[Enregistrement électronique]
Le mardi 1er octobre 1996
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Aujourd'hui, nous étudions le projet de loi C-39, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de York Factory sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres. Nous étudions également le projet de loi C-40, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de Nelson House sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres.
Aujourd'hui, nos témoins sont du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien; il s'agit de Terry Henderson, directeur général, Direction de la mise en oeuvre des ententes relatives aux revendications, Sandy Jackson, gestionnaire, évaluation des répercussions de l'exploitation; et Kenningham Marchant, conseiller juridique.
Nous allons siéger sans formalités, car il s'agit plutôt d'une séance d'information. Vous nous apportez vos connaissances et votre expérience, une expérience directe, et nous allons vous écouter avec beaucoup d'intérêt.
Nous disposons d'une heure par projet de loi. Nous ne verrions aucun inconvénient à ce que la séance soit plus courte, mais nous voulons tout de même recueillir le plus d'informations possible.
M. Terry Henderson (directeur général, Direction de la mise en oeuvre des ententes relatives aux revendications, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Comme vous nous avez présentés, mes collègues et moi-même, je vais tout de suite passer aux courtes observations que j'ai préparées.
Comme les membres du comité le savent sans doute, le projet de loi C-39 doit servir à faciliter l'application de certaines dispositions de l'accord de règlement de la première nation de York Factory, un accord signé en janvier 1996. Cet accord de règlement porte sur tous les aspects de la convention de 1977 avec le Manitoba Northern Flood Committee tel qu'il s'applique à la première nation de York Factory. Il doit permettre aux quatre parties de mieux assumer leurs obligations respectives dans le cadre de la Convention sur la submersion des terres de 1977.
Plus précisément, le projet de loi C-39 n'est pas là pour mettre l'accord en vigueur. En effet, cela a déjà été fait lors de la signature par toutes les parties en décembre 1995 et janvier 1996. L'accord signé avec York Factory est déjà en vigueur et a force de loi, tout comme les accords comparables signés avec la première nation des Cris de Split Lake et la première nation de Nelson House. Le projet de loi C-39, et le projet de loi C-40 dont nous discuterons plus tard, lorsqu'ils seront en vigueur, serviront simplement à faciliter l'application de certaines dispositions de l'accord.
Plus précisément, les sommes versées dans le cadre de l'accord ne seront pas considérées comme des versements aux Indiens aux termes de la Loi sur les Indiens, mais seront administrées en fiducie au nom des membres de la première nation, conformément à certains termes de l'accord et à un acte de fiducie. Certaines terres qui, dans ce cas, doivent être cédées à la première nation de York Factory seront considérées comme des terres en fief simple, et non pas comme des terres de réserves aux termes de la Loi sur les Indiens. Troisièmement, les revendications dans le cadre de l'Accord sur la submersion des terres seront traitées conformément aux dispositions de l'Accord de règlement. Enfin, quatrièmement, le Canada peut se réclamer de la législation manitobaine en matière d'arbitrage en cas de conflit entre les parties lorsque l'accord prévoit le règlement par arbitrage.
Le projet de loi C-39 s'applique exclusivement à la première nation de York Factory, et le projet de loi C-40 s'applique exclusivement à la première nation de Nelson House. Ces dispositions ne s'appliquent à aucune autre première nation. L'énoncé de ces projets de loi est virtuellement identique à la Loi concernant la première nation Cris de Split Lake sur des questions découlant d'une Convention sur la submersion de terres, qui a été proclamée en décembre 1994.
Enfin, monsieur le président, à date, trois de ces accords ont été signés avec trois des premières nations relativement à des terres submergées. Des ententes similaires sont en cours de discussion et de négociation avec les deux autres premières nations, Norway House et Cross Lake.
Voilà qui termine mes observations d'ouverture, monsieur le président. Merci.
Le président: Est-ce que vos collègues ont quelque chose à ajouter?
Collègues, j'ai l'intention de diriger cette réunion sans trop de formalités, en souplesse.
M. Duncan (North Island - Powell River): Ma question échappe peut-être un peu aux paramètres des projets de loi C-39 et C-40, mais je crois qu'elle n'est pas sans rapport.
Quand nous avons adopté la loi en ce qui concerne Split Lake, j'avais cru comprendre que tous les accords suivants seraient virtuellement identiques. Autrement dit, vous venez de nous dire que l'énoncé des projets de loi C-39 et C-40 est pratiquement identique à celui de l'entente de Split Lake.
