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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 19 mars 1997

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[Traduction]

Le président (M. Lyle Vanclief (Prince Edward - Hastings, Lib.)): Mesdames et messieurs, nous allons commencer si les membres du comité veulent bien s'asseoir à la table. Est-ce que les représentants des trois premiers groupes qui vont témoigner ce matin peuvent s'approcher de la table, s'ils n'y sont pas déjà? Il s'agit du Saskatchewan Women's Agricultural Network, de l'Université de la Saskatchewan et du Syndicat national des cultivateurs.

Je tiens à vous remercier de vous présenter devant ce comité. Comme vous le savez, nous formons le Comité permanent de l'agriculture et nous sommes ici pour connaître l'avis et l'opinion des gens sur le projet de loi C-72, qui est une loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé.

Nous avons déjà tenu des audiences à Winnipeg et à Regina. Demain, nous serons à Calgary. Vendredi, nous irons à Grand Prairie.

Lorsque nous retournerons à la Chambre des communes, nous poursuivrons les audiences sur ce projet de loi. Nous passerons ensuite à l'examen article par article pour permettre au comité de faire d'autres modifications au projet de loi pour l'améliorer. Ces modifications au projet de loi nous auront peut-être été suggérées, d'où notre présence ici: pour connaître l'opinion des gens.

Le projet de loi est arrivé devant le comité après la première lecture, ce qui est une nouvelle façon de procéder de l'actuel Parlement. Lorsqu'un comité reçoit un projet de loi après la première lecture plutôt qu'après la deuxième, cela lui donne plus de souplesse et lui permet de travailler avec les personnes concernées par le projet de loi durant tout le processus.

Afin de nous assurer que tout le monde comprend bien le processus, nous avons trois groupes à la table actuellement. On vous a avisés - et je sais que vous allez coopérer - que vos exposés dureront 15 minutes. J'essaierai de vous faire savoir lorsqu'il ne vous restera que deux ou trois minutes.

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Nous allons être inflexibles tout au long de la semaine afin d'être justes avec tout le monde. Nous aurons ensuite une période de 45 minutes durant laquelle les membres du comité pourront poser des questions, faire des commentaires ou demander des éclaircissements aux trois groupes présents à la table. Nous passerons ensuite au groupe de témoins suivant.

Je crois que dix groupes et neufs personnes témoigneront d'ici la fin de la journée. Je vous remercie donc encore une fois de votre présence.

Nous entendrons d'abord le Saskatchewan Women's Agricultural Network (SWAN).

Nous souhaitons la bienvenue à Noreen Johns et à Elaine Meachem. Il s'agit d'un exposé conjoint et c'est vous qui allez commencer, Noreen?

Mme Noreen Johns (Secrétaire administrative, Saskatchewan Women's Agricultural Network): Merci. Nous apprécions beaucoup de pouvoir vous présenter notre analyse du projet de loi C-72. Nous remercions les membres du comité de s'être déplacés dans notre province agricole.

Je crois que je vais maintenant vous lire mon mémoire.

Nos membres ont adopté une résolution appuyant vigoureusement la Commission canadienne du blé et l'avantage que représente son point de vente unique. Le concept de mise en marché par la Commission canadienne du blé qui, au Canada, est synonyme de coopération par opposition à concurrence, demeure valable.

Le SWAN a été très actif au sein de la Pro-Canadian Wheat Board Coalition, en réponse aux récentes attaques dont cet organisme a fait l'objet. Nous ne sommes pas contre les changements proposés à la Commission du blé, mais nous demandons que ces changements soient analysés pour voir s'ils pourront rehausser et en fait renforcer la Commission.

Certains objectifs du projet de loi C-72 semblent très valables. Les motifs en faveur des autres modifications proposées semblent assez faibles. Sommes-nous en train d'essayer de régler des problèmes qui n'existent pas vraiment?

Malheureusement pour nous, certaines propositions pourraient miner les forces fondamentales ou les piliers de la Commission du blé: l'avantage du point de vente unique, la mise en commun des prix, des possibilités de livraison équitables, les garanties gouvernementales et la confiance des consommateurs.

Notre exposé se veut une incitation à la prudence tout en demandant instamment une analyse avant de mettre en application les modifications proposées. Nous sommes préoccupés par la vaste portée de ce projet de loi habilitant. Tant de choses sont laissées à la discrétion de la nouvelle Commission que ceci constitue en soi un maquillage incertain. Nous devons nous demander quelle est vraiment l'intention de certaines des modifications proposées? Où ces modifications peuvent-elles et vont-elles nous mener?

Il est difficile de spéculer ou de faire des commentaires avant d'avoir demandé une définition claire de l'intention de l'orientation éventuelle. Nous demandons tout d'abord une analyse complète des conséquences possibles. Les agriculteurs ne connaissent que trop bien les terribles conséquences des cataplasmes mal planifiés appliqués aux politiques. On peut facilement se rappeler aujourd'hui l'exemple des promesses non tenues, des autoroutes non construites et de la pagaille dans le transport des produits agricoles suite à la suppression du tarif du Nid-de-Corbeau.

Permettez-moi de vous faire part de notre point de vue sur certaines des modifications proposées. Si nous regardons le côté positif, le projet de loi comporte plusieurs objectifs très louables: moderniser le système de mise en marché dans l'Ouest canadien; améliorer les relations avec les agriculteurs en augmentant la responsabilisation; mieux réagir aux besoins changeants des producteurs; créer des possibilités d'obtenir plus de liquidités immédiates pour les agriculteurs; et, point crucial, profiter des points forts de l'actuel système de mise en marché. Je souligne ce dernier objectif afin de mettre l'accent sur le fait que nous possédons vraiment un produit de qualité.

En aparté, j'ai récemment participé à Winnipeg au 24e cours annuel de l'IICG pour les responsables agricoles. Chaque producteur devrait avoir la possibilité de visiter les institutions de mise en marché des céréales à l'intersection des rues Portage et Main à Winnipeg.

Notre calibre élevé d'expansion des marchés, de surveillance, de coordination, et d'expertise était très évident. Un rapport très intéressant tiré d'un sondage de l'IICG révèle que, d'après les pays importateurs qui évaluent les pays exportateurs, le Canada occupe le premier rang pour la qualité, la propreté, l'uniformité, l'appui technique, la fiabilité et le service à la clientèle, mais le dernier rang pour le prix. Autrement dit, nous sommes considérés comme des vendeurs chers.

La Commission canadienne du blé nous aide à accorder des avantages à nos pays importateurs sans compromettre le prix versé aux agriculteurs canadiens. Quant à moi, je n'ai pas l'intention de courir le risque de perdre cet atout.

Nous serions d'accord d'envisager un versement anticipé et de distribuer des versements finaux. La technologie informatique moderne devrait permettre le calcul et la distribution rapides en supprimant la restriction de date contenue dans l'actuelle Loi sur la Commission canadienne du blé. La possibilité de recevoir des frais d'entreposage, des intérêts et d'autres montants liés aux livraisons crée une certaine équité dans les perspectives de livraison mal équilibrées.

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Nous obtiendrons des mesures d'efficacité si nous n'avons pas à prélever de façon égale dans toutes les régions. Cependant, nous ne voulons pas voir une situation chronique qui ronge le pilier des perspectives de livraisons égales qui existent en vertu du système des appels d'offres. Des perspectives de livraison mal équilibrées sont inacceptables si elles créent des problèmes incessants de liquidités dans certaines régions, surtout durant une période de temps assez longue. La perspective d'interdire des routes à la circulation le week-end dernier nous rappelle que les agriculteurs peuvent être désavantagés par des demandes tardives. Les céréales sont transportées plus efficacement sur les routes en hiver, que durant la fonte des neiges au printemps, et certainement pas durant nos semis de printemps.

Le SWAN trouve le projet de loi un peu contradictoire pour ce qui est d'offrir des liquidités aux agriculteurs. Tout en bricolant pour mettre rapidement de l'argent comptant dans leurs mains, nous remarquons que le projet de loi, avec son fonds de réserve, ses certificats transférables et ses périodes réduites de mise en commun, pourrait en fait coûter aux agriculteurs encore plus cher à long terme. Le maintien du programme actuel des avances au comptant peut répondre à certains des besoins de liquidités.

Sous les rubriques organisation et responsabilité, le libellé du projet de loi C-72 est très vague en ce qui concerne la composition du nouveau conseil. Bien qu'il permette l'élection de représentants des producteurs, leur nombre, l'électorat, les mises en candidature et le processus ne sont pas définis. Nous pensons qu'il est possible de politiser les élections au conseil, d'encourager les influences de tierces parties et de créer une division interne. Un conseil nommé a permis d'obtenir un équilibre au niveau des compétences et de laisser les faits l'emporter sur les opinions.

A-t-on créé de faux espoirs de responsabilité accrue en offrant la possibilité de faire élire des représentants des agriculteurs? D'après nous, une meilleure méthode de communication et une oreille plus attentive au système actuel de Comité consultatif élu auraient réduit bon nombre des problèmes et des préoccupations auxquels nous devons faire face aujourd'hui. À moins que le nouveau conseil n'ait un budget pour les communications, le temps et le désir d'ouvrir un dialogue bilatéral avec les agriculteurs, la voix de la base ne comptera pas plus qu'à l'heure actuelle.

Il semble ironique que ceux qui ont lancé en premier le cri de ralliement demandant une plus grande responsabilité de la Commission du blé sont ceux qui favorisent un système de marché libre qui n'offre aucune responsabilité.

Combien les agriculteurs accompliront-ils vraiment? D'après le texte du projet de loi C-72, le gouvernement conserve en fait un vaste contrôle sur les nominations au conseil et au poste de président de la Commission. Même si nous comprenons la raison des décisions prises à cet égard - signifiant que le gouvernement continuera à garantir les transactions commerciales de la Commission canadienne du blé - nous pouvons déjà entendre les cris à l'effet qu'il ne s'agit pas d'une responsabilité.

Alors qu'elle passera d'une société d'État à un système le libre entreprise encore plus libre, que pourrait-il arriver aux garanties gouvernementales? Elles représentent aujourd'hui 60 millions de dollars pour la Commission du blé et pour les agriculteurs. Des frais de crédit supplémentaires coûteront de l'argent aux agriculteurs.

Qu'arrivera-t-il à la confiance de nos consommateurs qui, pour de nombreux pays, est très étroitement liée à cette relation entre le gouvernement canadien et la Commission canadienne du blé? Nous ne pensons pas que la responsabilité actuelle soit déphasée au point de risquer de perdre ces garanties. J'aimerais savoir ce que l'exigence d'une responsabilité accrue veut vraiment dire.

En 1994-1995, la Commission canadienne du blé a raté l'occasion de tirer profit de la vente à prix élevé d'orge fourragère au Japon. Voulons-nous aujourd'hui mettre en danger un système efficace de mise en commun des prix afin d'offrir cette occasion sur une base permanente?

