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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 5 novembre 1996

.1109

[Traduction]

Le président: Je déclare la séance ouverte.

Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le comité reprend son examen des initiatives de renouvellement de la fonction publique. Nous sommes heureux d'accueillir ce matin Mme Ruth Hubbard, présidente de la Commission de la fonction publique.

Notre objectif en vous invitant à comparaître aujourd'hui est de nous assurer d'obtenir la vision de la Commission sur l'avenir de la fonction publique ainsi que son point de vue sur les nouvelles initiatives proposées par le Conseil du Trésor, entre autres.

Nous reconnaissons que vous en faites état dans votre rapport annuel, dans une grande mesure. Cependant, nous espérons éclaircir un certain nombre de points au cours de cette séance.

Je vous saurais gré, madame Hubbard, de bien vouloir nous présenter les commissaires ainsi que les hauts fonctionnaires qui vous accompagnent avant de nous faire votre exposé. Merci.

.1110

Mme Ruth Hubbard (présidente, Commission de la fonction publique): Merci, monsieur le président, honorables députés.

[Français]

Permettez-moi d'abord de vous présenter mes collègues, Mmes Ginette Stewart et Mary Gusella, toutes deux commissaires, et M. Jean-François Martin, directeur exécutif des programmes de dotation.

Je suis vraiment ravie d'avoir aujourd'hui la possibilité de discuter du Rapport annuel 1995-1996 de la Commission de la fonction publique.

Comme vous le savez sans doute déjà, la Commission est votre agent, l'organisme parlementaire chargé de veiller à ce que la population canadienne soit servie par une fonction publique hautement compétente, non partisane et représentative.

[Traduction]

Nous prenons cette responsabilité très au sérieux parce que nous savons qu'une fonction publique efficace, professionnelle et motivée par des principes est la pierre angulaire du système canadien de conduite des affaires publiques. Elle joue un rôle important dans l'évolution actuelle et future du Canada, en tant que société; elle est un élément clé du maintien de l'avantage du Canada sur la scène internationale. Nous savons, par contre, que le besoin de changement continue de croître au Canada, comme il le fait dans la plupart des démocraties du monde. Peu importe le point de vue adopté, qu'il s'agisse de la société canadienne dans son ensemble, ou de chacun et chacune d'entre nous, le changement touche à peu près tous les aspects de notre vie.

Confrontés à des défis d'envergure mondiale aussi bien que nationale, les systèmes de gestion publique évoluent et les gouvernements continuent de chercher des façons de mieux servir les citoyens et les citoyennes, de faire face aux problèmes liés au service, à la qualité et au coût. Il s'ensuit que nous voyons le rythme et l'étendue de la réforme du secteur public augmenter et devenir plus complexes, ce qui inclut un accroissement du nombre et de la souplesse des modèles organisationnels applicables aux activités du secteur public. C'est dans ce contexte que la fonction publique fédérale change et s'adapte.

Avant de discuter brièvement des principaux messages de notre rapport annuel, j'aimerais prendre quelques minutes pour parler de la fonction publique, en adoptant deux points de vue différents. Je vais d'abord en parler en tant qu'institution et, ensuite, en tant que regroupement d'hommes et de femmes dévoués, capables, qui tous les jours travaillent pour le bien commun. Je ne suis pas certaine que nous ayons souvent la possibilité de penser à la fonction publique en ces termes.

[Français]

Voyons d'abord la fonction publique en tant qu'institution. Nous soulignons dans le Rapport annuel que la fonction publique est la dépositaire des enjeux à long terme du pays et que, par conséquent, elle doit penser en fonction des répercussions à long terme des gestes posés maintenant.

Cela ne signifie pas qu'elle décide des mesures à prendre, car cette responsabilité incombe aux élus, mais plutôt qu'elle doit conseiller le gouvernement en place du mieux qu'elle peut et exécuter loyalement les ordres et les directives qui lui sont donnés en conformité avec les lois du pays, en fournissant des services au public et en veillant à l'application des lois et des règlements.

[Traduction]

La fonction publique, c'est également un regroupement quelque peu hétérogène d'un grand nombre de personnes; des personnes qui sont les amis, les voisins, les parents et les enfants de ceux que nous voyons comme les Canadiens et Canadiennes ordinaires, des personnes qui ont de bons et de mauvais jours; des personnes qui possèdent un niveau élevé d'études ou qui font profiter leur milieu de travail de leur propre expérience et des personnes qui ont une hypothèque à payer et qui ont au sujet de l'avenir du Canada les mêmes angoisses et les mêmes préoccupations que la plupart de leurs concitoyens et concitoyennes, des personnes qui vivent et travaillent dans des petites villes, qui travaillent pour la majorité à l'extérieur de la région de la Capitale nationale, des personnes qui travaillent surtout avec les idées; d'autres qui travaillent surtout avec les gens; des personnes qui, à l'instar d'autres personnes, veulent accomplir du bon boulot et sentir qu'elles peuvent contribuer à améliorer leur milieu de travail.

Bien sûr, elles ont un emploi alors qu'un grand nombre de Canadiens et de Canadiennes n'en ont pas. Bien sûr, ce sont les contribuables qui paient leur salaire. Bien sûr, les interactions entre la population et les fonctionnaires peuvent en laisser plus d'un véritablement insatisfaits. Bien sûr, il y a place à l'amélioration, mais sans qu'elle s'en rende compte, la population du Canada en est venue à compter sur ses fonctionnaires. Elle compte sur eux pour veiller, par exemple, à ce que les aliments soient inspectés; pour veiller à ce que les appareils médicaux utilisés dans les hôpitaux soient sécuritaires; pour veiller à ce que nous, les propriétaires de petites entreprises, percevions et payions la TPS au même titre que notre concurrent de la rue voisine; pour nous aider à remplir les formulaires qui nous permettront de toucher les prestations auxquelles nous avons droit; pour assurer la sécurité de nos quartiers; pour fournir des conseils spécialisés en ce qui a trait à une gamme de règles et de règlements d'intérêt public.

.1115

Au retour d'un voyage à l'étranger, il ne nous vient jamais à l'idée qu'il pourrait être nécessaire, voire possible, de soudoyer l'inspecteur des douanes à la frontière. Nous présumons également que les renseignements personnels ou délicats recueillis par les gouvernements demeurent strictement confidentiels, qu'ils ne sont pas rendus publics et que nous n'avons pas à payer quelqu'un pour qu'ils demeurent confidentiels.

[Français]

Nous tenons pour acquis que le pays est servi par une fonction publique professionnelle. Jamais nous n'avons pensé qu'il pouvait en être autrement. C'est un élément essentiel de notre système de conduite des affaires publiques, tout cela parce que des milliers de fonctionnaires sont déterminés à s'acquitter le mieux possible de leurs tâches, compte tenu des circonstances, et parce qu'ils agissent de façon à respecter certaines valeurs démocratiques, éthiques et professionnelles fondamentales.

Comme je viens de le dire, la fonction publique professionnelle change et s'adapte. Toutefois, il faut consentir à examiner de nouvelles approches, à aller au-delà des pratiques établies et des vues traditionnelles, à écouter les autres et à apprendre de leurs expériences. Cependant, il ne faut pas oublier que les fonctionnaires sont aussi des personnes.

[Traduction]

La Commission de la fonction publique doit faire et fera sa part pour appuyer et réaliser la réforme de la fonction publique fédérale, et cela à court, à moyen et à long terme. Elle entend appuyer le gouvernement du jour et travailler avec les autres intervenants afin d'assurer le maintien en place d'une institution publique bien vivante, capable de relever les défis de demain.

Dans le Rapport annuel de 1995-1996, nous faisons le point selon un certain nombre de perspectives. Nous avons donc regardé l'avenir afin de déterminer de quelle façon la transformation continue de la fonction publique influera sur sa composition et sa santé dans les années à venir. Puis, nous avons fait un retour sur la fonction publique d'il y a 15 ans pour comprendre l'incidence des changements survenus jusqu'à aujourd'hui. Nous avons également fait état des transactions et des activités réalisées au cours de l'exercice 1995-1996, tout en fournissant un bref aperçu de la nature même de la fonction publique professionnelle que nous sommes dans le contexte des changements importants que nous vivons tous et toutes.

Le principal message de ce rapport est la nécessité d'acquérir de nouvelles compétences, de recruter de nouveaux talents et de préserver les valeurs du secteur public, alors que la portée et le rythme de la réforme du secteur public canadien continuent de prendre de l'ampleur. Pour ce qui est des membres de la fonction publique, nous voyons un ensemble de défis qu'ils devront relever dans un contexte de restrictions continues au regard des possibilités: d'abord, la démographie d'une fonction publique vieillissante et ensuite, l'importance accrue de nouvelles compétences de base selon l'évolution du rôle du gouvernement.

Cela signifie, tout d'abord, la nécessité pour les ministères et les organismes de trouver un équilibre entre les nouveaux talents, grâce au recrutement ciblé auquel contribue la Commission, et le besoin d'investir largement dans le potentiel des fonctionnaires en poste afin de tirer profit de leur expérience et de leurs compétences. De plus, un effort organisationnel accru doit être déployé à tous les paliers de la fonction publique, que ce soit au niveau d'entrée, au niveau de la relève, aux échelons supérieurs ou dans les secteurs fonctionnels spécialisés. Tous ces efforts doivent être agencés à des activités de perfectionnement entre les divers niveaux.

[Français]

Quant aux valeurs, il faut commencer à réfléchir à des moyens permettant de veiller à ce que les valeurs démocratiques, éthiques et professionnelles se répandent dans les diverses organisations, indépendamment de la forme organisationnelle.

La fonction publique professionnelle a toujours joué un rôle central pour ce qui est de relever les défis auxquels le Canada a dû faire face pour créer la société dynamique et prospère que nous connaissons. La Commission est persuadée que les hommes et les femmes qui composent la fonction publique canadienne profiteront de l'occasion et verront dans les défis des possibilités de croissance.

