[Enregistrement électronique]
Le mercredi 18 octobre 1995
[Français]
Le président: Bonjour, tout le monde. On va procéder à l'étude du projet de loi C-94, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse.
On me dit qu'un membre du Comité a l'intention d'invoquer le Règlement. Je lui laisse la parole. Monsieur Chatters.
[Traduction]
M. Chatters (Athabasca): Avant de commencer, il y a plusieurs points sur lesquels j'aimerais avoir un éclaircissement.
Tout d'abord, le projet de loi à l'étude a été présenté par la ministre de l'Environnement, et pourtant il a un impact direct sur plusieurs autres ministères, notamment le ministère des Ressources naturelles, Industrie Canada et Transports Canada. Les représentants de chacun de ces ministères ont-ils été invités à comparaître comme témoins? Ont-ils refusé de comparaître comme témoins? Ce sont les questions générales que je voulais poser à cet égard.
Deuxièmement, je crois comprendre qu'Ethyl Canada Inc. sera l'avant-dernier témoin à comparaître devant le Comité, suivi de l'Association internationale des fabricants d'automobiles du Canada. J'aimerais savoir pourquoi nous n'avons pas accédé à la demande qu'Ethyl avait présentée au président du Comité en vue de comparaître en dernier, étant donné que l'adoption de ce projet de loi aura un impact considérable sur Ethyl. En fait, cela signifiera la disparition de cette société au Canada et, par conséquent, des pertes d'emplois. Pourtant, on n'a pas accédé à la demande d'Ethyl de comparaître en dernier. Même si le projet de loi est rejeté, le pire qui puisse arriver aux fabricants internationaux d'automobiles, c'est qu'ils devront sans doute ajouter quelques lignes dans leurs manuels d'entretien des voitures.
Enfin, je crois comprendre que le président a reçu des lettres de quatre experts-conseils de l'extérieur qui demandaient à comparaître, soit Alison Pollack d'Environ; Fred Hochberg, de l'Université Harvard; Ken Crump, d'ICF Kaiser; et Joseph Zayad, de l'Université de Montréal. Je crois qu'il est important que le Comité puisse entendre les témoignages d'experts et d'autres témoins qu'Ethyl ou l'AFVA. Le président permettra-t-il à ces quatre témoins de comparaître devant le Comité?
Le président: Ce sont toutes d'assez bonnes questions et je vais tenter d'y répondre très brièvement.
Les ministères de l'Industrie et des Transports sont dirigés par un ministre qui est membre du Cabinet et qui a approuvé le projet de loi dont nous sommes saisis. Par conséquent, il est implicite que les ministres en question appuient ce projet de loi, étant donné que nous en sommes saisis aujourd'hui. Habituellement, il y a un ministre principal responsable du projet de loi qu'il propose et à ce moment-ci, nous n'estimons pas urgent d'entendre d'autres ministères sur cette question.
Quant à la demande d'Ethyl Canada, le greffier et moi-même en avons longuement discuté. Disons que le projet de loi à l'étude intéresse deux grands secteurs industriels. Vous en avez identifié un; l'autre est le secteur de l'automobile.
Pour être le plus équitables possible, comme les deux témoins voulaient comparaître en dernier et qu'il n'était pas possible d'accéder à la demande de chacun, nous avons décidé de les faire comparaître en même temps, soit le même matin, l'un après l'autre, dans la même pièce. Ainsi, aucun n'aurait un avantage par rapport à l'autre ce matin-là.
Cependant, l'un des deux devra témoigner en dernier - cela est inévitable. Nous nous sommes donc demandé s'il fallait les inviter à témoigner à la table en même temps ou l'un après l'autre.
Nous avons résolu la question très rapidement, monsieur Chatters, car les délégations sont trop grandes pour que nous puissions les recevoir toutes les deux ensemble à la table. Donc, lorsque le jour viendra, les deux groupes comparaîtront le jeudi matin, et je les inviterai à tirer au hasard pour déterminer qui témoignera en dernier. Nous aurons donc été le plus équitables possible à leur égard.
Enfin, pour ce qui est des experts, à ce moment-ci, il nous semble prématuré de consulter des experts dans le domaine médical et de la santé sans entendre également toute une série d'experts sur les autres aspects de la question. Par conséquent, je réserve ma décision sur cette question et je consulterai sans doute un plus petit groupe - disons le comité directeur de notre Comité - à une date ultérieure si nous constatons qu'il est nécessaire d'explorer davantage la question.
Soyez assuré que je tiendrai compte de vos observations. Je vous remercie d'avoir soulevé la question.
M. Chatters: Pour revenir au premier point - et j'ai trouvé vos réponses très acceptables - comme l'Environnement est le ministère responsable, et que pour cette raison vous dites que les autres ministères ne doivent pas comparaître, alors je me demande pourquoi Santé Canada figure sur la liste des témoins.
Le président: C'est à la demande de votre collègue M. Forseth. Autrement, il n'aurait pas été inclus.
M. Chatters: Très bien. Merci, monsieur le président.
[Français]
Le président: Monsieur Pomerleau, voulez-vous invoquer le Règlement?
M. Pomerleau (Anjou - Rivière-des-Prairies): Non.
[Traduction]
Le président: Avant de commencer cette série d'audiences - et je m'en excuse auprès des témoins - j'aimerais faire quelques observations sur la nature du projet de loi dont nous sommes saisis. Il me semble qu'il est justifié ici de faire quelques observations qui vont au-delà du contenu du projet de loi.
À mon avis, il s'agit d'un projet de loi qui touche à des questions de progrès technique et de protection du consommateur. C'est un projet de loi qui traite du fonctionnement quotidien de l'automobile de millions de Canadiens, et qui concerne la possibilité de pannes, ou de pannes prématurées, des systèmes antipollution des nouveaux modèles. Si c'était le cas, de telles pannes pourraient représenter des coûts de réparation inutiles.
Il s'agit d'un projet de loi pour lequel les données et les analyses ne proviennent que d'une société qui fabrique un produit et d'une autre qui en fabrique un autre. C'est un alignement inhabituel des pouvoirs.
Le projet de loi nous a été présenté parce qu'il n'y a aucun point de vue indépendant sur la question, c'est-à-dire qu'aucune étude indépendante n'a été faite, pour trancher la question entre les deux parties. C'est pourquoi nous sommes saisis de ce projet de loi. Le gouvernement exerce donc un jugement indépendant au nom du public, n'ayant aucun autre recours, et après de longues consultations avec les parties concernées pour essayer d'en arriver à une solution... Vient un moment où il faut tenir compte de l'intérêt public, et c'est ce que l'on tente de faire dans ce projet de loi.
Nous ne voulons certainement pas d'une réduction de la couverture de la garantie des automobiles canadiennes, et nous ne voudrions pas exposer les propriétaires au risque de coûts de réparation accrus. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit également d'une question de protection du consommateur.
Cela dit, nous sommes tout à fait conscients du fait que nous avons une tâche difficile devant nous, mais nous allons l'accomplir de notre mieux, guidés par le fait que nous devons prendre à coeur l'intérêt du public.
Si je me trompe dans mon analyse, j'invite mes collègues à me faire part de leurs observations lors de séances ultérieures.
Entre temps, je souhaite la bienvenue aux délégations des deux ministères que nous accueillons aujourd'hui. Je demanderais au porte-parole de la délégation d'Environnement Canada, M. Clarke, de nous présenter ses collègues, et à quelqu'un d'autre de présenter l'autre groupe. Je vous invite à nous faire part de vos points de vue.
M. Tony Clarke (sous-ministre adjoint, Service de la protection de l'environnement, ministère de l'Environnement): Merci, monsieur le président. Je suis accompagné aujourd'hui d'Ellen Fry, avocate générale; de Frank Vena, chef de la Division des systèmes de transport; et de Rod Raphael, de Santé Canada.
Je n'ai pas de déclaration liminaire, monsieur le président, mais j'aimerais faire quelques observations. Je ne répéterai pas ce que vous avez dit. Je me contenterai tout simplement de dire que la question du MMT fait l'objet de discussions depuis le début des années 1980, discussions qui se sont intensifiées lors des négociations entre le Canada et les États-Unis et les diverses parties au début des années 1990. Elles se sont intensifiées dans une large mesure parce que les modèles 1996 et les nouveaux systèmes de diagnostic intégrés allaient être introduits.
En ce qui concerne l'Association des fabricants de véhicules automobiles, il était très clair qu'ils estimaient avoir des preuves démontrant que les systèmes de diagnostic intégrés allaient être affectés par le MMT. Ils nous l'ont dit très clairement. Ils nous ont fait part d'études à cet égard et nous ont invités à des colloques sur la question. Ils ont en outre dit qu'ils étaient très inquiets des diverses responsabilités qui surgiraient, des nouveaux programmes de garanties, à cause de l'utilisation du MMT. Ils étaient si inquiets qu'ils ont parlé du fait qu'ils seraient peut-être même obligés de débrancher cette nouvelle technologie. Cela n'était pas terriblement satisfaisant pour Environnement Canada, car nous pensions que nous devrions avoir la même technologie qu'aux États-Unis, en matière de protection environnementale. Les systèmes de diagnostic intégrés de deuxième génération sont en fait l'équivalent des programmes d'entretien et d'inspection des automobiles. C'est donc une question qui, de ce point de vue, nous inquiétait considérablement.
D'un autre côté, Ethyl Canada a fait beaucoup de travail et a été tout aussi claire. Les études faites par Ethyl démontrent que ce produit n'affecte pas les systèmes de diagnostic intégrés de deuxième génération et qu'en fait, ce produit est même bon pour l'environnement en ce sens qu'il réduit les émissions d'oxyde d'azote dans les gaz d'échappement.
Pendant deux ans, nous avons tenté de réunir les deux parties, et elles se sont donc réunies pour essayer de trouver une solution à ce problème. Nous pensions que ce serait bien si le gouvernement pouvait laisser ces deux groupes industriels résoudre leurs problèmes sans que le gouvernement n'ait à s'en mêler. Cela ne s'est certainement pas produit, et le temps a finalement manqué pour ce qui est du modèle 1996.
Nous avons confié à plusieurs experts indépendants du secteur privé le soin d'examiner les analyses que nous ont fait parvenir Ethyl ainsi que plusieurs fabricants de véhicules automobiles; ils semblent se ranger, dans l'ensemble, au point de vue de l'AFVA, tout en disant plutôt pécher par excès de prudence.
De ce point de vue également, on a réclamé que soit faite une étude indépendante et constitué un groupe indépendant. Nous n'avons pas vu l'utilité de ce dernier et d'ailleurs, en toute franchise, le temps faisait défaut.
Tout cela a débouché sur l'introduction d'un projet de loi et c'est ce qui nous amène ici aujourd'hui.
Je vous ai donné un très bref rappel de la situation. Si vous tenez à ce que nous mettions en relief les points saillants du projet de loi, nous pouvons le faire très rapidement, ou nous pouvons nous contenter de répondre aux questions des membres du Comité.
Le président: Y a-t-il une intervention de Santé Canada?
M. Rod Raphael (chef, Division de la surveillance et des critères, Santé Canada): Santé Canada, comme le disait M. Clark, a participé à titre de consultant auprès des divers ministères examinant la question du MMT. En 1994, nous avons publié notre évaluation la plus récente de la toxicité et de l'exposition aux produits du manganèse provenant du MMT utilisé dans l'essence. Le Comité a reçu, si je ne me trompe, un exemplaire de ce rapport ainsi que des documents de synthèse.
Nous aussi sommes à votre disposition pour répondre à vos questions. Nous n'avons pas d'autre déclaration à faire.
Le président: Pour les députés qui sont nouveaux à ce Comité, pourquoi ne pas passer brièvement en revue les points saillants du projet de loi?
[Français]
Mme Ellen Fry (avocate générale, Services juridiques, ministère de la Justice): Comme vous le savez, le but du projet de loi est de permettre le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales du MMT ou de toute substance contenant du MMT lorsque celle-ci est destinée à être ajoutée à de l'essence sans plomb.
[Traduction]
L'essentiel du projet de loi se trouve à l'article 4, qui interdit de se livrer au commerce interprovincial ou à l'importation à des fins commerciales d'une substance qui fait l'objet du projet de loi, sauf autorisation expresse du ministre. À part l'article 4, le reste du projet de loi contient, pour l'essentiel, des dispositions techniques visant à donner effet à cet article qui, comme je le disais, est le coeur même du projet de loi.
