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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 16 mai 1996

.0907

[Traduction]

Le président: Bonjour à tous.

Si cela vous convient, nous commencerons par la Fédération canadienne des producteurs de lait, puis nous entendrons la Commission canadienne du lait, pour terminer par le Conseil national de l'industrie laitière du Canada.

Les témoins ont tous accepté de nous faire d'abord leur exposé, après quoi les membres du comité pourront leur poser des questions.

On me dit que les témoins ne sont pas tous arrivés. Je vois. Mais s'ils ne sont pas encore arrivés, c'est sans doute parce qu'ils ne pourront se présenter à la séance du comité, mais ils arriveront peut-être plus tard.

Monsieur Hedley, c'est vous qui ouvrez le bal. Bienvenue au comité.

M. Douglas Hedley (directeur général, Direction du rendement et de l'analyse du secteur, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Merci, monsieur le président.

J'ai l'intention de vous donner un bref historique des subventions laitières du gouvernement fédéral aux producteurs de lait et de crème de transformation. Pour vous aider, nous vous avons apporté un jeu de diapositives ainsi que des feuilles de données auxquelles je me reporterai au cours de mon exposé.

Le soutien fédéral pour le revenu des producteurs de lait et de crème de transformation remonte au moins à la Seconde Guerre mondiale et à l'époque du contrôle des prix. Ce soutien est réapparu dans les années 50 et 60 et a permis au gouvernement fédéral d'aider les producteurs de lait de transformation. Rappelez-vous cette période où les prix étaient extrêmement bas et le marché considérablement déréglé.

En effet, pendant toutes ces années, les producteurs de lait de transformation faisaient face à d'énormes difficultés. Leur production servait à fabriquer des produits laitiers entreposables, tels que le beurre et le fromage, qui étaient commercialisés sur des marchés à concurrence internationale. Le rendement par unité de ces produits était considérablement plus faible que celui du lait de consommation, leur qualité laitière était moindre et leur marché était parfois excédentaire à cause de la présence des excédents du marché de lait de consommation, qui faisait l'objet, quant à lui, de plans de commercialisation imposés par les provinces.

Entre 1970 et 1974, les offices et agences des provinces adhéraient à un plan national de commercialisation du lait qui prévoyait la gestion de l'offre du lait de transformation, rendue possible par l'adoption en 1966 de la Loi sur la Commission canadienne du lait et par le démarrage en 1967 de cette même commission.

Pour encourager les provinces à y adhérer, le gouvernement fédéral étendait sa subvention laitière au lait de transformation produit dans les fermes laitières de la province dès que cette dernière annonçait son intention.

Au cours de la crise des protéines en 1973-1974, le gouvernement fédéral a augmenté le taux de ses subventions de façon considérable pour permettre aux producteurs de tenir le coup devant l'inflation et devant la baisse de l'approvisionnement laitier. En avril 1975, le gouvernement fédéral annonçait une politique laitière à long terme. Que je sache, c'était la première fois que l'on utilisait cette expression pour offrir une période de stabilité à l'industrie du lait de transformation. Cette politique a eu pour conséquence de geler le taux de la subvention à 6,03 $ l'hectolitre ou à 2,66 $ les cent livres, pour ceux d'entre vous qui s'en souviennent.

.0910

Autre élément de la politique: on utilisait une formule d'ajustement du revenu qui mesurait le changement des coûts dû à l'indexation et permettait de rajuster plusieurs fois par année au besoin le revenu cible du lait de transformation pour refléter le changement des coûts survenu pendant la période. Rappelez-vous qu'à l'époque la subvention représentait 24 p. 100 du revenu cible, soit environ le quart de ce que l'agriculteur laitier tirait de son lait de transformation. Chaque fois que l'on convenait d'un changement de revenu cible, les prix de soutien auxquels la Commission canadienne du lait achetait le beurre et la poudre de lait écrémé étaient modifiés pour refléter ce changement, tandis que la subvention restait fixe.

La subvention est payée pour les besoins canadiens, c'est-à-dire que l'on mesure la quantité de lait de transformation nécessaire par année pour approvisionner les Canadiens, tout en tenant compte des importations réglementées de matière grasse. La subvention est versée directement aux producteurs de lait et de crème de transformation par le gouvernement fédéral, sur une base mensuelle. La subvention est calculée en fonction de la matière grasse, évaluée à partir d'un hectolitre standard de lait de transformation contenant 3,6 kilos de matière grasse par hectolitre. À la fin de l'année laitière, les paiements sont rajustés pour refléter la mesure réelle des besoins intérieurs pour l'année qui se termine.

De 1979 à 1986, la subvention fut aussi payée sur 2,2 millions d'hectolitres produits pour l'exportation spéciale. La subvention est restée gelée de 1975 à 1992, au taux de 6,03 $ l'hectolitre. Toutefois, comme elle avait été gelée à une valeur nominale, la subvention laitière représentait de moins en moins les revenus que tiraient les producteurs de leur lait de transformation. Comme vous le voyez sur le tableau, la subvention, qui représentait 24 p. 100 du revenu cible en 1975, ne représentait plus que 12 p. 100 en 1990.

Depuis, le gouvernement a annoncé trois réductions dans sa subvention laitière pour tenir compte des modifications dans le financement de ses programmes. La première réduction du taux de subvention atteignait 10 p. 100, et est entrée en vigueur en août 1993, après avoir été annoncée en décembre 1992 par le ministre des Finances de l'époque, dans un énoncé économique.

Deux autres réductions de 15 p. 100 chacune ont ensuite été annoncées dans le budget de 1995 et devaient entrer en vigueur en août 1995, puis en août 1996. Enfin, dans son budget de 1996, le gouvernement annonçait l'élimination progressive de ce qui restait comme subvention par le truchement de cinq réductions égales du taux de subvention, tous les 1er août, dès 1997, c'est-à-dire dans 14 ou 15 mois. Par conséquent, la subvention sera complètement éliminée le 1er août 2001.

Le tableau suivant vous montre l'incidence que ces réductions auront sur le financement du gouvernement fédéral par année laitière. Jusqu'en 1994-1995, les chiffres représentent les dépenses réelles, alors que pour les années suivantes il s'agit de prévisions qui se fondent sur les besoins intérieurs de 42 millions d'hectolitres de lait de transformation. En pratique, les besoins intérieurs tendent à fluctuer autour de ce chiffre, et c'est pourquoi nous l'avons utilisé comme chiffre de base dans nos prévisions.

Le budget de 1996 pose à l'industrie laitière le problème de la fixation des prix dans un contexte de réduction du taux de subvention. J'ai donc inclus dans mes notes quelques informations sur les décisions prises par la Commission canadienne du lait en matière de prix les deux fois où l'on a mis en vigueur jusqu'à maintenant la réduction du taux de subvention. Les tableaux vous montrent que dans chaque cas l'augmentation du revenu que le producteur attendait de la vente de son beurre et de sa poudre de lait écrémé sur le marché était plus élevée que la réduction du taux de subvention. On peut donc conclure que les producteurs n'ont pas eu à souffrir directement dans ces deux cas de la réduction du taux de subvention.

.0915

Dans la foulée de l'annonce du budget de 1996, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, l'honorable Ralph Goodale, annonçait ce qui suit:

Le ministre a demandé à son secrétaire parlementaire, M. Jerry Pickard, de mener des consultations en vue de l'élaboration d'une politique laitière à long terme. M. Gilles Prégent, président de la Commission canadienne du lait, et moi-même formons équipe avec lui.

En prévision de ces consultations, la Commission canadienne du lait et le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire préparent un document d'information que nous comptons envoyer d'ici un jour ou deux à tous les intervenants, accompagné d'une lettre de M. Pickard dans laquelle il demandera à tous les intéressés de lui faire part de leur opinion sur l'élaboration de cette politique laitière, depuis son annonce dans le budget.

Monsieur le président, voilà tout ce que j'avais à dire pour l'instant. Je répondrai avec plaisir aux questions des membres du comité au moment voulu.

Le président: Merci de votre exposé, monsieur Hedley.

Je crois que M. Balcaen, vice-président de la Commission canadienne du lait, a maintenant quelques brefs commentaires à faire.

M. Louis Balcaen (vice-président, Commission canadienne du lait): Merci, monsieur le président. Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre part à vos discussions de ce matin. Comme vous l'avez annoncé, je serai bref.

Il serait peut-être bon de décrire aux membres du comité le rôle que joue la commission, étant donné qu'il y a différents intervenants dans le secteur laitier. Il est parfois difficile de savoir qui fait quoi.

La Commission canadienne du lait est une société d'État fédérale qui a été créée en 1966. Parmi ses grandes attributions, elle fixe à l'échelle nationale les prix cibles pour les producteurs de lait de transformation ainsi que les marges des transformateurs, et elle fixe aussi les prix de soutien du beurre et de la poudre de lait écrémé.

Elle a aussi le rôle important d'éliminer les surplus de production du marché, et elle le fait en coopération avec le secteur privé - des sociétés privées et des coopératives. Bien des gens ne le savent pas, mais nous nous occupons assez activement de la planification des exportations et de la suppression des surplus, étant donné que nous vendons du beurre, de la poudre de lait écrémé, du fromage et de la crème glacée à plus de 35 pays.

La commission administre aussi le versement de subventions fédérales aux producteurs de lait, comme l'a dit M. Hedley, et elle réalise différents programmes au nom du secteur laitier. Un des grands rôles de la commission consiste en fait à être un des grands modérateurs de l'industrie dans différentes tribunes, et je pense surtout à son rôle à la présidence du Comité canadien de gestion des approvisionnements de lait, le CCGAL. À ce titre, elle supervise l'exécution du plan national de commercialisation du lait, qui est une entente fédérale-provinciale régissant le programme de gestion des approvisionnements de lait au Canada.

Ce comité se réunit tous les deux ou trois mois. Il examine les marchés et la production requise, fixe des quotas le 1er août, et les réexamine au cours de l'année. Et, bien sûr, les offices du lait provinciaux, comme les Producteurs laitiers de l'Ontario et la Fédération canadienne des producteurs de lait au Québec, veillent à attribuer à leurs propres producteurs la part du quota qui revient à chacune de leurs provinces.

.0920

Le Comité canadien de gestion des approvisionnements de lait est un groupe d'une quarantaine de personnes qui représente des producteurs, des transformateurs et les gouvernements de chacune des provinces, à l'exception de Terre-Neuve. À la table, nous avons aussi trois organisations nationales qui ont un statut d'observateur: les Producteurs laitiers du Canada, le Conseil national de l'industrie laitière du Canada et l'Association des consommateurs du Canada.

La commission se compose de M. Gilles Prégent, président-directeur général, qui n'a pas pu venir avec nous aujourd'hui. M. Prégent est avocat et ancien président de la commission de surveillance au Québec.

J'ai le plaisir d'être accompagné aujourd'hui par mon collègue, Alvin Johnstone, de Red Deer. Alvin est l'ancien directeur général du Central Alberta Dairy Pool, coopérative albertaine qui a fusionné avec d'autres coopératives de l'Ouest pour former DairyWorld. Alvin est comptable.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le président, je suis vice-président de la Commission canadienne du lait, et je suis un producteur laitier ainsi qu'un céréaliculteur du sud-est du Manitoba.

Je sais que cette séance a pour but d'examiner les préoccupations que soulève la suppression des subventions du secteur laitier. Je n'ai pas grand-chose à ajouter, étant donné que ce n'est pas une décision de la commission, bien que notre président, de concert avec M. Hedley et le président, ait mené des consultations assez approfondies auprès du secteur et ait par la suite présenté leur avis au gouvernement.

Je m'en tiendrai à cela. Je suis prêt à répondre aux questions qu'on voudra me poser plus tard. Merci.