[Traduction]

Merci, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le président: Merci.

Monsieur Fillion, dix minutes.

[Français]

M. Fillion (Chicoutimi): Merci, madame, pour votre présentation.

Vous saviez sans doute qu'en venant devant ce comité, vous auriez surtout à parler de chiffres. Votre énoncé est plutôt, selon moi, philosophique. Je vais aller directement au but en parlant de la réduction de la fonction publique elle-même.

Au tout début, on vous demandait de réduire la taille de la fonction publique et, dernièrement, on a augmenté ce nombre de 10 000 personnes.

Je crois que dans le plan initial, la dotation représentait 1,5 milliard de dollars. Où en est-on rendu avec cela et, compte tenu des 10 000 emplois supplémentaires qui pourraient être coupés, jusqu'où prévoit-on aller?

.1120

Mme Hubbard: C'est au gouvernement de déterminer les activités de la fonction publique et le nombre de fonctionnaires qu'elle comptera pour livrer les services et donner des conseils. Pour cette raison, les explications quant aux coûts et à la diminution des effectifs devraient être données par les représentants du Conseil du Trésor.

Le gouvernement a dit qu'il prévoyait, comme vous l'avez dit, que peut-être 10 000 employés de plus seraient affectés par les réductions de la revue des programmes. Le gouvernement a décidé de prolonger la période de revue des programmes de trois à quatre ans. Il a aussi déclaré qu'il n'avait pas pour objectif de diminuer le nombre de fonctionnaires, mais d'envisager d'une façon un peu différente le rôle du gouvernement tout en continuant de réduire les dépenses du gouvernement.

Le gouvernement pense qu'il aura besoin, pour le downsizing, de 700 millions de dollars de plus.

Je regrette, mais je ne peux pas ajouter davantage à cela, parce que la Commission de la fonction publique est un agent du Parlement, et non un agent qui décide du rôle du gouvernement. Elle est simplement l'agent qui sauvegarde le mérite dans l'institution de la fonction publique professionnelle.

M. Fillion: Ma question sera donc la suivante. En ce qui a trait à la décision de réduire la fonction publique d'encore 10 000 emplois, la Commission s'est-elle demandé quelle sorte de fonction publique on aura?

À un moment donné, il va falloir que cela s'arrête quelque part. Les jeunes ont besoin d'emplois un peu partout. Les personnes âgées vont se retirer. À un moment donné, vous avez certainement votre mot à dire quelque part pour arrêter cette hémorragie.

M. Hubbard: Vous avez parfaitement raison, mais nous devons agir en fonction du rôle d'une fonction publique professionnelle, qui est de donner des conseils au gouvernement et de livrer les services, de faire les choses que le gouvernement a décidé qu'elle fera. Comme le gouvernement l'a expliqué, le programme n'avait pas simplement pour objectif la diminution des effectifs la fonction publique. On a soulevé plusieurs autres questions qu'on considérait importantes.

À l'avenir, la fonction publique sera différente. Elle sera plus petite. Nous savons aussi qu'il y a a eu dans presque tous les pays du monde un changement fondamental dans la nature du travail, dans la façon de faire les choses.

Cette réalité est reflétée dans la fonction publique comme dans d'autres milieux de travail. Pour cette raison, nous verrons à l'avenir peut-être un peu de différence dans les compétences des fonctionnaires. C'est plus une question d'évaluer les capacités dont on a besoin pour travailler en partenariat avec d'autres paliers du gouvernement et d'autres secteurs.

.1125

Pour ces raisons, nous verrons une fonction publique différente à l'avenir. Elle sera plus petite et devra s'adapter à l'environnement. Cependant, les valeurs, à notre avis, resteront les mêmes. Les activités seront faites dans l'intérêt public. C'est important. C'est l'essentiel de la fonction publique: excellence et vérité, des qualités que la fonction publique a démontrées. Nous sommes convaincus qu'elle pourra encore les démontrer à l'avenir.

M. Fillion: Madame, si vous me le permettez, je vais vous rapporter ce que les citoyens de nos circonscriptions nous disent régulièrement. Ils disent que la réduction de la taille de la fonction publique est apparente, mais qu'en parallèle, il existe une autre fonction publique que vous venez de créer en mettant à la retraite des gens qui vont offrir leurs services à contrat. C'est ce que les gens déplorent.

Oui, d'un côté, on s'aperçoit que cela diminue. Il y a des économies d'argent, mais on reprend ces économies d'argent pour créer un système parallèle. À ce moment-là, il est très difficile d'avoir le contrôle sur ce qui se passe, en tout cas en tant qu'élus.

Mme Hubbard: Aujourd'hui, il y a deux façons de faire les choses. L'une est de donner des contrats pour les services. C'est un phénomène qui a commencé non pas dans le secteur public au Canada, mais dans d'autres secteurs, il y a quelques années. Pour certaines activités, on pense que cette façon de faire est plus efficace et plus efficiente que d'autres.

Il est vrai qu'en même temps, il y a beaucoup de fonctionnaires qui quittent la fonction publique. Il est vrai que ces fonctionnaires ont une expertise valable pour les compagnies, pour d'autres gouvernements ou pour n'importe quel autre secteur du gouvernement.

Cependant, certaines règles très strictes ont été établies par le gouvernement pour qu'une personne qui quitte la fonction publique ne puisse pas simplement être embauchée à contrat le lendemain et gagner encore de l'argent. De cette façon, on protège les dépenses du gouvernement. Ces personnes sont qualifiées et ont beaucoup d'expérience. Je pense qu'il n'est pas injuste ou déraisonnable...

M. Fillion: Avez-vous des chiffres pour appuyer ce que vous dites?

Mme Hubbard: Non, mais nous pouvons chercher les réponses à vos questions et vous les transmettre. Cela relève du mandat du Conseil du Trésor. Nous pouvons certainement demander à ces gens de fournir les réponses.

[Traduction]

Le président: Pourriez-vous faire parvenir les réponses au greffier du comité qui les distribuera ensuite. Merci.

[Français]

M. Fillion: On rapporte également dans la population que cela dépend du palier de la hiérarchie de la fonction publique auquel on se trouve. Lorsqu'on est un employé de base, un employé de soutien, on n'est pas remplacé. On n'offre pas de contrats à ces gens. Pour de tels travaux, on se dirige tout droit vers la privatisation, mais lorsqu'on monte un peu dans la pyramide et qu'on arrive chez les cadres intermédiaires ou supérieurs, l'accent est beaucoup mis sur les services professionnels. Ces gens-là sont à leur retraite et offrent quand même leurs services.

.1130

Est-ce que tous, dans chacun des paliers de la hiérarchie, sont traités à peu près équitablement? Je pense qu'il est important de se poser cette question-là. Vous êtes-vous demandé si toute cette catégorie d'employés était traitée équitablement?

Mme Hubbard: Il faut d'abord se demander quelles sont les activités des différents niveaux de la hiérarchie. On sait que, comme dans le secteur privé et dans d'autres secteurs publics de d'autres pays, on peut utiliser la technologie d'une façon qui aide à la livraison des services et que cela affecte les résultats.

Pour ce qui est des travaux qui étaient faits par les gens au premier niveau du gouvernement, cela a un impact technologique. Ce n'est pas une question de ne pas accorder de contrats à ces personnes. Il y a une autre raison.

Je parle de mon expérience. À la Commission, en tant que ministère, nous embauchons des professionnels, des spécialistes, des psychologues, des personnes qui ont une expertise en formation.

Quant à nos activités, on ne sait pas exactement quelle sera la demande pour nos services. Nous offrons des services de base et avons des personnes qui travaillent à cela en tant que fonctionnaires. Cependant, lorsque nous n'avons pas les personnes qu'il faut, nous cherchons l'expertise ailleurs.

Nous procédons à une restructuration de nos activités. Cela affecte la responsabilité des cadres et de ceux qui travaillent à d'autres niveaux de la hiérarchie et dans d'autres ministères. Je ne sais pas si cela répond à vos questions.

M. Fillion: Je reviendrai.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Fillion.

Monsieur Bellemare.

[Français]

M. Bellemare (Carleton - Gloucester):

Lors que je pense à l'intégrité, à l'honnêteté, à l'engagement et aux services, je pense à la fonction publique, aux fonctionnaires et, en même temps, à la Commission de la fonction publique.

Madame Hubbard et compagnie, je dois vous remercier, au nom de ma communauté, pour le travail que vous faites. J'ai des inquiétudes cependant, pas en ce qui a trait à votre travail, mais en ce qui a trait à l'évolution de la fonction publique, qui se fait malgré vous, à cause des compressions budgétaires dues au déficit et à la dette. On pense qu'on peut régler la question du déficit sur le dos des fonctionnaires. Cela m'inquiète beaucoup, au point même de me choquer.

Nous sommes en train de créer - c'est une observation personnelle et je l'ai faite au Conseil du Trésor l'autre jour, lors d'une séance de notre comité - une deuxième fonction publique, c'est-à-dire des sous-traitants de l'extérieur qui n'ont ni la culture, ni la mémoire, ni l'intérêt que les fonctionnaires ont actuellement et ont eus dans le passé.

On embauche des gens en sous-traitance pour faire des tâches qui peuvent durer une journée, une semaine, un mois ou un an et qui sont très déterminées. On dirait que le travail est fait en conséquence des budgets.

.1135

Pour ce qui est de la question du

[Traduction]

dégraissage et de la sous-traitance, dans votre exposé, vous parlez d'un renouvellement de la fonction publique, mais vous avez certainement constaté que sur le plan démographique, notre fonction publique vieillit. Dix ans passent très vite. Pour le constater, il suffit de revenir dix ans en arrière, soit en 1986. On a l'impression, du moins pour ce qui est des gens de mon âge, que 1986 c'était il y a quelques jours, et que 1996 est arrivé extrêmement vite. L'an 2006 arrivera encore plus vite.

Quel genre de fonction publique aurons-nous alors? Aurons-nous alors deux fonctions publiques, une au travail et une au chômage?

