[Enregistrement électronique]
Le mercredi 1er mai 1996
[Français]
Le président: Je vous souhaite une bonne fin de journée.
Le Comité permanent des comptes publics se réunit conformément à l'alinéa 108(3)d) du Règlement en vue de débuter l'étude du chapitre 18 du Rapport du vérificateur général du Canada de novembre 1995 traitant de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique.
Avant de débuter, je vais demander aux témoins de bien vouloir s'identifier, en commençant par vous, monsieur Desautels.
M. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Bonjour, monsieur le président. Je m'appelle Denis Desautels et je suis accompagné aujourd'hui de M. John O'Brien, directeur principal de notre bureau de Halifax.
M. Norman Spector (président, Agence de promotion économique du Canada atlantique): Bonjour, monsieur le président. Je m'appelle Norman Spector et je suis accompagné de Paul LeBlanc, qui est notre vice-président, affaires corporatives.
Le président: Merci, messieurs. Est-ce que vous commencez par une déclaration d'ouverture, monsieur Desautels?
M. Desautels: Oui, monsieur le président.
Je suis heureux de pouvoir rencontrer le comité pour discuter du contenu du chapitre 18 de notre rapport annuel de 1995.
Notre vérification de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ou APECA, est l'une des quatre vérifications touchant les programmes de développement économique régionaux que nous avons faites en 1995. Les trois autres portaient sur les agences de l'Ouest canadien, de l'Ontario et du Québec. Quant au chapitre 17 de mon rapport de 1995, il présente un résumé de l'ensemble des questions liées au développement régional.
Selon la plupart des mesures, comme le taux de chômage ou le niveau d'activité économique, le Canada atlantique est désavantagé par rapport au reste du Canada. L'Agence fonctionne donc dans un environnement difficile où bon nombre des propositions qu'elle reçoit comportent des risques élevés.
Même si les agences de développement économique présentent de nombreuses similitudes, elles présentent aussi des différences importantes. À titre d'exemple, notre chapitre 20 sur la diversification de l'économie de l'Ouest canadien soulève des questions assez différentes de celles de l'APECA.
[Traduction]
Notre vérification de l'APECA a porté sur deux secteurs: d'une part, la mesure et la communication des résultats obtenus et, d'autre part, l'évaluation et la surveillance des projets.
Je reconnais que toute discussion des programmes de développement économique régional risque de soulever un débat sur les résultats réels obtenus. Les opinions sont nombreuses et elles ont tendance à être polarisées. Ces programmes sont confrontés à un certain nombre de problèmes quant à la confiance du public, particulièrement la question de savoir s'ils atteignent les objectifs énoncés.
L'histoire des programmes fédéraux de développement économique régional au Canada est marquée par de fréquents changements d'orientation et d'organisation. Les changements d'approche rendent l'évaluation des résultats plus difficile. Dans ces programmes, le processus de changement est continu.
Comme nous l'indiquons dans le chapitre 17, nous avons constaté que l'information sur les résultats obtenus par les programmes de développement économique régional ne montrait généralement pas que les programmes ont réduit les disparités régionales ni qu'ils ont atteint les autres objectifs énoncés. Certaines personnes ont laissé entendre qu'il est impossible de mesurer le rendement des programmes de développement économique. Toutefois, nous croyons que les résultats peuvent et doivent être mesurés. Je crois que les progrès réalisés par l'Agence au niveau de la mesure des résultats appuient ce point de vue.
[Français]
J'aimerais d'abord parler des facteurs où l'Agence a réussi à mesurer et à communiquer des résultats. Selon nous, les résultats choisis par l'Agence à des fins de mesures et de communication étaient pertinents par rapport à ses objectifs.
L'information que l'Agence communique sur les retombées macro-économiques de ses programmes va au-delà de la plupart des pratiques actuellement en vigueur.
L'Agence a respecté l'exigence législative qui en fait le seul organisme fédéral à devoir communiquer l'effet de ses programmes sur les disparités régionales. D'après nos constatations, l'information sur les résultats communiquée au Parlement était considérable et pertinente par rapport aux objectifs de l'Agence, même si elle était quelquefois présentée de façon confuse.
Qu'y a-t-il donc à améliorer? Nous croyons que l'Agence devrait améliorer la clarté des objectifs de ses programmes clés et les rendre plus mesurables. De plus, l'Agence devrait recueillir et conserver l'information sur les programmes nécessaire à l'évaluation des retombées des programmes. Par exemple, l'information sur les activités et les résultats réels des programmes exécutés dans le cadre du Programme de coopération n'était pas facile d'accès. En outre, nous sommes inquiets de la fiabilité des données de base utilisées pour évaluer le Programme Action. Enfin, l'Agence devrait mesurer et communiquer les répercussions négatives aussi bien que les résultats positifs de ses programmes.
Même si l'information sur les résultats que l'Agence communique au Parlement comporte d'importantes limitations, les premiers efforts déployés par l'Agence sont encourageants. À notre avis, la méthode adoptée par l'Agence la met sur la bonne voie, mais elle devrait faire preuve de plus de rigueur dans la collecte des données utilisées pour communiquer les résultats obtenus. En définitive, l'Agence devrait produire des évaluations exhaustives et équilibrées qui tiennent compte tant des répercussions positives que négatives de ses programmes.
Le comité voudra peut-être examiner les changements mis en oeuvre ou prévus par l'Agence qui influeront sur sa capacité future de mesurer et de communiquer les résultats obtenus.
[Traduction]
J'aimerais me tourner vers un autre secteur important de notre vérification, l'évaluation et la surveillance de projets individuels par l'Agence. Nous avons cherché à savoir si les évaluations tenaient compte des questions suivantes: la nécessité d'un financement par le gouvernement, la viabilité du projet, les retombées économiques nettes sur la région et l'importance des capitaux fournis par le requérant.
Nous avons constaté que les évaluations effectuées par l'Agence ont bien tenu compte de certains des risques qui pèsent sur ces objectifs de développement économique. Toutefois, dans un grand nombre de cas, nous avons noté que l'Agence n'avait pas adéquatement tenu compte d'au moins une de ces questions de base avant de donner son approbation. Par exemple, nous avons relevé des projets où les requérants semblaient avoir des ressources suffisantes pour aller de l'avant et où l'analyse de l'Agence n'avait pas relevé les raisons pour lesquelles l'aide gouvernementale était nécessaire. Dans d'autres cas, l'analyse de l'Agence n'avait pas tenu pleinement compte des graves obstacles à la viabilité des projets.
Lorsqu'elle évalue des projets, l'Agence doit établir un lien plus serré entre les résultats attendus du projet et les objectifs du programme. Par exemple, il n'est pas suffisant de dire que le résultat à atteindre est l'embauche d'un directeur du marketing. À notre avis, le résultat attendu doit plutôt être formulé de manière à indiquer ce à quoi devrait donner lieu l'embauche de ce directeur.
Nous avons constaté que l'Agence surveillait bien le respect des modalités de paiement qui figurent dans les contrats. Toutefois, il faut que les agents d'affaires comprennent mieux les opérations des clients ainsi que l'évolution et les résultats des projets. Une meilleure compréhension des résultats de chaque projet devrait aider les gestionnaires à prendre des décisions au sujet des projets futurs.
Une partie importante des programmes de l'Agence comporte des ententes fédérales-provinciales de développement économique. Nous avons toutefois relevé un certain nombre de problèmes importants au niveau des ententes existantes. Nous avons constaté que les objectifs n'étaient pas clairs, mesurables, ni orientés sur les résultats; que les critères d'admissibilité ne tenaient pas compte des concepts de développement économique clés; et que la répartition des responsabilités de surveillance des projets et de communication de l'information sur le rendement des projets n'était pas claire. Comme il est difficile de modifier les ententes existantes, l'Agence devrait s'efforcer de négocier des améliorations de ces aspects dans les ententes fédérales-provinciales futures.
[Français]
J'ai déjà mentionné au comité mes inquiétudes sur la reddition de comptes à l'égard de l'exécution de programmes auxquels participent des tierces parties. L'Agence conclut des ententes avec beaucoup d'organisations non commerciales qui l'aident à réaliser ses objectifs de développement économique. Selon nos constatations, l'Agence doit améliorer la communication des résultats de ces ententes. L'accent étant mis de plus en plus sur le développement économique communautaire, il importe que l'Agence fixe ses objectifs de projets clairement et qu'elle demande aux tierces parties de communiquer les résultats des projets à l'Agence.
J'aimerais aussi faire ressortir les observations positives que nous avons formulées au sujet du rôle que l'Agence a joué dans la coordination des activités de développement de deux secteurs particuliers d'activités. Les efforts déployés par l'Agence en vue de coordonner ses activités de développement avec celles d'autres paliers de gouvernement et le secteur privé sont encourageants.
Le comité voudra peut-être examiner les mesures prévues ou prises par l'Agence pour améliorer l'évaluation et la surveillance des projets et pour resserrer le contrôle sur l'exécution des programmes par des tierces parties.
Monsieur le président, pour résumer, nous nous sommes dits inquiets des limites que comportent les résultats des programmes communiqués par l'Agence et de la nécessité, pour cette dernière, d'améliorer l'évaluation et la surveillance des projets.
Je vous remercie, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Desautels.
Monsieur Spector, avant que vous ne commenciez à parler, pouvez-vous nous dire si vous avez des notes écrites pour nous permettre de suivre votre présentation?
M. Spector: Non, j'ai décidé de ne pas faire d'exposé d'ouverture. J'ai simplement quelques mots à dire, si vous me le permettez.
Le président: On ne vous avait pas demandé de nous faire parvenir des notes?
M. Spector: Le greffier nous a dit que c'était optionnel. J'avais le choix de faire ou de ne pas faire d'exposé d'ouverture. J'ai donc choisi de ne pas en faire afin de vous donner plus de temps pour poser vos questions.
Le président: D'accord, allez-y.
[Traduction]
M. Spector: Plus précisément, ce qu'on nous a indiqué à votre bureau, c'est que c'était optionnel, qu'on pouvait choisir de faire une déclaration écrite ou pas. Nous avons décidé de ne pas le faire pour laisser plus de temps au comité.
À l'APECA, nous sommes tous très reconnaissants au vérificateur général d'avoir reconnu l'importance de nos progrès sur le plan de l'évaluation des programmes. En effet, comme il l'a fait remarquer, parmi les agences régionales, nous sommes la seule qui soit tenue d'effectuer une telle évaluation. Si on considère que ces activités se sont déroulées pendant nos années de démarrage, il y a tout lieu de féliciter les gens qui étaient en place à l'époque pour tous leurs efforts - et je ne me compte pas parmi eux.
Cela dit, le vérificateur général a signalé clairement divers domaines où nous pourrions faire mieux. En ma qualité de président de l'APECA, j'avoue que j'accueille ces suggestions avec plaisir. À mon avis, le vérificateur général est l'un des meilleurs alliés d'un sous-ministre, car il peut l'aider à s'assurer que les programmes qu'il ou elle administre sont bien conformes aux objectifs fixés. Dans ce cas particulier, ce sont des objectifs de développement économique, de création d'emplois, de croissance et de développement régional. Pour atteindre les objectifs fixés par le Parlement et servir d'instrument économique au Parlement, nous avons donc tout intérêt à poursuivre le dialogue avec le vérificateur général. Nous accueillons donc ce rapport avec plaisir.
