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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 26 septembre 1996

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[Traduction]

Le président: Bonjour à tous. Nous allons reprendre l'examen du projet de loi C-5, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de l'impôt sur le revenu.

Ce matin, nous accueillons des témoins de l'Institut canadien des compagnies immobilières publiques. Bienvenue, messieurs. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris de votre temps pour venir nous aider à examiner ce texte de loi. Nous aimerions que vous présentiez une déclaration préliminaire, puis que vous laissiez beaucoup de temps à nos collègues pour qu'ils vous posent des questions. Nous avons constaté que tous les témoignages des dernières semaines ont suscité beaucoup d'intérêt et qu'il y a de nombreux points dont on veut discuter.

L'un d'entre vous pourrait peut-être commencer et se présenter ainsi que ses collègues.

M. Lorne Braithwaite (président, Institut canadien des compagnies immobilières publiques): Je m'appelle Lorne Braithwaite et je suis président de l'Institut canadien des compagnies immobilières publiques. Je suis également président-directeur général d'une compagnie immobilière publique pancanadienne, qui s'appelle Cambridge Shopping Centres. Canada. Si certains d'entre vous sont allés magasiner à Bayshore, il se trouve que c'est notre projet.

Avant de parler brièvement de l'institut, j'aimerais vous présenter Ron Daniel, directeur exécutif de l'institut, qui dirige notre association commerciale, et Terry Dolan, qui travaille avec nous et nous a aidé à préparer notre mémoire et à communiquer avec vous.

L'institut représente un actif d'environ 50 milliards de dollars au Canada et compte une trentaine de membres. Nous représentons l'industrie de l'immobilier commercial, ce qui comprend des bureaux, des commerces, de l'immobilier résidentiel et industriel. Les actifs de la plupart de nos membres se trouvent au Canada bien que certains aient aussi des actifs aux États-Unis. Voilà un bref aperçu du travail de l'institut. Je laisserai Ron et Terry prendre la suite.

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M. Terence M. Dolan (membre, Institut canadien des compagnies immobilières publiques): L'institut comparaît ici aujourd'hui pour parler principalement des dispositions de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, qui traitent de la résiliation d'un bail et en particulier pour mettre l'accent sur les modifications proposées à cet article. Il s'agit de l'article 42 du projet de loi qui modifie l'article 65.2. Je suppose que vous avez eu l'occasion de jeter un coup d'oeil à notre mémoire. Je reprendrai pour vous les grandes lignes de notre mémoire, qui n'est d'ailleurs pas très long.

Le comité qui a examiné les dispositions actuelles de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité a convenu qu'une révision et une réforme de ces dispositions s'imposaient.

La loi actuelle accorde à un locataire commercial insolvable le droit de résilier son bail immobilier. Il est tenu de payer six mois de loyer et le locateur n'a ni le droit de voter, ni celui de produire une réclamation ou de réclamer un montant différent. C'est donc un système très simple mais très arbitraire. L'expérience que nous avons eue des deux côtés nous a permis de conclure que le montant équivalent à six mois de loyer était soit trop important, soit insuffisant.

Il existe certains cas fameux, dont fait état le mémoire, où des locataires insolvables ont résilié des baux importants. Ils ont remboursé à environ 99 p. 100 leurs autres créanciers commerciaux mais leurs locateurs, dont l'un avait construit un immeuble expressément pour le locataire, ont subi des dommages importants. C'était manifestement injuste.

Dans bien des cas, les locataires, surtout s'il s'agissait d'une grande chaîne de magasins de détail, trouvaient qu'il était trop cher de payer six mois de loyer lorsqu'ils devaient résilier de nombreux baux. Il leur était impossible de se prévaloir de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et ils devaient donc invoquer l'autre loi, dont vous avez sûrement entendu parler, c'est-à-dire la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, pour procéder au réaménagement de leur dette.

Les grosses compagnies comme Dylex et Dalmy's plus récemment et un certain nombre d'autres ont invoqué la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies plutôt que la Loi sur la faillite pour réaménager leur dette. Dans pratiquement tous ces cas, ce réaménagement consistait en majeure partie à se débarrasser de baux peu rentables.

En vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers de compagnies ou LACC, le locataire détermine le montant qu'il peut se permettre d'offrir aux locateurs dont il veut résilier les baux. Il présente une proposition. Les locateurs ont le droit de voter sur cette proposition et de produire une réclamation, soit dans leur propre catégorie, si le traitement réservé est différent, soit dans la même catégorie que les créanciers non garantis dont les réclamations reçoivent le même traitement que la réclamation des locateurs. Les parties négocient. Nous avons constaté que dans la plupart des réaménagements de dette importants, un accord est conclu et le réaménagement a lieu.

Les modifications proposées visent trois objectifs. Elles visent en fait à rendre les dispositions de la LFI plus conformes au régime qui existe et continuera d'exister en vertu de la LACC, en conférant au locateur le droit de produire une réclamation soit pour les dommages réels qu'il a subis par suite de la résiliation, soit pour le montant statutaire. C'est le locataire - et je crois que cela est assez important - qui choisit l'offre qu'il présentera dans sa proposition.

Une fois cette proposition faite, le locateur peut produire une réclamation et voter. Elle est établie en fonction des dommages réels ou du montant statutaire, selon la catégorie appropriée. Le locateur peut également demander au tribunal de déterminer si la résiliation du bail est nécessaire pour faire une proposition viable. Comme dans le cas du régime prévu par la LACC, il demeure possible de faire appel au tribunal pour obtenir des instructions permanentes tout au long du processus.

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Par conséquent, les modifications proposées dans notre mémoire aux dispositions sur la résiliation d'un bail visent à simplifier délibérément les dispositions de la LFI et à mieux les rationaliser, afin que la LFI offre cette option en matière de réaménagement mais incorpore l'équilibre et l'équité assurés au prix de nombreux efforts au fil des ans dans le cadre de l'application de la LACC.

L'institut est tout à fait en faveur des modifications proposées, c'est le moins qu'on puisse dire. Il y a longtemps que les membres de l'institut tiennent à ce que certaines modifications soient apportées à la LFI pour rectifier ce déséquilibre et éviter les abus dont ils ont été victimes.

Nous indiquons dans notre mémoire que l'on pourrait grandement améliorer le libellé de ces dispositions pour les rendre plus simples et plus claires. Nous avons eu l'occasion de discuter avec certains membres de l'Institut d'insolvabilité - dont je fais d'ailleurs partie - et avons manifesté notre appui sans réserve à la révision proposée par l'Institut d'insolvabilité dans le mémoire qui vous a été remis. Je crois que vous avez entendu les témoignages de leurs représentants la semaine dernière.

Nous avons joint à notre mémoire la version révisée des dispositions relatives à la résiliation d'un bail, proposée par l'Institut d'insolvabilité. Les membres de l'ICCIP appuient ce libellé et considèrent qu'il est entièrement conforme aux principes généraux que j'ai exposés mais les exprime d'une manière beaucoup plus claire et facile à comprendre, sans réglementer la question à outrance, ni ajouter de redondances, comme c'est le cas avec les dispositions du projet de loi actuel. Nous appuyons donc le fond de ces dispositions mais trouvons que l'autre libellé proposé est préférable.

Là où notre institut n'est pas d'accord, bien sûr avec le plus grand respect, avec l'Institut de l'insolvabilité, c'est lorsqu'il propose de supprimer le droit du locateur de demander au tribunal de déterminer si la résiliation d'un bail est nécessaire pour qu'une proposition soit viable. Nous tenons à bien faire comprendre qu'il s'agit, pour nous, d'un élément essentiel de la loi.

