[Enregistrement électronique]
Le jeudi 23 novembre 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Le Comité permanent des ressources naturelles se réunit. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de la réglementation environnementale et des problèmes de chevauchement et de dédoublement dans le secteur minier.
Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui Vic Shantora, directeur général de la Direction générale de la prévention de la pollution par des toxiques, du Service de la protection de l'environnement, et Pat Finlay, chef intérimaire de la Division des opérations minières et métallurgiques.
Merci, messieurs, d'avoir accepté de comparaître devant le comité pour nous faire part de vos opinions et de vos connaissances sur cette question. Nous vous souhaitons la bienvenue au comité et nous vous invitons à faire votre exposé quand vous serez prêt.
M. Vic Shantora (directeur général, Direction générale de la prévention de la pollution par des toxiques, Service de la protection de l'environnement, ministère de l'Environnement): Nous sommes très heureux d'être ici avec vous pour faire quelques remarques sur le secteur minier et la concurrence dans ce secteur, en particulier sur la façon dont nous travaillons avec le secteur minier au Canada pour mettre en oeuvre des mesures destinées à protéger l'environnement.
Je m'appelle Vic Shantora, comme le président l'a dit. Mon collègue, Patrick Finlay, travaille avec le chef de la Division des opérations minières et métallurgiques. Nous oeuvrons tous deux dans le domaine de la prévention de la pollution par des toxiques, comme l'indique le nom de notre direction générale.
Nous travaillons avec une variété de secteurs industriels du pays - les mines, les pâtes et papier, l'industrie chimique et le raffinage du pétrole, pour n'en nommer que quelques-uns. Le secteur minier, c'est évident, revêt une importance considérable pour l'économie du Canada et est donc très important pour nous.
Je vais vous parler quelques instants des lois qui sont en vigueur et de la façon dont elles pourraient toucher le secteur minier, ainsi que des règlements, de certaines questions concernant l'harmonisation fédérale-provinciale, et je terminerai par un sommaire. Ensuite, si vous le désirez, monsieur le président, nous serons heureux de répondre à vos questions ou à vos commentaires.
Environnement Canada dispose de deux instruments législatifs majeurs pour promouvoir la protection de l'environnement: la Loi sur les pêches, dont nous partageons l'administration avec le ministre des Pêches et des Océans, et la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
En vertu de ces deux lois, nous avons quatre règlements qui concernent le secteur minier. Il y a le Règlement sur les effluents liquides des mines de métaux - j'en parlerai plus en détail tout à l'heure - le Règlement sur les mines d'amiante et les ateliers de criblage-défibrage, le Règlement sur le rejet de plomb de seconde fusion et le Règlement sur les rejets de stériles dans le bras Alice. À l'exception du Règlement concernant spécifiquement le secteur du bras Alice, les autres fixent des normes nationales en matière de rendement environnemental pour l'ensemble du Canada.
Le règlement fédéral le plus intéressant et le plus pertinent, à mon avis, pour le secteur minier et votre comité, monsieur le président, est le règlement sur les effluents liquides des mines de métaux, promulgué en 1977.
Des provinces ou des territoires peuvent administrer des normes équivalentes ou plus strictes dans le cas de certaines installations particulières du pays. Dans des provinces comme l'Ontario, par exemple, ces normes nationales de base ont été dépassées par des exigences plus complètes et plus strictes sur une base géographique.
Le rôle du gouvernement fédéral dans la conception des règlements applicables au secteur minier a été de prendre l'initiative en matière d'environnement et d'assurer une certaine uniformité dans le pays. Nous avons donc cette notion d'exigences nationales de base. Les provinces, si elles le désirent, peuvent fixer des exigences plus strictes ou plus spécifiques en fonction d'une installation particulière ou d'un secteur géographique donné, comme celui de la région des Grands Lacs.
L'un des instruments législatifs les plus importants dont nous disposons est la Loi sur les pêches. C'est l'une des plus anciennes lois du Canada, comme vous le savez certainement, car elle a été adoptée pour la première fois par le Parlement en 1868.
Le paragraphe 36(3) interdit le dépôt de substances nocives dans des eaux où vivent des poissons. L'interdiction générale s'applique à tous, dans tous les endroits du pays. Le paragraphe 36(4) permet qu'on prenne des règlements pour faire des exceptions à cette interdiction générale. Le paragraphe 36(5) donne le pouvoir de déterminer, par règlement, les substances nocives dont le rejet peut être autorisé. C'est en vertu de ce paragraphe que le règlement sur les effluents liquides des mines de métaux a été pris.
Ce règlement a été élaboré entre 1973 et 1977 par un groupe de travail auquel participaient des représentants du gouvernement fédéral, des provinces et du secteur. Il est fondé sur ce que nous appelons la «meilleure technique praticable» au moment de sa présentation.
Le règlement porte sur trois problèmes fondamentaux de pollution de l'eau: le total des solides en suspension, autrement dit, le sable ou les matières fines qui proviennent d'une installation minière et vont polluer un cours d'eau où vivent des poissons; les métaux en suspension et les métaux dissous, comme l'arsenic, le cuivre et d'autres, ainsi que l'acidité; il y a aussi le radium 226 qu'on trouve dans les effluents d'usine et les rejets de mines d'uranium. Ce règlement s'applique donc également aux mines où l'on extrait du minerai d'uranium. Bien que ces normes aient été établies il y a 18 ans, nous croyons qu'elles ont résisté à l'épreuve du temps et qu'elles ont permis d'accomplir la tâche prévue.
Comme nous l'avons dit, le gouvernement de l'Ontario a préparé de nouvelles normes connues sous le nom de Stratégie municipale et industrielle de dépollution - la SMID, comme on l'appelle - qui ont été publiées en 1994. Fait plutôt intéressant, bien que les règlements pris aux termes de la SMID soient plus stricts en ce qui concerne le total des solides en suspension et les niveaux d'acidité, ils sont identiques pour les autres paramètres sur lesquels porte le règlement fédéral.
En vue de modifier le règlement sur les effluents liquides des mines de métaux, nous avons entamé un processus multilatéral appelé AQUAMIN. On y évalue l'efficacité des règlements actuellement en vigueur. L'objectif est d'examiner la science et la technologie actuelles, de déterminer si le règlement en vigueur est adéquat et s'il protège l'environnement comme il le devrait, en plus de décider s'il y a lieu de modifier ou de changer ce règlement et de quelle façon. Le secteur minier est un intervenant clé dans cet exercice, de concert avec les provinces, les territoires et les groupes environnementaux.
Nous espérons que le processus AQUAMIN se terminera le 31 mars 1996, avec la présentation d'un rapport et de recommandations. Le tout sera remis à Environnement Canada et nous évaluerons ces résultats pour décider des mesures ultérieures à prendre.
Nous croyons que le règlement actuel a servi les intérêts de la protection de l'environnement en même temps que ceux des collectivités et des industries depuis près de 20 ans. Ce règlement nous a donné des normes nationales prévisibles, pratiques et fondées sur la technologie, en ce qui concerne la qualité des effluents. En ce qui concerne la mise à jour et le renforcement de ce règlement, beaucoup d'intervenants dans des initiatives connexes y ont participé et continueront d'y participer, afin qu'on tienne compte des améliorations et de l'évolution continue de la technologie, des pratiques et des politiques des gouvernements, de l'industrie et des organismes du secteur public.
Nous tenons à avoir des règlements efficaces et d'un bon rapport qualité-prix. Nous examinons aussi actuellement un ensemble complémentaire d'outils pour améliorer la qualité de l'environnement. Nous avons lancé dernièrement ce que nous appelons un «processus d'options stratégiques», dans le cadre duquel, si nous constatons que nous avons des raisons de croire qu'il existe un problème environnemental, nous pouvons examiner toutes les possibilités avec les divers intervenants, afin de trouver la meilleure combinaison de solutions. On ne décidera pas seulement de ce qu'il y a lieu de faire, mais de qui le fera. Je tiens à souligner par là que s'il convient mieux aux provinces de jouer le rôle principal dans un aspect particulier d'un problème environnemental, il en sera ainsi. S'il faut une exigence nationale, on agira en conséquence. Nous utilisons le processus des options stratégiques pour déterminer la méthode à prendre.
