[Enregistrement électronique]
Le jeudi 18 avril 1996
[Traduction]
La présidente: La séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration est ouverte. Conformément aux articles 110 et 111 du Règlement, nous examinons aujourd'hui une nomination par décret du conseil.
Nous accueillons Janice Cochrane, sous-ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je vous souhaite la bienvenue, madame Cochrane.
Avant de commencer, je tiens à signaler aux membres du comité que nous devons pour cet examen respecter certaines règles quant au genre de questions à poser. Je vais cependant être très souple. Je tenais à le signaler.
D'après une décision rendue par le président John Fraser le 11 décembre 1986, un comité ne peut examiner que les aptitudes et compétences à exercer les fonctions du poste et c'est ce que nous allons faire aujourd'hui. Nous ne pouvons pas dépasser ces paramètres et je voudrais que les membres du comité en tiennent compte en posant des questions au témoin.
Merci beaucoup. Je commencerai par M. Nunez vu qu'il doit se rendre à la Chambre des communes.
[Français]
Monsieur Nunez, voulez-vous commencer, s'il vous plaît?
M. Nunez (Bourassa): Merci, madame Cochrane, d'être ici cet après-midi. J'ai lu avec beaucoup d'attention votre curriculum vitae. Il est très intéressant. Vous êtes originaire du Nouveau-Brunswick, province voisine du Québec. Vous avez un baccalauréat ès arts et une licence en droit, comme moi, et vous êtes conseiller de la Reine depuis 1987. Vous travaillez au sein de la Fonction publique depuis 1975, soit 21 ans, et vous avez occupé des postes aux ministères de la Justice, des Affaires indiennes et du Nord canadien et de l'Environnement. Cependant, je ne vois dans cela aucune fonction reliée à l'immigration ou aux réfugiés. Vous avez probablement eu des expériences dans ce domaine qui n'apparaissent pas dans votre C.V.
J'aimerais connaître votre implication en matière de réfugiés et d'immigration et savoir pourquoi vous avez été appelée à ce poste si prestigieux de sous-ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.
[Traduction]
Mme Janice Cochrane (sous-ministre, Citoyenneté et Immigration, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration); Merci. Tout d'abord, madame la présidente,
[Français]
j'aimerais dire que le député a raison. Je n'ai pas d'expérience dans le domaine de l'immigration ou dans celui des réfugiés.
[Traduction]
Néanmoins, vous pouvez voir d'après mon curriculum vitae que, depuis 20 ans, j'ai eu beaucoup d'expérience dans la gestion de services ministériels importants et complexes, dans des ministères qui ont un mandat de politique sociale et qui ont donc des choses en commun. Je songe tout particulièrement au ministère des Affaires indiennes et du Nord, qui s'occupe depuis longtemps de délicates questions d'ordre moral et de problèmes juridiques complexes qui ne sont pas faciles à décrire, mais qui ont évolué à cause de la pratique et du droit.
À mon avis, mon expérience au ministère des Affaires indiennes et du Nord, de même que mon expérience
[Français]
comme avocat au ministère de la Justice et mon expérience au ministère de l'Environnement, où j'ai travaillé sur des questions globales,
[Traduction]
m'ont bien préparée à occuper mon poste de sous-ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.
Quant aux raisons pour lesquelles le premier ministre m'a choisie, je pense que c'est à lui que vous devriez poser la question.
[Français]
M. Nunez: Il a le pouvoir de choisir une sous-ministre femme. J'accepte cela, et c'est très bon.
Les services de renvoi et d'exécution de la loi, où il y a énormément de problèmes, relèvent de vous. Vous connaissez le rapport Tassé et ses allégations sur ce que l'enquêteur appelle les «honoraires de facilitation», facilitation fees - ce que moi j'appelle des «pots-de-vin» - , versés par vos fonctionnaires à des autorités étrangères pour qu'elles acceptent leurs propres ressortissants. La semaine dernière, alors que j'étais à Montréal, on m'a parlé d'un cas où 200$ US auraient été versés à une autorité étrangère pour qu'elle accepte un de ses propres ressortissants.