Mme Hubbard: La réponse courte à votre question est la suivante: nous sommes d'avis que cela ne sera pas le cas. Je pense que la raison pour laquelle nous disons cela c'est parce que la façon dont le travail est effectué varie considérablement. Les fonctions publiques professionnelles et les gouvernements de nombreuses sociétés démocratiques dans le monde cherchent de nouvelles façons de répondre davantage aux besoins des citoyens et de maintenir les activités qui sont considérées dans ces pays comme étant dans l'intérêt public tout en tenant compte de leur capacité financière.

Si vous me demandez à quoi ressemblera la fonction publique dans 10 ans, je vous répondrai qu'elle sera différente. Je dirais qu'elle sera différente particulièrement sur le plan de la prestation des services. Il y aura une grande variété d'arrangements et de partenariats, d'alliances. Dans notre pays, comme dans d'autres pays, nous sommes de plus en plus interdépendants entre gouvernements...

M. Bellemare: Ne risquons-nous pas ainsi de perdre le contrôle sur notre mission, sur votre mission, aux mains de puissants sous-traitants?

Mme Hubbard: Je pense que la réponse à cette question, une réponse qui est à notre avis importante, se trouve au chapitre 3 de notre rapport annuel.

Nous disons qu'en raison du rythme accéléré et de la portée élargie de la réforme de la fonction publique au Canada, il est vraiment nécessaire de commencer à se pencher sur ce qui constitue la meilleure façon de s'assurer, en ce qui concerne les activités exercées dans l'intérêt public, peu importe la forme organisationnelle, qu'il existe des garanties appropriées. Nous en avons besoin pour assurer le maintien d'un comportement individuel et organisationnel approprié.

La préoccupation que vous exprimez est une préoccupation que nous comprenons. Étant donné ce qui se passe autour de nous, il est vraiment important pour les parlementaires, pour les citoyens et pour les fonctionnaires de s'interroger sur la meilleure façon de ne pas pécher par excès de zèle.

M. Bellemare: Le déficit et la dette ont créé une mentalité de droite dans toutes les collectivités. Nous faisons appel à la sous-traitance pour régler le problème. La sous-traitance signifie d'une part la compression des effectifs de la fonction publique, mais n'allons-nous pas ainsi créer ce qu'on appelle une double fonction publique? Si le Conseil du Trésor nous dit qu'il épargne ainsi 9 milliards de dollars, cela comprend également les services fournis, non seulement les fonctionnaires.

La question que je voudrais poser, non pas à vous, mais au Conseil du Trésor, est la suivante: combien d'argent dépensons-nous en sous-traitance? J'ai des doutes à ce sujet. Je lance le défi à tout le monde partout, y compris au Conseil du Trésor et à votre ministère. Peut-être que nous épargnons 5 milliards de dollars, non pas 9 milliards de dollars, et nous dépensons sans doute 10 à 15 milliards de dollars en sous-traitance. À mon avis, ça ne constitue pas un bon équilibre. La sous-traitance est plus coûteuse, et je ne parle pas ici uniquement du coût sur le plan financier.

Ma question est donc la suivante: la réduction des effectifs, du nombre d'emplois, comme on dit, est une question qui soulève énormément d'inquiétude. Il y a deux ans, non pas le gouvernement, mais les médias ont dit que plus de 45 000 emplois seraient touchés. Naturellement, nous savons tous que ce n'est pas parce qu'un emploi est touché qu'une personne est mise à pied. La réduction des effectifs se fait par attrition, par les départs volontaires en raison des incitatifs. La fonction publique est en train de se transformer en service privé. Récemment, dans les médias, on ne parle plus de 45 000, mais plutôt de 55 000 emplois. Cela me rend très hostile, car cela crée un sens d'insécurité dans ma collectivité et ailleurs. Ce n'est pas bon pour les affaires. Le secteur privé est atteint par ricochet.

.1140

Quels sont les chiffres réels? Les médias ont-il obtenu ces chiffres tout à fait estimatifs en bavardant avec des fonctionnaires? Les médias cherchent toujours un titre à sensation pour que les gens lisent leurs journaux.

Mme Hubbard: Le Conseil du Trésor peut certainement vous dire exactement combien de gens ont quitté la fonction publique au cours de la dernière période et ce, avec ou sans incitatif de quelque sorte. Il existe sans aucun doute un nombre estimatif de postes, qui n'est pas exactement le même nombre. On pourrait vous l'obtenir, et c'est avec plaisir que nous vous l'obtiendrons.

Je pense que le chiffre estimatif auquel nous avons fait allusion précédemment était un chiffre utilisé par le gouvernement pour déterminer de quelle somme additionnelle il aurait besoin pour les programmes d'encouragement au départ anticipé des fonctionnaires dont le poste risque de disparaître suite au prolongement de l'examen des programmes pendant une quatrième année.

La question que vous posez à cet égard est tout à fait légitime: la façon dont le travail est effectué dans la fonction publique fédérale est-elle la plus efficace et la plus efficiente? Je pense que c'est la question que vous posez et il ne fait aucun doute que le gouvernement serait heureux de tenter d'y répondre.

M. Bellemare: Voici ma dernière question pour ce premier tour de table. Y aura-t-il d'autres réductions des effectifs? Nous sommes passés de 45 000 à 55 000. Y aura-t-il d'autres réductions? Est-ce que les gens ont été désignés ou est-ce qu'ils le seront?

Mme Hubbard: Je crains de ne pouvoir répondre à cette question pour la fonction publique en général. En ce qui a trait à notre propre organisation, qui a été touchée par la réduction des effectifs, je pense que l'on peut dire que nous avons effectué la plupart des réductions requises par le recentrage de la Commission de la fonction publique. Il reste un impact pour 1997-1998 sur les gens qui travaillent à la Commission de la fonction publique. Nous faisons de notre mieux pour nous assurer que les gens dont les emplois risquent d'être touchés à ce moment-ci soient mis au courant. Bon nombre d'employés au sein de notre organisation qui ont appris que leur poste risquerait d'être touché plus tard ont décidé, lorsqu'ils ont appris la nouvelle, de prendre leur propre décision quant à ce qu'ils avaient l'intention de faire.

Je ne peux que répéter ce que je crois comprendre que le gouvernement a dit. Le dernier chiffre estimatif donné par le gouvernement, c'est-à-dire que 10 000 emplois de plus seraient touchés, est le meilleur chiffre estimatif de l'impact total pour le moment. Mais je suis certaine qu'on pourrait fournir au comité le nombre exact de fonctionnaires qui sont partis, si c'est ce que le comité veut avoir.

Le président: Oui. Le comité aimerait avoir ces renseignements.

Merci, monsieur Bellemare.

Monsieur Gilmour, s'il vous plaît.

M. Gilmour (Comox - Alberni): Merci, monsieur le président.

À la page 66 de votre rapport annuel de 1995-1996, en ce qui a trait à l'équité en matière d'emploi, il y a 59 p. 100 de femmes, 2 p. 100 de minorités visibles, 1 p. 100 de personnes handicapées et 2 p. 100 d'Autochtones. Étant donné les nouvelles mesures législatives en ce qui a trait à l'équité en matière d'emploi, prévoyez-vous changer cette répartition au sein de la fonction publique?

.1145

Mme Hubbard: La réponse courte à votre question c'est que notre objectif consiste à continuer de tenter de faire des progrès sur le plan de la représentation dans la fonction publique. La nouvelle loi sur l'équité en matière d'emploi accordera certainement davantage d'attention à la question, mais je pense que depuis un certain nombre d'années nous tentons de nous assurer que la fonction publique professionnelle est très compétente, non partisane et représentative.

Au sujet de la représentation de la population, permettez-moi de vous dire que dans un pays comme le nôtre, il est extrêmement important que la fonction publique soit représentative et ce, pour deux raisons. Tout d'abord, la fonction publique change et devient de plus en plus complexe. J'ai constaté qu'aucune des solutions qui fonctionnaient auparavant ne fonctionne dorénavant, ou si elle fonctionne ce n'est que pour une courte période où elle a des effets secondaires pervers.

En tant que gestionnaire, ce que je tente de faire à l'heure actuelle, ce qui n'est pas ce que je tentais de faire pour les mêmes raisons il y a dix ans, c'est voir plus de diversité possible. Si ce que je pensais qui fonctionnait auparavant ne fonctionne plus, alors j'ai besoin de différentes façons de voir les choses. Plus grande sera la diversité, plus grande sera la différence, et c'est sans doute beaucoup plus vrai que cela ne l'était il y a quelques années sur le plan de la gestion.

L'autre observation que j'aimerais faire, c'est que nous croyons qu'il est important que la fonction publique fédérale représente les gens qu'elle dessert. Si l'on regarde uniquement les chiffres en ce qui concerne la fonction publique fédérale actuelle, on a l'impression que les hommes et les femmes sont assez bien représentés à la fonction publique fédérale, que les deux groupes de langues officielles sont assez bien représentés. Environ les deux tiers des fonctionnaires fédéraux travaillent à l'extérieur de la région de la Capitale nationale.

Pour ce qui est du recrutement, si vous regardez certains des chiffres dans notre rapport annuel, vous verrez que nous faisons en fait un assez bon travail pour ce qui est de recruter des gens, étant donné les possibilités limitées, par rapport à leur disponibilité sur le marché du travail. C'est le cas pour les minorités visibles, pour les Autochtones. C'est moins vrai en ce qui concerne les personnes handicapées. Mais nous n'avons certainement pas encore une fonction publique représentative, c'est-à-dire pour ce qui est de retrouver des gens de divers groupes partout dans la fonction publique et les femmes, les minorités visibles, les Autochtones et les personnes handicapées ne sont certainement pas représentés à tous les niveaux de la fonction publique.

Allons-nous continuer à faire des progrès à cet égard? Nous allons certainement faire des efforts dans ce sens. Est-ce difficile dans l'environnement actuel? Oui, c'est difficile. Est-ce important de le faire? Nous pensons que c'est important. Par ailleurs, c'est tout à fait en accord avec la notion d'une fonction publique très compétente et professionnelle.

