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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 31 octobre 1996

.0920

[Traduction]

Le président: Bonjour, mesdames et messieurs. Nous reprenons l'étude de l'ordre de renvoi daté du mardi 22 octobre, relatif au projet de loi C-63, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi référendaire, déféré en conformité du paragraphe 73(1) du Règlement.

Chers collègues, j'aimerais souhaiter la bienvenue, en votre nom, à M. Bruce Phillips, le commissaire à la protection de la vie privée, qui est accompagné de Mme Harris, avocate générale. Soyez les bienvenus au comité.

.0925

Monsieur Phillips, je crois savoir que vous avez une déclaration liminaire.

Ensuite, chers collègues, veuillez me faire signe si vous voulez être inscrits sur la liste des membres désireux de poser des questions. Si je ne vous vois pas faire de signe, je présumerai que vous n'avez pas de question.

Je vous remercie, monsieur Phillips. Vous avez la parole.

M. Bruce Phillips (Commissariat à la protection de la vie privée du Canada): Je vous remercie, monsieur le président. Je n'ai pas de mémoire écrit aujourd'hui. Je me contenterai de quelques brèves remarques.

Je crois savoir que M. Kingsley a tenu hier quelques propos élogieux concernant mon bureau et notre participation à ce travail. J'aimerais lui retourner le compliment. Un certain nombre d'éléments intéressant la protection de la vie privée sont apparus au cours de ces deux années de travail sur cette réforme, et je veux donner acte à M. Kingsley que, dès le début, il a demandé la collaboration de mon bureau et des membres de mon personnel afin d'aplanir ces difficultés, de façon à vous soumettre un projet de loi dans lequel les problèmes de protection de la vie privée que nous avons identifiés ont été dans une large mesure réglés par avance. À mon avis, c'est là un très bon exemple de l'utilité que de petits organismes comme le mien peuvent présenter pour le Parlement, puisqu'il ne faut pas oublier que le Commissariat à la protection de la vie privée est une émanation du Parlement et que l'une de ses principales fonctions est de se placer au service de ce dernier.

Lorsque le projet de loi nous a été soumis pour la première fois, l'une de nos préoccupations principales concernait le mécanisme de mise à jour du registre au moyen de l'exploitation des bases de données fédérales. En effet, l'un des principes clés de la Loi sur la protection de la vie privée fédérale veut que les renseignements recueillis par l'État auprès des citoyens canadiens pour un usage donné ne soient pas utilisés à d'autres fins à leur insu et sans leur consentement. C'est l'une des règles cardinales de toute législation de protection de la vie privée digne de ce nom, partout dans le monde développé.

M. Kingsley en a conscience et nous avons pu, petit à petit, trouver un modus vivendi qui nous satisfait. Ainsi, par exemple, s'il va interroger la base de données de Revenu Canada, ce sera uniquement avec le consentement des contribuables individuels. Nous allons mettre au point un formulaire de consentement approprié qui sera inclus dans la déclaration d'impôts sur le revenu des contribuables. C'était là notre préoccupation la plus pressante.

Il y en avait un certain nombre d'autres. L'une, qui n'a pas été résolue et qui n'est pas strictement une affaire de protection de la vie privée et dont M. Gray a parlé dans son témoignage, est la décision de communiquer cette liste annuellement aux députés et aux partis enregistrés. À notre sens, c'est pousser les choses un peu loin, car il est difficile de prétendre que cela soit lié de quelque manière à l'admissibilité d'une personne à voter, ce qui est le but d'une liste d'électeurs. Cela nous paraît davantage être destiné à la commodité des députés et des candidats aux élections, pour leur faciliter la communication avec les électeurs. Si c'est le but, il faudrait le dire clairement dans le projet de loi. Nous sortons là un peu de mon domaine.

Nous sommes quelque peu préoccupés par le libellé de certaines dispositions. Je n'ai pas eu l'occasion de discuter de ces aspects avec M. Kingsley, et les propos que je tiens ici ne doivent pas être considérés comme des doléances ou des objections, mais nous pensons que certaines choses pourraient être légèrement remaniées. Je songe en particulier aux paragraphes 71.024(1) et (2), à la page 14 du projet de loi, traitant des relations du directeur général des élections avec les gouvernements provinciaux.

On vous a donné toutes les explications voulues. Je suis sûr qu'Élections Canada souhaite accéder, pour la tenue à jour du registre, aux renseignements contenus dans des bases de données provinciales, tels que les registres des permis de conduire et, réciproquement, le gouvernement fédéral, c'est-à-dire le directeur général des élections, peut conclure des ententes avec les gouvernements provinciaux pour communiquer à ces derniers des données tirées de la liste fédérale aux fins de l'établissement de listes électorales provinciales.

Le paragraphe 71.024(2) du projet de loi prévoit:

.0930

Il me semble, et c'est une caractéristique d'autres ententes contractuelles conclues entre le gouvernement du Canada et les provinces, que lorsque des renseignements confiés à la garde d'un organisme fédéral sont communiqués à des tierces parties, les conditions de la Loi sur la protection des renseignements personnels s'appliquent. C'est une clause habituelle de ces contrats.

Je pense que le même principe devrait, à tout le moins, être appliqué à toute communication à des gouvernements provinciaux de renseignements provenant de la liste électorale, afin que les provinces soient soumises aux mêmes contraintes que le directeur général des élections lorsqu'il recueille ces données en premier lieu, ou bien, à défaut, qu'un contrat spécifique devrait être signé pour assurer que des conditions, telles que le consentement en connaissance de cause et la limitation des utilisations ultérieures à des fins autres, fassent partie de l'accord.

Je suis sûr que M. Kingsley y réfléchit et il en a peut-être déjà parlé avec vous, mais je n'en ai pas été informé. Je pense que le libellé ici est un peu trop vague.

Le même article du projet de loi stipule, au paragraphe 71.024(3), que:

Cela implique la vente de renseignements personnels placés sous la garde du gouvernement du Canada et me paraît certainement contraire à la Loi sur la protection des renseignements personnels actuelle.

Je ne sais pas si cette disposition est là uniquement pour permettre au gouvernement d'obtenir un remboursement des frais liés au transfert des données. Si oui, je pense qu'il conviendrait de le spécifier. Mais d'après ce texte, le gouvernement pourrait exiger une contrepartie pour n'importe quel usage, tel que des opérations de marketing. Je ne pense pas que ce libellé soit suffisamment précis.

Toujours à la page 14, le projet d'article 71.021 dit:

Je pense qu'il est impératif de préciser le but et le sens de cet article.

À la page 27, au projet de paragraphe 196(2), je pense que l'on reprend l'ancienne loi. Je suis surpris que nous n'ayons pas décelé cela auparavant. On dit que le directeur général des élections...

Le président: Est-ce à la page 27? Est-ce la bonne page?

M. Phillips: C'est à la page 27, en haut de la page, le projet de paragraphe 196(2)...

Le président: Examen des documents?

.0935

M. Phillips: Oui. Ce paragraphe stipule:

Ce sont là les seules difficultés que je vois, monsieur le président. Je conclurai en disant que, de façon générale, M. Kingsley a fait un excellent travail pour tenir compte de la dimension protection de la vie privée dans ce projet de loi. Sous réserve de ces quelques très modestes changements et adaptations que j'ai suggérés, nous lui décernons la note A-plus.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Phillips. Nous apprécions votre exposé.

Notre greffier et notre attaché de recherches ont tous deux pris des notes de ce que vous avez dit.

Comme vous le savez peut-être, conformément au nouveau processus parlementaire, ce projet de loi nous a été envoyé dès après la première lecture, ce qui donne aux députés davantage de faculté d'apporter des changements ou des améliorations. Franchement, ce processus fonctionne plutôt bien.

Chers collègues, je vais me montrer vigilant ce matin en raison des contraintes de temps qui pèsent sur nous. J'accorderai plusieurs tours de questions ou d'interventions de cinq minutes, si cela vous convient.

Nous commencerons ce matin avec Mme Catterall. Vous avez la parole.

Mme Catterall (Ottawa-Ouest): J'ai indiqué avant le début de la réunion que j'allais parler de la mise en balance de différents droits dans ce projet de loi. J'apprécie vos propos sur les droits à la vie privée et la manière dont le projet de loi les prend en compte ou les ignore, mais il m'apparaît qu'il convient également de traiter tous les électeurs sur un pied d'égalité, dans toute la mesure du possible. En fait, je crains que certaines des considérations de protection de la vie privée aient amené à inscrire des dispositions qui feront qu'il sera plus difficile pour certains électeurs que pour d'autres de se faire inscrire sur la liste.

Nous avons parlé hier de la naturalisation des étrangers. Y a- t-il une raison, à votre sens, de ne pas incorporer dans le processus de naturalisation l'inscription sur la liste des électeurs?

M. Phillips: Je répondrai, Mme Catterall, que l'un des principes qui sous-tendent ce projet de loi est qu'un citoyen canadien a le droit de décider de figurer ou non sur la liste électorale. Ce caractère facultatif est profondément ancré non seulement dans ce projet de loi, mais dans toutes les lois qui l'ont précédé. C'est pourquoi la question du consentement apparaît tout au long du projet de loi.

Une personne, au moment du recensement proposé, peut dire si elle veut ou ne veut pas être sur la liste. Une personne à qui l'on demande des renseignements aux fins de la mise à jour de la liste a la faculté de les refuser. Une personne inscrite sur la liste peut s'en faire rayer si elle le souhaite.

Donc, le fait de traiter différemment de nouveaux citoyens exigerait, je suppose, une conception de leurs droits différente de celle des droits des citoyens déjà établis. Mais je ne vois pas quel argument pourrait militer en faveur d'une telle distinction.

.0940

La question de savoir si une personne devrait ou non être tenue de voter n'est pas, strictement parlant, une question de vie privée. À mon avis, en tant que commissaire à la protection de la vie privée, nul renseignement de nature personnelle ne devrait jamais être recueilli auprès de citoyens de ce pays à leur insu et sans leur consentement express. La question de savoir s'il faut obliger les gens à voter, comme cela se fait dans certains pays, n'est pas de mon ressort. Au sens strict, et du point de vue de l'égalité de traitement, il me semble que ce que vous demandez reviendrait à traiter les immigrants de manière différente des citoyens déjà établis.

Mme Catterall: Non. Je dis que je présume qu'il n'y aurait pas de problème du point de vue protection de la vie privée à demander aux gens s'ils veulent être inscrits, à titre facultatif, sur la liste des électeurs au moment où ils présentent leur demande de citoyenneté.

M. Phillips: Oh, je vois. Veuillez m'excuser, je n'avais pas compris.

Mme Catterall: Au lieu de leur poser la question ultérieurement, une fois qu'ils sont devenus citoyens.

M. Phillips: C'est certainement une bonne idée. Si la proposition est faite de façon claire, sans ambiguïté, et d'une manière que le requérant puisse comprendre, et que le refus du consentement n'intervienne en aucune façon dans l'admissibilité de cette personne à la citoyenneté, je suppose que ce pourrait être un procédé utile. Je n'y avais jamais vraiment réfléchi, mais à première vue cela ne me paraît pas contraire au principe du consentement. C'est à envisager.

Mme Catterall: Mes cinq minutes sont peut-être écoulées. Souhaitez-vous passer à quelqu'un d'autre et revenir à moi plus tard?

Le président: Oui, c'est excellent.

[Français]

Monsieur Laurin, s'il vous plaît.

M. Laurin (Joliette): Monsieur le commissaire, vous avez fait allusion au nouvel article 71.024 en disant qu'il était peut-être un peu vague. L'article prévoit que:

71.024. (1) Le directeur général des élections peut conclure avec tout organisme chargé, au titre d'une loi provinciale, d'établir une liste d'électeurs...

En pratique, cela veut dire, pour une province comme le Québec, que les municipalités, les villes et les commissions scolaires sont autorisées par une loi provinciale à confectionner les listes électorales.

Tel que l'article est rédigé, il pourrait arriver que ces organismes confient à une tierce personne ou à une compagnie la responsabilité de confectionner une liste électorale. Selon vos commentaires, vous ne voudriez pas que cela soit possible. Est-ce exact? C'est-à-dire qu'une municipalité ne pourrait pas confectionner sa liste électorale à partir des données du recensement fédéral ou du registre fédéral.

[Traduction]

M. Phillips: Comprenez-moi bien. Je ne dis pas qu'il faille interdire au directeur général des élections de conclure de telles ententes. Ce que je dis, c'est que les conditions de ces ententes devraient être énoncées plus précisément. À cet égard, je suis davantage préoccupé par le paragraphe 71.024(2) que par le paragraphe 71.024(1), car le paragraphe (2) porte sur la communication aux gouvernements provinciaux de renseignements déjà en la possession du directeur général des élections. Je pense qu'il faudrait ériger en condition d'un tel transfert l'application des mêmes normes de protection qui existent au niveau fédéral à tout renseignement confié à un gouvernement provincial par le gouvernement du Canada ou l'un de ses organismes.

Pour ce qui est de la collecte de renseignements auprès des gouvernements provinciaux par le directeur général des élections aux fins de la mise à jour de la liste fédérale des électeurs, il incombe aux gouvernements provinciaux de veiller à ce que les contraintes de protection de la vie privée applicables dans une province soient inscrites dans toute entente que la province conclut avec le gouvernement fédéral.

Si vous me permettez une courte digression, un certain nombre de commissaires provinciaux à la protection de la vie privée - mes homologues de certaines des provinces, dont bien sûr le Québec où vous avez un commissaire très vigilant - sont extrêmement intéressés par ce projet de loi et ont l'intention d'aborder cette question avec leur gouvernement pour assurer que toute entente de cette nature respecte la législation provinciale en matière de vie privée.

.0945

Est-ce que cela répond à votre question?

[Français]

M. Laurin: Oui. Vous avez également dit que vous étiez inquiet au sujet du paragraphe 71.024(3) qui stipule:

(3) L'accord peut prévoir toute contrepartie valable pour la communication des renseignements.

Je voudrais que vous précisiez davantage vos inquiétudes. Pour moi, cela signifie tout simplement que le gouvernement pourrait exiger d'une municipalité qui aurait besoin de ces renseignements-là le paiement de la liste. Vous avez exprimé une inquiétude que je comprends mal. Voudriez-vous expliciter davantage?

[Traduction]

M. Phillips: Je ne veux voir personne vendre des listes d'électeurs dans quelque but que ce soit.

S'il y a des frais liés à l'administration d'une entente entre le gouvernement du Canada ou le directeur général des élections et quelque entité provinciale ou municipale, et que le directeur général des élections veut recouvrer ses dépenses, très bien. Si je dois débourser un dollar pour vous envoyer ce renseignement, très bien, rendez-moi mon dollar. Cela, je peux le comprendre. Mais je n'aimerais pas voir des listes à jour être envoyées routinièrement à d'autres organismes ou à d'autres gouvernements, pour quelque but que ce soit. Cela devient de la vente de renseignements personnels. Vous voyez la différence.

[Français]

M. Laurin: Si un article de la loi prévoyait qu'il y ait inscription automatique des gens sur un registre d'électeurs, par exemple au moment de la naissance ou au moment où une personne est naturalisée canadienne... Il y a toujours un document officiel qui est émis à ces occasions-là. Si ce document servait à l'inscription automatique de ces gens-là sur un registre d'électeurs, cela vous semblerait-il contraire à la protection de la vie privée des citoyens?

[Traduction]

M. Phillips: Oui, vous me comprenez bien. Je ne suis pas en faveur de l'inscription automatique d'une catégorie quelconque de personnes. L'un des principes de la pratique électorale canadienne est que l'on n'est pas contraint par la loi de voter et que l'on n'est pas contraint par la loi de figurer sur une liste si on ne le veut pas. Je pense que l'utilisation de l'un quelconque de ces autres documents administratifs fédéraux - tels que les documents de naturalisation - pour inscrire automatiquement ces personnes dans un registre des électeurs revient à traiter ces gens de manière inégale, et je n'en vois aucune justification. Si quelqu'un souhaite être sur la liste des électeurs, cette personne a le droit de le dire. Si elle souhaite ne pas y être, elle a également le droit de le dire.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Harper, je vous prie.

M. Harper (Calgary-Ouest): Monsieur Phillips, j'ai trois sujets à aborder et je vais essayer de les passer en revue rapidement. Je me fonde dans chaque cas sur votre rapport annuel de 1995-1996, bien que vous ayez répété ici aujourd'hui certains de ses éléments.