Nous sommes d'avis que l'option d'achat au comptant ne devrait s'appliquer qu'en fonction de lignes directrices et dans des circonstances très strictes. Nous reconnaissons la nécessité d'avoir des exportations soutenues de céréales fourragères afin de maintenir un prix canadien honnête. Nous voulons donc tirer profit de telles occasions qui existaient en 1994-1995, mais trop d'achats au comptant saperont les principes de la mise en commun des prix et des livraisons ordonnées.

Le prix au comptant offert doit toujours demeurer inférieur au prix de mise en commun, sinon les agriculteurs seront réticents à s'engager dans des contrats avec la Commission du blé et le pilier de la mise en commun des prix sera rongé, tout comme les possibilités de mise en marché ordonnée.

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N'oublions pas que la Commission canadienne du blé est notre agent de mise en marché, et non un acheteur de céréales. Le Saskatchewan Women's Agricultural Network aimerait connaître la définition des modifications importantes du mandat. Éliminer n'importe quelle catégorie de blé ou d'orge du champ de compétence de la Commission du blé réussira à éroder considérablement sa situation de point de vente unique. Il semble ironique que des mécanismes soient créés afin de soustraire des céréales à la Commission du blé, alors que la possibilité d'ajouter d'autres cultures sous la coupe de la Commission du blé est refusée.

Le SWAN a adopté une résolution dans ce sens lors de son AGHA de février 1997 et nous vous demandons de la prendre en considération. Elle se lit comme suit:

Nous entendons de plus en plus de gens, surtout des producteurs de canola, s'interroger sur les systèmes d'achat erratiques et apparemment manipulés, en rapport avec la fixation actuelle des prix. En examinant les certificats négociables, je dois admettre qu'il existe une certaine confusion dans ce domaine. Je me demande comment les agriculteurs en profiteront à long terme?

On doit assurément tirer un prix des transferts. Les techniques de gestion des risques ne tiendront certainement pas compte de l'éventuelle valeur finale du certificat lorsqu'il sera accepté. A la fin de l'année, le revenu brut des agriculteurs sera en fin de compte moindre. Nous devons nous demander si cela va préparer les agriculteurs pour le scénario de la poule aux oeufs d'or.

Définir des périodes de mise en commun inférieures à un an comporte certainement des inconvénients en termes de gagnants et de perdants et détruit l'équité créée par le pilier de la mise en commun. Les agriculteurs qui ont besoin de liquidités seront obligés de vendre durant la mise en commun automnale, lorsque les prix sont traditionnellement plus bas. Ceux qui peuvent se permettre d'attendre pourront obtenir une mise en commun printanière plus lucrative. Si un plus grand nombre d'agriculteurs peuvent attendre pour une livraison plus tardive, la Commission fera face à un engorgement des silos et à une limitation des débouchés.

Lorsque le vote actuel portant sur l'orge sera compté et que les résultats seront connus, nous prévoyons que les lois du pays prévaudront et que le cas de ceux qui continueront à braver la loi sera traité de façon rapide et efficace.

En démocratie, lorsqu'une majorité de personnes décident que leurs droits individuels sont mieux défendus collectivement, dans ce cas par la Commission canadienne du blé, alors on établit dans la société des règlements ou des lois qui s'appliquent à tous et chacun et qu'il faut respecter. On pourrait établir un parallèle entre la situation actuelle et un match de hockey au cours duquel un arbitre faible perd le contrôle de la partie. Nous, au SWAN, sommes très inquiets de la tension qui s'accumule chez les agriculteurs et de ses conséquences possibles.

En conclusion, j'aimerais citer la phrase suivante: «Tout changement n'est pas synonyme de progrès, comme tout mouvement n'est pas vers l'avant». Je réitère notre demande d'analyse prudente des modifications proposées à la Commission canadienne du blé par le projet de loi C-72. À court terme, certains agriculteurs profiteront en fait de certaines des modifications proposées. Cependant, certaines modifications pourraient détruire les avantages prouvés de la Commission canadienne du blé.

Nous avons tiré la sonnette d'alarme afin de vous aider à reconcevoir un système de mise en marché pour aider les producteurs céréaliers à long terme. J'insiste sur les producteurs de céréales car nous croyons que toute modification aux programmes ou institutions conçus pour servir au mieux leurs intérêts devrait l'emporter.

On ne devrait pas se presser pour faire ces modifications pour essayer de clarifier les eaux troubles, de transférer les responsabilités et les engagements du gouvernement fédéral, de créer des prix canadiens bon marché ou de s'excuser pour un monde des échanges commerciaux qui reconnaît les forces et la réputation de la Commission canadienne du blé apparemment mieux que nous.

Je vous remercie pour votre attention et j'attends vos questions avec impatience.

Le président: Merci beaucoup, Noreen, pour votre excellent exposé.

Nous allons passer au professeur Fulton de l'Université de la Saskatchewan.

Bienvenue, Murray.

Professeur Murray Fulton (Université de la Saskatchewan): Merci beaucoup.

J'aimerais commencer par dire ma joie de pouvoir témoigner devant votre comité.

Ma présentation consiste en un document de travail publié en décembre. J'en ai quelques exemplaires que vous pourrez obtenir à la fin de mon exposé. J'essaierai d'en avoir d'autres.

Le président: Vous pouvez remettre un exemplaire du document au greffier si vous le désirez, Murray, et nous le distribuerons dès qu'il sera traduit.

Prof. Fulton: J'en ai déjà remis un exemplaire au greffier. Si d'autres personnes en désirent un, je vais m'assurer qu'il y aura quelques exemplaires supplémentaires cet après-midi.

Le président: Merci.

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Prof. Fulton: J'aimerais commencer mon exposé en disant que, d'après moi, la Commission canadienne du blé possède un certain nombre de caractéristiques uniques en temps que marchand de céréales.

Ces caractéristiques sont, entre autres, les suivantes: premièrement, la Commission canadienne du blé détient le pouvoir de vendre à un guichet unique pour la mise en marché du blé et de l'orge dans le champ de compétence de la CCB, à l'exception, bien entendu, des céréales fourragères destinées au marché canadien; deuxièmement, la Commission canadienne du blé maximise les produits de la vente de blé et d'orge au nom des agriculteurs; et troisièmement, la Commission canadienne du blé exige le droit de faire respecter les décisions qu'elle prend concernant les contrats et les ventes. Cette possibilité dépend en large mesure de l'appui des agriculteurs.

Ces trois caractéristiques créent ensemble quelques enjeux particuliers en matière d'organisation. Comme je l'ai déjà mentionné, la possibilité qu'a la Commission canadienne du blé d'agir comme un point de vente unique dépend en fin de compte de la possibilité qu'elle a d'obtenir l'appui de la majorité des agriculteurs à l'intérieur du champ de compétence de la CCB. Si elle n'a pas l'appui des agriculteurs, elle ne pourra pas fonctionner efficacement.

À mon avis, pour obtenir l'appui des producteurs de céréales de l'ouest canadien, il faut deux choses. Premièrement, les agriculteurs doivent pouvoir exprimer leurs points de vue sur la CCB et espérer raisonnablement qu'ils seront écoutés. Deuxièmement, les représentants des agriculteurs doivent exercer un contrôle efficace sur les politiques et le fonctionnement de la CCB. Si on ne fournit pas aux agriculteurs à la fois la voix et le contrôle - et d'après moi la voix et le contrôle sont les deux principaux ingrédients - il est fort peu probable qu'ils continueront à appuyer la Commission canadienne du blé.

L'histoire démontre, selon moi, que cette voix et ce contrôle n'étaient pas présents au sein de la CCB. Bien qu'un comité consultatif soit élu, les agriculteurs ne s'attendent pas à ce que cet organisme ait un pouvoir direct sur les politiques de la Commission canadienne du blé.

Il y a une autre idée que j'aimerais avancer ici. La Commission canadienne du blé fait face à certains problèmes d'évaluation de l'efficacité du fonctionnement et de la mise en marché. Si vous êtes dans une société cotée en bourse, vos actions sont transigées et d'autres personnes, des courtiers, etc., évaluent le rendement de votre société.

Évaluer le rendement de la Commission canadienne du blé n'est pas si facile. Tout d'abord, il n'y a pas de transactions boursières. Ensuite, les choses traditionnelles que l'on retrouve dans une société cotée en bourse ne sont les mêmes choses que vous chercheriez dans la Commission canadienne du blé. Vous ne vous intéressez pas au taux de rendement sur les capitaux propres ou au ratio d'endettement par rapport aux capitaux propres. Vous vous intéressez, dans le cas de la Commission canadienne du blé, à ses succès pour obtenir les céréales des agriculteurs et les mettre en marché pour eux, et pour obtenir le prix le plus élevé sur le marché mondial.

Ce problème de capacité d'évaluation du rendement de la Commission canadienne du blé soulève certaines questions sur la façon dont les agriculteurs peuvent juger de l'efficacité de la Commission canadienne du blé, mais également certains problèmes d'organisation. J'y reviendrai dans une minute.

En bref, ce qu'il faut c'est que la Commission canadienne du blé devienne beaucoup plus démocratique de nature, et on doit pouvoir le constater. La nouvelle structure gouvernementale doit accorder aux agriculteurs une voix considérable et doit leur donner une voix et un contrôle efficaces.

Qu'en est-il du projet de loi proposé? Passe-t-il le test? De façon générale, je crois que oui. Le projet de loi parle clairement de la possibilité d'avoir des représentants élus. Lorsque vous commencez à approfondir le sujet, j'estime que les dispositions du projet de loi proposé reflètent un manque de confiance dans la structure démocratique. Si nous voulons réellement avoir une structure d'organisation qui soit vraiment démocratique, il faut apporter certaines modifications importantes au projet de loi.

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Voici celles que je proposerai. Tout d'abord, je crois que le projet de loi devrait conférer au conseil d'administration le pouvoir de nommer et de destituer le président de la Commission. Telle est la structure d'organisation traditionnelle dans les coopératives et les sociétés et je crois que c'est ce qu'il faut à la Commission canadienne du blé si elle doit vraiment être dirigée par le conseil d'administration. Ce dernier est vraiment le groupe en charge. Il doit avoir le pouvoir de nommer ou de révoquer le président de la Commission. Faire assumer cette responsabilité au ministre est inefficace à mon sens.

Je crois que le projet de loi devrait mentionner clairement que les membres du conseil élus par les agriculteurs devraient être majoritaires. Il est silencieux sur ce point. Et j'ajouterai que la majorité devrait être d'au moins 75 p. 100 du conseil. Les membres du conseil élus par les agriculteurs devraient atteindre au moins 75 p. 100. Mais il s'agit de mon opinion. Je crois que le président de la Commission ne devrait pas être un membre du conseil, tel qu'il est indiqué dans le projet de loi. J'estime que le président du conseil devrait être élu par les membres du conseil.

Le projet de loi devrait également indiquer le mode d'élection des agriculteurs membres du conseil. Le choix que j'ai indiqué dans mon document est une structure représentative. J'y ai pas mal réfléchi, à savoir si une structure représentative, ou une représentation directe, serait la meilleure façon d'élire les agriculteurs membres du conseil.

