au lieu d'attendre une autre année et demie que le comité termine l'étude de la loi, parce que je pense que les changements sont nécessaires maintenant.

M. Ramsay: Très bien. J'ai une autre question.

À l'époque où l'on étudiait la Loi sur les jeunes délinquants, ou au moins les modifications y afférents qui ont donné lieu à la Loi sur les jeunes contrevenants, on a abondamment discuté pendant longtemps. Après avoir examiné la question, il me semble que c'est la Charte des droits et libertés qui a vraiment suscité les changements, surtout l'article 15 de cette charte, dans la mesure où les sanctions imposées par les tribunaux du pays étaient inconsistantes. Cela avait un rapport avec le degré d'égalité.

Il existe encore, et je suppose que le comité va le constater en voyageant à travers le pays, beaucoup d'inconsistance en ce qui concerne les sanctions, ce qui confirme évidemment l'infraction à l'article 15. Qu'en pensez-vous? À votre avis, les sanctions imposées dans les différentes régions du pays sont-elles logiques, car c'est cette question qui nous a vraiment incités à remplacer la Loi sur les jeunes délinquants par la Loi sur les jeunes contrevenants; sommes-nous confrontés au même genre de problème aujourd'hui?

M. Rock: Je ne suis pas d'accord sur le fait que c'est la Charte des droits ou ses dispositions relatives à l'égalité qui ont entraîné l'adoption de la Loi sur les jeunes contrevenants. À mon avis...

.1135

M. Ramsay: En partie.

M. Rock: En partie? C'était peut-être un facteur, mais je crois que la loi était l'aboutissement d'environ 20 années de recherche, d'études et de discussions. Le comité qui a étudié la loi à l'époque l'a fait de façon très approfondie.

Quoi qu'il en soit, il ne fait aucun doute que l'inconsistance dans la façon de traiter les jeunes contrevenants demeure un problème. Comme je l'ai dit ce matin, les pratiques diffèrent d'une région à l'autre. Le Québec a sa façon de procéder. Les taux d'incarcération diffèrent d'une province à l'autre, comme Mme Kirvan nous le dira. C'est préoccupant.

L'une des raisons en est que nous rédigeons les lois, mais ce sont les provinces qui les administrent, et elles le font de façon très différente. Chaque province investit différemment dans son système de justice juvénile. Chaque province a sa façon de sanctionner un jeune reconnu coupable d'un crime.

À certains égards, nous ne surmonterons jamais ce problème, car dans notre système de gouvernement, cette responsabilité incombe aux provinces. Toutefois, monsieur le président, je pense que l'un des rôles que le comité peut jouer est de trouver les solutions que les provinces jugeront intéressantes d'une manière générale. Peut-être pouvons-nous rechercher une plus grande uniformité dans les sanctions.

Ai-je répondu à votre question?

M. Ramsay: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Madame Barnes, vous avez 10 minutes.

Mme Barnes (London-Ouest): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, je vous remercie d'être venu. Je remercie également Mme Kirvan.

Je suis enchantée que vous ayez commencé par reconnaître que la plupart des jeunes au Canada se comportent très bien dans notre société et n'ont nul besoin de ce système. Manifestement, leurs parents et leurs communautés se débrouillent bien. Cela doit être assez difficile; il est en effet probablement très difficile d'être un enfant de nos jours, avec tout l'impact de la télévision et de la violence dont nous sommes témoins dans notre société.

Ce qui me préoccupe le plus, c'est que même si nous avons la très nette impression que quelque chose ne va pas avec la Loi sur les jeunes contrevenants, la plupart des gens ne savent pas distinguer entre les faits et la perception que nous avons des faits. Par conséquent, c'est un peu comme si on disait que l'éducation reçue est inadéquate et qu'il faut par conséquent fermer les écoles. On ne peut pas faire cela; on pourrait toutefois changer certaines choses au programme ou dans les méthodes d'enseignement.

La violence chez les jeunes est quelque chose qui me préoccupe, de même que de nombreux Canadiens, mais les infractions violentes au Canada sont surtout commises par des adultes, et non par les jeunes. Pourtant, la plupart des gens n'en tiennent pas compte lorsqu'ils pensent à la criminalité chez les jeunes.

L'un des problèmes que nous devons régler est celui de la perception qu'a le public de ce qui se passe exactement dans notre société. J'aimerais que vous parliez quelques instants du rôle de l'éducation du public, non seulement des adultes mais également des jeunes, au sujet des faits se rapportant au système de justice pour les jeunes. Parlez-nous également du rôle des médias dans ce processus d'éducation.

Monsieur le ministre, j'aimerais également que vous nous disiez quelques mots sur la raison d'être du système de justice pour les jeunes. En effet, pourquoi ne pas appliquer le système des adultes à tous? Pourquoi ne pas traiter exactement de la même façon les jeunes qui commettent exactement les mêmes infractions que les adultes?

S'il reste du temps, j'aurai d'autres questions.

M. Rock: Je vais essayer de vous répondre brièvement. Les questions soulevées sont très vastes, mais j'essaierai d'être aussi direct que possible.

Au sujet de la raison d'être d'un système de justice pour les jeunes, je crois qu'on reconnaît de nos jours, comme depuis toujours, qu'il est nécessaire d'avoir un système différent pour les jeunes, non pas parce qu'ils ne sont pas responsables de leurs actes, mais parce qu'ils le sont différemment. Il est plus efficace d'adopter d'autres méthodes avec eux, puisqu'on a de meilleures chances de changer ou d'influencer le comportement des jeunes que celui des adultes.

Je pense que c'est là la raison fondamentale. C'est la raison pour laquelle le Parlement a adopté unanimement la Loi sur les jeunes contrevenants, en 1982. Je pense que le principe est aussi valable aujourd'hui qu'à l'époque.

Vous avez aussi parlé de l'éducation du public au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants. Or, c'est l'une des raisons pour lesquelles je suis ravi que votre comité entreprenne ce travail: nous avons l'occasion de sensibiliser le public. Quand je me déplace d'un bout à l'autre du pays, je constate qu'aucun projet de loi n'est plus controversé que la Loi sur les jeunes contrevenants, même pas...

Mme Barnes: Ne le dites surtout pas.

Des voix: Oh, oh!

M. Rock: Je ne le dirai pas; M. Ramsay et moi-même avons promis de ne pas en parler.

Il y a de réelles préoccupations au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants et je crois qu'il est important de le reconnaître et de respecter cela. Les gens sont fort préoccupés par le système de justice destiné aux jeunes et ont l'impression que dans bien des cas, il ne fonctionne pas, et que nous ne sommes pas protégés.

.1140

Votre comité pourrait faire beaucoup en faisant connaître les faits. Examinons-les. Quelle est vraiment la fréquence des crimes chez les jeunes? Quelle est celle des crimes violents chez les jeunes gens? Comment se compare le système de justice destiné aux jeunes et celui des adultes, dans leur traitement de la criminalité? Quand ces faits seront connus, la perception du public pourra changer. C'est un rôle très important que vous pouvez jouer maintenant.