Tous vos principes reviennent à dire ceci: la loi devrait limiter la collecte de renseignements personnels à ces données qui sont nécessaires pour que les Canadiens puissent exercer leur droit de vote. Nous avons soulevé la question - et elle nous a été suggérée par les femmes célibataires - de savoir pourquoi il est nécessaire que le sexe soit indiqué sur une liste électorale. Pourquoi n'en avez-vous pas fait l'une de vos préoccupations?

M. Phillips: Je crois savoir que la question a été posée à M. Kingsley hier. Je paraphrase, mais il me semble qu'il a répondu que ce n'était pas réellement indispensable - pas plus que certains autres renseignements qui devaient initialement être couverts par la phase de collecte, tels que les numéros de téléphone.

Je dois parler franchement, monsieur Harper. Je n'y ai pas vu de problème particulier parce que l'explication qu'on m'a donnée est que c'était très utile pour distinguer entre des hommes et des femmes qui peuvent avoir le même nom, que c'est un renseignement utile lorsqu'il s'agit d'identifier et de certifier les électeurs admissibles à voter. Si M. Kingsley pense que ce n'est pas nécessaire, je serais personnellement ravi que ce renseignement soit supprimé, oui, absolument. C'est un renseignement personnel intime et, s'il n'est pas nécessaire, pourquoi le recueillir?

.0950

M. Harper: Voici ma deuxième question. Votre deuxième principe - et vous l'avez réitéré aujourd'hui dans les mêmes termes - est que les renseignements doivent être recueillis directement auprès des citoyens, avec leur consentement express. Vous pourriez peut- être m'indiquer ce que dit exactement la Loi sur la protection des renseignements personnels. Est-ce en connaissance de cause et avec le consentement des citoyens du Canada, des résidents du Canada ou des contribuables du Canada?

M. Phillips: La Loi sur la protection des renseignements personnels s'applique aux résidents du Canada.

M. Harper: La raison pour laquelle je vous le demande est que tout parti politique tient évidemment à assurer que seuls des citoyens figurent sur la liste, par opposition aux non-citoyens, et cela a été un problème par le passé. Dans quelle mesure la Loi sur la protection des renseignements personnels permet-elle au directeur général des élections d'avoir accès à des données susceptibles de lui indiquer si une personne est ou non un citoyen?

M. Phillips: Je vais essayer de répondre à la question d'une autre façon. Selon ma lecture de la loi, elle établit un certain nombre de critères, en ce sens qu'une personne doit établir sa citoyenneté canadienne, en particulier par voie d'attestation.

Pour nous, ce n'est pas strictement un problème de vie privée. C'est à M. Kingsley qu'il incombe de décider comment il va s'assurer de la citoyenneté d'une personne donnée. Je pense que je sortirais largement de ma compétence, monsieur Harper, si je prétendais dire au comité comment il convient de certifier la citoyenneté.

M. Harper: La troisième question intéresse en quelque sorte vos troisième et quatrième principes, concernant la limitation de l'utilisation du Registre et l'interdiction de la divulgation de renseignements personnels.

Souvent, lorsque nous abordons de façon générale ces questions au sujet de registres ou d'archives gouvernementaux, nos mandants nous disent que ce n'est pas seulement une affaire juridique. On a beau inscrire dans les textes de loi que ces choses sont illégales, mais les gens nous rétorqueront: quelle garantie avons-nous, hormis les sanctions prévues en cas d'infraction? Est-ce que le Commissariat à la protection de la vie privée a une méthode pour contrôler la gestion générale et les procédures opérationnelles des organismes qui possèdent des banques de données, de façon à vérifier que la vie privée ne peut pas être violée de manière routinière? Exerce-t-il un contrôle, ou est-il capable de contrôler les outils technologiques, tels que la manière dont ces organismes utilisent les modems dont sont équipés leurs systèmes informatiques, pour s'assurer que la transmission des renseignements est impossible. Que faites-vous, au-delà du seul texte de la loi, pour assurer la protection de la vie privée?

M. Phillips: Je vais répondre de mon mieux à votre question.

La Loi sur la protection des renseignements personnels nous donne le pouvoir de procéder à des vérifications de la manière dont les organismes fédéraux régis par la loi gèrent les renseignements personnels qu'ils détiennent.

Nous procédons à de telles vérifications. Mais nous sommes un petit bureau et nos ressources sont extrêmement réduites, et ce depuis toujours; ce n'est pas seulement une conséquence des coupures gouvernementales. Je crois qu'au cours de la douzaine d'années d'existence de mon service, nous avons réussi jusqu'à présent à vérifier moins d'un tiers des organismes gouvernementaux et ministères qui recueillent des renseignements personnels.

Nous aimerions en faire plus. Oui, le pouvoir existe. Ce qui manque, ce sont les ressources.

M. Harper: Avez-vous jamais effectué une vérification chez le directeur général des élections et avez-vous l'intention d'en faire une une fois que le registre informatique sera en place?

M. Phillips: Oui. D'ailleurs, nous penchons de plus en plus vers ce genre de vérification ponctuelle, au lieu d'essayer d'examiner l'ensemble des opérations informationnelles d'un ministère. C'est une tâche trop massive pour que nous puissions la gérer. Mais nous allons choisir des domaines ponctuels et les passer au peigne fin.

Oui, du moins si le registre se fait pendant la durée de mon mandat, nous allons certainement continuer à travailler avec le directeur général des élections pour voir comment tout cela tourne.

Par exemple, il va consulter mon bureau pour un certain nombre de choses dans ce domaine. Nous allons l'aider à rédiger le formulaire de consentement qui sera annexé à la déclaration d'impôts, ce genre de choses.

.0955

Je suis moins préoccupé par les risques dans ce domaine particulier, monsieur Harper, car le système est déjà construit de telle sorte que le seul renseignement que le Directeur général des élections puisse obtenir de Revenu Canada, par exemple, sera un nom et un changement d'adresse, rien d'autre. Il n'aura pas accès en ligne à la base de données de Revenu Canada. Il y a d'autres couplages de données déjà en cours ou envisagés qui présentent davantage de problèmes du point de la protection de la vie privée, mais la réponse générale à votre question est oui.

M. Harper: Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie, monsieur Harper.

Monsieur Speaker, je vous prie.

M. Speaker (Lethbridge): Mes questions portent sur votre rapport d'août 1996. Il s'agit du deuxième point de votre énumération, page 16. C'est la dernière ligne, là où vous dites que les renseignements devraient être recueillis directement auprès des citoyens, avec leur consentement express.

Hier, lors de sa comparution, M. Kingsley a paru comprendre cet impératif. Nous lui avons demandé s'il pourrait trouver les renseignements. Je parle là de la liste initiale, celle qui sera éventuellement constituée en 1997. Il a indiqué que sa méthode préférée serait de s'adresser personnellement à chaque résident du Canada pour lui poser la question: voulez-vous être inscrit sur la liste des électeurs? Dans l'affirmative, il indiquerait de quels renseignements il a besoin pour cela.

Regardez du côté des gouvernements provinciaux. Par exemple, l'Alberta procède à un recensement des électeurs en novembre. J'imagine que l'on va y rendre visite à chaque ménage pour poser à peu près les mêmes questions. Quelle est votre position à ce sujet? Est-ce qu'une province, à titre d'organisme tiers, ou parfois une municipalité, pourrait effectuer le travail et ce travail serait-il acceptable, du point de vue de ce que vous avez dit ici?

M. Phillips: Permettez-moi de vous dire quelle serait ma préférence, monsieur Speaker. Ce serait certainement que le directeur général des élections procède à son propre recensement, conforme aux conditions fixées par le Parlement. Ainsi, nous saurons tous de quoi il retourne.

Cependant, le projet de loi prévoit que le directeur général des élections puisse conclure des ententes avec les gouvernements provinciaux en vue de se procurer des renseignements aux fins de sa propre liste.

M. Speaker: Il s'agit là de la mise à jour de la liste.

M. Phillips: Oui.

M. Speaker: Je parle, moi, de la liste initiale. Il y a une différence. Quel est votre avis, dans ce cas?

M. Phillips: Je ne prétends pas être un spécialiste de l'histoire électorale, du moins pas un érudit. Mais je ne me souviens que d'une ou deux occasions dans l'histoire récente où le gouvernement fédéral a utilisé une liste provinciale pour quelque chose d'aussi important qu'une élection ou un référendum fédéral, national. C'est peut-être arrivé dans le cas du référendum sur l'Accord de Charlottetown, ou l'un de ces scrutins assez récents où le gouvernement du Québec venait d'achever un recensement et où cette liste a été acceptée par le gouvernement fédéral.

Mais, de façon générale, les référendums fédéraux, les élections générales et partielles sont tenus sur la base de recensements fédéraux. Je pense qu'il y a une bonne raison à cela, à savoir que tout le monde a ainsi l'assurance que la composition de la liste répond aux exigences de la loi fédérale. Je ne sais pas ce que je pourrais dire de plus.

M. Speaker: Oui, je comprends cela.

Je pense que ma vraie question, en fin de compte, concerne le recensement albertain. Le gouvernement de l'Alberta va encourir des frais majeurs pour effectuer ce recensement en novembre 1996. S'il y a un recensement fédéral, certains des mêmes agents de recensement vont procéder également à celui-ci. Nous ferons appel à leur expérience pour l'effectuer.

Je pense qu'il incombe au comité de déterminer si nous pouvons autoriser l'utilisation de cette liste albertaine si elle est crédible et si cela nous fait économiser de l'argent. Vous dites dans votre rapport que c'est une façon de voir qui a davantage cours aujourd'hui qu'il y a dix ans.

M. Phillips: Oui.

M. Speaker: Dieu merci.

Je demande donc s'il serait acceptable, selon votre optique, de le faire, dans la mesure où une entente à cet effet pourra être conclue, de façon à obtenir les renseignements voulus à un coût grandement moindre?

M. Kingsley a donné à entendre - j'ai essayé de lire entre les lignes - qu'il ne tenait pas à le faire. Il pensait que le commissaire à la protection de la vie privée lui taperait peut-être sur les doigts s'il passait un contrat avec le gouvernement provincial.

.1000

M. Phillips: J'ai indiqué ma préférence, monsieur Speaker, et je saisis très bien ce que vous voulez dire.

Je ne peux pas répondre à votre question par oui ou par non, dans l'abstrait. Il faudrait que je connaisse toutes les conditions du recensement provincial avant de pouvoir dire si, à mon sens, ce dernier répond à tous les critères et présente toutes les garanties requises au niveau fédéral.

M. Speaker: La ligne directrice serait donc précisément cela, me semble-t-il?

M. Phillips: Je pense avoir dit tout à l'heure que j'espère que tout accord fédéral-provincial de partage de renseignements électoraux engloberait le genre de principes énoncés dans la Loi fédérale sur la protection des renseignements personnels, adoptée par ce Parlement, afin que tout le monde se réfère à la même norme et applique la même norme.

M. Speaker: Donc, dans ces conditions, mon idée serait possible.

M. Phillips: J'aimerais bien y réfléchir un peu plus. Pardonnez ma prudence.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Frazer, c'est à vous.

M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur Phillips, nous avons une divergence d'opinion. Je regarde ce que vous dites à la page 15 de votre rapport concernant la divulgation annuelle des listes. Il me semble qu'avec les progrès de l'informatique, tout accord de communication de la liste fédérale aux provinces et municipalités etc... Il est relativement facile de produire une liste pour cette fin précise, le moment venu.

J'ai tendance à être d'accord avec vous lorsque vous dites qu'il ne semble guère utile que cette liste soit mise à jour, arbitrairement, chaque année, puisqu'elle ne sert qu'aux élections. C'est vrai non seulement du point de vue de la nécessité réelle de ces renseignements, mais aussi du point de vue du coût de la production et de la distribution de cette liste.

M. Phillips: Monsieur Frazer, je pense que c'est une chose qu'il appartient aux parlementaires eux-mêmes de décider. Que cette loi soit considérée comme ayant pour seul but de certifier l'admissibilité des citoyens de ce pays à voter, d'une manière répondant aux besoins du processus électoral, ou que cette loi doive remplir plusieurs objectifs, entre autres faciliter pour les partis politiques le contact avec les électeurs potentiels, il ne m'appartient pas d'en décider. Je rappelle simplement à tout le monde que nous vivons dans une époque où les gens ordinaires se font harceler presque quotidiennement par des entreprises, des organisations et des personnes qui ont quelque chose à vendre ou à solliciter.

On commence à voir apparaître une résistance considérable. C'est ce qu'indiquent nos propres sondages. Un certain nombre d'enquêtes ont établi que le public commence à développer une assez forte résistance contre ce qu'il estime être des sollicitations excessives, qui ont été facilitées par les moyens de communication modernes et l'informatique. C'est à vous de décider dans quelle mesure le processus politique va tenir compte de ce phénomène ou passer outre.

La communication de listes annuelles d'électeurs aux députés et partis enregistrés représente bien sûr une invitation et une tentation à intensifier la sollicitation auprès des électeurs potentiels.

C'est à vous de former ce jugement. Je ne vais certainement pas me mettre en situation de le faire à votre place. J'attire simplement votre attention sur la réaction que provoquent aujourd'hui chez le grand public les envois publicitaires et les sollicitations de toutes sortes.

.1005

M. Frazer: Je ne veux pas vous acculer et nous admettons que c'est à nous de décider ce qu'il y a lieu d'inscrire dans cette loi, mais iriez-vous jusqu'à dire que vous recommandez de ne pas mettre cela dans la loi?

M. Phillips: Dans les affaires de ce genre, je dois défendre l'optique de la protection de la vie privée, monsieur Frazer, et ma préférence, en adoptant le point de vue du puriste, serait que la liste électorale soit utilisée et perçue comme une liste ayant pour objet principal de certifier l'admissibilité à voter, et non pas comme un outil de publicité politique. C'est une préférence.

M. Frazer: Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie, monsieur Frazer.

Monsieur Pagtakhan, s'il vous plaît.

M. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Je vous remercie, monsieur le président. Merci, monsieur Phillips.

Dans le sondage que vous avez effectué concernant le ressentiment contre le marketing excessif... À partir de ces données et d'autres que vous possédez, ou d'après votre intuition, quelle proportion de l'électorat choisirait, en toute probabilité, de ne pas figurer sur une liste d'électeurs permanente?

M. Phillips: Je n'ai pas fait d'enquête, et je n'en connais pas, à moins que le bureau deM. Kingsley en ait fait une, indiquant combien de personnes préféreraient ne pas être sur une liste d'électeurs. Les seuls chiffres que j'ai entendus à ce sujet, et ils sont de deuxième main car je les tiens du directeur général des élections, sont qu'en moyenne de 75 à 80 p. 100 des électeurs admissibles sont inscrits sur la liste. Mais je ne suis pas un expert dans ce domaine, croyez-moi.

M. Pagtakhan: Vous avez indiqué dans votre rapport que la raison d'être de la liste est la tenue des élections. Vous vous êtes ensuite dit préoccupé par un éventuel usage de cette liste aux fins d'un démarchage répété de la part des partis politiques, et vous venez d'indiquer que la liste devrait servir uniquement à certifier l'admissibilité des électeurs et donc à la tenue d'élections. À ce sujet, que recouvre à votre avis le processus électoral, si la liste doit servir uniquement à des fins électorales? Qu'est-ce pour vous une fin électorale, du point de vue de la protection de la vie privée?

M. Phillips: Son utilisation lorsqu'une élection est en cours.

M. Pagtakhan: Donc vous lieriez cela à la délivrance du bref?

M. Phillips: Oui, généralement parlant.

M. Pagtakhan: Je n'ai pas d'autres questions, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Madame Catterall, qui sera suivie de M. Laurin.

Mme Catterall: Permettez-moi de revenir sur quelques-uns de vos propos. Vous avez parlé du droit de ne pas figurer sur la liste des électeurs et du droit d'y être inscrit. L'une de mes préoccupations c'est que, selon les modalités prévues ici, on tend à favoriser la non-inscription plutôt que le droit à figurer sur la liste. Il en résultera en toute probabilité une discrimination à l'égard de certains groupes de la société.

Je m'explique. Ma vie privée est tout autant respectée si je reçois une carte disant: voilà les renseignements que nous avons sur vous et si vous voulez être portée sur la liste des électeurs, vous n'avez rien besoin de faire. Si les renseignements sont erronés ou si je ne veux pas être sur la liste, je dois renvoyer la carte. Y a-t-il une raison, du point de vue de la protection de la vie privée, qui fasse qu'il est préférable de faire savoir de manière positive que je veux être sur la liste des électeurs, au lieu de m'y faire figurer à partir d'une certaine date à moins que je dise que je ne veux pas? C'est l'équivalent de la facturation par option négative, n'est-ce pas?