Une structure représentative fournirait une partie de cette voix qui est vraiment nécessaire au sein de la Commission canadienne du blé car une structure représentative sera composée d'un certain nombre de représentants venant de partout dans l'ouest du Canada. Ces représentants représenteront chacun une région géographique et ils seront ceux qui apporteront les préoccupations des agriculteurs de leur région au groupement représentatif et ensuite aux membres de ce groupement représentatif qui seront nommés au conseil.

Je crois qu'à notre période de traitement plus poussé à la ferme et au niveau communautaire, on devrait songer à créer des structures de base qui ne sont pas géographiques, des structures de base qui... Par exemple, il y aurait une structure de base regroupant des personnes impliquées dans une activité à valeur ajoutée à la ferme, et elles pourraient élire un des délégués au groupement représentatif.

Finalement, je crois que le projet de loi proposé ne prête pas suffisamment attention au déroulement de la transition entre la structure actuelle et la nouvelle structure. C'est un point absolument essentiel. Permettez-moi de m'y arrêter un moment.

Comme je l'ai déjà mentionné, la nouvelle structure du gouvernement devrait comporter un président de la Commission élu par le conseil. Je crois que ceci devrait faire partie de la structure de transition. J'estime donc qu'il serait tout à fait raisonnable d'avoir un conseil provisoire ainsi qu'un président de la commission intérimaire pendant l'élection des membres au groupement représentatif. Mais, en fait, il faudrait avoir un président intérimaire pour permettre à la société de traverser cette période de temps. Une fois les élections terminées, et les membres agriculteurs ainsi que les autres membres élus, une des premières tâches de ce conseil devrait être de nommer le président qu'il désire à la Commission canadienne du blé.

Si une telle phase de transition n'existe pas, nous aurons certains membres du conseil élus par les agriculteurs, mais les agriculteurs n'auront aucun contrôle, en fin de compte, sur l'identité du président de la Commission canadienne du blé. Je crois que cela va à l'encontre du test démocratique de la voix et du contrôle dont j'ai parlé précédemment.

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Les commentaires contenus dans le document de travail traitent tous d'organisation. J'aimerais profiter de l'occasion pour parler brièvement de quelques-uns des autres éléments du projet de loi.

L'une des questions soulevées à propos de la modification de la structure d'organisation est qu'un tel changement implique bien davantage que les électeurs du conseil. En fait, cela comprend un changement pour savoir si la CCB est un agent du gouvernement ou une entreprise mixte. On craint que si son statut juridique change, l'engagement du Parlement et du gouvernement vis-à-vis de la Commission canadienne du blé changera également.

On craint, par exemple, que les garanties financières puissent être retirées à un certain moment. Je crois que cela se produit déjà dans le projet de loi. Les garanties sont étendues au versement initial, mais ne sont pas étendues à aucun versement intérimaire et rajusté. En tant qu'économiste, je ne peux voir aucune raison pour faire cette distinction. Il me semble que si le gouvernement est disposé à garantir le versement initial, il devrait être également disposé à garantir tout ajustement en cours de route, en particulier lorsque aucun ajustement au cours des 60 dernières années n'a entraîné de pénurie.

Il me semble qu'il s'agirait d'un risque relativement petit à prendre et je ne vois pas pourquoi il existe une différence dans ces deux méthodes. Cela semble indiquer que le gouvernement peut décider à un certain moment qu'il retirera son appui à certaines de ces garanties. En clair, cet appui est nécessaire au bon fonctionnement de la Commission canadienne du blé.

Très rapidement, en terme d'échanges au comptant, bien qu'il existe des moments où les échanges au comptant seraient avantageux, le conseil devrait y avoir recours avec modération si on lui donne ce pouvoir. La raison en est qu'on voudra utiliser les échanges au comptant lorsque le marché et les prix au comptant sur le marché d'exportation seront supérieurs au prix de mise en commun prévu et que la Commission du blé voudra s'en servir pour retirer certaines céréales du système afin de pouvoir satisfaire certains de ces débouchés à l'exportation.

Cela semblerait souhaitable car les céréales se déplaceraient ainsi et aboutiraient sur certains de ces marchés. Cependant, si la Commission canadienne du blé utilise de façon habituelle les versements au comptant de cette façon, les agriculteurs se rendront compte de ce qui arrive et ils commenceront à s'attendre à ne pas avoir de livraisons à effectuer à l'automne. Ils attendront jusqu'à ce que ce marché soit à court et que la Commission du blé les contacte et leur offre une transaction au comptant. Vous avez alors transformé la Commission en un système de double mise en marché. Autrement dit, il s'agit d'une double mise en marché par la porte arrière.

Mon opinion sur le maintien d'une double mise en marché est exposée dans le mémoire que j'ai présenté l'an dernier, à peu près à la même époque, au Groupe de spécialistes de la mise en marché des grains, ainsi que dans d'autres ouvrages que j'ai rédigés sur ce sujet précis. Si des personnes sont intéressées, je me ferai un plaisir de vous les faire parvenir, mais je suis d'avis que le système de double mise en marché ne doit pas en fin de compte être maintenu, du moins en ce qui concerne la mise en marché des céréales et de l'orge dans l'Ouest canadien. Dans d'autres cas, la double mise en marché peut réussir et a réussi, mais je ne crois pas qu'elle réussira dans ce cas précis.

Finalement j'aimerais dire quelques mots sur le fonds national de réserve. Une des raisons de l'existence du fonds de réserve est le besoin de pouvoir garantir ces versements ajustés. Il est mis en place pour quelque chose mais j'ai de la difficulté à en comprendre la raison. Le fonds de réserve m'inquiète. Je crois que le fait que la Commission canadienne du blé possède ce gros montant d'argent, qui est en fait l'argent des agriculteurs, et le conserve à l'extérieur, bien qu'il rapporte des intérêts, constitue une mauvaise situation politique dans laquelle s'est embarquée la Commission du blé.

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Je crois que la Commission canadienne du blé sera toujours tentée de décider qu'elle aimerait utiliser ce fonds pour financer l'achat d'installations de transformation ou d'autres activités du même genre. Je crois qu'il existe de très bonnes raisons en matière de politique publique pour expliquer l'existence d'une Commission canadienne du blé et le pourquoi de ses pouvoirs de point de vente unique en ce qui a trait à la mise en marché des céréales des agriculteurs des Prairies. Je crois qu'il n'existe pas de bonnes raisons en faveur de l'investissement par la Commission canadienne du blé dans les installations de transformation. C'est ce qui m'inquiète à propos du fonds de réserve.

Ce sont mes commentaires. Merci beaucoup.

Le président: Merci, professeur Fulton, pour vos remarques et vos commentaires.

Nous allons passer au Syndicat national des cultivateurs.

Bienvenue au comité. Vous êtes au courant que le temps qui vous est alloué est de 15 minutes et que je vous avertirai lorsqu'il ne vous restera que deux ou trois minutes. Il y aura ensuite une période de questions et de remarques pour les trois groupes durant 40 à 45 minutes.

Mme Nettie Wiebe (Présidente, Syndicat national des cultivateurs): Merci.

Permettez-moi de vous présenter Darrin Qualman, secrétaire administratif du Syndical national des cultivateurs qui participera également à la période de questions.

J'aimerais commencer par vous remercier d'être venus dans l'ouest du pays pour nous entendre. Ceux d'entre vous qui venez de loin devraient savoir que la température n'est pas toujours ainsi. Bienvenus dans l'Ouest à ceux qui viennent d'ailleurs. Je suis très contente car cela prouve que vous reconnaissez que, dans l'ouest du pays, la Commission canadienne du blé est un organisme important et essentiel et que nous sommes très intéressés à lui voir conserver sa force.

Dans mon esprit, nous aurions peut-être été mieux servis si les parlementaires étaient venus dans l'Ouest pour réparer quelque chose qui est brisé. Je pense présentement au système de transport. Nous aimerions vraiment avoir des audiences sur l'ONTC. Elle fonctionne mal pour nous. La Commission canadienne du blé fonctionne bien pour nous. Je pense que nous aurions mieux utilisé notre temps à nous pencher sur quelque chose qui est brisé.

Ceci étant dit, nous nous penchons sur la Commission canadienne du blé, alors permettez-nous de vous présenter notre mémoire, que je vous recommande de lire. On m'a dit que je n'aurais pas le temps de le lire en entier devant vous.

Le président: Merci de le faire circuler dans les deux langues officielles. Nous savons que vous aborderez les points sensibles.

Mme Wiebe: C'est mon intention car je suppose que vous lirez le mémoire quand vous en aurez le temps.

Vous reconnaissez que le Syndicat national des cultivateurs est un organisme national, le seul organisme national d'agriculteurs à adhésion directe au pays qui soit bénévole, et nous avons toujours déployé beaucoup d'efforts au nom des familles agricoles. Lorsque nous nous concentrons sur ce projet de loi, c'est avec un oeil aiguisé sur la façon dont les producteurs céréaliers de l'Ouest canadien s'en tireront. C'est notre intérêt primordial.

Nous avons effleuré l'éventail des recommandations découlant de ce projet de loi et je voudrais les aborder d'une façon relativement systématique. Je tiens à dire que le Syndicat national des cultivateurs appuie la souplesse accrue au niveau des activités de la Commission canadienne du blé et l'augmentation des options offertes aux agriculteurs. Cependant, l'affaiblissement ou le démantèlement partiel de la Commission canadienne du blé ne fera augmenter ni les options offertes aux agriculteurs, ni la souplesse conférée à la Commission canadienne du blé.

Pour cette raison, le syndicat des cultivateurs s'oppose à bon nombre des changements que propose le projet de loi actuel. Une analyse raisonnable montre que bon nombre de ces changements proposés affaiblissent en fait ou ont nettement le potentiel d'affaiblir la Commission canadienne du blé. Nous sommes désireux d'accepter des changements à la Commission du blé, mais nous ne voulons que les changements qui élargiront, rehausseront et renforceront la Commission canadienne du blé et donc renforceront la position des agriculteurs des Prairies sur le marché céréalier mondial.

La Commission canadienne du blé repose sur trois piliers: la mise en commun des prix, les emprunts garantis par le gouvernement et la vente par un guichet unique. Le projet de loi C-72 porte préjudice à deux de ces trois piliers et pourrait le faire au troisième. En outre, il ne fait pas grand-chose pour améliorer la responsabilité envers les agriculteurs, qui était un objectif déclaré de ce changement législatif.

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J'aimerais aborder l'un des piliers, à savoir la mise en commun des prix. Pour nous agriculteurs, c'est un volet très important. La mise en commun des prix nous permet de livrer une partie des céréales à la récolte tout en recevant les prix plus élevés qui se pratiquent plus tard au cours de la campagne agricole d'août à juillet.

Elle protège les agriculteurs contre le risque de baisses soudaines des prix au cours de l'année et ceux d'entre nous qui vendent un peu de céréales sur le marché libre sont parfaitement conscients des risques encourus. Elle leur fait économiser les coûts élevés associés à la couverture du marché des produits de base. Elle facilite des livraisons organisées et prévisibles aux silos et au port. Elle leur fait économiser du temps et elle nous apporte une certaine tranquillité d'esprit.