Que comprend le projet de loi? Il concerne le MMT et toute substance à base de ce produit. Le cas échéant, il est possible, par décret en conseil, d'élargir la loi pour y inclure d'autres substances à base de manganèse, encore qu'à l'heure actuelle il ne semble pas que ce besoin se fasse sentir.
L'article 11 donne au ministre le pouvoir d'obtenir, de tierces parties, l'information pertinente pour l'aider à prendre une décision concernant l'élargissement de la loi et son application éventuelle à d'autres substances.
Est également prévue la possibilité d'obtenir une dérogation à l'application de ce projet de loi à celui qui voudrait importer du MMT ou en faire commerce interprovincial, si cette personne est en mesure de prouver au ministre responsable que le MMT, dans ce cas particulier, ne sera pas utilisé dans l'essence sans plomb. Diverses dispositions, figurant aux articles 5 à 10 du projet de loi, énoncent les règles régissant les autorisations, conditions, dépôts d'une caution, formalités de déclaration, etc.
Après l'adoption de la loi, toute personne qui commettra une infraction à celle-ci pourra être poursuivie en justice. Toutes les dispositions d'application se sont inspirées, dans toute la mesure du possible, de la LCPE, de sorte qu'il n'y a aucune innovation à cet égard.
Quant aux sanctions maximales prévues au projet de loi, qui sont équivalentes à celles de la LCPE, elles comprennent, pour l'essentiel, trois catégories. Pour le commerce interprovincial ou l'importation illicite de MMT ou d'une substance à usage contrôlé une amende maximale de 300 000$ et/ou un emprisonnement maximal de six mois sont prévus si l'infraction a été constatée par procédure sommaire; un maximum d'un million de dollars et/ou de trois ans d'emprisonnement s'il y a mise en accusation, procédure plus grave. Quiconque, par ailleurs, transmet au ministre des renseignements faux ou trompeurs est passible d'une peine maximale de cinq ans par mise en accusation, au lieu de trois ans, comme je le mentionnais dans la précédente catégorie de sanctions. Toute autre infraction à cette loi entraîne une amende de 200 000$ et/ou un emprisonnement de six mois et ferait l'objet de poursuites pénales de moindre gravité, c'est-à-dire par procédure sommaire.
Il est également prévu, de même que dans la LCPE, que si une personne est reconnue coupable d'une infraction aux termes de cette loi, le tribunal peut rendre une ordonnance imposant une indemnité supplémentaire à la sanction de base. C'est ainsi que si des bénéfices ou autres avantages pécuniaires ont été réalisés par suite de l'infraction à la loi, le tribunal peut augmenter l'amende en conséquence. Le tribunal peut ordonner au contrevenant de s'abstenir de tout acte risquant d'entraîner la récidive. Il peut également ordonner de prendre diverses mesures de réparation, ou ordonner la publication des faits liés à la perpétration de l'infraction commise aux termes de la loi, etc..
De même que dans la LCPE, le projet de loi C-94 prévoit que lorsque des tierces parties subissent des préjudices ou dommages à la suite de l'infraction à la loi ceux-ci peuvent intenter un procès aux contrevenants et en recevoir des dommages-intérêts.
Le reste de la loi consiste essentiellement en ce que j'appellerais des pouvoirs d'application, à savoir les pouvoirs que confère la loi aux inspecteurs, le fait que les directeurs d'entreprises, dans certaines circonstances, peuvent être poursuivis pour des infractions commises par leur société, etc. Ces mesures figurent aux articles 12 à 19 et, là encore, dans la mesure où elles étaient pertinentes, elles ont simplement été tirées de la LCPE.
Je vous ai fait là un résumé rapide du projet de loi, mais je me ferai un plaisir de répondre, le cas échéant, à des questions plus détaillées. Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie.
Après cet exposé,
[Français]
monsieur Pomerleau, voulez-vous poser vos questions?
M. Pomerleau: Une seule question pour commencer. Monsieur Clarke, vous avez dit avoir rencontré la compagnie Ethyl Canada Inc. et également les fabricants d'automobiles. Avez-vous aussi rencontré les compagnies pétrolières et, si oui, quelle a été leur position sur le MMT?
[Traduction]
M. Clarke: Nous avons rencontré à plusieurs reprises les compagnies pétrolières, Ethyl et l'AFVA. Nous avons rencontré tous ceux que nous avions à rencontrer et nous avons écouté toutes les parties.
Les compagnies pétrolières tiennent, pour l'essentiel, à continuer à mettre du MMT dans l'essence, parce qu'elles considèrent que c'est un bon remonteur d'octane, qui ne cause pas beaucoup de dégâts à l'environnement. Elles ont opposé une vive résistance à l'idée de retirer le MMT de l'essence.
[Français]
M. Pomerleau: Est-ce que les pétrolières ont laissé entendre que l'abolition du MMT et son remplacement par un autre additif pourrait causer une augmentation des coûts de production du pétrole?
[Traduction]
M. Clarke: Les compagnies pétrolières pensent que l'utilisation de MMT est l'option la moins coûteuse et sont contre le remplacement de ce produit. Est-ce là la question que vous me posiez?
M. Pomerleau: Oui, c'est bien cela.
M. Clarke: Le MMT était l'additif auquel elles donnaient leur préférence.
M. Frank Vena (chef, Division des systèmes de transport, Prévention de la pollution aérienne, ministère de l'Environnement): Permettez-moi d'ajouter quelques mots, monsieur le président.
Les compagnies pétrolières ont fait savoir que le retrait du MMT entraînerait des coûts. Les chiffres présentés par le secteur de l'automobile - qui d'ailleurs ne sont toujours pas encore définitifs - donnent à penser qu'il pourrait en coûter à ce secteur jusqu'à 83 millions de dollars.
Cela se traduirait... Le coût du remplacement du MMT s'établirait entre 50 millions de dollars et 83 millions de dollars, ce qui représenterait un dixième de cent à un quart de cent d'augmentation du coût de production d'un litre d'essence.
Nous ne savons naturellement pas comment cela se répercuterait sur la vente au détail; il s'agit là simplement du coût de production.
M. Pomerleau: Mais il y aura une augmentation.
M. Vena: Il y aura effectivement une augmentation, et si celle-ci correspond à l'augmentation des coûts de production, le consommateur risque de payer deux ou trois dollars de plus par an pour sa consommation d'essence.
Là encore, nous soulignons que nous ignorons comment cela se répercutera sur la vente au détail.
Le président: Madame Kraft Sloan.
Mme Kraft Sloan (York - Simcoe): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je voudrais simplement que vous précisiez ce que vous venez de dire. Vous disiez que le consommateur paierait deux ou trois dollars de plus par an pour son essence, mais combien lui en coûte-t-il pour les problèmes que lui cause son automobile?
M. Vena: Cela dépend, de toute évidence, des conditions des garanties. Certains fabricants de véhicules automobiles craignent les risques associés à une augmentation des coûts de garantie. Si le MMT cause des dégâts à leurs systèmes de diagnostic intégrés, à leurs détecteurs d'oxygène, commme l'ont prétendu certains fabricants... La question des bougies d'allumage a également été soulevée. Ces coûts ont effectivement leur importance. Quand nous allons chez un concessionnaire nous savons tous ce que représentent certains coûts et ce qu'ils pourraient signifier.
C'est évidemment là le revers de la médaille. Je voulais simplement attirer votre attention sur ce que représenterait ce coût en essence pour quelqu'un qui parcourt 10 000 milles par an, si l'augmentation était d'un dixième de cent à un quart de cent, mais n'empêche que l'autre aspect de la question subsiste.
Mme Kraft Sloan: Mais cet aspect est beaucoup plus coûteux que deux ou trois dollars.
M. Vena: Cela dépend de certains des coûts de garantie. Certains fabricants de véhicules automobiles seraient mieux à même de vous donner ces renseignements généraux.
Mme Kraft Sloan: Quels autres produits, à part le MMT, peut-on utiliser comme remonteur d'octane dans l'essence sans plomb?
M. Vena: Le secteur des carburants a plusieurs solutions de rechange: Il peut raffiner davantage le produit; il pourrait produire plus de produits d'alcoylation, il pourrait encore choisir d'autres catégories de produits. C'est ainsi qu'il y a des substances, sur le marché, qui servent de remonteur d'octane. Certaines d'entre elles sont également des composés contenant de l'oxygène, comme par exemple les éthers. L'un de ces produits communément utilisés aux États-Unis est le méthoxy-2 isobutane qui lui aussi a des propriétés de remonteur d'octane. On pourrait également adopter l'éthanol, alcool contenant de l'oxygène.
Ce sont donc plusieurs solutions qui s'offrent au secteur des carburants pour atteindre la teneur en octane.
Mme Kraft Sloan: Si je vous ai bien compris, on peut changer l'essence quand on la raffine, ou on peut à un stade ultérieur, y ajouter un remonteur d'octane, n'est-ce pas?
M. Vena: C'est exact, vous pouvez soit modifier le processus, soit ajouter un produit après la transformation. Vous pouvez ajouter des composés ou des substances qui amènent l'octane au niveau voulu selon qu'il s'agit d'essence ordinaire, extra ou super.
Mme Kraft Sloan: Queles sont les coûts respectifs, selon que le fabricant décide de modifier le processus au début, ou d'ajouter un produit par la suite? L'un de ces procédés est-il plus coûteux que l'autre?
M. Vena: Cela dépend, bien entendu, du processus de raffinage, de la façon dont le fabricant dispose ses cornues et ses alambics, autrement dit ses schémas de raffinage pour fabriquer l'essence. Les chiffres que nous ont fournis les industries du raffinage tenaient compte de cet éventail d'options.
Mme Kraft Sloan: Mais qu'est-ce qui serait meilleur marché, changer le processus à la source, ou ajouter un produit par la suite?
M. Vena: Les représentants de ce secteur seraient mieux placés pour vous dire exactement comment... Au Canada, on utilise beaucoup le MMT, parce que c'est un remonteur d'octane bon marché, c'est là sa propriété la plus précieuse. Il est utilisé par la plupart des industries du raffinage. Lorsqu'on raffine le carburant, cela dépend du brut qu'on a et de la façon dont on fait le raffinage à différents moments de l'année. Il est parfois plus rentable d'en mettre un peu moins. Cela dépend de la façon dont chaque raffinerie fonctionne.
Mme Kraft Sloan: Quelles sont les conséquences, pour l'environnement, d'une modification du raffinage ou du produit à la source ou de l'ajout de produits par la suite? Peut-on faire des généralisations à ce sujet? Est-ce possible?
M. Vena: C'est là une des préoccupations qui ont été exprimées, monsieur le président: si on supprime le MMT, que devront alors faire les raffineurs? S'il leur faut procéder à un raffinage additionnel, ils devront peut-être alors brûler davantage de combustible ou faire d'autres choses qui pourraient augmenter la pollution produite par les raffineries. Essentiellement, c'est un peu ça qui se produit.
Resituons-nous dans le contexte: si nous parlons d'augmentations d'émissions des oxydes d'azote, par exemple, lors de la combustion du combustible à la raffinerie, si ma mémoire est bonne, une étude commandée par Ethyl à Stanley Associates Inc. indique que les émissions de NOx pourraient augmenter de moins de 1 p. 100. Dans le cas du CO2, l'un des principaux gaz contribuant à l'effet de serre, il s'agit là d'une augmentation inférieure à un quart de 1/100 de 1 p. 100.
Par conséquent, bien qu'il pourrait y avoir raffinage additionnel créant une augmentation de la pollution à la source ponctuelle, à l'échelle nationale, il s'agirait d'augmentations minuscules. Je crois qu'on trouve des données à ce sujet dans le rapport. C'est un rapport de Stanley pour Ethyl, société qui voulait savoir si cela entraînerait une hausse de la pollution.
Mme Kraft Sloan: Je crois savoir que le benzène et le toluène peuvent être ajoutés à la source, n'est-ce pas?
M. Vena: Le benzène et le toluène font partie du procédé. ...[Inaudible - Éditeur] ...ce n'est pas le benzène lui-même, mais un groupe de composés qu'on appelle les hydrocarbures aromatiques et parmi lesquels on trouve le benzène.
Mme Kraft Sloan: Alors, on procède au raffinage, mais on ne supprime pas ces substances. On les y laisse, n'est-ce pas?