Pour ce qui est des médias, ils ne font que leur travail. Ils rapportent les faits et il est naturel que les médias s'intéressent davantage aux crimes spectaculaires impliquant de la violence qu'aux cas de vols à l'étalage. Je ne pense pas que nous puissions blâmer les médias qui ne font que s'acquitter de leurs responsabilités.

Toutefois, lorsqu'on accorde une attention indue à ces crimes violents spectaculaires, on a l'impression qu'ils sont beaucoup plus courants qu'en réalité et que le risque pour notre société est plus grand. De cela, il nous faudrait parler. Il faudrait vraiment replacer les faits dans leur contexte.

Est-ce que cela répond à votre question?

Mme Barnes: Oui.

Si vous parlez de l'incidence de la réinsertion sociale des jeunes contrevenants sur la sécurité à long terme d'une communauté, si c'est là la priorité, soit de changer leur comportement afin qu'ils soient sur la bonne voie en entrant dans le monde adulte et qu'ils aient des attitudes sociales normales, alors les programmes préconisant des solutions de remplacement seront les plus efficaces. Des recherches l'ont prouvé. Toutefois, dans votre exposé, vous avez également dit que très peu de provinces se servaient de la loi de manière à susciter l'application de mesures de remplacement.

J'aimerais que nous parlions des facteurs qui inhibent la participation de la communauté. S'agit-il d'un manque de ressources? D'un manque d'information? D'un manque d'engagement? Si nous en sommes réduits à parler d'argent, si l'argent est le problème, quelle différence de coût y a-t-il entre la garde en milieu fermé, ou tout type de détention, quels que soient les niveaux, et les programmes de mesures de remplacement.

Je sais que cela peut varier d'une province à l'autre, et peut-être Mme Kirvan pourra nous donner ces détails.

Il y a autre chose, monsieur le ministre: nous pouvons faire toutes les recommandations que nous voulons; au bout du compte, ce sont les gouvernements des provinces et des territoires qui appliqueront la loi, quels que soient les recommandations ou les changements que nous avons proposés. En tant que ministère, que faites-vous dès maintenant pour discuter avec vos collègues et homologues provinciaux, ainsi qu'avec les fonctionnaires des autres niveaux?

M. Rock: Je vais répondre d'abord à la deuxième question et je céderai la parole à Mme Kirvan pour qu'elle réponde à la première.

Pour ce qui est des provinces et des territoires, comme vous le savez, un groupe de travail fédéral-provincial-territorial a commencé ses travaux au printemps dernier. Il travaillera en marge de votre comité et présentera son rapport le printemps prochain. Vous serez en mesure de prendre en compte les points de vues exprimés dans ce rapport avant de présenter vos recommandations finales. Le groupe de travail fédéral-provincial-territorial se penche sur six questions: l'intégration et la coordination des systèmes de justice pour les jeunes et les autres systèmes, le traitement des contrevenants coupables d'infractions graves; la déjudiciarisation, la détention avant procès et les autres solutions à la détention; les questions de procédure, par exemple intégrer les déclarations à la preuve; le partage et la réduction des coûts; la divulgation des noms, le partage de l'information et la tenue des dossiers des jeunes contrevenants.

Les provinces et les territoires participent directement à cette étude. Leurs fonctionnaires collaborent avec le gouvernement fédéral. Je vois des signes d'un engagement réel de la part des provinces à travailler avec nous pour améliorer le système actuel.

Je crois que lorsque leur rapport sera prêt, de même que vos recommandations qui suivront son examen, nous serons en mesure de mettre au point une stratégie qui recevra l'aval de toutes les instances gouvernementales, afin d'améliorer le système de justice pour les jeunes.

Je ne peux pas parler au nom des gouvernements provinciaux, évidemment, mais je peux vous dire que j'ai vu des signes d'un engagement réel. Si nous produisons un rapport sérieux qui propose des façons d'épargner de l'argent et d'obtenir un meilleur résultat, je pense qu'elles y souscriront.

Je vais maintenant demander à Mme Kirvan de répondre à la première partie de votre question.

Mme Kirvan: J'aimerais toutefois que vous précisiez votre question au sujet des autres solutions; parlons-nous en général? S'agit-il de solutions à l'extérieur du système judiciaire ou également, de solutions autres que la détention.

Mme Barnes: J'aimerais que vous nous parliez des deux.

.1145

Mme Kirvan: La solution se trouve sans doute dans des changements à trois niveaux. Au sujet des mécanismes nécessaires pour arriver aux changements dont vous avez parlé, il faut voir ce qu'on peut faire au niveau fédéral. Trois instruments peuvent être envisagés.

Tout d'abord, il faut certainement voir comment la loi peut être modifiée pour favoriser cela. Par exemple, lorsqu'on parle de recourir à des mesures de remplacement pour solutionner des problèmes, qu'on pense aux conférences familiales ou à certaines pratiques néo-zélandaises, on pourrait les intégrer à la loi ou alors, en parler dans nos politiques, sans pour autant les intégrer à la loi même. Il faut donc voir si la loi doit être modifiée au niveau fédéral.

Deuxièmement, toujours au niveau fédéral, comme le ministre en a parlé plus tôt, vos propositions seront cruciales pour permettre que le mécanisme de partage des coûts entraîne un changement.

Troisièmement, le fédéral a mené quelques expériences en contribuant financièrement à des programmes où l'on s'y prenait de façon différente de sorte qu'il y a une base de comparaison. On s'intéresse beaucoup à la façon dont les communautés peuvent intégrer ces programmes, ou s'organiser de manière à ce qu'on arrive à des résultats réels, au niveau communautaire.

Voilà probablement les outils dont nous disposons au fédéral. Au niveau provincial, vous avez raison, comme vous le disiez, on pourrait faire beaucoup. Cela dépasse peut-être le mandat du comité, mais lorsque vous visiterez des communautés ailleurs au pays, on vous parlera sans doute du lien entre le système provincial, son administration, et le système fédéral. Ces renseignements pourraient nous éclairer sur ce qu'il y a à faire de ce côté-là. Même si cela dépasse votre mandat, officiellement, vous pouvez tout de même dire que ces questions doivent être examinées de manière plus approfondie au niveau provincial.

La troisième partie du problème, qui montre bien la complexité de l'application de méthodes différentes, c'est le manque d'argent... qu'il provienne du gouvernement fédéral ou des provinces, il faut se demander comment on peut l'utiliser pour le mieux au niveau communautaire. Il faut donc penser à la communauté et aux organismes communautaires, qui ont des budgets très serrés, un peu partout au Canada, et qui se demandent comment avoir un meilleur contrôle sur les fonds destinés à la communauté, de manière à servir le mieux possible les intérêts des jeunes et de la population.

Il n'y a pas vraiment de solution facile. Il faut bouger à tous les niveaux: communautaire, provincial et fédéral. Il incombe au comité de nous dire la meilleure façon d'arriver au changement dont vous avez parlé.

[Français]

Le président: Monsieur Deshaies, vous avez cinq minutes.

