[Enregistrement électronique]
Le mardi 23 avril 1996
[Français]
La présidente: J'aimerais vous souhaiter la bienvenue.
[Traduction]
Nous avons la chance d'accueillir aujourd'hui M. Bill Radburn, vérificateur général adjoint, et M. Grant Wilson, directeur principal, Opérations de vérification. Nous sommes impatients de vous entendre puisque vous êtes les inspecteurs principaux du trésor public et je sais que vous avez toute la sagesse voulue pour nous faire rapport aujourd'hui.
Veuillez commencer votre exposé.
M. Bill Radburn (vérificateur général adjoint, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci madame la présidente.
J'ai une brève déclaration liminaire que Grant Wilson et moi-même partagerons. Madame la présidente, avec votre permission, nous aborderons essentiellement les points qui figurent dans la trousse ainsi que dans les diapositives correspondantes.
Nous sommes tous deux heureux d'être ici pour discuter des observations découlant de l'étude figurant au chapitre 10 du Rapport de 1995 du vérificateur général. Le rôle premier du Bureau est de servir le Parlement. Je le mentionne afin de préciser la nature indépendante de nos vérifications et de nos études.
Notre travail vise à fournir au Parlement de l'information, une assurance et des avis objectifs. Conformément au Règlement de la Chambre des communes, nos rapports sont présentés au Comité des comptes publics, mais nous sommes heureux de répondre aux demandes d'information d'autres comités parlementaires comme le Comité des opérations gouvernementales.
Aujourd'hui, nous aimerions vous parler des résultats de notre récente étude sur les sociétés d'État qui a été déposée au Parlement conformément à la Loi sur le vérificateur général. Il est à remarquer que ce chapitre regroupe en réalité les résultats des travaux de vérification que nous effectuons sur les sociétés d'État en vertu d'une autre loi, la Loi sur la gestion des finances publiques.
Je vais vous donner une vue d'ensemble de l'étude sur les sociétés d'État en m'attachant particulièrement au cadre de responsabilisation des sociétés d'État et aux résultats de nos examens spéciaux des sociétés d'État. Grant Wilson traitera aussi de deux questions dont le comité voudra peut-être discuter: la communication de l'information sur le rendement et la planification, et l'intendance.
La partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques définit les sociétés d'État fédérales comme étant celles qui appartiennent à 100 p. 100 au gouvernement. À la date de présentation de notre rapport, en octobre dernier, il y avait 48 sociétés d'État mères. Le gouvernement a recours à un certain nombre d'autres entités, qui ne sont pas des sociétés d'État, pour atteindre ses objectifs fondamentaux. Ce sont notamment les autres sociétés qui appartiennent en totalité au gouvernement, que l'on appelle des sociétés gouvernementales, comme la Commission de contrôle de l'énergie atomique.
Il y a aussi quatre entreprises mixtes et trois coentreprises qui sont des entités qui n'appartiennent pas en totalité au gouvernement. Un exemple serait la North Portage Development Corporation. Il y a aussi d'autres formes d'établissements, comme les organismes de service spéciaux, par exemple le Bureau des passeports, et les administrations locales, par exemple les administrations aéroportuaires.
Je signale que ce chapitre ne porte pas sur ces autres entités, mais uniquement sur les sociétés de la Couronne assujetties à la partie X.
Dans nos rapports de 1991 et de 1995, nous avons indiqué qu'il serait souhaitable que bon nombre des dispositions de la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques, par exemple celles qui ont trait à la responsabilité de gestion, à l'obligation redditionnelle et à la vérification, s'appliquent aux sociétés qui ne sont pas visées par la loi.
Les sociétés exemptées, notamment la Commission canadienne du blé, le Centre national des Arts et le Centre de recherches pour le développement international, ont des fonctions commerciales importantes et poursuivent des objectifs d'intérêt public importants. En outre, elles reçoivent généralement des crédits parlementaires considérables. Toutefois, elles ne sont pas soumises au processus de plan d'entreprise, à la communication de l'information sur le rendement ni à l'obligation de se soumettre régulièrement à des examens spéciaux.
Nous recommandons toujours de clarifier la situation de toutes les sociétés d'État exemptées et, dans la mesure du possible, de les soumettre au même régime que les autres sociétés d'État.
La Loi sur l'administration financière a été modifiée en 1984 de manière à fournir un cadre amélioré de contrôle et de responsabilisation pour les sociétés d'État. Nous croyons que le régime établi par la loi accorde suffisamment de liberté d'action aux sociétés tout en assurant une reddition des comptes adéquate au conseil d'administration, au gouvernement et au Parlement.
Les principales caractéristiques du cadre comprennent les dispositions concernant la planification et la communication de l'information sur le rendement, un régime de vérification assez rigoureux de même qu'une définition claire des rôles et des responsabilités.
De 1989 à 1995, nous avons à cinq reprises présenté au Parlement un rapport sur les questions de responsabilisation des sociétés d'État. Nous avons conclu, en 1995, que la situation s'était beaucoup améliorée comparativement à celle qui existait en 1984 et que le cadre de responsabilisation était solide. Cependant, des problèmes persistent dans certains secteurs.
Pour ce qui est des résultats des examens spéciaux, notre étude des questions liées aux sociétés d'État définissait le cadre de responsabilisation qui régit les sociétés d'État mères nommées à la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques et communiquait les résultats de 31 examens spéciaux effectués par notre Bureau sur une période de cinq ans.
L'examen spécial, un genre de vérification de l'optimisation des ressources, sert à fournir une opinion indépendante au conseil d'administration des sociétés d'État. Dans la plupart des cas - mais pas tous - , le vérificateur peut aussi présenter le rapport au ministre responsable, et même au Parlement, bien que ce dernier cas soit rare.
Le rapport d'examen spécial indique s'il y a, d'après les critères utilisés, une certitude raisonnable que les éléments d'actif de la société sont protégés et contrôlés, que les ressources financières humaines et matérielles sont gérées de façon économique et efficiente et que le déroulement des opérations est efficace.
Toutes les sociétés d'État mères nommées à l'annexe III de la Loi sur la gestion des finances publiques sont soumises à l'examen spécial. Notre Bureau a été nommé vérificateur d'un bon nombre de sociétés d'État, mais non de toutes ces sociétés. La Loi sur la gestion des finances publiques indique que le vérificateur général est le vérificateur ou covérificateur des sociétés d'État qui utilisent régulièrement les fonds publics, ont un rôle important en matière de politiques publiques, comme la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Société pour l'expansion des exportations, la Société du crédit agricole et la Banque du développement du Canada, ou qui constituent une composante importante de l'ensemble de l'activité gouvernementale. Cette structure permet au vérificateur général de fournir au Parlement une vue globale des résultats combinés de l'examen des questions touchant les sociétés et des vérifications que nous avons effectuées.
Pendant ce cycle de cinq ans, aucun rapport d'examen spécial ne justifiait qu'il soit porté à l'attention du Parlement, mais l'ensemble des examens spéciaux du deuxième cycle de cinq ans a soulevé des préoccupations. En effet, pour 80 p. 100 des sociétés d'État actives examinées, nous avons signalé au moins une lacune importante. Notre plus grande préoccupation concerne l'existence d'une ou de plusieurs lacunes liées soit à la planification générale ou stratégique, soit à la mesure du rendement et à la communication des résultats, soit aux deux.
Avec votre permission, j'invite maintenant mon collègue, Grant Wilson, à faire des commentaires sur les deux autres questions.
M. Grant Wilson (directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, madame la présidente. Les types de lacunes qu'a mentionnés Bill Radburn à l'égard de la communication de l'information sur le rendement et de la planification ont des conséquences graves parce qu'elles indiquent que de nombreuses sociétés d'État ne sont pas en mesure de se conformer aux caractéristiques clés du cadre de responsabilisation.
De nombreuses sociétés n'ont pas de vision, de valeurs ou de buts généraux bien articulés; elles n'ont pas de stratégies clairement formulées pour réaliser leur mission et leur vision; elles ne savent pas dans quelle mesure elles atteignent leurs objectifs; et elles ne rendent pas compte adéquatement au Parlement et au gouvernement de leurs objectifs et de leurs stratégies.
Lorsqu'il n'y a pas d'interprétation claire des mandats, d'objectifs mesurables ou de planification stratégique adéquate pour assurer l'atteinte des objectifs, il n'est pas possible de communiquer au Parlement de l'information sur le rendement. En outre, lorsque le rendement obtenu par rapport aux objectifs n'est ni mesuré ni communiqué, le Parlement est moins en mesure de demander aux sociétés qu'elles rendent compte adéquatement de leurs résultats.
Dans notre chapitre, nous avons suggéré un certain nombre de façons de régler ces problèmes. Le processus et la structure, appelés intendance, dont on se sert pour orienter et gérer les affaires de la société afin de rehausser sa valeur, pourraient aider à traiter ces questions, mais ce n'est qu'une étape. La direction, le conseil d'administration, le gouvernement et le Parlement devront tous jouer un rôle plus actif pour améliorer la reddition des comptes et pour régler efficacement les problèmes signalés.
Le conseil d'administration peut clarifier et interpréter les mandats en vue de définir l'orientation stratégique de la société de même qu'élaborer des plans d'entreprise qui prévoient clairement une évaluation du rendement. Les conseils d'administration et de direction peuvent élaborer de mesures de rendement qui fourniraient une indication utile sur les résultats de la politique gouvernementale.
