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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 3 décembre 1996

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[Traduction]

Le vice-président (M. Flis): Monsieur Cowper, puisque nous avons maintenant des députés du Parti ministériel ainsi que de l'opposition, de sorte que je déclare la séance ouverte.

Je crois savoir que vous avez un exposé préliminaire que vous aimeriez nous présenter. Après votre exposé, nous passerons aux questions. La tradition veut que nous commencions par l'opposition et que nous passions ensuite aux ministériels.

Je ne peux pas dire qu'il s'agit d'une table ronde, mais la présente séance de notre comité sera vraiment unique en son genre. Je crois que nous ouvrons ici une nouvelle voie. Nous réaliserons peut-être des économies considérables pour les contribuables en obtenant de l'information d'experts comme vous. Je vous invite donc à nous présenter votre exposé.

M. Stephen Cowper (directeur général, Forum nordique): Merci, monsieur le président.

J'ai déjà soumis un mémoire écrit, que j'ai envoyé par télécopieur à Janice Hilchie - je crois que c'était hier - , mais comme je le lui expliquais, je voudrais procéder de façon plus informelle aujourd'hui et vous inviter, bien sûr, à m'interroger sur toutes les questions que vous voudrez à la fin de mon exposé.

Tout d'abord, je tiens à remercier le comité de s'intéresser aux vues du Forum nordique. Permettez-moi de me présenter officiellement. Je suis Steve Cowper et je suis actuellement, entre autres choses, directeur général du Forum nordique.

Je veux vous faire un bref historique du Forum nordique - comment il a été fondé, quels sont ses buts et quel est son niveau d'activités actuel.

Dans les années 1980, le gouvernement de Hokkaido avait déjà lancé l'idée de créer une organisation inter-régionale regroupant les gouvernements régionaux nordiques. Naturellement, l'idée ne pouvait guère se concrétiser à l'époque où l'Union soviétique existait toujours, car les chefs de gouvernements régionaux de l'Union soviétique n'étaient pas vraiment autorisés à se déplacer librement et, comme la Russie occupait une part tellement considérable du territoire arctique, il ne semblait guère logique de créer une organisation arctique ou nordique qui n'inclurait pas la Russie.

Comme chacun le sait, la situation a changé du tout au tout à la fin des années 1980. C'est ainsi que nous avons tenu en 1990 une réunion que nous avons appelée Conférence des régions nordique, dont j'ai moi-même été l'hôte. Je crois que près de 600 personnes y étaient présentes, dont bon nombre du Canada. Cette conférence était vraiment la première à laquelle les gouverneurs régionaux russes avaient pu participer assez librement, et ils y ont effectivement exprimé leurs opinions.

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À l'issue de cette réunion, il a été décidé de créer une organisation permanente à partir des idées présentées à la conférence. D'où la création du Forum nordique, qui a officiellement vu le jour en 1991.

Au début, l'organisation comportait un assez grand nombre de membres russes et, comme cela se produit souvent, elle a en quelque sorte pataugé pendant un certain temps en se cherchant un but. Je crois pouvoir dire sans trop risquer de me tromper qu'elle a connu un certain nombre de faux départs mais que, comme d'autres organisations, le Forum nordique a pris avec le temps une certaine maturité, et je crois qu'il est maintenant solidement engagé dans la bonne voie.

Notre organisation regroupe les gouvernements régionaux des diverses régions du Nord. Par le «Nord», nous entendons plus que l'Arctique. Nous comptons des représentants, non pas seulement des pays arctiques, mais aussi de la Chine, du Japon et de la Mongolie. La Corée du Sud, c'est-à-dire la République de Corée, a plutôt le statut d'observateur.

L'organisation a commencé ces dernières années à attirer de nouveaux membres. Nous comptons maintenant des membres de 10 pays, en comptant la Corée. J'en donne la liste dans le texte de mon exposé, de sorte que je ne me répéterai pas. Je crois que nous avons 11 membres régionaux de la Russie. Au Canada, du moins à l'heure actuelle, nos membres son l'Alberta et le Yukon; je participe toutefois à des pourparlers assez intensifs avec l'administration des Territoires du Nord-Ouest à Yellowknife afin d'amener ce territoire à adhérer à notre organisation. Nous avons notamment fixé à cette fin un droit réduit pour les gouvernements régionaux qui représentent moins de 100 000 personnes. Nous avons cru bon de ramener le droit d'adhésion à 5 000 $ pour qu'il soit un peu plus à leur portée.

Alors, que faisons-nous à part nous réunir en assemblée annuelle? L'organisation a essentiellement pour but de servir de moyen de communication permanent entre les membres des gouvernements régionaux. Les résultats sont assez positifs. Comme vous le savez sans doute, il est quelque peu difficile de pénétrer dans certaines régions de Russie, mais à cause du lien direct que nous avons avec les gouverneurs ou les chefs des administrations régionales, nous sommes sans doute plus en mesure que quiconque de communiquer avec ces régions.

Quoi qu'il en soit, la communication est un dossier auquel nous nous intéressons de près. Nous voudrions qu'un meilleur système de communication soit mis en place dans les bureaux des gouverneurs des différentes régions de Russie. Dans d'autres endroits, la communication est assez facile. À l'heure où nous nous parlons, nous sommes en train de mettre en place un réseau privé qui facilitera le transfert de données entre nos membres par courrier électronique et par d'autres moyens électroniques.

Nous avons une perspective bien à nous sur ce qui se passe dans l'Arctique. Nos membres sont, bien sûr, les gouverneurs des régions et il se trouve que tous les gouverneurs des régions de Russie notamment commencent à devoir livrer la marchandise sur le plan de l'économie, de l'emploi et des problèmes d'ordre pratique qui se posent dans tout l'Arctique et dans tout le Nord.

Notre activité est donc d'abord et avant tout axée sur les problèmes d'ordre pratique et sur la communication d'informations au sujet des technologies qui ont été mises au point dans telle ou telle région du Nord et qui pourraient être appliquées dans d'autres régions.

En fait de projets, nous avons un projet de surveillance environnementale permanente dans le nord-est de l'Asie, qui se révèle très utile et qui a pour but de retracer les sources des pluies acides. Il s'agit d'un projet auquel participent les régions de Heilongjiang, de Hokkaido, de l'Alaska de même que la République de Sakka, ou Iaksutie, en Russie, et Sakhalin. Nous espérons qu'il permettra d'identifier certaines, sinon la totalité, des sources de pluies acides dans cette région en particulier du nord-est de l'Asie. Le projet pourrait même avoir des répercussions plus vastes encore, mais l'avenir nous le dira.

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Nous avons aussi un projet de gestion coopérative de la faune. L'État de l'Alaska a pas mal d'expérience dans le domaine de la gestion de la faune. Cette expérience pourrait être transférée, du moins en partie, à Hokkaido et à certaines régions de Russie de même qu'à certaines des autres régions qui ont peut-être moins d'expérience au niveau régional dans le domaine de la gestion de la faune. Nous bénéficions pour ce projet de l'aide de certaines régions scandinaves.

Nous travaillons aussi au développement du tourisme nordique. Le Forum nordique a un projet en cours par lequel nous espérons former les fonctionnaires qui s'occupent du tourisme dans la région de Kamchatka, en Russie. Ils ont là une magnifique région qui présente un potentiel touristique énorme, surtout dans la zone qui a récemment été désignée comme zone d'écotourisme. L'infrastructure y est pratiquement inexistante. Ils ne savent pas trop comment s'y prendre pour mettre en place les installations qui leur permettraient d'attirer les groupes de touristes assez bien nantis qui viennent de l'Occident et aussi du Japon. C'est ce que nous essayons de les aider à faire. Ce projet est actuellement en cours.

Nous avons également un projet qui a trait aux liaisons aériennes est-ouest et qui a déjà donné des résultats concrets. Les efforts en ce sens ont permis l'établissement d'une liaison entre la Chine - Heilongjiang en fait - et Vladivostok, et nous croyons que nous ne tarderons pas à avoir une liaison directe, sans escale, de Iakoutsk, dans la République de Sakka, à Anchorage. Comme le savent sûrement les membres du comité, les liaisons aériennes entre l'Est et l'Ouest sont difficiles et coûteuses, surtout quand il s'agit de survoler l'Arctique, et nous tentons de faire ce que nous pouvons pour remédier à cette situation.

Nous travaillons aussi avec le gouvernement de Sakhalin, qui a décidé de se lancer à fond dans l'exploitation pétrolière. Le gouvernement de la région veut notamment savoir comment répartir les bénéfices; qui devrait avoir droit à quel montant; quelles lois régionales devraient être adoptées afin de protéger l'environnement; comment il faudrait s'y prendre pour faire respecter les règlements visant à protéger l'environnement? Non seulement nous envoyons dans la région de l'information à partir de l'Alaska, mais nous en demandons aussi à la région nordique de la Norvège, qui a une certaine expérience au niveau cellulaire, ainsi qu'à l'Alberta. Nous comprenons que les enseignements issus de l'expérience de ces régions ne pourront pas être appliqués directement à Sakhalin, mais ils seront quand même utiles. Il est utile de savoir ce que font les voisins.

À propos de ce que font les voisins, nos activités nous amènent notamment, généralement par l'entremise du Secrétariat du Forum nordique, qui a son siège ici à Anchorage, à essayer de déterminer les besoins technologiques de nos membres. Il y a, par exemple, pas mal de régions de Russie qui cherchent des génératrices efficaces pour des petites localités ou pour de grands projets industriels qui ont été entrepris sur leur territoire. Il y a aussi plusieurs régions de Russie qui cherchent du matériel d'exploitation et des fournitures pour des projets d'exploitations pétrolières. Nous tentons de représenter, non pas les entreprises en tant que telles, mais les régions, de sorte que nous nous efforçons d'introduire un élément de concurrence dans nos recherches pour que nos membres puissent voir ce qui est disponible. Naturellement, ils peuvent ensuite décider eux-mêmes de ce qu'ils veulent.

En Alaska, par exemple, nous sommes depuis assez longtemps à la recherche de petites unités d'épuration des eaux pour nos villages. Et voilà que la Finlande en produit depuis déjà un certain nombre d'années. Il y en a même en Colombie-Britannique, pas très loin de l'Alaska; et, bien entendu, l'Alaska n'en savait rien. Grâce au Forum nordique, nous sommes maintenant au courant de l'existence de cette technologie finlandaise et nous pourrons l'importer en Alaska. Je crois effectivement que c'est ce qui se produira.

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Nous parrainons aussi des conférences existantes qui touchent les territoires nordiques et l'Arctique et nous collaborons à leurs travaux. Nous assumons notamment la responsabilité du travail de secrétariat pour les réunions dites de l'ISCORD, qui auront lieu à Anchorage en mai prochain. Il s'agit d'une organisation circumpolaire qui s'intéresse à l'investigation et à l'expérimentation sur la nature et qui se sert abondamment de technologies nordiques. Nous ne voulons pas faire double emploi par rapport à ce qui se fait déjà. Nous prévoyons aussi de parrainer ou de coparrainer une conférence agricole circumpolaire qui aura lieu en Alaska en 1999.

Nous participons à la planification, nous aidons à réunir les conférenciers et, ce qui est peut-être encore plus important, nous faisons la publicité de ces conférences et nous essayons d'amener les gens à y participer pour qu'ils puissent en tirer profit.

