[Enregistrement électronique]
Le mardi 16 avril 1996
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Mesdames et messieurs, comme cette réunion débute 15 minutes plus tôt que d'habitude, je pense que nous devrions consacrer les deux ou trois premières minutes - pas plus longtemps je l'espère mais s'il le faut nous pouvons le mettre de côté - à prendre connaissance du deuxième rapport du Sous-comité du programme et de la procédure avant d'entendre le premier témoin.
Le rapport fait état de la discussion du comité de direction. Tout d'abord, il indique la série de séances prévues pour le comité cette semaine sur le projet de règlement relatif à la production d'aliments biologiques.
La deuxième question porte sur la tenue d'une séance supplémentaire à celle déjà prévue sur la question des wagons-trémies.
Le troisième point porte sur la demande du comité concernant le budget. Il y aura peut-être lieu de poser une question au greffier à ce sujet.
Quatrièmement, à la fin de ce que je crois avoir été la dernière séance, j'ai indiqué à titre de président du comité que je diffuserais un communiqué de presse pour renseigner le public sur le programme ambitieux du comité pour ce printemps et qui s'étendra peut-être jusqu'à l'automne. Nous avons parlé d'inviter les personnes intéressées à présenter au comité leurs vues sur le développement du milieu rural au Canada.
Le cinquième point concerne la série de réunions prévues sur le budget des dépenses.
Ce n'est pas l'ordre dans lequel tout cela se fera. N'oubliez pas que nous avions adopté plus tôt un rapport renfermant des questions sur ce sujet également et qui les précéderaient.
Monsieur Hermanson.
M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): J'aurais quelques questions, monsieur le président.
Je lis ici «un budget additionnel de 10 000 $». S'agit-il d'un ajout à quelque chose d'autre ou s'agit-il simplement d'un budget de 10 000 $?
Le président: Je demanderai au greffier de répondre à cette question.
Le greffier du comité: Il s'agit d'un budget de 10 000 $. Nous étions en situation déficitaire vers la fin mars. Ce budget de 10 000 $ est prévu jusqu'à la fin de l'exercice 1995-1996. Par conséquent, il s'ajoute au budget que nous avions déjà. Je pense que pour l'exercice 1995-1996, nous avions un budget total d'environ 35 000 $.
M. Hermanson: Par conséquent, il était de 45 000 $ moins le déficit que nous avions l'année dernière.
Le greffier: Oui.
M. Hermanson: L'autre question, monsieur le président, concerne le point deux qui se lit comme suit: «une coalition de producteurs menée par la Ontario Corn Producers Association». Il avait été question que certaines organisations ontariennes examinent la question des wagons-trémies mais à moins qu'il s'agisse d'une autre coalition, cette coalition n'est pas dirigée par la Ontario Corn Producers Association.
Le président: Je demanderai au greffier d'expliquer la situation.
Le greffier: C'est peut-être un mauvais choix de mots de ma part. Il y a effectivement plusieurs organisations de producteurs de l'Ontario qui en font partie. Mais d'après la personne-ressource qui a communiqué avec mon bureau, l'affaire était coordonnée par la Ontario Corn Producers Association. Mais vous avez tout à fait raison, plusieurs groupes en font partie. Je ne suis pas sûr que cette association dirige à proprement parler la coalition. C'est peut-être un mauvais choix de mots.
M. Hermanson: Je dirais que c'est trompeur. La principale coalition, ou ceux qui sont à l'origine de la décision d'acheter des wagons-trémies, regroupait des organisations agricoles canadiennes de l'Ouest, y compris le Syndicat national des cultivateurs, la Western Canadian Wheat Growers Association et la Saskatchewan Association of Rural Municipalities. Certaines organisations ontariennes s'intéressent maintenant à cette question.
Donc à mon avis, cela n'est pas exact.
M. Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe): Il existe des producteurs de blé en Ontario.
M. Hermanson: Mais ce n'est pas la coalition qui a...
Le président: Le greffier peut apporter des éclaircissements. Je crois que l'autre groupe est sûrement invité lui aussi.
M. Pickard (Essex - Kent): Le Parti réformiste est-il en train de dire que l'Ontario n'a pas d'importance?
Le président: Une petite minute, monsieur Pickard. Nous laisserons le greffier répondre. Il se gardera bien de dire une chose pareille.
Le greffier: Monsieur le président, essentiellement, deux coalitions ont été formées. L'une, vous avez tout à fait raison, est installée principalement dans l'Ouest et l'autre en Ontario. Ces deux coalitions sont invitées à comparaître devant le comité.
Le président: Monsieur Landry.
[Français]
M. Landry (Lotbinière): Je vois que la procédure du comité est posée ici, à l'article 5.
J'aimerais vous parler d'une problématique qui existe au niveau du Québec et de l'Ontario. Il s'agit du lait cru.
Je ne sais pas si le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire va se pencher sur cette problématique et quelle sera notre position face au Québec et à l'Ontario à l'égard de la réglementation sur le lait cru.
[Traduction]
Le président: Ces règlements, monsieur Landry, sont en train d'être publiés officiellement dans la Gazette du Canada par le ministère de la Santé. J'ignore la date à laquelle ils ont été publiés mais ils sont publiés dans la Gazette pendant 75 jours pour recueillir les commentaires du public, comme vous le savez. Je suppose que si on veut que le comité de direction examine l'opportunité pour ce groupe d'entendre des commentaires à ce sujet, c'est une demande qui peut lui être faite.
Je tiens à vous rappeler - non pas que ce ne soit pas une question importante qui risque de toucher les producteurs agricoles du Canada et l'ensemble de l'industrie - que nous avons un programme très chargé d'ici la fin juin. Plus nous y ajouterons d'éléments, plus nous risquons de manquer de temps pour tous les aborder.
À titre d'information, je tiens à rappeler à chacun d'entre nous que si nous connaissons des groupes de gens qui aimeraient faire des commentaires, nous devrions nous assurer qu'ils sont au courant du processus établi. Ce projet de règlement est publié pendant 75 jours dans la Gazette du Canada pour recueillir les commentaires du public, après quoi le ministère de la Santé examinera ces commentaires et prendra ensuite les mesures qui s'imposent.
Y a-t-il d'autres commentaires sur le deuxième rapport du Sous-comité du programme et de la procédure? Dans la négative, pouvons-nous avoir une indication de la suite qui devrait selon vous lui être donnée? Manifestez-vous. Êtes-vous pour ou contre son adoption ou allez-vous simplement rester là?
M. McKinnon (Brandon - Souris): Je propose que nous adoptions le programme présenté.
M. Reed (Halton - Peel): J'appuie la motion.
M. Hermanson: Le comité de direction n'a-t-il pas discuté de la possibilité de débattre de la question du filet de sécurité?
Le président: Je crois que cela faisait partie du premier rapport. C'est le rapport que nous avons adopté avant celui-ci. Donc cela devrait toujours être au programme.
M. Hermanson: Cela est toujours au programme.
Le président: Je dirais que oui.
M. Hermanson: Ce point ne va donc pas disparaître parce que nous adoptons ce rapport-ci.
Le président: J'espère bien que non.
Monsieur Landry, avez-vous d'autres commentaires?
M. Landry: Non.
Le président: Il est proposé que nous adoptions ce deuxième rapport.
La motion est adoptée [Voir Procès-verbaux]
Le président: Mesdames et messieurs, nous avons un certain nombre de témoins avec nous ce matin. Nous avons la salle jusqu'à 11 heures et nous avons trois témoins qui doivent comparaître devant le comité ce matin pour que nous discutions avec eux de leurs commentaires sur le projet de règlement relatif à la production d'aliments biologiques. Nous devons donc agir en conséquence et tenir compte du fait que nous avons trois témoins à entendre au cours des deux prochaines heures.
Notre premier témoin est la présidente sortante de Canadian Organic Growers, Anne Macey.
Anne, je vous cède le microphone et vous pourriez peut-être nous en dire un un peu plus sur vous et sur votre organisation. Nous vous souhaitons la bienvenue.
Mme Anne Macey (présidente sortante, Canadian Organic Growers): Je suis la présidente sortante de Canadian Organic Growers. J'ai fait très longtemps partie de cette organisation. J'ai également participé à l'élaboration du projet de règlement sur la production d'aliments biologiques.
Canadian Organic Growers est un organisme de charité enregistré, constitué en vertu d'une loi fédérale. Depuis plus de 20 ans, nous diffusons dans l'ensemble du Canada de l'information sur la culture biologique et nous constituons des réseaux d'entraide dans ce domaine pour promouvoir les méthodes de culture biologiques et sensibiliser les Canadiens aux avantages qu'elles présentent pour l'environnement, la santé et la société.
Notre organisme compte 1 600 membres dans l'ensemble du pays, dont des agriculteurs, des jardiniers, des chercheurs, des détaillants et des consommateurs qui s'intéressent à la production d'aliments biologiques. Nous publions des livres comme Organic Resource Guide et Organic Field Crop Handbook, des fiches techniques et des enregistrements magnétoscopiques ainsi qu'un trimestriel intitulé Cognition. Nous décernons également chaque année une bourse d'études de 1 000 $ à un étudiant diplômé dont les recherches pourraient profiter aux producteurs d'aliments biologiques. Nous parrainons des conférences, des ateliers et d'autres événements et nous travaillons avec d'autres organismes pour soutenir l'expansion de l'agriculture biologique au Canada. C'est la raison pour laquelle nous avons participé à l'élaboration du projet de règlement sur la production d'aliments biologiques. Nous ne sommes pas un organisme d'accréditation de la production biologique.
Avant d'exposer les raisons pour lesquelles nous appuyons ce projet de règlement, je pense qu'il serait utile d'en situer le contexte. Comme vous le savez sans doute, l'agriculture biologique est un système de production alimentaire qui favorise et accroît la biodiversité, les cycles biologiques et l'activité biologique du sol. Elle vise à permettre aux agriculteurs de produire de façon durable en utilisant des méthodes saines sur le plan environnemental, notamment en faisant des rotations de cultures complètes, en recyclant les déchets végétaux et animaux, en favorisant un rapport équilibré entre les plantes hôtes et les parasites et en réduisant au maximum le recours à des intrants externes. Un système de production biologique n'utilise jamais d'engrais ni de pesticides synthétiques.
Au cours des années 1970, plusieurs organismes favorables à ces méthodes, dont COG, ont été créés. Les années 1980 ont vu le nombre de producteurs d'aliments biologiques augmenter avec la demande pour ce type de produits. De plus en plus de consommateurs qui ne pouvaient acheter directement des agriculteurs se sont mis à demander qu'on leur prouve que les aliments dits biologiques qu'on leur vendait étaient vraiment produits au moyen de méthodes biologiques, et plusieurs organismes de certification ont été créés dans l'ensemble du pays pour leur donner cette garantie. Beaucoup étaient constitués d'agriculteurs qui faisaient inspecter leurs fermes chaque année par des inspecteurs indépendants pour être certains que leurs méthodes de production étaient conformes aux normes établies par l'organisme.
La multiplication des organismes de certification a bientôt créé de la confusion chez les consommateurs. En avril 1998, COG a organisé une conférence sous le thème «An Organic Food System for Canada». Les participants ont notamment recommandé, d'une part, de concevoir un logo unique commun à toute l'industrie permettant aux consommateurs de reconnaître immédiatement les produits biologiques vendus dans le commerce et, d'autre part, de demander aux groupes de producteurs, de grossistes, aux détaillants et aux gouvernements de le créer collectivement, en coopération.
En novembre 1988, divers groupes du pays s'étaient déjà réunis et avaient élaboré une définition de la production biologique qui a été incorporée aux lignes directrices de Consommation et Corporations Canada sur l'étiquetage des aliments et est devenue la description de base de ce type de culture que l'on retrouve dans les lignes directrices internationales Codex.
En 1989 et 1990, le comité spécial du Conseil de recherches agricoles du Canada chargé d'étudier l'agriculture biologique a organisé divers ateliers aux termes desquels il a été recommandé d'élaborer un cadre réglementaire pour régir les organismes de certification des produits et les agences d'accréditation de ces organismes. En 1990, le Projet canadien d'unification de la production biologique a commencé ses travaux en vue d'élaborer une norme nationale de production biologique et un système d'accréditation des organismes de certification. Dans le cadre de ce processus, qui exigeait des consultations poussées, tous les intervenants de l'industrie de la production d'aliments biologiques ont été invités à faire connaître leurs opinions. Axé sur le consensus, ce Projet a continuellement modifié les propositions, qui ont finalement été soumises à Agriculture Canada en décembre 1992.
Le Conseil consultatif canadien de la production biologique a été créé en mars 1993 à titre d'organisme national d'accréditation du Canada. Depuis, les progrès ont été lents.
Le Conseil a en effet dû examiner les commentaires des gouvernements et de l'industrie et tenter de résoudre les problèmes qui ont surgi au cours de l'élaboration de la réglementation. Ses communications avec les producteurs biologiques et les divers organismes du secteur se sont avérées difficiles surtout pendant la campagne agricole et parce que chaque fois que ces organismes changeaient de représentants, les points de vue changeaient aussi.
Jusqu'à maintenant, l'élaboration de la réglementation s'est faite en grande partie grâce au temps et à l'énergie de bénévoles, et plus le temps passait, plus il devenait difficile de financer l'entreprise. Le Canada est maintenant en retard sur d'autres pays dans l'établissement de sa réglementation.
Pendant ce temps, la Fédération internationale des mouvements d'agriculture biologique, la FIMAB, a créé un programme d'accréditation des organismes de certification que les gouvernements nationaux reconnaîtront, espère-t-elle, pour faciliter l'importation. Plutôt que d'attendre qu'on ait enfin établi un régime national d'accréditation, certains grands organismes de certification ont demandé l'accréditation de la FIMAB afin de protéger l'accès de leurs clients aux marchés internationaux. Par contre, les petits organismes trouvent le coût de l'accréditation de la FIMAB prohibitif et espèrent donc qu'un système national sera établi qui leur évitera de devoir recourir au programme de la Fédération.
Nous avons désormais un projet de règlement qui définit le terme «biologique» aux fins du commerce interprovincial et international. Si le règlement est adopté, tout produit portant la mention «biologique», qui sera exporté de la province où il aura été cultivé devra satisfaire aux exigences du règlement. Pour porter la mention «Canada biologique», il devra provenir d'un établissement certifié par un organisme de certification accrédité. Les produits biologiques importés devront avoir été cultivés dans le cadre d'un système équivalent.
Le règlement a fait l'objet d'une certaine opposition pour diverses raisons, souvent semble-t-il parce qu'il a été mal compris. Les opinions ont rapidement changé une fois que les explications voulues ont été données et assimilées. Certains membres du mouvement de l'agriculture biologique, qui redoutaient l'intervention du gouvernement, s'opposent au règlement parce qu'ils ne veulent pas que le terme «biologique» fasse l'objet d'une réglementation et parce qu'ils tiennent à contrôler l'importation au Canada de produits étrangers qui ne respectent pas les normes de notre industrie.