Le gouvernement, par l'intermédiaire du Cabinet, du Conseil du Trésor et des ministres responsables, peut envisager de préciser l'étendue des pouvoirs qu'il délègue au conseil d'administration et établir une distinction entre les résultats des efforts faits en vue d'atteindre les objectifs de la politique gouvernementale et les résultats des activités de la société.
Le Parlement, par l'intermédiaire de ses comités, peut envisager d'aider les sociétés à clarifier leur mandat, au besoin, et d'examiner et d'utiliser les plans et l'information sur le rendement communiqué par le ministre.
Votre comité, madame la présidente, a franchi une étape importante à cette fin en examinant ce chapitre sur les sociétés d'État et en demandant aux sociétés dont il est responsable, notamment la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Société canadienne des postes et la Monnaie royale canadienne, de comparaître devant lui au sujet de leur rendement. Le comité voudrait peut-être recommander aux autres comités d'agir de la même façon.
D'autres mesures comprennent les initiatives déjà mises en oeuvre. À titre d'exemple, je dirai qu'en 1993, le vérificateur général a créé un prix d'excellence des rapports annuels des sociétés d'État, qui vise à encourager une meilleure communication des résultats en récompensant les sociétés qui ont préparé de bons rapports annuels et en les citant en exemple. Je crois que vous avez reçu un exemplaire de la brochure d'information sur ce prix.
Le Conseil du Trésor a indiqué que, lors de son examen des plans d'entreprise, il mettra tout particulièrement l'accent sur l'information sur le rendement. Le secteur des sociétés d'État et de la privatisation du Secrétariat du Conseil du Trésor et le ministère des Finances sont en train d'élaborer d'autres lignes directrices concernant l'intendance des sociétés d'État.
De plus, le Bureau envisage d'aider davantage les sociétés d'État à élaborer ou à compléter des indicateurs de rendement propres à chaque société.
M. Radburn: Enfin, madame la présidente, même si des progrès ont été accomplis dans l'amélioration de la responsabilisation prévue selon l'esprit des modifications apportées à la Loi sur la gestion des finances publiques en 1984, notre étude propose des solutions qui pourraient être adoptées pour accélérer ou améliorer la responsabilisation des sociétés d'État, particulièrement dans le domaine de la mesure du rendement et de la communication des résultats.
Nous serons heureux de répondre à toute question concernant notre étude, madame la présidente.
La présidente: Je vous remercie de votre exposé très détaillé. Il nous sera très utile.
Dans vos remarques liminaires, vous avez indiqué que 80 p. 100 de toutes les sociétés d'État comportent deux grandes lacunes communes: premièrement, une lacune au niveau de la planification générale et stratégique et, deuxièmement, une lacune au niveau de la mesure du rendement et de la communication des résultats.
Étant donné que notre comité - et je crois pouvoir m'exprimer au nom de tous ses membres - veut aider à combler ces lacunes, que pourrions-nous faire pour vous aider à transmettre votre message au Parlement, au gouvernement et aux sociétés d'État afin que ces problèmes soient corrigés?
M. Radburn: Madame la présidente, dans notre étude, et plus particulièrement à la pièce 10.5, nous avons souligné le nombre important de maillons que compte la chaîne de responsabilité, y compris le Parlement, le gouvernement, le conseil d'administration et la direction. En ce qui concerne le Parlement et ses comités, celui-ci par exemple, nous croyons que vous pourriez aider à combler les lacunes en explorant, dans vos réunions avec elles, les objectifs des sociétés d'État et en discutant de la meilleure façon pour elles d'indiquer dans leurs rapports si ces objectifs ont été atteints.
C'est un problème que nous avons relevé, comme nous l'avons indiqué dans le rapport, dans la plupart des sociétés. Le fait que ce problème soit si courant indique bien à quel point il est difficile de satisfaire à toutes les exigences de la loi.
La présidente: Je ne veux pas vous mettre sur la sellette, mais est-ce qu'il serait utile que notre comité présente un rapport et avez-vous répertorié les modifications législatives qui seraient nécessaires?
M. Radburn: Nous estimons qu'on peut faire beaucoup même avec les dispositions actuelles de la Loi sur la gestion des finances publiques. Cela ne signifie pas que cette loi, qui est entrée en vigueur en 1984, ne pourrait pas faire l'objet d'un examen à la lumière de circonstances actuelles. Des améliorations seraient possibles dans certains domaines, mais nous croyons que les correctifs recensés à la pièce 10.5 pourraient être apportés sans qu'il soit nécessaire de modifier la loi.
La présidente: Merci beaucoup de ces explications.
[Français]
Monsieur Fillion.
M. Fillion (Chicoutimi): Merci de votre présentation. J'aimerais passer au document qu'on nous a distribué tout à l'heure, à la page 2: Vue d'ensemble des sociétés d'État. On y donne une nomenclature des sociétés. Nous savions qu'au départ il y en avait 48. On les divise maintenant en trois catégories: dépendantes financièrement, autonomes et exemptées.
J'aimerais que vous nous donniez brièvement le portrait de chacune de ces catégories.
[Traduction]
M. Radburn: Peut-être pourrez-vous préciser votre question. Je ne suis pas certain des informations que vous nous demandez concernant l'aperçu. Voulez-vous connaître le nom des sociétés?
[Français]
M. Fillion: Pourriez-vous expliquer le terme «dépendantes financièrement»? Signifie-t-il que tous les crédits de ces sociétés proviennent du gouvernement et qu'aucun ne provient de l'industrie privée? Et qu'est-ce qu'«autonomes» et «exemptées» signifient? Je voudrais faire la distinction entre les trois catégories.
[Traduction]
M. Radburn: Une société non autosuffisante est celle qui habituellement pour l'exploitation ou les dépenses en capital, a besoin de crédits parlementaires.
Au cours des dernières années, on a demandé à certaines de ces sociétés de devenir autosuffisantes de façon à ce qu'elles ne dépendent plus des crédits parlementaires; certaines d'entre elles font l'impossible pour atteindre cet objectif. Cette catégorie de 28 sociétés, du moins au mois d'octobre dernier, dépendait encore d'une façon ou d'une autre de crédits d'exploitation ou de dépenses en capital.
La catégorie des sociétés autosuffisantes comprend celles qui, généralement, n'ont pas besoin de crédits parlementaires, que ce soit pour l'exploitation ou les dépenses en capital. L'an passé, les sociétés de cette catégorie étaient plus nombreuses. Plusieurs d'entre elles ont été commercialisées ou privatisées récemment. Ainsi, nous avons assisté au cours des dernières années à la privatisation du CN, d'Air Canada et de Petro-Canada. Certaines de ces sociétés auraient été de bons exemples de sociétés autosuffisantes; c'est d'ailleurs parce qu'elles étaient autosuffisantes qu'elles ont été privatisées.
Les sociétés exemptes comprennent la Banque du Canada, la Commission canadienne du blé et certaines sociétés culturelles. Lorsque la Loi sur la gestion des finances publiques a été déposée, on avait d'abord l'intention d'en faire une loi omnibus qui s'appliquerait à toutes les sociétés d'État. Toutefois, au moment de la première et de la deuxième lectures, en 1984, certaines sociétés culturelles se sont opposées à des dispositions du projet de loi qui, d'après elles, permettaient au gouvernement de s'ingérer dans les activités culturelles. On en a alors répertorié certaines qui, depuis, ne sont pas assujetties à l'application de la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques.
Si vous le souhaitez, nous pourrions vous parler des conséquences de cette exemption.
C'est là un aperçu des trois catégories de sociétés d'État. Est-ce que cela répond à votre question, monsieur?
[Français]
M. Fillion: Cela répond à ma question. Je crois comprendre que le vérificateur général a droit de regard dans les deux premières catégories, ce qui vous a permis de produire le rapport du chapitre 10. Par contre, quand il s'agit des sociétés d'État exemptées, vous avez plus de difficulté à faire des vérifications. Est-ce le cas? Quels avantages les sociétés exemptées peuvent-elles retirer par rapport aux autres catégories? Vous avez nommé deux de ces sociétés, tandis qu'il y en a sept. Pouvez-vous nous donner les noms des cinq sociétés manquantes?
[Traduction]
M. Radburn: Je donnerai une réponse technique à votre première question.
Pour les sociétés prévues à la partie I de l'annexe III, notre Bureau agit comme vérificateur ou covérificateur. Le vérificateur général est covérificateur ou vérificateur à moins qu'il ne renonce à l'affectation.
Pour les sociétés autosuffisantes, dont la liste se trouve à la partie II de l'annexe III, notre Bureau peut agir comme vérificateur, mais cela n'est pas obligatoire.
Je vous donne l'exemple de la Monnaie royale. Elle figure à la partie II de l'annexe III, et nous pouvons donc en être le vérificateur. Au moment où on a refait les annexes, la Monnaie a dit souhaiter que nous demeurions son vérificateur et elle nous a donc donné cette responsabilité dans sa loi habilitante. Nous sommes donc les vérificateurs de la Monnaie, non pas parce que la Loi sur la gestion des finances publiques le prévoit, mais bien aux termes de la Loi sur la Monnaie royale canadienne.
