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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 31 mai 1995

.1543

[Traduction]

Le président: Bon après-midi, chers collègues du Sous-comité sur le VIH/SIDA du Comité permanent de la santé.

Nous entendrons cet après-midi M. Charles Fremes, qui est premier vice-président aux Affaires de l'entreprise et aux affaires publiques à la Brasserie Molson Limitée. Il va nous parler des campagnes de financement du secteur privé pour le VIH/SIDA.

[Français]

La parole est à vous.

[Traduction]

M. Charles Fremes (premier vice-président, Affaires de l'entreprise et affaires publiques, Brasserie Molson Limitée): Merci beaucoup, monsieur le président de nous avoir invités à comparaître.

Je vais vous présenter aujourd'hui un bref survol du travail que Molson a effectué dans le domaine du sida. Je dois dire dès le départ que cette présentation n'a pas été préparée pour votre comité. Ce n'est pas vous, notre public.

À la demande de plusieurs organisations s'occupant du sida dans diverses régions du pays, Molson a préparé cette présentation pour faire part aux entreprises et aux organisations communautaires de ce que notre compagnie a appris dans le cadre de son programme Partners in the Fight Against AIDS. Plutôt que de venir ici faire une présentation particulière, pour les parlementaires, qui connaissent déjà très bien la question, je vais faire ce que je fais le mieux, c'est-à-dire répéter la présentation que je fais devant diverses entreprises du pays.

Sans vous citer de nom, je vous dirai qu'il y a de grandes banques, de grandes entreprises de fabrication et de grands organismes de services qui nous ont invités à leur expliquer ce que fait Molson dans le domaine du VIH/SIDA, et pourquoi. C'est ce que j'ai l'intention de vous présenter aujourd'hui très rapidement; avec un peu d'aide de la technologie, je vais vous montrer quelques exemples de ce que nous avons fait.

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[Présentation de diapositives]

M. Fremes: Nous avons intitulé cette présentation: «Why AIDS? Why Us? Why Now?» - «Pourquoi le sida? Pourquoi nous? Pourquoi maintenant?» Comme je l'ai dit, quand des entreprises nous invitent à leur parler de ce que Molson fait dans le domaine du sida, nous devons notamment leur expliquer dès le départ comment il se fait qu'une entreprise généralement associée au divertissement, au rock and roll, au hockey, aux boissons alcooliques, au sport automobile et aux exportations s'est retrouvée là.

C'est ainsi que les consommateurs canadiens nous perçoivent généralement, en effet, et c'est pour cela qu'une des premières questions qu'on nous pose, quand nous parlons à des gens d'affaires dans tout le pays, c'est la suivante: «Qu'est-ce qu'une entreprise comme la vôtre, qui représente tout cela et qui y est associée dans l'esprit des consommateurs, fait de toute façon dans le domaine du VIH/SIDA?»

Étant donné que nous discutons souvent avec les spécialistes de la commercialisation, qui s'intéressent à l'image de leur entreprise et à sa participation sur la scène communautaire, nous devons reculer d'un pas avant d'avancer d'un. Je suis certain qu'une partie de l'information que je vais vous présenter vous est déjà familière, mais je vous ai déjà dit que c'est la présentation que nous donnons devant les entreprises du pays; je vais donc vous la montrer très rapidement.

Nous commençons par leur dire que nous avons fait pas mal de recherche sur la question, à la fois des études documentaires et des études que nous avons commandées nous-mêmes. Nous avons examiné des études qui ont été subventionnées par Santé Canada. Nous sommes également abonné au Goldfarb Report, qui porte sur les attitudes et les opinions des consommateurs. Nous avons parlé à un certain nombre d'organisations et d'organismes aux États-Unis. On nous a d'ailleurs souvent demandé de faire cette présentation devant des entreprises et des organisations américaines.

Nous y parlons de certains faits essentiels au sujet du VIH/SIDA. Le premier, comme vous le savez sûrement, c'est qu'il s'agit de la cause de décès dont la croissance est la plus rapide chez les hommes de 25 à 44 ans aux États-Unis, depuis le début des années quatre-vingt; les chiffres ont augmenté de façon similaire au Canada. Nous insistons aussi sur le fait que c'est maintenant la deuxième cause de décès pour l'ensemble des hommes à Toronto.

Nous mentionnons également qu'il y a plusieurs types de coûts associés à la question: premièrement, les coûts humains, deuxièmement, les coûts économiques directs, et troisièmement, les coûts économiques indirects. Qu'est-ce que cela signifie? D'après une étude financée par le gouvernement en vue de la conférence mondiale de Yokohama sur le sida, les pertes de revenus imputables au sida dans notre pays se situent entre 1,4 et 2,6 milliards de dollars.

Lorsque nous parlons aux gens d'affaires canadiens de notre engagement et des raisons de cet engagement, nous choisissons un langage qu'ils comprennent, si vous voulez, c'est-à-dire que nous insistons sur les répercussions économiques de cette maladie.

La question suivante que nous abordons, parce que ces gens-là ne le savent pas, c'est celle de la réaction de la population à l'épidémie du sida au pays. Cette réaction a pris graduellement de l'ampleur au début des années quatre-vingt, à partir d'un petit groupe de bénévoles dévoués qui travaillaient dans diverses organisations de travail communautaire et de service social. Or, la Société canadienne du sida évalue aujourd'hui à environ 10 000 par année le nombre des bénévoles qui travaillent dans le domaine.

Imaginez un peu ce que cela signifie comme contribution, sur le plan monétaire. Ces bénévoles donnent environ un million d'heures de leur temps par année et, à 10$ seulement l'heure, cela fait déjà une contribution bénévole annuelle de 10 millions de dollars. Et ce travail se fait chaque jour dans notre pays pour l'éducation et la recherche sur le sida, et pour les soins aux sidéens.

Les gens d'affaires aiment aussi entendre parler d'étude de marché et de recherche sur les habitudes de consommation. S'ils doivent se lancer dans un domaine quelconque, ils veulent savoir comment le public va réagir. Or, nos données montrent que la santé et les questions médicales en général sont maintenant en tête de liste des domaines auxquels les Canadiens voudraient voir les entreprises consacrer leurs ressources philanthropiques. L'éducation, la recherche médicale et les activités scientifiques viennent tout à fait en tête, alors que les sports, les divertissements, et les arts et la culture viennent en dernier.

Il serait trop simpliste de tirer ces conclusions uniquement sur une diapositive, mais cela vous donne une idée des priorités des Canadiens. Puisque vous participez de près au débat sur la politique gouvernementale, je suppose que cela ne vous surprendra pas tellement. Vous savez sûrement, d'après ce que vos commettants vous disent et d'après ce que vous entendez un peu partout, que les Canadiens se préoccupent de plus en plus de la qualité de l'éducation et des soins de santé dans notre pays. Bien franchement, ils considèrent l'aide que le gouvernement et les autres sources accordent aux organisations artistiques et culturelles comme «agréable» plutôt que «nécessaire». Ce que nous avons ici reflète assez bien ces conclusions, il me semble.

On entend souvent dire au sujet du sida que ce n'est en réalité qu'une question marginale - et il est important d'en parler tout de suite quand on s'adresse à des gens d'affaires. Il y a des gens qui pensent que ce n'est pas une préoccupation de l'ensemble de la population canadienne. Certains gens d'affaires se demandent pourquoi ils devraient s'en occuper puisque cela ne touche que quelques personnes.

Mais en réalité, quand on regarde les données présentées dans le Goldfarb Report - qui est une étude quantitative tout à fait légitime sur l'évolution des attitudes des Canadiens au cours des 15 dernières années - le sida s'est retrouvé pendant quatre années d'affilée parmi les cinq principales préoccupations des Canadiens, sur 50.

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Je voudrais vous dire deux ou trois petites choses au sujet de ce tableau. La première, c'est que les cinq ou six préoccupations qui se retrouvent en tête sont toutes des questions économiques, à l'exception du sida. Nous savons que les Canadiens s'inquiètent de l'économie; ils se préoccupent du chômage, des taxes, des dépenses et de la dette. Le sida est la seule autre question qui se classe parmi les cinq ou six premières au Canada. C'est la seule question de santé publique qui se retrouve sur l'écran radar de la nation.

C'est extrêmement important pour nous, à la fois comme entreprise qui a une longue habitude de communiquer et de participer à des causes communautaires, et également comme grand commerçant.

L'autre façon d'aborder la question, c'est de demander aux Canadiens s'ils pensent que tout le monde peut avoir le sida. C'est une autre façon de déterminer s'il s'agit d'une question d'intérêt général ou d'une question marginale dans notre pays.