M. Vena: Ces substances sont déjà dans le combustible. Le raffinage sert en partie à augmenter la teneur en aromatiques. D'ailleurs, l'un de ces aromatiques, le benzène, vient d'être déclaré toxique aux termes de la LCPE. La ministre de l'Environnement a annoncé que nous élaborerons un règlement nous permettant de nous assurer que le niveau de benzène dans l'essence ne dépasse pas 1 p. 100 en moyenne à l'échelle du pays.
Nous étions préoccupés par l'augmentation des aromatiques pour diverses raisons, et nous contrôlerons cette augmentation grâce à ce règlement sur le benzène.
Mme Kraft Sloan: Les aromatiques vont-ils toujours continuer d'augmenter ou seront-ils toujours présents?
M. Vena: Les aromatiques constituent l'un des principaux éléments de l'essence, oui.
Mme Kraft Sloan: Mais est-ce que l'élimination du MMT ne nous permettra pas de freiner l'augmentation des aromatiques?
M. Vena: La présence des aromatiques et du benzène sera limitée par le règlement qui est en voie d'élaboration. Si vous me demandez si la teneur en aromatiques augmentera par suite de l'élimination du MMT, la réponse est non. Nous nous assurerons que les niveaux de benzène ne dépasseront pas 1 p. 100 par volume, ce qui constitue une réduction par rapport aux niveaux actuels, et que les aromatiques ne dépassent pas un niveau moyen. Par conséquent, l'élimination du MMT n'entraînera pas d'augmentation des constituants toxiques des rejets de benzène, qui sont aussi des composants de l'octane.
Mme Kraft Sloan: Merci beaucoup.
Le président: À cette étape-ci, nous demandons habituellement aux députés du Parti réformiste s'ils ont des questions.
M. Chatters: Oui.
Le président: Je vous en prie, allez-y. Vous serez suivi de M. Steckle.
M. Chatters: En fait, j'ai plusieurs questions à poser. Je commencerai par m'adresser aux représentants de Santé Canada à qui on ne s'est pas encore adressé.
Une étude parue le 6 décembre 1994 et intitulée Évaluation du risque concernant les produits de combustion de Méthylcyclopentadiényl Manganèse Tricarbonyle (MMT) dans l'essence indique que les analyses démontrent que les produits de combustion du MMT dans l'essence ne constituent pas un risque accru pour la santé de la population canadienne. C'est à la page 69 du rapport. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
M. Raphael: Oui. Cette étude est fondée sur un examen des informations toxicologiques sur les oxydes de manganèse. Pour déterminer le risque que présente l'exposition à ces substances, nous avons utilisé des données provenant des stations de contrôle environnemental d'Environnement Canada et d'organismes provinciaux.
Sur la foi de ces informations, nous croyons pouvoir dire que cet énoncé est juste. Selon le niveau de référence qui est le même que celui qui a été calculé par la Environmental Protection Agency des États-Unis, les niveaux d'exposition au Canada sont bien inférieurs à ceux qui pourraient avoir des conséquences pour la santé. Voilà pourquoi nous avons fait cette déclaration.
M. Chatters: Merci.
Monsieur Clarke, vous nous avez dit avoir participé à des ateliers où on vous avait fait faire l'étude décrivant le problème qu'entraîne le MMT pour les systèmes de diagnostic intégrés. Ces études ont-elles été rendues publiques ou fournies à Ethyl Corp. pour qu'on puisse les étudier?
M. Clarke: Je n'en suis pas certain. Certains de ces rapports d'étude contiennent des informations confidentielles et il faudrait alors invoquer le droit à l'accès à l'information pour les obtenir.
En fait, la société Ethyl nous a demandé ces rapports. Nous les avons passé en revue et en avons tiré les informations qui n'étaient pas confidentielles. Par conséquent, les informations non confidentielles que contenaient ces rapports d'étude, à tout le moins, sont maintenant du domaine public. Les informations confidentielles n'ont pas été communiquées.
M. Chatters: D'accord. Pourriez-vous nous dire quel était le taux de défaillance des systèmes de diagnostic intégrés aux États-Unis, où il n'y a pas de MMT dans l'essence sans plomb, en comparaison du taux de défaillance au Canada?
M. Clarke: Je crois savoir qu'il y avait en effet des problèmes. M. Vena pourra vous en dire plus long.
M. Vena: Monsieur le président, aux États-Unis, la technologie existe depuis plusieurs années et est assez complexe. Je crois savoir que les systèmes de diagnostic intégrés ont causé des problèmes et ne fonctionnent pas comme ils le devraient.
On a dispensé plusieurs fabricants de l'obligation d'inclure un tel dispositif à leurs modèles. Toutefois, je me suis laissé dire que peu de dérogations avaient été accordées pour les modèles 1996. Il faudrait maintenant mener des études ponctuelles pour que les autorités acceptent de ne plus exiger de systèmes de diagnostic intégrés à bord des voitures.
Ces systèmes ne sont pas très courants au Canada pour l'instant. On verra les premiers en 1996. Les données dont nous disposons sur les systèmes de diagnostic intégrés sont très limitées. Quant au taux de défaillance lors de l'usage de l'essence contenant du MMT par rapport à celle n'en contenant pas, nous avons très peu de données d'études menées sur le terrain, tout simplement parce qu'il s'agit de systèmes tout nouveaux.
M. Chatters: Pouvez-vous nous donner des données comparatives sur les taux de défaillance en présence de MMT et en l'absence de cette substance?
M. Vena: Certaines études incluent des données expérimentales dont certaines font partie des données dont nous disposons. Je crois que ces données ont été transmises à ceux qui ont fait une demande d'accès à l'information, mais nous n'avons pas de données sur l'utilisation pratique de systèmes de diagnostic intégrés pour l'essence avec MMT et sans MMT, parce que ces systèmes sont encore très rares au Canada.
M. Chatters: Mais il serait bon que vous communiquiez les données que vous avez. Comment se comparent-elles? Comment le taux de défaillance des États-Unis se compare-t-il à celui du Canada?
M. Vena: Je n'ai qu'une petite partie des données qui ont été fournies au ministère. Nous avons constaté qu'un nombre très limité d'essais avaient été effectués et que les données n'étaient toujours pas concluantes. C'est ce que nous avons d'ailleurs tenté de souligner. Nous n'avons tout simplement pas suffisamment de données pour pouvoir prendre une décision définitive. Certaines des données que nous avons nous ont donné des raisons de nous inquiéter et c'est pourquoi nous avons fait cette déclaration.
M. Chatters: Pourquoi alors vous opposez-vous à toute autre étude indépendante sur le sujet?
M. Vena: À l'époque, nous savions que ces systèmes feraient leur apparition au Canada et nous n'avions pas les moyens d'en faire plus. Ces systèmes existent maintenant au Canada. Nous estimons que ces systèmes constituent pour nous un outil important de lutte contre la pollution. C'est à nous qu'il incombait de prendre une décision, et nous l'avons fait.
M. Chatters: Mais vous n'aviez pas de données concluantes vous prouvant que, lorsque ces systèmes seraient utilisés au Canada, leur taux de défaillance serait différent de celui qui prévalait aux États-Unis sans le MMT.
M. Vena: Vous savez, c'est difficile. Je ne connais pas de données sur le taux de défaillance aux États-Unis sans le MMT. Je sais que l'arrivée de ce dispositif a été la source de certaines inquiétudes, parce qu'il y avait des problèmes au niveau de son fonctionnement. Je crois toutefois savoir que, dès 1996, la plupart de ces systèmes qui seront utilisés aux États-Unis fonctionneront parfaitement. Aucune donnée ne nous permet de croire qu'il y a eu de nombreuses défaillances avec ou sans le MMT.
M. Chatters: Très bien. Monsieur le président, avec votre permission, j'aimerais passer aux rejets d'oxyde d'azote. Des études qui m'ont été fournies par la Société Ethyl indiquent qu'en éliminant le MMT de l'essence, les rejets d'oxyde d'azote dans les gaz d'échappement augmenteraient d'environ 20 p. 100. Vous nous avez parlé d'une étude indiquant qu'il y aurait une hausse de 1 p. 100 ou inférieure à 1 p. 100. Pourriez-vous mettre cette étude à notre disposition?
M. Vena: J'ai transmis ce rapport d'étude à Ethyl. Nous avons discuté de l'importance des NOx. Le système de diagnostic intégré évalue l'efficacité du convertisseur catalytique; c'est donc un outil qui nous permettra de réduire tous les polluants qu'émettent les automobiles, dont les principaux sont l'oxyde d'azote, les hydrocarbures et le monoxyde de carbone.
Il est évident que nous nous intéressons aux rejets dans leur ensemble, et nous avons communiqué à Ethyl la méthode selon laquelle nous avons évalué les réductions de NOx pour l'essence contenant du MMT. C'est la Société Ethyl qui nous a fourni la plupart des données. Nous avons tenté de comprendre le processus avec les représentants de cette entreprise, mais nous ne le comprenons toujours pas.
On a émis des hypothèses sur ce qui pourrait se passer, mais ce qui est le plus important pour nous - et pour Ethyl - c'est qu'il nous semblait y avoir réduction. On a effectué des essais en vue de transposer à la réalité la réduction observée dans le parc automobile de cette entreprise, qui a fait l'objet d'essais de durabilité dans des conditions très strictes. Manifestement, toute baisse des rejets nous importe. Nous voulions comprendre de quoi il s'agissait véritablement. Nous ne savons toujours pas comment appliquer ces données d'essai à la réalité. Voilà pourquoi il y a encore des différences.
Toutefois, il faut se rappeler que tout cela se fait dans le contexte de la réduction de la pollution, et c'est pourquoi cette question revêt pour nous une telle importance. Les systèmes de diagnostic intégrés servent à vous prévenir - l'un d'entre eux, du moins - lorsque le convertisseur catalytique, qui est le principal agent de réduction des rejets, ne fonctionne pas comme il le devrait. S'il fonctionne mal, les émissions d'hydrocarbures, de monoxyde de carbone et même de NOx augmentent.
Il nous incombe maintenant de déterminer ce que cela pourrait signifier. J'ai tenté de vous décrire le contexte. M. Clarke a parlé plus tôt du programme d'entretien et d'inspection qui nous aide beaucoup à ce chapitre.
Les véhicules se détériorent. Ils sont conçus pour faire certaines choses, mais en raison de la façon dont nous les conduisons, ils se détériorent et, au fil des ans, ils en viennent à polluer plus que ce qu'on avait prévu au moment de leur conception. C'est une question cruciale pour nous.
La Colombie-Britannique, par exemple, est allée un peu plus loin à cet égard et a mis sur pied un programme d'entretien et d'inspection qui fait maintenant partie des exigences dans la Vallée du bas Fraser. On doit amener son véhicule à l'un des divers postes où on vérifie le système de pollution. S'il y a des anomalies, et si la pompe ou le convertisseur catalytique ne fonctionne pas, les intéressés sont tenus de procéder à l'entretien ou aux réparations nécessaires.
Le ministère de l'Environnement de la Colombie-Britannique a évalué les avantages de ce système de lutte contre la pollution et, dans sa dernière étude, il a constaté que le programme a permis de réduire de 20 p. 100 les émissions de monoxyde de carbone. Les hydrocarbures ont diminué de 24 p. 100, et l'oxyde d'azote de 3 p. 100. Quant au gaz carbonique, qui est l'un des principaux gaz responsables de l'effet de serre, il a diminué de 5 p. 100.
D'une façon générale, tel est l'objectif du système. Il est censé vous prévenir de toute anomalie. Évidemment, si vous prenez les mesures appropriées, voilà le genre d'avantages que vous pouvez en tirer. C'est ainsi qu'en agissant au niveau de l'oxyde d'azote, nous avons obtenu des résultats en ce qui concerne le MMT. Toutefois, s'il y a des répercussions sur le système de diagnostic intégré, cela équilibre considérablement les choses. Voilà où nous en sommes.
Le président: Nous pourrons y revenir pendant la deuxième période. Maintenant, donnons la parole à MM. Steckle, Wappel et DeVillers.
M. Steckle (Huron - Bruce): Monsieur Clarke, certaines questions ont déjà été posées en partie et on y a répondu en partie. Je pense que l'objectif ultime de tout le processus et de nos délibérations est de déterminer les additifs de l'essence qui donneront au moins les meilleurs résultats pour toutes les parties concernées, car il s'agit aussi de questions de santé.