Eu égard aux sociétés autosuffisantes, nous estimons que plus elles gagnent en autonomie, moins elles ont besoin de nos services.
En ce qui concerne les sociétés exemptes, vous avez demandé de quels avantages elles jouissent par rapport aux sociétés qui sont assujetties à la partie X. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'elles jouissent d'avantages, mais il est vrai que certaines modalités de la Loi sur la gestion des finances publiques ne s'appliquent pas à elles, comme le processus de planification d'entreprise. Je crois savoir que les sociétés exemptes dressent des plans, mais qu'elles n'ont pas à les faire approuver. Elles ne sont pas assujetties au processus d'approbation.
En outre, certaines dispositions concernant la vérification ne sont pas obligatoires; toutefois, je me dois de signaler que bon nombre d'entre elles se sont soumises de leur propre gré à une vérification de l'optimisation des ressources.
Grant, aimeriez-vous ajouter quelque chose?
M. Wilson: Dans votre troisième question, vous avez demandé le nom des sociétés exemptes. Ce sont la Banque du Canada, le Conseil des arts du Canada, Téléfilm Canada, la Commission canadienne du blé, le Centre de recherche pour le développement international et le Centre national des arts. Ce sont les sept sociétés qui ne sont pas assujetties à la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques.
[Français]
M. Fillion: Je vais continuer sur le même tableau. Le total des actifs, soit 85 milliards de dollars, comprend-il également les frais de financement, d'emprunt? Vient-il grossir la dette du gouvernement ou s'il s'agit d'un calcul complètement à part? Est-il inclus dans la dette fédérale?
Ces sociétés ont-elles suivi les mêmes directives que l'ensemble de la fonction publique canadienne en vue des réductions d'effectifs?
[Traduction]
M. Radburn: Concernant la dette, les sociétés ont des actifs qui sont financés soit par des investissements du gouvernement, soit par des prêts du gouvernement ou de tierces parties.
Le gouvernement du Canada tient des comptes sur ses investissements dans les sociétés d'État et il les indique dans les états financiers du Canada, dans un compte d'emprunts, investissement et avances. Par conséquent, d'une certaine façon, cela a en effet une incidence sur les actifs et sur le fonctionnement du gouvernement dans son ensemble - mais pas aussi directement que s'il s'agissait d'activités ministérielles.
Quant aux employés, si j'ai bien compris, vous avez demandé si, en général, les sociétés d'État examinaient l'efficience de leurs activités et prenaient des mesures, comme on le fait ailleurs au gouvernement, pour réduire le personnel. Les sociétés avec lesquelles j'ai traité m'ont indiqué qu'elles étaient en train d'effectuer un examen de ce genre, qui comprend la réorganisation, la réduction des effectifs et le réexamen de leurs activités, et ce, en vue d'améliorer leur efficience. C'est le cas, comme vous l'avez peut-être lu dans les journaux, d'une des sociétés exemptes, la Société Radio-Canada.
Pratiquement toutes les sociétés et autres organismes gouvernementaux s'adonnent actuellement à l'examen et à l'évaluation de leurs activités.
M. Wilson: J'aimerais vous dire une chose. Cette année, le président du Conseil du Trésor dépose à la Chambre des communes le rapport annuel au Parlement sur les sociétés d'État et les sociétés en coparticipation du Canada. Dans ce rapport, on trouve une foule d'informations sur les activités des sociétés d'État. On y trouve notamment un tableau indiquant que le nombre d'employés de ces sociétés a diminué de façon significative au cours des cinq dernières années; il était approximativement de 128 000 en 1990-1991 et il est maintenant d'environ 115 000.
[Français]
M. Fillion: Pouvez-vous préciser si les actifs comprennent également la dette?
[Traduction]
M. Radburn: Les actifs sont financés avec les prêts et les capitaux propres. La dette est incluse.
[Français]
M. Fillion: Puisque la dette est incluse dans leur actif, êtes-vous en mesure de déterminer quel pourcentage de la dette est financé par le gouvernement et, par le fait même, quel pourcentage l'est par des tiers? Cette information se retrouve-t-elle dans les documents?
[Traduction]
M. Radburn: Nous avons les chiffres, madame la présidente. Je renvoie le député à la pièce 10.7 de notre chapitre, page 10-22. Elle indique le ratio d'endettement. Elle montre, qu'au fil des ans, un nombre croissant d'éléments d'actif sont financés avec des prêts plutôt qu'avec des investissements du gouvernement.
M. Wilson: En outre, le rapport de 1995 du président du Conseil du Trésor, page 27, donne des indications sur le financement. Vous n'avez peut-être pas ce rapport, mais vous pourrez l'obtenir.
La présidente: Excusez-moi, mais s'agit-il bien du «Rapport annuel au Parlement sur les sociétés d'État et les sociétés en coparticipation du Canada»?
M. Wilson: Oui. Dans ce rapport, on donne des indications sur les changements dans les emprunts nets au secteur privé. Ces données ne fourniront pas une réponse complète sur le pourcentage des investissements publics par rapport aux investissements privés, mais le renseignement qu'il vous faut peut être trouvé dans le rapport annuel des sociétés ainsi que dans ce document.
La présidente: Monsieur Gilmour, vous avez dix minutes.
M. Gilmour (Comox - Alberni): Il me paraît utile d'avoir une liste plus complète. Il y a 48 sociétés réparties en trois catégories: sociétés non autosuffisantes, autosuffisantes et exemptes. Pourrions-nous avoir une liste des sociétés figurant dans chaque catégorie? Si vous avez une liste de leurs actifs, pourrions-nous l'avoir? Le total du financement budgétaire est de 4,6 milliards de dollars. Pourriez-vous nous donner des précisions sur ce financement? Cela serait très utile au comité.
M. Radburn: Comme l'a indiqué M. Wilson, ces informations détaillées figurent dans le rapport du président du Conseil du Trésor qui est déposé chaque année. C'est l'une des mesures de contrôle et de reddition de comptes qui n'existait pas avant 1984 et qui constitue maintenant une des exigences de la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques.
On trouve dans ce rapport des renseignements très pertinents qui n'étaient pas disponibles auparavant. Nous serons ravis de vous les faire parvenir.
M. Gilmour: J'aimerais revenir à la question de mon collègue sur les sept sociétés exemptes. Dans quelle mesure ces sociétés ont-elles des comptes à rendre? J'avoue que cela me met un peu mal à l'aise.
M. Radburn: Les sociétés exemptes doivent toujours établir des états financiers, dont des extraits sont fournis. Ces états financiers doivent faire l'objet d'une vérification, mais le processus de planification d'entreprise n'est pas assujetti au processus d'approbation imposé aux autres sociétés. En outre, elles ne sont pas tenues de subir un examen spécial tous les cinq ans.
Comme je l'ai déjà indiqué, certaines d'entre elles se sont soumises de leur gré à une vérification d'optimisation des ressources. Nous sommes toutefois d'avis que, si une loi omnibus régit toutes les sociétés d'État, il n'est pas souhaitable qu'il y ait des exemptions. Il serait préférable qu'un seul cadre régisse toutes les sociétés d'État, mais nous n'en sommes pas encore là.
M. Gilmour: Je suis d'accord avec vous. Je ne vois pas pourquoi la Commission du blé, par exemple, devrait être exempte.
Qui a pris cette décision? Est-ce le Cabinet? À quel niveau a-t-on décidé d'exempter certaines sociétés?
M. Radburn: Si ma mémoire est bonne, seule la Banque du Canada et la Commission du blé étaient exemptes dans le projet de loi original. Puis, on a ajouté les sociétés culturelles par suite du débat public qui s'est tenu au moment des première et deuxième lectures du projet de loi. Mais je crois que seule la Banque du Canada et la Commission du blé étaient exemptes au départ.
M. Gilmour: J'ai déposé un projet de loi d'initiative parlementaire sur l'accès à l'information, parce que je ne vois pas pourquoi certaines sociétés d'État ne seraient pas tenues de fournir certaines informations puisqu'elles sont financées avec des deniers publics. Et ces cas-ci ne constituent que la pointe de l'iceberg.
Je m'arrête ici, madame la présidente; je cède la parole à mes collègues.
La présidente: Monsieur Bryden.
M. Bryden (Hamilton - Wentworth): Je m'intéresse aussi beaucoup aux sociétés d'État exemptes. Je n'ai pas eu la possibilité d'examiner les rapports annuels du CRDI. Beaucoup d'argent est investi dans ce centre, le centre en dépense aussi beaucoup, mais je ne saurais vous dire ce qui se passe précisément. Le vérificateur général a-t-il déjà effectué un examen approfondi des activités du Centre de recherche pour le développement international? Vous êtes-vous déjà penché sur la gestion ainsi que sur...?
M. Radburn: C'est un des organismes qui, bien qu'il soit exempt, nous a demandé de faire une vérification d'optimisation des ressources il y a quelques années. C'est ce que nous avons fait et nous avons présenté notre rapport au conseil d'administration du CRDI. Pour répondre à votre question, oui, nous avons déjà effectué un examen des activités de ce centre.