Des changements considérables ont été apportés depuis la période étudiée dans ce rapport, une période qui couvre les années de démarrage, de 1988 à 1993. Certains des programmes commentés par le vérificateur général ont beaucoup changé, en particulier le programme Action qui n'existe plus et qui a maintenant été remplacé par le programme de développement commercial.
Aux termes du programme de développement commercial, toutes les contributions à des organismes commerciaux deviennent remboursables. C'est une situation très différente de celle que nous avons comme pendant les années de démarrage. Étant donné que les contributions sont remboursables, nos agents d'affaires suivent ces projets de beaucoup plus près. Pour cette raison, je crois bien que la prochaine fois que nos programmes seront évalués, ils le seront à partir de données beaucoup plus solides. De la même façon, des changements considérables ont été apportés à l'autre programme important évalué par le vérificateur général, le programme de coopération. En effet, nous négocions actuellement des ententes distinctes avec chacune des quatre provinces.
Nous avons réussi à convaincre de plus en plus de provinces d'entrer dans ce monde nouveau de la vérification de l'optimisation des ressources. La prochaine fois, nous espérons que ces programmes seront évalués clairement sur la base des résultats obtenus et, à cet égard, nous accueillons d'une façon très positive l'exemple cité par le vérificateur général. De toute évidence, il fait une distinction tout à fait justifiée entre les efforts et les résultats, une distinction que nous souhaitons conserver lors d'évaluations futures.
Mais il y a une lacune dans ce rapport, une chose pour laquelle nous souhaiterions voir le vérificateur général intervenir plus activement à l'avenir et nous dispenser plus de conseils. Je m'explique: par définition, le bureau du vérificateur général s'intéresse particulièrement aux programmes qui consomment de vastes ressources, et en particulier des ressources financières. Dans le monde nouveau vers lequel le gouvernement fédéral semble s'orienter, il y aura, d'une part, moins de ressources et, d'autre part, plus de partenariats. Il me semble que pour se faire une idée complète et équilibrée d'une agence comme l'APECA, nous devrions accorder beaucoup d'attention non seulement aux programmes qui consomment des ressources, mais également à ceux qui n'en consomment pas beaucoup.
Qu'est-ce que je veux dire par là? Je vais vous donner un exemple. Dans la région de l'Atlantique - et je crois que cela est sans précédent au Canada - nous avons maintenant 50 000 étudiants inscrits à des cours d'entrepreneuriat, des cours axés sur le travail autonome, le démarrage d'une entreprise, etc. On tente ainsi de modifier la culture de la région de l'Atlantique pour servir les objectifs du développement économique. D'ici l'an 2000, nous aurons des cours d'entrepreneuriat de la maternelle à la 12e année. À cet égard, nous travaillons en étroite collaboration avec les écoles, et sans passer par les provinces. Tous les élèves, de la maternelle à la 12e année, étudiants pourront suivre des cours d'entrepreneuriat.
Cet aspect nous semble particulièrement important si nous voulons pouvoir mesurer l'incidence que ces programmes et les changements culturels qu'ils représentent auront sur l'économie et sur la création d'emplois. Ces programmes ne représentent pas des centaines ni même des dizaines de millions de dollars. Lors de nos discussions permanentes avec le vérificateur général au cours des années qui viennent, nous allons tenter de mettre au point des moyens pour mesurer non seulement les projets qui consomment beaucoup de ressources, mais également ceux qui en consomment moins, et dont l'orientation est plus diffuse. Que faut-il faire, donc, pour cerner l'incidence de ces programmes sur l'économie et la création d'emploi?
[Français]
Monsieur le président, sur ces mots je termine ma présentation. Je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Spector.
Je donne la parole au représentant du Bloc québécois, M. Rocheleau.
M. Rocheleau (Trois-Rivières): Mes questions s'adresseront à M. Desautels. J'ai trois questions. La première porte sur le paragraphe 22 où vous dites que l'Agence a réussi à agir comme coordonnateur des activités de développement avec d'autres paliers de gouvernement et le secteur privé. On parle ici d'activités, de responsabilités, de coordination. Peut-on dire qu'il pourrait y avoir eu dédoublement entre certains programmes de l'Agence et certains programmes de l'un ou l'autre des gouvernements provinciaux des Maritimes?
Ma deuxième question porte sur le paragraphe 8 de votre commentaire d'introduction, dont le contenu m'apparaît très important. J'aimerais simplement que vous élaboriez davantage sur ce que vous avancez quand vous dites:
- ...nous avons constaté que l'information sur les résultats obtenus par les programmes de
développement économique régional ne montrait généralement pas que les programmes ont
réduit les disparités régionales ni qu'ils ont atteint les autres objectifs énoncés.
- J'aimerais que vous élaboriez davantage pour le bénéfice des membres du Comité.
Ce sont mes trois questions, monsieur le président.
M. Desautels: Monsieur le président, je vais essayer de répondre assez rapidement aux trois questions. Premièrement, en référence avec le paragraphe 22, le député demande s'il y a dédoublement avec les programmes des provinces. Nous n'avons pas noté, au cours de notre travail, de dédoublement comme tel. Nous avons plutôt observé une assez bonne coordination entre l'Agence et les fonctionnaires oeuvrant sur le plan provincial. Donc, en autant que je sois concerné, je n'ai pas découvert l'existence de ce problème. Au contraire, il semble y avoir une assez bonne coopération.
Quant aux statistiques sur les disparités régionales, vous avez parlé du paragraphe 8 du chapitre 18, je crois.
M. Rocheleau: Non, du paragraphe 8 de votre déclaration.
M. Desautels: Nous avons fourni dans le chapitre 18 une série d'indicateurs qui établissent, entre autres, des comparaisons de revenus moyen pour l'ensemble du Canada avec ceux des provinces de l'Atlantique et des comparaisons de taux de chômage.
On s'aperçoit que pendant les années allant de 1960 à 1994, les différences se sont peut-être amenuisées un petit peu à certains égards. Mais dans l'ensemble, il y a un écart assez important pour la plupart des indicateurs économiques que je viens de nommer. Tout ça, je pense, est assez bien illustré dans notre chapitre 18.
Vous demandiez également s'il y a au sein de l'APECA des programmes semblables à ceux qui existent au gouvernement du Québec, je crois?
M. Rocheleau: Non.
Est-ce que, comme le BFDR au Québec, l'APECA a la responsabilité de coordonner des programmes comme ceux de la SADC? Est-ce qu'il existe une SADC dans les Maritimes? Si oui, est-ce que l'APECA a la responsabilité nouvelle et récente, comme le BFDR, de coordonner?
M. Desautels: Oui. Cependant, je préférerais que le président de l'APECA réponde à cette question vu que c'est cette agence qui s'occupe de ces programmes.
Le président: C'est ce que je voulais suggérer. Je ne voulais pas être directif quant au choix de vos questions. Je pense que M. Spector aimerait y répondre.
M. Spector: Que veut dire le sigle SADC?
M. Rocheleau: La Société d'aide au développement des collectivités.
M. Spector: En effet, nous sommes responsables de programmes semblables qui nous ont été transférés par le ministère du Développement des ressources humaines, il y a plusieurs années. Chez nous ils s'appellent Community Futures Corporations.
Nous avons la même responsabilité de promouvoir le développement économique au niveau de la collectivité, des communautés, etc. On prévoit que ces organismes contribueront à la création de 4 000 emplois au cours des cinq prochaines années de notre période de planification.
M. Rocheleau: Je voudrais revenir sur le paragraphe 8.
Si on en croit vos conclusions, le gouvernement ne devrait-il pas songer sérieusement à repenser ou, peut-être, à abolir ces programmes, puisqu'ils semblent plutôt inefficaces ou sans portée véritable, compte tenu qu'ils entraînent des coûts? Est-ce que votre recommandation va aussi loin?
M. Desautels: Nous ne sommes pas allés jusqu'à laisser entendre qu'étant donné le maintien plus ou moins grand des écarts, les programmes n'auraient pas leur raison d'être.
Il y a bien des façons d'interpréter ces résultats. On pourrait même soutenir que l'écart aurait été encore plus grand si de tels programmes n'avaient pas été en place pendant toutes ces années.
Cependant, étant donné que les gens s'interrogent sur ces programmes, non seulement dans le Canada atlantique mais ailleurs au pays, nous pensons qu'il est important de mesurer régulièrement leur impact véritable et les résultats atteints.
Il faut essayer de satisfaire, d'une certaine façon, le besoin de savoir de ceux qui se posent des questions, justement du genre de celles que vous posez, à savoir si les programmes en place sont toujours valables ou s'ils devraient être modifiés.
Je crois qu'une évaluation assez rigoureuse de ces programmes peut aider les parlementaires à tirer des conclusions.
M. Rocheleau: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Harper, vous avez 10 minutes.
M. Harper (Simcoe-Centre): Merci, monsieur le président.
En fait, c'est une question de procédure que j'aimerais aborder, car si j'ai bien compris ce que vous avez dit au début de la réunion, vous avez réclamé une déclaration d'ouverture écrite. Les greffiers ont précisé que la décision appartenait à M. Spector, contrairement à la requête du président. Pouvez-vous me dire si vous avez formulé cette requête et si c'est véritablement optionnel?
[Français]
Le président: Il n'était pas dans notre intention de tenir un long débat sur le sujet. Cependant, le greffier, qui est un des vétérans des comités sur la Colline, a évoqué cette possibilité et mentionné qu'il était d'usage...
Il s'agit peut-être d'une simple mésentente en ce qui concerne la façon dont la demande du greffier a été adressée à M. Spector et la façon dont elle a été comprise par M. Spector. Je pense qu'on ne devrait pas passer beaucoup de temps là-dessus, avec tout le respect que je vous dois, monsieur Harper. Je pense qu'on ne devrait pas insister davantage.
Par contre, quand un témoin se présente ici sans notes, ça illustre... Disons qu'on pourrait présumer du sérieux de la démarche si... Je veux réserver mes commentaires pour la fin du témoignage de M. Spector dans son entier, vis-à-vis des recommandations contenues dans le rapport du vérificateur.
[Traduction]
M. Harper: Merci, monsieur le président.
J'ai une question à l'intention de M. Spector au sujet de l'aperçu, et en particulier au sujet des observations qui figurent au paragraphe 17.53, intitulé «Les résultats d'un programme ne se limitent pas à la somme des résultats des projets». Autrement dit, nous devrions évaluer la façon dont réagiraient les revenus et l'emploi si l'APECA n'existait pas.
Je vous pose donc la question suivante: dans quelle mesure envisagez-vous de donner suite à cette suggestion du paragraphe 17.53?
M. Spector: Je ne voudrais pas non plus prolonger le débat, mais c'est une option qui nous a effectivement été présentée et nous avons, je crois, répondu par écrit que nous n'allions pas soumettre de déclaration écrite, précisant que cela laisserait plus de temps pour les questions. Si on nous avait répondu qu'une déclaration écrite était obligatoire, évidemment, mais en aurions préparé une.