On constate entre 1989 et 1993 - et encore un peu plus en 1994 - une augmentation du nombre de Canadiens qui pensent que tout le monde peut attraper le sida. C'est une question qui concerne tous et chacun, et pas seulement les gens qui ont choisi un certain mode de vie. Tout le monde, dans notre pays, s'en préoccupe.

On peut également se demander s'il s'agit d'une question d'intérêt général ou marginal. Les pourcentages nous disent que les problèmes énumérés ici sont considérés comme extrêmement sérieux, ce qui montre bien l'importance que les gens leur accordent; nous avons par exemple la dette nationale, les dépenses gouvernementales, le chômage, le sida, les impôts, la TPS, l'économie. C'est seulement aux alentours de 45 p. 100 qu'on retrouve une question non économique sur cette diapositive, et il s'agit de la toxicomanie; la délinquance juvénile vient ensuite. La dette, les dépenses, le chômage et le sida sont considérés comme des problèmes extrêmement sérieux, selon une enquête nationale sur les attitudes.

Permettez-moi de retourner un peu en arrière. Aux États-Unis, un échantillon d'adolescents et de jeunes gens ont été invités à dire ce que les médias devraient, d'après eux, couvrir aux États-Unis. Ces réponses ont ensuite été comparées à ce que les médias avaient effectivement couvert dans ce pays. On avait donné aux répondants toute une liste de choses.

Il se trouve que les principaux sujets couverts cette année-là aux États-Unis, c'est-à-dire il y a quelques années, ont été le nannygate, la Bosnie, la Somalie, les sans-abri et le déficit fédéral. Mais les adolescents et les jeunes gens interrogés aux États-Unis auraient voulu que les médias accordent plutôt la priorité au sida et à la recherche dans ce domaine; c'était la question sur laquelle ils souhaitaient le plus avoir de l'information. C'est parce qu'il s'agit pour eux d'une question d'intérêt général, d'une question de santé publique. C'est une question de santé publique pour tous ceux qui sont sexuellement actifs en Amérique du Nord.

Si vous demandez aux jeunes Canadiens ce qu'ils feraient s'ils avaient 100$, à qui ils le donneraient, le premier groupe répond qu'il consacrerait cette somme à la violence familiale, c'est-à-dire aux organisations ou aux groupes communautaires qui luttent contre la violence familiale. Le sida vient en deuxième place, suivi de l'environnement, des arts, de la culture et des droits des animaux, mais les chiffres diminuent de plus en plus jusqu'à ce qu'on en arrive aux dons à un parti politique, ce qui est assez intéressant.

En 1994, nous nous sommes rendus à l'Université Simon Fraser et à l'Université de la Colombie-Britannique, et nous avons posé un certain nombre de questions à des étudiants, en groupes de discussion. Nous voulions sonder le terrain au sujet de quatre questions. La première chose que nous voulions savoir, c'était les enjeux qu'ils considéraient comme étant les plus importants au Canada aujourd'hui; deuxièmement, nous voulions qu'ils nous fassent part de leurs attentes vis-à-vis des entreprises canadiennes; troisièmement, nous voulions connaître plus particulièrement leurs attitudes au sujet du VIH/SIDA. Et la dernière chose que nous espérions trouver grâce à ces rencontres, après avoir établi un cadre de réflexion sur ces questions, c'est la place que Molson devrait prendre et le rôle qu'elle devrait jouer.

Les questions les plus importantes en 1994, selon ces jeunes, c'était évidemment d'abord l'emploi. Ce sont des étudiants, qui se demandaient s'ils allaient trouver du travail après la fin de leurs études à Simon Fraser ou à UBC. C'était la préoccupation numéro un de la plupart des étudiants, sinon de tous. Le sida venait en deuxième, et ensuite l'environnement, le déficit, la criminalité et l'immigration.

Quand nous étions là-bas, il était beaucoup question d'unité nationale. Je ne suis pas sûr que les étudiants de UBC et de Simon Fraser en parleraient autant aujourd'hui. Je ne sais pas.

Ce qui compte, de toute façon, ce sont les trois premières préoccupations: l'emploi, le sida et l'environnement; l'environnement, le sida et l'emploi; l'emploi, l'environnement et le sida. Voilà quelles sont les grandes préoccupations des jeunes.

Quand nous leur avons demandé à quelle cause les entreprises devraient contribuer, ils nous ont répondu que c'était à celles du sida, de l'éducation et de l'environnement. C'était tout à fait clair dans leur esprit.

Nous leur avons également demandé quel rôle Molson devrait jouer dans tout cela - puisqu'ils savaient tous que Molson vend de la bière et commandite la course Molson Indy à Vancouver, ainsi que du hockey et des spectacles rock - la première chose qu'ils ont dit, c'est que Molson avait un rôle à jouer, et pourquoi pas? Ils avaient du mal à comprendre ce que nous voulions exactement leur faire dire. Nous avons presque dû leur préciser que certaines personnes pensent qu'une brasserie ne devrait pas faire ce genre de choses et que certaines personnes pensent même que les grandes entreprises ne devraient pas s'occuper du tout de cette question-là. Ils se demandaient bien pourquoi. Ils avaient beaucoup de mal à comprendre exactement où nous voulions en venir. Pour eux, en tant que consommateurs, c'était tout simplement quelque chose d'important et ils se demandaient pourquoi nous ne nous engagerions pas dans ce domaine-là. Voilà qui en dit long sur l'argument de l'homophobie.

.1555

Il y a six ans, environ, des gens qui commanditaient une activité à Toronto ont demandé à Molson si nous pourrions fournir la bière pour la réception qui devait avoir lieu le dernier soir. Il s'agissait d'une fête destinée à célébrer la toute première édition de Dancers for Life. C'était la soirée de l'équipe; il y avait donc là Karen Cain et Rex Harrington, les gens du Ballet national, Danny Grossman, des danseurs de ballet et de jazz, et tous ces gens-là s'étaient réunis sur une même scène à Toronto pour recueillir de l'argent pour le sida.

J'aimerais bien pouvoir vous dire que nous avons eu un éclair de génie il y a six ans. Que nous avons adopté une stratégie brillante, que nous avons tout calculé et que nous nous sommes lancés dans cette voie en sachant que nous pourrions en arriver à aider à recueillir de l'argent pour l'éducation et la recherche sur le sida, et pour les soins aux sidéen, et nous rapprocher en même temps de nos consommateurs. Mais ce n'est pas de cette façon-là que les choses se sont passées.

Nous avons répondu au téléphone, et c'est comme cela que nous nous sommes engagés dans le domaine du sida. Nous avons rencontré des gens que nous connaissions par d'autres biais, et ils nous ont parlé de Dancers for Life, dont je n'avais jamais entendu parler et qui en était alors à sa deuxième année d'existence; nous en sommes maintenant rendus à la septième ou à la huitième édition. Ces gens-là m'ont demandé si nous étions prêts à fournir la bière pour la soirée.

Nous leur avons demandé plus de détails, puisque nous pouvions peut-être les aider par d'autres moyens. Tout a commencé par une espèce d'association officieuse avec le secteur bénévole, et plus particulièrement avec certains groupes communautaires de Toronto, puisque c'est là que se trouve actuellement le siège social de Molson. C'est là qu'a eu lieu la réunion. Tout a commencé à Toronto.

Les gens se sont bientôt passé le mot, tant dans les milieux du travail communautaire et de la lutte contre le sida que dans celui des arts et du spectacle et, dans une certaine mesure, comme vous allez le voir, dans celui des sports. La nouvelle s'est également répandue grâce aux gens de chez Molson, parce qu'il y avait de plus en plus de gens, dans les organisations communautaires et les groupes populaires, qui avaient entendu dire que notre porte était ouverte à ce genre de choses et que nous étions prêts à fournir non seulement de l'argent, mais également du temps. La nouvelle s'est donc répandue, et nous avons reçu des demandes de plus en plus nombreuses.

Nous avons ici en quelque sorte un menu de ce que nous avons fait jusqu'ici, tout au long des sept dernières années, dans l'ensemble du pays. J'ai choisi deux ou trois études de cas pour vous montrer l'ampleur et le niveau de l'engagement de Molson dans certaines de ces activités qui visent à sensibiliser les gens et à aider à recueillir de l'argent pour les organisations communautaires.

Je voudrais d'abord vous parler de Casey House, un hospice de Toronto. June Callwood, qui connaissait quelqu'un qui connaissait quelqu'un qui travaillait pour nous, chez Molson, m'a appelé un jour et m'a dit qu'elle aimerait vraiment nous faire visiter Casey House. Elle avait entendu dire que nous participions à Dancers for Life et voulait nous parler des autres choses que nous faisions.