M. Bryden: Pourrais-je obtenir les résultats de cette étude? Pourrais-je voir le rapport?
M. Radburn: Je ne l'ai pas ici. Je vous suggère de le demander au CRDI.
M. Bryden: Mais c'est un document public.
M. Radburn: Nous avons présenté ce rapport au CRDI à sa demande. Je ne vois donc pas pourquoi...
M. Bryden: Cela me ramène à ce qu'a dit mon collègue. C'est une société d'État; il me semble donc que toute évaluation effectuée par le Bureau du vérificateur général, ou par qui que ce soit d'autre, devrait donner lieu à un rapport public.
M. Radburn: Ce n'est pas ainsi qu'est libellée la Loi sur la gestion des finances publiques. Ainsi, les rapports d'examen spéciaux sur les sociétés figurant à la partie II de l'annexe III- les sociétés qui se dirigent vers l'autosuffisance - ne sont remis qu'à leur conseil d'administration. Par conséquent, quel que soit le vérificateur, que ce soit notre bureau ou une entreprise privée...
M. Bryden: Qui commande ces vérifications?
M. Radburn: Les résultats de la vérification spéciale ne peuvent être communiqués qu'au conseil d'administration et ils ne peuvent être rendus publics, à moins que la société elle-même ne décide de le faire.
M. Bryden: Voilà une réforme que notre comité pourrait envisager. Nous pourrions changer cela. Nous pourrions y songer.
M. Radburn: Si tel est le voeu de votre comité ou d'un autre comité, cela nécessiterait probablement une modification à la loi.
M. Bryden: C'est ce que j'ai besoin de savoir.
M. Wilson: Il y a des raisons pour lesquelles les rapports relatifs aux examens spéciaux du vérificateur sont adressés au conseil d'administration et non pas nécessairement au Parlement.
La première raison, c'est que le conseil d'administration et la direction sont les mieux placés pour trouver remède aux problèmes soulevés par le vérificateur. Pour cette raison, il y a une disposition qui permet au vérificateur d'adresser au ministre ou au Parlement un rapport sur les sociétés de l'annexe III-I, seulement lorsqu'on juge que le rapport est d'une importance suffisante pour le soumettre au Parlement. D'ailleurs, cela n'est arrivé que deux fois depuis 1984. Donc c'est arrivé, mais c'est très rare.
M. Bryden: Ce qui me préoccupe moi, comme député fédéral, ou encore comme membre du comité, c'est de savoir comment je pourrais être prévenu dès le début s'il y a quelque chose qui ne va pas au sein d'une société d'État comme le CRDI. On envoie des rapports que je n'ai pas le droit de voir. On produit des rapports annuels, que j'invite mes collègues à lire, mais je ne pourrai jamais savoir où sont passés les 100 millions de dollars.
Mais, un autre ordre d'idée, pourrais-je savoir combien gagnent les administrateurs et les cadres du CRDI, par exemple? Est-ce que c'est public?
M. Radburn: Autant que je sache, ce n'est pas public. Il faudrait vous adresser à la société, et il en serait de même pour les sociétés régies par la partie X. Ces renseignements ne sont pas rendus publics.
M. Bryden: Eh bien, si je peux savoir combien gagne le premier ministre, pourquoi ne puis-je pas savoir combien gagne un cadre d'une société d'État ou un administrateur?
M. Radburn: Si l'on pense que c'est important, il faudrait probablement modifier la loi.
M. Bryden: Ce qui nous ramène à la case départ. Seriez-vous surpris si je vous disais que rien que la semaine dernière, un administrateur de la Société canadienne des postes m'a dit qu'il se sentait totalement incapable d'obtenir la moindre information raisonnable sur le fonctionnement de cette société? Est-ce que cela vous surprendrait?
M. Radburn: Madame la présidente, il y a longtemps que je m'occupe des sociétés d'État. Non, cela ne me surprend pas.
M. Bryden: Je vous remercie de votre réponse.
J'ai noté avec grand intérêt ce que vous avez dit au sujet du conseil d'administration. Pouvez-vous me dire comment l'on peut donner des pouvoirs au conseil d'administration? De toute évidence, qu'il s'agisse d'une société d'État ou d'un organisme de bienfaisance, par exemple, qui est un autre secteur qui m'intéresse beaucoup, souvent le conseil d'administration n'a pas la moindre garantie qu'il obtient des renseignements honnêtes des cadres. Comment régler ce problème?
M. Radburn: Il y a plusieurs choses à dire. Je crois qu'il faut d'abord se pencher sur le processus de nomination et la qualité des membres du conseil d'administration. Nous avons fait des observations à ce sujet dans plusieurs rapports, pour ce qui est du moment où les nominations sont faites et du rôle du conseil d'administration dans la planification de la relève. Le conseil pourrait identifier des gens aptes à devenir administrateurs et soumettre leur nom, même s'il n'appartient pas au conseil d'administration ou à la direction de choisir les administrateurs.
L'autre chose, je crois, c'est qu'il s'agit souvent ici de personnalités et de la manière dont le président-directeur général et son équipe décident de gérer. Certains décident de gérer d'une certaine façon et ne sont peut-être pas aussi coopératifs ou transparents que d'autres avec les membres du conseil d'administration. Il y a plusieurs façons de gérer, et je crois que le mode de gestion que l'on choisit tient largement aux personnalités présentes.
M. Bryden: Autrement dit, on pourrait supprimer certains conseils d'administration, et personne ne le remarquerait. Est-ce bien ce que vous dites?
M. Radburn: Je ne dirais pas cela. La loi exige qu'il y ait des conseils d'administration. Mais je dois admettre franchement que, oui, j'ai vu des conseils d'administration qui étaient prisonniers de la direction. Je n'irais pas jusqu'à dire que cela ne changerait pas si l'on changeait les personnalités en cause.
M. Bryden: Si vous me permettez de continuer, madame la présidente, ce que notre comité doit faire et le sujet sur lequel il doit se pencher - vous l'avez suggéré dans votre exposé - , c'est la grande question de savoir qui gère. C'est parfois le conseil d'administration, mais je doute fort qu'il en soit ainsi dans la plupart des cas.
Croyez-vous sincèrement que les comités peuvent intervenir? Je n'ai pas la moindre idée de la façon dont on pourrait régler le problème.
M. Radburn: C'est une chose dont nous parlons constamment dans nos rapports. C'est le troisième ou quatrième rapport où nous mentionnons la nécessité d'améliorer l'information sur le rendement des sociétés. Je crois que les conseils d'administration et la haute direction peuvent jouer un rôle important dans ce domaine, et c'est l'orientation que nous, les vérificateurs, privilégions.
Je crois qu'il existe un effet d'impulsion, qui faciliterait également ce genre de choses. L'initiative pourrait fort bien venir des membres de votre comité et des sociétés dont vous êtes responsables. Vous pourriez par exemple leur demander quels sont leurs objectifs et comment elles savent qu'elles les atteignent, et vous pourriez de cette façon obtenir des informations sur le rendement qui seraient meilleures sur le plan quantitatif et qualitatif.
M. Bryden: J'ai une dernière question. Le problème tient-il partiellement au fait que les administrateurs sont nommés par le pouvoir en place? Est-ce une lacune? Devrait-on envisager un autre mode de nomination pour les conseils d'administration, un mode qui soustrairait les nominations au favoritisme politique? Je n'aime pas le terme favoritisme politique parce qu'il est mal choisi, mais le fait est qu'on se retrouve tout le temps avec une bande d'amateurs. Est-ce là que le problème se pose?
M. Radburn: Je ne suis pas sûr de pouvoir bien répondre à votre question, de la manière dont vous la posez.
Au cours des dernières années, j'ai remarqué une amélioration dans la qualité des administrateurs. La partisanerie ne semble plus avoir l'ampleur qu'elle avait. J'ai constaté que la qualité des administrateurs avait beaucoup augmenté, même ces dernières années. Les administrateurs posent beaucoup plus de questions et acceptent moins que la direction réponde simplement qu'elle n'a pas les informations voulues ou qu'elle ne les communique pas. J'ai donc vu une amélioration dans la qualité du fonctionnement des conseils d'administration.
Dans notre rapport, nous voulons aller un peu plus loin en exigeant une meilleure information sur le rendement.
M. Wilson: Je tiens seulement à mentionner qu'en 1993, comme Bill Radburn l'a dit je crois, nous avons recommandé que les conseils d'administration établissent des énoncés de qualité pour les administrateurs. De même, en 1995, nous avons fait une étude sur les conseils d'administration des sociétés d'État pour voir si elles avaient établi ces énoncés de qualité, et dans une large mesure, ce n'était pas le cas. Elles étaient très peu nombreuses à l'avoir fait.
Nous croyons fermement que s'il existait des énoncés de qualité propres aux conseils d'administration de chaque société, on serait mieux en mesure de choisir les candidats les plus qualifiés pour ces postes. Nous croyons aussi que le Bureau du conseil privé est très favorable à cette recommandation et qu'il encourage les conseils d'administration à lui communiquer des énoncés de qualité, mais jusqu'à présent, cela n'a pas été une réussite totale.
M. Bryden: Est-ce que les administrateurs de ces sociétés exemptées ou des autres sociétés ont accès aux livres et aux informations de la société au même titre que la direction? Autrement dit, le conseil d'administration peut-il demander certaines informations avant de prendre ses décisions? Le conseil peut-il avoir une idée exacte des salaires et du reste?