Peut-être s'est-il agi d'un malentendu, mais nous avons effectivement échangé des lettres à ce sujet il y a plusieurs semaines.
Quant à vos observations au sujet de l'évaluation des programmes, vous avez parfaitement raison. À mon avis, ce n'est pas le succès d'un projet comparé à un autre, ce n'est pas le fait que trois projets réussissent et qu'un quatrième échoue qui intéresse les parlementaires. Tout cela est digne d'intérêt, mais ce qui retient surtout l'attention des parlementaires, ce sont les résultats d'un programme.
En fait, c'est ainsi que nous abordons la question. Nous avons essayé d'évaluer les résultats de nos principaux programmes, le programme de développement commercial, qui fournit des contributions remboursables, et le programme de coopération, qui est fondé sur une entente fédérale-provinciale vieille d'une trentaine d'années. Nous avons soumis au Parlement un rapport quinquennal pour les années 1988 à 1993, une évaluation de nos principaux programmes et des résultats obtenus, et en particulier des résultats obtenus sur le plan des emplois.
Ai-je bien répondu à votre question, ou bien ai-je oublié quelque chose?
M. Harper: Je ne pense pas que vous y ayez répondu. Je vous ai demandé si vous aviez l'intention de déterminer ce qui se produirait si vous n'étiez pas là, si vous n'interveniez plus dans le secteur privé. C'est la question qu'on pose au paragraphe 17.53. C'est l'autre côté de la médaille dont vous devez tenir compte. Je reconnais que ce programme a permis de créer x nombre d'emplois, mais que se serait-il passé s'il n'avait pas existé? Voilà la question posée au paragraphe 17.53 et je pense que vous n'y avez pas répondu.
M. Spector: D'accord. Cette question de savoir ce qui se serait produit si nous n'étions pas là soulève deux aspects. D'une part, il y a la relativité. Supposons que nous ayons créé 100 emplois. Nous nous demandons si en même temps, à cause d'une concurrence déloyale, par exemple, nous n'avons pas détruit 20 autres emplois. Les chiffres que nous avons soumis au Parlement, soit 42 000 emplois pour nos cinq premières années, sont des chiffres nets.
Nos mesures ne sont peut-être pas tout à fait exactes. Je ne jurerais pas qu'il ne s'agit pas de41 950 emplois, etc. Mais sur le plan intellectuel, sur le plan empirique, nous tenons compte de votre argument dans nos analyses.
Une fois en possession de ces chiffres nets, si on se demande ce qui se produirait si nous n'étions pas là, eh bien ces 40 000 emplois n'existeraient pas. C'est le moins qu'on puisse dire.
En ce qui concerne la concurrence avec le secteur privé, pour l'instant, je ne pense pas qu'on puisse prétendre que nous livrons concurrence au secteur privé. Nous fournissons des contributions remboursables, mais ce n'est pas comparable à ce qu'une banque pourrait offrir. Ces contributions sont sans intérêt, ne nécessitent pas de garanties et sont remboursables sur de très longues périodes. Ainsi, si nous n'existions pas, ce chiffre de 40 000, à quelques emplois près... c'est un chiffre assez solide et il n'y a pas de question de concurrence avec le secteur privé.
M. Harper: Merci.
Aux termes de votre nouveau programme Action, tous les prêts seront dorénavant remboursables. Vous avez dit, je crois, que la totalité de ces prêts deviendrait remboursable. Avez-vous cherché à projeter le taux de remboursement probable? Dans quelle mesure réussirez-vous à récupérer la totalité de ces prêts?
M. Spector: Pour l'instant, nous espérons les récupérer tous.
M. Harper: Ce que vous espérez, c'est une chose, mais est-ce que quelqu'un a vraiment cherché...
M. Spector: Nous sommes actuellement en pourparlers avec le Conseil du Trésor pour déterminer notre budget futur. Autrement dit, on tient pour acquis que nous aurons dorénavant des rentrées, et ces rentrées seront déduites de nos crédits. Nous sommes actuellement en négociations avec le Conseil du Trésor.
M. Harper: Votre modèle repose sur l'hypothèse que les emplois créés existeront pendant 10 ans. Dans son rapport, le vérificateur général mentionne qu'il n'a trouvé aucune preuve de cette assertion. En fait, Statistique Canada possède des chiffres sur la durée moyenne d'occupation d'un emploi dans les quatre provinces de l'Atlantique: à Terre-Neuve, 98,2 mois; dans l'Île-du-Prince-Édouard, 98,3 mois; en Nouvelle-Écosse, 100,4 mois et au Nouveau-Brunswick, 100,1 mois. Dans ces conditions, comment pouvez-vous justifier cette prévision de 10 ans, c'est-à-dire 120 mois?
M. Spector: Ce sont des chiffres de Statistique Canada? Je n'ai pas vu ce rapport, et j'aimerais le consulter et déterminer sur quoi se fonde cette analyse avant de vous répondre.
M. Harper: Vous n'avez pas vu ces chiffres?
M. Spector: C'est exact.
M. Harper: Et vous ne savez pas très bien pourquoi vous vous basez sur une période de 10 ans.
M. Spector: Je n'en suis pas certain. On ne m'a toujours pas fourni de meilleurs chiffres, mais j'aimerais regarder ce que vous avez cité.
M. Harper: D'accord. Merci.
Le président: Monsieur Byrne.
M. Byrne (Humber - Sainte-Barbe - Baie Verte): Merci, monsieur le président. Je suis heureux de pouvoir poser des questions aujourd'hui, et je remercie nos deux groupes de témoins de comparaître. Pour commencer, j'ai des questions à l'intention du vérificateur général.
Lorsque vous effectuez une vérification, j'imagine qu'en plus de l'année financière en question, vous vous penchez également sur la performance passée, les vérifications antérieures, et que cela vous aide à formuler vos recommandations ou vos critiques pour l'année qui fait l'objet de votre vérification. C'est bien ce que vous faites?
M. Desautels: Dans ce cas particulier, nous ne nous sommes pas contentés de considérer les transactions ou la situation cette année-là. Comme vous le savez, ce n'est pas le premier rapport que nous faisons sur l'APECA, c'est un organisme que nous connaissons très bien et notre vérification s'appuie en partie sur les connaissances accumulées au cours des années.
M. Byrne: Dans ces conditions, à votre avis, comment la performance de l'APECA ces dernières années se compare-t-elle à celle des toutes premières années, par exemple de 1987 au début des années 90? Quelle est votre opinion professionnelle, pensez-vous que les résultats de l'APECA sont plus satisfaisants aujourd'hui?
M. Desautels: Monsieur le président, sans entrer dans toutes sortes de détails, je crois pouvoir dire que les problèmes que nous avons soulevés et que d'autres ont soulevés au sujet de l'APECA au cours des années passées n'existent probablement plus. En ce qui concerne une partie des activités quotidiennes de l'agence, la situation au moment de notre vérification en 1995 était en fait meilleure que celle que nous aurions trouvée, par exemple quatre ou cinq ans plus tôt, et meilleure que la situation trouvée par d'autres.
M. Byrne: Est-il juste de supposer que grâce à vos critiques ou à vos évaluations des dernières années, des changements structurels au sein du programme ont éliminé la cause de vos préoccupations initiales? Plus particulièrement, lorsque vous avez formulé des critiques... je suppose que vous ne répétez pas les mêmes critiques, car elles ont été résolues. Est-ce bien le cas?
M. Desautels: Je demanderais à M. O'Brien de compléter ma réponse tout à l'heure.
Certains des problèmes que nous avons soulevés cette fois, par exemple, avaient déjà été soulevés précédemment. Une partie seulement d'entre eux avaient été résolus dans une certaine mesure. Par exemple, nous avons constaté cette fois des problèmes dans la façon de traiter certaines demandes d'assistance pour des projets, et de tenir compte de différents facteurs dans l'évaluation de ces demandes. Précédemment, nous avions constaté de nombreux problèmes de ce genre dans des cas particuliers, que nous avions signalés dans nos précédents rapports. Nous considérons donc que l'APECA d'aujourd'hui est bien différente de ce qu'elle était il y a quelques années.
Mais cela ne veut pas dire que tout soit parfait. Comme vous le savez, il y a toujours des problèmes dans certains cas. Nous en donnons des exemples dans ce rapport.
Monsieur le président, j'aimerais que cette question soit approfondie par M. O'Brien, qui a effectué la vérification de l'APECA.
M. John O'Brien (directeur principal, Direction générale des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Je vous dirai simplement que nos vérifications précédentes de l'APECA portaient sur des projets isolés. C'est la première fois que nous effectuons une vérification intégrée de l'optimisation des ressources auprès de l'APECA depuis sa création en 1987. Les observations que nous avons faites précédemment étaient parcellaires. Comme l'a dit le vérificateur général, nous avons parfois observé de nouveau les mêmes problèmes. Si l'on compare globalement la situation d'il y a cinq ou six ans à la situation actuelle... Il y a six ans, nous n'avions pas fait de vérification intégrée; donc, il est difficile de mesurer véritablement le progrès. Si l'organisme existe encore d'ici cinq ou six ans, nous aurons un point de repère.
M. Byrne: Pourquoi n'avez-vous pas fait de vérification intégrée il y a six ans? Il me semble qu'un programme important et relativement nouveau comme celui-ci, qui est destiné à une région particulière, justifie une vérification intégrée chaque année, en particulier au début.
M. O'Brien: Nos vérifications comportent un cycle de cinq à huit ans. Cette vérification est arrivée à point nommé. Nous voulions étudier simultanément tous les organismes de développement régional. Dans le cas de l'APECA, nous voulions lui laisser la possibilité de se développer au cours des premières années.
M. Byrne: Passons à une autre série de questions. On a dit que cette vérification arrivait à point nommé. Je pense que c'est effectivement le cas. Dans son rapport, le vérificateur général signale que l'Agence s'est efforcée - et je suppose qu'elle y a réussi - de coordonner ses initiatives de développement économique avec d'autres paliers de gouvernement.
Le Comité sénatorial des banques vient de publier son rapport; il estime que l'APECA devrait fermer ses portes et s'intégrer à d'autres organismes ou ministères d'envergure nationale. Le vérificateur général semble aller à l'encontre de ce point de vue, car à son avis, l'APECA présenterait moins de chevauchements que le comité sénatorial ne semble le croire.
Pour le compte rendu, j'aimerais avoir votre opinion sur les recommandations et le rapport du Comité sénatorial des banques.
M. Spector: Pour des raisons évidentes, je n'ai pas à me déclarer en accord ou en désaccord avec la recommandation du comité sénatorial, à laquelle le gouvernement donnera les suites qu'il jugera appropriées.
Je dirai simplement qu'au niveau des faits, le comité sénatorial n'a pas été constitué pour étudier les organismes de développement régional. Sa tâche est de surveiller les organismes du gouvernement du Canada qui prêtent de l'argent pour voir s'il y a chevauchement et double emploi entre ces organismes de prêts au niveau fédéral.
À la fin du processus, le comité a demandé aux organismes de développement régional de comparaître, puisqu'eux aussi pratiquent le crédit, comme nous le faisons nous-mêmes. Le comité n'a pas étudié l'ensemble de nos activités ni celles des autres organismes de développement régional.