À cet égard, le ministère a déjà entrepris un certain nombre de mesures internes, en plus de faire d'énormes efforts pour harmoniser notre approche avec les provinces. En 1993, Environnement Canada a participé à un examen de la réglementation que demandait le budget de 1992. Nous avons examiné l'efficacité, l'efficience et les répercussions que peuvent avoir sur la concurrence du secteur minier les quatre règlements s'y rapportant. Je puis ajouter qu'on a constaté qu'aucun des quatre règlements n'avait un effet préjudiciable sur la compétitivité des mines au Canada.
Une étude récente des mines de métaux communs et des mines d'or au Canada a montré que les coûts d'application du règlement sur les effluents liquides des mines de métaux sont minimes par rapport au total des coûts d'immobilisation et d'exploitation d'une mine. Il est évident que la question la plus importante en ce qui concerne la rentabilité et la compétitivité d'une mine est la qualité du gisement de minerai, ainsi que les coûts d'extraction et de livraison au marché.
Les quatre règlements fédéraux portant sur le secteur minier feront l'objet, au Conseil canadien des ministres de l'Environnement, d'initiatives d'harmonisation dont vous avez peut-être entendu parler. Aux termes des initiatives d'harmonisation du CCME, les gouvernements ont négocié un projet d'entente cadre sur la gestion de l'environnement qui vise à maintenir un niveau élevé et continu de protection de l'environnement tout en établissant des processus et des dispositions plus efficaces pour donner aux Canadiens les programmes et services environnementaux voulus. Ce projet d'entente cadre contient de nombreuses annexes dans lesquelles on trouve un aperçu des rôles et des responsabilités du gouvernement fédéral dans des domaines comme la surveillance, le respect des règlements et les lignes directrices. Le projet d'entente avec ses dix annexes a été publié afin de lancer un débat public.
L'annexe sur la politique et la loi, dans le projet d'entente, porte sur la question des dédoublements, sur le plan législatif et réglementaire. Aux termes de cette annexe, les gouvernements se sont engagés à examiner la législation et les règlements en vue de réduire au minimum les dédoublements, et peut-être même de les éliminer.
Pour résumer, je tiens seulement à dire qu'à notre avis, au Canada, la situation change en ce qui concerne la protection de l'environnement, le rôle des gouvernements et la nature du secteur. Il y a plusieurs années, nous avions tendance à mettre l'accent sur la réglementation directe. De nos jours, nous mettons davantage l'accent sur la prévention de la pollution. C'est moins cher, c'est plus rapide et c'est plus efficace. Nous voyons maintenant des industries nous soumettre des idées très novatrices sur la façon de prévenir la pollution et de faire des économies. Le cadre de la réglementation traditionnelle est donc complété par ces autres initiatives diverses.
L'une de ces initiatives, à laquelle nous avons participé, est celle de Whitehorse. Ce processus multilatéral placera le secteur minier du Canada dans une meilleure position pour entamer le siècle suivant et promouvoir le développement durable.
L'initiative volontaire appelée ARET est un autre exemple important; c'est l'Accélération de la réduction et de l'élimination des toxiques. Le secteur minier y joue un rôle-clé. Jusqu'à maintenant, 13 sociétés minières représentant 83 p. 100 de la valeur de la production de métaux communs du Canada se sont engagées par écrit à effectuer des réductions allant de 50 p. 100 à 90 p. 100 de la pollution environnementale dont elles sont responsables.
Le défi consiste à obtenir 100 p. 100 de réduction et nous poursuivons les discussions avec nos collègues du secteur minier. C'est seulement ainsi que des initiatives volontaires permettront d'uniformiser les règles du jeu, ce qui est nécessaire pour des concurrents dans un secteur industriel.
Je tiens à le souligner, car au cours de mes discussions avec un certain nombre de sociétés qui ont accepté volontairement ces défis, on me demande continuellement ce qu'il en est des resquilleurs. Nous devons amener ces resquilleurs à faire leur part. Nous y travaillons.
Au fur et à mesure que la mondialisation de l'économie se poursuit, il est essentiel que nos industries puissent assurer leurs clients étrangers qu'ils respectent les normes astreignantes qu'exigent les consommateurs. Comme nous l'avons fait dans le passé, nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec nos divers secteurs industriels afin de nous assurer que les nouveaux contrôles qui entreront en vigueur seront efficients et efficaces, et fondés sur des connaissances scientifiques solides. Nous poursuivrons nos vastes consultations et nous continuerons de travailler avec les provinces en vue d'éviter les dédoublements et les chevauchements.
En terminant, je tiens à déclarer que des règlements environnementaux bien conçus et bien mis en oeuvre fournissent la protection environnementale que les Canadiens recherchent tout en donnant à l'industrie la certitude et la prévisibilité dont elle a besoin pour faire face à la concurrence au Canada et sur les marchés mondiaux. De plus en plus, des initiatives volontaires complètent les exigences réglementaires au fur et à mesure que les industries deviennent plus responsables sur le plan de l'environnement, mais je souligne encore une fois que ces mesures volontaires doivent être un complément aux règlements, qu'elles ne doivent pas s'y substituer.
L'amélioration continue est inhérente au système, et les normes environnementales ainsi que la conformité dans ce domaine seront examinées régulièrement.
Environnement Canada croit que nous avons de solides rapports de partenariat avec nos collègues du secteur. Nous voulons maintenir et améliorer ces rapports, et nous voulons le faire dans l'intérêt de tous. Merci de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Deshaies.
[Français]
M. Deshaies (Abitibi): Merci, monsieur Shantora. Il y a un aspect que j'aimerais définir avec vous. Au ministère, dans un pays très grand comme le Canada, on veut souvent émettre des normes de base. Il est très vertueux de parler de normes, surtout de normes respectueuses de l'environnement, mais est-ce que le ministère doit établir des normes de base ou être à la base des normes?
Voici ce que je veux dire par là. Vu que les provinces ont normalement la prérogative de contrôler leurs richesses naturelles, pourquoi le ministère ne serait-il pas seulement un émetteur de normes de base et ne laisserait-il pas aux provinces la responsabilité et le devoir de gérer ces normes? Ça permettrait de faire de grandes économies.
Vous disiez tout à l'heure que vous essayiez, au moyen d'ententes administratives avec les provinces, d'éliminer des chevauchements. Si les provinces avaient simplement à administrer ces normes de base, vous n'auriez pas de problème à ce niveau. Les provinces seraient là pour respecter leur propre environnement, car personne ne veut que son environnement soit pollué. Il n'y a pas meilleur client que quelqu'un qui possède son propre terrain. Ne pensez-vous pas qu'il serait plus avantageux et profitable qu'ici, au fédéral, on édicte des normes nationales de base au lieu d'être à la base de ces normes?
[Traduction]
M. Shantora: Je crois que c'est essentiellement l'objectif de l'exercice d'harmonisation. Le fait est que bien que ce soit un bon principe, il y a des cas où certaines provinces sont mieux en mesure que d'autres de faire respecter certaines exigences.
Je vais vous parler du cas du règlement sur les BPC, qui est actuellement en vigueur. L'Alberta, par exemple, a signé une entente d'équivalence. C'est elle qui l'applique exclusivement sur son territoire. D'autres provinces, comme l'Île-du-Prince-Édouard, disent qu'elles n'ont pas vraiment la capacité de s'en occuper et demandent au gouvernement fédéral de le faire.