M. Radburn: À notre connaissance, oui.
M. Bryden: Merci.
La présidente: Monsieur Gilmour, votre collègue M. Fillion vous laisse intervenir avant lui. Je crois que vous devez nous quitter plus tôt à cause d'un problème d'horaire.
M. Gilmour: Merci. Je n'ai qu'une brève question à poser.
Je viens du secteur des grandes entreprises. J'ai passé 25 ans chez MacMillan Bloedel, qui a été à un moment donné la plus grosse compagnie de Colombie-Britannique. Cette compagnie était responsable devant ses actionnaires. À l'assemblée annuelle, chaque actionnaire pouvait se lever et poser une question au conseil d'administration ou au président. Devant qui les sociétés d'État sont-elles responsables?
M. Radburn: Aux termes des dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques, elles sont en définitive responsables devant le Parlement. Reste à déterminer selon quelles modalités et dans quelle mesure elles sont responsables.
M. Gilmour: C'est à cela que je veux en venir. Elles sont responsables devant le Parlement, mais d'après ce que je vois, le Parlement ne peut obtenir aucune réponse. Nous sommes parlementaires, et nous n'obtenons pas de réponse à nos questions. Cela ne marche pas. C'est peut-être une erreur de raisonnement de ma part, on ne frappe peut-être pas à la bonne porte, ou c'est peut-être un problème de circulation de l'information.
M. Radburn: Comme les autres comités parlementaires, ce comité a l'occasion de convoquer les sociétés d'État et de leur poser les questions qu'ils jugent pertinentes. C'est du reste ce que vous avez l'intention de faire. C'est sans doute comme cela que cette responsabilité s'exerce.
Je pense qu'au fil des années, le Parlement a reçu une information plus complète et plus abondante grâce au rapport du président du Conseil du Trésor et grâce aux rapports annuels des différentes sociétés d'État. On y trouve énormément de renseignements, mais ils sont peut-être insuffisants ou ils ne correspondent pas nécessairement à ceux que vous voulez obtenir. La meilleure chose à faire serait sans doute de demander à ces sociétés d'État de comparaître et de leur poser des questions.
M. Wilson: Il y a deux documents clés qui sont fournis au Parlement et qui favorisent cette fonction de reddition de comptes. Le premier est le résumé du plan d'entreprise, qui est approuvé par le gouvernement pour chaque société d'État. Il est déposé devant le Parlement et le comité peut en prendre connaissance. Le deuxième est le rapport annuel, qui est également déposé devant le Parlement.
Comme nous l'avons dit à plusieurs reprises dans nos rapports, ces plans et ces documents ne sont pas parfaits. Ils ne sont pas aussi bons qu'ils devraient l'être, et c'est sans doute notamment pour cela que vous avez l'impression de ne pas pouvoir obtenir de ces sociétés une véritable reddition de comptes, car leurs rapports n'indiquent pas exactement dans quelle mesure elles atteignent leurs objectifs. Peut-être même ne précisent-elles pas suffisamment leurs objectifs pour que vous sachiez exactement ce qu'elles doivent faire pour réussir.
Voilà donc quelques-uns des problèmes qui se posent. Nous disons qu'au plan structurel, cette obligation de rendre des comptes semble répondre aux besoins des parlementaires, mais qu'apparemment, c'est encore la qualité de ces rapports qui fait défaut.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Monsieur Fillion.
[Français]
M. Fillion: Je trouve ardu de n'obtenir que très peu de réponses aux questions pertinentes qui ont été posées de part et d'autre ce matin. Il est difficile d'avancer. Notre comité est de bonne foi et devrait être en mesure d'avoir des réponses à ses questions.
La présidente: Je pense que les témoins nous donnent les réponses, sauf qu'il y a un vide et c'est à nous de voir...
M. Fillion: C'est justement l'essence de ma question. Nous verrons où se situe le vide. On se demande si les conseils d'administration devraient ou non dévoiler les noms de leurs membres. Les vérificateurs ne nous donnent pas ces renseignements dont ils devraient normalement être au courant.
Vous nous dites dans sept, huit ou neuf paragraphes de votre déclaration d'ouverture comment régler les problèmes que vous relevez. Chacun de vos paragraphes débute par: «Le conseil d'administration pourrait faire ceci... Le gouvernement, par l'intermédiaire du Cabinet, pourrait faire cela... Le Parlement, par l'intermédiaire des comités, devrait faire ceci...», etc. Qui agira dans tout cela? On semble vouloir mettre tous les problèmes sur le dos de l'un ou de l'autre. Si le conseil d'administration n'agit pas, le Parlement réagira peut-être. Qui prendra le leadership dans ces questions et fera avancer les dossiers?
Au niveau de la vérification générale, vous mettez le doigt sur le problème. Vous dites que les sondages que vous avez faits au sein des sociétés d'État révèlent que très peu d'entre elles ont mis en application vos recommandations. Le vérificateur général ne devrait-il pas alors aller devant le Parlement et soulever les lacunes à ce niveau?
[Traduction]
La présidente: Monsieur Radburn, je voudrais faire une remarque avant que vous ne répondiez; vous voyez ici la frustration qu'éprouvent les membres du comité lorsqu'ils veulent obtenir de l'information et vous voyez à quel point nous avons besoin de vos conseils quant à la façon de résoudre certaines de ces difficultés.
M. Radburn: Madame la présidente, je dois reconnaître que je partage en partie cette frustration, car dans nos rapports de 1990, 1991, 1993 et encore une fois dans le rapport dont nous parlons aujourd'hui, nous avons signalé au Parlement et au gouvernement que l'information sur le rendement est insuffisante et qu'à notre avis, les exigences de la loi n'ont pas été adéquatement respectées. Conformément à notre mandat, nous avons donc signalé un ensemble d'insuffisances à l'attention du Parlement et nous avons proposé des solutions concernant les mesures plus énergiques qui devraient être prises.
Nous n'avons pas pour mandat de mettre en oeuvre nos recommandations ou nos propositions, et notre frustration vient du fait que nous répétons les mêmes arguments dans nos rapports d'une année sur l'autre et que les progrès, quoique réels, sont néanmoins relativement lents. Dans notre rapport de cette année, nous désignons les fautifs et nous indiquons les mesures qu'ils devraient prendre pour s'améliorer.
M. Wilson: Je signale que si nous utilisons aussi fréquemment le mot «pourrait», c'est notamment parce qu'à notre avis, les responsabilités des sociétés d'État sont partagées par tous les intervenants. Par exemple, on sait parfaitement qui est responsable des activités et des affaires d'une société d'État. C'est le conseil d'administration. On sait également parfaitement que le président a des responsabilités. On sait que le Parlement étudie les rapports des sociétés d'État et leur demande des comptes.
Le problème survient lorsque l'un des intervenants de la chaîne de responsabilité ne fait pas tout ce qu'il devrait faire. Par exemple, si une société d'État présente au gouvernement un plan d'entreprise dont les objectifs sont imprécis, pourquoi le gouvernement ne les rejette-t-il pas? Si vous trouvez que l'information fournie par la société d'État au Parlement dans ses résumés et ses rapports annuels est insuffisante, pourquoi n'exigez-vous pas une information plus détaillée? Voilà le problème.
Nous disons que chacun doit en faire un peu plus. Ce comité a fait un grand pas en avant, car normalement, il n'est pas d'usage que les comités étudient des rapports annuels, des résumés de plan d'entreprise, qu'ils convoquent une société d'État pour l'interroger sur ses rapports de rendement, son efficacité, etc. C'est pourquoi nous avons utilisé le mot «pourrait». Le problème ne se situe pas à un seul endroit. Tous les intervenants peuvent améliorer la chaîne de responsabilité.
M. Radburn: Je pourrais ajouter un commentaire pour bien indiquer notre mécontentement. Nous avons pensé à prendre le problème par l'autre bout et qu'au lieu d'indiquer les faiblesses, nous pourrions essayer d'identifier les sociétés d'État qui ont amélioré la qualité de leur rapport. Ainsi, il y a deux ans, nous avons lancé le prix d'excellence du vérificateur général pour les rapports annuels. Ce prix a été décerné à deux reprises. Nous avons pensé qu'au lieu de dénoncer les fautifs, il était aussi avantageux de désigner les bons éléments. C'est pourquoi nous avons créé ce prix il y a deux ans. Nous pensons qu'il commence à avoir un effet positif sur la qualité des rapports.
[Français]
M. Fillion: Je comprends le travail que vous faites au niveau de la vérification par le biais des rapports déposés par le vérificateur général. Toutefois, un rapport comme celui-ci est plutôt une étude globale faite sur un ensemble d'activités, dans ce cas-ci sur les sociétés d'État.
Lors de vos vérifications, vous avez énuméré deux ou trois sociétés qui relèvent de notre comité. Si je me souviens bien, il s'agit de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Monnaie royale canadienne et la Société canadienne des postes. Avez-vous déjà fait part au Parlement de certaines lacunes décelées dans une société que vous aviez vérifiée? En avez-vous fait un rapport distinct ou plutôt l'objet de rapports globaux concernant toutes les sociétés? Peu importe l'exemple que vous voulez choisir, est-ce déjà arrivé?