Quand les gens nous demandent comment nous avons commencé à nous intéresser au sida, la réponse la plus courte que nous leur donnons parfois, c'est de leur demander s'ils ont déjà rencontré June Callwood. C'est une personne à qui il est très difficile de dire non. Elle a dit qu'elle croyait vraiment à ce que nous faisions, qu'elle pensait que Molson pourrait aider sa cause et qu'elle aimerait beaucoup nous rencontrer.

Trois d'entre nous sont donc allés visiter Casey House. Nous y avons vu une sorte de miracle. C'est vraiment très difficile à croire tant qu'on n'est pas allé à Casey House ou à un autre hospice pour sidéens. Il y a une liste longue comme le bras de bénévoles qui veulent travailler à Casey House. Par conséquent, du point de vue de l'entreprise, nous avons l'impression qu'il s'agissait d'une occasion tout à fait spéciale.

La première chose que nous avons faite pour Casey House, c'est de commanditer le concert-bénéfice de Leontyne Price au Roy Thompson Hall de Toronto. Cette soirée a permis de recueillir environ 30 000$ ou 40 000$... Shoppers Drug Mart, Hotel Intercontinental et Novopharm étaient également commanditaires. Nous ne sommes pas la seule entreprise à s'occuper de ce domaine, et nous n'en avons pas la prétention. Il y a d'autres entreprises qui aident aussi. Je tiens à ce que cela soit très clair.

Pour ce qui est de Laughing Matters, c'est un peu l'équivalent de Dancers for Life. C'est un spectacle de comédie, pendant lequel quelques-uns des meilleurs comiques de l'année se réunissent sur une même scène, à Toronto, pour recueillir de l'argent pour le VIH/SIDA. Il s'agit d'une soirée-bénéfice.

Mais les gens de Casey House voulaient faire savoir qui ils étaient. Ils voulaient que la population en général comprenne qui ils étaient, ce qu'ils voulaient et ce qu'ils faisaient. Nous leur avons dit que nous les aiderions dans leur mise en marché et leurs relations publiques. Nous avons constitué un comité spécial de mise en marché pour Casey House et nous avons produit une publicité pour la radio, qui a été diffusée à Toronto il y a environ cinq ans. Voici cette publicité. Je vais vous donner la chance de l'entendre au complet parce qu'elle n'est pas très longue.

.1600

[Présentation audio]

M. Fremes: C'était la toute première publicité radio que nous faisions chez Molson pour sensibiliser la population. On n'y entendait même pas prononcer le nom de Molson. Mais vous allez voir que cela a changé.

Le deuxième cas, c'est celui de «Dancers for Life». Nous avons commencé par commanditer la soirée de l'équipe, et puis les choses ont pris de l'ampleur. Nous avons fait appel à la participation de nos clients. Nous avons produit un chevalet, c'est le terme utilisé par les brasseries pour désigner l'objet que vous voyez ici; vous en avez sûrement déjà vu beaucoup - sur lequel on pouvait lire:

Nous avons non seulement sollicité des dons pour l'organisation, mais également essayé de faire appel à nos consommateurs parce que nous savons, d'après la recherche que nous avons effectuée, qu'ils veulent aider. Nous savons que cette question est très importante pour eux et qu'elle est tout à fait conforme à leurs priorités. Cela n'aurait pas été une véritable promotion de bière si nous n'avions pas eu un T-shirt à donner à nos clients sur les lieux.

L'année suivante, nous avons produit ceci. Il s'agit de l'annonce qui figurait sur le programme et qui a également été diffusée dans les abrisbus. Voilà comment on peut inciter les consommateurs de Toronto à faire le lien, en servant des bières de marque Molson et en aidant à recueillir de l'argent, grâce à la remise d'une partie des profits pour l'éducation et la recherche sur le sida et pour les soins aux sidéens.

Voici l'annonce publicitaire conçue l'année dernière pour «Dancers for Life», c'est-à-dire pour la campagne de publicité dans les abrisbus de Toronto. «Dancers for Life» joue à guichets fermés tous les ans à Toronto. Il est impossible d'avoir des billets à moins de commander très tôt. Notre programme s'échelonne sur toute l'année, avec le T-shirt, le programme lui-même, la campagne dans les abrisbus et la publicité sur le programme.

Je voudrais maintenant vous faire entendre très rapidement trois publicités radio qui vous donneront une idée de ce que nous faisons d'équivalent dans d'autres médias. La première de ces publicités met en vedette Timothy Findley. Dans les deux autres, l'équipe de conception, la même que celle qui a conçu la publicité de Molson sur l'alcool au volant, a été invitée à essayer d'ajouter un peu d'émotion dans tout cela. La première annonce est un message d'intérêt public de Timothy Findley, et les deux autres montrent un peu plus la participation de Molson; il y a également un peu plus d'émotion dans ces deux annonces-là, et nous espérons qu'elles auront beaucoup d'effet.

[Présentation audio]

M. Fremes: Nous avons maintenant la publicité de l'an dernier.

[Présentation audio]

.1605

M. Fremes: Dans la dernière annonce, nous entendions la voix de Molly Johnson. Dans la première, c'était celle de Timothy Findley, qui est un grand écrivain canadien, comme nous le savons tous. Pour la deuxième annonce, nous avons fait appel à des professionnels de Toronto qui avaient travaillé à divers projets et nous leur avons demandé de donner de leur temps. Notre participation au projet «Dancers for Life» est tout à fait représentative de ce que nous faisons dans ce domaine, ainsi qu'auprès des organisations communautaires, et nous en sommes évidemment très fiers en tant qu'entreprise.

Mais il y a plus. Il y a des marches organisées dans tout le pays au mois d'octobre. Ces activités permettent de recueillir plus d'argent que toutes les autres ensemble. Je pense que la marche de Toronto a permis à elle seule de ramasser 1,1 million de dollars l'an dernier, alors que les recettes nettes de «Dancers for Life» s'élèvent à environ 100 000 à 125 000$.

Molson commandite des marches à Toronto, Ottawa, Vancouver, Halifax, Calgary et Montréal depuis deux ou trois ans. C'est une façon pour nous de travailler avec les organisations communautaires et de faire participer nos employés, un élément sur lequel nous devons insister lorsque nous parlons aux entreprises. Comme les entreprises ont de moins en moins de ressources à consacrer à des activités de plus en plus nombreuses, un peu comme les gouvernements, elles doivent trouver un moyen de motiver leurs employés. Si on peut les inviter à s'intéresser à une question ou à une cause qui fait qu'ils sont fiers de travailler pour une entreprise, c'est une très bonne façon de contribuer à améliorer le moral.

Les marches de Toronto et de Montréal, et la participation de Molson, sont présentées dans une des annonces placées dans les abrisbus. J'aimerais maintenant vous présenter une bande qui vous montrera comment les médias couvrent cette marche. Vous vous demandez peut-être comment les gens d'affaires peuvent réagir à cette bande; ils s'intéressent à la façon dont les choses se déroulent. Ils n'ont peut-être pas regardé la télévision ce jour-là - on ne peut jamais supposer que oui - et c'est pourquoi nous voulons leur montrer comment les médias ont couvert l'activité à laquelle nous leur demandons de participer. Donc, nous leur montrons ce clip, qui présente les points saillants des reportages que les médias ont consacrés à la marche de l'an dernier.

[Présentation vidéo]

.1610

M. Fremes: Cela donne aux gens, qui n'ont probablement jamais vu de reportage sur cette activité à la télévision, un aperçu de la façon dont elle a été présentée dans l'ensemble du pays.

Mon dernier exemple, c'est celui du festival Kumbaya. Molly Johnson - une chanteuse de blues et de jazz de Toronto - a réussi là à peu près toute seule, avec MCA, Molson et d'autres entreprises commanditaires, à rallier la communauté musicale du Canada pour recueillir de l'argent. Elle invite les meilleurs artistes canadiens qu'elle puisse trouver à se produire gratuitement - ce qui n'arrive vraiment pas souvent - à Ontario Place, pendant toute la journée du lundi de la Fête du Travail. Les musiciens, les syndiqués et tous les autres donnent de leur temps et fournissent leurs services gratuitement. Elle recueille ainsi environ 200 000$, qui sont donnés à d'autres organisations communautaires de différentes régions du pays.

Voici une bande qui montre comment nous pouvons positionner Molson dans tout cela, et comment les choses sont présentées à la télévision nationale. Encore une fois, je vous demande votre indulgence. Nous avons réduit ici cinq heures de télévision à une minute et demie.

