[Enregistrement électronique]
Le jeudi 26 octobre 1995
[Traduction]
Le président: Bonjour, chers collègues. Nous devrions nous mettre en route ou plutôt, puisqu'on parle de chemin de fer, nous remettre sur la bonne voie, si l'on peut dire. Nous reprenons l'étude du projet de loi C-101, Loi sur les transports au Canada.
Ce matin, nous entendrons en premier lieu le témoignage de M. E. Scott Smith, directeur général de la «New Brunswick Southern Railway Limited». Soyez le bienvenu, monsieur Smith. Joe Day, que nous connaissons bien à ce comité, est le conseiller juridique interne de la société. Quant à Robert Youden, il est directeur général de «Irving Forest Services». Nous l'avons rencontré lors de nos déplacements sur la côte Est dans le cadre de notre étude du secteur maritime.
Messieurs, c'est un plaisir de vous revoir aujourd'hui à Ottawa. Nous avons hâte d'entendre votre exposé qui, je l'espère, ne durera pas plus de quinze minutes pour nous laisser le temps de vous poser des questions. Encore une fois, soyez les bienvenus et allez-y dès que vous serez prêts.
M. Joseph Day (conseiller juridique interne, «New Brunswick Southern Railway Limited»): Merci, monsieur le président. Nous sommes heureux d'être ici ce matin. Nous tenons à vous remercier, ainsi que les membres du comité, d'être venus à Saint John, au Nouveau-Brunswick, lors de vos audiences sur le transport maritime.
Nous témoignons aujourd'hui pour vous parler du transport ferroviaire. Étant donné que c'est vous qui vous êtes déplacés la dernière fois, nous avons jugé bon de venir à vous cette fois-ci. Étant donné la façon dont le gouvernement avance avec ses modifications législatives, nous risquons bien de nous retrouver à Hamilton pour la prochaine réunion.
Le président: Vous y seriez très bien accueillis.
M. Day: Monsieur le président, nous vous avons fait parvenir à l'avance notre mémoire écrit. Je tenais à m'assurer que tous les membres du comité et vous-même l'aviez bien reçu.
Le président: Oui, nous l'avons reçu et nous vous en remercions vivement. Je vous signale d'ailleurs qu'il a été traduit.
M. Day: J'ai un changement à apporter au mémoire qui vous a été transmis. Il s'agit de la page 3, troisième paragraphe, qui commence par la phrase suivante:
- Il serait peut-être utile que le comité permanent examine l'ancienne ligne du Canadien
Pacifique qui va de Saint John, au Nouveau-Brunswick, à Montréal, en passant par le nord de
l'État du Maine, comme elle apparaît sur la carte jointe.
En effet, cette société ferroviaire n'est pas considérée comme une exploitation internationale. Dans le paragraphe suivant, je disais le contraire. En effet, je disais que: «l'«Eastern Maine Railway Company» est une société américaine exploitée au Nouveau-Brunswick». C'était pure spéculation de notre part lorsque nous avons préparé ce mémoire. En fait, ce n'est pas le cas. Cette société ferroviaire n'est exploitée que dans l'État du Maine et n'est donc pas assujettie à la législation canadienne sur les chemins de fer.
C'est le seul changement que nous souhaitons apporter à ce mémoire écrit, monsieur le président.
Le président: Nous prenons note de ce changement. Merci, monsieur Day.
M. Day: Aujourd'hui, j'aimerais procéder comme vous l'avez suggéré. Nous n'avons pas l'intention de lire le mémoire. Si vous ou l'un des membres du comité aviez des questions au sujet de ce qui s'y trouve, nous sommes ici pour y répondre.
Nous tenons à faire ressortir deux points de ce mémoire. Cela nous prendra certainement moins de 15 minutes, comme vous nous l'avez demandé.
La «New Brunswick Southern Railway Company Limited» appuie l'énoncé de principe fondamental du gouvernement selon lequel le transport ferroviaire devrait être assujetti aux forces du marché, ce qui est la meilleure façon de garantir un réseau ferroviaire viable et efficace. Telle est la position fondamentale que nous exposons dans notre mémoire écrit.
Nous sommes préoccupés par la situation tout à fait unique des provinces Maritimes et notamment des expéditeurs de cette région. L'évolution qui se produit dans l'industrie ferroviaire, où l'on va de plus en plus s'orienter vers l'exploitation de chemins de fer sur courtes distances, nous inquiète également. Je sais que le ministre a déclaré que les modifications proposées à la législation ferroviaire dans le projet de loi C-101 visent également à faciliter cette évolution.
Nous sommes accompagnés aujourd'hui par le directeur général de l'un de ces chemins de fer sur courtes distances, qui vous fera part de ses préoccupations en tant qu'exploitant, en premier lieu, mais surtout vu sous l'angle d'un exploitant de chemins de fer sur courtes distances au Nouveau-Brunswick. Ce qui vaut pour le Nouveau-Brunswick vaut également pour toutes les Maritimes, puisque les expéditeurs de la Nouvelle-Écosse ou de l'Île-du-Prince-Édouard devraient également passer par le Nouveau-Brunswick s'ils expédiaient leurs produits vers Montréal ou d'autres points situés à l'Ouest, ou recevaient des marchandises en provenance de ces endroits.
M. Robert Youden est également ici aujourd'hui pour faire un bref exposé et répondre à vos questions. Comme vous l'avez dit en le présentant, M. Youden est le directeur général de «Irving Forest Services Limited». Mes problèmes de transport font partie intégrante des activités courantes de sa société qui reçoit des fournitures et expédie des produits manufacturés à partir des Maritimes. En conséquence, on peut le considérer comme un expéditeur dans le contexte du projet de loi à l'étude.
Vous avez donc devant vous un représentant des transporteurs et un représentant des expéditeurs.
Au cours de notre exposé, nous allons aborder deux points en particulier. D'une part, les dispositions relatives à l'accès concurrentiel, notamment les prix de ligne concurrentiels dont profitent les expéditeurs du Nouveau-Brunswick. Nous allons également aborder brièvement la question de l'accès à l'Office pour les expéditeurs. Voilà les deux points que nous aimerions faire ressortir.
Je cède maintenant la parole à M. Scott Smith.
M. E. Scott Smith (directeur général, «New Brunswick Southern Railway Limited»): En janvier dernier, la «New Brunswick Southern Railway» et son associé américain, la «Eastern Maine Railway», ont acheté l'ancienne ligne abandonnée par le CP reliant Saint John au Nouveau-Brunswick et Brownville Junction dans l'Etat du Maine. Ces lignes de chemin de fer, avec la «Canadien American Railroad Company» rejoignent les lignes du CP à Sherbrooke, au Québec.
Ces trois lignes secondaires représentent une distance de 370 milles entre Saint John et le raccordement avec le chemin de fer de classe 1 à Sherbrooke, entre Saint John et Brownville Junction. C'est le tronçon qui relie le Nouveau-Brunswick au sud-est du Maine. La société «Canadien American» dessert Sherbrooke, ou plus exactement Lennoxville, et rejoint la ligne du Canadien Pacifique à cet endroit.
Pour replacer les choses dans leur contexte, l'autre option pour les expéditeurs de Saint John et de l'ensemble des Maritimes, en fait, c'est le Canadien National. Pour l'expéditeur de Saint John qui veut acheminer son produit vers le centre du Canada en empruntant les lignes du CN, le trafic devra se faire entre Saint John et Moncton, en passant par Edmundston pour rejoindre le Saint-Laurent, et vers l'ouest, le long du Saint-Laurent jusqu'à Québec et d'autres destinations à l'Ouest.
La distance entre Saint John et le plus proche raccordement avec une ligne ferroviaire réglementée par le gouvernement fédéral, sur le parcours du CN, est d'environ 530 milles. Je le signale parce que la plupart des marchandises en provenance des Maritimes sont acheminées en direction de Montréal et de Toronto. Le point d'établissement du PLC pour les Maritimes sera donc Québec et non plus Saint John comme c'est le cas actuellement. De ce fait, les provinces de l'Atlantique seront les seules du Canada à ne pas être desservies par deux chemins de fer de classe 1, et à être privées de points où s'applique le PLC. À notre avis, les expéditeurs des Maritimes devraient avoir le choix et ce choix devrait être une ville plus proche que ne l'est Québec.
Il y a dix mois, les traverses de chemin de fer et d'autres éléments d'infrastructure que possède actuellement la «New Brunswick Southern Railway» appartenaient au Canadien Pacifique. Celui-ci abandonnait cette ligne. Nous nous demandons pourquoi l'achat de ces éléments d'actifs a pour effet de modifier de façon si importante la protection des expéditeurs des Maritimes.
Les dispositions relatives à l'accès concurrentiel ont été adoptées dans la Loi sur les transports nationaux de 1987 pour protéger les expéditeurs contre les pratiques monopolistiques des transporteurs. À notre avis, dans l'industrie ferroviaire au Canada, on s'oriente de plus en plus vers la création de chemins de fer sur courtes distances.
Ce fait même, en plus des dispositions proposées pour les PLC, nous amène à conclure que de plus en plus d'expéditeurs se verront refuser en pratique l'accès aux PLC, parce qu'un vieux bien régi par le fédéral se retrouve dans le domaine provincial.
Les chemins de fer sur courtes distances vont faire partie intégrate du réseau de transport ferroviaire au Canada, et on ne peut pas se servir de cette réalité pour priver qui que ce soit d'un accès raisonnable aux dispositions de la loi régissant les PLC.
Nous ne disons pas que le projet de loi C-101 devrait être modifié pour permettre l'imposition des PLC à des chemins de fer régis au niveau provincial, mais nous croyons qu'il devrait être possible d'imposer des PLC à des chemins de fer régis par le fédéral, et que les droits d'un expéditeur ne devraient pas être compromis juste parce qu'un ou plusieurs chemins de fer entre le point d'origine et la destination sont du ressort provincial.
J'ajouterais que ces chemins de fer auraient déjà accepté volontairement un tarif. Toute solution à cette situation devrait réduire son impact sur d'autres articles du projet de loi. À notre avis, une solution simple serait de changer le libellé du paragraphe 131(1) et de dire, de façon plus générale, que le transporteur local devrait établir un prix de ligne concurrentiel jusqu'au point de correspondance le plus proche avec un autre transporteur. Ce faisant, l'expéditeur serait sur le même pied d'égalité qu'auparavant quant aux dispositions régissant les PLC avant l'évolution de l'industrie vers les chemins de fer sur courtes distances.
M. Day va parler de ce point ainsi que d'autres solutions recherchées dans quelques instants. Maintenant, Bob Youden a quelques observations à faire.
M. Robert Youden (directeur général, «Irving Forest Services»): J'aimerais parler à titre d'expéditeur ce matin. Nous expédions environ 700 000 tonnes de marchandises chaque année, par chemin de fer, camion et navire. Chaque jour, nous préparons des lettres de transport et nous expédions des marchandises à travers le pays, et nous avons des préoccupations. En termes simples, nous aimerions pouvoir nous adresser à quelqu'un lorsque nous avons des problèmes.
J'aimerais vous donner un exemple qui, à mon avis, est réel pour la plupart d'entre nous. Il est tiré de l'industrie du téléphone. Il y a six ans, j'ai déménagé au Nouveau-Brunswick et j'ai demandé une liaison téléphonique. On m'a dit que si je pouvais être à la maison jeudi, quelqu'un viendrait chez moi. On ne pouvait pas me dire à quelle heure, mais si je restais là toute la journée, quelqu'un viendrait. Personne n'est venue ce jour-là; le technicien est plutôt venu le lendemain. On m'a laissé une petite note me disant que je n'étais pas là et que je devais rappeler pour fixer un autre rendez-vous. J'ai fini par me faire installer le téléphone.
J'ai déménagé depuis, et lorsque j'ai téléphoné pour demander une autre liaison téléphonique, on m'a demandé quel jour je voulais que le technicien vienne. J'ai trouvé cela gentil. Lorsque j'ai demandé si le technicien pouvait venir le soir, on m'a dit que oui et on m'a demandé quel soir. Lorsque j'ai dit que je serais à la maison jeudi, on m'a demandé de choisir une heure et on m'a dit que le technicien serait là. Il est venu le jeudi soir installer mon téléphone et il m'a laissé une petite carte avec un numéro de téléphone à composer si j'avais des problèmes. Deux jours plus tard, j'ai reçu un appel dans le cadre d'un sondage de satisfaction de clients pour voir si j'étais content du service.
Quant à l'expédition quotidienne de marchandises, j'aimerais me retrouver quelque part entre le premier exemple, où je me sentais négligé et isolé, avec personne à qui m'adresser, et le deuxième exemple. C'est ce qu'il faut.
Je vais vous donner un exemple, ce n'est pas un exemple canadien cette fois-ci, et il n'est donc pas valable aux termes des règles dont nous parlons ici. J'ai un client américain au Rhode Island à qui j'ai expédié des marchandises. Les 400 premiers milles me coûtent la même chose que les 60 derniers milles. Cela n'a pas de sens. Est-ce que je peux dire qu'il y a préjudice important et que cela me cause du tort? Non. Je vais continuer à expédier. Je vais vendre à quelqu'un d'autre. Mais est-ce que c'est la bonne approche pour nous? Je ne le crois pas.
Je propose qu'on ait un système juridique qui nous permette d'avoir accès aux tribunaux, et que si l'on s'en sert de façon insensée ou déraisonnable, on en paie le prix. Cela nous permettrait peut-être, lorsque cela va mal, de nous adresser aux bonnes personnes, et si notre démarche était insensée, on en assumerait le coût.
M. Day: Les rédacteurs et le ministre ont cru bon d'inclure et de consigner les dispositions touchant les PLC dans le projet de loi C-101. Ces dispositions ont été intégrées à la législation de 1987 dans le but d'établir un équilibre entre les expéditeurs et les grands transporteurs nationaux, pour éviter la possibilité de pressions monopolistiques exercées par l'un des grands transporteurs sur un expéditeur captif d'un transporteur. C'était là le but.
On vous dira qu'on ne s'est pas servi très souvent de ces articles, ce qui veut dire que les demandes auprès de l'office en vertu de ces articles n'ont pas été très courantes. Mais nous croyons que ces articles ont servi, et qu'on s'en est servi assez souvent comme menace. Cette menace, c'est que s'il y a possibilité de s'en servir, il est donc facile pour l'expéditeur d'en arriver à une entente avec le transporteur. Mais s'il n'y a pas de menace possible, ou si la menace a été réduite ou atténuée, ce sera moins facile. Dans notre rapport, nous suggérons que c'est ce qui a résulté, en partie involontairement, de l'évolution vers les transporteurs sur courtes distances.
Telle est notre position. Les dispositions relatives aux prix de ligne concurrentiels figurent aux articles 130 à 137. Si je les analysais, on en viendrait aux détails techniques, et je n'ai pas l'intention d'en parler. Mais si vous voulez qu'on débatte des différents articles et des raisons qui sous-tendent notre libellé, on le fera avec plaisir.
Nous ne sommes pas des rédacteurs législatifs. Le libellé que nous avons proposé sert plutôt à fixer des concepts.
Le premier concept, c'est que le parcours doit être entièrement situé au Canada. À vous de décider, en tant que comité, si une telle restriction sur une demande de prix de ligne concurrentiel mérite d'être maintenue car c'est une décision politique: si vous devez faire une demande pour un PLC, vous devriez donc demander ou délimiter un autre parcours entièrement situé au Canada, s'il y en a.
Premièrement, vous devez décider si cela mérite d'être maintenu. Si vous dites que c'est pour encourager les affaires au Canada et si nous donnons à un expéditeur au Canada un droit particulier et que nous devrions tenter d'aider l'un des chemins de fer nationaux au Canada, ça va.
Ensuite, il y a la question de la disposition déterminative pour les Maritimes. Cette disposition déterminative existait pour des raisons évidentes. Elle existait parce qu'il y a deux transporteurs nationaux, le CP et le CN, et que l'un d'eux passait à travers le nord du Maine. En 1987, le CP a voulu être de la partie. En gros, la ligne bleue qui passe à travers le nord du Maine était une ancienne ligne du CP, et on avait estimé que ce parcours se situait entièrement au Canada.
Cette disposition a été éliminée dans le projet de loi qu'on nous propose. Il faudrait se demander pourquoi. L'a-t-on éliminée pour la seule raison que le CP l'a vendue à plusieurs transporteurs sur courtes distances? Ces transporteurs ne sont-ils pas aussi importants que l'était le CP? Est-ce là la raison? Est-ce parce que les expéditeurs ne sont pas aussi importants aux Maritimes que partout ailleurs, où il y a deux lignes? Ou est-ce parce que nous voulons que le CN soit plus attrayant, pour la vente? Ce sont là les décisions que vous aurez à prendre, et vous aurez à préciser la raison de son élimination.
Nous avons proposé plusieurs autres modifications des définitions. On devrait les modifier, parce qu'il faut tenir compte des chemins de fer sur courtes distances. Si vous mettez en oeuvre les changements de définitions ainsi que d'autres changements que nous avons proposés, une disposition déterminative ne serait peut-être plus nécessaire.
C'est la façon d'interpréter l'un de ces articles, c'est-à-dire l'article 131(1), qui porte sur la question des PLC, qui pose certains problèmes.
S'il n'existe pas une autre ligne entièrement située au Canada, si la compagnie à laquelle vous demandez un prix de ligne concurrentiel possède deux lignes, comme c'est le cas au Nouveau-Brunswick, vous ne devriez pas, me semble-t-il, vous trouver dans une situation où vous seriez obligés de vous servir d'une autre de leurs lignes.
Vous devez demander un tel prix à une compagnie. Si la compagnie refuse de vous offrir un prix, vous devez vous présenter à un office et demander à ce dernier d'obliger cette compagnie à vous offrir un prix de ligne concurrentiel. Il est certain que ce n'est pas l'intention du projet de loi, mais cet article n'indique pas clairement que vous pouvez vous servir d'un transporteur autre que le transporteur local auquel vous avez demandé un prix de ligne concurrentiel. Ce n'est pas bien évident dans le texte, et nous demandons que cela soit précisé.
À l'heure actuelle, il y a un point de correspondance à Québec. Les gens des provinces Maritimes ne seraient tout de même pas obligés de se servir de la ligne du transporteur local jusqu'à Québec. Si le point d'origine est à Sussex, au Nouveau-Brunswick, vous ne devriez pas être obligés d'aller jusqu'à Québec, ce qui représente cinq sixièmes du parcours entre Sussex et Montréal. Il ne serait pas logique de vous offrir un prix de ligne concurrentiel pour 90 p. 100 du parcours.
Nous avons proposé un amendement à l'un de ces articles pour régler ce problème. Notre mémoire parle de cet article, que je vais expliquer en quelques instants. Notre proposition fait mention de 1 200 kilomètres ou 50 p. 100 et, plus loin, on précise en disant «la distance la plus longue».
Le président: Joe, je vous accorde une minute de plus.
M. Day: Voici mes observations. Nous proposons que les amendements qui seront apportés ne devraient pas obliger un expéditeur à aller à Québec. Il faut changer les définitions. Il faut modifier cet article qui stipule les critères économiques parce qu'il sème la confusion et l'incertitude et nuit à nos PLC.
Voici alors notre proposition. Nous appuyons l'approche en général. Au fait, nous sommes en faveur de la plupart des approches envisagées, mais il faut améliorer ces articles en raison de ces chemins de fer sur courtes distances et de la situation particulière qui existe dans les provinces Maritimes.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, messieurs. Je vous remercie beaucoup de cette présentation de la «New Brunswick Southern Railway Company». Je crois pouvoir dire que vous êtes allés directement au but. Les membres me donnent déjà l'impression qu'ils ont certaines questions qui pourraient répondre à certaines préoccupations que vous avez soulevées.
M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Pensez-vous qu'il serait possible de créer un autre chemin de fer sur courtes distances aux Maritimes? Est-ce que c'est possible, oui ou non?
M. E.S. Smith: Il y a beaucoup de rumeurs qui courent. À la longue, on croit que leur nombre s'accroîtra plutôt que le contraire.
M. Hoeppner: Cette situation va-t-elle avoir un impact sur le prix du transport de vos marchandises? Pouvez-vous réduire les tarifs marchandises s'il y a plus de chemins de fer sur courtes distances?
M. E.S. Smith: Je ne peux pas vraiment répondre à cette question. On veut simplement créer une situation qui offre un choix aux expéditeurs. Voici le point clé de notre présentation. Nous croyons que nous pouvons faire concurrence à tous nos rivaux, mais il faut uniformiser les règles du jeu.
M. Hoeppner: Alors, le coût n'est pas un facteur qui vous importe. C'est plutôt une question d'accès à certaines régions.
M. E.S. Smith: C'est exact.
M. Hoeppner: Merci.
Le président: Monsieur Fontana.
M. Fontana (London-Est): Je vous remercie de votre présentation, mais je suis un peu perplexe. Nous discutons surtout des chemins de fer sur courtes distances américains, n'est-ce pas? Vous avez des chemins de fer américains, qui relèvent d'une autre juridiction, et vous avez également des chemins de fer provinciaux, n'est-ce pas?
M. Day: Oui.
M. Fontana: Vous n'avez pas demandé une loi fédérale qui vise à faire imposer aux chemins de fer sur courtes distances provinciaux les droits du successeur, et je suis heureux de cela. Maintenant que nous avons établi notre cadre législatif, il faut espérer que les provinces vont faire la même chose. L'Ontario envisage cette possibilité et le Nouveau-Brunswick et certaines autres provinces qui prônaient ces chemins de fer seront obligées, bien sûr, de se doter d'une loi qui reflète la nôtre afin de supprimer certaines ambiguïtés.
En vertu de l'article 131(4) du projet de loi, le parcours auquel s'applique un PLC ne doit être entièrement situé au Canada que s'il est raisonnable et rentable, ce qui veut dire, grosso modo, qu'on peut toujours emprunter un parcours aux États-Unis qui est beaucoup plus rentable. Essentiellement, vous êtes en train de nous demander d'élargir, pour votre compte, les droits du successeur, mais il faut comprendre que tous les autres expéditeurs à travers le pays vont nous demander la même chose.
Vous devez alors me convaincre de la raison pour laquelle je devrais accorder à vos expéditeurs quelque chose que nous ne sommes pas prêts à accorder à tous les autres. Ou bien êtes-vous prêts à dire que nous devrions offrir cette même possibilité à chaque expéditeur du pays?
Je crois que les critères prévus à l'article 131(4) règlent cette préoccupation que vous avez soulevée.
M. Day: Monsieur Fontana, puis-je revenir à ce que vous avez dit au tout début et confirmer ce que vous venez de dire? Notre mémoire ne propose pas d'élargir les droits. Le gouvernement fédéral ne devrait rien imposer aux chemins de fer qui relèvent d'une province ou qui ne relèvent pas du gouvernement fédéral.
Quelqu'un qui transporte des marchandises à partir de Sussex, qui se trouve sur la ligne entre Moncton et Saint John, aura droit à un PLC du chemin de fer Canadien National, qui relève du gouvernement fédéral, pour cette courte distance afin qu'il puisse atteindre le lieu de correspondance.
Nous examinons la situation du point de vue de l'expéditeur. Il voit cette ligne-là qui appartenait au CP et qui traversait le nord de l'État du Maine, et il veut transporter ses marchandises là. Avant, il pouvait choisir entre le CN ou le CP. Il demandait un PLC au CN et il pouvait l'obtenir. Cependant, il existe maintenant un certain nombre de chemins de fer sur courtes distances sur cette même ligne, alors quelle différence est-ce que cela peut faire à l'expéditeur?
M. Fontana: Eh bien, un chemin de fer était, à ce moment-là, un chemin de fer de compétence fédérale - Canadien Pacifique - mais il existe maintenant des chemins de fer américains ou provinciaux...
M. Day: Qui transportent le commerce interprovincial à partir du Nouveau-Brunswick. Du point de vue de l'expéditeur, c'est le commerce interprovincial qui relève de la compétence du gouvernement fédéral. Alors il faut se mettre d'accord sur tous ces éléments avant, de toute façon. Vous n'imposez rien à ces chemins de fer; tout ce que vous faites, c'est accorder à l'expéditeur au Nouveau-Brunswick les mêmes droits qu'il avait avant. C'est tout.
M. Fontana: C'est ce que je dis. Bien entendu, vous avez fait une observation pertinente qu'il va falloir examiner. Je vous propose que la simple adjonction du terme «que s'il» à l'article 131(4) pourrait permettre, soit à vous ou à un autre expéditeur, de présenter une demande à cet effet à l'Office.