Il y a beaucoup d'allégations voulant que les agents de renvoi administrent des médicaments, des calmants, des drogues à des gens qui font du trouble lors de leur départ du Canada. J'ai visité le centre de détention de Mississauga et celui de Montréal. En effet, il y a beaucoup de problèmes. Des mineurs demeurent sans raison dans ces centres pendant plusieurs mois, et il n'y a pas de critères pour les retenir ou les libérer.
Qu'entendez-vous faire en tant que sous-ministre de ce ministère?
[Traduction]
Mme Cochrane: Je dois dire tout d'abord que nous considérons les recommandations deM. Tsaï comme une occasion pour nous de continuer à apporter les changements nécessaires pour garantir que les agents d'exécution de la loi et d'expulsion de tout le pays respectent les normes les plus rigoureuses possibles. Nous avons commencé à appliquer ces normes de concert avec nos employés, soit dit en pensant, parce qu'il importe
[Français]
pour s'assurer que les gens qui ont dérogé à la loi soient on side et qu'ils comprennent leurs obligations.
[Traduction]
Nous avons donc élaboré un plan d'action nationale, de concert avec les gestionnaires dans le domaine de l'exécution de la loi d'un bout à l'autre du pays. Les agents d'exécution tiendront des ateliers nationaux pour examiner les recommandations. Si l'on constate qu'il faudrait apporter des changements aux procédures et aux manuels d'exploitation, nous le ferons.
J'ajoute que tout cela tient vraiment à un changement culturel fondamental pour le ministère. De tels changements ne peuvent pas se produire du jour au lendemain. Le ministère a certaines traditions ou certaines habitudes pour faire fonctionner ses services et, sans vouloir commenter ses traditions, je vous dirai simplement que je compte m'engager personnellement à garantir que nous énoncerons les normes les plus rigoureuses possibles et qu'elles seront bien comprises par notre personnel.
M. Nunez: Mais qu'avez-vous l'intention de faire au sujet des frais de facilitation? Ces frais sont remboursés par votre ministère.
La présidente: Avant que vous répondiez, madame Cochrane, je rappelle que j'ai signalé dès le départ que les questions devaient porter uniquement sur les aptitudes, la compétence et l'exécution des fonctions.
M. Nunez: C'est ce que nous...
La présidente: Si vous voulez bien me laisser terminer, monsieur Nunez.
[Français]
On aura l'occasion de passer en revue certaines pratiques du ministère lorsque Mme la sous-ministre viendra témoigner au comité lors de l'étude des prévisions budgétaires et du fonctionnement du ministère.
Aujourd'hui, nous sommes ici pour examiner les qualifications de Mme la sous-ministre. C'est la raison de cette séance, et n'oubliez pas que c'est à votre demande.
M. Nunez: C'est bien cela.
La présidente: Vous l'avez demandé.
M. Nunez: Mais c'est justement une façon d'évaluer les qualifications et la compétence d'une personne et de savoir si elle connaît exactement les fonctions qui sont les siennes. Je ne vois pas beaucoup d'antécédents ici; je ne vois que des titres. Quel genre de questions peut-on poser? En tout cas, je vais en poser une autre.
En ce qui a trait à la CISR, qui est un tribunal quasi judiciaire, désirez-vous et pouvez-vous faire quelque chose en ce qui a trait aux arrérages de dossiers? À Montréal, il faut attendre presque un an pour avoir une audition, et la moitié des réfugiés arrivent au Québec. Bien qu'il y ait beaucoup plus de cas à Montréal qu'à Toronto, on compte moins de commissaires à Montréal.
