Passer au contenu
TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 20 mars 1996

.1536

[Traduction]

Le président: Je vous souhaite à tous la bienvenue.

Vous voulez invoquer le Règlement, monsieur Chrétien. Allez-y.

[Français]

M. Chrétien (Frontenac): Monsieur le président, pour la bonne marche de nos délibérations, je me demande si on ne devrait pas établir des balises, entre autres sur la fréquence de nos rencontres et les délais de convocation. Vous n'êtes pas sans savoir que le jeudi soir, les trois représentants de l'Opposition officielle quittent Ottawa pour leur circonscription et qu'il leur est donc très difficile d'être ici le jeudi soir et, à plus forte raison, le vendredi.

Ma dernière remarque a trait à la rencontre que le Comité permanent de l'agriculture a traditionnellement avec le ministre après le dépôt d'un budget. Cette rencontre, si elle a lieu six mois après le dépôt d'un budget, est comme du pain: il n'est plus tellement frais, il est rassis et il a perdu de sa saveur.

Si vous examinez le calendrier, vous verrez qu'il ne nous reste que cette semaine et la semaine prochaine. Ensuite, c'est le congé de Pâques pendant deux semaines, si bien qu'on ne pourrait se réunir qu'à partir du 15 ou du 18 avril. Ce serait alors très tard pour recevoir le ministre de l'Agriculture.

Je me demandais si vous, monsieur le président, avec l'influence dont vous jouissez au sein de votre parti, ne pourriez pas concocter la visite du ministre de l'Agriculture au comité dans les plus brefs délais, soit au début de la semaine prochaine. J'apprécierais que vous puissiez répondre à chacun de ces points.

[Traduction]

Le président: Merci monsieur Chrétien. Je vais faire de mon mieux pour essayer de répondre à vos questions.

Vous vous souviendrez que lors de la réunion du comité directeur tenue la semaine dernière, nous avons dit qu'il fallait tenir plus de réunions que nous avons coutume, si c'est le bon mot, de le faire les mardi et jeudi. Si j'ai bien compris, nous avons dit que si nous devons tenir une troisième séance, il faudrait qu'elle ait lieu le mercredi pour les raisons que vous venez d'exposer, à savoir que le jeudi soir et le vendredi, beaucoup de députés rentrent dans leur circonscription. Si la séance doit se tenir le mercredi, on préférerait qu'elle se tienne à cette heure-ci, vers 15 h 30.

Avec la séance de ce soir, cela signifie qu'il y en a deux aujourd'hui. Et comme vous le savez, il n'y aura pas de séance demain parce que ceux qui peuvent être ici ce soir ne pourront y être demain ou la semaine prochaine. La séance de ce soir, consacrée aux pesticides, nous la tenons parce que les témoins que nous voulons entendre sont libres.

Je suis certain qu'au comité directeur, il a été dit que nous préférions tenir nos séances le mardi matin, le mercredi après-midi et le jeudi matin. Si des témoins veulent se faire entendre, on pourra peut-être prévoir une séance le mercredi soir. Reste que nous essaierons de nous en tenir à des séances de jour, c'est-à-dire mardi matin, mercredi après-midi et jeudi matin.

.1540

En réponse à votre question, comme je l'ai dit hier, le ministre comparaîtra devant le comité mardi prochain à 19 heures. Il fera le point sur un certain nombre de questions, comme le dossier du lait, les wagons-trémies et la contestation aux termes de l'ALENA. Il a aussi accepté de venir devant le comité dès que possible lorsque nous reviendrons en avril pour discuter de questions plus précises relatives au budget. Hier, on nous a montré comment consulter le document. Il a donc accepté de venir deux fois, d'abord la semaine prochaine, mardi soir, pour discuter de certaines questions, comme le dossier du lait, qui ne manqueront pas de vous intéresser.

[Français]

M. Chrétien: Pourriez-vous parler des délais? Vous les avez oubliés.

[Traduction]

Le président: Oui, il faut clarifier la question des préavis. J'ignore quel est l'usage ici. Parfois, nous ne savons pas combien de temps il faut pour convoquer les gens, mais je vous assure sur l'honneur que nous ne vous réserverons pas de mauvaises surprises et que vous disposerez du délai le plus long possible.

Lorsqu'on essaie de faire venir des gens, on ne sait pas toujours... Nous demandons aux témoins s'ils sont libres dans la matinée du jeudi de la semaine suivante mais nous allons collaborer avec le greffier et nous donnerons à tous les membres un préavis maximum. À tout le moins, je pense que nous devrions réserver les matinées de mardi et de jeudi de chaque semaine. Merci beaucoup.

Nous recevons ce matin les représentants de l'Association des producteurs de légumineuses à grains du Canada pour l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba. Ce sont les principaux producteurs du pays, j'imagine.

Vous venez d'entendre la discussion que nous avons eue. À ce propos, nous avons reçu une lettre de vous dernièrement, nous informant que vous seriez à Ottawa aujourd'hui et demain et que vous vouliez être entendus. Nous avons accepté de vous recevoir au pied levé, puisque vous étiez en ville.

Cela n'a rien à voir avec votre groupe en particulier, mais sachez bien que cela ne doit pas servir de précédent pour d'autres groupes qui veulent être entendus par le comité permanent pour la simple raison qu'ils sont ici pour d'autres questions.

Comme vous avez pu en juger vous-mêmes, les membres du comité aiment être avertis le plus longtemps possible à l'avance. De plus, si vous avez un mémoire, vous pouvez le faire traduire, parce que nous avons établi que seuls les documents dans les deux langues officielles peuvent être distribués au comité.

Si vous avez un texte, vous le remettrez au greffier lorsque vous aurez terminé. S'il n'est pas dans les deux langues officielles, il faudra le faire traduire avant de le remettre aux membres.

Cela dit, je vous souhaite la bienvenue. Parfois, sans préavis, il n'y a pas autant de membres du comité qu'on le souhaiterait, mais chacun des trois partis est bien représenté aujourd'hui.

J'ignore qui va commencer... Janette? Lyle, très bien, allez-y. Si vous le voulez bien, Lyle, présentez-vous ainsi que les collègues qui vous accompagnent. Je crois savoir qu'au moins un des membres du comité connaît assez bien l'une de vos collègues pour avoir travaillé ensemble. Elle pourra nous en dire davantage si elle le souhaite lorsqu'elle aura la parole. Allez-y.

.1545

M. Lyle Minogue (directeur, président, Développement du marché, Saskatchewan Pulse Crop Development Board): Je crois que nos combats ne s'arrêtent pas là.

Le président: Bon, entendu.

M. Minogue: Tout d'abord, je m'excuse de la confusion que j'ai pu créer en vous prévenant si tardivement. Laissez-moi vous expliquer. Nous essayons de venir à Ottawa à cette époque de l'année, au moment du dépôt du budget. C'est difficile à prévoir trois mois à l'avance. Mais maintenant que j'ai vu les difficultés que cela crée, l'année prochaine nous allons faire un effort pour vous prévenir plus tôt. Nous sommes très reconnaissants aux membres du comité qui ont pris la peine de venir nous entendre.

Avant de vous présenter les personnes qui m'accompagnent, je vais vous expliquer brièvement qui nous sommes. Il y a en Saskatchewan une association des producteurs de légumineuses à grains. Il en va de même en Alberta et au Manitoba. Une fédération les regroupe, ce qui permet aux trois provinces de collaborer dans bien des domaines.

Je suis le président de ce qui s'appelle la Western Canada Pulse Growers Association, et c'est moi qui vais faire l'exposé. Les deux personnes qui m'accompagnent représentent les deux autres provinces: Jack Froece, du Manitoba, et Janette McDonald Adams, de l'Alberta, pourront répondre aux questions qui concernent leurs provinces respectives.

Une certaine période m'a été allouée, je crois. Pourriez-vous me dire de combien de temps je dispose?

Le président: Ensemble, pourriez-vous vous en tenir à un exposé de 15 à 20 minutes? Nous donnons ensuite la parole aux représentants de chaque parti pour qu'ils puissent poser des questions et faire des observations. Nous ferons un autre tour s'il y a lieu.

M. Minogue: Entendu. C'est clair. Je vais faire l'exposé au nom de la Western Canada Pulse Growers.

Nous sommes des associations de producteurs. Notre financement provient de prélèvements effectués auprès des producteurs. Ceux-ci paient 0,5 p. 100 de leur chiffre de ventes à une caisse administrée par la province.

Je parlerai le plus souvent de la Saskatchewan puisque c'est la province que je connais le mieux. Chez nous, nous prélevons plus d'un million de dollars par année auprès des producteurs. Cette somme sert à financer la recherche. L'année dernière, nous y avons consacré près de 400 000 $. Une partie des fonds a été versée dans le cadre du projet fédéral de co-investissement. Une autre partie a été dépensée de concert avec les gouvernements provinciaux et d'autres associations.

