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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 9 mai 1996

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[Traduction]

Le président: La séance est ouverte. Nous n'avons pas encore le quorum, mais vu qu'il s'agit d'une réunion d'information, nous pouvons commencer. Aucun vote n'étant prévu, nous pouvons travailler en l'absence d'un quorum.

Je suis heureux d'accueillir parmi nous des représentants du Congrès des peuples autochtones. Sont venus nous rencontrer aujourd'hui le président, M. Jim Sinclair, et ses collègues,MM. Gary Bohnet et Marc LeClair.

Pour bien mettre les choses en contexte, je tiens à vous préciser, à vous nos invités, que le comité a décidé d'entreprendre un processus d'éducation. Au lieu de lancer des études et de s'éparpiller de tous côtés, nous aimerions aborder notre travail de façon coordonnée, et vous êtes les premiers témoins que nous ayons invités à venir nous rencontrer.

Ce que nous aimerions, pour aujourd'hui, c'est que vous nous expliquiez votre rôle, la façon dont le congrès a été créé et qui vous nomme ou vous élit aux postes que vous occupez. Nous serions également intéressés de savoir quelles sont vos priorités, et quelles études, déjà effectuées et gisant quelque part sur une étagère, vous aimeriez nous voir reprendre. Ce sera donc l'occasion pour vous d'influer sur notre programme de travail pour le restant de notre mandat.

Nous comptons siéger aujourd'hui jusqu'à 12 h 30 au plus tard. Je pense que cela nous laissera suffisamment de temps. S'il y a des membres du comité qui ne sont pas d'accord, je leur demanderai de me le faire savoir. Je suis très souple.

Nous allons commencer par demander à nos invités de nous faire leur présentation. Vous avez la parole.

M. Jim Sinclair (président, Congrès des peuples autochtones): Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui.

Je pense que le processus d'éducation est pour nous un processus sans fin d'explication et de sensibilisation au sujet de nos besoins et de notre position relativement à diverses questions à l'échelle nationale ainsi qu'internationale, bien sûr.

J'aimerais dire, tout d'abord, que nous sommes une organisation qui compte des membres partout au Canada, de Terre-Neuve et du Labrador jusqu'aux Territoires du Nord-Ouest, au Yukon, en Colombie-Britannique et partout dans les Prairies.

Notre réunion annuelle est organisée par les délégations qui élisent à cette occasion un président, pour un mandat de trois ans. Je suis un ferme défenseur de la base et dans le cas de toute organisation nationale, je ne suis heureux que si chacun a le droit de voter dans le cadre d'élections visant à choisir le leader. En l'absence d'un tel processus, les gens qui élisent leurs leaders d'un bout à l'autre du pays devraient, comme c'est notre cas à l'heure actuelle, tenir des réunions collectives pour discuter des questions qui les intéressent dès qu'ils en ressentent le besoin.

Je m'intéresse davantage à la base, car je crois fermement en la Constitution canadienne et je suis convaincu que la Constitution est faite pour les gens, groupes et individus, et non pas pour les organisations. Or, je pense que c'est là une chose au sujet de laquelle même le gouvernement n'a pas été très clair au cours des dernières années.

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Je comprends que lorsqu'ils parlent d'offrir certains programmes, ils offriront un programme à l'Assemblée des Premières nations parce qu'il vise les Indiens, ils offriront certains programmes aux Inuit parce que les Inuit y sont, et ils accorderont certains programmes aux Métis, ceux-ci ayant une organisation, un groupe national, créé il y a quelques années par le biais des tribunaux et de la dernière série de conférences constitutionnelles. À cause de tout cela, lorsque nous voulons accéder à certains de ces programmes et services tout en exerçant nos droits, cela déclenche des discussions sur le fait que le gouvernement traite avec des organisations qui représentent un certain nombre de personnes au lieu de traiter avec ceux qui ont des représentants dans le cadre d'autres types d'organisations.

Lorsqu'il est question de droits ancestraux, de droits issus des traités, je ne pense pas que l'on puisse envisager de fonder à l'avenir l'appartenance à une organisation sur la race . Votre appartenance à un groupe devrait également être déterminée par votre philosophie, votre façon voir les choses et la région que vous habitez. Ces facteurs devraient intervenir lorsqu'il est question de constituer une organisation.

Je pense que tant et aussi longtemps que des organisations dûment constituées expriment leurs opinions et leurs besoins, alors le gouvernement doit s'en occuper. Si vous parlez du droit inhérent à l'autonomie politique, je ne pense pas qu'il y ait de différence selon que vous soyez un Métis, un Indien ou un Inuit. Vous avez ce droit inhérent. Encore une fois, je pense que chacun devrait avoir le droit de se joindre à d'autres pour créer ce genre de structures afin que tout le monde, dans une région donnée, puisse en bénéficier.

Il y a, dans ma région, des Métis, des Indiens qui vivent à l'extérieur de la réserve, des Indiens de fait, des Indiens de plein droit et des Indiens qui habitent la réserve. Il arrive que certaines personnes veuillent vivre et travailler ensemble mais que des lois fondamentales ou des politiques gouvernementales les séparent.

J'ose espérer que l'un des objectifs de la reconnaissance de droits inhérents sera de permettre à ces gens de vivre et de travailler ensemble et de s'exprimer d'une seule et même voix, non pas parce qu'ils sont tous des Métis ou tous des Indiens, mais bien parce que c'est ainsi qu'ils veulent exprimer leurs droits inhérents. Je pense que cela est important.

Le problème, bien sûr, est que nous avons un ministère des Affaires indiennes qui devait représenter tous les Indiens ou travailler pour tous les Indiens. Récemment, il me semble que le ministère des Affaires indiennes axe ses programmes et leur exécution sur les seules réserves. Cela a causé quelques graves problèmes, étant donné que, me semble-t-il, les réserves, d'un bout à l'autre du pays, représentent à peine 1 p. 100 de la superficie totale, en tout cas guère plus.

Encore une fois, si vous parlez des régions conférées par les traités à nos ancêtres qui les ont signés, celles-là représentent de vastes étendues. Selon moi, les régions consenties par traité devraient être respectées car les traités sont venus avant les réserves et ces dernières étaient des terres qu'on a distribuées et sur lesquelles on a tenté d'entasser les gens.

J'ai l'impression qu'aujourd'hui, dans le cas de certaines réserves, 90 p. 100 des gens n'y habitent pas. Nous ne disons pas que ceux et celles qui vivent dans les réserves n'ont pas besoin d'aide. Nous ne disons pas que nous n'avons pas besoin des valeurs et des modes de vie traditionnels qui sont le fait de nombre de ces réserves, mais nous ne pouvons pas non plus refuser à nos jeunes gens et à d'autres qui veulent quitter ces réserves, s'installer dans d'autres communautés et travailler pour eux-mêmes, la possibilité de le faire.

Comptent parmi nos membres des Métis. Les Métis ont été intégrés à la Constitution en 1982. Nous avons consacré plusieurs années à lutter pour la cause des Métis, pour essayer d'obtenir pour eux la reconnaissance qu'ils méritent.

L'histoire des Métis est bien sûr très turbulente. Il y a peut-être eu des processus de négociation de traités très pacifiques avec des Indiens dans différentes régions du pays, mais vous avez également eu une guerre avec les Métis et certains Indiens qui n'acceptaient pas le processus des traités ou qui voulaient obtenir davantage de terres. Par suite de cet effort conjoint de résistance dans l'Ouest du pays, qui continue d'être d'actualité pour de nombreux Indiens et Métis, les Métis se sont vu refuser certains droits au fil des ans. Même avec la reconnaissance qui leur a été accordée dans la Constitution, personne ne s'est encore assis avec eux pour savoir comment ils définiraient leur propre forme d'autonomie politique au pays.

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M. Bohnet va prendre la parole un petit peu plus tard. Il est président de la Nation métisse dans les Territoires du Nord-Ouest, là où des négociations visant des ententes constitutionnelles sont toujours en cours. Mais au sud du 60e parallèle, il y a eu très peu de travail du genre, sauf dans le cas des colonies métisses de l'Alberta, qui ont discuté terres et ressources.

J'ai toujours pensé que de tous les traités qui ont été signés au Canada, le plus important était l'Acte du Manitoba. Cet acte a été élaboré par les Métis, mis en oeuvre par les Métis, et voici que ce même peuple qui a façonné cet acte se voit aujourd'hui refuser ses droits fondamentaux. C'est une lutte pour nos droits.

L'un des graves problèmes que je constate à l'heure actuelle au Canada est que chaque fois que des questions se posent, le gouvernement fédéral, qui a des obligations fiduciaires envers les trois groupes, soit les Métis, les Indiens et les Inuit, tente de se dérober à ses responsabilités et de les transférer aux provinces. Ce n'est pas bien.

Par le passé, le gouvernement a utilisé la question québécoise pour organiser son programme et pour rendre le Québec responsable des problèmes qui existent ailleurs au Canada. Pourquoi le fédéral veut-il céder ces pouvoirs aux provinces au lieu d'en accepter lui-même la responsabilité?

Dans le cadre de mes discussions avec des gens du Québec - et je suis certain que vous me corrigerez si j'ai tort - j'ai constaté que le Québec ne s'oppose pas aux droits des Autochtones, et en un sens, qu' il les appuie même.De temps à autre, nous le mettrons lui aussi à l'épreuve en ce qui concerne son engagement à respecter nos droits. Nous avons déjà eu des discussions.

Je tiens à ce qu'il soit très clair que ce n'est pas parce que nos droits sont enchâssés dans la Constitution et qu'il s'agit pour nous de les exercer dans le cadre de structures autonomes, que cela suffit que nous ayons une réunion constitutionnelle une fois tous les 50 ans et que cette journée-là est notre journée d'autonomie politique. En effet, l'autonomie politique est un processus permanent, un peu comme ce qui se passe pour vous: vous vous réunissez aujourd'hui et vous vous réunirez encore demain. Il s'agit d'un processus permanent, qui évolue. Il ne s'agit pas de lancer quelque chose et de s'arrêter là. Il nous faudra donc examiner ces questions et discuter de la façon d'exercer ces droits de façon quotidienne.

