[Enregistrement électronique]
Le mercredi 9 avril 1997
[Français]
Le président (M. Jim Peterson (Willowdale), Lib.)): Nous commençons maintenant les discussions,
[Traduction]
mais il nous manque deux personnes pour pouvoir voter.
Quoi qu'il en soit, nous avons ici Len Farber et Brian Ernewein du ministère des Finances. Je vous remercie d'être venus. Pourriez-vous nous donner un bref aperçu du sujet avant que nous ne passions aux questions, monsieur Farber?
M. Leonard L. Farber (directeur général, Division de la législation de l'impôt, ministère des Finances): Oui, monsieur le président. Je vous remercie vivement de votre accueil.
Le projet de loi C-37 a pour objet de mettre en oeuvre un accord avec la Russie, signé en 1995; une convention avec l'Afrique du Sud, également signée en 1995; un accord avec la Tanzanie, signé en 1995; un accord avec l'Inde, signé en 1996; et une convention avec l'Ukraine, également signée en 1996. Le projet de loi a été déposé à la Chambre des communes le 17 mai 1996, et il a été renvoyé au Comité permanent des finances le 17 juin 1996.
À ma connaissance, monsieur le président, tous les pays signataires de ces accords ont adopté les dispositions législatives requises pour la mise en vigueur des conventions respectives. Toutes ces conventions prennent effet le 1er janvier de l'année suivant l'année de l'entrée en vigueur, à l'exception de celle qui a été signée avec l'Afrique du Sud, dont les dispositions entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant...
[Français]
Le président: Excusez-moi. Nous avons un problème de traduction. Pour que la séance se déroule bien, nous ferions peut-être mieux de commencer par tenir le vote dans les deux langues officielles, sans traduction. Avec votre permission, on pourrait le faire. Nous avons discuté de tout cela et nous le connaissons par coeur.
Notre greffière est devenue si conservatrice.
[Traduction]
Je ne fais qu'occuper le fauteuil. Il appartient aux membres de décider s'ils préfèrent voter avant ou après l'audition des témoins.
Savez-vous combien de temps cela va prendre pour réparer cet appareil?
Une voix: Non. Le technicien est en route.
Le président: Avez-vous essayé de donner un grand coup de pied dans cet engin?
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Grubel, voudriez-vous que l'on vote avant d'entendre les témoins?
M. Herb Grubel (Capilano - Howe Sound, Réf.): Oui, je serais ravi de coopérer avec mon président.
[Français]
Le président: Monsieur Pomerleau, on pourrait peut-être tenir le vote.
[Traduction]
Barry, pourriez-vous nous dire quand nous allons voir le projet de loi portant exécution du budget?
M. Barry Campbell (St. Paul's, Lib.): Monsieur le président, si vous vérifiez la transcription de notre dernière réunion, que la greffière a certainement sous la main, vous pourriez y lire ce que j'ai déclaré à cette occasion. Rien n'a changé depuis lors. Je pense donc que, compte tenu de l'esprit habituel de coopération sur lequel on peut compter de la part des deux côtés de la Chambre, nous devrions voir ce projet de loi à la fin de la semaine ou au début de la semaine prochaine.
En fait, les deux projets de loi seront débattus à la Chambre, demain. La Loi d'exécution du budget de 1997 et les mesures de la Loi de l'impôt sur le revenu de 1996. Nous espérons que le débat sera très bref et que nous pourrons renvoyer les deux projets de loi devant les comités de manière à ce que l'on puisse les étudier. Étant donné que le débat sur le budget traîne depuis des jours et des jours, le débat sur la Loi d'exécution du budget n'utilisera même pas les trois heures qui lui ont été réservées pour la journée de demain.
Le président: Y a-t-il une opposition quelconque aux mesures proposées?
M. Barry Campbell: Pas de ce côté-ci de la table, monsieur le président.
Le président: Voilà qui est inhabituel.