Est-ce que vous pourriez m'assurer que ce sera le cas également pour les deux accords qui restent? J'imagine que vous ne pouvez pas me l'assurer d'une façon absolue. En supposant que ce ne soit pas le cas, que le pire se produise, est-ce que cela exigerait des changements? Par exemple, si des modifications étaient apportées aux deux ententes suivantes, est-ce qu'il faudrait remanier les projets de loi C-39 et C-40?
M. Henderson: Le gouvernement est raisonnablement certain que les projets de loi C-39 et C-40, et la loi qui les a précédés, qui s'applique à Split Lake, suffiront pour exécuter les obligations prévues par les accords respectifs. Sans le moindre doute, le gouvernement a l'intention de déposer des projets de loi similaires, comme ceux que nous avons sous les yeux, dans le cas des deux autres premières nations.
D'autre part, il est certain que nous avons l'intention de consulter les premières nations concernées par ces projets de loi, mais en fin de compte, le ministre déposera les instruments les mieux adaptés aux besoins. À mon avis, ces projets de loi et leurs énoncés sont conformes aux accords existants et, selon toute probabilité, ils rempliraient les conditions dans le cas des premières nations de Norway House et de Cross Lake.
M. Duncan: Je vais poser la question d'un autre angle. Y a-t-il dans les projets de loi C-39 et C-40 des dispositions qui autoriseraient les premières nations à réouvrir l'accord?
M. Henderson: Je vais demander à notre conseiller juridique de répondre.
M. C. Kenningham Marchant (conseiller juridique, Étude Marchant): Non, je ne pense pas que ce soit possible. Les accords ont été rédigés délibérément dans un langage très simple pour régler toutes les questions d'application de la Loi sur la submersion des terres et contiennent un minimum d'exceptions définies, dont la principale porte sur les eaux et les égouts canadiens.
Cette disposition législative est un simple instrument d'application. Donc, je ne pense pas que ce soit le cas, pas du tout.
M. Hubbard (Miramichi): Monsieur le président, je suis nouveau venu au comité; pour me donner une idée de la population, combien y a-t-il d'habitants dans ces réserves?
Deuxièmement, est-ce que ces réserves ont formulé des revendications territoriales auprès du gouvernement, soit le Manitoba, soit le Canada? Quelles sont les sommes en cause? C'est un accord qui remonte à il y a très longtemps. Y a-t-il de l'argent en cause?
On a parlé de fiducies. Qui sera l'administrateur de ces fiducies? Est-ce que les autochtones de ces communautés acceptent la notion d'une fiducie?
M. Henderson: Nous allons essayer de répondre à vos questions dans l'ordre, monsieur Hubbard.
Sandy Jackson, avez-vous des chiffres en ce qui concerne la population de ces deux premières nations?
M. Marchant: Je crois qu'environ 3 000 personnes appartiennent à Nelson House et 1 200 à York Factory.
Mme Sandy Jackson (gestionnaire, Évaluation des répercussions de l'exploitation, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): C'est le total des membres, y compris ceux qui vivent hors réserve.
M. Marchant: C'est le total, y compris ceux qui vivent hors réserve. À Nelson House, je crois qu'environ les deux tiers vivent dans la réserve, peut-être 1 800 ou 1 900, et à York Factory, environ 700 personnes vivent dans la réserve. Ce sont des chiffres approximatifs.
M. Hubbard: Y a-t-il des revendications territoriales en souffrance?
M. Jackson: Dans le cas de Nelson House, ils font partie du groupe de revendication du Manitoba, qui, effectivement, a des revendications en souffrance.
M. Hubbard: Quant aux sommes en cause et au principe de la fiducie?
M. Marchant: Dans les deux accords, celui de York et celui de Nelson, et même dans l'accord des Cris de Split Lake, et également celui de Norway House qui est en cours de négociation, les arrangements fiduciaires sont similaires. Les avoirs sont confiés à une société de fiducie. Ils sont administrés en commun et le fiduciaire de la première nation est nommé ou élu par la première nation ou par son conseil. L'administration de la fiducie est entièrement confiée à la première nation, plus ou moins de la façon suivante; avant de pouvoir dépenser les fonds de la fiducie, il faut obtenir l'approbation de la communauté dans le cadre d'un processus donné. Cela comprend l'application de normes sur la façon d'expliquer à la communauté comment l'argent doit être dépensé, ainsi que des réunions communautaires pour en discuter, pour aboutir à une décision finale prise par le chef ou le conseil ou, dans certains cas, aux termes d'un vote dans la communauté.