M. Gilmour: Supposons par exemple qu'un membre d'une minorité visible soit postulant, ce serait facile si cette personne était la plus qualifiée. Cependant, si vous aviez un postulant qui n'était pas membre d'une minorité visible mais qui était le plus qualifié, cette nouvelle loi vous oblige-t-elle dorénavant à faire la différence ou à choisir entre membres d'une minorité visible et le mérite?

Mme Hubbard: Non, la nouvelle loi concernant l'équité en matière d'emploi n'a pas apporté de changements fondamentaux. Pour ce qui est de nos responsabilités - et vous trouverez cela dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, c'est-à-dire la Loi que nous administrons - la loi nous oblige à ne pas faire de discrimination fondée sur toute une série de motifs, notamment l'origine ethnique. Par ailleurs, cette loi nous donne le mandat d'utiliser certains pouvoirs pour administrer et élaborer des programmes en vue d'améliorer l'équité en matière d'emploi, des programmes que l'employeur, le Conseil du Trésor, estime nécessaires, et d'en assurer un accès juste et équitable. Donc, l'entrée et les promotions au sein de la fonction publique se font selon le mérite, soit selon une norme fondamentale de compétence ou selon le candidat le plus qualifié.

Nous avons le pouvoir d'intéresser des membres spécifiques de groupes cibles et d'aider à les perfectionner, et nous le faisons dans certains cas précis. Mais même dans ces cas, ce que nous faisons... par exemple, les ministères peuvent avoir des postes de stagiaire. Nous pouvons aider le ministère à choisir les personnes compétentes qui peuvent être formées pour améliorer leur capacité, même si elles n'ont pas encore cette plus grande capacité. Après une période de perfectionnement, ces personnes peuvent être nommées lorsqu'elles ont démontré leur compétence. Par la suite, leur progression au sein de la fonction publique se fait selon le principe du mérite.

Donc, à notre avis, le mérite et l'équité en matière d'emploi ne sont pas deux principes qui s'opposent.

M. Gilmour: Bien. Merci.

Vous occupez-vous des contrats avec les syndicats?

.1150

Mme Hubbard: Nous ne négocions pas avec les syndicats. C'est à l'employeur de le faire. Nous travaillons avec les syndicats et nous les consultons. En fait, la loi qui nous régit l'exige. Lorsque nous prenons des règlements ou que nous envisageons des politiques qui affectent les lieux de travail, la loi exige que nous consultions les syndicats. Je dois dire que nous avons à mon avis d'excellentes relations de travail avec les dirigeants des syndicats.

M. Gilmour: Dans le budget des dépenses supplémentaire, vous demandez 5,5 millions de dollars pour un budget total de 107 millions de dollars. Comme la taille de la fonction publique diminue, elle devrait avoir besoin de moins d'argent. Pourquoi demandez-vous 5 millions de dollars de plus au Conseil du Trésor?

Mme Hubbard: Oui, ce budget des dépenses supplémentaire représente le report sur les exercices suivants. Lorsque la fin d'un exercice approche, un ministère peut s'apercevoir qu'il serait en fait plus judicieux de ne pas dépenser les montants alloués par le Parlement pour cet exercice, plutôt que d'essayer de dépenser cet argent. Afin d'encourager cette bonne pratique de gestion, le Conseil du Trésor permet un report de 5 p. 100 - il me semble qu'il le fait avec l'appui du Parlement et des comités parlementaires. Cela signifie que si on a un crédit parlementaire de 200 millions de dollars et si cette somme n'est pas dépensée de façon utile pendant l'année pour laquelle elle a été allouée, il est alors possible de reporter jusqu'à 5 millions de dollars à l'exercice suivant. C'est ce qu'on appelle un report, et le mécanisme qui permet de le faire est le budget des dépenses supplémentaire.

Voilà donc pourquoi nous demandons 5 millions de dollars additionnels dans notre budget des dépenses supplémentaire. Nous avons décidé que cette somme ne pourrait pas être dépensée de façon aussi utile au cours du dernier exercice financier mais que nous pourrions le dépenser utilement au cours du prochain exercice.

Si le présent exercice est typique, nous nous retrouverons sans doute avec le même montant qui n'aura pas été dépensé et que nous pensons pouvoir dépenser à des fins plus utiles au cours de l'exercice suivant. Étant donné que nous pouvons reporter nos crédits à la fin de chaque exercice à l'heure actuelle, cette technique encourage une meilleure gestion de la part des ministères. Nous nous prévalons donc de cet avantage comme d'autres ministères.

M. Gilmour: Ai-je encore le temps de poser une petite question?

Le président: Permettez-moi de prendre quelques secondes, car je tiens à éclaircir ce point.

Peut-on dire alors qu'en fait, les 5,5 millions de dollars que vous demandez dans le budget des dépenses supplémentaire fait partie du montant initial de 102 millions de dollars, et que le budget des dépenses supplémentaire est la technique qui permet de reporter ce montant ou est-ce un nouveau montant d'argent?

Mme Hubbard: Non, ce n'est pas un nouveau montant pour l'exercice pour lequel on demande l'autorisation. Si vous voulez, cela fait partie du budget de l'an dernier.

Le président: Très bien, c'est ce que je voulais éclaircir.

Monsieur Gilmour.

M. Gilmour: M. Bellemare parlait de la sous-traitance. Quel mécanisme utilisez-vous pour décider s'il est plus avantageux de recourir à la sous-traitance ou de faire faire le travail à l'interne, pour le contribuable? Y a-t-il des lignes directrices afin de...?

Mme Hubbard: Oui, le Conseil du Trésor a des lignes directrices pour aider les ministères à prendre de bonnes décisions quant au recours à la sous-traitance plutôt que de faire faire le travail à l'interne. À la Commission de la fonction publique, en tant que ministère, lorsque nous voulons décider de quelle façon un travail doit être effectué, nous nous posons les questions qu'il est logique de se poser: est-ce le genre de travail pour lequel il existe une compétence ailleurs que dans la fonction publique? Y a-t-il un marché suffisant pour ce travail de telle sorte que si nous décidons de faire faire le travail en sous-traitance, aurions-nous un meilleur rapport qualité-prix? Serait-il préférable de faire faire le travail à l'interne ou à l'externe? Est-ce que la demande...?

Par exemple, nous retenons les services d'experts pour évaluer les possibilités de promotion de certains fonctionnaires. Bon nombre de ces évaluateurs sont eux-mêmes des fonctionnaires, et nous les formons pour qu'ils puissent faire ce travail. Cependant, étant donné que nous ne pouvons prédire quelle sera la charge de travail, il se peut que nous fassions appel à des gens de l'extérieur qui ont une certaine compétence pour gérer cette petite partie. D'un autre côté, si nous devions effectivement engager ces gens de façon permanente, ou même pour une période déterminée - de six mois à un an - nous n'en aurions peut-être pas besoin.

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Nos approches sont conformes aux lignes directrices établies par le Conseil du Trésor. Il s'agit de déterminer quel est le meilleur rapport qualité-prix, ou de nous assurer qu'en fait, nous ne désavantageons pas nos propres employés en éliminant leurs postes et en les remplaçant d'autres façons, par exemple.

Nous avons au sein de notre organisation un comité d'examen des contrats qui tente de s'assurer que nos pratiques de sous-traitance sont raisonnables, justes et équitables. Nous en discutons souvent avec nos syndicats locaux, les syndicats qui représentent les employés au sein de notre organisation.

M. Gilmour: Merci.

Le président: Merci, monsieur Gilmour.

Ça nous amène à la fin de notre premier tour de table. Nous allons maintenant entreprendre un deuxième tour de table de cinq minutes pour chaque question et réponse. Nous allons commencer par M. Murray.

M. Murray (Lanark - Carleton): Merci, monsieur le président.

Madame Hubbard, je vous remercie d'être ici.

En écoutant vos observations, j'ai trouvé intéressant ce que vous avez dit au sujet de la fonction publique professionnelle. Je pense qu'il est utile qu'on nous rappelle la valeur d'une fonction publique professionnelle, mais il m'est venu à l'esprit qu'on avait peut-être toujours l'impression au sein de la commission ou peut-être au sein de la fonction publique en général, que les Canadiens n'appréciaient peut-être pas leur fonction publique.

Je voudrais tout simplement dire que l'époque où les Canadiens en général critiquaient les fonctionnaires est peut-être révolue. Je pense que cela remonte en fait à l'époque de la récession, lorsque les travailleurs du secteur privé étaient mis à pied tandis que ceux du secteur public ne l'étaient pas. La situation a changé au cours des dernières années. Des fonctionnaires partout au pays ont perdu leur emploi, à divers niveaux du gouvernement, et en grand nombre.

Je pense qu'alors que les Canadiens se penchent sur leurs institutions nationales, dont l'une, je crois, peut être définie comme la fonction publique, ils ne souhaitent pas miner ou même détruire bon nombre de ces institutions. Par conséquent, je pense qu'il n'est plus nécessaire pour nous d'être sur la défensive en ce qui concerne la fonction publique.

C'était l'observation que je voulais faire, et j'aimerais vous poser une petite question rapidement: à votre avis, y a-t-il toujours beaucoup d'insécurité et le moral est-il toujours aussi bas au sein de la fonction publique? Dans l'affirmative, est-ce parce que les gens perdent leur emploi? Ou, comme je l'entends souvent, est-ce parce que les gens ont l'impression qu'ils travaillent trop fort, de trop longues heures, sans l'appui dont ils ont besoin?

Mme Hubbard: Je suis certainement d'accord avec vous lorsque vous dites que l'opinion publique continue à évoluer. Je pense que de plus en plus dans les journaux et dans les talk-shows, on s'aperçoit que les Canadiens sont de plus en plus conscients du fait que certaines activités d'intérêt public qui leur sont chères sont en fait des activités qu'ils veulent maintenir. Je suis donc certainement d'accord avec cela.