Si vous examinez cette disposition, il s'agit à ma connaissance - votre conseiller juridique pourra peut-être vous en trouver d'autres exemples - de l'unique disposition du droit canadien qui accorde à une partie à un contrat le droit de résilier ce contrat en vertu de la loi. Bien sûr, n'importe qui peut résilier un contrat mais à ma connaissance il n'existe aucune loi vous autorisant à ne pas respecter un contrat.

Un syndic de faillite a bien entendu depuis longtemps le droit de liquider, un à un, les actifs d'une entreprise, en vertu de la loi et de prendre tous les autres moyens nécessaires pour faire son travail. Ce syndic est donc appelé à résilier des contrats et c'est un droit que lui confère la loi.

Lorsqu'un locataire désireux de réaménager sa dette veut résilier un contrat, il peut poursuivre ses activités. Le président et l'ensemble de la direction continueront de faire leur travail. La compagnie continuera d'exister mais sera libérée de son contrat.

Par conséquent, le fait d'accorder, en vertu de la loi, le droit de résilier un contrat est une ingérence fondamentale.

Nous ne voulons pas nécessairement que cette ingérence soit supprimée de la loi mais nous considérons que par souci d'équité et surtout d'apparence d'équité, il est essentiel d'accorder le droit de recourir aux tribunaux.

J'ignore combien de fois ce droit sera invoqué ou sera efficace. Pour ma part, je pense qu'il sera difficile de persuader un juge que des résiliations de bail, dans les types de cas dont je viens de parler, ne sont pas nécessaires pour rendre une proposition viable. Il n'en reste pas moins que ce droit devrait exister.

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Ce droit devrait exister parce qu'il donne aux milieux d'affaires canadiens ainsi qu'aux prêteurs et investisseurs étrangers l'assurance que nous avons un régime harmonieux et équilibré. Les procédures prévues par le Chapitre 11 aux États-Unis, dont vous avez sûrement entendu parler à l'occasion de ces audiences sinon ailleurs, sont considérées parmi les dispositions législatives du monde les plus sympathiques envers les débiteurs, puisqu'elles leur confèrent le droit de résilier des baux ou d'autres contrats non réalisés, sous réserve de l'approbation des tribunaux. L'approbation des tribunaux est donc nécessaire. Les locateurs veulent conserver le droit de faire appel aux tribunaux et de soumettre la question à un juge.

Voilà donc l'appui et les commentaires que nous avons reçus à propos des dispositions sur la résiliation d'un bail. Nous estimons que ces dispositions sont essentielles mais que leur libellé peut être amélioré. Nous jugeons par ailleurs essentiel de conserver le droit de faire appel aux tribunaux.

Si nous passons brièvement aux dispositions de la LACC, l'institut a considéré important d'accorder son appui aux réformes procédurales qui sont prévues et surtout de signaler que les dispositions qui seraient ajoutées à la LACC pour prévoir l'obligation de payer au fur et à mesure, essentiellement de payer les dépenses postérieures au dépôt, incluant plus précisément le loyer en cours, sont très importantes pour les locateurs. Cela est déjà prévu par la LFI. Il s'agit simplement ici encore d'incorporer la réforme procédurale à la LACC en prenant les éléments positifs de la LFI, tout comme pour la résiliation des baux, nous avons pris les éléments positifs de la LACC, c'est-à-dire la souplesse, pour les incorporer à la LFI. À mon avis, cela permettra une meilleure concordance des deux régimes de réaménagement. C'est une simple question de bon sens.

Enfin, l'ICCIP considère important de poursuivre cette étude afin de parfaire ces deux régimes de réaménagement de manière à ce qu'ils finissent par s'harmoniser encore plus qu'ils ne le seront une fois ces modifications adoptées. Le traitement des actionnaires dans le cadre d'un réaménagement de la dette est l'une des questions que nous avons abordées et qui mérite une étude plus approfondie. Nous ne prétendons pas avoir les solutions. C'est une question très complexe qu'il faut néanmoins ajouter à la liste.

Enfin, nous envisageons la fusion éventuelle de ces dispositions en un seul texte de loi, avec un régime différent. Il existe peut-être des raisons qui m'échappent de les conserver dans des lois distinctes. Quoiqu'il en soit, l'important est de poursuivre nos efforts pour concilier les intérêts de toutes les parties et c'est une initiative que l'ICCIP appuie.

Le président: Je vous remercie beaucoup de nous avoir exposé votre position.

Monsieur Lastewka.

M. Lastewka (St. Catharines): J'aurais simplement quelques questions. Je tiens à m'assurer d'avoir bien compris. Vous avez indiqué qu'il y avait de nombreux autres points que vous vouliez voir inclus parce qu'ils permettraient de simplifier et de préciser les choses et que vous les aviez envoyés à... Je ne suis pas sûr à qui.

M. Dolan: Oui. Cela se trouve à l'annexe A du mémoire présenté par notre institut. Il s'agit simplement d'une copie de la proposition faite par l'Institut d'insolvabilité. Nous avons discuté avec les membres de l'Institut d'insolvabilité qui s'en sont occupés. Le mérite revient surtout à David Baird et à certains autres membres. Nous appuyons cette proposition qui exprime en termes plus clairs ces principes.

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M. Lastewka: Je vous remercie. Je cède la parole à M. Milliken.

M. Milliken (Kingston et les Îles): D'après ce que je crois comprendre, vous voulez que les dispositions concernant le droit de faire appel aux tribunaux en cas de résiliation, le droit du locateur d'obtenir réparation en cas de résiliation d'un bail et le droit du locateur de contester la résiliation du bail en fonction de conditions limitées, continuent à faire partie de la loi.

D'après ce que je crois comprendre, elles continuent à faire partie de la loi. Le projet de loi C-5 ne les supprime pas. Parce que l'institut a recommandé qu'elles soient éliminées, vous soutenez la position contraire mais en fait ces dispositions figurent dans le projet de loi.

Est-ce exact?

M. Dolan: Non. Je ne me suis pas bien expliqué.

Aujourd'hui, les dispositions relatives à la résiliation d'un bail, qui n'accordent pas le droit de voter ni le droit de produire une réclamation, prévoient le droit de contester cette résiliation devant les tribunaux. Il s'agit simplement d'un autre moyen de mettre en doute la nécessité de la résiliation. Les modifications proposées par le projet de loi C-5 maintiennent ces dispositions. C'est très bien et nous appuyons cette initiative.

Ce que je prévois, c'est que mes estimés collègues de l'Institut d'insolvabilité, qu'il faut écouter avec beaucoup d'attention et de respect...

M. Milliken: Font fausse route.

M. Dolan: ...font fausse route.

Je suis d'accord avec le nouveau libellé qu'ils proposent. Je le trouve excellent. Mais je crois qu'ils sont allés trop loin en proposant d'éliminer le recours aux tribunaux sous prétexte que le libellé de ces dispositions a été amélioré. J'estime que c'est un élément utile, qui assure un certain équilibre, et qu'il faut le conserver.

Le président: Donc, comme nous, ils font la fine bouche.

M. Dolan: C'est exact. Je suppose que l'une des fonctions du comité est de retenir les meilleures propositions.

M. Milliken: Pourrais-je poser une autre question? Si un locataire décide de mettre fin à son bail et invoque le droit qui lui est conféré par la loi pour le faire, si le locataire est en fait un sous-locataire et qu'il y a un locateur intermédiaire, cela crée-t-il un problème pour ce locateur intermédiaire en ce qui concerne le bail principal?

Autrement dit, supposons que le locateur intermédiaire était en fait un ancien exploitant de l'entreprise. Il a vendu l'entreprise mais n'a pas transféré le bail, préférant plutôt accorder un sous-bail. Il a assumé le bail et s'est donc trouvé à perdre un peu d'argent dans le cadre de la transaction. À votre avis, cela crée-t-il un problème qui permettrait à ce locateur de mettre alors fin à son bail avec le locateur principal?