Le président: Merci, monsieur Balcaen.

M. Rivard est président de la Fédération canadienne des producteurs de lait. Soyez le bienvenu au comité, monsieur Rivard.

[Français]

M. Claude Rivard (président, Fédération canadienne des producteurs de lait): Bonjour, monsieur le président, mesdames, messieurs.

Au nom des producteur laitiers, je tiens à vous remercier de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui devant votre comité pour aborder cette question critique qu'est le paiement des producteurs, un paiement direct.

Dans le cadre de la Conférence annuelle des producteurs laitiers du Canada sur la politique laitière, en janvier 1996, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, M. Goodale, a signalé son intention de rétablir une politique laitière à long terme au Canada pour redonner une certaine stabilité au contexte politique dans lequel l'industrie évolue.

Après la rencontre, le ministre a invité le conseil exécutif des PLC à poursuivre les discussions avec lui sur la question du paiement direct pour le lait de transformation, sans porter atteinte à la position des producteurs laitiers du Canada.

Nous avons accepté cette invitation, mais il faut bien comprendre que les producteurs ont de sérieuses difficultés à faire le lien entre les messages de libéralisation du commerce, de compétitivité accrue et d'orientation vers l'exportation, et plusieurs autres messages discordants qui sont véhiculés par le gouvernement d'une part, et d'autre part sa tendance à retirer son soutien financier aux industries agricoles beaucoup plus rapidement que nos partenaires commerciaux, entre autres les États-Unis et l'Europe.

À titre d'exemple, en vertu du dernier projet de loi agricole aux États-Unis, ce qu'on appelle communément le Farm Bill, les dépenses fédérales consacrées à l'agriculture diminueront d'environ 23 p. 100 au cours des sept prochaines années, ce qui portera le soutien financier gouvernemental à un total de 44 milliards de dollars.

Au Canada, le gouvernement fédéral réduisait déjà les fonds publics destinés à l'agriculture de 21,5 p. 100 entre 1995 et 1997-1998, les portant à 1,628 milliard de dollars.

Donc, d'ici sept ans, lorsque les États-Unis auront abaissé progressivement leurs subventions à 44 milliards de dollars, leur agriculture continuera de profiter d'un niveau de soutien trois fois supérieur à celui qui est déjà annoncé au Canada, et dans un rapport de 10 pour 1.

Puisque le gouvernement fédéral s'attaquera inévitablement au paiement direct dans le cadre de son processus budgétaire, le conseil exécutif s'est dit prêt à prendre les mesures nécessaires qui ont été communiquées dans une lettre adressée au ministre le 13 février 1993.

.0925

Premièrement, les producteurs laitiers s'engageaient à rechercher l'appui du conseil d'administration de notre organisation afin d'en arriver à une élimination progressive du paiement direct du gouvernement fédéral sur une période de cinq ans, en contrepartie d'un engagement de la part du gouvernement fédéral que cette réduction se répercute totalement sur le prix du marché.

Deuxièmement, ils s'engageaient à obtenir du conseil d'administration un mandat pour amorcer de toute urgence les discussions avec le conseil d'administration du Conseil national de l'industrie laitière du Canada pour ouvrir l'entente de Saint-Sauveur et déterminer comment l'élimination pourrait être compensée par les prix du marché de la façon la moins perturbatrice possible pendant la période visée.

Troisièmement, il s'agit d'élaborer avec les transformateurs une proposition de politique laitière à long terme en y traitant aussi de la question de l'élimination des paiements directs, qui vous serait soumise dès que possible.

Au moment du dépôt du budget en mars 1996, le gouvernement a annoncé une élimination progressive du paiement direct échelonnée sur une période de cinq ans, à compter du 1er août 1997. Les initiatives décrites dans la lettre au ministre ont alors été mises en branle. Malheureusement, la réunion mixte tenue par les producteurs laitiers du Canada et le Conseil national, les 6 et 7 mai 1996, n'ont débouché sur aucun accord concernant la mise en oeuvre d'une politique laitière à long terme.

La question de recouvrer totalement du marché le revenu perdu à la suite de la réduction du paiement direct était au coeur du débat. La question de recouvrement du marché revêt une importance fondamentale pour les producteurs laitiers du Canada, et le ministre l'a reconnu dans sa volonté d'instituer une nouvelle politique laitière à long terme.

Une telle politique est essentielle à l'industrie puisqu'elle contribuera à rendre l'avenir plus prévisible pour les producteurs. Les PLC regrettent que le conseil d'administration du Conseil national de l'industrie laitière n'ait pu appuyer l'élaboration d'une politique laitière à long terme. Les PLC ont néanmoins l'intention de poursuivre l'élaboration de cette politique directement avec le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Dans ce contexte, voici la position des producteurs laitiers du Canada face à l'annonce de l'élimination échelonnée sur une période de cinq ans du paiement direct pour le lait de transformation.

Le paiement direct étant une subvention à la consommation, toute perte de revenu résultant de sa réduction doit être recouvrée du marché, bien sûr. Échelonné sur une période de cinq ans, le recouvrement total nécessiterait une hausse du prix du lait de transformation d'environ 1,3 à 1,4 p. 100 par année. Je vous ferai remarquer que, même avec les hausses croissantes des prix destinées à recouvrer les coûts plus élevés engagés par les producteurs et les transformateurs au cours de la période, cela resterait toujours nettement en deçà du taux d'inflation.

Le recouvrement total de la réduction du paiement direct aurait peu d'influence sur la demande du marché. Les producteurs estiment qu'en investissant davantage dans la promotion et la publicité, les producteurs réussiront à faire plus que simplement compenser les effets négatifs des hausses de prix sur le marché, et donc à favoriser la croissance de ces marchés.

Deuxièmement, en 1995, les producteurs et les transformateurs avaient convenu d'abandonner l'ajustement des prix au 1er août et de se limiter à une seule correction annuelle, le 1er février, à compter du 1er février 1998.

Même s'il était parfaitement au courant de cette entente, le gouvernement fédéral a annoncé que le paiement direct serait réduit à compter du 1er août 1997 pour une période de cinq ans. Cette décision menace l'entente de l'industrie et fait fi d'une solution pourtant adoptée au marché, qui est le report des ajustements pris au 1er février de chaque année.

Les producteurs laitiers du Canada demandent donc au gouvernement fédéral de reporter au 1er février 1998 la mise en vigueur de la réduction de la subvention de façon à ne pas perturber l'entente entre les producteurs et les transformateurs à laquelle était parvenue l'industrie laitière.

Troisièmement, on reconnaît depuis longtemps qu'il faut mettre en oeuvre des ajustements de prix de façon à accroître la valeur de la protéine. Si on transforme une réduction du paiement direct pour la matière première butyrique en hausse de prix de soutien pour la poudre de lait écrémé, on n'offre aux producteurs qu'un recouvrement partiel du revenu perdu à la suite de cette réduction.

Nous avons préparé une illustration de ce problème qui montre clairement que plus de 16 p. 100 des réductions actuelles ne seront pas récupérées du marché par les producteurs.

.0930

Les producteurs laitiers du Canada demandent donc que le recouvrement intégral des revenus perdus soit institué en même temps que la réduction de la subvention. Ainsi, une réduction du paiement de l'ordre de 76 cents, par exemple, tel qu'il est prévu par la décision du ministère des Finances sur une base de 50 cents l'hectolitre, nécessiterait l'équivalent d'un ajustement de 91 cents l'hectolitre au prix de soutien de la poudre de lait écrémé pour s'assurer que cela ait un effet neutre en termes de revenu des producteurs.

Les trois éléments dont je viens de vous parler constituent l'essentiel d'une politique relative à l'élimination du paiement direct pour le lait de transformation au cours des cinq ou six prochaines années.

Si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Rivard, pour votre exposé.

J'invite maintenant le Conseil national de l'industrie laitière du Canada. M. Kempton Matte, je crois, va prendre la parole. Soyez le bienvenu au comité.

M. Kempton Matte (président, Conseil national de l'industrie laitière du Canada): Bonjour, monsieur le président. Merci beaucoup.

Tout ce que j'aimerais faire ce matin, c'est exposer dans quel contexte le Conseil national de l'industrie laitière du Canada traite avec les producteurs et pourquoi ces relations ont une très grande incidence sur notre secteur.

Le Conseil national de l'industrie laitière du Canada est l'organisme qui représente les transformateurs de produits laitiers de toutes les provinces canadiennes. Il représente une industrie du secteur privé. Il représente de grandes entreprises comme de petites entreprises familiales. Il représente aussi des coopératives laitières, des grandes comme des petites. Collectivement, nos membres transforment plus de 95 p. 100 de tout le lait produit au Canada. Nous comptons quelque 25 000 travailleurs répartis dans 300 installations de production disséminées dans toutes les provinces du pays.

Notre position face à la suppression des subventions a été clairement exposée au cours du processus consultatif que vous avez mené, monsieur le président, quand nous avons indiqué que nous préférions nettement que les subventions demeurent. Nous n'estimions même pas que les fonds devaient être réattribués en fonction de leur utilisation courante, puisque nous estimions que l'usage qu'on en fait actuellement permet de tirer le meilleur rendement possible de l'investissement de ces fonds par le gouvernement fédéral.

Toutefois, il y a eu un processus de consultation et de négociation entre les producteurs laitiers et le gouvernement fédéral, et on en est arrivé à une entente. Après cette entente, une tierce partie est intervenue, et on lui a demandé de veiller à la mise en application de ladite entente. Cette tierce partie était le secteur de la transformation des produits laitiers, par l'intermédiaire du Conseil national de l'industrie laitière du Canada.

Je n'arrive pas du tout à saisir comment il se fait que le ministre et les producteurs laitiers du Canada sont parvenus à s'entendre sur un programme pour récupérer sur le marché la totalité des subventions supprimées sans inclure le Conseil national de l'industrie laitière et ses membres. À ce que je sache, le ministre ne contrôle pas le marché, pas plus que les producteurs laitiers du Canada. Bien sûr - il faut bien être réaliste et honnête - les membres du Conseil national de l'industrie laitière ne le contrôlent pas non plus.

La grande question qui se pose ici, c'est de voir comment on peut indemniser les producteurs laitiers à partir d'un marché qui n'accepte pas les hausses de prix, dans un contexte où un secteur de l'industrie qui est et demeure assujetti au marché, et qui ne le domine pas, est censé hausser ses prix de façon générale pour rééquilibrer la situation sur une période de cinq ans sur un marché où les prix suivent constamment une tendance à la baisse. Que l'industrie alimentaire lutte aujourd'hui contre ces tendances pour garantir aux producteurs qu'ils ne ressentiront pas du tout les effets de la suppression des subventions, cela n'a à mes yeux aucun sens et cela n'avait aucun sens pour les administrateurs du Conseil national de l'industrie laitière.

Ils ont collectivement proposé que nous respections l'entente de Saint-Sauveur; que nous récupérions et acceptions la compression initiale, actuellement prévue pour août 1997, en février 1998; et qu'à ce moment-là nous ajoutions, en dépit du risque, un montant pour indemniser les producteurs laitiers au titre de certaines des augmentations de coûts conséquentes, et que nous essayions dans un premier temps d'agir ainsi sur le marché. Après quoi, nous pourrions établir un comité de producteurs laitiers et de transformateurs de produits laitiers qui trouveraient une formule - ce ne sera pas facile, mais je suis sûr que c'est possible - qui tiendrait compte des facteurs du marché. Je ne parle pas que de l'indice des prix à la consommation; je parle de choses comme les tendances relatives aux prix du marché, les niveaux de revenu des consommateurs, les niveaux d'emploi et la capacité de payer. Le comité tiendrait compte de ces facteurs dans l'application d'une formule qui aiderait le groupe à présenter une recommandation sur les ajustements qu'on pourrait apporter à partir de là en matière de fixation des prix.