Les petits producteurs, qui desservent les marchés locaux, craignent que les règlements ne fassent grimper leurs coûts. Les producteurs de la Colombie-Britannique jugeaient nécessaire de réglementer la culture biologique et se sont donnés leur propre loi en la matière. Maintenant, ils craignent qu'un autre niveau de contrôle ne fasse augmenter leurs coûts.
OCIA International est un organisme de certification international qui s'oppose aux règlements. Il espère que l'on s'en tiendra à l'accréditation de la FIMAB afin d'avoir accès à tous les marchés étrangers. Ici encore, la motivation première est la crainte de coûts supplémentaires. Cependant, au cours de l'élaboration de la réglementation canadienne, les représentants des sections canadiennes de l'OCIA, à l'exception de celles du Québec, ont souscrit à l'idée d'une réglementation nationale.
Malgré ce qui précède, COG croit que le principe d'une réglementation nationale a beaucoup d'appui et que si on réglait les problèmes des coûts supplémentaires, très peu de producteurs s'y opposeraient. En fait, le règlement proposé par le gouvernement prévoit un régime auquel les petits producteurs desservant les marchés locaux ne seraient pas tenus d'adhérer. Ce n'est donc pas vraiment un problème. De plus, le CCCPB n'a cessé de chercher des moyens de garder les coûts le plus bas possible; il a notamment recommandé de tenir compte, dans la prise de nos décisions, des rapports d'autres agences d'accréditation ayant des critères équivalents, de manière à ce que nous n'ayons pas à toujours répéter la même chose.
Canadian Organic Growers privilégie depuis toujours l'élaboration d'une réglementation canadienne et appuie le projet de règlement pour les raisons suivantes:
Nous voulons que l'on protège le terme «biologique» afin qu'il ne soit pas utilisé à tort et à travers et vidé de son sens véritable, comme le terme «naturel».
Nous voulons que le règlement fasse obstacle à la fraude en rassurant les consommateurs et en les protégeant d'éventuelles affirmations fausses et invérifiables au sujet des produits agricoles.
Nous voulons que l'on crée une marque de commerce facilement reconnaissable, comme la mention «Canada Biologique», pour encourager les consommateurs à acheter des produits biologiques canadiens et les sensibiliser aux avantages qu'il y aurait à appuyer des méthodes de production agricole soucieuses de l'environnement.
Nous voulons que le règlement confère une solide réputation aux produits agricoles canadiens et aide nos producteurs à pénétrer le marché mondial de l'alimentation biologique, qui connaît une croissance rapide. Beaucoup de nos membres appuient l'idée de systèmes régionaux de production alimentaire, et certains refusent que l'on soutienne quelque facette que ce soit de l'agriculture d'exportation. Cependant, la plupart d'entre nous croyons qu'il serait avantageux, tant pour l'environnement que pour la société, qu'un plus grand nombre de producteurs pratiquent l'agriculture biologique et que si certains producteurs biologiques doivent vendre leurs produits sur les marchés d'exportation pour que leurs exploitations demeurent rentables, il faudrait les y aider.
À l'heure actuelle, certains produits agricoles canadiens certifiés biologiques ne sont pas acceptés dans certains pays européens; les courtiers disent avoir du mal à exporter nos produits vers la Suède et la Hollande. Mais à l'heure actuelle, l'industrie connaît une croissance importance. Cette année, environ 450 producteurs de l'Ontario et des États-Unis ont assisté à la conférence annuelle de l'agriculture biologique, qui a eu lieu à l'Université de Guelph. Aux États-Unis, le secteur de la production d'aliments biologiques croît plus rapidement que tous les autres secteurs de l'industrie de l'alimentation. L'alimentation biologique n'est plus considérée comme un créneau mais comme un secteur de marché. En 1994, les ventes au détail de produits biologiques y ont atteint 2,3 milliards de dollars, et les ventes à la ferme, un milliard de dollars. Nous n'avons pas encore les chiffres pour 1995.
Au Canada, ce secteur du marché connaît aussi un certain essor, mais il croît beaucoup moins vite qu'aux États-Unis, notamment parce qu'il n'est pas réglementé; aussi faut-il importer une quantité considérable de produits biologiques pour répondre à la demande. On estime que chez nous, le chiffre des ventes à la ferme fluctue entre 50 et 80 millions de dollars.
Nous croyons que la réglementation de la production d'aliments biologiques favorisera la croissance de l'agriculture biologique au Canada et l'amélioration des méthodes. Nous aurions préféré que notre réglementation incorpore les normes par référence. Les normes en la matière ne sont pas statiques; elles évoluent avec la technologie et notre compréhension du domaine. Les modifier dans la réglementation à intervalles réguliers pourrait causer des problèmes.
Nous sommes aux prises depuis un certain temps déjà avec les difficultés d'ordre juridique que la question soulève et bien qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada ait énormément coopéré avec nous, il n'a pas fait preuve de toute la souplesse que nous aurions souhaitée, même si nous avions obtenu du gouvernement un appui sans précédent en faveur de l'autoréglementation de l'industrie et que l'occasion était belle de faire les choses de façon inédite. Nous estimons maintenant qu'il ne faut plus atermoyer et que le moment est venu de promulguer la réglementation. Nous voulons pouvoir apposer la mention «Canada Biologique» sur nos produits le plus tôt possible, voire même préférablement avant la fin de 1996.
Nous vous remercions de cette occasion de vous exposer notre point de vue.
Le président: Je vous remercie beaucoup, Anne.
Nous céderons maintenant la parole aux députés. M. Hermanson.
M. Hermanson: Merci, madame Macey, d'avoir comparu devant notre comité. J'ai trouvé votre présentation des plus utiles.
L'une des difficultés que j'éprouve et je soupçonne que c'est le cas pour de nombreux membres du comité, c'est de tâcher de déterminer qui est le véritable porte-parole des producteurs d'aliments organiques en raison du grand nombre d'organisations ayant des organismes de certification - le CCCPB, votre organisation et d'autres organisations.
Vous dites que votre organisation compte environ 1 600 membres et appuie le projet de règlement qui se trouve devant nous. Pouvez-vous m'indiquer la façon dont votre organisation a examiné ce règlement et comment elle en est arrivée à l'appuyer? Quel mécanisme avez-vous utilisé et quelle a été l'étendue de la consultation auprès de vos membres? Comment avez-vous déterminé qui était pour ou contre le règlement?
Mme Macey: Nous en avons discuté au niveau exécutif et lors d'ateliers. Nous ne l'avons pas examiné ligne par ligne; c'est surtout la notion que nous avions appuyée dès le début de nos discussions avec les membres, dans notre bulletin. Des lettres ont été échangées et ce genre de choses. Comme je l'ai souligné, certains de nos membres refusent effectivement d'appuyer tout ce qui concerne l'agriculture d'exportation et se seraient opposés à toute réglementation s'ils pensaient que c'était la seule raison d'être du règlement. Ils n'en continuent pas moins d'être partisans d'une réglementation pour protéger le consommateur.
Il y a également le problème de savoir qui représente qui. Un grand nombre de membres des différents groupes de certification font également partie de notre organisation.
M. Hermanson: C'est ce que je pensais. Par exemple, faites-vous partie du CCCPB ou avez-vous aidé à élire votre représentant au CCCPB et faites-vous partie également de l'OVONA ou de l'OCIA?
M. Macey: Au début de ce processus, j'ai été parmi les agriculteurs choisis par l'ensemble des fermes biologiques en Ontario pour faire partie du Projet canadien d'unification de la production biologique, à titre de représentante de l'Ontario. Tout le monde s'est réuni à ce stade, indépendamment de l'organisation à laquelle chacun appartenait. Je n'étais pas là en tant que représentante de COG, mais simplement à titre individuel. J'ai poursuivi mon travail au sein de divers comités lorsque j'ai été choisie pour faire partie d'un comité particulier dans le cadre de ce projet.
M. Hermanson: Par conséquent, vous parlez vraiment au nom de l'exécutif de votre organisation mais vous n'êtes pas sûre de représenter la position de l'ensemble de vos membres...
Mme Macey: Je ne représente pas la position de l'ensemble des membres.
M. Hermanson: D'accord.
Vous parlez de la mention «biologique». Votre organisation veut-elle laisser entendre qu'il ne faudrait pas qu'un produit porte la mention «biologique» à moins que la production tombe sous le coup du projet de règlement ou s'agit-il uniquement de la mention «Canada Biologique» qui pourrait être utilisée en vertu de ce règlement?
Mme Macey: Nous aimerions que toute utilisation de la mention «biologique» par les détaillants relève du règlement. Il devrait s'agir d'un produit certifié qui devrait par conséquent être visé par le règlement. Pour l'instant, nous indiquons simplement que nous appuierons le règlement, qui est uniquement applicable à un produit qui circule d'un bout à l'autre de la province. Notre organisation n'a pas décidé si elle allait faire pression pour que chaque province ait un règlement semblable qui s'y applique. Idéalement, nous aimerions que tous les produits vendus au détail soient certifiés.
M. Hermanson: Vous avez mentionné que si le facteur coût était éliminé - je ne suis pas trop sûr de ce que vous voulez dire par facteur coût mais j'en ai une bonne idée - ce règlement recevrait un vaste appui. Il faudrait donc qu'Agriculture Canada fonctionne selon une formule de recouvrement de fonds. En d'autres mots, tous les coûts seraient transmis aux producteurs et je soupçonne que les producteurs d'aliments biologiques devraient également payer pour la mise en oeuvre...
Mme Macey: Effectivement.
M. Hermanson: ...de ce règlement. Quelle est votre opinion à ce sujet?
Mme Macey: Cela a été un sujet de préoccupation car la certification des producteurs d'aliments biologiques a toujours représenté un coût supplémentaire. Ils sont obligés de payer 300 $ de plus par année pour subir ce processus. Ils craignaient que le coût de l'accréditation vienne s'y ajouter et représente une somme supplémentaire importante.
Pour le moment, diverses propositions ont été présentées concernant le coût de l'ensemble de ce processus. Je pense que le coût le plus faible, si la valeur des ventes est de 10 000 $, serait de 35 $. Nous avons réussi à maintenir ce coût à un niveau raisonnable. C'était l'une des préoccupations. Les producteurs estiment qu'ils paient déjà suffisamment comme ça et que cela représente une dépense supplémentaire.
M. Hermanson: Une autre critique qui a été exprimée, c'est que certaines des normes ne sont pas suffisamment élevées. Certains producteurs d'aliments biologiques m'ont dit que si ce règlement est adopté, leur marché disparaîtra parce que les normes ne sont pas assez sévères. Ces producteurs ont déjà adopté des normes beaucoup plus sévères et ils ne seront pas reconnus comme il se doit. Ils devront abaisser leurs normes au lieu de voir leur marché se consolider.
Mme Macey: Je ne crois qu'ils ont eu à abaisser leurs normes tant que cela. Il existe un ou deux groupes qui ont des normes particulièrement sévères. Nos normes sont qualifiées de normes minimales mais elles sont en fait assez sévères même si, à un ou deux égards, elles sont peut-être moins sévères que celles d'autres groupes. Elles ne sont certainement pas inférieures aux normes internationales. En fait, c'est l'un des problèmes. Nous subissons des pressions jusqu'à un certain point pour que nous abaissions nos normes et certains craignent que ces pressions s'intensifient et nous obligent à abaisser nos normes pour qu'elles correspondent à certaines normes internationales. Nous nous y sommes opposés.
Je ne crois pas que la situation sera différente qu'elle l'est à l'heure actuelle pour quelque groupe que ce soit. Ils peuvent commercialiser leurs produits en utilisant leurs propres marques de commerce et le fait qu'ils respectent les normes canadiennes en plus d'avoir leurs propres marques de commerce... Si ce sont les normes que réclament leurs clients, libres à eux de le faire.
M. Hermanson: Voici ma dernière question, monsieur le président.
Vous avez indiqué que vous auriez préféré que la réglementation incorpore les normes par référence. Pourriez-vous nous donner plus de précisions là-dessus? C'est la première fois que j'entends cette expression en ce qui concerne ce projet de règlement. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par là et comment cela fonctionnerait?
Mme Macey: Comme je ne suis pas avocate, je ne peux pas vraiment l'expliquer correctement mais certains d'entre nous avaient pensé au départ qu'il y aurait un règlement gouvernemental qui indiquerait que la loi, au lieu d'énumérer tout ce qui est interdit et permis, obligerait les exploitants à respecter les normes établies par l'industrie ou l'auteur de la référence en question.
M. Hermanson: Est-ce que cela permettrait une plus grande souplesse?
Mme Macey: Cela permettrait une plus grande souplesse pour modifier les normes, si nécessaire. Lorsque les normes renferment une liste des produits autorisés, j'ignore dans quelle mesure il est facile de recourir au processus pour modifier certaines choses qui pourraient devenir périmées sous peu.
Certaines réserves ont été exprimées à cet égard. On nous a alors indiqué qu'étant donné que nous avions créé ce document de normes canadiennes expressément en prévision du règlement, il était impossible de les incorporer par référence. Seules les normes déjà en vigueur pouvaient être incorporées par référence même si le document que notre industrie avait créé s'inspirait de diverses normes déjà en existence que nous avions réunies et légèrement remaniées. Ce n'était pas comme si nous avions créé des normes entièrement nouvelles. Quoi qu'il en soit, sur le plan juridique, cela n'était pas jugé acceptable.
M. Hermanson: Vous êtes donc convaincue qu'il est impossible de les incorporer par référence?
Mme Macey: Je pense que ce serait possible mais les avocats sont d'un autre avis.
M. Hermanson: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Reed.
M. Reed: Madame Macey, je tiens à m'excuser d'avoir été en pleine conversation avec un collègue lorsque vous avez commencé votre exposé. J'avais porté mon attention ailleurs et je tiens à m'en excuser.
Tout d'abord, je tiens à dire que j'admire le fait que vous vouliez conserver des normes supérieures à celles de vos concurrents possibles d'autres pays. Il existe une clause dans l'accord du GATT qui appuie nettement ce genre d'initiative. En d'autres mots, tout le monde doit adhérer aux normes les plus élevées.
Je ne sais pas si vous aimeriez commenter cet aspect mais en lisant le règlement, je suis stupéfait de constater toutes les formalités requises pour s'y conformer. Je me demande si cela n'obligera pas les producteurs biologiques à travailler plus souvent à leur ordinateur que sur le terrain, à faire ce qui les intéresse. Je sais que c'est une chose que vous acceptez volontiers mais...