La principale chose qu'il faut garder à l'esprit, à mon avis, c'est que quand on présente quelque chose à des gens d'affaires - et c'est pour eux que nous avons conçu ceci - ils veulent voir de quoi leur entreprise pourrait avoir l'air. Donc, ils examinent la façon dont Molson est présentée. C'est ce que nous leur avons montré, et c'est pourquoi le nom de Molson est mentionné un peu plus souvent dans ces cinq heures-là que ce serait normalement le cas.

[Présentation vidéo]

M. Fremes: Encore une fois, quand nous parlons aux gens d'affaires, nous leur disons que la leçon la plus difficile à retenir, dans le domaine de la mise en marché, c'est qu'il est parfois préférable de se contenter de peu. Nous avons ici cinq heures de télévision, dans lesquelles nous disons que nous sommes Molson Canadian et que nous vous présentons quelque chose sans pause publicitaire. Le nom de Molson est mentionné au moment de la présentation du chèque, et puis à la fin des cinq heures, quand on remercie les gens et qu'on leur dit au revoir. Ce sont les trois seules mentions du nom de Molson en cinq heures de télévision en direct.

.1615

Pourtant, quand nous avons fait notre vérification auprès de l'auditoire, nous avons constaté que la participation de Molson à cet événement avait obtenu une très haute cote, même si notre nom n'avait été mentionné que trois fois en cinq heures. Nous étions là tout seuls, et l'événement était si envahissant, sur le plan du marketing, que ça restait dans la mémoire des gens.

Il n'est pas toujours nécessaire d'avoir trois messages publicitaires de 30 secondes toutes les quinze minutes pour faire passer son message.

Je vais vous donner quelques autres exemples, après quoi je résumerai pour que vous ayez le temps de poser des questions. Vous avez été très patients et je vous en remercie.

Red Hot Nights a débuté aux États-Unis. Dans la version canadienne, la Canadian Stage Company est venue nous voir il y a deux ans en disant qu'elle faisait pas mal de choses et qu'elle voulait s'engager dans ce dossier. Ses représentants nous ont dit que nous étions des spécialistes de la commercialisation d'une grande entreprise et que nous étions déjà engagés, en ajoutant qu'ils aimeraient participer à une campagne de financement et faire pour le théâtre ce que Dancers For Life avait fait pour la danse. Ils nous ont demandé s'ils pouvaient être nos partenaires et se servir de nos talents de marketing pour sensibiliser davantage les gens à la question. Nous avons parrainé trois ou quatre représentations de Red Hot Nights que la Canadian Stage Company a présentées à Toronto.

Cela vous donne une idée du programme que nous avons commandité avec Eight Ball et avec la Fondation canadienne pour la recherche sur le sida, CANFAR.

À la fin, les gens du secteur public aussi bien que du secteur privé veulent savoir quels résultats nous avons obtenus. Qu'est-ce que tout cela a donné?

Je vous donne une liste très rapide et très sommaire de certaines de nos réalisations. Jusqu'à présent, nous avons amassé plus de 4,5 millions de dollars, et cet argent ne provient pas seulement de Molson mais aussi d'activités auxquelles Molson a participé. Molson n'a pas donné tout cet argent; il a été amassé grâce aux efforts d'autres groupes, d'organisations communautaires, de gens qui oeuvrent dans les domaines de la danse, du théâtre, des variétés et du rock and roll. Ces gens-là ont aidé Molson et d'autres à recueillir l'argent.

L'idée de partenariat et de liens mutuels est très difficile à quantifier, mais l'entreprise privée - et le gouvernement aussi, je pense - commence à la comprendre. Quand on développpe et qu'on renforce ces liens, on devient une meilleure entreprise ou une meilleure institution. Nous avons fini par avoir des liens très importants et très étroits grâce à notre participation à cette lutte. Nous avons maintenant des partenariats non seulement avec des organisations communautaires de lutte contre le sida, mais aussi avec d'autres compagnies, qui se lancent elles aussi dans la partie.

Nos recherches nous ont confirmé que nos efforts ont contribué à améliorer l'image de marque de Molson. Nous avons vraiment une assez bonne image de marque, et notre participation à ces activités y a contribué. Les gens aiment bien savoir que nous faisons ça. Comme vous l'avez vu dans la recherche, les consommateurs estiment que c'est parfaitement compatible avec la nature de notre entreprise et de nos activités.

Enfin et cet aspect-là est difficile à quantifier, lui aussi, même si nous avons fait des recherches sur les attitudes de nos employés et des évaluations qualitatives, le fait de participer aux marches de financement de la lutte contre le sida et d'offrir à nos employés la possibilité de contribuer quelque chose à leur collectivité peut accroître leur fierté et améliorer leur moral. Comme je l'ai dit tout à l'heure, en période de ressources de plus en plus restreintes, ces deux résultats-là ne sont pas dénués d'importance.

Voilà pour la partie structurée de mon exposé. Je tiens vraiment à vous remercier pour votre patience, et j'espère que vous aurez le temps de poser des questions. Merci.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Fremes. Ce fut très intéressant et même très rafraîchissant. C'est très différent de ce que les autres témoins des divers sous-comités ont présenté.

Je suis très heureux de constater l'approche que la Brasserie Molson a prise dans ce domaine. C'est une approche sociale très humaine. Vous faites preuve de leadership avec cette vidéo vis-à-vis des autres grandes compagnies canadiennes qui, à l'occasion, peuvent avoir certaines difficultés à s'intégrer. Elles comprennent le problème de l'intégration, surtout avec une image de marketing. Je vous remercie beaucoup et encore une fois, félicitations!

On va avoir tout le temps voulu parce que cet après-midi, vous êtes le seul témoin. Ça nous fait vraiment plaisir. M. Ménard va commencer la période de questions.

M. Ménard (Hochelaga - Maisonneuve): D'abord, je dois vous dire que je suis le député d'Hochelaga - Maisonneuve. C'est une circonscription qui est située dans l'est de Montréal. Votre siège social pour la province de Québec est situé pas très loin de chez moi. J'ai eu le plaisir, à plusieurs reprises, d'être invité par le porte-parole des relations publiques pour le Québec, M. Houle.

M. Fremes: L'ancien numéro 15 des Canadiens de Montréal.

M. Ménard: Quel était son surnom au hockey?

M. Fremes: Réjean Pinotte.

M. Ménard: Oui, c'est cela. Le Comité doit vous remercier parce que votre projet est vraiment un modèle qui doit être exporté. On ne peut pas imaginer jusqu'à quel point un citoyen corporatif comme vous doit être impliqué.

.1620

J'ai trois questions à vous poser. Je vois bien que vous avez constaté que cela faisait partie des préoccupations des Canadiens, mais c'est vraiment une nouvelle façon de s'impliquer dans la communauté. La dernière année où j'étais à l'université, j'ai fait des études en administration. Même si on connaît votre optimisme pour l'avenir, monsieur le président, il reste que j'étais étudiant en administration, et on commençait à nous inculquer des principes comme: être administrateur n'est pas juste être comptable; c'est aussi avoir des liens avec la communauté. On n'avait pas vraiment de modèle de citoyen corporatif très impliqué à nous donner. J'aimerais, si ce n'est pas aller dans la planification stratégique de Molson, savoir comment est née cette idée, parce que l'évaluation que vous pouvez en faire est très positive. C'est ma première question.

Deuxièmement, est-ce qu'un gouvernement comme le gouvernement canadien et ce Comité qui revoit la stratégie canadienne de lutte contre le SIDA pourraient faire plus pour vous être utiles et faire en sorte que vous puissiez être encore plus facilement associés à la levée de fonds?

Troisièmement, vous avez mentionné que vous aviez présenté cette vidéo à d'autres citoyens corporatifs. Avez-vous réussi à être «contagieux», sans mauvais jeu de mots, pour d'autres partenaires du secteur privé?

[Traduction]

M. Fremes: Je vous remercie beaucoup pour votre introduction et pour vos compliments. Je les communiquerai à Réjean Houle, je puis vous l'assurer.

Je dirais que l'idée de notre participation à la lutte contre le sida - la façon dont elle est née et d'où elle vient - n'est qu'un prolongement naturel des autres activités auxquelles Molson participait déjà, et je vais vous l'expliquer.