Une autre grande activité pour nous est la vulgarisation et les communications. Nous sommes en liaison avec d'autres organismes et associations, avec les gouvernements fédéral et provinciaux et notamment avec les producteurs. Nous les tenons au courant des faits nouveaux qui leur permettent d'améliorer la culture et de choisir les produits en fonction de ce que réclame le marché.

La troisième grande activité est l'information commerciale et le développement du marché. Dans le premier cas, nous essayons d'être en contact étroit avec des représentants du secteur, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et les ambassades à l'étranger pour savoir ce qui se passe sur les autres marchés et ce que font nos concurrents.

Nous nous rendons à l'étranger à l'occasion pour nous entretenir avec les acheteurs et savoir si notre produit est de la taille et de la couleur ou a la forme qui convient pour ce marché, de manière à orienter nos travaux de recherche et à satisfaire ces acheteurs.

Le deuxième volet de notre activité de développement du marché est la promotion de développement du marché. Cela signifie que nous essayons de déterminer ce qui limite notre accès au marché. Nous essayons de faire connaître notre produit dans le monde entier et d'obtenir le meilleur prix possible.

Si nous sommes à Ottawa aujourd'hui, c'est pour faire connaître les programmes qui existent aux membres de notre conseil. Nous venons rencontrer des représentants de divers organismes, conseils et groupes de producteurs, et tous ceux qui ont des intérêts commerciaux semblables aux nôtres, ce qui nous permettra de mieux faire notre travail lorsque nous rentrerons chez nous et de savoir que nous utilisons le mieux possible toutes les ressources à notre disposition.

.1550

Une partie du travail, c'est donc de rencontrer des gens au gouvernement, aussi bien des fonctionnaires que des élus, pour qu'ils sachent ce que nous faisons et puissent nous poser des questions. Nous pouvons communiquer des informations et ainsi améliorer l'industrie. C'est donc pour cette raison que nous sommes ici aujourd'hui.

Je vais maintenant vous donner des chiffres sur notre secteur d'activité. Je n'irai pas dans le détail, parce que ce serait long. En revanche, j'aimerais vous donner une idée de la situation de notre secteur et de ses perspectives d'avenir.

Le secteur des légumineuses à grains dans l'ouest du pays est de création relativement récente. Pour ceux qui ne sauraient pas ce que j'entends par légumineuse à grains, je préciserai que nos principales cultures à l'heure actuelle sont les lentilles et les pois. Sur une plus petite échelle, nous cultivons aussi des haricots et des pois chiches.

Dans le cas des lentilles, les premières ont été cultivées dans l'ouest du pays en 1970. La surface cultivée n'a cessé de grandir et, l'année dernière, il y avait 800 000 acres de lentilles en culture.

Dans le cas des pois, cette plante est cultivée au Canada depuis longtemps, mais pas en grande quantité. Toutefois, la croissance a été phénoménale au cours des dix dernières années. L'an dernier, plus de 2 millions d'acres de pois ont été cultivés dans les trois provinces des Prairies.

Dans le cas des haricots, nous avions environ 20 000 acres de culture il y a dix ans, et aujourd'hui nous en avons environ 100 000.

Les pois chiches. L'année dernière, nous avions 3 000 acres, ce qui n'a l'air de rien, mais nous pensons que le potentiel est excellent et que dans 10 ou 20 ans, les surfaces cultivées pourraient se comparer à celles des lentilles. Le marché mondial du pois chiche est énorme, et nous n'avons pas su en profiter parce que nous n'avions pas les variétés qui poussaient bien au Canada. Nous avons fait beaucoup de recherches pour remédier à cette situation.

Il n'y a pas que la taille de l'industrie qui compte. D'autres facteurs sont en jeu et il est important de bien les comprendre. Un acre supplémentaire de pois, de haricots ou de lentilles au pays, c'est bien autre chose qu'un acre de blé plutôt que d'orge.

La lentille ou le pois sont des cultures à forte production. Ces cultures ont besoin de plus de main-d'oeuvre, de plus de matériel et d'apports divers. Ces secteurs créent plus d'activités dans notre économie. Les rendements à l'acre sont plus élevés. Ces rendements se font sentir non seulement dans l'ouest du pays mais dans l'économie nationale tout entière.

De plus, une grande partie des terres dans l'ouest du pays faisait l'objet d'une rotation des cultures avec mise en jachère. Il y avait donc une saison pendant laquelle il n'y avait aucun revenu. La mise en jachère servait à conserver l'humidité du sol et à permettre l'accumulation d'azote. Grâce aux nouvelles techniques de culture et aux espèces de légumineuses dont nous disposons aujourd'hui, les lentilles et les pois, et, nous l'espérons, d'autres cultures, permettront grâce aux rotations, d'éliminer la jachère et d'obtenir l'azote de la plante elle-même.

Cela présente divers avantages, le premier étant que l'on n'a plus besoin des engrais commerciaux qui, non seulement sont coûteux, mais n'ont pas en outre la faveur de la population, qui préfère les engrais organiques.

De plus, après la culture d'une légumineuse, le rendement des autres cultures connaît une augmentation. C'est ce que l'on appelle l'avantage de la rotation. Les agriculteurs le savent depuis longtemps, mais aujourd'hui des chiffres venus du Manitoba et de la Saskatchewan permettent de le mesurer. La production de blé augmente en effet de 10 à 11 p. 100 en moyenne s'il est cultivé sur du chaume de légumineuse plutôt que du chaume de blé ou d'orge.

Cela présente donc un gain net pour l'ouest du pays, d'abord par suite de l'élimination de la jachère et ensuite grâce à l'augmentation du rendement. Troisièmement, les niveaux de protéine sur le chaume de légumineuse, sont plus élevés, dans le cas des céréales, que lorsqu'ils sont cultivés sur d'autres cultures, même si l'on utilise un apport d'azote comparable dans le sol.

.1555

Il y a donc des avantages protéiniques et de rendement inexpliqué, grâce aux légumineuses. Les chercheurs disent que cela tient peut-être à la libération lente de l'azote dans le sol dans le courant de l'année à partir des résidus ainsi qu'à la rupture du cycle des maladies qui touchent les plantes. Autrement dit, la rotation permet de faire échec à la maladie.

Nous sommes très enthousiasmés par le potentiel d'augmentation de la valeur que présente les légumineuses par rapport aux cultures traditionnelles. De plus, les légumineuses sont transformées avant de quitter le pays. Dans le cas des lentilles, que je connais mieux, elles sont toutes nettoyées avant de quitter le pays. La plupart de ces lentilles sont mises dans des sacs de tailles et de formes diverses et elles sont envoyées dans des marchés précis. Nous créons donc beaucoup d'emplois.

Rien qu'en Saskatchewan, il y a 960 emplois dans le secteur de la transformation, dont plus de 600 sont permanents. Les autres sont des emplois à temps partiel. Les chiffres sont un peu moins élevés au Manitoba et en Alberta puisque les surfaces cultivées sont plus petites, mais je crois que l'on peut dire, sans risque de se tromper, qu'il y a actuellement 1 600 emplois dans l'ouest du pays directement attribuables à la transformation de ces cultures.

Il y a aussi un gros potentiel de valeur ajoutée. Des techniques passionnantes sont en préparation pour utiliser les pois, par exemple, non seulement pour l'amidon, mais aussi comme source de protéines ou de fibres. Il existe une entreprise à Saskatoon, Parrheim Foods, par exemple, qui le fait actuellement. Elle travaille à un procédé de raffinage de l'amidon. Si elle réussit, comme on s'y attend, l'amidon entrera dans la fabrication du papier journal sur une grande échelle et constituera un marché important pour les pois. Le potentiel est donc très grand à l'heure actuelle.

En janvier dernier, nous avons réuni des chercheurs et des représentants de l'industrie pour discuter de ce potentiel dans l'ouest du pays: jusqu'où peut-on aller? Si on ne prend que les rotations... Il faut que je vous explique qu'on ne peut pas cultiver pois sur pois sur pois sans risquer de problème. Vous le savez sans doute. La rotation ne peut se faire que jusqu'à un certain maximum. Certaines cultures sont adaptées à certaines régions; d'autres cultures sont adaptées à d'autres régions. Si l'on tient compte des facteurs agronomiques, nous estimons qu'il est possible de multiplier jusqu'à cinq fois la superficie totale de légumineuses.

