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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 31 octobre 1996

.0911

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte. Je vous prie de m'excuser de ce retard, mesdames et messieurs, mais nous avons dû régler quelques petits problèmes à la dernière minute.

Ce que nous allons peut-être faire avant qu'éventuellement un certain nombre de membres du comité nous quittent... J'espère que non, mais je sais cependant qu'il y en a un ou deux qui ont d'autres engagements et qui nous reviendrons plus tard.

Vous avez devant vous le septième rapport du sous-comité des programmes et de la procédure. Si vous voulez bien l'examiner rapidement, je crois qu'au point un... Étant donné que le comité directeur s'est réuni au début de la semaine, il y a eu depuis une autre demande, et il y en aura peut-être encore. Je n'en sais rien. Marc, de qui provenait cette demande?

Le greffier du comité: Elle provenait du Conseil canadien des transformateurs d'oeufs et de volaille et il est possible que ce dernier fasse une intervention conjointe avec le Conseil des viandes du Canada. C'est une chose qui n'a pas encore été confirmée, mais il est certain que le Conseil canadien des transformateurs d'oeufs et de volaille souhaite comparaître au sujet du projet de loi C-60. Ça se fera la semaine prochaine.

Le président: Vous pourriez peut-être en prendre note. À moins d'avis contraire, nous communiquerons avec les responsables de ce Conseil pour leur dire que nous allons les ajouter à la liste de ceux qui veulent intervenir au sujet du projet de loi C-60.

Y a-t-il une objection à ce que nous ajoutions une intervention individuelle ou conjointe à la liste?

M. Reed (Halton - Peel): Non.

Le président: Sur le deuxième point, l'une des raisons pour lesquelles j'avais parlé à Dennis Kam, simplement pour que les membres du comité soient au courant... Comme vous le savez, nous avons reçu la semaine dernière une copie du budget supplémentaire des dépenses. Vous avez probablement tout compris, mais ce n'est pas mon cas. Je craignais que, si je ne comprenais pas son contenu, c'était peut-être parce que l'on ne me donnait pas une représentation fidèle des dépenses réelles contenues dans le budget principal des dépenses par rapport au budget supplémentaire.

Lorsque je me suis entretenu avec M. Kam, ce dernier m'a dit qu'en fait ce n'étaient pas 646 millions de dollars supplémentaires, parce qu'une partie de cet argent figurait déjà dans le budget principal des dépenses. J'étais totalement perdu et je lui ai donc demandé s'il accepterait de venir très bientôt devant le comité et de passer rapidement en revue les chiffres qui figurent dans le budget principal des dépenses en nous précisant de quelle manière fonctionne le budget supplémentaire et quelle était, par exemple, la part de ces 646 millions de dollars qui figurait déjà dans le budget des dépenses d'origine. Je m'arrête là, car je pourrais vous en parler très longtemps.

Malgré l'explication rapide qu'il m'a donnée, je n'ai toujours pas compris et je lui ai donc demandé de venir comparaître devant le comité. Le comité directeur a recommandé que nous agissions ainsi. Il ne s'agit pas de discuter des dépenses effectivement comptabilisées. Nous l'avons déjà fait lorsque nous avons examiné le budget des dépenses. Il s'agit simplement pour nous de comprendre comment les deux choses s'articulent. Voilà pour le deuxième point.

Le troisième point a déjà été réglé. Le greffier a parlé avec les gens du bureau du ministre et je me suis personnellement entretenu avec le ministre en lui demandant de comparaître ici devant le comité. La lettre devant permettre d'assurer un suivi sur ce qui s'est passé il n'y a pas si longtemps de façon à ce que nous soyons au courant de la situation dans le secteur des chemins de fer a été envoyée au ministre des Transports ou est en voie de l'être.

.0915

M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): Sur le troisième point, monsieur le président, est-ce que le ministre a fait savoir s'il était disposé à comparaître bientôt devant le comité? Il semble qu'il soit déjà en train de discuter avec les médias de ses projets concernant le Bureau et le plébiscite, et je crois qu'il serait bon qu'il comparaisse sans délai devant notre comité.

Le président: Je lui ai dit que le comité voulait de toute urgence qu'il se présente ici. Il ne m'a pas dit s'il le ferait bientôt, mais il m'a assuré qu'il viendrait.

Sur un autre point, ceux d'entre vous qui étaient au comité directeur... Monsieur Chrétien, vous avez dit à la réunion du comité directeur que vous étiez préoccupé par la question des wagons-trémies et, comme je vous l'ai dit alors, j'ai effectivement rencontré le ministre et je lui ai demandé d'entrer en contact avec vous. J'espère que c'est ce qu'a fait son personnel.

[Français]

M. Chrétien (Frontenac): Quelqu'un du ministère m'a téléphoné hier, monsieur le président. Malheureusement pour moi et pour lui, nous n'avons pu communiquer parce qu'il ne pouvait pas s'exprimer en français et que je ne pouvais pas m'exprimer en anglais. Nous avons donc convenu qu'on se rappellerait, mais mon bureau n'a pas encore rappelé. Encore une fois, c'est un problème linguistique.

[Traduction]

Le président: Y a-t-il d'autres commentaires au sujet du rapport qui est présenté au comité? Puis-je avoir l'avis du comité? Est-ce que vous souhaitez adopter ce rapport?

Des voix: Adopté.

Le président: M. Pickard comparaît devant nous ce matin.

Monsieur Pickard, est-ce que les fonctionnaires vont vous rejoindre à la table et est-ce que vous avez des commentaires à faire? Nous n'avons pas eu le temps l'autre jour de terminer... Si vous me le permettez, monsieur Pickard, je vais revenir quelque peu en arrière.

Nous avons distribué à chacun une lettre du ministre portant sur le service de consultation agricole. Vous l'avez tous devant vous. Le ministre a demandé que l'on se prononce et que l'on fasse des commentaires au sujet du service de consultation. M. Pickard a peut-être d'autres observations à faire à ce sujet. Je n'en sais rien.

Lorsque nous nous sommes quittés l'autre jour, nous venions d'entendre l'exposé de M. Pomerleau, et les fonctionnaires comparaissaient devant le comité. J'ai demandé à M. Pickard et aux fonctionnaires s'ils pouvaient faire d'autres observations et donner leur avis au sujet des points soulevés par M. Pomerleau étant donné que ce dernier, c'est évident, a procédé à un examen très approfondi du projet de loi.

Par la suite, mesdames et messieurs les membres du comité, j'ai reçu hier matin une lettre de l'Association des banquiers canadiens qui a été envoyée à la traduction. Elle est datée du 30 octobre 1996. Elle m'a été envoyée par télécopieur par l'Association des banquiers canadiens et elle porte sur un certain nombre de points qui inquiètent l'association ou que cette dernière veut faire figurer dans le projet de loi.

Je tiens à dire dès le départ aujourd'hui que compte tenu de ce que je viens de vous relater et de l'existence d'un certain nombre d'autres amendements qui nous sont envoyés, d'après ce que nous dit le greffier, il me semble qu'il serait probablement prématuré de procéder dès aujourd'hui à l'examen article par article du projet de loi. C'est un projet de loi important, mais je ne crois pas que le monde va s'arrêter de tourner si nous attendons encore quelques jours avant de l'adopter. Je crois que pour être juste avec tout le monde, il nous faut encore discuter de ces questions aujourd'hui. Si le comité y consacre tout son temps, ce n'est pas grave. Si ce n'est pas le cas, nous lèverons la séance et nous fixerons une autre date afin que nous ayons le temps de faire traduire la lettre de l'Association des banquiers canadiens. Le greffier pourra mettre en ordre les amendements de dernière minute afin que nous n'ayons pas à nous précipiter.

Il s'agit d'un projet important et à moins qu'il y ait une objection majeure, c'est là la façon dont j'entends procéder. Nous ne passerons pas aujourd'hui à l'examen article par article du projet de loi.

.0920

M. Hermanson: Monsieur le président, je suis d'accord avec votre recommandation. J'ajouterais qu'il y a tout juste deux jours, nous avons entendu un témoin dire qu'il fallait davantage d'amendements. D'autres témoins vont comparaître aujourd'hui et il n'est pas raisonnable de passer immédiatement de l'audition des témoins à l'examen article par article.

Étant donné que ce projet de loi a été renvoyé devant un comité avant la deuxième lecture - et même lorsque les projets de loi ne suivent pas cette procédure - il apparaît tout à fait raisonnable qu'il y ait au minimum un délai de quatre jours entre le moment où le comité se réunit pour entendre le dernier témoignage et le moment où débute l'examen article par article, pour la simple raison qu'en tant que députés de l'opposition nous avons besoin de temps pour déterminer quels sont les amendements que nous préférons déposer devant le comité et quels sont ceux que nous souhaitons présenter à l'étape du rapport.

Il nous faut travailler avec le conseiller législatif et nous devons communiquer avec les greffiers. Vous savez que tout cela prend du temps. Ces gens ne peuvent pas être à notre botte. J'apprécie votre décision. Je l'appuie et je vous invite à continuer à agir ainsi avec notre comité.

Le président: Très bien. Je vous le répète, je ne veux pas que nous nous précipitions. On ne refait pas les lois tous les ans - pas chaque loi, c'est évident - il arrive qu'un long délai s'écoule avant qu'on ne se penche à nouveau sur une loi donnée, et nous devons donc faire de notre mieux pour répondre aux préoccupations de tous les gens concernés. Bien évidemment, nous ne donnerons pas satisfaction à tout le monde sur tous les points, mais faisons de notre mieux. Ne manquons pas de tenir compte de leurs préoccupations et de leurs commentaires et d'y répondre d'une façon ou d'une autre. Essayons dans toute la mesure du possible de faire un bon travail.

Excusez-moi, M. Pickard, je vous ai coupé la parole. Vous comparaissez à nouveau devant nous ce matin en compagnie de vos fonctionnaires pour poursuivre les entretiens que nous avons eus lors de notre dernière séance au sujet du projet de loi C-38. Je suppose que vous allez d'abord nous présenter un exposé. Nous passerons ensuite à la discussion et aux questions.

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre d'Agriculture et Agroalimentaire Canada): Je vous remercie, monsieur le président. J'apprécie la possibilité qui nous est donnée de poursuivre nos entretiens. Je considère que cela fait suite à ce que nous avons commencé l'autre jour.

Le dernier jour de son témoignage, M. Pomerleau a effectivement évoqué plusieurs sujets de préoccupations qui, à mon avis, méritent d'être abordés et nous avons évidemment ici l'occasion de le faire pour un certain nombre d'entre eux.

Il est important de comprendre ce que nous visons avec la LMEA. M. Pomerleau s'est demandé si nous voulions limiter l'application de cette loi aux agriculteurs dont l'activité principale et la principale source de revenu est l'agriculture. Et bien non. Il y a de nombreux agriculteurs commerciaux qui ont d'autres sources de revenu, qu'ils soient autonomes ou employés à l'extérieur, tout en étant des agriculteurs légitimes qui doivent pouvoir bénéficier d'une aide en vertu de la loi.

Ainsi que l'a indiqué M. Pomerleau, si nous souhaitons englober dans le projet de loi ce groupe plus large - ce qui est le cas - la définition qu'en donne le projet de loi C-38 est appropriée. Si nous parlons d'agriculteurs commerciaux, c'est parce que nous voulons exclure les agriculteurs dilettantes qui n'ont aucunement l'intention de tirer un revenu de leur ferme.