Par conséquent, ce serait mélanger les torchons et les serviettes que de prétendre qu'il a fait ce que le vérificateur général... Le vérificateur général a considéré l'ensemble des programmes de l'organisme, alors que le comité sénatorial s'est occupé uniquement des activités de crédit.
Deuxièmement, à mon avis, le comité sénatorial commet une erreur au niveau des faits lorsqu'il dit que nous faisons double emploi avec la Banque fédérale de développement, car comme l'a indiqué M. Harper, la Banque fédérale de développement pratique le crédit dans des conditions tout à fait différentes de celles qui accompagnent nos contributions remboursables.
Je peux donc vous donner une réponse en deux parties: tout d'abord, à mon avis, les observations du comité ne sont pas exactes en ce qui concerne nos activités de crédit et deuxièmement, le comité n'a pas étudié l'ensemble de nos activités, qui comprennent la coordination de l'activité économique avec les provinces, etc.
M. Byrne: Je comprends que vous n'acceptiez pas de bon gré de prendre officiellement position sur le rapport du Comité sénatorial des banques. Cependant, vous dites très nettement que vous avez bien réussi dans vos interventions directes auprès des entrepreneurs, et que vous l'avez fait sans participation directe des provinces.
Vous avez éprouvé le besoin de travailler en partenariat avec des commissions scolaires, des enseignants et des étudiants et de venir en aide à des entrepreneurs; or, d'après l'une des recommandations du rapport du Comité sénatorial des banques, lorsqu'il existe des programmes de développement économique régional qui sont financés au niveau fédéral mais qui ne comportent pas de services directs aux entreprises, ces programmes devraient être exécutés par des organismes provinciaux. Pourtant, vous dites que votre organisme a travaillé efficacement en relation directe avec des entrepreneurs et, je suppose, des organismes à but non lucratif. Puis-je avoir votre opinion à ce sujet?
M. Spector: Je pense que c'est exact, et cela prouve bien ce que je viens de dire, à savoir que le comité n'a pas considéré l'ensemble de nos programmes. Il ne nous a pas interrogés sur nos programmes destinés aux entrepreneurs.
Je voudrais vous donner un autre exemple de collaboration avec les provinces. Il s'agit de la promotion du tourisme. Nous avons réuni les quatre provinces de l'Atlantique pour la première fois autour d'une même table pour faire la promotion commerciale du Canada atlantique en tant que région, au lieu de laisser chacune des provinces faire sa propre publicité à l'étranger. Nous avons créé la notion de Canada atlantique dans le domaine de la promotion touristique. Les provinces n'auraient pas entrepris d'elles-mêmes une telle activité.
Il existe une forte concurrence entre les provinces, mais nous les avons réunies. Nous avons tiré parti des synergies pour faire une campagne de promotion commune, à tel point que le Nouveau-Brunswick ne fait plus de publicité touristique aux États-Unis, par exemple. Il fait partie du partenariat touristique du Canada atlantique pour ce qui est de la publicité aux États-Unis; et il peut consacrer l'argent ainsi économisé à la promotion touristique au Québec, qui représente un marché très important pour le Nouveau-Brunswick.
Il y a donc de nombreux domaines où nous apportons une valeur ajoutée, aussi bien lorsque nous ne travaillons pas avec les provinces, comme dans le cas de l'aide aux entrepreneurs, que lorsque nous collaborons avec elles dans une démarche régionale. Nous savons bien qu'il s'agit d'une petite région faiblement peuplée. C'est là l'un des problèmes du Canada atlantique. Nous faisons donc appel à une démarche régionale pour tirer parti des économies d'échelle.
Mais encore une fois, le comité sénatorial ne nous a pas demandé de comparaître pour ces raisons, puisqu'il n'a pas pour mandat de discuter du partenariat touristique du Canada atlantique.
Le président: Merci, monsieur Byrne.
M. Byrne: Merci.
[Français]
Le président: Avant qu'on entreprenne les questions, je vous dirai, monsieur Spector, que jusqu'à présent, je suis un peu déçu de la façon dont vous avez abordé l'exercice auquel nous nous livrons. Peut-être est-ce dû à votre expérience des séances de comités. Nous ne souhaitions pas que vous vous sentiez impressionné par nous. Cependant, vous semblez complètement détaché vis-à-vis de ce qui se dit et vous nous servez des généralités.
Dans vos remarques d'introduction, vous avez dit que vous apprécieriez que le vérificateur général ait des suggestions à vous faire ou des conseils à vous donner. De notre côté, nous nous attendions... Votre budget pour 1996-1997 est de 354 millions de dollars, et cet argent provient des impôts des Canadiens qui, soit dit en passant, sont fatigués de payer pour toutes sortes de choses. C'est de cela qu'on traite ici.
Je suis déçu parce que j'aurais aimé vous entendre et vous lire sur ce que vous avez fait de concret depuis novembre 1995. Je vous cite quelques courts paragraphes du rapport du vérificateur général et des extraits de ses notes d'aujourd'hui. Au paragraphe 11, il nous dit, à propos de l'information, qu'elle «était quelquefois présentée de façon confuse». Au paragraphe 12 des notes du vérificateur général, on dit:
- Qu'y a-t-il à améliorer? L'Agence devrait améliorer la clarté des objectifs de ses programmes
clés et les rendre plus mesurables.
- Ensuite, toujours dans le même paragraphe, on dit:
- Enfin, l'Agence devrait mesurer et communiquer les répercussions négatives aussi bien que les
résultats positifs de ses programmes.
- ...dans un grand nombre de cas, nous avons noté que l'Agence n'avait pas adéquatement tenu
compte d'au moins une de ces questions de base avant de donner son approbation.
Voici un autre exemple; au paragraphe 19, le vérificateur général nous dit que «les objectifs ne sont pas clairs, mesurables ni orientés sur les résultats». Au paragraphe 24, il conclut en disant:
- ...nous nous sommes dits inquiets des limites que comportent les résultats des programmes
communiqués par l'Agence et de la nécessité, pour cette dernière, d'améliorer l'évaluation et la
surveillance des projets.
[Traduction]
M. Spector: Monsieur le président, je vous remercie de votre question. Je suis tout à fait disposé à donner une réponse précise à une question précise.
Comme je l'ai dit, le vérificateur général signale que nous innovons avec nos évaluations, et que personne n'a fait cela avant nous. Nous faisons oeuvre de pionniers. C'est ce que signale le rapport. Oui, nous aurions pu faire mieux au cours des cinq premières années. Bien sûr, nous aurions pu avoir de meilleurs résultats, nous aurions pu mieux les mesurer, mais nous avons fait oeuvre de pionniers. Aucun autre organisme n'a encore fait ce que nous avons fait en matière d'évaluation de programmes.
Plus précisément, nous avons un nouveau programme d'aide aux entreprises, et le programme d'évaluation que nous sommes en train de préparer en vue de notre prochain rapport au Parlement tiendra compte des critiques formulées par le vérificateur général. Comme il l'a proposé, nous allons nous servir de mesures intermédiaires comme la productivité, les ventes et les exportations. Nous allons préciser nos résultats non pas en fonction des efforts déployés, mais en éléments mesurables.
Je ne conteste pas les critiques du vérificateur général. Je pense qu'elles sont tout à fait fondées. Nous allons en tenir compte dans l'évaluation de nos programmes et de nos réalisations. Et lorsque le vérificateur général fera sa prochaine vérification intégrée, j'espère qu'il pourra dire que notre organisme a pris très au sérieux les critiques de son premier rapport. J'espère que la prochaine fois, on reconnaîtra non seulement que nous avons innové en allant au-delà des usages courants, comme on l'a reconnu cette fois-ci, mais aussi que nous avons fait un excellent travail. C'est ce à quoi je m'engage formellement.
Nous nous sommes attelés à la tâche, qui n'a pas toujours été facile, car personne n'avait fait cela avant nous, ni au niveau fédéral, ni dans les provinces, que ce soit dans une des provinces de l'Atlantique, dans l'Ouest où je travaillais précédemment, ou au Québec. Personne n'a jamais entrepris ce genre de programme d'évaluation. Nous avons fait oeuvre de pionniers en la matière.
Les Européens ont déjà fait ce genre d'évaluation, et nous avons fait aussi bien qu'eux. C'est donc un sujet que nous prenons très au sérieux, et nous sommes disposés à répondre à toutes questions, si précises soient-elles.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Spector.
Monsieur Rocheleau.
M. Rocheleau: Ma question va porter sur le paragraphe 16 du document du vérificateur dans lequel M. Desautels dit, en somme, que l'APECA ne devrait pas s'engager dans certains projets où on n'a pas besoin de ses services, le requérant ayant des ressources suffisantes, et dans d'autres projets trop hasardeux.
J'aimerais savoir combien de projets sont dans ce cas, ou en avoir une idée, et comment il se fait qu'il en soit ainsi. Je voudrais des explications supplémentaires, si c'est possible.
J'aimerais aussi connaître la réaction de M. Spector sur le commentaire numéro 16 du document de M. Desautels
M. Desautels: Monsieur le président, je vais demander à M. O'Brien de répondre à la question de M. Rocheleau.
[Traduction]
M. O'Brien: Monsieur le président, si vous vous reportez aux paragraphes 18.75 et 18.76 de notre rapport, vous y verrez quelques statistiques concernant notre échantillonnage des projets du programme Action. Nous avons constaté qu'en ce qui concerne les répercussions éventuelles sur les concurrents, environ 23 p. 100 des projets que nous avons considérés - excusez-moi, c'est à la rubrique «besoin d'aide» - lorsqu'on a cherché à savoir si un projet avait besoin de fonds publics, nous avons constaté dans environ 19 p. 100 des cas que les bénéficiaires disposaient des ressources nécessaires pour exécuter le projet. Ces indications viennent des dossiers consultés et de discussions avec les responsables de projet. Nous n'avons trouvé aucune autre justification. Il en existe d'autres, comme le besoin d'un rendement suffisant de l'investissement, mais nous n'avons trouvé aucune autre explication concernant l'octroi de ces fonds. De la même façon, pour ce qui est de la viabilité des projets, le vérificateur s'est posé des questions dans quelque 17 p. 100 des cas quant à la prise en compte de la viabilité future de l'organisme. Ce sont là des statistiques fondées sur l'échantillonnage des projets que nous avons étudiés.
En ce qui concerne les causes d'une telle situation, elles tiennent notamment au fait que les règles de l'organisme n'exigent pas d'enquêtes ou d'études approfondies dans le cas des projets de moindre envergure, qui comptent pour une moindre partie de ceux que nous avons étudiés; la plupart des projets dont s'occupe l'APECA seront désormais des petits projets. Il faut donc que les règles de l'organisme soient rajustées en fonction de cette réalité nouvelle.
M. Spector: Pour compléter la réponse à la deuxième partie de votre question, je voudrais faire remarquer que l'Agence a un taux de succès de plus de 90 p. 100. Plus de 90 p. 100 des projets auxquels elle a prêté assistance ont réussi.