Au même moment, nous avons demandé aux spécialistes de la commercialisation de nous décrire le marché potentiel d'une production plus élevée. Calculs faits, ils nous ont dit que le marché pourrait absorber au cours des vingt prochaines années une production à peu près aussi importante.

Je ne suis pas convaincu que nous atteindrons ces chiffres de production car plusieurs facteurs sont en jeu. Je crois que nous n'arriverons pas à multiplier par cinq la superficie cultivée, c'est d'abord parce que la demande sera forte pour affecter la terre à d'autres usages. Vous savez tous que le prix du grain a augmenté. On assistera à une augmentation énorme de la demande pour des produits comme l'orge de brasserie et de nouveaux types de blé comme les espèces hyper-résistantes tels le blé Glenlea ou le blé de printemps des prairies. Il s'agit de marchés très prisés avec lesquels la concurrence sera très difficile.

Il faudra aussi compter avec d'autres contraintes. L'une d'entre elles, c'est le transport, et vous pouvez jouer ici un rôle très important. J'aimerais vous expliquer en quoi le transport des légumineuses se distingue de celui d'autres productions. Certains d'entre vous le savent sans doute déjà, mais d'autres pas.

Lorsque l'on expédie du blé à l'étranger, le producteur livre sa production à un silo à grain ou à un wagon. Le blé est expédié jusqu'à un port, où il est placé dans un silo et mélangé à d'autres grains. Le blé sera stocké en grandes quantités et on en extraira la quantité voulue au moment nécessaire. La provenance du blé n'est alors plus connue. Dans le cas des légumineuses, elles sont réceptionnées, nettoyées, mises en sac, échantillonnées et vendues en fonction d'un échantillon précis si bien que l'acheteur achète des lentilles particulières venant de telle ou telle usine de nettoyage.

Or, il n'y a pas d'installation de stockage pour les livraisons de ce genre. C'est pourquoi des dispositions particulières doivent être prises pour qu'une production donnée transite de l'exploitation au chemin de fer, jusqu'au port et jusqu'au navire selon un calendrier précis. Il faut donc avoir accès au wagon et faire ce que l'on appelle dans le métier l'attribution des wagons en fonction des ventes fermes plutôt qu'en fonction du stockage.

.1600

C'est tout à fait différent du blé. Pour le blé normal, on peut mousser les ventes pendant deux mois puis prendre un répit d'un mois. On ne peut pas procéder ainsi pour les cultures spéciales. Le système de transport doit se plier aux exigences du marché. Nous pensons que, dans ce dossier, vous pourriez nous aider.

Nous ne travaillons pas dans le secteur du transport, et mes collègues et moi-même connaissons trop peu ce secteur pour vous faire des recommandations précises. De toute façon, j'hésiterais à le faire même si je pensais avoir la réponse, parce que c'est un dossier immense, où tous les éléments sont liés entre eux.

Par contre, lorsque vous discuterez du transport, avant d'approuver quelque changement que ce soit, je vous demande de vous poser la question, cela va-t-il aider le secteur des légumineuses dans l'ouest du pays? Nous ne voulons pas perdre notre gagne-pain par suite d'un changement mal conçu dans les transports.

Il y a une autre question qui nous préoccupe, c'est la recherche. Vous savez tous combien la recherche est importante. Elle doit se faire de façon permanente. Il y a toujours de nouvelles maladies, de nouveaux problèmes, de nouvelles contraintes de production, et il faut effectuer de la recherche pour assurer la viabilité du secteur. Il y a certains types de travaux que les producteurs et le secteur privé peuvent réaliser lorsqu'on s'approche du point de vente du produit, mais il y en a d'autres, fondamentaux, qui doivent être réalisés par les services l'Administration pour que nos chercheurs à nous, au niveau inférieur, puissent faire leur travail et nous tenir au fait des nouvelles variétés, des nouvelles techniques et des nouveaux produits chimiques dont nous avons besoin.

S'il me reste un peu de temps, j'aimerais aussi parler des produits chimiques ainsi que du processus d'harmonisation et d'homologation. La difficulté, c'est que nous avons beaucoup de mal à trouver des produits chimiques pour certaines de nos plantes à cause du volume, qui est trop petit. Les compagnies hésitent à investir les sommes qu'il faut pour faire homologuer leurs produits. Nous voudrions que les autorités aient davantage recours aux données de recherche et aux tests réalisés dans d'autres pays pour réduire les frais, alléger le mécanisme et le rendre plus efficace.

Nous ne disons pas que nous voulons avoir accès à tous les produits chimiques produits dans le monde entier, parce que certains pays se servent de produits chimiques qui ne devraient jamais être utilisés. Toutefois, il y a des pays dont les mécanismes d'essai et les données de recherche sont fiables. Dans ces cas-là, nous aimerions avoir accès à leurs données, aux résultats de leurs recherches et à leurs produits chimiques pour que notre secteur puisse en profiter au mieux.

Je pourrais vous donner d'autres précisions, mais c'est sûrement suffisant pour lancer la discussion. Je vais vous céder la parole si vous voulez me poser des questions.

Le président: L'un de vos collègues voudrait-il faire des observations ou s'approcher pour répondre aux questions des députés? Est-ce ainsi que vous voulez procéder?

M. Jack Froece (Directeur, Association des producteurs de légumineuses à grain pour le Manitoba): Oui, c'est très bien.

Le président: Très bien, je ne veux pas vous couper la parole.

Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Chrétien: J'ai bien apprécié votre exposé, notamment lorsque vous avez dit qu'il était possible que certains députés ne connaissent pas toutes les légumineuses. J'en connaissais quelques-unes et vous en avez nommé au moins quatre: les lentilles, les pois, les haricots et les pois chiches. J'imagine qu'il en existe bien d'autres et que vous pourriez m'en énumérez encore quelques-unes.

J'aimerais avoir des explications supplémentaires sur les exportations. Quel pourcentage des récoltes dans les trois provinces de l'Ouest est destiné à l'exportation? Je suppose que le reste est produit pour le marché canadien.

Mon autre question a trait aux marchés internationaux. Quels sont vos concurrents les plus sérieux?

J'aimerais aussi que vous nous parliez de l'adaptation à laquelle vous avez dû vous astreindre après l'abolition de la LTGO, dans le cas où cela vous aurait touché.

En dernier lieu, j'aimerais connaître le nombre d'agriculteurs qui vivent exclusivement de la culture des légumineuses.

.1605

[Traduction]

M. Minogue: Je vais d'abord répondre à votre question sur les exportations. La consommation des légumineuses n'est pas répandue au Canada parce que nos concitoyens ne sont pas habitués à en manger. Dans d'autres pays, au Proche-Orient, en Afrique et dans beaucoup d'autres régions du monde, les légumineuses font partie du régime alimentaire. De plus, notre population n'est pas très grande.

Dans le cas des lentilles, un tout petit pourcentage de la production aboutit sur le marché intérieur. La quasi-totalité de la production est destinée à l'exportation. Parmi nos principaux concurrents se trouve la Turquie, dont la production est suffisante pour pouvoir en exporter ailleurs. Une partie provient aussi de l'Australie, une autre de l'Afrique du Nord, et les Américains en produisent aussi. Mais le Canada est le premier exportateur mondial de lentilles vertes.

Dernièrement, nous avons commencé à vendre une variété de lentilles rouges. À peine 300 acres seront semés cette année, mais nous espérons rencontrer le même succès qu'avec la lentille verte. Dans 10 ans, je serai peut-être ici en train de vous dire que nous sommes le premier exportateur mondial de lentilles rouges aussi.

Dans le cas des pois, ils ont deux usages: la consommation humaine et les farines animales. La proportion de la variété destinée à la consommation humaine au Canada est relativement petite. Une partie de la production est exportée vers l'Europe et dans d'autres parties du monde pour la consommation humaine. Le gros de nos exportations, je veux dire entre 70 et 80 p. 100 des exportations de pois, est destiné au marché des farines animales.

L'utilisation des pois dans l'alimentation du bétail présente également un potentiel immense au Canada. Jusqu'à présent, la source principale d'alimentation pour les porcs et la volaille en particulier était diverses céréales comme l'orge, le blé et le maïs, et le principal complément protéique était la moulée de soya des États-Unis.

Comme on peut maintenant se servir des pois, et nous pouvons vous donner des informations sur la mise à l'essai des pois dans l'alimentation animale, vous allez voir qu'on peut réaliser des économies de deux à trois dollars par porc si l'on utilise des pois dans l'alimentation des porcs et des volailles. Les pois servant à l'alimentation animale ont environ 3 500 calories d'énergie, ce qui se compare au blé. Le niveau protéique est de 20 à 28 p. 100, comparativement à 10 ou 12 p. 100 pour le blé, et le maïs est plus bas que ça.