Une fois cela fait, et si le fiduciaire de la société a pu s'assurer que les procédures voulues ont été suivies, que les déclarations exigées ont été faites, que les états financiers vérifiés ont été soumis, les fonds sont alors débloqués et le chef et le conseil, qui sont eux-mêmes fiduciaires, doivent s'assurer que les fonds sont bien dépensés conformément à ce qui a été déclaré et approuvé.
M. Hubbard: La façon dont les diverses premières nations utilisent leurs ressources pose un problème majeur dans le cas du tiers de la population qui vit hors réserve. Est-ce que cette loi éliminerait tout versement de la fiducie à cette population qui vit hors réserve?
M. Marchant: Non, monsieur, rien dans ce projet de loi ou dans l'accord n'empêche les membres hors réserve d'en profiter.
M. Hubbard: Autrement dit, seule la Loi sur les Indiens s'applique à la façon dont le chef et le conseil utilisent ces fonds.
M. Marchant: La Convention sur la submersion des terres vise expressément les conséquences de cette submersion pour les réserves. C'est une précision qu'on retrouve dans pratiquement tous les articles de la Convention sur la submersion des terres. Par conséquent, du point de vue pratique, cette disposition est destinée principalement à ceux qui vivent dans les réserves. Toutefois, quiconque vit hors réserve peut bénéficier de la fiducie et on ne fait pas de distinction entre diverses catégories de bénéficiaires, selon qu'ils vivent dans une réserve ou hors réserve. Un membre hors réserve peut invoquer des effets négatifs et soumettre une réclamation, exactement comme un membre qui vit dans la réserve.
Sur le plan pratique, le processus d'approbation par la communauté est axé sur la réserve et, par conséquent, je pense qu'on va effectivement accorder la priorité à ce qui se passe dans la réserve. Cela dit, il n'y a pas de restrictions ou d'exclusions en ce qui concerne les membres hors réserve.
M. Hubbard: Vous attendez-vous à ce qu'il y ait des problèmes avec le tiers des membres d'une première nation qui vit hors réserve; que vont-ils penser du gouvernement du Canada en ce qui concerne cette loi et la fiducie qu'elle établit? Vous attendez-vous à des problèmes comme on en a vus dans d'autres régions?
M. Marchant: Cette loi contient diverses dispositions, mais à mon avis, seules les dispositions relatives à des revendications peuvent mettre les membres d'une première nation en cause. D'après ce projet de loi, il est possible de déposer une revendication soit aux termes de la Convention sur la submersion des terres, soit aux termes de l'accord de règlement.
L'accord de règlement ne pénalise pas les membres hors réserve en ce qui concerne les revendications. À mon avis, ce projet de loi ne les désavantage donc en rien. J'ajoute qu'au moment de rédiger les dispositions de l'accord de règlement relatives aux revendications, on a pris grand soin de s'assurer que les dispositions relatives à la procédure présentaient les mêmes avantages aux revendicateurs que la Loi sur la submersion des terres, et cela, qu'ils vivent dans une réserve ou hors réserve.
M. Hubbard: Monsieur le président, j'ai encore une question. À propos de la notion de propriété, vous parlez de fief simple. Certaines dispositions existent en ce qui concerne la vente ou la cession de terres autochtones ou de terres des premières nations et... Est-ce que cette notion de fief simple vient modifier cet état de chose?
M. Marchant: L'article 36 de la Loi sur les Indiens prévoit que toute terre détenue à l'intention ou à l'avantage des Indiens ou encore en fiducie, pour les Indiens, et détenue par une entité autre que Sa Majesté, peut être considérée comme une réserve spéciale.
On pourrait donc avoir une parcelle de terre considérée techniquement comme étant un fief simple, mais si elle était détenue en fiducie par une entité autre que la Couronne fédérale, quelqu'un pourrait prétendre qu'il s'agit d'une terre de réserve.
La province est prête à céder certaines parcelles de terre pour les règlements dans le cadre de la Loi sur la submersion des terres, sans que ces terres soient considérées comme des réserves. C'est donc une exigence... La province ne veut pas transférer ces terres au fédéral, et dans certains cas, ce sont les premières nations qui se sont réclamées de cette disposition parce qu'elles préfèrent un fief simple, et parce que cela leur permet de les développer sur le plan commercial, etc.