J'aimerais parler à Bob de son exemple. Je n'ai pas compris si les 60 derniers milles étaient aux États-Unis ou au Canada. Vous avez dit que les 400 premiers milles vous ont coûté la même chose que les 60 derniers milles. Dois-je comprendre que les 60 derniers milles étaient au Canada ou dois-je comprendre qu'ils se trouvaient aux États-Unis?
M. Youden: Aux États-Unis. Ce n'est pas un exemple qui convient tout à fait aujourd'hui, mais il existe d'autres exemples semblables au Canada. Nous avons payé pour les 400 milles le même montant que nous avons payé pour les 60 ou 70 derniers milles. Il n'y avait qu'une seule ligne, et ce transporteur en particulier a décidé de demander un prix qu'il pensait pouvoir obtenir.
M. Fontana: Vous vouliez savoir à qui vous adresser en cas de problème, un peu comme vous pouvez le faire en vous adressant à votre compagnie de téléphone. Voilà justement la raison d'être de l'Office sauf, évidemment, si vous exploitez un chemin de fer sur courtes distances assujetti à la réglementation provinciale.
Comme je l'ai déjà dit, il faudra que les provinces adoptent des lois afin de vous donner accès à une instance provinciale. Je suis persuadé que nous encouragerons les provinces en ce sens, mais par contre, je ne sais pas si nous pouvons le faire vraiment dans le cas des chemins de fer assujettis à la réglementation fédérale.
Vous allez pouvoir adresser vos questions précises à l'Office qui évaluera s'il y a préjudice important. Il faudra présenter une demande à l'Office qui n'examinera la question du préjudice important qu'après s'être assuré avoir compétence en la matière, après avoir déterminé que vous avez un recours. Ce n'est qu'alors que l'Office s'interrogera sur l'existence d'un préjudice important. S'il y a une différence de 2, 3 ou 5 c., est-ce un préjudice important? Peut-être pas. Vous devrez démontrer, au cas par cas, qu'il y a préjudice important.
Voilà pourquoi nous voulons inclure le critère du préjudice important: afin que l'Office puisse déterminer, sur demande, s'il y a recours et s'il y a préjudice. Dans votre cas particulier, je pense que c'est au gouvernement du Nouveau-Brunswick qu'il faudrait vous adresser pour obtenir un mécanisme semblable à l'échelle provinciale.
M. Youden: Je dirais que cette expression «préjudice important» occupera nos avocats mais nous laissera, nous qui devons payer le transport, sans définition applicable. En ce qui concerne le préjudice important, quelques cents la tonne, c'est important si je fabrique de la pâte à papier. Suis-je lésé? C'est difficile à dire. Comment le déterminer, que dire à mes employés? Nous expédions 700 000 tonnes par année. Je ne vois pas toutes les transactions. Nous faisons de notre mieux. Nous aimerions avoir un cadre pour nos activités, au jour le jour. Tout cela est très vague.
M. Fontana: Vous négociez à tous les jours avec votre compagnie de chemin de fer, n'est-ce pas?
M. Youden: Monsieur Fontana, nous avons annoncé au mois de décembre que nous mettions sur pied un chemin de fer sur courtes distances. J'ai rencontré à ce moment-là les représentants des compagnies de chemin de fer qui nous desservaient, les deux grandes compagnies canadiennes. Nous leur avons expliqué que nous allions mettre sur pied une compagnie de chemin de fer. Nous leur avons dit que 90 p. 100 de notre transport avait été confié à leur concurrent au cours des deux dernières années. Nous leur avons dit qu'il fallait qu'ils nous donnent de meilleurs prix. Savez-vous ce qu'on nous a répondu? Sur leur départ, ils nous ont dit, nous allons devoir augmenter les prix de 3 p. 100, parce que nous perdons de l'argent.
Je reviens à mon exemple de ma compagnie de téléphone: je serai là jeudi, attendez-moi. Je ne peux pas mener mon commerce ainsi. Je dois savoir que si je suis traité injustement, j'ai un recours. Si je m'en prévaux, on doit prévoir des sanctions. Ma tâche consiste à livrer mon produit au marché, pas à faire la tournée des offices de ceci ou de cela à tous les mois.
M. Fontana: Permettez-moi un commentaire. Puisque la loi actuelle vous donne accès à l'Office maintenant, vous présumez que sans ces mots, vous allez continuer à devoir justifier votre droit à un recours.
Le seul nouvel élément - et je suis persuadé que vous le comprendrez puisque vous êtes dans les affaires et que vous traitez avec de nombreuses personnes qui vous demandent d'améliorer vos prix vous aussi - c'est la nécessité d'un mécanisme qui permette de déterminer ce qui est équitable et raisonnable sur le plan commercial et de déterminer si vous causez ou non un préjudice important là où la concurrence existe et où il y a d'autres options compétitives à votre disposition.
M. Youden: Les temps sont très difficiles. On modifie notre loi sur les transports. La politique maritime évolue. La Garde côtière fait l'objet de changements. Je consacre autant de temps à comparaître devant des groupes comme le vôtre qu'à gérer mes affaires. Tout cela est important, et nous appuyons vraiment...
M. Fontana: Mais je peux vous promettre que tout cela nous donnera un meilleur système.
M. Youden: J'en conviens. Je pense que c'est excellent. Je pense que tout ce changement, toutes ces mesures que vous préconisez seront excellents, mais si nous commettons des erreurs, ou si certains expéditeurs se retrouvent en difficulté, ils n'auront pas accès au même recours pour régler leurs problèmes. Devant tout ce qui se passe, ne pourrait-on pas être prudent en ce qui concerne l'accès à l'Office tant que tout ne sera pas réglé; ce serait plus rassurant.
Le président: Merci.
Joe, j'aimerais une précision. Votre demande en ce qui concerne le PLC ici, à l'article 131, m'étonne beaucoup. Vous êtes avocat. Il ne s'agit pas ici sur la carte d'un chemin de fer interprovincial, mais plutôt international. Vous partez du Nouveau-Brunswick, vous traversez l'État du Maine pour vous rendre au Québec. Comment un organisme du gouvernement fédéral comme l'ONT ou l'OTC peut-il dire à un propriétaire américain en sol américain qu'il doit offrir un PLC?
M. Day: Il n'en est pas question.
Le président: Alors montrez-moi comment cela fonctionnerait.
M. Day: Certainement.
Voici Sussex sur la carte, vous ne le voyez pas, mais c'est bien ici, entre Saint John et Moncton. L'expéditeur de Sussex - il y a une scierie à Sussex - expédie son bois à Montréal. Nous avons l'option, et la compagnie de Bob Youden l'a aussi, de passer par ici, jusqu'en haut, en faisant le tour, ou nous pouvons plutôt passer par ici. C'était ainsi du moins le 31 décembre 1994, lorsque la voie était exploitée par le CP et était considérée comme une ligne entièrement située au Canada.
Si vous décidiez que vous vouliez passer par ici, vous demandiez au CN de vous donner un prix jusqu'à l'interconnexion ici à Saint John. Le CN acceptait ou vous pouviez vous adresser à l'Office pour obtenir ce prix. Voilà comment on obtenait le PLC sur les parcours sur courtes distances puisque nous sommes captifs sur ce tronçon.
Avec le changement, ce parcours n'est plus considéré comme entièrement situé au Canada. Deuxièmement, il existe maintenant plusieurs lignes secondaires dans ce secteur. Aux termes du libellé du projet de loi, cet endroit n'est plus un lieu de correspondance et ce service n'est plus assuré par un transporteur de liaison. Aux termes du projet de loi, l'expéditeur ici qui aurait pu obtenir le PLC sur ce tronçon il y a neuf mois ne pourra plus le faire. Nous demandons donc une modification à la définition de «lieu de correspondance».
Pourquoi l'expéditeur n'aurait-il pas accès à cette ligne et pourquoi les chemins de fer sur courtes distances n'auraient-ils pas l'option de faire concurrence au transporteur national tout simplement parce que les définitions de «lieu de correspondance» et de «transporteur de liaison» ne s'appliquent qu'aux chemins de fer assujettis à la loi fédérale. Voilà l'une des choses que nous demandons.
Le président: Mais ce tronçon, dont vous parlez, relève entièrement de la province. Vous ne parlez pas d'une ligne interprovinciale.
M. Day: Ce tronçon-ci?
Le président: Non, l'autre.
M. Day: Cette ligne?
Le président: Non. La ligne rouge et la ligne bleue dont vous parlez au point d'interconnexion. Tout ce secteur se trouve au Nouveau-Brunswick et est donc de compétence provinciale.
M. Day: Voici la ligne du CN qui relève de vous. Nous demandons le PLC sur la voie du CN.
Le président: Et vous aurez un PLC.
M. Day: Nous ne voudrions pas que le CN nous dise qu'il ne va pas nous accorder un PLC parce que l'article...
Le président: Ils ne vous le diront pas. Vous aurez ce PLC.
M. Day: Nous ne pouvons pas l'avoir.
Le président: Du CN.
M. Day: Nous ne pouvons pas. Vous ne pouvez pas nous le donner. Le CN va aller voir l'Office et lui dire: «Vous ne pouvez pas le leur accorder car ce n'est pas une interconnexion. Ce n'est plus un chemin de fer de liaison.»
Le président: Vous êtes alors allés demander à la province du Nouveau-Brunswick de vous déclarer transporteur de liaison pour pouvoir obtenir ce PLC du CN.
M. Day: Même si le Nouveau-Brunswick le faisait, cela ne nous servirait pas à grand-chose avec le projet de loi que vous nous proposez ici, le projet de loi C-101.
Regardez le paragraphe 131(1). On y parle du «lieu de correspondance le plus proche avec un transporteur de liaison». Or, ce n'est pas un lieu de correspondance et ce n'est pas un transporteur de liaison.
M. Fontana: Regardez le paragraphe 131(4): c'est là qu'il y a le critère que je voulais vous mentionner. C'est tout ce qu'il faut.
M. Day: Non. Il faut modifier les définitions de «lieu de correspondance» et de «transporteur de liaison», et préciser les choses.
Le président: Il y a un autre petit problème supplémentaire, c'est que le CN est sur le point d'être privatisé.
M. Day: Oui.
Le président: Mais nous en sommes là pour l'instant.
M. Day: Il n'y a pas de raison de ne pas s'occuper des problèmes tels qu'ils se présentent actuellement. C'est tellement facile de modifier le libellé comme nous l'avons proposé pour l'article 131. C'est tellement facile de changer...
Le président: Désolé d'accaparer la parole, mais je voulais m'assurer que je comprenais bien.
M. Day: ...pour régler les problèmes des chemins de fer sur courtes distances et clarifier la situation particulière des Maritimes. C'est tout ce que nous demandons. N'importe où ailleurs, cette ligne serait aussi au Canada.
Mme Wayne (Saint John): Au sujet de la compagnie du téléphone, monsieur Youden, c'est ma belle-fille qui a repris les choses en main, et c'est pour cela que vous avez eu ce coup de téléphone sympathique. Elle est comme sa belle-mère.
En outre, j'ai posé une question quand notre ministre a comparu, car je sais qu'il veut que cette ligne, la New Brunswick Southern Railway, fonctionne bien. Quand je lui ai posé la question à l'époque, car j'étais au courant de vos préoccupations, il m'a dit qu'on attendait en fait ce que vous avez ici sous les yeux pour voir s'il était possible de rectifier la situation, parce qu'il tient vraiment à ce que cette ligne fonctionne bien. C'est indéniable. Il n'y a qu'à regarder.
Le président: C'est vrai, Elsie. C'est pour cela que notre comité cherche à voir s'il faut apporter certaines modifications au projet de loi.
Mme Wayne: À la page 12 de votre mémoire, Joe, vous parlez de l'article 132. Dans le texte anglais, vous dites «portion of the railway line to the neatest interchange». Vous vouliez dire «the nearest», n'est-ce pas?
M. Day: Je pense que vous avez raison.
Mme Wayne: Vous suggérez un certain nombre de modifications... Dans votre mémoire, à la page 8, vous mentionnez trois articles - le paragraphe 34(1), le paragraphe 27(2) et l'article 113, et vous les avez soulignés.
M. Day: Oui.
Mme Wayne: Ils vous posent manifestement des problèmes. C'est pour cela que vous les avez soulignés? Au début, quand j'ai vu que vous les aviez soulignés, j'ai eu peur, j'ai cru que vous vouliez les conserver alors que tous les autres expéditeurs voulaient les supprimer.
M. Day: Non, c'était simplement pour les mettre en évidence. Vous avez raison, madame Wayne. J'ai ajouté cela.
Nous n'avons pas mentionné la question des «objections frustratoires» car c'est une objection normale dans toute procédure juridique ou para juridique.
Nous n'avons pas d'objection majeure à cela. Nous n'allons pas creuser la question. Diverses autres personnes l'ont déjà abordée. Il s'agit simplement de montrer qu'il y a un certain nombre de nouveaux obstacles, de nouveaux critères qui ne facilitent pas les choses pour un expéditeur désireux de faire appel à l'Office.
Comme je l'ai dit lors de notre exposé oral, l'élément important, c'est la menace. Ce n'est pas une menace si quelqu'un sait que son avocat est capable de trouver toutes sortes d'astuces pour saboter la procédure. Plus il y a de recours, moins la menace a de poids.
Il y a aussi ce qu'a dit M. Fontana. Il a dit qu'on pourrait peut-être interpréter les choses comme cela. Si cette possibilité existe, pourquoi ne pas dire clairement qu'en l'absence d'une autre...
Mme Wayne: C'est ce que disent tous les expéditeurs du Canada.
M. Day: ...route entièrement à l'intérieur du Canada, on peut passer par les États-Unis à condition d'aboutir au Canada finalement?
Mme Wayne: C'est cela. C'est ce que disent tous les expéditeurs.
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Ma question porte sur les chemins de fer sur courtes distances, car je viens de l'Ouest et nous avons de nombreux embranchements qui pourraient en devenir.
Comme c'est une nouvelle notion et que nous avons un territoire immense dans l'Ouest, quels sont les points les plus évidents auxquels notre comité et le gouvernement devraient faire attention pour ne pas commettre d'erreur dans l'Ouest?
Je sais que c'est une vaste question, mais nous aurions peut-être besoin d'aide à ce sujet.
M. Day: Je suis sûr que Scott pourra vous aider. La seule chose que je dirai avant de le laisser intervenir, c'est ce que je viens de dire, qu'il faut être prudent. Avec une réglementation provinciale, le lieu de correspondance... Avec la définition actuelle, le transporteur de liaison, s'il s'agit d'une ligne secondaire à réglementation provinciale... ce n'est plus un lieu de correspondance aux fins de la loi, puisque la ligne est définie comme fédérale depuis longtemps... Il faut rectifier cela en modifiant la définition de «transporteur de liaison» ou de «lieu de correspondance». Au lieu d'utiliser «lieu de correspondance», on mettrait autre chose: un endroit où l'on change de ligne de chemin de fer. On ne parlerait plus de «transporteur de liaison».
Comme je le dis dans mon mémoire, au paragraphe 130(1), on parle de «compagnies» et non de «compagnies de chemin de fer». Voilà un exemple.
Mais Scott va maintenant pouvoir continuer.
M. E.S. Smith: Tout à fait d'accord. Il va y avoir de plus en plus de chemins de fer sur courtes distances. Je pense que la plupart des exploitants de ces lignes sont convaincus d'être concurrentiels. Ce qui est essentiel, c'est de donner aux expéditeurs le choix du lieu et des moyens d'expédition. Si une loi lui impose ce qu'il doit faire, je pense que ces chemins de fer sont condamnés d'avance. La plupart d'entre eux, en tout cas. Pied d'égalité, d'accord, à condition qu'il y ait vraiment égalité.
M. Youden: Permettez-moi d'ajouter autre chose. En tant qu'expéditeur, cela ne me réjouit pas de savoir que pour obtenir un PLC, si je veux expédier quelque chose à travers le pays, je vais me retrouver à discuter avec des offices des transports provinciaux et des offices des transports fédéraux. Je vais plutôt mettre ma marchandise sur un camion, parce que ce sera trop compliqué. Quand on tombe au niveau provincial, peu importe que l'on reste au Canada ou que l'on aille à l'étranger. Si un autre transporteur veut vous donner un prix et que votre transporteur détenant un monopole peut rester compétitif, peu importent ces autres transporteurs.
Si je suis expéditeur et que j'obtiens un PLC à Québec, c'est probablement la dernière fois que je parlerais de PLC. Je pense que dans l'Ouest si vous devez faire 500 milles sur un parcours de 1 000 milles, ce sera pareil.
Le président: Mais, de la même façon, si vous choisissez d'expédier votre marchandise par camion d'une province à l'autre... si vous croyez que vous allez avoir des problèmes avec les chemins de fer, attendez donc de voir ce que donne le camionnage interprovincial. Nous ne sommes pas compétents en matière de transport interprovincial par camion. Vous allez devoir faire des démarches auprès de chacune des provinces que votre camion va traverser.
M. Youden: Mais je peux faire venir trois sociétés de camionnage différentes jusque chez moi, mais je n'ai accès qu'à une seule société ferroviaire. Voilà le problème. Si je pouvais avoir le choix entre trois chemins de fer différents, je serais le plus heureux des hommes. Scott et moi ne pourrions plus voyager parce que nous passerions tout notre temps à nous disputer, mais je serais très heureux car j'aurais le choix entre diverses options. Voilà la différence.
Mme Cowling: J'ai une remarque à faire. D'après de nombreux témoins, étant donné les distances à parcourir et le relief de la région, le camionnage n'est pas une option pour les gens de l'ouest du Canada.
Le président: Puisqu'il n'y a plus de questions, je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui.
Nous vous savons gré d'avoir pris le temps de nous présenter votre mémoire et d'avoir répondu à nos questions. Merci, messieurs.
PAUSE
Le président: Chers collègues, nous accueillons maintenant Thomas Payne, président de la «Central Western Railway Corporation».
Soyez le bienvenu, Thomas. J'ai remarqué que vous avez suivi nos délibérations pendant deux ou trois jours. Nous avons hâte de vous entendre, monsieur. Si vous pouviez nous présenter un résumé d'une quinzaine de minutes au plus, cela nous laissera du temps pour vous poser des questions qui nous intéressent au plus haut point, compte tenu de votre expérience en matière de chemins de fer sur courtes distances. Je vous remercie.
M. Thomas Payne (président, «Central Western Railway Corporation»): Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, c'est un honneur pour moi de comparaître devant votre comité. Il s'agit, sauf erreur, du septième comité parlementaire devant lequel je témoigne pour parler des chemins de fer sur courtes distances au Canada. Parti d'une idée brillante qui a vu le jour sur la locomotive no 2359 du Chemin de fer du Canadien Pacifique en 1979, nous avons évolué pour devenir une solide petite entreprise prospère.
Ce projet de loi débouchera à mon avis sur la relance de l'industrie ferroviaire à laquelle on a pu assister aux États-Unis après l'adoption de la «Staggers Act». Nous connaissons actuellement au Canada, dans le domaine des chemins de fer sur courtes distances, les balbutiements qui ont marqué les cinq ou six premières années d'application de la «Staggers Act» aux États-Unis. Nous faisons les mêmes choses et nous heurtons aux mêmes problèmes. Maintenant que tout est rentré dans l'ordre, il existe dans ce pays une industrie ferroviaire régionale solide et prospère.
J'ai suivi avec intérêt vos délibérations pendant quelques jours cette semaine, ce qui m'a permis d'entendre les préoccupations soulevées par d'autres au sujet du projet de loi. Je partage certaines d'entre elles.
Au cours de l'une des réunions, il a été question des frais d'entretien des routes. À ce sujet, j'ai apporté aujourd'hui une étude que j'ai préparée il y a cinq ans et que j'ai distribuée aux divers ministères du gouvernement. C'est le fruit de dix ans de calculs détaillés des dépenses techniques, effectuées par les États américains du Nord-Est et du Nord-Ouest et liées aux frais d'entretien du réseau routier à la suite d'abandon de lignes de chemin de fer. Il va sans dire que ces frais sont élevés. Les économies découlant du regroupement et de la rationalisation des embranchements sont restreintes, mais il faudra qu'un recherchiste se penche sur cette question en temps et lieu.
Vous avez reçu mon mémoire et j'ai aussi apporté certaines diapositives, puisqu'une image vaut mille mots.
Monsieur le président, mon intervention vise à vous démontrer certains avantages susceptibles de découler d'un chemin de fer régional.
Voici Castor, une ville typique desservie par un embranchement. Elle compte 500 habitants. Elle produit quelque 15 000 à 20 000 tonnes de céréales dont le transport est effectué par la «Central Western Railway». Comme vous pouvez le voir, il s'agit d'une voie d'évitement conçue pour la mise en place et le chargement de wagons couverts. Les gens se marchent dessus pour avoir accès au silo adjacent. Les préposés au silo en viennent parfois aux poings pour décider qui peut utiliser les wagons sur cette voie d'évitement.
Nous offrons un service à la demande. Nous disons tout d'abord aux responsables du Syndicat du blé de l'Alberta de commander autant de wagons que nécessaire à la Commission du blé. Nous leur disons que nous viendrons prendre les quatre wagons vides qu'ils sont en train de charger et que, une fois chargés, nous les ramènerons et leur fournirons quatre wagons supplémentaires.
En fait, nous avons réussi à accroître la capacité de roulement des silos-élévateurs desservis par la «Central Western». En moyenne, il y avait deux roulements par an; il y en a aujourd'hui plus de cinq. Les exploitants de silos-élévateurs utilisent donc leurs installations de façon plus efficace. Le volume de marchandises a augmenté, sur la subdivision Stettler, passant d'une moyenne à long terme sur une période de cinq ans de 130 000 tonnes, lorsque la ligne était exploitée par le CN, à 170 000 tonnes, sous les auspices du «Central Western Railway».
Voilà le genre de service que nous offrons. Lorsque vous voyez nos locomotives et nos trains sur la ligne, il n'y a pas de surprise. Nous avons de bonnes locomotives en état de marche qui sont de catégorie et de puissance identiques à celles des autres transporteurs nationaux du pays. Nous offrons un service à la demande.
Il peut arriver que vous voyiez un petit train et ensuite un long train. Voilà Meeting Creek, l'une des gares situées sur la ligne. Là où il y avait un petit train, il y a maintenant un train de taille plus moyenne pour la «Central Western».
Le ballast que vous voyez étalé sur cette grille n'était pas là lorsque nous avons débuté nos activités. Au fil des ans, nous avons réparti près de 600 000 tonnes de ballast sur les lignes. Nous avons placé entre 75 000 et 80 000 traverses. Certains prétendent que les embranchements, les CFIL et les exploitants de chemins de fer régionaux réussissent à survivre en reportant à plus tard les travaux d'entretien et en limitant leurs dépenses en employant du personnel non qualifié et du matériel inférieur aux normes, mais c'est un argument tout à fait spécieux.
Voici une autre photo. Là encore, c'est un endroit typique après la remise en place de ces wagons. Voilà le genre de trains que nous exploitons à partir d'une voie d'évitement classique pour une région rurale, et nous le faisons à la demande. En moyenne, nous desservons nos lignes deux fois par semaine.
Nous effectuons l'entretien nécessaire. Le niveau des rails se trouve là où était la terre noire au début de nos activités. Voici nos machines. Si vous comptez sur vos transporteurs de liaison pour vos approvisionnements en produits et services, vous êtes à leur merci. Ils doivent se charger de leurs propres programmes et utilisent à cette fin leur propre matériel.
Si nous leur demandions de retirer de l'équipement de leurs lignes pour nous offrir un service, nous paierions des frais pour cela et en général, cela ne serait pas fait dans les temps car ils utilisent leur équipement pour l'entretien de leurs propres lignes. Vous finirez par être obligés d'effectuer vos travaux d'entretien au tout début ou à la toute fin de la saison, au moment où il devient crucial de sortir le matériel de la ligne nationale, et c'est pourquoi il est essentiel d'utiliser votre propre équipement.
Voici un petit train de travaux.
Il nous faut entretenir des ponts. Voici l'un de nos plus petits ponts. Il ne fait que 150 pieds de longueur sur 25 ou 30 pieds de hauteur. Nous avons des ponts en acier ainsi que des ponts sur chevalets en bois. Nous avons dû remplacer un pont au cours de notre première année d'exploitation, six mois après avoir acheté la ligne. Il faisait 198 pieds de longueur sur 45 pieds de hauteur, et nous avons dû le remplacer. À ceux qui prétendent qu'un CFIL ou un chemin de fer régional va faire faillite à cause d'un énorme problème technique, nous disons qu'il faut se préparer en vue de cette éventualité et financer les travaux.