.0935

Malheureusement, cette approche n'a pas été jugée acceptable par les producteurs laitiers parce qu'elle ne contenait pas une garantie quinquennale d'augmentation des prix, si bien qu'on en est arrivé à une impasse.

Je n'ai pas de solution magique à offrir, mais je vous dirai qu'il est ici question de quelques aspects tout à fait fondamentaux. D'abord il y a toute cette question de l'intervention d'une tierce partie dans une entente bipartite, qui a un rôle clé à jouer dans la mise en application de cette entente, et cela sans avoir même participé aux discussions.

Deuxièmement, il y a toute cette question qui a été soulevée dans les observations de M. Rivard au sujet des facteurs que constituent les matières grasses, les protéines, et les solides non gras du lait dans l'établissement des prix, et comment cela influe sur certains facteurs de l'industrie de la transformation des produits laitiers. Depuis plusieurs années maintenant, compte tenu du fait que les producteurs laitiers se plaignent qu'ils sont lésés parce que l'industrie répond aux attentes des consommateurs, qui demandent des produits à faible teneur en gras, chaque fois qu'on a imposé une hausse de prix, c'était sur les solides non gras du lait - chaque fois.

Pour un fabricant de yogourt au Canada, une augmentation de prix de 2 ou 3 p. 100 imposée à ses collègues de l'industrie équivaut dans son cas à une augmentation de 9, 10 ou 11 p. 100. Ce que nous faisons, littéralement, c'est étrangler les fabricants de produits à faible teneur en gras, et en particulier les fabricants de yogourt. Cette industrie était en croissance très rapide, mais celle-ci a nettement ralenti parce qu'elle doit subir ces hausses de prix.

Voilà donc une autre question beaucoup plus complexe que cette idée simple et superficielle qui veut qu'avec l'augmentation de la demande pour les produits à faible teneur en gras, il nous faut mettre de plus en plus l'accent sur le lait écrémé en poudre par opposition à la matière grasse. Cette situation a une incidence qui dépasse largement le niveau de production primaire. Cela ne change en rien le fait que les producteurs laitiers ont parfaitement raison dans leurs revendications. Je tiens toutefois à souligner qu'à l'autre bout de la chaîne de production on a également des revendications légitimes.

Il y a une autre question fondamentale qui doit tous nous préoccuper: qui s'inquiète du consommateur dans cette affaire? Au Conseil national de l'industrie laitière nous avons déclaré publiquement, à de nombreuses reprises, que nous appuyons la gestion des approvisionnements, que nous l'avons fait par le passé et que nous continuons à le faire. Nous avons toutefois signalé que dans un régime de prix administrés nous ne pouvons verser que l'équivalent de ce que nous pouvons obtenir sur le marché. Nous ne pouvons pas en mettre plus. À notre avis, on ne tient pas suffisamment compte de ce fait. La capacité de payer du consommateur est l'élément clé. Or, en l'occurrence, je me permets de vous faire remarquer que les seuls joueurs sont les transformateurs de produits laitiers et leurs clients.

Il y a donc des recherches poussées à faire et une longue réflexion sur la façon de mettre en oeuvre ce programme particulier - si nous voulons éviter que tous les intervenants de l'industrie laitière n'en souffrent.

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Il serait facile de dire simplement: nous allons demander au ministre de donner l'ordre à la Commission canadienne du lait d'ajouter tout simplement le montant de la subvention aux prix de soutien des produits laitiers - aux termes de la politique actuelle, tout irait au lait écrémé en poudre - et de modifier le prix indicatif, que les offices provinciaux pourraient alors ajuster pour chaque catégorie de prix. On pourrait fort bien procéder ainsi. Toutefois, on constaterait probablement que pour chaque cent d'augmentation du prix on accuse une perte comparable de volume, et donc une réduction de l'industrie. Qui gagne? Personne.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Matte.

Les exposés étant finis, nous allons maintenant passer aux questions et commentaires en commençant par M. Landry, M. Easter et M. Hoeppner.

[Français]

M. Landry (Lotbinière): Je remercie les témoins d'avoir comparu ce matin.

Pour commencer à parler de la subvention laitière, prenons la page 4. Quand je regarde la liste des nouveaux taux de subvention qui va mener à l'abolition totale de la subvention ainsi que le document que M. Rivard a déposé ce matin, où il dit que les Américains vont avoir un soutien trois fois supérieur à celui du Canada, je me pose des questions que je vais d'ailleurs vous poser aussi. Est-ce que le Canada va être capable d'entrer en concurrence avec ce pays-là? Deuxièmement, est-ce qu'on retrouve cette équité entre le Canada et les États-Unis pour un autre marché? Troisièmement, quel est le pourcentage de nos exportations?

[Traduction]

M. Hedley: Les modifications apportées dans le budget aux subventions laitières n'ont aucune incidence sur le volume de commerce entre le Canada et les États-Unis. Ces marchés sont plutôt distincts. Le marché des importations au Canada en provenance notamment des États-Unis augmentera d'environ 3 à 5 p. 100 jusqu'à la fin de la décennie, mais le budget et les changements au niveau des subventions qui s'y trouvent n'ont aucune incidence sur ce commerce ou sur le volume de ce commerce.

Par conséquent, il est très difficile de comparer le Canada et les États-Unis en ce qui concerne l'avoir, le niveau des subventions ou quoi que ce soit. Ce que font les États-Unis à l'heure actuelle n'a vraiment aucune incidence sur les marchés au Canada.

[Français]

Le président: Monsieur Rivard.

M. Rivard: Premièrement, au sujet de la première question concernant la compétitivité, il faut savoir que, depuis les ajustements apportés au Canada pour le GATT, les producteurs, par le biais de la politique nationale et des négociations interprovinciales, ont fait des remarques.

En effet, lorsqu'on n'est pas soi-même transformateur dans certains marchés qui sont à risque par rapport à la concurrence des importations, par exemple dans le cas d'un produit d'importation américain ou même de certains marchés où on exporte au Canada, le coût est entièrement assumé par les producteurs laitiers qui vendent à des prix réduits. Dans la majeure partie des cas, l'écart est de l'ordre de 30 à 40 p. 100 avec le prix canadien. Le revenu des producteurs canadiens est donc complètement affecté par ce système.

Je voudrais ajouter que, bien sûr, pour être conforme aux règles du GATT, il n'y a pas de subventions sur ces exportations. Je pense que mon document illustre bien ce qui ne va pas au niveau de la compétitivité.

On demande à des producteurs ou à une industrie d'entrer en concurrence avec le Trésor américain. Je suis obligé de vous répondre que, malheureusement, on ne peut pas faire face à l'État américain ou à la CEE, parce qu'il faut bien constater que le terrain de jeu n'a pas été nivelé.

M. Landry: Quel est le pourcentage de nos exportations?

Le président: Monsieur Matte, allez-y.

M. Matte: C'est environ 5 p. 100 en ce moment, mais c'est un maximum. Normalement, c'est 2 ou 3 p. 100.

M. Landry: Merci.

Le président: C'est tout?

[Traduction]

Monsieur Easter.

.0945

M. Easter (Malpèque): J'ai une question semblable. À la lumière de la diminution des subventions et dans le cadre des négociations avec l'industrie visant à déterminer comment on peut compenser certaines des pertes des producteurs, où en sommes...?

La Fédération canadienne des producteurs de lait le mentionne dans son mémoire, et vous venez tout juste de dire que nous n'avons pas les mêmes chances que les Européens et les Américains. On ne cesse de nous le répéter ici. Notre comité devra peut-être même faire remarquer que le ministère des Finances, par son attitude enthousiaste à l'égard de la réduction du déficit, ne laisse qu'une très petite marge de manoeuvre au ministre de l'Agriculture, qui veut que notre industrie soit capable de concurrencer le reste du monde au niveau des prix.

Nous mettons l'accent sur les exportations. M. Matte a fait valoir que les transformateurs doivent être en mesure de vendre leur produit et que les consommateurs doivent pouvoir l'acheter. Les producteurs doivent pouvoir eux aussi concurrencer efficacement le reste du monde.

Monsieur Hedley, avez-vous des chiffres que vous pouvez déposer, maintenant ou plus tard, qui indiquent où nous nous situons par rapport à nos concurrents dans le respect des obligations du GATT? À quel degré sommes-nous en deçà du seuil établi par le GATT, comparativement aux Américains? Où en sommes-nous en ce qui concerne les mesures ambrées, vertes et rouges du GATT? Il nous faut cette information.

Monsieur Rivard, où en sommes-nous?

Monsieur Matte, vu les modifications apportées au régime de gestion des approvisionnements, etc., comment nos transformateurs se comparent-ils à ceux des États-Unis lorsqu'il s'agit de vendre aux consommateurs au Canada?

Le président: Je pense que vos trois questions s'adressaient d'abord à M. Hedley; donc, nous allons entendre les réponses de M. Hedley, ensuite de M. Rivard et enfin de M. Matte.

M. Hedley: Je n'ai pas tous ces renseignements ici avec moi aujourd'hui, mais je serai heureux de vous les faire parvenir.

Le président: Très bien.

M. Easter: J'ai autre chose à ce sujet, monsieur le président.

L'autre facteur dont il faut tenir compte, mais que l'on oublie souvent - et nous l'avons mentionné au comité aussi - c'est l'adoption du recouvrement des coûts. Comme nous l'avons déjà dit, au sein du ministère de l'Agriculture, dans le cadre de la réduction du déficit, il y a 42 programmes de recouvrement des coûts. S'ajoutent à cela les programmes de recouvrement des coûts du ministère des Pêches et des Océans, de Douanes et Accise, etc.

C'est un recouvrement des coûts généralisé. Je ne critique pas le gouvernement pour cette initiative, mais il faut bien en comprendre les répercussions. Si le ministère de l'Agriculture a plus que sa part du fardeau, alors il faut faire quelque chose.

J'aimerais que vous teniez compte aussi de ces facteurs. Les Américains n'ont pas adopté comme nous le recouvrement des coûts. Ils ne réduisent même pas leur régime de subventions comme nous. Donc, j'aimerais savoir où cela nous mène aussi, monsieur Hedley.

Excusez-moi, monsieur le président.

M. Hedley: Monsieur le président, je pense que le ministère a déjà accepté de vous fournir ces renseignements.

Le président: En effet.

[Français]

M. Rivard: En ce qui concerne la compétitivité, il faut bien remarquer l'écart des prix. Il y a plusieurs facteurs qui influencent cet écart entre le Canada et les États-Unis, comme les politiques monétaires et le taux de change. On a des tarifs qui nous protègent, mais il faut savoir que les résultats d'une enquête d'opinion Canada-US sur ce dossier devraient sortir d'ici l'été. Il est difficile de faire des comparaisons en termes de compétitivité parce que ce sont deux pays différents. Actuellement, par exemple, les Américains sont en train de mettre en place des programmes pour soutenir leur industrie au niveau des exportations. Que fait le gouvernement ici? Je vous ai dit que le gouvernement canadien mettait zéro cent en termes de subventions à l'exportation! Je ne dis pas que le gouvernement devrait investir de l'argent dans cela, mais on devrait étudier les politiques que le GATT nous permet en termes de programmes «verts» ou «ambres» et la façon de les mettre en place.

Je trouve cela très anormal. D'autre part, pour comprendre le secteur laitier, il est important de savoir que, de 1984 à 1994, le prix du lait payé aux producteurs a augmenté de 17,1 p. 100, alors que les prix des produits laitiers ont augmenté de 41,5 p. 100 pour les consommateurs durant la même période. Vous voyez donc qu'on est nettement en deçà de l'inflation et que nous avons aussi, comme les transformateurs, le souci de nous assurer que nos ventes progressent.

