[Enregistrement électronique]
Le jeudi 1er juin 1995
[Traduction]
Le président: À l'ordre.
Bonjour, collègues. Aujourd'hui, le comité reprend l'étude du projet de loi C-89, Loi prévoyant la prorogation de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada sous le régime de la Loi canadienne sur les sociétés par actions ainsi que l'émission et la vente de ses actions au public, connue également sous le nom de la Loi sur la commercialisation du CN.
Nous avons parmi nous ce matin un porte-parole de la Coalition pour la sauvegarde du Pont de Québec, M. Jacques Jobin.
Bonjour, monsieur. Avez-vous un mémoire à notre intention, ce matin? Je demanderai à la greffière de le distribuer et je vous prie de commencer.
[Français]
M. Jacques Jobin (porte-parole, Coalition pour la sauvegarde du Pont de Québec): Je désire d'abord vous remercier. Je peux faire distribuer à chacun un exemplaire de notre mémoire. J'ai également quelques exemplaires du mémoire avec photos que j'aimerais distribuer aux représentants des trois partis politiques qui sont présents.
Je désire d'abord vous remercier d'accueillir la Coalition pour la sauvegarde du Pont de Québec. Notre organisme représente 25 organisations du Québec et du Canada, lesquelles représentent deux millions de personnes à travers le Canada. L'objectif de la Coalition est double. D'une part, c'est la sauvegarde du pont de Québec, qui est un monument historique patrimonial canadien, reconnu à travers le monde.
Pourquoi la sauvegarde? C'est tout simplement parce que le pont est dans un état de détérioration extrêmement avancée. On évalue à l'heure actuelle les coûts de réfection du pont à 45 millions de dollars.
Le deuxième objectif de la Coalition, c'est la mise en valeur du pont de Québec, une fois qu'il sera rénové, comme monument national, comme élément touristique de la grande région de Québec. On évalue que la mise en valeur pourrait générer une activité très importante pour la région de Québec. Le pont de Québec fait partie de l'histoire canadienne. C'est sir Wilfrid Laurier, premier ministre du Canada, qui en a été le parrain. Il a fait en sorte qu'au début du siècle, en 1900, les travaux de construction du pont soient amorcés. La construction du pont de Québec a été marquée par deux grandes tragédies qui ont fait 89 morts.
Le pont de Québec a toujours été la propriété du gouvernement fédéral. Au début, il était essentiellement ferroviaire, mais avec le développement de l'automobile, il est devenu un lien routier important. Par conséquent, en 1949, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec ont conclu une entente permettant au gouvernement du Québec d'utiliser le pont de Québec, moyennant une somme de 25 000$ par année. Cette entente est valable jusqu'en 2012.
Le gouvernement du Canada, qui a été propriétaire du pont de Québec jusqu'en 1993, en a confié la gestion au Canadien National au début des années 1920. Celui-ci en a fait l'entretien de façon correcte et satisfaisante jusqu'au début des années 1980. Puis, comme il a cessé d'investir les sommes requises à son entretien, le pont de Québec a commencé à se détériorer.
L'entretien normal du pont de Québec est évalué à trois millions de dollars par année. Or, depuis le début des années 1980, le CN a investi environ 600 000$ par année. Donc, d'année en année, l'état du pont de Québec s'est détérioré de façon importante et vous allez pouvoir constater, en regardant les photos que nous avons déposées et qui datent de 1990, que le pont de Québec est rouillé et qu'il est dans un état de délabrement inacceptable. Comme je le disais tout à l'heure, on évalue à environ 45 millions de dollars son coût de réfection.
Donc, en juillet 1993, et c'est extrêmement important, une entente a été conclue entre le gouvernement fédéral et le Canadien National, entente aux termes de laquelle le gouvernement fédéral cédait au Canadien National le pont de Québec ainsi que des terrains pour 1$. On nous a dit, au cabinet du ministre des Transports, que ces terrains étaient évalués à 30 millions de dollars. Donc, en juillet 1993, le pont de Québec est devenu la propriété du Canadien National et, conformément à l'entente, celui-ci avait l'obligation d'entreprendre un grand programme de réfection et d'éclairage du pont de Québec pour le remettre en état. Cette obligation est clairement prévue à l'article 4 de l'entente.
Or, ce que le gouvernement fédéral prétendait à l'époque, c'était que le Canadien National avait l'obligation d'entreprendre le travail de réfection, donc de respecter l'article 4 de l'entente, en contrepartie de la cession de terrains. En réalité, depuis cette entente de 1993, il n'y a pas eu de programme de réfection ni d'entretien du pont de Québec, ce qui fait que le pont continue à se détériorer de façon importante.
Évidemment, la Coalition pour la sauvegarde du Pont de Québec est intervenue auprès du gouvernement du Canada, du CN et du gouvernement du Québec par le biais du ministère des Transports du Québec pour tenter de convaincre ces trois parties de s'entendre sur un programme de réfection qui pourrait se faire sur six à sept ans et qui permettrait de sauver le pont de Québec.
Si la détérioration du pont de Québec continue à ce rythme, les spécialistes prédisent que dans 30 ans, il faudra le condamner et possiblement le démolir. Le coût de démolition est évalué en argent de 1990 à 100 millions de dollars.
Donc, nous avons tenté de convaincre les trois intervenants d'adopter un programme de réfection et il y a eu une ouverture de la part du CN et du gouvernement du Québec pour conclure une entente à cet effet.
Or, c'est dans ce contexte qu'intervient le projet de loi. Je vais vous dire au nom de la Coalition que nous sommes extrêmement inquiets des conséquences du projet de loi. Si le pont de Québec est privatisé dans le cadre de la privatisation des actifs du Canadien National, le gouvernement fédéral n'aura plus d'obligation morale envers le pont de Québec.
Il est fort possible aussi que le Canadien National, une fois privatisé - surtout s'il appartient en majorité à des intérêts étrangers - ne donne pas la priorité au pont de Québec. En effet, il nous a déjà confirmé que le pont de Québec ne serait plus absolument nécessaire à ses opérations puisqu'il pourrait transiter par la rive nord de Québec.
À ce moment-là, il pourrait fermer la voie ferrée sur le pont de Québec, qui est la seule voie ferrée unissant les deux rives et qui permet aux entreprises de la région de Québec de transiter leurs marchandises par le pont de Québec à destination du marché américain et des Maritimes.
Au début du siècle, le pont de Québec a été construit justement pour réunir la rive nord et la rive sud de Québec pour permettre aux entreprises de Québec d'exporter leurs machandises vers les États-Unis et vers les Maritimes. Donc, la condamnation du pont de Québec par le biais de la fermeture de la voie ferrée aurait un impact économique désastreux pour la région de Québec.
Donc, nous venons vous voir aujourd'hui essentiellement pour vous dire qu'à notre avis, compte tenu que le pont de Québec est un monument national; compte tenu que le pont de Québec, selon les dires même de sir Wilfrid Laurier, est un momument patriotique; compte tenu que le gouvernement du Canada a des obligations légales et morales envers le pont de Québec et envers la région de Québec; compte tenu que l'entente de 1993 qui transférait le pont de Québec au CN obligeait celui-ci à entreprendre un programme de réfection pour le pont de Québec; compte tenu que ces ententes n'ont pas été respectées; compte tenu des dangers que représenterait la privatisation pour la survie du pont de Québec, la Coalition pour la sauvegarde du Pont de Québec - qui représente 2 millions de personnes - demande aujourd'hui d'exclure le pont de Québec de la privatisation du CN.
On a appris récemment que plusieurs immeubles du CN, comme la Tour du CN à Toronto, ne feraient pas partie de la privatisation parce que le gouvernement canadien les rachète. Notre Coalition croit fermement que le gouvernement fédéral devrait adopter la même attitude envers le pont de Québec et se prévaloir de l'article 6 du projet de loi pour que celui-ci lui soit remis. Cela assurerait sa conservation, parce que le gouvernement fédéral est le mieux placé pour négocier une entente avec le gouvernement provincial et avec le CN concernant la survie et la conservation du pont.
Si le pont passe à des intérêts privés, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial vont hésiter fortement à investir des deniers publics dans un bien appartenant à une entreprise privée, et l'entreprise privée qui sera le futur CN n'aura sûrement pas comme priorité d'investir 45 millions de dollars dans un bien dont elle n'a pas essentiellement besoin pour ses opérations.
Je voudrais, en terminant, vous remettre en guise d'amitié et de solidarité un livre qui a été écrit sur l'histoire du pont de Québec et qui s'intitule Une merveille du monde. Lors de la construction du pont, sir Wilfrid Laurier avait dit que le pont de Québec serait une merveille du monde. Vous allez lire dans ce livre et vous allez voir, photos à l'appui, toute l'importance qu'a le pont de Québec dans l'histoire du Canada. Nous désirons vous en remettre un exemplaire.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup monsieur Jobin, c'est très généreux de votre part.
Passons maintenant à quelques questions.
[Français]
M. Guimond (Beauport - Montmorency - Orléans): Avant toute chose, j'aimerais, pour le bénéfice de mes collègues, souligner la présence de mon collègue, le député de Louis-Hébert. Une des extrémités du pont de Québec est située dans son comté. Mon collègue de Louis-Hébert suit le dossier du pont de Québec de façon très assidue et très attentive ainsi que mon collègue, le député de Lévis.
Monsieur Jobin, je vous remercie de votre présentation. Je ne suis pas persuadé que la majorité de mes collègues du Comité autour de cette table comprend le sens de votre présentation. En plus, je crois que vous êtes conseiller municipal à la Ville de Québec. Ils pourraient peut-être se demander pourquoi la Ville de Québec n'a pas déposé, dans le cadre du programme d'infrastructure, une demande d'aide pour rénover le pont de Québec.
Encore une fois, j'aimerais que vous mettiez l'accent sur le propriétaire du pont de Québec et que vous nous disiez en quoi le projet de loi C-89 devient déterminant pour l'avenir du pont de Québec. Je pense qu'il serait bon que vous mettiez à nouveau l'accent sur le propriétaire et que vous nous expliquiez quels sont les articles du projet de loi qui sont pertinents au pont de Québec.
M. Jobin: Pour ce qui du programme des infrastructures, nous avons pris des renseignements au ministère des Affaires municipales et il s'avérait impossible d'investir dans le pont de Québec par le biais de ce programme parce que le pont de Québec appartient au Canadien National. Par ailleurs, il était impossible de puiser dans le programme des infrastructures, car il n'y avait pas d'argent disponible.
[Traduction]
Le président: C'était quand?
[Français]
M. Jobin: Il y a environ trois mois, j'ai eu des discussions avec le ministère des Transports du Québec. J'ai également eu des discussions avec le bureau du ministre des Transports du Canada, M. Young. Malheureusement, il n'était pas possible de se prévaloir du programme des infrastructures.
Quant au projet de loi, il est important pour la raison suivante: le pont de Québec va devenir un actif du CN privatisé. À ce moment-là, le CN n'aura plus vraiment intérêt à investir dans la réfection du pont de Québec. Le CN sera une entreprise privée et non plus une société de la Couronne.
À notre avis, il serait même possible que le CN privatisé dise tout simplement qu'il n'est plus lié par l'entente de 1993. L'entente de 1993 cédait des terrains au CN, mais on nous dit, au ministère des Transports du Canada, qu'un bon nombre des terrains qui ont été cédés par l'entente de 1993 vont retourner au gouvernement fédéral par le biais de l'application de l'article 6 du projet de loi.
Finalement, on se retrouve devant une sorte de vide juridique à cause duquel l'entente risque de ne jamais être respectée.
J'attire votre attention sur l'article 6 où on dit:
- Le ministre peut, pendant que le CN est une société d'État au sens de l'article 83...
- et c'est le cas actuellement
- ...de la Loi sur la gestion des finances publiques, ordonner au CN de lui transférer - ou de
transférer à tout ministre ou à toute autre société d'État désignés par le gouverneur en
conseil - les biens,...
- Le pont de Québec est un bien, évidemment.
- ...notamment les baux, droits, intérêts et avantages, qu'il juge indiqués, et ce aux conditions
qu'il juge indiquées, notamment la remise d'une contrepartie s'il en est; le CN est tenu de se
conformer sans délai à ces ordres.
- L'article 12 également est extrêmement important. Il dit ceci:
- 12. Le ministre peut, avec l'agrément du ministre des Finances:
- a) conclure avec le CN ou toute autre personne des accords ou autres ententes sur
l'acquisition, la détention, le paiement, la cession ou l'acquittement des dettes, créances,
obligations du CN ou des sûretés données par le CN, ou sur toute autre opération à leur
égard;
- c) prélever sur le Trésor ou sur le produit de la vente d'actions, de créances ou
d'obligations du CN ou de sûretés données par le CN les fonds relatifs à tout accord ou
entente visée aux alinéas a) ou b).
Nous trouvons qu'il serait extrêmement important que le pont de Québec ne fasse pas partie des actifs qui seront privatisés par le projet de loi. Nous pensons que, pour les raisons que nous avons déjà données, le projet de loi prévoit des dispositions permettant au gouvernement de récupérer des biens dont, entre autres, le pont de Québec, afin qu'il respecte son obligation historique et son obligation légale envers le pont de Québec.
M. Guimond: Aujourd'hui, qui est propriétaire du pont de Québec?
M. Jobin: Depuis l'entente de juillet 1993, le propriétaire du pont de Québec est le Canadien National.
M. Guimond: Pourquoi seulement depuis juillet 1993?
M. Jobin: Parce qu'auparavant, c'était le gouvernement fédéral qui en était le propriétaire. Il en a été le propriétaire depuis le tout début, soit dès 1900, puisqu'il avait été à l'origine de sa construction. Et en juillet 1993, le gouvernement fédéral et le CN ont conclu une entente, entente selon laquelle le gouvernement fédéral cédait le pont de Québec au CN. J'ai l'entente ici devant moi.
M. Guimond: Est-ce que vous pourriez la déposer auprès de la greffière du Comité?
M. Jobin: Oui, absolument.
C'est le décret 143059. Je vais vous lire l'article 4 en anglais, avec mon meilleur anglais!
[Traduction]
- (4) Le Canada transfère le pont du Québec au CN comme premier transfert en bloc des terres
appartenant au gouvernement du Canada. Le CN s'engage à financer un vaste programme
d'entretien du pont qui comprend l'installation et l'entretien d'éclairage architectural pour
restorer la structure et ainsi assurer sa viabilité à long terme sans pour autant limiter l'obligation
du CN telle que précisée plus haut. Le CN va chercher à conclure une entente avec la province
du Québec pour établir ensemble ce programme.