Vous le savez peut-être déjà, mais c'est la famille Molson qui a lancé le tout premier hôpital de Montréal. Molson contribue généreusement à des projets dans le domaine de l'hygiène publique et à des projets communautaires et sociaux dans toutes les régions où elle a des activités au Canada, et ce depuis plus de 250 ans. Alors, quand on nous demande «Pourquoi participer à la lutte contre le sida?», la vraie réponse est toute simple: «Pourquoi pas?». C'est compatible avec tout ce que nous avons fait dans le passé. L'exemple que je vous ai donné en vous expliquant comment nous nous sommes lancés dans la lutte contre le VIH et le sida, et quand une organisation communautaire est venue nous demander notre aide, est tout à fait véridique, mais notre intervention est fondée sur une très longue tradition chez Molson.

Qu'est-ce que le gouvernement peut faire? Pour vous répondre brièvement, je dirai que, quand je parle aux représentants d'autres entreprises - habituellement à la demande d'organisations communautaires, mais parfois aussi à la demande des entreprises elles-mêmes - j'ai dit qu'il y a deux ou trois besoins à combler. À mon avis, la première chose que le gouvernement peut faire, c'est de comprendre ces besoins. Je dois vous dire que nous collaborons très étroitement avec les fonctionnaires de Santé Canada, et je suis convaincu qu'ils comprennent ces besoins. Je ne crois pas avoir dit aujourd'hui quelque chose qui serait du nouveau pour eux. Ils savent ce qu'il faut faire et ils s'en occupent.

Certains pourraient dire que nous devrions accélérer le mouvement. Certains pourraient aussi déplorer le risque que, dans certains gouvernements, le dossier est en train d'être mis en veilleuse et qu'on y consacre de moins en moins de ressources, mais je ne crois pas que les politiciens et les fonctionnaires aient le moindre doute: nous devons nous engager dans cette lutte.

Le thème clé est celui du partenariat. Il faut que les entreprises, le gouvernement, la communauté et les professionnels des soins de santé collaborent pour faire quelque chose et pour arriver au consensus national sur quelque chose. Ce «quelque chose» qui doit faire l'objet d'un consensus national, à mon avis, c'est que le sida est le problème et le défi de tout le monde.

Je pense que Molson peut contribuer à cette démarche grâce à sa compréhension des consommateurs et de la recherche de marché. Nous pouvons montrer à tous les intéressés que le dossier est au programme de tout le monde. Ce n'est pas Goldfarb ou une autre maison de sondage qui va vous faire une recherche sur l'opinion publique comme celle-là, à moins que la question soit aussi prioritaire que les emplois, le déficit et les impôts, bref ce qui figure, nous le savons, à l'écran économique des Canadiens.

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Cela dit, il n'y a pas suffisamment d'information sur le sujet. Les grandes entreprises réclament des preuves; il leur faut plus d'éléments concluants. Molson en a vu assez; nous avons fait nos devoirs, je pense que vous l'avez constaté. Pourtant, il reste encore d'autres entreprises à convaincre, et elles ne viendront pas à notre aide si nous ne faisons pas d'autres recherches.

En termes concrets, que pouvons-nous faire? Je pense que le gouvernement et des gens du secteur privé qui s'intéressent à la question - quand je dis le gouvernement, je ne parle pas seulement de Santé Canada, mais bien du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux - devraient créer la base de données définitive de recherche sur l'opinion publique des consommateurs au sujet du sida. Cette base de données prouverait premièrement aux grandes entreprises et deuxièmement aux politiciens que cette question-là tient à coeur aux Canadiens, qu'ils la considèrent comme prioritaire, que les consommateurs et les employés y tiennent, eux aussi.

Mme Bridgman (Surrey-Nord): Je vous remercie beaucoup pour votre exposé. Je suis la députée réformiste de Surrey, en Colombie-Britannique. Mes questions ressemblent à celles qui vous ont déjà été posées. Je pense que le comité en est venu à la conclusion que les entreprises ne participent pas assez à la lutte contre le sida, et il se demande ce qui les empêche de le faire. Vous avez certainement parlé de certaines des questions d'actualité.

Je félicite la brasserie Molson pour s'être lancée dans la partie et pour avoir fait preuve de leadership, mais je ne sais pas si une étude serait préférable à un programme de sensibilisation destiné aux entreprises, par exemple. Nous avons déjà la Stratégie nationale sur le sida et l'infection au VIH, et bien d'autres programmes encore. En outre, on semble dire qu'il faudrait améliorer la coordination de ces programmes.

Premièrement, le genre de produit qu'une compagnie vend influe-t-il sur sa participation à une campagne comme celle qui nous intéresse? Deuxièmement, les victimes du sida sont des gens jeunes, tout au plus au milieu de la quarantaine. Pourquoi des entreprises ne s'attaqueraient-elles pas au cancer, à l'hépatite B ou au cancer du sein, par exemple? Le cancer est un terrible fléau, tout comme les maladies du coeur, mais pourquoi faudrait-il s'attaquer au sida? Le produit de la compagnie influe-t-il sur sa participation?

M. Fremes: Permettez-moi de revenir sur votre question. Vous demandez pourquoi on ne s'attaquerait pas au cancer ou aux maladies du coeur, et je vous dirai que l'une des choses que nous avons constaté dans notre participation à toutes ces activités de lutte contre le VIH et le sida, c'est qu'il faut tenir compte de la façon dont la maladie s'est manifestée au Canada et en fait dans le monde entier ainsi que de ses victimes; c'est une réalité profondément ancrée dans les années 1980. En fait, nous sommes aux prises avec une épidémie qui tue beaucoup de monde. Le mal est incurable. Les gouvernements et le secteur privé ont de moins en moins de ressources à y consacrer, et c'est pourquoi les organisations communautaires et les bénévoles dont j'ai parlé se sont ralliés à la cause. Une foule de gens pour qui c'était important et à qui les gens frappés par la maladie tenaient à coeur ont offert leur temps et leurs efforts pour la combattre.

À l'époque, ces gens-là avaient beaucoup d'enthousiasme, mais, par contre, je le leur ai dit et je le leur répéterais s'ils étaient ici, ils étaient loin d'avoir les talents de marketing et de financement de leurs homologues qui s'étaient consacrés à la lutte contre des maladies «traditionnelles» établies ou à des organismes de charité. Ils n'étaient pas des amis des présidents et des directeurs généraux. Ils ne jouaient pas au golf dans le même club que ces gens-là, ils ne fréquentaient pas non plus les mêmes restaurants. Bref, ils n'étaient pas du même monde, de sorte qu'ils étaient très défavorisés, en termes de marketing pris au sens large, pour vendre leur marchandise.

Les entreprises doivent analyser ce qu'il faut faire et ce qu'il est possible de faire. Leur budget est très limité. Je ne suis pas ici pour vous dire que Molson est une entreprise vouée à régler le problème du sida, parce que ce n'est pas notre affaire. Notre affaire, c'est brasser de la bière et faire de l'argent en la vendant. Nous essayons de rendre au pays un peu de ce qu'il nous a donné, et nous espérons être considérés comme un bon citoyen corporatif. Cela dit, je le répète, nous n'avons pas pour mission de trouver la cure du VIH et du sida. Je vais un peu vite, mais je suis sûr que vous comprenez.

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Bref, nous donnons aux organismes de charité du secteur de la santé qui s'occupent du cancer et des maladies du coeur, mais nous estimions qu'il était vraiment urgent de chercher à combler le vide.

Nous avons notamment essayé d'aider les organisations communautaires dans leurs activités de marketing et de financement, parce qu'il y a moyen de parler aux entreprises dans leur langage. Quand un tas de gens de ces organismes communautaires voient notre exposé sur la façon de parler aux entreprises, ils en tirent une meilleure compréhension de la façon de présenter leurs arguments pour le compte du Comité de lutte contre le de Sault Ste. Marie, ou pour l'organisation qu'ils représentent, quelle qu'elle soit.

Mme Bridgman: Je pense que quand vous cherchez à amener des entreprises à participer, vous allez vous attacher à deux éléments. Le premier serait que la cause qu'on leur présente doit être assez visible pour un groupe d'âge donné, comme le sida, dans le cas des jeunes, etc. L'autre serait l'éducation qui s'impose dans le monde des affaires pour lui inculquer les aptitudes de marketing nécessaires à ce genre de promotion. C'est quelque chose que les gens d'affaires n'ont jamais fait, de sorte qu'ils ne savent pas comment procéder.