Bien sûr, lorsqu'on parle de l'aspect autonomie politique et engagements constitutionnels, on regarde ce qu'a fait le gouvernement fédéral jusqu'ici, et il a distribué un certain nombre de pouvoirs de veto. Même si les avocats essaient de me convaincre que les clauses nonobstant contenues dans ces droits de veto protègent nos droits, je m'inquiète de ce que plusieurs provinces aient un droit de veto et puissent stopper des choses que nous sommes parfaitement autorisés à faire et qui sont légales dans le contexte des lois et des responsabilités fédérales. Encore une fois, que signifie véritablement ce droit de veto? Certains disent que cela ne signifie rien, et d'autres prétendent le contraire. Mais dans le cadre de ces discussions, nous sommes à l'extérieur et non pas à l'intérieur, et ici encore, c'est quelqu'un d'autre qui est en train de prendre des décisions qui ont une incidence sur nos vies.

Cela m'amène à la question suivante: toute conférence constitutionnelle ou réunion des premiers ministres à l'avenir - et il y en a une qui est prévue pour juin - devrait nous inclure. Nous devrions être là, même si quelqu'un dit que les questions autochtones ne sont pas à l'ordre du jour. Les questions qui sont à l'ordre du jour auront certainement une incidence sur nous quoi que disent les gens. Nous voulons participer à ces conférences des premiers ministres; cela nous avait été promis. On est en train de prendre des décisions en notre absence et il nous faut pouvoir nous prononcer sur ces questions.

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Lorsque vous parlez d'autonomie politique, vous parlez de la question de savoir qui va payer pour l'autonomie politique. Cela fait de nombreuses années que l'on discute avec les gouvernements de l'utilisation qui est faite de l'argent des contribuables. Or, nous avons des solutions à proposer qui n'exigeraient pas de nouveaux fonds. Je l'ai dit à chaque réunion et à chaque comité que j'ai rencontré, et je vais le répéter ici encore: il vous faut redistribuer les sommes dont vous disposez déjà, abandonnant la mentalité et les structures d'assistanat et de prison pour mettre davantage l'accent sur la formation, le progrès économique et de meilleures conditions de vie pour les Autochtones. Vous dépensez 70 000 $ par an par Autochtone que vous mettez en prison.

Le Parlement a fait certaines déclarations au sujet du fait que certains membres de la génération du baby-boom vont prendre leur retraite au cours des prochaines années. Vous vous demandez qui va payer les pensions de tous ces gens. Permettez-moi de vous demander comment vous pouvez vous attendre à ce qu'un groupe nombreux et croissant, celui des jeunes qui vivent dans nos communautés autochtones et dont 75 p. 100 sont âgés de moins de 25 ans, supporte le fardeau du paiement d'impôts pour d'autres Canadiens, ce qui finira par arriver, ou finance les pensions d'autres Canadiens plus âgés, ce qui finira également par arriver, s'il reste en prison?

Vous avez un groupe de personnes qui sont en prison et pour lesquelles vous dépensez aujourd'hui beaucoup d'argent. Vous avez un autre groupe, celui-ci composé de personnes qui vont prendre leur retraite. Mais qui va financer les chèques de pension de tous ces gens-là? Il vous faudra changer de mentalité et abandonner l'assistanat et le recours à la prison, pour appuyer les ressources et le développement humains. Cela doit reposer sur quelque chose. Vous ne pouvez pas tout simplement vous présenter et dire: «Oui, nous allons y parvenir grâce à ce programme-ci ou à ce programme-là».

Nous avons à l'heure actuelle dans les réserves une stratégie qui s'occupe des questions qui intéressent les réserves, mais ce qu'il nous faut maintenant, c'est une stratégie urbaine qui vise ceux et celles qui ont quitté les réserves. Il ne s'agit pas de dépenser de nouvelles sommes d'argent, mais bien de réaffecter les crédits dont vous disposez déjà. Si vous examinez le système carcéral tel qu'il existe à l'heure actuelle, vous constaterez qu'il y a dans les prisons du pays de nombreux Autochtones qui s'y trouvent du simple fait qu'ils n'aient pas pu payer une amende de 50 $ ou qu'ils aient perdu leur permis de conduire et qu'ils aient malgré tout pris le volant. Souvent, ces gens-là récidivent et finissent par passer plusieurs années de leur vie en prison du simple fait qu'ils aient conduit sans permis. Il n'y a aucune raison de garder une personne en prison pendant si longtemps et de dépenser des sommes énormes tout simplement parce qu'elle n'a pas de permis de conduire.

Par ailleurs, vous dépensez de l'argent pour rendre les prisons confortables et pour en faire des endroits où les gens ne sont pas malheureux de se retrouver. Certains se font mettre en prison pour l'hiver. Je me souviens que nous étions nombreux à ne pas être fâché si l'on passait les mois de janvier et février en prison, car c'est une période de l'année où il fait très froid. Mais je vais vous dire quelque chose: si les prisons sont plus confortables que les écoles, alors à quoi pouvez-vous vous attendre? À quoi vous attendre de la part des jeunes qui entrent dans des salles de classe dont les murs sont défaits et qui n'offrent pas les installations nécessaires? Il faut revoir vos priorités.

Si les Canadiens de race blanche ont mauvaise conscience, alors ils devraient peut-être examiner le système carcéral et se dire que leur rôle n'est pas de construire de meilleures prisons pour que les gens s'y sentent bien, mais bien de veiller à ce que ces prisons puissent un jour être supprimées. Si les Autochtones représentent 10 p. 100 de la population, alors ils ne devraient compter que pour 10 p. 100 du nombre total de détenus et non pas 70, 90 voire 100 p. 100, comme c'est le cas dans certaines prisons pour femmes. Il faut que les attitudes changent.

Encore une fois, vous économiserez de l'argent, et nous, nous en économiserons aussi si les fonds existants sont redistribués. Nous le répétons, le Canada n'a pas besoin de nouveaux fonds pour mener à bien ce processus. L'argent est déjà là; il est déjà disponible. Il s'agit tout simplement de le redistribuer.

Je tiens à ce que les choses soient très claires. Je ne dis pas qu'il faut protéger les assassins, les violeurs et les personnes coupables de crimes violents. Une prison doit être une prison, cela est certain. Mais une prison ne doit être une résidence secondaire pour personne. Nous tenons à ce que cela soit très clair.

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Vous parlez de l'argent qui est dépensé. Si vous prenez la répartition des peuples autochtones à l'échelle du pays, les terres que nous habitons et celles que nous revendiquons, vous verrez que ces régions qui nous ont été cédées par traité et ces terres que nous revendiquons comme étant nôtres et que nous n'avons pas encore cédées renferment quantité de ressources. Mais voyez la pauvreté qui existe dans certaines réserves. Or, ces ressources ont été et sont toujours les nôtres.

Mais chaque printemps, les gouvernements nous donnent un chèque à titre de subvention. Les contribuables disent qu'on donne de leur argent aux Indiens, aux Autochtones, aux Métis. On veut que les politiciens fassent bonne impression et que les gens aient l'air généreux. Ce n'est pas la façon de faire.

Il faut prendre le produit national brut du pays et notre chiffre de population. De l'argent nous est donné en fonction de notre population, et parce que cet argent nous appartient, nous devons décider de la façon dont il est dépensé. Vous nous demanderez peut-être ce qui va se produire si nous gérons mal cet argent. Vous nous demanderez peut-être si nous reviendrons alors en redemander d'autre. La réponse que je vous donnerai est qu'il nous faut apprendre. Les choses pourraient fonctionner de cette façon pour une période temps donnée, dont tout le monde conviendrait. Mais vous constaterez de nouveau, si les choses se déroulent ainsi, qu'un grand nombre des membres de nos nations autochtones qui parlent aujourd'hui souveraineté ne parleront plus de sortir de la Confédération.

Il y en a beaucoup parmi nous qui sont à l'extérieur et qui veulent se trouver à l'intérieur. Nous tenons à ce que ces personnes aient la possibilité de créer leurs propres institutions. Elles reviendront peut-être vous dire: «Écoutez, nous n'allons pas payer les pensions de vieillesse, alors une certaine partie de cet argent devra rester aux mains du gouvernement fédéral, qui s'occupera de payer les pensions»; ou encore «Nous n'allons pas nous occuper de certains aspects des affaires étrangères, alors le gouvernement fédéral gardera notre part; même chose pour la défense nationale». Nous pouvons négocier ce genre d'ententes avec le gouvernement national.

Nous ne dépensons que notre argent. Nous ne puisons pas dans la poche des contribuables, ce dont on nous accuse sans cesse. Il faut donc régler ces questions.

L'une des choses avec lesquelles il nous faut composer aujourd'hui - et je pense que M. Harper l'a constaté dans le cadre de ses déplacements, de ses réunions et de ses discussions - , et c'est un phénomène en pleine croissance, est la suivante: nous voulons parler de notre genre de vie, de nos traditions et de notre culture. Il y a une certaine évolution dans le contexte de nos problèmes particuliers et des défis auxquels nous sommes confrontés. Au lieu que tout cela nous sépare, cela nous unit, nous rapproche bien plus que ne pourrait jamais le faire une Constitution.

Ces rencontres et cette énergie présentent néanmoins certains dangers: les gens se motiveront eux-mêmes en vue de prendre les mesures qui s'imposent pour amener certains changements.

Encore une fois, notre argent doit être dépensé de façon positive. Nos efforts ne doivent pas être perçus dans un contexte où les gens se disent: «On leur accordera une réunion aujourd'hui, mais demain on les oubliera». Je pense que ce sont là des questions qu'il vous faudra analyser et dont il vous faudra discuter pour amener, du moins c'est là notre espoir, le Parlement à les comprendre.

Cela m'amène à la question qui nous occupe ici: un accord politique, qui a été signé par le gouvernement fédéral il y a quelques années et dont nous allons vous remettre une copie, pour votre gouverne. Cet accord a été signé par le ministre des Affaires indiennes, responsable des Indiens, ainsi que par la ministre Anne McLellan, responsable des Métis et des Indiens hors-réserve au niveau national.

Nous avons un programme et nous nous sommes efforcés d'en faire notre plate-forme pour bâtir à partir de là. Nous avons été confrontés à de sérieuses difficultés relativement à l'accès à certaines parties du programme et même au lancement du travail sur certains éléments. Encore une fois, je pense qu'il nous faut utiliser cela comme fondation. Nous n'avons pas voulu vous distribuer toute une pile de documents dont vous n'aurez pas le temps de vous occuper ou que vous n'aurez pas le temps de lire. Ce que nous avons apporté est le fondement même de notre développement. Nombre des questions auxquelles nous nous trouvons confrontés en découlent.

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Je tiens à vous assurer - mais ce ne sont pas tous mes collègues qui seront d'accord avec moi là-dessus - qu'en tant qu'organisation nous avons beaucoup souffert au cours des dernières années. Lorsque l'actuelle administration a pris les choses en mains il y a de cela plus de deux ans, nous avions une dette d'un million de dollars, plus précisément de 940 000 $. Cela nous a également poursuivis.