M. Phillips: J'allais justement dire que les abonnés du câble d'Ottawa ont répondu au moins en partie à votre question, madame Catterall.

À mon avis, il y a entre le consentement négatif et le consentement positif la différence suivante. Que vous veuillez ou non être sur la liste des électeurs, vous devez le signifier par un acte déterminé. Cela exige des gens qu'ils réfléchissent activement à la question de savoir s'ils veulent ou non y être. Ils doivent nous le dire; par conséquent, ils vont y réfléchir. À mon sens, cela nous rapproche beaucoup plus de l'idéal d'une décision en connaissance de cause que lorsque les gens peuvent simplement réagir en disant: «Je ne comprends rien à tout cela et cela ne mérite pas que je m'en inquiète». À mon avis, ce deuxième procédé ne correspond pas au critère strict consistant à demander à l'intéressé une décision en connaissance de cause.

.1010

Mme Catterall: Permettez-moi de vous soumettre deux autres problèmes que je vois dans cela. Je vais vous en citer un, car j'ai temporairement oublié l'autre.

Comme je l'ai dit, ce processus ne doit être en aucune façon discriminatoire. À mon avis, l'obligation de faire quelque chose signifie que si j'ai la chance d'être portée fortuitement sur la liste des électeurs pendant un recensement, je n'ai pas de consentement à donner. Un agent de recensement peut apprendre de la bouche de mon voisin ou de mes parents que je viens d'avoir 18 ans, ou qu'une nouvelle famille a emménagé à cette adresse, et la personne se retrouve sur la liste des électeurs. Elle peut ensuite demander à être rayée si elle ne veut pas y figurer, mais elle est inscrite en premier lieu sans son consentement. Vous pouvez juger cela répréhensible.

Ma préoccupation est qu'en rendant cette décision aussi dépendante de l'alphabétisme, on risque d'exercer une discrimination à l'encontre de ceux qui ne savent pas bien lire, ou qui ont des difficultés de langue, ou qui sont aveugles ou malvoyants, et c'est quelque chose que je tiens beaucoup à éviter.

Cela est en dehors de votre domaine, mais quel est le plus grand risque, que quelqu'un soit inscrit sur la liste simplement parce que la personne a oublié de renvoyer la carte ou que quelqu'un n'y figure pas parce que la personne ne pouvait pas lire la carte ou n'en comprenait pas la signification?

Le président: Collègues, je vais intervenir pour demander la réponse à la question. Nous avons le temps pour une dernière et ensuite nous devrons passer au témoin suivant.

M. Phillips: Nul ne peut répondre à cette question, madame Catterall. Je ne sais pas si une personne se sentirait davantage lésée par le fait d'être sur la liste que d'en être omise par mégarde.

Je comprends votre préoccupation au sujet des personnes défavorisées, en particulier les personnes qui ne savent pas lire ou écrire ou qui sont aveugles. Mais je suppose que des dispositions particulières sont prises à leur égard dans le processus électoral actuel et je présume que des dispositions similaires peuvent être prises sous le régime de la nouvelle loi.

J'aimerais faire un bref commentaire général sur cette loi. Ce qu'elle m'indique, en tant que citoyen, c'est qu'à l'occasion de la réécriture de notre loi électorale... la création d'une liste permanente pour mettre à profit, si vous voulez, la technologie moderne et nous donner un processus électoral plus efficient... Je vois le reflet dans cette loi de la reconnaissance par ses auteurs que le vote est un grand privilège, qui n'est pas conféré sans discrimination et que, bien que chaque citoyen ait le droit de voter, chaque citoyen est censé réfléchir à ce privilège et vouloir réellement l'exercer.

Nous avons adopté pour principe dans ce pays, dès le début, de ne contraindre personne à voter, car les Parlements successifs ont jugé qu'un vote doit être un vote réfléchi, l'acte d'une personne qui comprend et apprécie la qualité de ce vote. C'est ce que je vois reflété dans le projet de loi et dans le soin que l'on a mis à assurer que les gens réfléchissent à ce qu'ils font.

Je sors largement du champ de la protection de la vie privée en disant cela, mais c'est ainsi que j'interprète le soin que M. Kingsley et son personnel ont mis à assurer qu'il y a des étapes dans cette procédure auxquelles les gens doivent réfléchir avant de signifier leur décision, en connaissance de cause, de voter ou de ne pas voter.

Le président: Je vous remercie.

Nous aurons une dernière intervention très brève de M. Laurin, ensuite de quoi nous remercierons le témoin.

[Français]

M. Laurin: Monsieur Phillips, j'aimerais que vous m'expliquiez ce qu'on peut faire pour la protection de la vie privée. Lorsqu'un citoyen naît, il est inscrit sur un registre de citoyens. Il ne l'a pas demandé. Il n'a pas choisi d'être inscrit ou pas et, pourtant, au moment de la naissance, on l'inscrit sur un registre de citoyens. On ne lui demande pas sa permission.

.1015

Pourquoi ne pourrait-on pas faire la même chose en reconnaissant qu'à 18 ans, on a le droit de l'inscrire automatiquement? En quoi, dans un cas, brime-t-on la vie privée alors qu'on ne la brime pas dans l'autre? C'est la même chose pour le recensement aux dix ans ou aux cinq ans. Les citoyens n'ont pas le choix d'être recensés ou pas. Ils ont le devoir de le faire en vertu de la loi.

[Traduction]

M. Phillips: Je pense que l'État a droit à certains renseignements de base, tels que de savoir si un nouveau-né est résident du pays, mais dès lors qu'il s'agit de choses comme des listes d'électeurs et la question de savoir si une personne souhaite voter ou non, vous avez là affaire à un être humain adulte qui a des droits, l'un de ces droits étant celui de décider de participer ou non à un processus politique.

Sauf votre respect, il me semble qu'il est assez facile de distinguer entre les deux choses et que la dernière ne présente pas du tout le même genre de problème. Un nouveau-né âgé d'un jour ou de deux semaines n'est pas une personne ayant une grande connaissance du système politique du pays faisant que... Il y a une différence de nature aussi bien que de degré.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Phillips. Nous apprécions sincèrement votre intervention et votre participation ce matin. Cela nous a été des plus utiles. Je sais que vous avez certainement clarifié un certain nombre d'aspects, et ce sera utile pour le comité lorsqu'il aura à prendre ses décisions, notamment sur le respect de la vie privée. Nous apprécions la bonne note que vous avez décernée à M. Kingsley et j'espère que vous nous accorderez la même lorsque nous adopterons le projet de loi.

M. Phillips: Si vous le permettez, monsieur le président, avant de partir j'aimerais vous remettre le texte de certains des amendements mineurs.

Le président: Ce serait très utile, car les membres du comité vont passer à l'étude article par article mercredi ou jeudi prochain.

Merci beaucoup.

Collègues, nous allons suspendre la séance pendant quatre minutes, le temps que les témoins suivants prennent place.

.1017

.1023

Le président: Chers collègues, nous reprenons l'étude de notre ordre de renvoi portant sur le projet de loi C-63.

[Français]

Bienvenue à M. Côté

[Traduction]

du Bureau du Directeur général des élections du Québec. Si j'ai bien compris, monsieur Côté, vous êtes ce matin accompagné de certains de vos collègues. Vous pourriez peut-être nous faire vous- même les présentations.

Mesdames et messieurs, M. Côté va, je pense, faire une brève déclaration liminaire, après quoi nous passerons, comme à l'habitude, à la période des questions.

[Français]

M. Pierre-F. Côté (directeur général des élections du Québec): J'aimerais vous présenter Me Eddy Giguère, mon adjoint immédiat; M. Jacques Drouin, responsable du scrutin; M. François Casgrain, directeur des affaires publiques; Mme Thérèse Fortier, du service des communications; et M. Jean Poirier, responsable immédiat de l'établissement de la liste électorale permanente informatisée.

Si vous me le permettez, je voudrais m'excuser auprès des membres de ce comité de ne pas avoir à ma disposition un texte de présentation en langue anglaise. Les notes que j'ai n'ont été finalisées que tard hier. Je m'en excuse, mais des exemplaires de ces notes ont été remises à la traduction simultanée et, comme je vais m'en tenir à mon texte au tout départ, il vous sera relativement facile de suivre.

M. Langlois (Bellechasse): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Le témoin a-t-il à sa disposition une version française qui pourrait nous être utile pour suivre avec l'interprétation?

M. Côté: Nous en avons une pour les membres du comité s'ils la veulent.

.1025

M. Langlois: Je l'apprécierais.

M. Côté: Je pense qu'on en a remis des exemplaires à Mme la greffière.

[Traduction]

Le président: Si j'ai bien compris, votre texte n'est disponible qu'en français, n'est-ce pas?

[Français]

M. Côté: On a des copies de ce texte qui pourraient être données aux membres du comité. En même temps que la traduction simultanée, vous pourrez suivre le texte français.

Mme Catterall: Monsieur le président,...

[Traduction]

Le président: Oui, madame Catterall.

[Français]

Mme Catterall: ...j'aimerais demander à M. Langlois s'il trouve acceptable que le texte soit donné aux membres du comité seulement dans une langue officielle.

M. Langlois: Je ne veux pas faire de débat avec Mme Catterall. La question s'est posée la semaine dernière au Comité permanent de la justice et des questions juridiques. Lorsque les témoins sont arrivés, ils avaient en main le texte anglais de leur présentation. Étant donné les délais, ils n'avaient pas eu le temps d'en faire faire la traduction. Comme le texte n'avait pas été distribué auparavant et que cela permettait aux gens de le lire au fur et à mesure...

[Traduction]

Le président: Je pense, chers collègues, que Mme Catterall tente de souligner que ce qui est bon pour l'un l'est pour l'autre. Vous avez souvent par le passé lourdement insisté là-dessus. Je pense que c'est cela qu'elle a voulu dire.

[Français]

M. Langlois: C'est ce qu'on vient de dire.

Le président: Pas de problème. Merci. Allons-y.

M. Côté: Monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, il me fait plaisir de me retrouver à nouveau devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre qui est chargé d'étudier le projet de loi C-63, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi référendaire.

En mai 1994, j'étais invité devant ce comité pour partager l'expérience québécoise en matière de référendums. En 1990 et 1991, j'ai été amené à collaborer cinq fois aux travaux de la Commission Lortie. L'expertise du directeur général des élections a également été sollicitée en janvier 1993 par un comité spécial de la Chambre des communes sur la réforme électorale et, en juin 1994, par un comité de la Chambre des communes et du Sénat chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada.

Je souhaiterais, en premier lieu, situer le cadre de mon intervention. Pour ce faire, j'aimerais rappeler brièvement les faits suivants. Après plus de 15 ans de réflexion et de tentatives diverses pour rationaliser la procédure d'établissement des listes électorales, l'Assemblée nationale du Québec a adopté, en juin 1995, une loi sur l'établissement d'une liste électorale permanente devant servir à la tenue de tout scrutin provincial, municipal et scolaire. C'est le directeur général des élections du Québec qui s'est vu confier la responsabilité de l'implantation de cette liste et de sa mise à jour.

La liste électorale permanente est constituée d'un fichier des électeurs établi à partir du recensement de septembre 1995, qui a servi au référendum, et d'un fichier des territoires. Ce recensement a été fait par des recenseurs recommandés par les partis politiques des deux côtés de la Chambre et a été suivi d'une révision effectuée par des commissions de révision, composées également de réviseurs recommandés par chacun des deux comités nationaux.

Les travaux reliés à la constitution de cette liste ont commencé à l'automne 1995 et doivent être complétés pour le 1er mai 1997, dans quelques mois. Au cours des travaux relatifs à la constitution et à l'implantation de la liste électorale permanente, nous avons été confrontés - et nous le sommes encore - à maintes difficultés qu'il nous a fallu résoudre puisque nous étions, si l'on peut dire, en terrain inconnu.

En même temps, notre expertise se consolide et se raffermit. C'est cette expertise que je suis tout disposé à partager avec vous aujourd'hui. Aussi, j'essaierai de répondre au mieux à toutes les questions concernant le calendrier des travaux, les modalités de la constitution de la liste, sa mise à jour, etc. Je vous ai présenté les gens de mon bureau qui sont avec moi.

Vous comprendrez par ailleurs qu'étant responsable de l'administration d'une loi qui a pour objet l'exercice des droits démocratiques de tous les électeurs du Québec et qu'étant redevable de mes actes devant les 125 membres de l'Assemblée nationale du Québec, je me dois d'avoir une attitude de réserve à l'égard de toute question qui pourrait avoir un caractère carrément politique.

.1030

Avant qu'on passe à la période de questions, vous me permettrez d'abord d'exposer succinctement les principes de base qui m'apparaissent devoir être pris en considération pour l'établissement et le fonctionnement d'une liste électorale permanente: premièrement, l'exhaustivité des données de base d'une telle liste, à savoir le prénom, le nom, le sexe, la date du naissance et l'adresse du domicile, y compris le code postal et l'adresse postale, le cas échéant; deuxièmement, le respect de la qualité d'électeur propre à chaque juridiction pour laquelle une liste doit être produite; troisièmement, le respect du choix de l'électeur d'être inscrit ou non sur la liste électorale; quatrièmement, l'établissement de mécanismes de mise à jour des renseignements de chacun des électeurs inscrits sur la liste électorale permanente. Ce mécanisme doit être fiable, complet, rapide et diversifié.

Ces principes sont ceux qui ont guidé l'élaboration de la loi québécoise et qui continuent de nous guider dans la mise en oeuvre de chacune des modalités ou des procédures de fonctionnement.

Permettez-moi de vous souligner certaines dispositions du projet de loi C-63 qui soulèvent, à mes yeux, des interrogations. Dans le texte qui suit, je serai très clair. Quand on parle du registre, il s'agit du projet de loi C-63. Quand il s'agit de la liste électorale permanente, il s'agit de notre liste, au Québec.

Au chapitre de la constitution du registre des électeurs, la loi prévoit que c'est par le biais d'un recensement général qu'elle sera réalisée. Aucune disposition ne prévoit la possibilité d'utiliser à cette fin des listes électorales provinciales existantes.

Puisque la tenue de ce recensement a été envisagée pour le printemps prochain et qu'à cette époque, la liste électorale permanente du Québec sera disponible et à jour, je suis quelque peu surpris de constater que le législateur n'ait pas envisagé la possibilité d'utiliser cette liste pour les fins de la constitution du registre, ce qui pourrait constituer une économie substantielle.

Quant à la procédure prévue pour le recensement et la mise à jour ultérieure du registre, je suis également étonné de constater que la date de naissance de l'électeur est une information facultative. Je voudrais apporter ici une précision. Il ne faudrait pas trop s'arrêter à tous les mots de mes notes. C'est avant tout des interrogations qu'on a et il est possible qu'on ait facilement des réponses à ces interrogations-là. Ce sont les questions qu'on se pose à partir de la lecture du projet de loi. Donc, la date de naissance des électeurs est laissée facultative.

Puisque, à notre avis, la date de naissance constitue souvent une piste d'identification essentielle dans les fichiers des organismes, comment les informations de mise à jour pourront-elles être versées au registre des électeurs avec un degré suffisant de certitude sur l'identité d'un électeur si cette identification se fait sur la seule base du nom de l'électeur et possiblement de son adresse?

Il est prévu que les informations nécessaires à la mise à jour du registre s'obtiendront notamment à partir des renseignements transmis au directeur général des élections du Canada par des organismes provinciaux, pour autant que les organismes visés consentent à de tels transferts d'information.

Il faut comprendre qu'au Québec, les organismes détenteurs de renseignements sont régis par leur loi constitutive, par la Loi sur l'accès à l'information et par les dispositions très restrictives sur l'échange de tels renseignements. Des modifications législatives seraient donc nécessaires pour que de telles ententes d'échange de renseignements avec le Québec puissent être mises en oeuvre.

Quelles sont les sources alternatives de mise en oeuvre auxquelles le directeur général des élections du Canada aura recours dans l'éventualité où une juridiction provinciale refuserait le transfert d'informations détenues par les organismes provinciaux?

Pour sa part, le législateur québécois, lors de l'adoption de la Loi sur l'établissement de la liste électorale permanente, a considéré que les renseignements contenus dans cette liste pourraient être utiles à la confection d'une liste fédérale. Il a ainsi introduit une disposition spécifique, l'article 40.42 de notre loi, autorisant la conclusion d'une entente à cet effet entre le directeur général des élections du Québec et son homologue fédéral. Il m'apparaît donc que cette voie doit être privilégiée pour la mise à jour des renseignements relatifs aux électeurs québécois.