Je tiens à vous rappeler que lorsque les agriculteurs se sont battus pour obtenir un peu d'ordre et d'équité dans la commercialisation des céréales entre 1910 et 1940, ils ont lutté pour la mise en commun des prix. Dans leur lutte pour créer les pools du blé des Prairies et par la suite des incarnations de la Commission canadienne du blé, les agriculteurs demandaient avant tout la mise en commun des prix.

La vente par un guichet unique est un volet crucial de la Commission canadienne du blé pour ce qui est des prix que nous obtenons pour nos céréales, mais la mise en commun est également indispensable pour les agriculteurs qui cultivent le blé et l'orge. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes penchés avec un souci tout particulier sur les achats au comptant, c'est-à-dire sur l'article 39.1 proposé dans le projet de loi C-72.

Notre analyse révèle que l'article 39.1 proposé, qui pourrait essentiellement donner carte blanche à la Commission canadienne du blé ou l'autoriser à acheter du blé ou de l'orge de n'importe quelle personne ou compagnie, à n'importe quel endroit, à n'importe quel moment, et dans le cadre de n'importe quel arrangement choisi par elle, constituerait en fait une menace grave pour la mise en commun des prix.

L'article proposé, comme beaucoup d'articles proposés dans le projet de loi C-72, est vague et imprécis, mais il prévoit un large éventail de scénarios allant d'achats limités au comptant par la Commission canadienne du blé une fois tous les dix ans auprès de compagnies céréalières ou du négoce pour remplir un contrat particulier et éviter des frais de stationnement jusqu'à l'élimination complète de la mise en commun par laquelle la CCB achète tout le blé et l'orge de l'Ouest au comptant.

Le projet de loi ne restreint pas l'utilisation future des achats au comptant et on peut donc envisager assez clairement qu'ils pourraient être utilisés en tout temps et en tout lieu et en fait saper complètement la mise en commun des prix pour les agriculteurs.

Il présente de nombreux dangers. Certains ont déjà été soulevés. Il présente le danger d'inciter les agriculteurs à conserver leurs récoltes à la ferme et à ne pas les livrer à la Commission canadienne du blé en espérant que cette dernière sera ultérieurement obligée de les contacter et d'acheter à un prix supérieur. Nous estimons que la mise en commun et les achats au comptant ne peuvent exister simultanément.

Si la Commission canadienne du blé choisissait d'acheter au comptant le blé et l'orge directement auprès des agriculteurs et si ce prix au comptant se révélait en fin de compte supérieur au rendement tiré de la mise en commun, très peu d'agriculteurs participeraient aux pools lors des années suivantes. Nous comprenons vite dans le milieu agricole. S'il appert que c'est un système qui comporte de graves lacunes, en fait il s'écroulera.

Les achats au comptant auprès des producteurs perturberaient l'acheminement sans heurts des céréales vers les réseaux de silos à grains. Les agriculteurs qui vendent au comptant ont besoin de livrer lorsque le prix est élevé. Les achats au comptant auprès des producteurs détruiraient le traitement équitable et égal que les agriculteurs apprécient dans leur relation avec la Commission canadienne du blé. C'est le fondement de leur confiance dans la Commission canadienne du blé. Le Syndicat national des cultivateurs recommande donc au gouvernement de supprimer du projet de loi C-72 l'article 39.1 proposé.

Nous estimons qu'un autre mécanisme mentionné dans le projet de loi C-72 a du potentiel mais devrait être reformulé. Dans son libellé actuel, c'est simplement une clause d'exclusion de céréales et de types de céréales de la Commission canadienne du blé et il présente un mécanisme qui permettrait de pratiquer de telles exclusions. Le projet de loi proposé est supposé permettre un vote des producteurs lorsque les exclusions jugées nécessaires par le conseil d'administration sont jugées d'importance.

Nous constatons que cette modification du mandat en est une qui permet à un futur conseil d'administration de la Commission canadienne du blé d'affaiblir et de démanteler la Commission mais qu'elle est déséquilibrée car elle ne permet aucun renforcement de la Commission ou aucun ajout de céréales à la Commission.

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Nous recommandons que l'article 45 proposé dans le projet de loi C-72 soit modifié pour permettre aux producteurs d'y ajouter des céréales comme le seigle, l'avoine, le canola, les céréales qu'ils jugent nécessaires, au champ de compétence de la Commission canadienne du blé. Les mécanismes pour de tels ajouts devraient être les mêmes que pour les exclusions, c'est-à-dire qu'ils devraient être soumis à un vote des producteurs.

En outre, le Syndicat national des cultivateurs recommande que le projet de loi comprenne une définition claire du terme «d'importance». Voici un exemple: «Lorsque, de l'avis du conseil, il s'agit d'un type, d'une catégorie ou d'un grade d'importance» mais le terme «d'importance» n'est pas défini.

Le projet de loi devrait également préciser que, s'il y a des motifs de douter que cela est d'importance ou non, le ministre doit demander l'avis d'un grand nombre de producteurs. Nous estimons que cette proposition a du potentiel, cette modification particulière que nous suggérons à la modification parce qu'elle nous donne une fois pour toutes, à nous les producteurs de l'Ouest, un mécanisme précis qui nous permettrait en fait d'inclure ou d'exclure des céréales du champ de compétence de la Commission quand nous le jugerions nécessaire, d'une façon bien comprise par le public.

Nous estimons qu'il s'agirait d'un avantage considérable. Dans son libellé actuel, l'amendement ne nous semble pas équilibré. Nous pensons qu'il est complètement déséquilibré et qu'il serait extrêmement intéressant de l'équilibrer et de prévoir à la fois l'exclusion et l'inclusion de céréales avec le même mécanisme.

J'aimerais passer maintenant à une autre recommandation touchant les périodes de mise en commun. Dans l'ensemble de notre analyse - et nous avons organisé des colloques publics sur ce sujet et fait de notre mieux pour le comprendre - nous ne pouvons trouver aucun motif convaincant à l'avantage des périodes de mise en commun raccourcies, mais nous pouvons entrevoir toutes sortes d'inconvénients.

En fait, à moins d'avoir une période de mise en commun quotidienne qui ressemblerait étrangement au marché au comptant, elle n'aurait pas l'avantage de résoudre le problème d'arbitrage entre le prix au comptant et le prix de mise en commun. Elle n'aurait donc pas cet avantage particulier et elle comporte en fait de nombreux inconvénients.

La Commission canadienne du blé présenterait une moins grande sécurité et prévisibilité de l'offre si nous pouvions choisir au cours de quelle période de mise en commun nous aimerions faire nos expéditions. Le passage à une mise en commun trimestrielle encouragerait les agriculteurs à conserver l'orge pour des mises en commun ultérieures à un prix éventuellement plus élevé. La rétention de l'orge pour des mises en commun ultérieures augmenterait la possibilité de la vendre en fin de compte sur le marché libre. Ceci réduirait la mise en commun de l'orge et ferait baisser le rendement obtenu par les participants.

Les prix ont tendance à augmenter à mesure que la campagne agricole avance. C'est très général; aucun d'entre nous n'en dépend. Si les producteurs qui vendent plus tard sont récompensés par des prix plus élevés, les agriculteurs auront alors tendance à choisir les troisième et quatrième trimestres et la Commission canadienne du blé pourrait éprouver des difficultés à attirer du blé dans le réseau plus tôt et en temps opportun.

La mise en commun trimestrielle détruirait le traitement équitable chez les agriculteurs et saperait leur confiance dans la Commission canadienne du blé. Le Syndicat national des cultivateurs recommande donc de supprimer l'article 31 proposé dans le projet de loi C-72 parce que des périodes de mise en commun variables sont inutiles et possiblement préjudiciables.

Notre recommandation concernant les certificats négociables par les producteurs fait état de notre appui à l'amendement à l'alinéa 32(1) d) de la Loi sur la Commission canadienne du blé, contenu dans le projet de loi C-72, qui permettrait la création de certificats négociables par les producteurs... le public se demandant comment cela pourrait fonctionner dans la réalité. Je pense qu'il faudrait étudier beaucoup plus sérieusement cet alinéa. Il a du potentiel, mais il faut savoir comment cela fonctionnerait en réalité.

Je passe à la dernière partie de mon mémoire. J'aimerais dire quelques mots sur le fonds de réserve mais surtout sur l'organisation. Nous estimons que le fonds de réserve est inutile. Il prélèverait de l'argent des poches des agriculteurs, des pools. Nous souhaitons recommander au gouvernement de continuer à garantir les ajustements au prix initial. Il ne s'agit pas d'un risque financier pour le gouvernement et cela n'a pas été le cas au cours des 60 dernières années. Nous ne prévoyons pas que ce sera le cas, et cela représente un avantage considérable pour les agriculteurs.

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Le partenariat entre le gouvernement fédéral et la Commission canadienne du blé vaut environ 60 millions de dollars par année. Ce montant fait plus que couvrir l'ensemble des frais d'exploitation de la Commission canadienne du blé. Permettez-moi de souligner que cela n'augmente pas le déficit du gouvernement canadien.

Il s'agit donc du meilleur de tous les arrangements possibles en termes de gouvernement public et d'avantage accordé par le gouvernement à un grand nombre de citoyens et à l'économie. Nous estimons qu'il faudrait le laisser tel quel. Nous voulons conserver le statut de société d'État. Nous reconnaissons que le gouvernement évolue. En fait, dès qu'un conseil d'administration a un membre élu, on ne peut conserver le statut de société d'État.

Nous voulons formuler une recommandation permettant à une structure gouvernementale de conserver le statut de société d'État et le partenariat financier intégral entre le gouvernement et la Commission canadienne du blé. Il accorderait aux agriculteurs ces avantages formidables et leur permettrait, en fait, d'avoir davantage voix au chapitre en matière de politique et d'orientation du conseil.

Notre recommandation se lit comme suit:

Merci.

Le président: Merci beaucoup, Nettie, pour votre exposé concis. Comme vous l'avez mentionné, vous nous avez présenté un mémoire plus détaillé. Le comité l'examinera assurément.

Je remercie les trois témoins pour leurs exposés concis et pertinents. Nous allons maintenant passer à une période de questions, de commentaires et de dialogue de 45 minutes au maximum. Je commencerai par M. Elwin Hermanson.

M. Elwin Hermanson (Kindersley - Lloydminster, Réf.): Merci, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue aux témoins présents ce matin à Saskatoon.

Je mène une vie très intéressante, monsieur le président. J'ai un certain nombre de leaders politiques et agricoles venant de la circonscription de Kindersley - Lloydminster. J'ai un certain nombre de membres de Farmers for Justice; j'ai un certain nombre de membres du SNC.

Le président: Êtes-vous membre de tous ces organismes?

M. Elwin Hermanson: Je ne suis en fait membre d'aucun.

Le président: Je pensais que vous aviez dit «membre» et je voulais une clarification.