Avec les compressions budgétaires imposées par le gouvernement, qui se sont élevées à environ 30 p. 100, et nos propres efforts de réduction du déficit, amenant des coupures de 50 p. 100 par an, nous nous sommes en fait retrouvés avec un budget d'exploitation de seulement 20 p. 100. Cela nous a nui et nous a créé de réelles difficultés. Il nous a fallu de ce fait survivre avec des fonds et des ressources tels que nous avons connu beaucoup de difficultés.

Le bureau national n'est à mon sens pas un énorme bureau avec un énorme personnel qui administre quantité de programmes. En fait, notre bureau national ne s'occupe même pas d'exécution de programmes. Je constate les compressions dans nos collectivités et du côté de nos organisations provinciales, qui sont en pleine négociation de revendications territoriales, comme il se doit, et qui exercent nos droits inhérents. Elles ne disposent pas des ressources de base nécessaires pour élaborer nos prises de position et pour s'asseoir et discuter avec le gouvernement.

D'autre part, il me semble que le gouvernement n'est à bien des égards pas vraiment disponible pour discuter. Dans le cas de nombre de nos collectivités, le gouvernement exige de nous que nous nous rendions à Regina, à Winnipeg, ou à Victoria pour discuter avec lui, dans ses bureaux, au lieu qu'il vienne chez nous, dans nos collectivités. Or, le gouvernement a les ressources nécessaires et il serait préférable de traiter avec les gens au niveau communautaire, ce qui permettrait d'éviter les genres de problèmes politiques qui se posent lorsqu'une entente est signée et que les gens disent par la suite qu'ils n'y ont pas participé.

J'estime par ailleurs que le gouvernement fédéral devrait rapidement «constitutionnaliser» toute entente négociée avec les Autochtones. J'ai été très déçu d'apprendre que la race intervient dans les élections en Colombie-Britannique. Je suis très déçu d'apprendre que les réformistes sont prêts à déchirer l'entente avec le peuple Nisga'a. Je suis déçu d'avoir entendu un leader libéral se lever et dire qu'il est prêt à déchirer l'entente négociée avec le peuple Nisga'a.

Il me semble que cela ne correspond pas à l'équité que défend le Canada. S'attaquer aux plus démunis, qui ont vécu à l'extérieur du système pendant si longtemps et qui viennent de signer une entente, en la déchirant... ce n'est pas cela le Canada. Il va vraiment falloir que je suive cela de près la prochaine fois que le Québec tiendra un référendum. Si c'est ainsi que nous sommes traités à l'intérieur de notre propre pays, alors nous ferions mieux de regarder du côté d'autres peuples et de leurs plaintes légitimes au sujet d'un système qui les empêche d'exercer leurs droits.

J'avais dit que je ne parlerais pas trop longtemps, mais vous avez dit ne pas être au courant et peut-être que vous pourriez, vous, me mettre un petit peu au courant de vos dossiers. Nous aimerions soulever un certain nombre d'autres choses, peut-être certaines questions mieux cernées, afin que vous soyez à jour en ce qui concerne certains des dossiers dont on discute. Je tiens néanmoins à souligner que je ne vous donne que certains renseignements de base. M. Bohnet voudra peut-être ajouter certaines choses. Nous a également accompagnés M. LeClair, qui voudra peut-être soulever d'autres questions encore.

Le président: Je tiens tout simplement à dire que chaque minute d'explication que vous nous avez fournie nous a été des plus précieuse. Vous nous avez fourni d'excellents renseignements et cela nous aidera dans le cadre de nos délibérations.

J'aimerais également vous demander si le leader libéral dont vous avez parlé est le chef du parti libéral provincial de la Colombie-Britannique.

M. Sinclair: Oui.

Le président: Je tenais à ce que cela soit clair. S'il s'agit d'un chef de parti fédéral, j'aimerais bien savoir de qui il s'agit.

M. Sinclair: Non.

Le président: Cela a donc été tiré au clair.

M. Sinclair: C'est le gouvernement fédéral qui a négocié l'entente.

M. Grose (Oshawa): Monsieur le président, j'ajouterais que ce chef libéral n'a pas été très bien accueilli par le caucus libéral fédéral.

Le président: C'est exact.

Monsieur Bohnet.

M. Gary Bohnet (président, Nation métisse, Territoires du Nord-Ouest, Congrès des peuples autochtones): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis moi aussi très heureux d'avoir ainsi l'occasion de m'adresser au comité permanent. La dernière fois que j'ai comparu devant le Comité permanent des affaires autochtones il y avait autour de la table un bien plus grand nombre de députés membres du Parti progressiste-conservateur. Cela fait donc un bon moment.

J'aime l'idée et l'approche que vous avez adoptées, monsieur le président, quant à votre utilisation du mécanisme à des fins d'éducation.

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Je vais, aux fins de la présente réunion, porter deux chapeaux. En effet, je représente le Congrès des peuples autochtones en ma qualité de coprésident du groupe de travail politique. J'attends avec impatience une invitation du comité à venir l'entretenir exclusivement des questions du Nord, au nom de la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest dont je suis le leader.

En matière de renseignements généraux, Jim a parlé de l'accord politique. Nous pensons qu'il s'agit là d'un très bon outil et mécanisme pour faire avancer le dossier des Métis qui vivent à l'extérieur des réserves. Nous avons le soutien du ministre Irwin et nous avons également eu celui de la ministre McLellan. En fait, tout juste hier nous avons posé la question dans le cadre du forum de la commission autochtone, qui se déroule à l'heure actuelle, et leur engagement à l'égard de ce processus est maintenu. Nous envisageons cela avec plaisir.

J'aimerais vous entretenir d'un des problèmes auxquels nous nous trouvons confrontés, soit le rôle de l'interlocuteur. Il s'agit d'un rôle très flou. Même l'interlocuteur fédéral nous a dit hier qu'elle comprend elle-même assez mal quel rôle lui revient. Le poste est assorti de très peu de ressources, et il n'y a pas de mandat. En fait, son rôle est d'organiser des réunions entre ministères d'exécution et Métis et Indiens non inscrits. Cela n'arrive que rarement.

Si le gouvernement est sérieux dans sa volonté de s'occuper des questions autochtones, ce qu'il nous faut faire c'est examiner de près le rôle de l'interlocuteur et lui accorder un peu plus d'outils et de ressources afin que le titulaire de ce poste puisse bien faire son travail.

L'autre chose qui est, je pense, importante dans le contexte du programme autochtone, c'est le comité permanent ici réuni. Je pense que celui-ci a un rôle très important à jouer. Si un grand nombre des problèmes potentiels et certaines des prises de position politiques symboliques adoptées à la Chambre des communes sont réglés comme il se doit par l'intermédiaire d'un comité permanent, alors tout le monde en sortira gagnant.

Pour ce qui est des questions pour lesquelles le comité peut trouver un terrain d'entente, je l'encouragerais à bouger rapidement. D'autres comités avant le vôtre ont déjà fait du travail. Il ne s'agit pas de réinventer la roue. Nous savons qu'il n'y a pas beaucoup d'argent et nous nous efforçons de nous débrouiller avec les moyens dont nous disposons.

L'une des questions qui me préoccupent beaucoup est celle de la fourrure. Dans le Nord, nous avons joué un rôle très actif dans ce dossier. Il y a eu un rapport de comité intitulé Canada Fur Watch: Aboriginal Livelihood At Risk. Il y a eu, au comité permanent, une entente parmi tous les partis. Or, voici que le rapport n'est jamais sorti. Mais le problème n'est pas attribuable au comité permanent ici réuni. D'après ce que j'ai compris, cela est tout simplement tombé lors des dernières élections. Cela avait été solidement appuyé par Ethel, par Jack Anawak et par tous les membres du comité à l'époque. J'aimerais que vous y jetiez un coup d'oeil. Le rapport avait du mérite à l'époque, et ce devrait être la même chose aujourd'hui. Regardez-le, revoyez-le et vous pourriez peut-être le déposer de nouveau.

Je vous ai apporté encore autre chose aujourd'hui: un petit communiqué d'une seule page qui traite de l'intention de l'Union européenne d'interdire les produits à base d'animaux à fourrure canadiens. Je ne vais pas vous le lire, mais il dit, en gros, que c'est une occasion pour le comité permanent de prendre position sur cette question de façon à bénéficier à tous les Autochtones ainsi qu'à des non-Autochtones, car il y a un grand nombre de trappeurs qui ne sont pas Autochtones. Cela prendra du courage, mais je pense que l'idée a beaucoup de mérite. J'aimerais que vous y réfléchissiez sérieusement. Renversons les rôles avec l'Union européenne. Disons-lui que le Canada prend cela au sérieux et qu'il va nommer un envoyé spécial. Disons-lui qu'il lui faudra travailler avec nous.

J'aimerais vraiment que vous preniez très au sérieux la question de la fourrure. Un grand nombre des gros dossiers politiques nationaux correspondent à des questions de grosse facture, mais nous, nous nous occupons de questions alimentaires, comme le piégeage - et je vais en aborder une autre dans un instant, la pêche - qui n'ont pas tendance à obtenir le soutien qui s'impose selon moi.

Il me faut dire une chose. En ce qui concerne la question de la fourrure, le ministère des Affaires indiennes et du Nord a fait un merveilleux travail aux côtés de nombre de nos organisations, mais là encore, les ressources ont été limitées. Il a fait du très bon travail.

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Je pense, par contre, que le ministère des Affaires étrangères a été très faible et très mou relativement à ce dossier. Dans ses relations avec l'Union européenne, le ministère des Affaires étrangères a eu tendance à ne pas vouloir faire de vagues. Je pense que le moment est venu pour le Canada d'en faire des vagues.

Je vais maintenant laisser de côté la question de la fourrure pour aborder celle de la pêche. Ici encore, je parle au nom du Congrès des peuples autochtones. Beaucoup d'argent et de ressources ont été consacrés à la pêcherie de la côte est à cause des problèmes que connaît celle-ci, ce qui est tout à fait normal. Des ressources ont également été consacrées à la pêcherie de la côte ouest. Mais on a oublié l'autre pêcherie, la pêcherie intérieure. Au moins 85 p. 100 des pêcheurs des lacs intérieurs sont des Autochtones.

On aurait pensé qu'avec la destruction des deux pêcheries côtières, ç'aurait été la fête pour la pêcherie intérieure. On se serait attendu à cela, mais ce n'est pas cela qui s'est passé. La stratégie pour la pêche autochtone s'est avérée en fait être surtout symbolique. Je pense qu'il s'agit là d'une question sur laquelle devrait sérieusement se pencher le comité.