L'industrie du porc au Canada est considérable. Nous avons calculé l'autre soir que la province de l'Alberta pourrait probablement utiliser toute la production de la moitié de son espace agricole rien que pour alimenter ses porcs. Il y a, dans le reste du pays, beaucoup de porcs qu'on pourra bientôt alimenter en pois. Ce changement est en train de se produire; tous les mois, nous assistons à une augmentation considérable de la proportion de pois dans l'alimentation animale au Canada, ce qui réduira nos importations de moulée de soya.

Pour ce qui est des débouchés étrangers des pois, à l'heure actuelle, 70 p. 100 de nos exportations sont destinées à l'Europe, où ils sont très demandés. Nous venons d'envoyer là-bas une mission commerciale qui a examiné les problèmes qui se posent. Nous ne voulons pas trop exporter vers l'Europe parce que s'il se produisait un changement dans les subventions ou la politique commerciale ou quelque chose de ce genre, notre production serait menacée.

Nous nous employons donc cette année à trouver des débouchés en Extrême-Orient. Nous sommes en train de faire des essais au niveau de l'alimentation animale dans les Philippines. Lorsque nous aurons ces résultats, nous enverrons des gens dans d'autres pays comme la Corée du Sud, Taïwan et d'autres, afin d'y faire connaître nos produits. Nous aurons besoin de l'aide d'Agriculture Canada, du ministère des Affaires étrangères et du ministère du Commerce international pour supprimer certaines barrières tarifaires, et nous croyons que nous pourrons prendre pied sur ces marchés s'il y a moyen d'abaisser ces barrières.

Pour ce qui est des haricots, il y a de très nombreux types de haricots, et il y a de très nombreux débouchés dans le monde. Je ne m'y connais moins en haricots, je laisserai donc à Jack Froece le soin de répondre à cette question dans une minute.

Je vais parler des pois chiches parce que c'est nouveau, et parce que les pois chiches sont prometteurs. Il y a deux débouchés pour les pois chiches. Il y a les gros pois chiches Kabuli qu'on voit dans les buffets à salades et qui sont en demande partout; nous recevons tout le temps des appels d'acheteurs qui nous demandent quand nos pois chiches seront prêts. Nous leur répondons que dans deux ans, nous produirons un gros pois chiche de type Kabuli, qui se tient debout et qui peut être récolté. Nous avons déjà mis au point une technologie de récolte pour ce pois chiche, et nous pourrons le produire à grande échelle d'ici quelques années, ce qui est très prometteur.

.1610

Le pois chiche Desi, qui est plus petit et dont le débouché représente un plus gros volume, ne se vend pas aussi cher, mais sur le marché nord-américain, le pois chiche Desi a une grande valeur s'il est traité. Nous tâchons donc de trouver des moyens de les écosser. À l'heure actuelle, il est difficile de les écosser; nous avons mis au point un pois chiche qui n'a pas de petit bec au bout, ce qui en complique la transformation. Nous allons trouver des moyens de les trancher et d'en tirer, entre autres, une farine, afin d'être prête le jour où l'on récoltera ce pois chiche à grande échelle.

Pour ce qui est des haricots, je cède la parole à Jack, parce qu'il connaît mieux ce secteur et sait ce qui s'y fait.

M. Froece: Les États-Unis nous font concurrence dans certains domaines. Dans d'autres domaines, nous faisons front commun. Dans le secteur des haricots blancs, tout particulièrement, la Grande-Bretagne est notre principal débouché; c'est une sorte de débouché conjoint. Pour ce qui est des haricots Pinto, des haricots noirs et des autres types de haricots, l'Amérique du Sud semble être notre principal concurrent. La Chine produit aussi beaucoup de haricots. Cela dépend des prix. Généralement, elle se lance sur le marché chaque fois que les prix sont élevés pour y obtenir des devises; la présence de la Chine sur le marché connaît des hauts et des bas.

Mme Janette McDonald Adam (Directrice générale, Association des producteurs de légumineuses à grain pour l'Alberta): Pour ce qui est de nos principaux concurrents sur le marché européen de l'alimentation animale, nous avons à faire face à l'Ukraine et à l'Australie.

Je crois que votre dernière question avait trait à la survie des agriculteurs, au revenu total que nous retirons des légumineuses, est-ce bien cela?

Au cours des dix dernières années, la croissance de l'industrie des légumineuses a été surtout attribuable à la baisse du prix des céréales, et au fait que les agriculteurs sont passés à la culture des légumineuses parce qu'il croit beaucoup dans les avantages de la rotation. C'est bien mal gérer sa production agricole lorsqu'on dépasse ce type de... Cela s'insère très bien dans la rotation des céréales et du canola dans les Prairies. On ne verra pas de fermes se convertir entièrement à la culture des légumineuses en raison des avantages de la rotation dans une bonne gestion agricole.

M. Minogue: Un mot de plus à ce sujet: les chiffres. Les trois organisations comptent en tout20 000 membres. Nous avons donc 20 000 agriculteurs qui cultivent des légumineuses, mais leur revenu total ne provient pas uniquement des légumineuses.

Le président: Monsieur Chrétien, une question supplémentaire.

[Français]

M. Chrétien: J'aimerais connaître votre point de vue. Cela ne vous a peut-être pas touché personnellement, mais l'abandon de la LTGO a-t-elle eu un effet dans votre industrie?

[Traduction]

M. Minogue: L'abrogation de la Loi sur le transport du grain a augmenté nos dépenses. Nous payons aujourd'hui toute la facture de transport, si bien que nos coûts de production sont plus élevés. Heureusement, cela s'est produit au moment où les prix des céréales augmentaient beaucoup, et les prix des céréales ont augmenté davantage que le coût des transports. Si ce changement s'était opéré il y a cinq ans, à l'époque où les prix étaient très bas, nous aurions éprouvé beaucoup de difficultés.

Pour ce qui est de l'avantage d'une récolte par rapport à une autre, rien n'a changé ici parce que les poids du produit sont sensiblement les mêmes; le transport a augmenté en montants égaux pour chacune de nos récoltes. Là où nous avons vraiment un avantage, c'est qu'il en coûte la même chose pour... Ce n'est peut-être pas un avantage, mais les prix de l'alimentation animale au Canada ont changé parce qu'il n'en coûte pas plus pour importer de la moulée de soya, mais il en coûte davantage pour exporter nos produits. Il est donc maintenant plus économique d'utiliser des pois dans l'alimentation animale dans l'Ouest canadien que cela ne l'aurait été avant les modifications apportées aux programmes de transport.

Le président: Merci, monsieur Chrétien. Monsieur Hermanson et, ensuite, monsieur McKinnon.

M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): Nous sommes très heureux de recevoir les producteurs de légumineuses aujourd'hui. Il y a environ un an, notre comité a entendu des producteurs de légumineuses, et les deux fois, j'avais la chance de compter un électeur parmi eux. Cela renforce ce que j'ai dit ici au comité et ailleurs, à savoir que les cultures spéciales et la culture des légumineuses constituent un pilier de notre économie agricole. Je ne vais pas répéter ce que vous avez dit, Lyle, mais je suis d'accord avec ce que vous avez dit sur l'importance des cultures spéciales et de la culture des légumineuses dans notre secteur. C'est ce qui nous a sauvé la vie au cours des quelques dernières années lorsque les prix du blé étaient bas.

.1615

Pour ce qui est de la question de la séparation du blé et des autres produits à l'heure où nous nous penchons sur l'attribution et la possession des wagons, c'est une très bonne chose que vous soyez ici aujourd'hui. Pourquoi cette séparation est-elle nécessaire? Vous dites que c'est nécessaire parce que le client veut son produit, il veut le produit dont il a vu les échantillons. Pourquoi est-ce nécessaire pour les légumineuses et non pour le blé? N'est-il pas vrai également qu'on expédie de plus en plus en vrac des légumineuses et des récoltes spéciales, comparativement à ce que c'était il y a quelques années?

M. Minogue: Les pois servant à l'alimentation animale sont expédiés en gros. Ce n'est peut-être pas aussi important ici. On pourrait traiter les pois comme le blé ici.

Mais dans le cas des lentilles ou des pois chiches ou des haricots spéciaux, les lentilles, par exemple, vous avez des spécifications comme la couleur, le pourcentage d'éclatement et la décoloration attribuable à la maladie. Ces produits vont aboutir en paquets sur les rayons des magasins. Les consommateurs les regardent et voient de quoi ils ont l'air. Quand on achète du blé transformé en farine, et qu'il s'agit d'un pain par exemple, on ne peut pas distinguer un pain d'un autre.