À mon avis, nous avons agi comme secteur responsable. La différence en termes de compétitivité, c'est que les producteurs assument tous les coûts de la compétitivité entre les prix canadiens et américains au moyen de prix différenciés.

.0950

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, on vend à nos transformateurs depuis le 1er août de cette année. Pour donner un exemple, si les prix du marché qui sont en compétition avec les prix américains s'affaissent, ce sont les producteurs qui assument cela selon une formule préétablie.

Je vous donne un exemple. Prenons une production qui est prévue pour aller sur certains marchés d'exportation. On a actuellement une marge canadienne d'environ 6 p. 100 qui représente en fait deux marges, une de 4 p. 100 et l'autre de 2 p. 100. Si les prix internationaux fluctuent, si les stocks sont en excédent, ce sont les producteurs qui assument ces écarts-là.

Concernant la compétitivité, vous avez certainement remarqué que les prix des céréales ont augmenté de façon très marquée. On parle, depuis un an, d'une augmentation d'environ 40 p. 100. Cette semaine, on a même parlé de 45 p. 100.

Je vous donne quelques chiffres. Il y a un an, on pouvait se procurer du maïs à 120 ou 125 $ la tonne, et présentement il est à 375 $ au Québec. Et en ce qui concerne le prix du lait, la formule de récupération des prix ne permet pas de récupérer ça toutes les semaines de façon instantanée.

Les producteurs laitiers voudraient que le gouvernement du Canada prenne ces éléments en charge. S'il se retire, ceux-ci espèrent recevoir une contrepartie qui leur permettra de rester en affaires.

Il y a un autre élément qui a influencé le coût de production. On vend, par exemple, des animaux qui ont été réformés, et le prix du boeuf a chuté de façon très très marquée. On doit considérer cela comme une baisse de revenu. Les producteurs doivent l'assumer sans pouvoir la récupérer par le marché.

Je ne dis pas que l'on doive contrebalancer cette situation de façon instantanée, mais ce sont les problématiques avec lesquelles les producteurs doivent vivre. On veut agir de façon responsable, mais on s'attend à ce que le gouvernement agisse aussi de façon responsable. Il nous demande d'être compétitifs sur les marchés internationaux, mais on entend un double et parfois un triple langage qui n'est pas du tout cohérent, malheureusement.

[Traduction]

Le président: Monsieur Matte.

M. Easter: Tout ce que vous avez à faire, c'est vendre, Kempton. Aucune difficulté.

M. Matte: Je vais me contenter de répondre à votre question.

Des voix: Oh, Oh!

M. Matte: En fait, ce que vous demandez au sujet de la compétitivité du secteur de la transformation au niveau de la clientèle est un élément clé dont se préoccupe vraiment notre organisme.

Parce qu'on entendait toutes sortes d'histoires sur nos usines de transformation, que certains prétendaient en décrépitude et presque démodées sur le plan technique, et parce que d'autres prétendaient le contraire, que nous étions rapides dans notre adaptation aux nouvelles technologies, l'an dernier notre conseil a entrepris de mener une étude comparative sur le secteur de la fabrication de la crème glacée. L'étude s'est terminée l'automne dernier et a révélé, incontestablement, que dans le secteur de la crème glacée, nos usines sont certainement compétitives avec celles des États-Unis.

L'étude a toutefois révélé quelques faiblesses auxquelles le secteur de la crème glacée s'attaque. En effet, nous n'avons pas les grandes économies d'échelle et les usines de taille considérable qui existent dans certains cas aux États-Unis. Par ailleurs, nous avons des usines très modernes, une gestion très compétente et un coût de transformation tout à fait raisonnables grâce à des salaires et à une fiscalité des plus compétitifs. Il est ressorti de cette étude de nombreux chiffres qui en ont surpris beaucoup.

Par la suite, notre conseil s'est penché de nouveau sur la question et s'est demandé: s'il y avait ouverture du marché au-delà de ce qui est prévu déjà aux termes des dispositions de l'Organisation mondiale du commerce, quel secteur serait le plus durement touché? Tous étaient d'accord pour penser que les Américains, tout particulièrement, voudraient probablement exporter du fromage au Canada, et donc nous avons entrepris une étude comparative sur l'industrie du fromage. L'étude est presque terminée. Nous nous attendons à avoir les résultats à la mi-juillet, et nous saurons alors exactement dans quelle situation se trouve l'industrie du fromage.

.0955

Nous envisageons actuellement la possibilité - notre problème, comme pour tout le monde, c'est l'argent - de procéder à une étude comparative de l'industrie du yaourt, qui, nous le savons, éprouve de graves problèmes au niveau du coût de ses intrants en lait cru. Nous voulons savoir si les usines sont suffisamment fortes, en supposant que le prix du lait soit concurrentiel et qu'il y ait du lait liquide.

Pour l'instant - les résultats préliminaires pour le fromage le confirment - le secteur de la transformation semble être concurrentiel. Le principal problème qui se pose, pour ce qui est de livrer un produit fini à ce que nous appellerions un prix nord-américain concurrentiel, c'est le problème que nous sommes en train de discuter, le problème plus large du revenu des producteurs.

Le lait est notre principal coût, et son prix est plus élevé que le prix américain. Si le point de repère est les États-Unis, il n'y a pas de mystère. Ce n'est pas dû au fait que l'industrie est inefficace ou à un problème de ce genre. Notre coût de base est élevé; c'est tout.

Si les barrières tombent et que certains producteurs décident d'adapter leurs pratiques et procédés de production - peu importe ce qu'ils font sur la ferme - afin de faire face aux prix concurrentiels américains pour le lait cru, nous voulons savoir si nous sommes prêts et si nous pouvons livrer la marchandise. Nous sommes de plus en plus confiants que nous pourrions faire face à la concurrence du point de vue de l'effet des coûts.

Le président: Monsieur Hoeppner.

M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Bienvenue au comité, messieurs.

J'ai entendu quelqu'un dire que nous exportons de 2 à 5 p. 100 de vos produits et que nous importons probablement la même quantité. Les Américains nous ont indiqué que des missiles Minuteman étaient braqués sur les producteurs céréaliers. Par quels missiles américains êtes-vous visés, en ce qui vous concerne?

M. Matte: C'est juste, monsieur Hoeppner. Nous avons entendu dire que des missiles sont braqués sur les producteurs céréaliers. Pour l'industrie laitière canadienne, les Américains ont recours aux universitaires.

Une des études les plus citées a été effectuée à l'Université de Philadelphie. Du moins, je pense que c'est l'Université de Philadelphie.

M. Hedley: De la Pennsylvanie.

M. Matte: Merci. Je savais que cela commençait par un «p».

On affirme qu'il y a un marché de 1 milliard de dollars en produits laitiers pour les Américains au Canada si ceux-ci veulent bien s'en donner la peine. Il en a été question aux réunions de la National Milk Producers Federation, aux États-Unis, et tout le monde s'est montré enthousiaste devant cette perspective.

Je peux vous dire que dans le cadre de mes fonctions j'ai eu l'occasion de participer à des réunions de conseils d'administration d'organismes de transformateurs américains et que leur connaissance du Canada dénote une ignorance sans bornes. C'en est désolant. Ils n'ont absolument aucune idée de ce dont ils parlent. Nous prenons leurs menaces de concurrence très au sérieux, parce que nous lisons beaucoup de choses à ce sujet, mais la situation est loin d'être simple.

Il y a autre chose. De façon générale, on admet que nos produits laitiers sont de meilleure qualité que les leurs. Nous détenons donc un avantage important. Cependant, nous devons vendre le produit à un prix concurrentiel; plusieurs consommateurs sont prêts à céder sur certains points pour faire face aux prix dans leur vie quotidienne.

M. Hoeppner: Je suis bien d'accord avec vous. Faisons-nous quelque chose pour contrecarrer cette propagande? D'après ce que je lisais dans un bulletin de la Colombie-Britannique intitulé The Dairyman, même l'industrie bancaire en Colombie-Britannique attaque, en particulier la Banque de Hongkong. Que faire devant un tel ennemi?

M. Matte: Il est très difficile de se défendre. Il faut voir également s'il convient de procéder publiquement ou entre organismes. Notre approche a consisté à intervenir lors des réunions auxquelles nous participons; nous profitons de ces occasions pour indiquer clairement que l'industrie canadienne n'est pas prête à lancer la serviette et à accueillir la concurrence à bras ouverts.

.1000

Malgré des déclarations enflammées, pour ce qui est des véritables plans de commercialisation, il est clair que les sociétés américaines se tournent vers le Mexique plutôt que vers le Canada. Sauf pour quelques sociétés des États du Nord qui connaissent mieux la situation et qui savent à quel point le marché est difficile, les laiteries américaines ne pensent même pas au Canada. Ce qui les intéresse, c'est le Mexique.

M. Hoeppner: Gagnerons-nous la bataille avec notre propre propagande?

M. Matte: Touchons du bois. Nous pensons au moins faire des progrès.

Le président: M. Rivard aimerait ajouter quelque chose.

[Français]

M. Rivard: Je vais un peu dans le même sens que M. Matte. Vous mentionnez la propagande, et je pense qu'il y a beaucoup de propagande aux États-Unis. L'étude de la Pennsylvanie est faite sur certaines bases qui ne sont pas très fiables en termes d'estimation des parts de marché qu'une province peut prendre, particulièrement en ce qui concerne la Colombie-Britannique ou le marché d'Ottawa. Pour le marché de Montréal, la part est moins grande. Quand on connaît les distances entre les frontières, on ne voit pas très bien où est la logique.

En ce qui concerne ce débat, il est important de dire, et le gouvernement canadien l'a démontré, qu'un livre a été signé de part et d'autre et qu'il doit être respecté. Je pense que nos chances sont bonnes dans ce dossier.

Vous mentionnez aussi les missiles. Bien sûr, il peut y avoir une contre-attaque. On a vu que les Américains commençaient à lancer de petits missiles contre la Chine. Il y aura peut-être certaines réactions entre les secteurs éventuellement. On sait que si les Américains étaient les gagnants dans ce dossier, et nous, les perdants, deux secteurs très névralgiques, les arachides et le sucre, seraient attaqués. Ils ont des quotas d'importation, tout comme nous, et des tarifs. Donc, je pense qu'il y aurait déduction. Je pense qu'il y aura des discussions. Pour le moment, il faut vivre une étape à la fois.

[Traduction]

M. Hoeppner: J'hésite à lire ceci seulement à cause de M. Easter. Il pourrait être fier de lui. Je vais quand même le lire. N'importe quel ignorant qui a la chance d'hériter de quelques centaines de milliers de dollars en terre et en équipement et qui est prêt à travailler à un salaire moindre que le salaire minimum, sans avoir droit à l'assurance-chômage, peut réussir comme agriculteur. Je pense que cela s'applique à presque tous les secteurs de l'industrie agricole.

Lorsque je rencontre mes producteurs laitiers - nous avons des discussions très franches - le sujet qui revient toujours sur le tapis, c'est le coût des quotas. Que devons-nous faire à cet égard? À peu près la moitié de l'avoir dans une ferme laitière de nos jours est dans la valeur du quota. Je pense qu'il faut faire quelque chose à cet égard de façon à ce que vous soyez protégés.

[Français]

M. Rivard: Je vais vous donner ma perspective avec toutes les limites qu'elle peut avoir. Au Canada, on a choisi un système qui s'appelle la gestion de l'offre et il faut l'adapter. Les producteurs ont choisi une façon de se répartir le marché entre eux qui s'appelle les quotas. Aux États-Unis, c'est un autre système. Dès que les stocks atteignent un certain niveau, le prix du lait est abaissé sans que le consommateur en profite. Il est important que les consommateurs canadiens soient au courant de ce système. À ce moment-là, c'est le plus fort qui l'emporte jusqu'à ce qu'il y ait un déséquilibre de l'industrie à travers les régions aux États-Unis. On n'a qu'à voir ce qui s'est passé dans le nord-est des États-Unis vis-à-vis du Midwest.