M. Fremes: Je dirais que vous avez raison, à une réserve près. Il ne s'agit pas seulement de la lutte contre le sida. Nos recherches ont révélé que, quand des entreprises veulent participer à ce qu'on appelle maintenant des activités de marketing axées sur des causes, si elles veulent qu'on achète leurs produits parce qu'elles sont engagées dans un secteur ou dans une cause, bref dans quelque chose qui tient à coeur aux consommateurs, et que, par exemple, en juin, x% des ventes de Molson seront versées à une organisation environnementale parce qu'on sait que les gens pensent que l'environnement est important, il y a moyen d'y arriver. Les spécialistes du marketing et les dirigeants des grandes entreprises en général en apprennent tous les jours davantage là-dessus. Les compagnies canadiennes sont de plus en plus nombreuses à prendre ce virage. Il n'y a pas de différence entre la question du sida et une autre question quand on fait du financement pour une oeuvre de charité.

Mme Bridgman: Si vous choisissez une entreprise pour appuyer une cause, vous allez probablement choisir une cause en fonction de ses produits. Par exemple, on sait qu'il se vend plus de bière aux jeunes qu'aux personnes âgées...

M. Fremes: Excusez-moi de vous interrompre. Je sais où vous voulez en venir, mais le fait est que les données révèlent qu'il n'y a pas que les jeunes qui s'intéressent à la question. On s'y intéresse parce qu'on a une fille de 20 ans ou un petit-fils de 17 ans. Cela ne fait aucune différence, parce que c'est une question de santé publique qui préoccupe les gens autant que l'économie. Je dois vous rappeler que le cancer et les maladies du coeur ne font pas partie de cette liste de questions très préoccupantes.

À mon avis, il n'est pas nécessaire d'avoir un créneau ou un groupe de consommateurs cibles nécessairement axés sur la jeunesse, comme pour vendre des jeans Levis, du Coca-Cola, ou que sais-je encore. Ce n'est pas nécessaire de viser seulement ces gens-là. Vous pouvez envisager de vous engager et de vous rapprocher des gens qui vendent des REÉR, parce qu'ils sont des parents d'enfants qui risquent d'être victimes de cette maladie.

Mme Bridgman: Pourtant, il serait probablement plus facile de faire appuyer la lutte contre le cancer par les gens qui vendent des REÉR, parce que c'est le groupe...

M. Fremes: Aujourd'hui, ce serait possible, parce que les gens ne sont pas bien informés, mais avec l'éducation dont nous parlions tout à l'heure, vous pourriez probablement les mobiliser.

Mme Augustine (Etobicoke - Lakeshore): Je tiens moi aussi à féliciter Molson pour avoir été un bon citoyen corporatif. La notion de partenariat est d'une telle importance, quand les entreprises et les gouvernements coopèrent.

J'aimerais vous demander si vos recherches ont été réalisées avant le début de votre engagement dans cette noble cause ou après. Certaines des expériences que j'ai vécues m'ont appris qu'il a fallu des années à certaines compagnies - prenons le cas de l'industrie de l'automobile, par exemple - avant qu'elle permette à un Noir de paraître à côté d'une voiture dans un message publicitaire pour vendre la voiture, simplement pour des questions d'image. Les compagnies avaient l'impression que l'image de tous les stéréotypes négatifs qu'on associait aux Noirs se refléterait dans la voiture. C'est pour cette raison que je vous pose une question sur la recherche. A-t-elle été réalisée avant ou après le début de votre engagement?

Je vais vous poser tout de suite mon autre question pour que vous puissiez répondre aux deux en même temps.

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Molson est-elle allée au-delà des relations publiques et des campagnes de promotion et de financement auprès de la belle société, en modifiant ses pratiques d'embauche pour que les gens atteints du sida, puissent...? Quelles sont vos pratiques professionnelles, et jusqu'à quel point faites-vous des campagnes de souscription et de l'éducation? Comment cet engagement se reflète-t-il d'une façon pratique dans les activités quotidiennes de votre entreprise?

Je connais la situation de Casey House. En effet, je viens de Toronto, et j'ai été présidente du conseil d'administration de la Commission du logement de la municipalité régionale de Toronto. L'expérience m'a appris que les personnes atteintes du sida, pas celles qui en étaient réduites à vivre à la Casey House, mais celles qui en étaient aux premières étapes de la maladie, avaient beaucoup de mal à se loger.

Il y a donc des questions très importantes à poser au-delà des activités de promotion et du don de quelques dollars. Il se fait bien des choses en matière d'éducation, il y a de nouvelles découvertes, des recherches, etc., mais il y a aussi l'autre côté de la médaille, celui des besoins pratiques et quotidiens des victimes du sida. Quelle forme l'engagement des entreprises peut-il revêtir à cet égard?

M. Fremes: Nos recherches ont été faites après le début de notre engagement. L'un des facteurs qui nous a amenés à nous lancer dans la partie presque par accident, ou, comme je l'ai dit, en acceptant de rencontrer les représentants de cette organisation-là après avoir reçu un appel téléphonique d'eux, c'est qu'on ne pouvait absolument pas nous accuser d'avoir concocté de propos délibéré une sorte de plan machiavélique, parce que nous nous sommes lancés dans cette aventure fortuitement, et nous le reconnaissons franchement. Cela dit, une fois que l'affaire a démarré et que nous avons commencé à recevoir de plus en plus de demandes, notre engagement s'est affirmé, car nous devions à nous-mêmes autant qu'à nos actionnaires et à nos employés d'arriver à mieux comprendre le problème et à comprendre aussi la nature de notre engagement. C'est alors que nous avons commencé à faire plus de recherche.

Je dois vous rappeler que je qualifierais une grande partie de la recherche que nous avons citée de livresque. Ce n'est pas de la recherche réalisée par Molson, car tous les gens qui fréquentent les bibliothèques sont capables de la consulter là. Je pense que nous nous demandions tout à l'heure comment le faire comprendre à certaines entreprises, parce qu'elles n'ont pas l'habitude de fréquenter les bibliothèques et d'y chercher de l'information de recherche. Les entreprises se font donner des exposés ou assistent à des conférences où l'on parraine une cause à laquelle on pourrait les rallier.

Pour ce qui est de la situation dans notre entreprise même, à titre de membre de l'Association des brasseurs du Canada, Molson a répondu comme tous les autres brasseurs canadiens à l'appel du gouvernement fédéral qui réclamait une stratégie et une politique de lutte contre le sida au lieu de travail. Nous avons à cet effet des programmes qui ressemblent beaucoup à ceux que nous appliquons pour assurer l'équité en matière d'emploi.

M. Culbert (Carleton - Charlotte): Monsieur Fremes, je voudrais commencer, comme mes collègues, par vous féliciter, vous et votre compagnie, pour l'initiative que vous avez prise. Je crois que vous avez impressionné tous les membres du sous-comité, qui se posent dans bien des cas des questions difficiles depuis plusieurs mois. La plus importante question que je voudrais poser, c'est si vous avez apporté des échantillons avec vous. Non? Eh bien, nous allons devoir nous débrouiller sans eux.

L'un des facteurs importants que la plupart des nombreuses organisations qui ont comparu devant nous nous ont signalé, c'est qu'elles avaient de la difficulté à mettre sur pied une campagne de souscription concentrée, en raison de la connotation défavorable qui entoure le VIH et le sida, à tort ou à raison, en raison des perceptions des gens.

Vos recherches me donnent l'impression que votre service du marketing ou le dirigeant clé de Molson qui ont dit «oui, on y va» avaient quelque chose en tête. De toute évidence, ils avaient une vue d'ensemble, alors que plusieurs des groupes et des organisations que nous avons entendus n'ont pas réussi à voir assez loin et qu'ils ont eu des difficultés.

Je vais commencer par vous demander si vous avez des conseils à nous donner? Ensuite, et je pense que vous y avez fait allusion dans votre exposé, est-ce que vous ou quelqu'un de votre compagnie seriez disposé à travailler avec un ou plusieurs représentants des organisations qui oeuvrent dans diverses localités et qui ont bien du mal à obtenir des résultats comparables à ce que M. Molson a fait pour commanditer des activités, etc.? Pourriez-vous les guider et leur dire comment vous avez fait pour réussir, et peut-être leur donner quelques conseils?

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M. Fremes: Je vais commencer par répondre à votre deuxième question. Oui, nous serions disposés à le faire, et nous l'avons déjà fait. Le problème, c'est de savoir jusqu'à quel point nous pouvons en faire davantage et de combien de temps nous disposons pour le faire. Nous avons donné cet exposé, sous une forme ou sous une autre, à peu près 25 fois au cours des 12 à 13 derniers mois. Il y a toutes sortes de congrès de relations publiques.

Je devrais aussi préciser que les gens qui donnent des conseils aux grandes entreprises sur les façons d'améliorer leur image, d'accroître leur part de marché ou d'augmenter les ventes sont fréquemment fort utiles pour ce genre d'activités, eux aussi. Nous avons donc ciblé les gens qui pratiquent les disciplines du marketing, de la publicité et des relations publiques afin d'influencer les influenceurs, si vous voyez ce que je veux dire. C'est une autre de nos méthodes.