M. Barry Campbell: Mais vous feriez peut-être bien de poser la question à nos collègues de l'autre côté de la table.
M. Herb Grubel: Quel projet de loi?
M. Barry Campbell: La Loi d'exécution du budget et les mesures fiscales de 1996.
M. Roger Pomerleau (Anjou - Rivière-des-Prairies, BQ): Il s'agit donc du projet de loi C-92 et du projet de loi C-93?
M. Barry Campbell: Je ne connais pas la numérotation, mais je crois que c'est ça.
Aucun membre de votre parti ne va donc intervenir demain? Tout va donc se passer très vite?
Est-ce que Loubier est là?
M. Roger Pomerleau: J'interviendrai, mais je parle plus vite qu'Yvan.
M. Barry Campbell: C'est absolument vrai.
Herb, après toutes ces longues journées de débat, il est impensable qu'il y ait quelqu'un d'autre dans votre parti qui veuille intervenir pour parler du budget de 1997.
M. Herb Grubel: Je suis totalement en dehors du coup.
M. Barry Campbell: Bien.
Le président: J'ai une autre suggestion à faire; nous pourrions demander aux interprètes de venir faire de l'interprétation simultanée... Nous pourrions sauter la déclaration préliminaire de nos fonctionnaires, et passer directement aux questions.
Je refuse de tenir une réunion qui ne soit pas bilingue, mais il n'est pas absolument nécessaire que l'interprétation soit simultanée pour chaque personne.
[Français]
J'aimerais suggérer que les interprètes s'assoient à côté de ceux d'entre nous qui désirent entendre la traduction simultanée et qu'ils ne traduisent pas nécessairement les interventions à tout le monde, ce qu'ils pourraient peut-être faire par la suite. Ce n'est qu'une suggestion.
La greffière du comité: Si les interprètes le veulent bien.
Le président: Vous pourriez peut-être le leur demander.
Une voix: Est-ce que nos invités parlent français?
Une voix: Un petit peu.
Une voix: Les interprètes devraient être là.
Le président: D'accord.
[Traduction]
Monsieur Farber, voulez-vous avoir l'obligeance de poursuivre les remarques que vous aviez commencées à faire avec tant d'éloquence?
M. Farber: Merci beaucoup, monsieur le président.
L'objet de ce projet de loi est de mettre en oeuvre des conventions ou des accords relatifs à l'impôt sur le revenu signés avec les cinq pays suivants. La Russie, en 1995; l'Afrique du Sud, en 1995; la Tanzanie, en 1995; l'Inde, en 1996; l'Ukraine, en 1996. Le projet de loi a été déposé à la Chambre des communes le 17 mai 1996 et renvoyé à ce comité le 17 juin 1996.
À ma connaissance, monsieur le président, tous les pays signataires ont adopté des dispositions législatives pour la mise en vigueur des conventions respectives. Toutes ces conventions prendront effet le 1er juin suivant l'année de l'entrée en vigueur, à l'exception de celle qui a été signée avec l'Afrique du Sud, dont toutes les dispositions prennent effet le premier jour du troisième mois suivant l'entrée en vigueur de la convention, et la convention avec l'Ukraine dont les dispositions relatives aux retenues prennent effet le soixantième jour après le jour d'entrée en vigueur.
Monsieur le président, ce projet de loi a deux objectifs principaux. Éviter la double imposition et empêcher l'évasion fiscale en ce qui a trait à l'impôt sur le revenu. Les conventions suivent de très près le modèle de la convention de double imposition, selon l'OCDE.
Le projet de loi que vous avez devant vous traite de tous les taux de retenue, ainsi que des autres dispositions qui ont été adoptées bilatéralement. À notre connaissance, il n'existe aucune disposition prêtant à controverse dans ces conventions qui constituent une mise à jour importante des dispositions convenues avec ces pays conformément aux annonces faites dans le budget de 1992 au sujet de la réduction des taux d'imposition variables.
M. Ernewein et moi-même sommes prêts à répondre à vos questions.
[Français]
Le président: Merci beaucoup. Monsieur Pomerleau, avez-vous des questions?