Le pouvoir accordé au directeur général des élections, en vertu de l'article 71.02 du projet de loi, de radier du registre l'électeur qui ne donne pas suite, après un délai de 60 jours, à une demande écrite d'information qui a été faite par le directeur général des élections m'apparaît un peu exorbitant.

Je suis également surpris de constater que le projet de loi accorde au directeur du scrutin, au fédéral, des pouvoirs décisionnels dans le cadre de la révision qui précède la tenue du scrutin. Ainsi, un directeur du scrutin - et c'est notre lecture du projet de loi - pourrait être appelé à décider de la radiation d'un électeur sans qu'il ait lui-même eu l'occasion d'entendre le témoignage de la personne visée.

Faut-il rappeler que la radiation d'un électeur est une décision qui affecte un droit fondamental garanti par la Charte canadienne et qu'à ce titre, elle doit être assujettie aux règles régissant les décisions de nature quasi judiciaires?

À mon avis, ni le directeur général des élections du Canada ni le directeur du scrutin ne devraient pouvoir prendre de telles mesures. Cela devrait être laissé à des commissions de révision.

Le projet de loi C-63 prévoit que le directeur des élections du Canada peut faire des ententes avec les directeurs généraux des élections des autres juridictions pour leur fournir des renseignements nécessaires à la confection de leur propre liste électorale.

Par ailleurs, les électeurs ne sont pas tenus de fournir au directeur général des élections du Canada des renseignements qui pourraient être requis par les provinces pour utiliser la liste fédérale. On peut s'inquiéter d'ailleurs de la capacité de la liste fédérale à répondre aux exigences et aux attentes des juridictions provinciales.

.1035

Ce ne sont là que quelques interrogations générales que soulève notre lecture du projet de loi C-63. Par ailleurs, certains ont soulevé des préoccupations relativement à l'utilisation de la liste électorale permanente du Québec aux fins de la constitution du registre des électeurs du Canada en regard du délai de domicile exigé par la Loi électorale du Québec, exigence qui ne se retrouve pas dans la loi fédérale.

Au Québec comme dans chacune des autres provinces, un délai de résidence ou de domicile de six mois est imposé pour avoir la qualité d'électeur le jour du scrutin, alors que ce délai n'est pas requis pour avoir la qualité d'électeur au fédéral.

La question posée est donc de savoir quelles sont les conséquences pour le fédéral d'utiliser une liste provinciale aux fins de la constitution ou de la mise à jour du registre des électeurs. Une analyse des statistiques démographiques relatives aux migrations interprovinciales permet d'évaluer le nombre d'électeurs qui ne seraient pas sur la liste québécoise qui serait transmise au directeur général des élections du Canada en raison de cette exigence du délai de six mois.

Entre les années 1980 et 1990, les migrations vers le Québec, en provenance des autres provinces, ont oscillé entre 20 000 et 30 000 personnes par année. Pour les années 1993-1994 et 1994-1995, ce nombre a été respectivement de 24 366 et 27 758. De ce nombre, il faut retrancher les jeunes de moins de 18 ans qui représentaient ces deux dernières années 22,8 p. 100 des nouveaux arrivants. Il y a donc eu respectivement 18 812 et 21 426 nouveaux arrivants au Québec susceptibles d'être inscrits sur la liste électorale fédérale. Ces données statistiques étant sur une base annuelle, le nombre de personnes visées peut être réduit de moitié, puisque c'est pour un an; on le calcule sur six mois. On peut donc avancer, comme ordre de grandeur, le nombre de 9 000 à 11 000 personnes qui ne seraient pas inscrites sur les listes québécoises, bien qu'elles aient la qualité d'électeurs au fédéral, ce qui correspond à 0,2 p. 100 des électeurs inscrits à la liste électorale permanente.

Il faut noter enfin qu'il existera nécessairement un décalage entre le moment de l'établissement d'un électeur dans une nouvelle province et le moment de la mise à jour du registre fédéral relativement à ce déménagement interprovincial, ce qui diminue d'autant l'impact d'une exigence provinciale du délai de six mois. De plus, comme la période électorale prévoit une révision de la liste devant servir à l'élection, les personnes non inscrites sur les listes préliminaires fédérales pourront profiter de ce mécanisme pour demander d'être inscrites et exercer leur droit de vote.

Je vais être obligé d'apporter une précision en regard d'un problème qui a été soulevé en particulier hier. Je m'attends à une question et j'y réponds à l'avance. Quand on dit que la liste provinciale peut être réutilisée au fédéral, on se pose immédiatement la question: peut-on prendre les 5 087 000 ou 5 070 000 électeurs du Québec et les placer au bon endroit dans des sections de vote du fédéral? La réponse à cet égard, à mon avis, est relativement facile. Nous avons d'ailleurs une expérience à cet égard, parce que nous faisons actuellement le processus de placer les électeurs dans les bonnes sections de vote avec les municipalités présentement. C'est un problème technique qui se règle, à mon avis, relativement facilement.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de votre attention. Mes collaborateurs et moi-même sommes à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

[Traduction]

Le président: Merci. Vous nous avez fait un si bel exposé que personne ne veut poser de questions.

[Français]

Monsieur Langlois, s'il vous plaît.

M. Langlois: C'est la blague de l'Halloween, monsieur le président. Je souhaite une bonne Halloween à tout le monde. J'espère que les enfants vont faire attention aux bonbons.

Merci, monsieur Côté, pour votre présentation. Vous avez une longue expertise en matière électorale et de consultations populaires. Combien d'élections et de consultations populaires au Québec ont été tenues sous votre autorité?

M. Côté: Je suis en poste depuis 18 ans et, en termes de consultations populaires, les trois référendums qui ont été tenus au Québec en 1980, 1992 et 1995 étaient sous ma responsabilité.

M. Langlois: Et les élections générales entre-temps.

M. Côté: Et les élections générales et partielles durant toute cette période.

M. Langlois: Vous avez aussi travaillé à l'étranger, au soutien en Haïti entre autres.

M. Côté: Oui, personnellement, j'ai participé directement, en Haïti, comme représentant personnel du secrétaire général de l'Organisation des États américains. De plus, plusieurs membres de mon personnel participent régulièrement à des missions d'aide et de collaboration dans le domaine électoral à l'étranger et plus particulièrement en Afrique francophone.

.1040

M. Langlois: Si vous me le permettez, monsieur Côté, je vais vous poser mes questions, quitte à ce que vous y répondiez à la fin, parce qu'il y peut-être des choses qui se recoupent.

Si je comprends bien, actuellement, au Québec, c'est la Loi 40, qui a été sanctionnée le 16 juin 1995, qui vous autorise à établir une liste permanente des électeurs. D'après la page frontispice de cette loi, qui a été sanctionnée par le lieutenant-gouverneur, le projet de loi lui-même a été présenté le 5 décembre 1994, a franchi l'étape de la deuxième lecture le 16 décembre 1994 et a été adopté six mois plus tard, le 15 juin 1995, au lendemain de son adoption en troisième lecture, semble-t-il.

Il me semble qu'on a tenu des audiences publiques au Québec entre le 16 décembre et le 15 juin. Donc, pendant une période de six mois, quelles ont été, non pas sur le plan politique, mais sur le plan administratif et technique, les objections qui ont été soulevées à l'encontre de l'établissement d'une liste électorale permanente au Québec?

J'aimerais vous demander aussi si on peut envisager d'utiliser la liste électorale permanente du Québec au lieu de procéder à un recensement au Québec et dans les autres provinces comme le prévoit le projet de loi C-63, cela pour des raisons d'économie. Quelle économie pourrait-on réaliser si on prenait la liste que vous êtes en train de confectionner?

Vous avez élaboré un peu sur la question des sections de vote. J'aimerais que vous élaboriez aussi sur la question de la fiabilité de votre liste. Cela a été remis en question hier. On a dit que la liste du Québec, telle qu'établie, n'était pas nécessairement fiable. Quelles normes vous ont guidés dans l'établissement de cette liste?

J'aimerais savoir si la liste que vous êtes en train d'établir sera périmée lorsque la liste qui pourrait être préparée par le fédéral entrera en vigueur le printemps prochain.

Quant à la mise en place du registre des électeurs et à l'importance de la date de naissance, vous en avez parlé dans votre présentation. M. Phillips en a également parlé plus tôt. M. Laurin a soulevé cette question à deux reprises lorsqu'il a questionné le commissaire à la vie privée. J'aimerais que vous élaboriez sur les sources de mise à jour de la liste électorale permanente du Québec.

J'aimerais aussi savoir pourquoi le Québec a décidé d'utiliser la Régie de l'assurance-maladie comme source principale de la mise à jour de sa liste électorale. Pourquoi n'avez-vous pas choisi comme sources principales ou même accessoires Revenu Québec et la Société d'assurance automobile du Québec ou encore les registres de l'état civil?

Finalement, comment faites-vous pour rejoindre et permettre l'inscription, sur la liste électorale permanente, des personnes qui atteignent l'âge de 18 ans ou de celles qui obtiennent la citoyenneté canadienne?

M. Côté: Je peux répondre à cinq, six ou sept questions. La première se rapporte à l'adoption, à l'Assemblée nationale, du projet de loi 40, qui est maintenant intégré dans la Loi électorale du Québec. Il est vrai qu'il a été déposé le 5 décembre 1994. L'intention du gouvernement, à l'époque, était de procéder le plus rapidement possible. Entre le mois de décembre et le mois de juin, il s'est produit la chose suivante. Premièrement, il y avait une interrogation du côté de l'opposition, mais également, il y avait un certain nombre d'organismes qui ont été appelés à témoigner en commission parlementaire.

Je peux vous nommer rapidement les principaux organismes qui se sont fait entendre: le protecteur du citoyen, la Commission des droits de la personne, la Commission d'accès à l'information, l'Union des municipalités du Québec, l'Union des municipalités régionales de comté de Québec, l'Association des greffiers municipaux, la Fédération des commissions scolaires du Québec, le Congrès juif canadien, l'Association québécoise des commissions scolaires, le conseil scolaire de l'Île de Montréal, etc. S'il en manque, je pourrai vous les fournir.

.1045

Tous ces organismes qui se sont présentés devant la Commission l'ont fait sous forme de mémoire. Des principales interrogations qui ont été soulevées, la première qui me vient à l'esprit est en particulier la protection des renseignements personnels. La Commission des droits de la personne et le protecteur du citoyen ont été assez vigoureux là-dessus.

Comment cela s'est-il finalement traduit? Cela s'est traduit par une précaution très grande - vous allez voir plus loin, quand je vous parlerai de la Régie de l'assurance-maladie du Québec - , dans les échanges d'information entre le directeur général des élections et les organismes gouvernementaux. C'est une grande préoccupation chez nous que de préserver l'échange d'information nominative.

Je passe à votre deuxième question, parce que je vais revenir sur ce point-là. Vous m'avez demandé si, au lieu de procéder à un recensement général au printemps prochain, au Québec, on pouvait utiliser la liste québécoise. Je prétends que oui. Cela nécessiterait évidemment des échanges, qui sont déjà très bons par ailleurs avec Élections Canada, des ententes là-dessus. Ce serait une épargne qu'on évalue facilement à peut-être une quinzaine de millions de dollars. C'est ce que coûte un recensement dans la province de Québec.

Notre liste sera-t-elle périmée à ce moment-là? Il faut que j'aille un petit peu dans le détail de ce que nous faisons actuellement pour l'établissement de cette liste. Après le recensement de 1995, on a fait une liste qui a servi immédiatement au référendum. Mais depuis ce temps-là, que faisons-nous?

Dans les grandes lignes, et mes collègues pourront me corriger ou apporter plus de précisions, voici ce que nous faisons actuellement. D'abord, il y a un principe de base qui est très important. Nous faisons affaire avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Mais je reviens à la question de la protection des renseignements personnels. Nous n'avons pas accès à la Régie de l'assurance-maladie du Québec. C'est la Régie de l'assurance-maladie du Québec qui nous fournit des renseignements. Donc, on n'a pas accès aux registres de l'assurance-maladie. Qu'est-ce qu'on a fait et qu'est-ce qu'on est en train de faire? On prend la liste des 5 080 000 électeurs sur notre liste électorale et on la transmet à la Régie de l'assurance-maladie qui voit à ce que tout soit conforme.

Pourquoi la Régie de l'assurance-maladie? C'est parce que la Régie de l'assurance-maladie au Québec, à cause de l'entente qu'elle a avec la Société de l'assurance automobile du Québec, avec la Régie des rentes et plusieurs autres organismes provinciaux, y compris le registre de l'état civil, a le fichier d'adresses le plus à jour qu'on puisse trouver au Québec. Il est constamment mis à jour. La Régie de l'assurance-maladie du Québec couvre environ 7,2 millions de personnes. Une fois qu'on a transmis notre liste à la Régie, il y a un recoupement qui se fait. Là on va voir si, par exemple, le nom est bien écrit, si c'est le bon prénom. C'est à ce moment-là qu'intervient la date de naissance, pour ne pas qu'on ait ce qu'on appelle des doubles. Il y a peut-être des jumeaux qui sont inscrits avec les mêmes initiales et la même date de naissance. À ce moment-là, on regardera l'adresse.

Ce recoupement va nous donner très prochainement, dans les prochains jours, une liste de personnes pour lesquelles on aura des difficultés quant à l'adresse, l'épellation du nom, l'âge, etc. On va alors écrire à ces personnes et vérifier l'exactitude des renseignements qu'on a sur la liste électorale permanente. Par la suite, nous allons effectuer une autre opération, qui va débuter en décembre et janvier, qu'on appelle l'opération d'appariement.

C'est une deuxième opération. Il y a, d'une part, l'exactitude des noms sur la liste, et nous communiquons avec l'électeur pour bien vérifier. La deuxième opération consiste à s'assurer que les électeurs sont placés dans leur bonne section de vote. C'est ce qu'on appelle l'appariement, parce qu'il y a deux fichiers. Il y a le fichier des électeurs et le fichier du territoire. Il faut s'assurer que, lorsqu'on va transmettre une liste électorale pour l'élection provinciale, et c'est le même principe pour l'élection fédérale, les noms des électeurs dans un territoire géographique déterminé correspondent bien aux domiciles de ces personnes. En anglais, on a un concept qui est analogue, pour ne pas dire identique, celui du main residence.

.1050

Au mois de mars, ou au plus tard au mois d'avril, nous aurons une liste électorale qui a été établie au recensement de 1995, mais qui sera à jour. Subséquemment, ce sera la mise en place de la liste. L'«opérationalisation» de la liste, une fois qu'elle sera en vigueur, au mois de mai, comment va-t-elle se faire?

C'est le même principe. On prévoit, par exemple, qu'on devra communiquer avec 75 mille personnes par mois, à cause de tous les déménagements qui se font, de tous les changements d'adresse. Mais il y a un principe de base qui est dans la loi: celui de la responsabilisation des électeurs.

Par exemple, il est dit dans la loi que lorsqu'un électeur change de domicile, il doit nous en aviser. Vous savez qu'on avise couramment le bureau de poste, la Société de l'assurance automobile, la Régie, etc. On demande aux électeurs de nous aviser également. Cependant, même s'ils ne nous avisent pas, à cause des renseignements qui seront transmis à la Régie de l'assurance-maladie, nous allons avoir ces changements d'adresse, parce qu'il y a un principe de base qu'il ne faut jamais perdre de vue et qui nous préoccupe constamment. C'est qu'il est toujours loisible à un citoyen du Québec qui a qualité d'électeur de vouloir que son nom soit sur la liste ou pas. C'est une liberté totale. Certaines personnes, dont le nombre est difficile à évaluer exactement, refusent que leur nom soit mis sur la liste.

Donc, le but du recoupement est de voir si les noms de notre liste sont conforme aux noms qui sont inscrits à la Régie. Comment procède-t-on avec la Régie? À la suite d'observations qui ont été faites par les organismes qui se sont présentés, notamment le protecteur du citoyen et la Commission des droits de la personne, nous avons un protocole d'entente avec la Régie qui a été approuvé par la Commission d'accès à l'information en particulier. C'est un protocole qui est public et la façon de procéder est bien établie. Nous nous préoccupons sans cesse, avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec, de la protection des renseignements personnels.

Je pense avoir parlé rapidement de l'importance de la date de naissance. Dans un système informatisé de liste électorale permanente, les données de base ne sont pas très nombreuses. C'est le nom, le prénom, le sexe et l'adresse du domicile. Pourquoi pense-t-on que la date de naissance est importante? Par exemple, prenons les personnes qui atteignent 18 ans et qui acquièrent la qualité d'électeur. Nous allons recevoir de la Régie de l'assurance-maladie, comme nous l'avons fait pour les élections municipales qui auront lieu dans les prochains jours, les noms de toutes les personnes qui vont atteindre 18 ans. Donc, la date de naissance est importante.