Mme Macey: C'est ce que font déjà la plupart des producteurs. Je veux dire que nos producteurs actuels sont certifiés. Il y a 1 500 producteurs au Canada dont les produits sont certifiés en tant que produits biologiques et ils respectent déjà ces normes et ont leur plan agricole; ils y sont obligés pour être certifiés. Cela ne représentera donc pas un surcroît de travail parce que les normes canadiennes prévues par le règlement sont en fait très semblables aux normes utilisées par différents groupes.
Il peut y avoir un ou deux groupes qui n'ont pas besoin de tenir des dossiers à un niveau aussi poussé que celui prévu par ces normes mais ils sont rares. Cela semble essentiel car comment prouver qu'un aliment est biologique à moins de tenir des dossiers?
Les gens utilisent donc les méthodes voulues. Là où se posent les problèmes, c'est au niveau de la tenue de dossiers. Il leur est toutefois impossible de présenter des preuves s'ils ne tiennent pas ce genre de dossiers. C'est pourquoi j'estime qu'ils n'ont pas vraiment le choix. Je ne crois pas que cela entraînera un surcroît de travail pour les producteurs mêmes. Ce seront plutôt les organismes de certification qui seront touchés car ils doivent s'assurer de pouvoir satisfaire aux critères d'accréditation et prouver qu'ils possèdent l'efficacité voulue pour certifier les exploitations agricoles.
M. Reed: Comme je ne suis pas doué pour la tenue de dossiers, cela suffit à me convaincre que je ne pourrai jamais être un producteur biologique.
J'aimerais vous poser une question concernant la mise en marché parallèle de produits biologiques et d'autres produits. Cela se fait manifestement dans certaines régions. Quelle est la réaction?
Mme Macey: Je crois que cela dépend de la nature du produit et de son coût. Les consommateurs choisissent un produit biologique s'il n'est pas tellement plus cher qu'un produit régulier. S'il l'est, ils ont tendance à acheter le produit régulier.
M. Reed: Avez-vous suffisamment d'expérience pour faire des commentaires sur le genre de prix que les consommateurs sont prêts à payer?
Mme Macey: Selon divers rapports, ce serait 25 p. 100 de plus mais c'est un secteur très difficile. Je connais beaucoup de producteurs pour qui cela pose problème car dans certains cas nous ne vendons pas notre produit à un prix plus élevé que les producteurs conventionnels mais une fois en magasin, le produit subit une majoration de prix assez importante parce qu'au niveau du commerce de détail, on pense pouvoir demander plus.
Nous espérons que cela ne deviendra pas un marché élitiste - que le prix de ces produits, si les gens veulent appuyer cette méthode de production agricole, sera abordable afin qu'ils puissent les acheter et manifester ainsi leur soutien.
M. Reed: Je vous remercie, monsieur le président.
[Français]
M. Landry: J'ai quelques questions à vous poser.
Tout d'abord, est-ce que le gouvernement vous apporte une aide financière?
Deuxièmement, pourquoi avez-vous de la difficulté? On parle aujourd'hui de mondialisation des marchés, de compétitivité et on dit que les produits biologiques sont toujours plus chers et que les gens sont moins portés à en acheter.
Troisièmement, une agence sera chargée d'établir les règles de délivrance, de suspension et d'annulation des certificats d'accréditation. Un comité d'évaluation des demandes d'accréditation présentera à l'agence des rapports et des recommandations.
Quelles mesures disciplinaires l'agence pourrait-elle prendre à l'égard des organismes qui utiliseront des pratiques inadmissibles? Les organismes d'accréditation auront-ils leur mot à dire au sujet des règlements de l'agence et de l'établissement des tarifs?
[Traduction]
Mme Macey: Dans la première question, lorsque vous parlez d'aide financière, parlez-vous du Canadian Organic Growers ou de l'industrie? Je ne suis pas sûre à qui la question s'adresse, au juste.
[Français]
M. Landry: Je parle de l'ensemble du secteur.
[Traduction]
Mme Macey: Le secteur a reçu des subventions gouvernementales. Il s'agissait principalement de subventions de contrepartie versées dans le cadre du Projet de développement agro-alimentaire canadien et de divers autres programmes en vue de faciliter l'élaboration du règlement. Nous ne recevons pas d'aide financière de quelque gouvernement que ce soit, du moins pas que je sache. Le gouvernement aide peut-être l'industrie biologique de la Colombie-Britannique et du Québec, mais, dans l'ensemble, le coût du processus de certification et de tout le reste est assumé par les producteurs.
Le président: J'aurais besoin d'un éclaircissement: quand vous parlez de la Colombie-Britannique et du Québec, parlez-vous d'une aide fournie par le gouvernement de la province?
Mme Macey: Oui.
Le président: Je vous remercie.
Mme Macey: Vous avez parlé de l'agence, du Conseil consultatif canadien de la production biologique, et vous avez demandé quelle était la participation des différents organismes de certification à ce processus ou au sein de l'agence. Les administrateurs de l'agence comprennent des représentants de tous les secteurs de l'industrie. Ils comprennent aussi des porte-parole de l'industrie de l'agriculture classique et des gouvernements.
Voici comment cela marche: tous les membres de l'industrie peuvent faire une contribution et, s'ils le désirent, présenter des recommandations concernant l'élaboration des normes et leur application. Le Conseil est composé de membres. Tous les organismes de certification en sont membres et y ont voix par l'intermédiaire des administrateurs, qui sont leurs délégués. Ils peuvent donc participer à l'élaboration des pratiques, aux modifications apportées et aux coûts que cela engage.
Cela répond-il à votre question? Je ne suis pas certaine d'avoir retenu tous les points soulevés.
[Français]
M. Landry: Monsieur le président, elle n'a pas répondu à ma deuxième question sur la mondialisation des marchés et la compétitivité. Je parlais des légumes biologiques qui sont beaucoup plus chers et que le public n'achète pas. Pourquoi ces produits sont-ils toujours beaucoup plus chers et pourquoi y a-t-il seulement quelques personnes qui peuvent se les procurer?
[Traduction]
Mme Macey: Les producteurs estiment que le prix qu'ils vendent leurs produits témoigne du prix réel de l'aliment par opposition à un prix subventionné.
Un des problèmes de la production biologique réside dans l'échelle de production. Nous n'avons pas accès aux économies d'échelle que vous pouvez réaliser en agriculture classique, sur le plan de la distribution et ainsi de suite. Quand il faut transporter des produits jusqu'aux points de vente, le transport de faibles quantités coûte plus cher que celui de gros volumes. Le prix de détail des produits biologiques tend à refléter le prix de revient réel.
De plus, la demande est très élevée. Le Japon achète beaucoup de soja biologique actuellement. Le produit se vend à prix d'or parce que c'est ce que veut le client et que l'offre est encore faible. À mesure qu'augmentera le nombre de productions de soja, son prix diminuera probablement, dans une certaine mesure.
La demande est forte, et l'offre est encore insuffisante pour y répondre. Les prix demeurent donc élevés.
Le président: Madame Macey, dans la foulée des commentaires faits par M. Landry, j'ai une question à vous poser avant de céder la parole à MM. Calder et Pickard.
Je sais qu'il n'existe pas de recette empirique en ce qui concerne le coût de production et l'agriculture. Par contre, comme vous l'avez dit vous-même, à juste titre, la production biologique représente un secteur de production alimentaire. Étant donné l'ampleur et l'échelle de tout ce que vous avez mentionné au cours des dernières minutes, où se situe, par unité de production, le prix de revient de ce secteur par opposition à l'autre, qui utilise d'autres produits comme herbicides ou insecticides? Est-il plus élevé ou plus bas?
Mme Macey: Tout dépend de la marchandise, du produit particulier dont vous parlez. On a constaté, dans l'industrie laitière, que les coûts étaient beaucoup moindres, parce que les intrants ne coûtent pas cher, que les frais de vétérinaires sont inférieurs, et ainsi de suite.
La culture de légumes coûte probablement plus cher parce qu'elle mise davantage sur la main-d'oeuvre que sur les machines ou les herbicides. Tout dépend du produit examiné.
Parfois, selon la région, le rendement a baissé, de sorte qu'il y a eu moins de produits à vendre. Cependant, cette tendance n'est que temporaire, jusqu'à ce que les systèmes aient été rodés.
On a mené des études quelque part dans les États du Nord, au Dakota peut-être. J'ignore où au juste et je n'ai pas les résultats de ces études avec moi. Cependant, on s'est penché sur la production biologique par opposition à la production classique. On a constaté, en fait, que, du point de vue de l'économie et de la science agricole, la production biologique était plus rentable. Cependant, j'estime que nous ne disposons pas de suffisamment de données pour vraiment nous prononcer à ce sujet.
Le président: Je vous remercie.
M. Calder, M. Pickard, Mme Ur et M. Bernier ont demandé à poser des questions. Par souci d'équité à l'égard des autres témoins, nous allouerons un maximum de huit à dix minutes à ces personnes pour poser leurs questions. Elles peuvent peut-être en garder en réserve pour plus tard. Je ne peux pas empêcher qui que ce soit de poser des questions, mais il faut être juste à l'égard de tous nos témoins.
Monsieur Calder, vous avez la parole.
M. Calder: Je serai aussi concis qu'à l'habitude, monsieur le président.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Je vous remercie, monsieur Calder. Passons au suivant.
Des voix: Oh, oh!
M. Calder: J'ai tout de même quelque chose à dire.
Le président: Allez-y.
M. Calder: Anne, je vous souhaite la bienvenue. D'après ce que je vois, le Canadian Organic Growers devance peut-être tous les autres. Vous représentez un organisme de charité enregistré constitué en vertu d'une loi fédérale, d'après ce que je lis. Lorsque j'élevais des cochons, au début des années 1980, j'aurais dû, moi aussi, m'inscrire comme organisme de charité.
Le président a parlé du prix de revient. De toute évidence, votre produit se vend un peu plus cher parce que vous n'obtenez pas le même rendement par acre de terrain cultivé que les producteurs commerciaux.
Mme Macey: Je n'ai pas dit cela.
M. Calder: Vous n'avez pas dit cela. Obtenez-vous un aussi bon rendement que le producteur commercial?
Mme Macey: Parfois, effectivement. Tout dépend du fermier, du groupe de fermiers que vous comparez à quel autre groupe et de leur expérience dans ce genre d'entreprise. Essentiellement, le rendement est fonction de la qualité de la gestion.
M. Calder: Je vois. En d'autres mots, les fermiers ne se ressemblent pas. Parfait.
Le prix de revient fera l'objet de beaucoup de débats. D'après la conférence Vision 2020, qui a eu lieu à Washington, l'an dernier, au sujet de la production alimentaire, la population mondiale croît chaque année alors que les superficies exploitées pour la production alimentaire diminuent. Par conséquent, quelle que soit la production agricole examinée, elle devra être très efficace et très compétitive sur le marché mondial pour assurer sa survie.
Quel avenir prévoyez-vous pour la production agricole biologique? Peut-elle être aussi compétitive que la production commerciale? Il ne faut pas oublier, non plus, qu'au tout début, nous faisions appel à beaucoup de produits chimiques. C'était le cas dans ma propre industrie, celle de la volaille. Nous utilisions beaucoup de médicaments auparavant, mais cela a changé. Nous cherchons aussi à accroître artificiellement la quantité d'anticorps présente dans la volaille de manière à prévenir la maladie. On vaccine tout simplement la volaille. La production commerciale change également. Cela m'amène à un autre sujet.
M. Pickard: Je croyais que vous deviez être bref.
M. Calder: J'ai deux questions seulement à poser, mais elles sont précédées d'un long préambule. Que puis-je dire? Soyons concis.
M. Hermanson: Ne croyez jamais aux promesses libérales.
M. Calder: Voyons, Elwin, soyez gentil.
Notre comité a étudié la question de la BST. Il s'agit d'une protéine, artificielle peut-être, mais d'une protéine tout de même dont on a dit qu'elle était impossible à dépister. Comment peut-on affirmer que le lait est biologique quand on ne peut même pas prouver que la vache n'a pas été traitée à la BST, substance indétectable?
Mme Macey: Si le lait est biologique, il ne peut pas venir d'une vache à laquelle on a injecté de la BST. C'est aussi simple que cela. Les normes de production biologique interdisent l'utilisation de produits de biotechnologie agricole, particulièrement de la BST.
M. Calder: Comment pouvons-nous le savoir?
Mme Macey: Que voulez-vous dire? Comment pouvons-nous savoir ce que disent les normes ou comment pouvons-nous savoir si de la BST a été injectée?
M. Calder: Comment pouvons-nous savoir que la vache a reçu de la BST?
Mme Macey: Comme pour tout autre règlement, il faut supposer qu'au moment de faire l'inspection et de procéder à l'accréditation... Dans le secteur de la production biologique, des inspecteurs se rendent au moins périodiquement à la ferme pour vérifier sur place, plutôt que de simplement inspecter la viande ou le produit à l'abattoir. Il est alors plus facile de veiller au respect des règlements.
Pour ce qui est de nourrir la population mondiale, cette question revient toujours sur le tapis. La réponse dépend de ses convictions politiques. Personnellement, je ne crois pas que la solution soit simplement d'être plus compétitifs sur les marchés mondiaux et de produire constamment plus d'aliments. La conjoncture mondiale est principalement attribuable à des problèmes de distribution, à la situation politique qui sévit dans les différents pays, aux guerres et à tout le reste. Simplement produire davantage ne nous permettra de nourrir tout le monde partout.
Dans bien des pays, le problème est dû à l'adoption de modèles occidentaux d'agriculture classique. Ces pays ne sont alors plus capables de nourrir leur propre population, voire d'en assurer la subsistance. Une grande partie de leurs terres sont affectées à des cultures d'exportation destinées aux marchés nord-américains, où le consommateur a déjà plus qu'il ne lui en faut.
Je ne crois pas que ce soient là les questions à se poser. Je me contenterais de voir tout le monde se concentrer sur la sécurité alimentaire au sein de leurs propres régions. Je crois qu'ils sont beaucoup plus susceptibles de le faire s'ils vendent de la production biologique que de la production classique, actuellement fondée sur le transport par camion des aliments partout dans le monde, avec les coûts élevés que cela engage et tout le reste. Cependant, il s'agit-là d'une opinion personnelle. Nous pourrions en débattre longtemps.
M. Calder: Vous êtes donc en train de nous dire qu'il vaut mieux répondre strictement à nos propres besoins, sans se préoccuper des autres.
Mme Macey: Non, ce n'est pas ce que je dis. Je suis peut-être en train de dire qu'il est présomptueux de notre part, nous les Nord-américains, de croire que ce que produisent nos fermes aura une influence sur ce qu'auront à manger les gens qui ont faim. Cependant, il s'agit-là...