M. Pomerleau a indiqué qu'il préférait que la suspension des procédures puisse suivre son cours dans tous les cas. Toutefois, le pouvoir discrétionnaire de mettre fin à la suspension des procédures aux termes des dispositions du paragraphe 14(2) est conforme au principe de base qui veut que la médiation soit un mécanisme accepté de plein gré. Il est conforme aussi à l'objectif de la suspension des procédures, qui est de laisser le temps à la médiation d'avoir lieu.

Il est clair que la majorité des créanciers ne veulent pas prendre part à la procédure de médiation. Il n'est pas prouvé qu'il soit utile de maintenir la suspension. De plus, les agriculteurs ont la possibilité de faire appel devant une commission d'appel de la décision mettant fin à la suspension, ce qui leur offre d'autres types de possibilités.

L'un des grands points forts de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, par rapport à ce qui se passe aux termes de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, c'est l'alinéa 5(1)b). De nombreux agriculteurs qui faisaient appel à la médiation et à un contrôle financier en vertu des dispositions de l'article 16 de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole étaient techniquement insolvables, mais ils ne voulaient pas se réclamer des dispositions de l'article 20 de la loi parce qu'ils n'avaient pas besoin d'une suspension ou n'en voulaient pas et parce qu'ils ne voulaient pas alerter inutilement les créanciers.

.0925

M. Pomerleau estime que cet article ne sera pas utilisé parce que les créanciers n'ont aucunement l'obligation de prendre part à la procédure de médiation. Nous avons la preuve du contraire lorsque nous nous penchons sur la participation au titre des dispositions actuelles de l'article 16 de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole. Ainsi que l'a déclaré la semaine dernière la présidente du bureau de l'Alberta, pratiquement tous les demandeurs qui se réclament des dispositions de l'article 16 pourraient prétendre se réclamer des dispositions de l'alinéa 5.(1)b) du projet de loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. D'autres bureaux d'examen de l'endettement agricole ont fait savoir par ailleurs que largement plus d'une moitié de leurs demandeurs en vertu des dispositions actuelles de l'article 16 sont insolvables et pourraient se réclamer des dispositions de l'alinéa 5(1)b) du projet de loi sur la médiation en matière d'endettement agricole.

M. Pomerleau a recommandé que la suspension des procédures soit automatique à partir du moment où un agriculteur réclame cette suspension. M. Pomerleau n'a peut-être pas suffisamment tenu compte du fait qu'un agriculteur dispose de 15 jours ouvrables pour demander une suspension une fois qu'un créancier garanti lui a notifié son intention d'intenter des poursuites. Les agriculteurs savent bien que s'ils laissent s'écouler ce délai de 15 jours avant de demander une suspension, ils risquent d'avoir le créancier à leur porte, prêt à prendre possession des biens qui constituent leur garantie.

Je tiens à apporter une dernière précision sur la question de la confidentialité des renseignements fournis par les demandeurs, question qui a été soulevée par M. Pomerleau. Il est important de relever qu'aux termes des dispositions de l'article 48 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, on ne peut demander la mise en faillite d'un agriculteur. Ainsi, un créancier qui reçoit des renseignements sur un agriculteur pour les besoins de cette loi ne peut par la suite utiliser ces renseignements pour faire mettre l'agriculteur en faillite.

J'aimerais pour finir dire quelques mots au sujet du service de consultation agricole.

La Fédération canadienne de l'agriculture a demandé que le service de consultation agricole ne soit pas incorporé à la loi de façon à lui donner une tournure plus positive plutôt que de le relier aux problèmes d'endettement qui dépendent du bureau d'examen de l'endettement agricole. Le SCA invite les agriculteurs à aller chercher de l'aide très tôt de manière à éviter ainsi que des problèmes plus graves ne se posent. Si ce programme était tenu à l'écart de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, davantage d'agriculteurs pourraient se prévaloir de ses avantages financiers et des recours qu'il offre sans porter le stigmate de l'insolvabilité et de l'endettement agricole.

Autrement dit, si on rattachait le mécanisme consultatif à la loi, l'insolvabilité serait elle aussi rattachée. Par conséquent, on découragerait bien des gens d'aller chercher cette aide. Le service de consultation agricole, tel qu'il nous est présenté aujourd'hui, permettrait bien évidemment à l'agriculteur de bénéficier des services de consultation financière et des moyens de recours sans qu'il y ait de stigmate et sans que les créanciers ne soient alertés au sujet de quoi que ce soit. Nous considérons donc qu'il est très utile que les deux choses restent séparées.

D'autres sujets de préoccupation m'ont par ailleurs été présentés. M. Hermanson a souhaité avoir des garanties pour que le service de consultation agricole soit mis en place en même temps que le projet de loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Il a demandé que l'on dépose devant la Chambre une déclaration à cet effet. Le ministre a examiné cette requête et souhaite assurer dès le départ à tous les membres du comité qu'il en sera bien fait ainsi. Vous avez donc sa réponse dans une lettre adressée directement au comité que vous avez devant vous aujourd'hui. Voilà ce qui a motivé la remise de cette lettre au comité.

Je pense que le ministre cherche effectivement ici à régler deux questions très importantes. Dans la lettre... il faut bien voir, à mon avis, qu'il y a certaines obligations et certaines lois dans les provinces et que nous ne voudrions pas donner l'impression de vouloir empiéter sur les responsabilités des provinces ou de compliquer les relations entre les provinces. Il est donc en fait préférable, pour garantir l'harmonie des relations entre les provinces et le gouvernement fédéral, de laisser tout cela en dehors de la loi.

.0930

En second lieu, le ministre souligne qu'il est important que l'on ait recours à ce service, comme je viens justement de vous le dire, et qu'il y ait là un mécanisme de consultation aussi ouvert que possible afin d'inciter davantage d'agriculteurs à y recourir sans être stigmatisés. Cette recommandation nous vient de Jack Wilkinson de la Fédération canadienne de l'agriculture. Le ministère y est certainement très favorable.

Voilà les deux principales raisons pour lesquelles le ministre estime dans sa lettre qu'il est important de tenir le service de consultation à l'écart de la loi.

Après ces commentaires, monsieur le président, nous pourrions peut-être passer aux questions.

Le président: Excusez-moi, je n'ai pas apporté ma feuille, mais je sais qu'il y a une ou deux personnes qui veulent faire des commentaires et poser des questions. M. Hermanson, c'est votre cas, et je commencerai donc par vous. Elwin, vous êtes le premier, et d'autres m'indiqueront ensuite s'ils veulent intervenir.

M. Hermanson: Merci, M. Pickard, d'avoir répondu en partie aux préoccupations que j'ai soulevées lors de la dernière séance du comité. Souvenez-vous que lors de cette séance vous nous donniez en fait un certain nombre de détails, à partir de vos notes, je crois, concernant l'application du service de consultation agricole.

Je vous ai mentionné qu'à partir du moment où vous aviez élaboré de manière aussi détaillée ce service de consultation, il fallait qu'il soit déposé devant la Chambre pour que l'on puisse se pencher sur quelque chose d'un peu plus concret que la simple promesse de mettre en place un service de consultation en même temps que la nouvelle loi sur la médiation. Voici quelle a été votre réponse:

J'apprécie que le ministre nous fasse parvenir une lettre, mais voilà qui n'expose pas clairement en quoi va consister ce service de consultation agricole. Vous avez poursuivi en ces termes:

Je vous ai alors demandé: «Ça peut être déposé devant la Chambre?» Et vous m'avez répondu: «Je n'y vois aucune difficulté.»

M. Pickard, lorsque vous comparaissez devant nous, nous estimons qu'en tant que secrétaire parlementaire, vous répondez au nom du ministre. C'est votre rôle devant ce comité. Je vous ai répondu «très bien», vous n'aviez plus rien à ajouter et le président a alors remercié le témoin. Je considère que cette lettre devrait être déposée devant la Chambre conformément à l'engagement que vous avez pris.

J'aimerais aussi voir le contenu de la note d'information que vous lisiez et qui précisait ce qu'allait apporter aux agriculteurs ce service de consultation agricole. Je pense que ce document devrait lui aussi être déposé et j'aimerais que cela soit fait.

J'ai un autre sujet de préoccupation. Il y a ici un document émanant du ministère au sujet des coûts. Il semble qu'il ait été élaboré de manière assez précipitée. Il fait état du coût des bureaux d'examen de l'endettement agricole au cours des cinq dernières années, le coût de la prise en charge de 3 538 demandes étant au départ en 1991-1992 de 11,4 millions de dollars pour en venir à des dépenses courantes de 3,5 millions de dollars correspondant à la prise en charge de 1 145 demandes. Dans la suite de ce texte, on peut lire:

On nous dit ensuite qu'il faudra faire une certaine publicité et que les deux choses pourraient finir par coûter 4 millions de dollars par an. Vous devez vous rendre compte que l'on envisage ici de dépenser davantage d'argent qu'il n'en coûte à l'heure actuelle à la fois pour apporter un arbitrage par l'intermédiaire du Bureau et pour fournir le service de médiation que le Bureau d'examen de l'endettement agricole dispense à l'heure actuelle aux termes de l'article 16. C'est pourquoi il nous apparaît très important d'avoir un peu plus de détails sur ce que sera ce service de consultation agricole. Puisque nous allons dépenser davantage d'argent, quelle contrepartie allons-nous en retirer alors que justement le nombre d'affaires traitées semble diminuer?

L'autre point important, c'est que le Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan qui a précédemment comparu devant nous comme témoin nous a déclaré qu'il traitait plus de la moitié des affaires prises en charge par l'ensemble des bureaux d'examen de l'endettement agricole et qu'il ne dépensait qu'un quart de leur budget. Je me demande donc pourquoi nous devons dépenser 3 à 4 millions de dollars dans les bureaux d'examen de l'endettement agricole du reste du Canada alors que la moitié des affaires sont traitées à un coût de 700 000 $ environ dans la seule province de la Saskatchewan.

Nous avons besoin d'un peu plus de renseignements. Nous avons besoin d'un peu plus d'éclaircissements sur la façon dont le gouvernement entend s'y prendre pour associer une loi à un service de consultation.

.0935

M. Pickard: C'est avec plaisir que je vais m'efforcer de répondre aux questions que vous venez de me poser.

Je pense que lorsque nous avons eu cet échange de vue, j'ai dit clairement que je ne voyais aucune difficulté, et je n'en vois toujours pas, à vous donner des renseignements aussi détaillés que possible sur le service de consultation agricole. Le ministère est tout à fait prêt à fournir tous les détails dont il dispose à ce sujet au moment où nous nous parlons. Ce n'est pas un problème.

Lorsque vous avez proposé que ce soit déposé devant la Chambre, je vous ai dit que je n'y voyais aucune difficulté, mais j'ai par ailleurs discuté avec vous de cette question, non pas lors de cette séance, mais par la suite... Je vous ai indiqué qu'il me fallait avoir l'autorisation du ministre. Je ne suis pas habilité à déposer ce document devant la Chambre.

En conséquence, comme je vous l'ai expliqué ici, je me suis effectivement adressé au ministre et je lui ai demandé de confirmer que ce service serait en place. Je pense que c'est le point essentiel sur lequel porte votre question. Le ministre a alors rédigé cette lettre, qui confirme que c'est bien le cas. Le ministre confirme pour quelle raison ce projet doit voir le jour.

J'ai pensé que c'était la meilleure solution de rechange que je pouvais vous proposer. Il est évident que lorsque je vous dis que je n'ai aucune difficulté à faire quelque chose, c'est toujours en partant du principe qu'un secrétaire parlementaire, quel qu'il soit, doit avoir l'aval de son ministre pour agir. Je dois vous avouer que dans le cas qui nous occupe, le ministre a estimé que la meilleure façon d'agir était de revenir directement devant le comité et de lui donner rapidement une réponse. C'est ce qu'a choisi de faire le ministre.