Que fait-on avec ces d'électeurs qui ont atteint 18 ans? Nous leur écrivons et nous leur demandons s'ils veulent que leur nom soit sur la liste.

Je vous signale que la dernière opération qu'on vient de faire à cet égard a dépassé notre espérance en termes de pourcentage de réponse de la part des jeunes qui ont atteint 18 ans. D'autre part, nous allons aussi recevoir de la Régie de l'assurance-maladie les données sur les décès. Cela a moins de rapport avec la date de naissance. Quand une personne décède, on ne peut pas la faire comparaître. Pardonnez-moi cette blague de mauvais goût. Mais quand une personne décède, il faut rayer son nom de la liste.

C'est donc une façon pour aider l'informatique notamment à bien fonctionner dans la vérification de l'identité de l'électeur. C'est pour cela qu'on se demande pourquoi la date de naissance est facultative selon le projet de loi. Peut-être qu'il y a une réponse à cela, mais je l'ignore.

Je vous ai répondu rapidement sur les sources de mise à jour. Je vous ai dit pourquoi on faisait affaire avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Vous avez touché un dernier point, celui de la citoyenneté.

Quant à la citoyenneté, le problème, pour nous, se pose de la façon suivante.

Il va de soi que dans le cas de tout citoyen canadien qui acquiert la citoyenneté et qui rencontre les autres exigences de la loi, soit être domicilié au Québec depuis six mois, avoir 18 ans accomplis, etc., ses nom, prénom, adresse, etc. sont inscrits.

Nous sommes actuellement en pourparlers avec le ministère de la Citoyenneté du Canada pour obtenir de façon systématique, de la part du ministère, les nouveaux certificats de citoyenneté attribués.

.1055

Supposons qu'on en arrive à une entente. Les négociations seront un peu longues et laborieuses, mais je les vois de façon plutôt positives

Aussitôt qu'on aura reçu l'information sur un nouveau citoyen, parce qu'au bout de trois ans il risque d'être domicilié au Québec depuis au moins six mois, qu'allons-nous faire? Nous allons écrire à ce nouveau citoyen pour lui dire: «Maintenant, vous avez la qualité de citoyen canadien, ce qui est une exigence fondamentale selon la Charte, et vous avez les autres qualités. Pouvez-vous nous les confirmer?» Donc, nous allons lui écrire et lui demander de nous confirmer cette information. Cela répond à la question sur la citoyenneté. Je pense avoir couvert presque toutes vos questions.

Le président: Merci beaucoup.

[Traduction]

Monsieur Pagtakhan.

M. Pagtakhan: J'aimerais que l'on parle de ce que vous entendez par «electoral purpose». Comment interprétez-vous cette expression?

[Français]

M. Côté: C'est une question fort intéressante qui a des conséquences dans notre loi. Je pense que c'est bien que vous mentionniez «electoral purpose». Une liste électorale ne peut servir qu'à des fins électorales. Qu'est-ce qu'on dit dans la loi à cet égard?

Au Québec, on pourra utiliser la liste électorale permanente pour des fins de scrutin provincial, municipal et, éventuellement, scolaire. Il y a dans notre loi une disposition qui dit que toute personne qui utiliserait la liste électorale pour des fins autres que le scrutin - le scrutin peut être de différentes natures: élections partielles, élections générales, référendum dans les municipalités et sur le plan scolaire - serait passible de fortes amendes. Pourquoi est-ce prévu dans ce sens au Québec? Nous croyons que les électeurs doivent toujours avoir confiance en nous. Ils doivent savoir que la liste électorale sur laquelle est inscrit leur nom ne servira pas à n'importe quel marchand ou à d'autres fins.

Comment procédera-t-on pour assurer cela? En période électorale, on fournit la liste aux administrations concernées et on la fournit également aux partis politiques, de sorte que les partis politiques auront en main une liste électorale et pourront s'en servir uniquement pour des fins électorales. Je vous dis que notre loi prévoit des amendes très élevées si quelqu'un s'aventure à utiliser cette liste pour des fins autres qu'électorales.

[Traduction]

M. Pagtakhan: En ce qui concerne votre réticence à vouloir qu'on autorise le directeur du scrutin à réviser la liste, vous avez fait état de l'absence d'audience et de mécanisme d'appel. Cela appaiserait-il vos craintes si l'on prévoyait un mécanisme permettant d'en appeler de la décision du directeur de scrutin de réviser la liste ou d'avoir d'abord un entretien avec l'intéressé?

[Français]

M. Côté: Si j'ai bien compris, vous dites qu'on pourrait confier la première vérification au directeur du scrutin ou au directeur général des élections tel que prévu dans le projet de loi. Nous croyons que c'est un droit tellement important et fondamental que d'avoir son nom sur une liste que le pouvoir de le rayer doit appartenir à un organisme quasi judiciaire. Et surtout, il faut que l'électeur concerné puisse se faire entendre. C'est pour cette raison que ce nous avons au Québec et préconisons dans les remarques que je viens de faire est avant tout une commission de révision.

Premièrement, une commission de révision - celles du Québec et du fédéral sont analogues - est composée de réviseurs dont la nomination est faite sur recommandation des partis politiques.

Deuxièmement, la décision de ces commissions de révision, en tant qu'organismes quasi judiciaires, est finale et sans appel, mais elles ne la rendent qu'après avoir entendu la personne. Il faut que tous les moyens soient déployés pour entendre une personne avant de rayer son nom. Nous allons procéder de cette façon et je vous assure que les moyens pour rejoindre les électeurs seront très larges chez nous, parce que le droit fondamental d'avoir son nom sur une liste électorale existe. Avant qu'on enlève son nom, il faut que l'électeur participe au processus lui-même et que la décision soit prise par un organisme quasi judiciaire.

.1100

[Traduction]

M. Pagtakhan: Vous avez parlé du fait que la liste du Québec serait mise à la disposition du directeur général des élections fédéral. Envisageriez-vous une compensation en retour, ou bien la liste serait-elle offerte gratuitement?

[Français]

M. Côté: Non. Il est prévu dans notre loi que, si on fournit cette liste à Élections Canada, ce sera moyennant compensation financière. Je pense que cela va de soi, d'abord parce que les gouvernements ont des difficultés financières, mais il y a également le travail considérable et les sommes dépensées jusqu'à maintenant par le Québec pour l'établissement de cette liste. Là-dessus, nous sommes ouverts à des échanges et à des discussions. Si jamais Élections Canada nous demandait la liste, je recommanderais au gouvernement, parce que ce sera la décision du gouvernement, qu'on soit raisonnable à cet égard, en termes de compensation financière.

[Traduction]

Le président: Allez-y, monsieur Bélanger, je vous prie.

[Français]

M. Bélanger (Ottawa - Vanier): Monsieur Côté, je me dois de vous poser la question suivante. S'il advenait qu'une loi électorale ou un projet de loi était en conflit avec la Charte des droits et libertés, dois-je comprendre de vos propos que c'est la Charte qui devrait primer?

M. Côté: Oui. Je pense que la Charte des droits et libertés a priorité, non seulement la Charte canadienne mais aussi la Charte québécoise, qui, sous certains aspects, est plus précise ou plus pointue. C'est un point de référence qui est inéluctable.

M. Bélanger: Croyez-vous que le gouvernement aurait dû réintroduire des notions de contrôle des limites de dépenses par un tiers parti, soit la disposition qui a été déclarée ultra vires par des cours albertaines?

M. Côté: Je considère la question hypothétique. Aurait-il dû le faire? Devrait-on le faire? Je suis un peu mal placé pour commenter cela en comité parlementaire. J'ai certaines opinions là-dessus, mais cela me semble un peu en dehors de ce comité.

Je ne veux pas vous donner l'impression que je me retire de cela, mais vous connaissez... Écoutez, je peux résumer de la façon suivante.

Vous connaissez les dispositions de la loi québécoise à cet égard, qui sont uniques au monde et qui donnent des résultats très positifs, à notre avis. C'est contesté et questionné. Il y a des décisions qu'on a obtenues au Québec de la Cour supérieure et de la Cour d'appel. Il y a des causes qui seront entendues très prochainement par la Cour suprême. Une fois que la Cour suprême se sera prononcée sur les questions qui relèvent de la juridiction du Québec, je pense qu'on aura... Évidemment, on va se plier aux décisions de la Cour suprême, cela va de soi. À ce moment-là, on pourra tirer des conclusions définitives.

Ce qui est important, c'est qu'au Québec, à l'égard du financement des partis politiques, il existe un très fort consensus social à l'égard de ces dispositions qui ont été adoptées. C'était le projet de loi 2 en 1979-1980.

Il s'est développé chez tous les Québécois un attachement à cette façon de procéder, qui n'est pas toujours facile. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'échappatoires, qu'il n'y a pas de façons de passer un peu à côté. Il y en a toujours, mais l'esprit général qui découle de cette façon de procéder, concernant la non-intervention des tiers par exemple, est vraiment inscrit dans les moeurs. Il faudrait un changement radical à l'Assemblée nationale pour changer cela, parce que l'Assemblée nationale et tous les partis politiques ont toujours observé ces dispositions-là.

Il faudrait deux choses: ou bien une décision de la Cour suprême qui nous dirait que ce n'est pas bon et de retourner faire nos devoirs, ou bien un changement d'orientation de société chez nous.

M. Bélanger: Je crois que la plupart des Canadiens partagent cet avis en ce qui a trait aux limites de dépenses, et je ne crois pas qu'il y ait quelqu'un qui remette cela en cause. Cependant, vous dites que cela va plus loin, particulièrement au sujet des tiers.

Quant à vous, le gouvernement aurait dû insérer une limite dans ce projet de loi.

M. Côté: Quand je demande si le gouvernement actuel aurait dû inscrire cela, c'est une hypothèse. Au Québec, c'est peut-être un point historique. Le contrôle des dépenses électorales a été établi en 1963. Le contrôle des contributions venant de personnes physiques a été établi de façon très précise en 1979. Les deux vont de pair.

Pendant une période de scrutin, qu'il s'agisse d'un référendum, d'élections générales ou d'élections partielles, pourquoi ne permet-on pas des interventions des tiers? Parce que le principe de base de la loi est que toute dépense doit être faite et autorisée par le représentant officiel. Tout ce qui est fait en dehors du représentant officiel n'est pas permis d'après notre loi.

.1105

C'est vrai que nous sommes allés assez loin, mais c'est une chose qui existe et qui fonctionne assez bien.

M. Bélanger: Et la question de la primauté de la Charte des droits?

M. Côté: Nous avons des jugements des tribunaux, de jugements de la Cour d'appel. Cette question de la Charte a été invoquée. Le premier ou le troisième article de la Charte permet à une assemblée législative de déroger sur le premier article, si c'est pour le bien commun, et c'est ce qui a été confirmé jusqu'à maintenant. Il reste à savoir si ces décisions des cours du Québec vont être entérinées par la Cour suprême.

M. Bélanger: Si je comprends bien, quand une personne demeure au Québec, son nom est inscrit sur la liste sans qu'elle ait à donner son consentement. Ai-je bien compris?

M. Côté: C'est le contraire. Quand on a fait le recensement, en 1995, on l'a fait de porte à porte et il fallait que les gens consentent à nous donner leur nom.

Supposons que quelqu'un ne veut pas que son nom soit sur la liste. Il y a possibilité de dire à la commission de révision qui suit immédiatement le recensement qu'on veut que son nom soit rayé. Les commissions de révision sont très importantes pour nous. Nous devons demander à tous les nouveaux électeurs, en particulier ceux qui atteignent 18 ans, mais aussi à toute autre personne qui obtiendrait la citoyenneté canadienne, leur consentement pour que leur nom soit inscrit sur la liste.

[Traduction]

Le président: Allez-y, monsieur Harper.

[Français]

M. Harper: Monsieur Côté, je vous remercie de votre témoignage et de nous avoir fait partager votre expérience.

[Traduction]

Pour enchaîner sur la question de M. Bélanger, si j'ai bien compris, vous avez dit que si la Cour suprême devait rendre des décisions sur l'une ou l'autre de ces questions, vous-même et votre Bureau s'y plieraient. Dans d'autres contextes, le gouvernement du Québec a laissé entendre qu'il ne serait peut-être pas d'accord pour se soumettre aux décisions de la Cour suprême relativement à une future campagne référendaire. S'il y avait des décisions de la Cour suprême portant sur une telle campagne, seriez-vous guidé par des directives venant du gouvernement du Québec ou de la Cour suprême du Canada?

[Français]

M. Côté: Il faut d'abord dire que vous posez votre question dans une perspective carrément politique. Des décisions devront être prises par le gouvernement du Québec. Ces décisions seront-elles conformes ou non aux décisions de la Cour suprême? C'est un point carrément politique.

En ce qui me concerne, je relève avant tout et directement des 125 membres de l'Assemblée nationale. Mon premier devoir est de suivre les lignes de conduite ou les directives que je reçois de l'Assemblée nationale.

Cela étant dit, si j'ai le choix, comme citoyen ou comme directeur général des élections, de me conformer ou pas à une décision de la Cour suprême, ma réponse sera évidemment positive. Mais je fais la distinction entre une directive que je recevrais de l'Assemblée nationale et une politique qui serait établie par le gouvernement. J'ai parlé du gouvernement; c'est l'Assemblée nationale également.

Je serais alors pris entre deux chaises. Je suis redevable de mes actes à l'Assemblée nationale et j'en reçois mes instructions, ce qui, entre parenthèses, est un avantage énorme. Je ne relève pas du gouvernement. Je suis nommé par l'Assemblée nationale et je rends compte à l'Assemblée nationale. C'est ce qu'on appelle la théorie de la persona designata en droit parlementaire britannique

Au XXVIIe siècle, la Chambre des communes a demandé à quelqu'un de faire quelque chose à sa place parce que, traditionnellement, une Chambre des communes ou une assemblée législative se renouvelle d'elle-même. Un jour, on a trouvé que c'était trop lourd et on a demandé à quelqu'un de le faire. C'était la personne désignée, la persona designata. Cette personne désignée est une émanation soit de la Chambre des communes, soit de l'Assemblée législative, soit de l'Assemblée nationale et relève d'elle. Je réponds à votre question de cette façon.

[Traduction]

M. Harper: Je reviendrai peut-être là-dessus un peu plus tard. J'aimerais maintenant traiter brièvement de certaines des questions abordées dans le projet de loi C-63.

Hier, j'ai posé à M. Kingsley un certain nombre de questions très générales concernant le coût de la constitution d'un registre permanent et le temps que cela semble prendre au Québec.

.1110

Selon votre expérience, combien cela peut-il maintenant coûter pour constituer un registre permanent au Québec, et comment cela se compare-t-il avec ce que les recensements vous ont jusqu'ici coûté?

[Français]

M. Côté: Il y a trois éléments de réponse. Premièrement, l'établissement de la liste au moyen d'un recensement provincial nous a coûté, en septembre, 19,4 millions de dollars pour être très précis, selon le rapport officiel.

Évidemment, il faut bien distinguer qu'au Québec, on a un plus grand nombre de circonscriptions électorales qu'au fédéral, soit 125 contre 75, et aussi plus de sections de vote. Nos sections de vote ne regroupent qu'un maximum de 300 électeurs. On a 22 000 sections de vote, d'où l'explication du premier coût du recensement.

Deuxièmement, pendant ce recensement, la loi a prévu un recensement plus long. Au lieu de prendre quelques jours pour le faire, on a obtenu six jours pour être bien certains que ce recensement allait couvrir tout le monde. Je pense qu'on peut dire qu'on a eu du succès parce que cela été notre plus fort recensement. Dans cette opération de 19 millions de dollars, une dizaine de millions de dollars ont servi à payer les recenseurs.

Qu'en est-il de l'établissement de la liste? Une fois qu'on a fait ces dépenses, on fait des dépenses pour la réalisation d'une liste électorale informatisée. Notre perspective et nos prévisions budgétaires se rencontrent assez bien actuellement; cela va coûter environ sept millions de dollars. On additionne ces chiffres et on se demande si on va faire des économies sur une longue période. Un rapport a été publié en mars 1993 pour ajuster les chiffres, mais il y a des prévisions d'économies qui vont jusqu'à 1999.

La première épargne que le Québec va faire, c'est qu'il n'y aura plus de recensement annuel, parce que la loi a prévu autre chose. On a eu un recensement en 1995, mais il n'y en aura plus. Donc, on épargne déjà au moins de 15 à 18 millions de dollars. Il n'y aura plus de recensement.