Vous savez aussi que c'est un fardeau financier considérable pour le gouvernement du Québec parce que si la Commission de l'immigration et du statut de réfugié prend un, deux ou trois ans pour trancher une question, c'est le gouvernement du Québec qui doit verser du bien-être social. Bien qu'il s'agisse d'un tribunal quasi judiciaire, que pouvez-vous faire dans les domaines qui sont de votre compétence?
[Traduction]
Mme Cochrane: Merci, madame la présidente.
Comme l'a dit le député, le Conseil d'immigration et du statut des réfugiés est un organisme quasi-judiciaire, ce qui veut dire que la possibilité pour nous d'influer sur ces façons de procéder est quelque peu restreinte. Nous avons cependant établi de bons rapports de travail avec la ministre, ce qui nous permet de lui fournir les conseils nécessaires pour garantir que le système fonctionne bien.
La semaine dernière encore, les hauts fonctionnaires du ministère ont rencontré diverses personnes, y compris la présidente du Conseil d'immigration et du statut des réfugiés. On y a justement discuté de la question des arriérés et je peux vous garantir que la présidente du conseil a élaboré un plan pour s'attaquer au problème. C'est à elle de le faire. Elle compte retenir au besoin les services de membres à temps partiel pour s'assurer qu'on pourra régler tous les cas en retard et elle doit d'ailleurs rendre compte à la ministre de la façon dont les cas sont examinés de façon opportune sans causer d'engorgement.
[Français]
M. Nunez: Le centre de traitement de Vegreville laisse beaucoup à désirer en ce qui a trait aux retards considérables dans le traitement des demandes de visa, d'extension de visa, de permis de travail, etc. On ne sait jamais quand un dossier sera renvoyé dans la région et quels sont les motifs de ces retards.
Il y a beaucoup de plaintes de la part des avocats, des intervenants et des demandeurs. Certaines personnes disent qu'il est plus facile et plus rapide d'aller à Buffalo, aux États-Unis, pour demander un visa qu'on obtient parfois le même jour, que d'envoyer le dossier à Vegreville, où il faut parfois deux ans pour obtenir un certificat de résidence permanente.
Malgré les efforts qui ont été faits dans ce sens, qu'allez-vous faire pour régler ce problème très grave?
La présidente: Monsieur Nunez, ses réponses seront évidemment basées sur son expérience dans d'autres fonctions. Je reviens à ma première intervention. Il faut que les questions aient trait à ses qualifications. En tout cas, on va laisser passer cette question. Allez-y, madame Cochrane.
[Traduction]
Mme Cochrane: Les centres de traitement de Vegreville et de Mississauga sont relativement nouveaux. Comme vous le savez, il y a trois centres de traitement, dont un à Sydney, en Nouvelle-Écosse, qui examine aussi les demandes de citoyenneté. Le centre de Vegreville a été ouvert en avril 1994 et nous reconnaissons qu'il a connu certains problèmes au départ. Certains de ces problèmes avaient trait à l'application des systèmes et à la rapidité avec laquelle on a pu mettre au point les systèmes et leurs applications et former ceux qui devaient s'en occuper.
Nous avons établi des normes de service nationales et nos trois centres de traitement de cas les respectent tous maintenant. La norme de service pour les trousses d'immigration à Vegreville est de 90 jours. En moyenne, nous traitons les demandes dans les 59 jours suivant leur présentation, ce qui comprend dix jours pour la poste. Les trousses de visiteur sont traitées en 18 jours et la norme de service pour les permis de visiteur est de 25 jours.
Même s'il y a encore des améliorations qu'on pourrait apporter à certains secteurs du système, nous considérons que nous respectons fort bien les normes nationales qui ont été fixées.
Comme vous le savez, madame la présidente, ces centres doivent traiter les demandes ordinaires qui sont très nombreuses pour permettre au personnel de nos bureaux locaux de s'occuper des cas les plus complexes. Bien sûr, quand un cas est plus complexe, si une demande est incomplète et si l'on a besoin de renseignements supplémentaires, par exemple, il faut plus de temps pour s'en occuper.