À long terme, nous voulons pouvoir avoir accès aux bases de données arctiques et les transférer à nos membres. Nous voulons être un centre de communications axé sur les gouvernements régionaux que nous représentons.

Permettez-moi maintenant de vous parler du Conseil de l'Arctique, car je crois qu'il est important que le Conseil de l'Arctique et le Forum nordique travaillent en très étroite collaboration.

Tout d'abord, nous sommes d'avis que le Conseil de l'Arctique est absolument nécessaire. Nos membres sont tous pour le maintien du Conseil de l'Arctique. Ils croient que le conseil servira d'organisation permanente par laquelle les gouvernements nationaux pourront échanger leurs vues. Ils espèrent qu'avec le temps, il sera possible de conclure des accords permanents qui nous assureront un ensemble uniforme de règles pour tout l'Arctique.

Nous comprenons tous qu'il ne faut pas que nous en venions dans l'Arctique à nous concurrencer les uns les autres pour le développement des ressources alors que la variable clé serait qu'une des régions concurrentes n'aurait pas de normes environnementales. Aucun de nous ne veut d'une telle situation. Personne n'y gagnerait. Voilà le genre de négociations pour lesquelles le Conseil de l'Arctique est tout désigné selon nous.

Cela dit, nous estimons que le Forum nordique représente un groupe de gouverneurs de différentes régions du Nord - pas nécessairement, comme je l'ai dit, de l'Arctique, bien que la plupart soient de l'Arctique - et que la participation à part entière de notre groupe est essentielle si nous voulons que les décisions du Conseil de l'Arctique soient appliquées et mises en oeuvre en temps opportun.

Nous vivons dans un monde qui évolue très rapidement. En raison des progrès sur le plan des communications, nous constatons maintenant que les gouvernements transfèrent systématiquement certains de leurs pouvoirs. La technologie est là pour tout le monde, mais elle se traduit essentiellement par une réduction des pouvoirs des gouvernements fédéraux. Beaucoup des décisions qui étaient auparavant prises au niveau fédéral le sont maintenant, du moins en partie, par les gouvernements régionaux. C'est là une tendance qui est sans doute irréversible.

Ne serait-ce que pour cette raison, nous estimons qu'il serait utile que le Conseil de l'Arctique permette à tout le moins au Forum nordique de participer à ses délibérations de manière à pouvoir faire connaître ses vues le cas échéant. Pour cela, nous avons proposé de créer une catégorie dite d'«observateur permanent». Nous avons fait cette proposition par l'entremise de plusieurs de nos gouverneurs régionaux, notamment, soi dit en passant, le gouvernement de l'Alberta. Le Conseil de l'Arctique n'a pas jugé bon de nous accorder ce statut. Nous nous retrouvons plutôt dans la même catégorie, si je ne m'abuse, que les 19 groupes environnements distincts. C'est finalement une décision qui n'a guère été appréciée de certains de nos gouverneurs. Il s'agit d'un rôle plutôt passif. Nos membres sont d'avis qu'étant donné la nature de notre organisation, nous méritons un statut un peu plus élevé.

J'ai discuté de cela de façon assez détaillée dans le mémoire que je vous ai soumis, et c'est tout ce que je vous dirai sur le sujet.

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Je tiens à vous dire que j'ai été invité à prononcer le discours-programme à la foire commerciale du Nunavut qui a eu lieu à Iqualuit en mars dernier, ce qui m'a beaucoup plu. J'ai toujours voulu visiter l'île de Baffin depuis que j'en ai découvert l'existence dans un atlas à l'âge de sept ans. Non seulement j'ai pu y aller, mais quelqu'un m'a payé le voyage et m'a nourri aussi.

Les gens d'Iqualuit voulaient savoir si, une fois que le Conseil de l'Arctique serait bien lancé, il ne prendrait pas simplement à sa charge tout ce que ferait le Forum nordique, qui n'aurait donc plus de rôle à jouer. Je leur ai dit que je ne croyais pas que le Conseil de l'Arctique en viendrait un jour à s'intéresser au transfert en Scandinavie ou en Russie d'une technologie d'empierrement novatrice mise au point au Yukon. Je leur ai dit que le Conseil ne s'occuperait pas de ce genre de chose, mais que c'est précisément ce dont nous nous occupons. Ainsi, le Conseil de l'Arctique a sa mission très importante et le Forum nordique a aussi sa mission, qui se situe peut-être à un niveau différent. Nous nous intéressons peut-être davantage à des applications plus pratiques et immédiates.

Tout cela pour dire que les deux organisations ont chacune une mission distincte et complémentaire et qu'il nous faut travailler ensemble. Nous avons besoin d'un mécanisme institutionnel pour travailler ensemble.

Monsieur le président, voilà qui termine mon témoignage plutôt informel. Je vous inviterai à poser toutes les questions que vous jugerez bon de me poser.

Merci.

Le président suppléant (M. Flis): Monsieur Cowper, je vous remercie pour cet exposé très détaillé. Nous sommes heureux de pouvoir vous rencontrer au moins par l'entremise du support vidéo, car dans les déplacements que nous avons fait dans le Nord et dans l'Arctique, nous avons entendu parler de l'excellent travail que fait le Forum nordique depuis que vous en avez assumé la direction. Depuis quand présidez-vous l'organisation?

M. Cowper: Depuis un peu plus d'un an. J'en ai assumé la direction en septembre 1995.

Le président suppléant (M. Flis): En tout cas, continuez à faire ce que vous faites. Nous avons entendu des commentaires très favorables au sujet du travail que fait le Forum nordique.

Le premier à poser des questions sera Charlie Penson, du Parti réformiste.

M. Penson (Peace River): Merci, monsieur le président.

M. Cowper, je tiens moi aussi à vous souhaiter la bienvenue, et je vous remercie d'être là avec nous cet après-midi.

Je veux simplement vous dire que ma circonscription de Peace River, en Alberta, se trouve à une cinquantaine de milles du mille zéro de la route de l'Alaska. Nous avons deux grandes routes d'approvisionnement qui mènent à vos régions de l'Arctique en passant par l'Alaska et il y a aussi la route du Mackenzie qui mène à la partie ouest de l'Arctique canadien. Je suis conscient de l'importance de la région arctique, de l'abondance de ses ressources naturelles et du rôle qu'elle sera appelée à jouer dans le développement tant du Canada que des États-Unis.

Avez-vous l'appui du gouvernement américain pour l'incorporation de votre forum au Conseil de l'Arctique?

M. Cowper: Si je devais répondre brièvement, je dirais «pas encore». Je crois qu'il s'agit, à vrai dire, d'une question qui devra être décidée par tous les pays membres, mais je crois qu'il y a une certaine réticence à nous accorder un niveau de participation plus élevé aux délibérations du Conseil de l'Arctique.

Franchement, j'ai l'intention d'en parler à Bob Sensiney en janvier. Je communique régulièrement avec ce service du département d'État, car apparemment, je suis aussi président de la Conférence des pêches des pays riverains du Pacifique et ce sont les mêmes types dans la même division avec lesquels je dois souvent faire affaire.

Mais en bref, la réponse est non, pas encore.

M. Penson: Je voudrais poursuivre sur le même sujet. Dans notre cas, des provinces comme l'Alberta et la Colombie-Britannique et, bien sûr, le territoire du Yukon sont intéressés au premier chef à ce dossier. Bien que ces provinces ne soient pas vraiment arctiques, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons d'importantes routes d'approvisionnement. Le tourisme est un secteur important dans votre région et aussi dans la nôtre, le long de la route de l'Alaska, et cela me semble donc assez justifié.

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Je vais étudier votre proposition, car nous venons tout juste de la recevoir cet après-midi. J'ai trouvé cela intéressant à entendre. Je ne sais pas trop bien ce que l'on pourrait faire pour intégrer votre groupe, mais je crois que nous devrions l'envisager sérieusement, car cela permettrait de faire monter à bord des intervenants qui ne seraient pas nécessairement impliqués autrement.

Cela dit, je vais céder la parole à mon collègue ou à quelqu'un d'autre, monsieur le président.

Le président suppléant (M. Flis): Le suivant sur la liste est Lee Morrison qui est aussi du Parti réformiste.

M. Morrison (Swift Current - Maple Creek - Assiniboia): Ma question ne porte pas directement sur la raison de votre exposé, mais ce n'est pas tous les jours qu'on a la chance de poser une question qui prête peut-être un peu à controverse à un ancien gouverneur de l'Alaska.

La question de la harde de caribous de la Porcupine est depuis fort longtemps une pomme de discorde entre le Yukon et l'Alaska et, indirectement, entre le Canada et les États-Unis. Qu'en pensez-vous? Croyez-vous que l'implantation de l'industrie pétrolière dans la zone de mise bas aurait effectivement une incidence néfaste sur cette harde, ou bien croyez-vous que notre réaction est exagérée? Quelle est votre opinion?

M. Cowper: Je vais reprendre un témoignage que j'ai fait devant le comité sénatorial en 1989. Je me rappelle bien la date parce que c'était juste avant l'accident du Exxon Valdez, qui, soit dit en passant, est survenu pendant mon mandat.

Je suis d'avis que la prospection et l'aménagement de cette région peuvent se faire de manière à ne pas nuire à la mise bas des caribous. La harde de caribous est une ressource d'une énorme importance. Les caribous habitaient cette région longtemps avant l'arrivée des compagnies pétrolières. On peut aujourd'hui utiliser des techniques qui rendent possible d'explorer et de mettre en valeur cette région sans que cela ait de grandes répercussions sur le troupeau lui-même. Quant à savoir si les compagnies vont le faire ou non, cela dépendra du niveau de surveillance gouvernemental; j'ai insisté là-dessus dans mon témoignage devant le comité sénatorial. Si la surveillance gouvernementale n'est pas assez serrée, alors je crois qu'il y a danger. Par contre, pourvu qu'il y ait une surveillance gouvernementale, la prospection et la mise en valeur peuvent n'avoir peut-être même aucune répercussion sur les caribous.

Les caribous, bien sûr, ne sont là que pendant une petite partie de l'année. Ils migrent dans cette zone pendant l'été. Ils mettent bas sur le versant nord ou dans les collines, après quoi ils poursuivent leur migration pour se rendre jusqu'à l'eau, afin de se débarrasser des insectes. Je crois que ce cycle migratoire ne doit pas être perturbé du tout.

Mais la plupart des travaux de prospection que nous faisons en Alaska se font en hiver; autrement, cela perturbe la toundra. On ne peut pas transporter le matériel dans la toundra pendant l'été, car cela laisse des traces qui durent des centaines, peut-être des milliers d'années. Nous ne l'autorisons pas en Alaska.

Je suppose que je peux répondre en une phrase: je crois que cela peut se faire de manière à ne pas déranger la harde de caribous. Nous ne voulons certainement pas la déranger.

Je signale en passant que mon témoignage devant le congrès en 1989 n'a pas été bien reçu par la délégation de l'Alaska au congrès à cette époque. Les congressistes de l'Alaska trouvaient que c'était une position un peu molle. Je leur ai rétorqué que c'était ma position et que c'était moi qui devais me battre pour me faire réélire. Mon point de vue n'a donc pas nécessairement prévalu en Alaska - c'est-à-dire le fait qu'il doit y avoir une surveillance gouvernementale rigoureuse de toutes les activités d'exploration et de mise en valeur dans cette région. J'ai dit également que je croyais qu'une partie de la région - je ne peux pas la qualifier de sensible, ce n'est pas le mot juste - , mais disons une zone critique pour la mise bas devrait rester interdite, mais pas l'ensemble de la plaine côtière. Je pense que ce serait exagéré.