Tout cela se fait aux termes d'accords. L'article que vous avez sous les yeux précise que ces terres destinées à devenir des fiefs simples ne doivent pas être transformées en réserves aux termes de la loi sur les Indiens, ce qui serait contraire aux intentions de tout le monde.
M. Henderson: Je précise, si vous le permettez, que la plupart des terres dont il est question dans la convention doivent devenir des terres de réserve. Seules quelques petites parcelles seraient considérées comme des fiefs simples.
Le président: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Finlay.
M. Finlay (Oxford): Monsieur le président, nous devons entendre d'autres témoins jeudi. Si on proposait des amendements aux projets de loi C-39 et C-40 est-ce que cela aurait une incidence sur les revendications territoriales et leurs règlements?
M. Henderson: Cela dépendrait probablement de la nature de l'amendement. S'il s'agissait simplement d'une précision dans le projet de loi, cela n'aurait pas de répercussions légales. Mais le conseiller juridique pourrait probablement répondre à cette question mieux que moi.
Le président: C'est peut-être une question qu'on ne devrait pas poser, mais nous voulons faire justice à tous les projets de loi qui nous sont soumis, et je vais donc vous la poser.
Nous avons invité quatre témoins, deux groupes de deux, qui doivent comparaître jeudi. L'un d'entre eux est le chef Jerry Primrose et un de ses collègues de la première nation de Nelson House. L'autre est le chef Eric Saunders de la première nation de York Factory.
Vous vous êtes occupé de ce projet de loi, vous avez eu l'occasion d'en parler à certaines personnes; pensez-vous que d'autres témoins devraient être convoqués, des gens qui pourraient nous donner des informations cruciales?
Si vous avez des idées à ce sujet, vous pourriez nous les suggérer, peut-être dans le corridor, mais nous voulons faire cette étude sérieusement. Nous aimerions aller le plus vite possible, mais sans pour autant être injustes pour les participants.
M. Henderson: Je ne pense pas que d'autres témoins aient des informations cruciales à vous donner au sujet de ces projets de loi. Les autres premières nations, celles de Norway House et celle de Cross Lake, s'y intéressent, mais elles ont été consultées au printemps et elles ont reçu des exemplaires du projet de loi à cette occasion. Nous ne pensons pas que cela leur pose un problème.
Le président: Vous qui avez discuté avec ces premières nations, pensez-vous qu'il y ait des amendements?
M. Henderson: Nous croyons savoir que la première nation de York Factory a l'intention de demander des amendements au projet de loi. Pendant les consultations en avril, il avait été question de certains changements à l'ébauche de projet de loi.
Le ministère de la Justice les a étudiés et a donné son opinion au conseiller juridique des premières nations. Nous avons conclu que ces changements ne se justifiaient pas sur le plan juridique. En fait, cela n'ajoutait rien sur le plan juridique. Depuis lors, et depuis le dépôt du projet de loi à la Chambre, leur conseiller juridique n'a pas communiqué avec nous. Cela dit, il semblerait qu'ils ont maintenant l'intention de demander des amendements au projet de loi.
Le président: S'il y a dans l'auditoire des gens qui écoutent au nom de témoins futurs, nous accueillons les amendements avec plaisir, mais si on nous prévient d'avance, cela nous facilite beaucoup les choses car nous pouvons faire des recherches.
J'ajoute que notre comité tient à rester très ouvert. Si nous connaissons les desiderata d'avance, nous pouvons travailler beaucoup plus efficacement que si on nous réserve des surprises au moment de l'étude article par article. C'est tout ce que j'avais à dire.
M. Henderson: Je crois que M. Harper a reçu une lettre du chef de la première nation de York Factory. Je ne sais pas s'il vous l'a communiquée, monsieur le président.
Le président: Non, j'ai reçu deux lettres de lui, mais pas de réponse. Vous voulez dire que cette lettre pourrait contenir des amendements?
M. Henderson: Nous essayons actuellement de déterminer si la première nation souhaite faire des propositions d'amendement.
Le président: D'accord.
M. Henderson: Pour l'instant nous continuons à penser qu'il n'est pas nécessaire d'apporter un amendement, mais il faudrait d'abord que nous voyions ce qu'ils ont à proposer.