Je pense qu'en principe les provinces qui en ont la capacité devraient faire respecter ces exigences, mais ce n'est pas toujours possible.
Il y a deux autres facteurs que j'aimerais soumettre à votre réflexion. Vu les compressions budgétaires à cause de la dette, on est en train de réduire la taille de nombreux ministères ce qui nous contraint à faire disparaître le double emploi et les chevauchements. C'est ma réponse à ce que vous avez dit à propos de l'efficacité et de la nécessité d'améliorer la façon dont nous procédons. Je pense que c'est possible.
Quant au troisième facteur, c'est ici qu'intervient le rôle et le leadership du gouvernement fédéral. Il faut encore s'assurer qu'il y a une certaine uniformité à l'échelle nationale et des chances égales pour tous.
Il y a des années, on parlait de ces refuges pour pollueurs et on s'est servi des normes nationales pour équilibrer les choses. Aujourd'hui, le problème n'est pas tant entre le gouvernement fédéral et les provinces. Avec la mondialisation de l'économie - et le secteur minier est important à cet égard parce qu'il exporte beaucoup - il faut que le gouvernement fédéral veille à ce que nos normes nationales soient raisonnables et uniformes; sur le plan international, nous veillons à ce que les chances soient égales pour tous. C'est le nouveau défi.
[Français]
M. Deshaies: Monsieur Shantora, la nouvelle Loi canadienne sur la protection de l'environnement permet de reconnaître des normes pertinentes aux provinces de façon à ce que les provinces puissent dire: «Eh bien, nos normes sont égales ou supérieures à celles du fédéral.» Les provinces pourraient prendre ce créneau-là pour obtenir l'établissement d'un guichet unique. Mais en même temps, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable suggère, dans son dernier rapport, une intervention plus importante dans les champs de compétence provinciaux.
Comme les gouvernements ont de moins en moins de fonds, je préférerais qu'il y ait une meilleure entente et qu'on donne aux provinces, et surtout à l'industrie, un seul endroit pour faire les demandes.
On sait qu'une des principales critiques des industries, en particulier l'industrie minière, c'est qu'on doit intervenir à différents niveaux, pas seulement au fédéral et au provincial, mais souvent à différents ministères. Il y a toutes sortes de chevauchements.
En tant que directeur, comment voyez-vous ce rapport, qui dit qu'il faudrait que le fédéral s'ingère davantage dans les champs de compétence provinciaux?
[Traduction]
M. Shantora: Le défi, c'est que tout bouge constamment. En 1970, lorsque le ministère de l'Environnement a été créé, je crois que nous étions le seul gouvernement à avoir des exigences environnementales.
Avec les années, les ministères provinciaux de l'Environnement sont nés et des lois provinciales ont été adoptées. Ces lois, comme les lois fédérales, ont été modifiées pour les rendre plus strictes. Il est difficile de prendre un instantané et de dire que le fédéral devrait être plus actif ou que les provinces elles, devraient l'être plutôt.
Cela dépend du dossier, s'il est d'envergure nationale ou localisée et de la nature du problème de pollution. Parfois il s'agit des canalisations d'eaux résiduaires d'usines tandis que dans d'autres cas il s'agit de commerce avec l'étranger.
Il faut donc tenir compte de tous ces éléments pour choisir le bon dosage d'instruments, comme je l'ai dit plus tôt, et déterminer qui doit agir. Je pense que le processus des options stratégiques dont j'ai parlé tout à l'heure, de même que les accords sur le cadre de gestion de l'environnement nous aideront à y arriver.
Je suis sensible à l'inquiétude que vous avez exprimée, mais je dois vous dire que je n'ai jamais trouvé de solutions toutes faites qui donnent réponse à tout.
[Français]
M. Deshaies: Monsieur Shantora, par votre travail, vous êtes à même de mesurer l'impact de la pollution causée par les différentes industries, particulièrement l'industrie minière. On sait que l'activité humaine et l'activité agricole provoquent de la pollution, mais ces engrais permettent aux plantes qui nous nourrissent de se développer.
On sait que, dans les années 1920 à 1940, l'industrie minière a vraiment pollué avec ses grands champs de résidus et qu'on doit maintenant décontaminer. Pensez-vous que l'industrie minière a aujourd'hui une bonne politique pour s'autocontrôler? Il faut toujours garder l'oeil ouvert. Je ne suis pas partisan du laisser-aller. Toutefois, l'industrie minière pollue-t-elle encore?
[Traduction]
M. Shantora: L'industrie minière continue d'être une source de pollution au Canada. Sa responsabilité est beaucoup moindre que dans les années 60 et 70. Je ne me souviens plus des chiffres exacts, mais je me souviens d'avoir fait un exposé à la Commission mixte internationale il y a environ deux ans et demi. Cela porte exclusivement sur les Grands Lacs, mais je crois que cela donne une idée de ce qui existe à l'échelle nationale. Nous avons fait des études sur des charges de pollution des Grands Lacs et leur origine.
Systématiquement, les principaux secteurs industriels ont réduit leur charge de pollution des Grands Lacs de 70 à 90 p. 100. La situation s'est donc beaucoup améliorée. Vos collègues de la région des Grands Lacs vous diront que la qualité de l'eau s'est beaucoup améliorée.
Cela dit, le travail n'est pas terminé. Il y a place pour de l'amélioration dans le secteur minier, celui des pâtes et papiers, dans les municipalités et dans la réaction des citoyens face à la pollution.
Le président: Enchaînons.
Monsieur Strahl.
M. Strahl (Fraser Valley-Est): Dans votre exposé, vous avez parlé d'une étude que le ministère a faite concernant les quatre grands règlements qui s'appliquent à l'industrie minière. Vous avez dit que dans aucun cas ces règlements ne nuisent à l'exploitation minière. Pourquoi est-ce que l'industrie minière canadienne va s'établir au Chili? Si la réglementation ne fait pas problème, pourquoi l'industrie minière semble-t-elle si peu désireuse... et pourquoi continue-t-elle de dire que la réglementation est une source de problèmes au Canada.
M. Shantora: Je ne suis pas certain d'avoir entendu cela exprimé en ces termes, et certainement pas venant de collègues à moi dans le secteur minier qui m'en ont parlé. Par exemple, je sais pourquoi certaines compagnies canadiennes vont travailler au Chili: c'est à cause de la qualité des gisements miniers là-bas.
Nous sommes allés au Chili au mois de mars de cette année à l'occasion d'un important atelier de travail de gouvernement à gouvernement où étaient représentés nos collaborateurs et l'agence environnementale chilienne. C'était une séance de transfert de technologie, si vous voulez. Ils s'intéressaient à la législation et à la réglementation canadienne et à la façon dont nous travaillons. Nous leur avons communiqué cette information.
Pendant mon séjour, j'ai eu l'occasion de converser avec le vice-président d'une grande compagnie minière. Ce qui l'ennuyait, ce n'est pas que les lois canadiennes sont exigeantes et que celles du Chili au contraire ne le sont pas. Ce n'est pas ça. Non, c'est que là-bas ils doivent s'assurer que quelles que soient les lois - et ils trouvent les lois canadiennes raisonnables - ils veulent que nous collaborions avec les Chiliens pour s'assurer que ceux-ci adoptent une façon de procéder semblable.
Ce dirigeant d'entreprise craignait par-dessus tout... Enfin, j'exagère peut-être un peu, mais il était d'avis qu'une formule à l'américaine, tracassière, péremptoire et antagoniste ne serait pas utile.
Nous avons passé quelque temps avec les Chiliens. Depuis, ils sont venus nous rendre visite. Ensemble, nous avons décidé que l'exploitation minière était un secteur d'activité important. Certains d'eux effectuent des visites dans les provinces, et examinent la façon dont elles procèdent, les mécanismes d'octroi de permis ainsi que les méthodes d'évaluation environnementale. Je pense qu'ils se sont rendus dans certaines mines canadiennes.