Avant d'en arriver au volet santé, ma première question est de savoir ce qui a incité l'industrie automobile à installer des systèmes de diagnostic intégrés dans les automobiles au Canada à partir de 1996. Étant donné que le MMT pourrait être de nouveau introduit aux États-Unis, et que nous continuons de l'utiliser au Canada, qu'est-ce qui a pu motiver cette décision?
M. Clarke: Je pense qu'il s'agissait d'une exigence de l'Environment Protection Agency quant aux normes relatives aux émissions des tuyaux d'échappement. Je pense que le système de diagnostic intégré, en particulier, sa deuxième version, a été conçu dans le but de faire respecter ces normes. D'une manière générale, en Amérique du Nord, toutes les automobiles sont construites selon les mêmes normes, et nous en fabriquons beaucoup au Canada pour le marché américain.
Nous avons travaillé sur le principe de l'harmonisation. Si les Américains ont une bonne technologie, nous l'avons aussi. En fait, nous devons la produire ici pour l'envoyer aux États-Unis. Les carburants doivent être compatibles à la technologie pour que l'on puisse en tirer les meilleures retombées environnementales.
Je pense que tout est parti de l'EPA. Le MMT était toujours en réserve. L'on ne savait pas très bien comment la situation évoluerait, et l'on ne sait toujours pas comment elle évoluera, malgré ce qui se passe actuellement aux États-Unis. Quoi qu'il en soit, tout a commencé avec les normes de l'EPA sur les tuyaux d'échappement. En fait, nous avons harmonisé nos normes avec celles des États-Unis. Nous fabriquons les mêmes automobiles et nous avons besoin de carburants compatibles. Le carburant américain ne contenait pas de MMT et l'on a beaucoup insisté pour que le carburant canadien n'en contienne pas non plus à cause des effets possibles sur la deuxième version du système de diagnostic intégré.
M. Steckle: A-t-on déterminé qu'il y a un coût supplémentaire découlant du remplacement du MMT par un autre produit? Peut-on le dire avec certitude? Je me souviens que, quand on a supprimé le plomb, certains ont dit que le MMT était plus coûteux. Il y avait une augmentation de coûts que l'on a imputée au consommateur. Je me demande simplement si l'on a établi avec certitude que le coût a augmenté; se peut-il que nous ne le sachions pas encore, mais que cela soit possible? Nous savons que le coût à la source pourrait être plus élevé, mais nous ne savons pas encore quelles pourraient en être les répercussions pour le consommateur.
M. Vena: Nous avons effectivement fait quelques études. Dans l'une, nous avons fait appel à l'Institut canadien des produits pétroliers pour nous fournir ses estimations. Dans le cadre des discussions dont M. Clarke a parlé tout à l'heure, le gouvernement a mis sur pied un comité mixte gouvernement-industrie en juin 1993. Nous voulions régler trois questions: les normes de dépollution automobile au Canada, l'utilisation continue du MMT, du soufre et du diesel, et la reformulation des carburants. Je pense qu'il y a alors eu certains mémoires présentés par Ethyl Canada, par l'Institut canadien des produits pétroliers et par l'Association des fabricants de véhicules automobiles de même que par des importateurs d'automobiles. À ce moment-là, lors d'un exposé présenté par l'Institut des produits pétroliers, on nous a dit que pour supprimer le MMT, il faudra 50 millions de dollars d'immobilisations et un budget annuel de 25 millions de dollars. Voilà comment nous avons calculé un dixième de cent par litre.
D'un autre côté, nous avons travaillé un peu plus la question, et manifestement, ils ont raffiné leurs chiffres. Depuis, je pense que le premier chiffre est passé à près de 83 millions de dollars. Je ne peux pas bien m'imaginer ce que cela signifiera précisément pour le marché mais, une chose est sûre, supprimer le MMT représente un coût supplémentaire pour les raffineries. Toutefois, je ne sais pas exactement ce que cela représente.
M. Steckle: Côté santé, si les oxydes de manganèse sont transportés dans l'air et peuvent causer des problèmes de santé, pourquoi Santé Canada ne s'en préoccupe-t-il pas tellement? Peut-être que oui? J'ai du mal à comprendre la position de Santé Canada à cet égard.
M. Raphael: Depuis 1976, je pense que Santé Canada a procédé à cinq évaluations différentes des oxydes de manganèse et du MMT. Pour ce faire, nous avons fait intervenir les hypothèses et les techniques courantes d'évaluation du risque. Des experts de l'extérieur ont revu nos évaluations. Dans le cas de notre dernière évaluation, c'est Michael Davis, l'auteur de l'étude américaine sur le MMT et de l'étude sur le manganèse, qui a revu notre évaluation. Ainsi, nous avons eu la confirmation que Santé Canada avait obtenu les mêmes résultats toxicologiques que l'agence américaine, l'EPA. La différence entre les deux était due au fait que pour l'évaluation canadienne, on avait eu recours à des données d'utilisation réelle tandis qu'aux États-Unis, l'EPA avait eu recours à un modèle à Riverside en Californie. Je pense que le résultat que nous avons vise uniquement les oxydes de manganèse provenant de la combustion du MMT.
Les renseignements ainsi obtenus par Santé Canada ont été présentés au groupe de travail fédéral-provincial qui s'occupe de l'élaboration d'objectifs et de lignes directrices en matière de qualité de l'air, ce qui témoigne du souci de juguler divers aéropolluants, y compris les particules et les matières en suspension dont les oxydes de manganèse ne constituent qu'une variété. L'organisme fédéral-provincial, créé dans le cadre de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement en vue de préparer des lignes directrices sur la qualité de l'air, travaille à l'élaboration d'une nouvelle norme pour les particules, PM10 et PM2,5. Permettez-moi de signaler qu'à Santé Canada nous ne nous intéressons pas nécessairement uniquement aux oxydes de manganèse et d'autres métaux, mais de façon plus générale aux particules et aux matières en suspension, celles qui sont fines en particulier.
Une étude récente faite sous les auspices du Conseil canadien des ministres de l'Environnement démontre que l'élaboration et l'application de normes de qualité atmosphérique pour les particules, l'ozone et les autres matières toxiques pourraient entraîner des avantages sur le plan de la santé évalués à plus de 31 milliards de dollars au cours des 23 prochaines années. Nous tenons à trouver une solution globale aux dangers que comportent les aéropolluants pour la santé, et nos efforts s'orientent essentiellement vers les matières en suspension parce que leurs conséquences néfastes sont connues.
Quant à notre rapport sur le manganèse et les oxydes de manganèse provenant de la combustion du MMT, à mon avis, il est complet. Il a fait l'objet d'une révision interne et il a été présenté lors de réunions scientifiques internationales. C'est un rapport qui se tient bien et je pense qu'il témoigne très bien de la stratégie que nous avons adoptée en vue de trouver une solution globale aux problèmes de qualité de l'air, plus particulièrement du point de vue de la santé. En effet, nous n'abordons pas la question de façon ponctuelle suivant les additifs, suivant les polluants, mais nous nous penchons sur les conséquences globales qu'ils représentent du point de vue de la santé.
Si vous me permettez une petite digression, en ce qui concerne les produits de remplacement dont il a été question tout à l'heure, plusieurs d'entre eux sont visés par les dispositions relatives aux oxygénants, comme l'éthanol, le méthanol et l'éther méthyl-tert-butylique, tandis que les aromatiques, notamment le benzène, sont soumis à certaines restrictions.
Nous avons des préoccupations en ce qui a trait au MTBE. Le MTBE figurait sur la Liste des substances d'intérêt prioritaire de la LCPE, une évaluation en a été faite en fonction d'un scénario particulier et voilà où en sont l'utilisation et le confinement du MTBE à l'heure actuelle. Faudrait-il ajouter du MTBE au carburant canadien comme produit de remplacement du MMT? L'exposition qu'entraînerait ce scénario modifie la situation pour nous et nous évaluons le produit à la demande de l'Office des normes générales du Canada, qui envisage d'accepter le MTBE comme produit de reformulation de l'essence.
Nous avons aussi des inquiétudes au sujet du MTBE parce qu'il existe de nouvelles données qui n'existaient pas à l'époque de l'évaluation initiale faite aux termes de la LCPE. Nous avons maintenant les résultats d'une étude à long terme sur le cancer, qui doit être évaluée et dont il faudra tenir compte dans l'évaluation du produit.
Nous constatons qu'au fur et à mesure que nous discutons de ces questions, de nouvelles informations nous arrivent sur certains de ces additifs. Nous sommes également mieux renseignés sur l'effet et l'impact globaux des divers polluants aériens, pour savoir s'ils agissent de façon synergique ou agonistique.
Dans l'examen de la composition des carburants, des additifs des carburants et d'autres produits semblables, il nous incombe de prendre en considération la qualité globale de l'air qui résultera de combinaisons particulières de carburants et d'additifs ainsi que, de notre point de vue, des conséquences pour la santé.
Le président: M. Wappel, d'abord, suivi de M. DeVillers.
M. Wappel (Scarborough-Ouest): Merci, monsieur le président.
Monsieur et madame, je suis nouveau à ce Comité, alors je ne vois peut-être pas les choses aussi clairement que d'autres. J'essaie de comprendre. Nous avons au Canada du MMT. Il s'agit d'un additif qu'on ajoute au carburant pour en accroître l'indice d'octane, et ce produit est utilisé depuis 1977 environ. Pour qu'il puisse être utilisé au Canada, nous - c'est-à-dire Santé Canada et Environnement Canada - avons dû en approuver l'utilisation. Sinon... Je vois que M. Vena fait non de la tête. Dois-je comprendre que nous n'en avons pas approuvé l'utilisation? Commençons par là.
M. Vena: D'après ce que je sais, nous n'avons pas en place de processus - M. Raphael pourra peut-être me corriger - pour vérifier les additifs des carburants. Aucune évaluation n'a été réalisée en 1977 pour déterminer si le produit pouvait être utilisé.
M. Wappel: Ainsi, nous savions que le plomb était mauvais et qu'il fallait l'enlever, mais nous avons autorisé son remplacement par un produit dont nous ne savions rien.
M. Raphael: Si vous me permettez d'intervenir, je ne pense pas qu'il soit juste de dire que nous avons remplacé le plomb par quelque chose dont nous ne savions rien.
M. Wappel: Alors, que savions-nous de ce produit?
M. Raphael: Que savions-nous du plomb?
M. Wappel: Que savions-nous du MMT? C'est de cela que nous discutons.
M. Raphael: Nous savons que le MMT est en soi une substance toxique - j'utilise ici le mot «toxique», non pas dans le sens juridique, mais dans le sens scientifique. Ce que nous savons au sujet du MMT, de son utilisation, de sa fabrication, et le reste, c'est qu'il est soumis à des contrôles très rigoureux et à des restrictions quant à l'exposition à des niveaux élevés (professionnels).
Ce que nous savons au sujet du manganèse et des oxydes de manganèse, c'est tout d'abord qu'il s'agit de substances d'origine naturelle. On les retrouve dans la nature. Ce que nous savons du MMT, c'est que sa combustion libère du manganèse et des oxydes de manganèse. Il convient à mon avis de bien se le rappeler.
Pour ce qui est de la toxicité du manganèse et des oxydes de manganèse, nous savons beaucoup de choses, notamment à la suite d'études faites sur l'hygiène du milieu. Les études de ce genre sont très utiles pour en savoir davantage sur la toxicologie en général. Grâce à ces études sur l'hygiène du milieu, nous sommes assez bien renseignés pour ce qui est d'établir le degré d'exposition maximal pour les Canadiens.
Soit dit en passant, si les Canadiens sont exposés au manganèse et aux oxydes de manganèse, c'est plus souvent par d'autres voies que la voie aérienne. Nous savons que les êtres humains, comparativement à d'autres espèces, ne sont pas très sensibles au manganèse transmis autrement que par voie aérienne. Or, dans notre examen de la combustion du MMT, nous nous sommes tout particulièrement attardés à la transmission par voie aérienne. Le rapport que nous avons produit montre qu'il existe un lien entre la présence d'oxyde de manganèse et, pas nécessairement la combustion du MMT, mais la fusion de métaux communs et d'acier.
M. Wappel: Excusez-moi, mais je parle du MMT comme additif qu'on ajoute à l'essence. C'est tout. Je ne m'intéresse pas à l'exploitation minière ni à quelque autre sujet. Je m'intéresse uniquement au MMT comme additif de carburant. Si je comprends bien, d'après ce que vous avez dit tout à l'heure, Santé Canada n'a trouvé aucun effet nocif sur la santé de l'utilisation du MMT dans l'essence au Canada. N'est-ce pas?