M. Guimond: Vous faites référence à un major maintenance program. Est-ce que ce sont des évaluations indépendantes? D'après le CN, quelle est l'envergure de ce programme de rénovations? À combien de millions de dollars s'élève-t-il?
M. Jobin: Selon les informations obtenues de la part du Canadien National, de la part du ministère des Transports du Québec et de la part de certains entrepreneurs indépendants, le coût actuel de la restauration du pont de Québec est évalué à environ 45 millions de dollars.
M. Guimond: Vous ne voudriez pas qu'une compagnie CN privatisée ne se rende pas responsable de ce programme de rénovations et dise: «Je n'ai rien à voir avec ce programme de 45 millions de dollars» ou encore: «Si je suis responsable, ça ne fait pas du tout partie de mes priorités; on va reporter ça aux calendes grecques». C'est pour ça que vous témoignez devant nous et c'est pour ça que vous nous dites que l'article 6 et l'article 12 du projet de loi C-89 devraient être modifiées pour s'assurer que le gouvernement fédéral demeure responsable de ce programme d'entretien de 45 millions de dollars. Est-ce exact?
M. Jobin: Oui. Vous avez raison en bonne partie parce que le Canadien National actuel, qui est une société de la Couronne, donc qui, en principe, est sensible aux volontés politiques, nous dit qu'il n'a ni les moyens ni la responsabilité d'investir un montant de 45 millions dans le pont de Québec parce qu'au moment où la détérioration du pont de Québec s'est faite, le propriétaire était le gouvernement fédéral et non pas le CN.
Donc, le CN société d'État nous dit: «Non, nous n'avons ni les moyens ni l'obligation de faire ce travail. La question que nous posons: Qu'en sera-t-il d'un Canadien National privatisé appartenant possiblement à des intérêts étrangers? Nous, nous sommes convaincus que le Canadien National privatisé n'aura pas comme priorité d'investir dans la réfection du pont et compte tenu que la détérioration du pont se fait de façon exponentielle, c'est-à-dire que chaque jour qui passe, le pont se détériore de plus en plus, le coût de la réfection risque d'être extrêmement élevé.
[Traduction]
M. Fontana (London-Est): Je vous remercie de votre exposé. J'essaie de bien comprendre les faits. Le gouvernement fédéral était propriétaire du pont et en 1993 il l'a transféré au Canadien National en vertu d'une entente qui comporte des obligations aussi bien pour lui que pour la province de Québec.
Si je comprends bien cette entente, la province de Québec devait aussi participer à l'entretien du pont. Vous venez de lire cet extrait et j'aimerais bien y jeter un coup d'oeil.
Permettez-moi de vous dire néanmoins qu'à mon avis vous interprétez mal les articles 6 et 12 et voici pourquoi. Je reconnais avec vous que le CN et le gouvernement fédéral précédent se sont tous les deux engagés à certaines choses.
On peut encore apprendre beaucoup de choses, mais je crois que vous interprétez mal l'article 6 qui traite des actifs non ferroviaires du CN. Il s'agit de l'immobilier. Cet article traite des biens du CN qui ne font pas partie comme tels de l'infrastructure du chemin de fer.
Donc, si on vous accordait une exemption en vertu de l'article 6, je peux vous garantir que chaque municipalité du pays demandait la même exemption pour chaque tronçon de chemin de fer, chaque pont, chaque gare du pays qui a une quelconque valeur historique. Mais ce n'est pas là le but de l'article 6. L'article 6 traite du transfert de biens non ferroviaires.
Cela ne veut pas dire pour autant que nous ne comprenons pas votre préoccupation concernant l'obligation du CN de réparer le pont. Je crois que cette entente concerne le CN en tant que société de la Couronne et le CN comme compagnie privée. Cette entente est toujours en vigueur.
Si vous pouviez nous fournir une copie de l'entente que vous venez de porter à notre attention, nous allons demander à M. Paul Tellier du Canadien National de nous expliquer pourquoi le CN ne respecte pas, pour reprendre vos paroles, ses obligations au niveau de l'entretien.
Maintenant, puis-je vous poser une question? Vous avez dit que le pont n'est pas essentiel au réseau ferroviaire du CN. Le CN ne s'en sert pas à l'heure actuelle pour ses trains.
M. Guimond: Au contraire, il s'en sert.
M. Fontana: Est-ce qu'il s'en sert à l'heure actuelle pour les trains?
M. Jobin: Oui.
M. Fontana: Mais vous avez dit que cela ne sera plus le cas dans l'avenir.
[Français]
M. Jobin: Il est possible que le CN privatisé n'utilise plus le pont de Québec. Le CN nous a dit que s'il continuait à transiter par le pont de Québec, c'était beaucoup pour des considérations d'ordre politique parce que la société d'État qu'est le CN actuellement peut difficilement ne pas transiter par le pont de Québec compte tenu de l'impact économique considérable que cela représenterait pour la région de Québec.
[Traduction]
M. Fontana: Quelle est l'alternative? CN doit avoir recours à autre chose. Y a-t-il un autre pont, un autre moyen de traverser?
M. Guimond: On reste ou sur la côte nord ou sur la côte sud. Ce pont est le seul moyen de traverser.
[Français]
M. Jobin: J'aimerais faire certains commentaires sur ce que vous avez dit. D'abord, le pont de Québec n'est pas une structure comme n'importe quel pont. Ce n'est pas un bout de rail.
[Traduction]
M. Fontana: Je le sais. Vous avez présenté votre argument historique... Je ne veux pas m'attarder sur cela.
Est-ce que le CN a besoin de ce pont pour fonctionner? Si c'est le cas, le CN va garder le pont qu'il soit compagnie privée ou société de la Couronne. C'est pour cela que je vous ai demandé si le CN a absolument besoin du pont.
Laissez-moi terminer. Si par contre le CN ne trouve pas que le pont est essentiel à ses opérations de chemin de fer, vous pourriez songer à l'acheter. Les deux millions de personnes que vous représentez pourraient investir de concert avec les gouvernements provincial et municipal et acquérir ce pont pour protéger son intérêt historique, n'est-ce pas?
[Français]
M. Jobin: Lorsqu'on discute avec les gens du CN, ils nous disent très clairement que l'entente de 1993 leur a été pratiquement imposée. Il faut évidemment comprendre que le CN est une société d'État et en 1993, quand le gouvernement fédéral lui a cédé le pont de Québec, le CN n'en voulait pas nécessairement. Je pense que cela a été d'une certaine façon imposé par le gouvernement fédéral de l'époque. Mais par la même occasion, le gouvernement fédéral n'a pas remis au CN les 40 millions de dollars qui étaient nécessaires à sa réfection.
Le gouvernement du Canada nous dit aujourd'hui qu'il aurait transféré un certain nombre de terrains avec le pont de Québec. Mais on nous dit aussi aujourd'hui que plusieurs de ces terrains vont retourner au gouvernement fédéral par le biais d'un article du projet de privatisation.
Finalement, le CN privatisé nous dira: «Nous n'avons jamais reçu de juste contrepartie pour le pont de Québec.» Au moment où l'on se parle, le CN nous dit qu'il n'est pas nécessaire pour leurs opérations, qu'ils peuvent transiter par la rive nord de Québec. Donc, une fois que le pont de Québec sera entre les mains d'une entreprise privée, il est fort possible que cette même entreprise décide, pour des raisons financières, que la voie ferrée n'est plus nécessaire parce qu'elle peut transiter par la rive nord. Évidemment, si cette entreprise n'a pas besoin d'une voie ferrée, il serait assez surprenant qu'elle investisse 45 millions de dollars pour la réfection du pont de Québec. Et il serait aussi extrêmement surprenant que le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada acceptent d'investir des sommes d'argent dans un programme de réfection d'un bien qui appartient à une entreprise privée.
[Traduction]
M. Fontana: Je comprends.
Puis-je poser une question? Votre principale préoccupation est-elle de garder ce pont en tant que moyen de transport nécessaire au CN ou bien voulez-vous le garder pour des raisons historiques? Il y a une grande différence entre les deux.
[Français]
M. Jobin: Est-ce qu'on peut me traduire la question correctement? J'en ai perdu un...
M. Guimond: Vous pourriez mettre les écouteurs. Est-ce que vous voulez sauver le pont en tant que voie de transport ferroviaire ou en raison de son caractère historique?
[Traduction]
Est-ce exact, Joe?
M. Fontana: Oui, merci beaucoup. Michel, toi et moi, on fait une belle équipe.
[Français]
M. Jobin: En fait, la réponse est un peu les deux. D'une part, le pont a évidemment un caractère patrimonial absolument incontestable. D'autre part, si jamais le CN privatisé fermait la voie ferrée, l'impact économique pour la région de Québec serait très important, même dramatique.
J'ai discuté avec des entreprises comme Déchawa, par exemple, qui est à Québec, et 35 p. 100 des marchandises qui sortent de Déchawa transitent par le pont de Québec parce qu'elles vont en direction des Maritimes et des États-Unis. Si la voie ferrée est fermée sur le pont de Québec, la Déchawa devra transiter par Montréal avec une augmentation de coûts extrêmement importante. Dans un monde compétitif comme celui de la vente du papier, par exemple...
[Traduction]
Le président: Sur ce, je dois vous dire que le président a la tâche peu enviable de décider si les témoins ont eu la possibilité de bien présenter leur point de vue.
Le temps nous presse. Je trouve que vous défendez votre point avec vigueur. Votre Coalition pour sauvegarder le pont du Québec devrait être fière de votre exposé aujourd'hui. Nous vous remercions, messieurs.
M. Guimond: Vous devriez discuter avec M. Jobin au sujet de la province car c'est un ancien maire de Québec.
Le président: Pourrions-nous éviter d'y mêler la politique? Nous avons entendu les témoins...
M. Fontana: Dites-lui que nous allons lui trouver des réponses.
Le président: Joe, s'il vous plaît, à l'ordre. Je viens de remercier les témoins.
Nous vous remercions beaucoup de votre exposé et d'avoir répondu à nos questions.
[Français]
M. Jobin: En terminant, je veux remercier tous les membres du Comité et leur dire, avec toute la conviction qu'on peut avoir lorsqu'on parle au nom de deux millions de personnes, que ce dossier est extrêmement important. On compte sur l'équité et la justice des membres du Comité. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, messieurs.
Chers collègues, nous invitons maintenant l'Association canadienne des pâtes et papiers à se joindre à nous à la table. M. David Church en est le directeur.
David, allez-vous être porte-parole?
M. David Church (directeur, Transport, recyclage et achats, Association canadienne des pâtes et papiers): Oui, monsieur le président.
Le président: Soyez le bienvenu. Nous sommes impatients d'entendre votre mémoire. Pourriez-vous nous présenter les personnes qui vous accompagnent aujourd'hui?
M. Church: Monsieur le président, nous sommes très heureux de pouvoir comparaître devant vous aujourd'hui pour parler du projet de loi C-89, la Loi sur la commercialisation du CN.
M. Brian McGurk est le directeur corporatif des transports pour la société Avenor Inc. de Montréal, qui a des opérations tant au Nouveau-Brunswick, en Ontario et en Colombie-Britannique qu'au Québec.
M. Russ Lewis est le directeur général des transports pour la Stone Consolidated Corporation et pour Stone Container Canada. Il est le président de la section des transports et de la distribution de l'Association canadienne des pâtes et papiers. La société Stone a des opérations au Nouveau-Brunswick, au Québec et en Colombie-Britannique.
Enfin, M. Mel Nunweiler est le directeur général de la distribution à la Canadian Forest Products de Vancouver. Il est le vice-président de notre section des transports et de la distribution. La société pour laquelle il travaille a des opérations en Colombie-Britannique et en Alberta.
Vous avez sous les yeux un exemplaire de notre mémoire. Je passe tout de suite à la page 2 du document et à l'énoncé de la position de l'Association canadienne des pâtes et papiers.
En principe, l'ACPP appuie la commercialisation du CN Amérique du Nord. Lors de sa comparution devant le groupe de travail du gouvernement sur les chemins de fer nationaux du Canada, en décembre dernier, l'ACPP a fait savoir qu'à son avis, la rigueur imposée par la privatisation et les pressions découlant des exigences des actionnaires amélioreront la tenue des coûts du CN.
La commercialisation du CN devrait avoir pour effet d'améliorer son rendement financier. Quoi qu'il en soit, le projet de loi C-89 ne devrait pas être examiné seulement du point de vue des avantages qu'il pourrait procurer au CN.
Le ministre des Transports a annoncé que le gouvernement présenterait à la Chambre des communes une mesure législative visant à moderniser la réglementation en matière de transport applicable au CN. Elle devrait être présentée d'ici la fin du mois. Il ne faut pas chercher à atteindre l'objectif qui consiste à obtenir le meilleur prix possible pour le CN, au détriment d'un réseau de transport ferroviaire concurrentiel au Canada.
La vente du CN au secteur privé et son succès comme société de chemin de fer transcontinentale dépendent du plein appui que lui accorderont ses clients, qui sont des intervenants importants dans le processus. En d'autres termes, les utilisateurs ont besoin d'un système ferroviaire concurrentiel, capable de s'imposer sur le marché national et international, sans quoi la production en souffrira, des usines déménageront, et l'emploi sera en baisse.
Dans pareil cas, les avantages de la commercialisation du CN seront illusoires, et les acquéreurs d'actions du CN feront un placement douteux.
L'ACPP a participé à un certain nombre de rencontres avec Transports Canada au sujet des modifications proposées au cadre réglementaire. Le fait que les modifications jugées nécessaires pour les clients du CN n'ont pas été mises de l'avant nous préoccupe grandement. Lorsque nous avons rencontré les représentants de Transports Canada lundi dernier, nous leur avons fait part de graves inquiétudes quant au fait que des modifications récentes n'avaient pas fait l'objet de discussions préalables.
Ces modifications comprennent des dispositions qui limiteraient inutilement l'accès des utilisateurs aux services de l'Office national des transports. Transports Canada a indiqué à plusieurs reprises que les droits actuels des expéditeurs seraient protégés. À notre connaissance, aucune disposition ne prévoit une telle protection.
D'importantes questions touchant les droits des utilisateurs ne sont pas traitées d'une manière satisfaisante. De son propre chef, Transport Canada a supprimé les dispositions de la loi concernant le niveau de service, en vertu desquelles les sociétés de chemins de fer sont tenues de fournir des installations adéquates. Le ministère compte imposer à la place des exigences considérablement réduites à l'égard du niveau de service, dans l'article de la Loi sur les transports nationaux qui porte sur l'arbitrage des propositions finales.