Si les compagnies canadiennes sont prêtes à dépenser 5 milliards de dollars pour investir dans des gisements là-bas, je pense que c'est bon pour le Canada.
M. Strahl: Je ne le conteste pas. Ce que je conteste... Ce n'est peut-être pas ce que vous entendez dire, mais moi, ce que j'entends, c'est que l'industrie minière ne veut pas d'allégements fiscaux. Elle sait qu'elle n'en obtiendra pas. Elle ne veut pas affaiblir la protection de l'environnement ni déverser du plomb dans les lacs. Ce que dit à l'unisson l'industrie minière, c'est que le problème tient dans la réglementation. Autrement, peut-être que pris individuellement ces règlements ne nuisent pas aux investissements au Canada, mais dans l'ensemble, il y a quelque chose qui ne va pas.
On a beau dire que tout va bien, ce n'est pas le cas. C'est pourquoi nous tenons cette réunion. Ça ne va pas bien. Ça prend trop de temps et il y a trop d'obstacles à franchir. Après tout ce que j'ai lu et entendu, pour l'industrie minière, c'est la refonte de la réglementation qui doit être faite en priorité si nous voulons les aider à ouvrir de nouvelles mines et à obtenir que leurs investissements produisent.
Je ne reproche pas aux Chiliens de vouloir attirer notre industrie. Je m'étonne par contre de la lenteur de la réforme réglementaire. Tout le monde semble être d'accord avec les promesses du Livre rouge mais cela prend un temps fou. La semaine dernière encore, le gouvernement n'avait toujours pas répondu au rapport du Comité permanent de l'environnement, cinq mois après son dépôt. De fait, le gouvernement a maintenant contrevenu à son propre Règlement pour n'avoir pas déposé sa réponse.
En 1995, le ministre de l'Industrie a promis que, dans une économie renouvelée, nous aurions des règlements simplifiés dans six domaines précis qui devaient être dévoilés dans l'année. Pour ce qui est de l'accord-cadre du Conseil canadien des ministres de l'environnement, nous l'avons, mais l'accord n'est toujours pas définitif. L'industrie minière reste très perplexe et ne s'attend pas à ce que le résultat soit la solution.
Autrement dit, tout le monde dit qu'il faut faire avancer les choses. Mais cela traîne toujours. Pourquoi? Où est le problème? Qu'est-ce qui bloque? Est-ce que ce sont les provinces? L'industrie? Est-ce que cela prend vraiment autant de temps pour franchir toutes les étapes? Qu'est-ce qui bloque?
M. Shantora: Monsieur, cela prend tout simplement beaucoup de temps lorsqu'on traite avec 13 gouvernements, ce qui est notre cas au Canada. Le processus est donc considérablement plus long.
Selon mon expérience avec le Conseil canadien des ministres de l'environnement... Je n'essaie pas de trouver des excuses. Je comprends ce que vous nous dites, mais il suffit qu'un seul gouvernement change pour qu'une province retire son appui à une certaine politique parce que quelqu'un d'autre est là et cela peut arriver également lorsqu'il y a un changement au niveau du gouvernement fédéral.
Je travaille dans ce domaine depuis 19 ans. Je dirais qu'il y a des signes précurseurs de certaines choses. Ils sont peut-être subtils et ils ne sont peut-être pas encore évidents, mais certains des mes collègues provinciaux avec qui j'ai eu des entretiens, ceux de l'Alberta, de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et au moins un autre - je crois qu'il y en a d'autres également - songent sérieusement à réexaminer tout leur processus d'émission de permis disant que ce dernier représente un fardeau administratif trop lourd. Pour une cheminée d'usine, il faut obtenir tel permis, tandis pour un conduit d'effluent, il faut obtenir tel autre permis de quelqu'un d'autre. Ils tentent donc de simplifier ce processus pour avoir un guichet unique. C'est un exemple de ce qui se passe. Encore une fois, malheureusement, il faudra du temps.
Au fait, ce n'est pas une mauvaise chose que l'industrie minière ou les sociétés en général nous gardent sur le qui-vive à cet égard. Nous respectons cela et nous faisons de notre mieux.
M. Strahl: C'est exact. Bon nombre d'entre nous sommes d'avis que c'est ce que devrait faire une industrie minière active. Il y a déjà quelque temps qu'on n'a pas ouvert de mine importance au Canada.
J'ai mentionné le rapport du Comité permanent de l'environnement. Ce ne serait pas exagéré de ma part que de dire que l'industrie minière a terriblement peur de ce rapport et dit que cela va détruire leurs chances industrielles au Canada. Les recommandations contenues dans le rapport - pas toutes les recommandations, car elles sont nombreuses, il y en a 140 - tendent en général à centraliser le pouvoir au Canada plutôt que de le déléguer aux provinces. Ce n'est pas le ministère qui le dit, mais dans son rapport, le Comité recommande de donner plus de pouvoir au gouvernement fédéral, non pas de lui en enlever.
Que pensez-vous de cela?
M. Shantora: Je ne participe pas personnellement à l'exercice d'examen de la LCPE au sein du ministère, et au sein du gouvernement en général, alors il vaudrait sans doute mieux attendre. Lorsque le Cabinet aura pris une décision concernant sa position, nous verrons ce que cela donnera.
Notre tâche consiste à examiner et à respecter les points de vue des divers intervenants. Il est parfois un peu plus difficile d'en arriver à une décision sur la bonne mesure à prendre et, la plupart du temps on est loin d'obtenir tout ce que l'on veut, mais on réussit à faire des compromis. Si nous pouvons faire cela et s'il est possible d'améliorer l'environnement grâce à des mesures qui ne nuisent pas indûment à l'industrie, alors je pense que tout le monde ressort gagnant.
M. Strahl: Avez-vous examiné les recommandations contenues dans ce rapport pour voir quelle serait leur incidence sur ce que vous tentez de faire, c'est-à-dire d'intégrer tout cela et de vous assurer qu'il n'y a pas de double emploi, etc.? N'est-ce pas votre travail?
M. Shantora: Je suis certain que toutes les questions dont vous avez parlé seront intégrées dans la réponse du gouvernement.
M. Strahl: Très bien. Nous attendrons. Nous attendons maintenant, et nous ne faisons qu'attendre!
Je m'arrête ici pour l'instant. J'y reviendrai.
M. Reed (Halton - Peel): J'aimerais vous poser une question directe: Êtes-vous en faveur du principe des droits acquis?
M. Strahl: Voulez-vous dire en général ou pour ce qui est de l'industrie des métaux spécifiquement?
M. Reed: Je parle du processus d'approbation et des rapports entre l'industrie et le gouvernement. Au début d'un projet, l'industrie commence avec une certaine série de règles, une certaine série de règlements. C'est à partir de ces règles et de ces règlements qu'elle décide de faire un investissement et que le processus est lancé.
Vous voyez ce que je veux dire.
M. Shantora: Ce genre de question est examiné au cas par cas, mais pour revenir au règlement sur les effluents liquides des mines de métaux dont j'ai parlé tout à l'heure, lorsqu'il a été établi en 1977, nous avons divisé les effluents en deux catégories: les mines existantes étaient assujetties à des lignes directrices. En d'autres termes, on reconnaissait qu'elles existaient déjà. Nous avons dit que les nouvelles mines seraient assujetties aux règlements.
Donc le principe des droits acquis en est un que nous avons déjà examiné par le passé, et j'imagine que nous pourrions le faire de nouveau à l'avenir.
M. Reed: Je pense que c'était l'une des principales préoccupations que l'industrie minière a exprimées devant notre comité, non seulement du point de vue fédéral, mais du point de vue provincial également. Les représentants de l'industrie minière nous ont dit qu'ils ne pourraient supporter que l'on modifie constamment les objectifs.