.1605

M. Morrison: Merci de vos commentaires.

Le président suppléant (M. Flis): Le prochain sur la liste, monsieur Cowper, est Beryl Gaffney, du parti ministériel.

Mme Gaffney (Nepean): Bonjour monsieur Cowper. Bienvenue à notre comité. Même si vous êtes très loin, nous avons l'impression que vous êtes présent dans la salle, ici même.

J'ai fait partie d'une équipe qui est allée en Russie pour étudier les dossiers circumpolaires. L'une des grandes déceptions de notre voyage est le fait que nous n'avons pu nous rendre à Mourmansk. Nous étions censés y aller, mais le brouillard nous en a empêchés.

Je crois comprendre que vous avez beaucoup travaillé en Russie. Je me demande si vous pourriez nous faire part de ce que vous y avez appris ou de ce que vous étudiez.

Avant de vous céder l'antenne, je voudrais dire, au sujet du Conseil de l'Arctique et du Forum nordique, qu'il existe aussi une autre tribune qui s'appelle le Barents Euro-Arctic Council. Vous le connaissez probablement. Les pays scandinaves et la Finlande font partie de ce conseil.

On dirait presque que ces conseils et forums divers se chevauchent ou font double emploi. J'en viens à me demander si chacun s'occupe des mêmes dossiers ou s'ils ont tous des activités différentes. Peut-être pourriez-vous répondre à cela aussi.

M. Cowper: Merci. Je vais commencer par la dernière question. Le Conseil de Barents comprend deux niveaux. Il y a un niveau fédéral auquel participent les gouvernements nationaux. Il y a aussi un niveau régional de communication entre les Norvégiens - je crois que les Finlandais en font partie également - et les régions de Mourmansk et d'Arkhangelsk. J'ignore si la Carélie en fait partie ou non.

Ce conseil a négocié avec beaucoup de succès bon nombre d'initiatives économiques conjointes qui font appel à des investissements norvégiens ou finlandais afin d'implanter de la technologie à Mourmansk et à Arkhangelsk.

Le groupe de Barents existe en partie en raison d'un conflit frontalier en matière de pêche. Nous trouvons que c'est important, notamment parce que c'est la première fois, du moins à notre connaissance, que la Russie a fait un compromis relativement à sa zone de pêche pour faire avancer un dossier plus général, à savoir la gestion des pêches dans l'ensemble de la région de Barents.

Nous négocions actuellement pour établir des liens formels avec le groupe de Barents. Mon actuelle directrice adjointe déménage le mois prochain à Bodo, en Norvège. Elle y travaillera à temps partiel comme représentante du Forum nordique. Elle travaillera également à temps partiel avec le groupe de Barents. Elle parle très couramment le russe et a beaucoup d'expérience là-bas, ce qui explique probablement pourquoi on la réclame. Nous allons donc coopérer très étroitement avec le groupe de Barents.

En fait, certains dossiers dont il s'occupe sont effectivement les mêmes. Ce que nous essayons de faire, c'est non pas tellement d'agir en parallèle, mais plutôt d'intégrer un plus grand nombre de nos membres de notre peuple, par exemple la République de Komi, qui n'est pas membre du groupe de Barents, dans certains de ces projets conjoints. Ce sera probablement à nous de trouver le financement pour la participation des Komi.

Mais nous n'aimons pas le dédoublement des efforts. Quand nous voyons que quelqu'un d'autre fait quelque chose d'utile, nous voulons seulement permettre à nos gens de prendre le train en marche, pour ainsi dire. Nous croyons que nous sommes déjà assez peu nombreux à tenter de résoudre ces problèmes nordiques, alors n'allons pas créer des conflits de compétence.

Votre première question portait sur ce qui se passe en Russie. Je vais essayer de vous en donner un aperçu, de mon point de vue. C'est particulièrement pertinent pour le Nord et l'Extrême-Orient. La plupart des gouvernements de ces régions font partie de notre organisation.

Pendant très longtemps, le Nord a été considéré comme un entrepôt de ressources pour le centre et l'Extrême-Orient était bien sûr considéré comme une sorte de place forte militaire, une forte de dernier bastion contre les ennemis présumés qui pouvaient venir de là. En conséquence, on n'a pas laissé ces régions se développer comme elles l'auraient peut-être fait naturellement. De plus, le centre contrôlait la mise en valeur des ressources et il donnait bien sûr de l'argent à toutes ces régions.

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Au moment de l'éclatement de l'Union soviétique, le centre, c'est-à-dire Moscou, n'a pas pu continuer à envoyer des fonds comme par le passé. Moscou avait subventionné pour ainsi dire toute l'économie de l'Extrême-Est et du nord du pays, en échange de quoi les ressources étaient à la disposition de l'État. Mais les autorités de Moscou disent maintenant qu'elles n'ont plus d'argent à envoyer dans les régions. Les gouverneurs régionaux demandent alors, puisqu'il n'y a plus de crédit, à pouvoir disposer des ressources. Il en est résulté la signature de toute une série d'ententes séparées entre Moscou et les gouvernements régionaux respectifs.

Mais, en même temps, il se passe des tas d'autres choses. Ainsi, dans le Tyumen, qui est une province du centre de la Sibérie - et je signale en passant que la province d'Alberta a conclu un arrangement avec cette province, ce dont je la félicite - , il y a deux sous-régions, celle de Khanty-Mansiysk et celle de Yamal-Nenets. Le pétrole et le gaz de Russie viennent surtout de ces deux okrugs, comme on les appelle. On dit que ce sont des régions autonomes, mais en réalité, elles ne sont pas véritablement autonomes, et pour nous c'est un petit peu difficile à comprendre.

Ces régions veulent se séparer du Tyumen. Elles ne comprennent pas pourquoi elles devraient continuer à envoyer de l'argent dans la capitale. C'est un refrain que l'on entend aussi ailleurs, bien sûr, et il y a donc des divergences politiques à ce sujet au sein des gouvernements régionaux.

Le danger, à mon avis, est qu'il n'y a plus de système structuré en Russie. Le danger général est que la Russie doit se redéfinir et elle a du mal à trouver son orientation. Le danger immédiat, pour les régions du Nord et de l'Extrême-Est, est que l'argent qui venait jusqu'ici de sources gouvernementales passe maintenant par des canaux privés douteux, et le gouvernement n'a plus aucun contrôle. Il n'y a pas véritablement de comptabilité publique en place. Je connais des gens dans notre pays qui trouveraient ça formidable, mais je ne pense pas que cela convienne à l'exercice des responsabilités gouvernementales.

Je crois donc que la création d'un bon système uniforme de comptabilité commune dans toute la Russie, dans certaines limites raisonnables, permettant de garantir des sources de revenu stables non seulement au gouvernement central mais aussi aux gouvernements régionaux, est une priorité. La société russe, traditionnellement, aime le secret, si bien que les autorités ne veulent pas demande à une entreprise comme l'un des six ou sept grands cabinets de comptabilité, de leur concevoir un système qui fonctionne. Elles refusent de communiquer à Deloitte et Touche ou à l'un de ces grands cabinets l'information dont ils auraient besoin pour mettre au point un système qui marche.

Il est donc essentiel que nous prenions les choses en main, mais seulement jusqu'à un certain point. Nos gouvernements doivent aller sur place et faire de leur mieux pour aider les Russes, car le chaos menace effectivement de s'installer. On peut y remédier, mais l'Ouest devra s'investir un peu plus.

Merci.

Mme Gaffney: Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. Flis): Merci, monsieur Cowper.

Nous passons maintenant la parole à M. Sarkis Assadourian qui est, lui aussi, du parti ministériel.

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M. Assadourian (Don Valley-Nord): D'après vos propos, j'ai le sentiment que le Forum nordique poursuit deux objectifs. D'une part la construction de logements, et de l'autre la création de flux est-ouest plutôt que nord-sud. Est-ce bien cela?

M. Cowper: Nous voulons nous assurer que les techniques qui sont mises au point au Nord soient ensuite diffusées dans les régions avoisinantes; c'est exact. Nous voulons être un centre de communication du savoir relatif au Nord.

M. Assadourian: Dans ce cas, quelle différence y a-t-il exactement entre les quatre conseils cités par ma collègue - le Conseil de Barents, le Conseil nordique, le Conseil de l'Arctique et le Forum nordique? Ne suffisent-ils pas à la poursuite de vos deux objectifs, et pourquoi faudrait-il créer une nouvelle structure? Voilà ma première question.

M. Cowper: Si le Conseil de l'Arctique veut se faire un vecteur de technologie dans le Nord, parfait. On ne sait pas encore très bien ce que le Conseil de l'Arctique va faire, et j'ai du mal à porter un jugement. À mon avis, cependant, ce type de travail se fait mieux dans une organisation qui représente les gouvernements régionaux plutôt que nationaux.

Les gouvernements régionaux, par nature, sont mieux au courant des besoins locaux. En Alaska, nous n'aimerions pas beaucoup par exemple devoir négocier avec le département d'État américain pour avoir accès à des technologies. Nous n'aimerions pas que ce soit lui qui s'en charge. Pour ce genre de questions, nous préférons travailler au sein d'une organisation comme le Forum nordique.

Le Conseil de l'Arctique a un rôle très important. Il suscite notre enthousiasme, mais ce ne sera sans doute pas un lieu de diffusion des technologies nécessaires au Nord. Voilà en gros ma réponse.

M. Assadourian: Vous représentez neuf pays, et peut-être 20 gouvernements régionaux. Comment les décisions sont-elles prises? Est-ce que ce sont les gouvernements régionaux qui décident, ou est-ce que ce sont les États nationaux qui décident pour les gouvernements régionaux?

M. Cowper: Les grandes décisions de politique sont prises à la réunion annuelle du conseil d'administration. À cette réunion, les gouverneurs des régions votent sur les propositions soumises par le secrétariat. Voilà la règle générale. Ensuite, le secrétariat applique la politique qui a été décidée. Il y a pas mal de projets qui peuvent associer trois ou quatre régions membres, et nous coordonnons ce genre d'activités.

Mais nous ne sommes pas une instance politique. Nous ne faisons pas de déclarations concernant la politique à appliquer dans l'Arctique. Si nous avons le sentiment que certaines décisions sont contraires aux intérêts de nos populations, nous allons nous manifester, mais nous ne discutons pas de politiques globales à l'échelle de l'Arctique. Là n'est pas notre objet. Ce serait à proprement parler la fonction du Conseil de l'Arctique.

M. Assadourian: Une petite question, si vous me le permettez: je viens de compter et je vois que la Russie a 11 représentants alors que les États-Unis n'en ont qu'un. Comment arrivez-vous à vous en accommoder?

M. Cowper: Comment puis-je m'en accommoder?

M. Assadourian: La Russie peut donc disposer de 11 bulletins de vote, alors que vous n'en avez qu'un. Comment avez-vous laissé les choses en arriver là?

.1620

M. Cowper: La réponse, bien sûr, est que chaque État est souverain et que personne n'abandonne ses droits, tout au moins en ce qui concerne le Forum nordique. S'ils cherchent à nous imposer quoi que ce soit, nous refusons. C'est aussi simple que cela.