[Traduction]
M. Radburn: Nous avons deux mandats. Le premier est d'effectuer une vérification annuelle auprès des sociétés dont nous sommes le vérificateur désigné. En tant que vérificateur, nous faisons tous les cinq ans une vérification d'optimisation des ressources. Au cours du dernier cycle dont nous parlons dans ce chapitre, nous n'avons jamais jugé opportun de soumettre le cas d'une société d'État ayant fait l'objet d'une telle vérification à l'attention du Parlement, même lorsque la loi nous autorisait à le faire.
Au cours du dernier cycle d'examens spéciaux, il y a eu deux cas où, conformément aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques, nous avons estimé que nos constatations étaient d'une importance telle que nous devions les porter à l'attention du gouvernement, et c'est ce que nous avons fait. La Loi sur la gestion des finances publiques nous autorise à le faire par l'intermédiaire du rapport annuel de la société d'État.
Donc, pour ce qui est des examens spéciaux, au cours du premier cycle, il y a eu deux cas où nous avons fait rapport au Parlement, mais aucun cette fois-ci.
Lors des vérifications annuelles, il arrive assez régulièrement que nous éprouvions des réserves quant aux états financiers des organismes vérifiés. Nous le signalons dans notre rapport de vérification au ministre. Les rapports de vérification sont présentés dans ce document public.
Il y a donc des cas de vérification annuelle et d'examens spéciaux qui font l'objet d'un rapport au Parlement de notre part.
La présidente: Merci. Monsieur Jackson.
M. Jackson (Bruce - Grey): Madame la présidente, je me demande parfois qui effectue la vérification du Bureau du vérificateur général, mais nous n'aborderons pas cette question aujourd'hui. Je suis sûr qu'on a dû prévoir un mécanisme quelconque.
Je voudrais faire une remarque d'ordre général. Nous voulons savoir comment fonctionnent ces sociétés d'État. Elles doivent bien avoir un mandat, et je suppose qu'en ce qui concerne l'obligation de rendre compte et l'exigence d'une bonne gestion, tout organisme à notre époque doit faire preuve de transparence et doit travailler efficacement.
Donc, ma première question est celle-ci: les mécanismes établis pour ces organismes sont-ils désuets et faut-il que nous les changions?
Ma deuxième question est celle-ci: si ce n'est pas le cas, s'il y a en fait suffisamment de mécanismes de freins et contrepoids - reddition de comptes par l'intermédiaire du ministre ou du responsable d'une société d'État - , que devrions-nous faire pour nous assurer que nous éliminons cette frustration?
Je ne crois pas que ce soit juste que nous, ou le Bureau du vérificateur général ou n'importe qui d'autre, aillions faire des observations sans entendre l'autre son de cloche. Ma foi, c'est facile de critiquer, mais les gens ont également leur version des faits qui est valable. Nous voulons voir le bon côté et le mauvais côté. Bien sûr, si l'organisme ne fonctionne pas, il faut y apporter des changements. Mais, à mon sens, cette idée d'aller partout et de porter des accusations n'est pas la meilleure façon de faire les choses.
Examinons la loi. Si la loi prévoit toutes les possibilités, utilisons cette loi pour obtenir les réponses que nous voulons; si ce n'est pas le cas, changeons la loi.
M. Radburn: Madame la présidente, nous avons revu le cadre, et nous avons fait rapport à son sujet; nous avons constaté qu'il est tout à fait correct. Donc, à mon avis, il n'est pas désuet. Il est relativement récent - 1984. Un examen exhaustif avait eu lieu à ce moment-là.
Pour ce qui est de la mise en oeuvre comparativement au cadre lui-même, nous continuons de signaler les aspects qui méritent une certaine amélioration dans la mise en oeuvre.
En ce qui concerne l'amélioration de l'information sur le rendement, nous disons, et cela fait quelque temps que nous le faisons, qu'il est important - et la loi contient des dispositions en ce sens - que les sociétés devraient faire état de la mesure dans laquelle elles ont atteint leurs objectifs. C'est mon avis personnel. Si les sociétés faisaient état de la mesure dans laquelle elles ont atteint leurs objectifs et que ce rapport était public, vous pourriez décider si vous êtes satisfaits ou non de leur rendement réel. Cela pourrait vous amener à réexaminer les objectifs, etc.
Mais de façon générale, je pense que vous avez ici l'occasion de convoquer devant le comité les sociétés pour lesquelles vous êtes responsables et de leur poser les questions que vous jugez appropriées. Je pense que c'est à ce moment là que la reddition de comptes se fait. Nous produisons des rapports de vérification; nous vous fournissons de l'information. C'est aux sociétés elles-mêmes de faire état de leur version des faits et d'en discuter. Votre comité est peut-être le bon endroit pour le faire. Très franchement, cela ne s'est pas produit très souvent par le passé dans n'importe quel comité parlementaire.
M. Wilson: Il y a peut-être un autre aspect à cette question: croyez-vous qu'il est nécessaire de changer la loi touchant les sociétés? Leurs mandats sont-ils désuets, etc.? Nous n'avons pas de commentaires à ce sujet, sauf dans la mesure où nous avons signalé que le gouvernement a, de temps à autre, proposé des modifications à la loi.
L'exemple que nous avons donné est la Société canadienne d'hypothèques et de logement et la Société pour l'expansion des exportations, où les deux lois visaient à réétudier leurs mandats pour que les attentes du Parlement de la part de ces sociétés deviennent plus claires.
Plus le mandat est bien compris, plus les objectifs seront clairs et ainsi de suite. Je crois que cela a effectivement été le cas au cours des dernières années. Puisqu'il y a eu un besoin accru de clarifier le mandat, cela s'est produit.
M. Jackson: Pour ce qui est de la reddition de comptes - et je ne sais pas comment cela fonctionne - cela doit être très frustrant pour un ministre. Je soupçonne qu'une société d'État est établie pour le bien du pays et pour une raison bien précise et qu'elle est gérée par un président ou un président du conseil d'administration ou une autre personne.
Comment la reddition de comptes se fait-elle dans le processus politique? Quelqu'un est ministre responsable d'une société. Quelle est la procédure habituelle? Comment un ministre obtient-il une réponse à une question au sujet de la société, qui peut être, par exemple posée par un député à la Chambre?
M. Radburn: Je ne suis pas sûr d'avoir suffisamment d'expérience en la matière pour être capable de vous répondre d'une façon générale, mais les ministres ont d'habitude des adjoints qui communiquent avec des responsables de la société pour leur poser la question et obtenir une réponse. Cela se ferait sans doute par téléphone. C'est la pratique.
M. Jackson: Donc, on pose une question au ministre qui obtient par la suite, éventuellement, une réponse écrite avant telle ou telle date convenue. Il ne connaît pas nécessairement le fonctionnement de la société.
M. Radburn: Je ne suis pas sûr que le lien soit aussi évident que vous le laissez entendre.
Le ministre reçoit bien sûr le rapport annuel de la société. Les états financiers vérifiés sont envoyés au ministre, comme le rapport annuel, et ils sont déposés. Le ministre doit approuver le plan d'entreprise et le résumé de ce plan. On communique donc une certaine information au ministre et il peut, vraisemblablement, avoir accès à tout autre renseignement supplémentaire qu'il estime nécessaire.
M. Jackson: J'oserais dire que les membres du comité éprouvent une certaine frustration, due en partie au fait que la constitution du comité change assez souvent. Peut-être devrait-on établir une procédure - tout comme on invite le ministre et le vérificateur général à comparaître - selon laquelle le président de la société d'État viendrait ici pour répondre à ces questions. Il me semble que nous tournons en rond et que nous n'arrivons pas à entrer dans le coeur du sujet.
La présidente: Monsieur Harvard.
M. Harvard (Winnipeg - St.James): Monsieur Radburn, si je ne m'abuse, les vérifications sont le lot de toutes les sociétés d'État - aucune n'y échappe - qu'elles soient ou non exemptée des dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques. Si vous prenez d'une part, une société qui n'est pas régie par la loi, comme la Commission canadienne du blé, et, d'autre part, une société qui est régie par la loi comme la Commission de contrôle de l'énergie atomique, les deux font l'objet d'une vérification. Cette vérification est effectuée par des instances différentes, mais, dans les deux cas, ces sociétés sont vérifiées.
Les généralisations comportent toujours des risques, mais, à votre avis, quelles seraient les différences évidentes entre ces deux vérifications? Quels renseignements supplémentaires obtiendrons-nous à propos de la CCEA parce qu'elle est régie par la Loi sur la gestion des finances publiques, que nous n'obtiendrions pas à propos de la Commission canadienne du blé?
M. Radburn: C'est une bonne question.
Je pense que notre position pourrait s'énoncer comme ceci: il est sans doute souhaitable que les organismes gouvernementaux qui jouent un rôle important dans l'élaboration des politiques publiques soient vérifiés par le vérificateur du Parlement.
L'une des différences est que le travail de notre Bureau a tendance à être axé sur les exigences du Parlement; nous servons le Parlement. Je ne suis pas sûr que les sociétés du secteur privé apportent à ce travail le même degré d'attention, de connaissance ou d'expérience.
M. Wilson: Que je sache, l'une des différences les plus significatives, dans le cas de la Commission canadienne du blé, est qu'on a jamais, dans le passé, effectué de vérification d'optimisation, alors que la Commission de contrôle de l'énergie atomique subit un examen spécial quinquennal. Ce qui signifie que cela s'est produit au moins deux fois au cours des dix dernières années.