M. Dolan: Je ne vois pas de problème en particulier. Ce serait de toute évidence une situation difficile pour le sous-locateur, c'est-à-dire le locateur intermédiaire, si son sous-locataire éprouvait des difficultés financières et voulait résilier le bail.

M. Milliken: Vous assumez le bail.

M. Dolan: Vous assumez le bail et le seul droit qui permet de contester cette résiliation, si le sous-locataire présente une proposition en vertu de la LFI, consiste à faire appel aux tribunaux et à indiquer qu'il n'est pas nécessaire pour le sous-locataire de résilier le bail pour faire une proposition viable.

C'est un argument assez mince. Cela ne règle pas les maux de tête du locateur intermédiaire, qui n'est peut-être pas insolvable et qui ne veut peut-être pas se lancer dans une restructuration. Il n'a qu'à accepter la situation.

M. Braithwaite et d'autres locateurs - oublions le locateur intermédiaire - en ont beaucoup enduré pour garder leurs propriétés et ils trouvent, en ces temps économiques difficiles, qu'un grand nombre de petits et de gros locataires quittent les locaux et abandonnent leurs baux d'une manière ou d'une autre.

L'ICCIP veut signaler que nous reconnaissons qu'il s'agit d'une situation difficile. Nous devons chercher une solution et nous essayons simplement de trouver un moyen raisonnable de régler le problème.

M. Milliken: Vous n'êtes donc pas en désaccord avec la façon dont on procède à l'heure actuelle ou avec les modifications proposées actuellement dans le projet de loi C-5, sauf pour ce qui est du libellé?

M. Dolan: En gros c'est ça.

M. Braithwaite: Je vais vous donner un exemple pour illustrer ce qu'on a dit au sujet du maintien du droit de s'en remettre à un tribunal.

Dans sa restructuration des magasins Bi-Way, Dylex a résilié un certain nombre de baux avec Cambridge. Elle avait entre autres un magasin à Edmonton qui faisait d'excellentes affaires dans l'ouest du pays et qui était très rentable pour la compagnie malgré la restructuration. La compagnie a fini par résilier ce bail - un bail à assez long terme - même si le magasin fonctionnait très bien, parce qu'elle voulait fermer tous ses établissements dans l'ouest du pays. La compagnie a pu se dégager de sa responsabilité dans le cadre d'un plan d'affaires lié à la restructuration et non à la difficulté financière réelle de l'emplacement.

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Si nous avions le droit de nous adresser à un tribunal, il faudrait que la compagnie prouve que la résiliation du bail était absolument nécessaire à la restructuration. Nous croyons qu'il est nécessaire et approprié d'englober les situations de ce genre qui surviennent périodiquement.

Le président: Monsieur Mayfield.

M. Mayfield (Cariboo - Chilcotin): Pour continuer sur le même sujet, je me demandais, compte tenu de votre expérience, dans quelle mesure vous auriez réussi à obtenir réparation. Les tribunaux vous sont-ils d'un très grand secours à cet égard? Font-ils une grande différence?

M. Braithwaite: Nous n'avons pas eu de succès avec les tribunaux au cours des deux ou trois dernières années. Dans un certain nombre de cas, nous en avons eu plus en négociant directement avec la compagnie s'occupant de la restructuration, si vous voulez. Dans d'autres cas, où les mesures n'avaient de toute évidence pas d'incidence sur le succès de la restructuration, nous n'avons pas eu de succès. Ainsi, nous les locateurs, de même que les financiers, les sociétés hypothécaires et d'autres, avons fini par subir de graves préjudices. Je crois que c'est parce que nous ne disposions pas tout à fait de l'équilibre dont nous avons besoin ici en ce qui a trait à que Terry demande.

M. Mayfield: Je me demande pourquoi vous exercez autant de pression aujourd'hui pour obtenir le droit de vous adresser aux tribunaux si vous n'avez pas réussi en procédant de la sorte ou pas autant que vous l'auriez espéré.

M. Braithwaite: Je ne suis pas sûr de comprendre entièrement votre question. Je ne pense pas que nous ayons le plein droit maintenant de nous adresser aux tribunaux. Aujourd'hui, quand il y a restructuration, la société présente son plan, vous assistez à une série de réunions et votre catégorie de créanciers peut être retenue ou non. Il peut se présenter des circonstances du genre de celles dont j'ai parlé plus tôt dans le cas du bail de Bi-Way et il n'y a pour ainsi dire presque rien que vous puissiez faire à ce sujet en tant que locateur.

M. Dolan: Rappelez-vous que la LIF n'était pas si efficace que cela, à moins de pouvoir vraiment profiter de la disposition sur la location de six mois et assommer votre locateur, en un mot... Donc, la plupart des restructurations subies par les chaînes de magasins de détail se sont faites en vertu de la LACC, qui a donné lieu à des conflits sur la façon de classer les locateurs à des audiences d'équité et le reste. On a aussi dû s'adresser aux tribunaux.

Les locateurs disent tout simplement que tout sera fonction des éléments particuliers de la restructuration, qu'on ait ou non réussi à aller en cour par le passé. À mon avis, la meilleure raison de conserver ce droit d'aller en cour - puisqu'on l'a maintenant - ne serait-ce que pour déterminer si la résiliation est nécessaire, est que l'on présente alors au monde un programme de restructuration qui est équilibré et juste.

J'aimerais bien essayer de savoir dans combien de cas cela a fonctionné, et dans combien de cas cela a échoué. Tout dépend tellement des faits que je crois qu'il est difficile d'énoncer un principe valable.

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J'agis fréquemment pour le compte de prêteurs, et qu'il s'agisse de prêteurs immobiliers ou de prêteurs qui financent des avions ou d'autres appareils, ils me demandent de leur parler de la LACC. Qu'avez-vous là-haut? Les prêteurs viennent habituellement de l'autre côté de la frontière.

Ils m'interrogent également sur la certitude, parce qu'ils veulent de la certitude, et ils ont un code élaboré. Nous devons leur dire que ceux qui leur empruntent de l'argent peuvent invoquer la LACC et ses dispositions de restructuration sans règles aux termes du chapitre 11.

Il importe donc - et je ne saurais trop insister là-dessus - de disposer tout autant des sauvegardes procédurales et de l'équilibre de la LACC que des avantages similaires offerts par la LFI, parce que je sais que c'est extrêmement important pour l'économie de l'entreprise canadienne et sa capacité de mobiliser des fonds quand des promoteurs et d'autres parties veulent les emprunter.

M. Mayfield: De par mon travail, je suis appelé à entendre peut-être davantage des locataires commerciaux que des locateurs commerciaux parler de leurs problèmes, et je vous suis très reconnaissant de votre exposé. Merci beaucoup.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Je n'ai qu'une brève question. Certaines personnes sont venues nous expliquer pour quelle raison il a fallu tant de temps pour en arriver à cette loi-ci. L'une des dispositions stipule que le gouvernement aimerait la revoir de façon régulière tous les sept ans. Nous aimerions que les témoins nous disent s'ils estiment que la révision devrait se faire à intervalles plus réguliers. Il me semble qu'étant donné la complexité du domaine - et je le dis du point de vue d'un profane - elle devrait être...

On aimerait fixer certaines lois pour toujours et revoir certaines autres lois de façon régulière. Celle-ci devrait-elle être revue de façon régulière ou devrait-on laisser s'écouler quelques années avant d'y apporter des modifications? Qu'en pensez-vous?

M. Dolan: Si vous le permettez, je vous donnerai mon opinion personnelle et demanderai à Ron ou à Lorne Braithwaite de réagir.

Je pense qu'un examen régulier est important. Le domaine change rapidement. Nous devons nous occuper de plus en plus de cas d'insolvabilité transfrontaliers. C'est un domaine qui évolue très rapidement, et je pense qu'un examen régulier est nécessaire, parce que comme je le dis toujours à mes collègues au travail, tout le droit commercial tourne autour du droit de la faillite. Ils ne sont pas toujours d'accord avec moi, mais je crois qu'elle est essentielle à notre structure commerciale.