M. Assadourian: Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. Flis): Merci, monsieur Assadourian.

Monsieur Cowper, pourrions-nous profiter de votre présence parmi nous pour vous demander ce que le Forum nordique aimerait voir inscrire à l'ordre du jour du Conseil de l'Arctique pendant ses deux premières d'existence, puisque le Canada présidera? Si nous choisissons mal nos priorités, cela pourrait bloquer toute créativité et toute réflexion productive. Puisque vous avez déjà une certaine expérience des régions de l'Arctique nord, quelles sont les questions qui, à votre avis, devraient de façon prioritaire retenir notre attention pendant les deux premières années?

M. Cowper: Monsieur le président, si je ne me trompe, le Conseil de l'Arctique a l'intention de pouvoir participer aux discussions sur la SPEA et le PCFFA. Cela me paraît tout à fait légitime.

Mais permettez-moi d'ajouter quelque chose. J'ai déjà dit qu'il était important qu'on s'entende sur certaines normes environnementales pour la mise en valeur des ressources de l'Arctique. Il n'est pas dans l'intérêt de qui que ce soit que l'on se fasse concurrence dans ce domaine et que la principale différence soit - j'en ai déjà parlé - qu'un des pays concernés n'ait aucune législation environnementale. Ça ne serait pas bon, et je crois que c'est un des sujets les plus importants sur lesquels le Conseil de l'Arctique devra se pencher. Nous serons heureux de prêter notre concours à cet effort, puisque les gouvernements régionaux ont de plus en plus de responsabilités, non seulement pour leur propre développement, mais aussi pour ce qui est de la surveillance de l'ensemble de l'exploitation de l'Arctique. C'est, à notre avis, une question très importante et tout à fait d'actualité.

Ensuite, la question des compétences des peuples autochtones doit également faire partie de l'ordre du jour. À mon avis, elle sera toujours tranchée par les gouvernements nationaux, chaque pays ayant, en ce qui concerne ses minorités, une histoire particulière. Mais c'est certainement une question que le Conseil de l'Arctique doit pouvoir discuter; d'ailleurs, il le fait déjà.

J'aimerais aussi que le Conseil de l'Arctique se penche sur la question de l'élimination des déchets nucléaires, dont la région arctique est truffée. C'est un problème angoissant pour l'Arctique. Une partie de ces déchets ont été déjà jetés quelque part dans l'océan. Personne ne sait exactement ce qu'il en advient. Et ce n'est d'ailleurs pas seulement un problème pour l'Arctique. Il suffit de regarder ce qui se passe dans les autres régions russes, et vous verrez que l'Arctique, que vous le vouliez ou non, est déjà une décharge de déchets radioactifs.

Il y a aussi d'autres questions qui se posent, monsieur le président, mais j'en resterai là.

Le président suppléant (M. Flis): Lorsque le comité s'est rendu à Yellowknife, nous avons assisté à une fort intéressante présentation de mode de fourrures du Nord et de l'Arctique. Nous avons été très impressionnés par certains styles modernes, futuristes... des combinaisons de fourrures et de textiles, etc. C'est une industrie remarquable qui pourrait contribuer au développement de l'économie de l'Arctique et du Nord, tout en permettant aux Autochtones de préserver leur style de vie traditionnel. Comme vous le savez, nous continuons à avoir des difficultés avec l'Union européenne. Et vous? Avez-vous réussi, et pouvez-vous nous en parler, à convaincre les Européens que tout embargo sur le commerce des fourrures accule certains Autochtones au suicide, à l'alcoolisme et à la toxicomanie, puisqu'ils se retrouvent sans base de subsistance?

.1625

M. Cowper: Si vous le permettez, je vais d'abord vous faire part d'une petite anecdote. J'étais il y a quelques années, en Alaska, dans un petit village isolé, Arctic Village. Il y avait une réunion d'Autochtones qui ont besoin des fourrures pour leur subsistance. Il y avait un représentant cri, du nord du Québec, si je ne me trompe, et on a parlé de la décision du Parlement européen concernant l'embargo sur les fourrures d'animaux sauvages. Il y avait un téléphone dans le village, et le représentant cri a dit: «Je vais appeler Mme Thatcher». Et c'est ce qu'il a fait. Il a appeléMme Thatcher, a pu lui parler au téléphone, d'une cabine téléphonique en Alaska, à Arctic Village, et je crois qu'il a réussi à obtenir son appui contre cet embargo.

Toujours dans cette même veine, les Alaskiens eux aussi font le commerce de la fourrure d'animaux sauvages, et nous appuyons les efforts déployés par le Canada - et espérons-le d'autres pays - pour persuader les Européens que les méthodes utilisées ne sont pas cruelles pour les animaux, et que cette activité contribue à maintenir le mode de vie traditionnelle de nos Autochtones. Les défenseurs des droits des animaux ne sont pas toujours très réceptifs à cet argument. Cependant, le piégeage est une activité légitime. Il se pratique depuis longtemps et il a une valeur indubitable pour les Autochtones, et sur ce dossier, nous sommes avec vous.

Le président suppléant (M. Flis): Monsieur Cowper, si vous voulez encore patienter, nous avons une autre question à poser. La Loi américaine de protection des mammifères marins interdit l'importation de produits de mammifères marins aux États-Unis. Le Canada et d'autres pays ont essayé de faire modifier cette loi, sans grand résultat. Avez-vous quelque chose à nous dire là-dessus?

M. Cowper: Je sais que le Forum nordique vous appuierait là-dessus. C'est d'ailleurs une question qui a fait l'objet de discussions à certaines de nos réunions. À ce sujet, j'aimerais moi-même pouvoir acheter une défense de narval, mais...

C'est une question que la délégation alaskienne du congrès a l'intention de porter à l'attention du gouvernement américain actuel, en y mettant tout le poids nécessaire. Nous comprenons effectivement l'obstacle que cela représente, et nous aimerions pouvoir améliorer la situation, au moins pour permettre le commerce entre les territoires et les régions arctiques.

Le président suppléant (M. Flis): Merci.

Certains ont prétendu, par le passé, que la constitution du Conseil de l'Arctique a pris très longtemps parce que l'Alaska ne se joignait pas à l'effort général pour ce qui était de la protection des droits des Autochtones et des progrès en matière de développement durable. À vous écouter, j'ai plutôt l'impression qu'au contraire l'Alaska aurait été à la pointe du combat dans ces domaines. D'où vient ce malentendu, ou est-ce que malgré tout il y a quelques vérités à l'origine de tout cela?

M. Cowper: L'Alaska, vous pouvez l'imaginer, ne parle pas souvent d'une seule voix. Nous sommes évidemment aussi divisés que la plupart des autres populations du Nord. Mais en Alaska - et c'est certainement vrai pour nos trois membres du Congrès - on ne voulait pas que les gouvernements nationaux fassent des concessions sur certaines questions qui, à notre avis, devaient être absolument de la compétence du gouvernement de l'État. Pour dire les choses un peu plus brutalement, on n'avait pas une grande confiance dans le département d'État américain.

En tout cas, on sait maintenant qu'il y a un Conseil de l'Arctique... qu'il est là pour durer, et que les États-Unis ont un rôle à y jouer. Je pense qu'à partir de maintenant notre délégation au Congrès sera disposée à collaborer. Les trois membres alaskiens du Congrès président d'ailleurs des comités importants, et je pense qu'ils comptent.

.1630

Le président suppléant (M. Flis): Le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Francis LeBlanc, aimerait vous poser une question.

M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands - Canso): Merci, et bienvenue à M. Cowper. J'ai une question à vous poser, et peut-être une seconde.

Au mois de mai de cette année, nous nous sommes rendus dans le Yukon pour la mission circumpolaire de l'année, et le gouvernement du Yukon nous a dit qu'il s'était retiré du Forum nordique. Il pensait que c'était un organisme utile, mais il avait le sentiment de ne pas en retirer de réels avantages. Pourtant, vous nous avez dit que le Yukon faisait partie du Forum nordique. En fait-il à nouveau partie, ou en a-t-il toujours fait partie?

M. Cowper: Il en fait à nouveau partie. Nous le savons, puisqu'il nous a envoyé de l'argent il y a deux semaines.

Il y avait eu une querelle entre Tony Penikett et son successeur, si je ne me trompe. Depuis que je suis là, j'ai rouvert le dossier, et je crois que nous avons obtenu de bons résultats. Je crois que le Yukon va à nouveau y trouver avantage.

Le président suppléant (M. Flis): Monsieur LeBlanc, cette vidéoconférence marche si bien que le président aimerait vérifier si ça fonctionne aussi bien dans les deux langues officielles. Le secrétaire parlementaire pourrait peut-être alors poser sa question en français, et M. Cowper nous dirait s'il entend bien l'interprète.

[Français]

Monsieur LeBlanc, en français, s'il vous plaît.

M. LeBlanc: Je ne m'attendais pas à devoir poser ma question en français, mais je vais le faire quand même.

Étant donné le fait que notre témoin a été gouverneur de l'État de l'Alaska, j'aimerais savoir s'il pourrait m'éclairer sur les rapports qu'entretiennent le gouvernement central des États-Unis et celui de l'Alaska quant à la position américaine touchant à la coopération circumpolaire. Qu'en est-il, par exemple, des questions environnementales de part et d'autre de la frontière entre le Canada et l'Alaska, comme les moeurs du caribou et du porc-épic, entre autres, et de certaines idées que vous avez mentionnées vous-même, monsieur le président?

J'aimerais savoir de notre témoin si la position américaine concernant les dossiers circumpolaires et le Conseil de l'Arctique lui-même est mise de l'avant par l'État ou surtout par le gouvernement américain. Merci.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Flis): Monsieur Cowper, vous avez déjà répondu à des questions concernant la harde de caribous. Le secrétaire parlementaire est arrivé un peu en retard, voilà pourquoi il a répété cette même question. Vous n'avez peut-être pas besoin de répondre à toute la question, mais simplement à ce dont vous n'avez pas parlé tout à l'heure.

Mais d'abord, comment était l'interprétation?

M. LeBlanc: D'abord, comment était le français?

M. Cowper: C'était très clair et excellent. Merci, monsieur LeBlanc.

.1635

En Alaska, les lignes de démarcation juridictionnelle suivent la propriété foncière plus que toute autre chose. Le gouvernement fédéral est propriétaire d'une partie importante des terres de l'Alaska, 60 p. 100, l'État en possède 28 p. 100 et les propriétaires privés 12 p. 100. Si vous faites le calcul, vous verrez qu'il ne reste pas grand-chose.

Le Arctic National Wildlife Range occupe des terres du gouvernement fédéral, et toutes les décisions le concernant sont prises au Congrès. Il est bien évident que notre délégation au Congrès cherche à influencer fortement ces décisions. Il n'en reste pas moins qu'elles sont prises à Washington.

Pour ce qui est des normes environnementales, l'organisme réglementaire fédéral en matière de protection de l'environnement, l'EPA, fixe certaines normes planchers, et l'État - c'est-à-dire le ministère de la Conservation environnementale - doit fixer des normes qui ne soient pas en deçà de celles de l'agence fédérale. Nous pouvons être plus exigeants, et c'est ce que nous avons fait dans certains cas. Si les normes sont approuvées par l'État fédéral, c'est ensuite l'Alaska qui s'occupe de la réglementation et de l'exécution sur le terrain.