Ce que je voulais vraiment dire dans mes observations, c'est que parfois, nous oublions jusqu'à quel point nous avons de la chance d'être Canadiens. Je ne voulais pas tellement parler du fait que parfois les fonctionnaires sont dénigrés, mais plutôt du fait qu'en tant que citoyens, nous tenons pour acquis le travail de ces milliers de fonctionnaires.

Pour ce qui est du sentiment d'insécurité et du moral très bas chez les fonctionnaires, étant donné l'ampleur des changements que nous avons connus au cours des dernières années et l'incertitude entourant l'avenir dans la fonction publique, je pense qu'il serait très surprenant que le moral au sein de l'institution ne soit pas affecté. Cela étant dit, cependant, le fait même que les Canadiens peuvent continuer de compter sur ce genre de services prouve que nous avons des centaines de milliers de fonctionnaires au pays qui vont travailler tous les jours et qui font preuve du même dévouement.

Donc, je ne pense pas qu'ils soient déprimés, si je puis m'exprimer ainsi. Je pense qu'ils tentent d'accepter des façons tout à fait nouvelles de voir leurs responsabilités et que certains d'entre eux s'en tirent mieux et plus rapidement que d'autres.

M. Murray: Puis-je revenir à cette question? Je suis désolé de vous interrompre, mais j'aimerais parler de certains des autres exercices de renouvellement de la fonction publique de ces dernières années.

Je pense par exemple à John Edwards et à Fonction publique 2000. Qu'est-il arrivé à ce projet? Je ne sais pas où ce projet en est aujourd'hui. Cet exercice a-t-il permis de tirer des leçons que nous trouvons utiles aujourd'hui? Vous avez dit que la fonction publique change et s'adapte, et j'aimerais comprendre qui est à l'origine de ce changement. Il doit y avoir quelqu'un qui examine toute la question. Qui est à l'origine de ce changement qui semble être en train de s'opérer?

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Mme Hubbard: Je pense que ce qui est surtout à l'origine de ce changement récemment est la formulation par le gouvernement des six questions qui ont été proposées dans le cadre de l'examen des programmes, et les ministres ainsi que les conseillers de la fonction publique auprès des ministres ont dû réfléchir attentivement aux réponses.

Quel est le rôle du gouvernement? S'agit-il d'une activité que les gouvernements doivent faire? Y a-t-il un autre palier de gouvernement qui pourrait mieux le faire? Même s'il s'agit de quelque chose qui doit être fait, en a-t-on les moyens? Ce sont des questions très profondes et auxquelles il est très difficile de répondre. Elles ont eu un impact sur l'accélération de la réflexion au sujet du rôle du gouvernement et par conséquent au sujet du rôle de la fonction publique. Jamais cela ne s'était fait dans la même mesure auparavant.

Vous avez parlé de FP 2000. Je dois vous dire que j'y ai participé. Cet exercice a entraîné des modifications importantes à certaines de nos lois, notamment à celles que nous sommes chargés d'administrer, et ces modifications nous assurent une plus grande souplesse.

C'était aussi une façon de penser. Il se trouve que j'ai participé au groupe de travail de FP 2000 sur le service au public. Nous avons examiné des questions fort intéressantes, comme de savoir ce que signifie le service au public quand il s'agit d'un organisme réglementaire dont les clients sont des gens qui ne ressentent pas particulièrement le besoin d'être servis. Il est plus difficile de répondre à cette question qu'on pourrait le penser.

Je crois que les résultats de cet exercice continuent à se faire sentir dans divers endroits de la fonction publique. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment de «big bang», de solutions idéales qui transformeraient tout du jour au lendemain de façon à ce que nous vivions dorénavant dans le meilleur des mondes possibles. J'ai l'horrible sentiment que le rythme toujours plus rapide auquel les changements se produisent continuera à s'accélérer.

M. Murray: Faut-il que ce soit un sentiment horrible? Ne pourrait-ce pas être un bon sentiment?

Mme Hubbard: Sur le plan humain, il y a des jours où je trouve que c'est horrible, et il y en a d'autres où je trouve que c'est là une occasion formidable. Étant humains, nous arrivons à nous en accommoder mieux certains jours que d'autres, et nous ne nous en accommodons pas de la même façon que nos amis et voisins. Les fonctionnaires y réagissent de façon très humaine, très individuelle, en fonction notamment de leur vision du monde et ils pourront en tirer de bons résultats dans la mesure où ils auront l'impression de pouvoir faire en sorte que le travail se fasse mieux et que le public soit mieux servi et qu'ils pourront ainsi en tirer une certaine satisfaction. La situation ne sera pas la même pour tout le monde.

Le président: M. Fillion puis M. Bryden.

[Français]

M. Fillion: Plus tôt, vous avez signalé que vos rapports avec le syndicat de la fonction publique étaient, d'après vous, excellents.

Je vois dans votre rapport que vous utilisez assez souvent des décrets. On en énumère toute une liste aux pages 42 et 43.

Utilisez-vous ces décrets-là lorsque cela ne va pas dans la fonction publique ou si c'est un moyen de classer ou de retarder des retraites anticipées ou de changer le personnel d'un ministère à un autre, etc.?

Mme Hubbard: La Commission utilise les décrets pour différents objectifs, pour des circonstances individuelles ou pour faciliter la réduction des effectifs dans la fonction publique. Chaque fois qu'on utilise ce mécanisme, nous sommes obligés d'expliquer dans quel but et pourquoi.

Si vous me le permettez, je vais demander à Mme Stewart d'expliquer les décret et les différents objectifs visés lorsque nous les utilisons. C'est une façon d'administrer la loi qui, selon nous, est dans l'intérêt public.

Ginette.

Mme Ginette Stewart (commissaire, Commission de la fonction publique): Le principe est que la Commission doit se pencher, dans toutes les circonstances, sur l'intérêt public. CommeMme Hubbard l'a dit, nous vivons un éventail d'expériences qui deviennent de plus en plus compliquées. Les décrets sont des outils que nous utilisons quand nous croyons qu'il est dans le meilleur intérêt de la fonction publique de procéder de telle ou telle façon.

.1205

Je vais vous donner un exemple. À la page 42, on cite un décret ayant trait à la nomination de certains fonctionnaires de la province de l'Alberta au Service correctionnel du Canada.

M. Fillion: C'est pour l'intégration des fonctionnaires à la fonction publique.

Mme Stewart: Oui.

M. Fillion: Celui-là s'explique, parce que ce sont des fonctionnaires d'une province qui intègrent la fonction publique du Canada.

Pour ces cas, il faut avoir un mécanisme, mais qu'en est-il des autres? Vous m'avez sorti le cas le plus facile, le plus facilement explicable, le plus compréhensible, mais dans les autres cas, ce sont des changements de fonctions du personnel. Est-ce un outil que vous utilisez régulièrement? Il y en a quelques-uns de cités ici, mais en discutez-vous avec le syndicat de la fonction publique? Des ententes se font-elles à ce moment-là? Y a-t-il vraiment acceptation de part et d'autre? On travaille tout de même avec des personnes humaines.

Mme Stewart: Pour répondre à la première partie de votre question, à savoir si on en fait plus, par expérience personnelle, ayant été impliquée dans le projet de loi sur la réforme de la fonction publique, le projet de loi C-26, je peux dire que le nombre de décrets d'exemption a diminué énormément.

Par exemple, nous avons introduit la notion d'«employé occasionnel». Auparavant, beaucoup de ces nominations se faisaient par décret d'exemption. Maintenant, avec le changement à la loi, le nombre de ces décrets a diminué énormément. Cela couvre la première partie de votre question.

Cependant, j'aimerais revenir à la complexité des différentes situations que l'on vit dans la fonction publique. Nous sommes toujours à l'affût de moyens nous permettant de faciliter certaines situations, comme dans l'exemple que j'ai utilisé plus tôt.

En ce qui a trait à l'implication des syndicats, la réponse est oui.

M. Fillion: À ce moment-là, il y a un genre d'entente entre le syndicat et la fonction publique elle-même

Mme Stewart: On discute des projets avec les représentants syndicaux qui sont impliqués dans la situation particulière.

M. Fillion: Sont-ils seulement informés ou s'ils prennent part à la décision?

Mme Stewart: Les syndicats sont consultés, mais la décision finale en ce qui a trait au décret demeure du ressort de la Commission.

M. Fillion: À la page 46, vous parlez d'exemptions particulières. Cela touche quelques personnes. Pouvez-vous me donner un compte rendu de ce qui s'est passé à ce moment-là? C'est à la page 46.

Mme Stewart: Oui.

M. Fillion: À un moment donné, on a besoin d'un système comme celui-là pour régler des cas très particuliers. Que s'est-il passé dans ces cas-là?

Mme Stewart: Je regrette, monsieur, mais je ne peux répondre en détail à votre question. Je vais être obligée de revenir avec l'information que vous désirez.

M. Fillion: Vous allez la faire parvenir au comité?

Mme Stewart: Oui.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Fillion.

Monsieur Bryden.

M. Bryden (Hamilton - Wentworth): Je vous remercie.

À la page 22 du rapport annuel, sous la rubrique «Équité en matière d'emploi», on trouve un paragraphe où il est question de ce qu'on appelle des initiatives de mesures spéciales et de programmes de mentorat à l'intention des membres des groupes désignés. J'ai lu le passage en question et je ne comprends pas vraiment ce dont il s'agit. Pouvez-vous me donner des détails pour m'aider à comprendre tout cela? De quoi s'agit-il? De quoi parlez-vous?

Mme Hubbard: Oui, le programme des initiatives de mesures spéciales est un programme qui a été mis sur pied par l'employeur, par le Conseil du Trésor. Il s'agit d'un programme de quatre ans qui entraînera, si je me souviens bien, des dépenses de quelque 55 millions de dollars - après l'examen des programmes - sur les quatre années visées. Le programme comprend la création d'un fonds.