M. Deshaies: J'ai seulement une courte question à poser au ministre. Je suis inquiet, parce qu'avec le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants et le Code criminel, on instaure une tendance vers la droite. Le projet de loi C-37 sera bientôt en vigueur et vous demandez au comité d'en faire une révision globale.

Ne craignez-vous pas qu'on ait tendance à aller vers la droite au lieu de viser les objectifs que l'on s'était fixés, soit des solutions de remplacement à moindre coût ou plus de réinsertion? Quels avantages ou désavantages y aurait-il à augmenter les peines et à diminuer l'âge pour un jeune accusé de meurtre? Ne croyez-vous pas que vous donnez là un indice du fait que vous voulez que le comité glisse vers la droite?

M. Rock: Je vois le processus suivi par le comité lors de son étude de la Loi sur les jeunes contrevenants et celui suivi par le gouvernement, non pas comme un exercice vers la gauche ou vers la droite, mais comme un pas en avant.

[Traduction]

Je ne crois pas qu'on ait tendance à aller vers la gauche ou vers la droite. Je pense qu'on va de l'avant. Je ne crois pas qu'il faut être de droite pour vouloir protéger la société contre les crimes violents. Je ne crois pas que ce soit une question d'idéologie que de vouloir traiter sévèrement ceux qui commettent des crimes violents. C'est le simple bon sens et c'est pourquoi nous avons dit dans le projet de loi C-37 que si vous avez 16 ou 17 ans et que vous commettez l'un des crimes violents mentionnés dans la loi, vous serez traduit devant le tribunal pour adultes et on vous imposera une peine en conséquence, à moins que nous puissions prouver qu'on peut protéger le public tout en vous faisant un procès devant le tribunal de la jeunesse. Ce n'est pas une idéologie de droite, monsieur le président. À mon avis, c'est simplement une façon sensée d'aborder une question qui touche notre sécurité.

.1150

Peu m'importe les idées de gauche ou de droite; je veux aller de l'avant. Ce que je veux, c'est un examen critique de la façon dont nous dépensons des centaines de millions de dollars chaque année pour enfermer des jeunes qui ne menacent pas notre sécurité personnelle. Je veux un examen rigoureux des diverses façons de traiter ces enfants, de manière à obtenir de meilleurs résultats pour eux-mêmes, tout en nous coûtant moins et ce, dans l'intérêt du public. Il ne s'agit pas, à moins avis, d'idéologie. Je veux une analyse fondée sur les faits pour trouver la meilleure façon de servir l'intérêt public.

[Français]

M. Deshaies: Je suis d'accord avec vous, mais il y a différentes façons de voir les choses. Par exemple, dans ma circonscription, les autochtones, en particulier les Inuit et les Cris, ont une façon de voir le règlement de leur criminalité différente de ce qu'ils appellent la loi des Blancs. Comment les jeunes contrevenants autochtones verront-ils ces modifications, selon vous?

Ce qui m'inquiète le plus, c'est que ces modifications mettent davantage l'accent sur la responsabilité. Cependant, la responsabilité est-elle égale à la criminalisation des jeunes? C'est pour cela que je me pose des questions. Il y a différentes façons de voir les choses. Ce n'est pas nécessairement dirigé à gauche ou à droite, mais il reste que le projet de loi C-37 a apporté des choses un peu plus...

Vous accordez plus de poids à la responsabilité du jeune criminel, mais il y a peut-être d'autres façons de voir cela. Au Québec, le jeune peut être traduit devant une cour criminelle d'adultes si le crime est jugé vraiment sévère. Toutefois, avec le projet de loi C-37, ce sera l'inverse: il devra faire la preuve qu'il ne doit pas être traduit devant une cour criminelle d'adultes.

[Traduction]

M. Rock: Nous avons beaucoup à apprendre des modèles autochtones. Comme je vous l'ai dit dans mon exposé, chez les Maoris de Nouvelle-Zélande, des méthodes ont été mises au point qui, une fois appliquées à la population générale, dans le cadre du système judiciaire pour les jeunes, se sont soldées par une baisse marquée du taux d'infractions, ce qui a permis au gouvernement de fermer 21 des 24 établissements de détention. Nous avons donc beaucoup à apprendre des méthodes autochtones.

Oui, j'ai parlé de la responsabilité, mais je ne suis que le premier témoin. Vous allez entendre des dizaines de témoins, comme vous l'avez fait pour le projet de loi C-37. Vous avez déjà une bonne connaissance de ces questions.

Il me semble qu'on dira au comité que la responsabilité des crimes non violents peut être acquise plus facilement qu'en mettant les jeunes en présence d'un juge, dans une salle d'audience, avec un avocat payé par l'assistance judiciaire, qui présente des arguments techniques et arides, et qu'en lui imposant une peine nécessitant son incarcération pendant trois mois dans un établissement où il jouera au billard et fumera des cigarettes avant d'être relâché dans la société.

Est-ce ainsi que le jeune se sent responsable de ses actes? Pourquoi ne pas plutôt instaurer un système où le contrevenant devra s'asseoir en face de sa victime et l'écouter et lui expliquer directement les conséquences du crime? J'ai perdu un sou et ce sou avait une importance extraordinaire pour moi. Pour toi, il ne valait rien. Laisse-moi te dire comment cela a changé ma vie.

Une confrontation directe avec le contrevenant. Que le contrevenant fasse un travail qui représente une sorte de dédommagement pour la victime, qui a une importance pour la victime et qui enseigne au contrevenant quelque chose d'utile. Cette façon de faire, si on en contrôle les conséquences, si elle est rigoureuse, pourrait en fait nous coûter moins cher. Cela aussi, vous savez, c'est rendre le jeune responsable de ses actes, mais d'une manière bien plus efficace qu'en l'enfermant dans un centre pour jeunes contrevenants.

Vous entendrez parler de ces questions dans les semaines à venir. Vous entendrez des témoins qui en savent bien davantage que moi et vous en tirerez vos propres conclusions sur des solutions plus valables que celles que nous appliquons maintenant.

Le président: Monsieur Allmand, vous avez cinq minutes.

M. Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, le gouvernement canadien a-t-il signé et ratifié la convention relative au droit de l'enfant, adoptée par les Nations unies en 1989?

M. Rock: Oui.

.1155

M. Allmand: Le gouvernement a-t-il signé et ratifié les règles minima des Nations unies concernant l'administration de la justice pour mineurs?

M. Rock: Oui.

M. Allmand: Comme vous le savez sans doute, les articles 37, 39 et 40 de la Convention relative aux droits de l'enfant sont très explicites quant aux normes et aux principes de la justice pour les jeunes et, en particulier, aux questions qui se rapportent à la Loi sur les jeunes contrevenants. Dites-moi si le gouvernement actuel souscrit pleinement aux dispositions des articles 37, 39 et 40 de la convention.

M. Rock: Je dois consulter mon conseiller juridique, monsieur le président.

M. Allmand: Très bien, je comprends.

M. Rock: On me dit que conformément à la pratique internationale, le gouvernement du Canada a déposé une réserve relativement à un aspect de ces traités, et il s'agit de la détention des jeunes contrevenants, soit l'article 37.