Cette mesure ne satisfait pas les utilisateurs des services des chemins de fer. L'article sur l'arbitrage des propositions finales n'est pas fait pour tenir compte de l'aide immédiate dont les expéditeurs ont besoin quand ils n'ont pas obtenu des services ferroviaires adéquats. De plus, l'inclusion d'un critère concernant l'intérêt public dans les dispositions sur les droits de circulation ainsi que la suppression de la question de l'intérêt public ailleurs dans la loi, sont illogiques et inacceptables.
L'ACPP souhaite vous décrire brièvement les conditions qui doivent exister dans l'industrie du transport pour que la commercialisation du CN puisse s'effectuer dans l'intérêt bien entendu de notre pays. En vertu de la Loi sur la réforme des règlements des transports, le CN et le CP pourront vendre ou abandonner des lignes de chemins de fer sans l'intervention des organismes de réglementation. Un tel rétrécissement du réseau donnera une capacité réduite et une puissance commerciale accrue aux chemins de fer, ce qui occasionnera une baisse du pouvoir de négociation des clients du CN.
L'ACPP reconnaît que les sociétés de chemins de fer canadiennes ont besoin de plus de liberté pour abolir l'infrastructure existante, mais cela ne peut pas se faire au prix d'un accroîssement de leurs pouvoirs monopolistiques sur leurs clients. Des initiatives favorisant la concurrence, notamment en élargissant les droits de circulation et en les rendant plus accessibles, sont nécessaires à l'atteinte d'un équilibre.
L'ACPP appuie fermement la recommandation de la commission Nault, selon laquelle toutes les sociétés de chemins de fer devraient jouir de pleins droits de circulation sur toutes les lignes de chemins de fer, et les dispositions actuelles de la Loi de 1987 sur les transports nationaux à cet égard, devraient être raffermies pour ne pas exclure tout exploitant éventuel admissible. La mise en oeuvre de cette recommandation permettra aux sociétés de chemins de fer sur courtes distances, crées à la suite de la vente de lignes fédérales superflues, d'avoir accès à plus d'une société de chemins de fer. Ces sociétés relèveront vraisemblablement de la compétence des provinces, et les dispositions actuelles de la Loi sur les transports nationaux les empêchent d'exercer leurs activités sur les lignes du CN et du CP.
Le président: Si je peux me permettre de vous interrompre un moment, monsieur Church, j'ai jeté un coup d'oeil à votre mémoire et je me demande s'il contient quoi que ce soit qui se rapporte directement au projet de loi C-89?
Nous vous sommes reconnaissants de l'exposé que vous nous présentez, qui porte principalement sur les règlements régissant l'ONT, dont nous entreprendrons l'étude à la fin de juin, lorsque le ministre présentera les modifications qu'il souhaite apporter aux règlements régissants l'Office national des transports du Canada. À ce moment-là, nous nous pencherons alors plus particulièrement sur des questions comme les droits de circulation, les processus d'abandon et d'autres questions du genre. Pour l'instant cependant, nous examinons la loi habilitante, qui porte davantage sur la vision d'une compagnie privatisée et sur les dispositions financières que cela suppose. Avez-vous des observations en particulier à formuler au sujet du projet de loi C-89 proprement dit?
M. Church: Monsieur le président, nous estimons que ces deux mesures législatives sont intimement liées...
Le président: J'allais utiliser la même expression moi-même, il y a deux minutes, mais j'ai préféré qu'elle vienne de vous. Cela dit, nous sommes conscient de la corrélation. Toutefois, vous soulevez des questions qui n'ont rien à voir avec ce projet de loi. Ce que nous étudions aujourd'hui, ce sont les dispositions du projet de loi C-89.
M. Church: Nous comptons sur votre aide pour que soient prises en considération dans les deux mesures législatives, la position des utilisateurs et la compétitivité indispensable des transports ferroviaires.
Le président: Absolument. En fait, il est fort proobable que votre organisme soit invité à revenir témoigner devant notre comité pour examiner à fond les amendements en ce sens, lorsque nous en serons saisis.
Avez-vous examiné le projet de loi C-89 et avez-vous des changements à proposer à l'égard de dispositions particulières du projet de loi?
M. Church: Nous avons étudié le projet de loi C-89 et nous appuyons l'idée de commercialiser le CN. Nous n'avons cependant aucun commentaire précis à formuler au sujet de dispositions particulières.
Le président: Auriez-vous objection alors à ce que nous vous posions quelques questions sur le projet de loi C-89?
M. Russ Lewis (président, Section des transports et de la distribution, Association canadienne des pâtes et papiers): L'une des choses dont nous voulions nous assurer, c'est qu'un processus est en cours et qu'il sera mené à bien avant que l'étude du projet de loi ne soit terminée. Nous tenions à vous faire part de nos préoccupations, et il ne nous reste, semble-t-il, que quelques jours pour le faire. Nous aurons, bien sûr, une autre occasion de nous faire entendre lorsque le projet de loi aura été présenté officiellement...
Le président: Absolument.
M. Lewis: ...mais nous savons cependant qu'à cette étape-ci, alors que le cadre législatif est en train d'être défini...
Le président: Non, nos vues divergent sur ce point. En tant que président du comité, j'ai reçu l'ordre d'étudier le projet de loi C-89.
Il vous est possible en vertu... en fait les divergences de vue que vous pouvez avoir ou les suggestions constructives que vous pourriez vouloir formuler pour amender la LNT, peuvent faire l'objet de discussions avec vos représentants et Transports Canada ou de communications directes au moyen de lettres, télécopies ou dépêches adressées au ministère. C'est probablement ce qu'il y a de mieux à faire dans ce cas.
M. Fontana: J'aurais une objection à formuler, monsieur le président car je crois que vous n'y êtes pas tout à fait vous non plus.
Le président: Que voulez-vous dire? Nous ne pouvons pas accepter de suggestions?
M. Fontana: Non, toutes les modifications proposées à la LNT passeront par ce comité-ci, qui sera chargé de prendre les décisions qui s'imposent.
Comme vous le savez, Transport Canada a entrepris depuis quelques mois des consultations sur les questions ferroviaires. Tous les projets de modifications seront soumis à notre comité, il incombra aux politiques de décider lesquels seront retenus.
Vous aurez donc l'occasion à ce moment-là, en juillet je suppose, de faire part des préoccupations que vous avez abordées aujourd'hui. C'est ainsi que ça marche.
Le président: Merci, Joe.
Je ne dis pas le contraire. J'ai déjà expliqué que nous allions être saisis de cette mesure législative. Mais je dis que le ministre et son ministère acceptent volontiers les suggestions qui peuvent leur faire les intervenants et les utilisateurs quant à des façons constructives de modifier la LNT. Voilà ce que j'essaie d'expliquer à ce groupe.
Je veux également qu'ils sachent que ce n'est pas l'endroit pour le faire; par contre celui-là l'est.
Nous acceptons, bien sûr, le mémoire que vous nous avez présenté, mais j'aimerais passer à des questions se rapportant directement au projet de loi C-89.
Monsieur Guimond, avez-vous des questions?
[Français]
M. Guimond: Monsieur le président, membres de l'ACPP, comme j'ai travaillé 14 ans pour Abitibi-Price, je connais quelque peu l'industrie de pâtes et papiers.
J'aimerais avoir une précision, car je suis persuadé que mes collègues n'ont pas compris un point soulevé par le témoin précédent. Par quelle ligne de chemin de fer une usine située à Shawinigan, à Grand-Mère ou à Trois-Rivières qui veut expédier du papier par le port d'Halifax va-t-elle transporter son papier?
[Traduction]
M. Church: Je vais laisser M. Lewis répondre à cette question, car il a une usine de papier à Grand-Mère.
M. Lewis: Si j'ai bien compris votre question, il s'agit de savoir comment une usine de Shawinigan ou de Grand-Mère s'y prendrait pour envoyer son produit au port d'Halifax. Dans les deux cas, à Grand-Mère comme à Shawinigan, les usines sont desservies tant par le CN que par le CP. Les deux compagnies ont chacune leurs propres lignes assurant le service jusqu'à Trois-Rivières ou, dans l'autre direction, vers Garneau, jusqu'au tronçon du CN desservant Montréal ou Québec.
M. Guimond: Et le train traverse le pont de Québec?
M. Lewis: Je crois bien que oui, monsieur.
M. Guimond: Il n'y a que par le pont de Québec que l'on peut passer de la rive nord à la rive sud, n'est-ce pas?
M. Lewis: Non, je ne crois pas que ce soit le seul moyen, monsieur.
M. Guimond: Le seul... en allant vers l'est, on peut expédier des marchandises de Shawinigan à Montréal en passant par la rive sud.
M. Lewis: La plupart de nos marchandises provenant de ces usines sont effectivement expédiées vers l'est en passant par Montréal ou vers l'ouest...
M. Guimond: La Société Daishowa, de Québec, achemine par train 35 p. 100 de sa production jusqu'à Halifax, en passant par le pont de Québec.
M. Lewis: Je ne connais pas les pourcentages, monsieur. Si cette compagnie envoie des marchandises à Halifax, il est probable qu'elle emprunte ce pont. En ce qui nous concerne, je dirais que le plus gros de notre trafic en provenance de Shawinigan ou de Grand-Mère serait en direction de l'ouest, en passant par Montréal, et de là, emprunterait des ponts de cette région pour pénétrer aux États-Unis.
M. Guimond: Merci.
Le président: À vous, monsieur Gouk.
M. Gouk (Kootenay-Ouest - Revelstoke): Merci, monsieur le président. Mes commentaires allaient essentiellement dans le même sens que les vôtres.
Nombreux sont les gens qui sont venus nous faire part de leurs préoccupations au sujet de l'aspect réglementaire. Le problème pour nous, c'est qu'aucune proposition touchant la réglementation ne nous a encore été soumise et que ce n'est pas ce que nous étudions.
Nous sommes très pressés d'étudier le projet de loi C-89 parce que nous devons en aborder l'examen article par article plus tard dans la matinée pour qu'il puisse retourner à la Chambre pour la troisième lecture. Par conséquent, comme le président l'a demandé je vous inviterais à nous faire part de vos préoccupations sur des aspects précis du projet de loi C-89 ou de vos commentaires sur n'importe laquelle de ses dispositions.
M. Church: Non, nous n'avons pas vraiment de commentaires précis au sujet du projet de loi C-89, si ce n'est que la privatisation du CN favorisera, à notre avis, une meilleure rentabilité du chemin de fer. Nous estimons cependant que la privatisation du CN devrait être liée au projet de loi sur la remise en état des voies pour qu'il existe un système de transport ferroviaire vraiment concurrentiel au Canada.
M. Gouk: Je crois effectivement que nous avons affaire à deux problèmes distincts. La plupart d'entre nous s'entendent pour dire que le CN devrait être privatisé. Cela constitue un problème en soi, qui fait l'objet du projet de loi C-89. L'autre problème, c'est que, comme on le sait, l'industrie ferroviaire toute entière a besoin d'être restructurée, ce qui fera l'objet de la prochaine étape des changements à la règlementation.
Je vous saurais gré, tout comme mes collègues j'en suis sûr, de nous soumettre vos mémoires ou suggestions concernant ce projet de loi en particulier d'ici à ce que vous ayez peut-être l'occasion de comparaître de nouveau devant notre comité à ce sujet.
Le président: Comme personne d'autre ne veut intervenir, je voudrais simplement rappeler en terminant que le ministre, pour reprendre ses paroles, s'inquiète assurément de la lourde réglementation qui lie actuellement les mains aux chemins de fer. Il a déclaré que:
- le cadre réglementaire actuel entrave le processus concurrentiel et l'établissement d'un réseau
de chemins de fer viable d'un bout à l'autre du pays. Il a l'intention de présenter à la Chambre
d'ici l'été une mesure législative qui tracera la voie à suivre pour modifier en profondeur notre
régime de réglementation.
M. Church: A notre avis, on risque de mettre le ministre dans une situation délicate en lui donnant la tâche de commercialiser le CN, compte tenu de la mesure législative concernant la réforme de la réglementation des chemins de fer dont vous serez saisi. Par contre, nous estimons que ce serait une erreur que de maximiser la vente des actions du CN en limitant la concurrence au sein de l'industrie ferroviaire.
Le président: M. Fontana voudrait répliquer à cela.
M. Fontana: Je dois contester cette affirmation, car il n'y a aucun rapport entre la règlementation et le fait que le CN soit une entreprise publique ou privée. Invoqueriez-vous les mêmes arguements à propos du CP s'il était commercialisé?
Le gouvernement est conscient de la nécessité de modifier les règlements de façon à accroître considérablement l'efficacité de nos réseaux de transport pour répondre aux besoins des expéditeurs et des chemins de fer en général, pour vous donner une chance à vous, en tant qu'expéditeur, de vendre vos produits à vos clients partout dans le monde. Nous savons ce qu'il en coûte à votre entreprise en frais de transport; il faut que ça cesse. C'est pourquoi nous sommes en train de modifier nos orientations en matière de transport maritime et ferroviaire de façon à ce que les personnes qui achètent vos produits puissent les obtenir au meilleur coût. On ne saurait tolérer plus longtemps dans un pays comme le nôtre que 50 p. 100 du coût de vos produits servent à couvrir les frais de transport.
Je crois donc que la privatisation CN sera avantageuse pour les expéditeurs. Le nouveau cadre réglementaire le sera aussi, pourvu qu'il comporte certaines protections à l'égard des droits de expéditeurs, des droits de circulation, ainsi de suite. Ces questions seront abordées à la prochaine étape.
Pour garantir le succès de la vente du CN, je pense que tout le monde, y compris les banques de placements, le CN lui-même et le ministre, nous a dit qu'il fallait de nouveaux règlements, un nouveau cadre réglementaire pour que tout le monde puisse acheter des parts dans le nouveau chemin de fer; c'est là qu'est la corrélation.
Je ne suis cependant pas d'accord avec le postulat sur lequel vous fondez votre raisonnement, qui veut que nous ayons pour seul motif de maximiser les chances du CN. L'enjeu est beaucoup plus considérable; il s'agit du système de transport au Canada.
Le président: J'accepterais un dernier commentaire, messieurs.