M. Raphael: Oui, c'est juste, et on s'est fondé pour cela sur les produits de combustion du MMT.
M. Wappel: Très bien. Maintenant, je veux être sûr de bien comprendre; l'objet de cette loi est d'interdire le commerce interprovincial et l'importation d'un additif qui n'a aucun effet nocif sur la santé des Canadiens. Je suppose que la seule raison pour laquelle on voudrait en interdire l'importation, c'est qu'il est censé endommager les systèmes de diagnostic intégrés. Puisque vous avez dit que vous n'aviez pas d'études, les seules études sur lesquelles vous avez pu vous fonder pour arriver à votre conclusion sont celles des constructeurs automobiles. N'est-ce pas?
M. Vena: Oui.
M. Wappel: Quels constructeurs vous ont fourni ces études?
M. Vena: Nous avons reçu des études sur les divers effets du MMT sur les dispositifs de régulation de vitesse de Ford, Chrysler, Honda, Toyota et General Motors.
M. Wappel: Et à quelles conditions vous ont-ils fourni ces études?
M. Vena: Dans nos efforts pour régler cette question particulière de l'utilisation de ce produit dans le contexte que j'ai décrit...
M. Wappel: Non, ce n'est pas dans ce sens-là que je l'entends. Je suis désolé. Ils vous ont fourni les études qu'ils avaient réalisées en vue, manifestement, de vous convaincre que le MMT endommage les systèmes de diagnostic intégrés. Quand ils vous ont remis ces études, vous ont-ils dit qu'elles étaient confidentielles, à titre strictement personnel, ou pour quelque autre raison... Dans l'affirmative, à quel titre vous les a-t-on remises?
M. Vena: On nous les a remises à titre confidentiel.
M. Wappel: Et que faut-il entendre par là?
M. Vena: Essentiellement, il faut comprendre que nous cherchions à obtenir des données. Comme vous l'avez dit, il s'agit d'un domaine très pointu. Les seuls qui s'y intéressent sont Ethyl ou les constructeurs automobiles. Nous avons également obtenu d'Ethyl beaucoup de données pour lesquelles nous avions soumis des demandes.
M. Wappel: J'y viens. Je veux savoir ce que vous entendez par «confidentel». Comment interprétez-vous la phrase «Ces rapports sont confidentiels»?
M. Vena: Essentiellement, je crois que c'est la tierce partie qui nous fournit l'information qui décide ce qu'elle entend par là. Le commissaire à l'accès à l'information fait lui aussi une détermination à cet égard. Essentiellement, parmi les données contenues dans ces rapports, nous communiquons à Ethyl, qui les a demandées, les données que nous sommes autorisés à communiquer à la suite d'une demande d'accès à l'information. Nous tenterons donc de fournir ces données à Ethyl.
M. Wappel: Nous représentons, non pas Ethyl, mais la population canadienne. On nous demande d'adopter une loi qui, d'après ce que j'en sais, se fonde sur des études réalisées par les constructeurs automobiles - et uniquement par les constructeurs automobiles - qui sont confidentielles et qui ne peuvent pas être communiquées à la population canadienne. Ainsi, pour adopter ce projet de loi, nous sommes appelés à faire un acte de foi, à faire confiance aux scientifiques et aux divers constructeurs automobiles, puisque personne ne semble vouloir nous montrer ces études.
Si je comprends bien, s'il appartient effectivement aux constructeurs de déterminer si un document est confidentiel et que le constructeur se présente devant nous, rien ne l'oblige à nous communiquer ces études s'il ne veut pas nous les communiquer. N'est-ce pas?
M. Vena: C'est juste.
M. Wappel: Et s'il refuse, notre Comité peut alors faire ce qu'il veut.
M. Vena: Il existe des dispositions relatives à la communication de cette information.
Mme Fry: Tout d'abord, il ne faut pas oublier que, bien sûr, la Loi sur l'accès à l'information prévoit la marche à suivre pour quiconque veut contester qu'un document soit considéré comme un secret des affaires.
Pour ce qui est du Comité, les règles parlementaires, telles que nous les interprétons, prévoient que les Comités respectent normalement le caractère secret de documents considérés comme confidentiels aux termes de la loi. La loi qui s'applique ici est la Loi sur l'accès à l'information. Ainsi, en pareil cas, les fonctionnaires auraient pour règle de demander au Comité de respecter le...
M. Wappel: Le droit et les pouvoirs des Comités évoluent quotidiennement. Auriez-vous l'obligeance de mettre à la disposition du Comité les extraits des études que vous avez communiqués à Ethyl Corp. et les extraits qui ne sont pas confidentiels et qui vous ont été communiqués par Ethyl Corp.? Auriez-vous également l'obligeance de mettre à notre disposition l'étude sur les émissions d'oxyde d'azote que vous avez rédigée ou dont vous avez parlé en réponse à la question de mon collègue du Parti réformiste?
M. Vena: Oui.
M. Wappel: Je vous remercie.
Dans un autre ordre d'idées, ce projet de loi a été présenté par la ministre de l'Environnement. Nous avons parlé du fait que le MMT ne semble pas avoir d'effet nocif sur la santé des Canadiens, mais qu'il pourrait affecter les systèmes de diagnostic intégrés, qui servent accessoirement à mesurer le niveau de divers éléments toxiques dans la voiture et qui pourraient par ricochet se répercuter sur l'environnement. Nous sommes préoccupés par l'environnement. Nous sommes préoccupés par l'air que nous respirons.
Pourquoi, alors, le ministre désigné dans le projet de loi n'est-il pas le ministre de l'Environnement? Pourquoi laisse-t-on au gouverneur en conseil le soin de désigner le ministre responsable, ce qui n'est pas pratique courante dans les projets de loi, vous en conviendrez? Dans la plupart des projets de loi, le ministre responsable est le ministre qui propose effectivement le projet de loi. Dans ce cas-ci, étant donné le souci que nous avons de protéger l'environnement et étant donné que le projet de loi est proposé par la ministre de l'Environnement, peut-on nous dire pour quelle raison d'orientation gouvernementale le ministère a choisi de ne pas désigner le ministre de l'Environnement comme ministre responsable?
Mme Fry: Je ne peux pas répondre à votre question sur l'orientation gouvernementale. C'est manifestement aux ministres qu'il appartient d'y répondre. Je ne peux pas non plus vous donner de chiffres sur le nombre de lois qui désignent un ministre en particulier... ou qui laissent au gouverneur en conseil le soin de désigner le ministre responsable. Je peux toutefois vous dire, d'après mon expérience, qu'un grand nombre de lois sont rédigées ainsi.
M. Wappel: Est-ce tout ce que vous pouvez me dire en réponse à la question de savoir pourquoi le ministre de l'Environnement n'est pas expressément désigné?
Mme Fry: C'est tout ce que je sais.
M. Wappel: Les rédacteurs ont dû recevoir des directives de quelqu'un. De qui ces directives leur seraient-elles venues? Directement de la ministre?
Le président: Monsieur Wappel, il convient peut-être de vous faire remarquer qu'on ne saurait demander à des fonctionnaires d'expliquer une décision politique prise par le Conseil des ministres.
M. Wappel: Je comprends. Je demande s'il s'agit bien d'une décision politique prise par le Conseil des ministres. Je veux simplement savoir si quelqu'un a pris soin de dire aux rédacteurs quand ils ont entrepris la rédaction du projet de loi: N'oubliez pas de ne pas désigner le ministre, nous le désignerons plus tard. Je ne sais pas exactement quelle est la procédure qu'on suit pour rédiger un projet de loi, puisque je ne travaille pas au service de rédaction législative, mais nos collègues qui sont ici comme témoins le sauraient sûrement. Je pose la question précisément au sujet de l'article 2 du projet de loi, où on définit le terme «ministre»: Quand les rédacteurs ont rédigé le projet de loi, ont-ils reçu des directives précises et, dans l'affirmative, de qui ont-ils reçu ces directives?
M. Clarke: Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à votre question, monsieur le président. Évidemment, les rédacteurs ont dû recevoir des directives leur enjoignant de ne pas désigner le ministre responsable.
M. Wappel: Puis-je vous demander de faire enquête et de revenir nous dire pourquoi?
M. Clarke: Je ferai certainement enquête et, si je peux communiquer au Comité l'information voulue, je le ferai.
Le président: Monsieur DeVillers.
M. DeVillers (Simcoe-Nord): Merci, monsieur le président.
En réponse à la question que M. Wappel a posée tout à l'heure au sujet du remplacement du plomb par le MMT et du procédé qui aurait été utilisé pour vérifier ou approuver le produit, etc., je crois pouvoir répondre qu'il n'existe pas de procédé à l'heure actuelle pour vérifier les additifs pour carburant et les approuver.
M. Vena: Oui, j'ai essayé de répondre à la question de savoir s'il faut enregistrer les additifs pour carburant. Pas à ma connaissance. Cela ne date pas d'hier et je ne suis peut-être pas bien informé car je ne connais pas très bien la question, mais lorsqu'on est passé à l'essence sans plomb, nous avons effectivement évalué diverses options.
M. DeVillers: Sauf erreur, dans son rapport sur la LCPE, le Comité recommande de modifier les articles 46 et 47 de cette loi en vue d'y inclure le traitement des additifs pour carburant. J'aimerais connaître l'avis des représentants de chaque ministère sur l'opportunité de cette initiative.
M. Raphael: Les ministres de l'Environnement et de la Santé n'ont pas terminé leurs réponses au rapport. Pour le moment, je ne peux pas vous dire si c'est une bonne idée ou non. Je dirais...
M. DeVillers: Vous n'avez aucune opinion à ce sujet?
M. Raphael: Vous me demandez mon opinion personnelle?
M. DeVillers: Oui.
M. Raphael: Je n'en ai vraiment pas... [Inaudible - Éditeur]...
M. DeVillers: Et Environnement Canada?
M. Clarke: L'une des limites qui existent dans la LCPE sous sa forme actuelle, c'est que seule la combustion nous permet d'évaluer si un carburant pollue ou non. Cela nous pose à l'occasion un sérieux défi. Il faut bien l'admettre.
Par exemple, nous savons que le benzène est cancérigène. Selon la LCPE, c'est un produit toxique et le benzène entre dans les éléments du carburant. Toutefois, pour déterminer la présence de benzène dans le carburant, il faut que celui-ci brûle et le benzène sort du tuyau d'échappement. Soit dit en passant, cela se produit également.
Il existe donc dans la loi certaines limites qui posent problème, car la pollution atmosphérique ne se produit pas uniquement lorsqu'on brûle certains produits. Près d'une pompe à essence, surtout dans le bon vieux temps, on pouvait facilement se sentir tout drôle rien qu'à respirer ce produit. Et il n'y avait pourtant pas de combustion. Il s'agit tout simplement d'un produit naturel qui s'évapore dans l'air. Ce produit qui s'évapore dans l'atmosphère contribue à la présence de smog dans certaines régions du pays.
C'est pourquoi je pense que le Comité permanent a sans doute fait ses recommandations quant à la nécessité d'élargir la portée de l'article sur le carburant de façon à y inclure ces dispositions.
J'espère que cela répond à vos questions, monsieur le président.
M. DeVillers: Je ne sais toujours pas si les responsables pensent ou non qu'il faut donner suite à cette recommandation. Avez-vous une opinion? Est-il souhaitable d'accepter cette recommandation?
M. Clarke: Du point de vue d'Environnement Canada?
M. DeVillers: Oui.
M. Clarke: Oui.
M. DeVillers: Merci.
Sauf erreur, le MMT dans l'essence dérègle les nouveaux systèmes de diagnostic intégrés dont sont équipés les véhicules. Ces systèmes ne pourront donc pas fonctionner, ils seront débranchés et les véhicules au Canada ne pourront pas être dotés d'un système de diagnostic intégré.
Monsieur Raphael, le fait que les véhicules ne puissent pas être dotés de ces systèmes pose-t-il un danger pour la santé des Canadiens, à votre avis?
M. Raphael: Ce serait une situation fortement hypothétique car un grand nombre de facteurs entrent en jeu. Nous nous penchons sur les répercussions sur la santé de certains résultats en matière de qualité de l'air. Avant de vous donner une réponse exacte, il nous faudra examiner - et être suffisamment convaincus - le scénario auquel nous nous intéressons relativement aux hydrocarbures non brûlés, aux émissions d'oxydes d'azote, de monoxyde de carbone, d'aromatiques et d'autres produits toxiques, ainsi que les différences qui existent entre diverses régions du pays en raison de certaines circonstances: des conversions en cours dans le bas Fraser, etc.