J'ai une certaine expérience personnelle de ce problème. Tant que ce problème existera, bon nombre d'industries décideront de ne pas investir tout simplement par crainte que le processus de réglementation change en cours de route, ce qui occasionne des dépassements de coûts, et un investissement énorme... Il faut beaucoup d'argent pour réembaucher des experts-conseils et présenter une demande quatre ou cinq fois avant de finalement obtenir le permis pour aller de l'avant et faire le travail.
M. Shantora: Je comprends cette préoccupation, mais si vous me permettez de vous donner un autre point de vue sur cette question...
Le règlement sur les effluents liquides des mines de métaux est en vigueur depuis 1977, alors je pense qu'il y a eu pas mal de stabilité avec ce règlement. Je pense que l'industrie est maintenant à l'aise avec le règlement. On peut dire honnêtement que la plupart des sociétés, sinon toutes les sociétés qui étaient visées par les lignes directrices répondent aux exigences qui sont essentiellement l'équivalent des normes contenues dans la réglementation. J'ai parlé également du fait que nous songeons à modifier ce règlement et que nous le faisons de façon entièrement publique, l'industrie étant à table avec nous au cours de ces délibérations.
Honnêtement, je ne peux accepter, du moins pour le genre de travail que nous faisons, que quelqu'un laisse entendre que nous leur imposons des changements en cours de route. Nous tentons réellement d'être ouverts et transparents et de justifier dès le début tout changement que nous envisageons. Nous ne réussissons peut-être pas toujours du succès, mais c'est un bon principe d'affaires et je pense que nous tentons de le respecter.
M. Reed: Ma propre expérience n'est pas avec le gouvernement fédéral mais avec le gouvernement provincial. On a perdu le contrôle du processus, si vous voulez, car on ne reconnaît absolument pas que c'est une question d'investissement et d'affaires. Certains des changements sont pour le moins plutôt spécieux.
J'aimerais savoir comment vous voyez le rapport entre certaines formes d'intrusion artificielle dans l'environnement et les choses qui se produisent naturellement. Mes gens en ont parlé en ce qui concerne les pêches, c'est-à-dire qu'il est inacceptable d'entreprendre une activité sur la berge d'une rivière tandis que la pluie qui cause l'érosion des berges est acceptable, parce que c'est une activité naturelle tandis que l'autre est artificielle.
Quelle est la logique que l'on applique dans de tels cas? Certaines personnes sur la ligne de tir disent qu'il y a une différence. Une activité est artificielle tandis que l'autre est naturelle. Donc parce que c'est une activité naturelle, c'est acceptable; mais si c'est une activité artificielle, ce n'est plus acceptable.
M. Shantora: Il est intéressant que vous souleviez cette question, car le gouvernement a annoncé en juin dernier ce que nous appelons une nouvelle politique sur la gestion des substances toxiques. Cette politique répond en partie exactement à ce dont vous parlez.
Vous avez sans doute entendu parler du DDT, du mirex, du toxaphène et des BPC. Ce sont clairement des substances synthétiques. Ce sont non seulement des substances fortement toxiques, mais elles sont en outre rémanentes et biocumulatives. Donc vous et moi en tant qu'êtres humains avons un petit peu de BPC et de DDT dans notre corps. C'est bien malheureux, mais c'est la réalité.
Nous constatons aussi que ces substances flottent dans l'atmosphère. Pendant longtemps, on a cru qu'il n'y avait pas de pollution dans l'Arctique parce qu'il n'y avait là-bas pratiquement aucune activité humaine. Mais les ours polaires et les phoques sont aussi contaminés par ces substances.
Nous avons conclu qu'il nous fallait un nouveau cadre de politiques pour traiter des substances qui ne sont pas seulement toxiques, mais aussi persistantes et biocumulatives. Pour ces substances, il ne suffit pas de parler de réduction; il faut trouver des façons d'en empêcher le rejet.
Essentiellement, notre politique prévoit que, si un polluant ou une substance toxique est anthropique en plus d'être toxique, persistante et biocumulative, on adopte l'approche prévue pour ce que nous appelons la filière numéro un. Selon cette approche, nous devons élaborer une stratégie qui empêche le rejet de ces substances dans l'environnement. Une fois que ces polluants se retrouvent dans l'environnement, il est trop tard.
On a débattu pendant un temps de la façon dont on devrait traiter les métaux. On peut faire valoir que le mercure est toxique, persistant et biocumulatif, que le plomb est toxique et persistant, bien que moins biocumulatif.
Voilà pourquoi nous avons établi ce critère qui dit que s'il s'agit d'une substance anthropique, toxique et biocumulative, elle devrait suivre la filière numéro un.
En ce qui concerne les métaux, nous avons estimé qu'ils ne faisaient pas partie de cette catégorie. On a donc prévu pour eux la filière numéro deux pour laquelle l'approche est essentiellement l'approche actuelle. On envisage des réductions là où c'est possible, mais on sait qu'on ne peut éliminer ces substances de l'environnement parce qu'elles s'y trouvent déjà naturellement. On tente donc de minimiser la menace, et non pas d'éliminer ces métaux.
M. Reed: Vous avez parlé de deux filières. Existe-t-il une troisième filière pour les substances non toxiques ou moins toxiques?
M. Shantora: Notre système ne s'applique pas aux substances non toxiques. Ces substances ne nous intéressent pas.
M. Reed: J'ai peut-être mal interprété ce que des fonctionnaires du ministère des Pêches qui oeuvrent en première ligne nous ont dit. Mes adjoints ont eu des discussions au sujet de l'argile maigre. En l'occurrence, il ne s'agissait pas d'argile organique, qui peut suffoquer les poissons, mais plutôt de sable, etc. On nous a répondu qu'on ne voulait pas risquer de détruire la population de fretins dans cette zone. Si cela se produit naturellement, par suite d'une inondation, par exemple, ça va, mais si c'est une conséquence de l'activité humaine, cela ne va pas.
M. Shantora: Je ne suis pas du tout au courant de ce dossier. Je ne crois pas pouvoir...
M. Reed: Cela relèverait de la Loi sur les pêches.
M. Patrick Finlay (chef intérimaire, Division des opérations minières et métallurgiques, ministère de l'Environnement): Vous avez raison. Comme vous le dites, cela relève de la Loi sur les pêches. Aux termes de cette loi, ce sont les rejets industriels dont nous sommes responsables, et non pas du genre de situation que vous décrivez qui relève plutôt de l'habitat du poisson.
Il serait préférable que vous posiez votre question aux représentants du ministère des Pêches et Océans.
Le président: Ils viendront témoigner la semaine prochaine; vous pourrez alors soulever la question.
M. Reed: Merci, monsieur le président. J'aurai d'autres questions au prochain tour de table.
Le président: Monsieur Thalheimer.
M. Thalheimer (Timmins - Chapleau): Lorsque vous faites vos évaluations environnementales, que tolérez-vous? Estimez-vous devoir protéger l'environnement quel qu'en soit le coût pour le secteur? Ou évaluez-vous les coûts immédiats de la protection de l'environnement pour le secteur?
M. Shantora: Il y a plusieurs choses que nous faisons régulièrement. D'abord, nous examinons les données scientifiques à partir desquelles l'ampleur du problème est mesurée. Comprenons-nous bien le problème scientifique et pouvons-nous établir une relation de cause à effet?
Deuxièmement, nous passons en revue les technologies ou les approches qui nous permettraient de régler le problème. Au début, nous avions... Le Règlement sur les effluents liquides des mines de métaux est un bon exemple du travail que nous avons fait en collaboration avec le secteur minier pour trouver des techniques nous permettant de réduire ces effluents.