Au Canada, vous ne voyez pas la situation des producteurs. Vous ne voyez que ce qui paraît, c'est-à-dire un prix de quota de 40 ou 42 $ le kilo. On peut dire que c'est un investissement anticompétitif. Je ne dis pas qu'on ne s'interroge pas sur cette façon de faire. Il faut voir, tout d'abord, qu'il n'y a pas 2 p. 100 de la production qui se transfère sur une base annuelle de quotas. C'est donc minime.

Deuxièmement, les producteurs ont trouvé des façons de transférer des fermes. Si toutes les fermes devaient être transférées avec quota à valeur totale, il est clair que les agriculteurs ne pourraient plus survivre ni rester en affaires.

.1005

En analysant indirectement les chiffres de la société de financement fédérale et ceux du Québec, on peut voir que, généralement, les fermes incluant la valeur du quota sont transférées à environ 50 p. 100 de leur valeur lorsqu'il s'agit d'un transfert père-fils.

Lorsqu'il y a un transfert entre étrangers, les fermes sont transférées à environ 75 p. 100 de leur valeur totale incluant le quota. Pour donner un autre exemple, lorsqu'il y a un démantèlement de la ferme, on peut récupérer environ 90 p. 100 de sa valeur.

Chacun des secteurs de l'industrie se donne ce genre de règles économiques tout en tenant compte de la compétition. Il y a aussi des quotas d'usine quand il y a de l'achalandage, comme on dit. Je pense que ce n'est pas différent dans d'autres secteurs. Si vous achetez une franchise McDonald's, par exemple, tout dépendant de l'endroit où vous vous installez, il vous faudra considérer la population et demander un permis de taxi ou un permis de camionnage.

D'après moi, on n'est pas si différents des autres secteurs de l'industrie. Mais avec les règles que les producteurs se sont données, il faudra voir lequel d'entre nous va rester dans le secteur de la production.

[Traduction]

M. Hoeppner: Reprenez-moi si je me trompe, mais d'après ce que j'entends de mes producteurs laitiers le système de quotas a été instauré pour réglementer la production. C'est à la suite des manoeuvres politiques des provinces que les quotas sont devenus une valeur. Vous n'êtes pas les seuls responsables de cette situation. Les politiciens y sont pour quelque chose. Vous en convenez?

[Français]

M. Rivard: Vous avez raison, mais ce n'est pas uniquement les politiciens. Beaucoup de gens l'interprètent à leur façon, et je pense qu'on peut tous avoir un peu raison selon le point de vue que l'on a.

En ce qui concerne les quotas, c'est un quota global qui est émis au Canada, en tenant compte de la consommation canadienne et des niveaux d'exportation qui sont décidés. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous exportons actuellement, pour l'ensemble des producteurs, 6 p. 100 de la production.

Sept p. cent de notre production est destinée à des marchés d'exportation américains et autres. Nous avons aussi, bien sûr, une production excédentaire qui est écoulée sur le marché international pour laquelle il n'y a pas de quotas parce que c'est ce que l'on appelle l'excédent. Ce sont les producteurs qui assument ces coûts-là et qui sont soumis aux aléas du marché international.

[Traduction]

M. Hoeppner: Oui.

Le président: Monsieur Calder.

M. Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe): Je vais devoir m'asseoir avec vous et vous expliquer le système un de ces jours, Jake, parce que je sais que vous ne le comprenez pas.

Une voix: Avez-vous une semaine à votre disposition?

M. Calder: Je ne sais pas si j'ai autant de temps.

Le président: Je me demande si dans son esprit tous les politiciens se trouvent au Parlement. Il y en a quelques-uns ailleurs.

M. Calder: Messieurs, dans votre mémoire, vous indiquez que le U.S. Farm Bill réduira les subventions de 23 p. 100 au cours des sept prochaines années, mais que les États-Unis continueront de subventionner l'industrie trois fois plus que le Canada, compte tenu de leur population dix fois plus importante.

Monsieur Matte, vous avez mentionné notre secteur de la transformation, mais à cause du coût de la main-d'oeuvre, ce secteur est concurrentiel uniquement à cause de la faible valeur de notre dollar. Si les subventions américaines sont beaucoup plus élevées que les nôtres, sont-elles quand même considérées comme des mesures vertes dans le cadre du GATT? Si oui, pourquoi? Nous parlons ici d'une politique laitière à long terme. Avez-vous envisagé un système semblable au système américain? Est-ce seulement possible?

[Français]

M. Rivard: Au niveau des subventions, les chiffres sont là. On sait que le Farm Bill est à l'étude présentement et ne devrait pas tarder à être adopté aux États-Unis, mais vous ne pouvez pas contester leur niveau de subventions tant et aussi longtemps qu'ils ne l'auront pas réajusté. Nous allons, bien sûr, réévaluer s'ils s'ajustent, mais pour l'instant, il y a certainement de la place pour l'interprétation du niveau des subventions et de la façon dont elles sont appliquées.

Les Américains ont négocié avec la CEE ce que l'on appelle l'entente de Blair House; c'est une «boîte bleue» pour une période de sept ou neuf ans au cours de laquelle on peut accorder des subventions pour fins de restructuration. Nous savons donc qu'il vont utiliser cette règle pour redéployer leurs subventions et aider leurs producteurs.

La CEE va agir de la même façon. Certaines subventions ont été reconverties dans la «boîte bleue» et vont aider les producteurs à moderniser leurs exploitations.

Je vous rappellerai qu'à part le subside que nous avons en ce moment pour les producteurs, aucune autre subvention n'a été accordée par le gouvernement canadien aux producteurs laitiers, conformément aux accords du GATT.

.1010

On avait fait une évaluation en 1992 et on avait pu faire une liste de 112 programmes de subventions américaines diverses. À notre avis, avec les règles que nous avions à l'époque, il y aurait eu place à certaines représailles. Je pense que le gouvernement doit réévaluer avec nous la façon dont chacun des pays opère en fonction de ses engagements; il faut voir s'il les respecte ou pas.

[Traduction]

M. Calder: Je pense que Kempton...

Le président: S'agit-il d'une corde sensible, Kempton?

M. Matte: Non. Je veux simplement indiquer que les études comparatives que nous avons effectuées, de même que celle que nous effectuons actuellement, tiennent compte des taux de change. Je vous ferai parvenir l'étude comparative sur la crème glacée, monsieur le président. Je vous acheminerai également l'étude comparative sur le fromage lorsqu'elle sera publiée.

M. Calder: Inversement, si la valeur de notre dollar augmente, c'est un autre facteur qui empêche notre secteur de la transformation d'être concurrentiel par rapport aux autres pays, n'est-ce pas?

M. Matte: Il ne fait aucun doute que vendre sur un autre marché est plus facile lorsque notre dollar est faible. Il n'y a qu'à voir ce qui s'est passé avec les achats outre-frontière. Malgré ce qu'on peut en dire, ce qui y a mis fin, c'est le taux de change.

M. Calder: Oui, j'ai déjà expliqué que chaque fois que la valeur de notre dollar baisse d'un cent, nos exportations augmentent d'un milliard de dollars, ce qui représente de 12 000 à 14 000 emplois permanents. Il va sans dire que nous devons essayer de régler ce problème.

Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Rivard, vous aimeriez faire un autre bref commentaire?

[Français]

M. Rivard: Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais faire un bref commentaire. Le Québec et l'Ontario produisent, à eux deux, au-delà de 80 p. 100 du lait de transformation. Je vous présente John Core, mon vice-président pour l'Ontario, qui va vous faire un commentaire. Mais avant qu'il n'intervienne, je voudrais vous dire quelque chose sur sur la compétitivité.

Tout à l'heure, on disait qu'on ne pouvait plus retransférer aux consommateurs certains ajustements de prix. Je vous donnerais comme exemple - et on peut vous fournir les données - que le prix du lait, durant la période d'avril 1992 à janvier 1996, a augmenté au Canada de 10,28 p. 100 alors que le prix de détail durant la même période, pour l'ensemble des produits laitiers, fromage, etc., a subi une augmentation de 14,49 p. 100.

Les transformateurs nous disent qu'ils ont des problèmes qui, je pense, ne sont pas liés au prix. Il y a des règles de compétitivité. Il y a une concentration de notre industrie de la transformation et il y a une règle de concentration au niveau des chaînes d'alimentation qui court-circuitent le système jusqu'à un certain point. En termes de compétitivité Canada-US, on sait qu'il y a une formule de prix et de coûts de production aux États-Unis ainsi de la marge des transformateurs. Pour vous permettre de comparer, je dois vous dire qu'au Canada, la marge des transformateurs sur les produits laitiers est de 7,97 $ alors qu'aux États-Unis, elle est de 5,12 $.

John, vous aviez un commentaire à faire.

[Traduction]

Le président: Monsieur Core.

M. John Core (vice-président, Fédération canadienne des producteurs de lait): Merci, monsieur le président.

J'ai quelques commentaires à faire. Murray, vous avez posé des questions sur le niveau de subventions en vigueur aux États-Unis. J'aimerais en parler brièvement, car il est important que le milieu agricole comprenne ce qui se passe aux États-Unis et en Europe. Ils ont signé le même accord GATT que le Canada, mais ils ont décidé de subventionner le secteur agricole au niveau maximum admissible en vertu du GATT. Le Canada aurait pu décider d'en faire autant.

Je comprends que le Canada connaît des problèmes financiers, mais le gouvernement a réduit le niveau des subventions de façon beaucoup plus marquée que ce celle que n'exige le GATT. Sur le plan de la concurrence, nous serions dans une position désavantageuse si, par exemple, nous devions perdre le comité de règlement des différends créé en vertu de l'ALENA. Nous n'avons aucunement l'intention de perdre ce comité, et c'est pourquoi il est essentiel que le Canada défende et maintienne les dispositions négociées en vertu de ces accords commerciaux. Nous devons nous assurer que les Américains sont obligés de les respecter aussi.

.1015

Si le comité de règlement des différends créé en vertu de l'ALENA disparaissait, les Américains maintiendraient leur haut niveau de subventions. Ces dernières donnent un avantage concurrentiel à leurs producteurs, car les deux parties ne jouent pas selon les mêmes règles. Une telle décision aurait des conséquences graves pour la production agricole canadienne et le secteur de la transformation. Compte tenu de l'importance de son marché et du niveau de subventions dont il jouit, le secteur de la transformation américain est en mesure de réaliser des économies d'échelle. C'est donc une question d'importance primordiale.

La Fédération canadienne des producteurs de lait n'a conclu aucun accord avec le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire au sujet du programme de réduction des subventions. Nous avons simplement entamé des discussions avec ce dernier. Le ministre nous a informés que le gouvernement du Canada avait l'intention de réduire le niveau des subventions offertes aux producteurs laitiers, et nous a demandé de le conseiller sur la méthode à utiliser. Nous n'en sommes pas arrivés à un accord. Nous avons simplement offert des conseils, expliquant que dans une telle éventualité nous préférerions que le gouvernement agisse d'une certaine manière. Monsieur le président, nous avons souligné la nécessité de prévoir un système de recouvrement des coûts.

Le président: Monsieur Landry.

[Français]

M. Landry: Dans toute la réorganisation qui est en train de se faire, il faut se préoccuper de la création d'emplois et des emplois qu'il faudrait conserver. J'aimerais savoir s'il y a à l'heure actuelle un risque de perte d'emplois avec toutes ces restructurations-là.