C'est ce que je me suis efforcé d'expliquer. Nous n'avons évidemment aucune difficulté à vous fournir un compte rendu détaillé.

Pour ce qui est de votre deuxième question, qui a trait aux coûts, il est clair, c'est tout à fait exact, qu'au titre du service de consultation que nous envisageons nous avons ajouté un certain nombre de dollars à notre budget précédent. Nous pouvons mettre à part 3,5 millions de dollars en disant que c'est ce que nous avons retenu au titre du projet de loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Nous avons ramené cette somme à 2,2 millions de dollars pour ce qui est du mécanisme de médiation dans la loi. Toutefois, pour être sûrs d'aller de l'avant et de nous attaquer au problème que nous jugeons fondamental, soit la possibilité de déceler et d'aider rapidement les agriculteurs risquant la faillite à l'avenir, la nécessité de faire du dépistage précoce nous a amené à faire un pas supplémentaire qui n'était pas prévu dans l'ancienne loi.

Après avoir écouté les représentants des milieux agricoles, les représentants de la Fédération canadienne de l'agriculture, tous les intervenants qui se sont intéressés à un moment donné à l'application de la loi, le ministère a estimé qu'il fallait s'assurer de pouvoir apporter une aide dès le début. Voilà donc ce qui explique le 1,8 million de dollars consacré au service de consultation. Il s'agit par là de donner des conseils, d'aider à trouver des recours, d'apporter un soutien professionnel aux agriculteurs qui en ont besoin pour se doter d'un plan d'entreprise.

En second lieu, il y a dans le 1,8 million de dollars un élément qui permet de s'assurer... et nous avons entendu M. Pomerleau s'inquiéter avant tout du fait que la plupart des gens n'étaient pas au courant des différents programmes existants. Le ministre s'est rendu compte que cela inquiétait beaucoup de gens. Sur ce 1,8 million de dollars, par conséquent, 250 000 $ serviront à faire connaître l'existence de ce programme à la population pour qu'elle puisse en tirer parti dès le départ. Il s'agit là d'un élément de coût intégré au départ au programme et que le ministère juge absolument indispensable si l'on veut que les milieux agricoles du Canada soient tenus au courant.

Nous avons donc le sentiment que même si nous dépensons 4 millions de dollars, comparativement à 3,5 millions de dollars jusqu'alors, nous faisons davantage pour l'information des milieux agricoles. Nous essayons de sensibiliser la population et d'intervenir plus tôt auprès des agriculteurs.

.0940

Ce que nous espérons, finalement, c'est qu'en adoptant cette démarche, en faisant en sorte que les gens s'adressent plutôt au service de consultation, on en retire par la suite un bénéfice au niveau de la procédure de médiation. Cela n'apparaîtra pas dans les premiers budgets, mais nous espérons que si nous réussissons effectivement à résoudre les difficultés des agriculteurs au tout début de leur apparition, ces derniers seront moins nombreux à devoir recourir au service de médiation à long terme. Il y aura donc des retombées positives aussi bien pour les milieux agricoles que pour les créanciers et pour tous ceux qui sont impliqués dans les exploitations agricoles. Nous estimons que c'est très important.

Voilà les chiffres que nous avons prévus dans notre budget. Il n'est pas sûr et certain que l'on s'en tiendra précisément aux chiffres prévus au budget, mais nous avons voulu absolument nous assurer que l'on dispose de recettes suffisantes pour que ce programme reçoive le feu vert.

Au cas où nous n'aurions pas suffisamment de fonds pour alimenter ce programme, nous avons aussi la possibilité, si le besoin s'en fait sentir, d'aller chercher des fonds dans d'autres secteurs. Nous savons tous que le nombre de cas d'insolvabilité fluctue dans notre pays selon la conjoncture économique et en fonction d'un grand nombre d'autres paramètres financiers qui caractérisent notre économie. Nous pensons donc pouvoir faire face à ces fluctuations, si elles se produisent, grâce à notre fonds d'adaptation.

M. Hermanson: Jerry, le budget actuel du Bureau d'examen de l'endettement agricole est de 3,5 millions de dollars. Dès à présent, le Bureau d'examen de l'endettement agricole consacre une plus grande part de ses ressources à la consultation qu'à l'arbitrage. Vous nous laissez donc entendre ici que cette nouvelle Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, qui se chiffre à 2,2 millions de dollars, va être plus coûteuse que le bureau actuel d'examen de l'endettement agricole alors que ce dernier fournit le même service. Autrement dit, le service dispensé au titre de l'article 20 de la Loi qui concerne le bureau d'examen de l'endettement agricole nous en donne davantage pour notre argent à l'heure actuelle que ne le fera la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole qui est proposée. Le service de consultation semble devoir être plus onéreux que les dispositions actuelles de l'article 16 de la Loi d'examen de l'endettement agricole. La formule que vous allez mettre en place va être plus coûteuse dans les deux cas et j'aimerais savoir pourquoi vous l'avez adoptée. Je ne suis pas sûr que ce soit une si bonne affaire. De plus, nous n'avons pas de détails en ce qui a trait au volet se rapportant à la consultation.

Avez-vous demandé au ministre si vous pouviez déposer vos propositions concernant le service de consultation agricole? Vous nous dites que vous ne pouvez pas le faire sans l'autorisation du ministre. Va-t-il vous en donner l'autorisation?

M. Pickard: Je vais demander aux fonctionnaires de mon ministère de vous répondre. Ils connaissent plus en détail les programmes précis et la façon dont vont s'articuler les dépenses.

Mme Lois James (gestionnaire, Politique d'adaptation, Direction générale des politiques, Agriculture et Agroalimentaire Canada): L'un des points importants à relever, c'est que ce programme, ainsi que le budget qui a été prévu, sont en très grande partie fonction de la demande. Si vous regardez la feuille à laquelle vous vous référez, vous pouvez voir que l'estimation des coûts est passée d'un maximum de 11,4 millions de dollars à 3,5 millions de dollars sur une période de cinq ans et que parallèlement le nombre de demandes a diminué. Il y a un certain montant de frais généraux à payer pour maintenir en place un ou deux employés dans chacun de nos bureaux au Canada de manière à assurer l'administration des services et à faire en sorte que quelqu'un soit là sur place lorsque les demandes sont présentées mais, pour le reste, tout est largement fonction de la demande. Nous payons les consultants ou les experts financiers qui s'occupent de chaque affaire, et c'est en fonction d'un tarif forfaitaire ou du nombre de journées de travail effectif. De même, nous versons une rémunération forfaitaire aux membres du bureau d'examen de l'endettement agricole ainsi qu'aux membres des groupes d'étude.

De ce fait, lorsqu'il y a très peu d'affaires, on dépense très peu d'argent au titre du programme. Au sein du programme actuel, en 1995-1996, vous avez pu remarquer que 3,5 millions de dollars étaient affectés au Bureau d'examen de l'endettement agricole et il y a eu 1 145 demandes. Selon nos estimations dans le cadre du nouveau programme et du service de consultation agricole, où nous avons prévu un budget de 1,8 million de dollars... ce budget part de l'hypothèse que l'on aidera entre 1 200 et 1 500 demandeurs. Une aide sera apportée à tous ces gens dans le cadre du service de consultation agricole.

Dans le cadre de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole qui est proposée, où l'on prévoit un budget de 2,2 millions de dollars - nous disons que l'on ne peut faire qu'une estimation étant donné que tout est fonction de la demande, de la conjoncture économique, du nombre d'agriculteurs qui se présentent et du montant de l'aide apportée - là encore, nous envisageons à peu près le même ordre de grandeur qu'à l'heure actuelle. Autrement dit, s'il y avait 1 145 demandes en 1995-1996, nos estimations portent essentiellement sur le même nombre de demandes dans le cadre du nouveau programme, et cela va nous coûter 2,2 millions de dollars.

.0945

Nous reprenons à peu près les mêmes chiffres que ceux qui découlent de la loi, et il y aura aussi un nombre supplémentaire de demandeurs qui seront desservis par le service de consultation agricole - y compris pour ce qui est des services d'orientation. Nous présumons que de nombreuses personnes vont venir nous demander de l'aide. Nous leur dirons que le service n'est pas disponible, qu'ils ne sont pas insolvables et qu'ils n'ont pas besoin d'aide financière, qu'il leur faut peut-être envisager de prendre conseil pour gérer le stress, d'aller voir un conseiller juridique ou une autre personne, et nous les renverrons donc devant ces intervenants. Mais là encore, il faut avoir pour cela des responsables sur place.

Le président: Avez-vous une question à poser, monsieur Hermanson?

M. Hermanson: J'aimerais avoir une précision. Ces 1 145 dossiers, est-ce qu'il ne s'agit que des demandes faites en vertu de l'article 20 ou est-ce que cela porte à la fois sur l'article 16 et sur l'article 20?

Mme James: Il s'agit de l'article 16 et de l'article 20.

M. Hermanson: C'est ce que je pensais. C'est pourquoi je vous ai dit que le nouveau service de médiation sera bien plus coûteux que le Bureau d'examen de l'endettement agricole, qui faisait à la fois de la médiation et de la consultation.

Mme James: Toutefois, il ne traitait qu'un nombre bien plus restreint de dossiers pour ce qui est de la consultation. Nous constatons, lorsque nous nous penchons sur les problèmes financiers que pose ce nouveau service, qu'il desservira de nouveaux clients qui ne l'étaient pas jusqu'ici. Enfin, il y a aussi la procédure d'orientation et nous estimons que dans ce secteur nous traiterons un bien plus grand nombre de dossiers.

Le président: Monsieur Pickard, vous n'avez pas répondu à ma question. Est-ce que le ministre refuse de déposer ces prévisions devant la Chambre?

M. Pickard: Il n'a pas refusé.

Monsieur Hermanson, je vous dis carrément que les chiffres lancés par le ministère correspondent à un service bien plus large que celui que nous avons à l'heure actuelle. Par conséquent, il est très clair que c'est un système bien plus efficace. C'est indéniable.

Si vous faites porter la comparaison sur un même nombre de personnes déposant une demande et bénéficiant d'un service selon qu'il s'agit du Bureau d'examen de l'endettement agricole ou de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, les coûts sont nettement moins élevés. Lorsqu'on tient compte des programmes supplémentaires que nous mettons en place, on s'aperçoit que l'on s'adresse à un nombre de demandeurs bien plus grand. Par conséquent, ce plus grand nombre de demandeurs bénéficie d'un service bien plus tôt, ce qui est très positif pour les milieux agricoles. Quel que soit l'angle sous lequel vous l'envisagiez, nous dispensons des services dans le cadre de cette nouvelle loi - associée au programme des services de consultation - qui répondent aux besoins d'un bien plus grand nombre de gens dans les milieux agricoles.

Le président: Monsieur Easter.

M. Easter (Malpèque): Merci, monsieur le président. Je pense, monsieur le président, que je vais avoir besoin d'un deuxième tour de questions avant même d'avoir commencé.

Pour reprendre les questions posées par M. Hermanson au sujet de ces sommes de 2,2 millions de dollars et de 1,8 million de dollars, est-ce que ces 250 000 $ de frais de publicité sont annuels?

M. Pickard: C'est le chiffre qui a été retenu dans le budget pour l'instant. Je vais demander aux fonctionnaires de vous répondre quant à savoir si cela doit se poursuivre sur une période de plus de quatre ans, c'est je crois la durée qui a été prévue.