L'objet est essentiellement de reprendre les meilleurs éléments des programmes antérieurs d'équité en matière d'emploi afin de les inclure dans ce nouveau programme et d'en modifier quelque peu l'orientation. Avant la mise en place du programme des initiatives de mesures spéciales, on mettait surtout l'accent, d'après ce que j'en sais, sur le recrutement, sur des mesures spéciales destinées à attirer des membres des groupes désignés dans la fonction publique.

.1210

Les changements survenus en 1994 ont montré que le recrutement est important, et nous continuons à faire du recrutement, mais qu'il fallait aussi garder nos employés et assurer une gestion axée sur la diversité. Quand, pour tout vous dire, les gestionnaires ne gèrent pas le lieu de travail de manière à accepter les points de vue différents qui sont apportés à la table de discussion, il ne sert pas à grand-chose de recruter des membres des groupes désignés. Si nous recrutons ces gens en nombre important mais qu'ils repartent aussitôt pour diverses raisons, nous ne réalisons pas vraiment ce que le gouvernement cherche à réaliser. À vrai dire, ce n'est pas non plus ce que nous voulons comme résultat.

Il s'agit d'un fonds et d'un programme. Je crois savoir qu'une quarantaine de ministères et organismes y participent. Ces ministères et organismes nous soumettent des propositions où ils font état de projets de dépenses - l'argent pourrait venir en partie de leur budget et en partie du fonds - visant à apporter certaines améliorations. Les projets sont variés, allant d'une collection de livres, de vidéos et de documents sur la diversité à un programme dans les Territoires du Nord-Ouest appelé projet Omnibus.

Je suis allé dans le Grand Nord il y a environ un an pour célébrer le 25e anniversaire d'un programme appelé Programme de promotion professionnelle dans le Nord, qui vise à recruter des candidats dans la fonction publique fédérale dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon. Ces 25 années sont la raison pour laquelle, je tiens à vous le dire, on retrouve parmi les décideurs de la fonction publique, des grandes entreprises et des administrations locales beaucoup de diplômés du programme. Ces gens-là sont entrés dans la fonction publique fédérale, ont acquis de l'expérience et reçu une formation, puis ils sont passés à autre chose.

Le Fonds de mesures spéciales se trouve être en quelque sorte le prolongement de ce Programme de promotion professionnelle dans le Nord qui a donné de si bons résultats. Il s'agit d'un programme de l'employeur que nous aidons à administrer.

M. Bryden: Par employeur, voulez-vous dire le Conseil du Trésor?

Mme Hubbard: Oui.

M. Bryden: D'accord. Qu'en est-il du mentorat? Cela fait-il partie du même programme?

Mme Hubbard: Oui. Les ministères pourraient par exemple soumettre un projet de programme de mentorat. Les fonds accordés serviraient en quelque sorte de fonds de démarrage.

M. Bryden: Mais qu'entendez-vous par mentorat?

Mme Hubbard: Je ne peux que supposer ce dont il s'agit. Je ne suis pas spécialiste de la gestion de la diversité.

Il se peut bien qu'on soit arrivé à la conclusion que, pour attirer des gens et les garder - par exemple, les Inuit qui font partie de la fonction publique dans le Grand Nord - , il faut les aider à faire la transition vers un milieu de travail qui est très différent du milieu où ils ont grandi. Il se peut que, dans le Nord, les gens soient obligés de travailler très loin de leur famille. Il leur est donc très difficile de s'adapter, et l'adaptation est aussi difficile pour les membres de leur famille, s'ils décident de les amener avec eux.

Dans ces cas-là, il ne s'agit pas de mentorat comme tel; il s'agit plutôt de reconnaître que, pour attirer et garder cet employé très compétent, il faut tenir compte de son confort et de celui de sa famille à divers égards. Il ne s'agit pas de s'ingérer dans sa vie, mais simplement d'être conscient de ses besoins particuliers.

M. Bryden: Je peux comprendre l'utilité d'un programme de ce genre dans le Grand Nord, mais en va-t-il de même des membres des autres groupes désignés à Ottawa, par exemple?

Mme Hubbard: Oui, il en irait de même. Le programme des initiatives de mesures spéciales se distingue par sa souplesse en ce sens que le ministère ou l'organisme peut présenter tout projet qu'il considère utile pour accroître la diversité de l'organisation en fonction des problèmes particuliers qui se posent. Les projets seraient donc de nature et de forme différentes.

M. Bryden: Puis-je vous demander, dans ce cas-là, de me donner des détails sur ce programme? Je voudrais l'examiner en profondeur, car je ne sais pas d'où il est sorti. Pouvez-vous me dire qui a autorisé l'affectation de 55 millions de dollars à ce titre en 1994? Quelles sont les modalités?

Mme Hubbard: Eh bien, le gouvernement a décidé qu'il voulait mettre sur pied un programme pluriannuel...

M. Bryden: Il s'agit donc d'une décision du conseil des ministres?

Mme Hubbard: ... mais le Parlement aurait approuvé les crédits.

M. Bryden: Bien entendu, il n'aurait pas été facile de voir cela dans le détail.

Mme Hubbard: C'est la dernière-née d'une série d'initiatives, si vous voulez. Les gouvernements s'intéressent à la gestion de la diversité depuis de nombreuses années. Il s'agit donc de la forme actuelle de l'investissement centralisé à cet égard, mais nous nous engageons à vous fournir les détails.

.1215

Le programme des aides techniques en est un autre exemple. Les personnes ayant des déficiences qui ont besoin d'appareils pour les aider à fonctionner à leur lieu de travail peuvent emprunter ces appareils grâce à cet élément du programme, que nous administrons. Pour les personnes ayant des déficiences, c'est donc tout autre chose.

M. Bryden: Oui, je peux comprendre que cela serait utile.

Mme Hubbard: Nous serions en tout cas très heureux de vous fournir plus de détails et nous les ferons parvenir au comité.

M. Bryden: Je vous en serais très reconnaissant, monsieur le président.

Mme Hubbard: Vous aimeriez avoir des détails au sujet du type d'activités.

M. Bryden: Oui. En fait, je voudrais une analyse complète des activités de chaque ministère, car si je comprends l'esprit dans lequel ce programme a été mis en oeuvre, tel que vous l'avez décrit, j'ai besoin de voir dans les faits comment les ministères l'appliquent. Nous avons fait la même expérience dans le cas de l'attribution de marchés de services avant que notre président actuel n'assume ses fonctions. Quand nous avons examiné la situation dans chaque ministère, nous avons constaté qu'elle était très différente de ce que le Conseil du Trésor croyait qu'elle était. Nous voudrions donc voir un peu ce qu'il en est cette fois-ci.

Puis-je passer très rapidement à deux autres points? Vous avez parlé brièvement du pourcentage d'Autochtones dans la fonction publique. J'ai lu quelque part - et je ne sais pas trop si c'était dans la documentation que nous avons là - qu'il y a maintenant beaucoup de fonctionnaires d'origine autochtone au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Pouvez-vous me donner les chiffres pour ce ministère, puis les chiffres concernant les Autochtones dans l'ensemble de la fonction publique? Pour que vous compreniez exactement ce que je cherche à savoir, il semble que la fonction publique compte à l'heure actuelle entre 2 p. 100 et 3 p. 100 d'Autochtones. Cette proportion serait-elle considérablement réduite si l'on en soustrayait les Autochtones qui se trouvent au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien?

Mme Hubbard: J'ai un chiffre à vous donner qui correspond, d'après ce que l'on me dit, à la proportion actuelle d'Autochtones au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. D'après ce que l'on me dit, leur proportion est actuellement de 22 p. 100. Je n'ai toutefois pas les chiffres relatifs au budget de base et au nombre estimatif de personnes qui se trouvent au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, mais nous pouvons certainement vous les fournir. Je pense bien qu'il s'agit d'une assez faible proportion du total.

M. Bryden: Vous comprenez donc ce que je cherche à savoir: je veux soustraire le nombre d'Autochtones qui se trouvent au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien du nombre de ceux qui se trouvent dans l'ensemble de la fonction publique pour avoir une idée de la présence des Autochtones dans la...

Mme Hubbard: Oui, je comprends. Nous vous ferons parvenir cette information. Si je devais vous donner une estimation, je dirais que le nombre est assez peu élevé et que la proportion de l'effectif total est si faible qu'elle n'aurait sans doute pas d'incidence sur le pourcentage global. Ce n'est là qu'une estimation, cependant, et je ferai en sorte de vous communiquer les chiffres.

M. Bryden: Très bien.

J'ai une dernière question. Vous avez dit quelque chose qui m'a frappé. Vous avez dit que l'autonomie gouvernementale attirait des Autochtones compétents de la fonction publique. Je ne sais pas comment réagir à cela. Est-ce quelque chose de positif ou de négatif selon vous du point de vue de l'effet sur la société canadienne dans son ensemble et de la place de la fonction publique dans la société canadienne? Pouvez-vous nous toucher un mot à ce sujet?

Mme Hubbard: Je veux bien essayer. Étant donné que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a pour mission d'assurer le transfert de responsabilités aux gouvernements des Premières nations et d'accélérer le développement et le transfert de pouvoirs au niveau local dans le Nord, il me semble que la réalisation de cet objectif exige que l'organisation puisse compter sur un assez fort pourcentage d'Autochtones, mais aussi que beaucoup d'Autochtones se joignent à la fonction publique fédérale pour y acquérir les compétences dont ils pourraient se servir pour pouvoir à l'avenir jouer un rôle efficace dans leurs propres administrations.

Il me semble que, d'une part, du point de vue de la société dans son ensemble, cela a un effet positif. Dans une perspective plus large, quand il s'agit par exemple du programme de promotion professionnelle dans le Nord, le fait qu'une proportion aussi élevée de personnes qui servent l'intérêt public dans le Nord, au niveau du gouvernement local, du gouvernement territorial ou d'entreprises privées, aient une certaine expérience de la fonction publique est le signe que le gouvernement fédéral, en qualité d'employeur, a fourni à ces personnes une excellente occasion d'apprendre et aussi d'apporter une contribution. Si tous les Autochtones qui travaillent à la fonction publique devaient partir demain, s'ils estimaient que leur place était désormais auprès des gouvernements autochtones, nous n'aurions plus une fonction publique fédérale très représentative.