Je sais que l'ancien ministre des Pêches, M. Tobin, a envoyé quelqu'un discuter avec les pêcheurs, alors il y a donc déjà certains rapports qui ont été produits. Il ne s'agit pas de réinventer la roue, mais que l'on donne aux pêcheurs des lacs intérieurs leur juste part des ressources.

Il est de nombreuses questions dont nous pourrions continuer de parler, mais la plus grosse est celle de cet accord politique. Comme je l'ai déjà dit, celui-ci devra être ressuscité et on nous a donné un engagement en ce sens. Les autres dossiers importants sont la fourrure et la pêcherie intérieure.

J'aimerais faire encore quelques remarques. Les jeunes et les gens qui travaillent au niveau communautaire dans les collectivités autochtones sont de plus en plus frustrés. Les gens ne font pas beaucoup confiance de nos jours aux gouvernements, qu'ils soient provinciaux ou fédéraux. Le niveau de frustration va croissant et il faudra donc que des mesures soient prises. Je suis heureux de voir que certaines initiatives ont été prises par le gouvernement dans différents domaines, mais je ne suis pas convaincu que cela soit suffisant.

Une autre chose qui crée beaucoup de frustration chez les élus qui essaient de travailler au niveau communautaire et d'oeuvrer dans le cadre du système avec le ministère, est celle du niveau de financement. Pour nombre d'entre nous, le financement pour nos structures internes nous vient d'Héritage Canada et du Programme d'aide aux organisations autochtones représentatives.

Les politiques gouvernementales en matière de compressions et d'imputabilité sont parfois ahurissantes, mais il n'existe aucune politique quant à la distribution de fonds aux organisations provinciales et territoriales en vertu du PAOAR.

Il y a quatre ou cinq ans, j'ai soulevé la même question, soit celle du financement, avec les mêmes bureaucrates, qui sont toujours en poste, et l'on continue de constater les mêmes réductions. Je viens du nord du Canada. Cela n'a rien à voir avec l'isolement, avec le coût de la vie dans le Nord ou quoi que ce soit d'autre du genre: il s'agit d'une réduction arbitraire qui est appliquée d'un bout à l'autre. Cela n'a aucun sens.

L'autre chose qui n'a aucun sens est la suivante: il n'existe aucune politique, mais si l'on en élaborait une, il faudrait que celle-ci prévoie la reddition de comptes. Pourquoi un organisme qui n'est pas redevable ou qui a, à toutes fins pratiques, disparu - et le gouvernement du jour sait de qui il s'agit - devrait-elle obtenir des augmentations de fonds aux dépens de ceux qui essaient de bien faire leur travail? Pourquoi les organisations provinciales et territoriales et le Congrès des peuples autochtones lui-même se voient-ils imposer des réductions arbitraires et punir du fait d'avoir pris des décisions financières qui étaient tout à fait fondées?

Je sais que vous comprenez à quoi je veux en venir ici. Cela n'est pas très logique. J'encouragerais le comité à examiner la façon dont les organisations autochtones sont financées et si aucune politique n'existe, alors dites donc à ces gens de se grouiller et d'élaborer une politique avec nous. S'ils ne veulent pas élaborer de politique, peut-être que le comité permanent devrait le faire.

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Il y a beaucoup d'autres questions que je pourrais soulever, mais je pense que je vais m'arrêter là pour l'instant et demander à Marc s'il veut ajouter quelque chose.

Le président: Avant que je ne donne la parole à M. LeClair, j'aimerais souligner maintenant - ce que j'aurais dû faire au tout début - que le comité a décidé d'accorder la priorité, dans le cadre de ses travaux, au développement économique, au développement du Nord. Le comité est en effet convaincu que si l'on parvient à amener de la richesse aux collectivités ou à les aider à en créer elles-mêmes, les autres problèmes seront réglés par la même occasion. Je tenais à souligner que c'est là ce que vise le comité.

Monsieur LeClair.

M. Marc LeClair (conseiller, Congrès des peuples autochtones): Merci. J'aimerais revenir sur une ou deux choses qu'ont évoquées Jim et Gary pour pousser un petit peu plus loin la discussion.

Comme vous le savez peut-être, le gouvernement fédéral a continué de rétrécir ses responsabilités au fil des ans à un point tel qu'aujourd'hui le ministère s'occupe presque exclusivement des Premières nations et des Inuit. Il achemine le gros du financement par l'intermédiaire des bandes indiennes et des Premières nations et, pour les Inuit, par les Territoires du Nord, et il s'est défait d'une responsabilité que d'autres considèrent comme et constitutionnelle et fiduciaire à l'égard d'autres Autochtones qui vivent à l'extérieur des réserves.

Cela a eu de multiples conséquences. Tout d'abord, au niveau fédéral, les initiatives en matière de programmes sociaux et économiques ont été réduites. Pendant les années 1970 et au début des années 1980, les dépenses sociales et économiques, au niveau fédéral, pour les groupes autochtones hors-réserve ont augmenté, mais l'on constate à ce chapitre une baisse constante depuis 1984. Parallèlement à la réduction du côté du soutien gouvernemental, les dépenses en ce qui concerne les Premières nations ont de façon générale augmenté, mais la croissance a été plafonnée du côté des réserves. On a constaté le phénomène inverse du côté des Autochtones vivant à l'extérieur des réserves, pour qui les dépenses ont baissé au même rythme que la taille du gouvernement. Mais l'incidence est beaucoup plus importante du fait que les ressources aient été plus limitées au départ.

Le contexte politique dans lequel s'inscrivent les centres urbains est différent: le gouvernement fédéral y a délimité ses responsabilités, ce qui a eu des répercussions. Celles-ci ont été très importantes surtout pour les provinces qui comptent une importante population autochtone hors-réserve.

Les députés membres du Parti réformiste du Canada doivent savoir qu'il y a dans l'Ouest un très grand nombre de Canadiens autochtones urbains. Dans la province d'Elijah, par exemple, la ville de Winnipeg compte plus de 30 000 Autochtones. Selon les statistiques, il y en a peut-être jusqu'à60 000, comme Jim l'a dit.

Le gouvernement fédéral se décharge de ses responsabilités. Ce qu'il a dit, c'est que ces personnes ne sont pas sa responsabilité, mais celle du gouvernement provincial. Bien sûr, les provinces se plaignent du fait que le fédéral se décharge sur elles, disant que ces gens-là ne sont pas leur responsabilité, mais bien celle du gouvernement fédéral. C'est ainsi que les gens se trouvent pris entre les deux. Le problème est particulièrement grave dans les centres urbains.

Par exemple, hier, la ministre, Anne McLellan, a pris la parole devant la Commission des peuples autochtones du Parti libéral, commission qui relève d'une initiative visant à intégrer les Autochtones aux conférences d'orientation du parti. La ministre s'est présentée et a déclaré qu'elle n'avait en fait aucune responsabilité à l'égard des personnes vivant à l'extérieur des réserves et que sa politique n'allait pas changer. Dix minutes plus tard, dans sa conclusion, elle a dit que les problèmes des centres urbains étaient les plus gros problèmes et le plus gros défi pour le gouvernement.

Gary a parlé de frustration lorsque vous dites que vous n'allez rien faire. Or, il s'agit là du plus gros défi. C'est un défi de taille, et qui a des conséquences pour les régions de l'Ouest et du Nord. Cela a des conséquences fédérales-provinciales, car le gouvernement provincial est en train de dire:« d'accord, aux fins de discussion - disons que nous sommes d'accord avec le gouvernement fédéral, bien que ce ne soit pas le cas - les provinces devraient augmenter leurs activités et leurs initiatives visant les Autochtones en milieu urbain». Elles devraient être encouragées à le faire. Où a-t-on vu le gouvernement fédéral encourager les provinces à prendre des mesures?

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Cela fait deux décennies que l'on suit ces conférences fédérales-provinciales. Le ministre des Affaires indiennes ne les aime peut-être pas beaucoup, et il y a toujours les sous-entendus politiques avec le Québec, mais il s'agit là d'une tribune discrète que nous avons traditionnellement utilisée pour augmenter l'intérêt des provinces. Nous ne réussissons pas toujours à obtenir d'elles un engagement pour quelque chose, mais au moins on s'assoit avec elles et on discute. Si le gouvernement fédéral ne fait rien d'autre, il devrait au moins encourager les provinces à travailler avec les Canadiens autochtones qui vivent à l'extérieur des réserves. C'est le minimum qu'il devrait faire.

Peut-être bien que cela est en train d'être fait. Peut-être qu'Anne McLellan et Ron Irwin sont en train de tordre quelques bras, mais on ne le voit pas. Cela n'est pas visible. On n'en entend pas parler. Cela crée certaines frustrations.

Il y a donc un gros vide, sur le plan politiques, dans les centres urbains. Je sais que le ministre des Affaires indiennes comprend les préoccupations relativement aux Autochtones en milieu urbain, mais il est en quelque sorte bloqué par son mandat, au sein de son ministère, et par les textes réglementaires qui disent qu'il faut traiter avec les Premières nations. Bien souvent - et je ne pense pas exagérer, lorsqu'on rencontre le ministre, il dit: «Eh bien, faisons ceci...» et il montre le ministère du doigt en disant: «Non, on ne peut pas faire cela car on n'a pas de politique de financement pour les Autochtones hors-réserve; on ne peut que faire des choses dans les réserves». Et c'est ainsi que l'on se trouve pris dans ce genre de bourbier.

Il importe de se pencher sur tout le contexte des Autochtones en milieu urbain, surtout ce vide... dans le cadre de la plus grande question du développement économique. Comment, dans les centres urbains, encourager et habiliter les collectivités elles-mêmes à faciliter la multiplication des possibilités commerciales et d'emploi pour les Autochtones? Comment s'y prendre?

Au Canada, nous avons une certaine expérience de travail avec les sociétés de développement des collectivités. Nous avons fait du travail du genre en région rurale dans le cadre du programme Développement des collectivités et dans le cadre d'autres activités de développement. Le Conseil économique du Canada et l'OCDE ont dit que le développement des collectivités est en réalité la prochaine génération d'approches du développement, et d'après eux, cela peut donner d'excellents résultats dans les parties les moins bien nanties des villes et dans les quartiers dont les habitants sont les plus démunis. Ils ont endossé cela, et le gouvernement l'a fait également.