M. Harvard: À votre avis, c'est cette vérification d'optimisation qui constituerait la différence la plus importante?
M. Radburn: Je pense que cela va plus loin que la simple vérification, bien que cela soit notre domaine. Je pense que les différences sont liées au processus de planification de la société; on exige que les sociétés d'État énoncent leurs intentions, leurs plans, les conséquences financières de l'exécution de ces plans, et qu'elles soient sujettes à une procédure d'approbation. Ce n'est pas qu'elles ne préparent pas de plan, mais que ce plan n'est pas sujet à un processus d'approbation, et que le résumé de leur plan d'entreprise n'est pas rendu public. Je pense que ces différences sont toutes aussi importantes, si ce n'est plus, que ce qui touche la vérification.
M. Harvard: J'ai une autre question, et elle porte, essentiellement, sur ce qu'on pourrait appeler les responsabilités et les règles de l'intendance dans le cadre de notre système politique.
Monsieur Radburn, il existe à l'heure actuelle une école de pensée populiste - entre autres courants de pensée farfelus - selon laquelle les conseils d'administration des organismes gouvernementaux devraient être élus par vote populaire, plutôt que d'être nommés par le gouvernement du jour. Prenons, encore une fois, la Commission canadienne du blé comme exemple. Essentiellement, le mandat de cette commission est de servir les agriculteurs des Prairies, les producteurs. Certaines personnes pensent que les administrateurs qui siègent au conseil de cet organisme, plutôt que d'être nommés par le gouvernement, devraient être élus directement par les agriculteurs. Cela soulève toute une série de questions à propos des responsabilités du gouvernement: comment le gouvernement pourrait-il, par exemple, dans le cas de la Commission canadienne du blé, garantir les ventes, etc.
Selon votre expérience en la matière, si les administrateurs devaient être élus, cela permettrait-il de répondre aux règles ou aux normes de l'intendance, telles que nous les comprenons?
M. Radburn: Il est difficile de répondre à cette question. Vous avez cité la Commission canadienne du blé comme exemple, et je préférerais peut-être répondre d'une façon plus générale, plutôt que de faire allusion à une entité spécifique.
Je pense que si tous les intervenants, dans la chaîne de responsabilité, sont mus par une volonté commune d'atteindre les mêmes buts, les objectifs fixés seront réalisés. Je pense que quand vous déterminez vos objectifs, et les façons de les atteindre, si tout le monde fait preuve de coopération, vous arriverez à vos fins. Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il y a plusieurs façons de faire les choses.
Le gouvernement qui a créé les structures qui existent aujourd'hui a dit - et les textes continuent de dire la même chose - que le gouvernement désire jouer un rôle primordial dans la nomination des membres des conseils d'administration. Cela devrait permettre d'atteindre les buts visés. Si on devait modifier la procédure pour que quelqu'un d'autre joue un rôle primordial dans la nomination des membres des conseils d'administration, je suppose que cela aussi pourrait permettre d'atteindre les buts visés, si on y met de la bonne volonté et si les personnes en cause sont compétentes.
Je pense donc qu'en ce qui a trait à ces procédures, il s'agit plus de questions de forme que de fond. Nous nous intéressons plus à obtenir certains types de rapports sur le rendement. C'est particulièrement complexe pour les organismes du secteur public, parce qu'on trouve toujours un élément commercial qui vient s'ajouter au rôle que jouent ces organismes dans la mise en oeuvre des politiques publiques. Voilà pourquoi nous faisons ces revendications: nous voulons plus d'information sur le succès ou l'échec de ces organismes à ce titre. Dans quelle mesure ont-ils bien exécuté leur rôle en ce qui a trait à la mise en oeuvre des politiques publiques?
M. Wilson: J'aimerais ajouter une précision. La loi existante est assez claire en ce qui a trait à l'attribution des responsabilités: la société d'État est responsable auprès du ministre, qui doit rendre des comptes au Parlement, et le conseil d'administration est responsable de la gestion de la société. Si les membres du conseil devaient être élus, ce conseil serait-il responsable devant le Parlement? C'est une question qu'il faut se poser. Je ne connais pas la réponse, mais au moins vous savez aujourd'hui que le gouvernement, qui doit rendre des comptes au Parlement, choisit les administrateurs, qui sont responsables des activités de la société. Ainsi, les responsabilités de chacun sont assez clairement définies.
M. Harvard: Dans certains cas, bien sûr, les électeurs potentiels, si je puis m'exprimer ainsi, de certains conseils d'administration sont plus faciles à identifier que dans d'autres. Je comprends qu'on puisse choisir la Commission canadienne du blé comme exemple, parce qu'il est assez apparent qu'elle existe pour servir les agriculteurs en premier lieu. Mais, dans le cas de la SRC, qui devrait voter pour élire les administrateurs? Les mandants éventuels constituent un groupe beaucoup plus insaisissable.
Je n'aurais qu'une autre question, qui porte sur ce que vous avez appelé les examens spéciaux. Vous avez dit qu'au cours de l'année qui vient de s'écouler vous avez soumis au Parlement les résultats de quelques-unes de ces examens spéciaux. J'en conclus qu'il y en a plusieurs. On les effectue, mais leurs conclusions ne sont pas divulguées, n'est-ce pas?
M. Radburn: Les exigences de la loi en ce qui a trait aux rapports préparés à la suite de ces examens spéciaux - il s'agit de vérifications comparables aux vérifications d'optimisation - sont communiquées au conseil, d'abord et avant tout. Pour les sociétés qui font appel aux fonds publics pour leur financement - elles sont énumérées dans la partie I de l'annexe III - le rapport d'examen spécial peut être communiqué, au conseil d'administration, au ministre et même au Parlement. Cela se ferait par le biais du rapport annuel de la société elle-même.
M. Harvard: Vous dites, donc, que certaines d'entre elles ne traversent pas toutes ces étapes, et c'est pourquoi nous n'en entendons jamais parler.
M. Radburn: Oui, c'est sans doute le cas de la plupart d'entre elles, à moins qu'une société décide de publier son rapport, comme plusieurs sociétés l'ont d'ailleurs fait volontairement.
M. Harvard: Les examens spéciaux sont en général déclenchés par une préoccupation très grave, parce qu'on craint que quelque chose ne va pas, n'est-ce pas?
M. Radburn: Non.
M. Harvard: Ce ne sont pas toujours des facteurs négatifs qui déclenchent ces examens, si je puis m'exprimer ainsi.
M. Radburn: C'est exact. La loi exige qu'un examen spécial soit effectué tous les cinq ans. C'est l'approche de cette échéance quinquennale qui déclenche en général la tenue d'un examen spécial, et c'est le conseil qui indique qu'il est disposé à entamer les procédures. En tant que vérificateurs, nous rencontrons la direction pour arrêter un échéancier et prévoir les modalités de la vérification. Mais il s'agit d'une exigence de la loi, si vous êtes régi par la partie X. Ce ne sont pas nécessairement des facteurs négatifs qui provoquent la tenue de ces vérifications.
M. Wilson: J'ai un commentaire au sujet de la première question. À la pièce 10.10 de notre chapitre, nous avons identifié, dans le cadre du premier cycle des examens spéciaux, le nombre de rapports fournis au conseil, puis au ministre et au Parlement. En effet, lors du deuxième cycle des examens spéciaux, nous avons présenté nettement plus de rapports au ministre que lors du premier cycle.
Donc, quoique nous ne laissions pas croire que cela se produira, puisque nous avons constaté une augmentation au niveau des rapports présentés au ministre, il est possible que des rapports soient présentés au Parlement lors du troisième cycle, si les mêmes préoccupations sont soulevées pour la troisième fois.
La présidente: Merci, monsieur Harvard.
[Français]
Monsieur Fillion, à vous la parole.
M. Fillion: J'ai deux questions relativement à la pièce 10.10. Ne pourrait-on pas en augmenter la fréquence afin de mieux informer les parlementaires? Divers comités sont-ils responsables des sociétés? Ici, on a trois sociétés. Notre comité ne pourrait-il pas recevoir les rapports de ces trois sociétés, surtout lorsque l'information se limite au conseil d'administration? Ne pourrait-il pas être saisi de ces rapports?
[Traduction]
M. Radburn: La réponse est la suivante: si les comités veulent obtenir ces renseignements, ils devraient, selon moi, demander aux sociétés de comparaître et de fournir ces renseignements. En tant que bureau, nous appuierions probablement la tenue de ce genre de réunions.
[Français]
M. Fillion: Je m'attendais à cette réponse. Par ailleurs, votre paragraphe dit: «Le Parlement, par l'intermédiaire des comités» et ainsi de suite.
Je suis prêt à accepter ce paragraphe, en autant qu'avant que les sociétés ne comparaissent devant nous, nous puissions en avoir un portrait, peut-être pas global. Par surcroît, il me semble que si ces sociétés ont fait l'objet d'une vérification de la part du vérificateur général, nous devrions avoir ces renseignements et un aperçu des lacunes et points forts que vous avez décelés.
Nous ne perdrions pas de temps à définir leur mandat, leurs objectifs et ainsi de suite. Nous disposerions déjà d'un bagage de connaissances qui nous permettrait d'aller directement aux véritables questions lorsque ces gens se présenteraient devant nous.