Troisièmement, nous étudions les conséquences socio-économiques. Nous nous demandons ce que coûtera le nettoyage de cours d'eau pollués par des rejets particuliers et quelle sera l'incidence pour le secteur touché. Nous examinons aussi les secteurs sociaux. Avant de prendre notre décision, nous tenons compte du fait qu'il s'agit, par exemple, d'une ville qui dépend entièrement de la mine.
Nous ne prenons pas de décisions préliminaires nous-mêmes. Nous présentons des renseignements et des recommandations aux ministres qui, en dernière analyse, déterminent la nature et la forme du règlement. Nous leur offrons plusieurs options après avoir tenu compte de tous ces facteurs.
M. Thalheimer: Manifestement, ...
Le président: Vous devrez attendre que ce soit de nouveau votre tour. Les 10 minutes dont disposaient les libéraux sont épuisées.
Monsieur Deshaies.
[Français]
M. Deshaies: Monsieur Shantora, j'aimerais savoir s'il existe des statistiques sur les taux de pollution par industrie. On sait maintenant que l'industrie alimentaire, l'industrie du papier et même l'industrie des pêches causent de la pollution. Serait-il possible de déposer devant notre comité, s'il y en a, des statistiques indiquant les taux de pollution relatifs à l'industrie minière de même que ceux relatifs aux autres formes de pollution, afin qu'on puisse avoir un ordre de grandeur?
Nous sommes ici pour parler du trop grand nombre de règlements et surtout des chevauchements. Par exemple, si l'autorisation de traverser les voies navigables vient de votre ministère, ne pourriez-vous pas accélérer parfois le processus?
Prenons un exemple précis. Au point de vue pratique, une industrie qui attend la permission de traverser un petit cours d'eau - en anglais on dit creek, en ce sens qu'il a peut-être deux mètres de large - pourrait attendre longtemps avant d'avoir les résultats d'une étude aussi simple. Pourtant, il n'y a pas de comparaison possible entre une telle étude et une étude environnementale en vue de la construction d'un barrage. N'y aurait-il pas un mécanisme plus simple pour l'obtention d'un permis de traverser une petite voie d'eau? Cela améliorerait les choses sinon politiquement, du moins au point de vue pratique.
[Traduction]
M. Shantora: Pour répondre à votre première question, nous vous ferons parvenir des renseignements sur les charges et les rejets par secteur. Vous savez peut-être qu'il existe un inventaire national des rejets polluants. Il a été publié pour la première fois l'an dernier. Il comporte des données par société et par région sur la qualité de l'air et de l'eau et sur les rejets polluants. Nous vous en ferons parvenir un exemplaire.
En ce qui concerne la Loi sur la protection des eaux navigables, ce n'est pas nous qui l'administrons. Elle relève d'un autre ministère. Toutefois, nous avons un rôle à jouer. Si un ouvrage relevant de la Loi sur la protection des eaux navigables comporte des incidences environnementales, nous vous ferons part de nos remarques au ministère compétent, et nous tentons de le faire dans les meilleurs délais.
Cela ne fait pas partie de mes fonctions, mais je peux certainement transmettre vos observations aux intéressés qui se pencheront sur la question. D'ailleurs, vous accueillerez peut-être les fonctionnaires d'autres ministères à qui vous pourrez poser cette question.
M. Deshaies: Merci.
Le président: Monsieur Strahl.
M. Strahl: Deux ou trois choses ressortent de notre discussion. Je reviens aux recommandations du Comité de l'environnement. Il a proposé que l'on modifie la façon dont les produits dangereux sont définis. Vous venez de dire qu'à l'heure actuelle, c'est la ministre qui prend la décision définitive en fonction des recommandations de votre ministère.
Auparavant, l'évaluation était fondée sur le risque. Vous examinez une situation ou un projet et vous constatez, par exemple, qu'il y aurait trois parties par million de mercure et que cela constituerait un risque. Mais puisqu'il y a du mercure dans la nature, on peut en tolérer un certain niveau. Le fait que nous respirons contribue à l'effet de serre, mais nous n'allons quand même pas cesser de respirer, n'est-ce pas?
Quoi qu'il en soit, auparavant, on se fondait sur le risque. On propose maintenant de fonder l'évaluation sur la toxicité intrinsèque des rejets. Quelle incidence cela aura-t-il sur le processus d'approbation?
C'est un changement de taille, parce que ça signifie qu'on s'éloigne du processus scientifique dont vous avez parlé plus tôt, et selon lequel, toutes choses étant égales par ailleurs, vous donnez votre approbation parce que vous estimez qu'il n'y a pas de risque ou que le risque est acceptable. Cela ne se ferait plus ainsi, selon ces recommandations. Il deviendra alors pratiquement impossible d'exploiter une mine, parce que les mines engendrent toujours des sous-produits.
Qu'adviendra-t-il du processus d'approbation, à votre avis, si vous abandonnez l'évaluation fondée sur les risques pour adopter plutôt une analyse en fonction de la toxicité intrinsèque?
M. Shantora: Permettez-moi de revenir en arrière. Notre intention n'est pas d'abandonner l'analyse fondée sur les risques. La politique de gestion de substances toxiques que j'ai décrite tout à l'heure reconnaît l'importance d'une approche fondée sur le risque. Je présume que vous faites allusion au rapport du comité parlementaire.
M. Strahl: Oui.
M. Shantora: Je me suis entretenu avec certains des membres de ce comité. Sans vouloir m'exprimer en leur nom, je crois pouvoir dire qu'ils estimaient que l'approche fondée sur la toxicité inhérente pouvait s'appliquer aux substances de la filière numéro un - le DDT et les pesticides les plus toxiques - et non pas à toutes les substances. Je me trompe peut-être, voilà pourquoi je nuance mes propos, mais c'est l'impression que j'ai eue.
Ce facteur détermine comment nous définissons quelles substances deviennent des substances de la première catégorie. Nous devons inciter les compagnies et les industries, qu'il s'agisse d'un vieux produit ou surtout d'un nouveau produit, à faire les analyses appropriées dès le début afin de déterminer s'il s'agit d'un produit persistant, toxique ou biocumulatif. Si c'est le cas, nous devons nous assurer que nous avons ce genre de données afin d'effectuer une évaluation.
Néanmoins, il faut dire que c'est toujours une approche qui comporte des risques.
M. Strahl: Je viens du secteur de l'exploitation du bois et je sais que travailler en fonction de la Loi sur les pêches, c'est comme travailler de concert avec la toute-puissance - et je ne fais pas allusion uniquement au gouvernement fédéral. Il est quasiment impossible de se conformer à cette loi. Le paragraphe 36(3) stipule qu'on ne peut introduire aucune substance nocive dans un ruisseau, ce qui veut dire que vous violez cette loi en traversant un ruisseau à pied parce que, en le traversant, les saletés de vos bottes, c'est-à-dire les substances nocives, vont être introduites dans l'eau.
Vous ne pouvez jamais gagner; si les inspecteurs veulent appliquer le règlement à la lettre, ils peuvent vous faire fermer boutique à n'importe quel moment, ce qui explique pourquoi vous devez passer votre temps à vous aplatir devant eux, dans l'espoir qu'ils vont quitter votre lieu de travail avant de vous forcer à fermer vos portes, puisque peu importe ce que vous faites, vous pouvez toujours être dans une situation où vous violez la Loi sur les pêches.
Il s'agit d'un principe très important. Si vous accordez à qui de droit le genre de pouvoir qu'on trouve dans la Loi sur les pêches, par le biais de la Loi sur l'environnement en général, il serait très difficile pour les gens de rester en affaires.
J'ai une autre question qui porte sur le programme volontaire de réduction des émissions, c'est-à-dire le programme ARET. De plus, la ministre des Ressources naturelles parle beaucoup du programme volontaire de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle accorde beaucoup d'importance à ce programme et, bien entendu, l'industrie se donne beaucoup de mal pour se conformer à ce programme volontaire afin d'éviter d'autres règlements supplémentaires. L'industrie espère pouvoir réduire les émissions de gaz à effet de serre de façon à satisfaire le gouvernement, le milieu international et les consommateurs pour éviter un processus réglementaire qui sera, à son avis, sans doute moins efficace et beaucoup plus difficile à respecter.