Je ne pense pas qu'il soit possible d'évaluer les répercussions sur la santé de la situation dont vous parlez. Je pense qu'il faudrait le faire de façon plus détaillée et élaborer un scénario auquel se référer au lieu de se contenter d'examiner les pannes de systèmes particuliers.
M. Clarke: Si le système de diagnostic intégré de deuxième génération fonctionnait comme il est censé le faire - et il a bien fonctionné - il y aurait sans doute moins d'émissions dans l'environnement; la qualité de l'air serait meilleure, en particulier dans les centres urbains; ce qui se traduirait par une meilleure santé de la population. C'est comme ça que je vois les choses.
Si ce système ne fonctionne pas correctement, c'est un peu comme quand un dispositif tombe en panne sans qu'on s'en rende compte - disons que la lumière s'éteint ou quelque chose comme cela - et à ce moment-là il y aura plus de rejets de substances polluantes dans l'atmosphère. La qualité de l'air va se dégrader et cela aura des conséquences néfastes pour la santé. Voilà comment je vois les choses.
M. Finlay (Oxford): Avec tout le respect que je dois à mon collègue, je ne suis pas du tout d'accord. Nous avons mis longtemps à élaborer la LCPE, et je crois que nous avons là l'un des premiers instruments qui nous permettra de voir si nous pouvons respecter les principes que notre Comité a mis si longtemps à formuler et à préciser.
M. Raphael n'a pas dit que le manganèse et l'oxyde de manganèse ne présentaient pas de risques potentiels pour la santé. Il a dit qu'on savait que le MMT est toxique; il a précisé qu'il y avait des normes d'exposition à ne pas dépasser au travail, et n'hésitez pas à me corriger si je me trompe, monsieur. Il nous a dit que le manganèse et l'oxyde de manganèse étaient des produits de la combustion du MMT et qu'on les trouve à l'état naturel aussi. Je rappelle à chacun d'entre nous qu'il y a aussi une formation naturelle de plomb et de mercure, ce qui ne les rend pas toxiques pour autant. Nous ne cherchons pas pour autant à savoir quelle quantité de ces substances se dégage dans l'environnement et entraîne une bio-accumulation dans la chaîne alimentaire et l'écosystème. Il a enfin ajouté que ces substances pouvaient être véhiculées en plus grandes quantités par d'autres voies que l'air, mais que nous n'en connaissons pas suffisamment sur l'exposition à ces oxydes véhiculés par l'air. Je pense donc que ce sont là les réponses assez précises que vous pourriez donner à M. Wappel.
Ce qui m'intéresse, c'est l'exploitation minière et toutes les opérations manufacturières dans le monde moderne. J'ai passé quelque temps à Sudbury et je viens juste de passer une heure avec les gens de Keep Mining in Canada, et je vous garantis qu'on relâche énormément de produits toxiques et qu'on endommage énormément l'environnement, et que les compagnies minières doivent s'en occuper, et ne restent pas les bras croisés, je suis heureux de le dire.
Si je ne veux pas autoriser le MMT et appuyer ce projet de loi, c'est pour des raisons qui rejoignent beaucoup celles de M. Clarke. Si nous n'avons pas de certitude absolue mais que nous savons que le MMT est toxique, que le smog, la pollution de l'air et l'accroissement de la teneur en CO2 de l'atmosphère sont toxiques, je ne suis pas d'accord pour prendre le risque. Nous savons que le CO2 est toxique; c'est un moyen très pratique de se tuer. Branchez un tuyau sur l'échappement de votre voiture et laissez-la tourner une demi-heure dans un garage fermé, le résultat est garanti. Il existe des additifs meilleurs qui ont une combustion plus propre, et il existe des constructeurs d'automobiles qui font des efforts importants pour réduire les émissions. Personnellement, c'est sous cet angle que je vois les choses.
Le président: Vous avez des questions?
M. Finlay: Pourquoi cette méthode-ci ne serait-elle pas acceptable? Les thèses de la société Ethyl et celle des fabricants automobiles sont contradictoires, donc elles ne prouvent rien à mes yeux. Je pense que nous devrions pécher par excès de prudence ici, et c'est ce que nous avons toujours dit.
Qu'on me corrige si j'ai tort, monsieur le président.
Le président: Monsieur Finlay, nous allons passer au second tour si vous voulez bien.
Mais j'aurais une petite question pour M. Raphael.
Votre ministère fait-il des études sur la pollution de l'air causée par les activités industrielles ou les émissions des voitures?
M. Raphael: Oui, monsieur le président. Santé Canada a en marche un programme de recherche sur les effets de la pollution de l'air sur la santé qui porte expressément sur les effets de la qualité de l'air sur la santé résultant des émissions industrielles ou automobiles. Nous participons à une initiative conjointe avec Environnement Canada, Ressources naturelles Canada et Transports Canada tant dans le cadre de la LCPE que d'autres programmes.
Le président: Pouvez-vous nous dire quelles études vous faites en ce moment?
M. Raphael: Oui. Au pied levé... et je sais que ce n'est pas une liste complète. Nous pourrons adresser au Comité une liste plus complète. Mais nous faisons des études sur l'ozone, dans le cadre du programme de recherche sur la présence du NOxx dans les COV, et nous nous intéressons en particulier à la vallée du bas Fraser, au couloir Windsor-Québec et à la région de l'Atlantique.
De même, nous avons également une étude qui porte sur seize villes et qui analyse les polluants de l'air les plus communs sous l'angle de la morbidité et de l'hospitalisation. Nous analysons une dizaine ou une douzaine de polluants dans cette étude. Il s'agit ici des seize plus grands centres urbains du Canada. On analyse les admissions dans les hôpitaux, la morbidité et la mortalité.
Nous faisons également des études dans le cadre du programme stratégique émanant de la LCPE et des futurs règlements. En particulier, nous avons coopéré avec Environnement Canada à la facture du nouveau règlement sur le benzène.
Nous faisons également des études sur les effets sur la santé des particules fines, des particules fines respirables en particulier. Cette étude vient appuyer un nouvel objectif en matière de qualité de l'air, en coopération avec les provinces et les territoires. Les particules, comme je l'ai dit plus tôt, constituent une priorité élevée pour nous parce qu'elles ont été directement en cause dans la mortalité de certains Canadiens.
Le président: Vos études sur les effets sur la santé comptent-elles une analyse quantifiant les coûts pour le public de l'incidence de la pollution sur les admissions hospitalières et les soins hospitaliers? Autrement dit, avez-vous des études économétriques suite à vos études sur les effets sur la santé?
M. Raphael: Oui. Je crois qu'elles avancent à un rythme plus lent que nos études sur les effets sur la santé. Nos études économétriques... il y en a une en particulier que nous avons faite en coopération avec le CCME, qui est autrement connue sous le nom de analyse Hagler Bailly du groupe de travail des sous-ministres du CCME sur les carburants propres, où nous avons appliqué une analyse économétrique aux études sur les effets sur la santé qui établit des rapports entre les soins de santé et les objectifs en matière de qualité de l'air.
Le président: Le Comité trouverait utile de prendre connaissance de ces études.
À propos du MMT, est-ce que je vous ai bien compris lorsque vous avez répondu tout à l'heure à la question de M. Steckle? Vous êtes-vous penchés sur les questions des émissions d'oxyde de manganèse dans votre étude de novembre 1994?
M. Raphael: Oui, l'étude a surtout visé ce domaine.
Le président: Vous êtes-vous penchés également sur les émissions de MMT?
M. Raphael: Nous avons abordé ce sujet dans notre étude, mais nous n'avons pas examiné la question de l'évaporation du MMT. Je crois que vous parlez surtout de cela.
Le président: Avez-vous dit l'évaporation?
M. Raphael: Vous ne parlez pas de cela?
Le président: Je voulais dire le MMT comme tel. Je ne saurais pas comment le qualifier.
M. Raphael: Très bien.
Le président: Avez-vous examiné cette question?
M. Raphael: L'étude s'est penchée sur cette question de l'exposition des Canadiens au MMT en tenant compte des propriétés physiques du MMT et de la probabilité, étant donné les renseignements à notre disposition, que les Canadiens n'étaient pas susceptibles d'être exposés au MMT de façon directe.
Le président: Croyez-vous que vous avez examiné cette question des émissions de MMT de façon concluante?
M. Raphael: Oui, monsieur le président. Je crois que nous avons examiné cette question de façon concluante.
Le président: Merci.
Pour le deuxième tour, nous avons M. Pomerleau, suivi de Mme Kraft Sloan, suivie de M. Chatters.
Mr. Pomerleau.
[Français]
M. Pomerleau: Je n'ai qu'une petite question. Les fabricants d'automobiles prétendent avoir fait des études démontrant que le MMT est dommageable au système antipollution. Est-ce qu'ils ont fait le même genre d'études sur l'éthanol ou sur tout autre produit de remplacement du MMT?
[Traduction]
M. Vena: Avez-vous demandé si les autres additifs ou les autres composants des carburants provoqueraient les mêmes préoccupations en ce qui concerne les systèmes de diagnostic intégrés?
[Français]
C'était bien cela, la question?
M. Pomerleau: Je voulais savoir si les fabricants d'automobiles, qui disent avoir fait des études démontrant que le MMT était dommageable au système antipollution, avaient fait des études similaires sur les produits de remplacement du MMT.
[Traduction]
M. Vena: Afin de remplacer le MMT, il faut avoir recours aux composés tels que l'éthanol ou le MTBE, ou bien il faut faire quelque chose lors du raffinage. La plupart de ces composants qu'on trouve dans les carburants canadiens et américains ne sont pas différents. Il est évident qu'on a tenu compte de ces carburants lors de la conception du système de diagnostic intégré. En effet, c'est le MMT et, dans une certaine mesure, le soufre qui constituent la plus grande différence.
Je crois qu'ils avaient à leur disposition une matrice des carburants sur le marché, et ils avaient une certaine expérience en ce qui concerne les effets de ces émissions et les problèmes que le système de diagnostic intégré pourrait connaître.
Je ne crois pas qu'ils ont mené des études formelles en ce qui concerne ce sujet, mais les composants de carburants qui peuvent servir de substituts se vendent sur le marché. Le carburant aux États-Unis ne contient pas de MMT, mais il pourrait contenir une assez grande quantité de EMTB ou d'éthanol. Voilà ce qui est différent là-bas, et on n'a pas soulevé de préoccupations en ce qui concerne ces carburants.
[Français]
M. Pomerleau: C'est tout, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Pomerleau. Madame Kraft Sloan.
[Traduction]
Mme Kraft Sloan: Merci beaucoup.
Pourriez-vous nous dire quels sont les produits de la photolyse du MMT une fois que ce processus a eu lieu? Quels sous-produits trouve-t-on dans l'environnement?
M. Raphael: Un certain nombre d'oxydes sont créés, y compris, en particulier, les oxydes de manganèse, et il peut y avoir aussi libération de manganèse. Je crois que c'est surtout la libération de manganèse ainsi que la libération des produits d'oxydation du manganèse - le MNO3 et d'autres oxydes de manganèse - qui font l'objet des études environnementales.
Mme Kraft Sloan: Et quels sont les effets de certains de ces produits sur l'environnement et sur la santé humaine? Est-ce qu'on le sait?
M. Raphael: Les études sur la santé dont nous disposons montrent que le manganèse est neurotoxique à forte concentration. Il peut traverser la barrière hémato-encéphalique. Au cours d'études menées en Europe dans les milieux professionnels, nous avons pu constater qu'à de très fortes concentrations le manganèse et ses oxydes en particulier ont un effet toxique sur le comportement neurologique.
Mme Kraft Sloan: Veuillez m'excuser, mais je n'ai pas de formation scientifique. Peut-être pouvez-vous m'aider à comprendre certaines de ces choses. Ces substances s'accumulent-elles facilement dans les tissus humains ou animaux? Une fois qu'elles s'y trouvent, y demeurent-elles longtemps?
M. Raphael: Elles demeurent dans les tissus animaux le même temps qu'y demeurent d'autres composés similaires aux métaux lourds.
Souvenons-nous que...
Le président: Pouvez-vous préciser?