Big Valley est une autre collectivité située le long de nos lignes. Ces gares étaient pratiquement à l'abandon lorsque nous avons débuté. À notre avis, les chemins de fer doivent à nouveau faire partie intégrante de la vie de ces collectivités et il faut tout remettre en place pour que les gens puissent les utiliser. Nous avons financé un service de train à vapeur qui transporte actuellement près de 22 000 touristes par an, pendant l'été, sur les lignes de la «Central Western». C'est un bon petit train. Le service est rentable. Si l'un d'entre vous a vu le film «Légendes d'automne», c'est là qu'il a été tourné.
Voici le genre de gares que nous avions au début de nos activités.
Voici nos gares aujourd'hui.
Voici la gare Significant. Elle se trouve tout au bout de la voie, dans un endroit appelé Compeer, où les locomotives font demi-tour sur une voie d'évitement. Nous avons appelé cette gare Significant parce que lorsque nous négociions les tarifs avec le gouvernement fédéral et que l'on nous a obligés à les réduire pour réaliser d'importantes économies, on nous a dit que le gouvernement ne ferait rien à moins d'être certain de réaliser d'importantes («Significant», en anglais) économies.
Nous avons dit: «Ma foi, si vous nous en prenez trop, les économies seront importantes. Vous vous trouverez avec des voies ferrées sans expéditeur, sans chemin de fer et sans transport.» C'est ainsi que nous n'avons pu nous empêcher de baptiser un petit endroit en Alberta d'où il ne vient aucun trafic important «Significant».
Le président: Vous n'avez pas appelé le suivant «Prejudice», par hasard?
Des voix: Oh, oh!
M. T. Payne: Non.
Les images sont plus éloquentes que les mots.
Si vous permettez, monsieur le président, je dirai quelques mots sur mon mémoire et je serai ensuite ravi de répondre à vos questions.
Ce que nous disons à propos de ce secteur, qu'il s'agisse de la réglementation ou des transporteurs et des expéditeurs, c'est qu'il est très progressiste à la condition qu'il n'y ait pas de changement. Ce projet de loi arrive donc comme une bouffée d'air frais.
Vous verrez les statistiques que contient notre mémoire. Nous estimons que les chemins de fer doivent disposer d'une certaine liberté de mouvement, poursuivre ce qui a débuté au début des années 80 et qui a influé sur la LTN de 1987, qui est en fait une loi pour les expéditeurs, qui était nécessaire alors. Il nous faut maintenant un petit peu d'aide pour les chemins de fer.
Il y a des questions assez importantes qu'il faut examiner et c'est le genre de chose que l'on peut faire par réglementation.
Jetez un coup d'oeil à la page 10 de notre mémoire, «Certificat d'aptitude (articles 91 à 95)». Ce que les localités, expéditeurs, agriculteurs, producteurs et compagnies céréalières nous ont dit c'est qu'il est difficile de savoir si ceux qui décident d'exploiter des chemins de fer régionaux sont aptes à le faire. Comment peut-on savoir que l'on ne va pas tomber sur un aventurier quelconque qui finira par faire disparaître ces chemins de fer?
C'est là que le certificat d'aptitude est important. L'Office peut imposer certaines conditions à ceux qui achètent des chemins de fer régionaux au CP ou au CN pour desservir ces localités afin de s'assurer qu'ils seront bien en mesure de tenir.
Initialement, nous avons comparu devant le Comité des projets de loi d'initiative privée de l'Assemblée législative de l'Alberta et je puis vous dire que ce n'était pas facile. Les législateurs s'inquiétaient beaucoup de notre aptitude financière, de la façon dont nous payions nos employés, des normes de sécurité que nous respections - de toutes ces belles choses - et avant que notre loi ne soit adoptée, nous avons dû convaincre cette assemblée législative que tout irait bien. Je pense que c'est une méthode qu'il faut maintenir.
À la page 13, nous parlons du transfert et de la cessation de l'exploitation de lignes. Il nous a fallu six ans pour acheter une première ligne. Six ans entre le moment où nous avons convenu avec les chemins de fer du CN que nous pouvions l'acheter et le moment où le contrat a finalement été conclu. L'achat suivant que nous avons fait était au Canadien Pacifique et il s'agissait de tronçons des subdivisions de Coronation et Lacombe. Nous avons commencé cela en mars 1987 et les choses étaient réglées en mars 1992.
M. Fontana: C'est mieux.
M. T. Payne: Oui, c'est mieux. M. Flohr en est arrivé à deux ans puis un an.
Toutefois, messieurs, lorsque vous traversez la frontière, les transactions se font en 30 jours. Cela se fait en 30 jours depuis 10 ans. Quel est le problème ici?
Le problème est double. Il y a certainement des lignes qui doivent être abandonnées. Il y a des lignes qui peuvent être vendues à un acheteur disposé à acheter et un vendeur disposé à vendre en toute bonne foi.
Si «Central Western» est autorisé à exploiter des chemins de fer en Alberta et que nous allons voir le Canadien Pacifique ou le Canadien National pour lui dire que nous voulons lui acheter tel ou tel embranchement et continuer à l'exploiter, nous devrions pouvoir faire cela entre nous sans avoir à nous adresser à quiconque d'autre. Nous devrions tout simplement pouvoir conclure la chose. C'est ce que font les Américains. Ils soumettent un avis à l'ICC indiquant qu'il y a une entente qui va être conclue. Il y a un préavis de sept jours et c'est tout ce que l'on demande.
Je ne vois pas pourquoi le processus stipulé aux articles 140 à 146 ne peut être un peu renforcé afin d'autoriser ce genre de méthode de transfert pour les lignes qui seront maintenues en activité. Pour celles qui seront abandonnées, le processus en cascade envisagé dans ce projet de loi est idéal parce que cela donne à tout le monde une chance.
Je ne pense pas que le problème pour l'acheteur de chemin de fer soit l'achat des lignes. Le problème, ce sont les tarifs. Comment obtenir des divisions? Là encore, il s'agit d'une question de compétence. L'Office des transports ne donne pas à un transporteur provincial compétence pour se présenter devant lui et faire une demande.
Nous avons présenté trois demandes à divers organismes de réglementation fédéraux ces dernières années car nous avions besoin d'avoir accès aux programmes des tarifs incitatifs auxquels avaient accès le Canadien National et le Canadien Pacifique. Nous avons demandé d'être inclus à titre de transporteur de liaison. On nous a dit que nous n'avions pas compétence pour présenter une telle demande. Les problèmes fondamentaux dans nos secteurs sont des problèmes de compétence. Il ne s'agit pas de fonctionnement. Ce ne sont pas les tarifs. Ce ne sont pas les droits de circulation. Rien de tout cela. Il s'agit de compétence.
À la page 14, nous discutons du barème des taux maximaux. Il y a là une autre feuille qui présente un barème de taux. Je vais m'arrêter là-dessus brièvement parce que c'est la façon dont il nous faut survivre. Il y a 10¢ qui sont ajoutés au tarif de transport. Nous sommes maintenant payés comme tous les autres. Nous ne sommes pas subventionnés. Nous sommes une entreprise commerciale. J'invite instamment le comité à préserver ces 10¢ parce que, sinon, nous ne pourrons plus exploiter de chemins de fer en Alberta.
Quant au barème de taux, les expéditeurs s'inquiètent d'avoir des taux exorbitants. Les chemins de fer eux s'inquiètent de ne pas être suffisamment payés. Je vous ai remis une feuille à ce sujet. J'aimerais que l'on revienne à un taux calculé par l'Office en fonction des coûts. L'article 149 pourrait permettre au ministre d'autoriser par décret du conseil la proclamation d'un règlement. L'Office pourrait utiliser les articles 35 à 37 de la LTGO pour les coûts.
Qu'est-ce que cela représente pour moi à titre de transporteur régional? Cela me permet de me présenter à l'Office et de dire que je veux acheter cette ligne. Il évalue alors les coûts des opérations du CN ou du CP. C'est une économie. Le tarif diminue pour refléter cette économie. Puis nous allons dire à l'Office que nous voulons qu'il calcule le coût de nos activités et qu'il modifie le barème de taux afin que nous puissions être payés.
Sur les subdivisions Stettler et Coronation-Lacombe, la différence est de 6¢ par tonne expédiée sur le réseau céréalier de l'Ouest canadien. Les expéditeurs ont bénéficié de cela grâce à «Central Western».
C'est donc mal comprendre les choses que de dire que nous ne représentons pas encore une économie.
Le président: Thomas, je regrette beaucoup, mais je vais devoir vous demander de conclure.
M. T. Payne: C'est à peu près tout. C'étaient les points essentiels que je voulais soulever.
Le président: Voulez-vous faire une dernière observation?
M. T. Payne: Je suis assez satisfait de l'examen en cours. Je pense que c'est très sain. J'espère que cela va permettre de modifier le projet de loi. Il n'a d'ailleurs pas besoin de grosses modifications car il est bon.
Je suis heureux d'avoir pu vous présenter mon point de vue. Si vous voulez d'autres documents ou avez besoin d'une aide quelconque, nous serons ravis de collaborer.
Le président: Thomas, merci beaucoup d'être venu nous expliquer la situation du chemin de fer «Central Western». Je n'ai aucun doute que vous soyez un vrai exploitant de chemin de fer.
Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Chatters.
M. Chatters (Athabasca): Je suis simplement curieux, Tom. Malgré certains des problèmes que vous avez connus, essentiellement des questions de compétence, comme vous l'avez indiqué, et d'accès à l'Office, vous exploitez une ligne non seulement de transport de marchandises mais, et c'est surprenant, de transports de voyageurs et vous gagnez de l'argent alors que les chemins de fer nationaux n'y réussissent pas. L'idée derrière ce projet de loi est dans une certaine mesure de permettre aux chemins de fer nationaux de réaliser des bénéfices ou plus de bénéfices. Comment réussissez-vous s'ils ne réussissent pas? Peuvent-ils faire la même chose que vous pour devenir plus rentables et gagner de l'argent, comme vous?
M. T. Payne: Ils peuvent prendre certaines des mesures que nous avons prises, mais cela leur est très difficile étant donné leur culture d'entreprise, la réglementation à laquelle ils sont assujettis et leurs obligations en matière de relations de travail. Nos réductions de coût à long terme se chiffrent à 1 million de dollars par subdivision et par année sur un total d'environ... À titre d'exemple, une subdivision de 2,9 millions de dollars fonctionne maintenant avec 1,7 million de dollars. Une autre de 2,4 millions de dollars fonctionne avec environ 1,6 million de dollars.
Qu'est-ce qui explique notre succès? Il faut d'abord reformuler la politique d'exploitation des chemins de fer. Il faut se demander s'il n'y a pas d'autres façons de concevoir les travaux d'ingénierie, les opérations, le système ferroviaire de manutention et de gestion, les cycles ferroviaires ainsi que la mise en place des wagons.
On cherche vraiment à répondre aux besoins de son client. Je ne connais aucun chemin de fer au Canada qui mettrait en place deux wagons sur un embranchement après un parcours de 75 milles. Nous avons mis en place un wagon pour un agriculteur qui avait un chargement de pois de fantaisie. Il nous a fallu trouver le wagon. Il s'agissait d'un wagon pour marchandises spécialisées. Nous l'avons obtenu auprès du Canadien Pacifique en le commandant spécialement pour cet agriculteur. Il devait répondre en trois jours à un marché au comptant et nous lui avons trouvé un wagon auprès du Canadien Pacifique. Le chargement était acheminé vers les États-Unis.
Il faut vraiment abandonner certaines des pratiques qui sont courantes chez les chemins de fer nationaux depuis des centaines d'années. C'est difficile de le faire, mais il le faut. Nous l'avons fait, et nous y avons gagné au change.
M. Chatters: Si vous y êtes parvenus avec succès, c'est que vous n'avez pas les mêmes contraintes pour ce qui est des conventions collectives. C'est du moins la façon dont je vois les choses. Or, l'idée de créer des chemins de fer d'intérêt local même pour ce qui est des lignes internes ne semble pas susciter un grand tollé de la part des syndicats qui n'y voient pas un moyen de contourner les négociations collectives. Comment expliquez-vous cela?
M. T. Payne: Je n'en suis pas sûr. Je crois qu'un chemin de fer régional et les syndicats peuvent négocier des ententes à ce sujet. Cela peut aussi se faire pour les lignes de compétence fédérale. Les syndicats changent et les chemins de fer également. Personne n'est cependant encore tout à fait parvenu à l'objectif visé.
Nous sommes cependant sur la bonne voie. J'ai été secrétaire trésorier de BLE pendant trois ans. Je connais la question. À mon avis, cela peut être fait. Certaines lignes pourraient être ainsi de compétence fédérale, ce qui calmerait nombre des inquiétudes des expéditeurs.
M. Chatters: Qu'en est-il de la question des droits de circulation? Le problème se pose-t-il pour vous? Avez-vous ces droits? Est-ce un problème?
M. T. Payne: Non. Je suis d'accord avec M. Flohr là-dessus. S'il nous faut des droits de circulation, je crois que nous pouvons les négocier de façon commerciale. Si c'est dans l'intérêt de tous que les marchandises soient livrées un peu plus loin le long de la ligne jusqu'à un point de jonction, il n'est pas nécessaire d'en dire davantage. De cette façon, le CP n'a pas à affecter à grands frais un équipage pour ce parcours. Nous livrons les marchandises à un point de jonction central. Tout le monde y trouve son compte: nous payons les droits de passage et nous livrons les marchandises. Je crois que cela peut se négocier.
M. Chatters: Je crois que votre succès dépend de l'affectation des wagons et de votre capacité à fournir le service voulu.
M. T. Payne: Tout à fait. L'affectation des wagons constituera la prochaine question sur laquelle devront se pencher les transporteurs de l'Ouest.
Nous entretenons de très bonnes relations avec la Commission canadienne du blé qui nous a fourni les wagons nécessaires pour répondre à nos besoins. La livraison de ces wagons a cependant été perturbée parce qu'ils se sont retrouvés coincés au port de Vancouver. Le système d'affectation des wagons de la Commission canadienne du blé est cependant sans pareil. Il fonctionne vraiment très bien et je suis content de voir que nous avons à traiter avec un organisme gouvernemental de moins. L'ATG n'a plus son mot à dire. Les négociations ont lieu entre la Commission canadienne du blé, l'expéditeur et le chemin de fer. Le système fonctionne et nous nous en réjouissons.
Nous voulons acquérir des wagons.
M. Fontana: Nous en avons à vendre.
M. T. Payne: Il faudra s'entendre sur le prix.
Le président: Madame Cowling.
Mme Cowling: Il semblerait que vous ayez rendu rentable une ligne qui ne l'était pas. Vous avez dit que vous aideriez le comité autant que possible.
Quelle aide gouvernementale «Central Western» a-t-il reçue pour augmenter sa rentabilité? Si vous avez cette information, pourriez-vous la transmettre au comité?
J'aimerais aussi vous poser une question sur l'espérance de vie de cette ligne. Combien de temps pense-t-on qu'elle survivra? Pourriez-vous nous donner cette information?
M. T. Payne: Vous m'avez posé une question au sujet de l'aide gouvernementale que nous avons reçue. Lorsque nous avons créé le chemin de fer, M. Mazankowski, par décret, a autorisé le commissaire principal de la CTC à l'époque, M. Jim McDonough de Saskatoon, d'assurer le démarrage de «Central Western Railway».
Nous avons négocié un contrat établissant nos tarifs aux termes de l'article 60 de la LTGO et nous nous sommes assurés ensuite le financement nécessaire. Nous avons constaté qu'en raison d'une disposition législative, il est difficile aux chemins de fer de trouver du financement. Le remboursement du capital et de l'intérêt vient en second lieu après le financement des dépenses de fonctionnement du chemin de fer.
Essayez de trouver une banque ou une institution financière qui vous prêtera de l'argent seulement après avoir tenu compte de vos dépenses de fonctionnement.
J'ai trouvé un directeur de banque qui était prêt à nous consentir un prêt à risque souverain. Comme le gouvernement du Canada ne garantissait pas ce genre de prêt en 1985 et 1986, nous avons dû trouver une autre solution.
Nous avons examiné nos coûts et nous nous sommes dit: «Nous avons réduit nos coûts. Quelle sera la valeur du paiement de nos livraisons de marchandises jusqu'en 1995 et ensuite jusqu'à l'an 2000. Nous nous sommes demandés si nous ne pourrions pas ainsi trouver des fonds pour «Central Western».
Nous avons donc ramené notre tarif pour le transport des marchandises au coût du capital du CP qui se situait, lors de l'année de création de notre chemin de fer, à 36 p. 100 avant impôt. Nous avons donc obtenu des fonds du gouvernement fédéral et les avons utilisés pour construire la ligne. Nous avons ensuite fixé nos taux de transport en fonction de ce coût. C'est le seul mécanisme de financement auquel nous pouvions recourir.
Nous avons exploité la ligne pendant quatre ans. Le contrat a ensuite expiré. Nos preuves étant faites, nous avons pu nous adresser à une banque et à une compagnie d'assurance-vie pour obtenir les fonds afin d'acheter la subdivision Coronation-Lacombe et rembourser ensuite cet investissement.
Nous ne devons donc rien au gouvernement du Canada. Nous avons obtenu notre financement sur les marchés commerciaux. On nous paie un tarif.
Mme Cowling: Ma dernière question portait sur l'espérance de vie de la ligne. Que réinvestissez-vous dans la ligne pour en assurer la survie?
M. T. Payne: Sur la subdivision Stettler, nous avons remplacé - et remplacer des rails coûte cher - un peu plus de 3,5 milles de rails là où il y a des courbes et là où les rails étaient très usés. Nous avons installé des milliers de traverses sous lesquelles nous avons mis des centaines de milliers de tonnes de ballast.
Ce sont les expéditeurs qui vont déterminer l'espérance de vie de la ligne. Le «Central Western Railway» compte avoir trois points de livraison d'ici cinq ans en raison de la consolidation des silos à grain. Les grands silos des Prairies desserviront les agriculteurs dans un rayon de 45 milles. Il est fort probable que nous nous retrouvions avec trois gros silos le long de la ligne parce que tous les petits silos locaux auront disparu. Nous desservirons ces trois grandes installations.
Le président: Monsieur Fontana.
M. Fontana: Je vous remercie de votre exposé, monsieur Payne. Il ne fait aucun doute que ceux qui comme vous ont créé des chemins de fer d'intérêt local ont ouvert la voie. Nous voudrions que d'autres vous emboîtent le pas.
Vous avez parlé brièvement de la durée de ces négociations. Comme vous le savez, cet aspect est abordé dans le projet de loi, où une échéance de cinq mois est proposée. Estimez-vous cela suffisant? Pensez-vous que cela puisse se faire beaucoup plus rapidement? Cinq ans, six ans ou peut-être un an à l'heure actuelle, c'est beaucoup trop long, selon moi. Et il n'y a rien, je crois, dans notre réglementation qui empêche qu'un processus soit terminé dans les 30 jours - même s'il est question ici d'un échéancier de cinq mois - cependant, d'autres obstacles doivent exister. C'est peut-être la législation provinciale que vous avez à l'esprit et non pas nécessairement la législation fédérale.
M. T. Payne: Non, d'après notre expérience, les problèmes ne sont pas survenus à l'échelle provinciale. Ils se situent plutôt à l'échelle des ministères fédéraux.
M. Fontana: Évidemment, tout cela est du passé. Le projet de loi C-101 vise à faire table rase de ce qui a existé durant 100 ou 125 ans. C'est l'objet même du projet de loi. Le délai de cinq mois nous semble raisonnable. Évidemment, si vous êtes en mesure d'y arriver plus rapidement...
En deuxième lieu, vous avez parlé de problèmes de compétence et je ne comprends pas trop bien, puisque vous n'avez pas terminé. Il est certain - et le ministre rencontre ses homologues provinciaux aujourd'hui et demain - que le projet de loi C-101 va faire l'objet de discussions. Il faut bien dire que, à mesure que nous mettons en place ce nouveau contexte de réglementation qui vise les petits chemins de fer sur courtes distances et nous sommes convaincus qu'un très grand nombre de petits réseaux vont être créés un peu partout au pays - les provinces vont devoir elles aussi mettre de l'ordre dans leurs lois et règlements et établir la réglementation qui s'impose en matière de lignes ferroviaires sur courtes distances, pour ce qui correspond à la compétence provinciale.
Que voulez-vous donc dire lorsque vous parlez de problèmes de compétence?
M. T. Payne: Deux questions se posent ici, l'une ayant rapport au transfert ou à la cession. Ce n'est pas l'achat qui pose problème. Il y a toujours moyen de négocier un prix. Il s'agit de payer le montant voulu. Cependant, comment la rémunération de l'exploitant va-t-elle être assurée?
Il n'y a rien dans ce projet de loi, me semble-t-il, qui m'autorise à obtenir une proportion du taux de transport. Il s'agit pourtant d'un aspect tout à fait crucial. À titre de transporteur provincial, je n'ai pas compétence, selon le projet de loi, pour faire une demande à l'Office si je ne suis pas en mesure de conclure une entente commerciale.
Les sociétés ferroviaires agissent en toutes circonstances en fonction de leurs intérêts commerciaux. Elles vont soutenir qu'elles n'ont pas à verser une fraction du taux lorsqu'elles abandonnent un tronçon puisque dans certains cas, elles vont s'accaparer le trafic de toute manière.
Pourtant, on peut supposer que le maintien du tronçon correspond à l'intérêt public. C'est ce que souhaitent les collectivités locales, les expéditeurs, le gouvernement provincial. Or, dans le projet de loi, rien...
Une question de compétence m'empêche d'obtenir...
M. Fontana: Vous avez peut-être raison, encore une fois. Voilà pourquoi je prétends que des mesures d'harmonisation seront nécessaires... pas à moins que vous ne vous définissiez comme un expéditeur. Or, je ne suis pas certain que vous puissiez vous définir comme expéditeur et ainsi faire une demande auprès de l'ONT à ce titre. Je n'en sais rien.
M. T. Payne: Nous avons tenté de le faire et notre demande a été rejetée par la Cour d'appel fédérale.
M. Fontana: Vous êtes vraisemblablement l'un des pionniers en matière de chemins de fer sur courtes distances et il me semble que les grandes sociétés ferroviaires souhaitent en créer. Il leur faut également, selon moi, des entreprises de desserte qui pourront acheminer les produits vers les réseaux principaux. Il y a donc de bonnes possibilités de partenariat.
Vous avez réussi à convaincre notre gouvernement de vous accorder les 10 cents; je crois que vous les méritiez et c'est pourquoi vous les avez obtenus. Cependant, d'après ce que je comprends des négociations portant sur la vente ou sur le taux, il s'agit pour l'essentiel de questions de nature commerciale. Ni une loi, ni un règlement ne sont nécessaires pour obliger deux parties à entreprendre des discussions. Dans la mesure où un problème existe et où vous n'avez pas d'accès, vous êtes dans une situation particulière du fait que vous relevez de la réglementation provinciale. Voilà pourquoi je prétends qu'une certaine réglementation provinciale sera nécessaire pour faire le pont entre les sociétés de chemin de fer qui relèvent du fédéral et celles qui relèvent du provincial.
M. T. Payne: Aux termes de l'ancienne Loi sur les chemins de fer, la Commission des transports du Canada et un office provincial de service publics pouvaient prendre conjointement des décrets. La pratique a disparu progressivement au cours des années soixante et elle n'a fait l'objet d'aucune mise à jour. Il faudrait peut-être un mécanisme de ce genre pour assurer cette harmonisation fédérale-provinciale qui est nécessaire, de telle sorte qu'un office provincial et son homologue fédéral puissent prendre des décrets conjoints qui assureraient l'harmonisation. Nous n'avons constaté aucun problème d'harmonisation ou de fonctionnement lié aux dispositions de la Loi sur les chemins de fer, mais il faut un lien quelconque entre les deux compétences. Je n'ai rien de concret à proposer, mais un tel lien est certainement nécessaire.
Le président: Quelques brèves questions maintenant de M. Hoeppner et M. Nault.
M. Hoeppner: Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de comparaître à nouveau, monsieur Payne. Cela m'a intéressé de constater que l'un des segments de votre réseau ferroviaire comportait un train touristique. Quels sont donc les points d'attraction? Ou bien s'agit-il tout simplement de fournir l'occasion d'une ballade en train?