C'est peut-être dans des cas de ce genre qu'on accuse les retards mentionnés par le député. Nous sommes convaincus que nos centres de traitement respectent et dépassent même, dans le cas du bureau de Sydney, les normes de service que nous avons nous-mêmes fixées.
[Français]
La présidente: Vous pouvez poser une autre question, monsieur Nunez.
M. Nunez: Je vais faire plaisir à la présidente.
La présidente: C'est le processus, monsieur Nunez.
M. Nunez: Madame Cochrane, vous êtes dans la Fonction publique fédérale depuis 21 ans, si je ne me trompe pas, depuis 1975.
[Traduction]
M. Bélanger (Ottawa - Vanier): [Inaudible - La rédaction]... pour survivre si longtemps.
[Français]
M. Nunez: Vos supérieurs ont-ils fait des évaluations de votre rendement? Avez-vous toujours détenu des postes de confiance? Le décret de votre nomination stipule que vous avez été nommé au poste de sous-ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration à titre amovible. Pourquoi a-t-on ajouté cela au décret portant sur votre nomination? Normalement, tous les sous-ministres sont nommés à titre amovible. Donc, mes deux questions portent sur l'évaluation et sur la mobilité.
Mme Cochrane: Je crois que c'est la pratique en ce qui a trait aux personnes nommées par décret.
[Traduction]
Pour ce qui est de mes évaluations de rendement,
[Français]
je suis très fière de dire que mes évaluations de rendement étaient dans la catégorie supérieure.
M. Nunez: Y a-t-il eu des évaluations écrites?
Mme Cochrane: Oui, mais parfois mes patrons ont oublié
[Traduction]
remettre leurs évaluations de rendement, mais depuis ma nomination à un poste de haut fonctionnaire il y a dix ans, j'ai toujours été cotée au niveau supérieur.
[Français]
La présidente: Votre temps est déjà écoulé.
[Traduction]
Monsieur Hanrahan.
M. Hanrahan (Edmonton - Stratchcona): Merci.
Madame la présidente, je dois moi aussi être à la Chambre aujourd'hui et je dois donc partir bientôt.
Je tiens simplement à féliciter Mme Cochrane de sa nomination et de sa longue expérience au gouvernement et à lui souhaiter tout le succès possible à l'avenir.
Merci.
La présidente: Merci.
Monsieur Cullen.
M. Cullen (Etobicoke-Nord): Merci, madame la présidente.
Madame Cochrane, je suis ravi de faire votre connaissance. J'ai lu votre curriculum vitae et je suis très impressionné par vos antécédents, votre expérience et tout ce que vous avez fait au sein du gouvernement.
Si je ne m'abuse, le travail d'un sous-ministre est un travail de gestion. Je voudrais donc savoir quelles sont d'après vous les priorités du ministère sur lesquelles vous comptez vous pencher à titre de sous-ministre?
Mme Cochrane: Merci, madame la présidente.
Comme le député et les autres membres du comité le savent, la ministre témoignera devant le comité d'ici peu pour parler des perspectives et du plan d'entreprise du ministère, de même que de nos priorités relatives à la politique.
Pour l'instant, nos priorités en matière de politique sont telles qu'elles sont écrites dans le plan d'entreprise de l'année dernière qui a déjà été rendu public. Pour ma part...
[Français]
M. Nunez: Je tiens à vous féliciter pour votre nomination.
Mme Cochrane: Merci.
[Traduction]
Je me suis moi-même fixée certaines priorités de gestion. Comme le sait peut-être le député, madame la présidente, le ministère a été réorganisé récemment. La nouvelle structure organisationnelle a été annoncée deux semaines avant mon arrivée en novembre dernier. Le nouveau ministère est quelque peu inédit au gouvernement fédéral.