Oui, nous sommes prêts, et nous sommes disponibles. Molson a des bureaux dans tout le pays; nous avons présenté cet exposé dans différentes localités de toutes les tailles, et nous allons continuer à le faire.

Quel conseil pourrais-je bien vous donner? Disons que je répéterai simplement ma réponse à la toute première question. Si vous cherchez une raison de ne pas vous engager dans la lutte contre le VIH et le sida, et que vous êtes un gouvernement ou une entreprise privée, vous avez l'embarras du choix. Vous pouvez invoquer toutes sortes d'arguments pour vous dérober, en disant que ce ne serait pas dans l'intérêt de votre compagnie, de vos actionnaires ou de vos employés. Il y a toutes sortes de raisons valables ou pas de se dérober, si vous voulez. Le véritable intérêt, le véritable avantage et le véritable profit qu'on retire d'un investissement pareil, c'est de s'engager dans une démarche qui incite les gens à dire que c'est «un peu différent».

Si vous prenez un petit risque, pas un risque avec un R majuscule, en faisant quelque chose qui semble un peu différent de ce qu'on a normalement l'impression que vous faites, vous en retirez un énorme avantage pour votre entreprise ou pour l'institution que vous représentez. Cet avantage peut être une amélioration de votre image, une augmentation de votre part de marché ou du volume de vos ventes ou encore un changement de l'opinion publique.

Les résultats de nos recherches sont absolument catégoriques là-dessus. Les Canadiens s'attendent à ce que les entreprises privées, le gouvernement, les professionnels des soins de santé et des organisations communautaires se mettent au travail. J'ai l'impression que les Canadiens mettent les gouvernements au premier rang des institutions qui devraient intervenir. Ils ne s'attendent pas à ce que General Motors règle le problème du VIH et du sida, mais ils estiment qu'il devrait y avoir des installations de soins de santé et de recherche subventionnées par des deniers publics et que les gouvernements devraient contribuer aux programmes d'éducation, de prévention et de soins.

M. Culbert: Monsieur Fremes, j'imagine qu'au fond, il fallait qu'il y ait quelqu'un dans votre compagnie qui a subitement compris et qui s'est dit «nous allons être optimistes sur cette question, nous allons nous lancer dans la partie». Je n'ai pas l'intention de vous soumettre à un contre-interrogatoire pour savoir de qui il s'agissait ou à quel point c'était un dirigeant clé de votre entreprise, mais ce serait de toute évidence la même chose dans n'importe quelle compagnie. Il a fallu que quelqu'un prenne la décision.

De notre point de vue, j'imagine que nous sommes ravis d'entendre les nouvelles encourageantes que vous nous donnez aujourd'hui, comparativement aux paroles plus pessimistes que bien des groupes nous ont adressées en nous relatant les difficultés qu'ils avaient éprouvées. Je suppose que c'est pour ça que j'en parle. S'il y a un autre moyen - vous y avez fait allusion vous-même grâce auquel tous les paliers de gouvernement et le secteur privé pourraient conclure un partenariat qui leur permettrait de collaborer pour atteindre notre objectif commun, vaincre cette terrible maladie, je pense que nous serons les champions de tous les habitants du pays.

Je ne voudrais pas laisser entendre que ce sont les grandes entreprises privées du Canada, que ce soit Molson ou une autre grande société, qui ont l'entière responsabilité de cette démarche. Je ne veux pas non plus laisser entendre que cette responsabilité doit être assumée par les gouvernements, à un palier ou à un autre, mais bien que nous avons tous ensemble une certaine responsabilité de relever avec optimisme le défi que nous lance cette maladie et de contribuer à la vaincre. D'après vos succès, vous pouvez peut-être nous donner des conseils en nous disant comment établir des partenariats à tous les niveaux et rejoindre tous les partenaires du monde corporatif au Canada car je crois que ce serait une possibilité intéressante.

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Le président: Avant que nous ne fassions un deuxième tour très rapide, j'ai deux petites questions à vous poser, monsieur Fremes.

Y a-t-il eu des réactions négatives des consommateurs envers les brasseries Molson parce qu'elles avaient embrassé la cause du VIH et du sida? Deuxièmement, pensez-vous qu'à cause des images, des préjugés et des stéréotypes, les entreprises à qui vous présentez votre marketing pour le sida hésitent à être associées à une certaine orientation sexuelle et que c'est peut-être pour cette raison qu'elles ne veulent pas être nommées ou qu'elles ne veulent pas participer à la lutte contre le sida? Ou pensez-vous qu'il y a maintenant une amélioration dans ces entreprises?

M. Fremes: Pour ce qui est de votre première question sur les réactions négatives des consommateurs, la réponse est oui. Mais je dois vous expliquer dans quel contexte cela s'inscrit.

Nous sommes très connus sur le marché canadien et il y a toujours une part de réaction négative des consommateurs à l'égard de ce que nous faisons. Il y a des gens qui trouvent que nous ne devrions pas commanditer le hockey. Certains estiment que nous ne devrions pas faire de publicité à la télévision et ils nous écrivent pour nous le dire. D'autres encore considèrent que nous n'avons pas à commanditer les sports automobiles et ils nous le disent. D'autres encore nous écrivent pour nous dire que notre publicité à la télévision cible trop les jeunes et la jeunesse.

Comme nous sommes très actifs sur le marché et très sensibles aux consommateurs, nous sommes toujours à l'affût de l'opinion des consommateurs et nous les écoutons toujours. Il est fréquent que nous changions notre façon de faire à la suite des réactions des consommateurs. Nous ne réussissons pas toujours à 100 p. 100. Autrement, il nous suffirait de couper nos téléphones et de ne pas répondre à notre courrier.

Cependant, sur ce point, je dois dire que l'on peut compter sur les doigts d'une seule main le nombre de lettres, de réactions et d'appels téléphoniques négatifs que nous avons reçus à ce propos au cours des sept dernières années. C'est infime.

Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à votre deuxième question parce que vous me demandez de me prononcer au nom de l'ensemble des entreprises canadiennes et je ne peux pas le faire. Je crois que la Chambre de commerce du Canada ou le Conseil canadien des chefs d'entreprise, qui représentent mieux que moi le point de vue des entreprises à l'échelle nationale, pourraient mieux vous dire si l'orientation sexuelle ou les attitudes à propos de l'orientation sexuelle peuvent être un élément dissuasif qui les fait hésiter à participer, mais je ne peux pas vraiment vous répondre.

[Français]

M. Ménard: Je vais vous poser une question égoïste et territoriale. Est-ce que, dans vos politiques d'implication et de redistribution, vous tenez compte de certains impératifs géographiques, du genre d'essayer d'avoir une implication dans chacune des provinces, ou essayez-vous plutôt d'avoir des implication locales? J'ai vu dans vos documents de promotion que vous parliez beaucoup de Montréal, de Toronto. Essayez-vous plutôt d'aller du côté de villes où il y a un plus grand contingent de personnes atteintes?

Deuxièmement, vous estimez dans vos résultats que vos diverses implications - spectacles, marches, etc. - ont contribué à amasser, si j'ai bien compris, quatre millions de dollars. Est-ce que ce serait indiscret - et vous pouvez compter sur mon entière discrétion comme les membres du Comité le savent - de vous demander ce que cela vous a demandé en investissements directs, comme citoyen corporatif?

[Traduction]

M. Fremes: En réponse à votre première question, je dirais que nous avons commencé ces activités à Toronto parce que c'est là que se trouve notre siège social. Tout a commencé là parce que l'on est venu nous voir au siège. Les organisations de lutte contre le sida ont un grand nombre d'activités là - Dancers for Life, Red Hot Nights et l'une des marches les plus connues et les plus couronnées de succès, Laughing Matters. Beaucoup des organisations qui ont demandé à Molson de les aider dans leur marketing et leurs levées de fonds étaient basées à Toronto. Il y a donc eu une certaine corrélation entre la base des activités au niveau local et notre siège social. C'est pour cela que le partenariat a commencé là-bas.

.1650

Pour répondre à la deuxième partie de votre question, en ce qui concerne les activités communautaires, nous concentrons plutôt nos efforts dans les régions où se trouvent nos brasseries. Nous sommes présents à Vancouver, Montréal, Toronto et Halifax. Nous sommes également actifs dans des endroits où nous avons des bureaux de vente ou une certaine présence, et c'est là que nous concentrons nos efforts.