M. T. Payne: Ce n'est pas un service de transport que les gens cherchent. Le train n'est pas plus rapide que les abeilles et les oiseaux qui longent la voie ferrée. Les gens sont à la recherche d'une expérience ferroviaire et touristique.
Pour les localités situées le long de la voie, il s'est agi d'une bénédiction sur le plan économique. Imaginez ce qui se passe lorsque 450 personnes descendent du train dans une localité comme Big Valley, dont la population se chiffre à 250 habitants, y compris les chiens et les chats, et que ces gens dépensent beaucoup d'argent. Évidemment, le train offre l'air climatisé: il suffit d'ouvrir les fenêtres. Dans la région de Drumheller, il finit par faire pas mal chaud durant l'été et tous les prétextes sont bons pour aller étancher sa soif au pub de Big Valley.
Nous avons créé de la richesse dans ces localités. On y a lancé des entreprises. La clientèle verse des impôts et bien des gens ont l'occasion de se balader en train et d'avoir beaucoup de plaisir. Nous simulons même des vols à bord du train.
M. Hoeppner: J'en profite ici pour vous poser ma prochaine question. Vous êtes-vous déjà rendu en train à Churchill?
M. T. Payne: Non, je ne me suis jamais rendu à Churchill en train.
M. Hoeppner: C'est bien dommage. Je l'aurais espéré. Vous voyez, je pense qu'il existe là-bas des occasions formidables. Je m'y suis rendu l'an dernier.
Le président: Je tiens à signaler que personne d'autre que Jake ne l'a fait.
M. Hoeppner: Pourquoi ne seriez-vous pas intéressé par l'achat de cette ligne vers Churchill, monsieur Payne? Ou l'êtes-vous?
M. T. Payne: Il y a évidemment la question du muskeg, mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'un obstacle insurmontable.
Pour ma part, j'ai visité le chemin de fer de l'État de l'Alaska. Entre Denali, le site d'une mine de charbon, et Fairbanks, la «Alaska State Railway» fait circuler des trains remplis de charbon à une vitesse de 40 milles à l'heure deux ou trois fois par jour. On roule sur le pergélisol, ce qui ferait pâlir d'envie les gens de Churchill. Les conditions de l'Alaska sont bien pires et pourtant on y fait circuler des trains de passagers à 50 milles à l'heure et des trains de charbon à 30 et 40 milles à l'heure. C'est donc possible.
Pour effectuer les changements voulus, il faut modifier les normes qui s'appliquent à la voie ferrée. Nous ne sommes pas ceux qui dirigent la société ferroviaire. Le maintien de ce tronçon dépend d'une décision en matière de politique publique.
M. Hoeppner: Voilà qui est fort intéressant. La chose est d'une grande importance pour le nord du Manitoba. J'aimerais pouvoir vous inciter à faire le voyage pour que vous puissiez nous dire ce que vous pensez des possibilités. Puisqu'il faut bien que vous vous changiez les idées de temps à autre, je vous recommande de vous y rendre.
M. T. Payne: Je dois tout d'abord veiller à ce que la mesure législative à l'étude me conserve mes dix cents et me permette de rester debout.
M. Hoeppner: Merci beaucoup.
Le président: Nous allons nous y appliquer et, entre-temps, nous vous remercions du mémoire que vous avec présenté au comité. Comme je l'ai dit plus tôt, vous nous en avez appris beaucoup au sujet du fonctionnement du CWR.
Je tiens également à vous remercier de votre offre généreuse. Je sais que certains membres du comité ont été invités à se rendre dans votre région et à faire l'expérience de votre service ferroviaire.
M. Nault (Kenora - Rainy River): Et à faire un tour à la taverne.
Le président: En effet. Certains d'entre nous l'ont peut-être fait. Nous vous en remercions également.
M. T. Payne: Je vous en prie.
Le président: Merci d'avoir répondu à nos questions.
Maintenant, nous invitons à la table M. Doug Smith, président de la Chambre du commerce maritime.
Ravis de vous revoir, messieurs Smith et Campbell. Vous avez la parole.
M. Jim Campbell (directeur général, Chambre du commerce maritime): Merci beaucoup, monsieur le président. Une fois de plus, la Chambre du commerce maritime a le plaisir de comparaître devant ce comité pour discuter d'une question qui est importante pour ses nombreux membres.
Il est intéressant de constater que nous sommes pris entre quatre compagnies de chemin de fer. Nous sommes un peu comme un pigeon parmi les chats, mais nous devrions nous en sortir.
Je suis accompagné par M. Doug Smith, président de la Chambre. Doug est l'ancien vice-président d'Hydro Ontario, où il s'occupait de l'approvisionnement en carburant et des contrats de transport.
Nous allons essayer d'être brefs pour permettre au comité de rattraper le temps perdu. Ainsi, nous pourrons tous vaquer à des tâches plus importantes ailleurs au pays dans les prochains jours. Je vous présente M. Doug Smith.
M. Doug Smith (président, Chambre du commerce maritime): Merci de nous avoir invités à comparaître ce matin.
Nous avons une nouvelle équipe. Vous ne nous reconnaissez probablement pas. Lors de notre dernière comparution, nous étions représentés par d'autres personnes.
La Chambre du commerce maritime représente plus de 100 entreprises utilisant le transport maritime ou offrant des services dans ce secteur. Pour que ces entreprises soient compétitives, elles doivent bénéficier d'un système de transport économique. Cependant, elles sont aussi intimement liées aux compagnies ferroviaires qu'elles utilisent pour accéder au transport maritime et, dans certains cas, comme solution de rechange compétitive.
La plupart des expéditeurs de marchandises en vrac doivent utiliser les chemins de fer pour envoyer leurs produits à un port d'où ils seront acheminés plus loin, et beaucoup reçoivent des biens et des matières premières par voies maritime et ferroviaire. Nos membres travaillent dans des secteurs économiques importants, notamment l'acier, le minerai de fer, le sel, les céréales, la potasse, le ciment et la production d'électricité; bien entendu, les ports et les transporteurs sont du nombre.
Nous savons que ce comité a reçu beaucoup de mémoires et d'interventions concernant ce projet de loi. Nous savons aussi que bien des préoccupations exprimées sont similaires. Au risque de me répéter, certains de nos propos aujourd'hui vous sembleront familiers.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, nous aimerions souligner trois choses. Premièrement, nous représentons les intérêts des principaux expéditeurs, ports et transporteurs qui ont beaucoup d'expérience dans leurs rapports avec les sociétés ferroviaires canadiennes et en ce qui concerne les questions soulevées dans ce projet de loi. Deuxièmement, en raison de la similarité entre nos préoccupations et celles des autres groupes, le comité doit se rendre compte de leur gravité et de leur bien-fondé...et il ne doit pas les considérer comme étant répétitives, banales, et pire, frustratoires. Troisièmement, la LTN de 1987 a été très favorable aux expéditeurs en assurant la présence de tarifs concurrentiels.
Permettez-moi de vous dire cependant que la Chambre du commerce maritime appuie l'orientation générale du projet de loi C-101, son esprit et l'essentiel de sa teneur. Nous pensons qu'il est important que les compagnies ferroviaires deviennent plus viables et compétitives. Nous savons que l'on peut réaliser des économies annuelles de 260 millions de dollars, et il existe des possibilités d'économies encore plus grandes.
Nous nous préoccupons surtout de trois dispositions que l'on peut modifier, à notre avis, sans vraiment nuire à l'orientation ni à la portée générale du projet de loi. Premièrement, il faudrait établir des mécanismes permettant aux expéditeurs d'obtenir des tarifs qui les rendent compétitifs et leur donnent la possibilité de bénéficier de réductions de coûts dans les chemins de fer; deuxièmement, il ne faut pas empêcher les tierces parties de combattre la concurrence déloyale; et troisièmement, il ne faut pas que l'allégement de la réglementation en entraîne la complexification ou réduise l'accès pour les usagers. Notre inquiétude porte sur les paragraphes 27(2) et 34(1), et sur l'article 113.
Commençons par le paragraphe 27(2). Je n'ai pas besoin de le lire. Je sais que vous en avez entendu parler à maintes reprises.
Essentiellement, ce paragraphe allège la réglementation applicable aux chemins de fer. Cependant, son interprétation dépend de celui qui l'interprète. On le fait en réduisant l'accès à la réglementation pour les expéditeurs et les tierces parties; pire, on leur impose des règles supplémentaires en demandant à l'organisme de réglementation de décider s'ils ont le droit de demander un examen à l'organisme fédéral.
Bref, nos objections concernant le paragraphe 27(2) sont les suivantes. Premièrement, il contredit l'affirmation du ministre selon laquelle les dispositions de la LTN de 1987 visant à accroître le pouvoir de négociation des expéditeurs sont préservées par le projet de loi C-101. Deuxièmement, il augmente le coûteux fardeau réglementaire en introduisant de nouvelles règles inutiles. Troisièmement, il érige un nouvel obstacle limitant la possibilité pour les expéditeurs de recourir à d'importantes dispositions relatives aux expéditeurs captifs. Quatrièmement, il limite la possibilité pour des tierces parties ou pour la population d'accéder à la procédure d'appel de l'Office des transports du Canada. Cinquièmement, il consacre le retour à la réglementation des différends privés relatifs aux tarifs entre les expéditeurs et les transporteurs. Enfin, sixièmement, il représente un retour à une mesure réglementaire désuète en introduisant, par voie législative, une condition préalable.
La CCM est en faveur de la concurrence et d'un environnement commercial propice à la concurrence. Cependant, nous attirons l'attention du comité sur le fait qu'au Canada, le secteur ferroviaire est ouvert et il n'y a pas de concurrence efficace. Cela est dû au fait que de nombreux expéditeurs, surtout ceux qui envoient des marchandises en grande quantité ou en vrac, n'ont pas d'autre choix économique réaliste que d'utiliser les chemins de fer, et souvent, ils n'ont accès qu'à un transporteur. En matière de transport, les prix du marché sont déterminés par les compagnies de chemin de fer, alors que les prix des produits envoyés par les expéditeurs sont bien déterminés dans d'autres marchés et ils ne tiennent pas compte des coûts de transport assumés par l'expéditeur.
Il est exagéré de demander que l'on prouve un préjudice important. Sur le marché, de nombreux facteurs peuvent nuire à la compétitivité d'un expéditeur et à son dynamisme. Ce sont là des raisons suffisantes pour rechercher un tarif approprié.
On cite souvent en exemple la déréglementation du secteur ferroviaire aux États-Unis. Cependant, le comité devrait savoir - je sais qu'on vous l'a déjà dit - que la situation au Canada est tout à fait différente de celle qui prévaut aux États-Unis. En matière de transport, les expéditeurs américains ont plus de choix et plus de compagnies ferroviaires que nous, leurs distances sont plus courtes, et ils comptent beaucoup moins sur les marchés d'exportation pour assurer leur prospérité. De plus, on leur offre des droits de circulation lorsque la concurrence est autrement limitée.
Au Canada, les chemins de fer sont moins rentables qu'on ne le souhaite, mais cela n'est pas dû aux tarifs que l'on impose aux gros expéditeurs. Pendant des années, ces derniers ont contribué à la capacité des compagnies ferroviaires de faire face aux pertes essuyées dans d'autres secteurs. Dans leur rapport annuel, les compagnies ferroviaires attribuent constamment l'augmentation ou la diminution de leurs bénéfices aux fluctuations de volume des principaux produits comme les céréales, l'acier, le charbon, le soufre, les automobiles, etc.
Nos membres veulent que les réductions de coût dans les chemins de fer entraînent une baisse de tarif qui renforcera leur position concurrentielle. Cependant, en limitant le droit des expéditeurs de demander un examen ou un arbitrage de l'office, on leur enlève le moyen d'atteindre cet objectif. Qui plus est, en limitant l'accès à l'office, on risque de susciter l'effet contraire, à savoir une augmentation inutile des tarifs.
La Chambre du commerce maritime occupe une position particulière. Voyons maintenant le revers de la médaille.
La suppression du droit des tierces parties de demander un examen de la situation des compagnies ferroviaires constitue un changement important. De plus, le projet de loi C-101 ne fixe pas de seuil tarifaire pour les compagnies ferroviaires. Ces dernières peuvent donc établir des tarifs déloyaux en toute impunité. Nos transporteurs et nos ports ont connu de telles pratiques auparavant - et je sais que M. Hall vous en a longuement parlé hier - mais ils ont pu obtenir un examen et remédier à la situation. Il ne faut pas que le projet de loi supprime ce recours.
«Les modifications proposées dans le projet de loi C-101 et relatives au paragraphe 27(2) visent à réduire la réglementation des coûts et des délais», etc. Je crois que cette prémisse est fausse. En fait, le droit qui permet actuellement de demander un examen ou un arbitrage de l'office a été utilisé judicieusement et parcimonieusement; par conséquent, les avantages qui découleraient d'un allégement de la réglementation après la réduction de l'accès à l'office sont fictifs.
L'ancienne loi donnait aux expéditeurs un avantage réglementaire pour négocier des tarifs sans qu'un organisme de réglementation soit obligé d'intervenir et la grande majorité des tarifs ont été établis dans le passé grâce à des négociations et non pas par un office quelconque.
Je voudrais maintenant parler du paragraphe 34(1). Comme vous le savez, cette disposition permettra à l'Office de faire payer des frais aux expéditeurs s'ils ont recours à un examen réglementaire pour des raisons frustratoires. Cela constitue un nouvel obstacle au recours à l'examen réglementaire. Non seulement les expéditeurs devront assumer leurs propres frais considérables pour contester un tarifs, mais aussi ils risqueront d'être obligés de payer des frais supplémentaires dans des conditions mal définies et qui dépendront du jugement de l'office.
En outre, ce paragraphe est redondant vu qu'il faut de toute façon obtenir l'approbation de l'office aux termes du paragraphe 27(2) pour obtenir un examen. L'office refuserait de toute façon les interventions frustratoires.
Nous affirmons donc respectueusement que ce paragraphe est inutile vu le paragraphe 27(2) et qu'il serait de toute façon inutile même sans cette autre disposition. Rien ne montre que les expéditeurs ont abusé dans le passé des droits qu'ils avaient à un examen par l'office.
Nos dernières observations portent sur l'article 113, qui stipule ceci:
- Les prix et conditions visant les services fixés par l'Office au titre de la présente section doivent
être commercialement équitables et raisonnables.
Il faut noter que les sociétés ferroviaires étaient obligées dans le passé de fixer des tarifs qui leur permettraient au moins de recouvrer leurs coûts minimaux, c'est-à-dire le coût variable à long terme. Le projet de loi ne les obligera plus à le faire. Cependant, la mesure interdit à l'office de fixer aux termes d'un examen des tarifs inférieurs à ces coûts minimaux, c'est-à-dire aux taux compensatoires.
Les sociétés ferroviaires sont donc gagnantes des deux côtés. Elles sont protégées, mais n'ont pas besoin d'avoir recours à cette disposition. Elles peuvent fixer des tarifs n'importe comment sans qu'ils soient assujettis à un examen par une tierce partie.
Cette disposition doit être éclaircie. La mesure devrait contenir une disposition prévoyant un tarifs minimum et, en cas de conflit relatif à des tarifs élevés, on devrait tenir compte des conditions du marché, de la concurrence et des coûts des sociétés ferroviaires.
Je résumerai en disant que la Chambre appuie la plus grande partie du projet de loi C-101. Nous sommes heureux que cette mesure a été présentée. Nous espérons qu'elle entraînera une réduction des coûts pour les expéditeurs et un milieu plus concurrentiel. Nous demandons cependant que les paragraphes 27(2) et 34(1) soient supprimés et nous croyons que l'article 113 devrait être renforcé et éclairci.
Merci.
Le président: Nous vous remercions de votre exposé, monsieur Smith.
Monsieur Chatters, avez-vous des questions à poser?
M. Chatters: Non, il n'y a rien qui me vient à l'esprit.
Le président: Monsieur Fontana?
M. Fontana: Je vous remercie beaucoup de votre exposé.
Qu'arriverait-il si nous commencions à réglementer vos tarifs? À titre d'expéditeurs maritimes, seriez-vous d'accord?
Je trouve parfois incroyable que, dans un système de libre entreprise et de libre marché, que tout le monde prétend appuyer, tout le monde dit aussi: «Ne réglementez pas mon industrie, mais réglementez toutes les autres.» Que diriez-vous si nous imposions les mêmes règlements au secteur maritime que vous nous demandez d'imposer à l'industrie ferroviaire?
Je sais que vous avez essayé de faire la part des choses. Malheureusement, vous ne pouvez pas prendre en même temps la part des expéditeurs et des transporteurs et espérer que cela va s'équilibrer. C'est pour cela que je vous pose cette question tout à fait philosophique.
M. D. Smith: Selon moi, le secteur maritime fonctionne de façon parfaitement concurrentielle. Il y a toutes sortes d'autres possibilités. Si l'industrie était réglementée, cela n'y changerait rien.
Selon moi, s'il y a une véritable concurrence, il n'y aura pas d'appel à l'office. S'il y a vraiment de la concurrence, les prix de transport des marchandises seront appropriés, qu'il s'agisse des prix de l'industrie ferroviaire ou des autres moyens de transport. Il n'existe pas au Canada de concurrence véritable pour le service ferroviaire et c'est pour cela qu'on a besoin d'autre chose.
La loi actuelle a très bien fonctionné. Il y a eu très peu d'appels. Les litiges ont été réglés entre les parties en cause. Les compagnies de chemin de fer ne sont pas sur la paille. Il se peut qu'elles le soient, mais alors elles n'ont qu'à ne pas accepter les règlements tarifaires qu'elles ont conclus maintes et maintes fois.
M. Fontana: Monsieur Smith, vous ne pouvez pas prétendre que les tarifs sont trop élevés et en même temps réclamer des tarifs minimaux parce que vous craignez la concurrence par l'établissement de prix abusifs de la part des compagnies de chemin de fer. Vous ne pouvez pas gagner sur les deux tableaux.
M. D. Smith: Eux, ils y parviennent. Ils peuvent gagner sur les deux tableaux.
M. Fontana: Vous n'avez pas répondu à ma question. Souhaitez-vous que nous réglementions vos tarifs?
M. D. Smith: Je ne pense pas que nous souhaitions la réglementation du secteur maritime, mais de toute façon, elle n'aurait aucune conséquence car la concurrence existe dans le secteur maritime et rendrait inutile tout appel. Les expéditeurs peuvent compter sur tous les concurrents qu'ils souhaitent.
M. Fontana: Je voudrais aborder les inquiétudes que suscite pour vous le paragraphe 27(2). Ne pensez-vous pas que pour un office, un tribunal ou tout autre organisme, ce serait agir de façon raisonnable et responsable que d'établir un redressement dans le cas d'une affaire dont il est saisi à propos du service ou du tarif, que de pouvoir en énumérer les mérites au cas par cas afin de déterminer le redressement approprié.
Par conséquent, quand vous faites valoir que le paragraphe 27(2) interdit l'accès - ce en quoi vous vous trompez - et que c'est une disposition générale qui ne tient pas compte d'un dossier particulier dont l'office pourrait être saisi...
J'ai du mal à comprendre comment les organismes quasi judiciaires qui existent déjà... Vous avez tout à fait raison: personne ne s'est adressé à l'office jusqu'à présent. Qu'est-ce qui vous porte à croire que si on ajoute un critère du côté du redressement, soudainement les gens vont s'adresser à l'office?
M. D. Smith: Excusez-moi. Je pense que nous disons que les gens ne s'adresseront pas à l'office.
M. Fontana: Mais c'est ce qui se passe actuellement.
M. D. Smith: En cela, nous n'accusons pas le redressement. Nous y voyons un critère qu'il faudra respecter avant que l'office se penche sur une affaire et nous pensons que cela n'est pas approprié.
M. Fontana: Ce n'est pas ce que dit le texte de loi.
M. D. Smith: Dans l'article, on dit préjudice important. J'aimerais m'attarder là-dessus un instant. Un préjudice important pourrait correspondre à «être acculé à la faillite». Il ne s'agit pas de cela ici.
Une compagnie de chemin de fer peut établir un tarif. Disons que ses coûts s'élèvent à 20$, mais la compagnie a le loisir d'essayer d'établir un tarif à n'importe quel niveau au-dessus de 20$. C'est peut-être 40$ ou 27$ ou 25$. L'expéditeur qui devrait payer tant de l'heure ne pourrait pas vendre son produit. Il pourrait peut-être le faire à 27$.
La question du préjudice me pose un véritable problème. Il faut que je puisse obtenir un tarif approprié.
Dans ces conditions, il se peut que je ne fasse pas faillite cette année mais je vais perdre des clients. Dix ans plus tard, c'est peut-être là que je ferai faillite.
Le critère du préjudice important me semble très draconien: «Allez-vous devoir fermer vos portes, déclarer faillite? Dans la négative, nous n'inscrirons pas votre affaire». Nous pensons qu'il faudrait...
M. Fontana: Mais vos clients ne vous disent jamais que vos tarifs sont trop élevés?
M. D. Smith: Bien sûr que si. Ensuite, ils s'adressent à d'autres expéditeurs.
M. Fontana: Dites-moi alors s'il est raisonnable qu'un office reçoive des directives quant aux tarifs et aux services et que les conditions soient établies «d'une façon commercialement équitable et raisonnable»? Qu'avez-vous contre cette notion? Si c'est l'expression qui vous gêne, pourquoi ne pas proposer une meilleure expression pour me dire comment le paragraphe 27(2) peut être amélioré. Au lieu de recommander qu'on le supprime carrément, aidez-nous à rédiger un article qui pourrait être beaucoup plus utile...
M. D. Smith: J'ai essayé d'en parler. C'est l'article 113, et non pas le paragraphe 27(2).
Je n'ai pas proposé de libellé. J'ai proposé plutôt de laisser tomber l'expression «équitable et raisonnable», de l'élargir pour prendre en compte... Parmi les éléments qui devraient être des facteurs pris en compte, devraient se trouver la situation concurrentielle - la situation du marché de l'expéditeur - et le coût de transport par chemin de fer. Vous avez dit tout à l'heure que les coûts de chemin de fer seraient l'élément déterminant pour établir un tarif. Que faites-vous des conditions du marché? Que faites-vous de la concurrence de l'Australie ou de l'Afrique du Sud ou d'un autre pays? Je prétends que l'expression «équitable et raisonnable» ratisse trop large, est trop vague, et qu'il serait plus sensé de parler plutôt de «position concurrentielle sur le marché»
Mme Wayne: Monsieur Smith, travaillez-vous en collaboration ave la Chambre de commerce des Provinces de l'Atlantique?
M. D. Smith: Non, nous ne travaillons pas avec elle.
Mme Wayne: Vous dites que non. Vous êtes de votre côté, indépendants, n'est-ce pas?
M. D. Smith: C'est cela.
Mme Wayne: Depuis combien de temps oeuvrez-vous dans les Maritimes?
M. D. Smith: La Chambre existe...
Une voix: C'est irrégulier.
M. D. Smith: C'est cela, c'est irrégulier. C'est une organisation qui remonte à une trentaine d'années. À certaines époques, elle était inactive, parfois très peu active. En ce moment, parce que nous nous inquiétons de la réforme maritime et que cela nous intéresse, la Chambre est active, très active. Nous comptons 100 organisations membres.
Mme Wayne: Si je vous pose la question, c'est parce que je connais bien la Chambre de commerce des Provinces de l'Atlantique et j'ai des contacts avec elle. Voilà pourquoi je me suis demandé si votre organisation était en cheville avec elle.
M. Fontana vous a demandé ce que vous pensiez de la possibilité de reformuler le paragraphe 27(2) ou le paragraphe 34(1). Nombreux sont les témoins qui nous ont dit qu'il faudrait supprimer ce paragraphe totalement et vous l'avez fait aussi. Imaginons que l'on reformule ce paragraphe de sorte que le projet de loi C-101 explique et définisse exactement ce que l'on entend par «préjudice important» et «frustratoire». Pensez-vous que l'on pourrait définir les choses de telle sorte que les inquiétudes des expéditeurs soient apaisées?
M. D. Smith: Je pense que c'est possible. Je suis convaincu que cet article est inutile parce qu'il n'y a pas eu abus quant à ce privilège par le passé. Ce paragraphe ne fait qu'ériger un obstacle supplémentaire, c'est tout.
Mme Wayne: Vous n'avez pas de libellé à nous proposer ici? Avez-vous une suggestion quant à ce qui pourrait satisfaire les expéditeurs? Y avez-vous réfléchi?