M. Raphael: Je ne peux pas vous dire combien de temps exactement ces substances subsistent dans l'organisme, monsieur le président. Il faut absolument se rappeler que le manganèse est un élément essentiel. L'organisme humain en a besoin comme cofacteur dans de nombreux systèmes enzymatiques importants. L'organisme a donc la faculté de puiser dans des sources environnementales une certaine quantité de manganèse, au-delà de laquelle, d'après les observations faites en milieux professionnels, il peut y avoir accumulation. Toutefois en ce qui a trait aux incidences de cette absorption et à la durée pendant laquelle subsistent ces substances dans l'organisme humain, je pense que nous savons très peu de choses, parce que nous n'avons tout simplement personne qui aurait été exposé à de si fortes concentrations de manganèse de façon régulière.
Mme Kraft Sloan: S'agit-il d'expositions ponctuelles à de très fortes concentrations ou d'expositions à de faibles concentrations sur une certaine période? Avons-nous des renseignements là-dessus?
M. Raphael: D'après les renseignements que nous avons, qui proviennent d'études faites en milieux professionnels, il s'agit d'expositions répétées à de fortes concentrations. L'étude Roels, soit l'enquête épidémiologique hollandaise, a été menée dans un milieu professionnel où les gens travaillaient 40 heures par semaine dans une usine de batteries.
Il existe d'autres études portant sur les expositions simulées auxquelles on a soumis des singes. Pour qu'il y ait accumulation dans les tissus, il faut que les niveaux de concentration dépassent ceux de l'étude Roels menée aux Pays-Bas. Il s'agit ici de concentrations de 1 000 à 10 000 fois supérieures à la concentration de référence, qui est elle-même de 10 à 100 fois supérieure aux niveaux enregistrés dans l'air au Canada.
Mme Kraft Sloan: A-t-on effectué un examen hématologique de masse relativement aux dérivés du MMT ou au MMT même? Le cas échéant, dans quoi d'autre pourrait-on constater la présence de ces dérivés? Leur présence dans l'atmosphère peut ne pas poser de problèmes considérables, mais en retrouve-t-on dans le sol, en retrouve-t-on dans l'eau? Si on en retrouve dans le sol et dans l'eau et dans d'autres milieux et qu'ils se concentrent dans les tissus humains, comment tout cela interagit-il? Comprenons-nous comment cela se passe?
M. Raphael: Vous abordez une question très épineuse, celle des examens hématologiques de masse à propos d'éléments qu'on trouve à l'état naturel. En particulier, les oxydes de manganèse qui se forment à la combustion se produisent naturellement. Ils résultent de processus autres qu'antropiques.
Oui, les études très préliminaires indiquent qu'il est très difficile de distinguer les oxydes de manganèse naturellement formés de ceux qui proviennent de sources de combustion. Nous savons que c'est principalement par l'absorption d'aliments qu'on est exposé à ces substances, soit les oxydes de manganèse et le manganèse même. Mais nous savons aussi qu'il y a absorption différentielle. Les oxydes de manganèse ne sont pas du tout absorbés de la même façon, ni sous la même forme, que le plomb. Il ne se produit donc pas du tout la même chose quand on absorbe des aliments contenant des oxydes de manganèse ou d'autres contenant du plomb.
Mme Kraft Sloan: Il faudra à nouveau que vous m'expliquiez. Dans les milieux urbains, surtout quand on émet des avertissements de conditions atmosphériques... Je souffre d'asthme, par exemple, et un jour d'été que je quittais mon bureau pour me rendre à ma voiture j'ai été prise d'une crise d'asthme et je ne pouvais plus respirer en raison des conditions atmosphériques, de l'humidité, etc.. C'est une expérience assez éprouvante à vivre.
Quand on considère les agglomérations urbaines, il s'y pose d'autres problèmes atmosphériques, surtout quand le temps est très humide, qu'interviennent des facteurs climatiques, sans compter tout ce qui se passe d'autre dans l'atmosphère. Vous avez parlé de synergie. Les produits peuvent être absorbés autrement. Savons-nous comment tout cela peut interagir avec le temps?
M. Raphael: La science fait des progrès. Nous en apprenons toujours plus sur ces phénomènes. Nous arrivons mieux maintenant à repérer les sources anthropiques de certains de ces constituants. Pour ce qui est de notre connaissance des incidences de la qualité de l'air dans les zones urbaines par rapport aux autres milieux, qu'il s'agisse du milieu rural ou d'autres considérés comme plus purs, nous mettons les gens en garde contre l'idée que la qualité de l'air ne pose un problème que dans les cadres bâtis ou les milieux urbains à forte densité.
Mme Kraft Sloan: Exactement. Il y a aussi des problèmes dans les zones rurales. En fait, c'est ce qui s'est passé dans la petite collectivité de Newmarket.
Pour revenir à ma question de tout à l'heure au sujet des examens hématologiques de masse, nous ne disposons d'aucune étude qui montre à coup sûr que ces dérivés ne sont pas absorbés autrement. Par conséquent, nous ne pouvons pas affirmer qu'ils n'ont aucune incidence sur la santé.
M. Raphael: Je pense que nous savons que si le sol absorbe les oxydes, les dérivés pourront se retrouver dans la chaîne alimentaire. C'est une déduction raisonnable. Pour ce qui est des oxydes de manganèse qui se retrouvent dans des aliments - et nous avons des renseignements à ce sujet qui proviennent d'une analyse multimédias - ce type d'exposition dépasse largement celle qui peut résulter de la présence de manganèse dans l'air.
Nous savons aussi que l'absorption différentielle et la toxicité différentielle de l'air que nous respirons en accroissent l'importance pour la santé par comparaison avec le manganèse que nous ingérons quotidiennement dans nos aliments ou dans le sol et l'eau que nous ingérons tout aussi quotidiennement.
M. Chatters: Je me suis un peu perdu dans les questions qu'on a posées au cours de la dernière ronde, et j'aimerais obtenir des clarifications.
Vous nous avez dit que vous acceptez cette conclusion selon laquelle le MMT contenu dans l'essence ne pose pas un danger pour la santé au Canada, n'est-ce pas?
M. Raphael: Oui.
M. Chatters: Bien.
L'autre chose que j'ai entendu dire par un de mes collègues, c'était qu'il fût inévitable que nous présentions ce projet de loi, étant donné que le MMT nuit au système de diagnostic intégré des nouvelles voitures. Or, je vous ai entendu dire que vous n'avez pas de preuves concluantes montrant que ces systèmes de diagnostic intégrés font plus souvent défaut au Canada qu'aux États-Unis, où l'on n'utilise pas de MMT; est-ce exact?
M. Vena: Oui. J'ai dit qu'il était difficile d'avoir des données quantitatives pour l'instant parce que ces systèmes ne sont tout simplement pas encore utilisés. Ils ne commenceront à faire leur apparition au Canada que sur les nouveaux modèles de voitures de 1996, et c'est pourquoi il est difficile d'avoir des données quantitatives.
M. Chatters: C'est bien. Merci.
Revenons à certains des autres aspects que vous avez abordés, à propos des produits qui pourraient remplacer le MMT; vous en avez mentionné certains, notamment le raffinage accru du pétrole brut pour produire de l'essence, ce qui accroît les émissions de composés aromatiques, y compris du benzène. Reprenez-moi si je fais erreur, mais l'une des solutions possibles consistait à recourir à ce processus de raffinage accru pour hausser le niveau d'octane. Les autres étaient deux ou trois additifs. Si on interdit le MMT, laquelle de ces solutions sera la moins coûteuse et, par conséquent, la plus susceptible d'être retenue?
M. Vena: Comme je l'ai dit, cela dépend dans une large mesure de la configuration des raffineries, de ce qui est possible et de ce qui ne l'est pas. Il y a deux façons de procéder, soit modifier le procédé, soit ajouter un additif antidétonant. Cela dépend donc dans une large mesure des possibilités des raffineries sur le plan des coûts.
M. Chatters: Est-ce que certains de ces procédés pourraient diminuer les émissions d'oxyde nitreux comme le fait le MMT? Les émissions d'oxydes nitreux contribuent à la formation du smog dans les villes, ce qui cause des problèmes aux asthmatiques.
M. Vena: Évidemment, dans plusieurs secteurs on se tourne vers les composés oxygénés. Par exemple, certaines régions américaines exigent une certaine oxygénation des carburants. Les composés oxygénés constituent d'excellents additifs antidétonants. Là où de forts niveaux d'oxyde de carbone sont une source de préoccupation, on peut reformuler l'essence en ajoutant des composés oxygénés d'éthanol, par exemple, ou bien du EMTB.
Aucune solution n'est une panacée. Il n'y a pas un seul produit dont on puisse dire que c'est le meilleur produit du monde. Ce serait très agréable, et c'est ce que nous essayons de trouver, mais en règle générale les composés oxygénés réduisent les niveaux d'oxyde de carbone, et seront encore plus efficaces dans les véhicules qui seront fabriqués à partir de maintenant, car on essaye de contrôler la proportion air-carburant d'une façon plus précise pour éviter une pollution excessive. Cela dit, même dans les anciens modèles, c'est un moyen efficace de réduire les émissions d'oxyde de carbone. De toute évidence, quand on ajoute un élément comme l'éthanol, le EMTB ou d'autres additifs dans un certain pourcentage, en même temps on supprime certains éléments. Si vous ajoutez 10 p. 100 ou 7,5 p. 100 d'un élément, vous êtes forcé de supprimer quelque chose, et en particulier une partie des éléments toxiques qui se trouvaient auparavant dans le mélange. Toutefois, il faut faire attention, car certains composés oxygénés produisent d'autres éléments, comme des aldéhydes, et il convient de faire la part des choses.
Il y a des avantages et des inconvénients, et dans certains cas il faut procéder à une analyse très approfondie pour décider de ce qui est préférable. Évidemment, des analyses ont déjà été faites, ce qui constitue déjà un avantage, puisque...
M. Chatters: Autrement dit, les autres solutions ne feront pas baisser les émissions d'oxyde nitreux.
M. Vena: Je crois comprendre qu'effectivement, qu'il s'agisse d'éthanol, de EMTB et de certains autres alkylats, les émissions d'oxyde nitreux ne baisseront pas. Mais d'autres additifs pourraient avoir cet effet.
M. Chatters: Quelqu'un a fait observer que ce projet de loi est utile, entre autres choses, parce qu'il harmonise notre situation à celle des États-Unis. Apparemment, depuis quelque 18 ans la Environmental Protection Agency étudie attentivement le cas du MMT, et, au terme de cette longue étude, un permis d'exploitation du MMT a finalement été donné aux États-Unis. Cette décision a été contestée devant les tribunaux, et le MMT a gagné une première fois; l'affaire est maintenant devant la cour d'appel fédérale, qui doit rendre une décision d'ici peu. D'après certains analystes, les chances que ce soit approuvé sont de 70 à 75 p. 100.
En interdisant cette substance ici, alors que selon toute probabilité elle va être approuvée aux États-Unis, est-ce que nous ne nous écartons pas encore une fois de la possibilité d'harmoniser nos carburants?
Mme Fry: Si vous le voulez, je vais discuter un peu des aspects juridiques. Comme vous l'avez dit, c'est une question qui a un long historique juridique, et, pour ma part, je n'essaie jamais de prédire les décisions des tribunaux, car...
M. Chatters: Mais il y a des gens qui le font.
Mme Fry: Certainement, mais pour l'instant aucune décision n'a été prise, ni dans un sens, ni dans l'autre. Cela dit, il ne faudrait pas penser qu'une fois la décision annoncée, quelle qu'elle soit, ce sera la fin de cette affaire.
Le fait est que nous ne savons pas ce qui se produirait si la décision allait contre l'EPA, puisque dans ce cas, par exemple, l'EPA pourrait décider de faire appel. Et si c'était le cas, cela pourrait prendre un an ou deux de plus. Si la décision était négative...
M. Chatters: Devant quelle instance feraient-ils appel? L'affaire est actuellement devant la cour d'appel fédérale, n'est-ce pas?
Mme Fry: Il y a une cour d'appel au-dessus, et mon collègue me dit que c'est la cour supérieure.
L'EPA pourrait décider d'utiliser d'autres outils juridiques. Si jamais ces... etc. Cela pourrait prendre très longtemps.
M. Chatters: Mais toujours sur le plan de l'harmonisation des carburants, ne serait-il pas logique d'attendre au moins cette décision du tribunal pour voir si en interdisant cette substance nous nous rapprochons de l'harmonisation ou nous en écartons?