Le président: D'accord. À l'intention des membres du comité, je vais m'informer et je vous tiendrai au courant; si c'est possible, j'essaierai de vous dire à quoi nous pouvons nous attendre avant la réunion de jeudi. Sinon, nous passerons à l'étude article par article et, si un amendement arrive, nous recommencerons. Si c'est inévitable, nous le ferons, mais il vaudrait beaucoup mieux que nous puissions nous préparer d'avance à étudier des amendements.
M. Duncan: Toutes ces négociations prennent beaucoup de temps et d'argent. Vues de l'extérieur, les modalités de ces négociations sont difficiles à comprendre; je me demande si vous pouvez nous expliquer un peu comment nous nous retrouvons avec des accords dont l'énoncé est très similaire, mais qui prévoient des formules de compensation différentes. Faut-il en déduire que toutes les discussions de fond lors de ces négociations portent sur les formules de compensation? Dans ces négociations, est-ce que le plus souvent l'énoncé de l'accord est pris pour acquis, ou bien est-ce qu'on se retrouve tout simplement avec le même énoncé? Voila ce que je veux savoir.
M. Henderson: Je vais demander à Mme Jackson, qui a participé activement aux négociations, de vous répondre.
Mme Jackson: Nous partons d'un principe fondamental; le Cabinet nous a confié un mandat de négociation qui sert de base à nos discussions avec chacune des premières nations.
Chacune des cinq premières nations a des caractéristiques uniques. L'impact du projet dans chacune des communautés est différent à cause de leur situation géographique qui est différente; d'autre part, elles sont situées à différents points du bassin hydrographique au Manitoba. Les dispositions uniques prises dans le cas de chaque communauté font l'objet de négociations détaillées et aboutissent à l'élaboration de mécanismes pour l'application des obligations dans le cadre de la Loi sur la submersion des terres.
M. Duncan: Par conséquent, ce n'est pas seulement la nature de la compensation qui prend du temps à définir, il faut également discuter des mécanismes d'application.
Mme Jackson: Oui.
M. Duncan: Peut-on dire que la première négociation a été la plus longue parce que c'est là qu'on a élaboré un énoncé qui a été repris par la suite?
Mme Jackson: Non, je ne pense pas, car comme je l'ai dit, chacune des communautés est différente. Elles ont des préoccupations différentes, et bien que les accords aient un énoncé assez similaire en fin de compte, il y a beaucoup d'autres questions à régler.
Pendant les négociations, un processus de consultation se déroule dans la communauté, et nous voulons nous assurer que les membres de la communauté sont au courant des discussions et des mécanismes élaborés pour appliquer et exécuter les obligations dans le cadre de la Loi sur la submersion des terres. Un travail considérable se fait donc au niveau de la communauté et on s'assure que les gens comprennent bien les termes qu'ils approuvent.
M. Duncan: Est-ce que les négociateurs de la province et ceux de Manitoba Hydro sont restés les mêmes pendant tout l'exercice?
Mme Jackson: Oui. La seule exception est l'équipe de négociation des premières nations dont les membres ont changé. Nous avons fait face à une équipe de négociation différente pour chacune des premières nations. Celles de Nelson House et de York avaient le même conseiller juridique, mais les négociateurs venaient de la communauté.
Le président: Monsieur Hubbard.
M. Hubbard: Est-ce que les communautés ont reçu une compensation annuelle au cours des années, à cause de la submersion des terres?
Mme Jackson: Non, depuis la signature de la convention en 1977, pratiquement aucune compensation n'a été versée aux premières nations. C'est une des principales raisons qui nous ont poussés à entrer dans des négociations globales. En effet, nous avions besoin d'un mécanisme pour remplir nos obligations envers les premières nations, et cela dans des termes qui puissent canaliser les versements de compensation vers la communauté.
M. Hubbard: Vous voulez nous dire que depuis près de 20 ans, en dépit de la Convention sur la submersion des terres, ni Manitoba Hydro ni la province du Manitoba n'ont véritablement versé de compensation?
Mme Jackson: Pratiquement aucune compensation n'a été versée aux Premières nations.
M. Hubbard: J'imagine que lorsqu'elles comparaîtront elles nous feront part de leurs préoccupations et de leur mécontentement face aux événements de cette période. C'est bien ce que vous pensez?