Deuxièmement, il est vrai que pour les petits projets, compte tenu des recherches dont nous disposons, nous ne les avons pas soumis jusqu'à maintenant à une analyse aussi rigoureuse que les grands projets. Cela va changer, puisque nous passons aux contributions remboursables et que l'agent d'affaires va suivre le projet d'un bout à l'autre. Nous aurons donc une meilleure idée de ces critères.
M. Harper: Monsieur Spector, le rapport signale, au point 18.38, les raisons importantes qui expliquent les divergences entre l'information communiquée dans le cadre de l'enquête et l'information consignée dans les dossiers de l'Agence. Le rapport précise que dans certains cas, l'estimation transmise au cours de l'enquête comprenait tous les emplois créés par tous les projets d'un client soutenus par l'Agence, et non pas uniquement les emplois directs créés par le projet qui faisait l'objet de l'enquête. Comment pensez-vous remédier précisément à ces écarts de chiffres?
M. Spector: Pour vous répondre simplement, dans notre nouveau programme, nous allons suivre les projets d'un bout à l'autre, sans jamais en perdre la trace. Cela devrait nous donner un décompte plus précis des emplois créés.
Je voudrais indiquer également que nous avons réduit de 33 p. 100 les chiffres fondés sur cette enquête avant d'en faire rapport au Parlement. Nous avons préféré pécher par excès de prudence.
Mais pour répondre succinctement à votre question, nous aurons un décompte beaucoup plus précis des emplois quand nous suivrons un projet d'un bout à l'autre.
M. Harper: Au même point 18.38, on donne l'exemple d'une entreprise qui, d'après l'enquête, a fait état de la création de 42 emplois grâce à un projet auquel l'Agence avait affecté un montant de 155 000$. Cette même entreprise avait deux autres projets de première importance, y compris son propre établissement, pour lequel l'Agence avait approuvé une aide de 1,3 million de dollars. Comment se fait-il qu'une entreprise puisse obtenir de l'argent pour trois motifs différents, ce qui a tendance à forcer les chiffres?
M. Spector: Une entreprise peut obtenir plus d'une contribution. Chaque demande correspond à un projet, et non à une entreprise.
M. Harper: Mais on trouve dans l'enquête une entreprise qui fait état de la création de42 emplois grâce à un projet qui a reçu 155 000$. Il y a ici quelque chose qui ne va pas. Si une entreprise peut faire approuver plus d'un projet, nous avons ici un problème de présentation des données.
M. Spector: C'est exact. C'est pour cela que le vérificateur général le signale. Il y a un problème dans la présentation des données de cette entreprise. Comme je l'ai dit, nous allons éviter une bonne partie de ces problèmes grâce à notre nouveau programme de contribution remboursable.
M. Harper: Dans le Telegraph-Journal du 27 avril, on pouvait lire un article concernant la nécessité d'indiquer avec exactitude le nombre d'emplois créés. Je crois que cette fois-là, il était question de 42 000 emplois. L'article visait à demander à l'APECA de justifier ce chiffre et d'indiquer s'il était exact ou non. L'Agence ne semblait pas vouloir répondre de bonne grâce, même si les emplois en question avaient bénéficié de l'argent du contribuable. À l'avenir, allez-vous vous montrer plus coopératifs avec ceux qui essaient d'obtenir ce genre d'information chiffrée, ou allez-vous toujours essayer de fausser les chiffres, comme vous l'avez fait ici avec le nombre de projets par rapport au nombre d'emplois?
M. Spector: Si vous vous reportez à l'arrêt de la Cour fédérale, madame le juge McGillis indique qu'après avoir étudié les données de l'enquête dont le journal demandait communication en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, elle estime que l'Agence a répondu aux exigences du Parlement en matière de reddition de comptes. Autrement dit, elle a considéré les données de l'enquête et n'a pas remarqué d'écart important entre ces données et le rapport au Parlement.
Nous voulions assurer la confidentialité des données car certains de nos clients n'ont participé au sondage qu'après avoir reçu la promesse que les renseignements demeureraient confidentiels; n'oublions pas qu'il s'y trouve toutes sortes de renseignements sur la nature de l'entreprise. Tout comme Statistique Canada doit promettre aux Canadiens que les données du recensement demeurent confidentielles, nous aussi avons dû garantir la confidentialité, sinon les gens ne participeraient pas.
Madame le juge McGillis a étudié les données et a conclu dans son jugement que la divulgation ne servirait aucunement l'intérêt public. Elle a statué contre le journal et le commissaire à l'information car nous avions déjà fait rapport des résultats et elle trouvait cela suffisant.
M. Harper: Alors, selon vous, cela ne pose aucun problème et vous ne voyez pas pourquoi l'APECA devrait changer sa position.
M. Spector: Eh bien, nous pourrions peut-être faire les sondages sans promettre la confidentialité et voir quel serait le taux de participation.
M. Harper: Lorsque ces gens s'adressent à nous pour emprunter de l'argent, ils ne pensent pas à la confidentialité, mais lorsqu'il s'agit des fonds des contribuables, ne pensez-vous pas que la question de la reddition de comptes devient beaucoup plus importante?
M. Spector: J'en conviens. La prochaine fois, nous ne devrions pas leur garantir que les données demeureront confidentielles. Je suis entièrement d'accord avec vous; il s'agit de l'argent des contribuables.
M. Harper: Merci, monsieur Spector.
Merci, monsieur le président.
[Français]
Le président: Chers collègues, nous aurons un vote dans sept à huit minutes. Je vous suggère d'ajourner. Est-ce que voulez demeurer jusqu'à notre retour, messieurs, parce qu'on a encore beaucoup de questions à vous poser?
Vous pouvez demeurer, monsieur Spector?
M. Spector: Oui.
[Traduction]
Le président: D'accord. Nous continuerons après le vote.
[Français]
Juste avant d'ajourner, dans la foulée de la question de M. Harper au sujet des 42 000 emplois et de la Loi sur l'accès à l'information, avez-vous vu cela, monsieur Desautels? Est-ce que le vérificateur général a pris connaissance de ces chiffres qui indiquent qu'il y a eu 42 000 emplois? Est-ce que ce sont des chiffres que vous contestez? Est-ce que ce sont des chiffres crédibles?
M. Desautels: Monsieur le président, nous avons accès à toute cette information de par notre propre loi. Donc, nous avons examiné non seulement les études qui donnent le résultat de 42 000, mais nous avons également pu examiner les dossiers qui ont produit ce calcul.
Le président: Et vous êtes satisfait? Ce chiffre est exact?
M. Desautels: Nous avons noté des lacunes dans le calcul des chiffres. Si vous lisez attentivement notre chapitre, vous allez voir que nous remettons en question certains des chiffres qui ont été utilisés pour calculer ces 42 000 emplois. On doit tenir compte de ces réserves quand on utilise le chiffre de 42 000.
Le président: Merci. La séance est levée jusqu'à notre retour du vote.
Le président: Nous reprenons la séance.
[Traduction]
Monsieur Hubbard, cinq minutes.
M. Hubbard (Miramichi): Merci.
J'ai lu dans des documents d'information que le budget de l'APECA se chiffre à quelque350 millions de dollars pour l'année 1995-1996. Si je comprends bien, vous avez sept bureaux distincts, dont six dans les provinces Atlantiques, y compris un siège social à Moncton.
Je vois aussi que les coûts d'administration accaparent environ 6 p. 100 du budget. On dépense environ 20 millions de dollars pour le personnel, sans compter les coûts administratifs. Vous comptez quelque 350 employés qui touchent environ 60 000$ chacun. Monsieur Spector, comme cela se compare-t-il aux autres organismes gouvernementaux et aux autres ministères?
M. Spector: Je n'ai pas de chiffres précis, mais je dirais que l'APECA coûte plus cher en frais de fonctionnement.
M. Hubbard: En votre capacité de président de l'APECA, ne trouvez-vous pas que le coût par employé est quelque peu excessif?
M. Spector: À mon avis, tout cela découle d'une décision prise par le Parlement d'avoir une agence très décentralisée.
M. Hubbard: Puis-je entrer dans les détails?
M. Spector: Puis-je terminer ma réponse?
M. Hubbard: Oui.
M. Spector: Il existe plusieurs solutions de rechange. Si toutes les activités étaient centralisées à Ottawa, le fonctionnement de l'Agence coûterait moins cher. Si, au lieu d'avoir des bureaux dans chacune des quatre capitales provinciales, il y avait, disons, un bureau pour la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard et un autre pour... on peut envisager plusieurs permutations et combinaisons plus rentables.
Comme vous le savez, lors de la dernière législature, je crois, on a essayé de fermer le bureau de la Société d'expansion du Cap Breton situé à Sydney. Je crois que la mesure législative a été rejetée au Sénat. Il y a plusieurs possibilités, mais j'ignore quel bureau on pourrait fermer si on veut respecter les modalités du mandat ainsi que la loi.
M. Hubbard: Je ne préconise pas la fermeture de bureaux.
Passons maintenant à la question des cadres supérieurs. Vous avez un nouveau conseil d'administration, qui a été nommé récemment. Combien de fois s'est-il réuni depuis votre accession à la présidence?
M. Spector: Vous parlez du conseil consultatif?
M. Hubbard: Oui.
M. Spector: Le conseil consultatif s'est probablement réuni quatre fois depuis que je suis président. Il n'y a pas eu de réunion pendant les cinq premiers mois de ma présidence, mais depuis, le conseil se réunit mensuellement et est tenu par la loi de se réunir au moins quatre fois par année.
M. Hubbard: De la façon dont je vois les choses, il devrait y avoir dans les provinces Maritimes des groupes de revendication qui examineraient les contrats du gouvernement du Canada en ce qui concerne les entreprises, l'ACDI, et ainsi de suite. Quel pourcentage de vos efforts est consacré à la recherche de contrats pour les sociétés des provinces de l'Atlantique?
M. Spector: Une grande partie du travail se fait ici, à Ottawa, et nous avons aussi des gens qui demeurent toujours en communication avec les agents d'affaires dans chacune des régions, parce que c'est un processus qui fonctionne dans les deux sens. Nous voulons surtout sensibiliser la communauté d'affaires de l'Atlantique à l'existence des contrats offerts par Ottawa, tout particulièrement dans les régions où ses membres pourraient éventuellement devenir les fournisseurs ou soumissionner pour ces contrats. Nous faisons donc beaucoup d'efforts en ce sens, et nous en sommes très fiers.
M. Hubbard: J'ai une dernière question qui porte sur ce que M. Byrne disait tantôt.
Il y a Industrie Canada, la Banque fédérale de développement, et de nombreux autres organismes Beaucoup de sociétés à la recherche de financement vont d'une place à l'autre pour dénicher toutes les possibilités. D'ailleurs, il y a des entreprises qui reçoivent du financement de banques privées, de la Banque fédérale de développement, de l'APECA, et probablement de leur propre entreprise. Ce n'est pas une tâche facile.
Quelles relations avez-vous avec les autres organismes? Pensez-vous entretenir de bons rapports avec vos clients? Y a-t-il une bonne communication qui permette de savoir si les clients communiquent avec d'autres banques ou agences de prêts, ou est-ce un problème dans cette région de l'Atlantique?