Le consommateur veut une lentille qui répond à ses besoins particuliers. Nous avons les petites lentilles Eston, nous avons les lentilles genre à pelures. Nous allons bientôt avoir ces petites lentilles rouges. Nous avons une lentille de type espagnol. Nous avons la CDC-Gold. Elles sont toutes différentes, et chacune a son créneau. L'acheteur voudra un produit d'un transformateur dont il sait qu'il peut donner à ses clients le produit auquel ils sont habitués. Je ne pense pas qu'on pourra contourner cela un jour.

Très franchement, c'est cela qui rapporte à l'industrie des légumineuses parce que nous avons dans l'Ouest canadien une industrie qui produit ces produits spéciaux. Encore là, si vous savez les préserver et les fournir à vos acheteurs à temps, vous en obtiendrez le prix fort.

M. Hermanson: Vous expédiez votre produit en wagons couverts plutôt qu'en wagons-trémies parce que c'est comme ça que vous séparez les sacs. On ne met pas des sacs dans un wagon-trémie. Ce qui veut dire que vous utilisez des wagons qui appartiennent à des chemins de fer et non au gouvernement. Est-ce qu'ils vous étaient attribués aux termes de la Loi sur le transport du grain par le passé? Comment fonctionnait l'attribution des wagons par le passé? Est-ce que le système répondait aux besoins de votre industrie ou aviez-vous de la difficulté à obtenir les wagons quand vous en aviez besoin?

M. Minogue: Je suis mal placé pour répondre à cette question technique au sujet du transport parce que je ne sais pas comment on commande les wagons et comment on les obtient.

Mais je sais qu'il y a des moments où les expéditions sont retardées parce qu'on manque de wagons. Cela nous inquiète beaucoup. De plus, à l'heure actuelle, bon nombre de nos transformateurs sont sur des lignes à faible densité de circulation, où l'on ne voit des trains que lorsque la demande pour le blé est forte. Je ne sais pas ce qui détermine exactement l'envoi d'un train, mais je sais qu'on n'enverra pas un train pour deux wagons de lentilles. On enverra un train pour 60 wagons de blé. Si votre expédition coïncide avec votre expédition de blé, vous avez de la chance, mais si ce n'est pas le cas, vous avez un problème.

Nombre de transformateurs - et je songe à l'un d'entre eux tout particulièrement qui est dans votre circonscription - doivent maintenant avoir des camions assortis d'un dispositif de mise en sacs, qui peuvent se rendre directement au chemin de fer, où ils trouveront un wagon pour expédier leurs produits.

Je ne peux vous citer de solutions précises. Faites venir des experts qui sont au courant de ces problèmes, qui connaissent les solutions, et assurez-vous qu'ils répondront à nos besoins.

M. Hermanson: On parle toujours de valeur ajoutée et de la nécessité d'avoir une valeur ajoutée dans les Prairies. On cite en exemple les récoltes spéciales pour la transformation dans les Prairies, particulièrement les lentilles et les pois.

Je veux savoir s'il y a place pour plus de transformation dans les Prairies. Franchement, lorsqu'on parle de transformation, on parle essentiellement de nettoyage. On ne dépasse pas le nettoyage et peut-être le classement, qui exige beaucoup de main-d'oeuvre. Y a-t-il place pour une transformation qui dépasserait le nettoyage et l'emballage du produit, ou devons-nous nous en tenir à cela dans les Prairies?

M. Minogue: Non. Il y a lieu d'aller beaucoup plus loin. J'ai parlé plus tôt d'une société à Saskatoon qui transforme maintenant 5 000 tonnes de pois par année en protéines, en amidons et en fibres. Tout récemment, elle a expédié 10 000 tonnes de pois entiers en Chine. La Chine va faire la même chose, elle sait donc de toute évidence transformer certains composants des pois.

Nous croyons que si nous faisons bien les choses, d'ici 10 ans, nous devrions expédier des amidons, des protéines, des fibres et d'autres produits précis, par exemples les acides aminés ou autre chose. Il y a des choses comme les dérivés protéiques ou des produits chimiques qu'on peut obtenir des... Nous savons qu'il y a des choses de ce genre, mais je ne peux pas vous donner de détail parce que nous n'avons pas encore de brevet, d'approbations et tout le reste. Mais il y a des choses fascinantes à faire ici.

.1620

L'une des contraintes que pose la consommation de lentilles dans certains pays est le temps de cuisson. Nous avons maintenant une société à Montréal qui prend nos lentilles, les fait cuire en partie, les congèle et les vend emballées. Ce produit fera son apparition l'été prochain dans une grande chaîne de supermarchés. Nous trouvons cela prometteur. Nous pensons que ça va marcher, et si ça marche, nous pourrions prendre pied sur le marché américain. Ensuite, nous nous tournerons du côté du marché européen et asiatique. Il n'y a pas plus de transformation lorsqu'on arrive à créer un produit qu'on met dans un sac de plastique et qui est prêt à servir.

M. Hermanson: Pour ce qui est du transport, si je vous comprends bien, vous n'êtes pas très sûr de la place que votre industrie occupe dans ce nouveau domaine. J'imagine que vous êtes encore en quête d'informations, que vous avez des gens dans votre industrie qui examinent cette question. La dernière fois que nous avons reçu ici des producteurs de légumineuses, ils s'inquiétaient de l'évolution de la Loi sur les grains du Canada et du fait que leur industrie n'avait pas tout à fait sa place dans cette loi.

Nous sommes députés, et nous adoptons des lois qui pourraient avoir un effet sur votre industrie. J'aimerais savoir comment vous concevez les besoins de votre industrie par rapport à la loi ou au règlement, et je suis particulièrement curieux de savoir ce que vous avez à dire sur les transports.

Veuillez vous en tenir surtout à la Loi sur les grains du Canada, et dites-nous si la loi sert bien votre industrie, s'il y a lieu d'y apporter des changements importants et quels seraient ces changements. La Commission canadienne des grains pourrait intervenir. Comment voyez-vous le rôle de la Commission canadienne du blé? Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

M. Minogue: Au cours des récentes discussions sur les changements à apporter aux transports, un comité a été créé pour en discuter avec les producteurs de légumineuses. L'industrie des cultures spéciales n'était pas représentée à ce comité. Cela nous préoccupe parce que l'industrie du grain y était très représentée. Elle a envoyé ses gros canons à ce comité, ses directeurs administratifs y siègent et font des recommandations. Cela m'inquiète. Ces gens se souviennent-ils qu'il existe d'autres récoltes qui ont leurs besoins propres? Les producteurs de légumineuses pourraient-ils être mieux représentés à l'avenir dans ces comités afin que nous puissions faire entendre nos vues?

Je ne crois pas que notre secteur ait des besoins législatifs particuliers en ce moment, mais nous nous intéressons aux discussions qui ont lieu actuellement au sujet du nouveau processus de licenciement et de sécurité dans l'industrie des légumineuses, processus qui nécessitera probablement des modifications à la loi régissant la Commission canadienne des grains. Je ne crois pas que nous ayons besoin d'apporter des modifications à la loi régissant la Société pour l'expansion des exportations, mais c'est une possibilité. Il y a des développements et des discussions en cours dans ce domaine.

M. Hermanson: Merci.

Le président: Merci, monsieur Hermanson. Monsieur McKinnon.

M. McKinnon (Brandon - Souris): Je vous souhaite la bienvenue, à vous qui êtes du meilleur coin du Canada, nommément l'Ouest. Je tenais à ce que cela soit dit.

M. Hermanson a posé certaines de mes questions. Il y a des producteurs dans l'ouest du Manitoba qui expédient leurs produits dans des véhicules de conteneurisation. Est-ce un mécanisme sous-utilisé ou ce mécanisme nous permettrait-il de faciliter le transport des produits de nos fermes vers les pays importateurs?

M. Minoque: Il y a plusieurs processus ici. Comme nous l'avons dit plus tôt, lorsque le produit est mis en sac, on le met parfois dans des wagons couverts. L'autre possibilité consiste à mettre ces sacs dans des conteneurs qui sont ensuite remorqués. Le conteneur est envoyé directement par camion vers un port ou est mis sur le train et expédié. J'oublie le terme exact, mais le camion le remorque et les conteneurs sont envoyés au port. Peut-être que Jack a quelque chose à ajouter ici. C'est un domaine qu'il connaît mieux que moi.

M. Froece: C'est ce qu'on fait beaucoup dans l'industrie du haricot. Normalement, les haricots sont traités à la ferme ou à l'usine, sont mis dans des conteneurs et envoyés au port. C'est encore plus important pour les haricots. L'expédition se fait pour la vente. Quand vous faites une vente, il faut envoyer son conteneur directement au port, parce que vous avez un délai précis pour atteindre un certain marché. On produit plusieurs haricots spéciaux. Ils répondent à des besoins particuliers, et à des créneaux particuliers dans le monde entier.