M. Mel Nunweiler (Vice-président, section des transports et de la distribution, Association canadienne des pâtes et papiers): C'est une excellente synthèse, mais nous tenons à signaler qu'il importe que le réseau de transport ferroviaire qui émergera soit très compétitif, parce que cela en garantira l'efficacité et que nous en profiterons tous.
Le président: Très bien. Nous sommes tous d'accord sur ce point. Nous comptons bien vous revoir quand nous serons saisis du projet de loi sur la LNT, soit les modifications à la réglementation.
Je vous remercie, monsieur Church, vous et vos collègues, d'avoir été des nôtres aujourd'hui et d'avoir répondu à nos questions.
M. Church: C'est nous qui vous remercions de nous avoir invités.
Le président: Chers collègues, nous invitons à la table l'Union des producteurs de grain, ainsi que son président, M. Ted Allen. Nous souhaitons à nouveau la bienvenue à M. Allen.
Ted, nous attendons avec impatience, votre exposé. Avez-vous apporté un mémoire?
M. Ted Allen (Président, Union des producteurs de grains Limitée): Nous n'avons pas de mémoire en tant que tel.
Le président: Parfait, vous allez donc nous parler du projet de loi C-89.
M. Allen: En effet.
Le président: Très bien. Vous avez la parole.
M. Allen: Je vous remercie beaucoup, monsieur le président et membres du comité.
Nous voudrions formuler quelques observations au sujet de la privatisation du CN. Comme vous le savez peut-être, le grain constitue une partie importante du traffic et des recettes des deux principales compagnies de chemin de fer. Ce projet de loi nous intéresse donc beaucoup.
D'abord, je voudrais dire qu'en principe, il est dans l'intérêt de notre industrie qu'il y ait le plus de concurrence possible dans ce secteur. Nous pensons qu'il est essentiel d'avoir au moins deux transporteurs ferroviaires très solides dans l'Ouest du pays. À cette fin, cependant, je pense qu'il est dans votre intérêt à tous que ces deux transporteurs deviennent très rentables grâce à une réduction de leurs coûts plutôt qu'une simple augmentation de leurs recettes.
Il est vrai que ces transporteurs offrent un service. Il y a beaucoup plus d'emplois en jeu dans les industries qu'ils desservent que parmi leurs employés. Il est donc essentiel que les industries extractives et autres qu'ils desservent demeurent viables, compétitives et prospères.
Nous ne sommes pas particulièrement intéressés à ce que les chemins de fer deviennent rentables en augmentant simplement leurs recettes plutôt qu'en réduisant leurs coûts. Nous pensons qu'ils ont une excellente possibilité d'y parvenir si le gouvernement établit la structure et les règles commerciales voulues.
Je voudrais ajouter simplement quelque chose sur certains des rapports que nous avons lus et qui laissent entendre qu'une dette appropriée pour le CN pourrait être de 1,5 milliard de dollars. Selon nos informations, à ce niveau-là, le CN arriverait à peine à obtenir la cote de crédit nécessaire pour être solvable.
Nous croyons qu'il est important de prévoir un certain coussin ou une certaine marge de manoeuvre dans le système du CN. Une dette de l'ordre de un milliard de dollars offrirait peut-être ce coussin ou cette marge de manoeuvre donnant à cette privatisation une plus grande chance de réussir et de cadrer davantage avec la privatisation que le gouvernement semble avoir à l'esprit.
À ce sujet, je sais qu'il y a des arguments qui militent contre une réduction trop importante de la dette du CN, car cela désavantagerait son principal concurrent, le CP. Quoi qu'il en soit, nous pensons qu'un milliard de dollars pourrait être un niveau d'endettement plus acceptable que 1,5 milliard de dollars, car ce dernier montant ne laisse absolument aucune marge de manoeuvre pour ce qui est de conserver une bonne cote de solvabilité.
Je voudrais maintenant m'arrêter brièvement sur une autre question qui inquiète le secteur céréalier, qui selon nous, va préoccuper les investisseurs et qui devrait donc être également un sujet de préoccupation pour le gouvernement. Je veux parler du fait que dans un certain nombre de domaines, il semble que le gouvernement n'ait pas laissé tomber complètement l'idée d'utiliser le transport ferroviaire comme instrument de sa politique sociale. Cela convenait peut-être à une autre époque et je pense qu'il est quelque peu difficile d'être à la fois chair et poisson.
Nous croyons qu'il faudrait supprimer les éléments de politique sociale qu'on semble encore vouloir imposer aux chemins de fer, si le gouvernement veut vraiment transformer ces compagnies en entreprises purement commerciales. Je vais me reporter plus particulièrement à deux de ces éléments dans le secteur du transport du grain de l'Ouest.
Le projet de loi C-76, la Loi d'exécution du budget, renferme une disposition selon laquelle, fondamentalement, si une compagnie de chemin de fer abandonne des voies non rentables, on lui impose alors une pénalité de 10 000$ le mille dans le cadre de l'établissement des taux de transport. Cela signifie que si un embranchement n'est pas rentable, et dans une proportion inférieure à 10 000$ le mille, il n'est pas avantageux de l'abandonner. Par contre, on n'impose pas cette pénalité au chemin de fer s'il cède ses activités à des chemins de fer secondaires.
On peut avoir pour première réaction de trouver le fait peut-être merveilleux. Cependant, lorsqu'on examine la question plus en profondeur, on s'apperçoit qu'on crée un milieu artificiel en jouant avec les chiffres, pour favoriser la formation de chemins de fer secondaires. Cela va ralentir l'intégration naturelle et ordonnée d'embranchements non rentables et ralentir du même coup le transfert du trafic sur des voies plus rentables.
En général, cela va réduire la possibilité d'améliorer l'efficacité du système dans l'intérêt de tous les intervenants - les agriculteurs, les sociétés céréalières et les transporteurs - et cela va forcer le système à continuer de fonctionner d'une façon qui est moins que rentable, ce qui n'est avantageux pour personne.
De plus, le comité des finances a proposé un amendement intéressant qui, selon nous, est une mauvaise mesure pour un certain nombre de raisons. Fondamentalement, cet amendement augmente le tarif-marchandises pour tous les agriculteurs de l'ouest du pays d'un montant pouvant aller de 4$ à 18$ la tonne. Ensuite, les compagnies de chemins de fer vont rembourser ce montant perçu en plus du taux de transport de base directement aux exploitants des deux chemins de fer secondaires actuels.
On doit alors se demander pourquoi cela n'a aucun sens. Dans le passé, les exploitants des deux chemins de fer secondaires existants recevaient deux subventions comparativement à une seule pour le reste de l'industrie. En effet, ils touchaient un montant fixe outre, à l'instar de tous les intervenants, la subvention du Nid-de-Corbeau. Vous avez donc droit à deux subventions comparativement à une seule pour tous les autres agriculteurs avec lesquels ils se partageaient la subvention [Inaudible] du Nid-de-Corbeau.
Or, maintenant que les agriculteurs ont perdu cette dernière subvention, les exploitants de chemins de fer secondaires continuent d'être subventionnés et il n'y a pas de crédits fédéraux pour cela. Ils ont persuadé le comité des finances d'ajouter au taux exigé de tout le monde un petit montant, qu'on leur verse ensuite. Ainsi, tous les autres intervenants sont passés d'une subvention à aucune et ces gens proposent de passer de deux subventions à une. La différence, c'est que la subvention qui reste ne sera pas financée par le Trésor fédéral, mais par les autres agriculteurs.
Il semble également que ce soit une subvention extrêmement inefficace en ce sens qu'on pourrait transporter ce grain par camion à partir de l'exploitation agricole pour entre un quart et la moitié du coût de la subvention proposée pour les exploitants de chemins de fer secondaires; ce n'est pas rentable. De plus, le ministre Goodale a annoncé qu'il supprimait l'interfinancement en modifiant le système de mise en commun pour le transport du grain. Nous établissons une nouvelle forme d'interfinancement.
Je m'arrête sur tous ces points en ce qui concerne le projet de loi sur la privatisation du CN pour vous montrer qu'en fait, le gouvernement essaie encore de mêler à son objectif de privatisation certains éléments de politique sociale, alors que ces deux choses sont contradictoires. Je pense vraiment que le gouvernement et le comité doivent mieux définir leurs objectifs. Veulent-ils créer une entreprise purement commerciale ou veulent-ils continuer d'utiliser les chemins de fer comme un instrument de la politique sociale?
Je pense que je vais terminer là-dessus, monsieur le président. Je suis tout à fait prêt à répondre aux questions que vous pourriez avoir.
Le président: Merci, monsieur Allen. Je pensais que vous nous reprocheriez davantage d'aller trop loin pour privatiser le système, plutôt que de mêler les deux choses.
Je voulais répondre rapidement à votre première observation. Si cela peut vous rassurer, aucun témoin qui a comparu devant nous n'a déclaré qu'il n'y avait pas place pour deux compagnies de chemins de fer compétitives au Canada.
En ce qui concerne la réduction de la dette à 1 milliard de dollars, vous avez raison de dire qu'il serait probablement injuste de la part du gouvernement de réduire la dette d'une société en-dessous de celle d'une société déjà privatisée, c'est-à-dire le CP. Ce serait perçu comme injuste et, en toute franchise, ce serait plutôt risqué pour le CP sur les marchés financiers.
Ce serait également injuste pour le contribuable, car comme les experts financiers nous l'ont expliqué, si le total des actifs non ferroviaires, comme l'encaisse excédentaire et la vente des biens immeubles non ferroviaires n'atteignent pas tout à fait 1 milliard de dollars - il est question qu'il reste un petit montant de 200 à 300 millions de dollars provenant de la vente d'actions - il faudra peut-être intervenir. Nous ne sommes pas certains que le contribuable verrait cela d'un très bon oeil.
M. Allen: Tout d'abord, je le répète, ce chiffre est affaire de jugement. Il s'agit d'une part, de ne pas désavantager le CP et d'autre part, de ne pas créer une entreprise dont la situation financière est précaire. Je crains qu'avec une dette de 1,5 milliard de dollars, le CN ne soit placé dans une situation de ce genre, ce qui nuira à la concurrence sur le marché. Cependant, c'est une question de jugement.
Le président: Vous êtes dans le secteur du grain, alors que je suis en politique, et probablement que ni vous ni moi n'avons suffisamment de compétence en économie pour prendre cette décision. Je vais vous écouter cependant.
M. Allen: C'est affaire de jugement.
En fait, je suis diplômé en économie. On appelle l'économie la «science sinistre».
Le président: Eh bien, j'ai gaffé, n'est-ce pas?
Des voix: Oh, oh.
M. Allen: Je ne prétends pas être un expert.
Le président: Je suppose que je pourrais faire valoir que ni vous ni moi ne connaissons tous les faits.
M. Guimond: Je tiens à vous remercier, monsieur Allen, de votre exposé. L'année dernière, à la même date, je vous ai rencontré à Thunder Bay dans le cadre des audiences de notre sous-comité présidé par M. Comuzzi. Je suis heureux de vous voir à nouveau et je tiens simplement à vous remercier de votre exposé.
M. Allen: Merci.
Le président: Allez-y, monsieur Gouk.
M. Gouk: Je vais aborder une fois de plus la même question, qui semble être délicate.
Je crains qu'on ne fasse exactement ce que vous dites qu'on nous ramène la dette à 1 milliard de dollars plutôt qu'à 1,5 milliard de dollars. Les experts financiers chargés de nous conseiller et ceux qui devaient commercialiser cette entreprise ont affirmé qu'une dette de l'ordre de 1,5 milliard de dollars conduirait à une cote de crédit triple B, ce qui, en théorie, devrait donner une certaine marge de manoeuvre. Que la cote soit triple B, triple B- ou double B+, on ne cherche pas à obtenir la plus basse cote possible.
Comme vous et moi en avons parlé auparavant - et c'est le revers de la médaille - il y a les actifs d'une grande valeur auxquels on a fait allusion, que le CN a pu racheter dans le cadre d'investissements pas très prudents, mais qu'il conservera encore lorsque tout sera terminé. Le CN s'est endetté pour faire l'acquisition de ces biens.
Si on les lui laisse sans qu'il ait à supporter la dette reliée à ces actifs, si on a de véritables règles du jeu égales sur le plan financier seulement, on en aura alors donné un avantage au CN.
M. Allen: Comme nous l'avons fait dans nos conversations précédentes, je suppose que nous allons rester sur nos positions respectives. Si vous deviez rejeter toutes les fautes de ces ancêtres sur l'enfant, je pense que ce serait tout à fait injuste. Si on devait vous faire payer les fautes des prédécesseurs de notre honorable et auguste institution, vous ne seriez peut-être pas ruiné, mais vous seriez peut-être fusillé.
M. Gouk: C'est l'avantage d'être membre d'un nouveau parti.
M. Allen: Donc, selon moi, si ça doit être effectivement une nouvelle compagnie, démarrant à zéro, il faudrait oublier les erreurs du passé et commencer à neuf.
M. Gouk: Là encore, la solution pourrait consister à modifier la réglementation et à revoir les droits de partage des voies, bien sûr. Si l'autre compagnie bénéficiait de certaines de ces conditions alléchantes, cela pourrait servir en partie à équilibrer les choses.
Y a-t-il d'autres aspects du projet de loi C-89 qui vous préoccupent ou à propos desquels vous auriez quelque chose à dire?
M. Allen: Pas de façon précise. Je dirais, qu'en principe, il est dans l'intérêt du pays, des expéditeurs et des transporteurs, de déréglementer le système parce que la réglementation a entraîné des coûts supplémentaires importants, afin qu'on puisse éliminer bien des coûts. Sinon, pendant que nous sommes là à nous inquiéter du sort du CP et du CN, des transporteurs américains risquent de ne faire qu'une bouchée de ces deux compagnies. Il y a beaucoup plus de gens et d'emplois, dans le secteur primaire et secondaire qui dépendent d'un système de transport efficace que dans le secteur du transport à proprement parler.
M. Jordan (Leeds - Grenville): Je vais me tourner vers notre économiste.
En fin de compte, peu importe que la dette soit ramenée à 1 milliard ou 1,5 milliard de dollars - on n'est pas tout à fait certain du chiffre idéal - , il faut savoir où se situe le juste milieu. N'est-ce pas ce que vous cherchez à dire? Je ne sais pas comment on pourrait prétendre que 1,5 milliard de dollars est trop ou pas assez. Selon moi, ce n'est pas ce que l'on est en train de faire. Il y a des risques dans les deux sens. N'est-ce pas là où vous vouliez en venir? N'est-ce pas ce qui doit nous préoccuper?