M. Roger Pomerleau: Premièrement, M. Jean-Marc Déry ne devait-il pas être ici à titre de témoin invité?
La greffière: On m'avait dit qu'il était viendrait, oui.
M. Roger Pomerleau: Il est le chef des conventions fiscales. J'aurais aimé lui poser des questions.
Le président: Je vous assure que nous avons ici de vrais experts qui oeuvrent dans ce domaine depuis longtemps.
M. Roger Pomerleau: On parle ici de nouvelles conventions avec de nombreux pays. De façon générale, combien de temps faut-il pour négocier une nouvelle convention qui n'a jamais été négociée avec un pays quelconque? Arrive-t-il à l'occasion que vous ayez à renégocier des conventions déjà existantes?
[Traduction]
M. Brian Ernewein (chef, Impôt international et sur les sociétés, ministère des Finances): En réponse à la première question concernant le temps nécessaire pour négocier une convention fiscale, je dirai qu'il suffit parfois d'une semaine ou même moins, si les deux parties parviennent à s'entendre et ont des objectifs assez voisins ou s'il y a eu un échange préalable de correspondance et si les questions à résoudre étaient assez limitées. C'est un laps de temps anormalement court et, bien entendu, il n'inclut pas le temps requis pour le déroulement du processus. En fait, c'est plus qu'un processus. La procédure de ratification entre également en ligne de compte.
Il faut parfois des années pour parvenir à un accord avec un autre pays. En moyenne, il s'écoule probablement deux à trois ans entre le premier accord ou la première démarche d'un pays auprès de l'autre en vue de conclure une convention fiscale et les négociations et la mise en oeuvre de l'accord.
[Français]
M. Roger Pomerleau: Nous parlons ici de nouvelles conventions fiscales. Est-ce qu'au cours des cinq ou dix dernières années, le Canada a eu à renégocier à l'occasion des conventions déjà existantes, indépendamment de celles-ci? Est-ce arrivé?
[Traduction]
M. Ernewein: Oui, c'est arrivé. Il s'agit ici de nouvelles conventions fiscales encore que, dans le cas de l'Afrique du Sud, une convention existait entre le milieu des années 50 et celui des années 80. La nouvelle convention avec l'Afrique du Sud remplace celle qui a été dénoncée il y a une dizaine d'années. Dans le cas de la Russie et de l'Ukraine, les conventions remplacent également la convention entre le Canada et l'ancienne URSS.
Pour répondre directement à votre question oui, nous renégocions effectivement des conventions. Nous n'avons pas de boule de cristal. Des changements nous obligent parfois à revoir les conditions des conventions existantes. La même chose se produit dans les autres pays. Nous en avons des exemples récents: les négociations avec le Royaume-Uni et un récent accord conclu avec la France. En réalité, surtout à cause du fait que les retenues sur certains dividendes ont été ramenées de 10 p. 100 au taux actuel annoncé de cinq pour cent, nous avons renégocié ou sommes en train de renégocier des conventions déjà en vigueur avec au moins une douzaine de pays.
[Français]
M. Roger Pomerleau: Je note, comme le précisait M. Farber, que les conventions fiscales sur lesquelles nous nous penchons aujourd'hui sont faites sur le modèle de l'OCDE et le suivent d'assez près. Dans quelques conventions fiscales antérieures à celles-ci, par exemple celle entre le Canada et les Bahamas, on ne suit pas directement le modèle de l'OCDE. Envisagez-vous de mettre à jour ces conventions? Les conventions existantes avec la Barbade seront-elles éventuellement remises à jour et reprises sur le modèle de l'OCDE?
[Traduction]
M. Farber: Je ne crois pas que nous ayons de convention avec les Bahamas. Je crois que c'est de la Barbade que parle le député. Je crois comprendre la nature de la question.
Il est certain que dans le contexte d'une renégociation, nous examinerions certaines dispositions adoptées par la Barbade dans le but d'une mise à jour conformément à la norme de l'OCDE. Il importe que vous sachiez que la question soulevée par le député est sous- tendue par celle de la concurrence fiscale exercée par certains paradis fiscaux. L'OCDE a organisé une session spéciale dans laquelle les pays membres participants examinent les problèmes de concurrence fiscale dans le monde entier et s'efforcent d'établir une série de critères et de normes que les pays membres de l'OCDE devront respecter. Nous espérons pouvoir retrouver ces normes dans la convention modèle.