M. Rivard: Je vous cite des chiffres de mémoire, mais on pourra vous fournir les données. Pour notre analyse, on a fait faire une étude au niveau canadien sur le dossier Canada-US. Si ma mémoire est bonne, on parlait de 45 à 50 p. 100 de pertes d'emplois dans le secteur agroalimentaire au Canada dans le cas où les résultats seraient en faveur des Américains. Cette étude prenait en compte la volaille, les oeufs et les différents secteurs sous contingentement. C'est donc très important, et ce que nous avons dit, John et moi-même, illustre bien le fait que le terrain de jeu est inégal et les règles, trop différentes. Tout cela fait qu'on ne peut pas lutter à armes égales. Malheureusement, certains secteurs de l'industrie ne pourront survivre, en particulier l'industrie laitière dans son ensemble telle qu'on la connaît actuellement.

[Traduction]

Le président: Excusez-moi, monsieur Rivard. Je pense que M. Landry parlait des changements apportés au niveau du soutien de la subvention. Vous parlez de ce qui pourrait se produire selon la décision du comité de règlement des différends créé en vertu de l'ALENA.

[Français]

M. Rivard: D'accord. Je vais vous donner des éclaircissements. Il y a un principe de base qui est que les producteurs laitiers canadiens doivent avoir une politique laitière à long terme et être capables de récupérer les augmentations de 200 à 300 p. 100, par exemple sur le prix du maïs, celui des concentrés, celui de l'essence qui vient d'augmenter fortement au Canada, et réagir devant les barrières qui s'affaissent. Tout cela n'est pas uniquement le fait des subventions. Il faut avoir une politique laitière de façon à ce que les producteurs et les différents secteurs de l'industrie au Canada soient capables de survivre aux aléas du commerce international. C'est global.

J'ai mentionné que les producteurs avaient accepté de tenir compte des secteurs où on ne pourrait pas être compétitifs, et je pense aux États-Unis et à d'autres importations, pour ajuster leurs structures de prix afin que cette industrie et ces emplois, au Canada, ne soient pas perdus. Mais il doit y avoir réciprocité. Le gouvernement canadien doit s'assurer qu'on a les outils nécessaires pour être compétitifs en nous permettant d'avoir assez de revenus pour rester en affaires. Vous permettez cela à Bell au nom des principes de récupération des profits. Nous ne vous parlons pas de profits mais seulement de la survie de l'industrie, et pour être précis, d'un revenu agricole moyen.

John mentionnait qu'en Ontario, il ne restait que 17 000 $ à un agriculteur pour faire vivre toute sa famille. Au Québec, c'est à peu près la même chose. Ce matin, on parle d'une perte de 8 000 $ à 10 000 $ selon la grosseur de l'exploitation. Faites le calcul: 17 000 $ moins 8 000 $ à 10 000 $. Que reste-t-il? Pensez-vous que des gens comme eux vont rester en affaires longtemps, et sans chômage en plus?

[Traduction]

Le président: Monsieur Matte, voulez-vous ajouter quelque chose? Ce n'est pas nécessaire. J'ai cru comprendre que vous vouliez faire un commentaire. Pas de commentaire?

D'accord, monsieur Landry.

[Français]

M. Landry: Je vous demanderais une précision. Quand vous avez donné les chiffres de 45 p. 100 à 50 p. 100, est-ce que c'est sur cinq ans?

M. Rivard: Oui, et on pourra vous fournir ces données-là.

M. Landry: Parfait. Merci. Merci, monsieur le président.

.1020

[Traduction]

Le président: Madame Ur.

Mme Ur (Lambton - Middlesex): Le Conseil national de l'industrie laitière et la Fédération canadienne des producteurs de lait ont bien collaboré pour les deux premières réductions de 15 p. 100. Comme vous l'avez expliqué dans votre exposé, les résultats de la réunion du 6 et du 7 mai étaient moins positifs. Est-ce que vos divergences d'opinions sont si profondes qu'elles vous empêcheront de continuer de collaborer comme vous l'avez fait pour réaliser les deux premières réductions de 15 p. 100?

M. Matte: Je crois qu'on continuera de travailler dans un esprit de collaboration. Malgré nos divergences fondamentales sur certaines questions, les deux parties ont réussi au cours des années à travailler dans un esprit de coopération. Dans les circonstances, il est très difficile de prévoir s'il sera possible de conclure une entente sur les autres réductions de subventions.

Nous ne contestons pas le principe selon lequel les producteurs laitiers doivent pouvoir recouvrer la perte de revenus résultant de l'élimination des subventions. Ce que nous contestons, c'est que le président d'une entreprise privée ou publique ou d'une coopérative fixe un calendrier quinquennal d'augmentations de prix alors qu'il n'a aucune prise sur le marché. Une entreprise reçoit une lettre qui la prévient qu'aucune de ces augmentations de prix ne sera acceptée. Ce n'est pas une invention, c'est vrai. Les PDG disent que c'est irresponsable de leur part. Ils ne peuvent plus se présenter à leur conseil d'administration et déclarer que sur un milliard de dollars de ventes, chiffre réel, ils ont réalisé 10 millions de dollars de profits l'an dernier et qu'ils ont accepté un calendrier quinquennal d'augmentations annuelles de leurs produits et de leurs intrants. Réfléchissez-y. Pendant combien de temps cela va-t-il être toléré? Pas très. Voilà le dilemme.

L'arrangement doit être le fruit d'une négociation. Notre conseil d'administration a fait une proposition que les producteurs laitiers ont jugé inacceptable parce qu'elle ne prévoyait pas que la hausse des prix se répercuterait à 100 p. 100 au cours des cinq prochaines années. En tout cas, c'est ce que nous avons compris. Ils pourront vous le confirmer ou non. Nous sommes prêts à rencontrer les producteurs laitiers et à poursuivre la discussion, mais si nos positions respectives restent les mêmes, il sera difficile de trouver une solution.

J'ai dit à maintes reprises que le secteur de la transformation, ferme défenseur de la gestion des approvisionnements, fait néanmoins face à une réalité bien différente de celle du producteur laitier. Dans notre cas, nous devons répondre au double impératif de la gestion des approvisionnements et du marché de consommation, qui est libre. Cela change tout. Il est facile de souscrire à un principe; ce qui est difficile, c'est de lui trouver une application raisonnable.

Le président: Monsieur Core.

M. Core: Il ne fait pas de doute dans mon esprit que nous allons continuer à collaborer. C'est ce que nous avons fait par le passé, et nous avons réussi à résoudre ce genre de problèmes.

Je voudrais revenir sur ce qu'a dit Kempton. Sachez d'abord que nous compatissons avec le secteur de la transformation, qui se trouve dans une situation difficile à cause du fort degré de concentration du marché de détail au pays. Les entretiens que j'ai eus dans ma province ne m'ont laissé aucun doute sur l'ampleur des pressions exercées par les détaillants, qui envoient des lettres disant qu'ils ne toléreront aucune majoration de prix dans les mois à venir. S'il y a quelque chose qu'il faut étudier, c'est la question de savoir si ce degré de concentration sur le marché de détail profite à l'agriculture canadienne et aux transformateurs canadiens.

Les transformateurs disent qu'il leur a été impossible dans bien des cas de répercuter les hausses de prix sur le marché de détail. Or, au cours des trois dernières années, le prix des produits laitiers a changé... Les chiffres d'avril 1992 à janvier 1996 montrent que le prix total du prix du fromage au détail a monté de 14,49 p. 100. Le prix du marché garanti pour le lait a augmenté de 10,28 p. 100.

.1025

Je crois les transformateurs lorsqu'ils disent que le marché exerce sur eux d'immenses pressions, mais il reste que le prix au détail continue d'augmenter. Comme producteur, je pose donc la question: les détaillants exercent-ils une pression inadmissible sur les transformateurs? Je dois poser la question. Je ne connais pas la réponse, mais je voudrais savoir.

Examinons aussi ce qui se passe sur le marché ontarien. Kempton dit être présent sur les deux marchés. Oui, c'est vrai, mais la frontière est toujours fermée pour ce qui dépasse le niveau des importations autorisées, et les droits de douane limitent ce que les détaillants peuvent importer d'ailleurs. Le marché n'est pas libre parce que le volume des importations est limité par les droits de douane. Les importations sont contingentées.

Je compatis donc avec la situation des transformateurs. Ce que je recommande, c'est que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire annonce une politique laitière quinquennale autorisant la répercussion sur les prix du marché de la hausse attribuable à l'élimination des subventions. Il devrait annoncer aux détaillants que cette répercussion est admissible. Cela allégerait les pressions qui s'exercent sur nos transformateurs. Cela ferait partie de la politique laitière de cinq ans du gouvernement de laisser ces augmentations se répercuter sur le marché.

Je pense qu'il faut vraiment travailler avec les transformateurs pour trouver une solution qui fera que ces augmentations de prix se feront sentir sur le marché. C'est ce qui compte pour nous, monsieur le président.

Le président: Madame Ur, aviez-vous d'autres questions?

Mme Ur: À la séance de ce matin, le Conseil national de l'industrie laitière a déclaré ne pas être en faveur d'une politique laitière à long terme.

M. Matte: Pour le moment. À notre avis, il est prématuré d'essayer de combiner tous les éléments - car il y a bien autre chose que le prix selon nous - d'une politique laitière à long terme qui doit être annoncée le 1er août alors qu'on connaîtra les résultats des travaux du groupe spécial de l'ALENA le 15. Cela risquerait de rendre caduque toute l'entente. Mieux vaut savoir à quoi l'on a affaire et réagir correctement.

Mme Ur: Je suis tout à fait d'accord avec vous là-dessus. Je me demandais seulement s'il y avait autre chose.

M. Matte: Non, c'est tout.

Le président: Monsieur Rivard.

[Français]

M. Rivard: Si le Canada n'avait pas de politique laitière, nous n'aurions probablement plus d'industrie laitière. Beaucoup de modifications ont été apportées aux politiques et certaines attaques, peut-être pas aussi importantes, ont été portées. Les négociations du GATT et celles du libre-échange avec les Américains ont eu lieu. L'industrie laitière ne s'est pas pour autant arrêtée. Si je me souviens bien, on discutait de ces questions au moment où le ministre de l'époque annonçait la dernière politique laitière. La vie ne s'arrête pas parce qu'un panel américain se réunit. Nous prenons les éléments pour gagner ce panel, mais les producteurs ont cru à l'engagement du gouvernement canadien, lors de la signature du GATT, d'élaborer une politique laitière cohérente. En ce moment, les producteurs commencent à être excessivement inquiets. On nous demande d'être compétitifs tandis que le gouvernement, par ses décisions, tel le retrait du subside, élargit le fossé de la compétitivité. Donnez-nous des outils d'une façon intelligente; nous sommes tous des gens intelligents au Canada, qui veulent travailler ensemble.

Les discussions qu'on entretient avec les transformateurs sont intéressantes, mais je vous rappelle que la décision en termes de politique reste entre les mains de M. Goodale, en sa qualité de ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Il doit donner un signal au secteur de l'industrie pendant qu'on débat de l'augmentation, de l'ajustement ou de la récupération du prix du subside auprès du consommateur. Je crois que c'est dans cette optique qu'on doit regarder la situation.

[Traduction]

Le président: Monsieur Collins.

M. Collins (Souris - Moose Mountain): Monsieur Matte, dans votre exposé, vous avez notamment dit que vous voudriez que les subventions restent. C'est ce que nous voudrions tous, sauf qu'il n'en est pas question. Comme vous, je pense que si nous n'élaborons pas une politique, nous risquons de rester à discuter ici ad vitam aeternam sans jamais nous entendre.

.1030

Si je vous ai bien compris, ce que vous souhaitez, c'est une certaine stabilité pour les cinq prochaines années.