M. Elwin Hermanson: Ils figurent au nombre de mes électeurs et j'apprécie d'entendre leurs témoignages.

Les exposés étaient très bons, très précis. Nous avons entendu bon nombre de témoignages à Winnipeg et à Regina hier. Ce que nous n'avons pas entendu, ce sont surtout des solutions à la rancoeur et à la division que l'on constate à l'heure actuelle partout dans les Prairies.

Nous avons entendu les témoignages des pools du blé; nous avons maintenant entendu à plusieurs reprises les témoignages du Syndicat national des cultivateurs; et nous avons entendu les témoignages de plusieurs agriculteurs individuels qui nous ont déclaré qu'ils n'aiment pas grand-chose dans le projet de loi C-72 pour diverses raisons.

Nous n'avons pas entendu beaucoup de témoins nous dire comment nous pouvons résoudre la division qui existe non seulement entre l'Alberta et les autres provinces des Prairies, mais également à l'intérieur de la province de la Saskatchewan, tout comme elle existe dans la circonscription de Kindersley - Lloydminster.

J'adresserai peut-être cette question surtout au Syndicat national des cultivateurs. Ce que vous proposez m'inquiète... et je crois comprendre que votre organisme est essentiellement opposé au projet de loi C-72. Vous vous opposez à l'organisation, à laquelle le gouvernement est engagé je crois. Vous vous opposez à certains des éléments de base du projet de loi. Vous vous opposez à peu près à tous les éléments des mesures prises pour assouplir la Commission: opérations au comptant, raccourcissement des périodes de mise en commun, fonds de réserve. Je suppose donc que vous vous opposez au projet de loi.

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Il me semble que si nous n'apportons pas de modifications constructives à la Commission canadienne du blé, si nous la laissons prospérer au XXIe siècle, en voyant le nombre de gens, même dans ma circonscription de Kindersley - LLoydminster, je constate une érosion progressive de l'appui accordé à la Commission telle qu'elle existe. Je constate un mouvement en faveur de changements importants, de changements auxquels le SNC s'oppose actuellement, qui s'amplifie. Je dirai que si nous n'effectuons pas certains changements - nous permettrons à la Commission de continuer à prospérer et peut-être d'être plus souple même de façons que vous n'aimez pas - le résultat éventuel fera que vous perdrez une influence absolue sur tous les changements qui seront effectués. La Commission n'existera pas d'une façon ou sous une forme que vous aimeriez voir au cours du prochain siècle. En fait, il se pourrait même qu'il n'y ait pas de Commission canadienne du blé si les partisans des trois piliers sont intransigeants.

Ce que je dis essentiellement, c'est que le SNC fait probablement davantage pour détruire la Commission que les Farmers for Justice en feront jamais. Ces derniers, et ceux qui souhaitent quelques changements assez importants, sont au moins disposés à voir la Commission du blé continuer à servir les agriculteurs dans une situation de monopole, du moment qu'ils peuvent vendre en dehors de ce monopole. Que répondez-vous à cela? Admettez-vous que mes propos pourraient comporter un semblant de vérité?

Le président: Nettie.

Mme Wiebe: Je commencerai par le dernier point parce que vous avez, en fait, mentionné justement ce qui est si curieux à ce sujet. Vous venez tout juste de dire qu'ils veulent vendre dans une situation de monopole en dehors de ce monopole. Même l'irrationalité de ce langage est ahurissante: avoir un monopole et ensuite vendre en dehors de ce monopole. Précisément, quel est l'intérêt monopolistique que vous vendiez...

M. Elwin Hermanson: Les agriculteurs ontariens vendent en dehors du monopole. Les agriculteurs américains vendent en dehors du monopole. Nous avons un marché mondial. Aujourd'hui, ce n'est pas tout le monde qui vend du blé, qui le fait par l'entremise de la Commission canadienne du blé. Vous ne pouvez pas le nier.

Mme Wiebe: Cela n'a jamais été contesté. La Commission canadienne du blé opère sur un marché international compétitif. Le monopole s'applique spécifiquement à ceux d'entre nous qui cultivent des céréales et les vendent sur ce marché international par l'entreprise de ce guichet unique. L'Ontario a son propre monopole. La Commission ontarienne de commercialisation du blé a également un monopole.

Permettez-moi de passer aux questions portant sur la circonscription. En fait, je fais partie de ses électeurs. Je tiens à lui rappeler que des milliers d'agriculteurs, il s'en souviendra, se sont réunis à Rosetown pas plus tard que l'été dernier pour montrer leur appui non équivoque à la Commission et, en fait, pour montrer leur appui à certaines des recommandations. Je parle ici tout particulièrement de la recommandation visant à avoir un mécanisme pour augmenter les céréales et les oléagineux vendus par la Commission, pour ajouter en fait des céréales et des oléagineux à la Commission. Dans ce sens, je pense donc que nous avons un soutien écrasant dans la circonscription et dans tout l'Ouest du Canada en faveur de ces recommandations.

Il me semble toujours peu judicieux d'essayer de modeler un projet de loi sur mesure pour les renégats et pour ceux qui sont prêts à utiliser des moyens antidémocratiques pour modifier la loi. Je considère que des moyens illégaux comme chevaucher la frontière sont des moyens antidémocratiques. J'estime que les législateurs réussiraient très mal, comparativement à nous autres citoyens qui respectons en fait la loi et souhaitons un moyen très démocratique et civilisé pour effectuer les changements recommandés.

Et je tiens à admettre cela dès le départ: le Syndicat des cultivateurs se concentre fermement sur les avantages qu'en tirent les céréaliers. Les changements que nous recommandons à ce projet de loi sont spécifiquement destinés non pas à profiter au négoce, non pas à profiter aux camionneurs, mais à profiter à ceux d'entre nous qui produisent ces céréales et ont besoin de les vendre sur le marché international. J'estime donc que le projet de loi devrait se concentrer sur ce point clé. Je vous recommande en fait de ne pas rédiger le projet de loi pour plaire à ceux qui chevauchent la frontière. Je dirai que ce n'est pas la bonne façon de diriger un pays.

Pour ce qui est de perdre l'influence au sein de la Commission, nous avons très nettement recommandé que le Comité consultatif élu par les producteurs dispose de pouvoirs plus étendus. Nous avons abordé la question de la responsabilité et la valeur de la garantie gouvernementale et le rôle de la Commission canadienne du blé sur la scène internationale de la mise en marché et les pouvoirs dont elle a besoin, et nous avons essayé d'équilibrer cela avec les revendications des agriculteurs en termes de responsabilité. Nous avons pensé qu'un groupe de gens élus disposant d'options en matière d'élaboration des politiques et qui doivent approuver la nomination de nos vendeurs clés - les commissaires - constituait le bon équilibre.

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M. Elwin Hermanson: Mais Nettie, vous n'avez pas répondu à ma question sur le fait que votre position est peut-être en réalité la principale force de destruction au sein de la Commission.

Je rappelais hier à notre ministre provincial de l'Agriculture que son propre sondage, commandé par son propre gouvernement, un gouvernement NPD en Saskatchewan, révèle que58 p. 100 des 800 agriculteurs échantillonnés veulent que la Commission canadienne du blé soit une institution à participation volontaire des agriculteurs. C'était très clair dans toute la province.

Un sondage Angus Reid, commandé par le ministre Goodale, a révélé qu'une majorité de producteurs d'orge voulaient également une Commission canadienne du blé à adhésion volontaire. Une fois qu'on les avait manipulés et amenés à conclure que le prix de l'orge brassicole pourrait être inférieur si tel était le cas, les avis étaient davantage partagés.

Vous donnez l'impression qu'il y a des milliers de partisans d'un côté et quelques renégats de l'autre, mais les chiffres personnels du gouvernement provincial de la Saskatchewan nous révèlent que ce n'est pas le cas.

L'autre fait intéressant à propos de ce sondage, c'est qu'il a montré que ce sont les jeunes agriculteurs, ceux de moins de 40 ans, qui sont le plus en faveur d'une commission à adhésion volontaire, et que ce sont les agriculteurs de plus de 40 ans qui y sont le moins favorables.

Ce que je dis à propos de Kindersley - Lloydminster est vrai. L'appui accordé à une Commission canadienne du blé plus souple ira grandissant. Si vous vous y opposez, cela finira par éclater et ce sera comme le tarif du Nid-de-Corbeau, qui a disparu soudainement et nous met dans une situation moins bonne que si nous avions élaboré un meilleur réseau de transport en collaboration.

C'est comme l'article 11 du GATT, pour lequel il y avait de l'opposition au changement, et du jour au lendemain il a disparu. Ce qui arrivera, c'est que dans environ cinq ou dix ans, la Commission du blé aura disparu à moins que nous n'envisagions certaines réformes qui la feront cadrer avec le climat économique du prochain siècle.

Mme Wiebe: Je ne commente pas des sondages que je n'ai pas vus. Je tiens à dire ceci. Il me semble que c'est une menace futile de dire que, si nous ne la démantelons pas, elle s'effondrera d'elle-même. Ce projet de loi démantèlerait de grosses parties de la Commission canadienne du blé. Il ne lui confère pas uniquement de la souplesse, il porte en fait préjudice à certains de ses éléments clés.

Je suis persuadée que lorsque les gens auront devant eux toute l'information, ils choisiront en fait un système qui présente le genre de souplesse et de caractéristiques que ce projet de loi apporterait. Lorsqu'ils additionneront les pertes que cela signifierait pour eux, je suis persuadée qu'ils voudront en fait conserver une Commission canadienne du blé plus forte.

M. Elwin Hermanson: C'est avec plaisir que je vous montrerai le sondage.

Mme Wiebe: J'estime que nous devons examiner ce projet de loi, non pas en fonction d'une minorité qui préconise le démantèlement de la Commission, mais que nous devrions le faire d'une façon beaucoup plus positive pour voir ce qui est possible. Nous avons là un organisme d'envergure internationale. Que peut-on faire pour renforcer ses éléments de mise en marché de façon à nous projeter dans le prochain millénaire et à nous permettre d'y être compétitifs?

Le président: Juste avant de passer à M. Easter, je demanderai à Noreen ou à Murray s'ils veulent faire des commentaires brefs, et nous passerons ensuite aux autres questions.

Noreen.

Mme Johns: Je suis d'accord avec les propos de Nettie. Nous mentionnons dans notre mémoire qu'en n'abordant pas cette question des renégats qui est sur la table, ce popularisme et les héros médiatiques que nous avons créés manipulent des tas d'agriculteurs qui en viennent à conclure qu'ils ne disposent pas de leurs droits individuels.

Je trouve cela très malheureux. Je répète que si nous pouvions amener chaque agriculteur devant la Commission canadienne du blé et devant toutes les institutions situées à Winnipeg et leur faire voir exactement ce qui se passe en leur nom, certains changeraient d'idée. D'une certaine façon, je pense que les faits contrediraient leurs opinions. Cela m'est arrivé personnellement lors d'une tournée en autobus que nous avons organisée il y a un an à partir de notre circonscription. Les jeunes du club de marketing y sont allés avec une attitude bien ancrée qui a changé lorsqu'ils ont vu les choses de leurs propres yeux.