Il va rester à déterminer s'il y a lieu d'avoir un recensement scolaire. Sur le plan municipal, on fournirait la liste, mais il y a des compléments dans les municipalités pour les non-résidents et le reste.

J'ai demandé quelle était l'économie prévue en 1998 et 1999. En quatre ans d'opérations, on épargnera 15 162 756,89$. C'est ce qu'on avait prévu à l'époque. Maintenant, c'est de 15 à 16 millions de dollars qu'on épargnera. Tout en fournissant ces listes au provincial, au municipal et au scolaire, on a l'intention de leur charger éventuellement quelque chose, ne serait-ce que symboliquement. Et il n'y aura plus de recensement, ni au provincial, ni au municipal, ni au scolaire.

[Traduction]

M. Harper: Avez-vous un budget pour l'établissement de la liste permanente, ou bien y a-t-il eu des coûts imprévus qui sont survenus au fur et à mesure de l'établissement de la liste et de l'exécution de ce projet?

[Français]

M. Côté: Si j'ai bien compris, vous me demandez si j'ai un budget bien déterminé et approuvé.

[Traduction]

M. Harper: Des prévisions ont manifestement été établies pour le coût et le temps à prévoir pour la constitution d'une liste électorale permanente. Ces prévisions se sont-elles avérées bonnes, ou bien vous êtes-vous trouvé confronté à des coûts ou à des retards imprévus?

[Français]

M. Côté: Non, pas pour le moment. Ce qu'on a prévu, comme on l'a dit en commission parlementaire, entre janvier et juin, c'est que cela nous coûterait sept millions de dollars, mais qu'il était possible qu'on aboutisse à huit millions de dollars, par exemple, parce qu'il y a toujours des coûts imprévus. Mais l'ordre de grandeur demeure le même.

Vous demandiez aussi quel était le budget du directeur général des élections. C'est peut-être important de vous donner cette précision. Pour mon budget de fonctionnement annuel, je dois me présenter annuellement devant une commission parlementaire. Cette commission parlementaire peut poser n'importe quelle question sur des dépenses - et cela s'est déjà produit - de 50$, par exemple, et on doit les justifier.

.1115

La particularité qu'il y a dans notre loi est que lorsqu'on se présente devant une commission parlementaire, la commission ne vote pas de budget. Il n'est pas transmis à l'Assemblée nationale. Il est simplement déposé et on doit répondre à toutes les questions.

Pourquoi n'est-il pas adopté par l'Assemblée nationale? C'est parce que s'il était voté par l'Assemblée nationale, je serais assujetti à la Loi sur l'administration financière et au gouvernement et je ne serais pas indépendant du Conseil des ministres. Cette façon de procéder fonctionne depuis une quinzaine d'années.

Qu'en est-il lorsque survient un événement, lorsqu'il arrive un recensement comme celui qu'on a eu pour le référendum, pour une élection générale? Je suis branché directement sur le Fonds du revenu consolidé et le ministre des Finances est habituellement dans l'obligation de donner suite à mes demandes de paiement. Évidemment, on me pose des questions et je réponds. Je ne peux pas faire n'importe quelle dépense. Les dépenses doivent être reliées à la réalisation de l'élection.

[Traduction]

M. Harper: Je tiens bien sûr à être très clair. Je ne vous demande aucunement de justifier vos dépenses. Nous tenons tout simplement à vérifier si les hypothèses budgétaires qui sous- tendent le projet de loi C-63 s'avéreront justes.

L'on se demande, surtout en Colombie-Britannique, si ces arrangements reposant sur des listes d'électeurs permanentes ne vont pas finir par être plus coûteux que les méthodes de recensement traditionnelles. Il ne semble y avoir aucune raison pour laquelle ils le seraient, mais certains doutes ont été soulevés à cet égard.

J'aimerais maintenant vous poser une dernière question là- dessus, et j'interviendrai peut-être un peu plus tard au deuxième tour. J'aimerais tirer au clair un élément important de votre exposé: le problème de l'exigence en matière de résidence qui existe au Québec, mais qui ne s'appliquerait pas au niveau fédéral. Il s'agit bien sûr là d'un petit hic, mais en règle générale, pensez-vous que le fait d'utiliser des listes québécoises au niveau fédéral et vice versa pose problème?

[Français]

M. Côté: J'aimerais apporter une précision. J'aimerais vous signaler que, quant aux prévisions budgétaires qu'on a établies au début de l'année et au calendrier que nous avons établi, nous les respectons.

Pour ce qui est de l'exigence de six mois de domicile dans la province, qui n'existe pas au Canada, je ne vois pas de problème majeur. Je l'ai exposé dans mon texte plus tôt. Cela peut toucher 11 000 ou 12 000 personnes. Sur 5 millions de personnes, c'est très petit, mais c'est un problème réel qu'on ne peut ignorer; c'est une différence réelle. Comment le régler? Ce serait par la publicité qui serait faite au moment de la révision des listes électorales fédérales pour dire à ces 10 000 personnes qui ont changé de province et qui sont maintenant au Québec: «Présentez-vous devant une commission de révision pour faire inscrire votre nom.»

Au fédéral, on peut inscrire son nom sur une liste le jour même du scrutin. Donc, on rencontre les exigences de la loi. Je ne vois pas là un problème majeur. Je ne sais pas si j'ai bien répondu à votre question, mais c'est comme cela que je vois la situation.

[Traduction]

Le président: Merci.

Mme Catterall.

Mme Catterall: J'ai quelques préoccupations, depuis que nous avons entamé notre examen du projet de loi, quant aux effets discriminatoires que pourrait avoir le fait d'exiger des gens qu'ils communiquent avec vous pour se faire ajouter à la liste, une fois celle-ci établie.

Vous avez mentionné le fait que vous venez tout juste d'avoir un premier groupe de jeunes gens qui ont fêté leur 18e anniversaire et que vous êtes très heureux du pourcentage d'entre eux qui ont demandé à se faire inscrire sur la liste d'électeurs. Pourriez-vous me dire, en pourcentage, quel était le taux de réponse de ceux qui étaient admissibles et, deuxièmement, si vous avez fait des recherches pour voir si ces jeunes gens qui se sont fait inscrire sont démographiquement très différents de ceux qui ne l'ont pas fait?

.1120

[Français]

M. Côté: Je m'excuse, mais j'écoute vos questions en anglais; c'est plus facile pour moi. C'est pourquoi je demande toujours si je réponds bien à la question.

Pour les élections municipales qui se tiennent cette fin de semaine-ci, nous avons communiqué avec 7 601 personnes qui atteignaient l'âge de 18 ans. C'était pour les élections du 5 novembre. Le pourcentage de réponse a été de 65,58 p. 100. Nous avons fait deux envois. Nous considérons que c'est un pourcentage assez élevé. Ce sont des jeunes, de nouveaux arrivants sur le marché électoral, si je puis m'exprimer ainsi. Il fallait leur dire qu'il y avait des élections, mais aussi leur demander si, une fois inscrits sur la liste électorale municipale de cet automne, ils voulaient que leur nom soit inscrit sur la liste électorale provinciale.

Qu'en est-il des autres catégories d'électeurs qui ne sont pas sur la liste, même s'ils sont citoyens canadiens et satisfont à toutes les conditions? Ils disent qu'ils ont oublié ou donnent mille autres raisons. Ils veulent maintenant que leur nom soit sur la liste. Ces électeurs auront le droit d'être sur la liste. Ils vont s'adresser à nous et leur nom sera mis sur la liste.

Nous allons leur demander de nous faire parvenir des pièces d'identité. Or, il n'y a pas une seule pièce d'identité qui satisfasse aux deux exigences. Il faut avoir le nom, le prénom, la date de naissance et l'adresse. Nous demandons donc soit le passeport, soit l'acte de naissance, soit le permis de conduire ou tout autre acte qui nous permet d'obtenir les deux renseignements. On demande toujours deux pièces parce qu'il faut avoir les informations de base. Ce sera très facile parce que les gens nous enverront des photocopies de ces documents.

À ces personnes, comme à celles qui atteignent 18 ans, nous allons écrire pour leur demander si elles veulent que leur nom apparaisse sur la liste. Dans le cas des 18 ans, cela arrive tous les mois qu'on ait à leur écrire.

[Traduction]

Mme Catterall: Mais a-t-on fait des recherches pour savoir si les caractéristiques démographiques des 25 p. 100 qui ne se sont pas inscrits sont différentes des caractéristiques démographiques des 75 p. 100 qui, eux, se sont fait inscrire?

Ce que je crains, c'est que des gens soient laissés de côté, et je songe ici aux analphabètes, aux personnes qui ne parlent ni l'une ni l'autre des deux langues officielles, aux personnes handicapées, aux personnes vivant dans certaines régions ou à celles qui appartiennent à certains groupes économiques au sein de notre société. Vous avez une certaine expérience de la chose. Il serait peut-être très utile pour nous de savoir si ces facteurs sont bel et bien sans importance ou s'il n'y a pas un certain parti pris à l'intérieur du processus même.

[Français]

M. Côté: J'ai oublié de vous mentionner qu'une autre démarche était possible. Je prends la différence entre 65 p. 100 et 100 p. 100. Tout le monde a été prévenu et nous avons fait de la publicité dans chacune des municipalités avertissant les gens dont le nom n'était pas sur la liste de se présenter à une commission de révision municipale. Ce mécanisme permettait également d'ajouter leur nom sur la liste provinciale.

Évidemment, on ne peut jamais avoir 100 p. 100 des électeurs. Il y a des gens qui ne veulent pas que leur nom soit sur la liste et d'autres ne s'en préoccupent pas. On ne peut jamais atteindre100 p. 100, mais tous les efforts qu'on fait sont de deux ordres: d'abord communiquer avec l'électeur; ensuite avertir les électeurs qu'en période de révision de la liste, ils ont la possibilité de se présenter pour que leur nom soit inscrit.

Mme Catterall: Merci.

Le vice-président (M. Langlois): Avant de donner la parole à M. Laurin, ce qui marquerait la fin du premier tour, je vais prendre tout de suite les noms des collègues qui veulent parler au premier tour. Il y en a, en effet, qui désirent s'inscrire avant que d'autres parlent une deuxième fois. Monsieur Pagtakhan, je vais prendre votre nom au deuxième tour parce que vous êtes déjà intervenu au premier. Monsieur Bélanger, au deuxième aussi.

Alors, je donne la parole à M. Laurin.

M. Laurin: J'ai d'abord trois questions, monsieur le président.

Monsieur Côté, en quoi la liste électorale permanente pourrait-elle empêcher que des personnes soient inscrites sur la liste alors qu'elles n'en ont pas le droit? À chaque élection, on déplore toujours que des personnes aient été ajoutées sur la liste alors qu'elles n'en avaient pas le droit. Le système de la fraude électorale fonctionne encore. Est-ce que l'existence de la liste permanente éviterait ce phénomène?

M. Côté: Il y a toujours deux composantes qui nous assurent d'avoir une bonne liste électorale qui comprend tout le monde et qui exclut ceux qui ne doivent pas être inscrits parce qu'ils n'ont pas qualité d'électeur.

.1125

À partir du recensement de 1995, des corrections ont été apportées aux listes au moyen de la révision. Un grand nombre de personnes ont été ajoutées ou rayées par le mécanisme de la révision. Quand nous aurons la liste électorale permanente, elle sera toujours révisée avant un scrutin, que ce soit au municipal ou au provincial. À ce moment-là, on est certains d'avoir une liste adéquate, qui reconnaisse, d'une part, ceux qui ont le droit d'y être et, d'autre part, ceux qui n'ont pas le droit d'y être et doivent être enlevés.

La commission de révision est le deuxième volet sur lequel j'ai beaucoup insisté depuis le début. Une commission de révision, pour nous, est composée de trois personnes, la première recommandée par un parti politique, la deuxième par l'autre parti politique à l'Assemblée nationale, et un président choisi par une entente entre les deux partis. S'ils ne s'entendent pas, c'est nous qui le nommons. Il y a trois personnes qui ont le pouvoir de décider, d'inscrire, de radier ou de corriger.

Quand les personnes se présentent devant la commission de révision, il est obligatoire de leur demander des pièces d'identité du genre de celles que j'ai mentionnées tout à l'heure.

Nous avons une autre grande préoccupation à propos de ce qu'on appelle dans notre jargon les «doublons». Nous avons tenté une opération sur ces cas, que nous voulons poursuivre et surveiller très étroitement. Je vous en donne un exemple très simple. Les parents et la famille d'un étudiant vivent en Gaspésie. Cet étudiant a décidé de rester à Montréal ou à Québec. Lors du recensement, son père l'a inscrit. Disons qu'il a 19 ans. Il y a une disposition qui permet en période électorale que cet étudiant de 19 ans, un travailleur ou une personne hospitalisée s'inscrive pour voter à Montréal. On peut donc se trouver dans la situation où il est inscrit à Montréal ainsi qu'à Gaspé. C'est ce qu'on appelle un «doublon». Il y a même des «triplons» dans de rares cas. Par le mécanisme qu'on met sur pied, par la façon de procéder et les recoupements qu'on va faire - incidemment l'âge est important pour nous dans ces circonstances - , on pense pratiquement éliminer cette possibilité de double inscription.

Quelle est notre principale préoccupation? C'est qu'un électeur ne puisse pas voter deux fois. Il ne faut pas qu'il y ait supposition de personne. Si cet étudiant s'est inscrit à Montréal et qu'il est inscrit à Gaspé, quelqu'un pourrait dire qu'il porte le même nom que cet étudiant et vouloir voter à Gaspé ou à Montréal. Notre procédure nous permet actuellement de rechercher ces «doublons» et de les éliminer.

M. Laurin: Vous avez parlé tout à l'heure de l'épargne qu'occasionnerait l'établissement de la liste électorale permanente. Est-ce que cette épargne inclut les épargnes qui seraient faites aux niveaux municipal et scolaire? Vous avez parlé d'épargnes qui totaliseraient environ 15 millions de dollars. Est-ce que ça comprend les épargnes faites aux niveaux municipal et scolaire?

M. Côté: Sur quatre ans, oui. Ce que je vous dis, c'est l'épargne globale. On a déduit les coûts d'un recensement provincial, municipal et scolaire. Prenons les chiffres qu'on avait établis en 1993. Il n'était pas prévu à ce moment-là qu'on aurait un plus long recensement en 1995. La prévision de ce que coûteraient les élections aux trois paliers - provincial, municipal et scolaire,était de26 millions de dollars. Au bout de quatre ans, on épargne 15 millions de dollars.

M. Laurin: Voici ma dernière question, monsieur le président. Est-ce qu'il y a eu des demandes de la part du Bureau du directeur général des élections du Canada pour voir comment on pourrait utiliser les données de la liste électorale permanente du Québec? Le fédéral est actuellement en processus d'établissement de listes permanentes au fédéral. Est-ce qu'il y a eu, non seulement communication, mais demande effective de la part du directeur général des élections du Canada pour utiliser ou voir comment on pourrait utiliser les données du Bureau du directeur général des élections du Québec?

M. Côté: Est-ce que vous faites allusion à des demandes pour avoir accès aux données de la liste électorale provinciale?

M. Laurin: Aux données du registre.

M. Côté: Notre liste électorale permanente pour les fins du registre.

M. Laurin: Le directeur général des élections du Canada est en train de mettre en place un processus d'établissement d'un registre permanent des électeurs. Pour ce faire, est-ce qu'il a demandé d'utiliser le registre permanent du Québec? Est-ce que ma question est assez claire?

M. Côté: Oui, ça va.

.1130

Il y a des communications, des relations constantes avec Élections Canada, comme Élections Canada a des relations avec d'autres instances provinciales. Cependant, y a-t-il eu des demandes officielles et formelles pour utiliser soit la liste électorale du Québec, soit la liste d'organismes provinciaux? Je comprends qu'au moment où la loi sera adoptée, cela se fera de façon formelle et officielle. Entre-temps, il y a des échanges. Je pense que M. Kingsley vous a mentionné hier qu'on participait déjà, il y a quelques jours, à des échanges d'information. Ainsi, il nous a donné son fichier d'adresses. On ne l'a pas utilisé parce qu'on utilise comme telles les adresses des électeurs. On n'a pas besoin des adresses où personne n'habite. S'il y a éventuellement des gens qui y vivent, on va les mettre sur la liste.

Il y a aussi des échanges d'information sur la géographie du territoire, par exemple. Il y a des échanges verbaux et écrits avec le directeur général des élections du Canada dans l'éventualité où il aurait le pouvoir de disposer des informations que nous possédons. En plus de cela, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, la loi nous permet de le faire.