Il y a déjà eu un certain nombre de réunions et nous participons très activement à cette session spéciale. Nous contribuons à la rédaction de certains documents et nous faisons partie du groupe de travail. Nous espérons que cette session spéciale aboutira à un consensus qui ouvrira la voie à la coopération, du moins entre les pays de l'OCDE, sur la manière de traiter les problèmes de concurrence fiscale dans le contexte mondial.
Cela dit, si ces normes sont mises en place à l'OCDE, je crois qu'il sera beaucoup plus facile pour les pays de respecter une norme établie et de ne pas se laisser entraîner dans ce genre de concurrence fiscale - qui est très fréquente - en offrant un abri fiscal aux entreprises étrangères.
[Français]
M. Roger Pomerleau: Prévoyez-vous prochainement une séance d'étude sur ce sujet? Croyez-vous qu'il y ait vraiment une chance qu'on réussisse à trouver des moyens pour que la compétition au niveau des taxes soit standardisée dans les pays et, dans l'affirmative, quand exactement pensez-vous que cela pourrait se faire?
[Traduction]
M. Farber: Monsieur le président, je ne peux certainement pas parler au nom de l'OCDE ni vous dire où en est son groupe de travail, ni ce que seront ses recommandations. Tout ce que je peux dire, monsieur le président, c'est que dès le départ, le Canada se refuse à négocier des conventions fiscales avec les pays dont le régime fiscal est trop différent du nôtre.
Le traité avec la Barbade mentionné par le député est un traité dont les grandes lignes étaient déjà établies. La Barbade a présenté un certain nombre de dispositions en vertu de sa législation sur les centres bancaires internationaux, afin d'attirer des organismes de services financiers en offrant des taux d'imposition assez favorables. C'est une question qui nous préoccupe indiscutablement. Nous l'avons tolérée mais nous n'avons pas toléré que cela aille plus loin.
Vous vous souviendrez qu'à la suite du rapport du vérificateur général de 1992 ou 1993 dans lequel il mentionnait certains paradis fiscaux et certaines des mesures des règlements de l'impôt sur le revenu qui autorisent quelques pays, en particulier aux Caraïbes, à bénéficier de certains aspects de notre système d'imposition, nous avons averti tous les pays qui figuraient déjà sur la liste de ceux qui avaient obtenu ce traitement préférentiel que dans les deux années qui suivraient, ils seraient rayés de la liste à moins d'avoir négocié un traité sur la double imposition avec le Canada.
Un certain nombre de pays des Caraïbes ont disparu de la liste, soit parce que nous avons refusé de négocier avec eux pour la simple raison qu'ils n'avaient pas de régime fiscal efficace ou de système qui soit vraiment comparable au nôtre... et en ce qui concerne les dispositions prises par la Barbade au sujet des compagnies d'assurances captives et des services financiers autres que ceux qui étaient déjà assujettis à leur législation sur les centres bancaires, la Barbade ne pourrait pas bénéficier de ce que nous appelons le surplus exonéré.
Vu sous cet angle, nous avons certainement fait un grand pas sur la voie de la stabilisation du système vis-à-vis des avantages que d'autres pays peuvent tirer des dispositions qui figuraient dans Loi de l'impôt sur le revenu ou dans les règlements, et nous allons certainement réaliser désormais des progrès dans nos négociations avec divers pays. Bien que nous poursuivions nos entretiens avec l'Organisation des États des Caraïbes orientales, nous n'avons pas encore engagé de négociations officielles, pour les diverses raisons que je viens de vous donner.
[Français]
M. Roger Pomerleau: Nous savons que nous sommes défavorisés vis-à-vis de la compétitivité au niveau de la taxation par rapport aux Barbades. Est-ce qu'un organisme canadien a déjà tenté d'évaluer combien il peut nous en coûter de ne pas être au même niveau que les autres pays avec qui on signe des conventions fiscales qui correspondent exactement à l'OCDE? Combien une telle affaire peut-elle nous coûter?