Pour ce qui est du développement des collectivités, peut-on créer des organismes à Winnipeg, à Saskatoon, à Edmonton et à Regina? En matière d'institutions de développement autochtones, peut-on les appuyer financièrement? S'il va y avoir des dépenses accrues dans les centres urbains, pourra-t-on au moins en profiter un peu? Peut-on envisager le développement communautaire dans les centres? Peut-on leur donner la capacité d'examiner les ressources humaines des différentes villes, d'examiner les possibilités commerciales qui existent, d'analyser l'expansion des villes et de voir comment ils pourraient y jouer un rôle? Voilà les domaines où des choses très positives pourraient selon moi être entreprises.

Si vous allez mettre l'accent sur le développement économique et du Nord, je vous encouragerais à examiner les défis tout à fait particuliers auxquels se trouvent confrontés les Autochtones en milieu urbain et les mécanismes de soutien qui y existent, du côté de l'industrie, etc., de sorte que ces communautés, ces entreprises et ces personnes puissent se brancher sur les possibilités économiques qui existent au Canada. Je pense que ce serait très utile que vous vous penchiez là-dessus et que vous y consacriez une partie de votre rapport.

La seule autre question que j'aimerais évoquer brièvement avec vous est celle du financement de base. Je sais qu'autour de cette table, il y a peut-être certaines personnes qui ne sont pas très favorables à une augmentation du financement pour ces organisations, qui peuvent être perçues comme des groupes de lobbying. Les coupures visent tout le monde. Les gens regardent de très près ces dépenses publiques.

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Cela étant dit, j'aimerais que vous vous regardiez dans le miroir. Je vous invite à vous regarder dans votre miroir, à vous pencher sur votre salaire de député, sur les déplacements que vous faites et les points que vous accumulez et à quantifier ce que cela représente, à quantifier la valeur du budget de votre bureau, de votre personnel et de votre bureau de circonscription. Quantifiez cela. À quoi cela s'élève-t-il grosso modo? À environ 400 000 $ ou 500 000 $, si vous tenez compte de tout, y compris des voyages.

Puis regardez ce que vous demandez aux organisations nationales de faire, ce que vous demandez à une organisation nationale comme le congrès, qui reçoit un financement de base - il s'agit en fait de fonds d'organisation - de 320 000 $. Le congrès s'occupe des responsabilités et des intérêts des Autochtones vivant à l'extérieur des réserves dans 12 régions, dix provinces et deux territoires. On compte sur lui pour convoquer une réunion annuelle pour consulter les gens - et la réunion annuelle coûte 400 000 $ - pour les rassembler. Qu'est-ce qui est juste?

Il vous faut déterminer ce à quoi sert ce financement. Quelle est la nature politique de ces organisations? Nous faisons partie de la culture politique du Canada depuis l'élaboration de la politique de financement en 1970. Nous faisons tout autant partie de...

Vous venez nous demander notre aide, et nous vous la donnons. Nous vous demandons la vôtre, et nous espérons la recevoir. Mais quelles sont nos ressources? Quelles ressources nous donne-t-on pour venir vous aider à faire votre travail et pour que vous puissiez nous aider à aider les personnes que nous représentons? Ces ressources sont très limitées, et je pense que c'est le jeu. Je sais qu'on ne regarde pas d'un très bon oeil les organisations qui viennent dire qu'il leur faut plus d'argent, mais mettez-vous à notre place et voyez quel travail doivent accomplir Jim Sinclair et Gary Bohnet. Ils reçoivent de leurs commettants autant de courrier que vous, peut-être même plus, et il est également possible qu'ils reçoivent plus de demandes de prononcer des discours que vous. Or, ensemble ils ne disposent pas des ressources d'un seul député.

Les observations de Gary sont vraiment importantes. Je vous encourage à donner suite à sa suggestion et à examiner cette question.

M. Bohnet: J'aimerais ajouter encore quelques petites choses.

Monsieur le président, si j'ai bien suivi, le comité permanent concentrera son attention sur les priorités en matière de développement des entreprises. C'est très bien. C'est un excellent projet. Mais un certain nombre d'autres conditions fondamentales doivent être remplies avant que les collectivités et les individus ne parviennent à ce stade de développement communautaire ou commercial.

Premièrement, ces collectivités doivent être en bonne santé, et elles doivent être instruites. Vous aurez beau mettre sur pied tous les programmes de développement des entreprises du monde, mais si vous n'avez pas une population saine, une population instruite, tout cela ne servira à rien.

Je veux dire quelques mots du problème de la santé, car il a été évoqué ces derniers jours dans une autre réunion à laquelle j'ai pris part. Une grande étude des prestations d'assurance-maladie offertes a été lancée. On lui a consacré des centaines de milliers de dollars et un rapport a été rédigé. Mais, voyez-vous, pendant qu'ils faisaient cette étude, ils se sont aperçus que la plupart des Autochtones vivent hors-réserve et l'étude ne portait que sur les réserves. Au moins 60 p. 100 de la population autochtone vit en dehors des réserves. Ils ont donc dépensé plusieurs centaines de milliers de dollars à faire ce rapport et se sont rendus compte... Ils sont venus nous voir avant-hier, en tant qu'organisation nationale, et nous ont dit que, pour que leur rapport serve à quelque chose, ils devaient nous consulter. Ils ont dépensé plusieurs centaines de milliers de dollars pour ce rapport.

Nous avons dit, très bien, c'est très joli, mieux vaut tard que jamais. Ils ont dit que ce serait une annexe de leur rapport principal. Il fallait que ce soit fait vite, d'ici l'automne. Ils ont dit qu'ils avaient environ 25 000 $ pour procéder à cette consultation. Mais voyez-vous, une somme de25 000 $ pour consulter les 60 p. 100 de la population qu'ils ont oubliée est complètement insensée. Vous ne pouvez élaborer des programmes et des politiques pour les Autochtones exclusivement sur la base des statistiques intéressant les réserves.

Encore une fois, je vous invite à jeter un coup d'oeil à toutes ces initiatives. La santé et l'éducation, je vous le dis, doivent être la principale préoccupation de ce gouvernement, de tous les gouvernements.

Je vous remercie.

.1200

Le président: Avant de passer aux questions - et je pense que M. Murphy voudra parler de l'éducation, ou du moins vous informer d'un certain nombre de choses en cours - il y a un dicton en politique qui dit que si l'on veut neutraliser quelqu'un, on l'élit président. C'est probablement ce qui s'est passé à ce comité. Mais je ne vais en aucune façon rester silencieux et laisser qui que ce soit critiquer l'argent que je gagne. Ma main ne tremble jamais lorsque je touche mon chèque. Un enseignant gagne plus que n'importe quel député ici présent. Si vous allez nous jeter...

M. LeClair: Ce n'est pas ce que je voulais dire du tout. Je ne vous faisais aucun reproche. Je disais simplement...

Le président: Nous gagnons 64 000 $ par an.

M. LeClair: ...ce sont les niveaux. Croyez-moi, je sais la difficulté de votre rôle. Je vous prie d'excuser toute...

Le président: Je ne dirai rien de plus. Mais je ne tolère pas cela. Ce sont les médias qui alimentent cela, et ce n'est pas vrai.

Je suis sorti de mon rôle, mais j'interviendrai de la même façon chaque fois que cette question sera abordée.

Nous allons passer aux questions. Monsieur Bachand.

Mme Marie Frawley-Henry (directrice, Services à la jeunesse, Congrès des peuples autochtones): Veuillez m'excuser. M'accorderiez-vous quelques instants?

Le président: Pouvez-vous faire en sorte que ce soit très bref, je vous prie?

Mme Frawley-Henry: Oui.

Le président: Tout d'abord, veuillez vous présenter.

Mme Frawley-Henry: Je me nomme Marie Frawley-Henry, et je suis l'intervenante pour la jeunesse au Congrès des peuples autochtones.

Je ne sais pas si vous connaissez le Programme d'intervention auprès des jeunes instauré par l'honorable Ethel Blondin-Andrew. Le programme que nous appliquons au Congrès des peuples autochtones manque de fonds plusieurs mois par an. Cela nous ramène à certaines des remarques fondamentales faites par mes collègues. L'insuffisance des crédits nuit gravement à ce programme. Qui en souffre le plus? Les jeunes que je suis censée servir.

Comme vous le savez, les jeunes Autochtones hors-réserve représentent une grosse proportion de notre population. Une génération plus nombreuse et hautement frustrée nous arrive, car ses besoins ne sont pas satisfaits. Les lacunes sont très évidentes. Il faut mettre en place des politiques pour confronter ce problème à tous les niveaux.

On parle de la problématique. Le développement économique est certes essentiel, mais je suis d'accord avec mon collègue pour dire que si l'on ne règle pas certains des problèmes de santé et si l'on ne met pas en place une structure élémentaire pour nos jeunes, on ne peut même pas imaginer ce que le développement économique pourrait être.

Nous avons un certain nombre de problèmes ponctuels, bien entendu. Je ne vais pas les aborder. Je voudrais inciter votre comité à jeter un coup d'oeil et inviter certains de ces jeunes afin qu'ils puissent eux-mêmes parler de ces problèmes. Je puis intervenir en leur nom, mais c'est à eux de s'exprimer et je pense que ce serait instructif pour vous de les recevoir.

Le président: J'en prends bonne note. Je vous remercie.

Monsieur Bachand.

[Français]

M. Bachand (Saint-Jean): Je vous remercie pour votre excellente et très honnête présentation. Je voudrais tout d'abord faire mes excuses à M. Bohnet que je n'ai pas salué tantôt. Je ne l'avais pas reconnu et je m'en excuse. J'ai rencontré M. Bohnet lors d'une visite dans les Territoires du Nord-Ouest. Sachez, monsieur Bohnet, que les deux ceintures fléchées que vous m'avez données sont en évidence dans mon bureau et que le petit bouquin que vous m'avez offert est fréquemment lu par mes adjoints. Je pourrais même vous dire qu'il est possible que j'aie embauché un adjoint qui est le descendant d'Archie Larocque. Cela vous rassurera peut-être de savoir que nous avons à coeur la question des Métis.

J'ai également toujours pensé que le développement économique était très important. Si vous vous en souvenez, j'avais insisté pour qu'on reçoive les gens de façon représentative pour qu'ils nous disent si nous étions sur la bonne voie. Je suis content d'apprendre que vous parlez aussi de santé et d'éducation. J'abonde tout à fait dans votre sens et nous allons certainement en tenir compte. Nous avons d'ailleurs voulu que les représentants viennent nous adresser la parole, parce que la dernière fois qu'on avait fait une étude sur l'éducation, les représentants de l'AFN étaient venus nous dire qu'il y avait une bibliothèque pleine d'études. Je m'étais senti un peu mal à l'aise et c'est pourquoi je tenais absolument, cette fois-ci, à ce qu'on vous rencontre avant qu'on entreprenne d'autres travaux.