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Dans cette province, nous faisons la promotion de la commercialisation dans le cadre de la libre entreprise, par l'entremise de nos programmes de gestion des fermes. Nous pouvons rester assis devant nos ordinateurs et le faire nous-mêmes. Nous pouvons aller à la «soirée de nos jeunes» au club de marketing et devenir des marchands.

Lorsque nous avons amené ces gens à Winnipeg pour leur montrer ce qui se passe vraiment et ce qu'implique vraiment la commercialisation en notre nom, ils ont changé d'idée. Ce sont les jeunes dans nos collectivités et ils sont maintenant devenus très actifs et gardent l'esprit ouvert aux débouchés, en produisant des cultures spéciales et d'autres choses du genre. Mais ils ont assurément eu cette possibilité de changer d'idée, ce qui ne serait pas arrivé sans cette expérience. Je pense qu'on était en train de leur faire un lavage de cerveau dans nos cours de gestion des entreprises agricoles pour les amener à penser qu'ils pouvaient être les distributeurs dans le monde.

Le président: Professeur Fulton, voulez-vous faire un commentaire?

Prof. Fulton: Non.

Le président: Très bien, monsieur Easter.

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Merci. J'aime la suggestion de Noreen. Je pense que nous allons demander à Preston d'envoyer Elwin à l'IICG.

Pour commencer, Elwin, je pense vraiment qu'il est injuste d'accuser ceux qui préconisent le maintien du statu quo à la Commission canadienne du blé en disant qu'ils sont la principale force de destruction. Je suis très heureux que nous soyons venus ici car je pensais qu'il y avait un raz-de-marée. J'avais l'habitude d'être ici tout le temps.

Pendant l'expérience que j'ai vécue ici, la Commission du blé bénéficiait d'un appui plus solide, mais en écoutant les médias et aussi certains des commentaires à la Chambre des communes, je m'attendais à un raz-de-marée d'opposition. Où sont ces agriculteurs partisans de la justice? Je ne les ai pas vus devant notre comité. Ne peuvent-ils pas expliquer leurs arguments? J'ai constaté toutes sortes d'appuis pour la Commission du blé.

À mon avis, il est donc injuste d'accuser les partisans de la Commission du blé d'être une force principale de destruction parce que ces renégats, comme les appelle Nettie, ne se sont jamais montrés le bout du nez pour venir témoigner devant notre comité et y être interrogés et pour expliquer leur point de vue concernant la façon d'améliorer la situation pour le milieu agricole.

Pour revenir à M. Fulton, deux ou trois nouveaux concepts ont été jetés sur la table et pourraient vous détourner de votre point.

Le premier concept est une proposition disant qu'on laisse peut-être trop de choses à la discrétion de la nouvelle Commission et que le projet de loi ne précise pas suffisamment ce qu'une nouvelle Commission peut faire comme ajout ou suppression.

Le deuxième concept est la proposition faite par le SNC en vue d'accorder plus de pouvoirs au Comité consultatif pour qu'il puisse éventuellement faire certaines des choses que le projet de loi lui confère essentiellement en termes de responsabilité à l'égard des producteurs.

Le principal point de divergence soulevé jusqu'à présent par bon nombre de témoins a porté sur la responsabilité à l'égard des producteurs et les garanties accordées aux contribuables. Cela revient au point que vous avez soulevé, à propos qui devrait nommer le président et le président du conseil. J'estime qu'il pourrait y avoir une certaine souplesse à l'égard du président du conseil, mais je ne vois aucune souplesse de la part du gouvernement pour la nomination du président.

A la page 7 de votre mémoire, vous insistez sur le fait que:

Il y a d'importants points de divergence à ce sujet. Nous devons reconnaître les enjeux qui sont sur la table. Le projet de loi stipule expressément que le gouvernement nommera le président et le président du conseil. Comme je l'ai mentionné, il pourrait y avoir une certaine souplesse en ce qui concerne le président du conseil. Ils le font à cause des trois garanties gouvernementales.

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L'un des exposés a mentionné que la garantie d'emprunt valait 60 millions de dollars. Le compromis pourrait consister à perdre cette garantie d'emprunt. Pensez-vous que c'est un prix trop élevé à payer et comment envisagez-vous une plus grande responsabilité à l'égard du milieu agricole en faisant nommer le président par le conseil d'administration?

Le projet de loi est très spécifique. Il stipule que le président, au nom du conseil, assure la direction et la gestion des activités et des affaires courantes de la Commission, son pouvoir d'agir étant assujetti à une résolution du conseil. Nous parlons d'une nomination; nous ne parlons pas du plan d'entreprise ou du plan opérationnel.

Prof. Fulton: Permettez-moi d'aborder certains de ces points. J'estime que vous avez très bien exposé le conflit que je constate dans ce projet de loi. Il existe un conflit réel entre le fait d'accorder ce que j'appellerais une voix et un contrôle efficaces aux agriculteurs sur le fonctionnement de la Commission canadienne du blé et la conservation de certaines des garanties gouvernementales. Il semblerait qu'il est impossible d'avoir les deux, même si nous aimerions qu'il en soit ainsi.

Le projet de loi constitue une tentative de compromis sur ces deux questions en accordant un peu de contrôle tout en conservant un peu de garantie. À mon avis, c'est un mauvais compromis.

Les compromis de cette nature tendent souvent à faire de mauvaises lois.

Je me sentirais plus à l'aise si le projet de loi accordait la voix et le contrôle ou conservait les garanties et se dispensait d'essayer de nous faire deviner qu'il y a une voix et un contrôle efficaces. Les tentatives de compromis sont plutôt inefficaces.

Personnellement, je prends position en faveur de la voix et du contrôle. C'est ce que je choisirais. Si cela signifiait abandonner certains des avantages financiers des garanties, je serais disposé à agir dans ce sens.

D'autres réagiront différemment, mais je dirai qu'en matière législative ce genre de compromis, qui essaie de donner un petit peu des deux, finira vraisemblablement par ne pas être très efficace. Les agriculteurs ne penseront pas vraiment qu'ils ont une voix efficace et, en même temps, vous aurez perdu certaines des garanties que vous auriez eues autrement. Vous n'obtiendrez pas vraiment ce qu'il vous faut de chacun des deux côtés.

Il s'agit vraiment d'une opinion personnelle pour savoir lequel des deux est plus important.

Permettez-moi d'aborder votre dernier point, à savoir si le président de la Commission est nommé ou si les directives viennent du conseil d'administration. Nonobstant ce que j'ai dit précédemment, je ne suis pas suffisamment bien informé sur le fonctionnement de ces choses. Il se pourrait très bien qu'en fait le conseil ait la capacité de nommer le président de la Commission, même s'il est stipulé que c'est du ressort du ministre, si le ministre s'assure en fait que les membres du conseil ont pu émettre leur avis pour prendre cette décision.

Il est évident que le problème réside dans le fait que ce n'est jamais précisé. Le ministre actuel ou le prochain pourrait très bien le faire mais, à un moment donné, ils pourraient très bien décider qu'ils n'ont rien à voir avec cela. On pourrait donc bénéficier facilement d'une certaine latitude, dans le cadre de laquelle même si on dit sur papier que c'est le ministre qui a fait la nomination, en réalité c'est le conseil qui a mené l'opération de bout en bout et non le ministre.

Il me semble important, pas seulement symboliquement mais pour ce qui est du fonctionnement d'une société, que le PDG soit choisi par les gens pour lesquels il travaille. Si vous alliez dans une de nos principales coopératives ou sociétés en disant qu'il y a un conseil qui représente les actionnaires, mais que quelqu'un d'autre nommera le PDG, sans que vous ayez votre mot à dire là-dessus, je ne suis pas certain que cette société fonctionnerait très bien.

M. Wayne Easter: Mais nous avons affaire à une entité différente. Nous avons actuellement une société d'État. Nous passons à une société d'économie mixte, ce qui m'amène à mon second point.

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Vous avez déclaré qu'il était difficile d'évaluer les travaux de la Commission canadienne du blé. Vous n'obtiendrez pas grand- chose d'autre que le rapport annuel de la Commission canadienne du blé pour ce qui est de ses travaux. Mais en termes d'évaluation, comparez cela aux grandes sociétés céréalières que sont les marchands de céréales. Quel genre d'évaluation obtenez-vous de Cargill et Bunge Dreyfus et des autres? Vous n'obtenez pas une bonne évaluation. Vous ne pouvez pas voir ce qui se passe à l'intérieur. Dans notre cas, vous avez une vue intime.

L'autre question que j'aimerais poser avant de manquer de temps, c'est que nous sommes ici, comme l'a mentionné le président, pour entendre et pour examiner quels changements peuvent être effectués. La proposition avancée par le SNC, telle que je la comprends - et c'est la première fois que nous l'entendons - prévoit de renforcer et d'habiliter l'actuel comité consultatif pour faire ce que nous prétendons vouloir faire dans le projet de loi avec l'élection d'un nouveau conseil. Il n'a pas de processus électoral établi.

Que pensez-vous de ce concept, professeur Fulton, ou qu'en pense le SWAN?

Prof. Fulton: Rapidement, même si je suis d'avis que les pouvoirs du comité consultatif pourraient être renforcés, je ne pense pas qu'il soit possible de les renforcer jusqu'au point où les agriculteurs auraient l'impression d'avoir vraiment une voix et un contrôle efficaces sur la Commission canadienne du blé. Je ne vois pas comment cela est possible. Oui, on peut leur accorder certaines choses supplémentaires, mais tant qu'il est clair dans le projet de loi que les commissaires ont la responsabilité, ils assumeront cette responsabilité. C'est la façon dont le gouvernement structure le travail.

Je suis parfaitement conscient de la raison pour laquelle on essaie de contourner cette situation. À mon avis, cela ne fonctionnera pas.

Le président: Noreen, voulez-vous faire un commentaire?

Mme Johns: J'aimerais faire un bref commentaire sur ce sujet et je crois que nous y avons fait allusion en partie dans notre mémoire.

Je sais que, dans le passé, j'ai été très négative à propos de la nomination de certains commissaires, et nous savons tous que certains sont venus de formations politiques différentes de la mienne, de toute évidence. J'ai été remarquablement surprise par le niveau de compétence et de travail qu'ils accomplissent à l'heure actuelle en notre nom.

À titre individuel, nous ne briguons pas les suffrages avec un programme électoral dans lequel nous nous présentons très souvent nous-mêmes sur une tribune et, une fois élus, nous ferions bien mieux de conserver ce programme pendant que nous sommes en poste. Nous n'avons pas cette occasion de laisser les faits contredire notre point de vue. Pour moi, ces choses ont changé dans la structure actuelle des commissaires. De fait, ils ont fait preuve d'ouverture d'esprit et sont devenus d'ardents supporters du conseil alors que, dans le passé, certains ne l'étaient pas. Ils ont fait preuve d'ouverture d'esprit et ont commencé à travailler vraiment fort.