[Traduction]
M. Ernewein: Si je comprends bien votre question, vous parlez des effets concurrentiels du système d'imposition de la Barbade par rapport au régime canadien.
M. Roger Pomerleau: Oui.
M. Ernewein: C'est en fait une des questions sur lesquelles porte le projet d'étude sur la concurrence fiscale dont M. Farber a parlé. À notre avis, cela ne met pas uniquement en cause la Barbade. Le problème qui se pose est celui de l'effet qu'exercent d'autres pays qui, grâce à des impôts peu élevés, s'efforcent d'attirer des entreprises qui, autrement, n'auraient pas décidé de s'installer dans ces pays pour des raisons commerciales.
Les travaux qui s'effectuent à l'OCDE ne visent pas à traiter ce genre de situation au cas par cas. Ce que l'OCDE essaie d'établir tout d'abord - encore que beaucoup d'entre nous ne pensent pas que ce soit nécessaire - c'est que la concurrence fiscale est nuisible, que lorsqu'on essaie d'intimider son voisin, à long terme, ce n'est profitable ni pour le pays perdant ni pour celui qui essaie d'attirer des entreprises chez lui car s'il réalise quelques gains à court terme, il ne gagnera en fin de compte rien au change.
En résumé, nous n'avons pas de solution pour la Barbade. Nous essayons de trouver une solution au problème général de la concurrence fiscale et à celui des effets des paradis fiscaux sur ce que nous appelons les pays qui perçoivent des impôts.
[Français]
M. Roger Pomerleau: C'est tout, monsieur le président. Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Pomerleau. C'était une bonne question.
[Traduction]
Monsieur Grubel.
M. Herb Grubel: En réponse à ce qui vient d'être dit, je me demande si la question de l'imposition étrangère que le Bloc soulève toujours constitue en fait deux types de problèmes différents.
Vous avez répondu à une question au sujet de la concurrence fiscale. Je peux comprendre qu'on est en train de régler cette question, mais qu'en est-il de l'imposition forfaitaire, lorsqu'un pays décide d'accorder une charte à des institutions financières qui ont des activités d'un océan à l'autre, ce qui signifie que le pays d'accueil ne sera jamais informé des dépôts et des revenus de ses propres ressortissants? Cette situation est-elle couverte par les conventions? Pourriez-vous également nous parler des problèmes que créent ces véritables paradis fiscaux pour le Canada?
M. Farber: Je répondrai simplement, monsieur le président, que le Canada n'a pas signé de convention avec ce que le député appelle de véritables paradis fiscaux. Nous ne pouvons donc imposer aucune restriction aux mesures fiscales que le pays souverain veut mettre en vigueur. Toute multinationale canadienne faisant affaire dans un tel pays ne bénéficierait donc pas des dispositions d'une convention. Nous considérerions que ce qu'elle gagne est totalement imposable, et dans la mesure où des impôts sont également perçus dans cet autre pays, la multinationale pourrait fort bien être soumise à un régime de double imposition.
À cet égard, je ne crois pas qu'il y ait de problème. Je crois que ce que le député du Bloc voulait dire c'est que vous avez d'autres questions à régler avec les pays avec lesquels vous avez déjà négocié une convention, lorsque, après coup, ces pays adoptent des dispositions qui peuvent être considérées comme une forme d'abri fiscal. C'est peut-être une question technique, mais il s'agit en fait là de mesures d'incitation adoptées par ce pays pour attirer certaines entreprises pour une raison quelconque, soit pour établir une base d'emplois afin de percevoir des droits d'obtention de permis ou en tirer des recettes pour établir sa propre base économique.
Il y a deux types de problèmes... quand un nombre important de pays se lancent dans ce genre de concurrence et commencent à abaisser leurs taux d'imposition à un niveau tel qu'il devient rentable de s'installer chez eux, il y a des raisons de s'inquiéter de la situation.