Ce qu'il faut faire à mon avis, c'est examiner de façon différente chacun de ces groupes qui font notre diversité, pour essayer de comprendre ce qui les motive et trouver un moyen convenable de faire en sorte, d'une part, que nous ayons une fonction publique représentative et, d'autre part, que nous répondions aux besoins et aux aspirations propres aux groupes en question. Dans certains cas, il se peut que leurs aspirations soient quelque peu différentes de celles de la grande majorité des Canadiens dans l'ensemble.

.1220

Le président: Merci. M. Jackson a maintenant la parole.

M. Jackson (Bruce - Grey): Madame Hubbard, j'ai trois questions.

La première tient au fait que nous entendons sans cesse dire, que cela vienne des médias ou de mes collègues, que ce sont les bureaucrates qui mènent tout. Le mot «bureaucrate» évoque l'idée que la fonction publique s'arroge le pouvoir du ministre qui devient alors captif. Le fait que votre rôle consiste uniquement à conseiller le ministre fait-il contrepoids à cela? S'agit-il là d'une critique injuste? Comment percevez-vous le mot «bureaucrate»?

La deuxième question est la suivante: pourquoi deviendrais-je fonctionnaire? Pourquoi déciderais-je de m'engager dans la fonction publique? Quel intérêt professionnel pourrais-je y trouver? Qu'est-ce qui fait l'intérêt d'une fonction dans la fonction publique comparativement à une carrière dans un autre secteur?

La troisième question est celle-ci: quelles sont les compétences et les qualités dont j'aurais besoin pour devenir fonctionnaire?

Mme Hubbard: Permettez-moi d'essayer de répondre à vos questions dans l'ordre. Bien sûr, il y a ceux qui disent, et ceux qui le croient, je suppose, que les bureaucrates mènent tout et que les ministres sont captifs de leurs bureaucrates.

Je suis moi-même arrivée à la fonction publique en 1963, j'hésite à le dire - bien entendu, je n'avais alors que trois ans. J'ai donc travaillé avec beaucoup d'hommes et de femmes politiques, de comités parlementaires, et de ministres. J'ai toujours trouvé facile d'être de l'avis opposé.

Les ministres peuvent prendre des conseils de diverses sources et ils le font. Les bureaucrates sont une de ces sources. Le haut fonctionnaire qui fait bien son travail trouve des moyens de faire en sorte que le ministre, quel qu'il soit, se sente à l'aise quand il s'agit de prendre une décision difficile, que ce soit en sa qualité de responsable d'un portefeuille en particulier ou de membre du conseil des ministres.

J'ai notamment appris au cours des nombreuses années que j'ai passées dans la fonction publique - et je crois que les hauts fonctionnaires arrivent tous à cette conclusion - que la satisfaction du travail bien fait vient non pas de ce que le ministre ou le gouvernement fasse ce que vous auriez fait à leur place, mais que le ministre ou le gouvernement comprenne les questions qui se posent parce que vous aurez été en mesure de les leur expliquer de façon à ce qu'ils puissent prendre une décision. Il est donc possible, je suppose, sur le plan humain, que les bureaucrates commencent à s'inquiéter avec le temps du fait que les gouvernements et les ministres ne suivent pas nécessairement leurs conseils dans les décisions qu'ils prennent.

J'ai toujours été consciente du fait que ce qui comptait, ce n'était pas qu'ils suivent les conseils que je leur avais donnés. Voici plutôt les questions que je me posais: leur ai-je bien expliqué les faits, même s'ils ne voulaient pas forcément entendre ce que j'avais à leur dire? Leur ai-je donné les meilleurs conseils que j'ai pu glaner d'une multitude de sources? Suis-je persuadée que je ne leur ai pas présenté une seule idée, mais bien une multitude d'idées pour qu'ils puissent prendre une bonne décision? La décision au bout du compte est forcément une bonne décision, car en ma qualité d'électrice j'ai élu ces gens-là. Au risque de paraître faussement sentimentale, c'est comme ça que c'est censé marcher et l'expérience que j'ai m'amène à conclure que c'est plus ou moins comme ça que ça marche.

Pourquoi devrais-je m'engager dans la fonction publique? C'est une excellente question. Les gens me la posent souvent, mais je dois dire que les jeunes que je rencontre aujourd'hui sont tout aussi enthousiastes et ont autant à coeur de servir l'intérêt public, de servir leur pays, que nous quand nous avions leur âge. Les possibilités qui s'offrent à eux sont loin d'être ce qu'elles étaient, quand j'ai moi-même terminé mes études, mais je crois que le défi est en quelque sorte plus grand. Il est un peu plus difficile de tenter de donner de bons conseils quant aux orientations à suivre quand il faut faire preuve de prudence sur le plan financier. Il est plus intéressant et peut-être plus gratifiant de trouver des moyens de faire en sorte que les gouvernements travaillent avec d'autres gouvernements, avec les organismes à but non lucratif et avec d'autres groupes. C'est plus compliqué. D'une certaine façon, aux yeux du bureaucrate, plus la situation est complexe, plus il faut faire preuve d'ingéniosité et de créativité et plus la satisfaction qu'on en tire est grande. Ainsi, les défis sont simplement plus formidables.

Je crois aussi que les jeunes d'aujourd'hui ne se font pas la même idée du travail que nous nous en faisons. Quand j'ai terminé mes études universitaires, je ne me souciais pas tellement de savoir dans quelle carrière j'allais me lancer. J'avais la certitude absolue que quelqu'un m'embaucherait pour faire quelque chose et que, tant que je ne déciderais pas de faire autre chose, je pourrais continuer à gagner ma vie. Les jeunes d'aujourd'hui ne pensent pas de la même façon. Ils ont une meilleure idée de ce qui les attend. Ils ont une conception différente du travail et de ce qui leur procurera une certaine satisfaction.

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Je suis donc très optimiste et je dirais simplement aux jeunes: si vous aimez relever des défis et faire un travail à la fois intéressant et gratifiant, si vous avez vraiment l'impression de vouloir apporter votre contribution, vous pourriez peut-être vous engager dans la fonction publique. Si vous ne considérez pas le service public comme une vocation, si votre satisfaction réside ailleurs, vous ne devriez peut-être pas envisager un séjour dans la fonction publique. Je ne crois toutefois pas que l'aspect vocation du service public a beaucoup changé.

En ce qui concerne votre troisième question au sujet des compétences et des qualités nécessaires, il me semble que, pour occuper un poste de commandement dans la fonction publique, il faut des compétences très semblables à celles qu'il faut pour réussir dans le secteur privé; il n'y a qu'à lire et à écouter ce qui se dit dans le monde. La différence tient au fait que dans le secteur public, c'est l'intérêt du public qui prime et qui sous-tend tous nos efforts. Nous devons composer avec l'incertitude. Nous devons composer avec la complexité. Nous devons travailler en partenariat. Nous devons comprendre l'interdépendance. Il y a des choses que nous n'avions pas besoin de faire aussi bien auparavant et qui seront dorénavant critiques. Nous devons mieux gérer les relations et les partenariats.

Au risque d'aller à contre-courant, je dirais que l'une des qualités les plus importantes des chefs de file de l'avenir - cela est sans doute tout aussi vrai à l'extérieur du secteur public - sera ce que j'appelle le souci du perfectionnement personnel continu. L'important n'est pas de participer à des cours ou des séances de perfectionnement, mais de toujours chercher à s'améliorer. Peu importe que je sois très bien payée, que j'occupe un poste important, que je commande le respect, je ne suis pas parfaite, je ne sais pas tout et je dois m'efforcer constamment de faire mieux. Il s'agit d'être ouvert à la possibilité de se perfectionner. C'est une vulnérabilité qui n'est guère à la mode dans notre société.

Voilà comment je répondrais à cette question.

M. Jackson: Je note avec intérêt que beaucoup de pays font face à la même situation que nous. Les données démographiques dans le monde sont telles que beaucoup de ceux qui occupent les postes supérieurs doivent partir. À ce propos, on dit notamment que, non seulement il en coûte cher pour inciter ces gens à partir, mais on se trouve ainsi à perdre certaines des compétences dont vous parliez et on ne remplace pas nécessairement ceux qui partent. On dit qu'il faudrait peut-être ralentir l'exode à cause des effets négatifs qu'il pourrait avoir. Avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet?

Mme Hubbard: L'expérience que j'ai en tant que gestionnaire m'amène à dire que, quand les gens décident après mûre réflexion qu'ils veulent vraiment faire autre chose de leur vie, ce n'est pas une très bonne idée d'essayer de les garder. Cela ne veut pas dire que ce sont de mauvais éléments. Cela ne veut pas dire que leur contribution n'a pas été utile. Cela veut simplement dire qu'ils ont décidé qu'ils voulaient faire autre chose. Je ne pense pas qu'il soit sage de garder des gens qui ont déjà choisi ou décidé de faire autre chose.

Par contre, je ne crois pas non plus que ce soit une bonne idée de dire que tout le monde devrait partir et que nous pourrions alors recommencer. Nous avons un investissement énorme en ces gens qui constituent notre mémoire et notre expérience institutionnelles, et c'est là un investissement précieux. Ce qu'il faut, c'est d'essayer de trouver un juste équilibre.