C'est une organisation très linéaire. À part mon propre poste, il y a deux postes de sous-ministre adjoint, qui n'ont aucune responsabilité hiérarchique directe, et 15 directeurs généraux, dont je suis le supérieur hiérarchique. Il s'agit d'une mise à l'essai d'un système de gestion horizontale.
Selon nous, notre ministère possède une organisation souple et des lignes de responsabilité bien claires et nous faisons le nécessaire pour qu'il fonctionne bien. Cela nous oblige à collaborer davantage et à avoir une gestion plus horizontale que hiérarchique.
Tout cela pour vous dire qu'un ministère qui connaît de tels changements en même temps que certaines compressions budgétaires par suite de l'examen des programmes a besoin d'un certain temps pour se stabiliser.
Je compte bien faire ma part pour consolider le nouvel organisme. J'essaierai aussi de stabiliser le ministère et de rétablir le moral des troupes pour que nous ne perdions pas de productivité juste au moment où cela commence à bien fonctionner.
La deuxième partie de mes priorités, et j'en ai parlé tantôt, consiste à profiter des occasions fournies par le rapport Tassé pour concentrer l'attention du ministère, et je parle maintenant de l'ensemble du ministère et non pas seulement des agents d'exécution de la loi, sur l'instauration des normes morales les plus rigoureuses possible puisque c'est ce que mérite le public canadien.
Nous avons un code de conduite et la majorité de nos employés connaissent bien son contenu et respectent ses principes.
Selon moi, tous les employés, y compris les hauts fonctionnaires du ministère, ont intérêt à revoir le contenu de ce code de conduite de temps à autre pour s'assurer qu'il relève les défis qui se posent à nos employés à notre époque. Nous devons aussi nous assurer que nos employés savent que l'on s'attend à ce que tout le monde au ministère respecte ce code de conduite, d'abord en donnant l'exemple et en leur fournissant les directives appropriées.
Du point de vue de la gestion, ce sont les deux priorités sur lesquelles je voudrais me concentrer au cours des années à venir.
M. Cullen: Merci.
La présidente: Monsieur Wappel.
M. Wappel (Scarborough-Ouest): Merci, madame la présidente. Je ne veux pas prolonger la séance, mais je tenais à dire bonjour à Mme Cochrane et à lui signaler que je suis ravi que ce soit une avocate qui occupe ce poste.
Je vois que Mme Cochrane a une longue expérience du droit et du fonctionnement interne de l'administration et je trouve que c'est tout à fait essentiel. Je dois dire aussi, Mme Cochrane, que, selon moi, s'il y a une bureaucratie plus labyrinthienne que celle du ministère de l'Immigration, c'est celle du ministère des Affaires indiennes et du Nord.
Je pense donc que vous avez d'excellents antécédents et que le ministère a besoin de quelqu'un qui possède vos compétences. Je vous souhaite bien du succès et je pense que nous pourrons bien collaborer pendant que je serai membre de ce comité-ci.
Vous avez dit que vous reviendriez en même temps que la ministre. À titre de sous-ministre, vous occupez-vous dans une mesure quelconque de l'élaboration de la politique ou ne faites-vous que l'appliquer?
Mme Cochrane: Dans mes rapports de travail avec la ministre?
M. Wappel: Oui.
Mme Cochrane: Madame la présidente, nous avons deux rôles à jouer. Ces deux rôles consistent à conseiller le ministre. La ministre s'attend que nous lui fournissions les meilleurs conseils de politique que le ministère peut offrir, après quoi elle prend une décision. Une fois sa décision prise, le rôle du ministère consiste à respecter ses désirs le mieux possible.
Nous collaborons donc de très près avec la ministre et son personnel. Comme moi-même, la ministre est nouvelle à son poste et elle compte beaucoup sur les conseils des fonctionnaires depuis longtemps au ministère pour examiner certaines de ces questions de politique hautement complexes.