Le président: Ils veulent que cet article soit supprimé.
M. D. Smith: Non, je n'ai pas réfléchi à un libellé possible.
Le président: À propos de cela... certaines suggestions ont été faites à des témoins qui ont comparu avant vous et vous en avez peut-être eu vent. Étant donné votre réaction aux articles 27, 34 et 113, advenant qu'ils soient supprimés... Voici ce qui a été proposé: si l'on supprime ces articles, et pour l'équilibre, si l'on supprime également les dispositions concernant les expéditeurs, ce serait l'arbitrage qui permettrait de trancher advenant un différend entre l'expéditeur et la compagnie de chemin de fer... Pouvez-vous concevoir cela comme une solution?
M. D. Smith: Oui, je pense que c'est tout fait approprié.
Je voudrais ajouter une nuance ici: si je ne m'abuse, cette solution n'en est une que pour les expéditeurs qui sont captifs et cela s'entend sur le plan physique comme sur d'autres plans. J'estime que d'autres gens n'ont pas le choix: ils doivent avoir recours aux chemins de fer même s'ils n'ont pas de contraintes physiques. C'est une question économique. Je vous l'ai dit tout à l'heure: la compagnie de chemin de fer peut exiger le tarif qu'elle veut et il faut un mécanisme qui contienne le tarif imposé à l'expéditeur, qu'il fasse partie de la catégorie visée par la disposition sur les expéditeurs captifs ou non. Toutefois, je pense que l'arbitrage est une bonne solution qui a fait ses preuves.
M. Chatters: J'ai une courte question à vous poser. Vous parlez de règles du jeu équitables et de vos préoccupations relatives aux prix abusifs et aux prix minimums, et il faut aussi tenir compte de la question de M. Fontana qui vous demandait si vous aimeriez vous-mêmes être réglementés. Les navires qui naviguent dans les eaux canadiennes sous de prétendus pavillons de complaisance pour éviter le régime fiscal canadien jugé répressif ne vous accordent-ils pas un avantage considérable? Comment réagiriez-vous si cette possibilité était éliminée?
M. D. Smith: Un de nos membres bat pavillon étranger.
M. Chatters: J'ai vu un nom qui m'est familier sur l'en-tête du document d'hier.
M. D. Smith: Nous avons aussi des membres qui battent pavillon canadien, de sorte que le point de vue est différent. Je ne pense pas que nous puissions prendre là-dessus une position qui représenterait les vues de tous nos membres.
M. Chatters: Vous savez bien vous défiler.
M. D. Smith: Excusez-moi. Ce n'est pas mon intention de me défiler. Naturellement j'ai parlé de la difficulté que nous avons à prendre position...
Le président: Vous comprenez maintenant pourquoi la Chambre du commerce maritime n'est pas toujours très active.
Y a-t-il d'autres questions, chers collèges?
Mme Sheridan (Saskatoon - Humboldt): Je ne sais pas si votre question est la même que la mienne, monsieur Nault, de sorte que vous voudrez peut-être vous réserver le droit d'intervenir.
Je dois préciser au départ que je ne suis pas d'accord avec vous pour dire que le paragraphe 27(2) constitue un obstacle, ou un nouveau critère qui aurait pour effet de nier l'accès. J'estime toutefois qu'il modifie la nature du redressement qui pourrait être accordé au bout du compte.
Votre exposé est le premier, que je me souvienne - et j'ai assisté à la plupart des audiences sur la question - , où il a été expressément question de la condition dont le «préjudice important» est assorti, à savoir la mention «autrement», qui fait allusion à la possibilité d'obtenir un redressement par d'autres moyens.
Étant donné que vous êtes les seuls à avoir soulevé la question, je me demande si vous voudriez bien nous expliquer de façon un peu plus détaillée les liens que vous voyez entre le «préjudice important» et la mention «autrement» et comment cela se répercuterait sur la définition en tant que telle.
M. D. Smith: J'essayerai. Jim, vous voudrez peut-être vous aussi dire un mot à ce sujet.
Quand on recourt à l'office, c'est parce qu'il n'y a pas d'autres moyens d'obtenir une réparation. On ne peut pas obtenir un prix acceptable par la voie de la négociation. Selon toute vraisemblance, l'expéditeur n'aurait pas accès à l'arbitrage pour obtenir un prix acceptable.
Mme Sheridan: Pourquoi pas?
M. D. Smith: Je me trompe peut-être dans mon interprétation, mais je croyais que la disposition ne pouvait pas être invoquée par tous les expéditeurs et qu'elle ne pouvait pas non plus être invoquée par les tierces parties. Les expéditeurs et les chemins de fer ne sont pas les seuls concernés. Il y a aussi des tierces parties, notamment le secteur du transport maritime, qui sont aussi préoccupées par le fait que les prix peuvent être trop bas. Nous n'avons pas de mécanisme qui nous permet de contester un prix établi par un chemin de fer pour nous enlever une partie de notre clientèle.
Mme Sheridan: Je ne vois pas pourquoi, dans la pratique, l'arbitrage ne serait pas offert à tous les expéditeurs. Je ne suis pas aussi certaine de ce qui en est pour les tierces parties, mais il me semble que cette possibilité leur est aussi offerte.
M. D. Smith: D'après la lecture que nous en faisons, ce critère serait une condition préalable à laquelle il faudrait satisfaire avant même d'aller à l'arbitrage. Je sais que vous en avez discuté. Je ne sais pas combien de mémoires vous avez reçu mais cette disposition préoccupe bien des gens. De toute évidence, beaucoup d'entre nous y voient un obstacle, de sorte qu'il serait utile d'en préciser l'intention.
Je crois toutefois que le préjudice important fait problème, comme j'ai essayé de l'expliquer. À mon avis, la disposition pourrait être interprétée comme visant seulement ceux qui seraient au bord de l'abîme. Et je ne crois pas que l'expéditeur devrait avoir à prouver cela pour obtenir une réparation. Nous craignons qu'on élimine l'accès des tierces parties dans ces situations-là, et nous savons que les chemins de fer ont déjà obtenu ce résultat en fixant leurs prix en deçà de leurs coûts.
M. Nault: Je veux simplement vous poser la question suivante. J'ai vraiment beaucoup de mal à comprendre que vous vouliez définir ce qui constitue un «préjudice important», car même aux termes de l'ancienne loi, il n'existait pas de définition qui permettait de déterminer à quel moment l'expéditeur captif pouvait faire appel à l'office pour obtenir une réparation quelconque. L'office fondait simplement ses décisions sur le bon sens pour déterminer si l'argument présenté par l'expéditeur était fondé et acceptable, auquel cas il imposait une réduction des prix ou une amélioration des services ou quelque chose du genre.
Bon, alors, vous dites qu'il vaudrait mieux définir cette notion si nous voulons l'inclure dans la loi. Je vous donne un exemple pour vous montrer pourquoi cela pourrait être très dangereux pour vous et pourquoi je me demande si les gens ont bien raison de nous demander de le faire. Ainsi, il se pourrait que, dans la définition qui serait retenue, on ne considérerait pas que le fait de faire passer le prix de 10 p. 100 à 12 p. 100 constituerait un préjudice important pour un expéditeur en particulier. L'augmentation serait donc acceptable, et l'office pourrait dire que votre demande n'est pas fondée, puisqu'une augmentation de 2 p. 100, ce n'est pas grand-chose, mais pour un autre expéditeur, une augmentation de 2 p. 100 pourrait les acculer...
M. D. Smith: Vous avez raison.
M. Nault: ...à la faillite. Alors comment pourrions-nous en arriver à une définition en pareil cas? Vous donnez l'impression dans votre mémoire que les décisions sont prises par une bande de bureaucrates. Je croyais, moi, qu'il s'agissait d'un comité quasi judiciaire qui était composé de personnes ayant une certaine connaissance du domaine et que c'est pour cette raison que vous y mettiez votre confiance et que vous étiez prêts à accepter les décisions de l'office.
Par contre, si c'est maintenant tout le contraire que vous nous dites, à savoir que ces gens-là ne sont qu'une bande de bureaucrates qui donnent toujours gain de cause aux chemins de fer, nous devrions peut-être éliminer simplement cette étape et aller directement à l'arbitrage.
Il faudrait donc savoir ce qu'il en est au juste. Pourquoi nous demanderiez-vous de définir quelque chose comme cela quand il n'y a pas de définition dans la loi existante? Il faut toutefois répondre à un critère donné. Il faut être expéditeur captif. C'est donc déjà défini en quelque sorte.
M. D. Smith: J'ai peut-être dit cela, mais je ne le crois pas. Je ne crois pas avoir demandé que la notion soit redéfinie; j'ai demandé qu'elle soit éliminée. On m'a demandé si je pourrais la redéfinir, et j'ai indiqué que, si j'y mettais beaucoup de temps et d'efforts, j'y arriverais peut-être.
Ce que nous avons demandé, je crois, c'est qu'on élimine cette notion. Je crois que les termes utilisés donnent à entendre qu'il doit absolument s'agir de quelque chose de draconien, sinon il n'y aura pas d'intervention, et je suis parfaitement d'accord avec vous pour dire qu'une augmentation de 2 p. 100 ne répondrait pas à ce critère. Voilà notre point de vue. L'expéditeur à qui on voudrait imposer une hausse de prix de 2 p. 100 et qui perdrait ainsi son marché serait parfaitement en droit de présenter une demande de réparation. Le préjudice peut ne pas paraître important, mais il le serait à ses yeux et il aurait donc une raison valable de demander qu'on examine la situation s'il n'a pas vraiment d'accès concurrentiel.
M. Nault: Justement, et l'office pourrait décider que la hausse de 2 p. 100 constitue effectivement un préjudice important pour l'expéditeur en question, mais pour un autre expéditeur dans une autre région du pays, une hausse de 2 p. 100 pourrait être acceptable. Naturellement, les chemins de fer, s'ils sont considérés comme une industrie et une entreprise commerciale, ont le droit d'augmenter leurs prix pour réaliser un bénéfice. Ne pensez-vous pas? Leurs coûts augmentent tout comme les vôtres et ceux de tout le monde.
M. D. Smith: En réalité, leurs coûts baisseront.
M. Nault: Ah oui?
M. D. Smith: C'est ce qu'on me dit. Nous sommes d'avis que le critère n'est pas nécessaire.
M. Nault: ...se débarrasser de tous leurs employés...
M. D. Smith: Examiner la demande et rendre une décision. On a l'impression qu'il s'agit d'un critère auquel il faut satisfaire avant de pouvoir descendre dans l'arène.
M. Nault: Je vous remercie.
Le président: Messieurs, merci beaucoup pour le témoignage que vous nous avez soumis. Merci d'avoir répondu à nos question.
M. D. Smith: Merci beaucoup.
Le président: Nous invitons les représentants de la Québec North Shore & Labrador Railway à prendre place à la table.
Chers collègues, nous souhaitons la bienvenue à Derek Rance, président de la Québec North Shore & Labrador Railway.
Soyez le bienvenu, monsieur. Pourriez-vous nous présenter le monsieur qui vous accompagne et prendre tout au plus 15 minutes pour nous résumer votre mémoire, que nous avons déjà reçu, afin que nous ayons le temps de vous poser des questions? Merci, monsieur.
M. Derek Rance (président, Québec North Shore & Labrador Railway): Je vous présente Marc Duclos, directeur général de la Québec North Shore Railroad, et Jean Bazin, l'avocat qui nous a aidés à rédiger notre mémoire.
Merci d'avoir invité les représentants de la QNS&L à cette audience et de nous donner l'occasion de répondre à vos questions. Nous avons déjà soumis notre mémoire au comité, et je suppose que vous avez eu le temps de le lire. Je n'ai donc pas l'intention de le reprendre de façon détaillée. Je préférerais répondre aux questions que vous voudrez bien nous poser.
Je voudrais toutefois mettre l'accent sur quelques-uns des points que nous soulevons dans notre mémoire.
De notre point de vue, le projet de loi C-101 a été rédigé en fonction principalement des deux grands transporteurs, le CN et le CP. À l'encontre des deux grands, la QNS&L est un chemin de fer qui a été construit expressément pour le transport du minerai de fer. La QNS&L a construit son propre chemin de fer qu'elle a payé elle-même.
À l'encontre du chemin de fer qui est son principal concurrent, Québec Cartier Mining, la QNS&L est obligée d'offrir un service de transport des voyageurs et des marchandises en raison de la charte fédérale à laquelle elle est soumise.
Par ailleurs, depuis que nous vous avons soumis notre mémoire, il s'est passé deux choses importantes dont je voudrais maintenant discuter avec vous.
D'une part, comme vous le savez peut-être, la QNS&L a fait l'objet très récemment d'une décision de l'Office national des transports qui l'oblige ni plus ni moins à poursuivre son service de trains de voyageurs en dépit du fait que l'ONT a conclu que le service n'est pas rentable et qu'il ne le sera sans doute pas à l'avenir.
Comme nous en avons fait la démonstration devant l'office, nous assurons depuis 10 ans ce service de trains de voyageurs déficitaire contre notre gré, et ce, au nom de l'intérêt public. Des décisions et des ordonnances rendues en 1985, 1990 et pas plus tard qu'en septembre 1995 attestent que ce service assuré par la QNS&L continue à être déficitaire. Il convient de signaler à ce propos que des négociations sont en cours avec le gouvernement fédéral en vue de la conclusion d'une entente de subventions.
D'autre part, la QNS&L a récemment fait l'objet d'une décision arbitrale des plus défavorables. La décision arbitrale rendue par l'honorable R.E. Holland le 30 août 1995 est venue souligner l'importance d'apporter des modifications aux dispositions du projet de loi C-101 concernant l'arbitrage.
Le litige portait sur les prix 1995 que la QNS&L demandait à Wabush pour assurer le transport de son minerai de fer de Ross Bay Junction à Arnaud Junction, soit une distance de quelque 216 milles. Wabush et la QNS&L ont toutes deux présenté des propositions finales. Le prix soumis par Wabush a finalement été retenu par l'arbitre, qui à notre avis n'a pas tenu compte du droit légitime du transporteur à un rendement acceptable du capital investi.
Nous avons conclu à une lacune importante du processus d'arbitrage actuel, du fait qu'il est impossible de fournir à l'arbitre des données suffisantes sur des prix de services de transport comparables qui sont «commercialement équitables et raisonnables», comme le dit la loi. Le plus souvent, ces prix sont fixés par contrat privé et ne peuvent donc pas être divulgués pendant le processus d'arbitrage, même s'ils sont généralement connus dans le secteur.
La nouvelle Loi sur les transports au Canada, le projet de loi C-101, permettrait de régler les litiges de ce genre de façon plus équitable à l'avenir. Nous sommes persuadés que le processus menant à l'arbitrage ne devrait être invoqué que lorsque l'expéditeur peut démontrer qu'il a subi un tort considérable relativement à sa capacité à exercer son activité ou à soutenir la concurrence. L'arbitrage pourrait aussi être invoqué si l'expéditeur soutenait qu'il se verrait obligé de mettre un terme à ses activités consécutivement à l'imposition par le transporteur d'un prix excessivement élevé.
Le projet de loi C-101, tel qu'on l'interprète à l'heure actuelle, n'impose pas d'obligations semblables à l'expéditeur. Il permet plutôt à l'expéditeur insatisfait des prix appliqués ou proposés d'avoir recours à l'arbitrage de l'office aux termes du paragraphe 161(1). L'expéditeur n'a donc rien à perdre. Même si la décision arbitrale ne lui est pas favorable, la seule pénalité à laquelle il s'expose est de devoir continuer à payer le prix déjà établi.
La QNS&L est d'avis qu'il faudrait laisser les forces du marché déterminer les prix pour les expéditeurs captifs et les transporteurs captifs. Il va sans dire que le transporteur qui établit des prix exorbitants obligera l'expéditeur captif à mettre fin à son activité, ce qui aurait pour effet de réduire considérablement la demande du transporteur. De ce fait, les poids et contrepoids du marché sont déjà assez irrésistibles que les deux parties en arriveraient à une entente même sans l'intervention du gouvernement.
Cependant, la QNS&L estime qu'il serait très utile, en cas d'impasse, d'établir par voie législative un processus de médiation qui s'enclencherait après les trois premiers mois de négociation. Aucune disposition en ce sens n'est prévue à l'heure actuelle dans le projet de loi C-101, mais on pourrait facilement en ajouter une.
Le médiateur serait choisi par les parties et, idéalement, aurait une certaine connaissance des questions ferroviaires et financières.
Si, dans le scénario que nous envisageons, la médiation ne donnait pas de résultat après trois mois, le litige serait soumis à l'arbitrage, de préférence à l'arbitrage d'un comité composé de trois personnes, afin d'en arriver à une décision finale. La décision du comité arbitral serait fondée sur des facteurs économiques et commerciaux.
Par ailleurs, toute décision sur les prix qu'il convient d'établir à partir de propositions finales devrait tenir compte du risque que courent le transporteur et du droit qu'il a d'obtenir un taux de rendement acceptable de son capital investi.
Aux termes du paragraphe 164(2) du projet de loi C-101, l'arbitre n'est pas tenu de prendre en considération l'un ou l'autre de ces facteurs.
Enfin, la QNS&L soutient que la partie perdante devrait assumer le coût, non seulement de l'arbitrage, mais aussi de la médiation. Comme elles s'exposeraient à des pénalités économiques, les parties seraient ainsi moins portées à s'engager dans des litiges pour des raisons frivoles et elles auraient aussi beaucoup plus tendance à négocier sérieusement pour éviter les importantes pénalités financières supplémentaires qui pourraient leur être imposées si elles n'avaient pas gain de cause à l'arbitrage.
Dans le cadre du système actuellement en place, un chemin de fer pourrait être obligé de maintenir un service déficitaire à la suite d'une décision arbitrale. La QNS&L exhorte le comité à prévoir un prix minimum de manière à faire en sorte qu'aucun transporteur ne subisse de pertes en raison des services qu'il assure à un expéditeur.
Les dispositions relatives aux droits de circulation et à l'usage commun des droits qui sont énoncés à l'article 138 du projet de loi C-101 ne tiennent pas compte, dans notre cas, du montant considérable de capital privé qui a été investi dans la construction du chemin de fer. Le projet de loi C-101 permettrait à toute compagnie de chemin de fer réglementée par le gouvernement fédéral, sans égard à la taille de la compagnie, d'obtenir le droit de se servir des voies d'un chemin de fer appartenant à des intérêts privés.
Étant donné l'importance du trafic qui passe sur notre ligne - c'est la ligne la plus utilisée au Canada pour ce qui est du tonnage par mille de rail - , dont la plus grande partie est à voie unique, cet accès illimité pourrait entraîner des retards et des bouchons inacceptables et poser des risques en conséquence pour la sécurité.
La QNS&L soutient que le projet de loi C-101 devrait mieux circonscrire le pouvoir discrétionnaire conféré à l'ONT par le paragraphe 138(2).
En cas d'expropriation, l'ONT devrait être en mesure d'accorder une indemnité suffisante.
Pour limiter l'accès, la QNS&L propose également qu'on n'accorde aucun droit de circulation lorsque le trafic proposé est inférieur à la proportion minimale du trafic total, proportion calculée selon le tonnage par kilomètre. Cette proportion minimale pourrait être fixée par règlement, et nous proposons qu'elle soit fixée à 5 p. 100 du trafic total actuel.
De plus, le chemin de fer devrait être autorisé à imposer un montant forfaitaire pour le dédommager d'une partie du capital investi dans la construction du chemin de fer. Il devrait également pouvoir demander des frais de location pour tenir compte, non seulement de l'entretien du chemin de fer, mais de la nécessité de réaliser un bénéfice acceptable, ces frais devant être négociés par les parties.
Après examen du projet de loi C-101, la QNS&L appuie entièrement et intégralement le principe d'équité que consacrent ses dispositions concernant les transferts et l'abandon de lignes de chemin de fer, en supposant que ce principe s'applique aussi à l'abandon de services.
Nous estimons que si les changements susmentionnés étaient incorporés dans la nouvelle Loi sur les transports nationaux, les règles régissant l'industrie canadienne du transport ferroviaire seraient plus justes et plus équitables.
Ce sont les commentaires, ajoutés à notre mémoire, que nous souhaitions soumettre à votre comité. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le président: Monsieur Rance, je vous remercie infiniment de votre intervention.
Nous passons directement aux questions. Monsieur Chatters.
M. Chatters: Je ne comprends pas exactement quelle est votre situation. Vous êtes une compagnie de chemin de fer d'intérêt local provincial?
M. Rance: Nous relevons du fédéral. Nous offrons un service entre Terre-Neuve et le Québec.
M. Chatters: Parce que vous couvrez deux provinces. Très bien. Cela répond en partie...
Et la réglementation donne à d'autres compagnies des droits de circulation sur la ligne dont vous êtes propriétaire et que vous avez construite?
M. Rance: Non, pour le moment il n'y a pas de droit de circulation mais ça pourrait venir.
M. Chatters: Et vous y êtes opposés?
M. Rance: Oui.
M. Fontana: Je tiens à vous remercier d'avoir au moins proposé quelques solutions de rechange positives contrairement à certains qui viennent simplement pour râler, se plaindre et réclamer le maintien du statu quo. Nous essayons de mettre en place une nouvelle infrastructure de transport qui réponde aux besoins de tout le monde.
Vous dites que le nouveau système d'arbitrage - fort de votre propre expérience de l'ancien - ne marchera probablement pas et vous proposez un espèce de système de médiation-arbitrage.
En cas d'échec de la médiation, c'est à l'arbitre de déterminer l'offre finale. Je reconnais que cette technique ne laisse pas beaucoup de marge de manoeuvre. Vous nous avez indiqué que dans votre cas c'était tout simplement impossible puisqu'il fallait à l'arbitre choisir entre une offre ou l'autre; il lui était impossible d'inciter une partie ou l'autre à un compromis, ce qui est parfois préférable.
J'essaie simplement de comprendre. En toute logique, si à la fin de cette période de médiation, de trois mois, comme vous le suggérez, rien ne se passe, est-ce que vous ne vous retrouvez pas dans la même situation qu'au départ?
M. Rance: Oui.
En fait, d'après moi, il y a deux différences. Premièrement, il y a la procédure de médiation. Pendant la négociation, il y a échange de lettres, il n'y a pas vraiment de face-à-face, de confrontation en présence d'un intermédiaire. C'est ça la médiation.
Pour nous, c'est une étape très importante. Elle donne de bons résultats dans les relations de travail. Nous espérons donc obtenir les mêmes bons résultats.
Pour l'arbitrage, nous suggérons un groupe spécial parce que dans notre cas, malheureusement, les questions économiques, les questions de marché et de tarification échappaient à l'honorable juge chargé de l'arbitrage. Sa décision manquait de rigueur à franchement parler; de notre point de vue, c'était une mauvaise décision. Il est évident que pour ceux auxquels il a donné raison, c'était une bonne décision.
M. Fontana: C'est justement la raison pour laquelle je crois que dans votre cas, l'application du paragraphe 27(2), la notion de «préjudice important» du projet de loi C-101, vous aurait aidé... Je crois que vous l'avez vous-mêmes dit. Il faut que l'expéditeur fasse la preuve d'un préjudice important. C'est la raison pour laquelle cette notion de «frustratoire»... Toutes ces protections supplémentaires sont là pour favoriser ce genre de dialogue - «la notion de tarifs commercialement équitables et raisonnables» aussi. C'est pour que l'office, aidé par des experts, puisse prendre une décision en toute connaissance de cause par opposition à un arbitre qui n'a peut-être pas toutes les données en main.
Ne pensez-vous pas cependant que notre système...? Je sais que certains ont suggéré un arbitrage à double insu. Peut-être que pouvoir examiner l'offre finale de l'expéditeur vous permettrait... Je sais que cela ne plaît pas aux expéditeurs mais est-ce que ce pourrait être une solution à votre problème?
L'idée de médiation me plaît. Il faudra peut-être y réfléchir un peu plus. J'essaye simplement...
M. Rance: Pour moi le problème que nous a posé l'arbitrage.... Si j'aime cette notion de médiation c'est parce que l'arbitrage, étant une procédure quasi judiciaire ne nous a pas permis de citer les tarifs pratiqués par d'autres compagnies. Nous connaissons ces tarifs. Nous savions que la compagnie X se faisait payer tant, que la compagnie Y se faisait payer tant pour le transport de la même marchandise. L'arbitrage ne nous a pas permis de le faire. Par contre, la procédure de médiation le permet car ce n'est une procédure quasi judiciaire comme l'arbitrage.