Nous avons eu des excédents de production alimentaire en Amérique du Nord, tout comme en Europe. Toutefois, la situation est peut-être en train de changer radicalement et il n'y en aura plus forcément. Par contre, même en période de surabondance des récoltes, ceux qui ont faim dans le monde n'ont pas suffisamment à manger. Le problème est d'ordre politique. Ce n'est pas un problème de rentabilité ou d'autres questions du genre.
M. Calder: Je ne suis pas d'accord avec vous à ce sujet, mais, par souci de concision, je n'en discuterai pas.
Le président: Oui, j'ai pris note du temps que vous avez mis à être concis, monsieur Calder. Le jour où vous disposerez de tout le temps normalement prévu, il faudra peut-être vous limiter.
Monsieur Pickard, à vous la parole.
M. Pickard: Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je serai concis.
Le président: Vraiment? Sachez que vous êtes chronométré, vous aussi.
M. Pickard: Il est intéressant de constater que vous voudriez assortir la marque «Canada Biologique» de normes homologuées.
Tout d'abord, je tiens à vous remercier du travail que vous avez fait dans ce domaine. Vous vous êtes surpassée.
Ensuite, la raison pour laquelle vous auriez peut-être opté pour des marques provinciales me préoccupe. Je crains que celles-ci ne véhiculent pas le même message à la population. Je suis conscient de la compétence des provinces dans les questions internes. C'est fort bien. Par contre, ne serait-il pas préférable que l'industrie essaie d'uniformiser au moins les règles et les lignes directrices, lorsque c'est possible - en d'autres mots, qu'elle travaille à la réalisation de cet objectif? Vos commentaires m'ont donné l'impression que vous ne travailleriez peut-être pas vraiment de manière aussi dynamique à la réalisation de cet objectif. Je me demandais simplement sur quel raisonnement vous vous fondez.
Mme Macey: Je préférerais simplement laisser la population de chaque région décider de ce qui lui convient. Si nous mettons en place un système national, que nous avons une marque nationale, la plupart des grands producteurs qui font de la vente au détail feront partie des grands groupes de certification. Ils pourront faire figurer le label «Canada Biologique» sur leurs produits. C'est préférable à une multitude de marques particulières aux différentes provinces.
Je sais que les producteurs vendent beaucoup de leurs produits comme étant biologiques aux marchés publics. Cela ne me préoccupe pas autant, parce qu'il y a à ce moment un lien direct entre le consommateur et le producteur. Quand on se connaît, on peut décider si l'on veut acheter le produit ou pas. C'est quand on entre au magasin que les préoccupations surgissent.
Je ne prône donc pas que chaque producteur qui utilise le label biologique fasse forcément partie du système. Si vous vendez votre produit à la ferme à quelqu'un qui vous connaît, peu importe le label utilisé. Le consommateur achète votre produit parce qu'il vous connaît et qu'il sait quelles normes vous respectez. Par contre, si vous vendez votre produit à un inconnu, vous devez alors être capable de faire la démonstration de sa qualité. Pourquoi ne pas utiliser un système national de sorte que tous utilisent les mêmes termes?
M. Pickard: Je suis préoccupé. Vous ne voulez pas qu'il arrive la même chose au terme «biologique» qu'au terme «naturel». Si nous n'avons pas une norme minimale canadienne, ne courons-nous pas ce risque? En d'autres mots, l'expression «Ontario Biologique» aura un tout autre sens pour le consommateur que celle de «Canada Biologique». Tout cet exercice ne vise-t-il pas en réalité à protéger le terme «biologique»?
Mme Macey: Effectivement. C'est ce que j'essaie de dire. De toute évidence, je m'explique très mal.
Je ne tiens pas particulièrement à voir des mentions comme «Ontario Biologique» ou «Colombie-Britannique Biologique». Je préférerais «Canada Biologique». Ce que j'ai dit, c'est qu'il m'importe peu de savoir qu'on parle de produit biologique quand celui-ci se vend à une échelle très locale, quand le maraîcher vend directement au consommateur. Par contre, lorsque le produit pénètre le circuit de la vente au détail, en magasin, il faut un label. À ce moment, il serait préférable, d'après moi, qu'on utilise la marque «Canada Biologique» plutôt qu'une marque provinciale.
M. Pickard: Je vous remercie, Anne.
Le président: Madame Ur, je vous demanderais de faire vite afin de laisser à M. Bernier le temps de poser des questions.
Mme Ur (Lambton - Middlesex): J'ai quelques petites questions. Ayant moi-même déjà été maraîchère, j'ai trouvé votre exposé de ce matin plutôt intéressant. Nous faisions effectivement de l'agriculture classique, mais nous travaillions aussi avec des gens qui vendaient des produits biologiques. Ceux-ci n'ont pas survécu. Vous dites que l'alimentation biologique n'est plus considérée comme un créneau, mais comme un secteur du marché.
Mme Macey: Je parlais de la situation aux États-Unis, qui est différente de celle du Canada.
Mme Ur: Voilà qui me rassure, parce que j'étais sur le point de dire que je ne voyais pas ainsi la situation au Canada.
Étant moi-même du secteur, je sais que le coût est un facteur déterminant dans le choix du consommateur, tout comme l'apparence. C'est fort bien de dire que le produit est biologique. Cependant, au moment de l'achat, le consommateur choisira le produit ayant belle apparence plutôt que de s'arrêter au coût ou au fait que la production est biologique. Je l'ai moi-même constaté.
Dans le passé et actuellement aussi, on demande au cultivateur d'être plus rentable, d'accroître sa productivité, etc. Tout cela va à l'encontre, à mon avis, de ce que nous conseillons à nos cultivateurs classiques. On semble dire qu'il n'y a pas de mal à être moins productif.
On a vraiment fait la preuve - à moins que vous ne puissiez nous prouver le contraire, ce matin - que, lorsque la productivité augmente à la ferme biologique... Je n'ai pas vu cela souvent. La proportion de grandes fermes biologiques est-elle plus importante en Colombie-Britannique et au Québec, et comment expliquez-vous le phénomène?
Mme Macey: Je crois qu'il y a plus de fermes biologiques accréditées au Québec, mais qu'un grand nombre d'entre elles sont des acéricultures. Si on les soustrait du nombre, la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec comptent à peu près le même nombre de cultivateurs. En termes de pourcentage du nombre total d'exploitations agricoles de la province, le taux varie. Il y a moins d'exploitations agricoles en Colombie-Britannique qu'en Ontario, de sorte que leur pourcentage y est plus élevé.
Mme Ur: Prévoyez-vous, un jour, un mariage entre les modes de production biologique et classique? Ces deux formes de production seront-elles un jour compatibles?
Mme Macey: Je crois que ces deux formes de production se rapprochent constamment. L'agriculture classique est en train d'adopter des techniques de production biologique. On a réintroduit des techniques comme la rotation dans l'agriculture classique, techniques que les producteurs biologiques utilisent depuis longtemps. On essaie aussi de réduire l'utilisation de pesticides et d'autres produits. Les deux formes de production ont bien des techniques en commun. Elles se rapprochent donc.
Je n'ai pas répondu à votre première question. Je suis navrée, mais il faudra me la répéter.
Mme Ur: Je crois que vous y avez répondu.
Mme Macey: Bon, je croyais qu'il y avait autre chose.
Mme Ur: J'ai une dernière question à vous poser. Votre association est un organisme de charité enregistré et constitué en vertu d'une loi fédérale. Je suis certaine que d'autres groupements de producteurs spécialisés s'intéresseraient...
Mme Macey: Nous ne sommes pas un groupe de producteurs spécialisés.
Mme Ur: Je n'ai pas dit cela, mais n'empêche...
Mme Macey: Je me suis demandée si je ne devais pas inclure cela dans mon exposé, parce que la question revient toujours sur le tapis. Mais j'ai cru préférable d'être honnête.
Mme Ur: Dans ce cas, je suppose que, comme tous les autres Canadiens, je me demande comment vous êtes parvenus à vous faire reconnaître comme un organisme de charité.
Mme Macey: En tant qu'organisme d'éducation publique, nous avons fait de l'éducation, plutôt que de la promotion. C'est pourquoi nous avons été reconnus comme organisme d'éducation. Le genre de matériel que nous produisons n'est pas destiné uniquement aux producteurs biologiques; il s'adresse au grand public. Nous consacrons beaucoup de temps à simplement répondre à des demandes générales de renseignements venues du grand public. On nous appelle pour nous demander comment obtenir une belle pelouse sans utiliser de produits chimiques, ce genre de choses. Voilà comment nous avons fait.
Le président: M. Bernier.
[Français]
M. Bernier (Mégantic - Compton - Stanstead): Madame Macey, j'ai quelques brèves questions à vous poser.
Votre organisme national compte 1 600 membres. J'aimerais savoir combien vous avez de membres au Québec et quelles sont vos activités dans cette province. Vous mentionnez dans votre document des motifs d'opposition de certains groupes et vous faites allusion aux représentants de l'OCIA, notamment du Québec, qui s'opposent à la réglementation nationale.
Pourquoi ces représentants du Québec s'opposent-ils à la réglementation nationale? Est-il possible, d'après vous, d'avoir une réglementation provinciale et une réglementation fédérale en même temps?
[Traduction]
Mme Macey: Je ne suis pas sûre de l'exactitude de vos chiffres au sujet de notre organisme au Québec, mais nous comptons des membres dans cette province. Ce sont habituellement des anglophones parce que nos publications sont rédigées en anglais plutôt qu'en français, malheureusement. Pendant une courte période, nous avons effectivement eu une section locale dans l'Outaouais. Elle a depuis lors été dissoute. À la création de notre organisme, il semblait y avoir au Québec des organismes qui assumaient déjà certaines fonctions et qui semblaient le faire beaucoup mieux que nous ne le pourrions en français. Nous leur avons donc laissé le champ libre.
Pour ce qui est de l'OCIA, il y a dans la salle, aujourd'hui, des gens du Québec qui pourraient probablement répondre mieux que moi à cette question. Nous avons, du moins depuis quelque temps, l'impression que le Québec ne veut pas vraiment s'engager dans ce dossier. Il semble attendre le résultat du référendum, entre autres. Il ne semble pas vouloir s'intéresser à la scène nationale. Cependant, des porte-parole de groupes de l'OCIA en particulier m'ont dit que les Québécois étaient préoccupés par le coût supplémentaire.
Si la province préfère faire cavalier seul et avoir son propre système, je n'y suis pas opposée. C'est à elle de décider. J'aimerais que ce système cadre avec le système fédéral d'une manière ou d'une autre. Il faudrait éviter de tous nous lancer dans des directions différentes. Il doit y avoir un moyen de s'appuyer sur ce que d'autres ont fait pour tout faire cadrer. On peut espérer que, si une province adopte un système, ses normes seront plus ou moins les mêmes que les normes nationales.
Le président: Madame Macey, je vous remercie beaucoup. Ces échanges ont été productifs. Je vous sais gré de votre participation et de votre dévouement de longue date aux préoccupations de ce secteur de notre industrie agricole. Vous resterez peut-être pour entendre ce qu'ont à dire les autres. Encore une fois, je vous remercie énormément d'avoir pris la peine de venir nous rencontrer aujourd'hui.
Mme Macey: Je vous remercie de m'avoir invitée.
Le président: Nous entendons maintenant M. Robert Beauchemin, de la Table filière biologique. Vous n'avez pas soumis de mémoire, mais il nous tarde de connaître vos vues.
M. Robert Beauchemin (vice-président, Table filière biologique): Bonjour. Je croyais être en retard lorsque je suis arrivé ici, ce matin, à 9 h 05. J'ai dû faire le tour du bâtiment pendant environ 10 minutes avant de trouver une porte ouverte. Vous excuserez ce retard.
Le président: Vous avez probablement eu de la difficulté à garer votre voiture.
M. Beauchemin: J'ai marché pendant un bon bout de temps.
J'aimerais remercier le comité, monsieur le président, et les députés présents d'avoir pris la peine d'entendre différents milieux au sujet du règlement à l'étude.
Permettez-moi tout d'abord de me présenter. Je suppose qu'il faut que je me définisse. Je suis agriculteur et je fais de l'exploitation agricole avec ma famille depuis 22 ans dans l'Estrie, au Québec. Voilà 20 ans déjà que je fais de la production biologique.
En 1984, lorsque nous avons diversifié nos marchés, nous avons, de concert avec des homologues du Québec, de l'Ontario et de la Pennsylvanie, constaté le besoin de mettre sur pied un programme d'accréditation. Nous faisions partie du mouvement fondateur de l'OCIA, soit de l'Organic Crop Improvement Association, qui devint plus tard l'OCIA International.
Cet organisme, né au Québec et en Ontario, s'est considérablement élargi durant les années 1990 jusqu'à devenir le plus important organisme d'accréditation du monde. Il compte quelque 20 000 producteurs accrédités dans plus de 32 pays. On peut probablement dire qu'il s'agit-là d'un produit de l'expansionnisme canadien.
Ici, au Canada, l'OCIA, plus important organisme, est représenté par 21 des 42 organismes d'accréditation enregistrés. Il compte 21 sections locales réparties un peu partout au pays.
En 1993, j'ai été élu pour deux ans président de l'OCIA International. C'est en cette qualité qu'on m'a prié de faire partie de plusieurs conseils et de venir témoigner.
En 1994, le Département de l'agriculture des États-Unis m'a nommé représentant de l'accréditation au sein de son office national des normes de production biologique, groupe consultatif qui élabore les normes pour le département.
J'ai également été nommé, durant cette même année, membre du comité d'accréditation de la Fédération internationale des mouvements d'agriculture biologique, soit de la FIOCES. Celle-ci est un mouvement de la base formé de plus de 500 associations membres présentes dans 91 pays. Cet organisme international s'est creusé une niche dans l'élaboration des normes.
Toutefois, je suis ici ce matin en tant que représentant des intérêts du groupe consultatif Table filière du Québec. Je vous parlerai donc brièvement de l'industrie québécoise.
[Français]
Le secteur de la production biologique a été en évolution assez rapide depuis 1988 au Québec, où on ne comptait qu'environ 150 producteurs il y a quelques années. En 1995, il y avait 523 producteurs accrédités par des organismes.
Lors de son dernier enregistrement des agriculteurs au Québec, le ministère de l'Agriculture avait inscrit une question sur ses formulaires demandant: Êtes-vous un producteur s'adonnant aux pratiques de l'agriculture biologique? Êtes-vous certifiable ou êtes-vous certifié?
Ce qui est ressorti de ce formulaire d'enregistrement, c'est qu'en 1995, il y avait 2 214 producteurs agricoles certifiables, donc qui répondaient aux normes, mais qui n'avaient pas vu à se faire certifier étant donné l'étroitesse du marché. Le nombre de producteurs en transition, qui avaient commencé une démarche dans la production biologique, s'élevait à au-delà de 1 300. Avec les producteurs certifiés et certifiables et ceux qui sont en transition, on avait en 1995 un total d'environ 4 000 producteurs, soit au-delà de 10 p. 100 des producteurs agricoles du Québec.