M. Wappel: J'imagine que cela veut dire que vous discutez effectivement de politique avec la ministre et que vous exprimez vos opinions là-dessus. Bien entendu, c'est la ministre qui prend la décision finale.
Mme Cochrane: C'est exact.
M. Wappel: Vous dites que vous allez revenir avec la ministre quand elle comparaîtra devant le comité?
La présidente: Nous inviterons Mme Cochrane à revenir quand nous examinerons les perspectives et le budget des dépenses du ministère. Je ne peux pas dire pour l'instant quand ce sera. Cela dépendra des autres travaux du comité.
M. Wappel: Très bien.
À ce moment-là, je voudrais savoir si vous répondrez aux questions que j'aurai à vous poser au sujet des conseils que vous fournissez à la ministre et de l'orientation que devrait prendre le ministère lorsqu'on modifiera la Loi sur les droits de la personne pour interdire l'orientation sexuelle comme motif de discrimination et comment cela touchera...
La présidente: Comment cela peut-il...?
M. Wappel: Je demande simplement que Mme Cochrane soit prête à répondre aux questions là-dessus à la prochaine réunion.
La présidente: Quel rapport cela a-t-il avec la réunion d'aujourd'hui?
M. Wappel: Je ne posais pas de question. Je voulais simplement signaler que ce sont des questions qui...
La présidente: Vous posez une question, monsieur Wappel...
M. Wappel: Non, je n'en pose pas.
La présidente: ...en ne posant pas une question, mais je ne m'étendrai pas davantage là-dessus.
M. Wappel: Je vous demande simplement d'être prête à répondre à ces questions à ce moment-là. Vous allez sans doute conseiller la ministre là-dessus. Merci.
La présidente: Merci, monsieur Wappel.
Monsieur Dhaliwal.
M. Dhaliwal (Vancouver-Sud): Merci beaucoup, madame la présidente. Je vous souhaite la bienvenue, madame Cochrane. Vous avez tout un défi à relever.
J'ai bien des questions à poser, mais je ne le ferai pas aujourd'hui parce que nous voulons être certains que vous resterez encore longtemps à votre poste pour assurer une certaine permanence au ministère.
Mon collègue à ma gauche, M. Bélanger, a eu une excellente idée. Il a eu la brillante idée que l'on pourrait peut-être déménager le bureau de Vegreville à Vancouver et je suis tout à fait d'accord là-dessus. Nous pourrions peut-être en faire l'un de nos premiers sujets d'examen.
Comme je me suis longtemps occupé d'immigration, je voudrais dire qu'il y a bien des choses à améliorer dans ce domaine, surtout à notre époque de compressions budgétaires. Je voudrais simplement vous signaler certaines de mes préoccupations, sans vous demander de réponses...
La présidente: Pas encore une autre question qui n'en est pas une.
M. Dhaliwal: J'étais à Delhi récemment et l'agent d'immigration m'a dit que 80 p. 100 des adoptions sont rejetées par le bureau de Delhi. Je me demande pourquoi tant de cas d'adoption sont parvenus à mon bureau. Le taux de refus est de 80 p. 100. Cela me préoccupe. À mon avis, vous-même et la ministre devriez vous inquiéter de voir que le gouvernement et les particuliers dépensent énormément d'argent pour franchir toutes les étapes du processus, et que cela finit par aboutir à un refus. Selon moi, il faudrait vraiment examiner toute cette question.
Une autre chose dont je veux vous parler à trait à l'époque où je m'occupais beaucoup des questions d'immigration. Cela m'étonnait qu'on renvoie tellement de cas apparemment très simples en appel. Je disais aux agents de l'immigration que cela n'avait aucun sens. Une femme s'était mariée, elle était devenue enceinte et les agents d'immigration disaient que ce n'était pas un mariage de bonne foi. À la fin du compte, le comité d'appel approuvait la demande sur présentation des preuves, mais quand nous le signalions aux gens de l'immigration, ils nous répondaient: «Il faut aller en appel; nous ne comprenons pas pourquoi. Nous savons que vous avez raison. C'est logique». Je leur disais: «Pourquoi gaspiller toutes ces ressources quand nous savons que l'appel sera accepté et que nous faisons tout cela simplement pour la forme?»