J'ai une première question sur la justice autochtone. Vous en avez parlé tantôt, mais j'aimerais que vous reveniez sur l'accord politique qui a été signé en 1994 et que vous nous donniez un compte rendu sur l'état d'avancement des dossiers prioritaires. J'ai cru comprendre tantôt, monsieur Sinclair, que vous disiez que même si cela avait été signé, la négociation elle-même n'avait pas beaucoup avancé. Même si un accord politique ferme a été signé, il semblerait qu'il y ait des problèmes à enclencher la négociation de façon sérieuse. J'aimerais donc que vous nous disiez si les choses ont avancé ou non.

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Je voudrais mentionner aussi que les Indiens hors réserve sont les enfants pauvres du ministère des Affaires indiennes. Nous le savons tous. Je voulais seulement ajouter quelque chose à ce queM. Leclair a dit tantôt. Je ne me suis pas senti offusqué par votre remarque, parce que je crois comprendre que vous avez voulu nous faire remarquer que vous avez dix provinces, deux territoires, environ 300 000 ou 400 000 Indiens hors réserve et que vous devez vous débrouiller avec un budget annuel de 300 000 $. Je peux vous dire que, du côté du Bloc québécois, j'ai noté ce que vous avez dit et que je vais faire des représentations auprès du ministre pour faire en sorte qu'on ajuste cela.

Mais vous n'êtes pas les seuls à avoir subi des coupures. Que ce soit l'AFN, les Métis, ou les Inuit, tout le monde se plaint qu'il y a un phasing out ou une diminution du financement significative.

À partir du moment où on ne finance plus les représentants des communautés, le ministère peut négocier plus facilement avec chaque communauté séparément. Je vais donc veiller à ce que cette situation s'améliore parce que je suis d'accord pour dire que cela n'a pas de sens.

Quand je parle d'«enfants pauvres», je peux vous dire, après être allé à Toronto, que 50 p. 100 des Indiens hors réserve d'Ontario qui fréquentent Toronto sont des jeunes dans un état d'abandon effroyable.

J'ai vu des jeunes autochtones couchés sur les trottoirs en plein hiver. Même si on n'en parle pas souvent, je sais qu'on ramasse un mort de temps en temps. Je sais donc que vous êtes les enfants pauvres. Même si vous êtes reconnus par la Constitution canadienne, vos n'avez ni la capacité ni la possibilité de faire quelque chose. Tout l'argent va aux autochtones sur les réserves, et les 50 p. 100 qui vivent hors réserve n'ont absolument rien, aucune aide, si ce n'est celle des centres d'amitié qui sont, eux aussi, très limités.

Je voulais donc vous dire que je sympathise énormément avec vous et que je vais travailler à ce que cela change, dans la mesure de mes moyens, naturellement. Vous savez que je suis dans l'Opposition officielle, et vous savez sûrement que nous notons ce genre de choses et que nous faisons un suivi avec le ministre et aussi avec vous.

J'aimerais que vous nous donniez, monsieur Sinclair, le compte rendu que je vous ai demandé sur l'état d'avancement des dossiers dont il est question dans l'accord politique.

[Traduction]

M. Sinclair: Comme je l'ai dit, l'accord politique lui-même a été signé il y a plus de deux ans. L'un des engagements était, je crois, de veiller à ce que les collectivités bénéficient de tout processus découlant du droit inhérent, de tout engagement constitutionnel. L'engagement a été donné que la Constitution serait pour les peuples, et non pour les organisations, et que le processus des revendications territoriales se poursuivrait et résoudrait le problème des Indiens hors-réserve dans les régions visées par le traité, et que le gouvernement fédéral conserverait sa responsabilité fiduciaire à l'égard des Indiens hors-réserve.

Cependant, sur les 5 milliards de dollars du Budget du ministère des Affaires indiennes, notre organisation touche environ 200 000 $. C'est tout ce qui est donné à l'organisation nationale. Et l'organisation nationale est censée consulter les régions de tout le pays, mais avec 200 000 $ on ne va pas bien loin.

Comme je l'ai dit, nous demandons que les négociations sur toute question relative aux droits constitutionnels et au droit inhérent à l'autonomie se déroulent dans les collectivités où vivent les gens. Ces négociations doivent être menées avec ces populations et le gouvernement va devoir dépenser un peu de son propre argent pour se rendre dans ces collectivités s'il ne veut pas nous donner les ressources dont nous avons besoin.

Je pense que la question dont vous parlez devra être traitée encore une fois dans l'arène politique. Le développement économique est réellement l'avenir. C'est ce que nous voulons, mais comme M. Bohnet et d'autres l'ont dit, avant de parvenir à ce plateau, il faut commencer par réparer les dégâts. Un certain nombre de conditions doivent être remplies et certaines priorités décidées. Cela suppose un changement de mentalité, pour nous et pour le gouvernement. Je pense que l'accord politique - et c'est pourquoi nous l'évoquons - est le fondement de tout.

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Hormis l'octroi de quelques crédits à l'organisation mère... Anne McLellan, qui est responsable des Métis, ne reçoit pas de crédits du tout, hormis peut-être 200 000 $. Encore une fois, à qui les Métis doivent-ils s'adresser pour obtenir les crédits dont ils ont besoin pour lancer ce processus d'autodétermination? Le gouvernement fédéral et la province ne cessent de se renvoyer la balle. Il y a là quelques situations très difficiles. Je pense qu'il faut s'arrêter et réfléchir à cela. CommeM. Bohnet, j'espère beaucoup que votre comité va se pencher sur certains de ces problèmes.

Le président: Monsieur Dumas.

[Français]

M. Dumas (Argenteuil - Papineau): Ma question est pour M. Sinclair. Vous avez mentionné tantôt la grande pauvreté dans les réserves. Vous disiez que, pour bien des citoyens, la prison devenait une deuxième résidence. Vous disiez également qu'on emprisonnait les gens qui conduisaient sans permis alors que l'amende est de 50 $. Vous parlez probablement de la situation dans les provinces de l'Ouest. Croyez-vous que la situation est la même au Québec?

[Traduction]

M. Sinclair: Nous ne sommes pas sûrs pour ce qui est du Québec. Nous avons une organisation au Québec qui se penche sur certaines de ces questions, mais je parle de façon générale. Les Indiens dans l'ouest du Canada sont plus visibles que dans l'Est, hormis dans quelques localités. Ils sont une minorité plus visible dans l'Ouest. Cela nous cause quelques grands problèmes, car, comme je l'ai dit, les Indiens sont facilement reconnaissables.

Plus j'avance vers l'Est et je rencontre certains des Autochtones de l'Est - j'en connais beaucoup depuis de nombreuses années - plus je vois qu'il est difficile de distinguer les Québécois des Indiens, et pourtant il y a quelques Indiens traditionnels. Je pense que le problème des Autochtones est qu'une fois que les gens vous reconnaissent comme tels et que vous vivez dans une réserve, vous êtes confrontés aux mêmes menaces, que vous viviez dans une réserve au Québec ou dans une réserve de l'ouest du Canada. Vous portez un stigmate que les nôtres connaissent bien, et qui s'accompagne de tous ces problèmes. Cela nous cause de graves problèmes, sur le plan de la pauvreté, comme vous l'avez dit.

Ce qui est intéressant dans tout cela, c'est que le gouvernement semble dire que si nous restions chez nous là où il n'y a pas d'emplois... l'ouest du Canada a ce problème du chômage dans bien des endroits, excepté certaines des réserves de l'Alberta riches en pétrole qui ne veulent pas partager leur richesse. Le gouvernement nous dit: «Si vous restez chez vous, nous vous donnerons un chèque d'assistance sociale et une maison. Mais si vous quittez cette réserve et que vous avez besoin d'aide pour trouver un emploi ou acquérir une formation, adressez-vous à quelqu'un d'autre». On nous incite donc à rester chez nous; on nous paye si nous restons chez nous, là où il n'y a pas d'emploi. Ce n'est pas ainsi que le Canada devrait fonctionner.

M. Bohnet: Monsieur le président, pourrais-je également apporter ma réponse à cette question? Les Autochtones du Québec connaissent exactement les mêmes problèmes que les Autochtones de toutes les autres régions du pays. Vous avez des Autochtones très pauvres au Québec, et ils souffrent des mêmes injustices que partout ailleurs. Je pense pouvoir le dire avec assurance.

Le président: Je vous remercie. Monsieur Murphy.

M. Murphy (Annapolis Valley - Hants): Je vous remercie de vos exposés. Expliquez-moi la notion de «hors-réserve», selon votre optique, et expliquez-moi comment vous concevez la responsabilité fiduciaire, si vous voulez bien. Qui... où s'exerce-t-elle

Il y a un autre problème. Nous parlons de développement économique et je pense qu'il est très important. Je pense qu'il est nécessaire, car il donne l'autosuffisance et renforce l'estime de soi de la collectivité etc. Mais vous avez également dit qu'il faut s'occuper des problèmes de santé et des problèmes d'éducation.

J'ai fait beaucoup de travail de développement communautaire au fil des ans, et j'ai toujours constaté que si l'on me bombarde avec trop de problèmes, j'en suis paralysé: je ne sais pas par quoi commencer, et par conséquent je ne bouge pas. J'aime croire que ce comité va faire quelque chose, lui aussi, en fin de compte. Je ne viens pas m'asseoir autour de cette table pour le simple plaisir. Je suis venu pour agir.

Je vous pose donc la question. Les jeunes connaissent beaucoup de problèmes, mais par quoi commençons-nous? Où vaut-il mieux intervenir pour lancer le mouvement?

.1215

Je veux vous dire également que je suis assis de ce côté-ci de la table, mais je ne suis pas réformiste, je suis libéral.

Le président: Cela aussi, vous tenez à ce que cela se sache.

M. Sinclair: Encore une fois, sur la question de savoir où commencer, ce qui compte c'est l'emploi, l'emploi, l'emploi. Cela ne fait aucun doute. La création d'emplois dans l'économie est essentielle à nos yeux. La préparation à ces emplois est importante à nos yeux. Je dis que pour changer cela, il faut avant tout une reconnaissance de notre droit inhérent et une reconnaissance de nos traités.

En ne reconnaissant que les réserves, vous reconnaissez des droits limités pour nous. Nos droits s'étendent au-delà des réserves. Il y a une responsabilité fiduciaire. Là où je vis, une région visée par un traité jouxte sa voisine et ainsi de suite à travers toutes les provinces.