Je serais donc tout à fait d'accord avec un examen régulier et passablement fréquent, peut-être pas copié sur le modèle du Comité consultatif de la faillite et de l'insolvabilité que vous suiviez auparavant, mais à tous les trois ans ou quelque chose de ce genre. Je dirais que ce serait très important pour voir comment s'applique la loi dans la réalité.

M. Ronald A. Daniel (directeur administratif, Institut canadien des compagnies immobilières publiques): Je suis d'accord avec cela.

Nous avons trouvé fort valable l'expérience avec le Comité consultatif de la faillite et de l'insolvabilité. Cette large tribune permettait beaucoup de discussions et d'échanges. Nous avons été déçus de ne pas étudier la LACC à l'époque, mais nous sommes en faveur des changements qui vont être apportés et aimerions que l'examen soit effectué dans un délai de deux à trois ans, pour l'étudier à nouveau et voir ce que l'on peut faire pour l'améliorer.

M. Braithwaite: Je suis d'accord avec mes deux collègues. Trois ans, ce serait peut-être trop fréquent. Je crois qu'au bout de quatre ou cinq ans, nous aurions une meilleure chance de nous y adapter. Mais la loi devrait certainement être revue régulièrement.

Le président: Merci.

Je remercie M. Braithwaite et ses collègues d'être venus. J'ai beaucoup aimé votre témoignage. Il était clair et sans détour.

Comme vous avez pu le voir par les questions, les députés se sont beaucoup intéressés à ce que vous aviez à dire. Merci d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui à Ottawa; je vous en sais gré.

Nous sommes un peu en avance, mais je vois que M. Daniels est arrivé.

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Monsieur Daniels, je crois que vous prendrez la parole en premier. J'aimerais vous souhaiter la bienvenue au comité à vous et aux membres de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes.

M. Mark Daniels (président, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes Inc.): Merci, monsieur le président.

Le président: Quand vous serez prêt, vous pourriez peut-être vous présenter et nous présenter vos collègues officiellement et nous dire de quelle manière vous entendez procéder. Comme vous le savez, d'habitude, nous commençons par un bref exposé suivi des questions et réponses.

M. Daniels: Merci beaucoup, monsieur le président.

Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis président de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Je suis accompagné aujourd'hui de deux grands avocats de l'industrie, qui travaillent tous deux pour la Sun Life. Paul Cozzi est vice-président et chef du contentieux de la Sun Life. Il est également président du Comité de la faillite et de l'insolvabilité de l'ACCAP.Sam Steel est vice-président adjoint et co-directeur du contentieux de la Sun Life. Il est également président du Comité de l'assurance-responsabilité contre l'atteinte à l'environnement de l'ACCAP. L'industrie nous a donc délégué ces spécialistes sur ces questions.

Ces dernières années, nous avons eu le plaisir de comparaître plusieurs fois devant des comités parlementaires sur des questions liées au projet de loi C-5. Nous avons comparu en 1991 devant le Comité permanent des consommateurs et des sociétés et de l'administration gouvernementale pour exposer nos vues sur les amendements proposés à la Loi sur la faillite. Nous avons également comparu devant votre comité en 1994 pour vous parler des relations de notre industrie avec la petite entreprise. Nous nous réjouissons de toutes ces occasions que nous avons de discuter de questions importantes qui intéressent le secteur des services financiers avec les membres de votre comité et d'autres comités parlementaires.

C'est donc dans un esprit de collaboration que nous vous faisons part aujourd'hui de certaines de nos réflexions sur le projet de loi C-5 et les amendements proposés aux dispositions sur la faillite qu'il contient. J'aimerais également signaler qu'au fur et à mesure que se fera l'étude de ces propositions, mes collègues de l'industrie et moi-même seront à votre disposition, monsieur le président, pour apporter toute nouvelle contribution aux travaux de votre comité de la façon qui vous semblera utile.

Avant de demander à nos indéniables experts MM. Cozzi et Steel de commenter certains des aspects précis de notre mémoire, j'aimerais préciser que dans l'ensemble l'industrie est fortement en faveur du projet de loi C-5 et des modifications proposées à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité de même qu'à la LACC. L'industrie estime que la plupart des initiatives que prend le gouvernement dans le projet de loi C-5 contribueront à améliorer sensiblement ces lois.

Par exemple, dans le contexte des assureurs qui agissent comme locateurs, l'industrie appuie les amendements proposés relatifs aux baux commerciaux, de même que les changements de libellé recommandés par l'ICCIP il y a quelques instants. Ces changements ont pour but de faire cesser les abus dont sont l'objet les dispositions de la LFI qui permettent à un locataire commercial insolvable de résilier un bail immobilier. Cet aspect n'a pas étudié lorsque ces dispositions ont été adoptées en 1992 et il en est résulté d'importants problèmes pour certains locateurs. Les changements proposés aux règles en vertu desquelles des locataires commerciaux insolvables font des propositions pour résilier les baux permettront d'équilibrer de façon plus appropriée les droits et responsabilités des locateurs et des locataires commerciaux insolvables, comme c'était l'intention en 1992, à notre avis.

L'industrie appuie également le maintien des examens périodiques des règles régissant les faillites, ces règles étant essentielles au bon fonctionnement du système économique. Elles devraient être régulièrement mises à jour.

Notre mémoire contient des commentaires et des recommandations sur deux aspects précis du projet de loi C-5. C'est là-dessus que porteront principalement nos brèves remarques aujourd'hui. Le premier aspect concerne la superpriorité d'ordre environnemental; le second porte sur les amendements à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Nos suggestions visent à rendre le projet de loi encore plus efficace.

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Avant que mes collègues ne commentent ces deux aspects, j'aimerais vous entretenir un instant du processus qui a mené à l'élaboration des dispositions proposées sur la superpriorité d'ordre environnemental.

Tout d'abord, j'aimerais signaler que l'industrie des assurances de personnes n'a pas eu l'occasion de commenter la proposition avant qu'elle soit intégrée au projet de loi. Nous croyons savoir que d'autres prêteurs ont été consultés à cet égard, mais cela n'a pas été le cas de l'industrie des assurances de personnes. Comme, je crois, le dit clairement notre exposé, cette exclusion peut avoir conduit les fonctionnaires à mal évaluer l'effet potentiel des propositions relatives à la superpriorité qui figurent aujourd'hui dans le projet de loi.

Heureusement, je crois que le problème est facile à régler.

J'aimerais maintenant demander à M. Steel de continuer à vous parler de la superpriorité et des difficultés que nous y voyons.

M. Sam Steel (président, Comité de l'assurance-responsabilité contre l'atteinte à l'environnement, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes): Aux termes du projet de loi C-5, les frais de réparation de dommages liés à l'environnement recevraient un droit prioritaire sur toutes les autres réclamations, y compris celles des créanciers garantis, notamment les créanciers hypothécaires. L'assainissement serait payé à même une sûreté de premier rang sur le bien immeuble du débiteur insolvable et sur tout bien immeuble contigu appartenant à ce même débiteur.

Les modifications proposées reconnaissent que les syndics et les séquestres ne sont pas des pollueurs et sont donc dégagés de toute responsabilité personnelle. Ils ont le temps d'évaluer le coût de la mise en conformité de ces biens avec les ordonnances environnementales et la possibilité, en dernier recours, d'abandonner tout intérêt dans les biens en cause.

De même, les prêteurs ne sont pas, eux non plus, des pollueurs. Pourtant, lorsque des biens contaminés sont en cause dans une insolvabilité, les prêteurs sont exposés à des pertes financières considérables, si ce n'est à la perte intégrale de leur garantie.