M. Allen: Tout à fait. J'éprouve certaines réserves avec le montant de 1,5 milliard de dollars, parce que d'après les renseignements dont je dipose, qui sont peut-être inexacts, c'est vraiment à la limite. Tout dérapage d'un côté ou de l'autre risque d'entraîner une paralysie sur un plan financier qui en fait aboutira à l'élimination de la concurrence dans l'industrie.
M. Jordan: Les risques existent. Mais nous pourrions trouver quelqu'un d'autre qui nous dirait que nos chiffres comportent un facteur d'éventualités. Donc, je ne sais pas. C'est aux fruits qu'on jugera l'arbre.
Vous avez commencé par dire que l'idéal serait d'avoir deux transporteurs viables, bien établis. Vous avez dit que pour expédier vos céréales, vous aimeriez pouvoir choisir entre les transporteurs A et B.
M. Allen: Ce serait même mieux d'avoir 10 choix, mais il faut être réaliste et nous ne pouvons pas espérer en avoir plus de deux.
M. Jordan: Et pour l'instant nous n'en avons pas deux, n'est-ce pas?
M. Allen: Selon nous, si. Mais à la façon dont les choses se déroulent, nous craignons que ce ne sera plus le cas dans l'avenir. Il y a bien deux transporteurs qui sont à peu près sur un pied d'égalité, mais les deux ne sont pas également rentables et efficaces. Et je ne peux en blâmer les transporteurs. Cette situation découle en partie des conditions dans lesquelles on les a obligés à fonctionner.
M. Jordan: L'un des deux n'est pas viable et la seule raison pour laquelle il demeure en affaires, c'est qu'il est subventionné par le contribuable.
M. Allen: En fait, les deux sont subventionnés.
M. Jordan: Tout à fait, mais il y en a un qui est plus subventionné que l'autre. Donc, pour l'instant, nous n'avons pas vraiment deux transporteurs viables. Il y en a un qui l'est, mais l'autre est un canard boiteux.
M. Allen: Quand on considère le contexte nord-américain, à la façon dont ils fonctionnent tous deux, je me demande s'il y en a vraiment un qui est viable. Je crois que les deux compagnies devront prendre d'importantes mesures à l'interne pour être entièrement compétitives et viables dans le contexte nord-américain.
M. Jordan: Je suis d'accord. Mais il n'y a que le marché qui va déterminer s'il y a assez de place pour les deux.
M. Allen: Tout à fait.
M. Jordan: Et ce projet de loi a pour objet de nous permettre de voir s'il existe ou non un marché pour les deux. J'espère que c'est le cas dans certaines parties du Canada. Mais je n'irai jamais jusqu'à dire que c'est possible dans toutes les régions du Canada, parce qu'en fait j'estime que ce n'est pas réaliste.
M. Allen: Nous nous sommes surtout intéressés à la situation dans l'Ouest canadien, parce que c'est là que nous avons nos opérations.
M. Jordan: Quand on parle de «politique sociale», est-ce une façon déguisée de dire qu'on fait simplement de la politique?
M. Allen: Non.
M. Jordan: Mais ce n'est pas loin de la vérité.
M. Allen: Je pense qu'il fut un temps où il était sans doute raisonnable d'utiliser les compagnies ferroviaires comme vecteur de la politique sociale. La Confédération, à l'époque où notre pays s'est bâti, a été fondée sur la promesse d'une liaison ferroviaire d'est en ouest. À cette époque, il n'existait pas encore l'excellent réseau routier que nous connaissons aujourd'hui. Il n'y avait pas non plus d'avions.
De nos jours, nous n'avons plus besoin d'une compagnie de chemin de fer nationale, nous n'avons plus besoin d'imposer aux compagnies privées toutes sortes de règles et de contraintes, parce que nous voulons conserver une compagnie nationale, afin de préserver notre identité... Tout cela est chose du passé. Et je crois que le comité prend acte de cette réalité dans son examen du projet de loi.
M. Jordan: Le ministre dit que les trains ne le font plus vibrer. Est-ce à dire qu'il n'y voit plus l'élément unificateur de la nation?
M. Allen: Je crois qu'il se rend bien compte qu'il n'est plus nécessaire d'avoir une compagnie nationale et que nous ne pouvons plus nous permettre d'en imposer les coûts d'exploitation aux contribuables et aux expéditeurs, autrement dit aux seuls qui doivent payer en fin de compte. D'un autre côté, il n'est pas économiquement logique de financer des services qui font double emploi.
Le président: Et puis, à l'époque, il n'y avait pas d'autres moyens de transport. Il n'y avait pas d'avions-cargo, ni de camions qui font aujourd'hui concurrence aux chemins de fer.
M. Allen: À l'heure actuelle, il existe de vastes régions dans l'Ouest du Canada où le chemin de fer est le seul mode de transport accessible.
On a dit qu'on ne parlerait pas de la nouvelle ONT, mais...
Le président: Tant mieux!
Des voix: Ah ah.
Le président: Une dernière remarque, Joe, avant que nous en terminions.
M. Fontana: Vous avez raison, c'est finalement le marché qui décide si une entreprise réussit ou échoue. C'est cela l'essence même de la libre entreprise dans un système capitaliste. Et notre gouvernement, qui veut privatiser le CN, doit s'assurer qu'il parviendra à réaliser le bon équilibre. Nous devons traiter avec égards l'argent investi par les contribuables dans cette compagnie, de même que l'argent que lui rapportera une entreprise publique. Je crois que c'est cela l'équilibre que nous recherchons.
Vous avez mis tout à fait le doigt dessus en disant que le plus grand défi pour le Canada, n'est pas de se demander s'il faut avoir un chemin de fer national public ou privé, mais plutôt d'avoir un réseau de transport efficace et concurrentiel et de veiller à ce que nos chemins de fer puissent soutenir la concurrence de nos voisins américains.
Les compagnies ferroviaires canadiennes, qui sont handicapées par rapport aux compagnies américaines à cause de notre réglementation, ont pourtant réalisé quelques beaux tours de force depuis deux ou trois ans, malgré ce boulet qu'elles traînent et dont nous avons l'intention de les débarrasser pour leur permettre de concurrencer les chemins de fer américains. La plus grande menace, pour nos chemins de fer canadiens, ne découle pas nécessairement de l'opposition entre le CN et le CP, mais du fait que ces deux compagnies doivent lutter contre les chemins de fer américains.
Quand vous avez critiqué le comité des finances d'avoir protégé les lignes de chemin de fer sur courtes distances et le tarif du Nid-de-Corbeau, vous semblez avoir oublié que nous avons plafonné votre tarif marchandise. N'est-ce pas de la politique sociale? Ne s'agit-il pas d'une subvention? Je crains que vous n'ayez une mémoire sélective et je me dois de vous reprendre. Vous ne pouvez pas prêcher le pour et le contre. Si vous aviez vraiment voulu laisser jouer les forces du marché, alors nous aurions dû déplafonner tous les tarifs et laisser au marché le soin de déterminer le prix du transport de vos céréales.
M. Allen: Arrêtons-nous un instant à ce prix plafond. Tout d'abord, il est suffisamment élevé pour que, si les compagnies de chemin de fer voulaient demander plus, le transport des céréales ne leur reviendrait plus.
Je n'ai pas critiqué les changements apportés au tarif du Nid-de-Corbeau. J'ai critiqué le comité des finances d'avoir haussé le plafond pour accorder une ristourne, dont bénéficient déjà 99 p. 100 des céréaliers, au pourcent restant desservis par des lignes sur courte distance.
M. Fontana: Et pourtant votre association a réussi à convaincre le comité des finances, d'après ce que je crois savoir, de prolonger le tarif du Nid-de-Corbeau au-delà de la période d'expiration de cinq ans prévue en vertu du projet de loi C-76. Et maintenant, vous réclamez une protection qui s'étende sur plus longtemps.
M. Allen: De quelle association parle-t-on, monsieur?
M. Fontana: De celle des céréaliers, de celle qui représente ces gens qui, de toute évidence, auraient tout à perdre d'une hausse du tarif-marchandises. Donc, vous pourriez soutenir que le taux suffit pour tenir compte de ces fluctuations. Mais il demeure que les céréaliers, les expéditeurs et tous les autres veulent bénéficier d'une protection au-delà du terme de cinq ans qui était prévu.
M. Allen: Il y a une raison fort simple à cela. On nous a demandé d'absorber ce changement et l'on va passer à une ONT, mais nous ne savons pas à quoi cela va ressembler.
M. Fontana: Autrement dit, la politique sociale, n'est-ce pas?
M. Allen: Non.
Le président: Nous restons donc sur nos positions respectives.
Sur ce, monsieur Allen, je vous remercie de votre exposé et d'avoir répondu à nos questions.
Nous allons prendre une pause de 5 minutes et nous reprendrons les travaux articles par articles au retour.
PAUSE
Le président: Nous reprenons.
Conformément au paragraphe 75(1) du Règlement, notre examen de l'article 1 est remis. Il s'agit du titre. Nous y reviendrons à la fin, comme à l'habitude.
Je vais vous présenter nos témoins, des fonctionnaires du ministère des Transports qui accompagnent leur sous-ministre adjoint, Moya Greene.
Bienvenue parmi nous et merci de votre visite.
Ils répondront à toutes les questions que nous aurons à leur poser.
Les articles 2 à 5 inclusivement sont adoptés
Article 6 - Transfert de biens
Le président: L'article 6 est-il adopté?
[Français]
M. Mercier (Blainville - Deux-Montagnes): Non, non. Monsieur le président, je lis la substance de l'article 6.
- 6. Le ministre peut, pendant que le CN est une société d'État au sens de l'article 83 de la
Loi sur la gestion des finances publiques, ordonner au CN de lui transférer - ou de transférer à
tout ministre ou toute autre société d'État désignés par le gouverneur en conseil - les biens,
notamment les baux, droits, intérêts et avantages, qu'il juge indiqués, et ce aux conditions qu'il
juge indiquées, notamment la remise d'une contrepartie s'il en est;
Nous ne présenterons pas d'amendement à ce stade-ci, mais nous estimons que nous ne pouvons pas donner au ministre un tel pouvoir sans que la Chambre puisse décider quels sont les biens que le ministre peut racheter et, deuxièmement, quel est le montant de la contrepartie qu'il veut donner. Nous estimons abusif ce pouvoir donné au ministre et nous présenterons un amendement pour que la Chambre soit saisie de tout transfert d'actifs supérieur à un million de dollars du CN au gouvernement. Nous présenterons un amendement en ce sens à l'étape du rapport.
M. Guimond: Nous demandons un vote par appel nominal pour cet article.
[Traduction]
Le président: D'accord, un vote par appel nominal pour l'article 6.
L'article 6 est adopté par 7 voix contre 2
L'article 7 est adopté
[Français]
Article 8 - Dispositions obligatoires des clauses de dérogation
M. Mercier: Monsieur le président, nous présenterons un amendement à l'étape du rapport concernant l'article 8, et vous en aurez le texte. Nous approuvons l'article 8 dans son ensemble et sa finalité qui est d'empêcher la concentration d'un trop grand pouvoir sur le CN par une même personne morale ou un même groupe de personnes.
La chose que nous objectons est la suivante: Il y a une disposition qui veille à ce que si plusieurs personnes morales font partie d'un même groupe ou ont entre elles certains liens et que, par leurs achats, chacun des membres pourrait dépasser le 15 p. 100, il est possible malgré cela, par une déclaration ou par un serment, que chacune de ces personnes puisse faire un achat de pair avec vote, même en dépassant 15 p. 100 pour l'ensemble, à condition qu'il y ait un serment en vertu duquel il n'y aurait pas de collusion ou d'entente entre ces parties d'un même groupe pour leurs intérêts dans le CN.
Nous proposons que cette possibilité soit limitée aux personnes physiques et morales canadiennes, parce que nous estimons que les administrateurs de la société qui ont en charge de voir à ce que ceux qui auraient prêté ce serment le respectent n'auraient pratiquement pas la possibilité de contrôler des propriétaires étrangers pour voir s'ils respectent ou non leur serment.
Comment nous ne voulons pas que les alinéas (5)a), b) et c), qui portent sur la possibilité de prêter serment comme quoi il n'y aura pas de collusion entre les parties, s'appliquent aux étrangers, je propose que l'article 8 soit modifié en ajoutant immédiatement après la ligne 19, page 5, ce qui suit:
- (5.1) Les alinéas (5)a), b) et c) s'appliquent seulement:
- a) aux personnes qui ont la citoyenneté canadienne ou qui sont résidents permanents au
Canada;
- b) aux sociétés constituées au Canada qui ne sont pas contrôlées par des personnes qui ne
sont ni citoyens canadiens, ni résidents permanents au Canada, non plus que par des
personnes morales constituées à l'étranger.
Le président: Monsieur Fontana, voulez-vous dire quelque chose au sujet de cet amendement?
M. Fontana: Je dirais tout simplement que cet amendement équivaut à bloquer la privatisation du CN.
Nous avons souligné qu'il n'y a pas suffisamment de fonds de capital au Canada pour permettre l'émission d'actions de cette ampleur. Voilà pourquoi nos souscripteurs voulaient s'assurer que les actions seraient faciles à vendre partout au Canada et partout aux États-Unis. Donc, si nous imposons ce genre de limitation, je pense qu'il sera impossible pour le CN et pour le gouvernement d'atteindre leurs buts.
Alors, évidemment, nous allons voter contre l'amendement.
[Français]
M. Guimond: Monsieur le président, je veux simplement mentionner que je n'ai pas l'intention d'ouvrir un débat aujourd'hui. Je pense qu'il sera toujours temps de faire un débat à la Chambre. Donc, je ne veux pas répondre spécifiquement aux propos de mon collègue, secrétaire parlementaire du ministre des Transports.
Toutefois, j'aimerais préciser que le Bloc québécois, même s'il dépose un amendement à l'article 8, appuie totalement l'alinéa 8(1)c), qui stipule que le siège social du nouveau CN demeurera situé dans la Communauté urbaine de Montréal. Vous douterez que...
[Traduction]
Le président: C'est voté.
Je vois que M. Gouk désire un éclaircissement.
M. Gouk: Ma question est plutôt générale, mais je ne veux pas sauter à des conclusions.
J'ai entendu M. Mercier déclarer qu'il a l'intention de proposer d'autres amendements à chaque article pendant notre étude à l'étape du rapport. Je voudrais tout simplement une confirmation de la part de la présidence qu'une telle déclaration n'est pas une exigence.