M. Allmand: J'aimerais connaître les détails de cette réserve, en temps voulu, pas nécessairement aujourd'hui.

Me diriez-vous maintenant si vous savez que des provinces ont exprimé une réserve à la convention et aux normes minimales.

M. Rock: Nous allons nous renseigner et vous en reparler. Ce matin, je ne crois pas qu'aucune l'ait fait, mais nous allons nous informer.

M. Allmand: Je vois.

Voici où je veux en venir: Dites-nous, au nom du gouvernement du Canada, si le gouvernement croit ou non, ou si vous croyez ou non, que toute modification à la Loi sur les jeunes contrevenants doit respecter les dispositions de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que celles des normes minimales. Autrement dit, nous avons signé et ratifié ces conventions, tout en émettant une réserve, comme vous l'avez dit, mais les recommandations de notre comité au sujet d'amendement ne devraient-elles pas respecter les conventions internationales que nous avons signées?

M. Rock: Je pense que le comité doit en tenir compte dans ses recommandations et nous le ferons certainement, en examinant les recommandations du comité.

M. Allmand: À ce sujet, je demande au président et au greffier de s'assurer que tous les membres du comité ont un exemplaire de la convention relative aux droits de l'enfant. Si elle n'a pas déjà été distribuée, elle devrait l'être, de même que les règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs, que le Canada a signées.

Je vais passer à autre chose. Vous avez fait remarquer que le Canada a un taux d'incarcération de jeunes contrevenants relativement élevé. Vous dites que 30 p. 100 de jeunes reconnus coupables sont incarcérés dans des établissements de garde en milieu fermé, alors que 83 p. 100 d'entre eux n'ont pas commis d'infractions violentes. N'est-il pas vrai que cela se fait dans bien des provinces, autrement dit, les juges décident de placer les jeunes contrevenants sous garde parce qu'il n'y a tout simplement pas suffisamment de ressources pour d'autres solutions que la détention? On me dit que les juges aimeraient bien adopter des solutions autres que l'incarcération, dans bien des provinces, mais que les dites provinces n'ont tout simplement pas voté les crédits nécessaires, et n'ont donc pas fourni les ressources. Les juges n'ont pas le choix, ils doivent incarcérer les coupables.

Pouvez-vous me répondre? Est-ce exact?

M. Rock: C'est certainement le cas.

J'ai omis de dire ce que je dis habituellement, dans ce contexte. Lorsque j'ai parlé des taux d'incarcération élevés, je ne voulais pas, ce faisant, critiquer les juges des tribunaux de la jeunesse; en effet, nombre d'entre eux sont frustrés du fait qu'il n'y ait pas d'autres solutions.

Je pense que c'est justement l'une des principales raisons du taux d'incarcération élevé des jeunes. C'est pourquoi je dis que lorsque nous renégocierons le partage des coûts avec les provinces, je stipulerai un plan destiné à inverser la tendance actuelle. En ce moment, sur les fonds que nous donnons aux provinces 8 $ sur 10 $ sont consacrés à la détention. Je pense que c'est la solution de facilité, qui dénote de la paresse. C'est la façon de s'assurer que nous construirons davantage de cages où enfermer les jeunes. Si j'en ai la chance, c'est ce que je négocierai, parce que je préfère voir à l'avenir la proportion s'inverser, avec 80 p. 100 des fonds destinés à d'autres solutions. Dans le cas des contrevenants non violents, le tribunal devrait avoir la possibilité de choisir des solutions autres que l'incarcération.

.1200

Je suis donc d'accord, monsieur Allmand, et c'est un objectif que nous pourrions essayer d'atteindre ensemble.

M. Allmand: J'ai une dernière question à ce sujet: Pourriez-vous dire au comité quels sont les instruments dont se sert le gouvernement fédéral pour aider les provinces à gérer ces ressources. J'ai cru comprendre qu'il y avait le Régime d'assistance publique du Canada. Il a été abrogé et remplacé par le Transfert social canadien.

Y a-t-il d'autres instruments dont se sert le gouvernement fédéral pour aider les provinces? Avons-nous réduit les fonds ainsi accordés aux provinces pour ces ressources? Je sais qu'on l'a fait au moyen du Régime d'assistance publique, mais qu'en est-il des autres instruments qui vous permettaient d'aider les provinces avec leurs jeunes contrevenants?

M. Rock: Que je sache, le Régime d'assistance publique du Canada n'est pas directement en cause, sauf dans la mesure où il fournit les fonds destinés à l'assistance judiciaire.

Le gouvernement fédéral aide les provinces d'une manière plus directe, pour ce qui est de la justice pour les jeunes, avec les fonds qu'il dépense chaque année soit entre 150 et 160 millions de dollars. L'an dernier, je crois que c'était 156 millions de dollars. Nous donnons cela aux provinces, pour partager les coûts relatifs aux jeunes contrevenants. Nous confions cet argent aux provinces et, comme je le disais, 75 ou 80 p. 100 des fonds sont destinés au placement sous garde.

Notre principale aide financière aux provinces se fait donc dans le cadre du partage des coûts pour les jeunes contrevenants. Pour répondre à votre question au sujet de la réduction de ces budgets, je pourrai vous répondre en détail plus tard, monsieur Allmand. Mais en gros, il y aura une réduction en raison de l'examen des programmes. Au cours des années à venir, nous aurons un budget d'environ 150 millions de dollars par an.

M. Allmand: Pourriez-vous donner ces détails au comité?

M. Rock: Oui, nous fournirons les renseignements nécessaires, en réponse à la question deM. Allmand, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur le ministre. Merci, monsieur Allmand.

Je me demande si le document dont vous avez parlé, monsieur Allmand, la Convention relative aux droits de l'enfant, pourrait être intégré à notre trousse d'informations. Nous apprécierions également que Mme Kirvan fournisse au comité, par l'intermédiaire du greffier, la réserve formulée par le Canada, ainsi que la réponse que vous devez fournir plus tard à la question de M. Allmand.

Madame Ablonczy, vous avez cinq minutes.

Mme Ablonczy (Calgary-Nord): Merci, monsieur le président et merci, monsieur le ministre.

M. Rock: Bonjour.

Mme Ablonczy: Nous vous remercions d'être parmi nous dès le début de nos travaux, afin que nous puissions préciser votre pensée au sujet de l'orientation que nous allons prendre. Pour nous aider dans notre examen de la loi, pourriez-vous nous dire quelle priorité nous devrions y accorder.

Bien entendu, il y a toutes sortes d'aspects à la justice pour les jeunes et certaines de ces questions ont déjà été soulevées. On a parlé de la prévention du crime, de la justice sociale, de la réinsertion sociale et du dédommagement. Pourriez-vous mentionner une chose que cette loi devrait faire, ou l'outil qu'elle devrait vous donner, si elle était mieux libellée?