M. Herb Grubel: Monsieur le président, je voudrais savoir ce qu'un pays industrialisé tel que le Canada peut faire pour limiter ce qui constitue, en vertu de nos lois, des sources de revenu et des dépôts illégaux dans ces paradis fiscaux, en dehors des pressions que nous pouvons essayer d'exercer pour que nos propres ressortissants n'utilisent pas ces possibilités, y a-t-il quelque chose que nous puissions faire? Sur le plan international, y a-t-il des efforts collectifs pour essayer de neutraliser ces paradis fiscaux?
M. Farber: Comme vous le savez, monsieur le président, ces dernières années le gouvernement a adopté un certain nombre de mesures relatives à la déclaration des revenus de source étrangère. À cause de la nature même de la situation, avant que ces mesures n'entrent en vigueur... Comme vous le savez fort bien, il ne se passe pas de semaine sans que paraisse dans le Globe and Mail ou dans le Financial Post une annonce concernant un séminaire sur la manière de placer de l'argent dans une île des Caraïbes offrant un abri fiscal, d'y créer une fiducie quelconque, avec un mandataire local.
Comme vous le savez, le gouvernement a adopté un règlement sur l'obligation de déclarer les revenus étrangers. Toute personne au Canada ayant un intérêt dans une fiducie, ou dans n'importe quel véhicule financier outre-mer est tenue de le déclarer.
Nous avons donc pris des mesures assez claires à l'égard de nos propres ressortissants pour nous assurer qu'ils savent qu'au Canada nous imposons leur revenu mondial et qu'ils ne peuvent pas placer leur argent en fiducie en pensant qu'il n'est pas nécessaire d'en faire la déclaration au Canada.
En ce qui concerne les sociétés, je répète que nous avons considérablement renforcé les exigences en matière de rapport en ce qui concerne les filiales étrangères, afin de nous assurer que les renseignements concernant les investissements, les filiales étrangères, et la situation du revenu d'au moins les filiales étrangères de catégorie un sont déclarés aux fins de l'impôt canadien.
Monsieur le président, je crois qu'une fois que ces mesures seront pleinement en vigueur et que nous aurons le bénéfice d'une ou deux années d'expérience, nous serons beaucoup mieux placés pour déterminer les autres mesures qui seront peut-être nécessaires pour nous assurer que tout le monde paie sa juste part d'impôt.
M. Herb Grubel: Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Grubel.
Madame Whelan, à vous.
Mme Susan Whelan (Essex - Windsor, Lib.): J'ai une brève question à poser. Je voulais être certaine que si des conventions sont signées avec ces pays, il n'y aura pas de Canadiens qui résident dans ces pays, ou de personnes résidant au Canada touchant une pension, qui se retrouveront dans la situation qui vient de se produire au Canada et aux États-Unis, situation à laquelle nous venons d'apporter remède.
M. Ernewein: En fait, aucun résidant canadien qui touche une pension d'un de ces pays ne verra augmenter les droits fiscaux de ce pays à cause de ces conventions. Cependant, en vertu des dispositions de ces mêmes conventions, ces autres pays conserveront les droits d'imposition qui ont déjà.
Autrement dit, je crois que les cinq pays concernés ont actuellement le droit d'imposer une taxe sur la sécurité sociale, comme nous le faisons nous-mêmes sur les paiements que nous effectuons. Les conventions ne changeront rien à cela.
Mme Susan Whelan: Est-ce que cela se fait dans ces pays?
M. Ernewein: Pas à ma connaissance, mais je ne sais pas s'ils le font ou non.
Mme Susan Whelan: Bien.
Le président: Merci.
Madame Brushett, vous avez la parole.
Mme Dianne Brushett (Cumberland - Colchester, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai deux ou trois questions à poser.
Je sais que nous avions déjà une convention avec l'Union des Républiques socialistes soviétiques, et que depuis la dissolution de l'URSS, nous avons maintenant une convention avec la Fédération russe, mais avions-nous déjà signé des conventions dans le passé avec ces autres pays, ou s'agit-il de conventions nouvelles?