.1625

M. McKinnon: Qu'en est-il du marché des lentilles? Est-ce qu'on utilise beaucoup la conteneurisation ici?

M. Froece: On l'utilise mais pas autant que pour les haricots. Mais quand il s'agit de l'aspect qualitatif des choses, comme le disait Lyle plus tôt, l'acheteur va chez le transformateur et achète un produit précis. Le processus de classement n'est pas nécessaire. Vous voyez l'échantillon, et c'est ce que vous achetez.

M. McKinnon: Si on me permet de passer à autre chose, monsieur le président, j'aimerais parler de l'évolution de la recherche agricole dans nos derniers budgets.

L'évolution des crédits de recherche agricole a-t-elle eu un effet sur votre industrie? Je parle ici des crédits fédéraux et des institutions qui ont été mises en place.

M. Minogue: Les compressions dans la recherche ont été assez importantes. Si l'on me permet de résumer ma perception des choses, Agriculture Canada a regroupé sa recherche dans un plus petit nombre d'endroits afin de se rendre plus efficiente. Nous venons de rencontrer le ministère aujourd'hui à ce sujet.

L'une des choses qui nous inquiètent, c'est que si on fait d'un endroit comme Morden le centre de développement des haricots, il reste que les conditions climatiques sont si différentes dans le pays que nous devons nous assurer que ces haricots sont testés très tôt dans toutes les régions de l'Ouest canadien avant de s'aventurer trop loin dans la phase de développement. On nous a donc assuré que cela se ferait.

Je dois aussi ajouter que le secteur privé investit aujourd'hui davantage dans la recherche. J'imagine qu'on arrive encore à s'arranger, mais nous craignons que de nouvelles compressions dans la recherche nous mènent au point où il n'y aura plus rien, et à ce moment-là, les pertes seront réelles.

M. McKinnon: Dans le développement industriel, en êtes-vous à un point où vous n'avez plus accès à certains créneaux, comme le disait votre collègue, parce que vous ne pouvez plus faire face à la concurrence dans le genre de produits que nous avons, par rapport aux autres producteurs des autres régions du monde?

M. Minogue: Je vais vous donner un exemple précis. Dans le cas des lentilles, la principale lentille que nous produisions à nos débuts était une variété américaine qui n'était pas particulièrement adaptée à nos besoins. La lentille Laird est apparue en 1978, et d'ici deux ans, nous aurons notre nouvelle lentille Laird résistante à la maladie, mais c'est trop long, parce que cela fait cinq ans que nous combattons les maladies. On a vu des lentilles être déclassées, des producteurs se retirer dans certaines régions parce qu'ils ne pouvaient plus les produire sans maladie. Nos pertes économiques ont été considérables à cause de cette lacune. Nous nous battons donc pour rendre le processus plus efficient, et il y a de nouvelles variétés qui apparaissent chaque année tous les deux ans, qui nous permettent de contrer les nouvelles maladies, les insectes et les autres problèmes qui se posent.

M. McKinnon: Ma dernière question porte sur la haute technologie qui intervient dans les manipulations génétiques. La R-D de l'industrie est-elle à jour dans ce domaine, ou est-ce quelque chose que vous réservez pour plus tard?

M. Minogue: Une découverte fascinante vient d'être faite au Conseil national de recherches, à Saskatoon, découverte qui permet d'insérer un gêne précis dans une plante précise. On a fait cela avec des pois. Si le financement de la recherche se maintient et si nous obtenons le soutien voulu, nous espérons pouvoir faire des choses dans l'industrie du pois, comme cela s'est fait dans l'industrie du canola au cours des 10 dernières années, et c'est ce que les Américains font pour certaines de leurs récoltes.

M. McKinnon: Merci.

M. Froece: J'aimerais seulement dire qu'il faut plus de recherche élémentaire sur les nouveaux genres de récoltes. Prenez l'exemple de l'industrie des légumineuses dans l'Ouest canadien. Il y a 10 ans, nous en étions à 675 000 acres. L'an dernier, nous en étions à trois millions d'acres. Il faut faire de la recherche sur les nouvelles récoltes, parce que c'est un exemple de ce qui peut se faire lorsqu'on fait ce genre de recherche.

Le président: Monsieur Lefebvre, et ensuite monsieur Calder.

[Français]

M. Lefebvre (Champlain): J'aimerais d'abord vous féliciter, parce que c'est la première fois que je vois de si belles fèves blanches. Je ne suis pas habitué d'en voir d'aussi grosses.

J'ai été très surpris d'apprendre que, dans le secteur de la culture de la légumineuse, vous aviez déjà créé 1 600 emplois. Vous dites que c'est un démarrage, mais je n'ai pas saisi sur combien d'années. Vous allez probablement me le dire. Vous dirigez-vous déjà vers la transformation de la légumineuse?

.1630

[Traduction]

M. Minogue: Oui.

Le président: Cela nécessite peut-être une certaine clarification. Les 1 600 personnes que vous avez mentionnées nettoyaient et traitaient les haricots après qu'ils avaient quitté la ferme. Cela n'incluait pas les personnes à la ferme. J'ai pensé que vous voudriez peut-être...

M. Minogue: Vous avez raison. Oui, c'est vrai. La transformation emploie 1 600 personnes, à l'heure actuelle, après que les haricots ont quitté la ferme. En Saskatchewan, nous avons recruté un consultant, dont la responsabilité primaire est de travailler à ce que nous appelons «l'industrie à valeur ajoutée».

Nous faisons des choses comme l'analyse des constituants, qui permet d'évaluer le montant exact de chaque nutriment et de chaque micro-nutriment dans nos produits. On s'emploie constamment à activer la recherche dans ce domaine. Nous travaillons avec les sociétés, comme celles de Montréal dont j'ai parlé, qui font de la transformation. Nous allons mettre au point une marque de commerce et des dépliants qu'on retrouvera dans les magasins afin de faire connaître ces produits et de les expliquer aux consommateurs.

Donc, nous faisons des choses dans ce domaine, mais nous devrions en faire davantage. Il faut faire plus d'efforts et recruter plus de gens. Nous essayons de suivre le rythme de progression de l'industrie, mais c'est difficile.

Mme Adam: De même, nous avons maintenant trois plantes dans les Prairies qui permettent de produire une moulée de pois et une moulée de pois en boîte pour notre bétail, et cela représente une valeur ajoutée importante. Ce produit n'est pas destiné à la consommation humaine, mais on ajoute une valeur importante au produit de base.

Une chose intéressante s'est produite dans l'industrie albertaine du haricot. Rien que l'an dernier, des recherches importantes ont été faites et l'on a testé des haricots frits que l'on compte exporter aux États-Unis. Nous faisons des percées dans ce domaine.

Nous venons d'ailleurs de rencontrer vos chercheurs, Dorrell et Brian Morrissey. Ils nous ont parlé du travail qui se fait au Canada pour faire du pois un agent insecticide pour le grain emmagasiné. Il se fait donc une recherche fascinante et intéressante au niveau de la valeur ajoutée. Le potentiel est considérable dans l'Ouest canadien.

Le président: Monsieur Calder.

M. Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe): Janette, j'aimerais qu'on regarde un peu du côté de l'avenir. J'aimerais que vous nous disiez où sera votre industrie d'ici l'an 2020. Je mentionne cette date pour une raison précise.

Il était question de cela à Vision 2020 l'an dernier à Washington. D'ici là, il y aura entre sept et huit milliards d'humains sur terre. Il y a quatre ou cinq ans, la production des fruits de mer a plafonné à 100 millions de tonnes. Puis elle a baissé de 4 p. 100, et sa baisse continue, si bien que toute la production alimentaire proviendra de l'espace agricole.

Vous cultivez en ce moment trois millions d'acres. Par exemple, pour ce qui concerne le rendement à l'acre, comment vous comparez-vous aux autres récoltes? D'ici l'an 2020, il faudra obtenir le maximum de chaque acre. Et ce, sans dégrader la terre.

Votre industrie est représentée ici aujourd'hui. Je sais que vous faite de la recherche et tout le reste. Où serez-vous d'ici l'an 2020?

M. Minogue: J'ai dit plus tôt que notre territoire agricole et notre espace agricole cultivé nous offrent la possibilité de quintupler la production de légumineuses si nous trouvons les débouchés voulus et si nous arrivons à surmonter les contraintes au niveau du transport, de la recherche et ce genre de choses.

L'aspect le plus important, c'est d'abord que nous obtenions des gains nets lorsque nous pratiquons la culture de légumineuses par opposition à d'autres céréales. J'ai parlé de l'élimination de la jachère, ainsi que de l'augmentation de la production de protéines, qui est aussi importante.