Vous demandez où commencer. Il faut commencer par recanaliser l'argent que vous engloutissez dans le système d'aide sociale et le système carcéral. Cela doit changer. Le système judiciaire doit changer. On a recommandé un système de justice de rechange. Si on va m'envoyer en prison pour un délit donné, peu m'importe qui m'envoie en prison, que ce soit un juge indien ou un juge blanc, c'est la même prison régie par les mêmes lois.

Vous devez reconsidérer vos priorités. Lorsque vous parlez d'un système judiciaire autochtone, je ne veux pas être assis en rond, dans un cercle où je peux décider quel châtiment infliger à quelqu'un. J'aimerais être là à l'origine, lorsque cet enfant naît, lorsque cette personne a un problème et n'a pas de logement décent, d'endroit décent où vivre, et souffre de discrimination. Il y a des politiques racistes qui pénalisent ces gens. Je veux changer tout cela afin que ces personnes soient placées dans un environnement vivable et dont elles puissent être fières. C'est là qu'il faut commencer.

Vous nous demandez aujourd'hui comment attaquer le problème de l'alcoolisme. Faut-il commencer avec les parents qui boivent ou faut-il commencer avec les enfants, qui sont bien souvent victimes de sévices? La majorité des nôtres aujourd'hui ne boivent pas et tentent d'élever leur famille, mais on nous badigeonne tous du même pinceau. Il vaut bien mieux avoir un problème de boisson car vous êtes plus susceptible de recevoir de l'argent pour continuer à boire que vous n'êtes susceptible de pouvoir travailler si vous voulez travailler. Personne ne veut alors vous aider. Si vous êtes sobre, ils vous disent de vous débrouiller et de trouver du travail vous-même.

Il faut se pencher sur ces questions et tenter d'inverser le cours des choses. Ces recommandations peuvent être faites. J'ai eu quelques réunions avec un certain nombre de ministres et avec Ron Irwin ces derniers jours. Je pense que beaucoup de choses positives peuvent être faites.

Bien sûr, si vous voulez parler de l'emploi, il faut aussi faire sauter le verrou des syndicats. Ils sont aussi responsables que n'importe qui de notre chômage car très souvent ils ont des ateliers fermés. La Commission de la fonction publique est fautive car elle veille bien à ce qu'il y ait quelqu'un assis à côté de nous lorsqu'elle embauche. Si vous n'avez pas un ami bien placé, vous n'avez pas de travail. Donc, elle non plus ne nous offre pas d'emplois; ils sont très rares, très limités.

Le gouvernement fédéral passe également chaque année pour des milliards de dollars de marchés avec des entreprises de tout le pays. Une chose que j'ai apprécié d'entendre l'autre jour, c'est lorsque M. Irwin a dit qu'il a maintenant un programme d'acquisition qui va offrir jusqu'à300 millions de dollars de marchés à des entreprises autochtones. Je suis très en faveur de cela car le gouvernement va devoir réserver des fonds s'il va adjuger ces contrats chaque année. Si c'est10 p. 100 du budget, ce serait bien.

C'est quelque chose d'important pour nos gens d'affaires. Lorsque vous parlez d'accorder des subventions aux entreprises, il s'agit là de subventions à des gens qui bien souvent ne savent même pas gérer une entreprise ou dont l'entreprise fera faillite dès que la subvention aura été dépensée. Si vous donnez un morceau de papier à l'un de nos entrepreneurs, sur une réserve ou hors des réserves, et qu'il a un contrat avec le gouvernement fédéral, il peut aller voir la banque avec ce contrat et il ou elle va gagner de l'argent. C'est le genre de chose qui est nécessaire.

On ne peut tout simplement mettre toute la pression sur l'industrie privée; le gouvernement doit accepter lui aussi de faire sa part. Je pense que cette initiative est de grande importance et je l'apprécie, mais il faut la faire aboutir, il faut la développer, il faut la faire avancer. J'espère que ni le Parti réformiste ni quiconque d'autre ne va se mettre en travers de la route, car nous devons recevoir notre part des contrats de construction passés par le Canada, même s'il s'agit de construction de navires ou de quelque chose du genre. Nous devons avoir notre part de ce processus.

Le président: Je vous demande de donner des réponses brèves. Poursuivez, mais il nous reste dix minutes et nous avons encore trois membres qui désirent poser des questions.

M. LeClair: Vous avez un problème institutionnel, d'une certaine façon, dans les centres urbains et, sans devenir trop bureaucratique, je pense qu'il faut des solutions institutionnelles. Il existe une politique d'équité en matière d'emploi et une politique en matière d'achats, mais sans un catalyseur qui mette en rapport les gens avec les possibilités, vous n'obtiendrez pas vraiment le résultat qu'il faudrait. Je pense que c'est là où les institutions de développement communautaire jouent un rôle important.

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Nous serions très heureux de revenir pour parler plus particulièrement du développement communautaire dans les centres urbains et vous présenter un mémoire à ce sujet, une fois que vos travaux seront lancés.

Le président: Merci beaucoup. Gary.

M. Bohnet: La question était excellente. Par quoi faut-il commencer? C'est toujours ce que nous nous demandons nous-mêmes. Pour dire les choses simplement, selon notre expérience, il faut commencer au niveau de la collectivité, déterminer ses besoins et comment elle va entamer sa guérison et pouvoir progresser. Il faut partir du niveau communautaire.

Les programmes nationaux conçus ici, à La Mecque, ne vont pas régler nos problèmes au niveau communautaire.

Mme Frawley-Henry: Pourrais-je très rapidement ajouter un mot à cela?

Dans le système des valeurs ou dans la philosophie autochtone, nous avons une approche particulière qui est circulaire. Comme Jim Sinclair l'a mentionné tout à l'heure, tout commence avec les enfants, nous avons donc les enfants, les jeunes, les femmes, les hommes, nos anciens, l'incarcération... Tous les autres problèmes qu'il faut régler. Ce peut être là la canevas. Et tout cela est axé sur la communauté également.

Je voudrais simplement mentionner un élément critique auquel tout cela peut être ramené: l'éducation et la prise de conscience sont un besoin vital dans ce pays. Nos jeunes disent qu'ils ne connaissent pas leur histoire. Elle n'est pas enseignée. Ils ne savent pas qui ils sont, ils ne savent pas où ils vont, ils n'ont aucune identité. Il faut la leur donner. La société en général doit connaître notre histoire, doit savoir qui nous sommes et quels sont nos droits. L'éducation et la sensibilisation sont essentielles. Voilà un endroit où commencer.

Le président: Monsieur Harper.

M. Harper (Churchill): Je vous remercie, monsieur le président.

Je voudrais souhaiter la bienvenue à mes amis Marie, Gary, Jim et Marc à cette tribune, le Comité parlementaire des affaires autochtones. Je ne dispose pas de beaucoup de temps, mais c'est certainement une occasion pour vous de nous informer.

Beaucoup de gens passent leur temps à faire de l'éducation et de la sensibilisation. Je le fais moi-même constamment depuis que je suis entré en politique ici, et c'est frustrant. Comme je l'ai dit ce matin à un autre groupe, il faut que les nôtres parlent pour eux-mêmes, et non que d'autres parlent en notre nom. C'est quelque chose que je préconise.

Pour les Autochtones, l'éducation exige que les gouvernements nous respectent et nous honorent, surtout lorsqu'on voit les conditions dans lesquelles les nôtres vivent dans les centres urbains. Je pense que les traités ont préséance sur toute loi fédérale. Les droits conférés par les traités ne s'arrêtent pas aux limites de la réserve. Ils doivent s'appliquer également dans les centres urbains. C'est une chose que je réclame sans cesse, et j'espère que vous m'appuyez là-dessus.

Mary a parlé d'éducation. Nous allons faire quelque chose à cet égard, notamment avec la journée nationale des Autochtones que nous proposons au gouvernement, comme point de départ de la sensibilisation et de l'éducation dans tout le Canada. Voilà ce que je voulais dire pour le moment.

M. Sinclair: Je voudrais juste dire une chose. Je voudrais remercier Elijah d'avoir organisé la conférence qui s'est déroulée cet hiver. Beaucoup de gens sont venus.

Mais je veux également vous rappeler quelque chose. Nous ne sommes pas différents des Noirs aux États-Unis qui se sont rassemblés autour de la religion musulmane, ou différent de qui vous voulez. Lorsque nous nous réapproprions notre religion ou nos positions, cela déclenche aussi un désir d'action et vous savez combien le mélange de politique et de religion peut être explosif. On le voit partout dans le monde. Et beaucoup de gens disent qu'il peut en sortir beaucoup de bien si les gens dialoguent avec nous, mais que s'ils nous rejettent, quantité de ces problèmes vont dégénérer et que l'on verra les affrontements violents se multiplier à travers le pays.

Lors des réunions tenues ici à Ottawa, cet hiver, beaucoup de gens, en particulier des Prairies, m'ont demandé d'inviter Elijah à des réunions similaires. Je pense que nous allons en organiser d'autres à l'avenir.

Le président: Monsieur Grose.

M. Grose: Je ne suis pas un membre régulier de ce comité. De fait, je remplace Jack Anawak. Mais, monsieur Sinclair, nous nous sommes déjà rencontrés au Comité des droits de la personne et nous traitons ici de certains de ces mêmes problèmes.

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Monsieur Bohnet, je suis membre du Comité des comptes publics. Nous avons étudié le Programme d'aide aux organisations autochtones représentatives et nous ne l'avons pas beaucoup apprécié. Je viens maintenant ici, et je m'aperçois que vous ne l'aimez pas non plus. Eh bien, arrangeons-le.

Une chose que j'aimerais souligner est que nos problèmes, les vôtres et les miens, sont traités, non pas isolément dans ce comité, mais également dans d'autres comités. J'utiliserai ce que j'aurai appris ici, aujourd'hui, au Comité des comptes publics, par exemple, pour dire qu'il faut revoir ce programme et l'améliorer. Nous vous inviterons peut-être pour que vous nous disiez en quoi il est défectueux.

Le président: Monsieur Finlay.

M. Finlay (Oxford): Je tiens à remercier les témoins. Leur exposé a été très riche d'enseignements et je me trouve en accord avec beaucoup des choses qu'ils ont dites.

Je voudrais poser une question suite à ce que M. Bohnet a dit, à savoir qu'il faut commencer au niveau de la collectivité locale. Ayant travaillé pendant deux ans au sein du Comité de l'environnement, j'en suis venu moi-même à peu près à la même conclusion, s'agissant de mettre en route un certain nombre de mesures que la plupart des Canadiens souhaitent.