Pouvez-vous nous remettre ces informations sur les sociétés que vous avez examinées et vérifiées? Des rapports ont sans doute été acheminés à leur conseil d'administration ou au ministre responsable. Notre comité peut-il recevoir les rapports des trois sociétés, soit la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Monnaie royale canadienne et la Société canadienne des postes?
[Traduction]
M. Radburn: Je suis d'accord avec le membre du comité quant à son désir d'obtenir cette information. Dans le cas de nos vérifications annuelles, cette information est publique et disponible. Dans le cas des examens spéciaux, je le regrette, mais les dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques nous obligent à faire rapport au conseil. Les circonstances nous permettant d'aller au-delà du conseil sont assez précises.
Je pourrais peut-être vous suggérer de demander ces renseignements aux sociétés. Nous serions prêts à tout faire pour prêter main forte aux recherchistes afin d'aider le comité, mais je ne pense pas que nous puissions présenter ces examens spéciaux aux comités parlementaires à moins que la loi ne soit modifiée dans ce sens.
M. Wilson: J'aimerais juste ajouter que plusieurs sociétés ont rendu publics leurs examens spéciaux, y compris la Société Radio-Canada, la Commission de la capitale nationale, le Musée canadien de la nature, etc. Donc, certaines sociétés fournissent déjà ces rapports au public. Pour d'autres sociétés, soit on ne leur a pas demandé ces rapports, soit elles ne les rendent pas publics pour diverses raisons.
[Français]
La présidente: Monsieur Fillion, avez-vous d'autres questions?
M. Fillion: Je voudrais remercier mes amis d'en face pour les renseignements. J'aimerais qu'on ajoute à notre horaire la comparution des trois sociétés qui relèvent de notre comité à un certain moment afin de pousser plus loin l'exercice que nous avons fait ce matin.
La présidente: Merci, monsieur Fillion.
[Traduction]
Je crois que M. Bryden a quelques questions complémentaires.
M. Radburn: Madame la présidente, j'aimerais faire une observation. On nous a demandé si nous avions des renseignements à vous fournir au sujet des trois sociétés qui relèvent de vous. J'aimerais attirer votre attention - et cette information est publique, c'est pourquoi je peux vous en parler - sur le rapport de 1994 de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. On y dit ce qui suit, et je cite le rapport annuel:
- Le second examen spécial de la SCHL, effectué en 1994, s'est soldé par des conclusions très
positives, le vérificateur général du Canada ayant informé le conseil d'administration de la
SCHL que les systèmes et pratiques de la société ne présentaient pas de lacune importante.
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Vous leur avez donné l'occasion de se réjouir.
Monsieur Bryden.
M. Bryden: Je suis prêt à être tenu responsable de ces sociétés d'État à mon niveau parlementaire, mais vous dites tous les deux que les conseils d'administration ont accès aux résultats de ces examens spéciaux. Ils ont accès à tous les documents internes de la société. Cependant, il me semble que, dans mon cas, au niveau de responsabilité suivant, je n'ai pas accès aux mêmes renseignements.
Dois-je comprendre que je suis obligé d'être responsable, compétent, prêt à accepter ce que disent ces sociétés, mais en même temps, que je n'ai pas accès aux renseignements qui sont disponibles à un niveau de responsabilité inférieur? Est-ce que le Conseil d'administration a des renseignements que je ne suis pas en droit de recevoir?
M. Radburn: C'est exact. En effet, le rapport d'examen spécial est adressé au conseil. On ne peut donc pas dire que les administrateurs y ont accès; le rapport leur est destiné. La structure est établie ainsi.
M. Bryden: Je veux m'exprimer très clairement. Vous avez dit vous-même qu'on s'attend à ce que ce comité soit plus responsable, ou exige plus de responsabilités de ces organisations. Et pourtant, vous m'avez expliqué que je ne peux pas obtenir les réponses aux questions que je voudrais poser. Est-ce exact?
M. Radburn: Je crois que vous allez obtenir ces réponses en faisant comparaître ces sociétés devant vous et en leur posant les questions. Elles ont les renseignements.
M. Bryden: Oui, mais qu'est-ce qui les obligerait à me faire part de ces renseignements? Est-ce qu'elles ne pourraient pas se protéger en faisant appel à la Loi sur la protection de la vie privée, ainsi qu'à la Loi sur l'accès à l'information?
M. Radburn: Je crois qu'une société d'État réfléchirait longuement avant de refuser à un comité parlementaire les renseignements qu'il désire.
M. Bryden: Mais elle peut le faire, non? Elle n'est pas obligée de divulguer ces renseignements.
M. Radburn: Je crois que même dans la Loi sur la gestion des finances publiques, il y a des dispositions qui prévoient des cas où il n'y aurait pas divulgation d'informations commerciales confidentielles.
M. Bryden: Je tente de faire ressortir un problème. C'est un problème de circulation des renseignements. Ce problème, c'est de savoir si on me garantit qu'on me dit bien ce qui se passe dans ces sociétés. De toute évidence, les rapports annuels sont souvent insuffisants. Je veux savoir que, si je fais comparaître ces sociétés d'État, comme l'a proposé M. Pilon, elles devront bien répondre à mes questions. Si je demande quels sont les salaires ou si je réclame l'examen spécial, sont-elles obligées, oui ou non, d'après vous, de répondre à ces questions si je les pose à une réunion du comité?
M. Radburn: Je ne crois pas pouvoir répondre à votre question aussi directement que vous le souhaitez. Je ne sais pas. Il se pourrait qu'il y ait des règles parlementaires que je ne connais pas qui entrent en ligne de compte, mais je crois que c'est bien ici qu'il faut poser ces questions.
M. Bryden: C'est donc une question... Peut-être que je pourrais vous la poser, madame la présidente. On devrait vérifier exactement quels sont les pouvoirs du comité pour ce qui est d'exiger une réponse de la part des témoins. J'ai une autre petite question, madame la présidente.
Je suis très sensible aux difficultés auxquelles le ministre de la Défense et le ministre de la Santé ont dû faire face pour ce qu'est de la commission Krever et de l'enquête sur la Somalie, où il était question de savoir si oui ou non des fonctionnaires avaient détruit des documents.
Dans les textes de loi, y a-t-il quelque chose qui garantisse qu'un conseil d'administration d'une de ces sociétés obtienne des renseignements justes, tous les renseignements, ou tous les renseignements pertinents de la direction? Comment pouvons-nous savoir si des documents sont détruits?
M. Radburn: Je ne pourrais pas répondre à cette question, madame la présidente.
M. Bryden: Mais cela souligne une lacune dans le système, n'est-ce pas? Si je comprends bien la loi actuelle - et j'espère que vous allez le vérifier pour moi - on ne peut appliquer de sanctions à l'égard des directeurs des sociétés d'État s'ils choisissent de ne pas être francs ou de mal renseigner de façon délibérée leur conseil d'administration. Y a-t-il quelque chose qui garantisse la franchise sur toute la ligne? Nous avons vu, très récemment, qu'il y a raison de croire qu'il pourrait y avoir des problèmes d'honnêteté.
M. Radburn: Madame la présidente, je répondrai en disant que, dans plusieurs de nos rapports, nous avons souligné le fait qu'il n'y a ni mesures incitatives ni sanctions. En général, la loi prévoit ce qu'il faut faire, sans dire que, si ce n'est pas fait, telle chose arrivera, ou si cela est bien fait, il y aura telle récompense ou telle mesure incitative. D'après ce que j'en sais, il n'y a pas de mesure incitative hormis la bonne volonté et la volonté de bien diriger.
M. Bryden: Je ne cherche pas des mesures incitatives; je cherche plutôt une punition pour ces gens qui ne livrent pas des renseignements complets, justes et honnêtes aux personnes responsables, que ce soit le conseil d'administration ou ce comité. Je vous demanderai donc d'étudier ce problème et de suggérer au comité quel type d'instrument législatif, si je puis dire, nous pouvons mettre en place ou envisager pour garantir que les personnes impliquées ont des rapports honnêtes avec le palier de responsabilité suivant.
M. Radburn: Nous prenons note de votre demande, mais je ne suis pas sûr que vous puissiez obtenir la garantie que les gens vont agir de façon correcte.
M. Bryden: Comme je le disais, la punition est une chose utile.
La présidente: Sur cette note punitive, j'aimerais vous remercier de votre tolérance, étant donné toutes les questions qu'on vous a posées. Vous nous avez certainement inspirés pour notre prochaine réunion. J'ai cru comprendre que la Société canadienne d'hypothèques et de logement allait comparaître devant nous la semaine prochaine.
Vous voyez que vous avez inspiré beaucoup de questions autour de cette table, et nous ne voulons pas vous empêcher trop longtemps de continuer votre travail. Je me demande donc si nous pouvons vous envoyer quelques questions par écrit pour que vous y répondiez de la même façon. Ce serait grandement apprécié.
M. Radburn: Nous le ferons avec plaisir, madame la présidente.
La présidente: Je vous remercie de la part de tous les membres du comité. Vous pouvez revenir. C'est un comité qui laisse toujours la possibilité à ses invités de revenir.
M. Radburn: Merci.
La présidente: La séance est levée.