En production de transformation, on compte plus de 39 transformateurs qui mettent en marché pour environ 20 millions de dollars de produits.
[Traduction]
Le secteur de la vente au détail est passé d'un chiffre d'affaires de 9,2 millions de dollars en 1988 à plus de 35 millions de dollars en 1993. De plus, le Québec compte en tout 470 installations et points de vente au détail de produits biologiques.
Il importe de mentionner, je crois, que les produits biologiques québécois vendus au Québec ne représentent que 16 p. 100 du total des ventes. Les produits de source canadienne en représentent 23 p. 100, ceux des États-Unis, 40 p. 100, et ceux des régions autres que l'Amérique du Nord, 21 p. 100. Toutefois, la plus grande partie de la production québécoise, qui atteint près de 85 p. 100, est actuellement exportée soit aux États-Unis, soit dans des pays membres de l'Union européenne. Nous sommes donc en état de dépendance, sur le plan des importations comme des exportations de cette industrie.
Pour ce qui est de l'emploi lié à la production biologique, le ministère de l'Agriculture du Québec a établi que cette industrie de production biologique, même en tant que créneau ou très petit groupe du secteur, fournit actuellement plus de 2 300 possibilités d'emploi au Québec.
En vue de se doter d'une structure, le milieu de la production biologique - et dans la foulée du sommet de l'agriculture de 1992 qui a eu lieu à Trois-Rivières... Durant le sommet de 1992, les différents secteurs de l'industrie ont été invités à se constituer en conseils consultatifs grâce à une déclaration commune faisant appel à la création de partenariats axés sur le marché.
En 1992, 10 groupes consultatifs ou tables filières ont été formés. Une table filière se définit comme un organisme consultatif permanent composé de tous les membres d'un secteur particulier qui ont un enjeu dans la production, la transformation, la distribution et la vente au détail, de même que de représentants des consommateurs et du gouvernement. En 1996, le Québec compte 22 tables filières. C'est en 1993 qu'est née la Table filière du Québec dont je suis le vice-président.
Comme je l'ai dit plus tôt, les groupes consultatifs du Québec doivent comprendre tous ceux qui ont des enjeux au sein d'une même industrie. Ils ne sont donc pas formés seulement de producteurs ou de transformateurs; pour que les pourparlers commencent, il faut que tous soient représentés à la table. La Table filière compte 40 membres. Elle a un conseil d'administration formé de 18 membres représentés par des organismes de certification comme l'OCIA et l'association de biodynamique Québec Vrai.
Les producteurs sont représentés par l'UPA et les transformateurs, par l'AMTAQ (Association des manufacturiers de produits alimentaires du Québec). Y sont aussi représentés le secteur de la distribution, les consommateurs et le ministère de l'Agriculture. Le volet Recherche et Développement est représenté par l'université Laval et par l'université McGill. Nous avons mis sur pied un groupe de travail remarquable pour contribuer au développement du milieu de production biologique.
Il existe aussi un comité exécutif, composé de trois personnes. Enfin, on compte des comités de travail chargés de l'enregistrement et de l'accréditation, de la création de marchés, de l'analyse économique et de l'information.
À ses débuts, la Table filière s'efforçait surtout de former une industrie et de dégager certains consensus. Comme nous avons pu le constater dans l'actuel processus de réglementation fédéral, on aura peut-être mal compris cette démarche à l'échelle nationale. Nous nous sommes donc, pendant deux ans et demi, livré des luttes intestines parce que nous sommes des producteurs biologiques. C'est comme une seconde nature pour nous. Nous aimons débattre de grandes idées et de grands principes.
Des voix: Oh, oh!
M. Beauchemin: En 1994, nous avons mis au point un plan stratégique que tous ont signé: si nous voulions développer le secteur, voici ce qu'il faudrait faire. Pour la première fois, nous demandions l'adoption d'une loi provinciale et nous avons passé l'année dernière à en discuter avec le ministère de l'Agriculture, parce que les autorités provinciales, tout comme les autorités fédérales, ne sont pas très chaudes à l'idée d'élaborer d'autres lois ou d'autres règlements. Il nous a fallu aplanir bien des difficultés pour nous faire comprendre et pour faire comprendre au gouvernement l'importance d'adopter une loi coercitive.
Le 19 janvier dernier, le ministre de l'Agriculture a annoncé l'adoption de mesures législatives qui sont actuellement en cours de rédaction. On s'attend que le projet de loi sera déposé à l'Assemblée nationale en septembre ou en octobre et qu'il sera adopté à l'automne. Il devrait entrer en vigueur au début de 1997. Lorsque la loi sera en vigueur, les tables filières se consacreront à développer des marchés et à faire de la recherche, du développement et de la promotion.
Il ne nous a pas été facile de nous arrêter à la réglementation fédérale projetée, parce que nous avions les yeux rivés à propre programme et que nous étions en train d'essayer de dégager notre propre consensus interne. Nous avons fait connaître notre opinion au CCCPB et au PCUPB. Nous avons aussi fait connaître nos commentaires à Agriculture Canada.
Dans une lettre de Mme Anne MacKenzie - que le comité a entendue, je crois, le 14 mars - , nous avons été invités par Agriculture Canada à transmettre nos observations au Conseil consultatif canadien de la production biologique. C'est en cette capacité que j'ai été nommé administrateur du Québec au sein du CCCPB.
Le projet de règlement actuel suscite chez nous bien des inquiétudes, pour de nombreuses raisons. Essentiellement, ce n'est pas que les Québécois en général, les fermiers ou l'industrie de cette province soient contre l'adoption d'un règlement ou d'une loi, car nous sommes justement en train d'adopter une loi provinciale à ce sujet. Le flou des objectifs à atteindre nous préoccupe, cependant. Dès 1989, nous avons constaté l'existence, ailleurs comme au Québec, d'un mouvement en vue d'élaborer une quelconque norme nationale pour faciliter le commerce et les exportations.
Le monde a subi de profondes transformations depuis la signature du GATT. L'Union européenne, qui a légiféré, comprend beaucoup mieux comment fonctionne le milieu de production biologique et comment protéger le consommateur en faisant respecter ses lois. En 1989, lorsque le milieu de la production biologique canadien demandait l'adoption d'un règlement, il le faisait par crainte de perdre des marchés d'exportation en Union européenne, étant donné que celle-ci exigeait, pour pouvoir exporter dans des pays membres, que l'exportateur figure sur une liste de pays tiers approuvés.
Depuis 1991, soit depuis la mise en oeuvre de la loi de l'Union européenne concernant la production biologique, plusieurs modifications ont permis d'offrir d'autres moyens d'assurer le respect de la loi que simplement de se faire inscrire sur une liste de pays tiers. Le dernier changement déposé entrera en vigueur le 1er juillet 1996. Il permettra que des organismes d'accréditation de pays tiers soient reconnus au même titre que des organismes nationaux s'ils peuvent prouver cette équivalence sans forcément passer par les programmes de réglementation d'autres gouvernements ou s'ils peuvent faire témoigner un expert à cet effet.
Nous sommes aussi préoccupés par le fait que, dans le cadre du GATT et de l'ALENA, les modalités de contrôle des importations au Canada sont interprétées en vertu de la clause de la nation la plus favorisée. Cela signifie que des produits importés au Canada sont assujettis aux lois nationales uniquement dans les conditions les plus favorables.
À titre d'exemple, si une province comme la Nouvelle-Écosse ou l'Ontario n'a pas de loi ou de règlement interne visant à protéger ses marchés, les conditions les plus favorables applicables à cet espace économique seront le vide juridique, même si le Canada a peut-être un règlement à ce sujet. Nous préférons donc réclamer, plutôt qu'un processus de réglementation qui lierait l'ensemble du Canada, l'adoption d'une norme nationale qui faciliterait l'harmonisation et laisserait aux provinces la liberté de se doter des règlements qui leur conviennent au sein de leur propre sphère de compétence.
Nous ne sommes pas contre les lois ou les règlements. Au Québec, une fois que la loi aura été mise en oeuvre, il nous faudra vérifier la conformité des produits en provenance d'autres provinces. Nous devrons aussi respecter les ententes commerciales internes. Il nous faudra faciliter l'harmonisation entre les provinces. En l'absence d'une réglementation ou d'une norme nationale, les institutions québécoises auront bien de la difficulté à assurer l'interprétation et la conformité à des normes de produits biologiques en provenance de la Saskatchewan, de la Colombie-Britannique ou des Maritimes.
Nous aimerions donc que l'on adopte une norme nationale. Nous espérons que les gouvernements provinciaux assumeront les responsabilités qui leur reviennent dans leurs domaines de compétence en vue de contrôler leurs marchés internes et qu'ils demanderont à Agriculture et Agro-alimentaire Canada d'élaborer une norme nationale qui, espère-t-on, renverra à des lignes directrices internationales. Il nous tarde de voir les lignes directrices du Codex Alimentarius définitivement adoptées, peut-être en mai; nous arriverons peut-être à franchir la septième étape, voire, au cours des prochains mois, la huitième. Si les lignes directrices du Codex Alimentarius relatives aux produits biologiques sont adoptées, nous conseillons vivement d'y effectuer un renvoi plutôt que d'élaborer une norme nationale qui n'a pas toujours l'appui des différents groupes.
Le Canada a fait figure de chef de file dans l'élaboration de mesures d'harmonisation internationales dans le cadre du Codex. C'est à l'invitation du Canada et de l'Australie que le comité du Codex chargé de l'étiquetage a conçu un cadre d'élaboration des lignes directrices. Nous invitons le gouvernement canadien à respecter ce processus et les énergies qui y ont été consacrées.
J'ignore combien de temps il me reste, mais j'espère que ces quelques notes vous porteront à réfléchir un peu plus longuement à tout ce processus de réglementation. Je vous remercie.
Le président: Monsieur Beauchemin, nous vous remercions beaucoup. Vous avez fait des observations intéressantes.
Avant de céder la parole à M. Bernier, j'aimerais vous poser une question. Quelques-uns de vos derniers commentaires me laissent un peu perplexe, et j'avoue que c'est de l'ignorance de ma part. Êtes-vous en train de dire que vous êtes en faveur d'une réglementation nationale au Canada et que vous espérez qu'elle présentera des analogies au Codex Alimentarius ou qu'elle y effectuera un renvoi afin d'harmoniser nos règlements avec ceux du reste du monde? Est-ce ce que vous prônez?
J'aimerais aussi savoir si, advenant l'adoption d'un tel règlement, vous estimez que les provinces devraient aussi en adopter ou si vous dites plutôt que le règlement fédéral devrait l'emporter sur les règlements provinciaux?
M. Beauchemin: J'aimerais que soit adoptée une norme nationale qui faciliterait l'harmonisation entre les autorités provinciales.
La loi qui est en cours de rédaction au Québec est quelque peu parallèle au système que l'on est en train de concevoir pour le reste du Canada. Il s'agit d'un partenariat entre le gouvernement et l'entreprise privée qui donne à celle-ci - en fait, les avocats s'arrachent les cheveux pour trouver un moyen de gérer tout cela - pleins pouvoirs concernant l'utilisation du mot «biologique».
Il est très important que la maîtrise de ce processus n'échappe pas à l'industrie. Je veux juste intervenir ici pour dire que lorsque l'industrie perd le contrôle, on assiste à des dérapages. Pour l'instant je suis témoin des efforts que déploient la Communauté européenne et le gouvernement américain pour introduire la notion d'acceptabilité des organismes génétiquement modifiés dans leur définition du produit biologique. Il s'agit de dérapages que nous devons éviter et, pour se faire, l'industrie doit garder la mainmise sur l'élaboration des normes.
Le président: Aux fins d'éclaircissement, la diffusion préalable d'une série de règlements fédéraux ne permet-elle pas d'atteindre l'objectif que vous visez?
M. Beauchemin: On essaie de faire mettre en place une mesure pour l'observation de la loi par un organisme d'accréditation national. Nous croyons que cela devrait se faire au niveau provincial afin de protéger contre les importations frauduleuses les marchés qui s'y trouvent.
L'une des principales lacunes à notre avis que comporte la structure du Conseil consultatif canadien de la production biologique, c'est qu'elle a été mal conçue. Ce sont tous des gens compétents qui n'ont pas ménagé leurs efforts dans le cadre de ce processus. Cependant, comme aucun concepteur ni aucune association professionnelle n'a contribué au processus, nous en sommes quittes pour une incroyable confusion en ce qui a trait à la consultation, à l'élaboration des normes et aux communications.
En guise d'exemple, en tant qu'administrateur du CCCPB, j'ai reçu le 25 mars la dernière version provisoire du Règlement interne du Conseil consultatif canadien de la production biologique que l'on me demandait de commenter parce que la constitution en personne morale devait se faire avant le 31 mars. On me donnait cinq jours et on ne me fournissait qu'un exemplaire en anglais; à titre d'administrateur je devais faire part des préoccupations de mon secteur. Comment vais-je pouvoir le faire?
Je ne dis pas que cela a été fait malicieusement. Je dis simplement qu'il manque une structure car il n'y a pas de groupe de soutien, pas d'infrastructure nationale qui peut aider à recueillir un consensus comme celui auquel le Québec et la Colombie-Britannique sont parvenus. Nous croyons qu'il serait plus facile de recueillir un consensus en passant par les structures provinciales de manière à regrouper les agriculteurs, les commerçants, les transformateurs et les universitaires et de s'entendre sur des mesures d'observation de la loi à ce niveau, plutôt que d'essayer d'improviser au palier national où l'infrastructure fait défaut.
Le CCCPB ne m'a toujours pas présenté, en ma qualité d'administrateur, un solide plan d'affaires. J'ignore où l'on s'en va. Comment voulez-vous alors que les agriculteurs le sachent? Comment les commerçants peuvent-ils se sentir à l'aise quant à la direction empruntée? Faute de mécanismes qui permettrait de faciliter ce processus, c'est le vide total en matière d'information.
Le président: D'accord. Je ne saisis pas encore tout, mais ça viendra peut-être.
Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier: Monsieur le président, vous m'avez volé plusieurs de mes questions.
[Traduction]
Le président: Très bien. Je suis désolé.
[Français]
M. Bernier: J'aimerais d'abord signaler aux membres du comité que M. Beauchemin habite le plus beau comté du Canada, puisqu'il s'agit du mien.
J'ai été très impressionné par l'information que M. Beauchemin nous a fournie. Elle aidera sans doute le comité à poursuivre son étude du règlement.
Je veux revenir sur la question de l'harmonisation de la réglementation provinciale-fédérale. J'ai demandé au témoin entendu auparavant en quoi consistait l'opposition du Québec. J'ai aussi retenu les commentaires de Mme Macey selon lesquels le Québec s'opposait à la réglementation fédérale principalement à cause du référendum.