Mme James: Nous avons prévu ce montant avant tout pour la première année car nous savons tous que lorsqu'un programme est annoncé au départ et lorsqu'il est mis en route, il faut faire davantage de publicité pour le faire connaître. Il y aura des brochures et toutes sortes de campagne de sensibilisation qui s'avèrent indispensables.

À l'origine, nous avions affecté à ce poste un montant inférieur. C'est à la suite des consultations que nous avons menées - plus particulièrement avec la FCA, mais aussi avec d'autres organisations agricoles - que nous nous sommes bien rendu compte qu'à partir du moment où nous avions un programme, il fallait nous assurer qu'il soit connu et prêt à être mis à la disposition des gens. Je crois que lorsqu'il a comparu devant vous, le Bureau d'examen de l'endettement agricole de l'Ontario a bien insisté lui aussi sur la nécessité de promouvoir le programme et de le faire connaître. C'est pourquoi nous avons augmenté notre budget, mais il est peu probable que l'on ait besoin d'autant d'argent à l'avenir.

M. Easter: Cela permettrait en outre de libérer des fonds, même si malheureusement j'ai bien l'impression que nous soyons au creux de la vague quant à l'utilisation de ces bureaux étant donné que l'on se préoccupe de plus en plus des questions de recouvrement des coûts.

Jerry, lorsque vous avez répondu à une autre question posée par M. Hermanson, vous nous avez finalement laissé entendre que si nous manquions d'argent, que ce soit au titre du service de consultation agricole ou dans le cadre de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, il serait possible d'en trouver ailleurs, probablement dans des secteurs comme celui des fonds d'adaptation. Voilà qui me préoccupe.

.0950

Hier, au moment des questions, j'ai fait état devant le président du Conseil du Trésor de deux préoccupations - et je vais ici lier les deux questions.

Vous n'ignorez pas que le fait que le service de consultation ne soit pas intégré à la loi me préoccupe. J'ai d'ailleurs ici préparé des amendements pour qu'il soit incorporé à la loi, mais je me demande s'il me faut ou non les retirer. Ce que je crains, entre autres, c'est que l'on ne dispose pas ici d'une marge de manoeuvre suffisante pour parvenir aux règlements financiers qui sont souhaités si le service de consultation n'est pas incorporé à la loi. A-t-on une marge de manoeuvre suffisante pour convaincre les banques d'en venir à la meilleure entente possible?

En second lieu, pour en revenir au président du Conseil du Trésor, si à un moment donné on revoit tout le programme - ou si l'on prend toute autre mesure de ce type - et s'il y a des compressions budgétaires, un autre problème va se poser alors. En réponse à la question que je lui ai posée hier, le président du Conseil du Trésor a déclaré que le ministère procédait à une analyse d'impact et que s'il se rendait compte que l'imposition de frais aux utilisateurs avait des répercussions imprévues ou négatives, il avait alors toute liberté - je veux parler du ministère - pour changer ses politiques. Je veux dire par là que lorsqu'on s'en tient au principe du recouvrement des coûts - et je pense que l'on constate aujourd'hui que les exportateurs de porcs vers le Mexique ont pratiquement été mis hors circuit en raison des frais aux incidences multiples qui ont été imposés dans ce secteur - si le ministère décide de réduire les crédits versés dans ce secteur à la suite de son analyse, il est possible qu'il prélève une partie des fonds consacrés au service de consultation. C'est ce qui m'inquiète. Nous savons bien à quel point on jongle avec les fonds à l'intérieur du ministère.

En second lieu, et les deux choses sont liées, vous nous avez dit que cet argent proviendrait éventuellement des crédits internes du ministère, du fonds d'adaptation rurale. J'ai bien peur ici que les politiques globales du gouvernement, et non pas simplement celles du ministère de l'Agriculture, aient des répercussions négatives sur la situation des agriculteurs qui sont d'ores et déjà en difficultés financières dans les régions rurales, et ce n'est donc pas simplement à Agriculture Canada qu'il faut faire appel pour obtenir ces crédits, c'est au gouvernement en général. Le ministre Massé a déclaré hier - je le cite:

Je vous demande de ne pas dire si vite que nous allons trouver les fonds à l'intérieur du ministère parce que je crois qu'il y a ici une responsabilité globale du gouvernement vis-à-vis des régions rurales du Canada. Qu'en pensez-vous?

M. Pickard: C'est tout à fait vrai. Je suis entièrement d'accord avec vous. Le gouvernement a bien évidemment une responsabilité globale et il doit s'assurer que tout fonctionne, et pas seulement le mécanisme de médiation. Il suffit de se pencher sur les chiffres des cinq dernières années pour constater qu'il y a des différences énormes au niveau des montants. Comme je l'ai fait observer, il est évident que tout cela dépend de la conjoncture économique dans le pays, qu'il s'agisse d'un problème de commercialisation d'un produit en particulier, que ce soit tout simplement la faute des taux d'intérêt élevés ou qu'il y ait d'autres facteurs. Nous savons qu'il y a toute sorte de facteurs qui ont eu des effets prononcés sur les milieux agricoles. On procède donc chaque année à des estimations pour savoir ce que vont coûter ces programmes et l'on tient compte de tous les facteurs qui apparaissent primordiaux pendant la période donnée.

Ce que je m'efforce de faire, c'est de vous garantir que dans le cadre du scénario qui semble se profiler cette année, nous allons affecter 2,2 millions de dollars au fonds de médiation. Par contre, ce n'est pas nécessairement ce que va nous coûter ce fonds dans deux ans ou à plus long terme et il nous faut donc nous donner les moyens de garantir ce soutien. Ce programme est donc intégré aux comptes de financement des programmes d'adaptation et il est important de faire en sorte que les fonds affectés dans le cadre de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole soient bien disponibles.

.0955

Nous savons qu'au niveau de la consultation - et c'est la raison pour laquelle ce programme a été mis en place - on va résoudre les problèmes bien plus tôt, que ça coûtera moins cher, que l'on aidera davantage le milieu agricole, tous les créanciers en cause, les petits créanciers qui n'ont pas de garantie et qui souvent sont les plus gros perdants dans toute cette opération. Si nous réussissons à écarter certains problèmes plus tôt, il nous sera possible d'aider la collectivité en évitant une partie des difficultés ultérieures liées à la médiation.

N'oubliez pas qu'avec ce service de consultation, on part du principe qu'il faut essayer d'aller aider les gens, sans alerter les créanciers et sans entamer de négociation avec ces derniers, en cherchait à les orienter et en examinant la situation d'un point de vue économique. Nous visons donc à élargir le programme que nous avons à l'heure actuelle et à intervenir plus tôt. J'espère que cela rapportera des dividendes plus tard, mais toutes les difficultés économiques qui se feront sentir dans le pays continueront à influer sur le nombre d'affaires que nous allons traiter, de sorte qu'il nous faut disposer d'une marge de manoeuvre budgétaire d'une année à l'autre.

M. Easter: C'est justement ce qui m'inquiète, Jerry. Le cloisonnement de nos services gouvernementaux et la toute puissance du Conseil du Trésor continuent à me préoccuper.

Je considère effectivement, monsieur le président, qu'il appartient à notre comité, chargé des questions agricoles, de trouver les moyens de régler cette question, parce que les bureaucrates du Conseil du Trésor, à mon avis, ne comprennent pas quelles sont les incidences de nos décisions sur la viabilité économique à long terme du monde agricole.

Vous nous parlez d'intervenir très tôt auprès des gens et de résoudre les difficultés, mais je vois le problème d'un autre angle. Ce serait trop beau si les choses étaient si simples et j'ai eu l'occasion de me pencher sur d'innombrables cas d'exploitations agricoles en difficulté financière. Je peux vous dire que lorsqu'on cherche à résoudre une situation de ce type, si l'on se trompe la première fois, il n'y a pas de deuxième fois.

Cela me ramène à la question de la marge de manoeuvre. Vous nous dites que l'on ne va pas alerter les créanciers... Je peux vous affirmer que lorsqu'un agriculteur est en difficulté financière sans être insolvable, il est en retard de 60 ou de 90 jours sur le paiement de certains comptes. Il y a des créanciers non privilégiés qui ne savent plus où donner de la tête.

Il va falloir vous adresser à ces créanciers. Il va vous falloir les avertir. Il va vous falloir leur demander de rabattre 50¢ sur chaque dollar qui leur est dû. Il va vous falloir peut-être vendre une partie du matériel, des têtes de bétail ou des terrains pour parvenir à un règlement. Si vous ne disposez pas d'une certaine marge de manoeuvre pour parvenir à rabattre 50¢ sur chaque dollar ou quelque chose comme ça, selon la situation...

Mettez-vous à la place de l'agriculteur. Vous savez que vous avez besoin, pour parvenir à un règlement et pour rester en activité, disons de 50¢ sur chaque dollar qui est dû. Les créanciers vous répondent alors qu'ils exigent un minimum de 70¢. Vous avez peur de perdre votre exploitation. Je peux vous dire que l'amour propre joue beaucoup dans un tel cas. C'est la moitié du problème.

Vous êtes donc là et vous vous dites que vous n'avez plus de marge de manoeuvre. Il vous faut donc accepter de payer 70¢ sur chaque dollar et, à moins d'un miracle, vous devrez cesser vos activités. J'ai vu des cas où le miracle ne se produit jamais à moins que l'on réussisse à obtenir 50¢ sur chaque dollar. C'est là où on peut se demander si ce service de consultation agricole va bien vous apporter le type de règlement vous permettant de rester en activité. Si vous en arrivez à une entente avec les créanciers sans que cela donne des résultats escomptés, lorsque vous revenez les voir une deuxième fois, comme l'on dit ici certains des témoins, tout se ramène à une question de confiance et à la question de savoir si vous pouvez réussir. Si vous avez échoué la première fois alors que vous en êtes arrivé à un concordat, ce climat de confiance et de bonne volonté va être pratiquement impossible à rétablir. C'est ce que je crains.

M. Pickard: Je dois reconnaître que ce que vous dites est en grande partie vrai. Je n'ai aucun argument à vous opposer. Je me contenterai de faire rapidement quelques commentaires et je demanderai ensuite aux fonctionnaires de vous répondre.

.1000

En ce qui concerne ces consultations, l'idée n'est pas de négocier avec les créanciers ou de parvenir avec eux à des arrangements. Il s'agit d'intervenir plus tôt que cela. D'après nous, le service de consultation interviendrait avant que le créancier ne vienne frapper à la porte de l'agriculteur et que celui-ci soit obligé de parvenir à un arrangement avec ses créanciers. Cette étape des négociations n'appartient pas au consultant. Cela relève de la médiation. À partir du moment où l'intéressé est vraiment poussé par ses créanciers qui exigent d'être payés, c'est un autre processus qui entre en jeu. Il s'agit du même processus que pour les bureaux d'examen de l'endettement agricole, sauf que ce serait un processus de médiation.

Je rends maintenant la parole aux représentants de l'administration qui vous en diront davantage sur ce point.

Mme James: Une précision concernant le cas des agriculteurs insolvables que prévoit le projet de loi sous sa forme actuelle... L'important serait peut-être d'examiner la définition d'«agriculteur insolvable». Je pense que les personnes dont vous évoquiez le cas pourraient déposer une demande en vertu de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Ceux qui ne l'ont pas déjà fait se verraient conseiller de le faire car ce serait pour eux le moyen de trouver l'aide dont ils ont besoin.