Le président: Non, ce n'est pas une exigence. Vous n'est pas du tout obligé de faire une telle déclaration ici.
M. Gouk: Très bien. Je ne veux pas que le président me punisse à nouveau pour avoir déposé des amendements tardivement.
Le président: Ce n'est pas moi qui vous punirais; ce serait peut-être votre whip.
M. Guimond: Je demande une vote par appel nominal sur...
Le président: Un instant.
M. Guimond: Pardonnez-moi.
M. Fontana: Sauf que j'invoque le Règlement...
Le président: Je voudrais tout simplement vous prier de vous adresser à la présidence. Ne pensez pas commencer...
M. Fontana: Je me suis adressé à la présidence, sauf que maintenant M. Gouk a fait cette intervention au sujet des amendements à l'étape du rapport.
J'admets que le Règlement de la Chambre des communes permet ces amendements, mais il est évident que le renvoi du projet de loi devant le Comité avant la deuxième lecture avait pour but de permettre le plus large débat possible. On voulait permettre aux députés de proposer de bons amendements pour que tous les membres du Comité puissent connaître leurs opinions et voter pour ou contre de bons amendements proposés par n'importe quel membre du Comité.
Le président: Merci, Joe.
M. Fontana: Si vous allez vous servir de cette nouvelle démarche pour retarder les choses, ou si vous allez commencer à proposer des amendements à la Chambre des communes - j'ignore pourquoi; peut-être avez-vous l'impression d'être plus en évidence et estimez-vous que l'impact de votre geste sera beaucoup plus grand - la réalité, c'est que ce n'est pas supposé fonctionner comme ça.
Vous avez dit que vous vouliez plus de pouvoir, vous avez dit que vous vouliez que les membres du Comité participent davantage aux travaux du Parlement; mais maintenant vous allez détourner le système des comités pour passer directement à la Chambre des communes. Je trouve que c'est...
Le président: Je veux mettre fin à ce débat. Ce qui compte, c'est que la réponse est oui: oui, vous aurez l'occasion de présenter des amendements à la Chambre.
M. Gouk: Je voudrais soulever une question de privilège. Comme le secrétaire parlementaire a dénigré des gens qui, selon lui, «dénatureraient le système», je tiens à dire que le système est organisé pour fonctionner d'une certaine manière, et à moins qu'ils aient l'intention d'adopter mes amendements à cette étape-ci ou de voter contre les articles auxquels je suis opposé, mon prochain recours est de régler le problème à l'étape du rapport, selon la procédure parlementaire.
Le président: Oui, c'est exact. Mais selon lui, vous pourriez proposer tous les amendements que vous allez peut-être proposer à la Chambre...
M. Gouk: Non, ce n'est pas vrai.
Le président: Permettez-moi de terminer.
Il disait tout simplement que cette nouvelle démarche a été conçue pour vous donner l'occasion maintenant de proposer ici au Comité tous les amendements que vous proposeriez d'habitude à la Chambre.
M. Gouk: Je vous donne un exemple très clair.
Le président: Ensuite, nous pourrions passer par tout le processus ici, en comité, et une fois que le projet de loi est rendu à la Chambre, nous pourrions l'adopter plus rapidement et de façon plus efficace.
M. Gouk: Je vous donne un exemple très clair: si quelqu'un vote contre un article en particulier, cela équivaut à un amendement. C'est comme dire tout simplement: «Je ne veux pas de ça». C'est la façon...
Le président: Ce n'est pas sous forme d'amendement. Non, ce n'est pas un amendement.
M. Gouk: Cela équivaut à proposer un amendement...
Le président: Non, pas du tout.
M. Gouk: ... parce que quand vous votez contre une disposition et qu'ensuite elle est renvoyée à la Chambre, vous êtes parfaitement en mesure de proposer un amendement pour supprimer l'article, et il n'est pas possible de proposer cet amendement ici.
M. Fontana: Non.
M. Gouk: Joe, c'est possible. Lisez le Règlement. Cette démarche est admissible.
Le président: En tout cas, je vais mettre fin à ce débat maintenant.
Article 8 - Dispositions obligatoires des clauses de prorogation
Le président: Nous avons un amendement.
M. Guimond: Je demande un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
[Français]
M. Mercier: Monsieur le président, j'aurais voulu qu'on m'explique un peu la portée de ceci, parce que je crois que M. Fontana ne l'a pas bien comprise. Je ne vois pas pourquoi il n'y aurait pas la possibilité de faire la vente publique du CN par un appel international, parce que cette disposition qui serait acceptée refuse simplement aux étrangers la possibilité de se libérer d'un maximum de 50 p. 100 pour un groupe par la voie d'un serment. Je ne sais pas si je peux demander qu'on m'explique cela. Ça m'apparaît évident dans sa finalité.
[Traduction]
Le président: Nous comprenons.
M. Guimond: Nous avons une question à l'intention du...
Le président: Les fonctionnaires désirent-ils répondre?
[Français]
Mme Moya Greene (sous-ministre adjoint, Politiques et coordination, Transports Canada): Je m'excuse, monsieur Mercier, mais je n'ai pas bien compris la question.
M. Mercier: Eh bien, madame, c'est que l'objection que M. Fontana a présentée à l'article 8 m'a donné à penser que peut-être il n'en avait pas compris la portée et que je m'étais mal exprimé. J'aurais voulu que vous en expliquiez la portée, la portée étant simplement que les étrangers ne puissent pas se prévaloir du processus du serment. Vous comprenez que seuls les nationaux puissent le faire, parce que nous estimons qu'en ce qui concerne nos intérêts étrangers, la possibilité pratique pour les administrateurs du CN de vérifier s'ils respectent leur serment n'existe pas.
M. Guimond: Monsieur le président,
[Traduction]
Je voudrais demander l'avis du conseiller législatif avant d'entendre les fonctionnaires de Transports Canada. Est-ce possible?
Le président: C'est possible. Je ne m'y oppose pas. Très bien.
M. Mike Clegg (conseiller législatif): Cet amendement ne porte pas sur le droit des non-Canadiens de détenir des actions, ni sur le seuil de 15 p. 100.
Au début de l'amendement, on fait référence aux alinéas 5a), b), et c), qui permettent aux détenteurs d'actions qui autrement seraient considérés comme liés de prêter un serment énonçant qu'ils ne vont pas collaborer et qu'ils ne voteront pas en bloc. Donc, en effet, après avoir prêté un tel serment, il est possible que des groupes qui sont liés en droit mais pas en pratique de vote puissent détenir plus de 15 p. 100 des actions.
Le but de cet amendement, proposé par le Bloc, est de permettre seulement aux Canadiens - des personnes physiques ou morales - de prêter ce serment de ne pas agir de concert. Donc, les sociétés liées étrangères ne pourraient pas détenir plus de 15 p. 100 des actions, et elles n'auraient pas le droit de prêter un serment énonçant qu'elles n'agiront pas de concert.
Seuls des Canadiens pourraient le faire. En aucun cas, des détenteurs étrangers pourraient se regrouper pour posséder plus de 15 p. 100 du portefeuille. Mais cela n'empêche en rien l'achat par des étrangers, ni des achats étrangers jusqu'à concurrence de 15 p. 100.
M. Gouk: Mais tous ensemble, les étrangers pourraient acheter 100 p. 100 du portefeuille. Ils ne pourraient tout simplement pas...
M. Clegg: Ils ne pourraient pas se regrouper.
M. Fontana: On voudra bien me reprendre si je me trompe, monsieur le président. À la façon dont M. Mercier s'exprimait, je croyais qu'il parlait des actions et du reste. Je comprends à présent, grâce à l'interprétation de notre conseiller législatif, qu'il parle en fait des mécanismes anti-collusion et de tout le reste.
Mais je continue à penser que la loi renferme suffisamment de mesures de protection, comme d'autres mesures législatives canadiennes pour qu'il n'y ait pas de risque de collusion et de regroupement au-delà de la limite imposée de 15 p. 100. Donc, je demeure persuadé que cet amendement est irrecevable.
Le président: Mais non, il n'est pas irrecevable.
M. Fontana: Eh bien, s'il n'est pas irrecevable, il n'est pas acceptable.
Le président: Pas acceptable, parfait.
Compte tenu de l'explication qui vient d'être donnée, le Bloc désirerait-il retirer son amendement?
M. Guimond: Oui, avec le consentement unanime, nous retirerons l'amendement.
M. Fontana: Et puis ils vont le représenter de nouveau à la Chambre.
Vous venez de le présenter. Très bien, je vous remercie. De toute façon, votre amendement a été défait.
Le président: Pas encore, nous n'avons pas encore voté. Nous allons procéder une étape à la fois. Rien ne sera décidé avant que tous les membres de ce Comité aient eu à se prononcer à ce sujet.
Que les choses soient bien claires. Je vais demander à ce qu'on vote sur l'amendement. M. Guimond a demandé à ce que ce soit un vote par appel nominal.
L'amendement est rejeté par 6 voix contre 2.
L'article 8 est adopté par 4 voix contre 3
Le président: Chers collègues, il vous intéressera peut-être de savoir que le monsieur qui est assis à ma droite s'appelle Chuck Bellemare, et c'est lui notre greffier à la procédure. Il connaît tout cela.
Je suis désolé de ne pas vous avoir présenté plus tôt, Chuck.
Les articles 9 et 10 sont adoptés
Article 11 - Opérations par le ministre
M. Gouk: Monsieur le président, j'ai un amendement à proposer à l'article 11.
Le président: En fait, vous proposez un nouvel article; n'est-ce pas?
M. Gouk: Oui.
Le président: Il s'agit de 11.1. Mais nous devons d'abord en terminer avec l'article 11.
M. Gouk: Non, on n'adopte pas d'abord l'article 11 pour ensuite en rajouter un autre. C'est ainsi qu'on procède?
Le président: Oui, c'est ainsi.
M. Gouk: Pouvez-vous éclairer ma lanterne? Dans ce cas, je ne pense pas que ce soit un problème, mais si j'estime devoir ajouter quelque chose à un article, et que ce ne peut être fait avant que l'article soit adopté, ne serait-il pas plus logique de voter contre l'article puis de le modifier ensuite?
M. Fontana: Non, il faut d'abord l'amender.
M. Gouk: Mais comment diable cela peut-il fonctionner? Si je n'aime pas un certain article qui ne contiendrait pas ce que je voudrais y ajouter et que l'on vote sur cet article avant que l'on ajoute...
Mais ce n'est pas logique d'adopter un article puis d'ajouter quelque chose par la suite.
Le président: Eh bien, on va vous faire expliquer cela par le greffier à la procédure.
M. Charles Bellemare (greffier à la procédure): Nous étudions l'amendement R-1. C'est un article distinct qui, pour des questions d'ordre pratique, a été baptisé 11.1. Si cet amendement est adopté et que le projet de loi est réimprimé, il deviendra alors l'article 12. Il n'est absolument pas lié à l'article 11. Il est tout à fait différent et il n'a aucun rapport.
M. Gouk: Mais alors, quand doit-il être présenté?
Le président: Eh bien, puisque c'est un nouvel article - si vous avez suggéré qu'il soit baptisé 11.1 - , nous allons le faire passer après l'article 11. Donc, nous traiterons d'abord de l'article 11 et, qu'il soit ou non adopté, vous présenterez ensuite l'article 11.1 en tant qu'amendement.
L'article 11 est adopté
Le président: M. Gouk a une suggestion à faire à propos du nouvel article 11.1.
M. Gouk: Vous ne voulez pas qu'on en fasse lecture?
Le président: Vous pouvez considérer qu'il a été lu tel qu'imprimé.
M. Gouk: On peut faire cela.
Expliquez-moi une chose. Je n'ai pu obtenir d'avis juridique pour savoir si les lois provinciales sur les valeurs mobilières couvriraient les délits d'initiés, parce que ces actions sont émises par le gouvernement fédéral, par l'État. Cela étant, je pense qu'il conviendrait d'inclure une disposition sur les délits d'initiés dans ce projet de loi, pour éviter qu'une telle chose se produise.
Le président: Eh bien, pourquoi n'obtiendrions-nous pas d'abord un avis juridique?
M. Clegg: Monsieur le président, je me suis penché sur cette question relativement à cet amendement. Malheureusement, les lois sur les valeurs mobilières et les dispositions sur les opérations d'initiés qu'on trouve dans la législation fédérale sont tellement complexes que je n'ai pas eu le temps de me forger une opinion définitive et savoir si toutes les transactions effectuées dans le cadre de cette loi peuvent ou non tomber sous le coup des lois provinciales sur les valeurs mobilières. Quoi qu'il en soit, toutes les bourses au Canada sont régies par les lois provinciales sur les valeurs mobilières.
En règle générale, il semble que les délits d'initiés soient couverts, qu'importe qu'il s'agisse d'opérations fédérales ou provinciales. Dans le cas d'un courtier en bourse - je vois que la SMA est d'accord avec moi à ce sujet... Voilà le problème quand des questions surgissent pendant l'examen d'un projet de loi; on entre dans un domaine différent de la loi. Par contre, on n'a pas assez de temps pour donner aux députés un avis aussi précis qu'on le souhaiterait. Pour ma part, je ne suis pas encore arrivé à me forger une opinion définitive.
M. Fontana: Peut-être Mme Greene pourrait-elle dire quelques mots à propos de ce que vient de déclarer le conseiller juridique.
Le président: Tout à fait. Excusez-moi, je croyais que vous vouliez en parler vous-même. Moya.
Mme Greene: Monsieur le président, il est prévu d'inscrire les actions du CN aux bourses de Toronto et de New York. Donc, je pense que, dans ce cas, les dispositions relatives aux délits d'initiés contenues dans les lois provinciales sur les valeurs mobilières, de même que dans les lois de l'État de New York, s'appliqueraient. En outre, le délit d'initié fait l'objet de pénalité dans la Loi sur les sociétés par actions. J'ai l'impression, sans avoir étudié la question, que M. Gouk n'a pas de raison de s'inquiéter à ce sujet.
M. Gouk: Eh bien, si cette question est en fait couverte par d'autres niveaux de compétence, alors c'est parfait, mais je me permettrais de vous faire remarquer que nous n'en sommes pas certains. C'est la conclusion à laquelle on arrive au jugé d'après l'expérience; notre conseiller législatif ne peut pas nous répondre avec certitude, mais si nous n'incluons pas cette disposition et que cette question n'est effectivement pas couverte par les lois provinciales, alors nous risquons d'avoir un problème. Par contre, il ne nous en coûtera rien de le prévoir dans la loi et cela ne nous occasionnera aucun problème.