Je me souviens que les agriculteurs de la Saskatchewan s'étaient fait dire d'augmenter la matière grasse butyrique. C'est ce qu'ils ont tous fait, puis tout d'un coup les règles ont changé, et on leur a dit de la réduire. J'ignore à quelle fréquence vous imposez ces changements, mais, croyez-moi, c'est dur.

Monsieur Matte, on dirait que vous nous demandez de dire aux citoyens qu'ils doivent continuer de vous subventionner, mais moi je vous demande comment on va égaliser les chances. Nous sommes dans une passe difficile. Vous me donnez l'impression que nous avons une baguette magique et que les choses pourraient rester telles quelles encore un peu. Est-ce que vous pourriez...

M. Matte: Oui, permettez-moi de vous répondre.

M. Collins: Je pensais bien que vous voudriez le faire.

M. Matte: D'abord, j'ai dit que nous appuyons les producteurs laitiers qui réclament le maintien de la subvention. Je n'ai pas besoin qu'on me fasse la leçon sur la situation financière du pays. Nous la connaissons tout aussi bien que vous. Nous nous y frottons sur le marché. Nous savons combien il y a de chômeurs. Nous connaissons les difficultés avec lesquelles les producteurs laitiers sont aux prises. Nous reconnaissons et nous comprenons que l'élimination des subventions a des effets très réels pour le producteur. Si le gouvernement appuyait le secteur comme il s'y est engagé, il aurait très bien pu utiliser cet argent sous une forme admissible en vertu des accords internationaux et le réacheminer aux producteurs. Il aurait pu le faire. Il ne l'a pas fait.

Je ne conteste pas cette décision. Je sais pourquoi il a agi ainsi, mais la réalité, c'est que c'est à notre secteur à nous qu'on demande de combler l'écart, et, à cause de la situation financière, nous disons que ce n'est pas le consommateur qui acceptera de casquer, à supposer même qu'on puisse essayer de le faire en passant du grossiste au détaillant. Puisque nous ne pouvons pas faire monter les prix, il faut absorber la hausse, et tout indique que cela nous sera impossible. Nous ne pouvons pas faire des promesses impossibles à tenir. Ce n'est pas possible, et c'est pourquoi nous ne pouvons pas prendre cet engagement.

M. Collins: Je vois.

Vous savez qu'une partie des laiteries de la Saskatchewan ont dû fermer leurs portes. Vous le savez sans doute. Estevan est peut-être l'une d'elles. Loin de moi l'idée de vous faire la leçon, mais je m'offusque un peu de voir que vous pensez que cela nous laisse indifférents. C'est tout le contraire. Je comprends la situation.

Monsieur Hedley, je vous remercie de nous avoir remis un document qui nous donne une vue d'ensemble - et aussi au témoin qui est à vos côtés, je suis désolé - mais je pense qu'il faut remettre les pieds sur terre, comme vous l'avez dit. Comment va-t-on régler cela? Allons-nous baisser les bras ou nous braquer?

Je vois les deux côtés de la médaille. Les producteurs laitiers vous disent qu'ils ont un problème; les transformateurs aussi. Que pouvez-vous faire dans l'immédiat pour sortir de l'impasse et obtenir des engagements à long terme? Votre argument est valable. Le gouvernement peut-il faciliter la répercussion des hausses? J'aimerais que vous nous en disiez davantage.

Le président: Monsieur Matte, voulez-vous répondre en premier?

M. Matte: Si vous me le permettez, monsieur le président.

Je vous comprends. De fait, je suis d'accord avec vous. Estevan est l'exemple parfait. Que peut faire un transformateur qui vend le litre de lait moins cher aujourd'hui qu'il y a cinq ans? Comment peut-il rester à flot? Après avoir passé en revue toutes ses opérations, dégraissé et éliminé le superflu, «coupé jusqu'à l'os» et consolidé ses opérations, il doit licencier du personnel, et cela fait mal. Dans bien des villages - vous le savez mieux que moi - la laiterie est le plus gros employeur. Les propriétaires ne veulent pas fermer ces laiteries. Au moment où on se parle, je sais que 12 laiteries vont fermer leurs portes d'ici à la fin de l'été. J'en connais 12. Voilà le problème.

.1035

[Français]

Le président: Monsieur Rivard.

M. Rivard: Un peu dans le même sens que Kempton et peut-être pas pour les mêmes raisons, l'industrie a engagé une importante restructuration, notamment relativement au nombre des usines. Les producteurs en ont ressenti les impacts.

Dans la région du Bas-du-Fleuve au Québec d'où je suis originaire, plus précisément à Trois-Pistoles, une usine de fabrication beurrière qui transformait plus de 120 millions de litres a dû, pour différentes raisons, cesser ses exploitations. Les producteurs québécois ont dû à ce moment absorber le coût d'un ajustement. Plus de 120 millions de litres doivent maintenant être transformés à de longues distances et les producteurs doivent assumer 2,50 $ de coût de transport.

En ce sens, quand nous vous demandons une politique laitière faisant preuve de cohérence, nous nous attendons à ce que le gouvernement canadien et les autres intervenants nous donnent des outils pour nous permettre de rester en affaires, puisque nous sommes liés.

Mme la députée demandait plus tôt si nous continuerions de nous parler. Nous n'avons pas le choix; nous entretenons un lien intrinsèque à titre de secteur de l'industrie des producteurs de lait de transformation.

Au Québec, la fermeture de deux usines moins éloignées au cours des six derniers mois a représenté une augmentation des coûts de transport de l'ordre de 1,2 million de dollars pour les producteurs. Nos transformateurs nous disent que nous ne pouvons pas récupérer des ajustements de prix sur le marché. Comment pourrons-nous rester en affaires?

Vous vouliez savoir comment le gouvernement pouvait nous aider. La seule façon serait d'être cohérent dans ses politiques; c'est pourquoi nous insistons sur la nécessité d'avoir une politique laitière. Sans elle, tant les transformateurs que nous ne pourrons pas rester en affaires. Nous nous autodétruirons et nous verrons nos emplois être exportés vers les États-Unis. Je ne veux pas dépendre des Américains; lorsque, dans certains autres secteurs, le Canada ou d'autres pays sont devenus dépendants pour leur alimentation, ils se sont fait carrément exploiter.

[Traduction]

Le président: Monsieur Reed, puis M. Hoeppner.

M. Reed (Halton - Peel): Je voudrais aborder une question qui ne concerne pas le financement, mais qui touche indirectement votre compétitivité. M. Matte en a dit un mot au début. Il s'agit de la différence de qualité qui existe ou que l'on imagine exister entre le produit canadien et le produit étranger.

Le consommateur canadien veut savoir ce qu'il achète lorsqu'il achète un litre de lait ici et accepte de payer un peu plus cher peut-être que pour le produit américain.

Par ailleurs, il y a quelques confiseurs dans ma circonscription, et l'un d'eux s'est plaint du prix du lait et envisage d'autres options.

Pourriez-vous nous dire en quoi la différence de qualité est importante et quel effet elle a sur votre compétitivité à long terme?

Merci.

M. Matte: Je ne vais pas me mettre sur la défensive, mais je vais vous avouer que je ne suis pas un spécialiste de cette question. Néanmoins, il est clair que dans l'esprit du consommateur canadien et que dans les faits il existe ici un régime réglementaire plus rigoureux pour les produits laitiers. Nous avons des normes élevées fondées sur les normes internationales. Nous avons de bons programmes de contrôle de la qualité assurés par l'entreprise à la laiterie. Nous avons un excellent régime d'inspection à la laiterie, et ainsi de suite.

Le consommateur canadien est habitué à des produits laitiers canadiens de très haute qualité. Le message est aussi véhiculé par l'étiquetage. C'est un atout qu'il faut protéger, préserver et consolider. C'est au coeur de nos préoccupations comme transformateurs. Prenez par exemple la possibilité de recourir à certains outils de gestion. Je ne veux pas me lancer dans un débat sur la question, mais c'est ce qui nous préoccupait dans l'affaire de la BST - comment concilier le recours à ce produit, utile pour certains, et garantir le choix du consommateur, qui, lui, est de plus en plus exigeant dans ses choix.

.1040

Limité par des règles de publicité et d'étiquetage gouvernementales très strictes, les méthodes de production et de fabrication, etc., le producteur laitier est très encadré. Nous n'avons rien contre. C'est le cadre dans lequel nous évoluons.

M. Reed: Est-ce qu'insister sur la qualité nous donne un avantage compétitif dans le cadre du GATT, par exemple, lorsque se profile le danger de l'importation de produits étrangers?

M. Matte: De tout temps le Canada a fait un usage judicieux et constructif de l'argument de la qualité pour conquérir des marchés. Quant à s'en servir pour lutter contre les importations, cela reste à voir. Il a d'assez bonnes chances d'être convaincant, mais en bout de ligne le consommateur n'acceptera de payer qu'un certain supplément pour un produit de meilleure qualité.

Le consommateur moyen ne paiera pas le supplément parce qu'il sait que le produit normal au prix moyen - s'il est d'origine canadienne - est de très haute qualité.

C'est ici qu'entre en jeu l'étiquetage, et c'est pourquoi il est très important que le consommateur puisse voir d'un simple coup d'oeil le label «Produit du Canada» ou Product of the USA et sache faire la distinction.

M. Reed: M. Rivard allait dire quelque chose.

[Français]

M. Rivard: C'est certes un autre outil incitatif, mais ce n'est pas le seul qui doit être mis en place. Nous avons déjà investi des sommes importantes de l'ordre de plusieurs millions de dollars. Nous travaillons en collaboration avec les transformateurs à promouvoir l'utilisation, au niveau canadien, d'un sceau d'authenticité pour les produits laitiers canadiens arborant une petite vache bleue. Un nombre important de transformateurs utilisent déjà ce logo, un peu comme le red seal sur les produits laitiers aux États-Unis.

Mais lorsqu'on parle d'importations ou d'exportations, c'est l'argent qui parle. Par exemple, l'Europe décidait il y a trois semaines de mettre un niveau de subvention supérieur sur son beurre en raison de ses stocks importants. Le prix international a tout de suite réagi et chuté.

Nous devons bien nous comprendre sur ce point. Les producteurs ne peuvent pas indéfiniment faire concurrence au Trésor. Dans ce cas précis, les Européens ont appliqué cette subvention et le prix international du beurre a chuté. Puisqu'au Canada ce sont uniquement les producteurs qui assument ces coûts, lorsque nous jouons sur ces marchés, nous devons ajuster notre prix à la baisse à l'instar de la compétition afin de garder ces emplois au Canada; nous devons donc indirectement ajuster notre prix à ce niveau.

En l'absence d'une politique dont les éléments se tiennent, nous ne pourrons continuer à faire face à cette compétition; nous ne resterons pas en affaires. Nous voulons maintenir une industrie laitière valable au Canada, mais nous avons besoin d'outils pour ce faire.

[Traduction]

Le président: Monsieur Balcaen.

M. Balcaen: Monsieur le président, je voulais revenir sur ce qu'a dit M. Reed à propos des confiseurs de sa circonscription qui envisagent ou menacent d'utiliser un autre produit. J'aimerais faire quelques observations là-dessus, parce qu'il s'agit d'une question très importante dont s'occupe notre secteur.

Remontons à il y a quatre ou cinq ans, à l'époque de la signature de l'accord commercial canado-américain, au moment où les obstacles tarifaires étaient levés. L'effet de la concurrence sur les transformateurs de second cycle du Canada a commencé à se faire sentir plus fortement.

La commission, avec la collaboration du secteur, a créé des catégories spéciales de produits à prix compétitifs à l'intention des transformateurs de second cycle.