C'est à l'article 6 de la loi qu'on trouve une définition de ce qu'on entend par insolvabilité. Cette disposition édicte trois critères d'admissibilité. Le premier cas est celui des personnes qui ne sont pas en mesure de respecter leurs obligations au fur et à mesure des échéances. Vous parliez de personnes qui ont 30, 60 ou 90 jours de retard et vous évoquiez le cas des créanciers non garantis qui pourraient n'être remboursés qu'à concurrence de la moitié de ce qui leur est dû.

Tout agriculteur qui, selon cette définition, n'est pas en mesure de régler ses échéances pourrait, il est clair, invoquer les dispositions de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Selon cette loi, il aurait pleinement accès au mécanisme d'examen de sa situation financière et il pourrait obtenir une réunion de ses créanciers.

Conformément à l'alinéa 5(1)b) de la loi, l'agriculteur ne demande pas alors une suspension des procédures engagées contre lui. Autrement dit, dans cette hypothèse, si les créanciers n'ont pas encore signifié un avis d'intention et que l'agriculteur en question fait savoir qu'il a des difficultés avec certains créanciers garantis, qu'il s'agisse d'une banque, de la SCA, ou d'une autre institution de ce genre, et qu'il aimerait recourir au processus de médiation afin de pouvoir se réunir individuellement avec ses quelques créanciers garantis sans avoir à réunir en même temps l'ensemble des créanciers non garantis - qui peuvent comprendre aussi bien le marchand d'aliments pour bétail, que le marchand d'engrais. Autrement dit - il ne veut pas alerter ses fournisseurs. Mais, s'il constate que le problème est plus vaste et qu'il entend effectivement réunir l'ensemble de ses créanciers, surtout s'il s'agit d'obtenir une suspension des procédures, il invoquera l'alinéa 5(1)a).

Je pense que si nous examinons les définitions concernant la cessation de paiement ou l'évaluation de l'actif - soit le passif est plus important que l'actif, soit l'intéressé ne fait pas face à ses échéances - c'est ce genre de personne-là qu'il s'agit d'aider et c'est bien l'objet du texte de loi.

M. Easter: J'aurais, un peu plus tard, plusieurs questions plus précises à vous poser.

Le président: Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Chrétien: La définition de l'agriculteur que M. Pomerleau a faite contenait une allusion à l'exclusion de l'agriculteur du dimanche, et vous avez à votre tour utilisé cette expression. Je connais de ces agriculteurs et je pourrais en nommer, par exemple Bobby Hull, l'ex-étoile du hockey, qui exploite une grosse ferme d'élevage de bovins de boucherie.

[Traduction]

Le président: En fait, c'est dans ma circonscription et Bobby Hull est un de mes électeurs.

Allez-y.

[Français]

M. Chrétien: Je pense qu'il consacre maintenant beaucoup plus de temps à sa ferme. Je connais également, dans la région de Rimouski, le propriétaire d'une pizzeria qui s'est lancé, lui aussi, dans l'élevage de bovins de boucherie et qui ne va à sa ferme que le dimanche.

Cela étant dit, ne faudrait-il pas prévoir un minimum de mise en marché, parce qu'autrement, c'est très subjectif? On dit que cette personne exploite une entreprise agricole à des fins commerciales. Qui exploite une entreprise agricole sans mettre en vente, un jour ou l'autre de l'année, ses produits, que ce soit des animaux ou des produits agricoles?

.1005

Je voudrais vous rappeler qu'au Québec, pour être reconnu agriculteur, il fallait antérieurement mettre en marché des produits d'une valeur d'au moins 3 000 $. Comme c'était nettement insuffisant, on a porté cette somme à 10 000 $. Le gouvernement québécois ne reconnaît pas un agriculteur s'il ne peut prouver qu'il a vendu pour 10 000 $. S'il a vendu pour 9 600 $, il n'a pas droit aux avantages reconnus aux agriculteurs au Québec. Vous allez dire comme moi, monsieur Pickard, qu'il a fait de la mise en vente et qu'il a exploité sa ferme de façon commerciale, mais selon notre définition, comme il n'a pas atteint le seuil minimum de 10 000 $, nous sommes muets à cet égard. Je crois donc que ce serait une position très subjective que de parler de «fins commerciales» quand on ne sait pas où ça commence et où ça finit.

Ma deuxième question ne concerne pas le projet de loi comme tel, mais plutôt des notes que nous avons reçues du ministère concernant des questions d'ordre général sur la nouvelle loi C-38. Lorsqu'on parle des médiateurs, on parle ici de former des personnes qui ne seraient pas tout à fait compétentes pour jouer le rôle d'un médiateur, mais on fait également allusion au fait qu'on pourrait dresser une liste des médiateurs à partir d'un marché concurrentiel. Je suis un peu intrigué que l'on parle d'un marché concurrentiel. Est-ce qu'il pourrait y avoir deux ou trois tarifs différents d'un médiateur à l'autre pour faire sensiblement le même travail?

Dans une région donnée où il y aurait plusieurs médiateurs en fonction, étant donné qu'il y aurait un marché de l'offre et de la demande, on pourrait payer nos médiateurs beaucoup moins cher que dans une autre région où il n'y aurait qu'un seul médiateur. Il pourrait même n'y avoir aucun médiateur et on serait obligé d'aller en chercher un qui serait sur une liste officielle, mais qui ne serait pas mandaté comme tel. Le médiateur pourrait alors être un avocat ou un comptable qui travaillerait à la pige pour le ministère.

Je demanderais donc à M. Pickard ou à ses collaborateurs ou collaboratrices de nous parler de la reconnaissance d'un agriculteur qui exploite une ferme à des fins commerciales, et également de la nomination des médiateurs et du marché concurrentiel des médiateurs.

[Traduction]

M. Pickard: M. Chrétien, je vous remercie de m'avoir posé cette question. Il faut effectivement s'interroger sur ce point.

S'agissant de définir ce qu'on entend par «agriculteur», afin de mieux cerner cette réalité, l'expression que j'avais utilisée «agriculteur amateur», s'entend de quelqu'un qui a une exploitation agricole mais qui n'a aucunement l'intention d'en tirer des bénéfices commerciaux.

Vous apercevrez également qu'il peut s'agir de propriétaires terriens qui n'ont jamais fait d'agriculture commerciale. Nous avons également relevé le cas de personnes qui possèdent des terres et qui, bien qu'ils n'en aient jamais tiré d'avantage commercial, ont pu déposer une demande en vertu de la loi. D'après nous, cela était injuste envers les agriculteurs. Nous ne pensons pas que les personnes qui n'utilisent pas leur ferme à des fins commerciales devraient pouvoir déposer une demande en invoquant cette disposition.

En ce qui concerne la seconde partie, s'agissant des Bobby Hull, qui peuvent très bien avoir une exploitation rentable, et bien oui, ces personnes-là seraient admissibles. Nous constatons que les Bobby Hull ne sont pas aussi nombreux qu'il paraît, mais qu'il y a de nombreux agriculteurs qui occupent aussi un emploi dans une usine ou, enfin, en dehors de leur exploitation agricole, ou dont le conjoint occupe un tel emploi. Les revenus tirés de ces emplois peuvent être beaucoup plus élevés que le revenu provenant de leur exploitation agricole. On ne veut pas les exclure, même si leur revenu principal ne provient pas de leur exploitation agricole. Il peut très bien s'agir de personnes qui jouent un rôle important au sein de notre agriculture et nous voulons veiller à ce qu'elles soient protégées dans le cadre de la loi.

.1010

C'est pour cela que la définition a été ainsi structurée. En gros, cela exclut les personnes qui, même si elles sont propriétaires, n'exploitent aucune entreprise agricole, et aussi les personnes qui, même si elles possèdent une ferme, n'ont jamais fait d'agriculture commerciale. Cela dit, nous voulons que toutes les autres personnes qui possèdent une exploitation agricole commerciale puissent, en cas de besoin, déposer une demande au titre de la loi.

Le second point que vous avez soulevé - et je laisserai aux représentants de l'administration le soin de vous en dire davantage s'ils jugent utile de le faire - concernait les médiateurs. La solution la plus simple consisterait peut-être à instaurer un processus permettant d'engager des médiateurs contractuels à qui l'on confierait ensuite la médiation, mais nous savons tous les deux que, parmi les personnes exerçant des responsabilités, certaines ont des dons et font d'excellents médiateurs. Ce sont des personnes qui ont la confiance de tous.

Il s'agit, dans le cadre de la structure que nous avons essayé de mettre sur pied, de disposer, dans chaque province, d'un grand nombre de médiateurs. Si, donc, dans une province donnée, nous avions cinq ou dix médiateurs... Ce n'est pas le nombre de médiateurs prévu qui pèsera sur les coûts. Les médiateurs, en effet, ne sont payés que lorsqu'ils se voient confier un dossier. Ils sont, en quelque sorte, en réserve, prêts à intervenir.

À supposer qu'un médiateur n'exerce pas correctement ses fonctions, l'administrateur ne lui confiera pas d'autres dossiers. Cela serait inutile. Cela, en plus, susciterait des inquiétudes au sein de la communauté agricole.

Les personnes qui figureraient sur les listes de réserve, celles à qui l'on ferait appel, sont celles qui feraient de bons médiateurs. Nous aurons également des médiateurs en réserve, et c'est pour cela que les listes sont aussi longues. Il s'agit d'assurer que le travail sera confié à de bons médiateurs, c'est-à-dire à des personnes qui ont les aptitudes nécessaires, qui peuvent faire ce que l'on attend d'eux, c'est essentiellement cela...

Peut-être que les représentants du ministère pourraient nous en dire un peu plus à cet égard.

Mme James: Permettez-moi, d'abord, de répondre à votre observation concernant la définition de ce qu'est un agriculteur. Je suis d'accord. Il est toujours difficile de parvenir à une définition. Je sais que, dans le cadre des diverses lois, aussi bien fédérales que provinciales, il a souvent été difficile de parvenir à une définition. La définition qu'en donne la Loi sur l'examen de l'endettement agricole est très large. En fait, elle ne contient aucune restriction. Selon cette définition, est agriculteur toute personne se livrant à l'agriculture. Et là, l'agriculture comprend à peu près tout, y compris les boisés, le sirop d'érable, le tabac, la culture agricole et l'élevage du bétail, enfin tout. La définition actuelle est très large. Elle ne contient aucune restriction.

Si l'on demande d'apporter des restrictions à cette définition, c'est à cause des problèmes auxquels a donné lieu son application, particulièrement dans les zones proches des agglomérations urbaines. On se trouve parfois devant ce qu'on a appelé des «agriculteurs de Bay Street». En Ontario, notamment, les bureaux d'examen de l'endettement agricole se sont aperçus qu'un certain nombre de personnes s'étaient prévalues de la loi afin d'empêcher à un créancier de s'en prendre, non seulement à leurs biens agricoles, mais également à leurs autres biens. L'idée était donc de resserrer un peu le dispositif...

Oui?

Le président: Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Chrétien: Je vous prie de m'excuser, mais je dois aller à la Chambre des communes. Je vous invite à poursuivre. Mon collègue, M. Landry, va rester pour vous écouter. Je ne voudrais pas vous paraître impoli. Je vous ai posé une question et je ne reste pas pour écouter la réponse, mais soyez sûr que je lirai les rapports. Merci.

[Traduction]

Mme James: Merci. Je comprends.

Nous avons essayé, dans le cadre de la loi, de parvenir à une définition qui exclurait un certain nombre de cas. M. Pomerleau a évoqué celle que contient la Loi sur la faillite et l'insolvabilité qui s'applique aux personnes pour qui l'agriculture est l'occupation et le moyen de subsistance principaux. À l'époque, nous avons également, avec notre conseiller juridique, examiné cette définition, ainsi d'ailleurs que d'autres qui lui ressemblent assez.