M. Spector: À notre avis, il y a eu une nette amélioration au cours des dernières années grâce au guichet unique qu'offrent nos centres de services aux entreprises. Un client peut s'adresser à un de ces centres et y trouvera un représentant d'Industrie Canada, de la province, de la Banque fédérale de développement. Le client s'adresse donc à un seul centre, et nous sommes très optimistes face à cette façon différente d'offrir les services.
M. Hubbard: C'est ce que nous visons dans ma propre circonscription et c'est une bonne initiative.
Merci, monsieur le président.
Le président: Vous avez cinq minutes, monsieur Grose.
M. Grose (Oshawa): Monsieur Spector, je voudrais d'abord vous dire que je déplore vivement que vous n'ayez pas préparé de mémoire écrit. Votre expérience est suffisamment longue pour que vous ayez appris les règles, écrites ou non écrites, et je crois que plutôt que de nous sauver du temps, vous nous en faites perdre. Vous auriez pu réagir à certains points soulevés par le vérificateur général, et nous n'aurions pas eu à vous poser ces questions-là. Nous n'avons donc aucun mémoire écrit. Cela m'a peut-être amené à ma première question.
M. Harper a posé une question à propos de cette idée que des emplois pourraient durer dix ans. Je n'ai pas été du tout satisfait de la réponse qu'il a eue. Qui plus est, dans votre exposé, vous avez parlé de cinq ans.
M. Spector: Je ne me souviens pas avoir dit cinq ans.
M. Grose: Voilà le problème quand on n'a pas de mémoire écrit. Je suis pas mal certain que vous l'avez dit, mais nous oublierons ça pour le moment. Mais cela porte à confusion.
Revenons au paragraphe 16. Il semblerait que 19 p. 100 des projets ont suffisamment de ressources et reçoivent quand même de l'aide du gouvernement. Pour 17 p. 100 d'entre eux, la viabilité était douteuse à cause d'obstacles majeurs.
J'oeuvre dans ce domaine depuis 35 ans. J'ai fait des demandes de fonds, dans certains cas auprès d'organismes fédéraux - en passant, je les ai tous remboursés - et ceci m'inquiète. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi un cinquième de vos activités seraient entreprises auprès de sociétés ou de groupes qui n'ont pas vraiment besoin de l'argent? Cela soulève beaucoup un doute dans mon esprit.
Nous passons ensuite au paragraphe 19, où les objectifs ne sont pas clairs, les critères d'admissibilité n'incluent pas de concepts clés de développement économique, et on n'attribue pas de façon claire la responsabilité du contrôle et des rapports quant aux résultats des projets. Ce qui m'amène, encore une fois, à vous poser la question: pourquoi considère-t-on ces gens, et pourquoi les accepte-t-on?
M. Spector: Monsieur le président, premièrement, permettez-moi de répondre à l'observation à propos de la déclaration écrite. C'est la première fois que je comparais devant le comité parlementaire et qu'on me dit qu'il est obligatoire d'avoir une déclaration écrite.
M. Grose: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Veuillez ne pas donner une interprétation légaliste à mes propos. Continuons notre travail.
M. Spector: Sauf votre respect, je pense que vous avez dit que je connaissais les règles. En réponse, je vous dis que j'ai pris le message que m'a transmis le greffier au pied de la lettre. Je n'ai pas d'objectifs cachés. Au plus, il s'agit d'un manque de communication honnête. J'ai fait une demande écrite, et j'ai dit que je n'allais pas présenter de mémoire. Si on m'avait répondu qu'il était obligatoire de soumettre un mémoire, j'aurais certainement respecté les règles du comité. Croyez-moi, je ne suis pas de ceux qui enfreignent les règles des comités parlementaires.
Le président: Mme Barnes désire ajouter quelque chose.
Mme Barnes (London-Ouest): Un éclaircissement, s'il vous plaît. La semaine dernière, en me préparant pour cette réunion - car de nouveaux membres siègent à ce comité - j'ai demandé au greffier de recommuniquer avec les témoins pour voir s'il leur conviendrait de nous soumettre un mémoire. Cela a-t-il été fait?
[Français]
Le président: Je demanderais au greffier, M. Fournier, de répondre.
[Traduction]
Le greffier du comité: Oui, madame Barnes, à la première heure le lendemain, j'ai appelé le bureau de Moncton. La personne avec qui j'avais traitée était absente, mais j'ai dit à son remplaçant que le comité apprécierait beaucoup qu'on lui soumette un mémoire écrit, et qu'en l'absence d'un tel document certains membres du comité ne seraient sans doute pas très contents. C'est le commentaire que je leur ai fait.
Mme Barnes: Merci.
Le président: Notre greffier a envoyé une lettre le 26 mars.
[Français]
Cette lettre mentionne, et je cite le troisième paragraphe:
[Traduction]
- Le comité demande que des exemplaires de toutes les déclarations d'ouverture et autres
documents pour la réunion soient reçus par les membres du comité pendant la semaine qui
précède la réunion.
Monsieur Spector, je crois que vous n'aviez pas fini de répondre.
M. Spector: C'est exact. Je veux simplement préciser que la demande de la semaine dernière, et la lettre, doivent être vues en contexte, c'est-à-dire qu'on nous avait dit très clairement au départ que les déclarations écrites étaient facultatives, et je pense que la réponse qu'on vous a donnée a été faite à la lumière de ces renseignements.
M. Grose: Ne coupons pas les cheveux en quatre. Continuons.
M. Spector: Permettez-moi de répondre à votre question. Le test des fonds supplémentaires constitue l'une des décisions les plus difficiles que doivent prendre nos gens. Bien sûr, 100 p. 100 des demandeurs se présentent devant nos agents pour dire qu'ils ont besoin d'argent et que le projet ne pourra pas être mis en oeuvre s'ils ne reçoivent pas cette contribution du gouvernement.
Pendant la vérification, nous accordions des subventions, et ainsi, s'il y a des chiffres qui dépassent 100 p. 100, c'est parce que plus de 100 p. 100 des demandeurs nous disaient: «J'ai besoin de cet argent et le projet ne pourra pas être mis en place sans cette contribution.»
De nombreuses demandes sont rejetées. Bien des demandeurs sont renvoyés parce que le projet irait de l'avant même sans la contribution du gouvernement. Je suis sûr que les députés reçoivent de temps à autre des plaintes de leurs électeurs dont la demande a été rejetée pour cette raison. Tout ce que je peux vous dire, c'est que dans 80 p. 100 des cas, selon cette vérification, nous prenons la bonne décision.
Nous essaierons de nous améliorer. C'est tout ce que je peux dire.
M. Grose: Eh bien, je suis désolé, mais vous avez omis les 17 p. 100 dont l'admissibilité n'a pas été évaluée de façon complète. De toute façon, poursuivons.
Je ne suis pas vraiment satisfait de cette réponse, et je ne suis pas du tout satisfait de la réponse que vous avez donnée à la question qui portait sur le rendement des prêts. Vous avez dit que c'était 100 p. 100. Je considère qu'il s'agit d'une réponse frivole. Il n'y a personne au monde qui prête de l'argent et qu'on rembourse à 100 p. 100 dans tous les cas. J'aimerais que vous nous donniez une meilleure idée de votre taux de récupération.
M. Spector: Le programme de contributions remboursables est trop récent pour que je puisse vous citer un taux de récupération. Cette nouvelle façon de faire n'a été mise en place qu'en février 1995.
M. Grose: Très bien.
Je suis aussi un peu perturbé par... Puis-je vous poser une question directe? Depuis combien de temps présidez-vous cet organisme?
M. Spector: Depuis maintenant 10 mois.
M. Grose: Dans ce cas, on ne peut pas vraiment vous tenir responsable de ce qui s'est produit auparavant, et je dois admettre que pour cette raison, certaines de mes questions ne sont pas tout à fait justes à votre égard. Mais je pense que vous auriez pu mieux vous défendre si vous vous étiez présenté avec un mémoire expliquant que vous n'êtes en poste que depuis 10 mois et que vous ne connaissez donc pas tous les détails de ce qui a été fait avant votre arrivée.
Je pense que maintenant, vous avez compris. J'espère que la prochaine fois que nous nous verrons - j'ose croire que vous reviendrez - vous vous souviendrez de cela et que vous aurez un mémoire écrit, pour que nous ayons un point de départ à nos discussions. Si nous pataugeons, c'est surtout parce qu'il n'y a pas de mémoire écrit.
Cela me suffit pour moi, monsieur le président. Merci.
Le président: Merci, monsieur Grose.
[Français]
Avant de céder la parole à M. Paradis, pour continuer dans la même foulée, je rappelle que vous avez été nommé le 4 juillet 1995, après avoir été ambassadeur du Canada en Israël. Je peux comprendre qu'après si peu de temps, vous n'êtes peut-être pas en mesure de savoir tout ce qui s'est fait.
M. LeBlanc pourrait peut-être répondre à nos questions précises. J'ai songé à vous pendant le vote tout à l'heure. Vous disiez que si nous avions des questions précises, nous obtiendrons des réponses précises.
Au paragraphe 12 du texte de la présentation du vérificateur général, on lit:
- L'Agence devrait améliorer la clarté des objectifs de ses programmes clés et les rendre plus
mesurables.
- Comment procéderez-vous de façon concrète? Qui consulterez-vous? Quel échéancier
prévoyez-vous? Six mois? Un an? Deux ans? C'est une question précise.
M. Spector: Nous allons évaluer nos programmes à la lumière du nombre d'emplois créés, des revenus, de ce genre de résultats. Je pense qu'il s'agit de résultats clairs et mesurables.
Nous allons aussi adopter la recommandation du vérificateur général, selon laquelle nous devrions tenir compte de certains critères intermédiaires - tels les ventes, la productivité, les exportations - dans le cas de ceux à qui nous avons fourni de l'aide. Nous allons mesurer ce genre de choses. Nous allons évaluer l'effet des contributions que nous leur avons accordées.
Je crois que nous aurons terminé ce travail d'évaluation dans les deux, trois ou quatre prochains mois. Nous y avons travaillé très fort. C'est un travail très difficile, qui n'a pas de précédent, mais nous allons y arriver.
[Français]
Le président: Monsieur Paradis.
M. Paradis (Brome - Missisquoi): Ma question s'adresse aussi à M. Spector.
Mes questions portent sur une période précédant celle où M. Spector est entré en fonctions, puisqu'il n'est là que depuis 10 mois. Elles se rapportent à l'exercice financier qui se terminait le31 mars 1995.
On constate que dans les dépenses de l'Agence figurent des sommes ou des contributions qui sont accordées à des personnes qui oeuvrent dans le domaine de l'hôtellerie.
Je donne quelques exemples: Anchor Inn Motel, 166 000$; Brier Island Lodge Limited, 101 000$; Garden of the Gulf Court and Motel Inc., 103 000$; Kaddy Motor Inns Limited à Fredericton, 178 000$; et White Hills Resort Limited, 428 000$. Il y en a peut-être d'autres, mais je ne mentionnerai que ces cinq établissements d'importance.
La politique de l'Agence prévoit-elle de continuer de contribuer dans le domaine des équipements touristiques, soit les motels et hôtels?
M. Spector: Cela varie selon la province dont il s'agit. Je peux parler de notre politique actuelle et de certains éléments de notre politique antérieure.