Mais ce qui compte encore plus, c'est que si vous examinez les données sur la demande de céréales pour l'an 2020, vous constatez que nous ne pouvons produire suffisamment de grain pour fournir à tous le genre de régime riche en protéines qu'ils souhaitent grâce au bétail ou au poisson. Il n'y aura pas suffisamment de bétail ni de poisson parce qu'on ne pourra produire suffisamment de céréales pour les nourrir.

.1635

Si vous pensez aux pays où on a du mal à trouver des protéines, comment se débrouille-t-on? En Afrique, on mange du maïs et des haricots, du teff et des haricots, du riz et des haricots, ou du manioc et des haricots; le régime quotidien comprend toujours des haricots.

Les récoles de légumineuses sont une source traditionnelle de protéines pour les gens, et ce, depuis très longtemps. J'estime qu'en l'an 2020, le secteur de légumineuses comblera un pourcentage beaucoup plus élevé des besoins en protéines de la population humaine qu'à l'heure actuelle, tout simplement parce que nous ne pourrons plus nous payer le luxe de donner en nourriture sept livres de céréales à un boeuf pour obtenir une livre de viande, ou cinq livres de céréales à un cochon pour obtenir une livre de porc, ou trois livres de céréales à un poulet pour obtenir une livre de cette viande, ou deux livres de céréales à un poisson pour pouvoir en manger une livre. On consommera davantage de légumineuses.

Voilà pourquoi nous prévoyons la croissance du secteur des légumineuses; les producteurs de légumineuses feront des gains à mesure que la demande de légumineuses augmentera et que le secteur agricole, lui, rétrécira.

M. Calder: J'élève des poulets, et je dois vous contredire. L'indice de conversion pour le poulet est de 1 pour 8.

M. Minogue: Nous n'avons pas de très bons poulets dans l'ouest du Canada.

Mme Adam: À ce sujet, et pour en revenir à votre remarque sur la production de légumineuses pour la santé et la durabilité de nos terres agricoles, les légumineuses ont l'avantage d'être la récolte tout indiquée pour la rotation et favorise la santé et la nutrition du sol. Avec un apport moindre d'engrais, on peut produire la même quantité d'aliments à un coût moindre. C'est une contribution importante de légumineuses à la rotation des cultures dans l'ouest du pays.

Le président: Je sais qu'ils diffèrent, mais pourriez-vous nous donner le pourcentage moyen de protéines contenues dans les légumineuses?

M. Minogue: Pour les pois, c'est de 20 à 26 p. 100, soit une moyenne d'environ 22 à 23 p. 100. Les lentilles se situent au même niveau.

Le président: Pour les légumineuses, alors, c'est environ 20 à 25 p. 100, alors que ce pourcentage est de 12 à 13 p. 100 pour le blé et de 9 à 10 p. 100 pour le maïs, je crois.

M. Minogue: C'est exact.

Le président: Vos remarques sur la production de protéines par acre... Cela aussi, ce serait une donnée intéressante parce qu'il faut aussi tenir compte de la production par acre. Je crois avoir vu des données comparatives sur la quantité de protéines produite par acre pour les récoltes de légumineuses et les récoltes de céréales, le maïs, par exemple.

Vous pourriez peut-être nous en dire plus long à ce sujet. Je ne veux pas vous mettre sur la sellette. Seulement, c'est une question qu'on est en droit de se poser. Nous savons que, pour les pois, le pourcentage est beaucoup plus élevé.

M. Minogue: En outre, nous pouvons actuellement cultiver une soixantaine de variétés de pois. La plupart viennent d'Europe, d'entreprises privées qui élaborent des variétés de graines. On s'est toujours fondé sur le critère de la production, parce que, il y a cinq ou 10 ans, les gens ne se préoccupaient pas tant de protéines. On voulait obtenir beaucoup de pois. On voulait une grosse production. De nos jours, la quantité de protéines est aussi un critère important.

Regardez ce qui s'est passé dans le secteur du blé. Il y a maintenant ségrégation de protéines à chaque demi-point de pourcentage de la filière, et de primes importantes pour les protéines. Il en sera de même un jour pour le secteur des pois; on prévoira des primes pour les protéines dans les pois.

Il faut encore de nouvelles recherches pour trouver des variétés au contenu plus élevé en protéines, plus facilement assimilables aux humains.

M. Froece: Les haricots à l'état brut sont en fait une source alimentaire directe. Ils contiennent des fibres et des protéines. À eux seuls, ils constituent la base d'un repas.

Le président: En effet, vous l'avez indiqué dans cette trousse que vous nous avez fait parvenir cet après-midi.

M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): M. Hermanson n'est pas le seul qui a de la chance aujourd'hui. J'accueille aussi un de mes électeurs. Dans la région, nous l'appelons M. Froece. Quelle est la bonne prononciation?

Je suis heureux de vous accueillir ici aujourd'hui et de rencontrer vos collègues.

Nous entendons souvent dire que les cultures spéciales dépendent d'une loi particulière. Aimeriez-vous qu'on adopte une loi sur les cultures spéciales qui comporterait des solutions à vos problèmes particuliers?

M. Froece: Je crois que la Loi sur les grains du Canada, dans sa forme actuelle s'applique bien à notre situation. À mon avis, nous n'avons pas besoin d'une loi sur les cultures spéciales. Pour autant que je sache, nous n'avons pas de problèmes particuliers qui nécessitent une loi.

.1640

Mme Adam: J'en reviens à la question de M. Hermanson sur la Loi sur les grains du Canada et sur les pourparlers concernant le permis et la sécurité. On a déjà tenté de régler ces problèmes. Les optimistes croyaient pouvoir faire déposer, au Parlement cette année, des modifications à la loi. Nous avons toutefois constaté que ce serait impossible.

Les changements que nous négocions avec la Commission canadienne des grains pourraient, d'après nous, être apportés à la loi existante, de façon à tenir compte de légers écarts entre les cultures. Nous ne réclamons de modifications de grande envergure à la loi.

M. Hoeppner: Je me posais la question, parce qu'une bonne part de la transformation que vous faites est du nettoyage et de l'emballage. Bon nombre de producteurs de cultures spéciales se sont plaints de ne pouvoir payer le permis et le cautionnement. Ils estiment avoir besoin de mesures spéciales pour survivre.

Mme Adam: Nous sommes en train de négocier des modifications à ce processus qui s'inscrivait dans la loi actuelle. Nous estimons que de petites modifications à la loi existante suffiraient. Nous nous entretenons à ce sujet avec la Commission canadienne des grains et l'industrie. Bien des gens participent à ces négociations, mais je crois que cela ne pourra se faire facilement dans le cadre de la loi actuelle. Nous espérons mener ce projet à bien d'ici la prochaine année de récolte, mais pas pour cette année; cela ne vous donnerait pas suffisamment de temps.

M. Hoeppner: Cela m'amène à poser mon autre question qui porte sur le système de classement. Avez-vous votre propre comité de normalisation, ou est-ce la Commission des grains qui établit les normes pour les lentilles? Je sais qu'il y a toutes sortes de catégories.

Mme Adam: Nous relevons d'un sous-comité spécial de la Commission canadienne des grains sur le classement. Lyle a fait allusion à un groupe constitué de représentants de producteurs, de la CCG et du secteur qui est revenu récemment d'Europe. Dans le secteur des pois, l'un des principaux obstacles, c'est de déterminer le contenu en éléments étrangers que nous exportons dans le monde. C'est l'un des principaux enjeux pour le groupe et le sous-comité spécial de la normalisation des céréales. Encore une fois, c'est une question ici de collaborer avec l'industrie. Il n'est pas nécessaire d'apporter des modifications de grande envergure aux lois; il suffit de négocier et de collaborer avec le secteur pour s'entendre sur les normes qui conviendraient au marché international et qui pourraient être adoptées à un prix raisonnable par nos commerçants et nos manutentionnaires céréaliers.

M. Hoeppner: Vous croyez donc pouvoir collaborer avec la Commission des grains.

Mme Adam: Oui.

M. Hoeppner: Mon autre question est celle-ci: en ce qui concerne les autres cultures spéciales, croyez-vous qu'une meilleure harmonisation des produits chimiques s'impose? Surtout pour les nombreux pesticides chimiques qui sont disponibles, que vous aimeriez pouvoir utiliser, mais qui sont interdits?

M. Froece: Le problème, particulièrement pour les haricots, c'est que la superficie de culture est relativement petite: il y a 35 000 acres dans le sud de l'Alberta et 50 000 acres au Manitoba. Les fabricants de pesticides chimiques ne veulent pas investir des millions de dollars dans la production d'un produit que les agriculteurs n'utiliseront que sur 30 000 acres. Ce n'est tout simplement pas rentable.