M. Henderson: Elles vous parleront peut-être de leur mécontentement passé, mais je crois que toutes les parties comprennent qu'en négociant les accords d'application - sur la base d'un projet de règlement convenu entre les parties en 1990 - on tente précisément de remplir des obligations qui, jusqu'à présent, n'ont pas été remplies. Cela dit, cela ne fait aucun doute, les parties ont été lésées en ce qui concerne l'application de la convention de 1977.
M. Hubbard: Par conséquent, nous, c'est-à-dire le gouvernement du Canada, n'avons pas fait grand chose pour protéger les communautés en cause.
Mme Jackson: Aux termes de la Convention sur la submersion des terres le Canada a des obligations, le Manitoba a des obligations et Hydro Manitoba a des obligations, mais il y a également des obligations partagées. Dans l'ensemble, le Canada a essayé de remplir ses obligations propres dans la mesure du possible. C'est lorsqu'on en vient aux obligations partagées que les choses deviennent difficiles. Depuis 1977, le Canada s'est acquitté de la plupart de ses obligations aux termes de la convention.
M. Hubbard: C'est une notion que je comprends mal. Voilà des gens dont les terres ont été inondées, des gens à qui on a enlevé leurs terres, et pourtant, la solution du problème s'éternise. J'ai du mal à croire que nous ne méritons pas des critiques, mais je m'en tiendrai à cette observation.
C'est une chose que j'ai déjà vue dans ma propre province, au Nouveau-Brunswick, lorsque des terrains ont été inondés à cause de la construction de barrages hydroélectriques. C'est une chose que nous avons vue dans tout le pays et quand on considère ces situations, on se demande si nos communautés autochtones sont suffisamment respectées. J'espère que cette mesure constituera une amorce de solution. Merci, monsieur le président.
Le président: Je suis certain qu'il y a eu beaucoup de situations de ce genre, mais notre comité doit concentrer son attention sur ses projets de loi et sur son rôle propre. J'ai beaucoup apprécié votre question qui nous enseigne que si l'on s'attarde trop sur le passé, on risque d'attendre longtemps une solution au problème.
M. Henderson: Permettez-moi d'ajouter, au sujet de l'accord d'application pour Split Lake, le premier des accords avec les cinq Premières nations, qui a été signé en juin 1992, que les quatre parties ont bien travaillé et réussi à s'acquitter des obligations les plus compréhensibles de cet accord d'application. Il y a eu très peu de problèmes. Des problèmes d'application et de réalisation se posent parfois, mais les parties cherchent toujours une solution d'une façon très responsable et très ouverte. Si vous parlez à des membres de la Première nation de Split Lake, ils vous diront probablement qu'ils se sont sentis lésés par le passé, mais qu'aujourd'hui ils sont satisfaits de la façon dont les parties collaborent pour s'acquitter de leurs obligations respectives.
Le président: Je tiens à remercier nos témoins pour leur intervention et pour être venus de si loin. J'espère que vous profiterez de votre visite à Ottawa - mais ce n'est pas la première fois que vous venez. Merci beaucoup.
Membres du comité, comme d'habitude, j'ai un autre programme à proposer. Mardi, nous devons recevoir deux groupes de témoins; si vous êtes d'accord, nous pourrions demander au greffier de préparer les documents nécessaires à l'étude article par article, ce qui nous permettrait de commencer à 13 heures, si cela s'avère possible, s'il n'y a pas de problèmes. Si après avoir écouté les exposés nous décidons que nous avons besoin de plus d'information ou de discussion, nous organiserons une séance pour la semaine prochaine.
Vous êtes d'accord pour que nous tentions de terminer jeudi si rien ne nous en empêche? Vous êtes d'accord pour que nous prévoyions l'étude article par article jeudi à 13 heures, ou même plus tôt si les témoins ont terminé? Tout le monde est d'accord? Si jeudi nous décidons que nous avons besoin de plus de temps pour faire des recherches et discuter, nous le ferons la semaine prochaine. Nous sommes d'accord?
Membres du comité, j'ai reçu un avis de motion du Parti réformiste. Je ne l'ai pas accepté tout de suite, mais maintenant j'ai décidé d'accepter la motion qui sera déposée au cours d'une réunion. C'est le comité directeur qui décidera du moment opportun. Vous pouvez donc vous attendre à en discuter, soit avant la séance de jeudi, soit après, ou bien encore la semaine prochaine. D'accord?