M. Fontana: J'aimerais vous poser une dernière question concernant le transport des passagers car c'est une question assez importante. Il est évident que nous étudierons peut-être encore plus dans les détails cette question lorsque nous nous intéresserons aux services passagers un peu plus tard. Le ministre nous a clairement indiqué que bien que ce projet de loi élimine cette subvention, certaines dispositions de ce nouveau projet de loi l'autorisent à verser des compensations analogues.
Il y a deux choses. De toute évidence, c'est un service qui ne vous intéresse pas car il vous fait perdre de l'argent et vous ne le maintiendrez que si quelqu'un vous garantit qu'une subvention continuera à être versée. C'est bien cela?
M. Rance: Exactement.
M. Fontana: Quelles autres solutions, selon vous, vous offre ce projet de loi permettant de garantir le maintien de ce service passagers? Serait-il possible d'envisager par exemple une ligne d'intérêt local provinciale - la création d'un service passagers distinct? J'essaie de voir un petit peu ce que vous pourriez faire.
M. Rance: Nous sommes actuellement en train de négocier avec le ministre, l'honorable Douglas Young, une indemnisation pour que QNS&L continue à offrir ce service pendant un certain temps. Nous pensons que les négociations sont en bonne voie et cela devrait marcher. Bien entendu, c'est tout à fait en accord avec l'esprit du projet de loi C-101. À condition qu'un service soit jugé d'intérêt public et qu'on n'oblige pas le transporteur à l'assurer à perte, nous sommes tout à fait disposés à continuer à offrir ce service.
Le président: Merci, Joe.
Elsie.
Mme Wayne: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
Je sais que vous êtes très occupés mais je ne crois pas que certains témoins ne soient venus ici que pour râler et se plaindre comme le secrétaire parlementaire l'a dit tout à l'heure. C'est ça la démocratie. Si ces gens ont des problèmes, ils ont tout à fait le droit de venir les exposer.
Pour commencer, à propos du service passagers, j'aimerais vous demander quelle population vous desservez?
M. Rance: La population de Wabush au Labrador tourne aux environs de 15 000 et à Schefferville aux alentours de 800.
Mme Wayne: Donc en ce qui vous concerne, vous êtes pour le maintien des paragraphes 27(2) et 34(1) dans le projet de loi. Vous êtes pour leur maintien sans explications supplémentaires. Il n'y a rien à y changer.
M. Rance: Nous nous demandons si le paragraphe 27(2) permet à l'office d'imposer un tarif ou exclut le recours à l'arbitrage d'offres finales. En d'autres termes, à qui revient la décision finale en cas du désaccord total? Y a-t-il une autre procédure permettant d'aboutir à une solution?
Nous aimerions également voir le genre de directives qui seront appliquées par l'office. Le paragraphe 27(2) nous inquiète un peu. Il ne précise pas quel genre de directives seront appliquées par l'office.
Mme Wayne: Merci.
Le président: Monsieur Nault.
M. Nault: J'aimerais revenir sur cette notion de médiation dont a parlé M. Fontana. Qu'est-ce qui empêche les deux parties d'organiser leur propre médiation avant de recourir à l'arbitrage d'offres finales? Il y a des bureaux de médiation privés tout à fait prêts à officier pour régler ce genre de différend. Pourquoi voudriez-vous que cela figure dans cette mesure législative alors que vous pouvez très bien vous en occuper vous-mêmes?
M. Rance: Il ne fait aucun doute que cela pourrait se faire pourvu que les deux parties soient d'accord. L'arbitrage est simple; une partie signifie tout simplement à l'autre partie qu'elle l'amène en arbitrage. C'est pour cela que nous croyons que ce devrait être enchâssé dans le projet de loi.
M. Nault: Dans ce cas-là, êtes-vous en train de nous dire que ce n'est pas nécessaire que le ministre ou quelqu'un d'autre puisse accepter l'argument d'une partie ou de l'autre préconisant la médiation? Selon le droit du travail actuel, vous savez que ce n'est pas obligatoire. Le gouvernement pourrait dire: nous n'allons pas vous accorder la possibilité de la médiation; nous avons décidé de vous laisser aller tout seul.
Mais qui prendrait cette décision? Il n'y a aucune garantie que vous iriez en médiation, mais il y aurait possibilité de médiation dans certains cas. Comment croyez-vous que cela pourrait être fait? La question d'autonomie se présente manifestement dans un tel cas. Le gouvernement enchâsse cela dans la législation; l'office et le processus d'arbitrage des propositions finales existent.
M. Rance: Dans le droit des relations de travail, quelqu'un doit faire la demande de services de médiation auprès du gouvernement. Une fois que le ministère du Travail a dit que l'on devrait utiliser les services de médiation, vous les utilisez. Il ne s'agit pas que le syndicat et l'employeur disent: allons se chercher un médiateur. C'est toujours une partie ou l'autre qui en fait la demande.
M. Nault: Alors à qui devraient-ils faire cette demande de services de médiation, à votre avis?
M. Rance: Je pense que l'Office national des transports devrait fournir le médiateur dans ce cas précis.
M. Nault: Le problème que présente ce processus, bien sûr, c'est que vous devez avoir des gens qui comprennent l'industrie. Faut-il avoir un certain degré de professionnalisme et des gens qui font partie du personnel, ou pensez-vous que cela pourrait se faire comme au...? J'essaie tout simplement de voir où vous pourriez obtenir les experts.
M. Rance: C'est pourquoi j'ai suggéré l'Office national des transports. Très franchement, je ne crois pas que cette expertise existe ailleurs qu'à l'office national des transports. C'est fort possible que l'office signe un marché de services avec des experts-conseils privés pour fournir les services de médiation, mais je crois vraiment que cela devrait se faire par le biais de l'Office national des transports.
M. Nault: La dernière question concerne les passagers. Nous avons bien sûr eu d'autres témoignages de sociétés qui ont dit très clairement qu'elles ne voulaient pas offrir de services passagers. J'irais même jusqu'à dire que la raison pour laquelle vous perdez de l'argent, c'est que vous ne voulez vraiment pas offrir de tels services, et si cela vous intéressait plus en tant que société, vous feriez probablement un meilleur travail. Y aurait-il moyen de faire en sorte que les choses aillent mieux?
Très franchement, je ne crois pas que c'est juste de la part d'un gouvernement ou de n'importe qui d'autre de forcer une société privée de faire quelque chose qu'elle ne veut pas faire, surtout lorsqu'elle y perd de l'argent. Cela ne fait aucun sens au plan économique, à mon avis.
Par contre, les gouvernements doivent se préoccuper de l'intérêt public. Comment pouvons-nous agir dans l'intérêt public dans ce cas-ci, dans le Nord et d'autres régions du pays? Nous voulons que ces trains de voyageurs demeurent en service. Très franchement, nous ne croyons pas... Je regarde les chiffres des années 1982 à 1993, pendant lesquelles les pertes réelles sont passées de 816 000$ à 3,3 millions de dollars. S'agit-il uniquement d'inflation, ou faisons-nous les choses beaucoup plus mal que par le passé?
Je parle du point de vue d'un exploitant de chemin de fer, car j'en étais un jadis. Je sais que très souvent les compagnies ont été forcées de faire certaines choses par décret du gouvernement même si elles ne voulaient pas les faire. Je me souviens que le CP avait des trains de voyageurs bien que ce n'était pas vraiment une grande priorité pour la compagnie. Ces services étaient dans le rouge quand c'était utile, les trains restaient immobiles alors qu'ils auraient pu être utilisés, et les autres trains roulaient parce qu'ils étaient rentables.
Pourriez-vous me donner une explication? Si vous ne voulez pas exploiter des trains de voyageurs et préférez que nous laissions quelqu'un d'autre les exploiter, que suggérez-vous pour que le service offert sur votre ligne à vous?
M. Rance: Je commencerai par vous expliquer pourquoi nous avons essuyé des pertes de façon continue, et pourquoi elle se sont accélérées.
D'abord, la mine de Schefferville a fermé ses portes et la population là-bas a périclité. Nous avons donc perdu à peu près la moitié de nos voyageurs. Ensuite, on a fini par construire de force une route, à la suite de diverses pressions exercées par les employés et, soit dit en passant, par Québec [Inaudible] le long du chemin de fer de Fermont. Il existe donc aujourd'hui une route qui n'existait pas naguère; si vous n'avez pas peur de conduire pendant 400 milles sur une route de terre terrifiante, vous pouvez donc quitter l'endroit de vos propres moyens, ce que beaucoup font.
Quant à l'intérêt pour nous d'exploiter cette ligne, nous avons en fait installé des michelines sur wagons diesel afin de réduire le coût du service et de l'accélérer. Nous avons annoncé ce service. Nous avons même encouragé des touristes à l'utiliser. Malheureusement, ce qui nous a nui le plus, ce sont nos propres conventions collectives. En vertu de ces conventions, nous sommes obligés d'avoir six employés à bord de la micheline, de sorte que cela nous force à placer trois de nos employés dans la cabine de la locomotive diesel. Notre plus grand écueil a été notre incapacité à négocier avec les syndicats pour retirer ces employés. Je dois avouer qu'il y a beaucoup trop d'employés à bord de ces trains diesel. Nous essayons évidemment de corriger la situation et nous continuerons à essayer de négocier nos conventions à la baisse, dans le but de réduite le coût d'exploitation du service. Nous ne voulons pas exploiter à perte.
Deuxièmement, c'est regrettable, mais la plupart de ceux que nous desservons sont nos propres employés. Par conséquent, il ne nous sert à rien de les désavantager. Le véritable problème, toutefois, c'est que nous exploitons ce service à perte.
M. Nault: Pourquoi le gouvernement semble-t-il penser que c'est à votre société de subventionner le service voyageurs? D'après vous, ne serait-il pas plus juste que le gouvernement paie sa part, en le faisant de façon transparente, surtout s'il s'agit de le faire dans l'intérêt et pour le bien de la population? Le gouvernement ne devrait-il pas vous payer pour l'exploitation de ce service ou payer quelqu'un d'autre de plus intéressé pour le faire? Pourquoi les gouvernements, conservateurs ou libéraux, ont-ils eu jusqu'à présent l'impression que c'est aux sociétés privées de subventionner les politiques d'intérêt public?
M. Rance: Je suis tout à fait d'accord. En fait, c'est justement ce pourquoi nous négocions actuellement avec le gouvernement. Le gouvernement nous offrira en sous-traitance l'exploitation de ce service.
Le président: Pour conclure, messieurs, la loi de 1987 prévoit la médiation. Combien de fois y avez-vous eu recours?
M. Rance: Jamais.
Le président: Si j'en parle, c'est que vous avez demandé que cette disposition se retrouve dans la nouvelle loi. Savez-vous combien de fois on a eu recours à cette disposition depuis 1987?
M. Rance: Je n'en ai aucune idée.
Le président: Une seule fois.
M. Rance: Peut-être cette disposition est-elle méconnue.
Le président: Voilà pourquoi on se tourne vers l'arbitrage.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Messieurs, merci de votre contribution et de votre témoignage.
Mesdames et messieurs, nous accueillons maintenant un conseiller de la Reine et ancien député, George Cooper, qui représente toute une gamme d'entreprises: la Canadian American Railroad Company, la Bangor & Aroostook Railroad Company, la Windsor et Hantsport Railroad Company Limited et l'Iron Road Railways Inc. - nous lui souhaitons la bienvenue sur la Colline du Parlement et l'écouterons avec plaisir.
Bienvenue.
M. George T.H. Cooper, c.r. (Canadian American Railroad Company; Bangor & Aroostook Railroad Company; The Windsor & Hantsport Railway Company; Iron Road Railways Inc.): Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs du comité, je tiens d'abord à féliciter le gouvernement d'avoir déposé le projet de loi C-101. Comme plusieurs des témoins d'aujourd'hui l'ont déjà expliqué, le projet de loi permettra sans doute de trouver des solutions commerciales aux problèmes auxquels se heurtent les industries canadiennes des transports, et particulièrement les chemins de fer. Ceux que je représente appuient presque sans réserve votre initiative. Je suis ici aujourd'hui pour vous parler d'un aspect où des changements s'imposent, à notre avis.
Je représente la «Iron Road Railways Inc.» qui est une compagnie de chemins de fer secondaires de portefeuille installée à Washington, D.C. Lancée il y a environ 15 mois, c'est la compagnie-mère de quatre chemins de fer.
Elle a d'abord acquis la Windsor & Hantsport Railway Company, voie ferrée secondaire de la Nouvelle-Écosse réglementée par cette province. Il s'agit en fait de tout ce qui reste de l'ancien Dominion Atlantic Railway, qui appartenait au CP en Nouvelle-Écosse.
Elle est également propriétaire d'un chemin de fer américain de l'État de Iowa, le «Iowa Northern».
En janvier et en mars dernier, elle achetait les deux chemins de fer qui nous intéresserons aujourd'hui. Il s'agit d'abord de la Bangor & Aroostook Railroad, dont les lignes ferroviaires ne se trouvent que dans l'État du Maine, à l'exception du pont qui se rend jusque dans le nord du Nouveau-Brunswick. Ensuite, il y a la Canadian American Railroad Company qui exploite un tronçon de l'ancienne ligne ferroviaire du CP qui allait de Montréal à Saint John.
Les représentants de la compagnie Irving, qui ont comparu plus tôt aujourd'hui, possèdent et exploitent l'autre tronçon de cette ligne, c'est-à-dire la partie allant de Brownville Junction, dans le centre du Maine, jusqu'à Saint John. La «Canadian American» est propriétaire exploitante de la ligne ferroviaire allant de Brownville Junction à Lennoxville, au Québec, qui est prolongée par la ligne du CP jusqu'à Montréal.
Voilà donc qui je représente.
J'avais espéré, pour ma comparution, pouvoir me servir d'un projecteur, mais il semble qu'il n'y en ait pas de disponible. Je vous demanderai donc de vous reporter à la dernière page du mémoire que j'ai distribué au comité, pour qu'il vous soit plus facile de suivre mon argumentation sans avoir à vous reporter en détail au texte.
Le tronçon de Brownville Junction à Lennoxville appartient à ceux que je représente, la «Canadian American». De Lennoxville à Montréal, la ligne - en rouge - est exploitée par le Canadien Pacifique. Si vous regardez dans le bout de Brownville Junction, vous verrez que les lignes ferroviaires en vert et en orange qui traversent le Maine et le Nouveau-Brunswick jusqu'à Saint John appartiennent aux compagnies Irving qui ont comparu plus tôt. Toutes les autres lignes ferroviaires de l'Atlantique, à quelques exceptions près, appartiennent au CN. Ces exceptions sont le tronçon en rouge entre St. Leonard et Grand Falls au Nouveau-Brunswick; la Windsor & Hantsport Railway en Nouvelle-Écosse, en jaune; et le tronçon allant de Truro, en Nouvelle-Écosse, jusqu'à Sydney, au Cap-Breton, qui appartenait autrefois CN mais a été vendu à un chemin de fer d'intérêt local en septembre 1973 par le CN. Ce tronçon représente le Cap-Breton and Central Nova Scotia Railway.
Jusqu'au 31 décembre 1994, à minuit, la ligne allant de Montréal à Saint John était la propriété du Canadien Pacifique qui l'exploitait. J'oubliais Bathurst: la ville n'est pas exactement située là où la carte le prétend, elle est un petit peu plus loin, mais faisons comme si elle y était vraiment, avec toutes mes excuses à MM. Hubbard et Young. En tant qu'expéditeur à Bathurst, j'étais un client captif du CN, parce que ma ville était située le long de la ligne du CN: par conséquent, j'avais le droit de demander au CN un prix de ligne concurrentiel. Je pouvais demander ce tarif concurrentiel jusqu'à Moncton et à Saint John, de façon à ce que je puisse me brancher sur le réseau du CP de Saint John jusqu'à Montréal.
Toutefois, avant de pouvoir obtenir un PLC du Canadien National, il me fallait avoir en poche une entente préalable avec le CP pour le transport de mes marchandises de Saint John jusqu'à Montréal. Si le CN refusait de m'accorder un PLC, ou si le prix ne me convenait pas, je pouvais me tourner vers l'Office national des transport qui, à son tour, pouvait imposer un autre prix en se fondant sur la formule établie. Voilà ce qu'il m'était possible de faire jusqu'à la fin de 1994.
Or, dès le 1er janvier 1995, conformément à un décret de l'Office national des transports, le CP abandonnait le chemin de fer situé entre Montréal et Saint John. Quatre jours plus tard, les nouvelles compagnies ferroviaires dont j'ai parlé achetaient les lignes, telles que je vous les ai décrites. Du jour au lendemain, à cause de la Loi de 1987, l'expéditeur captif de Bathurst que j'étais n'avait plus droit aux prix de ligne concurrentiels. Je n'avais plus le droit d'exiger du CN qu'il me cote un PLC jusqu'à Saint John, parce que le transporteur de Montréal à Saint John n'était plus désormais soumis à la loi; de plus, le projet de loi définit le «transporteur de liaison» comme un transporteur soumis aux lois fédérales, alors que Saint John n'est pas un point de correspondance régi par la loi fédérale.
Je crois que mon argument est le même que celui qu'invoquaient plus tôt les Irving: ce que nous vous demandons, c'est tout simplement de préserver dans votre projet de loi les dispositions qui s'appliquaient jusqu'au 31 décembre 1994. Pourquoi? Simplement parce que nous voulons préserver le droit des expéditeurs de l'Atlantique d'avoir l'alternative suivante: soit utiliser les lignes du CN en passant par Grand Falls, St. Leonard, Saint-André Jonction, Québec jusqu'à Montréal, soit utiliser l'autre itinéraire de Saint John à Montréal.
Je crois comprendre que si le gouvernement a déposé le projet de loi C-101, c'était pour protéger les droits des expéditeurs. C'est peut-être ce que vous croyez faire, mais les choses ont changé. Les choses ont changé parce que ces lignes ferroviaires sont devenues des lignes secondaires ou des lignes américaines, ou encore autre chose. Mais grâce au projet de loi dont vous êtes saisis, vous avez aujourd'hui la possibilité de faire en sorte que les expéditeurs de la région de l'Atlantique, qui sont dans une position tout à fait particulière au Canada - et j'y reviendrai dans un instant - conservent leur droit aux PLC, à l'instar de tous les autres expéditeurs canadiens.
Si la région de l'Atlantique est dans une position particulière, c'est pour deux raisons. Tout d'abord, l'État du Maine pointe comme un appendice entre les régions de l'Atlantique, d'un côté, et Montréal ainsi que l'Ouest du Canada, de l'autre côté: autrement dit, pour éviter cet État, le trafic doit emprunter le long parcours.
Deuxièmement, contrairement aux autres régions du Canada, la région de l'Atlantique n'est desservie que par une compagnie de chemin de fer, soit le CN. Elle n'est pas desservie par le CP.
Voilà les deux raisons pour lesquelles la région de l'Atlantique est unique. C'est pourquoi, en 1987, lorsque la politique canadienne du transport a établi pour la première fois le régime des prix de ligne concurrentiels, la voie ferrée entre Montréal et Saint John a été désignée «route entièrement située dans le Canada» pour les fins du PLC. Nous demandons aujourd'hui que cette même voie entre Montréal et Saint John continue à être désignée route entièrement située dans le Canada pour les fins du PLC et que l'on modifie comme il se doit les définitions du projet de loi.
D'après ce que j'ai entendu des questions posées à MM. Youden et Day, il semble régner une confusion quant à la façon dont les PLC fonctionnent. Un PLC est un tarif imposé uniquement aux transporteurs fédéraux, c'est-à-dire au CN qui parcourt le tronçon Bathurst à Saint John. Il n'est pas question que le Parlement impose quoi que ce soit aux chemins de fer qui ne relèvent pas de sa compétence. Il n'est pas question non plus d'une quelconque intrusion dans les compétences provinciales ou américaines.
Rappelez-vous que l'expéditeur de Bathurst ne peut avoir recours au CN que s'il a conclu au préalable un accord volontaire avec les quatre autres chemins de fer pour le transport de ses marchandises à un prix donné entre Saint John et Montréal. C'est la condition préalable à l'octroi d'un PLC. Or, le PLC n'est imposé qu'un transporteur fédéral local, le CN qui est donc obligé de transporter ces marchandises de Bathurst à Saint John.
Je ne voudrais pas trop entrer dans les détails, mais je le ferai sur demande. La difficulté, c'est que les définitions du projet de loi actuel de «transporteur de liaison» et «point de correspondance» ne s'appliquent qu'à des transporteurs ou à des lieux de correspondance régis par la loi fédérale. Tout ce que nous demandons c'est ceci: pour les fins des PLC et pour cela uniquement, nous voudrions que la ligne ferroviaire de Saint John à Montréal soit désignée comme étant à parcours continu situé entièrement au Canada, tout comme elle l'est dans la loi actuelle de 1987; autrement dit, nous demandons que la loi ne change pas la situation actuelle. De plus, nous voudrions que les transporteurs et les points de correspondance le long de cette ligne ferroviaire soient considérés comme étant de compétence fédérale et ce uniquement pour les fins du PLC. Ou encore, vous pouvez tout simplement décréter que, même si les transporteurs et les points de correspondance ne sont pas de compétence fédérale, le CN est obligé d'offrir un PLC de Bathurst à Saint John. C'est aussi simple que cela.
Autrement dit, nous vous demandons de maintenir le régime du PLC qui existait jusqu'au31 décembre 1994 à minuit. Voilà tout. Tout tourne autour de cela. Nous ne contestons rien d'autre dans le projet de loi, mais je voudrais terminer en répétant qu'il vous faudrait reconnaître que, pour des raisons d'ordre géographique et parce que le CP a cessé d'exploiter sa ligne de chemin de fer au Québec, la région de l'Atlantique est dans une situation particulière eu égard au PLC. Or, cette situation particulière était reconnue dans la loi de 1987 et nous voudrions qu'elle soit maintenue encore aujourd'hui.
J'ai parlé du CP. Vous pourriez objecter qu'il suffirait d'obtenir un PLC du Canadien national, à Québec même. Mais regardez la carte et imaginez que vous soyez un expéditeur de Halifax, en Nouvelle-Écosse. Le transporteur local offrant un PLC expédie vos produits de Halifax à Québec sur une distance de 1 021 kilomètres; or, il vous faut alors vous fier à l'autre transporteur pour expédier vos marchandises jusqu'à Montréal, sur la courte distance qui reste à parcourir. C'est parfaitement illogique de n'appliquer le PLC que sur les trois quarts de la distance que vous voulez parcourir. La loi de 1987 reconnaissait cette particularité et a donc désigné comme parcours continu entièrement situé au Canada la voie entre Montréal et Saint John.
De plus, qui sait si le CP continuera son exploitation autour de la ville de Québec encore longtemps? Rien n'a encore été annoncé, mais je sais que le tronçon de Québec à Murray Bay en amont du fleuve a été vendu il y a un an ou deux. Que réserve l'avenir? La compagnie pourrait transformer en ligne secondaire ce tronçon, et cela pourrait être une décision judicieuse. Je ne critique pas, mais cela supprime même l'argument évoqué, à savoir que l'on peut demander un PLC au-delà de Québec.
Il y a un avantage en matière de PLC que procure le nouveau projet de loi. Si je mets le doigt sur New Glasgow, qui se trouve à l'est de la Nouvelle-Écosse, sur le continent, je remarque que l'expéditeur de New Glasgow n'a plus droit au tarif PLC en vertu de la loi de 1987. Pourquoi? Simplement parce qu'en septembre 1993, le tronçon de Truro à Sydney a été vendu et transformé en ligne secondaire, c'est-à-dire en chemin de fer régi par la loi provinciale.
Quel est l'avantage du nouveau projet de loi? Le projet de loi, à juste titre, ramène l'expéditeur de New Glasgow dans le giron des tarifs PLC, grâce à une disposition spécifique du projet de loi.
À la lecture de cette disposition, il semble évident que le gouvernement a pour objectif de maintenir les PLC et de continuer à les appliquer, même si certaines voies ont été transformées en lignes secondaires, ou quelque chose du genre. Or, j'ai déjà expliqué que l'autre disposition du projet de loi empêche l'application de PLC entre Saint John et Montréal, ce qui semble contrevenir à l'esprit du projet de loi.
Précisément. C'est la seule chose qui compte. Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cooper. Nous avons beaucoup apprécié votre exposé.
Monsieur Chatters.