Pour ce que l'on a pu faire au sujet du Conseil de l'Arctique, je crois savoir que tout remonte à une déclaration ancienne du président Clinton, dans laquelle il approuvait la participation des États-Unis au Conseil. Comme vous le savez, les États-Unis avaient, jusqu'alors, refusé de participer aux discussions préliminaires.

Tout a donc dépendu d'une décision fédérale - une bonne décision, à mon avis - et, à partir de là, il appartient à l'Alaska de se faire entendre au mieux de ses possibilités. L'État d'Alaska a assisté jusqu'ici aux réunions du Conseil de l'Arctique comme observateur, et je pense qu'il aimerait bien voir le Forum nordique participer aux discussions à un niveau plus élevé, afin que les intérêts des gouvernements régionaux puissent être pris en compte dans l'ensemble du processus.

Merci.

Le président suppléant (M. Flis): Monsieur Cowper, mesdames et messieurs, voilà qui clôt notre vidéoconférence avec M. Cowper, directeur général du Forum nordique à Anchorage, en Alaska.

Monsieur Cowper, si vous aviez été à Ottawa, ou nous à Anchorage, la seule différence eût été qu'à la fin de la réunion nous aurions pu échanger nos cartes de visite. Puisque ça n'est pas possible, j'aimerais vous présenter notre greffière, Janice Hilchie. Si vous vous trouvez à un moment ou à un autre à Ottawa, vous pourrez toujours vous adresser à elle si vous voulez prendre contact avec l'un des membres du Comité des affaires extérieures.

Merci de nous avoir fait part de vos idées et veuillez féliciter les participants de votre Forum nordique pour leur travail de pionniers. Nous sommes heureux qu'à votre avis, vos activités et celles du Conseil de l'Arctique et des autres conseils ne font pas double emploi. Il s'agit de travailler ensemble et de coordonner toute la recherche qui se fait, en espérant que nous pourrons avoir une meilleure planète où vivre. Au nom de tout le comité, merci.

M. Cowper: Merci, monsieur le président.

Le président suppléant (M. Flis): Mesdames et messieurs, cela clôt cette partie de notre réunion.

Avant que nous ne nous séparions, je rappellerai que M. Penson m'a donné avis, au début de la réunion, d'une motion qu'il aimerait soumettre et discuter brièvement. Je vais déclarer une suspension de séance d'une minute, pendant que votre président reprend sa place. Pendant cette pause, M. Penson pourra parler de sa motion aux députés.

.1639

.1642

Le président: Je déclare la séance ouverte.

M. Penson a une motion à déposer.

M. Penson: Monsieur le président, j'ai effectivement une motion à soumettre au comité. Je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps pour en discuter, mais j'aimerais, dans le bref laps de temps qui nous reste, aborder la question de l'entente sur le bois d'oeuvre avec les États-Unis et ses conséquences pour notre industrie forestière.

Au printemps, au moment où cette entente a été négociée, le ministre nous a dit qu'elle représentait le résultat d'une consultation avec les entreprises, lesquelles voulaient que l'on s'arrange avec les États-Unis parce qu'elles craignaient qu'ils imposent des droits compensateurs. Elles le craignaient parce que les États-Unis avaient manoeuvré et changé leur législation de sorte que nous ne pouvions plus espérer avoir gain de cause auprès d'un groupe spécial de l'ALENA, et cela est effectivement vrai.

Monsieur le président, je pense que l'industrie du bois d'oeuvre n'a pas véritablement compris les conséquences possibles de ce système de quotas, qui impose à un secteur industriel assez complexe une sorte de système de gestion de l'offre au lieu et place d'une économie de marché. Cette entente a été négociée par les États-Unis pour satisfaire quatre ou cinq grandes multinationales de leur pays, en faisant monter le prix du bois, ce qui effectivement a été le cas.

À mon avis, nos industriels savaient de façon générale - les associations le savaient peut-être, mais j'en doute - qu'il y avait une autre solution au problème que ce système de contingentement; elle consistait à saisir l'Organisation mondiale du commerce en cas de mesure compensatoire américaine. J'ai parlé à beaucoup d'entrepreneurs qui déclarent n'avoir pas vraiment compris quelles en seraient les conséquences. Certains ne savaient même pas que l'Organisation mondiale du commerce pouvait être saisie comme un groupe spécial de l'ALENA pour résoudre ce genre de litige. Ils pensaient que l'OMC n'avait pas autant de pouvoir et ne se rendaient pas compte qu'on pouvait s'adresser à elle.

Je dirais que l'industrie du bois d'oeuvre connaît des difficultés multiples. Il y a une semaine j'ai envoyé un sondage par fax à environ 500 entreprises qui ont des quotas. Nous avons reçu 110 réponses, et cela semble être à peu près la fin. Quatre-vingt-dix pour cent de ceux qui ont répondu se sont déclarés mécontents du système des quotas. Nous demandions aussi si ces entrepreneurs seraient prêts à dénoncer cet accord et, en cas de mesures de représailles, à apporter l'affaire devant l'Organisation mondiale du commerce. À cette deuxième question, 75 à 80 p. 100 ont répondu positivement.

.1645

Beaucoup de grandes entreprises ont beaucoup d'argent, certaines d'entre elles d'ailleurs sont des compagnies à capitaux américains, installées au Canada. Environ 40 p. 100 des entreprises qui exploitent le bois au Canada sont des filiales de compagnies américaines. Elles ne vont donc certainement pas répondre positivement à ce genre de questions, étant donné que cette entente peut leur rapporter gros aux États-Unis. C'est d'ailleurs ce qui se passe.

Je crois qu'il y a quand même une autre solution que notre secteur ne connaissait pas, et même s'il était au courant à l'époque, il a en tout cas changé d'avis en ce qui concerne cette entente, car celle-ci est source de toutes sortes de problèmes, particulièrement pour les petites entreprises. Nous devrions utiliser les possibilités de recours que le Canada a négociées et dont nous pouvons profiter.

Il a fallu neuf ans et la dernière série de négociations du GATT pour que l'on crée une Organisation mondiale du commerce et un système de réglementation, quelque chose qui nous a paru à tous une nécessité. Le Canada est une nation commerçante. Ce fut l'un des premiers partisans de ces grandes structures de réglementation, que nous avons précisément l'occasion d'utiliser maintenant. Il serait coupable de ne pas le faire.

Au fur et à mesure que le temps passe, ce litige sur le bois d'oeuvre ne peut qu'empirer. Il est temps que notre comité se pose la question de l'annulation de cet accord.

Le président: Est-ce que je pourrais poser une question à M. LeBlanc?

Puisque le secrétaire parlementaire du ministre du Commerce n'est pas là, pourriez-vous défendre le dossier, ou voulez-vous que nous attendions que M. MacDonald soit ici?

M. LeBlanc: Monsieur le président, je ne peux certainement pas appuyer une motion qui nous tombe dessus comme cela et qui porte sur une question aussi complexe que cet accord du bois d'oeuvre, avec toutes les conséquences que cela peut avoir pour nos échanges, même si je devais être d'accord avec ce que M. Penson vient juste de dire.

Je pense que la façon dont cette motion nous tombe dessus n'est pas acceptable. Peut-être que le comité devrait se saisir de cette question de l'accord sur le bois d'oeuvre, mais, à mon avis, nous ne pouvons pas débattre d'une motion comme celle-ci à l'improviste. Je ne veux pas discuter de cette motion sur le fond, car nous ne pouvons pas prendre de décision aussi grave en comité seulement après en avoir discuté deux minutes avec l'auteur de la motion.

Si la motion est déposée, je demanderai que nous la rejetions, tout en étant disposé peut-être à envisager que nous parlions de la possibilité d'étudier plus longuement cette question. En tout cas, le comité ne peut pas décider d'une question aussi grave en disposant de si peu d'information.

M. Penson: Est-ce que je peux répondre rapidement?

Le président: Oui, si M. Sauvageau est d'accord. Oui, répondez rapidement, et ensuite nous passerons à M. Sauvageau.

M. Penson: La difficulté vient en partie de ce que nous posons des questions à ce sujet à la Chambre depuis pas mal de temps.

Une voix: Il y a urgence.

M. Penson: Comme mon collègue vient de le dire, il y a urgence, d'une certaine manière. Les petites entreprises en particulier nous disent qu'elles ne pourront pas tenir plus de quelques semaines. Certaines d'entre elles n'ont d'ailleurs même pas eu la moindre part de quota.

Il y a, dans ma circonscription, une scierie qui a acheté pour un million de dollars d'arbres à abattre. Elle avait des difficultés de trésorerie l'an dernier parce qu'elle se préparait à l'opération et avait dépensé 400 000 $ de travaux de réfection de l'usine, pour ensuite n'obtenir aucune part de quota. Il y a un article spécial concernant les préjudices subis. Mais on nous dit au ministère qu'il faudra deux ou trois mois avant que l'on obtienne une décision là-dessus; or, ces petites compagnies sont aux abois et risquent de devoir fermer leurs portes d'ici là.

Le ministre du Commerce international, comme vous le savez, n'est pas très souvent à la Chambre ces jours-ci, peut-être un jour sur quinze ou vingt. Et le secrétaire parlementaire du ministre n'a pas été parmi nous depuis pas mal de temps.

Le président: On me dit qu'il va rentrer ce soir. Il sera donc là demain.

M. Penson: Oui, peut-être.

Peut-être qu'effectivement cela vous tombe dessus un peu brutalement, mais si l'on veut en faire l'étude pendant deux ou trois mois, ça ne me paraît pas être une solution, parce que beaucoup d'entreprises auront eu le temps, d'ici là, de subir des préjudices graves. Nous n'avons pas le temps de procéder de cette façon-là.

[Français]

Le président: Monsieur Sauvageau.

M. Sauvageau (Terrebonne): Je crois que M. Penson et M. LeBlanc ont bien résumé. On va consacrer huit ou neuf mois au dossier circumpolaire. M. Bergeron me disait que vous aviez pris plusieurs mois pour discuter d'Haïti. Je ne crois pas que rapidement, en 10 minutes, on doive prendre une décision sur une question aussi importante que celle-là.

.1650

Nous devons aussi montrer, bien que je sache que le lobby des producteurs de bois est très puissant, une certaine forme d'imperméabilité et tenir nos discussions rapidement et de la façon la plus rationnelle qui soit au sein du comité. Je ne suis pas contre le fait qu'on en discute, mais adopter une position tranchée aujourd'hui en deux minutes sur une proposition comme celle-là me semblerait un peu dangereux. Merci.

[Traduction]

Le président: M. Flis, puis M. Morrison et M. Dupuy.

M. Flis (Parkdale - High Park): Je ne connais pas le dossier dans le détail, mais cette motion n'engage pas le comité. On demande simplement de transmettre une demande au gouvernement. Cela n'engage personne. Je pense donc qu'elle est bien formulée.

Nous avons tous des réunions de caucus demain, et le comité se retrouve jeudi. Nous pourrions donc peut-être présenter cette motion à nos caucus respectifs pour qu'on puisse avoir leur avis, et on pourra ensuite consacrer 10 minutes jeudi matin à l'adoption, ou non, de la motion. Il s'agit effectivement d'une situation d'urgence.

Le président: Nous pourrions peut-être au moins remettre la chose à plus tard; comme vous l'avez dit, entre maintenant et 5 heures, vouloir trancher d'une question aussi grave et risquer...