M. Ernewein: Nous avions une convention avec l'URSS. La Fédération russe et l'Ukraine avaient accepté de continuer à observer les dispositions de cette convention pendant les deux ou trois dernières années.
Les conventions actuelles, notamment celles avec la Russie et l'Ukraine, remplacent la convention antérieure avec l'URSS. Nous avions également signé une convention avec l'Afrique du Sud, qui a été dissoute en 1985; donc, si vous voulez, nous avons une nouvelle convention avec l'Afrique du Sud. La convention avec la Tanzanie est totalement nouvelle et celle que nous avons signée avec l'Inde remplace une convention existante.
Mme Dianne Brushett: On procède donc une mise à jour de certaines de ces conventions pour diverses raisons.
Je voudrais maintenant savoir pourquoi nous en avons vraiment besoin. Je comprends très bien la notion de protection, de double imposition, ou son absence. Si une personne des milieux d'affaires se rend en Inde, s'y établit comme cela se fait depuis bien des années, le fait-elle sans être couverte par des conventions telles que celles-ci? Ces gens d'affaires ont-ils décidé de prendre des risques, de tenter leur chance, le résultat étant qu'ils ne paient pas trop d'impôts ou que nous ne percevons pas notre juste part?
Je ne comprends pas exactement comment... Cela a-t-il vraiment beaucoup d'importance pour les sociétés qui cherchent à obtenir une aide financière de la Banque mondiale ou du Fonds monétaire international? Ce que je voudrais savoir c'est si, sur le plan pratique, il existe un besoin réel?
M. Ernewein: La nécessité d'avoir des conventions fiscales ou les avantages à en tirer dépendent des dispositions de ces conventions et de ce que le contribuable individuel souhaite lui- même faire.
L'objectif général des conventions fiscales est d'empêcher l'évasion fiscale. On y parvient grâce à des échanges d'information et à la collaboration entre les autorités compétentes des deux pays.
L'objectif est également d'empêcher la double imposition. Pour cela, on limite les droits de chaque pays d'imposer le revenu et on coordonne les droits fiscaux de manière à ce que si les deux pays ont le droit de percevoir des impôts, chacun sera obligé d'accorder un crédit pour l'impôt perçu par l'autre. Il y a des exemples de ce genre de situation.
Quels seraient donc les avantages d'une convention fiscale pour une personne souhaitant faire affaire en Inde? L'avantage est que la convention établit avec certitude le montant des impôts que l'Inde peut percevoir auprès de cette personne et qu'elle ne peut l'imposer que si la personne est physiquement présente sur son territoire et y est établie de manière stable.
Cela signifie que si des dividendes, un intérêt ou des redevances en provenance de l'Inde sont payés à un investisseur canadien, les taux d'imposition seront réduits. Il ne s'agira pas des taux que l'Inde fixera unilatéralement mais des taux autorisés par la convention.
S'il y a un conflit au sujet de l'application de la convention ou du règlement en vertu du Code fiscal indien, la convention prévoit un mécanisme permettant aux autorités fiscales de travailler de concert pour régler le problème, pour régler les différends.
Mme Dianne Brushett: Quelle est la définition de résidence donnée dans le projet de loi C-37? Nous savons que c'est une question qui revient fréquemment dans toutes ces conventions. Est- ce la propriété d'un aménagement matériel ou suffit-il de faire affaire dans un pays?
M. Ernewein: La résidence est une notion technique utilisée dans les conventions fiscales. L'expression «résidant» désigne toute personne considérée comme résidant et qui est imposable. Cela signifie en général que cette personne est imposable sur la totalité de ses revenus mondiaux, où que ce soit, par le pays en question.
Considérons, par exemple, que toutes les personnes assises à cette table sont imposables en tant que résidants canadiens; elles sont alors assujetties à l'impôt sur le revenu quelle que soit la source de ce revenu. C'est la définition de la résidence utilisée dans la convention.