Par exemple,
[Traduction]
Le raccordement permanent de l'Île-du-Prince-Édouard est presque terminé. Nous sommes d'accord avec la province que l'infrastructure hôtelière n'est pas suffisante pour répondre à l'augmentation prévue du tourisme qui résultera du nouveau pont. Nous avons donc convenu avec la province de fournir de l'aide pour les projets hôteliers à qui on attribuera plus de trois étoiles. Voilà pour l'Île-du-Prince-Édouard.
M. Paradis: C'est un projet qui a été amorcé et qui se poursuit.
M. Spector: Cela se poursuit. C'est commencé.
En Nouvelle-Écosse, nous n'avons jamais fourni d'aide pour la région d'Halifax, car nous avions l'impression que l'infrastructure était suffisante, sauf pendant le G-7. On a pensé que certains hôtels devaient faire des rénovations vu que l'attention des médias du monde entier allait être braquée sur Halifax suite à l'initiative du premier ministre d'y accueillir le G-7.
Le Nouveau-Brunswick a mis fin à ce genre de projets il y a plusieurs années et fournit maintenant ce qu'on appelle le logement regroupé; c'est un créneau particulier du marché.
À Terre-Neuve, nous ne fournissons pas d'aide à St. John's, mais nous en accordons à l'extérieur de la région métropolitaine.
[Français]
M. Paradis: J'aimerais bien comprendre. Vous dites que cela peut continuer selon les circonstances.
M. Spector: Selon les circonstances dans chaque province.
M. Paradis: C'était ma première question. J'en ai deux autres que je poserai l'une à la suite de l'autre. Vous pourriez peut-être y répondre en bloc par la suite.
Dans les Comptes publics figurent des dépenses, des contributions faites par l'Agence au cours du même exercice auquel je fais référence, et qui ont été accordées à des groupes ou compagnies dont l'adresse n'est pas dans les Maritimes.
Je cite quelques exemples: le groupe Rasakti inc. de Drummondville; Seprachem Canada Limited de Windsor, Ontario, qui aurait reçu un demi-million de dollars; et Wink Industries Ltd. à Montréal, qui aurait reçu 8,2 millions de dollars.
Je ne vous demande pas ces détails puisque vous n'étiez pas alors en poste. J'aimerais toutefois avoir des précisions sur ces sommes, puisque des sommes importantes ont été déboursées pour des compagnies dont l'adresse n'est pas dans les Maritimes, mais plutôt à Montréal et en Ontario.
Ma dernière question vise à obtenir des précisions sur certains éléments qui apparaissent dans les Comptes publics.
On parle de Folk of the Sea qui aurait reçu 195 000$ au cours de la même période.
Une somme importante, de l'ordre de 2 678 000$, a été accordée à John Cabot 1997, la corporation du 500e anniversaire, en date du 31 mars 1995. J'aimerais savoir si d'autres sommes ont été déboursées et ce qui est arrivé des fonds si cette corporation a vraiment été abolie, comme on me le disait.
Il s'agit de questions bien précises. Toujours en ce sens, qu'en est-il du Women's Enterprise Bureau qui aurait reçu 913 000$?
Enfin, j'aimerais savoir qui était votre prédécesseur et où il se trouve maintenant.
M. Spector: En réponse à votre première question relativement aux sociétés dont le siège social est situé hors de la région de l'Atlantique, je précise que toutes nos contributions sont allouées à des entreprises qui oeuvrent dans l'Atlantique. Ceci n'exclut pas les sociétés de l'extérieur qui font des investissements dans la région de l'Atlantique. On pourrait ainsi expliquer les comptes de dépenses que vous citez.
Je devrai vous répondre par écrit relativement à Folk of the Sea puisque je n'ai aucune idée de quoi il s'agit.
Quant à la société John Cabot, c'était une société provinciale que le gouvernement provincial a abandonnée et nous avons recouvré nos fonds. L'entente a été annulée par la province. Nous allons quand même promouvoir ces festivités et affecter d'autres sommes dans le cadre de nos programmes de marketing dont j'ai parlé, soit l'Atlantic Canada Tourism Partnership. Les sommes ont été recouvrées auprès de la province.
M. Paradis: Monsieur Spector, pourriez-vous confirmer par écrit au comité que la somme de 2,6 millions de dollars accordée à John Cabot a été récupérée en entier et nous dire si d'autres sommes qui auraient pu être accordées au cours de l'exercice financier suivant ont aussi été récupérées?
M. Spector: Je ne sais pas si le Women's Enterprise Bureau est le bureau situé en Nouvelle-Écosse, à l'Université Mount St. Vincent. Je ne sais pas exactement...
M. Paradis: À Terre-Neuve.
M. Spector: À Terre-Neuve. Plusieurs de nos programmes visent à promouvoir l'entrepreneurship des femmes. Par exemple, nos subventions et programmes sur le campus de l'Université Mount St. Vincent, à Halifax, favorisent le mentorship des femmes intéressées à fonder leur propre entreprise. C'est un des volets de nos programmes. Nous devons avoir de tels programmes à Terre-Neuve.
M. Paradis: Qui vous précédait et où est-il rendu?
M. Spector: Mon prédécesseur était Mme Mary Gusella. Elle est actuellement une des commissaires de la Commission de la fonction publique.
M. Paradis: En terminant, quand recevrons-nous votre réponse par écrit?
M. Spector: Dans une semaine tout au plus.
M. Paradis: D'accord. Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Telegdi.
M. Telegdi (Waterloo): Monsieur Spector, bienvenue au comité.
Vous avez dit que vous étiez responsable de la création de 42 000 emplois nets dans la région. Ai-je raison de penser qu'il s'agit de la région des Maritimes?
M. Spector: Oui, c'est exact.
M. Telegdi: Avons-nous une petite idée du nombre d'emplois qui auraient pu être perdus en Ontario, au Québec, ou ailleurs? Est-ce inclus dans votre chiffre net?
M. Spector: Monsieur le président, nous nous gardons bien de faire du maraudage, si c'est de cela qu'il s'agit. Nous n'accordons aucune aide à la firme située à l'extérieur de la région des provinces de l'Atlantique qui déménage ses activités chez nous.
M. Telegdi: Imaginons un autre scénario. Si quelqu'un vous dit qu'il peut fabriquer des gants et qu'il entend s'installer dans votre région, il se pourrait que cette entreprise fasse concurrence à une entreprise de l'Ontario. L'entrepreneur de l'Ontario n'a pas l'avantage que lui procurerait une subvention régionale au développement et cette entreprise ne serait pas concurrentielle pour cette raison. J'aimerais savoir si vous avez des chiffres sur ce genre de perte d'emplois.
M. Spector: Non. Franchement, le mandat que nous a confié le Parlement consiste à faire la promotion du développement économique dans la région de l'Atlantique. Comme vous le dites, il est vrai, et on ne peut le contester, que nous accordons certains avantages à ceux qui sont prêts à s'installer dans la région de l'Atlantique, avantages qui n'existent pas, mettons, pour le Sud de l'Ontario. Il y a un programme semblable mais différent pour le Nord de l'Ontario, mais pas pour le Sud de cette province. Je ne conteste donc pas ce que vous dites.
M. Telegdi: J'aimerais donc poser une question au vérificateur général. Croyez-vous que les chiffres de cet ordre devraient être disponibles pour analyse? Si nous créons dans la région de l'Atlantique une dizaine d'emplois qui se traduisent par une perte d'une dizaine d'emplois à Kitchener ou ailleurs, la création nette d'emplois au Canada est nulle. Nous nous retrouvons dans une situation où nous avons pris des fonds du gouvernement pour les remettre à la région de l'Atlantique et il est plus que probable que ce mouvement de fonds dépassera en importance le chiffre d'affaires d'une entreprise dont les employés payaient des impôts, qui servaient, en partie, à redresser la situation. À votre avis, est-il important pour le Canada d'avoir un droit de regard?
M. Desautels: Monsieur le président, dans notre rapport, nous avons bien exprimé certaines inquiétudes concernant la façon de mesurer certaines des conséquences négatives possibles de certains de ces projets. Une meilleure évaluation et une divulgation plus approfondie de ces conséquences seraient les bienvenues. Que cela s'accomplisse à l'intérieur de la région de l'Atlantique ou que d'autres provinces y soient mêlées, il me semble que la question revient au même. Cela rejoint une partie des inquiétudes soulevées dans notre chapitre.
M. Telegdi: Ce n'est pas pour être méchant envers les provinces de l'Atlantique, mais il me semble que la stratégie que devrait préférer le gouvernement fédéral, dont nous sommes les représentants, devrait viser à donner à nos entreprises canadiennes les moyens d'attirer des entreprises étrangères, ce qui serait avantageux pour tout le pays grâce à l'activité économique en régions.
Je prends l'exemple de chez nous. Il y a beaucoup d'emplois dans les industries de pointe et la demande ne cesse de croître. Il y a aussi beaucoup de gens qui ont découvert que leurs emplois, comme ceux qu'ils avaient dans l'industrie du pneu chez Uniroyal... Ils ont perdu des milliers d'emplois là-bas. Mais ces gens ne sont pas à s'aventurer dans la nouvelle économie technologique. Il est donc important d'avoir dans notre région des emplois qui conviennent à divers segments de la population, parce qu'on ne veut quand même pas voir nos gens déménager. Je sais que les provinces de l'Atlantique sont aux prises avec un problème épouvantable, mais je crois que si nous pouvions nous assurer que nos programmes enrichissent le Canada dans son ensemble et soit un facteur positif dans l'équation, les politiques du gouvernement s'en porteraient mieux.
Mme Barnes: Je vais poursuivre un peu sur cette lancée. Vous avez parlé de «maraudage» et je crois que dans le rapport du vérificateur général, il est question du concept de déplacement. Je vais vous parler de la façon dont vous mesurez les conséquences du déplacement d'industries semblables à l'intérieur d'un même environnement dans la région de l'Atlantique. En d'autres termes, si on accorde x dollars en aide à un motel, mesure-t-on jamais quelles sont les répercussions de cette aide sur les concurrents du bénéficiaire à qui l'APECA n'a accordé aucun financement...? Lorsque vous calculez la valeur des emplois créés, cette création nette d'emplois peut avoir déplacé quelqu'un qui se sert d'un dollar différent, qui fait face à un facteur de risque différent et qui a des fins différentes. J'aimerais savoir comment vous allez améliorer les choses et régler ce problème.
M. Spector: Tout à fait d'accord. D'abord, nous ne fournissons pas d'aide au niveau des détaillants et c'est là que ce problème se poserait le plus probablement dans la région de l'Atlantique. Deuxièmement, nous évaluerons les effets de déplacement de toute demande que nous recevrons, encore une fois, à l'intérieur de la région. Nous avons refusé bien des demandes qui auraient eu pour effet de déplacer des emplois plutôt que de créer de nouvelles richesses, des exportations et ainsi de suite, comme l'a souligné le député précédent.
Mme Barnes: De toute évidence, cela doit se réaliser par l'emploi d'une méthode juste et équitable dans la région. Avez-vous des directives ou pourriez-vous nous en fournir?