On gaspille beaucoup de ressources. Tout le monde le sait et sait aussi que nous pourrions à notre époque de compressions budgétaires, mieux utiliser les ressources à notre disposition dans le secteur de l'immigration.
Je ne veux pas que vous répondiez tout de suite parce que je sais que vous avez encore beaucoup à apprendre cette année à propos du ministère. Je peux cependant vous garantir que nous voulons collaborer avec vous pour trouver des solutions. J'espère que vous serez prête à faire la même chose pour améliorer la situation parce que je suis certain que nous pourrons faire beaucoup ensemble pour apporter des améliorations.
Il y a quelque temps à Vancouver, j'ai été étonné de lire dans les journaux que l'un de nos propres agents d'immigration contestait l'intégrité du Conseil du statut de réfugié. L'agent en question avait dit aux journaux qu'il avait dû y avoir une intervention politique quelconque relativement à une décision du comité d'appel, qui est un organisme quasi-judiciaire. Cela m'a étonné de voir que nos propres agents d'immigration contestent les décisions du conseil.
Vous avez donc un défi difficile à relever. Quelqu'un m'a déjà dit que le rôle des agents de l'immigration consiste à empêcher les gens de venir au Canada et non le contraire, et qu'on n'avait pas du tout compris. Les agents d'immigration ne devraient pas aider à faire venir des gens au Canada et devraient plutôt créer toutes sortes d'obstacles pour les en empêcher. Ce devrait être leur rôle fondamental et ils font bien leur travail s'ils créent de tels obstacles.
Je pense donc que c'est un genre d'attitude que nous devrions faire disparaître.
J'ai bien hâte de travailler avec vous. Bonne chance et merci beaucoup d'être venue nous rencontrer si peu de temps après votre nomination.
[Français]
La présidente: Monsieur Bélanger.
M. Bélanger: Moi aussi, je tiens à vous féliciter, madame.
[Traduction]
Qu'attendez-vous de notre comité sur le plan des conseils, de l'aide ou des recommandations? Comment, selon vous, pouvons-nous vous aider dans votre travail?
Mme Cochrane: Selon moi, comme bon nombre d'entre vous l'ont signalé, il existe toutes sortes de questions de politique délicates et complexes au ministère de l'Immigration. Il est impossible à des fonctionnaires de résoudre tous les problèmes en même temps.
Il est donc très utile que les députés examinent la situation vu qu'ils peuvent aussi consulter les ONG et les gens de l'extérieur, y compris nos propres clients, pour nous fournir des conseils objectifs.
Le ministère lui-même n'est pas toujours objectif. L'administration a tendance à s'encroûter. Votre comité peut justement fournir au ministère et à moi-même des conseils qui nous feront voir les choses d'une façon nouvelle.
Comme les députés étudient ces questions depuis déjà quelque temps, ils s'y connaissent pour la plupart tout aussi bien dans ce domaine que les fonctionnaires du ministère. Il est très utile pour la ministre d'avoir des points de vue différents.
M. Bélanger: Merci. Vous en aurez.
La présidente: Je peux vous le garantir.
Monsieur Knutson, vous aurez le dernier mot, je pense, à moins que Mme Minna veuille la parole.
M. Knutson (Elgin - Norfolk): Merci beaucoup, madame la présidente et toutes mes félicitations à Mme Cochrane. Je remplace quelqu'un aujourd'hui, même si j'ai déjà fait partie du comité.
La présidente: Vous êtes en effet un ancien membre du comité.
M. Knutson: Je m'excuse, un ancien membre.
La présidente: Un membre qui formulait de bonnes recommandations.