La seule condition, ou exigence supplémentaire imposée par les conventions est que pour être considérée comme un résidant aux termes d'une convention fiscale, une personne est imposable dans le pays dans lequel elle est considérée comme un résidant.
Si j'ai bien compris votre question, vous voudriez peut-être plutôt savoir quand l'autre pays a le droit d'imposer un résidant canadien.
Mme Dianne Brushett: Comme je le disais, c'est une expression qui revient souvent lorsqu'on parle d'impôts: quel est le pays qui définit la résidence; est-on un résidant lorsqu'on fait affaire dans un pays ou lorsqu'on est propriétaire de biens matériels dans ce pays?
J'ai lu les restrictions que ce projet de loi impose en ce qui concerne les biens mobiliers. Les aéronefs et les navires sont considérés comme des biens immobiliers. J'aimerais bien savoir comment on définit la résidence lorsqu'on fait affaire au Liban ou en Tanzanie?
M. Ernewein: Ni la présence physique ni l'importance de l'investissement ne sont nécessairement liés à la résidence. La résidence est l'endroit où vous accrochez votre chapeau en rentrant le soir, l'endroit où vous avez un foyer d'habitation permanent.
Ce n'est pas la seule base du droit d'imposition pour un pays. Nous avons le droit d'imposer nos propres résidants sur l'ensemble de leurs revenus. Nous avons également le droit d'imposer le revenu gagné au Canada par des non-résidants. Lorsqu'une convention fiscale est en vigueur, d'autres restrictions nous sont imposées en ce qui concerne les non-résidants, les résidants de l'autre pays. Nous ne pouvons imposer que le revenu qu'ils tirent d'un établissement stable - un emplacement de fait ici - ou du revenu qui leur est payé sous forme d'intérêts, de dividendes ou de redevances.
Excusez-moi. Est-ce que cela répond un peu mieux à votre question?
Mme Dianne Brushett: Je m'en tiendrai là pour le moment, merci.
Le président: Monsieur St. Denis.
[Français]
Le vote aura lieu d'ici 15 minutes.
La greffière: Non, c'était juste un manque de quorum.
Le président: D'accord.
[Traduction]
Il n'y a pas d'autres...
[Français]
Les articles 2 à 31 inclusivement sont adoptés
Les annexes 1 à 5 inclusivement sont adoptées
L'article 1 est adopté
Le titre est adopté
Le président: Puis-je présenter le projet de loi C-37 à la Chambre?
Des voix: Adopté.
Le président: Merci beaucoup de votre collaboration.
[Traduction]
Brent, aviez-vous une motion à présenter?
M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Oui. Ce n'est qu'une petite question interne. Lorsque notre Sous-comité d'examen des IFI se trouvait à Washington, il avait été décidé que nous remettrions un petit cadeau à une de nos personnes-contacts. Je propose donc que le comité rembourse les dépenses encourues pour acheter un cadeau officiel lors du séjour du sous-comité à Washington. Il s'agit d'une petite somme dépensée pour offrir un cadeau à Leslie Boucher.
Le président: Le montant est-il inférieur à 25 000$?
M. Brent St. Denis: Je le crois.
Le président: En est-il convenu?
[Français]
La motion est adoptée
[Traduction]
M. Brent St. Denis: À propos, nous aurons un rapport à présenter au comité avant la fin d'avril.
Le président: Parfait. Je remercie nos hauts fonctionnaires et...
[Français]
spécialement les deux députés de l'opposition pour la coopération dont ils ont fait preuve dans l'étude de ce projet de loi. J'espère qu'avec cette espèce de coopération, ce projet de loi pourra être adopté par la Chambre avant l'ajournement. Je tiens à vous remercier parce que ça va aider énormément nos investisseurs et nos sociétés canadiennes qui font affaire dans ces cinq régions du monde. Sans ce genre d'appui de notre pays, ce serait impossible pour eux. Donc, merci beaucoup à tout le monde
[Traduction]
et en particulier le merveilleux représentant du bureau du whip,...
[Français]
pour tout ce que vous avez fait pour nous.
[Traduction]
La séance est levée.