Dans le système actuel, je n'ai pas trouver grand-chose à redire même si, de temps à autre, j'ai pensé que nous avions nommé quelqu'un qui n'allait pas servir au mieux la Commission du blé et ses intérêts. Mais, à long terme, mes appréhensions se sont révélées erronées, et au nom du comité consultatif et des événements que je constate ici... ils ne disposent même pas d'un budget pour venir et nous entendre ou écouter tous.

C'est de là que viennent bon nombre des problèmes à l'heure actuelle. J'estime que si les agriculteurs avaient senti dans le passé qu'ils disposaient d'une tribune pour se faire entendre en arrivant là-bas, on n'assisterait pas à toutes ces plaintes que l'on entend pour manque de responsabilité.

Je suis d'accord avec M. Easter au sujet du rapport annuel. Nous n'obtiendrons jamais ce rapport annuel de quiconque manutentionnera nos céréales, si nous perdons la Commission canadienne du blé. Nous n'aurons jamais de document qui précise tout cela ou qui est vérifié et ouvert au public comme celui-ci.

Dans une certaine mesure, je suis d'accord avec Nettie pour dire que, peut-être, si nous nous étions tournés vers le comité consultatif et si nous l'avions écouté, nous aurions adouci le problème. Le simple fait d'élire un conseil à ce stade ne nous garantit nullement que la voix des agriculteurs sera entendue.

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Une fois encore, je répète que si nous briguons les suffrages avec un programme électoral, nous nous retrouvons acculés dans un coin et, peu importe ce que nous apprenons entre-temps, nous devons respecter ce programme parce que c'était la base de notre campagne électorale. Si nous avons deux ou trois personnes, même au sein du conseil, qui sont vraiment dans l'opposition, nous provoquons une nouvelle division et je ne pense pas que nous puissions avoir un conseil élu efficace s'il est divisé intérieurement.

Le président: Juste avant de passer la parole à M. Hoeppner, je demande personnellement une clarification au professeur Fulton.

Professeur Fulton, vous avez suggéré que le conseil d'administration choisisse son propre président et choisisse le président de la Commission. C'est le processus que suivent les sociétés privées.

Avez-vous connaissance de sociétés privées qui ont fait cela si le gouvernement leur accorde une pleine garantie; autrement dit, le soutien et les garanties? Les gouvernements accordent-ils cela à des sociétés privées sans entretenir un lien quelconque avec elles?

M. Elwin Hermanson: Bombardier.

Prof. Fulton: Pour le genre de garanties dont nous parlons dans le cas de la Commission canadienne du blé, non, ils ne le font évidemment pas.

Le président: Très bien, merci.

Monsieur Hoeppner.

M. Jake Hoeppner (Lisgar - Marquette, Réf.): Merci, monsieur le président.

La matinée a été intéressante et nous souhaitons la bienvenue à tous les témoins qui se présentent devant nous.

J'ai entendu ce matin des déclarations à l'effet que nous devons appuyer les trois piliers de la CCB. J'ai entendu parler de gens qui subissent un lavage de cerveau ou de renégats. Lors de mon élection à la Chambre des communes, je n'ai jamais pensé que je m'occuperais un jour d'un des grands enjeux, à savoir la CCB.

Je suis un peu abasourdi par les propos de Mme Wiebe qui veut appuyer les trois piliers de la CCB. Je lui ai écrit le 16 septembre 1996 pour l'informer des énormes bonis versés comme primes de sélection et pour savoir où cela cadrait dans l'un des piliers de la CCB. Je n'ai jamais obtenu de réponse.

Pour moi, il s'agit de quelque chose qui détruit la CCB. J'aimerais vous dire ici aujourd'hui que le projet de loi C-72 est en train de légaliser les irrégularités qui se produisent à la Commission du blé depuis un certain nombre d'années. Il est là pour protéger les actuels commissaires de la CCB, et probablement les anciens, et il sera adopté.

J'ai demandé au ministre, en Chambre, comment il pouvait fermer les yeux... ou bien où ces primes étaient autorisées dans la Loi sur la Commission canadienne du blé. Il a refusé de répondre en disant qu'il demanderait à la CCB de me donner une réponse. C'est ce que M. Klassen, l'un des commissaires, m'a écrit - et j'ai demandé tout d'abord une opinion juridique de mes propres avocats. Il a déclaré:

Le juge Wright, de la Cour du Banc de la Reine du Manitoba, a statué sur ce point. Il a dit que c'est totalement faux car la CCB a un monopole. Elle a le devoir de veiller à ce que les producteurs soient tous traités également en vertu du système de mise en commun, et cela sera prouvé.

À propos de l'autre question, lorsque j'ai été impliqué dans cette question, c'est parce que la CCB n'achetait pas de blé atteint de fusarium. Il n'y avait pas de débouchés pour lui, Dans ma région, on a dit aux agriculteurs qu'ils pouvaient l'exporter eux-mêmes s'ils obtenaient des permis d'exportation. Nous avons entendu hier des témoins dire que les prix d'exportation fixés par la CCB étaient tels qu'ils ne pouvaient pas se permettre d'exporter.

Je me contenterai de vous lire un court témoignage tiré du contre-interrogatoire d'un responsable de la CCB, Lawrence Klassen, qui travaille à l'élaboration des politiques générales. Sous serment, M. Riley a déclaré:

M. Hay, avocat en chef du ministère de la Justice, a répondu: «Y a-t-il un contrat d'exportation entre le producteur et la Commission?»

M. Riley a répondu: «Oui. Alors d'après vous, n'est-ce pas correct?» M. Hay a répondu oui.M. Riley a alors rétorqué:

M. Hay, avocat en chef du ministère, a répondu oui.

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Dites-moi comment les agriculteurs peuvent exporter leurs propres céréales à un prix équitable si c'est ainsi que les choses se passent.

Le président: Madame Wiebe.

Mme Wiebe: Je vais d'abord répondre à la deuxième question. Je comprends qu'il existe une formule pour fixer la prix de rachat, et il s'agit d'une formule qui tient compte de ce que la Commission canadienne du blé aurait pu obtenir en fait de prix en dehors du marché américain. C'est ce que je comprends du processus et je suppose qu'on l'a respecté.

En ce qui a trait au fusarium, il posait un problème de qualité et il est toxique, comme nous le savons. On a traité ce problème de différentes façons. Dans le Dakota du Nord, quelques centaines ou peut-être milliers d'acres de céréales infestées du fusarium, ont été brûlés. Nous n'avons pas choisi cette option au Canada. Bien entendu, il y a eu certaines tentatives pour le commercialiser. Au début, ces tentatives n'ont pas été très fructueuses, mais je crois que le problème a été résolu. Je ne pense pas que ce soit pertinent à la discussion sur la façon dont nous voulons remodeler la Commission du blé à ce moment-ci pour des travaux futurs.

En ce qui a trait à la première question, tout comme vous, je suis une partisane très convaincue de l'égalité de traitement des cultivateurs au sein du conseil et, comme vous pouvez le voir, plusieurs des recommandations que nous formulons en tiennent compte explicitement. Nous avons une confiance profondément enracinée dans l'Ouest canadien et je pense une confiance bien méritée dans la justice avec laquelle nous traite le conseil. Nous apprécions énormément ce principe. Je comprends que c'est aussi votre cas. En fait, vous l'appréciez au point de penser que tout incitatif de livraison concernant une mise en marché spécifique devrait être exclu. Cela a été fait dans le passé...

M. Jake Hoeppner: N'est-ce pas le principe fondamental de la mise en commun?

Le président: Laissez-la répondre.

M. Jake Hoeppner: J'aimerais savoir si cela n'entre pas dans le principe fondamental de la mise en commun.

Mme Wiebe: Je pense que vous devez faire preuve d'un certain bon sens et de souplesse lorsque vous déterminez comment ces pools sont fixés et quels pools sont fixés. Nous voulons en fait des prix plus élevés pour certains grades plus élevés et nous les obtenons. Au fur et à mesure que les gradations sont devenues plus raffinées, nous avons obtenu plus d'écarts dans le système, ce qui d'après moi démontre une sorte de souplesse que nous apprécions tous, au fur et à mesure que les grades de protéines deviennent plus raffinés.

Il s'agit de marchés spécifiques de qualité et de quantité spécifiques pour des agents spécifiques. Je comprends que c'est cela un incitatif de livraison. Je ne peux pas parler de la théorie de la conspiration. Je ne m'embarque jamais dans la théorie de la conspiration, par conséquent je n'ai pas de raisons...

M. Jake Hoeppner: Je crois que cela met le doigt sur la question que le professeur a soulevée. Actuellement, il existe vraiment un système de double mise en marché qui se faufile par la porte arrière. J'ai eu un carnet de livraison pendant 35 ans avant de prendre ma retraite. Durant toutes ces années, on ne m'a jamais offert un incitatif pour livrer une céréale destinée à la Commission à un autre silo parce qu'on voulait soustraire des affaires. On m'a peut-être fait une offre légèrement meilleure pour l'extraction des impuretés ou parfois on a pu améliorer ma qualité en mélangeant un grade et le qualifiant quand même pour ce grade, mais donner en 1994, à un agriculteur qui avait un quota de 600 tonnes et qui a livré 6 000 tonnes, une prime de 54 dollars la tonne en dehors du système de mise en commun, en l'absence de fusarium, pour moi il s'agit d'un système de double mise en marché pour l'élite.

Le président: Professeur Fulton, aimeriez-vous faire un commentaire? Je vais donc passer à Mme Ur. Professeur Fulton?

Prof. Fulton: Sur ce dernier point, il existe un double système de mise en marché de l'orge et des céréales fourragères au Canada. Je ne pense pas que ce soit le cas pour le blé. Oui, des primes sont accordées. Elles prennent diverses formes. Le classement par grades en est une qui existe depuis longtemps et qui a été utilisée par les exploitants de silos au fil des ans afin d'attirer plus de grains. Les primes de camionnage sont largement utilisées dans les Prairies où les exploitants de silos exonèrent dans le fond les frais de transport ou paient l'ardoise.

Ces pratiques ne constituent pas une double mise en marché. Il s'agit d'activités exercées par les exploitants de silos qui essaient de récupérer une plus grande part du marché.

Le président: Très bien, madame Ur.

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Mme Rose-Marie Ur (Lambton - Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais remercier les témoins ce matin. Ils ont présenté d'excellents mémoires. Je vais aborder l'organisation en fonction des projections de Nettie et Noreen concernant la composition du conseil et le concept selon lequel ce que nous avons actuellement fonctionne bien et que nous ne devrions réparer que ce qui a besoin de l'être.

Je pense que vous avez toutes les deux mentionné dans votre témoignage que le comité consultatif faisait un bon travail. Je crois que Noreen a dit que oui, qu'il fait un bon travail, mais que le message ne passe peut-être pas. Les gens devraient vérifier auprès du conseil pour savoir ce qui se passe vraiment. Comme l'a dit le professeur, nous serions mieux servis par un conseil élu par les agriculteurs avec des agriculteurs élus au conseil. Le comité consultatif n'est-il pas également composé d'agriculteurs élus?