Point essentiel de la proposition relative à la superpriorité contenue dans le projet de loi C-5, toute réclamation pour frais de réparation serait garantie par une sûreté sur le bien immeuble du débiteur et non par une sûreté grevant les biens meubles de ce dernier, comme la machinerie et l'équipement.

L'industrie des assurances de personnes ne comprend pas pourquoi les prêteurs détenant en garantie des biens immeubles seraient assujettis à cette sûreté prioritaire dont serait assortie la réclamation pour frais de réparation des dommages liés à l'environnement, alors que les prêteurs sur d'autres biens de l'entreprise qui sont servi à exercer l'activité ayant causé ces dommages ne seraient pas obligés de partager l'obligation d'assainissement.

Nous demandons au comité de modifier la disposition de superpriorité proposée dans le projet de loi afin qu'y soient assujettis tant les biens immeubles que les autres biens du débiteur. Un tel amendement rendrait la disposition de superpriorité plus conforme au principe du «bénéficiaire payeur» énoncé dans le Rapport au Conseil canadien des ministres de l'Environnement sur la responsabilité à l'égard des lieux contaminés de mars 1993, selon lequel l'assainissement d'un lieu ne devrait pas avoir pour effet d'enrichir injustement ceux qui en bénéficient et selon lequel l'obligation d'assainissement doit être partagée entre les personnes ayant tiré profit de l'activité responsable de la contamination.

De même, le changement que nous proposons rendrait la sûreté prioritaire plus conforme au principe d'équité énoncé par le CCME.

La différence de traitement entre les prêteurs sur biens immeubles et les prêteurs sur machinerie et équipement est donc d'une importance capitale pour les sociétés d'assurances de personnes car, de toutes les institutions financières en activité au Canada, elles sont la principale source de financement des hypothèques commerciales. Les assureurs de personnes fournissent plus de50 p. 100 des hypothèques commerciales, tandis que les banques, par exemple, n'en consentent qu'environ 25 p. 100. Pour notre industrie, cela représente 32 milliards de dollars par opposition à15 milliards de dollars pour les banques.

Les autres prêteurs ne se trouveraient pas désavantagés dans la même mesure car les biens affectés en garantie dans leurs activités de financement sont principalement des biens meubles comme du matériel et des éléments d'actif. Les prêts consentis par les assureurs de personnes sont, par contre, très souvent garantis par des biens immeubles commerciaux et c'est pour ce type de biens que seraient engagés la plupart des frais de réparation.

Nous sommes également d'avis que les autorités de réglementation provinciales considéreraient que la responsabilité environnementale du prêteur devrait s'appliquer à tous les types de créanciers.

En ce qui concerne les autorités provinciales de réglementation et la proposition de superpriorité, il vaut la peine de noter qu'il se pourrait que la proposition soit une question qui relève de la compétence fédérale. L'industrie est d'avis que l'application de cette superpriorité aux biens immeubles seulement serait inéquitable et inopportune. Nous sommes d'avis que cette superpriorité devrait viser les biens immeubles et les biens meubles du débiteur.

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Nous sommes également d'avis que l'application de la sûreté aux biens immeubles contigus du débiteur soulèverait de graves problèmes pour les prêteurs sur biens immeubles. Avant que des biens immeubles contigus puissent faire l'objet d'un droit prioritaire, nous estimons qu'un lien de causalité devrait être établi selon lequel l'utilisation de ces biens immeubles contigus a contribué de façon notable à la situation en présence sur le lieu contaminé. Les prêteurs n'aiment pas l'incertitude et les dispositions applicables aux biens immeubles contigus ne feront qu'ajouter à la certitude et à la confusion qui règnent dans le domaine environnemental.

Il a été dit à ce comité qu'il existe en Ontario une disposition analogue relative aux biens immeubles contigus. En fait, la disposition ontarienne, l'article 154 de la Loi sur la protection de l'environnement de l'Ontario, exige que la Couronne ait fait quelque chose sur la propriété adjacente par suite des activités ou des faits s'étant déroulés sur la propriété en cause, que cette dernière ait ou non fait réellement l'objet de travaux. Cela permet à la Couronne de récupérer les frais de réparation sur une propriété contiguë quand une telle réparation est nécessaire par suite des activités ou des faits s'étant déroulés sur la propriété visée, par exemple une migration de la contamination. Il ne suffit pas que la propriété soit simplement liée à l'activité ayant causé le fait ou le dommage lié à l'environnement. Il doit être également clair qu'un tel droit prioritaire incombe à la Couronne.

Cibler les prêteurs qui disposent d'énormes sommes pour régler le problème des sites contaminés serait vain dans la pratique, car il en résulterait une restriction du crédit, une augmentation des sites abandonnés et une pénurie des fonds disponibles pour la remise en état des sols.

Mon collègue M. Cozzi passera maintenant brièvement en revue notre position et nos suggestions sur les modifications proposées à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.

M. Paul Cozzi (président, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes): Monsieur le président, le Canada dispose actuellement de deux lois, qui visent chacune le même objectif, la réorganisation des entreprises commerciales lorsque c'est possible. L'une est la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, adoptée dans les années 30, et l'autre est la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, adoptée par le Parlement en 1992, après de longues recherches et de nombreux débats. Quand ils parlent de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, les gens utilisent habituellement les sigles LACC et LFI, et avec votre permission, je ferai de même.

Depuis 1991, l'industrie des assurances de personnes préconise l'abrogation de la LACC. Il manque à cette loi des années 30 le cadre et l'orientation parlementaire nécessaires, dans les années 90, pour favoriser des restructurations efficaces et établir un équilibre entre les participants au processus de restructuration. Il n'en résulte souvent que de longues procédures contradictoires inutilement longues et extrêmement coûteuses. Créanciers comme débiteurs souffrent de cette situation et il semblerait que seuls les professionnels en bénéficient. En outre, depuis 1992, les règles de cette loi font double emploi avec les dispositions relatives aux restructurations qui ont été ajoutées en 1992 à la LFI.

Notre industrie reconnaît que le projet de loi C-5 propose un certain nombre de changements qui tendent à faire concorder les dispositions de la LACC avec celles de la LFI. Cependant, l'industrie estime que les règles régissant les réorganisations commerciales devraient être les mêmes dans tous les cas. Par conséquent, la LACC devrait être abrogée et ce sont les dispositions de la LFI concernant les réorganisations commerciales, modifiées comme il se doit, qui devraient s'appliquer.

Malgré cette position, l'industrie apprécie les efforts qui ont mené au projet de loi C-5 et ses objectifs précis. À cet égard, nous appuyons les changements à la LACC contenus dans le projet de loi C-5, par exemple l'obligation pour une compagnie débitrice de disposer de réclamations supérieures à 10 millions de dollars pour pouvoir invoquer la LACC.

Les recommandations et suggestions formulées dans le cadre du présent mémoire sont destinées à permettre à ce projet de loi de mieux atteindre ses objectifs. Je vais en parler brièvement. Une d'entre elles concerne la nécessité, à notre avis, de tenir des statistiques exactes sur la LACC, ce qui ne se fait pas actuellement. Cela ne se veut pas une critique, en passant; il se trouve seulement que c'est dans cet ordre que les sujets sont traités.

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Parmi les autres sujets: les règles liées à l'obtention et à l'élargissement des ordonnances applicables aux compagnies débitrices et aux créanciers; les responsabilités des contrôleurs qui vont être permis aux termes des modifications proposées à la LACC; et la nécessité pour le Parlement lui-même d'énoncer le critère qu'une compagnie débitrice doit respecter pour obtenir une ordonnance, plutôt que de déléguer ce pouvoir aux tribunaux, comme cela se fait aux termes de la LACC. Le Parlement a déjà prescrit dans la LFI les critères à appliquer en pareilles circonstances. Aux termes de la LACC, il délègue ce pouvoir aux tribunaux, en effet.