M. Rock: Ce qui compte le plus, c'est de restaurer ou de bâtir la confiance du public dans le système judiciaire pour les jeunes. Comme je l'ai déjà dit, je ne crois pas qu'aucune loi soit aussi controversée. Lorsque je me déplace à travers le pays, comme vous-même, pour savoir ce qui préoccupe les gens, on me parle toujours de la Loi sur les jeunes contrevenants.

L'un des avantages de votre travail, c'est que l'on traite de ces préoccupations d'une manière ouverte, directe et en public. Cela nous permet d'examiner les faits. A mon avis, c'est fondamental parce que le système ne saurait être efficace s'il n'est pas crédible. Et il ne sera pas crédible sans le respect du public. Il faut retrouver cette confiance. S'il faut pour cela faire connaître au public les faits se rapportant à la criminalité chez les jeunes, faisons-le dans le cadre de votre comité. Vous allez tenir des audiences publiques partout dans le pays. C'est une excellente façon d'exposer les faits au public. A part cela, c'est difficile à dire.

Personnellement, j'aimerais que l'on se penche sur la question des crimes avec violence ainsi que sur les questions que j'ai présentées ce matin. Devrions-nous recourir plus souvent aux dispositions de renvoi de l'ancien projet de loi C-37? La peine maximale de trois ans est-elle inférieure à celle que nous devrions pouvoir imposer au tribunal de la jeunesse, aux jeunes contrevenants qui ont commis un crime avec violence autre que le meurtre? Quelles doivent être les limites d'âge? Comment peut-on régler au mieux le cas d'un enfant de 11 ans qui a commis un crime de violence grave? Cela va sans doute se produire un jour. Il faut que nous soyons prêts. Pensons dès maintenant à la meilleure façon d'agir dans la situation, pour le bien des enfants et du public.

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Enfin, nous dépensons des sommes énormes pour mettre sous les verrous des enfants qui ne présentent pas un danger pour nous. Est-ce qu'il n'y aurait pas mieux à faire? Ne pourrions-nous pas, par exemple, de concert avec les provinces trouver des moyens de dépenser cet argent d'une façon plus intelligente et plus utile. Pour moi, ce sont les priorités.

Mme Ablonczy: Je comprends et j'apprécie cette position dont plusieurs personnes ont parlé ce matin. Cela mérite certainement d'être répété: C'est une proportion infime des jeunes qui sont concernés. Nous avons de bonnes raisons d'être fiers des jeunes Canadiens qui deviendront de bons dirigeants pour l'avenir. Mais évidemment, la loi vise cette petite proportion des jeunes qui n'ont pas de respect pour la loi, ne respectent pas les droits d'autrui. Comme vous le dites, nous devons rassurer le public et leur montrer que les problèmes posés par ce petit pourcentage de jeunes seront réglés d'une façon que nous approuvons.

Vous avez dit que vous avez eu l'occasion de vous entretenir avec des Canadiens un peu partout dans le pays, c'est une chose que j'ai fait moi-même, et je ne suis pas la seule. Comme vous le savez, le public ne fait pas confiance à la façon dont la justice est administrée en ce qui concerne les jeunes, et cela pour toute une multitude de raisons, mais d'un autre côté, les jeunes non plus ne font pas confiance à cette loi. En fait, quand vous leur parler dans les écoles secondaires, ils vous disent que c'est une plaisanterie. Ils voient leurs pairs et des gens qu'ils connaissent enfreindre la loi et violer les droits des autres et lorsqu'ils doivent en subir les conséquences, ces conséquences sont minimes. Dans le secteur de la justice des jeunes, le facteur de dissuasion est virtuellement non-existant. C'est ce que me disent les jeunes, et je suis certaine qu'ils ont dû vous dire la même chose.

Vous parlez maintenant de diminuer la garde sous prétexte que ce n'est pas rentable. Le public va vous demander ce qu'on peut faire pour bien faire comprendre à ce petit groupe de jeunes que s'ils enfreignent la loi, s'ils violent les droits des autres, s'ils leur font du mal et qu'ils détruisent leurs biens, ils ne s'en tireront pas si facilement, et devront faire face aux conséquences, des conséquences assez sévères pour les convaincre d'y réfléchir à deux fois la fois suivante. Qu'allez-vous faire pour faire passer ce message? De toute évidence, à l'heure actuelle, il ne passe pas.

M. Rock: Plusieurs choses doivent être faites. Pour commencer, nous devons nous pencher sur les dispositions procédurales de la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous allons probablement constater que très souvent les agents de police trouvent cette loi très difficile à appliquer. Il y a tellement de formalités à accomplir, des mises en garde, des mesures de protection avant de pouvoir faire admettre une déclaration comme preuve, des démarches interminables.

Je crois que l'on devrait écouter la police. Je crois qu'on devrait se demander s'il n'est pas possible d'éliminer une partie de ces formalités, de revenir à la base en ce qui concerne l'application de la loi. Je pense que nous devrions également trouver les moyens de faire comprendre aux enfants que lorsqu'ils font quelque chose de mal il y a aura des conséquences déplaisantes.

Si le fait de devoir comparaître devant un tribunal avec un avocat de l'assistance judiciaire, de voir l'affaire remise, parfois à plusieurs reprises, de comparaître finalement devant un juge qui rendra une décision après avoir écouté des arguments techniques juridiques, si tout cela ne les dissuade pas, est-ce qu'on ne devrait pas envisager de les forcer à reconnaître leur tort en dehors du système judiciaire officiel?

On pourrait, par exemple, les mettre en présence de la victime, en présence de la famille et le cas échéant, en présence de leur propre famille et de la famille de la victime en même temps. Ensuite, on pourrait les forcer à faire du travail communautaire sous surveillance pendant une certaine période? Si on les forçait à faire quelque chose qui les dérange, est-ce que cela donnerait des résultats? Ils devraient rendre des comptes, montrer qu'ils ont fait ce travail, montrer qu'ils comprennent que c'est une punition, ce qui leur donnerait le temps de réfléchir aux conséquences de leurs actes. D'autre part, avec une bonne surveillance, ils pourraient peut-être en tirer une leçon? Que pensez-vous de cette idée-là?

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Il n'y a pas si longtemps, j'étais dans une communauté autochtone où on m'a expliqué comment la communauté traitait les jeunes qui ne respectent pas les coutumes et les normes locales. Deux jeunes gens s'étaient mal conduits, avaient endommagé certains biens matériels, et la communauté avait prononcé une sentence.

On n'a pas beaucoup parlé de ce qu'ils avaient fait dans la communauté, mais pendant environ six mois, les gens se sont aperçus que ces deux jeunes là coupaient tout le bois dont les anciens avaient besoin pour leurs cheminées. Autrement dit, les anciens de la communauté avaient dit: «Pendant six mois, vous allez couper du bois, et vous avez intérêt à vous assurer que nos familles et nous-mêmes ne manquons jamais d'un seul morceau de bois. C'est ce qu'ils ont fait, et ils en ont tiré une leçon.

Il est donc très important de revenir à ces principes fondamentaux, et aussi de redonner au système la légitimité qu'il a perdue aux yeux des jeunes. Je crois qu'il y a beaucoup à faire sur ce plan là.