M. Spector: Oui, nous vous les communiquerons par écrit d'ici une semaine.
Mme Barnes: Merci.
J'ai piqué un brin de jasette avec certains de mes collègues qui vivent dans cette région de l'Atlantique et il semble y avoir certaines préoccupations parce que, par le passé, l'Agence a remis des fonds à certains postulants - je crois que nous en avons parlé aujourd'hui - tandis qu'on aurait pu trouver d'autres sources de financement. J'aimerais savoir ce que vous faites, dans le poste que vous occupez, pour empêcher que cela se produise ou encore quelle procédure ou quelles directives vous pourriez mettre en place - ne serait-ce que de demander s'il existe d'autres sources de financement et quelles mesures ont été prises pour les épuiser - ou si vous pensez même que cet objectif est valable.
M. Spector: Oui, nous posons cette question. De plus, nous demandons aux candidats de signer une déclaration écrite à cet effet. Mais je crois que le changement le plus important est celui qu'a annoncé le gouvernement en février 1995, mais qui déborde les paramètres de cette vérification, choisissant d'accorder des contributions remboursables plutôt que des subventions. Je crois que cela impose une discipline beaucoup plus stricte aux candidats qu'auparavant.
Mme Barnes: Vous me direz si j'ai tort, mais je crois qu'on demande aux candidats de remplir un formulaire, comme vous l'avez dit, où ils disent qu'ils ont besoin d'aide financière, mais il n'y a pas d'autres questions dans le genre: «Avez-vous épuisé» ou «Quelles autres méthodes de financement avez-vous explorées?»
M. Spector: Le formulaire qu'ils doivent signer précise que le projet ne pourrait se réaliser sans cette aide.
Mme Barnes: Fait-on un suivi ou une vérification?
M. Spector: Oui, c'est le genre de choses... Et il y en aura davantage avec cette nouvelle aide remboursable parce que nous aurons à contrôler les projets pendant toute la période pour laquelle l'aide est consentie.
Mme Barnes: Certains de ces projets ne survivent pas lorsque leur financement s'épuise ou pour d'autres raisons. Quelle méthode d'évaluation allez-vous instaurer dès le départ pour vous assurer que le projet a de bonnes possibilités de viabilité?
M. Spector: La rentabilité constitue l'un de nos critères. Nos gens y mettent tous les efforts voulus; la preuve, 90 p. 100 de nos projets réussissent.
Mme Barnes: De toute évidence, le tourisme est une ressource économique importante pour la région de l'Atlantique. Pourriez-vous nous donner l'exemple d'activités auxquelles l'APECA peut participer pour planifier l'inter-saison du tourisme, gardant à l'esprit nombre de dollars que vous consacrez à appuyer ce tourisme?
M. Spector: Oui. Une des deux principales priorités, c'est l'inter-saison; l'autre, c'est la question des intérêts touristiques dans une zone donnée. Je l'ai dit plus tôt, mais vous deviez être occupée à autre chose à la Chambre des communes...
Mme Barnes: Non, j'étais à une séance d'information.
M. Spector: Oh, désolé.
Une des mesures dont nous sommes le plus fiers, c'est que nous avons réuni autour d'une même table les quatre provinces de l'Atlantique et l'industrie elle-même sous l'égide de l'Atlantic Canada Tourism Partnership, et il en est résulté un plan conjoint de promotion. Nous avons mis fin à la concurrence entre les provinces et nous faisons maintenant la promotion de la région dans son ensemble.
Mais pour répondre à votre exemple de l'inter-saison, une des initiatives les plus intéressantes a été prise au Nouveau-Brunswick, où on a créé un marché de la motoneige pour encourager le tourisme d'hiver. Nous faisons porter tous nos efforts sur le ski et le golf, ce qui prête à controverse, car nombreux sont ceux qui pensent que nous ne devrions pas nous occuper de golf. Mais le golf - comme l'a montré l'exemple de l'Île-du-Prince-Édouard - est un atout puissant pour attirer les touristes japonais.
Nous visons donc effectivement à prolonger l'inter-saison.
Le président: Monsieur Hubbard.
M. Hubbard: C'est là une tâche importante qui vous a été confiée, monsieur Spector, et nous souhaitons certainement que le travail que vous faites, en tant que directeur de l'APECA, soit couronné de succès.
Nous, de l'Atlantique, constatons qu'Industrie Canada dépense beaucoup d'argent dans tout le pays, mais pas tellement chez nous. L'APECA joue donc pour nous un rôle très important. J'ai siégé à des conseils d'administration qui avaient obtenu de l'aide de cet organisme, aide qui n'est pas nécessairement matérielle. Mais ce qui est plus important encore, c'est que ces fonds encouragent une société à se lancer dans un projet et à investir à cet effet.
Vous êtes sur la bonne voie en voulant amener plus de gens dans les provinces Atlantiques. Pendant trop longtemps, en effet, nous nous en sommes remis à d'autres - par exemple, les usines de l'Ontario - pour produire les marchandises dont nous avons besoin. Nous devons mettre sur pied, dans notre région, des industries créées et exploitées par les nôtres, et encouragées par des organismes comme l'APECA.
Je ne voudrais pas vous donner l'impression que ce comité vous a dénigrés. Je voudrais au contraire faire ressortir, en tant que Canadien de la région de l'Atlantique, que nous reconnaissons l'importance du rôle de l'APECA. Votre organisme a subi une véritable épuration ces dernières années, après ce qui s'y est passé dans les années 80, et nous espérons pouvoir nous féliciter de votre travail au cours des années à venir.
Je vous remercie.
[Français]
Le président: Juste avant de donner la parole au vérificateur général qui nous fera part de sa conclusion, j'aimerais vous demander, au nom des Canadiens qui vous donnent 350 millions de dollars de leurs impôts à gérer par an, si vous êtes prêt à vous engager à nous faire parvenir par écrit, dans les meilleurs délais - nous pourrions immédiatement convenir d'un délai - des réponses concrètes, des plans, des procédés, ainsi que les noms et les tâches de ceux qui répondront aux25 points soulevés dans les 25 paragraphes et aux points qui ressortent de la présentation d'aujourd'hui.
Êtes-vous prêt à vous engager à nous faire parvenir ces renseignements dans les meilleurs délais?
J'aimerais proposer un délai qui nous serait des plus utiles, soit avant l'ajournement de juin. Nous pourrions en faire l'étude pendant l'été. Est-ce possible?
Mes collègues me permettront-ils, bien que nous n'en n'ayons pas discuté et que je ne veuille pas être perçu comme étant un leader autocratique imposant des choses, de formuler une deuxième demande? Si vous avez une objection, chers collègues, veuillez me l'indiquer.
Seriez-vous disposé à revenir, au besoin, témoigner devant le comité après que nous ayons étudié vos réponses au cours de l'été?
M. Spector: La réponse à vos deux questions est: Certainement, oui.
Le président: Parfait.
M. Spector: Avec plaisir. J'inclurai des commentaires en réponse aux éloges que le vérificateur a formulés à notre égard dans son rapport. Nous sommes en quelque sorte le représentant des autres agences auxquelles il se référait dans ce chapitre et au chapitre 17. Comme le constatait le vérificateur général, l'APECA a poursuivi beaucoup plus à fond que d'autres agences l'évaluation de ses programmes. Nous sommes ainsi tout disposés à répondre par écrit dans les plus brefs délais et j'accueille avec plaisir l'invitation à comparaître à nouveau devant ce comité.
Le président: Monsieur Spector, je vous prie de ne pas mettre des paroles dans la bouche du vérificateur général. Je n'ai pas entendu ces propos. Vous parlez au nom du Bureau fédéral de développement régional et du ministère de la Diversification de l'économie de l'Ouest.
Si le Comité permanent des comptes publics vous a invité à comparaître - cela devrait peut-être faire partie de votre formation à titre de nouveau président - , c'est parce qu'il a décidé d'étudier le chapitre 18 du Rapport du vérificateur général. Vous n'êtes pas ici à titre d'agence modèle. Ces audiences ne remplacent pas celles que nous pourrions décider de tenir. Nous avons un pouvoir décisionnel; nous pourrions décidons d'aller plus loin que ce qui s'est fait dans l'Ouest. Ne prenez pas vos rêves pour des réalités. Ce n'est pas vraiment ce que je veux vous dire, mais ne faites pas de présomptions. Si tel est le cas, le vérificateur général nous le dira.
Dans la vie, on veut toujours améliorer les choses. Nous ne voulons pas vous couvrir de fleurs. Nous avons pour but d'améliorer les choses, d'améliorer la gestion des 354 millions de dollars que vous avez entre les mains.
M. Spector: Je suis tout à fait d'accord, bien que je constate, au risque de me répéter, que le vérificateur général, qui est ici à mes côtés, nous a donné des fleurs. Cela ne signifie pas que nous n'avons pas d'améliorations à faire; nous acceptons ses recommandations très sérieusement. Il a toutefois constaté que l'APECA avait poussé ses démarches beaucoup plus loin que les autres agences.
Le président: C'est dans la loi qui vous constitue. Vous y êtes forcés.
M. Spector: C'est un fait.
Le président: J'espère que vous ne vous vantez pas de satisfaire à une obligation de la loi.
M. Spector: Mais c'est un fait.
Le président: Monsieur Spector, nous nous attendons à recevoir des points précis quant à la clarté des objectifs de ces programmes clés afin de les rendre plus mesurables. Nous aimerions voir le bouquet de cette fleur que le vérificateur vous lance.
M. Spector: Vous l'aurez, mais vous aurez également une réponse à la constatation du vérificateur relativement aux efforts que nous avons faits dans cette démarche.
Le président: Sur ce, je donne la parole au vérificateur général du Canada.
[Traduction]
M. Desautels: Je vais m'efforcer d'être bref. Pour revenir sur ce dernier échange, je voudrais souligner que nous nous sommes efforcés, dans notre rapport, d'être justes et équitables: nous décernons des louanges quand il y a lieu de le faire et quand des améliorations s'imposent, nous ne manquons pas de le dire.
Je dirai que les problèmes que nous avons soulevés, en particulier ceux auxquels se sont attachés nombre de députés au sujet de l'évaluation globale du nombre d'emplois créés au cours d'une certaine période, ne sont pas triviaux et méritent d'être examinés à fond.
Cela dit, j'aimerais rappeler au comité que nous nous employons, dans les deux années qui suivent la publication d'un rapport, à revenir sur nos pas pour examiner ce qui s'est fait, et c'est certainement notre intention avec l'APECA. Nous voudrions voir résolus avant tout les problèmes de gestion des projets, dont il est question dans notre rapport, en particulier par le truchement du programme de développement des nouvelles entreprises. Nous voudrions également, dans le nouveau plan évoqué par M. Spector, voir quels critères ont été adoptés pour cette question de mesure du résultat. Vous pouvez être certains que nous nous pencherons de nouveau sur cette question et ferons rapport là-dessus au comité
[Français]
Le président: Mais notre demande n'est pas incompatible avec... Nous savons que vous y retournerez.
M. Desautels: Cela ne peut que faciliter notre tâche, parce que cela va effectivement faire avancer les choses encore plus vite.
Le président: D'accord. Merci beaucoup, messieurs, de votre présentation.
La séance est levée.