En vous écoutant, monsieur Beauchemin, j'ai compris qu'il y avait d'autres motifs et que vous souhaitiez que l'industrie garde le contrôle de la réglementation ou de l'évolution de la réglementation et qu'on regroupe les gens par province, pour en arriver, comme c'est le cas au Québec, à une réglementation provinciale qui soit chapeautée ou complétée par une réglementation fédérale. J'ai compris que vous souhaitiez même des normes internationales.
J'aimerais vous entendre davantage là-dessus.
M. Beauchemin: Dans le cas du COAB, il n'y a pas qu'un seul problème et il n'y a pas qu'une solution. C'est un ensemble de facteurs qui ont fait qu'il y a eu des problèmes dans le développement de cet organisme.
Mme Macey sait bien que j'ai été un des rares à commenter sur une base régulière et souvent sans aucun mécanisme de rétroaction, et cela a causé beaucoup de frustrations. Je me suis quand même assuré de diffuser l'information reçue et d'expliquer aux gens l'importance de ces travaux.
Je crois qu'il est important qu'il y ait une norme nationale et des lois parce que, pour une industrie naissante, c'est en quelque sorte un certificat de naissance.
Cette norme donne accès à des programmes gouvernementaux et suscite une reconnaissance de la part des institutions, que ce soit le crédit agricole, les offices de commercialisation, ou encore l'harmonisation avec tous les secteurs de transformation assujettis à une réglementation fédérale ou provinciale. Une norme nationale vient décréter que cela existe et qu'il faut en tenir compte. C'est un marché en croissance.
M. Bernier: Vous parlez d'un chiffre d'affaires de 20 millions de dollars. J'aimerais avoir un peu plus de précisions là-dessus. S'agit-il du Québec ou du Canada?
M. Beauchemin: Les chiffres présentés nous viennent du ministère de l'Agriculture du Québec. Ce sont des chiffres du marché québécois autant sur ce qui est vendu que ce qui est produit.
On vit une situation particulière où la majorité de ce qui est consommé au Québec est importé et la majorité de ce qui est produit est exporté. Ça m'a fait un petit froid tantôt quand on a dit qu'au Québec, il y avait beaucoup de producteurs, mais que c'étaient des producteurs de sirop d'érable.
Je regrette, ce sont des producteurs agricoles. Du sirop d'érable, on en exporte à la tonne. Il est important de reconnaître les efforts qui sont faits dans cette production pour développer un système de production agricole qui soit respectueux de l'environnement, qui ait recours à une technologie plus douce et qui ait une durabilité à long terme.
[Traduction]
Le président: La parole est à M. Pickard, puis à M. Hermanson et enfin, à M. Calder.
M. Pickard: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je crois que vous avez surtout voulu faire ressortir le fait qu'une normalisation à l'échelle du pays s'impose et que chaque province doit adopter au moins des normes équivalentes aux normes nationales en ce qui a trait à la production biologique.
En outre, vous aimeriez que nous nous rapprochions davantage des accords internationaux et que nous essayions d'assujettir toute la production canadienne à des normes minimales qui permettraient à nos producteurs de vendre sans entrave leurs produits dans le monde entier. Autrement dit, nous respecterions les normes internationales et y souscririons entièrement.
Comment voyez-vous le mouvement des produits canadiens? Vous avez très bien fait comprendre que sur l'ensemble des produits organiques vendus au Québec seulement, 16 p. 100 proviennent du Québec, tandis qu'une importante proportion vient des États-Unis.
Lorsque nous parlons du secteur de la production d'aliments biologiques au Canada, nous y voyons un énorme potentiel de croissance. Je crois que c'est l'une des raisons pour lesquelles nous nous penchons sur des normes à l'heure actuelle. Comment conjuguer selon vous notre potentiel de croissance et l'élaboration de normes qui permettraient à l'industrie de progresser?
M. Beauchemin: J'ai assisté en novembre dernier à une conférence au Costa Rica, la BioFair. Un rapport a été soumis par de nombreux pays sur l'expansion du commerce des produits biologiques dans différentes régions.
Pour vous donner un simple exemple, des régions dont les pratiques agricoles s'apparentent à celles du Canada connaissent une incroyable croissance - par exemple, les pays scandinaves. Le Danemark vise à ce que 40 p. 100 de sa production interne soit constituée d'aliments organiques d'ici l'an 2000. La Suède s'est fixée un objectif. Au cours des deux dernières années, les producteurs d'aliments biologiques y sont passés de 550 à 2 500. La Finlande a décidé que 10 p. 100 de sa production laitière serait biologique d'ici l'an 2000. Nous pouvons tous penser que l'Islande n'a pas de production agricole, mais on y trouve un nombre incroyable de sources naturelles de même que beaucoup de serres chaudes et de serres. L'Islande a décrété que d'ici l'an 2000, la totalité de sa production agricole sera organique, pour des raisons environnementales.
De nombreux autres pays songent au potentiel, mais ils considèrent aussi l'ensemble de leurs agriculteurs et ce qu'a apporté la spécialisation de l'agriculture à l'intérieur des différents systèmes de production. Ici au Canada, si nous songeons à mes collègues des Prairies, la production d'aliments biologiques leur a surtout permis de diversifier davantage les systèmes de production.
Nous avons toujours des agriculteurs qui cultivent 3 000 acres; cependant, ils sont passés de la rotation blé-jachère à une rotation des cultures sur sept ans, en introduisant le millet, la luzerne et une énorme quantité d'espèces, de nouveaux légumes secs. Ils sont en train de créer des débouchés pour ces nouveaux produits tout en maintenant la qualité du sol.
Je peux donc voir un débouché mais plus particulièrement la possibilité de protéger l'agriculture ici au Canada.
M. Pickard: Merci beaucoup.
Pour faire avancer d'un cran le débat, le gouvernement fédéral a des responsabilités. Je conviens avec vous que l'idée d'une norme canadienne est très bonne tout comme celle de regrouper les provinces en vue d'une harmonisation. Cependant, chaque région du Canada s'inquiète de sa compétence et de l'empiétement dont elle fait l'objet d'un palier de gouvernement à l'autre.
Par le passé, certains organismes provinciaux ont opposé une certaine résistance lorsque les normes fédérales étaient appliquées - et vice versa, ce qui pourrait très bien se produire. Comment selon vous peut-on harmoniser raisonnablement les normes fédérales et provinciales dans ce pays?
M. Beauchemin: Si les normes sont conçues par l'industrie, je crois que différents secteurs de cette dernière peuvent y souscrire. Je songe à la façon dont les normes ont été harmonisées et conçues au niveau international par l'entremise de la FAO, dans le secteur privé, ou comment les choses se passent au sein de la commission du Codex.
Je suppose donc que si l'on donne aux gens les outils dont ils ont besoin, ils peuvent parvenir à s'entendre. Si les producteurs du Québec parviennent à s'entendre sur quelque chose, je suppose que les autres provinces du Canada peuvent suivre son exemple - parce que dans le secteur de la production des aliments organiques, nous nous bagarrons. Cependant, lorsque nous ne perdons pas de vue l'objectif...
C'est peut-être ce que nous devons faire: définir précisément l'objectif. S'il s'agit de mettre au point des normes pour compliquer la situation, eh bien! Nous le ferons. Si l'objectif est de faciliter les échanges et de faire progresser l'industrie, nous élaborerons les normes en suivant strictement les principes de l'agriculture biologique tels qu'ils ont été conçus et reconnus par la communauté internationale.
M. Pickard: Si je vous comprends bien, le CCCPB ou l'industrie doit veiller à harmoniser ses activités d'un bout à l'autre du pays.
M. Beauchemin: J'ai participé à l'assemblée annuelle du CCCPB à Vancouver, où il y avait un représentant d'Agriculture Canada, M. Don Raymond. Il y a distribué deux documents très importants que vous connaissez tous je crois et qui parlaient de la consultation publique. S'il distribuait ces documents, je suppose qu'il réagissait au nom d'Agriculture Canada à une grande partie des réactions négatives qui venaient de l'industrie. Des gens de vos circonscriptions demandaient probablement là où le gouvernement voulait en venir avec ce règlement. La consultation a été très limitée.
Sur les quelque 200 lettres qu'a reçues Agriculture Canada et qui ont été transmises au CCCPB, il ressort qu'un grand nombre des préoccupations était attribuable au manque de compréhension lui-même attribuable à l'absence de consultation. Ce n'était pas que le gouvernement était mal intentionné, qu'il cherchait à s'arroger des pouvoirs ou que sais-je encore. Il s'agit simplement d'un manque de ressources et de la difficulté qu'éprouve une industrie naissante à se structurer au niveau national alors qu'elle n'a toujours pas réglé ses problèmes au niveau provincial.
Je recommanderais à l'industrie de faire ce qu'elle a à faire au niveau provincial. C'est ce qui arrive en Colombie-Britannique et au Québec. Je sais que des discussions sont en cours en Nouvelle-Écosse. Le Saskatchewan Organic Development Council travaille et essaie de réunir différents intervenants autour de la table. Fournissons à ces différents mécanismes provinciaux les moyens et le temps dont ils ont besoin pour recueillir un consensus et réunissons les ensuite autour de la table nationale. Ne mettons pas en place un système national qui se heurte à une forte résistance.
Le président: M. Hermanson.
M. Hermanson: Merci, monsieur Beauchemin de comparaître devant le comité aujourd'hui.
Tout est assez confus et fascinant. Votre curriculum vitae est impressionnant. Vous y indiquez que vous faites partie de plusieurs organismes, mais vous représentez ici la Table filière biologique. Je suppose que vous êtes le porte-parole de cet organisme ce matin.
M. Beauchemin: Oui.
M. Hermanson: Très brièvement, voici le règlement. Votre organisme appuie-t-il la version provisoire du règlement qui doit paraître dans la Gazette?
M. Beauchemin: Dans sa forme actuelle?
M. Hermanson: Oui, dans sa forme actuelle.
M. Beauchemin: Non.
M. Hermanson: Vous ne l'appuyez pas.
M. Beauchemin: Non.
M. Hermanson: D'accord. C'est ce que je voulais savoir.
Le ministère de l'Agriculture a signalé qu'il veut collaborer avec le CCCPB à titre d'organisme représentant l'industrie pour l'élaboration de ce règlement. Vous dites avoir été nommé au CCCPB. Croyez-vous que le CCCPB est l'organisme en qui l'industrie veut placer sa confiance pour s'assurer que ces règlements lui seront utiles?
M. Beauchemin: C'est une question biaisée.
M. Hermanson: C'est une question importante.
M. Beauchemin: C'est une question très importante.
M. Hermanson: Très importante.
M. Beauchemin: Je crois que le CCCPB pourrait être habilité à le faire, mais qu'il n'a pas accompli son devoir. Il s'agit d'un groupe ad hoc constitué sans l'appui d'un groupe sectoriel ou d'une association professionnelle qui pourrait parrainer le processus. Il a été défini comme un groupe ad hoc.
M. Hermanson: Vous siégez au sein du conseil du CCCPB. Vous y avez été nommé.
M. Beauchemin: J'ai été nommé par la Table filière parce qu'on nous avait chargé d'étoffer nos commentaires et de jouer notre rôle si nous voulions que notre opinion soit prise en compte dans le processus national, de passer par l'entremise du CCCPB.
La situation en ce qui a trait au CCCPB est très déconcertante. Lorsque j'ai assisté à la réunion en mars, j'ai été surpris de constater que le CCCPB procédait déjà à des accréditations, distribuait des documents, percevait de l'argent, reconnaissait la compétence des agents de vérification, sans avoir été constitué en personne morale au préalable, ce qui mettait en cause la responsabilité individuelle.
J'ai laissé entendre que je n'allais pas participer à une décision d'accréditation à moins que la société ne soit structurée et constituée, qu'une façon de procéder soit élaborée et que tout soit mis par écrit étant donné l'importance que revêt pour moi l'accréditation. J'ai participé à des accréditations par l'entremise de la FIMAB et je sais à quel point tout doit être clairement établi. Alors que j'étais membre du conseil d'administration d'OCIA International l'an dernier, l'organisme a fait l'objet d'un recours collectif de 60 millions de dollars. Nous avons dû passer au travers de ce processus. Nous avons gagné mais il nous a fallu débourser 150 000 $ en frais d'avocat pour nous en sortir et pour nous faire dire qu'il s'agissait là d'un recours futile. Cependant, cela ne veut pas dire que vous êtes à l'abri des poursuites.
Un conseil consultatif qui exerce déjà certaines fonctions, qui prend certaines décisions et qui reconnaît certaines mesures de vérification du respect de la loi et des règlements sans avoir été formé au préalable ne repose pas sur des assises très solides.
M. Hermanson: Vous parlez au nom de la Table filière biologique. Comment votre association est-elle arrivée à la conclusion qu'elle n'appuyait pas ce règlement? Est-ce que la décision a été prise par le comité exécutif ou est-ce une décision personnelle? Avez-vous consulté les membres?
M. Beauchemin: Le document daté du 29 septembre nous est parvenu au Québec le 16 octobre. La lettre du 29 septembre précisait qu'il y aurait une période d'examen et de commentaires de trois ou quatre semaines. Lorsque nous avons reçu la lettre, il ne restait plus que 10 jours. Nous avons donc communiqué avec Agriculture Canada pour lui dire que nous avions besoin de plus de temps, parce que le règlement était complexe et que nous voulions consulter nos membres.
Agriculture Canada nous a informés qu'il recevrait des commentaires jusqu'en novembre; il nous a dit de ne pas tenir compte du délai. Nous avons donc distribué le document aux tables filières, aux 18 membres du conseil, aux représentants des distributeurs et à l'organisme de certification. Nous avons fait circuler le document et recueilli des commentaires.
Nous avons convoqué une réunion des tables filières, qui se sont entendues pour dire qu'elles n'étaient pas à l'aise avec le processus, et plus précisément, avec l'idée d'accorder des pouvoirs à un groupe du secteur privé qui n'était pas en mesure de répondre aux besoins du Québec.
Toutes les réunions se déroulent en anglais. Les documents du CCCPB et les traductions nous parviennent, si nous les recevons, plusieurs mois plus tard. Je ne veux pas critiquer le Conseil. Il faut beaucoup de ressources pour entreprendre un projet à l'échelle nationale. Toutefois, les agriculteurs québécois ne devraient pas être obligés de passer leur temps à interpréter des règlements, des plans d'entreprise ou autres documents de ce genre.
Un organisme est en train d'être mis sur pied pour administrer ce règlement. Nous devrions avoir le droit d'être entendus et de participer à cet exercice.
M. Hermanson: Agriculture Canada a bien indiqué au comité que le règlement ne serait publié dans La Gazette que lorsqu'un consensus se serait dégagé de l'industrie et qu'un porte-parole ou un groupe représentant l'industrie aurait été désigné. Pensez-vous que les choses vont se dérouler de cette façon? Est-ce l'impression que vous avez, d'après vos discussions avec Agriculture Canada et le CCCPB?