Mme Ablonczy: On dirait...

Le président: Je suis désolé, mais pour ce tour, votre temps est déjà écoulé depuis trois minutes.

Madame Cohen.

Mme Cohen (Windsor - Sainte-Claire): Monsieur le ministre, merci d'être venu. J'aimerais vous parler d'une préoccupation dont m'ont fait part certains procureurs, certains avocats de la défense et également des jeunes clients à moi, qui ne concorde pas avec ce que Mme Ablonczy a entendu pendant ses voyages.

C'est une situation très inquiétante quand on doit défendre ou poursuivre au tribunal un de ces jeunes qui ont commis un crime grave - je ne parle pas de mauvaise conduite, de nuisances ou d'une première accusation - et quand, après que la culpabilité a été établie, il faut trouver une solution qui aidera un jeune de 14 ou 15 ans à réorienter sa vie tout en satisfaisant et en protégeant la communauté.

À mon avis, c'est au coeur de la question. Je vous parle du type de délit dont la communauté doit se protéger. Je vous parle de crimes de violence ou de délits matériels graves: il faut trouver une solution, décider de ce qu'on va faire de ce jeune, et la seule chose qui soit disponible, c'est la garde en milieu fermé. D'un autre côté, parfois on sait qu'il a besoin d'être gardé en milieu fermé, que c'est la bonne solution, et qu'il doit y rester pendant un certain temps, mais on sait aussi que lorsqu'il en sortira, il n'y aura aucune supervision dans la communauté.

Le plus souvent, on commence par la garde en milieu fermé, puis on passe à la garde en milieu ouvert pour passer enfin à la libération conditionnelle et la probation. Mais quand on dispose d'un total de trois ans, il est très difficile de tenir compte de la gravité du délit. C'est un aspect que j'ai toujours trouvé frustrant, quel que soit le camp dans lequel je me suis trouvé.

Il me semble que la solution consiste peut-être à s'écarter de cet affreux système accusatoire, punitif, pour rechercher un système moins coûteux, moins accusatoire, qui respecterait tout de même les droits de l'individu. Je ne suggère pas qu'on force ces jeunes-là à s'inscrive à des programmes de réhabilitation quand ils ne sont pas coupables de délits, mais ne vaudrait-il pas mieux rechercher des solutions moins coûteuses et moins axées sur la justice?

M. Rock: Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais peut-être en imposant une ou deux conditions. Je me demande si vous êtes d'accord.

Pour commencer, tant que cela n'est pas considéré, tant que cela n'équivaut pas à un moyen d'échapper à ses responsabilités...

Mme Cohen: Non.

M. Rock: Je sais que ce n'est pas ce que vous vouliez dire. Toutefois, si on choisit de s'écarter du processus judiciaire officiel lorsque quelqu'un a commis un crime, il faut bien comprendre que cela ne sera pas une partie de plaisir, que c'est un moyen différent de faire face à ses responsabilités. Comme je l'ai dit dans ma déclaration d'ouverture, il faut trouver une solution un peu plus exigeante qu'une simple comparution dans une salle d'audience suivie d'un séjour au centre des jeunes pendant trois mois passés à fumer des cigarettes.

Mme Cohen: Je me suis entendue avec Mme Torsney et je lui ai permis d'utiliser un exemple de Windsor en posant sa question. C'est une chose qui mérite probablement réflexion. Nos juges provinciaux à Windsor font preuve de beaucoup de créativité lorsqu'ils prononcent des sentences. Un juge m'a dit un jour: Je vais créer un véritable enfer pour ce jeune, et il ne sera même pas emprisonné.

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Il me semble qu'il devrait y avoir une solution moins coûteuse et plus efficace.

Mais je reviens à mon idée de départ, celle d'assortir les jeunes de prison ou les sentences de garde en milieu fermé d'une certaine supervision, et également de prolonger l'incarcération au-delà de trois ans. Je sais ce que c'est ce que vous avez fait dans le cas d'un meurtre, mais pourriez-vous développer un peu cet aspect-là? Est-ce que d'autres mesures ont été prises, ou bien sont envisagées, pour nous permettre de superviser ces jeunes-là dans la communauté pendant plus longtemps?

M. Rock: Effectivement, je crois que c'est le cas. Comme vous le savez, dans le projet de loi C-37, nous avons apporté des modifications qui permettent une surveillance obligatoire, si je peux m'exprimer ainsi, car c'est un terme réservé aux adultes, la surveillance exercée par la communauté après la libération pour certaines catégories de contrevenants.

D'autre part, le comité pourrait peut-être se pencher sur l'ensemble du régime punitif prévu par la Loi sur les jeunes contrevenants. Des procureurs et des avocats de la défense m'ont dit à moi aussi ce qu'ils pensaient de la façon dont on utilise la Loi sur les jeunes contrevenants au tribunal. Les avocats de certains jeunes contrevenants essaient de faire transférer leurs clients, car dans ce cas-là s'ils sont reconnus coupable par un tribunal pour adultes, ils font de la prison, mais cela leur permet ensuite d'obtenir une libération conditionnelle. Cela n'existe pas pour les jeunes contrevenants. Après une période de garde dans le système des jeunes contrevenants, il n'y a pas de libération conditionnelle ni de libération anticipée. Autrement dit, très souvent un jeune a intérêt à être reconnu coupable par un tribunal pour adultes. Cela n'a aucun sens et cela devrait être rectifié.

Le président: Madame Torsney.

Mme Torsney (Burlington): L'affaire dont ma collègue vous a parlé, est bien sûr, l'affaire Hollinsky, dans laquelle on a pris une initiative extraordinaire. Il s'agit d'un jeune qui a tué deux personnes alors qu'il conduisait en état d'ivresse. Les familles se sont rencontrées et se sont mises d'accord pour reconnaître que le meilleur moyen pour mettre fin à ce type de crime, d'empêcher d'autres familles de perdre leurs enfants ...

M. Rock: C'est un jugement qui a été prononcé par le juge Nosanchuk?

Mme Cohen: Exactement.

Mme Torsney: Il est de Windsor.

M. Rock: Un excellent jugement.

Mme Cohen: Un jugement de Salomon.

Mme Torsney: La Couronne a fait appel: La peine minimum prévue pour ce genre de crime, une peine de prison, a été donnée, mais les choses se sont terminées beaucoup mieux que d'habitude.

C'est une des choses que j'essaie de trouver: Que faut-il faire pour laisser aux juges suffisamment de marge de manoeuvre pour leur permettre de trouver de meilleures solutions? Que faut-il faire pour arrêter le courant à sa source, comme on le fait dans le mouvement écologique, au lieu d'adopter des solutions quand il est trop tard? Au lieu de continuer à construire de nouvelles prisons et à compliquer le système, pourriez-vous nous donner des idées sur la façon de faire cela, ce qui serait épatant.