Enfin, certaines restrictions en matière de délai devraient être imposées dans le cadre de ce processus pour forcer les parties à négocier en temps utile et réduire au minimum les frais.

Notre industrie estime qu'en proposant des suggestions constructives, nous pouvons contribuer adéquatement à améliorer le projet de loi C-5 et les lois relatives à l'insolvabilité et aux restructurations.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup pour vos remarques d'ouverture.

Monsieur Mayfield, avez-vous des questions?

M. Mayfield: J'en ai, monsieur le président, mais j'aimerais les laisser mijoter.

Le président: Je sais que vous aimez cela.

Monsieur Shepherd.

M. Shepherd (Durham): Vos commentaires sur la propriété adjacente m'ont intéressé. Vous ajoutez un élément nouveau à nos discussions ici du fait que vous voulez que la responsabilité, la superpriorité, s'applique également à ce que je considérerais comme des biens mobiles.

Du point de vue de l'application de la loi, comment le feriez-vous dans la pratique? Vous dites qu'une propriété adjacente doit avoir une relation de causalité avec l'événement qui a entraîné la contamination. Vous semblez vous attarder à une entité sociale qui pourrait avoir de nombreuses propriétés, mais vous semblez vous attacher aux débiteurs, aux stocks, etc., lesquels pourraient très bien se trouver au centre-ville de Toronto plutôt que dans le nord de l'Ontario s'il s'agissait d'avoirs miniers.

Comment pourrions-nous appliquer cela dans la pratique?

M. Steel: Monsieur Shepherd, vous avez soulevé deux questions, et je pourrais peut-être y répondre séparément.

Dans le premier cas, il s'agit de savoir si la sûreté prioritaire devrait s'appliquer uniquement aux biens immeubles ou aux biens meubles et aux biens personnels. Dans le second cas, il s'agit de savoir si elle devrait s'appliquer à la propriété qui est contaminée, à la propriété qui est adjacente ou à une autre propriété qui a un lien causal avec la propriété contaminée.

En ce qui concerne la question des biens personnels, comme je l'ai dit dans mes remarques, notre industrie, qui consent plus de 50 p. 100 des hypothèques commerciales au Canada, estime qu'elle ferait l'objet de discrimination si la sûreté prioritaire ne s'appliquait qu'aux biens immeubles et pas au matériel, à la machinerie et à d'autres éléments de nature personnelle, si c'est ainsi que vous voulez les appeler, garantis par d'autres prêteurs. Ces prêteurs ont la même capacité d'influer sur les activités du débiteur.

L'anomalie... Permettez-moi de vous donner l'exemple d'un cas où nous étions prêteurs sur un bien immeuble. Une banque était prêteur sur le matériel, la machinerie et les stocks. Ce matériel et cette machinerie étaient utilisés pour contaminer notre bien immeuble. Au bout du compte, la banque a réussi à s'approprier les débiteurs. Quand elle a tenté de faire de même avec le matériel et la machinerie, le ministère de l'Environnement et de l'Énergie de l'Ontario a menacé la banque, le prêteur, de la considérer à ce moment-là comme responsable de la propriété ou des biens contaminés et de l'obliger à procéder à la réparation, ou du moins le ministère entendait essayer de l'obliger à le faire.

La banque a fait marche arrière. Elle s'est appropriée les débiteurs, mais n'a pas tenté de s'approprier le matériel et la machinerie, pour ne pas créer de précédent. Nous sommes restés avec le bien immeuble; c'était notre garantie. Le coût de remise en état du bien immeuble, qui avait été contaminé par les activités effectuées avec ce matériel et cette machinerie, dépassait, pour nous, la valeur estimative de l'immeuble fixée l'année d'avant. Nous ne pensons pas qu'il soit juste que seuls les prêteurs sur biens immeubles doivent assumer les coûts de réparation.

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M. Shepherd: Je crois que le problème est que cette sûreté prioritaire s'applique uniquement à la propriété elle-même. Nous pourrions cependant avoir une compagnie qui possède de nombreuses propriétés mais dont une seule est contaminée, et la responsabilité du débiteur hypothécaire serait donc assujettie à cette contamination. Mais vous vous trouvez en quelque sorte à élargir votre propre garantie, si vous voulez, en permettant à d'autres éléments d'actif d'être intégrés dans cette superpriorité.

M. Steel: Non, monsieur. Ce qui se passe, c'est que vous accordez à la Couronne une sûreté qui a préséance sur notre garantie. Nous sommes un prêteur du débiteur. Nous disons que si en fait il existe un lien causal et que vous disposez de l'équipement qui a contribué à la contamination du site, d'autres prêteurs du débiteur, peu importe la nature des biens pour lesquels ils ont consenti des prêts, devraient être assujettis à la même sûreté prioritaire. Donc, si une banque a prêté de l'argent pour de l'équipement, elle ne devrait pas pouvoir arriver et partir avec cet équipement. Celui-ci a contribué à créer la contamination.

M. Shepherd: Je comprends votre point de vue, mais je crois qu'il semble incompatible avec la philosophie de la législation proposée parce qu'il s'intéresse à la propriété contaminée, alors que vous vous intéressez à toute la compagnie, et à ses opérations.

M. Steel: Eh bien, si vous vouliez limiter la sûreté aux biens qui se trouvent sur le site contaminé, cela ne me poserait aucun problème. Mon problème, c'est qu'une banque qui détient une garantie sur du matériel qui a été utilisé pour contaminer ma propriété peut venir sur la propriété, partir avec ses biens, et il ne me reste plus qu'à remettre en état ma propriété.

M. Shepherd: Mais supposons que les stocks sont entreposés à 500 milles de là. Ce n'est pas sur le site. Quelle priorité accordera-t-on à votre réclamation dans cette situation?

M. Steel: Je ne suis pas sûr qu'il soit question de priorité à ce moment-là. La sûreté prioritaire a préséance sur mon hypothèque. J'ai une hypothèque sur le bien immeuble. Je n'ai pas de priorité vis-à-vis de la banque. La banque détient une garantie sur le matériel. Ce que je dis, c'est que si vous consentez à la Couronne une superpriorité par rapport à moi, je crois qu'elle devrait également s'appliquer aux autres prêteurs de ce débiteur.

M. Shepherd: Je crois que le problème tient au fait que nous professons deux philosophies différentes.

M. Daniels: Si vous me le permettez, monsieur le président...

Le président: J'aimerais que ce soit votre dernier commentaire car je voudrais céder la parole à M. Milliken.

M. Daniels: J'aimerais simplement ajouter que je comprends que vous considériez la contamination d'une propriété comme une situation pressante mais il serait bon également que le comité prenne en considération le problème plus général que nous avons soulevé.

Comme notre industrie représente la source la plus importante de prêts hypothécaires commerciaux à long terme, ce problème risque à un certain moment d'influer sur son orientation. Vingt et un pour cent des actifs de notre industrie sont immobilisés dans des hypothèques commerciales, comparativement à 3 p. 100 pour les banques dont les actifs sont toutefois quatre fois plus importants. Or, le problème, c'est que 21 p. 100 de nos actifs risquent de faire l'objet d'une contrainte théorique, comparativement à 3 p. 100 pour les banques.

Vous êtes sans doute tous au courant des arguments en faveur de règles du jeu équitables, qui prédominent, monsieur le président, au sein du comité des finances en préparation à la loi de 1997. Il s'agit donc d'un problème d'une certaine importance.

Le président: Monsieur Milliken.

M. Milliken: Ma question porte sur le même point. Lorsque j'ai écouté votre exposé, puis lu votre mémoire, cette idée m'a paru immédiatement intéressante. Je me demande toutefois si le créancier qui détient des biens meubles en garantie a en fait les mêmes droits que le créancier hypothécaire. Supposons par exemple que l'entreprise possède une machine sur laquelle il y a une hypothèque mobilière et que cette machine produit des déchets qui sont déversés sur la propriété et causent de graves dommages à l'environnement et qu'il faut nettoyer la propriété.