Je ne voudrais pas qu'on s'imagine que les gens de mon âge - c'est fou ce qu'on peut se sentir vieux quand on dit ça - n'ont plus rien à apporter. Par contre, je dois reconnaître que, quand je m'assois autour d'une table avec des gens qui occupent des postes semblables aux miens et que nous sommes tous à peu près du même âge, l'autre génération ne se fait guère entendre. Nous n'avons le bénéfice ni de la voix de l'autre génération ni de son point de vue. Si nous voulons réfléchir à l'avenir de la fonction publique, il me semble que notre réflexion doit être éclairée vraisemblablement par l'expérience et la sagesse des gens de mon âge mais aussi par les idées, les espoirs, les aspirations et l'expérience de ceux qui seront là longtemps après que j'aurai cessé de faire ce que je fais en ce moment.

Nous devons avoir à coeur le bien du système et mettre aussi dans la balance les aspirations et les intérêts de ceux qui y travaillent, quel que soit leur âge ou leur expérience.

Le président: Tout à l'heure, quelqu'un a parlé des jeunes et des raisons qui pourraient inciter les jeunes à s'engager dans la fonction publique. Vous parlez dans votre mémoire du vieillissement de la fonction publique, et il ne fait aucun doute qu'on est très conscient de la jeune génération aujourd'hui. Le gouvernement sait bien qu'il doit régler certains problèmes auxquels les jeunes font face. La fonction publique a-t-elle envisagé la possibilité de mettre sur pied un programme quelconque de stage d'apprentissage pour les jeunes, qui nous permettrait d'attirer ainsi des jeunes dans la fonction publique de façon à non seulement leur offrir une bonne expérience de travail et peut-être aussi la possibilité d'acquérir des compétences qu'ils pourraient mettre à profit dans le secteur privé, mais à s'attaquer à ce problème du vieillissement de la fonction publique?

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Mme Hubbard: Chose certaine, le gouvernement fédéral a toujours eu, depuis aussi longtemps que je me souvienne, des programmes d'emploi d'été pour les étudiants. Avant que je n'entre moi-même dans la fonction publique, c'était d'ailleurs là une des seules possibilités qui s'offraient aux jeunes femmes qui voulaient gagner assez d'argent pendant l'été pour pouvoir poursuivre leurs études universitaires à l'automne. Il en est toujours ainsi.

Il existe des programmes d'alternance études-travail, il existe divers mécanismes que les gouvernements ont déjà mis en place et il existe aussi des programmes qui ont été mis en place par le gouvernement actuel. Ces programmes ont l'avantage de répondre aux besoins des ministères et organismes en fait de main-d'oeuvre et de permettre à ces gens - bien souvent ce sont des étudiants, mais pas forcément - d'acquérir une expérience de travail. Je sais que certains ministères qui ont des besoins spécialisés ont des programmes particuliers qu'on pourrait considérer comme des programmes de stage parce qu'ils veulent maintenir leurs liens avec la communauté scientifique ou avec quelque autre communauté.

Nous avons aussi, bien entendu, des programmes de recrutement ciblés qui visent à attirer les diplômés d'établissements d'enseignement postsecondaire dans la fonction publique - dans l'espoir de les garder bien sûr - dans des domaines où il existe des besoins réels, en économique, par exemple, en mathématiques, en statistique mathématique et en gestion. Nous essayons de recruter les plus brillants, les meilleurs, et de les suivre dans leur perfectionnement jusqu'à ce qu'ils atteignent le niveau de cadre moyen.

Ces mécanismes existent donc. Ils semblent donner des résultats. Il se peut bien qu'il y en ait d'autres que nous pourrions examiner. Il se peut bien qu'il y ait des programmes qui conviennent davantage à certains ministères et organismes qu'à l'ensemble de la fonction publique, et je ne serais pas surprise si, dans leurs efforts pour assurer leur renouvellement, les ministères et organismes mettaient davantage l'accent sur les programmes de ce genre.

Le président: Bien. Je vous demanderais, si vous le voulez bien, de faire parvenir au comité des chiffres en ce qui concerne certains des objectifs et peut-être aussi le nombre de jeunes qui trouvent des emplois dans la fonction publique grâce aux programmes d'emplois d'été et à d'autres programmes.

Mme Hubbard: Bien sûr. Nous serons heureux de vous communiquer cette information.

Le président: Monsieur Bryden, vous avez une dernière observation à faire?

M. Bryden: J'ai effectivement une toute dernière observation à faire. Étant donné que l'équité en matière d'emploi vise essentiellement à faire en sorte que la fonction publique soit représentative de la société canadienne, il me semble qu'il faudrait mettre l'accent sur sa représentativité en fonction des divers groupes d'âge. Ce devrait être notre première priorité. C'est vraiment la seule observation que je tenais à faire.

Mme Hubbard: Il ne fait aucun doute à mon avis que nous avons besoin dans la fonction publique des divers points de vue qu'apportent les différentes générations. Je crois qu'il faut, par souci d'équilibre, investir dans ceux qui ont déjà une certaine expérience et une certaine compétence et qui participent à la mémoire institutionnelle et tenir compte à la fois de la sagesse qu'on acquiert ou qu'on devrait du moins acquérir avec l'âge et de l'enthousiasme qu'apportent les jeunes. Pour que la fonction publique soit vraiment compétente et professionnelle, il faudrait assurer l'équilibre entre les deux.

Le président: Bon, je croyais que c'était la dernière intervention. M. Harvard vient de lever la main.

M. Harvard (Winnipeg - St. James): Je veux vous poser une question, car vous avez parlé tout à l'heure du fait que le service public était une vocation. Il se trouve que je crois vraiment qu'il s'agit d'une vocation, tout comme la politique est une vocation.

Ma question est la suivante: faut-il s'attendre à ce que ceux qui se sentent appelés et qui répondent à l'appel fassent certains sacrifices, notamment sur le plan de la rémunération et des avantages sociaux? Je sais que, dans certains domaines, la fonction publique est très compétitive par rapport au secteur privé. Dans d'autres, je me demande si elle l'est vraiment, surtout lorsqu'il s'agit des postes les plus élevés. Alors, madame Hubbard, voici ma question: craignez-vous que l'on s'en aille vers une situation telle que la fonction publique, du moins dans certains domaines très importants, ne serait pas compétitive avec le secteur privé et qu'elle perdrait des talents très importants ou qu'elle n'attirerait pas des talents qui iraient plutôt au secteur privé?

Mme Hubbard: Pour ce qui est savoir si nous trouvons difficile à la Commission de la fonction publique de recruter et de garder des gens qui ont une certaine compétence spécialisée - dans le domaine par exemple de la technologie de l'information - la valeur relative de la rémunération et la demande relative dans d'autres secteurs sont des éléments importants. Pour ce qui est de savoir si la rémunération dans la fonction publique peut soutenir la comparaison avec la rémunération dans le secteur privé, c'est là une question que vous devriez poser au Conseil du Trésor.

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Je vous dirai toutefois que, de manière générale, elle l'est. Je ne pense pas que les fonctionnaires, surtout ceux qui occupent les postes les plus élevés, s'imaginent qu'ils deviendront riches en travaillant dans la fonction publique. Je crois qu'on peut en dire autant des hommes et des femmes politiques. Cela dit, j'estime toutefois qu'il faut être réaliste et essayer de déterminer qui sont les autres compétiteurs qui recherchent les services et les compétences dont nous avons besoin dans le secteur public. Quels sont les divers moyens que nous devons mettre en oeuvre pour faire en sorte d'attirer et de garder les plus brillants, les meilleurs?

Il me semble que le secteur public a notamment l'avantage de permettre à ceux qui y travaillent d'avoir un certain sentiment de satisfaction, d'avoir l'impression de continuer à apprendre et à grandir. Il ne me viendrait jamais à l'idée de conseiller à quelqu'un d'entrer dans la fonction publique pour devenir riche. Par contre, je crois qu'on accepte simplement que ceux qui considèrent le service public comme une vocation en tirent une certaine satisfaction. Je crois toutefois qu'il faut prendre garde dans le secteur public de ne pas surestimer le sentiment de satisfaction qu'on peut tirer du fait de servir l'intérêt public et nous retrouver un jour dans l'impossibilité d'attirer ou de garder les gens dont nous avons effectivement besoin pour faire le travail.

La question est compliquée, mais nous sommes effectivement inquiets de constater que nous avons une pénurie de compétences dans certains domaines et nous devons chercher à savoir pourquoi ces compétences sont si rares. La rémunération est-elle un facteur? Si elle l'est...

M. Harvard: Celui qui veut gravir les échelons et devenir un jour sous-ministre ne s'attend peut-être pas à devenir riche à tout casser, mais quand on entend parler de ces chefs de la direction, que ce soit dans le secteur bancaire, informatique ou dans un autre secteur... Pour moi, le sous-ministre est à bien des égards l'équivalent du PDG. On entend parler de ces PDG qui gagnent 3 millions, 4 millions, 5 millions ou 10 millions de dollars, alors que les sous-ministres gagnent une infime fraction de ce montant. Combien de temps encore avant que vous ne puissiez plus attirer les gens dont vous avez besoin?

Mme Hubbard: C'est une question qui mérite qu'on s'y attarde et à laquelle il faut trouver réponse. Je crois que la satisfaction qu'obtiennent les sous-ministres, ne tient pas uniquement à leur rémunération. Il y a d'autres considérations. C'est une excellente question. Si les cadres supérieurs se mettent à nous quitter en grand nombre, il faudra se demander pourquoi et quelles mesures peuvent être prises. On peut faire certaines choses, mais il n'est pas réaliste de penser que... On ne saurait imaginer la rémunération d'un sous-ministre égale à - vous peut-être, moi pas - celle des dirigeants de certaines entreprises privées.

Cela dit, la disparité est peut-être trop importante et cela a peut-être des effets. Si c'est le cas, j'imagine que cela doit intéresser les membres du comité et l'ensemble des citoyens.

Le président: Merci.

Pour vraiment en finir, j'aimerais que vous aidiez le comité en répondant à certaines questions qu'il nous arrivera peut-être de vous faire parvenir.

Mme Hubbard: Tout à fait, je serais ravie.

Le président: Je vous remercie beaucoup de votre participation à nos travaux et de l'aide que vous nous avez apportée.

La séance est levée.

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