Je pense que dès après l'adoption de cette loi qui va habiliter formellement et légalement le directeur général des élections du Canada à faire affaire avec le Québec, cela prendra une tournure plus formelle et officielle. À ce moment-là, il y aura probablement des décisions très politiques de prises, parce que cela doit se faire entre gouvernements. On verra.

Ce que je peux dire de mon côté, c'est que les échanges avec Élections Canada sont très cordiaux, très positifs. Je peux vous en donner un petit exemple: je suis invité par lui à dîner ce midi. Parce que nous sommes tous les deux des professionnels de la question, nos relations sont...

Le président: I'm sorry, Mr. Laurin.

M. Laurin: C'est ma dernière question.

[Traduction]

Le président: Vous me dites toujours cela.

[Français]

M. Laurin: Monsieur Côté, dans ces relations actuellement très amicales entre les deux directeurs des élections, y a-t-il des points actuellement en litige à propos de la collaboration qui pourrait être offerte par l'un ou par l'autre? Est-ce qu'il y a litige, soit sur les principes, soit sur la technique utilisée?

M. Côté: Je dirais qu'il y a des interrogations et j'en ai même cité quelques-unes tout à l'heure, que je vais pour exposer plus clairement maintenant. Par exemple, dans le projet de loi C-63, il est prévu en annexe que le directeur général des élections pourra s'adresser - et dans toutes les provinces c'est la même liste, à l'annexe IV - aux organismes qui régissent les permis de conduire et le registre de l'état civil.

Il y a aussi une autre disposition dans la loi qui permet - c'est un peu extraordinaire - au directeur général des élections de modifier l'annexe IV; c'est l'article 71.014. Disons que, par exemple, le directeur général des élections décide de modifier l'annexe IV et de s'adresser à d'autres organismes que ceux qui sont établis dans cette liste. Alors, nous nous interrogeons. Nous allons voir quelle va être la position du directeur général des élections. À ce moment-là, des demandes officielles devraient être faites. Est-ce qu'on voudrait utiliser, ce qui me semblerait normal, la liste du directeur général des élections, c'est-à-dire notre liste permanente, ou est-ce qu'il faudrait utiliser des sources d'information d'organismes provinciaux? On va voir comment la situation va évoluer.

Mais nous sommes disposés, et c'est prouvé dans notre loi, à l'article 40.42, à offrir la liste provinciale pour des fins de liste fédérale.

M. Laurin: Je n'ai pas d'autres questions, monsieur.

[Traduction]

Le président: Je suis certain que vous en avez.

Je vais faire mon possible pour qu'on boucle rapidement la suite.

M. Harper, M. Langlois, M. Bélanger et M. Pagtakhan, dans cet ordre-là.

Monsieur Harper.

M. Harper: J'aimerais vous poser une dernière question, monsieur Côté. Je la soulève car on parle coopération entre paliers de gouvernement, mais il me faut également dire que je ne pose cette question que parce que beaucoup de gens dans ma circonscription estimeraient qu'il serait irresponsable de ma part de laisser passer l'occasion de vous la poser.

Cela concerne certaines choses dont il a été question récemment dans la presse. Il me faut reconnaître que je m'appuie moi-même sur des rapports parus dans la presse, mais selon ces rapports vous auriez émis une opinion voulant que certaines participations à la dernière campagne référendaire, et ce serait le cas du rassemblement à Montréal en particulier... Vous auriez émis l'opinion que certaines des violations - ou violations potentielles - de la loi, sur le plan participation, étaient des menaces plus graves à la démocratie que le rejet de bulletins de vote déclarés nuls le soir du référendum.

.1135

Je peux vous dire que dans mon coin, cette opinion - et c'est la mienne - telle qu'elle nous a été rapportée, m'apparaît à moi, ainsi qu'à la plupart des gens que je représente, comme étant complètement insensée. Je ne vois pas quelle menace plus grave à la démocratie il pourrait y avoir que le rejet de l'intégrité du vote ou d'un bulletin de vote lui-même. Je ne comprends pas et, franchement, je pense que cela a porté atteinte à la réputation du Bureau du Directeur général des élections du Québec à l'extérieur du Québec.

Étant donné ces rapports, je vous demanderais de nous expliquer ce que vous avez dit ou écrit et quelles sont vos vues là-dessus.

[Français]

M. Côté: Il arrive parfois qu'on emploie des expressions qui sont prises hors contexte ou qui sont tirées en épingle et auxquelles on attache une importance démesurée.

Une autre commission parlementaire a étudié les amendements à la Loi électorale. J'ai eu l'occasion de préciser ma pensée à cet égard et d'atténuer les propos que j'ai tenus au moment de l'information qu'on a donnée sur les infractions à la loi. Évidemment, aucun journaliste n'a relevé ça. Vous connaissez peut-être la phrase célèbre de Voltaire qui disait: «Donnez-moi deux lignes d'une personne et je me charge de vous la faire pendre». Je suis un peu placé dans cette situation. Pour moi, il est évident que tout bulletin rejeté, toute personne qui peut être privée de son droit de vote, c'est une atteinte grave au système électoral.

Qu'en est-il pour le référendum? Je vais revenir plus tard à la marche pour l'unité. Qu'en est-il à cet égard? Il faut bien voir qu'il y a toujours des bulletins rejetés. La proportion de bulletins rejetés pour l'ensemble du Québec a été de 1,82 p. 100. Il est certain que dans quelques circonscriptions électorales, dans la région de Montréal en particulier, il y en a eu plus de 1,82 p. 100. Quand on a11 p. 100, c'est beaucoup.

Dans ces cas-là, il y a deux questions fondamentales qu'on me pose. Je me dois d'être prudent, parce que les causes sont devant les tribunaux; nous poursuivons les personnes qui auraient pu commettre des actes illégaux, et ce n'est pas encore entendu par les tribunaux. Donc, est-ce qu'il y a eu un pattern national, un mot d'ordre national? Est-ce qu'on peut arriver à la conclusion que cette façon de procéder a eu cours non seulement dans ces trois ou quatre circonscriptions électorales de Montréal, mais aussi ailleurs?

Je pourrais vous faire parvenir ce que j'ai fait parvenir à plusieurs reprises à des médias anglophones et des organismes anglophones en particulier. Je m'excuse de le préciser, mais c'est comme ça que ça s'est présenté. Je pourrais faire venir d'autres exemplaires de mon rapport, où on établit clairement la situation à cet égard. Alors, le fait des bulletins rejetés est une question sérieuse. Mais de là à conclure, comme le laissait entendre un journal montréalais hier, que le système électoral québécois est en péril, que la démocratie est en péril, que tout fout le camp, qu'on est retourné à des façons de procéder préhistoriques... Je m'excuse, mais je n'en crois rien, parce que l'enquête que j'ai menée a été faite avec l'aide de personnes très compétentes et sérieuses: trois professeurs d'université, dont un de McGill, et M. le juge Gold. Tous ces aspects ont été évalués.

Là, on nous dit de fournir la preuve de tout ça et nous sommes pris dans une difficulté majeure: les preuves vont servir lors des procès. Il faut ménager le droit des personnes à avoir une défense pleine et entière pour que nous fassions notre preuve et qu'on ait la contre-preuve; le juge décidera si nous avons tort ou raison. Ce n'est pas encore réglé. Ça vient devant les tribunaux.

Qu'en est-il de l'autre aspect de l'intervention des tiers, qu'on appelle en anglais third-party advertising ou advocacy?

.1140

J'ai publié un texte sur ce sujet il y a plusieurs années. Il me ferait plaisir de vous en donner un exemplaire; il est rédigé en versions française et anglaise.

Quel est le principe de base? Le principe de base est le suivant: est-ce que la démocratie veut dire un dollar égale un vote, ou une personne égale un vote? C'est la question fondamentale qu'il faut se poser, et vous pourriez facilement faire la relation avec ce qui se passe aux élections présidentielles aux États-Unis. Les articles du New York Times d'il y a deux dimanches sont tout particulièrement éloquents à ce sujet.

Quelle est l'importance que ça revêt? Le financement doit se faire chez nous uniquement à partir de personnes physiques, et non pas d'entreprises, de corporations ou de personnes morales. C'est un principe de base. On a fixé des limites de 3 000$ par personne physique par année par parti politique; la même formule s'applique à un comité par appui lors d'un référendum.

Au chapitre des dépenses, c'est compliqué et difficile. Prenons par exemple la période référendaire qui s'étend sur une quarantaine de jours. Pendant cette période de 40 jours, d'après notre loi, les seules personnes habilitées à faire des dépenses sont le comité du Oui et le comité du Non. Qui dans le comité du Oui ou dans le comité du Non? C'est le représentant officiel.

Toute autre dépense qui a pour objectif d'influencer le résultat du vote, qui n'est pas faite par l'un ou l'autre comité et son représentant officiel, est illégale. C'est la position juridique du Québec. À partir de là, toutes les dépenses qui ont été faites deviennent des interventions de tiers. Il ne me sert à rien de les énumérer. Vous les connaissez puisqu'elles ont paru dans les journaux. J'ai intenté des poursuites à cet égard parce qu'à mon avis, à la suite de l'enquête qu'on a faite, il s'agissait de dépenses non réglementées, non autorisées.

Pourquoi est-ce que je pense que cette question de l'intervention des tiers est si importante? Je reviens au principe de départ. Est-ce qu'un dollars égale un vote, ou si un électeur égale un vote? Fondamentalement, ce que la démocratie prévoit, c'est la protection du vote des électeurs, et non pas l'achat de votes de quelque façon que ce soit. C'est le principe qui est dans la loi et qui nous guide.

Le président: Thank you.

Monsieur Langlois, s'il vous plaît.

M. Langlois: En répondant à la question de M. Harper, vous avez aussi répondu à une des miennes. J'aimerais savoir comment au niveau municipal, lorsque des personnes morales ont le droit de vote, particulièrement au niveau des référendums, vous réussissez à les ajouter à vos listes électorales. C'est une question plutôt technique.

Mon autre question est beaucoup plus générale et nous ramène au débat sur le projet de loi C-63. Je comprends très bien le statut du directeur général des élections qui s'est substitué à toutes fins utiles soit à la législature, soit au Parlement fédéral et qui en lui-même constitue le prolongement de l'institution législative. Ma question se précise maintenant: le projet de loi 40 a-t-il été rédigé par les légistes du Conseil exécutif du Québec ou s'il a été rédigé par les légistes du directeur général des élections du Québec?

M. Côté: Sur la liste municipale figurent ceux qu'on appelle les non-résidents, les personnes qui sont propriétaires. On peut retrouver des entreprises, des corporations qui sont non propriétaires. Il est prévu dans la loi que chaque greffier municipal ou président d'élection municipal a la responsabilité de les ajouter à cette liste parce que ça vient du rôle d'évaluation. Nous ne sommes donc pas ceux qui établissent cette liste dans les municipalités. On établit la liste des personnes physiques; la liste des personnes non physiques qui ont droit de vote est établie par le greffier, qui doit voir à ce qu'il n'y ait pas double exercice du droit de vote.

Comment le projet de loi 40 a-t-il été rédigé? Nous sommes associés à cette idée d'une liste électorale permanente depuis 15 ans. Il y a 15 ans, le projet de loi 3 était déposé à l'Assemblée législative et, à la suite de la démission du ministre, le projet s'est évanoui dans la nature. Nous réfléchissons là-dessus depuis longtemps et c'est évidemment en collaboration avec deux autres instances gouvernementales, le ministère d'État à la Réforme électorale qui existe chez nous et le Conseil exécutif, le Comité de législation.

.1145

Pour les grandes lignes de ce qui apparaît dans la loi sur la façon de procéder, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le Comité de législation. La procédure est la suivante: il doit y avoir approbation du Conseil des ministres, parce que le Comité de législation, qui est composé de ministres, doit l'approuver avant qu'elle ne soit présentée à l'Assemblée nationale.

Quand il s'agit d'un domaine très précis sur la façon de procéder, tous les ministères et organismes gouvernementaux font toujours appel aux spécialistes que l'on retrouve dans les différentes instances gouvernementales, mais la responsabilité définitive est celle du gouvernement.

M. Langlois: Je vais préciser ma question, monsieur Côté. Est-ce que vous avez fait bénéficier le Conseil exécutif de votre expertise, ou est-ce que le Conseil exécutif vous a demandé de rédiger un projet de loi contenant des choses très précises, de telle sorte que vous n'aviez aucune autonomie ou marge de manoeuvre dans la rédaction de votre projet de loi?

M. Côté: Non, le gouvernement nous a exprimé son désir d'avoir une liste électorale permanente et nous a simplement demandé de lui faire savoir ce que cette loi devait contenir. Tout cela s'est fait en collaboration.

En ce qui concerne le rapport de 1993, il y a eu l'étude des Livres blancs de 1979-1980. C'est un cheminement constant et je vais vous expliquer la façon dont on a procédé en 1995-1996. Pour nous, c'était l'aboutissement de 15 ans de réflexion et d'étude sur ce sujet. Il était donc normal que le gouvernement nous demande des conseils sur la façon d'établir la liste électorale permanente informatisée qu'il voulait, et il est certain que nous avons fourni les grands paramètres.

M. Langlois: À Québec, je crois qu'il y a la Commission des institutions devant laquelle vous êtes responsable. Est-ce que la Commission des institutions a été, à ce moment-là, informée que vous travailliez à la rédaction d'un projet de loi? Est-ce qu'elle a été impliquée dans la rédaction du projet de loi 40?

M. Côté: Non, c'est différent au Québec. Elle est intervenue au moment de l'étude du projet de loi.

Mais il y a un autre point que je voudrais vous préciser. Il y a une autre particularité à Québec: il existe ce qu'on appelle le Comité consultatif. C'est dans la loi. Le Comité consultatif est présidé par le directeur général des élections, mais y siègent aussi trois représentants des partis politiques à l'Assemblée nationale, dont au moins un député. Une tradition s'est développée au cours des années: à ce Comité consultatif on retrouve, par exemple, le ministre d'État à la Réforme électorale, le délégué, des députés du Parti libéral et du Parti québécois, le président du parti et les principaux organisateurs. Finalement, on peut compter 10 ou 11 personnes, moi y compris. Il doit y avoir quorum.

Au cours des années, tout ce qui s'est développé dans ce comité a été fort positif. En fait, ça me dérangeait un peu au début, mais maintenant je ne peux en dire que du bien. On pourrait dire que c'est une sorte de chambre de compensation

Il y a quatre intervenants: les trois partis politiques de l'Assemblée nationale et le directeur général des élections. Je fais les propositions de modifications, les autres partis en font aussi, et on discute et on cherche un consensus. Quand le consensus est atteint, le projet de loi est rédigé et présenté en Chambre et les débats parlementaires sont pratiquement inutiles. Nous allons d'ailleurs refaire l'opération prochainement.

Je dois vous dire que, pour la liste électorale permanente de 1995-1996, ceci n'a pas fonctionné au Québec parce que l'opposition libérale a dit qu'elle n'en voulait pas. Le Comité consultatif n'a pas fonctionné, cette fois-là. C'est d'ailleurs la première fois en 18 ans qu'il n'a pas bien fonctionné en tant que chambre de compensation, si je peux utiliser cette expression encore une fois.

Mais depuis, on a remis en marche le Comité consultatif. Il va y avoir des amendements apportés à la Loi électorale et nous allons procéder par l'intermédiaire de ce Comité consultatif.

Je me souviens par exemple qu'en 1989-1990, il y a eu une foule d'amendements apportés à la loi. On était en commission parlementaire, la Commission des institutions, et le président ne faisait que tourner les pages et énumérer les articles. Il n'y a pas eu d'interventions parce que toutes les interventions, tous les compromis, toutes les ententes s'étaient faits avant.

Au Québec, la préoccupation de tous les députés de l'Assemblée nationale est de bonifier constamment la Loi électorale.

Je pense qu'il n'y a pas eu une année, depuis 18 ans, où nous n'avons pas discuté, à la commission parlementaire, de l'amélioration de la loi. Il faut la collaboration de tous les députés pour que la loi soit rigoureuse et le plus complète possible. Pour l'améliorer, on a utilisé la mécanique de ce Comité consultatif.

.1150

C'est un peu étrange parce que ce comité est là pour me conseiller dans l'application de la loi. Justement, cela a pris cette tournure-là qui est très heureuse à mon sens.

La vice-présidente (Mme Catterall): Monsieur Bélanger, you are well over seven minutes.

M. Bélanger: Vous avez communiqué avec au-delà de 7 000 personnes qui ont eu 18 ans pour les inscrire ou leur demander si elles voulaient être inscrites sur la liste électorale. D'après vos chiffres, 35 p. 100 environ de ces personnes n'ont pas répondu ou ont dit non.