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Je me demande comment le créancier hypothécaire peut insister pour que la machine ne soit pas utilisée de manière à produire ce genre de déchets puisque la contamination est causée non pas par la production de déchets mais plutôt par leur déversement sur la propriété.

Je suppose que si ces déchets étaient déversés ailleurs, il n'y aurait aucune difficulté et le super privilège ne s'appliquerait pas. Mais l'argument qui sera avancé, c'est qu'étant donné que la propriété est contaminée et qu'il y a un créancier pour le matériel qui a produit les déchets, il est injuste d'obliger le créancier hypothécaire à assumer les frais de réparation.

Le créancier hypothécaire me semble avoir un recours très solide, puisqu'il peut insister pour qu'on ne commette pas de dégradations sur la propriété. Si je me souviens bien, chaque hypothèque prévoit que le débiteur hypothécaire doit s'engager à ne pas commettre de dégradations. Je me fie à ma mémoire car je n'ai pas exercé le droit depuis huit ans, mais si cet engagement existe, comme je le crois, le créancier hypothécaire ne peut-il pas en assurer l'exécution en déclarant: «Vous ne devez commettre aucune dégradation sur cette propriété en y déversant des déchets ou en causant un désastre environnemental, sinon je mettrai fin à l'hypothèque et j'exigerai le remboursement de mon prêt»?

Est-ce que ce n'est pas un recours dont dispose le créancier hypothécaire et la mise en place de ce super privilège, par mesure d'intérêt public, n'oblige-t-elle pas les créanciers hypothécaires à exercer un certain contrôle sur les débiteurs hypothécaires négligents?

M. Steel: Oui. Il ne fait aucun doute qu'aujourd'hui toutes les hypothèques prévoient cette disposition. Je pense qu'un prêteur sur biens meubles prévoirait également dans son hypothèque que les activités commerciales exercées par l'emprunteur doivent être conformes à la loi, pour ce qui de l'élimination des déchets et des choses de genre. Je pense que les deux prêteurs pourraient obliger le débiteur à se conformer à la loi dans l'exercice de ses activités commerciales.

La réalité est toutefois très différente. Permettez-moi de vous en donner deux exemples.

Dans l'exemple que j'ai décrit plus tôt, la banque avait en garantie des stocks d'une valeur de un million de dollars. En raison de l'incertitude que laisse planer la loi, les négociations entre nous, la banque, le ministère de l'Environnement et celui de l'Énergie ont duré six à sept mois, au bout desquels les stocks, qui se composaient d'insecticides et de produits d'entretien ménager, étaient devenus des déchets en vertu de la loi. C'était les stocks que détenait la banque en garantie.

M. Milliken: La vente en était interdite?

M. Steel: Il s'agissait de déchets. Oui. La vente en était non seulement interdite mais en raison du volume de ces déchets, il fallait désormais s'en débarrasser d'une manière bien précise. C'est le genre de produits que nous pourrions avoir dans nos cuisines mais à cause de leur volume, ces produits étaient désormais considérés comme des déchets sur lesquels la banque avait encore une garantie.

Qui à votre avis a dû se charger d'éliminer ces déchets? Ce n'est sûrement pas la banque et ça n'a pas été la banque. C'est le prêteur sur biens immeubles, parce que le prêteur ne peut pas abandonner les biens immeubles. C'est là la différence.

Il n'est pas juste que nous devions assumer le fardeau des mesures de réparation.

Le président: Aimeriez-vous aborder une autre question?

M. Milliken: Non, je crois avoir reçu les éclaircissements nécessaires. J'ai peut-être examiné la situation des prêteurs sur biens immeubles de façon trop immédiate. C'est assurément un point dont il faut tenir compte. Il serait peut-être préférable que le tribunal puisse décider de qui devrait payer, en fait, par la création de ce privilège et déterminer qui a priorité.

M. Steel: Ce n'est pas une question de priorité entre les deux prêteurs.

M. Milliken: Ce pourrait l'être.

M. Steel: La question est de savoir qui doit assumer les frais de réparation.

À cause de leur portefeuille bien garni, il est tentant de demander chaque fois aux prêteurs d'assumer les frais de réparation. Il est toutefois irréaliste de croire que les prêteurs en assumeront la totalité des coûts.

M. Milliken: Ce n'est pas ce que je voulais dire mais on pourrait voir à qui le tribunal accorde la priorité.

Par exemple, dans la situation que vous décrivez, il semble injuste de rendre le propriétaire de l'immeuble responsable de la réparation des dommages puisqu'il s'agissait de stocks et non d'un déversement.

La priorité serait donnée au créancier hypothécaire avant tous les autres créanciers garantis, par exemple. J'ignore quel était le nombre des autres créanciers garantis mais cela pourrait faire se faire de cette façon-là.

.1135

M. Steel: Le problème, c'est que la banque n'a pas à aller chercher ces biens. Si elle ne le fait pas, elle a une garantie mais elle n'a pas à réaliser ces biens si elle craint que cela l'oblige à gérer le contrôle de la sûreté. Par conséquent, elle ne fait rien. Cette option n'existe pas pour le créancier hypothécaire.

Le président: Monsieur Lebel.

[Français]

M. Lebel (Chambly): J'aimerais avoir une précision. Quand je lisais les dispositions du paragraphe 14.06(7), j'avais l'impression qu'on faisait automatiquement allusion au fait que c'était le sol, la propriété elle-même qui était polluée, mais monsieur vient de m'éclairer un peu. Ce n'est pas nécessairement toujours le cas.

Si, par exemple, j'entrepose sur un terrain des pesticides qui sont déclarés bannis d'utilisation au Canada, même si le site lui-même n'est pas contaminé, c'est le créancier hypothécaire de premier rang qui, généralement, aura l'odieux de voir à l'élimination de ces produits.

C'est ce que vous dites en ce qui a trait au paragraphe 14.06(7)?

[Traduction]

M. Steel: C'est exact. C'est soit le propriétaire des biens qui sera responsable de leur élimination, s'il s'agit de déchets... Si le propriétaire des biens disparaît - abandonne les biens - alors le prêteur a une option. Il devra décider s'il vaut la peine d'assumer les frais de réparation et de courir le risque de devoir contrôler la sûreté sur le bien immeuble.

[Français]

M. Lebel: Ma question va plus loin. Si la propriété comme telle n'est pas polluée mais qu'on y met des produits qui sont interdits de commerce, le coût de l'élimination de ces produits est imputé au propriétaire, ou au créancier si le propriétaire est insolvable, cela même si le terrain est parfaitement propre.

[Traduction]

M. Steel: Oui, c'est exact. Mais dans certains cas les coûts de l'élimination de ce genre de déchets peuvent être exorbitants. Si le bien immeuble est grevé d'une hypothèque de un million de dollars et qu'il vous en coûtera 100 000 $ ou 200 000 $ pour vous débarrasser de ces déchets et que vous ne croyez pas que le fait d'exercer le contrôle de la sûreté sur ce bien immeuble comporte d'autres risques, alors oui vous dépenserez les 100 000 $ ou 200 000 $ pour éliminer ces déchets. Cela ne fait aucun doute. Vous n'avez pas le choix parce que c'est votre garantie; tandis que le prêteur sur stocks n'a aucune obligation à cet égard. S'il considère que ce sont des déchets, il laissera tomber.

[Français]

M. Lebel: D'après vous, dans un tel cas, les frais de nettoyage seraient pris sur la masse générale des actifs de la faillite.

[Traduction]

M. Steel: Ce serait assurément notre position.

Le président: Monsieur Mayfield.