Monsieur Penson, pourriez-vous nous expliquer pourquoi à votre avis un panel de l'OMC aurait plus de chance de trancher en faveur du Canada qu'un groupe spécial de l'ALENA? De toute évidence, vous avez été conseillé par quelqu'un. Je serais cependant surpris que le droit appliqué par le panel de l'OMC diffère de celui de l'ALENA.

Ce qui se passerait, c'est que les choses seraient bloquées pendant un an, pendant toute la procédure. À mon avis les droits compensatoires seraient prélevés aux États-Unis de toute façon, et il faudrait ensuite essayer de les récupérer, comme la dernière fois.

Je pense que les membres du comité aimeraient connaître les détails d'une procédure aussi compliquée. Vous vous souviendrez de la dernière fois où nous avons eu un tel litige avec les États-Unis. Ils ont levé un droit compensatoire que nous avons ensuite essayé de récupérer. Six milliards de dollars, c'était incroyable.

M. Penson: Mais souvenez-vous, monsieur le président, nous les avons effectivement récupérés. Chaque fois que nous nous sommes présentés à une procédure d'arbitrage contre les États-Unis, ou nous avons gagné ou ils se sont retirés du procès.

Le président: Oui, mais vous avez dit les choses tout à fait comme elles sont: les règles de l'ALENA leur permettaient de changer leur législation après coup, et c'est ce qu'ils ont fait. Voilà pourquoi nous sommes maintenant dans cette situation difficile. Et voilà également pourquoi, à mon avis, cette modification de la législation aura le même effet aux yeux de l'OMC, et nous n'avons pas plus de chances que celle-ci tranche en notre faveur que le groupe spécial de l'ALENA.

Ce n'est évidemment qu'une supposition de ma part. Je ne veux pas dire que j'en connais plus que vous là-dessus, mais je pense que les membres du comité veulent être mieux informés avant de pouvoir voter sur votre motion.

M. Penson: Je pense que c'est un petit peu subjectif. Le Canada a négocié pendant neuf ans pour que ce système voie le jour. Au moment où on peut s'en prévaloir, pour savoir si nous avons raison ou non - et à chaque fois que nous nous sommes présentés devant un groupe bilatéral, nous avons eu gain de cause ou les États-Unis se sont retirés du procès - nous semblons hésiter à saisir l'OMC.

Il est probable que des droits compensatoires seront imposés de façon provisoire. Il faut de toute façon que ce genre de mesure soit appliquée pour que nous puissions saisir l'OMC. Mais nous avons toute raison de croire que nous obtiendrions gain de cause à l'OMC, où l'on tiendrait compte du fait que les États-Unis ont manoeuvré et modifié leur loi. Toute personne raisonnable interpréterait cela comme un truc utilisé par les États-Unis pour empêcher le Canada de gagner. Ils ont fait ce changement pour que, en arbitrage auprès de l'ALENA, nous ne puissions plus obtenir gain de cause.

Le président: C'est bien.

M. Morrison, M. Dupuy et ensuite M. Bergeron.

M. Morrison: J'aimerais faire quelques commentaires de nature politique.

Nous savons tous que cet accord a été fait sur mesure pour plaire au lobby très puissant du bois aux États-Unis, qui contrôle, comme l'a dit mon collègue, environ 40 p. 100 du même secteur au Canada. Tout cela se fait en famille de façon un peu incestueuse.

.1655

Mais il y a aux États-Unis des secteurs puissants sur le plan politique qui sont aussi opposés à cet accord que nous-mêmes, je pense aux associations de consommateurs et aux entrepreneurs du bâtiment. Ils veulent se débarrasser de cet accord qui a fait monter le prix du bois d'oeuvre de façon faramineuse. Nous pourrions donc chercher la possibilité de chercher des alliés. Nous n'aurions peut-être même pas besoin de nous adresser à l'OMC.

Bref, les États-Unis pourraient peut-être faire marche arrière pour des raisons de politique intérieure, mais vous ne pourrez pas le savoir sans vous mouiller un petit peu.

Le président: Monsieur Penson

M. Penson: Si cela permet d'avancer, je suis tout à fait disposé à retirer ma motion, à me ranger à l'avis de M. Flis, et donc à en parler demain en caucus. On pourra en rediscuter jeudi si cela convient au comité.

Le président: Nous devons discuter de l'élargissement de l'OTAN et d'autres questions très importantes; si nous devions rediscuter de cette motion, il faudrait le faire de façon très disciplinée, en réservant par exemple une demi-heure avant le début de notre séance normale. Il ne faudrait pas déborder sur la discussion portant sur l'élargissement de l'OTAN.

M. Penson: Monsieur le président, si nous ne réglons pas cette question rapidement, nous allons nous retrouver à l'ajournement de Noël pendant sept semaines; or, pour beaucoup de ces entreprises, le compte à rebours a commencé.

Le président: Je comprends. Nous pouvons en tous les cas utiliser le temps qui nous sépare de5 heures pour entendre d'autres opinions, mais, vu le peu de temps dont nous disposons, nous ne pouvons guère faire autre chose que débroussailler superficiellement la question.

M. Dupuy (Laval-Ouest): Monsieur le président, je vais être bref. On a déjà évoqué la complexité de ce dossier et les antécédents épineux de cette question.

Ce que j'aurais surtout à dire, c'est que j'éprouve une réelle compassion pour toutes ces entreprises qui risquent de fermer leurs portes. J'ai moi aussi reçu quelques informations concernant des firmes québécoises aux abois. Cela dit, nous sommes là pour protéger l'ensemble des intérêts canadiens et, quels que soient les sentiments que j'éprouve pour ces entreprises menacées, nous ne devons pas perdre de vue qu'il s'agit d'un secteur énorme.

C'est une très longue histoire. A certains moments, nous avons pensé pouvoir réussir; d'autres fois, c'était le contraire. Mais de façon générale, la procédure d'arbitrage nous a bien servis, et ça n'est pas de ce côté là que se trouve l'os, mais plutôt du côté de la situation politique américaine. Et là, nous devons nous montrer réalistes.

Nous n'avons pas le temps ce soir d'entrer dans les détails de cette problématique, et très franchement je ne trouverais pas recommandable de prendre une décision précipitée, sans avoir eu au préalable la possibilité d'être informés des tenants et des aboutissants de cette situation complexe. Si nous demandons des mesures, nous engageons la responsabilité du comité. C'est-à-dire que nous émettons un avis non négligeable.

J'aimerais ajouter incidemment que le comité a créé un sous-comité pour examiner les litiges commerciaux. Il se trouve que vous m'avez fait confiance puisque vous m'avez demandé de le présider. Nous avons été obligés de ralentir un petit peu pour faire passer la LSMI en priorité, mais votre sous-comité sur les litiges commerciaux existe et il entamera ses travaux l'an prochain, à la reprise.

Je sais que ça n'est pas une réponse à ce que M. Penson demande, mais je pense qu'il fallait mentionner cette possibilité de discuter à fond de cette question pendante entre le Canada et les États-Unis.

[Français]

Le président: Merci. Monsieur Bergeron.

M. Bergeron (Verchères): Monsieur le président, je dirai très brièvement que la question soulevée aujourd'hui par M. Penson revêt une importance capitale. C'est une question des plus pertinentes qui mérite qu'on s'y attarde attentivement. C'est la raison pour laquelle je m'oppose, de façon à ne pas minimiser l'importance qu'on doit accorder à la question, à ce qu'on la règle à la sauvette ce soir. On ne peut pas se le permettre.

Cependant, je suis tout à fait d'accord que c'est une question d'une certaine urgence; donc, on ne peut pas envisager la tenue d'une espèce d'étude exhaustive à long terme comme on l'a fait dans le cas des PME ou des institutions financières internationales, ou encore comme on le fait actuellement pour les affaires circumpolaires.

.1700

C'est une question qui, je pense, s'apparente en grande partie aux questions ponctuelles qui exigent qu'on présente une résolution au gouvernement. Je pense par exemple à l'IFOR, à l'élargissement de l'OTAN, à Haïti. Je pense qu'on doit suivre exactement le même cadre, c'est-à-dire tenir une séance qui porte exclusivement sur la question du bois d'oeuvre avec, éventuellement, des experts qui pourront éclairer les membres de ce comité qui pourraient avoir des questions sur le sujet et au terme de laquelle nous pourrions avoir une discussion entre nous et en arriver à une résolution à l'intention du ministre.

Mais, quelle que soit l'urgence de cette question, je ne pense pas qu'on doive minimiser les autres sujets qui sont à l'ordre du jour du comité, comme par exemple, pour jeudi, l'élargissement de l'OTAN et surtout le fait que nous allons recevoir en comité l'ambassadeur du Canada à Paris. Donc, je ne crois pas, d'une part, qu'on puisse régler aujourd'hui, en dix minutes, la résolution dont M. Penson nous a saisis et, d'autre part, je ne crois pas qu'on puisse se permettre d'éliminer ne serait-ce que cinq minutes des rencontres qui sont déjà prévues à notre programme.

Donc, je proposerais, monsieur le président, que nous puissions prévoir, d'ici la fin de la session, une demi-journée qui pourrait porter sur cette question-là, parce que je suis d'accord avec M. Penson qu'on ne peut pas laisser ce sujet-là en plan jusqu'à notre retour en février. Donc, on aurait une demi-journée portant sur cette question-là. On pourrait recevoir des experts du ministère du Commerce international et le secrétaire d'État et, au terme de cette rencontre, nous pourrions formuler une résolution qui soit acceptable pour l'ensemble des membres de ce comité à l'intention du gouvernement sur ce sujet si important.

Le président: D'accord, c'est une suggestion.

[Traduction]

M. Assadourian: Je passe mon tour.

M. Penson: Si nous parvenons à nous entendre de façon satisfaisante sur la façon de traiter cela dans des délais raisonnables, je serai disposé à retirer ma motion. Je voulais simplement vous dire que la situation était urgente. Je suis d'accord avec M. Bergeron, il serait préférable de régler cela avant Noël.

Je ne veux pas simplement en discuter avec des fonctionnaires du ministère. Il faudra aussi qu'il y ait des entrepreneurs concernés. Nous devons entendre leur témoignage, eux qui sont dans une situation des plus difficiles suite à cet accord. Mais si c'est possible, je serais tout à fait disposé...

Le président: La greffière me dit que, si nous discutions de l'élargissement de l'OTAN jeudi après-midi, nous pourrions aborder cette question-ci mardi après-midi prochain, où nous avions prévu l'OTAN.

Je suis d'accord avec ce qu'a dit M. Bergeron. Si effectivement nous voulons en discuter, nous devons être complètement informés. Il faudrait donc entendre les représentants du secteur concerné, qui nous exposeraient les raisons de leur mécontentement en ce qui concerne cet accord, mais nous devrions aussi entendre au moins un témoin qui puisse nous expliquer que oui, nous pouvons faire ceci et que la solution de l'OMC est jouable.

Monsieur Flis.

M. Flis: Je m'oppose à ce que nous ajoutions des séances ou des sujets supplémentaires d'ici le 13 décembre. À l'heure où la séance d'aujourd'hui devait commencer, il n'y avait qu'un député. Les députés sont tous pris par deux ou trois comités en même temps.