Le président: Voulez-vous répondre, madame Greene?
Mme Greene: Après avoir lu très rapidement l'amendement de M. Gouk, il semble qu'il propose des amendes différentes de celles prévues dans les autres lois. Loin de moi l'idée de vouloir retarder les délibérations, monsieur le président. Cela vous regarde. Peut-être que nous pourrions avoir un point de vue plus définitif cet après-midi et savoir si cette disposition est nécessaire et si elle est appropriée.
Le président: Eh bien, le président décide de traiter de la question maintenant et donc je la soumets au vote.
La proposition de M. Gouk, c'est-à-dire l'adoption d'un nouvel article 11.1, est-elle adoptée?
Le nouvel article est rejeté.
M. Gouk: Un instant. J'ai entendu un oui, le mien, et un non de...
Le président: Voulez-vous un vote par appel nominal, monsieur Gouk?
M. Gouk: Oui, peut-être le devrions-nous.
Le président: Ou un vote à main levée, si vous voulez?
M. Gouk: Un vote par appel nominal convient probablement.
L'amendement est rejeté [Voir les Procès-verbaux et témoignages]
Article 12 - Règlement
M. Gouk: Monsieur le président, j'ai un amendement à proposer. Et cette fois, il s'agit bien d'un amendement.
Le président: Monsieur Mercier, pour un rappel au Règlement.
[Français]
M. Mercier: L'article 12.
[Traduction]
Le président: Je voulais juste savoir si l'on commence d'abord par un amendement.
M. Gouk: Peut-être pourrions-nous considérer qu'il a été lu, puisqu'il a été distribué à tout le monde.
Cet amendement s'explique par le fait que le ministre et divers spécialistes en valeurs mobilières nous ont affirmé qu'il faudrait injecter 1,5 milliard de dollars pour que le CN ait une cote de crédit acceptable pour le marché. Pour nous assurer que nous n'en arriverons pas à d'importantes variations, comme celle dont il a été question ce matin, j'aimerais que la loi confirme que c'est en fait ce que nous allons faire.
Cet amendement limite tout d'abord le remboursement de la dette au produit de la vente des actifs et des ressources du CN et, si besoin était, à une injection de fonds par le gouvernement du Canada, jusqu'à concurrence de 1,5 milliard de dollars.
Le président: Nous avons entendu cet argument à de nombreuses reprises.
Monsieur Fontana, voulez-vous répondre?
M. Fontana: Une seule chose. Je vois où M. Gouk veut en venir. Je pense que nous partageons tous la même impression, c'est-à-dire que le ministre et le CN veulent obtenir 1,5 milliard de dollars. Mais j'estime que c'est un peu prématuré de parler de 1,5 milliard de dollars, six mois avant l'écoulement des actions, parce que ce n'est pas avant septembre ou octobre que tous les éléments seront en place et que nous serons prêts à écouler les actions sur le marché. Il peut y avoir certaines variations d'ici là.
Qui sait? Peut-être retirera-t-on plus de la vente des actifs.
Donc, c'est être trop précis pour l'instant que de parler de 1,5 milliard de dollars, même si nous comprenons ce que vous voulez dire et que, de toute évidence, nous n'avons pas plus envie que vous d'aller au-delà, dans l'intérêt du contribuable, mais aussi dans celui du CN. Donc, même si nous comprenons ce que vous voulez, nous devons malheureusement voter contre cet amendement.
Le président: Est-ce qu'un vote à main levée suffit?
M. Gouk: Je pense que dès qu'il y a différend, dans l'examen article par article, nous devrions tenir un vote par appel nominal.
Le président: Je me devais de poser la question parce que, à l'occasion, les députés se contentent d'un vote à main levée.
M. Gouk: Faites donc un vote par appel nominal. Nous n'en aurons peut-être plus qu'un seul après.
Le président: Je ne puis vous garantir le nombre de personnes qui prendront connaissance des résultats par écrit.
Alors nous allons voter sur l'amendement à l'article 12.
L'amendement est rejeté [Voir les Procès-verbaux et témoignages]
M. Guimond: M. Mercier veut dire quelque chose au sujet de l'article 12.
Le président: Bien sûr.
[Français]
M. Mercier: Nous avons également des objections à l'article 12 qui donne au ministre le pouvoir de conclure, avec le CN, des accords pour l'acquisition à l'acquittement des dettes et aussi de prélever sur le Trésor ou sur le produit de la vente d'actions de quoi payer ses dettes. Nous estimons, monsieur le président, que c'est là donner au ministre beaucoup trop de pouvoir en dehors du contrôle de la Chambre.
On permet au ministre de conclure avec le CN des accords sur l'acquittement des dettes du CN et on lui permet de prélever sur le Trésor, et par conséquent auprès du contribuable ou sur le produit de la vente d'actions, les montants requis pour ces dettes. Nous estimons que cela donne trop de pouvoir au ministre en dehors du contrôle de la Chambre et que les opérations sur la dette du CN doivent être étudiées et approuvées par la Chambre. Nous déposerons un amendement en ce sens à l'étape du rapport.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur.
Les articles 12 à 15 inclusivement sont adoptés
M. Jordan: Pourquoi sommes-nous passés au vote à main levée plutôt...?
Le président: Parce que j'ai...
Le greffier du Comité: Monsieur le président a demandé si c'est ce que vous vouliez.
M. Jordan: Il est trop tard pour revenir en arrière, mais nous aurions dû avoir un vote par appel nominal là-dessus.
Le président: Il est trop tard. L'article a été adopté à 7 contre 1; seul M. Gouk s'y est opposé. Cela devrait suffire, pas vrai?
Article 16 - Ouvrages à l'avantage du Canada
Le président: Avez-vous un amendement à proposer?
M. Mercier: J'ai une observation à faire.
[Français]
L'article 16 n'est guère à l'avantage général du Canada et met donc sous juridiction fédérale les ouvrages de chemin de fer ou autres ouvrages de transport formés par la réunion ou la fusion de deux ou plusieurs de ces compagnies. Nous estimons que seuls les ouvrages de transport ayant un caractère interprovincial devraient être déclarés à l'avantage du Canada, à l'exclusion des ouvrages de transport qui sont entièrement situés à l'intérieur d'une province et qui, eux, ne devraient donc pas être déclarés à l'avantage du Canada et être placés sous juridiction fédérale.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Mercier.
Avez-vous d'autres observations sur l'article 16? Monsieur Gouk.
M. Gouk: J'ai une remarque à faire sur cette méthode qui consiste à adopter un article puis à y ajouter un nouveau paragraphe. Je tiens à m'assurer que nous appliquons la bonne procédure. Je voudrais que l'on étudie l'ajout que j'aimerais proposer à l'article 16.
Le président: Conformément à la procédure de réception que nous avons adoptée, vous proposez un nouvel article 16.1.
M. Gouk: Oui.
Le président: Nous allons voter sur l'article 16. S'il est adopté, il le sera en tant qu'article 16. Si votre nouvel article 16.1 devait être adopté, il serait renuméroté dans un nouveau projet de loi; il deviendrait l'article 17.
Nous allons nous occuper d'abord de l'article 16.
M. Guimond: J'aimerais que nous votions par appel nominal sur l'article 16, s'il vous plaît.
L'article 16 est adopté par 6 voix contre 2.
Le président: On propose un nouvel article 16.1. Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président. À mon avis, ce paragraphe devrait faire partie de l'article 16, mais peu importe où il figurera si le Comité juge bon de l'adopter...
C'est une nouvelle disposition qui se lit comme suit:
- 16.1 Pendant dix ans à compter de la prorogation, il est interdit au CN d'abandonner ou
d'aliéner la liaison ferroviaire entre Montréal et Halifax et d'éliminer ou de diminuer
considérablement le service fret sur cette liaison.
J'aimerais que nous votions par appel nominal.
Le président: Monsieur Fontana, vouliez-vous répondre?
M. Fontana: Monsieur le président, je dirai simplement qu'il serait de loin préférable de prévoir ce dont M. Gouk parle dans un règlement, à mon avis.
Comment ou pourquoi se fait-il que M. Gouk serait disposé à imposer au CN une obligation qu'on n'a pas imposée au CP, sur l'endroit où il peut exploiter un service ou pas? C'est une restriction commerciale qui n'est pas réaliste, et je suis sûr qu'un partisan de la libre entreprise comme M. Gouk ne l'imposerait pas à une entreprise privée.
S'il veut prôner un réseau ferroviaire national d'un océan à l'autre, je l'invite à le faire dans le contexte de la réglementation, pas nécessairement en parlant d'une entreprise en particulier, en disant comment elle peut fonctionner ou pas et où elle peut et ne peut pas exploiter un service. Je pense qu'il est ridicule de laisser entendre qu'on peut imposer ce genre d'obligation à une entreprise quelconque.
Le président: Monsieur Gouk.
M. Gouk: Si M. Fontana s'attend à ce que je vote contre mon amendement parce que je suis un homme d'affaires, je m'attendrais quant à moi qu'il vote pour, en sa qualité de secrétaire parlementaire, parce que son parti et son ministre veulent imposer des restrictions au titre des langues officielles et d'un siège social établi à un endroit précis qu'on n'impose pas à d'autres entreprises de ce genre. Il est favorable à ces restrictions-là, et je pense donc qu'il devrait appuyer mon amendement, pour être conséquent.
Le président: Je pense que le président pourrait faire une brève intervention, parce que, je pense, le ministre a expliqué au Comité dès le début que, même si les deux langues officielles s'imposent et que le siège social est à Montréal - ou au Canada - ce qui compte pour le ministre...
M. Gouk: L'entreprise ne peut-elle pas juste faire rapport de ses activités au ministre?
Le président: ...n'influait nullement sur les possibilités de vendre la compagnie, alors qu'une restriction comme celle que vous proposez dans ce nouvel article 16.1 sur la liaison ferroviaire Montréal-Halifax pourrait nuire aux possibilités de vendre la compagnie.
M. Gouk: J'aimerais faire une observation là-dessus. Il y a deux aspects en jeu.
Premièrement, nous n'imposons pas cette condition à une entreprise privée, pour le moment. Les entreprises en question ne sont pas des compagnies privées, et nous n'imposons pas arbitrairement une restriction à une entreprise privée. C'est d'une société d'État qu'il s'agit; elle a des méthodes de fonctionnement différentes, et je pense qu'il est irresponsable de simplement s'en défaire en se déchargeant de toutes les obligations que le pays et l'administration fédérale ont assumées sans prévoir une période de transition, quand c'est dans l'intérêt d'une importante partie du pays.
Le président: Monsieur Gouk, vous avez absolument raison.
M. Gouk: Pourriez-vous me laisser finir? Vous n'avez pas aimé cela quand je vous ai interrompu.
Le président: Excusez-moi.
M. Gouk: Je pense tout d'abord que cette obligation nous incombe. Ensuite, cette liaison ferroviaire existe; elle est en exploitation. Il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elle continue de l'être.
L'argument avancé par la Société du port de Halifax est le suivant: Il lui faut une garantie de ce genre afin d'être en mesure de financer une expansion d'infrastructure de l'envergure qu'il lui faut pour les nouveaux types de bâtiments qu'elle accueille.
N'oubliez pas que nous venons d'adopter un rapport susceptible d'aboutir à la privatisation de sociétés portuaires comme celle de Halifax, ce qui les obligerait à emprunter sur les marchés commerciaux sans l'appui du gouvernement.
Enfin, je parle d'une disposition de temporarisation. Elle ne sera pas éternelle, car elle ne vaudra que pour une période de 10 ans, une période de transition, si vous voulez.
M. Hubbard (Miramichi): Monsieur le président, si j'ai bien compris les avis juridiques que nous avons, l'Acte de l'Amérique du Nord britannique garantit le maintien de cette liaison ferroviaire par le gouvernement fédéral jusqu'à Halifax. Le gouvernement fédéral n'a-t-il pas l'obligation de maintenir une liaison ferroviaire entre le centre du Canada et le port de Halifax?
Le président: Madame Greene, vous pourriez probablement nous dire quelque chose sur ces points.
Mme Greene: Si ça peut être utile au Comité, monsieur le président, je vais vous exposer un premier point en ce qui concerne les réserves de M. Gouk. À mon avis, il y aurait peut-être une meilleure façon de surmonter la difficulté. Vous-même et des personnes qui ont comparu devant le Comité avez souligné que les obligations de maintenir le service sapent la valeur de l'entreprise dans un contexte où l'on cherche à la vendre.
Néanmoins, les obligations d'assurer ou de maintenir le service ne sont pas rares, du point de vue de la réglementation. En fait, la Loi sur les transports nationaux, qui prévoit le mode d'exploitation des chemins de fer au Canada, va définir clairement une procédure pour que le réseau soit maintenu, comme elle le fait d'ailleurs maintenant. D'un autre côté, comme la loi s'applique à toute l'industrie du transport ferroviaire, plutôt qu'à une seule compagnie, cette procédure n'a aucun effet sur la valeur de la compagnie elle-même. Toutefois, ce que M. Gouk propose serait considéré comme une condition de vente et influerait par conséquent sur le produit de la vente des actions que le contribuable pourrait s'attendre à réaliser.
En ce qui concerne l'intervention de M. Hubbard, je dirai que le gouvernement fédéral a le pouvoir constitutionnel de réglementer le transport ferroviaire interprovincial. Que ce pouvoir soit assorti d'une obligation ou pas dépend de la façon dont il est défini dans le cadre réglementaire.
Comme je l'ai dit, le cadre réglementaire établit clairement une procédure permettant de déterminer quelle sera la nature du réseau à un moment quelconque.
Bref, si ça peut être utile au Comité, j'aimerais proposer...
M. Hubbard: Nous avons des avocats ici. Y a-t-il dans l'AANB une disposition prévoyant l'existence et l'exploitation d'un service ferroviaire?
M. Clegg: Monsieur le président, je crains de ne pouvoir rien ajouter de précis à ce que les fonctionnaires ont dit à ce sujet.
Je ne peux pas affirmer qu'il existe ou pas une disposition constitutionnelle équivalant à celle qui garantissait un service de traversiers à l'Île-du-Prince-Édouard et qu'il a fallu abroger quand on a décidé de construire le pont.
J'ai l'impression que s'il existait une obligation constitutionnelle aussi claire, la Société du port de Halifax l'aurait su et n'aurait peut-être pas été aussi préoccupée quand elle s'est présentée devant le Comité. Toutefois, je le répète, je ne pourrais pas l'affirmer. Je pourrais en informer le Comité plus tard.