.1045

Il y a environ un an, une entente est intervenue entre les transformateurs de second cycle, les transformateurs et les producteurs. Un mécanisme d'établissement des prix et de révision à intervalles réguliers a été accepté, ainsi qu'une méthode d'examen, actuellement en cours. Il a été difficile d'obtenir de l'information de qualité des transformateurs de second cycle pour nous indiquer les lacunes de la méthode actuelle.

Hier, à Toronto, une réunion a rassemblé un certain nombre de représentants des Fabricants canadiens de produits alimentaires, du Conseil canadien de la boulangerie, etc. Il y avait là un certain nombre de personnes - le Conseil national de l'industrie laitière et la Fédération canadienne des producteurs de lait. C'est la commission qui a présidé la rencontre. Il y en aura une autre cet après-midi, et des recommandations seront adressées au Comité canadien de gestion des approvisionnements de lait.

Je pense que le secteur a été très réceptif aux préoccupations des transformateurs de second cycle. Ce qui a fait défaut, peut-être, c'est la participation sérieuse aux discussions des transformateurs de second cycle - il ne suffit pas de dire que le prix et le calendrier de révision des prix sont insuffisants. Ce que nous voulons entendre d'eux, ce sont des réponses, pas seulement des questions. J'ai le sentiment que cela est en préparation depuis quelques semaines.

Je suis heureux que les producteurs aient accepté de reporter l'ajustement de prix du 1er mai pour rendre la chose possible. Je pense que c'est une bonne idée.

Ce que j'ai dit, c'est que c'est une question importante pour le secteur parce que cela représente un secteur de croissance, et aussi bien les producteurs que les transformateurs tiennent à trouver une solution à ce problème. Tous nous voulons que cette activité continue d'exister au Canada, tout comme les emplois qu'elle représente.

Le président: Merci.

Monsieur Matte, vouliez-vous dire quelque chose?

M. Matte: Sur ce que vient de dire Louis, j'allais...

Le président: Monsieur Hoeppner.

M. Hoeppner: Monsieur le président, je pense que nous tous, autour de cette table, voulons que les producteurs laitiers puissent survivre, et même prospérer. Toutefois, je me demande si nous ne livrons pas une bataille perdue d'avance, en ce sens que nous ne serons probablement jamais sur un pied d'égalité avec nos concurrents américains. Cela m'inquiète vraiment, surtout quand je vois que nos finances sont dans un tel fouillis. Nous payons des sommes énormes d'intérêt, à d'autres pays.

Je viens de recevoir cet article du Financial Post, et je vais vous demander si, à votre avis, c'est de la propagande, ou bien si c'est réaliste. On y lit que la commission du lait de la Nouvelle-Zélande estime que le producteur laitier moyen recevra cette saison un paiement record. Cette prime financière vient d'une production exceptionnellement élevée, d'une habile stratégie de commercialisation à l'étranger et du fait que les marchés sont bons. On y ajoute qu'en dépit de cette production plus élevée un nombre croissant d'agriculteurs deviennent des producteurs laitiers. Pour eux, c'est un signe positif.

À la page suivante, Martin dit que la commission a agi rapidement pour saisir de nouvelles occasions qui s'offraient, y compris un accès légèrement amélioré à l'Europe et aux États-Unis. Nous vendons des fromages qui étaient auparavant inconnus aux États-Unis et qui sont faits sur mesure pour plaire aux palais américains.

Avons-nous du retard par rapport à ces gens-là? Ils se sont réorganisés. Est-ce que c'est ce qu'il faut faire? Je ne pense pas que le coût de la main-d'oeuvre soit supérieur à celui des États-Unis, si l'on tient compte du revenu net disponible.

Le président: Je vois que M. Core s'amène à la table; je pense qu'il veut intervenir.

M. Hoeppner: J'ai posé beaucoup de questions.

M. Core: Le point qu'il faut retenir, c'est que tout le secteur laitier de la Nouvelle-Zélande était organisé en fonction de l'exportation. Les producteurs laitiers de la Nouvelle-Zélande ont traversé des périodes de grandes difficultés financières. En ce moment, ils disent que ça va bien à cause d'une bonne planification, mais ils font plus d'argent parce que, pour la première fois dans l'histoire, le cours mondial a atteint les 26, 27 et 28 cents le litre. C'est déjà monté à ce niveau auparavant, mais le prix retombe toujours très bas par la suite.

Ce n'est donc pas tellement de la bonne planification de la part de la Nouvelle-Zélande; il s'agit plutôt d'un coup de chance, à savoir que le cours mondial est actuellement assez bon. Je crois qu'il va baisser bientôt.

.1050

Le président: Il y a des producteurs laitiers de la Nouvelle-Zélande en ville aujourd'hui...

M. Core: En effet, et je vais d'ailleurs les rencontrer ce soir; je suis donc en train de roder mes arguments.

M. Hoeppner: Allez-vous leur demander si c'est un gouvernement libéral qui a réussi cela à leur intention?

M. Core: Par ailleurs, je voudrais faire observer qu'il y a eu beaucoup de discussions...

Le président: En tout cas, ce n'est sûrement pas un gouvernement réformiste.

M. Core: ... sur la façon dont l'agriculture de la Nouvelle-Zélande s'est restructurée pour affronter la concurrence mondiale, mais ce dont on n'a pas parlé, c'est la quantité phénoménale de dettes agricoles qui ont été radiées en Nouvelle-Zélande au moment de la restructuration. Si l'on radiait la totalité de l'endettement agricole parmi les agriculteurs canadiens, je peux vous garantir qu'on pourrait accepter un prix plus bas. Peu importe pour quelles denrées, si l'on élimine la dette, tout ira mieux, mais ce n'est tout simplement pas réaliste dans notre environnement. Il y a donc bien des facteurs qui entrent en jeu.

M. Hoeppner: Mais si nous ne restructurons pas notre secteur et ne parvenons pas à devenir compétitifs, si nous ne faisons pas un effort de commercialisation et n'augmentons pas notre production pour exporter partout dans le monde, nous devons peut-être faire exactement ce que vous suggérez.

M. Core: La réalité, c'est que le marché mondial de l'exportation pour les produits laitiers représente environ 7 p. 100 de la production mondiale; c'est donc un marché assez petit. Il l'a toujours été et, à notre avis, il le sera toujours. C'est un marché de dernier recours, pour écouler les invendus.

Toutefois, les Australiens et les Néo-Zélandais ont certains avantages qui leur permettent d'être plus compétitifs sur le marché mondial: leur climat, leurs pâturages, que nous ne pouvons pas concurrencer dans l'hémisphère nord.

M. Hoeppner: Je voudrais vous donner un autre exemple...

Le président: Jake, il y a des gens qui veulent intervenir à ce sujet.

M. Hoeppner: Très rapidement.

Le président: D'accord.

M. Hoeppner: Les Pays-Bas ont à peu près la moitié de la superficie du Manitoba, mais ils nous dépassent pour les exportations et les importations. Ils doivent importer des ressources naturelles pour fabriquer les produits qu'ils exportent. Comment s'y prennent-ils? Qu'est-ce qui cloche chez nous, que nous ne puissions pas en faire autant?

M. Core: Si l'on examine ce qui se passe en Europe, on voit que leur taux de subvention de l'agriculture est très supérieur au taux canadien. Les prix intérieurs sont extrêmement élevés, ce qui leur permet de faire ce que vous venez de décrire.

Le président: Monsieur Rivard.

[Français]

M. Rivard: John mentionnait qu'en Europe, les subventions étaient de l'ordre de 43 p. 100; je n'ai pas en main les données les plus récentes, mais on parlait plutôt de 36 p. 100 au niveau de subventions de l'État. Je vous rappelle que la Hollande fait partie de la CEE. Nous parlions ce matin d'un objectif zéro d'intervention de l'État canadien dans les politiques.

[Traduction]

M. Hoeppner: Vous dites, en somme, que nous sommes dans la pire situation imaginable. Pas de subventions du tout, c'est bon, et des subventions très élevées, c'est bon aussi. Nous, nous sommes entre les deux, et nous n'arrivons pas à survivre.

[Français]

M. Rivard: C'est ce que le GATT visait à niveler. Nous venons tout juste de terminer la première année de la mise en oeuvre des politiques dans le secteur laitier. Nous devrons vivre selon les nouvelles dispositions du GATT. Il y aura une deuxième ronde de négociations et je présume que le Canada s'y prépare dès maintenant. Nous devrons faire des analyses.

Le GATT vise à ouvrir la compétition. On disait que si les terrains de jeu étaient nivelés et qu'on parlait d'équité entre différents secteurs et entre différents pays, on pourrait se pencher sur cette question. C'est ce que le GATT vise à niveler, mais quel accès certains pays ont-ils ouvert jusqu'ici? Le Canada a joué les règles du jeu de GATT. Avons-nous le même accès aux États-Unis que les Américains? Essayez d'exporter de la crème glacée ou du yogourt aux États-Unis. Hors de question. Avec tout le respect que je vous dois, c'est ce sur quoi nous devons nous pencher.

[Traduction]

M. Hoeppner: Vous êtes en train de dire, et je tiens à consigner cela au compte rendu, que le gouvernement libéral a signé l'accord du GATT, mais qu'il n'a pas appris à s'en servir comme il faut.

[Français]

M. Rivard: Je vous dis qu'un jeu se joue à l'heure actuelle. Je laisserai cela aux politiciens, mais je vous ferai part de ma perception; les Américains jouent le jeu et l'interprètent à leur façon, lisant entre les lignes. Nous devons, jusqu'à un certain point, regarder comment ils manoeuvrent, tout en manoeuvrant nous aussi d'une façon intelligente. Nous, au Canada, ne sommes pas plus bêtes que les Américains et les autres.

[Traduction]

M. Hoeppner: Je suis d'accord avec vous.

Le président: Monsieur Matte.

Nous devrons mettre fin à la discussion après l'intervention de M. Matte, parce qu'un autre comité attend qu'on finisse pour utiliser la même salle.

M. Matte: Monsieur le président, je voudrais expliquer pourquoi le Conseil national de l'industrie laitière n'appuie pas la demande actuelle des producteurs laitiers qui réclament une politique laitière à long terme. Je ne veux pas que les membres du comité aient l'impression qu'il y a eu un changement fondamental dans notre position à ce sujet.

.1055

Il est important de se rappeler que, depuis maintenant de nombreuses années, nous n'avons pas de politique laitière à long terme. Or, si l'on tient compte de la conjoncture commerciale et politique, compte tenu des comités de l'ALENA, etc., nous posons la question: pourquoi agir maintenant, pourquoi ne pas attendre et faire les choses comme il faut? Comme les membres du comité l'ont dit, tout le contexte de la production laitière est en train de changer. Si nous devons faire des règles valables pour les cinq prochaines années, commençons d'abord par établir clairement à quoi exactement s'appliqueront ces règles. C'est pourquoi nous préférons attendre l'aboutissement des travaux du groupe. Il faut espérer que la décision nous sera favorable, après quoi nous pourrons aller de l'avant.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, messieurs et mesdames et messieurs les membres du comité.

En terminant, je voudrais dire qu'il est indéniable que le secteur laitier canadien est important et qu'il évolue. Et ceux d'entre vous qui sont au bout de la table... vous tous serez les intervenants qui représenteront tous les producteurs au fur et à mesure que le secteur évoluera. Je suis attentivement ce secteur depuis quelques années, et j'ai vu l'évolution qui a eu lieu.

Chose certaine, j'ai confiance que cette évolution sera telle que le secteur pourra continuer de croître et de prospérer. Ce ne sera pas facile. Il faudra probablement faire des compromis, et peut-être faudra-t-il faire des pieds et des mains, mais, personnellement, je suis confiant.

Je vous remercie beaucoup d'être venus témoigner devant le comité aujourd'hui, d'avoir exprimé clairement votre point de vue et d'avoir répondu aux questions des membres du comité.

La séance est levée.

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