[Français]

M. Ménard: Je désire poser une dernière courte question qui fait partie d'un dossier qui me préoccupe beaucoup. Je ne sais pas si vous avez la réponse. Est-ce que la Molson, comme citoyen corporatif, dans ses rapports avec ses employés, reconnaît, dans ses assurances privées ou d'autre manière, les conjoints de même sexe?

M. Fremes: Pas encore.

M. Ménard: Mais cela va venir.

M. Fremes: Je ne le sais pas.

[Traduction]

Mme Ur (Lambton - Middlesex): Merci de votre exposé. Je ne veux pas avoir l'air de ne penser qu'à l'argent, mais j'ai quelques questions à vous poser. Avez-vous dans votre société des chiffres à nous donner sur le pourcentage des dons versés au sida - je sais que vous avez dit quatre millions - par rapport aux autres organismes de bienfaisance auxquels Molson fait des dons?

Deuxièmement, vous savez peut-être qu'à la suite des coupures budgétaires au gouvernement, les subventions dans le domaine sportif ont beaucoup diminué ou ont été tout à fait supprimées. Dans ces conditions, je voudrais savoir si vous envisageriez de modifier votre politique de subventions pour privilégier le sport plutôt que la santé?

Ma dernière question porte sur le résultat financier final. D'après vos déclarations, vous vous êtes lancés dans ces activités en raison de l'intérêt manifesté par l'entreprise et les actionnaires. En entendant cette déclaration, je me demande si vos ventes ont augmenté depuis que vous avez commencé à travailler avec les groupes de lutte contre le sida?

M. Fremes: Pour ce qui est de votre question concernant les sommes allouées par l'entreprise au sida plutôt qu'aux autres organismes de bienfaisance, il m'est difficile de vous donner une réponse complète parce que ce sont les compagnies Molson, qui sont l'une de nos trois sociétés-mères - nous appartenons aux compagnies Molson, au Foster's Brewing Group Ltd. d'Australie, et au Miller Brewing Co. Inc. de Milwaukee - qui gèrent le fonds de bienfaisance de Molson, c'est-à-dire le fonds destiné aux dons de charité pour toutes les entreprises, dont Beaver, Diversey, Molson, etc. Donc, en résumé, je ne sais pas. Mais je peux me renseigner et vous donner la réponse plus tard.

Mme Ur: Je vous en serais reconnaissante.

M. Fremes: En ce qui concerne les sports par opposition à la santé, je crois que l'engagement pris par Molson à propos du VIH/SIDA commence à être mieux compris par les organisations de lutte contre le sida, certainement par les gouvernements, grâce à des tribunes comme celle-ci, tout au moins nous l'espérons, et par les autres grandes sociétés. Il n'est pas question de changer ou de reculer tant que c'est une question qui reste prioritaire pour nos consommateurs et nos employés. Quelles que soient les sommes que le gouvernement consacre au sport, je crois que nous avons pris un engagement très clair dans ce domaine.

Les ventes ont-elle augmenté? Il est difficile de dire si les ventes ont augmenté ou sont restées au même niveau. Quand on choisit un sujet aussi controversé que le VIH/SIDA, on veut avant tout être sûr que les ventes ne diminuent pas. Nous avons commencé par voir les réactions à nos activités de la part des clients et dans les établissements licenciés à Toronto et à surveiller les ventes.

Est-ce que les gens ont tendance à moins boire notre produit parce que nous collaborons avec «Dancers For Life» et que ça se fait dans un certain milieu à Toronto et parce que nous demandons aux consommateurs d'acheter les marques Molson pour contribuer à la cause et lever des fonds? Nous avons tout de suite constaté que ces activités avaient très peu d'influence positive ou négative sur les ventes.

Graduellement, avec le temps, si on trouve la bonne combinaison, on peut obtenir une certaine fidélité du consommateur, pas uniquement en raison du VIH/SIDA mais du fait que l'on s'attaque à une question qui est vraiment importante et qui intéresse le consommateur.

M. Jackson (Bruce - Grey): Monsieur Fremes, vous êtes le bienvenu au Comité. Nous sommes très heureux de vous accueillir.

.1655

Je ne vais pas vous soumettre à un interrogatoire serré pour savoir comment vous êtes arrivés à cela. Cela nous touche tous de différentes façons. J'ai dit à mes collègues que l'abstinence pourrait être une solution, mais il y a aussi tous ceux qui sont contaminés à la suite de transfusions sanguines ou pour toutes sortes de raisons. Chaque fois qu'apparaît une maladie comme celle-là, il faut pratiquement partir en guerre pour réussir à la faire disparaître.

J'ai quelques questions à vous poser. Je n'ai pas très bien compris à qui vous versiez des fonds. Selon quels critères accordez-vous des fonds? Faites-vous des évaluations et essayez-vous de savoir si les programmes donnent les résultats escomptés? Les programmes permettent-ils vraiment aux gens de vivre plus longtemps? Sont-ils vraiment utiles, et si oui, de quelle façon?

M. Fremes: Merci beaucoup de ces commentaires. En fait, c'est d'après les travaux de recherche effectués que nous attribuons nos fonds. Si l'on demande au consommateur si Molson a raison de défendre la cause du sida, il répond à juste titre que Molson devrait lever des fonds ou jouer un rôle utile, mais que la compagnie ne sait peut-être pas comment procéder pour que l'argent soit donné à ceux qui en ont vraiment besoin.

Pour les consommateurs, et c'est vrai, nous sommes une brasserie. Nous ne sommes pas une organisation communautaire ou un organisme de santé publique. C'est pourquoi, pour que le programme de marketing et de relations communautaires soit crédible, il faut un partenariat avec une organisation communautaire locale contre le sida. Nous avons ainsi plusieurs partenaires: Casey House, CANFAR, le «AIDS Committee» de Toronto, le «AIDS Committee» de Vancouver, et le «Pacific AIDS Resource Centre» - dans tout le pays.

Nous avons parlé tout à l'heure des nombreuses organisations qui participent à cet effort. Notre porte est ouverte à toutes, parce qu'elles travaillent toutes sous un angle différent. Certaines s'occupent plutôt des soins, d'autres de l'éducation et de la prévention, d'autres encore décident de convaincre les entreprises et les gouvernements de donner la priorité à cette lutte - ce sont presque des lobbyistes et des militants. Nous estimons qu'elles apportent toute une contribution utile et c'est pourquoi notre porte leur est ouverte.

Le président: Nous avons une dernière question. Madame Bridgman, s'il vous plaît.

Mme Bridgman: J'ai une brève question à vous poser et c'est plutôt à titre d'information, parce que je ne connais pas le domaine du marketing.

J'ai vu dans la présentation Kumbaya que l'on mentionnait Molson à trois reprises, chaque fois en rapport avec les fonds, en parlant par exemple de l'aide apportée à la manifestation et du chèque. Je sais que la perception est très importante mais ici, on a l'impression qu'il s'agit d'une levée de fonds. Pensez-vous qu'il serait possible que l'on parle plus souvent de Molson, mais plutôt à propos d'éducation, en donnant des chiffres, en parlant de la disparition d'un mythe, etc.? Pourquoi parle-t-on surtout des activités de levées de fonds? Pourriez-vous aussi faire une certaine place à l'éducation?

M. Fremes: On accorde en fait beaucoup d'importance à l'éducation. J'ai dit que c'était un extrait de deux minutes d'une émission de télévision de cinq heures. Je devrais vous donner l'enregistrement - et je serais très heureux de le faire - de toutes les annonces de service public qui ont été présentées pendant les cinq heures et qui sont également les fruits des efforts des organisateurs.

Ils sont allés voir les principaux réalisateurs et producteurs et créateurs canadiens pour leur demander de réaliser, à leurs frais, des annonces de service public, dans un but d'éducation et de prévention. Il y en a eu une petite au sujet de l'Organisation mondiale de la santé, disant que toutes les 18 secondes, quelqu'un est contaminé, et qu'il y a 5 000 cas par jour, mais c'était plutôt des chiffres pour amener les gens à réagir. Il y en a d'autres qui portent plutôt sur la prévention et je pourrais vous les faire parvenir.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Fremes. C'était très intéressant. Je comprends maintenant pourquoi vous êtes le vice-président directeur, et vous avez sans doute fait du marketing auparavant. Vous nous avez beaucoup impressionnés.

[Français]

Merci beaucoup encore une fois. Je vous souhaite un bon retour à Toronto.

M. Fremes: Merci beaucoup.

Le président: On va faire une pause de deux minutes et ensuite siéger à huis clos.

[La séance se poursuit à huis clos]

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