M. Duncan: Est-ce que ce sera avant ou après la séance de jeudi?
Le président: Si le comité directeur décide de recommander une réunion à 10 h 30 jeudi matin, j'accéderai à cette demande, mais il se peut également que le comité directeur décide que non, que c'est trop important pour en discuter en une demi-heure, et qu'il est préférable de se réunir la semaine prochaine. Là encore, je n'y vois pas d'inconvénient. J'essaie d'avancer le plus vite possible, vous verrez que c'est dans ma nature, je pousse beaucoup, mais en même temps je tiens à être juste. Je ne veux pas avoir des réunions pour le plaisir de se réunir, je pousse pour que le travail avance, et si je pousse trop fort, n'hésitez pas à me le dire, je ralentirai.
M. Duncan: Cela ne me gêne pas, je voulais seulement savoir.
Le président: Vous comprenez, monsieur Duncan, cet avis de motion doit être étudié au cours d'une réunion prévue à cet effet. Nous ne pouvons pas nous pencher sur cet avis de motion pendant une réunion qui doit être publique ou qui était prévue pour discuter de ce projet de loi.
M. Duncan: Dans ce cas, pouvez-vous me dire quand le comité directeur doit se réunir pour en décider?
Le président: Dès que nous pourrons parler aux députés du Bloc. Je crois que M. Bachand veut assister à cette discussion car il était là au début. Dès que les membres du comité directeur pourront se réunir... Nous pouvons régler cela en trois minutes avant la période de questions. Il s'agit seulement de décider à quel moment nous pourrons discuter de cet avis de motion. J'ai déjà décidé d'accepter cet avis de motion.
M. Duncan: Est-ce qu'il va falloir encore une fois constituer officiellement le comité directeur?
Le président: Nous ne l'avons pas fait.
M. Duncan: Non, nous ne l'avons pas fait.
Le président: Je crois comprendre que le comité directeur est constitué de trois députés de la majorité et d'un député de chacun des partis d'opposition. Est-ce qu'il ne s'agit pas du président, du vice-président et du secrétaire parlementaire puis d'une personne désignée par chacun d'entre vous? Ces personnes ne sont pas nommées par le comité, mais par les partis. Reprenez-moi si je me trompe.
M. Duncan: Je ne me souviens pas comment nous avons procédé la dernière fois.
Le président: Je ne me souviens pas d'avoir élu des députés pour siéger au comité directeur.
M. Duncan: Nous avions procédé à l'amiable, n'est-ce pas?
Le président: Oui. Vous devez donc décider qui va vous représenter et, de leur côté les membres du Bloc vont décider également.
M. Duncan: Est-ce que vous essayez d'organiser un comité directeur? Je pensais que je pourrais être le représentant du Parti réformiste pour cette session et, apparemment, c'est M. Bachand qui représentera le Bloc.
[Français]
Le président: Monsieur Dumas, savez-vous si M. Bachand est à Ottawa?
M. Dumas (Argenteuil - Papineau): Non, il n'est pas ici aujourd'hui.
[Traduction]
Le président: M. Bachand n'est pas là aujourd'hui.
[Français]
Est-ce que vous savez quand il sera ici?
M. Dumas: Probablement demain ou mercredi.
Le président: Demain ou mercredi.
[Traduction]
Sous réserve de changements, je veux bien convoquer une réunion pour 13 h 45 demain dans le foyer - non pas dans le lobby, mais dans le foyer - avant la période de questions.
M. Duncan: Pas dans le lobby, dans le foyer.
Le président: Je ne sais pas si c'est ainsi qu'on l'appelle, c'est la pièce où on entre avant de passer dans l'un ou l'autre lobby. Comment est-ce que ça s'appelle? Le foyer. Tout le monde sait de quoi je parle.
M. Duncan: Après avoir passé les gardes de sécurité, mais en dehors de la Chambre.
Le président: Exactement.
Parfait. Donc demain à 13 h 45. Je vais convoquer les gens par téléphone, ou encore quelqu'un dans mon bureau le fera et nous confirmerons.
M. Duncan: Merci beaucoup.
Le président: Monsieur Finlay, est-ce que vous serez libre demain à 13 h 45?
M. Finlay: Pour autant que je sache, monsieur le président.
Le président: Monsieur Patry? Monsieur Duncan? Il nous reste à demander à M. Bachand s'il est libre.
Y a-t-il d'autres affaires du club à soulever? La séance est levée.