Il nous faudrait pouvoir faire enregistrer ces produits pour un emploi limité. Nous ne demandons pas ce que tous les autres pays font, mais simplement la possibilité de recourir aux produits utilisés par les nations industrialisées qui disposent déjà de données, telles que l'Union européenne, les États-Unis, etc. Puisqu'ils ont déjà fait des recherches et recueilli des données et qu'ils homologuent aujourd'hui ces produits, nous devrions pouvoir y avoir accès.

M. Hoeppner: Vous avez donc fait connaître votre problème au gouvernement et suggéré des solutions concrètes que nous pourrions préconiser?

Le président: Il y a un groupe dont le noyau provient, je crois, de la Fédération canadienne de l'agriculture et d'autres organisations de ce genre, qui se réunit régulièrement pour examiner les demandes d'homologation pour emploi limité faites par notre expert. Vous connaissez certainement ce groupe, sinon vous pourriez vous informer afin que votre demande soit bien acheminée aux autorités compétentes. D'ailleurs, chers collègues, on pourra traiter de ce sujet ce soir. Mme Ur a quelques questions.

.1645

Mme Ur (Lambton - Middlesex): Comme j'ai peu de temps, je ne poserai que deux questions.

Que faites-vous pour familiariser les Canadiens avec votre produit, pour promouvoir la consommation de légumineuses afin qu'elle augmente au Canada? Par ailleurs, examinez-vous d'autres méthodes de transport des légumineuses, autres que le rail, qui seraient rentables?

M. Minogue: En ce qui concerne votre première question sur la promotion de nos produits, nous avons engagé une entreprise qui participe régulièrement aux foires alimentaires qui se tiennent un peu partout au pays pour faire la promotion de nos produits. Nous donnons des informations aux organisations qui ont des besoins précis. Les légumineuses sont un aliment fonctionnel qui est donc très utile pour ceux qui souffrent de certaines maladies telles que la c«lialgie, le spina bifida, etc. Nous avons apporté des exemplaires de certaines de nos publications. Je crois qu'il y a un problème de langue, mais nous pouvons certainement vous en envoyer d'autres exemplaires si vous souhaitez.

Je crois que les gens connaissent de mieux en mieux les légumineuses. Je constate que maintenant, lorsque je dis aux gens que je fais pousser des lentilles, ils me demandent si ce sont des rouges ou des vertes. Il y a 10 ans, les gens demandaient plutôt ce qu'était une lentille.

Pour ce qui est du transport, le seul moyen autre que le rail, c'est le camionnage. Ça nous coûterait extrêmement cher si nous devions expédier nos produits à partir de nos trois millions d'acres jusqu'aux ports par camion. Le coût serait exorbitant et, en outre, les routes deviendraient impraticables pour les voitures.

Le président: Monsieur Hermanson.

M. Hermanson: On a abordé la question des pesticides. J'ajouterais seulement que vous savez sans doute que vous comptez de nombreux alliés à cet égard, particulièrement en Ontario, où on réclame l'harmonisation et l'abaissement des prix des produits chimiques nécessaires à la lutte contre les insectes nuisibles.

Il reste une question à laquelle on a fait allusion - on l'a mentionnée, mais on ne l'a pas abordée en détail - à savoir la question de la sécurité. Lorsqu'un agriculteur livre son produit, comment peut-il être certain qu'il sera payé? Je sais que ce problème touche surtout le secteur des cultures spéciales, tout simplement parce que c'est un secteur émergeant où il reste beaucoup de détails à régler.

Il y a eu, bien sûr, la fameuse affaire Klemmer à Rosetown, dont vous êtes au courant, qui n'a pas beaucoup aidé le secteur. Je me demande si, dans l'industrie, on estime que l'auto-réglementation est préférable pour les cultures spéciales, pour les légumineuses, afin de garantir, notamment aux agriculteurs qui livrent des lentilles au transformateur local, qu'ils finiront par être payés, ou si on ne préférerait pas une situation semblable à celle du blé qui est assujettie aux règles de la Commission canadienne des grains, ce qui donne certaines assurances aux agriculteurs.

Dans l'affaire Klemmer, M. Klemmer ne jouissait d'aucune protection, et ça a fait tout un gâchis. L'affaire s'est rendue jusqu'au ministère de la Justice; nous pourrions en parler ad vitam eaternam. J'ai entendu parler des deux solutions. Certains producteurs estiment que leur secteur diffère grandement de celui du blé; ils veulent les outils qui leur permettront d'assurer leur crédibilité et de veiller à leurs propres affaires. D'autres préféreraient que la Commission canadienne des grains s'en occupe comme elle fait pour le blé et l'orge. Qu'en pensez-vous?

M. Minogue: Notre position sur la sécurité est claire. Les producteurs de légumineuses de l'Ouest canadien se sont entendus, il y a quelques années, pour assurer une certaine sécurité sur une base volontaire et non obligatoire; le producteur qui veut des garanties doit verser une prime et s'assurer pour le cas où le consommateur ou l'acheteur ferait faillite.

On a constitué un comité qui a rencontré la Commission canadienne des grains et le gouvernement pour trouver une solution. On discute actuellement d'une proposition, et je peux vous en faire un bref résumé.

.1650

La Société pour l'expansion des exportations dit pouvoir assurer les pertes en échange d'une prime. Elle propose un tarif qui nous semble raisonnable, 0,2 p. 100 ou 20 cents pour 100 $. Elle suggère de s'en remettre à un agent qui serait fort probablement de la Commission canadienne des grains.

Si la Commission canadienne des grains ne veut pas ou ne peut pas s'en occuper, si des problèmes surgissent, la Western Canada Pulse Growers pourrait prendre la relève. Si c'était là le seul obstacle, c'est ce que nous ferions. Nous espérons donc que les détails seront réglés sous peu.

Certaines questions restent sans réponse. Qui déterminera quels transformateurs ou quels acheteurs seront assurables? Nous ne voulons pas consentir une assurance à n'importe qui. Nous voulons que le processus soit ouvert et facile, nous ne voulons pas limiter indûment l'admissibilité du secteur de la transformation. Nous ne voulons pas imposer des exigences élevées concernant le capital ou le cautionnement ni prévoir des modalités qui prennent beaucoup de temps.

Si nous parvenons à nous entendre sur les critères d'admissibilité et si les tarifs sont raisonnables, nous croyons pouvoir soumettre une proposition au gouvernement d'ici l'an prochain; il faudra alors vraisemblablement modifier la loi qui régit la Commission canadienne des grains. Si en fonction d'autres options nos conseils des légumineuses doivent prélever des droits pour ensuite les verser à la Société d'expansion des exportations, il faudra peut-être modifier nos régimes provinciaux. Cela reste encore incertain, mais nous avons réalisé des progrès et je crois que nous réussirons à créer un programme qui satisfera les producteurs.

Pour l'année actuelle, nous devons nous en remettre à l'ancien régime qui prévoit la délivrance d'un permis ou d'un cautionnement par la Commission canadienne des grains. Tous n'ont pas le permis et le cautionnement. Les producteurs qui font affaire avec des transformateurs ou des acheteurs qui n'ont ni permis ni cautionnement le feraient à leurs propres risques.

Le président: Merci beaucoup. Je ne veux pas vous presser, mais je sais que vous devez prendre l'avion à 18 heures. S'il n'y a pas d'autres remarques, je tiens à vous remercier, Janette, Jack et Lyle pour votre exposé. Il a été des plus intéressants et des plus pertinents, et j'espère que vous avez aussi trouvé utile d'être venus aujourd'hui. Merci beaucoup.

Mme Adam: J'aimerais ajouter une chose. Les gens avec qui nous avons travaillé au cours des trois derniers jours et qui nous ont aidés, ici... Nous avons eu des rencontres très fructueuses. Les gens avec lesquels nous nous sommes entretenus ont été très attentifs. Ils s'intéressent sincèrement à ce que nous faisons. Ils ont suggéré deux solutions à nos problèmes. Le dialogue a été excellent. Les fonctionnaires que nous avons rencontrés ont une très bonne attitude. Lorsqu'on leur a présenté nos idées, plutôt que de s'y opposer sur-le-champ, ils nous ont fait des suggestions créatives pour les améliorer. Nous leur en savons gré. Vos employés ici, à Ottawa, sont très compétents, et il est important que vous sachiez que nous le reconnaissons.

Le président: Merci beaucoup. C'est bon de vous l'entendre dire. Bon voyage.

Mme Adam: Merci.

Le président: La séance est levée.

Retourner à la page principale du Comité

;