J'aimerais vous parler également de deux choses sur lesquelles on a attiré mon attention au centre Syl Apps, qui se trouve près de ma circonscription. La première, c'est le concept de la responsabilité parentale. Apparemment, aux termes de la Loi sur les jeunes délinquants, il y avait un processus plus défini en ce qui concerne la responsabilité parentale. Un minimum à accomplir ... Pour l'instant, le système prévoit que tout le monde a le droit à l'assistance judiciaire, et pourtant, les familles pauvres en ont probablement plus besoin que les familles riches. Peut-être pourrait-on demander aux parents aisés dont les enfants ont des problèmes, de payer les frais d'assistance judiciaire. Cela leur ferait mieux comprendre la situation dans laquelle se trouve leur enfant, le fait est que la défense est une chose coûteuse et qu'il faudrait peut-être faire quelque chose pour remettre cet enfant dans le droit chemin. Pensez-vous que cela est possible?

D'autre part, j'aimerais parler du droit de refuser un traitement, et je me demande si les enfants sont vraiment capables de prendre ce genre de décisions, et également, comment nous pouvons les y forcer. Il est déjà assez difficile de conduire un cheval à la fontaine et de le forcer à boire, mais que pouvons nous faire pour nous assurer que ces enfants sont traités de la façon la plus efficace possible, comment pouvons-nous les forcer à se réhabiliter?

M. Rock: En ce qui concerne votre première question, comme vous le savez, l'alinéa 11(4) de la Loi sur les jeunes contrevenants prévoit que le tribunal nomme un avocat lorsqu'un jeune souhaite se prévaloir des services d'un avocat mais n'en a pas les moyens. La théorie était que certains jeunes qui comparaissent ont des parents qui refusent de s'impliquer, de fournir de l'aide... En effet, un jeune qui doit subir un procès criminel doit pouvoir faire appel à un avocat, et le tribunal est habilité à ordonner à l'aide juridique de fournir un avocat pour représenter l'inculpé. Ensuite, la province et le gouvernement fédéral partagent le coût de cet avocat.

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Le groupe de travail fédéral-provincial-territorial se penche actuellement sur la question de savoir s'il convient de mettre fin à cette pratique ou de la changer. Beaucoup de régimes d'assistance judiciaire provinciaux souhaiteraient nous voir changer cette disposition qui, disent-ils, nous force souvent à dépenser de l'argent pour des gens qui n'en ont pas besoin. Il y a des parents qui auraient les moyens de payer un avocat mais qui attendent que le tribunal en nomme un. Cet avocat est alors payé à même les fonds publics, ce qui n'est pas normal.

M. Forseth (New Westminster - Burnaby): Dans tous les cas?

M. Rock: Évidemment, je ne sais si tous les parents ont les moyens de payer un avocat. Quoi qu'il en soit, cela mérite examen, surtout à notre époque où l'on cherche à économiser les rares fonds qui sont consacrés à l'assistance judiciaire.

Plusieurs options seraient possibles, comme par exemple la réserver aux cas les plus graves, ou peut-être à certains groupes d'âges, comme les enfants de moins de 16 ans, ou encore de remplacer le droit statutaire à un avocat par un mécanisme administratif qui permettrait au service d'assistance judiciaire de fournir un avocat aux jeunes en se fondant sur les mêmes critères qui sont utilisés pour les adultes. Quoi qu'il en soit, cela mérite d'être examiné.

Quant à votre deuxième question à propos du traitement, je vais demander à Mary-Anne Kirvan d'y répondre car c'est un domaine qui l'intéresse particulièrement.

Mme Torsney: Et qu'elle connaît particulièrement.

Mme Kirvan: Du moins je l'espère.

En ce qui concerne les traitements, vous vous souvenez peut-être qu'un changement avait été apporté dans le projet de loi C-37. À l'heure actuelle, il y a dans la loi une disposition qui a été vraiment très mal comprise. Il s'agit du consentement a être envoyé dans un établissement. On avait pensé qu'un jeune qui acceptait, par exemple, d'être placé dans un établissement de traitement pour toxicomanes, faisait preuve du sens des responsabilités, ce qui suffisait et rendait inutile toute autre sentence.

Quoi qu'il en soit, cela a provoqué beaucoup de confusion au cours des années, et particulièrement en Ontario, pour des raisons qui ne sont pas très claires. Le projet de loi C-37 a donc rectifié cette situation dans une certaine mesure, puisqu'il a supprimé cette disposition.

Cela ne signifie pas que le droit criminel permette d'imposer certains traitements radicaux sans le consentement des parents ou de l'intéressé.

Par conséquent, avec ces changements, et en date du 1er décembre, la Loi sur les jeunes contrevenants va renfermer une disposition de non-consentement à un traitement.

Il faut bien comprendre que la santé relève du domaine de compétence provinciale. En effet, ce sont les provinces qui adoptent les lois relatives au consentement.

Aux termes de la Loi sur les jeunes contrevenants, il est certainement possible d'imposer un traitement sous forme de conditions à la probation.

Deuxièmement, lorsqu'un jeune est placé sous garde, il n'a pas le choix. C'est une décision du tribunal et si le programme de garde est axé sur un traitement, le jeune en question se trouve automatiquement placé dans ce milieu.

Troisièmement, certains systèmes provinciaux sont arrangés de telle façon que le jeune contrevenant porte deux casquettes: la casquette de jeune contrevenant, mais également, aux termes de la législation provinciale sur la santé, l'intéressé peut subir involontairement certains traitements.

La situation est donc compliquée, mais les deux systèmes, la législation qui régit les jeunes contrevenants et le régime de santé de la province, doivent fonctionner ensemble.

M. Forseth: J'ai une expérience pratique de la Loi sur les jeunes délinquants et j'ai également participé à ces conférences fédérale-provinciales et à toutes ces discussions qui ont précédé l'élaboration le la LJC. Voilà maintenant dix ans que cette grande expérience sociale, la LJC, est en place.

Vous avez reconnu sans hésiter aujourd'hui qu'après dix ans la Loi sur les jeunes contrevenants n'avait pas une très bonne réputation. Ce n'est pas l'opinion d'une région, c'est une opinion généralisée, et c'est un sujet dont on a également parlé au cours de la dernière campagne électorale.

Face à ce mécontentement généralisé, à la fois au niveau de la communauté et au niveau national, nous entreprenons maintenant une nouvelle série de consultations au lieu de prendre des mesures sur la base des éléments que nous possédons déjà et qui sont volumineux. En 1993, le public avait été invité à envoyer de la documentation pendant une certaine période, une période qui avait été prolongée. Nous avons d'innombrables études.

C'est peut-être le programme politique et philosophique actuel qui m'inquiète, l'existence d'un préjugé qui nous empêche de mieux définir les sanctions. Le gouvernement se heurte à un problème politique, et c'est l'aspect qui m'intéresse. Lorsque le gouvernement a un problème politique et qu'il ne sait trop que faire, un nouveau cirque itinérant se met en branle.