M. Chatters: Je suis curieux. Pensez-vous que les rédacteurs de ce projet de loi aient ignoré l'impact de ce changement sur l'abandon de la voie de Montréal à Saint John et la transformation de cette dernière en ligne secondaire? S'ils étaient au courant, pour quelle raison ont-ils décidé de ne pas en tenir compte dans cette mesure?
M. Cooper: Je pense que les rédacteurs du projet de loi ont adopté la démarche suivante: ils se sont dit: avec ce projet de loi, nous ne voulons ni étendre, ni restreindre le régime législatif actuel en ce qui concerne les prix de ligne concurrentiels. Aux termes du régime actuel, en se contentant de changer les faits et non pas les dispositions législatives, depuis le 1er janvier 1994, la ligne de Montréal à Saint John, Nouveau-Brunswick, échappe au régime PLC.
M. Chatters: Cela a beaucoup changé.
M. Cooper: Cela a beaucoup changé à cause de la vente de la ligne, et non pas à cause d'un changement législatif.
M. Chatters: Mais les rédacteurs devaient être au courant.
M. Cooper: C'est exact, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici. Si nous sommes ici, c'est pour vous dire... Vous pouvez vous demander: pourquoi les rédacteurs du projet de loi n'ont-ils pas changé la définition de «transporteur de liaison»? Pourquoi n'ont-ils pas changé la définition de «point de correspondance»? À mon avis, ils se sont dit que s'ils changaient la définition de «transporteur de liaison» et celle de «point de correspondance», dans le seul but de préserver les prix de ligne concurrentiels dans les Maritimes, ils risquaient de laisser la voie libre à d'innombrables témoins que vous avez entendus et qui pourraient décider qu'ils veulent une nouvelle définition de «point de correspondance». Mais cela, pour d'autres raisons.
Bref, ce n'est pas tellement un changement de définition que nous voulons, c'est plutôt la protection des droits des expéditeurs des Maritimes, une protection qui existe actuellement et que le gouvernement souhaite maintenir. Il suffirait de trois ou quatre mots dans un article unique consacré aux prix de ligne concurrentiels, consacré exclusivement aux Maritimes, comme c'est le cas actuellement, et cela ne laisserait pas la voie libre à des gens dans tout le pays qui se heurtent à des problèmes de prix de ligne de concurrentiels, des problèmes qui n'ont rien à voir avec la position unique des Maritimes. C'est extrêmement simple.
M. Chatters: Excusez mon cynisme, mais le vente prévue du CN est probablement plus responsable de cet état de choses que quoi que ce soit d'autre.
M. Cooper: Je préfère ne pas m'aventurer dans ce domaine, mais je peux vous dire que d'après certains, cela tient peut-être au fait que la ligne appartient actuellement en partie à des intérêts américains. Dans trois ou quatre semaines, le CN pourrait fort bien appartenir à des intérêts américains. Nous ne le savons pas encore, n'est-ce pas? D'un autre côté, il est possible également que le CN décide de faire de ses voies en Nouvelle-Écosse des lignes secondaires, soit en les vendant à un autre chemin de fer d'intérêt local ou régional soit en les transformant en lignes sur courte distance.
Pour l'instant, personne ne peut prévoir ce que l'avenir réserve au CN. Tout ce que nous disons, c'est qu'il est important de conserver le régime PLC actuel, un régime que les expéditeurs des Maritimes méritent de conserver, tout comme les expéditeurs du reste du pays, partout où il y a deux chemins de fer.
Le président: Une précision, monsieur Cooper; vous avez parlé du tronçon Bathurst-Saint John et du tronçon Saint John-Montréal. Ce sont deux tronçons différents. Si vous pouvez aller trouver les gens du CN avec un accord déjà signé dans votre poche qui confirme les tarifs de Montréal à Saint John dans le cadre du nouveau régime concurrentiel, le CN ne va certainement pas fermer la porte aux expéditeurs et leur refuser un tarif raisonnable entre Bathurst et Saint John.
Et si l'expéditeur juge ce tarif inacceptable ou incompatible avec le tarif qu'il obtient entre Saint John et Montréal, vous pouvez toujours aller en arbitrage...
M. Cooper: Oh, certainement.
Le président: ...et obtenir alors un tarif encore meilleur que le PLC.
M. Cooper: Vous dites que l'arbitrage est la solution. Si l'arbitrage est la solution...
Le président: En partie. La concurrence et l'ambition du CN d'expédier les marchandises des expéditeurs de Bathurst à Saint John entrent également en ligne de compte puisqu'il existe un bon tarif entre Saint John et Montréal. Il pourrait dire: «Nous sommes en affaires, nous voulons votre clientèle, monsieur Cooper, par conséquent, nous allons vous donner un bon tarif.»
M. Cooper: Monsieur le président, avec cet argument, on se débarrasse complètement des PLC. On n'en a plus besoin parce que dans le reste du pays, nous avons l'arbitrage et également une forme quelconque de concurrence, qu'il s'agisse du camionnage ou du chemin de fer. Nous pourrions aussi bien nous débarrasser des PLC.
Le président: C'est ce qui me ramène à la proposition dérobée que je faisais tout à l'heure: toute cette réglementation défie l'imagination. Je n'ai pas encore réussi à justifier tout cela. J'ai beaucoup de mal à justifier ce besoin, et lorsque nous aurons entendu toutes les personnes intéressées, un peu plus tard, je vais probablement présenter une requête officielle. Pourquoi diable avons-nous besoin de toutes ces complications de toutes sortes? Pourquoi donc ne pas rétablir un nouvel équilibre fondé sur la concurrence, à l'exception des obligations de...
M. Cooper: Les chemins de fer s'opposent aux PLC. Ils n'aiment pas cela parce que c'est une ingérence dans leurs affaires.
Je représente un chemin de fer. Pourquoi suis-je venu réclamer le maintien des PLC?
Le président: Oui, exactement, ça aussi, ça m'intrigue.
M. Cooper: C'est justement parce que nous croyons être concurrentiels entre Saint John et Montréal que nous réclamons le même droit que le CP, un droit que le CP possédait mais n'exerçait pas à des «tarifs entre Saint John et Montréal» pour attirer les expéditeurs dans les Maritimes.
S'il existe un régime de PLC dans ce pays, qu'il soit à la disposition de tous les expéditeurs dans toutes les régions.
Le président: Merci, monsieur Cooper.
Madame Sheridan, je vous en prie.
Mme Sheridan: J'ai une question, une précision à demander plutôt, sur l'exemple de New Glasgow que vous avez cité. Sur quel article du projet de loi C-101 vous fondez-vous? C'est peut-être dans votre mémoire.
M. Cooper: Oui, dans le mémoire. Je crois qu'il s'agit du paragraphe 130 (2):
- Le transfert des droits de propriété ou d'exploitation d'une ligne en application de la section V
ou de l'article 158 de la Loi de 1987 sur les transports nationaux ne limite pas le droit de
l'expéditeur qui utilise cette ligne d'obtenir un prix de ligne concurrentiel...
M. Cooper: Oui, absolument. Jusqu'en septembre 1993, l'expéditeur de New Glasgow n'avait aucun mal à obtenir un PLC parce qu'il s'agissait du CN. Par contre, quand la ligne de Truro à Syndney est devenue secondaire, du jour au lendemain ce n'était plus un chemin de fer fédéral et il n'était plus possible d'obtenir un PLC. Aujourd'hui, ce projet de loi reconnaît l'irrégularité et rétablit les choses dans cet article 130(2); c'est une bonne idée.
Tout ce que nous voulons, c'est qu'on reconnaisse le tort causé par cette modification du régime des PLC et qu'on rectifie la situation d'une façon qui profite à tous les expéditeurs dans les Maritimes.
Il y a un autre petit détail à ce sujet. Le paragraphe 130(2) ne va pas suffisamment loin car il vise uniquement les expéditeurs des lignes qui ont été vendues. En effet, les expéditeurs des lignes qui ont été abandonnées puis remises en service ne sont pas couverts. Quelle est la différence, me direz-vous, si la ligne est abandonnée? Eh bien, je vais vous le dire.
La ligne entre Brownville Junction et Lennoxville a été abandonnée. Elle a été remise en service trois ou quatre jours plus tard et aujourd'hui elle est en exploitation. Mais il faut modifier le paragraphe 130(2) - comme je le dis dans mon mémoire - pour s'assurer que les expéditeurs qui se trouvent entre Brownville Junction et Lennoxville sont traités de la même façon que ceux qui sont à New Glasgow. Autrement dit, qu'ils soient assujettis au régime des PLC. C'était l'idée dès le début.
Mme Sheridan: Merci.
Le président: Merci, madame Sheridan.
Madame Wayne, à vous.
Mme Wayne: Merci beaucoup.
Je sais que les compagnies qui ont acheté la ligne du CP ont tenu des négociations assez longues. Monsieur Cooper, comme Irving chez nous, estimiez-vous, vous et tous les autres associés, que parce que le CP pouvait exploiter la ligne et qu'elle était, conformément à l'ancienne loi, entièrement située au Canada, quand vous avez acheté la ligne, cette possibilité là existait toujours pour vous et pour tous les autres exploitants de CÉFIL de Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, à Sherbrooke?
M. Cooper: Je ne peux pas vraiment dire que c'est le cas, parce qu'en fait cette désignation n'était valable que pour le CP. On pourrait être légaliste et soutenir que cette désignation dépendait plus du nom de la ligne que de ses propriétaires, mais ce ne serait sans doute pas un argument convaincant. J'imagine donc qu'on peut dire que nous l'avons acheté en sachant qu'il n'y aurait plus de PLC.
Les chemins de fer ne livrent pas tant un combat pour eux-mêmes ici que pour les expéditeurs. Si les expéditeurs gagnent, alors les chemins de fer vont gagner aussi parce qu'ils décideront peut-être d'emprunter désormais notre ligne plus souvent.
Mme Wayne: La qualité de vie de nos concitoyens dans la région dépend de l'adoption de cet amendement parce que d'après ce que les expéditeurs de la région m'ont dit, il faut qu'un tronçon de la ligne soit assujetti au PLC pour qu'ils puissent survivre. Ils veulent survivre, ils veulent des assurances et être indépendants.
Le président: Cela ne fait aucun doute, madame Wayne, si c'est à moi que vous posez la question.
Je développerais ce que vous avez dit à M. Cooper et je dirais que si c'est si nécessaire que cela, pourquoi est-ce qu'il ne présente pas ses arguments aux autorités provinciales du Nouveau-Brunswick, de qui cela relève et ne réclame-t-il pas qu'elles adoptent une loi semblable au projet de loi C-101 pour répondre à ses objections? Qu'il laisse la province décider.
M. Cooper: Peu importe ce que la province fera, même si elle adoptait une loi en tout point parfaite demain, cela ne réglerait pas le problème. C'est cela qu'il faut comprendre.
Le président: Vous auriez une loi semblable à la loi fédérale et cela vous permettrait de faire ce que vous devez faire dans un cadre provincial puisque c'est de la province que cela relève.
M. Cooper: C'est faux parce que si je suis un expéditeur à Bathurst - et il importe de bien comprendre comment ça marche - dans ce cas, en vertu du projet de loi C-101 sous sa forme actuelle, je vais m'adresser au CN et lui demander de me fixer un PLC pour Saint-Jean. Vous savez ce que le CN va me répondre? Il va me dire «Je n'ai pas le droit de vous faire un PLC pour Saint-Jean. Pourquoi? Parce qu'aux termes du projet de loi C-101, un transporteur de liaison est défini c'est un transporteur de liaison fédéral seulement et un lieu de correspondance c'est un lieu de correspondance fédéral seulement. Cela, ça n'existe pas à Saint-Jean. On m'interdit de vous donner un PLC et vous ne pouvez pas vous adresser à l'ONT pour me forcer à vous en donner un.»
Voilà le problème.
Mme Wayne: C'est un problème, monsieur le président, sur lequel le comité doit se pencher. C'est sérieux
Le président: C'est la raison pour laquelle nous sommes réunis ici et que nous entendons tous ces témoins.
M. Nault: J'essaie de m'y retrouver dans tout cela, monsieur Cooper, parce que bien honnêtement si c'est ce qui se passe dans la région de l'Atlantique et s'il va y avoir plus de CÉFILs, cela se produira vraisemblablement ailleurs.
La première chose à déterminer, ce n'est pas nécessairement de savoir s'il faut apporter à la loi un amendement expressément conçu pour la région de l'Atlantique. Il s'agit plutôt de voir comment on peut modifier la mesure législative pour permettre aux CFILs de se faire concurrence.
Êtes-vous en train de me dire que sur le tronçon de New GLasgow à Truro, par exemple, c'est permis à cause de la définition de lieu de correspondance?
M. Cooper: Non...
M. Nault: J'ai vraiment bien du mal à comprendre comment New Glasgow peut obtenir un PLC sur une ligne utilisée par un chemin de fer provincial, puisque c'est maintenant un CFIL, tandis que vous, si vous voulez passer par St-Jean, vous ne pouvez pas.
M. Cooper: Laissez-moi revenir...
M. Nault: Pouvez-vous m'expliquer ça? Est-ce parce qu'il faudrait élargir la définition de lieu de correspondance pour que cela englobe les chemins de fer sous régie provinciale? Est-ce que c'est ça la question?
M. Cooper: Non, ce n'est pas ça la question. Est-ce que je peux revenir un instant à l'exemple de l'expéditeur de Bathurst?
M. Nault: Allez-y.
M. Cooper: Imaginons qu'on soit le 31 décembre 1994. Le CP est toujours propriétaire de la ligne qui va de St-Jean à Montréal. Moi, je suis un expéditeur à Bathurst. Je suis un expéditeur captif parce que je suis sur la ligne du CN qui va de Bathurst à Montréal en passant par Campbellton et St-André-Jonction. Je veux expédier ma marchandise à Montréal. Alors je dis au CN que je suis un expéditeur captif; que je veux que vous me donniez un prix de ligne concurrentiel sur sa ligne - le transporteur local, c'est le CN - pour aller jusqu'au lieu de correspondance le plus proche où il y un chemin de fer fédéral. C'est St-Jean. Alors le CN me dit bien sûr, je vous propose un prix de 300$ le wagon.
Pour pouvoir m'adresser au CN, il faut que j'aie dans ma poche une entente avec le CP. 300$ le wagon, ça ne me plaît pas. C'est trop cher. Je pourrais alors m'adresser à l'ONT et l'office, d'une formule qui est dans la loi, peut forcer le CN à me faire un prix de 275$ le wagon plutôt que de 300$ pour aller de Bathurst à St-Jean.
Nous sommes toujours le 31 décembre 1994 mais je suis à New Glasgow. Jusqu'en septembre 1993, je pouvais faire la même chose que le type de Bathurst. Mais maintenant ce n'est plus possible, parce que je me suis retrouvé avec un CFIL en septembre 1993.
Maintenant, nous sommes en janvier 1995. Personne dans la région de l'Atlantique n'a de PLC. Personne n'en a, ou en tout cas personne n'en a de St-Jean à Montréal parce que la situation a changé et que le CP n'est plus le propriétaire de la ligne...
M. Nault: Il n'y a qu'un seul chemin de fer sous régie fédérale.
M. Cooper: Mais ce n'est pas tout, parce que la désignation de parcours entièrement situé au Canada qui était applicable à la ligne du CP qui va de St-Jean à Montréal pour les besoins des PLC a disparu parce que le CP n'est plus le propriétaire de la ligne.
Et voilà qu'arrive le projet de loi C-101. Le texte dit à l'expéditeur de New Glasgow écoutez, nous pensons que nous vous avons fait du tort. Nous pensons que vous devriez être assujetti au régime des PLC même si vous avez été vendu à un chemin de fer provincial aux termes de l'article 158. Et c'est pourquoi nous allons ajouter le paragraphe 130 (2), qui dit que même si vous vous êtes retrouvés avec un CFIL, vous ne perdez pas vos droits à des PLC. Alors l'expéditeur de New Glasgow lui est ravi.
Mais vous savez quoi? Ce n'est pas ça qui rétablit dans la loi l'ancien régime qui fait de la ligne Montréal-St-Jean un parcours de rechange. Alors non seulement le type de New Glasgow se retrouve gros Jean comme devant, mais c'est le cas pour tout le monde dans la région de l'Atlantique.
C'est ça le problème.
M. Nault: Je comprends ça. Mais j'essaie de voir... Vous demandez, et avec raison, un amendement bien précis pour que ce parcours soit désigné comme étant entièrement au Canada. Ca règlerait votre problème. Moi, la question que je vous pose, est plus vaste. Une fois qu'on aura plus de CFIL et que tout d'un coup cela vienne changer la situation pour beaucoup d'entre eux, est-ce qu'on va se retrouver avec le même genre de problème dans le cas des CFIL de l'Ontario, ceux de l'Ouest-le même problème-alors que ce qu'il faut, c'est changer la définition d'interconnexion ou de quelque chose d'autre d'aussi important?
M. Cooper: Je ne le pense pas, car rappelez-vous que dans le reste du Canada, du moins pour l'avenir prévisible, nous avons deux chemins de fer de catégorie 1 qui exploite des lignes principales... J'allais dire d'un océan à l'autre, mais en fait c'est de Montréal à Vancouver. Peu importe que de petites tronçons de cette ligne soit transformés en lignes secondaires. Le point d'origine pour ces PLC est l'endroit où la ligne secondaire se raccorde à celle d'un transporteur sous réglementation fédérale.
Prenons comme exemple le chemin de fer de Tom Payne. C'est une ligne secondaire. Quelqu'un, le long de sa ligne, peut encore demander un PLC pour la distance qu'il doit parcourir - je ne sais plus si c'est sur les voies du CN ou du CP - pour se rendre au prochain lieu de correspondance avec l'autre chemin de fer sous réglementation fédérale. Il peut encore le faire. Le problème c'est que dans la région de l'Atlantique il n'y a qu'un chemin de fer sous réglementation fédérale, le CN. C'est ça le problème; en plus du fait que la ligne du Maine monte comme ça. C'est un problème géographique et un problème d'exploitation ferroviaire.
Le président: J'aimerais préciser que M. Payne fait non de la tête. Je pense qu'il ne relève pas du gouvernement fédéral comme vous le dites. Son chemin de fer est provincial.
M. Cooper: C'est exact. Tout ce que j'essaie de dire c'est que le régime des PLC...
Le président: Non, il n'a pas de PLC. Son chemin de fer est sous réglementation provinciale.
M. Cooper: A-t-il été vendu en vertu de l'article 158 de LTN?
Le président: Oui.
M. Cooper: Il est donc assujetti au régime créé par le paragraphe 130(2).
Le président: Nous pensons que non.
M. Cooper: Eh bien, laissez-moi vous lire le paragraphe 130(2).
Mme Wayne: Nous avons un problème et il faudrait bien y trouver une solution.
Le président: Nous essayons de le régler, Elsie. Nous avons déjà déterminé que...
Mme Wayne: Oui, nous devons vraiment nous efforcer d'éclaircir la question.
M. Nault: Nous n'en avons pas le temps maintenant. Si vous voulez y réfléchir et nous envoyer votre réponse plus tard, monsieur Cooper... car il est évident que nous allons interroger les fonctionnaires à ce sujet. S'il y a de plus en plus de lignes secondaires, je soupçonne... Vous me dites qu'une ligne secondaire comme celle de M. Payne a le droit d'obtenir des PLC. À mon avis, c'est tout à fait le contraire; il ne peut en avoir.
M. Cooper: Il n'y a pas droit tant que vous n'aurez pas adopté ce projet de loi mais alors le paragraphe 130(2), dit: «le transfert des droits de propriété ou d'exploitation d'une ligne en application de la section V» de ce projet de loi «ou de l'article 158 de la Loi de 1987 sur les transports nationaux», que ce projet de loi remplace, «ne limite pas le droit de l'expéditeur qui utilise cette ligne d'obtenir un prix de ligne concurrentiel au titre des articles 131 à 137».
Bien sûr, cette personne doit pouvoir acheminer ses biens jusqu'au point de départ de la ligne fédérale. Je pense que M. Payne en conviendra. Je ne dis pas que l'ONT peut forcer M. Payne à lui accorder un PLC à partir d'un endroit sur sa ligne jusqu'au point de correspondance avec le CN, pas plus que l'expéditeur de New Glasgow ne peut obliger le Cape Breton and Central Nova Scotia Railway à transporter ses marchandises de New Glasgow jusqu'à Truro. J'en conviens. Le fait est que lorsque ces marchandises sont rendues à Truro, il a le droit d'obtenir un PLC en vertu de cette loi.
J'ai entendu dire que cette possibilité a toujours existé dans la loi de toute façon et que le paragraphe 130(2) vise simplement à éclaircir ce point. J'ai entendu dire qu'il s'agissait simplement d'une disposition d'éclaircissement, c'est peut-être vrai, mais elle est là. Cette disposition dit qu'un transporteur ne perd pas son droit à un PLC du simple fait qu'il est devenu exploitant d'une ligne secondaire. Il faut quand même qu'il transporte ses marchandises jusqu'au chemin de fer fédéral.
Mme Sheridan: Votre interprétation est peut-être fausse.
Je réfléchis à haute voix simplement. Je n'ai pas passé de nuit blanche à examiner le paragraphe 130(2) alors que j'aurais peut-être dû le faire.
Lorsque cette disposition dit que le transfert «ne limite pas le droit de l'expéditeur», je pense que cela veut dire également «et ne crée pas non pas de droits qui n'existaient pas auparavant». Alors si l'expéditeur n'avait pas droit à un PlC en vertu de l'ancienne loi, il n'y a rien dans le paragraphe 130(2) qui crée de droits non plus. Simplement, elle n'empêche pas l'exercice d'un droit qui existe déjà. Dans le cas de M. Payne, s'il n'avait pas ce droit auparavant, il ne l'aura pas plus maintenant, d'après mon interprétation.
M. Cooper: Vous pouvez prétendre, comme vous venez de le faire, que le paragraphe 130(2) vise simplement à éclaircir la loi actuelle. Mais ce que je dis c'est que si le gouvernement cherche à éclaircir ce point dans une loi dans l'intérêt des expéditeurs qui utilisent les voies secondaires, pour qu'il soit clair qu'ils ont droit au PLC, il me semble que ce serait conforme à l'esprit de la loi de ne pas leur enlever ces droits.
Mme Sheridan: Si vous me le permettez, j'aimerais enchaîner sur ce que disait M. Nault lorsqu'il vous a demandé d'éclaircir ce point.
Votre argument est bon, mais malgré la situation quelque peu anormale qui existe dans la région de l'Atlantique du fait qu'il n'y existe qu'un seul chemin de fer fédéral, notre comité a néanmoins la responsabilité de préparer une loi qui s'appliquera à l'ensemble du pays.
Une option serait simplement d'inclure une disposition déterminative, comme dans l'autre loi. Nous pourrons simplement dire que telle ligne est réputée être ce qu'elle n'est pas en réalité. Mais cela pourrait peut-être créer à long terme les problèmes dans les autres régions du pays, car on ne sait jamais.
J'ai pensé que votre premier argument c'était que vous aimeriez que nous redéfinissions «transporteur de liaison» et «lieu de correspondance» qui, je suis d'accord avec vous, s'appliquent uniquement aux chemins de fer fédéraux. Vous ne pensez pas que ce serait une solution possible?
J'aimerais que vous cherchiez une autre façon de faire, sans recourir à une disposition déterminative, lorsque vous retournerez chez vous et que vous réfléchirez à cette question.
M. Cooper: Voilà le problème.
M. Nault a évidemment raison de dire que si les lignes secondaires se multiplient dans tout le pays, les expéditeurs qui utilisent ces lignes ne font plus affaire avec des chemins de fer fédéraux de telle sorte qu'ils ne pourront plus invoquer une loi fédérale pour demander à l'ONT d'obliger un expéditeur sous réglementation provinciale de leur accorder un PLC jusqu'à la ligne principale sous réglementation fédérale la plus proche. C'est exact. Cela se produit parce que nous pensons, pour des raisons d'intérêt public, que nous devons soutenir les lignes secondaires.
M. Nault: L'expéditeur de Frédéricton est un bon exemple. Il n'a pas droit au PLC.
M. Cooper: C'est vrai.
M. Nault: Pourquoi devrai-je aider l'expéditeur de Bathurst si je ne peux pas aider celui de Frédéricton?
M. Cooper: Eh bien, on ne lui enlève pas son droit à un PLC. Il suffit qu'il puisse d'une façon ou d'une autre acheminer ses marchandises jusqu'à Saint John, comme n'importe quel autre expéditeur.