M. Knutson: Voici ma question.
Depuis quelques mois, les médias signalent que les décisions relatives à l'expulsion de criminels dangereux risquent de causer des problèmes. Apparemment, nous expulsons des gens parce que nous jugeons qu'ils sont des indésirables.
Vous ne voudriez peut-être pas qu'ils deviennent vos voisins s'ils ont un casier judiciaire, mais ils ne posent peut-être pas vraiment de danger. Ils ont peut-être commis une infraction relativement mineure, compte tenu, par exemple, du temps qu'ils ont passé en prison.
Je voudrais savoir ce que vous considérez comme le critère qu'on devrait appliquer, abstraction faite de ce que dit la loi à ce sujet, pour déterminer quand une personne doit être expulsée.
Mme Cochrane: J'aurais vraiment du mal à donner mon avis sur un tel critère après avoir passé si peu de temps au ministère. Je ne me suis pas vraiment penchée sur cette question de façon détaillée.
Nous savons qu'il importe d'envisager cette question du point de vue de la gestion des risques. Il faudrait d'abord déporter les criminels dangereux. C'est généralement la façon dont nous abordons notre travail avec les forces de l'ordre.
Peut-être que M. Tsaï pourra donner des détails. Il a peut-être travaillé à l'élaboration de la stratégie pour le groupe d'étude conjoint qui se penche sur la question de concert avec la GRC depuis 1994.
La présidente: Je vais vous permettre de répondre même si cela n'a rien à voir avec... Ce sera la dernière question.
M. Georges Tsaï (sous-ministre adjoint, Partenariats, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci, madame la présidente. La question de savoir comment déterminer si quelqu'un représente un danger pour le public canadien est, bien sûr, très délicate. Si je ne m'abuse, les critères applicables, aux termes de la Loi sur l'immigration, ne sont pas les mêmes que les critères utilisés en vertu du Code criminel. La définition de qui constitue un danger pour le public n'est pas la même.
Il s'agit toujours de maintenir un équilibre très délicat entre le côté facilitation du programme d'immigration, qui a pour rôle de laisser les gens venir au Canada, et le contrôle qui vise à protéger l'intégrité du système et du processus.
La loi contient maintenant des dispositions relativement nouvelles qui portent sur cette notion de criminel dangereux pour le public et selon lesquelles les personnes visées ne peuvent pas interjeter appel auprès de la SAI. Ces dispositions sont encore assez nouvelles, mais c'est une personne désignée par la ministre qui prend la décision. Nous procédons très prudemment et nous devons aussi surveiller les précédents qu'on est en train de créer.
Il y a eu quelques cas portés devant les tribunaux. Je suis au courant d'au moins un cas qui a été porté devant la Cour fédérale, qui a maintenu la décision qui avait été prise sur la question de savoir si quelqu'un constituait un danger pour le public ou non.
La présidente: Mme Minna.
Mme Minna (Beaches - Woodbine): Madame Cochrane, je voulais simplement vous remercier au nom de mes collègues d'avoir pris le temps de nous rencontrer cet après-midi. Je compte bien vous revoir et travailler avec vous plus tard.
Je sais que bon nombre des questions que nous avons essayé de glisser alors que la présidente s'efforçait rigoureusement, et avec raison, de respecter les règles, sont des questions sur lesquelles nous allons revenir plus tard parce que nous devons les examiner. J'espère que nous pourrons le faire au cours des mois à venir. Merci d'être venue.
La présidente: Comme j'avais donné une certaine marge de manoeuvre à l'opposition, j'ai voulu faire la même chose pour les ministériels.
Au nom de tous les membres du comité, madame Cochrane, je tiens à vous remercier d'être venue témoigner devant le comité. Nous vous reverrons certainement. Merci.
Le comité s'ajourne à mardi prochain à 15 h 30. Nous examinerons à ce moment-là quatre nominations par décrets du conseil du CISR. Merci.