M. Côté: Il y en a 35 p. 100 qui n'ont pas répondu à une demande par la poste.

M. Bélanger: D'accord. Est-ce qu'on communique avec ces gens-là en français seulement?

M. Côté: Ils ont la possibilité de demander un formulaire de langue anglaise, cela va de soi.

M. Bélanger: Ils peuvent le demander.

M. Côté: Oui.

M. Bélanger: Mais la première communication vient en français?

M. Côté: Oui, c'est la règle au Québec. Mais je précise que pour ceux qui n'ont pas répondu,le directeur général des élections a payé dans des municipalités des avis très évidents et très clairs pour attirer l'attention. Si ce n'est pas le jeune de 18 ans, ce sont les parents. Il y a beaucoup de possibilités. On va voir ce que cela va donner à l'élection du 5.

M. Bélanger: Est-ce que vous avez un processus pour cerner les autres, les 35 p. 100?

M. Côté: Il sera difficile de faire cette évaluation; on pourrait réfléchir à la question, mais c'est très difficile.

M. Bélanger: C'est peut-être difficile de savoir, parce qu'au fur et à mesure que les registres ou les listes se développent un peu partout au pays, on va devoir canaliser ce genre de phénomène. Je me demandais si votre bureau avait l'intention de préparer une analyse sur la façon dont on va récupérer les autres 35 p. 100 qui veulent être inscrits à la liste.

On a posé la question hier à M. Kingsley, et il disait que sur la liste électorale en Colombie-Britannique, 200 seulement avaient dit qu'ils ne voulaient pas être inscrits.

C'est pour cela que je trouve que les 35 p. 100, ce sont les gens, non pas qui ne voulaient pas être inscrits, mais qui ont été négligents, qui ont oublié, ou qui n'étaient pas là lorsque le courrier est arrivé, ou quoi encore. Est-ce que vous comptez faire un exercice quelconque pour savoir combien des 35 p. 100 qui restent seront récupérés lors de la révision de la liste pour les élections municipales?

M. Côté: Il faut bien préciser qu'il s'agit de 35 p. 100 des personnes qui ont eu 18 ans et qui ont le droit de vote le 5; il ne faudrait pas penser qu'il y a 35 p. 100 des gens...

M. Bélanger: Non, non, 35 p. 100 des quelque 7 000 personnes.

M. Côté: Et je vous rappelle ce qu'on a fait pour les atteindre par les annonces et par les commissions de révision. Ils avaient la possibilité de s'inscrire.

Si on compare cette donnée-là au nombre d'électeurs inscrits sur la liste provinciale, si on essaie de faire une analogie, on évalue qu'on atteint de 92 à 93 p. 100 de la population adulte sur la liste provinciale. Il reste 7 p. 100. Cela peut sembler considérable.

D'une part, il faut bien distinguer que pour les 35 p. 100 au niveau municipal, l'intérêt pour les gens pour une élection municipale est moins grand que pour un référendum ou une élection provinciale. Je ne veux pas dire qu'ils ne sont pas intéressés, mais l'intérêt à aller voter pour un conseiller municipal n'est pas évident.

Mais nous sommes préoccupés par les 7 p. 100 de la population adulte qui ne sont pas inscrits, C'est pourquoi nous dépensons des sommes d'argent considérables à chaque événement. On nous reproche même d'avoir des communications de publicité ou d'information assez élaborées, mais notre préoccupation est de rejoindre le plus grand nombre de personnes, Nous le faisons même en plusieurs langues. Nous avons un dépliant en 19 langues pour atteindre toutes les catégories, parce que tous les citoyens canadiens qui ont la qualité d'électeur ont le droit d'avoir leur nom sur la liste électorale provinciale. Il n'y a aucun doute dans mon esprit là-dessus.

M. Bélanger: Merci beaucoup. Merci, madame la présidente.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Monsieur Pagtakhan.

M. Pagtakhan: Merci, madame la présidente.

En ce qui concerne la citoyenneté canadienne en tant que facteur déterminant, d'après votre expérience, est-ce le ministère de la Citoyenneté qui est la meilleure source de renseignements en vue de la mise à jour de la liste et de la vérification du statut de chacun?

[Français]

M. Côté: Pour tous les nouveaux citoyens, il n'y aucun doute que c'est le ministère de la Citoyenneté.

.1155

Il n'y a pas d'autre organisme qui détient cette information. On n'a cela nulle part. Notre démarche est donc d'obtenir du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration la liste de tous les nouveaux citoyens canadiens pour qu'on puisse leur écrire et leur demander s'ils veulent que leur nom soit sur la liste. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que c'est le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration qui est la meilleure source d'information.

[Traduction]

M. Pagtakhan: Si j'ai bien compris, au Manitoba, pour voter au niveau des commissions scolaires, il n'est pas nécessaire d'être citoyen canadien. Il suffit d'être résidant canadien et d'habiter la région concernée. La situation est-elle la même au Québec?

M. Côté: Non, il vous faut être un citoyen canadien pour les trois niveaux: commission scolaire, niveau municipal et niveau provincial.

M. Pagtakhan: Toujours au Manitoba, si vous prenez une circonscription fédérale... ce n'est jamais le même nombre de circonscriptions provinciales. Pensez-vous qu'il serait opportun de concilier les limites des circonscriptions provinciales de façon à ce que lorsque vous les ajoutez ensemble, que ce soit trois, quatre ou cinq, la région concernée corresponde très exactement à une circonscription fédérale?

[Français]

M. Côté: C'est une décision qui relève de chacune des juridictions provinciales. Chaque province, le Manitoba, l'Alberta, l'Ontario, etc. peut décider d'avoir les mêmes limites territoriales que les circonscriptions électorales et, par voie de conséquence, les sections de vote. Cela facilite les choses. C'est avant tout une décision de chacune des législatures provinciales. Par exemple, au Québec, il y a 125 circonscriptions et au fédéral, il n'y en a que 75. Est-ce que ça pose un problème réel de prendre la liste du Québec et de l'utiliser dans les 75 circonscriptions électorales au Canada pour le Québec?

Je pense qu'il y a là un problème technique qui est facilement soluble. Il s'agit qu'Élections Canada nous transmette la liste des délimitations des sections de vote, qu'on prenne les électeurs, les adresses et tous les renseignements et qu'on les mette dans la bonne section de vote, ou qu'on leur fournisse la liste et qu'eux le fassent. Mais ça ne me semble pas un problème technique considérable parce que le total des électeurs au Québec est le même.

C'est la répartition géographique de ces électeurs dans les bonnes circonscriptions, dans les bonnes sections de vote qu'il faut faire. C'est un problème technique qui est relativement facile. Pourquoi dis-je cela? Parce que nous sommes en train de le faire. On a le même problème avec les municipalités. Nous devons fournir la liste municipale à partir des délimitations territoriales municipales, qui ne sont pas toujours les mêmes qu'au niveau provincial.

On ne doit pas dépasser les municipalités. Certaines municipalités ont des districts électoraux municipaux, d'autres n'en ont pas. On a ce problème concret d'avoir à fournir la liste. On va même être dans l'obligation, à l'avenir, quand il y aura une élection municipale partielle ou un référendum qui peut couvrir une partie du territoire d'une municipalité, de fournir la liste des électeurs de façon très précise et très bien circonscrite sur le territoire requis.

Nous sommes en train d'élaborer cette façon de procéder et de communiquer avec les municipalités. Par analogie, c'est la même chose pour les circonscriptions électorales fédérales et les sections de vote fédérales.

[Traduction]

M. Pagtakhan: Je suis heureux de vous entendre dire que vous ne voyez que très peu de difficultés techniques quant à la résolution de ce problème.

Ma dernière question concerne une déclaration que vous avez faite tout à l'heure. Vous avez dit être un agent de l'Assemblée nationale du Québec. Cela étant, pour ma gouverne, et afin que cela figure au procès-verbal, vous a-t-il fallu chercher une autorisation légale pour comparaître devant le comité ou avez-vous demandé à l'Assemblée nationale du Québec l'autorisation de comparaître devant ce comité de la Chambre des communes?

[Français]

M. Côté: Non, je n'ai pas fait de demande formelle. J'ai évidemment dit que j'étais invité devant ce comité. On n'a pas soulevé d'objection majeure à ce que j'agisse ici comme témoin pour donner le fruit de notre expérience.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): J'espère que les membres du comité me permettront de poser une question.

.1200

[Français]

J'aimerais assurer à notre témoin que ce qui suit est une question technique et non politique.

[Traduction]

Vous nous exhortez à utiliser, comme base pour notre registre des électeurs, le travail qui a déjà été effectué au Québec - et je reviens sur les élections de 1993 pour lesquelles le Québec a décidé de ne pas utiliser la liste électorale précédente, établie pour le référendum - et je me demande quelles raisons vous aviez à l'époque de décider d'entreprendre un nouveau recensement au lieu d'utiliser celui qui avait été fait précédemment. Je vous pose la question tout simplement parce que vous nous exhortez aujourd'hui à faire cela, et j'aimerais savoir quelles étaient vos raisons à l'époque afin que nous puissions également en tenir compte.

[Français]

M. Côté: Le problème qui s'est posé est que, pour mener à terme la deuxième opération, on ne disposait pas des outils informatiques requis pour l'utilisation de la première liste. On les a mis en place et on en dispose maintenant.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Pourriez-vous nous expliquer de façon un petit peu plus précise les genres de problèmes que cela aurait créés?

[Français]

M. Côté: Quant à l'établissement de listes électorales permanentes informatisées, on va avoir à l'avenir le mécanisme auquel j'ai fait allusion tantôt, celui d'une mise à jour constante. C'est une opération qui se fait par système informatique. À l'époque, en 1992, on n'avait rien de cela. On ne pouvait pas dire qu'on prenait la liste de 1992 et qu'elle pouvait tout de suite servir à établir une liste électorale informatisée, parce qu'on n'avait pas les pouvoirs de le faire. On a eu dans le projet de loi 40 les pouvoirs d'établir cela. Que dit le projet de loi 40? Il dit qu'on doit faire un premier recensement, ce qui a été fait. On a demandé d'avoir une plus longue période pour informatiser la liste, c'est-à-dire d'aboutir au mois de mai avec une liste électorale à jour que nous pourrons maintenir à jour constamment par la suite, mois par mois. En 1992, on n'avait pas ces possibilités-là.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Pensez-vous donc que la qualité des listes électorales utilisées dans les autres provinces était inférieure à celle de la liste utilisée au Québec pour les élections de 1993?

M. Côté: Je n'ai pas eu...

La vice-présidente (Mme Catterall): Les autres provinces ont utilisé la liste établie pour le référendum et ont recouru à un processus de révision plus intensif pour veiller à ce que les nouveaux citoyens admissibles soient ajoutés à la liste. Le Québec n'a pas fait cela; il a entrepris un nouveau recensement.

Estimez-vous que la qualité de votre liste d'électeurs pour les élections fédérales de 1993 était supérieure à la qualité des listes utilisées ailleurs au pays pour ces mêmes élections?

M. Côté: Vous voulez parler des élections fédérales de 1993?

La vice-présidente (Mme Catterall): Oui.

M. Côté: Pas les élections générales au Québec, mais le référendum.

La vice-présidente (Mme Catterall): Non.

M. Côté: J'imagine qu'ils auraient pu utiliser notre liste provinciale pour les élections de 1993.

La vice-présidente (Mme Catterall): Non. Ce que je dis, c'est que pour les élections de 1993, les autres provinces ont utilisé la liste établie pour le référendum de 1992, mais cela n'a pas été le cas au Québec.

M. Côté: Mais les élections provinciales au Québec ont eu lieu en 1994.

La vice-présidente (Mme Catterall): Non, je veux parler des élections fédérales de 1993.

M. Côté: Selon moi, ils auraient pu s'en servir, mais ils ont décidé de faire un recensement à l'échelle de la province.

La vice-présidente (Mme Catterall): Très bien.

Monsieur Harper.

.1205

[Français]

M. Harper: La décision du fédéral de ne pas employer la liste du Québec dans la dernière élection fédérale était-il une décision du Bureau du directeur général des élections ici ou de votre Bureau de Québec?

M. Côté: Pour les élections fédérales?

M. Harper: Oui.

M. Côté: C'était une décision de notre part. Et si on reposait la question, lors du référendum, on aurait pu utiliser également la liste du Québec. Ce sont des décisions gouvernementales qui ont été prises à ce moment-là d'avoir notre propre liste et vice-versa.

M. Harper: Était-ce possible pour le fédéral d'utiliser la liste du Québec?

M. Côté: Oui, mais dans les deux cas se posait quand même le problème de l'informatisation des listes et de leur mise à jour subséquente. On est rendus beaucoup plus loin présentement dans le règlement de ce problème.

Le problème majeur d'une liste électorale permanente informatisée, au fédéral ou au provincial, ce n'est pas d'établir la première liste, la liste complète, la liste complémentaire, la liste de base. C'est plutôt la mise à jour constante pour éviter de perdre des électeurs, pour ne pas qu'il y en ait qui disparaissent dans la nature.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Monsieur Langlois, très rapidement, puis M. Bélanger.

[Français]

M. Langlois: Il y a deux juridictions en cause, le Québec et Élections Canada. Je vois que Me Girard est dans la salle. Il pourrait peut-être nous dire pourquoi le fédéral n'a pu, pour l'élection générale de 1993, utiliser les listes référendaires au Québec. Cela compléterait, à mon avis, les réponses qui ont été données par Me Côté.

M. Jacques Girard (directeur, Services juridiques, Élections Canada): La raison pour laquelle il n'était pas possible pour Élections Canada de prendre les listes référendaires de 1992 pour l'élection fédérale de 1993, c'est qu'il aurait fallu modifier notre loi. La disposition actuelle dans la loi fédérale prévoit qu'on peut utiliser une liste qui n'a pas plus d'un an, mais une liste fédérale seulement. C'est le statu quo et c'était la disposition à l'époque. C'était la raison pour laquelle il n'était pas possible d'utiliser la liste du Québec.

Évidemment, je renchéris sur ce que M. Côté disait au sujet des problèmes techniques pour transposer la liste à ce moment-là.

M. Bélanger: Parce que la liste de 1992 avait déjà...

M. Girard: La Loi électorale du Québec, la Loi référendaire du Québec.

M. Bélanger: Et des territoires.

M. Girard: Oui.

M. Côté: Cela s'établit au Québec selon la loi du Québec et dans les autres provinces selon la loi fédérale.

Je suis heureux de l'intervention de M. Girard, d'autant plus qu'il a été pendant de nombreuses années chez nous. On apprécie encore ses capacités professionnelles.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Je pense que cela boucle les questions que nous avions pour M. Côté. Nous allons maintenant passer à autre chose,

[Français]

et remercier notre témoin pour ses excellents commentaires et réponses aux questions. Merci beaucoup.

M. Côté: Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les députés.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Je demanderai aux personnes qui sont en train de discuter entre elles de bien vouloir quitter la salle, car la réunion n'est pas encore terminée.

[Français]

M. Langlois: Madame la présidente, ma demande serait la suivante, et je vous remercie d'avoir ramené le décorum qui nous a échappé pendant un moment.

.1210

Serait-il possible pour nos recherchistes de nous préparer pour la prochaine réunion un résumé des points techniques et administratifs soulevés soit par Élections Canada, soit par le directeur général des élections du Québec, afin que sur les points techniques où M. Kingsley et M. Côté ne sont pas d'accord, nous puissions cibler davantage notre étude lorsque nous nous réunirons pour éviter de reprendre un débat qui soit at large? Cela nous aiderait beaucoup dans la poursuite de nos travaux.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Je pense que c'est là une excellente suggestion.

Nous n'avons plus le quorum nécessaire pour traiter des autres questions... à moins que quelqu'un ne communique avec le bureau de notre whip pour voir si l'on ne pourrait pas nous dépêcher un député. Nous ne pourrons pas déposer le rapport tant...

M. Langlois: Nous trouverons quelqu'un.

[Français]

On peut étudier la proposition maintenant à huis clos et la ramener ensuite...

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Je pense que nous pouvons faire cela.

[Français]

M. Langlois: De toute façon, on n'aura pas quorum pour prendre une décision sur la motion.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Catterall): Franchement, je préférerais que les gens qui vont faire le rapport soient ici pour la discussion et la présentation par le président du sous-comité.

Faisons donc une pause de quelques minutes en attendant que tout le monde soit ici. Nous poursuivrons ensuite à huis clos.

[La séance se poursuit à huis clos]

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