Jusqu'à présent la ministre des Ressources naturelles a dit qu'elle entend prendre cette voie. Elle a dit qu'elle allait mettre l'accent sur l'aspect volontaire de ce programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre. C'est l'orientation qu'elle veut prendre.
La semaine prochaine je vais recevoir un rapport sur l'aspect volontaire de ce programme, c'est-à-dire comment il fonctionne, s'il fonctionne et ainsi de suite. Je tiens à faire ressortir le fait qu'on met vraiment l'accent sur l'aspect volontaire et proactif de ce programme.
Il me semble que dans le secteur minier que vous êtes en train de nous décrire, on pourrait presque qualifier d'arrière-pensée l'aspect volontaire, tel que représenté par l'ARET. Ou bien lui accorde-t-on la même importance que Mme McLellan semble accorder au programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre? En d'autres termes, est-ce que le ministère de l'Environnement considère que le programme ARET représente la bonne approche, ou est-ce qu'on le voit plutôt comme un bon programme, compte tenu de ses limites, tout en pensant qu'il faut plutôt adopter des règlements?
En d'autres termes, l'industrie dit qu'il est très difficile de se conformer aux règlements à 100 p. 100. Nos programmes volontaires pourraient être plus acceptables.
M. Shantora: Je vous ai parlé d'un mélange d'instruments et du besoin d'élargir la portée de ces instruments. Je crois qu'on pourrait les qualifier aujourd'hui de projet pilote - il s'agit d'une expérience. Il y a d'autres projets pilotes qu'on entreprend de concert avec les fabricants d'automobiles dans la région des Grands Lacs, les fabricants de pièces d'automobiles, et ces projets visent à prévenir la pollution; ils semblent connaître un certain succès. Nous avons obtenu des bilans très positifs de ces groupes.
Comme je l'ai fait remarquer dans mon exposé, et c'est une chose qu'on nous répète inlassablement, si nous n'obtenons pas une participation à 100 p. 100, que faire de ces parasites qui refusent de participer à nos programmes?
Certaines associations du secteur... je vais parler de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques en particulier, parce que je connais bien les activités de ce groupe. Cette association exerce de grosses pressions sur les membres qui ne participent pas encore au programme ARET, en les enjoignant fortement de le faire.
Je crois qu'il y aura passablement de pression exercée par les pairs, mais au bout du compte, même si vous avez 50 ou 60 ou même 80 p. 100 de vos membres qui s'engagent et qui respectent leurs engagements, si les autres ne le font pas...
M. Strahl: Ils ne sont pas sur un pied d'égalité.
M. Shantora: Oui, exactement.
M. Strahl: Disons que vous obtenez un taux de 80 p. 100 de réduction volontaire du plomb dans les résidus. Comme ce n'est pas 100 p. 100, tout le monde veut s'en mêler, l'industrie et le gouvernement. Tous sont irrités par le mouton noir qui continue de refuser d'en tenir compte. Que pourrait-on faire pour cibler ce mouton noir en particulier au lieu de dire, bon, ça n'a pas marché puisque nous n'avons pas un taux de 100 p. 100, alors je suis désolé, mais vous devrez tous subir la réglementation afin d'obliger cet unique mouton noir à rentrer dans le rang?
Y aurait-il moyen de cibler quelqu'un en particulier, tout en laissant les autres, les bons citoyens, faire ce qu'ils font déjà?
M. Shantora: C'est exactement ce que nous essayons de faire, c'est-à-dire d'élaborer un système quelconque qui établira les mêmes règles du jeu pour tous sans pénaliser tout le monde à cause d'une poignée de contrevenants.
M. Strahl: Avez-vous des exemples? Vous y travaillez, mais qu'est-ce que cela veut dire exactement?
M. Shantora: Nous y travaillons dans le sens que nous essayons d'élaborer un document de travail. Pour le moment, je n'ai donc absolument rien à vous montrer, mais je peux vous donner un exemple dans le secteur des pâtes et papiers. Ce n'est peut-être pas tout à fait pertinent, mais cela s'en rapproche.
Dans ce secteur, nous avons pris de nouveaux règlements vers 1992 et tous devront les respecter d'ici à la fin de l'année. Pour les compagnies qui respectent intégralement le règlement et qui peuvent démontrer qu'au cours d'une période de je ne sais plus trop combien de mois, toutes les normes ont été régulièrement et constamment dépassées, nous disons, bon, vous pouvez réduire la fréquence de l'échantillonnage. Cela réduit évidemment le coût et le fardeau pour cette compagnie.
À la première infraction, la compagnie doit revenir à l'ancien système. Dans l'intervalle, nos inspecteurs ou agents d'enquête peuvent leur rendre visite pour essayer de comprendre ce qui s'est passé et quelles mesures pourraient être prises pour y remédier. C'est un exemple de ce que l'on peut faire, c'est-à-dire que l'on peut tenir compte des mérites des entreprises qui obtiennent constamment de bons résultats; c'est un peu comme la maîtresse d'école qui colle une étoile dorée dans le cahier d'un élève pour reconnaître ses mérites.
M. Strahl: Je crois connaître le secteur. Je ne dis pas que tous sont animés d'un sentiment d'altruisme, mais ils le font pour une foule de raisons, notamment la confiance du consommateur, l'acceptabilité internationale, etc. C'est dans leur intérêt et c'est justement ce que nous essayons d'obtenir.
Je suppose que vous n'avez pas d'échéancier précis pour ce document de travail dont vous avez parlé. Il me semble que si nous voulons que ce soit attrayant et souhaitable pour ces bons citoyens d'entrer dans le mouvement, nous pouvons faire un bon bout de chemin avec cela, compte tenu du fait que le monde entier s'intéresse actuellement aux questions environnementales. C'est vraiment la chose à faire. Si nous pouvons trouver le moyen de faire ce que vous décrivez, c'est-à-dire de réduire sensiblement leur fardeau - (paperasse, coûts, échantillonnage, etc.) - cela pourrait faire une grande différence et nous pourrions fixer des normes dont nous serions tous fiers.
M. Shantora: Nous allons persévérer. Je trouve qu'il y a des possibilités de ce côté.
M. Strahl: Il faut que ça aboutisse bientôt.
Le président: J'ai une brève question.
Il y a des gens qui suggèrent de temps à autre que la solution à ce problème, je veux dire les compagnies qui refusent de se conformer volontairement, c'est simplement d'en aviser leurs clients ou d'avertir quiconque achète leurs produits que cette compagnie donne le mauvais exemple, en fournissant une liste de fournisseurs susceptibles de la remplacer. Certains ont dit que ce geste pourrait infléchir leur comportement. Qu'en pensez-vous?
M. Shantora: En fait, nous en avons un excellent exemple au Canada aujourd'hui. Si votre calendrier vous le permet, vous devriez inviter l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques à témoigner. Depuis bon nombre d'années maintenant, l'association a établi un programme appelé gestion responsable.
En fait, ils se sont aperçus par des sondages d'opinion que le grand public avait une très mauvaise opinion de leur secteur et que leurs membres étaient moins bien considérés que des vendeurs d'autos usagées. Ils ont donc mis beaucoup d'effort dans ce Programme de gestion responsable afin d'inverser la tendance. Ils ne font pas exactement ce que vous laissez entendre, mais ils demandent aux dirigeants d'entreprise de signer un document pour prendre certains engagements de base. C'est une condition d'adhésion et si l'on ne respecte pas ces engagements, on est expulsé.
Le président: Monsieur Rideout.