M. Nault: C'est justement ce que je dis. Si je suis un expéditeur de Frédéricton et que je veux obtenir un PLC pour me rendre à la voie du CN, parce que je n'aime pas la ligne secondaire, je ne peux pas l'obtenir.
M. Cooper: Je suis d'accord avec vous. Je pense qu'il devrait y avoir une loi provinciale parallèle.
M. Nault: Oui, pour que les expéditeurs ne partent pas. J'essaie de découvrir s'il y a un mécanisme pour régler ce problème, comme Mme Sheridan le demandait.
Le président: Oui, il y en a un. Nous supprimons les PLC et nous les remplaçons par l'arbitrage.
M. Cooper: En effet, vous pourriez faire cela. Si vous supprimiez tout à fait les PLC...
Le président: Cette idée vous plairait-elle?
M. Cooper: Non, elle ne me plairait pas.
Le président: Je ne le pensais pas.
M. Cooper: D'ailleurs, le gouvernement a annoncé que sa politique était de maintenir ces lignes en exploitation.
Le président: Vos préoccupations seront consignées au procès-verbal. Je pense que nous avons discuté à fond de cette question et nous continuerons à y réfléchir.
Chers collègues, pour votre gouverne, nous avons commencé une liste des questions de détail que nous voulons poser aux fonctionnaires du ministère qui reviendront un peu plus tard dans le processus.
M. Cooper: Monsieur le président, je n'ai pas très bien compris ce que me demandait M. Nault. Est-ce qu'il faut que je communique avec lui plus tard sur un point particulie.
M. Nault: Oui, absolument. Trouvez des solutions.
Le président: Monsieur Cooper, si vous envoyez votre réponse au greffier, le greffier la distribuera dans les deux langues officielles à tous les membres du comité.
M. Cooper: Oui, très bien. Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Cooper. Merci de votre mémoire.
Je demanderais maintenant aux représentants de la Commission de transport Ontario Northland de prendre place à la table, s'ils le veulent bien.
Chers collègues, nous accueillons maintenant, de la Commission de transport Ontario Northland, le président, Matt Rukavina, et M. Payne, directeur des Affaires générales de la société et de la planification.
Bienvenue, messieurs. Nous avons hâte d'entendre votre exposé en 15 minutes ou moins - j'insiste sur le moins - afin qu'il nous reste du temps pour vous poser des questions. Merci beaucoup. Vous pourrez commencer dès que vous serez prêts.
M. G.A. Payne (directeur, Affaires générales de la société et planification, Commission de transport Ontario Northland): Bonjour.
Au cours des 39 dernières années, j'ai travaillé comme ingénieur dans la construction, l'entretien et l'exploitation de chemins de fer. M. Rukavina a surtout de l'expérience en administration publique ou municipale, mais il a également une longue expérience dans l'exploitation d'un service voyageurs dans le Nord-Est de l'Ontario. Depuis quatre ans, il travaille pour la Commission de transport Ontario Northland.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de comparaître devant le comité pour appuyer notre mémoire du 31 août, que vous avez avec vous, je crois.
Le greffier vous distribuera également une chemise bleue qui contient des documents d'information. Il y a un certain nombre de brochures et de publicité, mais du côté gauche vous trouverez des feuilles avec un en-tête jaune. Ces trois feuilles décrivent qui nous sommes. Les documents intitulés Rail Services et Passenger Train Services vous donneront des renseignements généraux sur les aspects de Ontario Northland qui intéressent particulièrement ce comité.
Si vous nous le permettez, nous allons diviser notre exposé en trois parties. Je présenterai d'abord un bref aperçu des éléments de la Loi sur les transports au Canada qui préoccupent et intéressent l'Ontario Northland Railway. Puis, M. Rukavina vous parlera de notre principale préoccupation, soit l'avenir des subventions pour les trains de voyageurs. Enfin, je commenterai la partie de notre mémoire qui s'intitule «Autres préoccupations ferroviaires» et je répondrai également à quelques éléments du mémoire de RAC. Nous n'avons pas l'intention de lire notre mémoire - cela prendrait plus que les 15 minutes que vous nous accordez, monsieur le président - mais simplement de souligner les principaux éléments ou peut-être d'approfondir certaines questions.
La Commission de transport Ontario Northland est un organisme de la Couronne répondant au gouvernement fédéral et n'est donc pas directement touchée par la loi fédérale actuelle sur les chemins de fer, sauf en ce qui a trait aux 60 milles du Nipissing Central Railway, une filiale dont elle est entièrement propriétaire. Cependant, elle est indirectement touchée en raison des ententes contractuelles qu'elle a avec d'autres lignes principales et en raison de notre politique d'adhésion volontaire à la plupart des règlements fédéraux.
En outre, vous savez sans doute que le gouvernement de l'Ontario a déposé récemment un nouveau projet de loi, le projet de loi 5, sur les chemins de fer sur courtes distances, qui pourrait appliquer, par renvoi, certaines dispositions de la Loi sur les transports au Canada aux chemins de fer sous réglementation provinciale, ce qui aurait un effet beaucoup plus direct sur la CTON.
Comme vous l'avez remarqué dans notre mémoire, nos commentaires sont limités au transport ferroviaire, quoique vous aurez remarqué que nous avons également des services de transport maritime, aérien et par autobus.
Depuis que nous vous avons présenté notre mémoire, le ministre des Transports, Doug Young, a annoncé qu'il avait l'intention de négocier des ententes avec la CTON et deux autres chemins de fer qui seront touchés, l'ACR et le chemin de fer Québec North Shore and Labrador. Vous avez entendu ce matin des représentants de QNS&L.
M. Young a dit vouloir conclure des ententes pour s'assurer que les services voyageurs seront maintenus. Toutefois, il a nuancé cette affirmation en disant plus tard que cette politique serait modifiée après un examen approfondi de toutes les subventions pour les services voyageurs, y compris celles que reçoit VIA, et qu'elles seraient assujetties à de futures restrictions budgétaires.
Le ministre a déjà annoncé le début de cet examen, qui devrait être terminé l'an prochain.
Alors, malgré l'annonce de son intention de négocier, surtout avec ces restrictions, nous ne sommes pas tellement sûrs que cela durera au-delà de 12 mois environ.
Il nous faut une certaine assurance que le financement continuera afin que nous puissions planifier un réseau de transport des voyageurs qui soit efficace et fiable, surtout pour servir les habitants du Nord-Est de l'Ontario.
Nous avons établi un premier contact avec des fonctionnaires de Transports Canada, mais nous n'avons pas encore réussi à obtenir un aperçu de la nature ou du contenu de l'entente. Nous ne sommes donc pas en mesure de juger si, en tant que texte de remplacement de la loi, cette entente sera suffisante pour nous permettre de continuer à fournir ces services.
Parmi les quatre options présentées au comité sous le titre des subventions pour les services voyageurs, celle qui nous plaît le moins pour le moment, c'est celle qui est prévue à l'article 49.
Nous avons d'autres recommandations relatives à d'autres éléments du projet de loi, dont je parlerai plus tard, qui, d'après nous, pourraient rendre la loi plus efficace.
Je passe maintenant la parole à M. Rukavina, qui vous parlera de la question des services voyageurs.
M. Matt Rukavina (président, Commission de transport Ontario Northland): Permettez-moi de vous donner des renseignements généraux et des repères géographiques qui vous permettront de nous situer.
Si vous regardez dans les documents d'information que nous vous avons distribués, vous trouverez, au dos de la troisième feuille, intitulée Rail Services, une carte qui pourrait vous être utile.
Vous trouverez, dans le bas de la carte, le tronçon de 215 milles de la ligne du CN entre Toronto et North Bay sur laquelle nous exploitons le service voyageurs de Northlander. Au nord de cela, de North Bay jusqu'à Cochrane, nous avons le Ontario Northland Railway.
C'est le point de départ de notre service voyageurs, le Northlander, qui descend de Cochrane jusqu'à Toronto, destination d'environ les deux tiers de nos voyageurs.
Au nord de Cochrane, jusqu'à Moosonee, il y a 186 milles de voies qui nous appartiennent et sur lesquelles nous utilisons un train mixte pour fournir des services de transport de marchandises et de voyageurs. Il n'y a pas de route jusqu'à Moosonee. C'est le troisième tronçon de notre service voyageurs. Sur ce même tronçon, entre Cochrane et Moosonee, nous offrons l'été une excursion touristique pendant une période de dix semaines.
Pour alimenter cette ligne à partir de l'est et de l'ouest nous avons un service d'autobus. Ainsi, il y a un service d'autobus entre Calstock et Cochrane qui alimente le train de Northlander et un autre à partir de Timmins.
La Commission de transport Ontario Northland a été créée en 1902 pour servir l'industrie forestière dans le Nord-Est de l'Ontario. À l'époque, nous transportions des marchandises et des voyageurs, en plus de fournir un service de communication télégraphique dans les régions éloignées. Depuis, nous avons ajouté des services de télécommunication, d'autobus, de transport aérien et de traversier.
Bien que nous soyons une société d'État, nous ne sommes pas entièrement financés par le gouvernement de l'Ontario. Nous avons quelques services commerciaux. Nos services de télécommunication, de transport ferroviaire de marchandises et d'autobus doivent être autonomes - doivent être viables, obtenir de bons résultats financiers et pouvoir réinvestir dans ces activités et rester compétitifs.
Pour ce qui est de nos activités non commerciales, le service voyageurs, nous recevons de l'aide du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial. En tant que société nous subventionnons également ce service. Nous sommes donc trois partenaires pour assurer la survie de ce système de transport ferroviaire.
En gros, nous sommes venus vous dire qu'en 1993, à la suite d'une audience de l'ONT, nous avons obtenu un décret qui devait s'appliquer pendant cinq ans. Nous voulons ce même genre d'assurance qui fait défaut dans le projet de loi C-101. Ce sera à la discrétion du ministre. Si on pouvait ajouter une disposition qui nous donnerait une assurance plus longue...
Nous sommes en train de négocier - nous le reconnaissons - une assurance plus longue afin de pouvoir planifier à long terme, même au-delà des cinq années que nous avait accordées l'ONT, car il y a déjà deux ans d'écoulés. Si une telle assurance pouvait être ajoutée, nous préférerions qu'elle ressemble à celle qui a été donnée en vertu de la politique fédérale sur les aéroports lorsque le gouvernement fédéral a décidé de cesser de verser des subventions aux aéroports après un délai de cinq ans. Vous pourriez donc peut-être prévoir une période de transition de cinq ans à partir du moment où le projet de loi C-101 entrerait en vigueur. Mais, je le répète, donnez-nous une période assez longue pour que nous puissions négocier plus efficacement avec les fonctionnaires du ministère des Transports afin de préserver le service voyageurs pour les 200 000 personnes que nous desservons le long du couloir qui va jusqu'à la baie James, et même au-delà. Des gens se rendent par avion de la baie d'Hudson et de la baie James jusqu'à Moosonee pour prendre notre train Little Bear jusqu'à Cochrane, puis le Northlander de Cochrane jusqu'à Toronto, dans le Sud.
Voilà ce que nous faisons, monsieur.
M. G.A. Payne: Nous pensons aussi que l'article 89 devrait être précisé, car la Commission de transport Ontario Northland est sans doute un cas unique, comme nous l'expliquons dans notre mémoire. Nous avons proposé des changements au libellé qui pourraient éviter des problèmes éventuels d'interprétation.
On pourrait croire que les dispositions du projet de loi C-101 sous sa forme actuelle s'appliqueraient si Ontario Northland achetait une partie du chemin de fer du CN ou, par exemple, le métro Newmarket, ou bien un tronçon du chemin de fer du Canadien Pacifique.
Je crois que toutes les autres compagnies ferroviaires partagent notre préoccupation concernant l'article 104, les passages. Nous avons proposé un libellé qui garantirait que la sécurité demeure un facteur prédominant dans les prises de décisions. À l'article 104 on ne mentionne que la jouissance du propriétaire. Nous pensons que la sécurité devrait être un critère encore plus important.
Les articles 138 et 139 portent sur les droits de circulation et l'usage commun des voies. En réalité, nous ne voyons aucune raison de légiférer sur les droits de circulation. C'est inutile et techniquement impossible, à notre avis. On devrait simplement s'attendre à une collaboration volontaire de la part des parties. Cette question ne nous inquiète pas outre mesure, car, comme je l'ai dit dans notre préambule, nous nous sommes penchés sur les questions qui toucheraient Ontario Northland. Nous ne voyons pas comment cette mesure toucherait notre entreprise. Toutefois, pour être bien précis, nous avons proposé d'éliminer la référence au bien public comme étant un critère, puisqu'il n'y aurait pas d'audiences.
Pour ce qui est de l'article 160, nous nous inquiétons surtout d'un évident conflit avec le paragraphe 27(2). Je comprends bien que le recours à l'arbitrage est litigieux, mais nous ne voyons pas comment cela pourrait avoir un effet néfaste sur Ontario Northland, et nous n'avons donc aucune sorte d'opinion sur cette question.
Enfin, à titre de membre de l'Association des chemins de fer du Canada, nous voulons dire officiellement à ce comité que nous appuyons en gros les points de vue présentés par le président de notre association. Nous appuyons plus particulièrement les principes et les politiques qui sous-tendent leur étude ainsi que leurs commentaires sur la concurrence, la fiscalité et le financement de l'infrastructure.
Vous avez entendu les commentaires de Tom Payne sur les droits du successeur. Nous croyons que la loi ontarienne sur les droits du successeur a été un grand obstacle à l'exploitation du service sur courtes distances dans cette province, et nous appuyons les commentaires faits par l'Association des chemins de fer du Canada. D'ailleurs, il y a quelques années, j'ai eu des discussions à ce sujet avec Tom Payne, et je crois qu'il serait d'accord avec ce que je viens de dire.
Le comité sait sans doute que le nouveau gouvernement de l'Ontario prend les mesures nécessaires pour éliminer cet obstacle en abrogeant le projet de loi 40.
Enfin - il me semble que j'ai déjà dit enfin, n'est-ce pas? - nous avons reçu beaucoup d'appui de la part de diverses parties intéressées à qui nous nous sommes adressés: le Northeastern Ontario Municipalities Action Group; Transport 2000 Ontario; la Northern Ontario Transportation Coalition; la Fédération des municipalités du Nord de l'Ontario; Gilles Bison, député provincial de Cochrane South; Bob Wood, député fédéral de ma propre circonscription; et Reg Bélair, député fédéral de Cochrane - Superieur.
Membres du comité, mesdames et messieurs, voilà qui met fin à notre exposé. M. Rukavina et moi ferons notre possible pour répondre à vos question.
Le président: Merci, messieurs, de votre exposé et de toute l'information que vous nous avez donnée. Ce sont des renseignements très utiles. J'ai toujours songé à prendre le Polar Bear Express, l'essayer...
Merci, messieurs. Nous passerons maintenant aux questions.
Avez-vous des questions, monsieur Johnston?
M. Johnston (Wetaskiwin): Je ne crois pas, monsieur le président. Merci.
Le président: D'accord. Ce n'est pas Marlene Cowling, mais plutôt Reg Bélair. Reg.
M. Bélair (Cochrane - Superieur): Monsieur le président, merci encore de votre indulgence, puisque je ne suis pas un membre régulier de ce comité.
Je voudrais demander à M. Rukavina pourquoi il pense que le Northlander, en particulier, devrait être maintenu. Vous n'avez pas donné de raisons dans votre exposé.
M. Rukavina: Le Northlander transporte 37 000 voyageurs annuellement. La plupart d'entre eux sont soit des voyageurs qui se dirigent vers le Sud de l'Ontario pour des raisons médicales, soit des personnes âgées qui n'ont aucun autre mode de transport confortable. Si nous ne recevions aucune aide, le Northlander ne survivrait probablement pas.
Permettez-moi de vous donner quelques chiffres. Les coûts d'exploitation l'an dernier étaient de 13 millions de dollars. C'est ce que cela nous a coûté pour le service de Cochrane à Toronto, y compris le service d'autobus. Nous encaissons 2,5 millions de dollars des ventes de billets. C'est environ 20 p. 100. L'an dernier, nous avons reçu 5 millions de dollars de la province. Du gouvernement fédéral, nous avons reçu 2,5 millions de dollars. Nous avons, en fait, reçu 3 millions de dollars, dont une partie était rétroactive. L'ONT prenait toujours deux ou trois ans pour terminer son travail. Donc, l'an dernier, nous avons, en réalité, reçu une subvention de 2,5 millions de dollars.
Pour ce qui est des opérations commerciales, il a fallu une subvention de 3 millions de dollars de notre part pour les rendre viables. On pourrait donc dire que les gouvernements provincial et fédéral collaborent avec notre commission pour maintenir le service voyageurs. Si l'un de ces partenaires était incapable d'aider, il faudrait couper le service.
Cela aurait un autre effet également. Une portion de nos coûts fixes sont partagés entre notre service voyageurs et notre service marchandises. Sans le service voyageurs, le fardeau du service marchandises augmenterait beaucoup, et il serait donc difficile de garder les taux de transport à des niveaux raisonnables pour nos clients industriels.
Sept de nos clients utilisent 90 p. 100 de notre service marchandises. Si l'un d'entre eux éprouve des difficultés, notre service marchandises en souffre énormément. Voilà pourquoi nous voulons continuer à obtenir de l'aide.
Le président: Ça va, Reg?
M. Bélair: Je voudrais parler un peu de l'article 49 et des pouvoirs confiés aux fonctionnaires du ministère et au ministre pour décider s'il y aura ou non d'autres subventions.
Dans votre exposé, vous avez demandé qu'on vous garantisse qu'il y aura une subvention pendant cinq ans après que le projet de loi aura reçu la sanction royale. Moi, je vise encore plus loin que cela. Pensez-vous que la Commission de transport Ontario Northland pourrait produire suffisamment de recettes - car vous venez tout juste de dire que votre propre organisme subventionne le Northlander - d'ici six ans, disons?
M. Rukavina: L'entreprise ne sera jamais totalement autonome sur le plan financier. Sans l'aide du gouvernement et de notre commission, il nous faudrait cinq fois plus de voyageurs ou il faudrait augmenter le tarif de 500 p. 100 pour la rendre viable; alors cela n'arrivera jamais.
Lors des négociations à long terme, nous essaierons de voir comment on peut améliorer la situation. Mais même après cette période de cinq ans, quelqu'un devra trouver les moyens pour maintenir le service voyageurs. Si nous pouvons accroître l'efficacité - et nous devrons le faire - cela pourrait réduire notre besoin en matière d'aide financière.
Le problème en est un de géographie - la longueur de la ligne et le fait que c'est une région peu peuplée. C'est vraiment l'essentiel du problème.
M. Bélair: Merci.
Le président: Monsieur Rukavina, combien de personnes transportez-vous?
M. Rukavina: Nous en avons transporté 37 000 l'an dernier.
Le président: Avez-vous déjà calculé le montant de la subvention par personne? Quel est le coût subventionné par voyageur?
M. Rukavina: Si ma mémoire est bonne, c'est de l'ordre de 250$, et nous chargeons 100$. C'est maintenant le tarif pour un voyage de Cochrane à Toronto - 100$. C'est 95$ par autobus. Nous essayons de garder le prix à 5 p. 100 de plus que le tarif par autobus.
Le président: Sans parler des touristes, maintenant...
M. Rukavina: C'est relativement peu.
Le président: Très bien. Ce que je veux savoir, c'est combien de gens dépendent du chemin de fer pour se déplacer d'une localité à l'autre là où il n'y a pas d'autres modes de transport. Combien peuvent-ils être?
M. Rukavina: Je peux vous donner certains chiffres. Nous transportons 19 000 personnes à bord du Little Bear de Moosonee à Cochrane, là où il n'y a pas de route. Elles ne se rendent peut-être pas toutes jusqu'à Toronto, mais vous avez là une idée. Beaucoup de personnes dépendent du chemin de fer. Elles prennent l'avion pour se rendre à Moosonee; de là, elles prennent le Little Bear jusqu'à Cochrane, et le Northlander ensuite...
Le président: Ce qui est probablement plus cher que de simplement prendre le train.
M. Rukavina: Assurément.
Le président: Je tiens à ce que ce soit porté au compte rendu, parce que nous devons nous assurer, là où il n'y a pas d'autres modes de transport et là où des localités canadiennes se sont établies à cause du chemin de fer, de ne pas démanteler arbitrairement le chemin de fer sous prétexte que nous ne pouvons plus, pour une raison ou pour une autre, lui octroyer des subventions. Nous devons avoir une très bonne raison pour isoler ces localités.
M. Rukavina: Nous allons isoler tous les gens qui se trouvent au nord de Cochrane.
Le président: Non, peu d'entre nous sont prêts à laisser les Canadiens sans moyens de transport dans leur localité.
M. Nault: J'aimerais savoir pourquoi la Commission de transport Ontario Northland est d'accord avec la disposition qui se trouve à l'article 160, portant que l'arbitrage s'applique au transport des voyageurs.
M. Rukavina: En réalité, nous n'avons pas d'opinion arrêtée à ce sujet.
M. G.A. Payne: Dans notre mémoire, nous disons être en faveur de cette disposition. Cependant, nous n'avons pas vraiment d'opinion.
Nous ne pensons pas que l'arbitrage nous touchera tellement. Il pourra peut-être intervenir dans nos négociations avec le Canadien National. Comme vous le savez, nous avons un contrat avec le Canadien National pour qu'il se charge du Northlander entre North Bay et Toronto. Sans avoir examiné la question à fond, nous avons jugé qu'ultimement l'arbitrage pourrait jouer en notre faveur en tant qu'expéditeur.
Nous avons essayé de ne pas trop insister là-dessus, parce que nous n'avons pas vraiment de position ferme.
M. Nault: Je crains que le contraire ne se produise, justement. Si l'arbitrage s'offre comme possibilité, le CN pourrait essayer d'obtenir une décision portant qu'en tant qu'entreprise il n'est plus obligé d'exploiter ce service parce qu'il n'est pas rentable et qu'il nuit à ses autres activités. Si la décision vous était contraire, vous pourriez vous retrouver dans une position difficile.
D'autres organismes et sociétés pourraient faire la même chose, c'est-à-dire essayer de ne plus avoir de service voyageurs sur leur ligne.
Je me demande bien pourquoi l'idée vous viendrait d'appuyer cette disposition, parce que si la décision était contre vous, vous pourriez vous retrouvez sans service voyageurs.
M. Rukavina: À long terme, nous pourrions en venir à considérer la ligne du CN entre North Bay et Toronto comme une ligne secondaire dont le CN accepterait de se départir. Nous en ferions alors l'acquisition afin d'obtenir les droits à long terme sur le service voyageurs de même que sur le transport des marchandises pour tout le chemin de fer provincial nord-sud.
M. Nault: Je comprends, mais ce que je dis, c'est que vous n'avez pas besoin de l'arbitrage pour en arriver là.
M. Rukavina: Je le sais.
M. Nault: En revanche, avec l'arbitrage, vous avez beaucoup à perdre. Je me demandais pourquoi vous vouliez appuyer cette disposition.
M. Rukavina: Votre argument est intéressant.
M. G.A. Payne: Si nous avions eu l'occasion de vous parler avant de présenter notre mémoire, nous aurions peut-être modifié certaines choses.
M. Bélair: Une brève intervention, si vous le permettez, pour renforcer l'argument deM. Rukavina au sujet de la santé.
Il convient de souligner qu'un grand nombre de personnes utilisent le Northlander parce qu'il est abordable. Comme il l'indiquait, il en coûte 100$ pour aller à Toronto. Le billet d'avion aller-retour pour Toronto à partir de Kapuskasing, par exemple, est de 500$. La subvention au titre du transport dans le Nord atteint 250$ au maximum. Tout le monde ne peut pas payer la différence.
Pour situer les choses dans leur contexte, disons que le service ambulancier aérien pour les urgences est financé à 100 p. 100 par le gouvernement provincial.
Le train Northlander est donc le choix logique à faire de préférence à l'avion et à l'autobus. Le voyage à Toronto en autobus coûte peut-être un peu moins cher, mais il y a également la question du confort. Lorsque quelqu'un se rend à Toronto pour voir un spécialiste, il n'est habituellement pas en très bonne forme.
Il est extrêmement important que le comité le comprenne.
Le président: C'est un excellent point. Merci, Reg.
Messieurs, merci beaucoup de votre exposé et de vos réponses. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté de nous rencontrer.
Mesdames et messieurs, nous nous reverrons mardi après-midi.
La séance est levée.