.1015

Le problème, avec ce type de définition assez étroite, est que, souvent, les personnes qui éprouvent des difficultés financières ne se retrouvent pas du jour au lendemain dans ce genre de situation. Il s'agit de problèmes qui s'accumulent depuis plusieurs années. Ainsi, une définition trop étroite aurait pour effet d'écarter ces personnes en raison de leur situation financière. Les gens étant assez débrouillards, ils ont pu trouver une autre source de revenu: un revenu d'emploi, un revenu non agricole ou quelque chose comme cela. Or, ce genre de définition aurait pour effet de les écarter au motif qu'ils ont, au cours des quelques dernières années, eu à se trouver un emploi. Mais, leur exploitation agricole est effectivement en difficulté et si ces personnes ne peuvent pas, aux termes d'une définition très restrictive, se livrer principalement à l'agriculture, c'est justement parce que leur exploitation agricole n'est pas solvable... et ne leur fournit plus les moyens de gagner leur vie et de pourvoir à l'entretien de leur famille.

Voilà, en fait, la définition. C'est pour cela que nous avons voulu exclure ceux qui pourraient contourner l'objet du projet de loi, mais pas ceux pour qui l'agriculture n'est pas, à proprement parler, l'occupation principale puisque leur revenu agricole ne leur en donnait pas la possibilité.

Le président: Monsieur Landry, avez-vous des commentaires à faire sur cela?

M. Landry (Lotbinière): Non.

Le président: Avant de passer à M. Hoeppner, j'aimerais continuer un peu dans cette voie.

M. Pickard: Monsieur le président, avec votre permission, il faut que je me rende à la Chambre.

Le président: Entendu. Je vous remercie, Jerry.

Poursuivons. Je dois dire que cela me préoccupe, moi aussi, et je ne sais pas vraiment comment régler le problème étant donné que, pour de multiples raisons, la question de savoir qui est un agriculteur et qui ne l'est pas n'a jamais pu être tranchée. J'ai déjà eu l'occasion de me pencher sur certaines définitions, selon lesquelles seraient considérées comme un agriculteur les personnes ayant vendu pour au moins 5 000 ou 6 000 $ de produits agricoles, ce qui ne nous ouvre guère de perspectives.

Je dois vous dire, à vous fonctionnaires, que je crains un peu que la définition parlant de personnes qui se livrent à l'agriculture «à des fins commerciales» crée une catégorie peut-être plus large que ne me semblerait... Je sais que cela préoccupe également l'Association des banquiers canadiens, dont la lettre sera distribuée dès qu'elle aura été traduite. Je ne parle pas en leur nom, mais je reprends les mêmes expressions.

Je ne crois pas me tromper en disant que dans la Loi de l'impôt sur le revenu, l'agriculteur est celui qui a «une expectative raisonnable de profit». Ce que je me demande c'est comment définir «fins commerciales». Je suis sûr que l'agriculteur amateur - bien que, là encore, je ne sois pas certain des limites de la catégorie - oeuvre en général à des fins commerciales. Il peut s'agir de quelques bovins de race ou d'un élevage de chevaux mais, j'imagine, qu'il va leur arriver de vendre certaines de ces bêtes. Cela permet-il de ranger ces personnes-là dans la catégorie des gens qui agissent «à des fins commerciales»?

Je pourrais même me situer de l'autre côté de l'argument. J'imagine que les administrateurs parviendront à faire un tri. Prenons le cas de la personne qui se présente devant un administrateur et qui, visiblement, veut parvenir à un arrangement afin de n'avoir à payer au port de plaisance que la moitié de ce qui lui est dû pour l'achat d'un bateau qui demeure peut-être amarré là. L'administrateur va peut-être répondre «Eh bien je ne sais pas très bien si nous devrions accepter votre dossier». Mais dans ce cas-là, que fera-t-on si l'intéressé dit «Eh bien, j'ai un troupeau de herefords pure race, j'en vends parfois à des fins commerciales et j'estime donc pouvoir me prévaloir de cette loi»?

Mme James: Comme vous l'avez bien montré, cette définition comporte beaucoup de difficultés. L'objet est ici de fournir un service de médiation et, pour permettre à un tel processus de se dérouler, de préserver en l'état certaines situations. Songez à ce que le projet de loi prévoit à l'égard du genre de personnes dont nous évoquions le cas, ceux qui ne sont pas véritablement des agriculteurs. On voit que le principal problème, au niveau de la loi actuelle et de la définition actuellement retenue, se pose à l'égard des personnes qui entendaient réclamer abusivement la suspension des procédures. Du point de vue des créanciers, c'était effectivement l'intention de certaines personnes invoquant ou tentant d'invoquer cette loi - à des fins tout autre, et se rattachant en général à d'autres types d'activités. C'est simplement que ces personnes possédaient une propriété à la campagne où, en fin de semaine, elles cultivaient leur jardin. Parfois, il s'agissait de personnes qui possédaient des terres mises en location, mais ce n'était pas des personnes dont on pourrait dire qu'elles exploitaient une entreprise agricole à des fins commerciales.

.1020

Voilà le véritable but. S'agissant des risques d'abus, ce n'est pas comme certains autres programmes ouvrant droit à des prestations financières. Ici, l'aspect financier ne résulte que du processus de médiation. Il s'agirait donc d'aboutir à une définition plus étroite que celle qui figure actuellement dans le texte, afin de permettre, comme vous le dites vous-même, aux administrateurs d'écarter les personnes ingénieuses qui ont pu invoquer cette loi à des fins étrangères à son objet réel.

Le président: Je pense au cas précis d'une personne qui possède un verger avec quatre ou cinq acres de pommiers. La récolte aura une valeur considérable. L'intéressé a également un poste d'enseignant, ou du moins en avait un. J'imagine que quelqu'un serait obligé de prendre une décision dans ce cas: l'intéressé exploite-t-il une entreprise agricole à des fins commerciales? Je dirais pour ma part que oui. Ce ne serait pas le cas s'il avait trois ou quatre arbres fruitiers, mais il s'agit là d'une exploitation agricole suffisamment importante pour qu'on la considère comme une exploitation commerciale. D'autres répondraient que l'intéressé a toujours exercé le métier d'enseignant et que c'est ça son occupation principale, l'agriculture n'étant pour lui qu'une occupation secondaire.

Relève-t-il des dispositions de ce projet de loi? J'imagine que les administrateurs auront à en décider. La décision n'est pas facile. Elle peut prêter à controverse. J'imagine que cet argument pourrait facilement être invoqué.

Diane.

Mme Diane Fillmore (conseillère juridique, Services juridiques, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Je voulais simplement ajouter que, d'après moi, le projet de loi contient deux mesures de sauvegarde. D'abord, la suspension pourra être levée si la majorité des créanciers ne participent pas à la médiation. En pareil cas, si les créanciers estiment que l'intéressé n'est pas un agriculteur et que sa situation ne relève pas véritablement des dispositions de la loi, ils ne participeront probablement pas à la médiation et la suspension des procédures sera levée. Mais, en plus, il y a le comité d'appel auquel peut s'adresser aussi bien l'agriculteur que le créancier, les deux pouvant ainsi contester la décision touchant le statut d'agriculteur. Voilà le genre de mesures de sauvegarde prévues par le texte.

Si vous tentez de donner une définition trop précise de ce qu'est un agriculteur, vous finirez peut-être par écarter de la définition des gens que vous ne voulez pas vraiment en écarter. Sous sa forme actuelle, la définition conserve une certaine souplesse au niveau de la catégorie, mais les mécanismes prévus ne seront probablement appliqués qu'aux personnes pour lesquelles ils ont été conçus.

Le président: Une dernière observation. Vous nous avez donné des précisions au sujet des appels... et ce n'est probablement pas exactement de cette manière-là que j'avais vu la chose. L'individu peut non seulement faire appel des résultats du processus auquel il aura participé - disons des résultats de la médiation - mais il peut également faire appel de la décision de l'écarter de ce processus. S'agissant du cas évoqué tout à l'heure, du propriétaire du verger, si l'administrateur lui avait répondu que non, je ne pense pas que vous soyez agriculteur, ou que vous le soyez suffisamment - si vous me permettez de m'exprimer ainsi - et, par conséquent, nous ne pensons pas devoir accepter votre dossier, l'intéressé peut-il aller devant le comité d'appel et prétendre que oui, j'estime appartenir à la catégorie prévue?

Mme Fillmore: C'est effectivement l'une des deux questions que les comités d'appel sont appelés à trancher, à savoir la prolongation ou la levée de la suspension et l'admissibilité de l'agriculteur.

Mme James: Une autre précision. Le comité d'appel ne peut pas connaître des résultats de la médiation. Autrement dit, si l'une ou l'autre des parties est mécontente de l'issue de la médiation, il n'est pas possible de faire appel devant le comité.

Le président: Mais, nous pourrions peut-être... Je ne cherche pas à prolonger le débat. Jake, soyez patient avec moi, il faut régler le problème.

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Regardez le paragraphe 15.(2), de la rubrique «Demande», on trouve:

l'admissibilité d'un agriculteur à faire une demande en vertu de l'alinéa 5(1)a).

- c'est-à-dire la possibilité de demander une suspension.

Mais peuvent-ils faire appel d'une décision prise au titre de l'alinéa 5(1)b), dans le cas, invoqué plus haut, d'un verger de cinq acres et d'un poste d'enseignant? L'intéressé déposerait probablement d'abord une demande en vertu de l'alinéa 5(1)b). Si l'administrateur répond qu'il ne saurait invoquer cette disposition - c'est, je crois, d'abord à l'administrateur que l'on doit s'adresser - et bien c'est cette décision-là qui ne peut pas faire l'objet d'un appel. Si l'administrateur oppose un refus, en disant que vous n'êtes pas, d'après lui, suffisamment agriculteur, et bien c'est fini...

Mme Fillmore: L'intéressé a alors la possibilité de déposer une demande en vertu de l'alinéa 5(1)a). Si l'administrateur maintient son refus, l'intéressé peut faire appel.

Le président: Entendu. Jake.

M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Merci, monsieur le président. J'aimerais revenir à la question des agriculteurs amateurs.

Je sais qu'au Manitoba on a quelque peu modifié les règles dans ce domaine. Ainsi, le propriétaire d'une ferme d'agrément ne peut déduire, sur ses frais d'exploitation, que la somme de 5 000 $.

Y a-t-il effectivement des personnes qui se livrent à une agriculture de plaisance? La plupart des petits propriétaires que je connais, font de l'agriculture pour gagner leur vie ou pour améliorer leur ordinaire parce que les impôts sont trop élevés en ville ou parce que leur salaire est trop bas. Mais alors, que va-t-on prévoir pour ces personnes-là? Il s'agit, selon la Loi de l'impôt sur le revenu, d'agriculteurs amateurs.

Mme James: Dans ce cas-là, s'ils élèvent ou font pousser un produit agricole - qu'il s'agisse de bétail ou de cultures - et qu'ils le vendent et en tirent un revenu, ils seront admissibles.

M. Hoeppner: Cela correspondrait-il à la définition d'agriculteur amateur de la Loi de l'impôt sur le revenu?

Mme James: Non, et...

M. Hoeppner: Car cela pose un sérieux problème.

Mme James: Encore une fois, si l'on considère l'objet de la loi et les avantages qu'on en attend, il faut conclure que, s'il s'agit d'agriculteurs amateurs qui sont en train de perdre leur ferme ou qui risquent de la perdre parce qu'ils sont incapables de payer leurs créanciers, on suppose que ces personnes disposent également d'un autre revenu - peut-être même d'un revenu important - de source non agricole.