Nous savons que la situation est urgente et nous sommes saisis d'une motion. Nous pourrions demander à notre président ou au secrétaire parlementaire de déposer cette motion sur le bureau du ministre, en faisant remarquer que la situation presse, et le ministre aviserait. Je ne pense pas que le comité ait une autre demi-journée à consacrer à cette motion. Ce serait au ministre ou au sous-ministre de s'en occuper. Si le ministre est absent, il y a d'autres personnes compétentes. Je sais que certains voudraient que nous ayons d'autres réunions, mais je suis désolé, mesdames et messieurs, je refuse de me présenter à une réunion de comité où il n'y a qu'un député.

.1705

Le président: Ce n'est pas une réunion supplémentaire, nous modifierions simplement notre programme. Nous nous servirions d'un créneau normal de réunion du comité, monsieur Flis, et je suis d'accord avec vous pour dire que, d'ici Noël, nous ne pouvons rien ajouter de plus.

N'oublions pas non plus que la semaine prochaine, M. Sauvageau, M. Penson et moi-même serons à Singapour.

M. Penson: Monsieur le président, nous en sommes à un point où nous essayons de faire progresser la cause de la libération des échanges avec de meilleurs mécanismes d'arbitrage, alors que d'un autre côté, nous ne nous prévalons même pas de ceux qui sont à notre disposition.

Le président: Monsieur Penson, puisque vous serez à l'OMC à Singapour, vous pourriez peut-être vous renseigner et ensuite informer le comité.

[Français]

M. Bergeron: Si je vous comprends bien, la rencontre portant sur le bois d'oeuvre devrait avoir lieu mardi prochain, mais vous et les porte-parole du commerce international du Bloc québécois et du Parti réformiste ne seriez pas là. Cela commence à poser un problème.

Le président: Oui, un grave problème.

[Traduction]

M. Assadourian: Vous pourrez en discuter à Singapour.

[Français]

M. Bergeron: Oui, pourquoi pas?

M. Dupuy: Il y a un autre problème sur lequel nous devons également réfléchir. Il y a un accord entre les États-Unis et le Canada. Ce n'est pas si simple de faire disparaître un accord qui a fait l'objet de négociations extrêmement ardues. Nous ne sommes pas, en ce moment, en train de jouer à la marge des choses. Nous sommes en train d'envisager de remettre en question l'aboutissement de négociations qui ont été très longues. Je veux simplement le signaler, parce que c'est sûr...

M. Bergeron: Je faisais allusion à une résolution qui pourrait être acceptable pour tous les partis. Je ne veux pas parler pour M. Penson, mais je ne crois pas que l'intention de M. Penson soit de présenter une résolution qui serait battue par ce comité.

M. Dupuy: Bien sûr.

M. Bergeron: Je pense qu'il veut alerter le ministre à l'urgence de la situation. Si on peut en arriver à une motion qui soit acceptable à tout le monde, qui soit unanime, elle aura encore plus de poids auprès du ministre. À mon sens, on ne devrait pas aller jusqu'à demander le retrait pur et simple du traité ou la...

[Traduction]

M. Dupuy: Il faudrait avoir cette motion tout de suite.

M. Bergeron: Oui. Voilà le nouveau libellé. Qu'en pensez-vous?

M. Morrison: J'ai l'impression que vous vous laissez un petit peu trop impressionner par cette motion. En fait, si vous la lisez bien, elle n'est pas tellement brutale. Nous demandons simplement au ministre d'agir, de faire quelque chose, et de se réveiller.

On pourrait peut-être supprimer le terme «scrap» et le remplacer par quelque chose de plus anodin; je ne sais pas si M. Penson serait d'accord. Mais, en fait, nous ne faisons que présenter une requête au ministre.

Le président: M. Assadourian et ensuite M. Sauvageau.

M. Assadourian: Merci beaucoup. J'aimerais proposer une modification, si c'est possible, et si cela vous convient: que le comité demande instamment au président...

[Français]

M. Bergeron: Non, on ne fait pas tout de suite la formulation. On fera cela la semaine prochaine.

[Traduction]

Le président: Si vous voulez bien, nous passerons la parole à M. Sauvageau.

[Français]

M. Sauvageau: Peut-être que je n'avais pas vu le...

[Traduction]

Le président: Vous êtes en fait déjà en train de modifier la résolution. Vous voulez recommander un amendement.

[Français]

M. Bergeron: Laissez-le finir; il va grimper sur la table.

[Traduction]

M. Assadourian: Très bien. Je recommande alors qu'on écrive une lettre en notre nom au ministre, faisant état de notre inquiétude. Est-ce que cela vous irait?

Le président: Avez-vous effectivement décidé que vous êtes préoccupé?

M. Assadourian: Pardon?

Le président: Connaissez-vous exactement le motif de votre préoccupation? Si je devais voter là-dessus, je ne suis pas encore certain de pouvoir suivre M. Bergeron. Je pense que M. Penson comprend que je veuille entendre les représentants de ce secteur, avant de décider si oui ou non j'ai effectivement un sujet de préoccupation; et que je veuille également entendre les représentants du ministère, avant de décider si une autre voie s'offre à nous. Voilà donc deux parties que j'aimerais entendre avant de m'engager. Les autres membres du comité décideront pour eux-mêmes.

Rapidement, monsieur Sauvageau, vous étiez le premier, et ensuite M. Penson.

[Français]

M. Sauvageau: Comme M. Bergeron me le soulignait si intelligemment, pourrions-nous remettre à jeudi après-midi cette rencontre sur le bois d'oeuvre, alors que vous et moi serons là, monsieur Penson? La rencontre sur l'OTAN pourrait avoir lieu mardi.

.1710

Je n'avais pas vu la version anglaise. On a peut-être utilisé le mot «scrap», en anglais, pour que cela veuille dire, pour les Libéraux, d'harmoniser aussi les normes avec les État-Unis.

[Traduction]

Le président: Cela me conviendrait. Je pense que le président pourrait peut-être demander à un comité tripartite de décider si la lettre au ministre, ou toute autre forme d'action, pourrait suffire. Sinon, nous tiendrons une réunion. La greffière dit que nous pourrions faire quelque chose jeudi après-midi, si nous sommes suffisamment rapides d'ici là.

À votre avis, est-ce que des représentants de l'association des industriels du bois d'oeuvre seraient en mesure de faire quelque chose d'ici jeudi après-midi?

M. Penson: Monsieur le président, si nous réservons une demi- journée, je ne pense pas qu'ils aient le temps de venir...

M. Bergeron: Je comprends, mais il faut faire diligence.

M. Penson: Monsieur le président, il n'y a rien de nouveau dans toute cette affaire. Cela fait plus d'un mois que le système des quotas est appliqué. Les membres du comité qui étaient à la Chambre ont pu nous entendre poser des questions là-dessus. Toute personne qui a voulu vérifier auprès du ministère, a pu constater que l'administration a des problèmes graves avec ce système des quotas. Lorsque vous téléphonez aux fonctionnaires, ils vous répondent qu'ils sont dans une véritable situation de crise. En plus, je n'ai pas de sondage scientifique, mais 110 entreprises sur 550 ont répondu, y compris beaucoup du Québec, pour nous dire que cet accord n'est pas une bonne chose.

Tout ce que nous demandons, c'est ce à quoi nous avons droit en vertu de l'accord de libre-échange signé avec les États-Unis. Nous avons en fait donné notre accord... et accepté moins que ce que à quoi nous avons droit, c'est-à-dire 88 p. 100 de ce à quoi nous avons droit en vertu des chiffres de l'an dernier, par exemple.

Il y a donc urgence. Je ne sais pas si l'on pourrait convaincre les sociétés les plus touchées de prendre un avion demain pour être ici jeudi. Je suppose que ce n'est pas facile. Mais je pense que les députés ici présents doivent bien prendre conscience de l'urgence de la situation. Je serais ravi que nous en saisissions nos caucus respectifs, qu'ils en débattent et que nous revenions jeudi pour en rediscuter; mais je ne pense pas que nous ayons le temps d'inviter les représentants des entreprises concernées.

Le président: C'est peut-être la meilleure solution. Si vous voulez retirer votre motion pour l'instant, nous en parlerons dans nos caucus et, à la prochaine réunion, nous déciderons pour le comité.

M. Penson: Je pense que c'est la meilleure solution.

[Français]

M. Bergeron: Mais on ne veut pas avoir seulement des gens qui nous parlent...

[Traduction]

M. Dupuy: Monsieur le président, j'aimerais quand même faire remarquer qu'il y a eu des consultations approfondies avec l'industrie avant que les négociations avec les États-Unis ne bloquent. On avait fait une recherche approfondie.

M. Penson: Auprès de quatre compagnies.

M. Dupuy: C'est pas ce qu'on m'a dit. De toute évidence, si vous voulez entendre ceux qui sont lésés, il faut également donner la parole à ceux qui estiment que c'est la seule solution. Mais penser que nous pouvons nous débarrasser rapidement de cette question comme de quelque chose de mineur parce que nous avons un programme de travail chargé est un petit peu irréaliste.

Cela dit, je peux dire à M. Penson qu'il fait ce qu'il faut en nous alertant et en nous informant des difficultés de certains industriels canadiens. Il est tout à fait légitime que nous nous penchions là-dessus, mais il y a loin de là à vouloir tout de suite passer à des recommandations lourdes de conséquences.

Le président: Il y a une question de temps. De toute façon, nous ne pouvons pas siéger beaucoup plus longtemps cet après-midi, nous avons d'autres choses à faire. Par ailleurs, nous avons également pas mal de travail d'ici la fin de la session. Trois d'entre nous, dont deux sont les critiques en matière de commerce, seront absents la semaine prochaine. Ou nous arrivons à faire quelque chose cette semaine, ou nous ne ferons probablement rien du tout.

J'ai le sentiment que les membres du comité, au cas où nous devrions présenter une résolution officiellement, aimeraient qu'il y ait eu une audience d'une sorte ou d'une autre, ce qui ne sera peut-être pas possible d'ici la fin de la semaine. Serait-il alors possible...

M. Bergeron: Mais nous allons faire notre possible.

Le président: Si cela satisfait les membres du comité, je suis à votre disposition.

Je voulais recommander, comme mesure de compromis, d'écrire une lettre au ministre au nom du comité, en l'informant de la discussion, comme l'avait proposé M. Assadourian, et en disant qu'il y a accord au sein du comité, sans que cela soit présenté sous forme de résolution en bonne et due forme, et que nous avons été informés de certaines préoccupations dont nous aimerions que le gouvernement se saisisse et nous lui transmettrions la résolution proposée.

.1715

M. Assadourian: Si vous ne voulez pas parler «des membres du comité», vous pouvez dire «certains membres du comité», ce qui réglerait la question.

Le président: Sinon, si nous n'avons pas d'audience, la motion va être défaite, simplement parce que les députés n'auront pas été suffisamment informés pour pouvoir voter pour ou contre. Et alors vous perdez tout.

M. Bergeron: Est-ce que cette lettre s'appuierait sur la discussion que nous aurions jeudi ou simplement sur celle d'aujourd'hui?

Le président: Sur celle que nous venons d'avoir.

Monsieur LeBlanc.

M. LeBlanc: Je ne voudrais pas lier le comité sans avoir eu au moins la possibilité d'entendre des témoins ou de discuter du fond de l'affaire. C'est en qualité de membre du comité que je le dis.

Le président: Je comprends.