M. Clarke: Le MMT n'est pas utilisé aux États-Unis. C'est dans le sens de cette norme-là que va notre harmonisation, si vous préférez cette façon de dire les choses. Nous ne voulons pas faire d'hypothèses sur ce qui pourrait se passer là-bas.
Toutefois, il y a une hypothèse que je serais prêt à avancer. Si les fabricants d'automobiles sont convaincus qu'ils auront des problèmes avec le MMT, si on réintroduisait le MMT dans l'essence, j'imagine que cela causerait encore plus de problèmes aux États-Unis. J'imagine que c'est là-bas qu'on réagirait.
Cela dit, nous sommes prêts à attendre que toute cette affaire aboutisse. Nous ne voulons pas faire de suppositions pour l'instant.
M. Chatters: Vous ne seriez pas prêt à abroger la loi, au nom de l'harmonisation, si le MMT était de nouveau utilisé aux États-Unis?
M. Clarke: Il y a une disposition à cet effet dans la loi, n'est-ce pas?
Mme Fry: Si on voulait changer rapidement ces dispositions, il y a effectivement une disposition technique. Mais M. Clarke nous dit que c'est un obstacle que nous surmonterons quand il se présentera.
Le président: Mais on continue à se demander si l'industrie automobile serait prête à renverser la vapeur sur le plan technologique si le MMT était réintroduit sur le marché, et cela, après une interdiction de seize ou dix-sept ans. Pendant ces années-là, des progrès technologiques ont été accomplis qui ont un certain impact sur l'industrie automobile. Il est peu probable que l'industrie automobile... Quand ses représentants comparaîtront devant nous, nous leur demanderons s'ils seraient prêts à revenir seize ans en arrière.
M. Chatters: Apparemment, si la décision du tribunal est favorable, plusieurs fabricants américains sont prêts à réintroduire du MMT dans l'essence.
M. Vena: C'est une question... si la décision était favorable à la société Ethyl, après une période d'appel de 45 jours on pourrait réintroduire légalement le MMT sur le marché américain, mais évidemment, ce qu'on ne sait pas, c'est dans quelle mesure les gens chercheraient à profiter de cette autorisation. La société Ethyl pourrait en parler également, mais il y a des secteurs américains... En fait, l'autorisation s'applique uniquement à l'essence classique. À l'heure actuelle, une proportion importante des carburants reformulés, de 30 à 35 p. 100 - cela dépend des États qui décident d'adhérer ou de ne pas adhérer - n'utilisent pas de MMT et ne dépendent pas de cette autorisation.
Les discussions que nous aurons avec les fabricants d'automobiles au sujet de leurs préoccupations sont également importantes. Techniquement, la substance peut être réintroduite dans le carburant, et certains raffineurs peuvent décider de l'utiliser pour des raisons de coûts ou pour améliorer marginalement l'indice d'octane. Cela dit, on ne sait pas vraiment qui s'en prévaudra. On ne peut pas dire que le MMT sera dorénavant facilement disponible, qu'il sera utilisé aux États-Unis... Il reste encore pas mal de temps avant que les choses se concrétisent; c'est une situation qui est incertaine depuis des années.
Je tenais à faire cette mise en garde.
M. Wappel: J'aimerais passer à un autre sujet, mais auparavant je peux vous dire que la cour d'appel des États-Unis, district de Columbia, a rendu une décision au sujet de l'affaire dont M. Chatters a parlé. La décision a été rendue le 14 avril 1995. Je connais mal le système judiciaire américain, mais j'imagine qu'après la cour d'appel, c'est devant la Cour suprême qu'on peut faire appel, et non pas devant la cour supérieure.
Mme Fry: Oui. C'est une affaire qui prête à confusion, car il y a plusieurs affaires devant les tribunaux en même temps. Je crois que la décision dont vous parlez, c'est la demande de dérogation.
M. Wappel: La dérogation, c'est exact.
Mme Fry: Nous étions en train de parler de la décision en ce qui concerne la demande d'enregistrement; c'est une affaire différente.
M. Wappel: C'est intéressant, car la cour d'appel a déterminé, dans le cas de la demande de l'EPA, que la société Ethyl Corp. avait réussi à prouver que la présence de MMT n'empêchait pas les appareils ou systèmes de contrôle des émissions de fonctionner selon les normes fixées par l'EPA aux États-Unis. Je précise cela, car c'est un détail qui m'a paru intéressant.
J'aimerais vous poser des questions sur le projet de loi. Apparemment, cela permettrait au ministre d'autoriser l'utilisation de MMT dans certaines circonstances, sous réserve de certaines exigences de contrôle. Pouvez-vous me dire en quoi consistent ces exigences de contrôle?
Mme Fry: Ce sont les cas où une permission est accordée à des gens qui veulent utiliser du MMT pour autres choses que pour l'essence sans plomb.
M. Wappel: Quelles sont ces autres choses? Pourriez-vous me donner un exemple?
Mme Fry: Frank, pensez-vous à une industrie qui serait susceptible d'utiliser cette substance?
M. Vena: Ce n'est pas très clair. On peut utiliser le MMT pour contrôler les émissions de fumée des moteurs diesel. Il pourrait y avoir d'autres utilisations.
M. Wappel: Je vais vous reposer la question: est-ce que vous connaissez des cas, ici au Canada, où on utilise le MMT autrement que comme additif pour les carburants, l'essence sans plomb?
M. Vena: Non, nous n'en connaissons pas.
M. Wappel: Dans ces conditions, cette disposition a été rédigée en prévision de quelque chose qui n'existe pas à l'heure actuelle au Canada.
Mme Fry: Absolument. Cela dit, lorsqu'une disposition figure dans la loi, elle est très difficile à changer. Nous avons voulu éviter d'interdire toutes les importations de MMT alors qu'en réalité, c'est l'essence sans plomb que nous visons, car dans plusieurs années quelqu'un pourrait trouver une utilisation tout à fait légitime, quelque chose qui n'aurait rien à voir avec l'essence sans plomb, et nous serions forcés de dire: «Ah, Seigneur, nous sommes désolés, nous pensons que votre idée est excellente, mais la loi ne nous permet pas de vous autoriser à l'importer.» Voilà l'objet de cette disposition.
M. Wappel: Dans ces conditions, pourquoi n'avoir pas rédigé l'article 4 de la façon suivante: «Il est interdit de se livrer au commerce interprovincial ou à l'importation d'une substance à usage contrôlé destinée à être utilisée dans l'essence sans plomb»?
Mme Fry: Si vous y réfléchissez, le résultat est le même. On a seulement décidé de le rédiger comme cela.
M. Wappel: Si vous visez uniquement l'essence sans plomb, l'article 4 semble aller beaucoup trop loin. Sous sa forme actuelle, il interdit tout usage commercial, à moins que le ministre n'accorde une exemption. Si nous voulons interdire cette substance uniquement dans les essences sans plomb, nous devrions le dire clairement.
Mme Fry: Il faut également faciliter l'application de cette loi. Aux fins de l'application, les procureurs qui poursuivent un contrevenant aiment bien se reposer sur une disposition claire et nette comme l'article 4.
Lorsqu'une personne importe cette substance, c'est une infraction si elle ne possède pas l'autorisation prévue par l'article 5, et, là encore, c'est un article clair et net, bien défini. Cela pourrait empêcher quelqu'un de s'en tirer en invoquant un détail technique ou une particularité de l'énoncé.
M. Wappel: Bien. Donc, les procureurs aiment que ce soit bien général.
Mme Fry: Les procureurs aiment que ce soit clair et simple, exactement comme vous.
M. Wappel: Et assez général pour qu'on ne puisse pas contourner quelque chose de trop détaillé.
Si le ministre autorise l'utilisation d'une substance contrôlée, quelles sont les dispositions de contrôle?
Mme Fry: Évidemment, ces dispositions sont là pour s'assurer que le MMT est utilisé selon les termes de l'autorisation, pour s'assurer - Dieu nous en préserve - que les gens n'ont pas menti lorsqu'ils ont formulé leur demande et qu'ils n'ont pas l'intention de l'utiliser dans de l'essence sans plomb.
Certains relevés et rapports doivent être préparés et envoyés.
M. Wappel: Pourriez-vous me donner plus de détails?
Mme Fry: L'article 9 dit que quiconque bénéficie de l'autorisation prévue à l'article 5 doit tenir un registre. Le paragraphe 9(2) cite les renseignements qui devraient figurer dans ce registre. Vous pouvez vous-même le lire si vous avez un exemplaire du projet de loi.
M. Wappel: Ce qui m'intéresse, c'est qu'ils doivent consigner ces renseignements dans les 30 jours qui suivent chaque opération. N'est-ce pas?
Mme Fry: Oui.
M. Wappel: Ces exigences de contrôle vont préoccuper le ministre, quel qu'il soit. Qu'arrivera-t-il à ce rapport qui doit être rempli dans les 30 jours suivant l'opération? Quand doit-il être communiqué au ministre?
Mme Fry: Si vous voulez bien vous reporter à l'article 10, vous verrez que l'intéressé doit tenir un tel registre et doit dans les 60 jours suivant la fin de l'année civile transmettre au ministre une déclaration suivant la forme que détermine celui-ci, etc.
Je devrais également ajouter que si, par exemple...
M. Wappel: Excusez-moi. Vous avez dit «dans les 60 jours qui suivent». Ce n'est pas dans les 60 jours qui suivent la rédaction du rapport. En d'autres termes, ce rapport doit se faire dans les 30 jours qui suivent.
Mme Fry: Oui.
M. Wappel: Mais ce n'est pas dans les 60 jours qui suivent la rédaction du rapport que vous devez le transmettre au ministre. C'est dans les 60 jours qui suivent la fin de votre année financière.
Mme Fry: C'est exact.
M. Wappel: Cela pourrait être 15 mois plus tard, n'est-ce pas?
Mme Fry: Oui.
M. Wappel: Comment peut-on alors parler de contrôle de l'utilisation d'un produit autre que les essences sans plomb si on bénéficie d'un délai de 15 mois?
Mme Fry: Ce n'est pas le seul moyen d'information du ministre.
Vous devez savoir, pour avoir lu la loi, que le ministre a le pouvoir de procéder à des inspections n'importe quand pour s'assurer du respect de la loi. Que cela concerne ou non le programme d'inspection normale du ministre, quiconque soupçonne la compagnie X de ne pas respecter les obligations imposées par la loi peut contacter le ministère, et le ministère envoie un inspecteur vérifier.
M. Wappel: Ma question est peut-être très simple. Pourquoi ne pas transmettre ce rapport dans les 60 jours qui suivent sa rédaction?
Mme Fry: Frank, voudriez-vous répondre à cette question qui concerne l'application de la loi?
M. Vena: Je crois qu'en fait, c'est une très bonne question. Cela semble tout à fait logique.
Pour ce qui est de l'application de la loi... De toute évidence, le ministre a demandé son avis au ministère de la Justice. Ce que vous demandez me semble tout à fait logique. Je ne peux pas vraiment vous dire pourquoi c'est ainsi.
M. Wappel: Monsieur le président, il faudrait peut-être demander au ministère de la Justice de nous le dire.
Oh, il y a un représentant de la Justice.
Mme Fry: N'exagérons pas. Les lois ne suivent pas toutes la même procédure, et c'est une question de décision administrative.
En l'occurrence, cette loi parle d'un rapport annuel devant être transmis dans les 60 jours suivant la fin de l'année civile. Bien sûr, il serait possible de fixer la transmission de ce rapport à 60 jours, 90 jours, 30 jours ou 5 jours, si vous voulez.
M. Wappel: C'est un choix.
Mme Fry: Oui.
M. Wappel: Je suppose que notre comité pourrait faire un choix différent de celui du rédacteur.
Mme Fry: Tout est possible.
M. Wappel: Merci, monsieur le président.
Le président: Je sens une possibilité d'amendement.
Je n'ai plus personne sur ma liste. L'après-midi a été très intéressant. Nous en avons appris plus sur l'essence que nous ne pouvions l'imaginer et nous avons peut-être aussi appris comment lire les projets de loi avec un oeil juridique en examinant plusieurs articles en même temps.
Nous tenons à vous dire que les précisions et les renseignements supplémentaires que vous nous avez donnés ont été très utiles. Comme vous le savez, c'est la première phase de nos audiences. Nous aurons peut-être de nouveau besoin de vous consulter individuellement au cours des prochains jours et des prochaines semaines.
Au nom de mes collègues encore une fois, thank you, merci beaucoup.
La séance est levée.