Il faut voir alors les avantages qu'ils pourraient tirer des nouvelles dispositions et savoir si, effectivement... Peu d'agriculteurs amateurs se retrouvent dans une situation où ils risquent de perdre la ferme - peut-être devrait-on dire les terres - qu'ils habitent, s'ils disposent d'un revenu important provenant d'une autre source.

Dans les zones proches des agglomérations urbaines, notamment, où ce problème s'est posé, les gens qui ont tenté d'invoquer la loi en de telles circonstances entendaient en fait éviter, par ce moyen-là, des mesures visant leurs autres investissements. En fait, ce n'était pas vraiment leur ferme qui allait être saisie. Le problème se situait au niveau d'autres biens de placement. Ou peut-être que la ferme avait été donnée en garantie aux créanciers. C'est dans ce genre de cas qu'on a constaté des problèmes. C'est ce genre de choses qu'on tentait d'éviter.

M. Hoeppner: Merci. Selon la loi, maintenant, on entend par «ministre» le «ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire». Dans certains autres projets de loi soumis à notre examen, on parle du «ministre désigné par décret en conseil». N'y a-t-il pas une contradiction dans ce projet de loi ou est-ce une manière d'évacuer le problème au cas où on supprimerait le ministère.

Mme Fillmore: Il me faudrait me pencher sur la question, mais je crois que le problème est réglé, soit dans la Loi d'interprétation, soit dans les mesures concernant le transfert de fonctions. Si le ministère est supprimé, ou si ses fonctions sont transférées à un autre organisme, la loi contient des dispositions s'appliquant à ce genre de situation. Cela ne crée aucun vide et ne rend pas la loi...

M. Hoeppner: Je tenais à m'assurer que tout est bien prévu à cet égard. Il pourrait sans cela y avoir un grave problème en cas de retournement de la conjoncture. Le gouvernement pourrait simplement s'en laver les mains.

Mme Fillmore: Non. Je répète qu'il me faudrait retrouver les dispositions exactes, mais je sais qu'elles existent pour ce genre de situation où un ministère est réorganisé et...

M. Hoeppner: Très bien. Il y a une autre question que je voudrais évoquer. J'ai ici les statistiques que nous a fournies le greffier du comité et je suis vraiment surpris.

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J'ai examiné la moyenne sur dix ans au Manitoba, ainsi que les totaux. Je constate qu'au Manitoba le nombre de saisies ou de personnes s'adressant au bureau d'examen de l'endettement agricole a baissé d'environ 75 p. 100 entre 1991 et 1996. Si vous consultez la première page, vous voyez, pour le Manitoba, un total de 25 034. Tournez la page et, en haut, vous voyez le chiffre de 678. Voilà la plus forte baisse de moyenne pour ce genre de cas.

Le président: Une précision, Jake. Vous avez dit 25 000.

M. Hoeppner: Je voulais dire 2 500.

Le président: C'est bien 2 500. Je tenais à rectifier aux fins du compte rendu.

M. Hoeppner: En effet.

Le président: Je ne pensais pas que l'agriculture se portait si mal au Manitoba et qu'il y avait eu 25 000 cas.

M. Hoeppner: Eh bien, je crains que la situation empire.

Le président: Le chiffre est donc passé de 2 500 à 600. Bon.

M. Hoeppner: Oui. Je dis simplement que je sais bien que le programme RARB fonctionne depuis 1991. C'est une très bonne chose pour les agriculteurs et ils en sont conscients, mais le programme a été supprimé depuis. Étant donné la baisse actuelle du prix des céréales, pensez-vous que les moyennes pour les cinq dernières années vont rester à leur niveau actuel? Cela me semble, personnellement, presque impossible. Je sais quels sont aujourd'hui les profits agricoles par rapport à ce qu'ils étaient au cours des cinq dernières années.

Mme James: Il n'est pas facile de répondre sur ce point. Je crois que si nous savions comment les prix allaient évoluer, et si nous pouvions également prévoir les conditions météorologiques, nous serions mieux à même d'effectuer des calculs. Mais, en ce qui concerne le nombre de demandeurs faisant appel aux bureaux d'examen, nos calculs sont fondés sur les chiffres de cette année et de l'année précédente.

C'est pourquoi je pense que lorsque M. Pickard vous a répondu, il a dit que les crédits nécessaires seraient prélevés sur le fonds d'adaptation et de développement rural. Si la demande augmente en raison de l'état de l'économie agricole, le fonds se gonfle et crée la possibilité de transférer des ressources d'un programme à un autre, en fonction de la demande. C'est pour cela que nous l'avons structuré ainsi et qu'il a cette souplesse permettant de tenir compte de l'augmentation de la demande.

M. Hoeppner: Le bureau d'examen de l'endettement agricole a-t-il une marge de manoeuvre pour l'augmentation du fonds? Je prévois un sérieux problème s'il s'avère qu'on a besoin, non pas de 3,5 millions de dollars, mais de 7 millions de dollars. En 1991, encore, il a fallu 11 millions de dollars. C'est dire que les besoins pourraient augmenter très fortement. Si le comité du bureau d'examen de l'endettement agricole doit, comme vous le dites, jouer des pieds et des mains pour obtenir un million de dollars supplémentaire, dispose-t-il d'une marge de manoeuvre lorsqu'il s'agit de retirer des fonds?

Mme James: Nos chiffres sont fondés sur leurs prévisions. Nous nous adressons aux gens des bureaux d'examen de l'endettement agricole dans les diverses régions et nous leur demandons leurs prévisions quant au nombre de demandes auxquelles ils devraient avoir à faire face. Nous suivons également de près la situation pour voir comment elle évolue. Je sais qu'au printemps dernier, on a constaté une certaine augmentation du nombre des demandes, et donc nous surveillons tout cela de près afin de pouvoir ajuster les budgets à l'évolution de la demande.

Une autre chose que nous avons constatée, en agriculture - et je pense que vous le constaterez vous-même, en consultant les chiffres - c'est que le niveau de la demande varie d'une région à une autre. Dans une région, vous constaterez des difficultés financières, alors que dans une autre région la situation semble se régler. J'imagine que cela doit être en partie dû au niveau des prix du bétail et des céréales. Souvent, lorsque le prix du bétail baisse, le prix des céréales augmente. C'est le cas actuellement. L'inverse est également vrai ou c'est du moins vrai au niveau des bénéfices étant donné l'interdépendance entre l'élevage et la culture des céréales.

Il faut également dire que l'agriculture varie beaucoup d'une région à l'autre. Nous avons, d'une manière générale, constaté, au milieu des années 80, alors que les problèmes étaient les plus sévères... Ils l'étaient effectivement en Ontario, au Québec, ainsi que, dans une certaine mesure au Manitoba et dans l'est du Canada, puis, comme vous le savez, ce problème s'est étendu à l'Ouest. En Saskatchewan, il a atteint son plus haut point en 1991, alors que, selon les statistiques, le problème s'était déjà beaucoup atténué dans l'est du Canada. Les budgets sont donc ajustés selon la région, en fonction du nombre de demandes présentées en vertu de la loi.

M. Hoeppner: Monsieur le président, j'ai une dernière question à poser.

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Nous avons entendu un monsieur québécois - un avocat - qui nous a présenté un très bon exposé. Nous avons également le comité d'examen de l'endettement, enfin le président ou le gestionnaire pour la Saskatchewan, qui nous a très bien expliqué comment ils étaient parvenus à réduire les coûts. Quel effet ont-ils au niveau des ministères? Suit-on certains de leurs conseils? Je sais qu'en tant que comité permanent nous avons nous-mêmes fait des suggestions dont le ministère n'a pas du tout tenu compte, surtout lorsqu'on examine rétrospectivement les dossiers. Je ne parviens pas tout à fait à oublier cela. Dans quelle mesure tenez-vous compte de ce genre d'exposés?

Mme James: Je peux simplement dire que nous en tenons largement compte. Nous attachons beaucoup d'importance à ce qu'ils disent, à leurs avis sur ce genre de choses. Ce sont eux qui se trouvent sur place et qui doivent faire face à ces difficultés financières. Ce sont eux les mieux placés pour connaître la demande, les besoins. Nous comptons donc sur eux. Vous pourriez dire que nous dépendons d'eux et cela est également vrai de beaucoup d'agriculteurs qu'ils parviennent à aider. On les écoute et on les écoute même avec beaucoup d'attention.

M. Hoeppner: J'espère que vous fixerez bien cela dans l'esprit du ministre - afin qu'il n'oublie pas car cela me paraît très important.

Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Monsieur Hoeppner, une précision concernant les chiffres que vous avez cités; c'est-à-dire 2 500 pour le Manitoba et 600, des chiffres que vous avez tirés des tableaux. Le chiffre de 2 500 était le total sur dix ans et le total pour les cinq dernières années était de 600. Il ne s'agit donc pas de chiffres annuels. Les pages suivantes, qui donnent les totaux pour 1987, 1988, etc., révèlent effectivement une baisse importante.

Mais je suis d'accord que les chiffres montrent qu'il y a eu une baisse au Manitoba, et, bien que je n'aie pas vérifié tous les chiffres, je crois qu'on a également enregistré une baisse dans les autres provinces.

M. Hoeppner: Je veux simplement effectuer une comparaison avec les deux autres provinces.

Au Manitoba, le programme RARB était très fort; il a très bien fonctionné. Il n'a pas fonctionné aussi bien en Saskatchewan et en Alberta, et je crois que c'est probablement pour cette raison-là qu'au Manitoba on a enregistré un moins grand nombre de demandes. Le programme a été supprimé depuis. Et je vous avertis, le nombre des demandes pourrait augmenter au Manitoba et je suis sûr que les gens vont faire appel à vous.

Le président: Entendu, madame Ur.

Mme Ur (Lambton - Middlesex): Merci, monsieur le président.

Ma question est étroitement liée à bien des points évoqués ici ce matin au sujet des coûts. Cette réforme de l'examen de l'endettement agricole se veut moins coûteuse, plus efficace, plus rationnelle et plus simple - autant de notions évoquées dans le cadre des divers exposés prononcés ici. Mais, pour moi, la seule nouveauté dans la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, et qui apporte peut-être quelque chose de nouveau aux agriculteurs, c'est la procédure d'orientation. Dans la brochure du bureau d'examen de l'endettement agricole, on trouve à l'article 16 un excellent graphique: «Demande fondée sur l'article 16 - aucune demande de médiation» et «Demande fondée sur l'article 16 - demande de médiation».

Tout cela semble relever de l'article 16: l'examen de la situation financière, l'examen par le comité, et la médiation - tout cela se trouve à l'article 16. Par rapport à ce que prévoit l'article 16, que va nous apporter ce service de consultation agricole?

Lorsque M. Pomerleau a pris la parole devant nous, l'autre jour, il avait ce même sentiment - c'est-à-dire que l'article 16 semblait plus avantageux pour les agriculteurs que ce qui était prévu dans le cadre de la consultation agricole.

Je continue à me pencher sur ces dispositions afin d'y trouver un avantage. Les renseignements transmis à M. Vanclief par le ministre... Les provinces estimaient que l'article 16 constituait un empiétement sur leurs compétences, et le grand changement, dans l'optique du ministère, c'est ce recours à la consultation et la suppression de l'article 16. Les provinces s'y sont-elles effectivement opposées, estimant que le gouvernement fédéral empiétait sur leurs compétences?