M. LeBlanc: Je veux bien admettre que c'est une question grave, comme M. Penson l'a dit, et peut-être qu'après discussion, je pourrais être persuadé que sa solution est la bonne; pour le moment, je n'en suis pas convaincu. Je voudrais d'abord entendre quelques témoignages pour pouvoir être fixé.

Si vous écrivez une lettre au nom du comité sans qu'il y ait eu d'audience, tout ce que vous pouvez dire comme président est que certains membres du comité ont soulevé cette question.

Mais si vous voulez avoir une réunion là-dessus jeudi, ce qui permettrait d'en discuter en comité, je sais que le secrétaire parlementaire sera à Ottawa. Je ne sais pas s'il a des rendez-vous.

Nous pourrions aussi utiliser les moyens techniques de cet après-midi pour entendre quelques représentants du secteur touché qui n'auraient pas la possibilité de se rendre d'ici jeudi à Ottawa.

M. Penson: Étant donné tout ce qui se dit depuis 15 minutes, j'ai le sentiment que les députés ne veulent pas véritablement inviter ces représentants du secteur du bois d'oeuvre. Il ne semble pas possible de les faire venir avec un jour de préavis. C'est quasiment impossible.

Cela étant, je propose que l'on passe à la motion. Si vous décidez de la rejeter, cela sera alors la décision du comité, mais au moins la motion aura fait l'objet d'un vote. Ensuite, si vous la rejetez, il appartiendra au comité de décider s'il désire aller plus loin.

M. Morrison: Ils ont déjà décidé en ce qui concerne jeudi.

[Français]

M. Sauvageau: Monsieur le président, si on siège jusqu'à 21 h, on peut discuter de la motion.

[Traduction]

Le président: Je pense donc que M. Penson demande un vote. Nous avons déjà dépassé l'heure de 20 minutes.

[Français]

M. Bergeron: Peut-on s'entendre pour qu'à tout le moins, vous écriviez une lettre au nom de ce comité disant que cette question a été soulevée? La résolution sera peut-être défaite, ce qui risque d'être le cas, mais je pense que cela n'enlève rien à l'urgence et à l'importance de la question soulevée par M. Penson.

Donc, que la motion soit ou non adoptée, vous pourriez peut-être suivre la suggestion deM. LeBlanc et écrire au ministre pour lui dire qu'il y a des préoccupations au sein du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international concernant cette question-là et qu'on lui demande de se pencher plus à fond sur la question.

[Traduction]

Le président: Absolument. Je ne veux pas que M. Penson pense pouvoir tirer un profit politique de ce que la majorité du comité aurait refusé d'entendre des témoins. Je suis évidemment sûr que ce n'est pas son intention. En tout cas, le comité est plus que disposé à faire quelque chose dans les limites de ses contraintes de temps, dont il faut évidemment tenir compte.

M. Penson: [Inaudible]... monsieur le président.

Le président: Je comprends, mais en toute équité à l'égard du comité, ce n'est pas de la faute des députés. Tout le monde est d'accord pour dire que nous le ferons jeudi si c'est possible.

M. Penson: Je ne suis pas le seul à dire que c'est une question grave. Beaucoup de députés qui entendent parler de cela...

Le président: C'est vrai, la situation est grave. Il suffit de lire les journaux pour le savoir. Nous en avons tous conscience. Croyez-moi, nous en avons tous entendu parler à l'extérieur de nos propres formations politiques et nous sommes d'accord avec vous là-dessus.

M. Penson: Je propose que nous passions à la motion et que nous discutions ensuite de la marche à suivre ultérieurement.

Mme Gaffney: Monsieur le président, c'est effectivement une question grave. Je ne pense pas que nous soyons en mesure de voter sur cette motion telle qu'elle nous est présentée. Nous devrions d'abord proposer une motion, selon laquelle nous déclarons que ça n'est pas le moment de voter sur la première motion. La question est grave, et il faudrait que le comité puisse se pencher sérieusement sur le dossier. Nous n'avons pas toute l'information de base. Je ne pense donc pas qu'il soit bon que nous votions tout de suite.

.1720

Le président: Je dois cependant respecter le règlement. La greffière me dit que si M. Penson veut faire voter sa motion maintenant plutôt que de la retirer, pour que nous puissions étudier la question, il a toute latitude pour le faire, et alors il faudra bien que nous votions. Le secrétaire parlementaire viendra peut-être à la prochaine réunion pour nous informer de la position du gouvernement sur cette question, ce qui serait une façon pour lui de répondre. Pour le moment, siM. Penson le désire, puisqu'il est l'auteur de la motion, celle-ci a été proposée en bonne et due forme et il est appuyé...

M. LeBlanc: Monsieur le président, j'aimerais, pour le compte rendu de séance, et au nom du parti ministériel, dire que nous sommes prêts à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour recevoir des témoins et en discuter avec eux dès jeudi, afin de faire les choses comme il faut. Si les membres du comité sont disposés dans ce sens, cela pourrait nous permettre d'exposer le point de vue du comité sur cette question.

Mais il n'est absolument pas acceptable que nous soyons saisis comme cela, sans préavis, d'une motion qui nous tombe dessus, où il n'y a ni préambule, ni exposé des motifs, et que l'on nous demande de voter... Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons eu une réunion du comité directeur, à laquelle le Parti réformiste a participé. On a discuté du programme du comité et on aurait pu alors le remanier pour inclure cette question si elle est si importante.

M. Penson: Je suis étonné qu'en votre capacité de secrétaire parlementaire, vous n'ayez pas porté cette question à l'attention du comité. Votre ministère devrait être au courant de ce qui se passe.

M. LeBlanc: Le secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international est tout à fait au courant et pourrait venir ici pour parler de toutes ces questions. Toutefois, cette motion nous a été présentée sans préavis et le secrétaire parlementaire du Commerce international, qui est au courant de tout ceci, n'a donc aucunement la possibilité d'être ici pour expliquer la position du gouvernement et éclairer le comité.

Le président: Monsieur Assadourian.

M. Assadourian: La Chambre des communes a été saisie de cette question à quelques reprises. Il a été le premier à en être informé et il la connaît probablement mieux que quiconque. Mais il sert mal cette cause en présentant la chose de cette façon-là.

Cela me préoccupe beaucoup. Tout le monde est très inquiet. Il est tout à fait injuste qu'il nous présente cette chose et nous demande de voter immédiatement. Si nous votons contre, il en fera tout un plat, ce qui est tout à fait injuste envers le comité et surtout envers la question elle-même. S'il se soucie vraiment du sort des gens qui travaillent dans ce secteur, il ne devrait pas faire cela en fonction de ses propres intérêts.

Je lui demande de retirer sa motion et de la présenter de nouveau jeudi. C'est tout à fait injuste.

M. Penson: Monsieur le président, nous avons discuté pendant quelque 20 minutes de la façon de procéder. Le secrétaire parlementaire a suggéré que nous convoquions des témoins dès jeudi. Il y a des entreprises en Alberta et en Colombie-Britannique ainsi qu'au Québec, d'ailleurs, qui ne pourront pas venir avec seulement une journée d'avis. Si nous avions le temps de procéder ainsi, j'en serais d'accord, mais nous ne pouvons pas le faire avec un jour d'avis. Ce n'est pas possible.

Le président: Le fait que trois membres seront absents la semaine suivante ne veut pas nécessairement dire qu'il sera impossible d'étudier la question cette semaine-là, n'est-ce-pas?

M. Penson: Non, mais ce n'est pas de cela que nous parlons.

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le président, je comprends de ce que nous dit M. Penson qu'il faut que cela se fasse vite, mais pas trop vite. Compte tenu de cette attitude un peu négative, je pense qu'il souhaite que la motion soit battue. Donc, battons sa motion et on en rediscutera de façon plus sérieuse ultérieurement.

[Traduction]

Le président: Je crois que c'est là la situation. À moins que M. Penson ne veuille retirer sa motion, il faut la régler, et je ne crois pas qu'il faille en discuter davantage. Voulez-vous qu'on aille de l'avant?

M. Penson: Oui.

Le président: D'accord. La motion se lit comme suit:

La motion est rejetée

.1725

M. Assadourian: Monsieur le président, je voudrais présenter une motion moi-même.

Le président: Oui.

M. Assadourian: Je propose que ce comité condamne le comportement du Parti réformiste au sein de ce comité sur la question du bois d'oeuvre.

Des voix: Ne sois pas si enfant!

M. Assadourian: Passons aux voix. Cette motion est différente de la vôtre. Je ne veux pas quitter ce comité, monsieur le président, en sachant que je pourrais être critiqué pour ne pas avoir fait mon travail au nom des citoyens canadiens.

Le président: Je crois que le procès-verbal sera la preuve que les membres du comité essayaient d'en arriver à une solution. Je m'attends à ce que le secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international soit des nôtres à la prochaine réunion, et nous ferons tout notre possible pour lui donner le temps de faire brièvement une déclaration à ce sujet.

Je conviens avec M. Penson qu'il s'agit d'une question importante et je suis d'accord avec les autres membres.

M. LeBlanc: Monsieur le président, pour la prochaine réunion du comité, puisque la question a été soulevée, que nous en reconnaissons l'importance et qu'elle préoccupe les membres, je m'engage à présenter, au nom du gouvernement, une déclaration qui fera le point sur la question afin de répondre aux attentes du comité. Cela vous convient-il? Nous le ferons pour jeudi.

Les membres du comité pourront donc déposer la déclaration au nom du gouvernement, laquelle expliquera la situation actuelle. Elle ne dira pas si le gouvernement est pour ou contre l'idée contenue dans la motion, mais le comité aura au moins quelque chose de concret qui pourra figurer au procès-verbal et expliquer le point de vue actuel du gouvernement sur cette question.

M. Penson: C'est bien.

Le président: Pour le moment, nous n'avons rien de prévu pour jeudi après-midi.

Monsieur Penson, vous ne dites pas que vous croyez que si nous pouvions préparer quelque chose d'ici jeudi...

M. Penson: Je crains que si nous voulions convoquer des témoins... Monsieur le président, je ne crois pas qu'on puisse tout simplement leur téléphoner et leur demander de venir ici jeudi après-midi. On est mardi après-midi et...

Le président: Oui, je comprends.

M. Penson: Nous n'habitons pas tous Montréal.

Le président: Non, je comprends.

M. Bergeron: Je le sais, mais ne tenez pas pour acquis qu'ils ne viendront pas.

M. LeBlanc: Ils ne sont pas obligés de venir à Ottawa; nous avons les vidéoconférences. C'est la raison pour laquelle cette technologie a été conçue.

Le président: Que pensez-vous d'une vidéoconférence? Plusieurs d'entre eux n'auraient-ils pas des représentants du secteur? Ne pourriez-vous pas convoquer un porte-parole du secteur qui serait à Ottawa pour parler au nom de ce secteur.

M. Penson: Je crois qu'un des problèmes, monsieur le président, est que les ministères ont parlé à certains porte-parole qui ont parlé au nom de l'ensemble du secteur. Dans la réponse du ministère, je crois que vous constaterez que plusieurs sociétés n'ont jamais été consultées par leurs associations; ils ne sont pas du tout satisfaits de cet accord qui ne leur est pas favorable.

Le président: Il est, bien sûr, évident qu'il n'y a pas toujours unanimité au sein de ces associations.

Je crois que nous avons fait tout notre possible pour le moment.

M. Penson: D'accord.

Le président: La séance est levée jusqu'à 9 heures jeudi.

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