M. Rideout (Moncton): J'ai deux questions à poser.
Nous n'avons pas beaucoup parlé du recyclage ni de la définition de déchets. Je me demande si vous avez des observations à faire dans ce domaine général, parce qu'en un sens, nous essayons d'encourager le recyclage, mais en même temps, nous disons que vous ne pouvez pas transporter tel ou tel produit parce que ce sont des déchets, vous ne pouvez pas faire ceci ou cela. N'y a-t-il pas contradiction?
Je vous invite à faire des observations tout à fait générales.
M. Shantora: Je crois que le gouvernement et Environnement Canada en particulier ont déployé beaucoup d'effort pour promouvoir et appuyer le recyclage, de même que les provinces. Nous sommes tout à fait conscients de la nécessité de recycler. Chose certaine, les fonderies de plomb nous rendent tous un très grand service en récupérant les batteries pour en traiter le plomb, etc.
La question que vous soulevez découle en partie de la Convention de Bâle et du fait que les pays du tiers monde craignaient, à tort ou à raison, de devenir un lieu de déversement de déchets dangereux du premier monde. Premièrement, le principal pays exportateur de déchets, si je peux utiliser cette expression, c'est les États-Unis, simplement parce que nous avons au Canada des installations de traitement, d'élimination et de recyclage des déchets dangereux, et ils en ont aussi. Il se trouve que c'est très rentable en termes de distance ou du type de déchets qu'on transporte, mais ces déchets sont transportés librement; enfin, ces mouvements sont contrôlés, mais on peut quand même les transporter de part et d'autre des frontières.
Nous avons quelques dossiers difficiles du côté du programme des Nations unies pour l'environnement en ce qui concerne l'exportation de déchets dans les pays du tiers monde. Le Canada croit que les déchets destinés au recyclage méritent une reconnaissance spéciale. Ce n'est pas un point de vue universellement adopté. Nous devons manifestement travailler davantage la question.
Tout cela revient au principe de base que le recyclage est une bonne chose. Pourquoi remplir des décharges de produits qui ont encore une certaine valeur économique. Faisons-en bon usage.
M. Rideout: En fait, ce n'est peut-être pas dans la même catégorie, mais il y a certaines entreprises, notamment dans le secteur de l'affinage du cuivre, qui fermeraient leurs portes s'il ne se faisait pas de recyclage, parce qu'il n'y a tout simplement pas suffisamment de matières premières. Le recyclage est un élément essentiel.
Y a-t-il quelque chose que notre comité pourrait faire pour faire progresser le dossier ou pour faire changer la définition? Y a-t-il autre chose que l'on puisse faire dans ce dossier?
M. Shantora: Je ne sais trop quoi vous dire. Je ne peux pas répondre à votre question aujourd'hui, mais je me ferai un plaisir de vous apporter de la documentation à ma prochaine comparution ou bien de vous faire parvenir des documents plus détaillés sur cette question.
M. Rideout: Je ne veux pas jouer au plus fin quand je pose cette question, mais depuis la Commission Brundland, nous avons adopté le concept de «développement durable». Ces derniers mois, on commence à entendre des définitions différentes du développement durable, c'est-à-dire que l'on ne met plus l'accent sur le développement, mais plutôt sur le terme «durable». Pourriez-vous me dire si vous en avez adopté une définition précise? Sinon, assiste-t-on à un changement à cet égard?
J'ai rencontré le président du Comité permanent de l'environnement et il m'a dit en termes clairs que le développement ne se produit qu'après qu'on s'est assuré qu'il n'y a aucun risque nulle part. Par conséquent, on insiste surtout sur l'aspect durable, plutôt que sur le développement. Au ministère, avez-vous une définition pour vous guider?
C'est ma dernière question.
M. Shantora: Oui. Je ne peux la citer par coeur, mais on y dit en gros que nous devons utiliser nos ressources avec sagesse, pour nous-mêmes, sans pour autant nuire à la capacité des générations futures de les utiliser à leur tour. C'est comme si on dépensait les intérêts et non le capital.
M. Reed: Peut-être qu'au cours des dix ou quinze dernières années, nous en sommes finalement venus à comprendre qu'il faut reconnaître que les humains font partie de la nature. Nous avons traversé une période où nous devions nous sentir coupables, en tant qu'ennemis de la nature, ce que nous ne sommes pas, en fait. Parfois, nous faisons ce qu'il ne faut pas. Il nous faut le reconnaître et soit cesser de le faire, soit corriger la situation. Mais j'espère que la définition de «durable» évoluera jusqu'à nous inclure quand on fait partie intégrante de la planète.
Monsieur le président, j'étais intéressé par le propos de mon collègue du Bloc au sujet des eaux navigables. Notez bien que je souhaite que le comité reçoive les responsables de l'administration de la Loi sur les eaux navigables. Nous aurions peut-être tous des questions à leur poser.
On a formulé un commentaire au sujet du transport transfrontalier des déchets; on a dit qu'il était parfois économique de procéder ainsi. D'après mon expérience, l'importation ou l'exportation de déchets est une question politique. Cela a servi à échapper aux prophètes de malheurs, lorsqu'une population doit s'occuper de ses propres déchets.
Je peux parler de ma propre circonscription, Halton - Peel, où la région de Halton, à un moment donné, avait envisagé des programmes de production d'énergie à partir des déchets. Il a fallu les abandonner, sous la pression des prophètes de malheurs. Nous avons fini par envoyer nos déchets dans l'État de New York, où ils sont incinérés à un prix qui, je dois le dire, n'est pas du tout concurrentiel...Avec l'argent qui a été payé en redevances de déversement, on aurait pu construire et exploiter de nombreuses usines de production d'énergie à partir des déchets.
Comme vous le savez, on est en train de vivre la même situation dans la grande région de Toronto. Les options ne seront pas choisies en fonction de critères économiques, mais politiques. Encore une fois, les prophètes de malheurs sont sortis de leur cachette. On dirait qu'ils gagnent leur vie de cette façon. Ça semble faire leur affaire de condamner certaines technologies qui pourraient très bien servir la population.
Je ne sais pas comment votre processus réglementaire se rapporte à cela, mais je vous parle de problèmes très sérieux, qui doivent être réglés.
J'ai une question. Elle porte sur votre examen de la réglementation. Il s'agit d'un examen interne que vous menez. Vous examinez les règlements, si j'ai bien compris, pour déterminer s'ils sont encore pertinents, s'ils pourraient être fusionnés avec d'autres ou être plus efficients. Au risque de semer la controverse, j'aimerais savoir si vous êtes bien la meilleure personne pour faire le travail? Est-ce mettre le loup dans la bergerie?
M. Shantora: Je ne pense pas que le loup soit dans la bergerie. Il s'agit d'un processus interne, pas au sein d'Environnement Canada. J'ai déjà dit que cela avait découlé de l'énoncé budgétaire de 1992, je crois. Les organismes centraux ont participé à l'élaboration des directives régissant ces examens. Je pense qu'on a demandé à tous les ministères de procéder à cet examen.
Nous avions des directives claires et précises sur ce que nous devions examiner, comment nous devions le faire, etc. Je pense que c'est un examen assez rigoureux. En passant, il est terminé et je pense que nous pourrions vous faire parvenir nos rapports, si vous le souhaitez.
M. Reed: Merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Je ne pense pas qu'il y ait d'autres questions. Nous avons quelques questions à vous poser par écrit. Nous vous demandons de bien vouloir y répondre, le comité vous en serait reconnaissant. Nous vous les donnerons après la séance.
M. Shantora: Bien.
Le président: Nous vous remercions beaucoup de votre présence et de nous avoir fait part de votre point de vue. Nos souhaits vous accompagnent.
M. Shantora: Nous espérons avoir été utiles.
Le président: C'est certainement le cas. Merci beaucoup.
La séance est levée et sera suivie d'une très courte réunion du comité directeur.