Mme James: J'aimerais revenir un peu en arrière, à l'époque où nous avons procédé à nos consultations dans l'ensemble du pays, dans toutes les provinces, avec l'ensemble des créanciers, des agriculteurs, des membres des comités du bureau d'examen de l'endettement agricole, avec certains de nos consultants financiers, ainsi qu'avec des gens qui avaient connu la situation avant l'instauration de ces mesures. Nous avons pu réunir une gamme très large d'intervenants.

Au cours de ces consultations, la question de l'article 16, de son utilité - du moins sous sa forme actuelle - a été soulevée. On s'est aperçu que certaines personnes déposaient une demande au titre de cette disposition, alors que ce dont ils avaient en fait besoin, c'était de conseils financiers, auxquels ils avaient d'ailleurs accès. Ils n'avaient pas vraiment besoin de ce mécanisme institutionnel comprenant un comité d'examen et une médiation avec leurs créanciers. Autrement dit, il s'agissait de personnes qui commençaient à éprouver des difficultés financières. Ils n'étaient pas du tout insolvables. Ils continuaient à régler leurs échéances, mais ils voyaient bien qu'un problème pourrait surgir et qu'il leur fallait prendre des dispositions.

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En se penchant sur le service et sur les moyens disponibles à l'époque - et j'imagine, aussi, à l'initiative des créanciers - on a vu que ce qu'il fallait prévoir c'était quelque chose à l'intention des agriculteurs insolvables. C'est surtout en cas d'insolvabilité qu'il faut recourir à la médiation. Il faut réunir le débiteur et les créanciers et ce genre de processus a été jugé extrêmement utile et valable. C'est pour cela qu'on a décidé d'en faire un régime distinct.

Lors de nos consultations avec les provinces - et beaucoup de gouvernements provinciaux sont également prêteurs, ayant instauré des programmes de prêts agricoles et relevant donc, à ce titre, de la loi - on a vu qu'elles avaient toutes instauré, sous une forme ou sous une autre, des programmes de gestion de terres agricoles. Dans certaines provinces, ce type de programme est beaucoup plus élaboré que dans d'autres, certains offrant, du moins dans une certaine mesure, ce genre de conseils et d'aide financière. Certains y voient une responsabilité provinciale - un prolongement des compétences de la province.

Certains se sont demandé dans quelle mesure les gouvernements provinciaux ont effectivement fourni ce type de services même si, dans le cadre du programme de gestion des entreprises agricoles, nous finançons bon nombre de leurs activités dans ce domaine, et dans quelle mesure c'est le gouvernement fédéral qui a assuré ce genre de services. C'est pourquoi il a été décidé d'en faire un régime distinct, afin que nous puissions offrir un programme qui comprend non seulement un service de médiation pour les personnes éprouvant des difficultés financières, mais également un service de consultation et, chose plus importante encore, cette procédure d'orientation qui les aide à trouver ce dont ils ont vraiment besoin, car tout le monde n'a pas besoin de médiation ou même de conseils financiers. Le besoin peut se situer ailleurs.

Mme Ur: Avant de venir à Ottawa, j'ai été chargée d'un bureau de circonscription pendant sept ans et je peux vous dire que, sur toute question, ce qui peut séparer les provinces et le gouvernement fédéral... Lorsqu'on vient vous voir à tel ou tel sujet et que vous répondez que cela relève du gouvernement provincial, ou du moins qu'il faut vous adresser à lui en premier avant de faire appel à un autre organisme... Je ne suis pas certaine que cela soit la réponse qu'il convienne de donner aux personnes qui vous entretiennent d'un problème.

À telle ou telle étape de vos difficultés, il faut vous adresser au gouvernement provincial, mais si votre cas est un peu plus grave, il faut vous adresser au gouvernement fédéral. Je ne suis pas certaine que l'on puisse agir de la sorte avec les gens, et je ne crois pas que cette approche soit la bonne. Je ne sais vraiment pas.

Mme James: On espère que cela ne se réduira pas à orienter les gens vers le gouvernement fédéral ou vers le gouvernement provincial... Autrement dit, il s'agit de problèmes humains et, souvent, les gens ont besoin de conseils juridiques.

Il peut s'agir de difficultés familiales qui ont entraîné un certain nombre de problèmes dans l'exploitation agricole même. D'autres fois, c'est au stress qu'il faudrait s'attaquer, ou à ce genre de problèmes-là. En les aidant, en les conseillant, il est parfois possible de résoudre certains autres problèmes qui, en fait, se cachent derrière des problèmes financiers.

Mme Ur: Lorsque je me suis entretenue avec le ministre, il m'a dit qu'il restait ouvert à toute discussion au cas où les mesures envisagées ne répondraient pas aux besoins de la situation, mais combien de temps va-t-on persister dans une voie qui n'est pas la bonne avant de se pencher sur le problème? Où est le repère dans ce genre de choses?

Mme James: Nous espérons continuer à recevoir vos observations, et celles de tous les autres intéressés, et nous espérons ne pas avoir à attendre, comme vous le dites, que la situation soit irréparable ou qu'elle soit devenue plus difficile à corriger. Je me prononce au nom du ministère et je crois que mes collègues s'accordent avec moi pour dire que nous vous savons gré de vos observations car c'est de cela que nous avons besoin dès le départ.

Le président: Monsieur Easter.

M. Easter: Cette question s'adresse en vérité au secrétaire parlementaire et je ne fais donc que vous la confier pour que vous puissiez la porter à son attention.

Dans la lettre du ministre... Certains d'entre nous sont préoccupés par le fait que le service de consultation agricole n'est pas inscrit dans la loi. Je tiens à préciser que M. Wilkinson, président de la Fédération des agriculteurs canadiens partage cette inquiétude. Lorsque j'ai fait valoir qu'il fallait donner au service de consultation agricole une base législative afin que le gouvernement fédéral soit absolument tenu de veiller à ce que les mécanismes, les ressources, les ressources humaines et les pressions de la part du ministère soient là pour que ce service puisse effectivement fonctionner, M. Wilkinson a répondu que cela lui paraissait juste et cela me porte à croire qu'il estime, lui aussi, qu'une telle base législative est nécessaire.

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Parfois, le ministre rédige ses lettres d'une manière qui oblige à les interpréter. Je ne vais pas demander à un conseiller juridique d'interpréter ce message de la lettre du ministre, mais pourriez-vous faire savoir au secrétaire parlementaire qu'il me faudrait une interprétation de l'avant-dernier paragraphe de la lettre du ministre, afin que je puisse savoir, exactement, ce qu'il veut dire? Ce paragraphe est, en effet, ouvert à toutes les interprétations. Pourriez-vous porter cela à l'attention du secrétaire parlementaire.

En ce qui concerne les comités d'appel - et cette question s'adresse au conseiller juridique - vous nous avez déjà dit que ces comités ne sont appelés qu'à se prononcer sur la suspension des procédures et sur l'admissibilité du demandeur. En fait, une des lacunes de la loi antérieure était l'absence... Dans les cas difficiles, le créancier - ou, souvent les banques - vont simplement attendre, avant de vous saisir, que la suspension soit levée. Rien ne prévoit le recours à un arbitrage. J'avais espéré que l'appel serait une forme d'arbitrage qui lierait les parties. Or, ce n'est pas le cas.

Si le conseiller juridique compare ce texte-ci et le texte de loi antérieur, le présent texte nous donne-t-il autant de pouvoir que le texte antérieur lorsqu'il s'agit de défendre les intérêts des agriculteurs? Ce pouvoir est-il accru? Est-il réduit? Est-il comparable? Certains des témoins qui ont comparu devant le comité nous ont dit que le mécanisme de suspension est en fait le seul moyen que nous ayons d'obliger les créanciers à parvenir à un accord. Je sais d'expérience que plus la somme que vous devez est importante, plus il peut être utile d'obtenir une suspension des procédures, cela étant particulièrement vrai lorsque les taux d'intérêt sont élevés. Cela coûte cher au créancier qui a donc tout intérêt à parvenir à un arrangement. Diane, pouvez-vous nous répondre sur ce point?

Mme Fillmore: Je tiens à préciser que je ne me suis pas occupée de beaucoup de dossiers relevant de l'ancienne loi. J'ai appris cela d'un ancien collègue. Aux termes de l'ancienne loi, le demandeur pouvait, au maximum, obtenir, au départ, une suspension complète. Si le dossier n'avançait pas et s'il n'avait aucune raison de faire autrement, la suspension n'était pas prolongée. Dans l'état actuel des choses, la seule différence est que s'il est évident que la médiation... Cette loi a pour objet d'encourager la médiation. L'ancienne loi ne permettait pas non plus de faire respecter l'arrangement auquel pouvaient parvenir les créanciers et l'agriculteur en question.

Je crois donc que ce nouveau texte est un peu plus réaliste: s'il est évident que la médiation ne va pas aboutir, il n'y a aucune raison de maintenir la suspension. Même aux termes de l'ancienne loi, la suspension devait permettre d'encourager l'agriculteur et le créancier à parvenir, volontairement, à un arrangement. Ni l'une ni l'autre des parties n'était tenue de le faire. Ici, au moins, les comités d'appel peuvent intervenir lorsque quelqu'un est écarté des dispositions de la loi ou lorsque les créanciers estiment qu'on a accordé le bénéfice de la loi à quelqu'un qui n'était pas admissible. Il y a donc un droit d'appel.

En ce qui concerne la suspension, j'ai eu à connaître de plusieurs situations où un agriculteur se plaignait du fait que la suspension n'avait pas été prolongée. Ils ont maintenant, en pareil cas, un droit d'appel. Je crois donc que le nouveau texte leur accorde plus de droits.

M. Easter: Mais, maintenant, les suspensions ne sont prononcées que pour 30 jours à la fois, non plus 120 comme...

Mme Fillmore: Même sous l'empire de l'ancien texte, les suspensions n'étaient pas de 120 jours. Il s'agissait de prolongations. Je pense que les délais sont actuellement les mêmes, mais les bureaux d'examen de l'endettement agricole étaient entièrement libres d'accorder ou non une prolongation. En cas de refus, il n'existait pas de droit d'appel.

M. Easter: J'imagine que cela dépendait de la région.

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Enfin, le paragraphe 28(1) veut-il dire que, dans trois ans, la loi sera remise à l'étude, qu'elle sera portée devant un comité permanent et réexaminée?

Mme Fillmore: Le texte dit bien «procède à l'examen», et donc ce réexamen est effectivement obligatoire.

M. Easter: Étant donné qu'un de mes sujets de préoccupation est ici le service de consultation agricole, ce paragraphe 28(1) s'applique-t-il à ce service de consultation agricole?

Mme Fillmore: Automatiquement? Je ne pense pas...

M. Easter: Voilà tout le problème. Il ne s'appliquerait pas automatiquement.

Mme Fillmore: Pas si l'on s'en tient au paragraphe 28(1).

M. Easter: Entendu.

Merci, monsieur le président.

Le président: Si personne n'a d'autres questions, je vais remercier celles qui se sont jointes à nous ce matin. Je pense que nous sommes parvenus à régler certains problèmes.

Notre examen de ce projet de loi va être différé pendant plusieurs jours puisque nos trois réunions de la semaine prochaine seront consacrées au projet de loi C-60. Nous ne pourrons reprendre notre examen de celui-ci que la semaine qui suit le congé. J'attendrai les instructions des membres du comité afin de voir s'ils veulent.. J'imagine que nous passerons alors à l'examen article par article et que, en même temps, nous pourrons aborder les autres questions ou obtenir d'autres précisions.

Lois, Diane et Julie, je tiens à vous remercier de votre présence ici.

La séance est levée.

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