Nous pouvons étudier la question dans ce comité. C'est bien joli de mettre les membres du comité au courant de la situation des jeunes contrevenants, c'est bien joli de faire notre maîtrise dans cette discipline aux frais du public, mais il ne faut pas oublier, comme vous l'avez dit au comité, que cela revient à aller calmer son monde, si l'on peut dire, ou encore à faire plaisir aux Canadiens en leur répétant à quel point le système qui régit les jeunes contrevenants est excellent. Entre autres choses, dans le courant de cette discussion, nous avons parlé de communication.

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À mon avis, nous devons remettre en question certains éléments administratifs et financiers qui font partie des règles du jeu et qui font parfois pencher la balance en faveur de la garde. Tout cela se ramène à une affaire d'argent. En fait, c'est la tâche même de notre comité.

On a fait des comparaisons avec le Québec, on a parlé de l'efficacité du système québécois. Je conteste absolument cela. A première vue, cela peut sembler préférable, mais si l'on considère le montant global des ressources consacrées à ce système social, elles sont considérables. En fait, c'est disproportionné par rapport aux autres provinces. Les Canadiens de toutes les provinces subventionnent en réalité le système québécois. Et ensuite, on cite cela en exemple.

En fin de compte, le problème c'est que ce comité et cet examen coûtent trop cher, et par conséquent, le comité va aller se promener pour que le gouvernement essaie de tirer son épingle du jeu.

M. Rock: Voilà une chose tout à fait renversante.

M. Allmand: C'est très cynique.

M. Rock: C'est très cynique, et tout à fait renversant de penser qu'en ma qualité de ministre de la Justice et de membre du gouvernement je puisse venir demander une telle chose à votre comité qui se compose de députés réformistes, de députés du Bloc et de libéraux.

Je tiens à préciser que c'est un examen tout à fait libre et que vous êtes parfaitement libres de faire les recommandations qui vous plairont. Penchez-vous sur les peines. Ce n'est pas une affaire entendue, comme vous semblez le croire. Je vous demande expressément ce matin d'étudier la question des peines et de faire rapport au Parlement, de nous dire si à votre avis elles sont appropriées. C'est un examen totalement libre, exhaustif, sans aucune limitation, que je vous demande d'entreprendre. Dans ces circonstances, il est tout à fait renversant de vous entendre dire que nous essayons de nous débarrasser d'un problème politique.

Vous appelez cela un cirque itinérant. Et bien, la tournée va prendre fin au printemps, au moment où vous aurez préparé votre rapport et des recommandations dont je devrais tenir compte, ou mon successeur.

Ce que nous avons, c'est un gouvernement qui assume ses responsabilités politiques. Nous avons déclaré que nous nous chargions de ce problème. Nous avons déjà pris des mesures avec le projet de loi C-37. Nous avons pris des mesures très précises pour régler des problèmes particulièrement difficiles. Aujourd'hui, nous nous attaquons de front à d'autres questions difficiles.

Il est tout à fait remarquable de vous entendre prétendre que nous avons l'intention de gagner du temps, de contourner le problème ou de l'esquiver. C'est tout à fait l'inverse. Nous nous attaquons aux problèmes directement, ouvertement et honnêtement. Je crois d'ailleurs avoir été très honnête avec le comité ce matin à ce sujet.

Permettez-moi d'ajouter que votre opinion en ce qui concerne l'expérience du Québec risque de changer avec le temps, au fur et à mesure que vous entendrez parler de ce qui se passe dans cette province. Je pense que, tout comme moi, vous reconnaîtrez que ce n'est pas seulement une question d'argent, que c'est également une question de principes, de valeurs et de méthodes. Je pense que la démarche adoptée par le Québec en ce qui concerne l'application de cette loi est éclairée et qu'elle devrait être prise en exemple par le reste du pays.

On arrivera peut-être à ces résultats en dépensant les mêmes sommes d'argent, mais en favorisant les programmes sociaux et non la justice criminelle. Cela dit, si le résultat obtenu est qualitativement préférable, pourquoi ne pas repenser les affectations de crédits dans les autres provinces également?

Quant à l'idée que le reste du pays subventionne de façon excessive ce qui se fait au Québec, non seulement ce calcul est-il loin d'être prouvé, mais il constitue également une attaque politique malveillante qui n'a pas sa place dans cette analyse.

M. Forseth: Monsieur le ministre, je suis heureux de vous entendre dire que vous avez maintenant l'intention de prendre au sérieux les conclusions du comité. J'espère qu'on n'assistera pas à ce qu'on voit souvent dans certains comités, des rapports que le ministre concerné ignore pendant un certain temps pour y répondre dans les 150 jours prescrits. Finalement, quand la législation sort, on n'y trouve pratiquement aucune trace des recommandations du comité.

M. Rock: Je sais que quelque chose cloche avec la Loi sur les jeunes contrevenants. C'est ce que j'ai dit ce matin lorsque je suis arrivé et je ne prétends pas avoir toutes les réponses, mais par contre, j'ai des suggestions et des orientations que j'aimerais soumettre à l'attention du comité.

Monsieur Forseth, c'est de l'aide, que je viens vous demander ce matin. Retroussez vos manches et écoutez les témoins. J'ai vu une liste des témoins et des mémoires que vous avez l'intention d'entendre. C'est extraordinaire, vous allez entendre l'opinion d'une gamme très vaste de gens très intéressants. Le comité va avoir l'occasion de beaucoup apprendre, ce qui lui permettra de faire une contribution efficace.

Travaillons donc ensemble à ce projet, essayons d'améliorer la loi pour que dans deux, trois ou cinq ans, peut-être même quand nous ne serons plus ici et que la prochaine vague de parlementaires sera au travail, nous puissions nous dire que nous avons fait quelque chose d'utile et que nous avons amélioré le système.

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Ne considérons pas que c'est une question politique, considérons plutôt que nous faisons cela pour nos communautés et nos familles, et pour l'avenir. C'est dans cet esprit-là que nous devons entreprendre cette tâche.

Le président: Vous avez parlé tout à l'heure du rapport Jasmin. Si Mme Kirvan a ce rapport, pourrait-elle le communiquer au comité en français et en anglais; cela nous serait utile.

Le temps que nous disposions étant écoulé, c'était la dernière intervention. J'espère qu'on ne pourra pas nous qualifier de cirque itinérant quand nous partirons vers les Maritimes la semaine prochaine. J'espère qu'on nous prendra plutôt pour des chefs d'expédition.

M. Rock: J'ai oublié de mentionner une chose. Je crois comprendre que vous devez aller à l'Île-du-Prince-Édouard, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. Rock: À Georgetown, à l'Île-du-Prince-Édouard, j'ai eu l'occasion de visiter un centre de détention des jeunes qui est tout à fait remarquable sur le plan du personnel et de ses qualifications. Ils ont un excellent programme, très instructif, pour les jeunes, et si vous en avez le temps, je vous suggère de leur rendre visite.

Le président: Merci beaucoup pour cette suggestion.

Je vous remercie d'être venu comparaître devant le comité aujourd'hui, d'être venu nous dire ce que vous pensez de la loi et de nous avoir éclairés dans de nombreux domaines.

M. Rock: C'est toujours un plaisir. Merci.

Le président: Merci.

La séance est levée.

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