M. Beauchemin: Agriculture Canada a dit bien des choses.
Pendant les quatre premières années, l'industrie s'est fait dire que les normes ne pouvaient pas être incorporées par renvoi, qu'elles devaient être incluses dans le règlement. Il y a deux mois, on nous a dit que les normes pouvaient être incorporées par renvoi. Je sais que le cadre réglementaire évolue très vite, mais si Agriculture Canada nous dit maintenant qu'il est prêt à attendre qu'un consensus se dégage dans l'industrie, je suis satisfait avec cette décision. Il sera toutefois intéressant de voir comment ce consensus sera interprété si le Québec et la Colombie-Britannique décident de ne pas appuyer le règlement ou d'y apporter des changements.
Nous ne voulons pas dénigrer ce système. En tant qu'organisme de surveillance oeuvrant au Québec, si on nous demandait de contrôler les produits de la Saskatchewan ou de l'Île-du-Prince-Édouard qui sont écoulés sur le marché québécois, nous préférerions que ce produit soit certifié par l'entremise d'un système d'accréditation provincial ou privé. Cela faciliterait notre tâche. Autrement, nous serions obligés d'effectuer nous-mêmes les contrôles et nous ne disposons pas des ressources voulues pour le faire dans le cas des produits du Québec. Nous voulons mettre l'accent sur l'harmonisation et la reconnaissance mutuelle des normes, principes qui sont définis dans les ententes régissant le commerce interne.
M. Hermanson: Vous dites que le processus réglementaire et législatif devrait être dirigé par l'industrie. Comment peut-il l'être s'il y a tellement d'agences, d'organismes et de groupes qui essaient de diriger l'industrie?
M. Beauchemin: L'absence de leadership constitue une des plus grandes faiblesses de l'industrie. Vous avez sans doute constaté, dans les nombreux documents que vous avez reçus, que l'industrie s'éparpille. On ne sait pas trop où on s'en va.
Certains veulent qu'on établisse des normes très protectionnistes, tandis que d'autres, plus ouverts, veulent assouplir les normes ou faciliter l'accès au marché.
Les producteurs d'aliments biologiques constituent un groupe assez particulier: ils veulent que tout le monde s'adonne à la culture biologique, mais qu'on ne touche pas à «leurs marchés». Ce sont des problèmes que nous devrons surmonter.
Le président: Monsieur McKinnon.
M. McKinnon: Nous avons déjà abordé cette question, mais j'aimerais y revenir brièvement. Vous avez parlé des changements qu'a connus le GATT depuis la signature de l'accord. Pouvez-vous nous donner des précisions là-dessus?
M. Beauchemin: Vous voulez parler des conditions les plus favorables?
M. McKinnon: Oui.
M. Beauchemin: Cette information a été transmise par Agriculture Canada lors de la réunion du CCCPB à Vancouver. Selon le ministère, la clause des conditions les plus favorables signifie que si une province n'a pas réglementé la production à l'intérieur de son territoire, les importateurs ne seraient assujettis à aucun règlement. C'est ce que j'ai compris.
Le Canada, semble-t-il, avait contesté la position des États-Unis dans le dossier des brasseries. C'est un champ de compétence qui a été établi par le GATT. Je confonds peut-être le GATT avec l'ALÉNA, mais c'est ce que disaient les documents qui ont été distribués par Agriculture Canada.
M. McKinnon: Vous avez mentionné brièvement que d'autres gouvernements voulaient inclure les organismes modifiés génétiquement dans la définition de produit biologique. Je ne connais pas grand chose à ce sujet. Êtes-vous en train de dire que ce genre d'organisme ne pourrait jamais être inclus dans cette définition?
M. Beauchemin: La Fédération internationale de mouvements d'agriculture biologique a déclaré que les organismes modifiés génétiquement ne devraient pas être inclus dans cette définition parce qu'on ne connaît pas encore toutes les conséquences de leur utilisation. On peut établir un parallèle avec la révolution écologique qui est survenue 40 ans après qu'on s'est rendu compte que les engrais et les pesticides ne possédaient pas toutes les propriétés magiques qu'on leur attribuait. On ne connaît toujours pas les conséquences qu'entraînera, sur le plan commercial ou autre, l'utilisation de semences brevetées.
M. McKinnon: Si un jour on finit par le savoir, les producteurs d'aliments biologiques utiliseront peut-être ces renseignements pour défendre leur position.
M. Beauchemin: Il s'agit d'un sujet délicat, car en tant que producteurs d'aliments organiques, nous nous intéressons aux systèmes naturels, aux mécanismes d'adaptation de la nature, et non aux organismes modifiés génétiquement.
M. McKinnon: Je vais me pencher sur cette question. Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Beauchemin. J'ai quelques commentaires à faire en guise de conclusion.
Je tiens à dire aux témoins que nous ne sommes pas obligés de quitter la salle à 11 h 15 pile. Toutefois, je sais que certains membres du comité doivent assister à d'autres réunions et qu'ils seront peut-être obligés de nous quitter.
Monsieur Beauchemin, je ne sais pas si j'ai bien compris. Êtes-vous en train de dire que vous voulez que le gouvernement fédéral établisse des lignes directrices auxquelles les provinces devront se conformer? Vous voulez toutefois que ces lignes directrices soient conformes au Codex Alimentarius et qu'elles soient reconnues par les autres pays - par l'UE, par exemple.
Si c'est ce que vous voulez - et je ne connais pas la réponse - , comment peut-on faire en sorte que toutes les provinces suivent le mouvement si le gouvernement fédéral n'adopte pas des lignes directrices solides? Lorsqu'un produit biologique arrive à la frontière, en vertu de quel règlement est-il accepté ou renvoyé? J'ai beaucoup de mal à comprendre cette question.
Je me fais l'avocat du diable, mais lorsque nous parlons du CCCPB, je ne sais pas comment... Je pense qu'il y a un problème... et il ne faut surtout pas que le groupe autour de cette table prononce ce mot, mais on craint que les considérations d'ordre «politique» interviennent pour beaucoup dans ce qui se passe dans le secteur de l'agriculture biologique.
M. Beauchemin: Vraiment?
Des voix: Oh, oh!
Le président: Oui. Nous avons le CCCPB, qui est composé de représentants de chaque province. Je ne sais pas comment ils ont été désignés, mais je crois comprendre, et je me trompe peut-être, que chaque province a choisi, parmi les producteurs d'aliments biologiques de la province, un représentant qui siégerait au sein du conseil pour qu'on puisse parvenir à un consensus. Or, on semble maintenant se poser beaucoup de questions au sujet de ce représentant; on se demande s'il parle au nom des personnes qui l'ont choisi et comment il a été choisi. Il semble y avoir beaucoup de discussions à ce sujet.
M. Beauchemin: La structure du processus d'accréditation est une question d'ordre technique. Avec le CCCPB, nous avons politisé le processus en élaborant un mécanisme de représentation provinciale et en déterminant qui peut faire partie de ce conseil. Vous devez être agriculteur, faire partie d'un organisme qui dégage un consensus au sein de la collectivité. Nous sélectionnons les membres, nous essayons de faire en sorte que les personnes choisies sont irréprochables.
Nous choisissons des gens sérieux, mais qui ne connaissent rien au processus de réglementation, à l'industrie. Nous réunissons des gens autour des tables. Le temps d'accomplir leur mandat de deux ans, ils commencent à se familiariser avec le dossier. Ils commencent à savoir comment gérer le système, mais leur mandat est terminé.
Le président: Merci, monsieur Beauchemin, pour votre exposé. Vous avez soulevé beaucoup de questions intéressantes.
Notre prochain témoin est M. Raymond Lamoureux, de l'Entreprise R.F. Inc.
Je tiens à faire remarquer aux membres du comité que nous poursuivrons notre étude de cette question jeudi, à 8 h 45. Vous avez déjà reçu un avis à cet effet.
[Français]
M. Raymond Lamoureux (propriétaire d'Entreprise R.F. Inc.): Bonjour, messieurs et mesdames.
M. Beauchemin a fait une très belle présentation. Je suis ici parce que vous m'avez invité et je vous en remercie.
Notre organisation, Entreprise R. F., est une organisation familiale qui oeuvre dans le domaine agricole, surtout en grande culture, au niveau de la production, depuis plus de 25 années. Notre organisation est aussi membre de l'organisation de certification biologique OVONA.
Je suis aussi copropriétaire d'une compagnie de semences qui s'appelle Hortisem inc., à Québec, compagnie qui est impliquée au niveau de la distribution de semences aux producteurs de gazon et aux professionnels de l'aménagement.
Depuis quelques années, nous travaillons de pair avec le ministère de l'Agriculture, c'est-à-dire les bureaux régionaux d'Agriculture Canada, afin d'évaluer des espèces de semences pouvant servir à produire des denrées biologiques telles que le soja, le blé et l'épeautre.
Notre industrie fonctionne bien présentement, le produit est reconnu par les acheteurs, et le marché est en expansion. Ce n'est pas par hasard que le marché actuel est grandissant; c'est le fruit de plusieurs années d'efforts et de recherche. Le marché est contrôlé par l'industrie privée.
Les acheteurs acceptent le produit fourni, ils acceptent la qualité et ils acceptent d'en payer le prix. Ils reconnaissent nos agences de certification selon leurs normes, et nos agences sont généralement acceptées par les gouvernements étrangers.
Les bureaux régionaux des gouvernements provinciaux ont collaboré étroitement au succès de cette industrie. Le bénévolat de plusieurs intervenants est grandement utile et apprécié. Les agences de certification existantes sont efficaces et suffisantes pour satisfaire aux besoins du marché.
Pourquoi une nouvelle réglementation? Ayant travaillé aux règlements de la Loi sur les semences pendant 20 années, alors que nous avons très peu d'inspecteurs au service de l'industrie et que les coupures de postes et de budgets sont évidentes, je ne vois pas pourquoi il y aurait place présentement pour un autre système de contrôle au niveau de la production et de la certification biologiques.
En ce qui a trait à COAB, je crois que les gens, surtout les producteurs, n'ont pas été suffisamment et adéquatement consultés. Si ces règlements avaient été adoptés tels que présentés l'automne dernier, la jeune entreprise n'existerait plus aujourd'hui.
Je disais tantôt que l'orientation des gouvernements, les coupures budgétaires, les coupures de personnel et la présence du gouvernement canadien se limitaient aux grands centres urbains. Les bureaux régionaux des ministères provinciaux sont présents partout: dans le champ, au niveau de l'agriculteur, et au niveau du développement de nouvelles espèces et variétés. Je crois que si le gouvernement canadien s'implique au niveau des produits biologiques, il doit le faire au niveau du développement de nouveaux produits et aider l'industrie, qui contrôle présentement ce commerce.
Si on regarde le marché actuel des produits biologiques, notre organisation exporte 99 p. 100 des produits. Il y a très peu de ventes localement. L'expansion de cette industrie est directement reliée aux efforts de l'industrie privée.
Les produits biologiques canadiens ont une très bonne réputation sur le marché étranger. Les agences et les organisations de certification ont officiellement reconnu nos agences. Le franc succès de cette industrie est directement relié aux personnes impliquées dans le domaine, surtout les conseillers régionaux et les gouvernements provinciaux, de même qu'au bénévolat des dirigeants, employés et organismes de certification biologique et des entreprises privées.
J'ai ici la Loi sur les semences. À cause d'un manque de personnel au sein de la division des produits végétaux d'Agriculture Canada, l'entreprise privée doit faire elle-même l'inspection des lots de semences. En plus, elle doit payer pour cela. Je suis actuellement à mon compte et je me demande pourquoi nous avons besoin d'une nouvelle réglementation au niveau de la production, de l'exportation ou de l'importation de produits biologiques.
Merci.
[Traduction]
Le président: J'ai une question à poser avant de céder la parole à M. Bernier.
Vous avez dit, monsieur Lamoureux, que vos produits sont acceptés par les pays étrangers - ce sont les mots que vous avez utilisés si je ne m'abuse. En vertu de quelles normes vendez-vous ces produits, et qui a établi ces normes?
[Français]
M. Lamoureux: Sous les standards des organisations de certification biologique présentes au Québec.
[Traduction]
Le président: Vous avez utilisé le pluriel. Vous avez parlé des «organisations» de certification biologique.
M. Lamoureux: Oui.
Le président: Il y a donc plusieurs organisations. Est-ce que leurs normes sont identiques?
[Français]
M. Lamoureux: Elles ne sont peut-être pas identiques, mais elles sont semblables. Il y a entre autres OCIA, OGBA et OVONA.
[Traduction]
Le président: Est-ce que ces normes sont identiques à celles qu'on applique en Ontario, au Québec ou aux États-Unis?
[Français]
M. Lamoureux: Ils sont déjà utilisés en Ontario, au Québec, dans les provinces de l'Ouest et aux États-Unis.
[Traduction]
Le président: Très bien.
[Français]
M. Bernier: Monsieur Lamoureux, je vous remercie d'être venu témoigner devant le comité.
Je vous poserai une question directement liée à la réglementation mais, comme vous êtes également dans l'industrie, je vais aussi vous poser une question que je voulais poser plus tôt à M. Beauchemin.
On a parlé de mon collègue d'Arthabaska lorsqu'on a entendu le premier témoin parler de la question des coûts des produits biologiques. Je ne voudrais pas prendre énormément de temps là-dessus, mais j'aimerais obtenir quelques précisions.
On dit, et c'est la réalité, que les produits biologiques sont plus chers que les autres produits. J'aimerais que vous nous en donniez brièvement les raisons. Est-ce la production des produits biologiques qui coûte plus cher ou si c'est une question de marché, comme Mme Macey l'a souligné, puisque la demande est grande et que la production ne suffit pas?
Deuxièmement, je vois que vous vous opposez à la réglementation fédérale. Avez-vous entendu l'exposé de M. Beauchemin et êtes-vous d'accord sur son point de vue?
M. Lamoureux: En ce qui a trait au prix, je vais vous demander de préciser votre question. Parlez-vous du prix du producteur ou du consommateur?
M. Bernier: Du consommateur.
M. Lamoureux: Le producteur biologique a nécessairement un rendement moins élevé. Parce qu'il n'utilise ni engrais ni produits chimiques pour le contrôle des insectes, il doit utiliser des moyens acceptés et plus conventionnels pour contrôler les mauvaises herbes et fertiliser ses champs. Donc, c'est sûr que le produit est plus cher au niveau du consommateur. Ce n'est peut-être pas le cas de toutes les productions, car dans certaines, l'agriculteur obtient un rendement sensiblement équivalent à celui de la culture traditionnelle.