Prof. Fulton: Oui, c'est exact. La différence est qu'à l'heure actuelle ni les agriculteurs, ni le comité consultatif n'estiment qu'ils exercent un quelconque contrôle efficace sur le fonctionnement de la Commission canadienne du blé. Oui, c'est un organisme auquel les agriculteurs peuvent apporter leurs plaintes mais il n'a pas le pouvoir de les régler.

Mme Rose-Marie Ur: Aurait-on une plus grande responsabilité en laissant de côté le fait qu'il y avait une implication du gouvernement dans le conseil?

Prof. Fulton: Je n'affirme nullement qu'il ne devrait pas y avoir d'implication du gouvernement dans le conseil.

Mme Rose-Marie Ur: À quel poste, alors?

Prof. Fulton: J'estime que le gouvernement devrait détenir un certain nombre de postes au conseil. Je dirais qu'il devrait détenir environ 25 p. 100 des postes au conseil. Des représentants du gouvernement devraient siégeaient à la table du conseil. S'il fournit des garanties, il doit être là pour s'assurer que l'argent est bien utilisé. Évidement, en tant qu'intervenant principal, il a le droit de nommer ses représentants au conseil.

Par la même occasion, j'aimerais voir une forte représentation, une majorité d'agriculteurs au conseil. Ce serait un bon moyen pour que les préoccupations des agriculteurs et l'appui des agriculteurs à la base soient poussés dans la salle du conseil de la CCB et se manifestent dans les politiques adoptées par le conseil.

Mme Rose-Marie Ur: Vous ne le constatez pas déjà avec le comité consultatif?

Prof. Fulton: Pas à l'heure actuelle, non.

Mme Johns: J'aimerais faire un commentaire sur ce qui précède et peut-être aussi clarifier une certaine idée fausse. Je n'ai pas laissé entendre que l'actuel système du comité consultatif fonctionne efficacement. J'ai plutôt dit qu'on ne lui a pas alloué de budget pour lui permettre d'aller rencontrer les agriculteurs assez souvent et discuter avec eux. L'assemblée annuelle de la Commission du blé va se dérouler dans notre province, mais ce n'est pas quelque chose d'habituel, pas plus que le comité consultatif ne dispose d'un budget pour pouvoir le faire.

D'autre part, lorsqu'ils font des recommandations, je ne pense pas que nous ayons des garanties qu'ils soient écoutés à ce stade. Je crois, tout comme Nettie, que si nous prenons le temps de travailler avec le système et de le réparer, nous n'aurons peut- être pas besoin de nous éloigner du statut de société d'État. Les agriculteurs pourraient très bien se faire entendre à l'intérieur de cette structure sans mettre en danger les liens avec le gouvernement.

Mme Rose-Marie Ur: Je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point. Peut-être qu'il faudrait réparer plutôt que de tout chambouler.

Mme Johns: Oui. Je crois que les communications ont fait défaut et que nous n'avons pas eu l'impression qu'on écoutait ce qu'ils avaient à dire. Ce n'est pas de leur faute mais c'est la réalité.

Mme Wiebe: Permettez-moi de souligner deux choses ici. Tout d'abord, il s'agit d'un énorme appui financier. Il s'agit d'un filet au nord qui devait souvent attraper une balle. Financièrement, nous avons un bon receveur dans la Commission canadienne du blé, mais il s'agit d'un filet de6 milliards de dollars que le gouvernement et les contribuables canadiens étendent derrière l'organisme qui met en marché nos céréales. C'est un avantage fantastique pour nous. Je ne peux imaginer qu'un gouvernement, qu'il soit Réformiste ou autre, soit aussi irresponsable avec l'argent des contribuables au point de nous dire d'aller de l'avant, de prendre cet appui, et de tourner le dos et de s'en laver les mains, en disant c'est votre affaire. Ce n'est pas la façon habituelle dont l'argent des contribuables est attribué ou dépensé.

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Nous, les agriculteurs, sommes pleinement conscients qu'il existe un problème avec les garanties accordées par le gouvernement pour le revenu des agriculteurs. Les gouvernements sont disposés à s'en départir. Ils sont impatients de se débarrasser de l'appui accordé au revenu des agriculteurs. Il s'agit d'une initiative coûteuse lorsqu'il y a un fléchissement du marché et ils sont impatients de s'en libérer et de s'en éloigner. Les contribuables ont jusqu'à présent aidé et soutenu ce principe et ils ont également dit de les laisser se débrouiller eux-mêmes.

Nous avons remarqué cela au niveau de la programmation systématique des fermes dans l'Ouest canadien. Je ne peux pas croire que si nous adoptions ce scénario à la Commission canadienne du blé, un gouvernement futur voudrait sauter dans l'arène et appuyer cette initiative alors que la décision initiale n'aura pas été la sienne. C'est la première chose.

La deuxième chose est que nous recommandons que le comité consultatif de la Commission canadienne du blé ait le pouvoir d'approuver toutes les nominations de commissaires. Il s'agit d'un pouvoir important qui soulagerait le problème que Noreen a mentionné, à savoir qu'il y a des commissaires nommés par le gouvernement qui ont d'énormes responsabilités au sein de cet organisme de mise en marché et des agriculteurs qui n'ont pas un mot à dire. Les agriculteurs auraient leur mot à dire à ce sujet.

Nous pensons que nous avons équilibré la situation en mettant l'accent sur le beignet et non sur le trou. Le beignet représente le partenariat financier avec le gouvernement canadien et donc avec le contribuable canadien.

Le président: Je tiens à avertir tout le monde qu'il nous reste au maximum cinq minutes avant de passer à l'autre groupe de témoins.

Monsieur Fulton, désirez-vous faire un commentaire?

Prof. Fulton: Oui, brièvement. Tout d'abord, je suis d'accord avec Nettie. La garantie fournie par le gouvernement à la Commission du blé est énorme et importante. Elle a tout à fait raison: le gouvernement n'a pas eu à offrir cette garantie très souvent. Il y a eu quelques occasions.

Un des points sur lesquels j'aimerais insister c'est que si le gouvernement n'a pas eu à intervenir très souvent au cours des 60 dernières années c'est parce que la Commission canadienne du blé a le pouvoir d'un point de vente unique. Si ce pouvoir est menacé de quelque façon que ce soit - et je me rapporte aux échanges au comptant et à la double mise en marché - alors le risque de cette garantie de prêt montera en flèche de façon exponentielle. Il pourrait devenir très grand car, dans une situation de double mise en marché, le pool obtiendra les prix durant les périodes creuses, et c'est exactement ce que vous ne voulez pas avoir si les prix initiaux sont garantis. Vous voulez obtenir les céréales lorsque le prix est bas, et non pas être obligé de le vendre lorsque le prix est bas.

Il existe un lien étroit entre certains autres aspects de ce projet de loi - le commerce au comptant et ainsi de suite - et cette garantie. Je voulais simplement le mentionner.

J'aimerais revenir sur ma remarque concernant le fait qu'il y a un choix clair ici. Si on décide de ne pas faire toute une série de changements qui rendraient la Commission canadienne du blé beaucoup plus démocratique, selon les grandes lignes de mon mémoire, et si on décide de conserver la Commission canadienne du blé comme société d'État, j'estime alors qu'il est impératif d'effectuer les changements proposés par le SNC. Le comité consultatif devra être renforcé au maximum. Je répète que nous avons ce choix.

Le président: Je vais passer à M. McKinnon qui a une question à poser. Vous disposez chacun d'environ 30 secondes pour y répondre, si vous le désirez.

M. Glen McKinnon (Brandon - Souris, Lib.): J'en ai des pages.

Le président: Désolé, vous n'avez que 60 secondes. Notre journée est bien remplie.

M. Glen McKinnon: Oui, je pourrai revenir à certaines questions plus tard.

Tout d'abord, je pars du principe que nous allons continuer avec la CCB et que des changements de structure y seront apportés. Je sais que Nettie et peut-être aussi Noreen ont déclaré que le statu quo est meilleur que ce que vous avez proposé. J'aimerais entendre vos commentaires concernant l'influence de tierces parties en ce qui a trait à l'élection d'un conseil d'administration composé d'agriculteurs.

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Deuxièmement, quel chiffre devrions-nous mettre dans le projet de loi pour ce qui est de l'effectif du conseil? Je vous fais remarquer que l'on parle d'un nombre non limité... vous avez parlé de 25 p. 100, mais 25 p. 100 de combien?

Je vais m'arrêter ici, monsieur le président.

Le président: Noreen, rapidement s'il vous plaît.

Mme Johns: En ce qui a trait à l'influence de tierces parties, l'argent parle de lui-même. Certaines organisations ont beaucoup d'appui. Le reste d'entre nous n'en avons aucun. Je me demande vraiment qui va me représenter. En outre, même s'ils n'ont pas une grande majorité dans la Commission, le simple fait qu'il y ait de graves divisions à l'intérieur de la Commission du blé la rendrait ingérable, je crois.

En ce qui a trait à la représentation, je siège sur plusieurs conseils et un trop grand nombre d'administrateurs alourdit la structure. Il faut s'assurer qu'il y a une représentation... et avoir des antennes à la campagne dans un souci d'équilibre. Pour une bonne représentation, nous devons envisager entre 12 et 15 personnes.

Le président: Merci.

Murray.

Prof. Fulton: En ce qui a trait aux nombres, cela entre dans ma fourchette. En ce qui a trait à l'influence de tierces parties, oui, c'est toujours un problème. Telle est la nature de notre société démocratique. Nous avons eu à traiter du même problème dans le domaine des soins de santé ainsi que dans beaucoup d'autres domaines. C'est tout ce que j'ai à dire. C'est un problème. Cela fait partie de notre système. Cela fait partie de ce que nous sommes.

Le président: Nettie, rapidement s'il vous plaît.

Mme Wiebe: Je sauterai la deuxième question. Je ne suis pas intéressée par la taille du conseil. Nous ne sommes pas intéressés par cette structure.

Concernant la première question sur l'influence de tierces parties, j'aimerais dire quelque chose qui est important afin de comprendre le point de vue des agriculteurs. L'une de nos préoccupations c'est que nous nous dirigeons vers une politisation d'un organisme de mise en marché. Ce sont de très mauvaises nouvelles.

Il y a des gens qui me parlent de responsabilité. Lorsque vous leur demandez s'ils sont prêts à assister à de nombreuses réunions afin de comprendre un système complexe de mise en marché et en fait d'essayer de savoir qui les représentera le mieux et s'ils sont prêts à se déplacer pour écouter des discours politiques de candidats qui désirent les représenter au conseil, etc., tout le monde quitte la salle. Ils ne veulent rien savoir.

Grâce à notre organisation, nous pouvons nous lancer dans une propagande électorale politique et voter et ainsi de suite. Bon nombre d'agriculteurs ne pensent pas que cette politisation du conseil serait un bon pas en avant. Ils croient que ce serait de l'ingérence dans une mise en marché ordonnée et efficace des céréales.

Le président: Merci beaucoup aux trois témoins pour leur collaboration et leur contribution à cette discussion sur le projet de loi C-72.

La séance est levée.

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