Vous avez mentionné qu'il existe une politique d'action positive et une politique d'achat favorisant les entreprises autochtones, mais vous pensez que le ministère des Affaires indiennes se préoccupe sans doute davantage des Autochtones vivant dans les réserves que de ceux hors-réserve. C'est sans doute assez logique, indépendamment de savoir si c'est une bonne chose ou non. Elijah ne cesse d'essayer de m'instruire, mais il me semble qu'il y a une différence.

Vous dites que 50 p. 100 de tous les Autochtones hors-réserve de l'Ontario vivent à Toronto. Quelle sorte de réaction obtenez-vous du conseil municipal de Toronto? Quelle sorte de réaction obtenez-vous de la communauté urbaine de Toronto? Quelle sorte de réaction obtenez-vous des autorités provinciales?

Tout ce que je dis, c'est que le MAIN et ce comité et le Parlement fédéral possèdent certaines responsabilités, mais à l'heure actuelle l'éducation n'en fait pas partie. Elle est du ressort provincial.

M. LeClair: Eh bien, il y a beaucoup de crédits fédéraux consacrés à l'éducation.

M. Finlay: Et qu'en dites-vous?

M. Sinclair: Pour commencer, je ne pense pas que les conseils municipaux aient grand-chose à voir dans nos vies. C'est en partie le problème. Les gouvernements se déchargent de ces problèmes sur les municipalités urbaines. Ils essaient même de transformer nos réserves, dans les territoires couverts par les traités, en municipalités. Ce n'est pas une bonne chose.

Encore une fois, je considère que nos droits s'étendent au-delà des limites des réserves. Si vous cherchez à confiner les gens dans un territoire où il n'y a même pas assez de place pour des maisons, qui est traversé par une ligne à haute tension et où il y a des maisons partout, il n'y a de place pour rien d'autre. Il n'y pas d'emplois. Les gens sont obligés de partir.

Vous demandez ce qui se passe lorsque quelqu'un quitte la réserve. Si vous quittez la réserve, vous êtes toujours couvert par un traité. Si vous-même quittez votre province, l'Ontario, pour vous installer en Saskatchewan, avez-vous moins de droits en Saskatchewan qu'en Ontario? Or, pour nous, c'est ce qui se passe. Aurons-nous moins de droits si nous quittons une réserve située à20 milles de Regina pour nous installer à Regina?

Je pense qu'il faut donner priorité à la notion que les Indiens conservent la propriété de ce territoire. C'est ce qui est dit dans les traités, et il faut reconnaître ces traités. Lorsque ces traités faisaient état d'une armoire à pharmacie, à cette époque ce n'était rien d'autre qu'un coffre, mais aujourd'hui c'est un programme de santé et vous ne vous êtes jamais concertés avec nous pour savoir comment distribuer ces soins de santé. Vous avez un programme de logement. Vous avez toutes ces choses, mais nous pouvons faire des choses pour nous-mêmes si l'on nous donne une part des ressources de ce pays, au lieu de nous faire l'aumône.

Je déteste voir que dans le Nord, il n'y a qu'un seul endroit où nous pouvons travailler, et c'est une mine d'uranium. Nous sommes contre l'uranium, mais si nous ne voulons pas y travailler, il n'y a pas d'autre emploi possible. Toutes ces ressources extraites dans le Nord vont remplir les gros coffres en France, à New York ou ailleurs. Cette richesse revient à Regina et nous revient sous forme d'un chèque d'assistance sociale. Cela leur permet de dire qu'ils s'occupent de nous, mais ces ressources proviennent de nos terres. Nous prenons tous les risques de l'extraction de l'uranium, mais nous n'en retirons aucun des avantages.

Les gens vont en Ontario, à Toronto, pour trouver une éducation. Où ailleurs voudriez-vous qu'ils aillent en quittant leur réserve surpeuplée? Pourquoi n'y a-t-il rien pour eux lorsqu'ils arrivent? Pourquoi aucune perspective ne leur est-elle offerte lorsqu'ils arrivent?

M. LeClair: Il y a, en un certain sens, une culture d'entreprise au Canada. Les municipalités sont responsables de telle chose, les provinces de telle autre, et le gouvernement fédéral d'autre chose encore. Ce n'est peut-être pas ainsi que cela devrait être, mais c'est la réalité.

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Lorsque vous vous adressez aux municipalités, aujourd'hui, en Ontario, municipalités qui ont dû réduire leurs dépenses à cause des coupures provinciales, pensez-vous qu'elles vont vous ouvrir une nouvelle enveloppe budgétaire? Elles ne vont pas le faire, car elles pensent que c'est la responsabilité du gouvernement fédéral... La raison pour laquelle la responsabilité a été confiée au gouvernement fédéral en premier lieu était que celui-ci disposait de davantage de ressources pour s'en occuper. En outre, le gouvernement fédéral était considéré comme le meilleur protecteur, comme le meilleur responsable fiduciaire, pour veiller à ce que les majorités locales ne piétinent pas les droits des Autochtones. C'était en 1867, mais le principe n'en demeure pas moins, à savoir que c'est le gouvernement fédéral qui est responsable.

C'est comme les bonnes oeuvres. Pourquoi les Canadiens ne donnent-ils pas davantage aux bonnes oeuvres? Eh bien, parce que le gouvernement... à cause de notre grand filet de sécurité sociale. Les gens attendent du gouvernement qu'il s'en occupe, et c'est pourquoi les sociétés privées ne donnent pas grand-chose. Chaque fois que vous vous adressez à elles en insistant un peu, elles demandent pourquoi nous ne nous adressons pas au gouvernement. C'est dû à la façon dont les choses sont organisées. On peut peut-être le déplorer, mais c'est ainsi.

M. Finlay: Ne vous méprenez pas, je suis pas mal d'accord avec ce que vous venez de dire. C'est la situation telle qu'elle existe. Il va falloir trouver des solutions dans ce cadre.

J'ai entendu l'un de vous dire que le problème est peut-être dû en partie aux préjugés ou au racisme. Je ne sais pas dans quelle mesure...

M. Sinclair: Oh, oui.

M. Finlay: ...cette bête immonde redresse la tête, mais...

M. Sinclair: Le racisme est très répandu au Canada. On ne peut simplement accuser le Parti réformiste de racisme. Il est partout. Les institutions sont racistes.

Je pense que lorsque les gens se montrent du doigt, ils feraient mieux de se regarder dans la glace auparavant. C'est une chose que de parler de racisme, et de faire des remarques racistes, c'en est une autre que de le pratiquer chaque jour dans vos institutions, comme cela se passe dans ce pays.

M. Finlay: Croyez-moi, ce n'est pas par un choix du gouvernement fédéral ni n'est toléré par le genre de lois que nous essayons de faire. C'est l'une des qualités de ce pays dont je suis le plus fier.

M. LeClair: Laissez-moi vous poser une question. Comment appelleriez-vous ceci: Gary est un Métis des Territoires du Nord-Ouest. Je suis un Métis de la Saskatchewan. Dans sa région il y avait un régime de colonisation des terres. Lorsque le Canada a colonisé l'Ouest, il y avait un système de certificats fonciers par lequel les Métis ont été spoliés de leurs terres. Cela s'est passé aussi bien dans les Territoires qu'en Saskatchewan.

Aujourd'hui, Gary négocie des revendications territoriales. Gary va être un bénéficiaire lorsque les revendications territoriales seront réglées. Ses droits seront protégés. Les miens ne le seront jamais. La limite magique est le 60e parallèle. Au nord du 60e - quelque chose de magique a eu lieu là-haut. Tout d'un coup, il peut faire valoir ses droits. Et moi, au sud du 60e, je ne peux pas. Est-ce du racisme? Est-ce de la discrimination, et si oui, sur quelle base?

Le président: N'ouvrons pas un débat, car nous débordons déjà de notre horaire, mais le fait est...

M. Sinclair: Je pense que nous sommes tous des politiciens autour de cette table. Personne ne peut y résister.

Le président: Nous avons chacun nos sujets favoris.

M. Bohnet: Ne tenez aucun compte de ce que dit Marc LeClair.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Je vais dire quelques mots pour vous laisser le mot de la fin, car je veux vous inviter à faire quelques remarques de clôture.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'être venus. Je tiens à vous dire que nous savons déjà que nous avons pris la bonne décision en nous engageant dans ce processus éducatif. Ce sera précieux pour nous et cela va nous aider à mieux faire notre travail, probablement mieux que jamais auparavant, car je sais que ce travail éducatif n'a jamais été entrepris auparavant pour nous, les politiciens, qui venons de partout.

Là-dessus, je vous invite à faire vos remarques de clôture.

M. Sinclair: Eh bien, il est agréable de vous avoir rencontré. Je pense que les questions qui ont été posées sont du type que nous aimons entendre, car je pense que les gens comprennent les problèmes beaucoup mieux qu'ils ne le prétendent.

Il faut certainement s'attaquer à ces problèmes et j'accepte votre parole lorsque vous dîtes que les membres de ce comité dissémineront l'information à travers leurs partis respectifs et jusqu'au gouvernement, pour tenter de faire bouger les choses.

Je ne veux pas donner l'impression que nous sommes ici pour mendier; c'est la dernière chose que nous voulons paraître faire. Mais je pense que lorsque nous parlons du Canada et de la réalité, il faut prendre l'économie comme elle est, prendre la situation financière comme elle est; il faut rechercher d'autres moyens. Il n'y a pas besoin de trouver de l'argent supplémentaire, il faut réorienter l'argent.

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Encore une fois, n'hésitez pas à prendre contact avec nous quand bon vous semble, pour passer en revue certaines des questions particulières que vous aimeriez aborder - que ce soit la jeunesse, ou que ce soit les conditions économiques ou la prestation de certains services - et nous pourrons vous faire un rapport.

Je préfère vous le faire à vous, qui pourrez en faire quelque chose immédiatement, au lieu que ce soit dans une étude qui va amasser la poussière sur une étagère. On économisera ainsi beaucoup d'argent et l'on pourra agir. Donner de l'argent pour une étude n'est qu'une autre façon de faire se tenir tranquilles les gens pendant une année de temps. Faisons plutôt quelque chose de concret. J'espère que vous le ferez.

Merci beaucoup de m'avoir invité à vous rencontrer. J'ai apprécié de rencontrer chacun de vous.

Le président: Merci beaucoup.

S'agissant des études, nous avons un dicton à Sudbury: lorsque vous engagez un consultant, il vous emprunte votre montre et ensuite vous dit l'heure qu'il est. Voilà ce que nous pensons. Voilà ce que je pense des consultants.

La séance est levée.

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