Je ne sais pas si le ministère peut répondre à cette question, à savoir si le gouvernement a une obligation constitutionnelle expresse de maintenir la liaison ferroviaire jusqu'à Halifax. Je pense qu'il s'agit plutôt d'un pouvoir de réglementation, comme le sous-ministre l'a dit.
Le président: À mon avis, même s'il existe effectivement une telle obligation, c'est dans le cadre de la procédure de modification de la Loi sur les transports nationaux qu'elle aurait été établie, et c'est alors qu'on aurait analysé ce cadre juridique-là.
M. Gouk: Mes observations vont porter essentiellement sur ce qu'on a dit au sujet de la valeur des actions.
Premièrement, je pense qu'il y a deux façons de surmonter la difficulté. On nous a proposé de le faire soit avant l'adoption du projet de loi, soit après, en modifiant la réglementation pour obtenir des résultats virtuellement identiques.
En ce qui concerne la valeur des actions, je pense que tout changement de valeur qui résulterait de l'adoption de ce nouvel article serait minime, à supposer qu'il y en ait un.
À ce sujet, je tiens à préciser que si l'amendement que je propose n'est pas adopté et que Halifax ou une autre ville portuaire des Maritimes se retrouve avec un problème tel qu'elle perde des clients au profit des États-Unis faute d'avoir eu cette garantie, en fin de compte, ça coûtera beaucoup plus cher aux contribuables canadiens qu'une baisse éventuelle de la valeur des actions. Je ne m'inquiète pas du produit de la vente des actions, mais plutôt du résultat net des répercussions globales de cette situation, et je pense que l'amendement que je propose protège nos intérêts financiers à long terme.
Le président: Si je ne me trompe, les fonctionnaires me corrigeront, monsieur Gouk, mais j'aimerais que nous revenions à l'objet du projet de loi C-89, qui consiste à privatiser la compagnie et à tenter d'établir un cadre grâce auquel un CN privatisé serait commercialement viable sur le marché de la libre entreprise. C'est la raison d'être du projet de loi.
Vous avez absolument raison en proposant un amendement comme celui-là et en l'expliquant comme vous le faites. Je suis d'accord avec vous: nous voulons faire tout ce que nous pouvons pour que les Canadiens continuent d'être desservis par cette liaison ferroviaire, compte tenu de l'AANB, compte tenu de toutes les responsabilités fiduciaires que nous pouvons avoir, compte tenu aussi de nos obligations sociales. Cela dit, je pense que cette discussion devrait avoir lieu un autre jour, au sujet de la réglementation découlant de la Loi sur les transports nationaux, dans laquelle nous pouvons concrétiser ces idéaux grâce à des règlements.
Dans ce cas-ci, il s'agit plutôt d'une mesure habilitante. Il s'agit de commercialiser l'entreprise, de dire, très bien, nous allons la mettre en vente, mais vous allez devoir faire ceci et cela, ce qui revient à limiter les possibilités d'une entreprise privée, à mon avis.
M. Gouk: Le seul commentaire que je vais faire là-dessus, monsieur le président, c'est celui que j'ai déjà fait, à savoir que le gouvernement a déjà jugé bon d'imposer des conditions; il en a imposé deux qui n'ont rien à voir avec le potentiel de vente des actions.
Le président: Pourtant, je dois vous expliquer que ces deux conditions-là n'influent nullement sur les possibilités de vendre la compagnie.
M. Gouk: Peu importe. L'argument même que vous...
Le président: Dire qu'il faut qu'une entreprise privée assure une liaison ferroviaire donnée réduit bel et bien les possibilités de vendre la compagnie.
M. Gouk: D'un autre côté, vous dites que seuls les facteurs susceptibles d'influer sur les possibilités de vendre la compagnie entrent en ligne de compte, alors que le gouvernement a jugé bon d'imposer deux conditions, l'une sur l'emplacement du siège social et l'autre sur les langues, qui n'ont rien à voir avec l'idée de vendre la compagnie.
Le président: Je ne vous explique pas bien la situation, ou vous ne voulez pas accepter mes prémisses, c'est l'un ou l'autre.
Restons-en là, puisque nous avons dit ce que nous avions à dire. M. Gouk a demandé que nous votions par appel nominal.
Nous votons sur l'adoption du nouvel article 16.1. C'est un nouvel article présenté par M. Gouk. Nous sommes arrivés à l'impasse, et c'est pourquoi je demande le vote.
M. Guimond: J'espère que vous n'aurez pas gain de cause. Nous obtiendrions quelque chose comme le contrôle des armes à feu.
[Français]
M. Mercier: On demande un vote par appel nominal.
[Traduction]
L'amendement est rejeté par 5 voix contre 4
Les articles 17 à 21 inclusivement sont adoptés
Le président: L'annexe I est-elle adoptée?
M. Guimond: Avant que vous ne procédiez, je voudrais annoncer que nous allons présenter deux autres amendements, l'un sur...
Le président: Maintenant?
M. Guimond: Non, plus tard. Je voulais juste vous prévenir.
M. Fontana: Simple politesse.
M. Guimond: Je sais reconnaître votre bon travail, Joe, mais nous rirons plus tard.
L'un de nos amendements porte sur le régime de retraite. J'ai des notes.
[Français]
Considérant que ce gouvernement a l'intention de privatiser le CN, considérant que le projet de loi C-89 ne contient aucune mesure pouvant dissiper les craintes des employés et retraités du CN, considérant qu'à ce jour, ni le ministre des transports ni le président-directeur général du CN ne nous ont assuré que le régime de retraite du CN ne serait pas changé et que toutes les lois pouvant affecter le régime de retraite du CN continueraient de s'appliquer même si le CN était privatisé, considérant que le gouvernement et le ministre n'auront plus le même contrôle avec un CN privatisé, nous proposerons un amendement au projet de loi C-89 qui, en gros, va prévoir que le régime de retraite du CN, tel qu'il existe présentement, ainsi que tous ses actifs, demeureront inchangés.
Les règles actuelles du régime concernant la capitalisation et l'administration du plan continueront de s'appliquer et tout changement à la caisse fiduciaire de retraite du CN ne pourra être accompli qu'avec l'approbation du Comité de retraite.
De plus, nous aurons un nouvel article concernant le régime de retraite pour assurer certaines garanties aux travailleurs et travailleuses du CN et aux retraités.
Nous ajouterons aussi un article distinct pour faire en sorte que le gouvernement fédéral assume ses responsabilités en matière d'entretien du pont de Québec, que je considère comme étant une infrastructure majeure et pas uniquement une infrastructure historique. Je reproche à certains de mes collègues libéraux d'avoir tenté de le banaliser et de le ramener au rang d'un vulgaire pont au fond d'un rang au milieu de nulle part.
Cela complète la liste des annonces que je voulais faire.
[Traduction]
Le président: Je remercie M. Guimond.
M. Guimond: Était-ce un coup bas?
Le président: Non, je ne dirais pas ça, mais je pense qu'il était injuste de sauter aux conclusions en disant que tous les Libéraux sont de cet avis. Je ne vous ai pas vu parler à tout le monde pour obtenir l'opinion de chacun avant de faire cette déclaration, mais, dans l'intérêt de la bonne entente, je n'insisterai pas.
L'Annexe I est adoptée
L'Annexe II est adoptée
L'article 1 est adopté
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Le projet de loi est-il adopté?
M. Guimond: Je demande un vote par appel nominal sur le projet de loi, s'il vous plaît.
Le projet de loi C-89 est adopté par 6 voix contre 2
Le président: Nous avons livré le bon combat. Nous allons procéder de façon démocratique.
Dois-je faire rapport du projet de loi à la Chambre?
M. Guimond: Oui, avec opposition.
Le président: Vous pouvez vous charger de l'opposition; je me contenterai d'en faire rapport à la Chambre.
M. Guimond: Avant de terminer, j'aimerais faire une observation.
Le président: Chers collègues, juste avant de céder la parole à M. Guimond, je tiens à vous remercier tous une fois de plus pour avoir été si accommodants. Je sais que notre horaire était exigeant. Nous avons dû siéger le matin, l'après-midi et le soir pour étudier le projet de loi, et nous l'avons fait pour une excellente raison, comme vous le savez, parce que nous avions constaté qu'il y avait une possibilité sur le marché, et nous essayons de nous en prévaloir. Vous avez tous joué un rôle important dans cette tâche et, en ma qualité de président, je vous suis reconnaissant de la collaboration dont vous avez tous fait preuve en comité.
M. Gouk: Avez-vous une idée de la date à laquelle le projet de loi sera déposé à l'étape du rapport?
Le président: Je vais le présenter à la Chambre demain, maintenant que nous avons fini notre travail. Après, tout dépendra de nos leaders à la Chambre et du temps qui restera. M. Young va demander la date la plus proche possible, mais ce sera à notre leader parlementaire, M. Gray, d'en décider. Je regrette, mais je ne peux pas vous donner de date.
M. Gouk: Très bien.
Le président: Votre leader parlementaire sera certainement informé aussitôt que M. Gray aura pris une décision.
Monsieur Guimond.
M. Guimond: J'ai une petite observation à faire. Je pense que mon parti et moi-même avons essayé de collaborer dans une grande partie des discussions que nous avons eues ici, et il m'a été très difficile d'accepter que mon collègue le secrétaire parlementaire du ministre des Transports, le député de London, M. Fontana, n'a jamais voulu m'accorder de consentement unanime quand j'ai voulu retirer mon amendement.
J'ai décidé que nous n'accorderons pas notre consentement unanime pour que le projet de loi C-81 franchisse l'étape des trois lectures demain; nous nous arrêterons à la deuxième lecture, après quoi nous reviendrons au Comité. Le projet de loi C-81 porte sur le pont entre Buffalo et Fort Erie.
M. Fontana: Vous avez décidé d'agir ainsi, monsieur Guimond... le fait est que les règles parlementaires vous donnent le droit de présenter un amendement, comme vous l'avez fait, après quoi vous devez obtenir le consentement unanime pour le retirer. Manifestement, vous vouliez présenter l'amendement, si vous l'avez présenté.
Cela dit, permettez-moi de vous dire que vouloir vous servir d'un autre projet de loi, qui n'a absolument rien à voir avec celui dont nous parlons aujourd'hui... en disant que vous tenez à ce qu'on vous entende bien et en faisant ces remarques au sujet du pont de Québec... En fait, j'étais venu vous parler de cette discussion sur le pont de Québec, car vos commettants s'étaient présentés pour nous exposer leur point de vue, pour vous dire que nous nous efforcions d'obtenir des renseignements pour vous, afin de partager l'information, pour vous montrer que nous ne restons pas inactifs et pour vous exposer la situation telle qu'elle est.
Je ne sais pas très bien pourquoi vous prenez cela si personnellement. Vous avez dit que vous voulez respecter les règles et que vous ne vouliez pas introduire tous vos amendements aujourd'hui. J'avais l'impression que c'est pour ça que nous voulions travailler dans ce comité, pour partager des idées et des amendements, afin d'arriver au meilleur projet de loi possible. Le fait que vous ne voulez pas vous prévaloir de ce mécanisme et que vous préférez vous servir de la Chambre des communes ne signifie pas que vous devriez retenir ou que vous ayez le droit de retenir l'étude d'un autre projet de loi important - vous savez qu'il est très important - en essayant de faire de la petite politique parce que vous voulez...
Le président: Les fonctionnaires peuvent se retirer, s'ils le désirent.
J'aimerais arrondir un peu les angles: nous avons tous des façons de voir différentes et nous sommes tous motivés par des idéaux différents. Je pense que nous avons eu d'excellentes relations professionnelles dans notre comité et j'espère que j'ai donné à chacun l'occasion de s'exprimer. La politique étant ce qu'elle est, il arrive parfois que le ton monte sur certaines questions.
Je comprends pourquoi M. Guimond réagit à quelque chose que M. Fontana a déclaré. D'un autre côté, le gouvernement doit lui aussi s'efforcer de faire ce qu'il croit juste pour ne pas surcharger l'ordre du jour, en sachant que les règles veuillent que le député ne puisse pas présenter son amendement ici, mais plutôt à la Chambre. On peut donc étouffer quelque chose dans l'oeuf ici et faire preuve de souplesse là, etc. Néanmoins, je pense que, dans l'ensemble, quand nous sortons de cette pièce, nous ne sommes plus dans l'arène politique, et nous nous entendons très bien. Avant que quelqu'un ait une réaction très vive ou fasse des remarques acerbes, je pense que nous pourrions partir, y penser et peut-être même prendre un verre ensemble.
M. Guimond: C'est simplement une question de respect d'autrui. Les gens de la Coalition pour la sauvegarde du port de Québec ne sont pas très contents du genre d'accueil qu'on leur a réservé ici. Certains de nos membres sont des anglophones unilingues. Les gens de la Coalition ont présenté leur exposé en français, et quand vous enlevez vos écouteurs, vous ne comprenez pas un mot de ce qui se dit.
Ces gens-là ne sont pas très contents. Ils ne veulent pas faire de politique. Je n'ai jamais assisté à ces réunions-là. Ils ne sont pas contents. À Québec, on m'a fait toutes sortes de commentaires négatifs sur notre comité, sur le genre d'accueil qu'on fait aux gens qui parlent seulement français.
Je m'efforce de parler mon meilleur anglais, parce que je pense que j'ai un avantage sur vous, parce que vous n'êtes pas capables de dire bien, en français. J'en ai eu la tête plus enflée encore, parce que j'arrive à vous exprimer certaines de mes opinions dans les deux langues officielles du Canada.
Le président: Et c'est fantastique, à mon avis. Vous avez été vraiment très souple à cet égard, Michel. Malheureusement, nous devons tenir compte des personnalités et nous sommes tous des êtres humains. Certains ne se comportent pas comme les autres.
J'espère quand même que les actions individuelles de certains des membres d'un comité ne reflètent pas l'attitude de l'ensemble du comité, qui, à mon avis, a bien reçu... j'ai bien reçu ces gens-là et je leur ai dit qu'ils avaient vraiment fait du bon travail. Je les ai félicités pour la passion et pour la conviction avec laquelle ils défendent le pont de Québec. J'espère que ça leur permettra de gagner la partie, en dépit des actions d'un ou deux membres du Comité, quels qu'ils soient.
Chers collègues, je vous remercie beaucoup, une fois de plus. Il y aura une réunion du comité de direction dans deux semaines.
La séance est levée.