Si votre question a trait à l'utilisation des produits vendus sur le marché local, je suis un peu embêté de vous répondre, parce qu'il s'agit là en général de fruits ou de légumes produits biologiquement. Je ne suis pas dans ce domaine-là.
Pour ce qui est de votre deuxième question, j'ai entendu l'exposé de M. Beauchemin. Vous me demandez si je suis d'accord sur la réglementation. Je crois qu'il y a place pour une réglementation. Je dirais qu'elle doit se faire à partir de l'industrie privée, en collaboration avec les gouvernements provinciaux, et que cela n'empêche aucunement un comité regroupant toutes ces associations de siéger au niveau national.
[Traduction]
Le président: M. Collins, M. Hermanson et ensuite M. Calder.
M. Collins (Souris - Moose Mountain): Merci, monsieur le président. Je n'ai pas eu l'occasion d'entendre le premier intervenant, mais j'ai entendu le deuxième, M. Beauchemin. Mon rôle ici consiste à poser des questions et à prendre des notes, mais je dois dire que si je devais choisir quelqu'un avec qui travailler, je choisirais M. Beauchemin... Il semble être ouvert à l'idée de mettre sur pied, à l'échelle nationale, un système où nous collaborons avec les provinces et coordonnons nos efforts.
Et je suis d'accord, vous travaillez peut-être dans ce domaine depuis une vingtaine d'années, mais j'ai enseigné pendant 30 ans. Cela ne veut pas dire que je ne suis pas prêt à envisager de nouvelles idées et de nouvelles approches. Si elles sont meilleures, pourquoi ne pas les adopter? Si vous êtes prêt à faire cela... Je ne veux pas que le gouvernement ajoute une autre série de règlements à ceux qui existent déjà.
Ce que j'aimerais savoir, en résumé, c'est comment pouvons-nous mettre au point un système qui incorpore les connaissances que vous avez acquises en 20 ans, grâce au travail accompli parM. Beauchemin et d'autres, à élaborer un règlement que nous pourrons appliquer à l'ensemble du Canada?
[Français]
M. Lamoureux: Je dois me répéter. Si l'industrie des produits organiques se porte bien, c'est grâce à l'industrie privée qui a travaillé de pair avec des représentants des gouvernements provinciaux pour développer des techniques de production biologiques et les rendre acceptables aux acheteurs. L'industrie prend actuellement de l'expansion. Il y a actuellement des organismes de certification reconnus dans certains pays de la CEE.
[Traduction]
M. Collins: Monsieur le président, j'ai une dernière question. Croyez-vous qu'il est possible, pour le gouvernement fédéral, de mettre en place un système unifié de règlements pour faire en sorte que les règlements soient les mêmes au Manitoba, au Québec ou en Alberta par exemple, pour faire en sorte que les règles qui régissent le commerce interprovincial ou international des semences ou autres produits soient les mêmes au Québec et en Alberta?
[Français]
M. Lamoureux: C'est un système qui est en place dans certains organismes de certification. L'OVONA est présente partout au Canada, y compris dans l'Ouest canadien. L'OCIA est également présente. Donc, je ne peux voir d'objections à un système unifié. Il en existe déjà un et il est fonctionnel.
[Traduction]
Le président: Monsieur Hermanson.
M. Hermanson: D'abord, vous travaillez dans le secteur de l'agriculture biologique. Vous occupez-vous de production, de transformation ou des deux?
M. Lamoureux: De production et de transformation - pas vraiment de transformation, parce que nous n'avons pas d'installations de nettoyage, mais nous collaborons avec un organisme de certification.
M. Hermanson: Mais vous produisez des aliments biologiques?
M. Lamoureux: Oui.
M. Hermanson: En tant que producteur d'aliments biologiques, vous faites partie de quel organisme?
M. Lamoureux: De l'OVONA.
M. Hermanson: C'est le seul?
M. Lamoureux: Je travaille également en étroite collaboration avec la section locale de l'OCIA.
M. Hermanson: Vous avez dit que si le règlement était approuvé - et je vous demanderais de clarifier ce point parce que je ne sais pas si j'ai bien compris - , votre entreprise n'existerait plus. Est-ce que cela veut dire que vous ne seriez pas en mesure de mettre sur pied une entreprise, ou que vous ne pourriez plus continuer de fonctionner avec cette réglementation?
M. Lamoureux: Si le règlement est adopté tel que présenté à l'origine, nous serions obligés de fermer l'entreprise.
M. Hermanson: Pourquoi?
M. Lamoureux: Parce que ce règlement est trop complexe; il définit même le terme «biologique». Je n'ai pas analysé le document en profondeur, mais j'ai l'impression...
M. Hermanson: Donc, vous ne faites pas allusion à des dispositions précises du règlement? C'est le processus que vous n'aimez pas, pas le contenu du règlement lui-même?
M. Lamoureux: Pourquoi avons-nous besoin d'un nouveau règlement si celui que nous avons actuellement fonctionne et qu'il est accepté par les acheteurs? C'est ce que j'essaie de vous faire comprendre, entre autres.
M. Hermanson: En tant que producteur, qui vous a consulté au sujet de ce règlement?
M. Lamoureux: Un représentant du gouvernement régional, provincial.
M. Hermanson: C'est le seul contact que vous avez eu avec le gouvernement provincial?
M. Lamoureux: Oui.
M. Hermanson: Vous n'avez pas été consulté par le CCCPB ou l'OVONA?
M. Lamoureux: L'OVONA nous a consultés, mais pas le CCCPB.
M. Hermanson: Est-ce que le CCCPB tient compte de vos vues? Est-ce que vous participez au choix des membres du Conseil? D'après vous, est-ce que le Conseil défend bien les intérêts de l'industrie dans ce dossier?
[Français]
M. Lamoureux: Je ne peux vraiment commenter sur le package parce qu'à mon avis, il n'apporte rien de nouveau.
[Traduction]
M. Hermanson: Ce n'est pas la question que je vous ai posée. Le ministère de l'Agriculture et le gouvernement ont indiqué vouloir collaborer avec un organisme qui représente l'industrie afin d'élaborer une série de règlements et d'y apporter les changements qui s'imposent. Ils ont dit vouloir travailler avec le CCCPB. En tant que producteur, estimez-vous que le Conseil défend vos intérêts lorsque vient le temps d'élaborer ou de modifier des règlements? Êtes-vous satisfait de son travail? Êtes-vous content d'avoir un organisme comme le CCCPB qui travaille pour vous, en tant que producteur? Faites-vous confiance au CCCPB?
[Français]
M. Lamoureux: Je ne vois pas l'utilité que COAB soit là pour développer un modèle national ou international de certification biologique.
Il y a déjà des organismes en place qui ne coûtent rien, ou à peu près rien, et je ne vois pas pourquoi on devrait en avoir un autre. Ce sera encore plus ambigu. Qui va vouloir laisser sa place? OVONA, OCIA, OGBA ou COAB?
[Traduction]
M. Hermanson: M. Beauchemin a dit que le CCCPB avait déjà commencé à délivrer des certificats d'accréditation. À votre avis, y a-t-il un trop d'organismes de certification? Est-ce qu'il serait préférable d'avoir un seul organisme national de certification comme le CCCPB? Ou serait-il préférable d'avoir des organismes distincts, comme l'OVONA entre autres, dont les normes sont légèrement différentes?
[Français]
M. Lamoureux: Je crois que l'on est encore dans un pays libre et qu'il y a de la place pour plus d'une organisation.
[Traduction]
M. Hermanson: Merci, monsieur le président.
Le président: J'aimerais clarifier un point. Le CCCPB ne s'occuperait pas de certification. Cet organisme est un conseil consultatif qui regroupe des représentants rassemblés par Agriculture Canada pour discuter des règlements qui pourraient être mis en place pour certifier ou - évitons d'utiliser le mot «règlements» - , les produits biologiques, de sorte que lorsque quelqu'un voit le mot «biologique» sur un produit canadien par exemple, il sait que le produit respecte certaines normes. Il s'agit d'un conseil consultatif.
Ce ne serait pas un organisme de certification, monsieur Hermanson.
M. Hermanson: M. Beauchemin a indiqué qu'ils commençaient à faire des démarches dans ce domaine. C'est pour cette raison que j'ai soulevé la question. Il a déclaré qu'ils pourraient même être tenus responsables, sur le plan juridique, de certaines décisions.
Le président: Non.
M. Hermanson: Mais vous rejetez son...
Le président: Monsieur Beauchemin, pouvez-vous s'il vous plaît clarifier ce point? C'est important.
M. Beauchemin: Le CCCPB est plus qu'un conseil consultatif. Il s'occupe de réglementation. Il doit faire en sorte que les organismes accrédités respectent les normes. Il joue donc le rôle d'un organisme d'accréditation. Il effectue des contrôles de conformité.
Le président: Est-ce que cela est défini dans le règlement?
M. Beauchemin: Le Conseil a déjà pris certaines décisions en matière d'accréditation. Il a déjà effectué quelques contrôles de conformité auprès d'organismes accrédités qui ont présenté une demande avant que le système ne soit mis en place.
Le président: D'accord.
M. Hermanson: Monsieur le président, la Bibliothèque du Parlement a préparé une note d'information sur le sujet. Elle précise dans celle-ci que:
- Un organisme national d'accréditation, le Conseil consultatif canadien des produits
biologiques, a été créé en 1993 pour administrer les normes et les tenir à jour et accréditer les
organismes chargés de certifier les produits biologiques...
- C'est le mandat qu'on lui a confié, mais il semble avoir dépassé la portée de celui-ci.
Monsieur Calder.
M. Calder: Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour, monsieur Lamoureux, et merci d'être venu nous rencontrer. Nous n'avons pas encore établi de normes nationales pour les produits biologiques; cette question relève des provinces, et nous y travaillons.
Je me demande s'il existe une définition pour les produits biologiques, qui est acceptée à l'échelle internationale?
M. Lamoureux: Vous avez dit à l'échelle internationale?
M. Calder: Oui.
M. Lamoureux: Je ne le crois pas.
M. Calder: Est-ce que l'industrie à l'échelle internationale pourrait établir cette définition? D'après un des rapports que nous avons ici - je pense que c'est celui de Mme Macey - , nous avons de la difficulté à écouler certains de nos produits en Hollande ou en Suède.
Quel est le problème? Est-ce que leurs normes sont plus sévères que les nôtres? S'agit-il d'une question politique?
M. Lamoureux: Je ne peux pas répondre à cette question. Je ne le sais pas.
M. Calder: Nous allons donc passer à autre chose.
Vous produisez des semences enregistrées, n'est-ce pas? C'est ce que vous vendez?
M. Lamoureux: Non. Certains produits agricoles, ainsi que des semences. J'ai deux entreprises différentes.
M. Calder: Donc, vous vendez un produit qui est enregistré...
M. Lamoureux: Du soya ou du blé ou du sirop d'érable.
M. Calder: D'où proviennent vos semences? Est-ce que vous les produisez vous-même?
M. Lamoureux: Il y a une nouvelle variété d'épeautre qu'on ensemence au printemps. Habituellement, l'épeautre est ensemencé à l'automne, pas au printemps. Nous avons mis au point une nouvelle variété d'épeautre qu'on ensemence au printemps en alternance avec le soya.
M. Calder: Est-ce vous qui avez mis au point cette semence?
M. Lamoureux: Elle a été mise au point en collaboration avec un spécialiste californien et une entreprise de l'Ouest.
M. Calder: Donc, autrement dit, cette semence n'a jamais été exposée à des produits chimiques ou autres?
M. Lamoureux: Pas encore, mais ce produit n'est pas encore commercialisé. Il sert actuellement à reproduire des semences.
M. Calder: Très bien.
Vous avez fait un commentaire fort intéressant qui contredit les propos de Mme Macey. Vous avez dit que la production d'aliments biologiques est en fait inférieure à la production agricole commerciale.
M. Lamoureux: Habituellement, oui.
M. Calder: Si un agriculteur biologique essaie d'être aussi compétitif qu'un agriculteur commercial et, par exemple, qu'il utilise plus de fumier parce qu'il ne peut se servir d'engrais chimiques, ou qu'il utilise plus souvent une sarcleuse ou un pieu de compactage pour enlever les mauvaises herbes, est-ce que cela causerait des problèmes sur le plan écologique?
M. Lamoureux: Non.
M. Calder: Non. Par exemple, que feriez-vous pour vous débarrasser des mauvaises herbes?
M. Lamoureux: Habituellement,
[Français]
c'est par sarclage.
[Traduction]
M. Calder: Que feriez-vous alors?
[Français]
M. Lamoureux: Planter en rang et sarcler mécaniquement.
[Traduction]
M. Calder: Donc, vous allez procéder au compactage du sol. C'est ce que je pensais.
M. Lamoureux: Voulez-vous dire...?
M. Calder: En repassant constamment sur le sol. Cela pourrait donc poser un problème sur le plan écologique.
M. Lamoureux: Il n'est pas nécessaire de le faire trop souvent. Les producteurs réguliers ou les producteurs commerciaux font la même chose que les producteurs biologiques.
M. Calder: Eh bien, je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point, parce que les agriculteurs commerciaux pratiquent la culture sans labour et utilisent des herbicides. En fait, nous travaillons moins la terre que dans le passé, parce que le compactage des sols pose un problème.
M. Lamoureux: Les producteurs biologiques doivent travailler la terre plus souvent, comme vous l'avez dit. Je suis d'accord avec vous.
M. Calder: Très bien. Merci beaucoup.
Merci, monsieur le président.
Le président: J'ai une dernière question, monsieur Lamoureux.
Pour résumer, est-il nécessaire à votre avis d'avoir une norme nationale ou une série de règlements nationaux que les organismes d'accréditation devront respecter, ou est-ce que l'industrie peut fonctionner avec un certain nombre d'organismes d'accréditation qui appliqueraient des normes qui ne seraient pas nécessairement identiques?
[Français]
M. Lamoureux: À l'heure actuelle, les organisations, que l'on parle d'OCIA, d'OVONA ou d'OGBA, sont reconnues autant aux États-Unis qu'au Canada et même dans certains pays d'Europe.
Je ne vois pas l'utilité d'ajouter ce que j'appellerais un superorganisme de contrôle des organismes de contrôle qui ajouterait des frais ainsi que du travail de bureau et de la paperasserie. Je crois qu'on en a déjà amplement.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Lamoureux. Je tiens également à remercier les autres témoins et les membres du comité.
Nous poursuivrons notre examen du sujet jeudi matin, à 8 h 45, dans la pièce 701 de l'édifice situé sur la rue Sparks. Toutefois, nous avons une autre réunion demain après-midi, à 15 h 30, avec le groupe Conservation des sols Canada et le Conseil canadien des plantes fourragères. Je vous demanderais de vérifier l'avis de convocation parce que je ne me souviens plus où elle doit avoir lieu.
La séance est levée.