M. Mayfield: C'est une question qui revient souvent devant le comité. Je suis heureux que vous l'ayez soulevée à nouveau.

En vous écoutant, cela m'a fait songer à certaines régions de ma province, la Colombie-Britannique, et de ma propre circonscription, par exemple, où l'exploitation minière a représenté un aspect important de l'économie. Je songe aux évaluations environnementales détaillées dont font l'objet ces projets avant qu'ils soient approuvés par les divers organismes gouvernementaux. Je commence à me rendre compte de certaines incidences de ce type de super privilège. Je voulais vous demander votre opinion, à la lumière des accords d'octroi de permis, des obligations du propriétaire, du prêteur. Auriez-vous quelque chose à dire à propos de l'opportunité d'inclure dans la loi ce type de privilège ou de sûreté?

.1140

M. Steel: Différentes provinces ont différentes façons d'aborder la question. Le privilège n'est pas une solution qui a été adoptée dans chaque province. En fait, en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, la solution consiste à donner à la Couronne le droit de poursuivre le débiteur pour récupérer le coût des mesures de réparation assumé par la Couronne.

J'opterais pour le droit d'intenter une action car j'estime que dans ce cas il est nettement plus probable que d'autres personnes responsables ou une personne ayant un lien de causalité, finiront par en assumer le coût.

J'estime qu'il est intéressant que l'autre loi pertinente, à savoir la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, ne prévoit pas de privilège; elle prévoit un droit d'intenter une action de la part de la Couronne.

Le président: Si vous avez terminé, monsieur Mayfield, M. Shepherd a une dernière question.

M. Shepherd: Oui, j'ai une question très brève et générale sur un point que vous avez brièvement abordé.

J'ai constaté que certains d'entre vous appartenez à la Sun Life. J'examine votre portefeuille d'actifs. Vingt trois pour cent de votre actif est immobilisé dans des hypothèques commerciales, un certain pourcentage dans des obligations, etc. Cette loi entre en vigueur le jour d'après. Je suis en train de songer à notre stratégie d'investissement. Je prends le 23 p. 100 d'hypothèques commerciales, puis je fais le calcul pour le secteur des ressources, les hypothèques résidentielles et ainsi de suite.

L'adoption de cette loi va-t-elle réduire les montants que vous mettrez à la disposition des avoirs miniers?

M. Steel: J'estime qu'il est tout à fait raisonnable de partir du principe que des dispositions de ce genre influeront sur le flux de crédit. Je crois qu'elles ont peut-être plus de répercussions sur les moyennes et petites entreprises où le prêteur ne peut compter sur d'autres actifs ou d'autres garanties comme nantissement en cas de risque pour l'environnement. En d'autres mots, ce que vous avez pris comme garantie constitue tout ce que possède le débiteur.

Il ne fait aucun doute que les prêteurs devront évaluer et réévaluer les répercussions que ce genre de dispositions auront sur leur garantie finale lorsqu'ils voudront la réaliser. Ils examineront certaines industries et certaines entreprises et évalueront le risque: Devrais-je prêter sur ce genre d'entreprises ou plutôt sur un autre type d'entreprise qui ne présente pas le même risque? Je pense que c'est simplement un résultat naturel, raisonnable et logique de ce type de loi.

M. Shepherd: J'ai posé cette question à l'Association des banquiers canadiens et ils ont semblé dire que ce n'était pas si grave. Mais compte tenu de vos commentaires, lorsqu'une si faible proportion de leur portefeuille total est investie dans des hypothèques commerciales, puis par définition une si faible proportion est investie dans des avoirs miniers, ce n'est peut-être pas si grave.

Une voix: Non, ce n'est pas si grave. C'est exact.

M. Steel: J'ignore s'il existe une étude comparable au Canada, mais une étude a été faite par l'agence de protection de l'environnement des États-Unis, intitulée «The Impact of Uncertain Environmental Liability on Industrial Real Estate Developments», ou l'impact d'une responsabilité incertaine en matière d'environnement sur les projets immobiliers industriels. Certains points se sont dégagés de cette étude. Une banque sur cinq a fait état du non- paiement des prêts hypothécaires, attribuable à la contamination de l'environnement et sept banques sur dix ont indiqué qu'il existait désormais certaines catégories de prêts que leurs institutions n'étaient plus disposées à consentir en raison des préoccupations que soulève la responsabilité en matière d'environnement.

Il ne fait donc aucun doute que ce type de loi aura des répercussions.

Le président: Avec l'indulgence du comité, j'aimerais simplement poser deux brèves questions. Premièrement, est-il facile de définir les biens personnels dans la loi? Est-ce une expression suffisamment courante pour que tout le monde sache de quoi il s'agit?

M. Steel: Oui. Je ne crois pas que cela poserait de problème. Dans certaines provinces, il existe un super privilège à la fois sur les biens immeubles et sur les biens personnels. Je crois queM. Mayfield a parlé de la loi de la Colombie-Britannique. Cette loi prévoit, il me semble, un super privilège sur les biens personnels et les biens immeubles.

.1145

Le président: Voici ma deuxième question. Monsieur Daniels, dans votre déclaration préliminaire, vous avez indiqué croire que votre association avait été oubliée lors des discussions finales portant sur cette question. Des discussions assez exhaustives ont eu lieu avec la plupart des parties intéressées, qui ont abouti au projet de loi. À votre avis, s'agit-il d'un oubli? Que s'est-il passé?

M. Daniels: Nous dirons qu'il s'agit simplement d'un oubli. Nous avons fait régulièrement des appels. Comme le comité le sait, monsieur le président, jusqu'à la fin il n'était pas clair que ce genre même de dispositions serait proposé en cas de contamination de l'environnement. Nous n'avons eu connaissance de cette proposition qu'au moment de la présentation du projet de loi. Disons simplement qu'il s'agit d'un oubli, monsieur le président.

Le président: Monsieur Assad, avez-vous une question?

M. Assad (Gatineau - La Lièvre): J'ai une brève question. En ce qui concerne les chiffres que vous avez cités sur les États-Unis et les ramifications, il ne fait aucun doute que les dispositions que vous avez proposées sont incorporées. Les banques hésitent beaucoup à prêter de l'argent pour un projet si elles savent qu'il comporte des risques au niveau de l'environnement car elles craignent d'engager leur responsabilité tout comme ceux qui ont hypothéqué l'immeuble. Vous pouvez comprendre que les banques préfèrent limiter leur rôle par crainte d'engager leur responsabilité.

M. Steel: Cela ne diffère aucunement de l'évaluation que nous devons faire lorsque nous consentons un prêt.

M. Assad: Sans doute, mais les banques préféreront sans doute limiter leurs investissements ou plutôt il deviendra plus difficile d'emprunter de l'argent auprès des banques si elles constatent, après analyse, que la situation comporte des risques sur le plan environnemental. Elles seraient tenues responsables de la décontamination au même titre que de l'hypothèque sur l'immeuble.

M. Daniels: Si vous me le permettez, monsieur le président, c'est tout à fait possible. Mais, monsieur Assad, vous comprendrez que notre crainte ici, c'est que l'industrie de l'assurance de personnes, qui assume le gros du fardeau en vertu de ce qui est prévu ici, se voit obligée de payer les pots cassés pour les établissements prêteurs.

M. Assad: Je comprends. Je crois que votre position est bien comprise et justifiée.

Une voix: Le fardeau doit être partagé.

M. Assad: Oui, il doit être partagé.

Le président: Je vous remercie beaucoup d'être venus nous rencontrer en compagnie de vos collègues et de nous avoir remis un mémoire aussi bien préparé. Comme vous pouvez le constater, mes collègues s'intéressent beaucoup à ce que vous avez à dire. Des hauts fonctionnaires sont également présents ici. Avant de procéder à notre examen final des modifications, nous nous assurerons de bien comprendre leur orientation et de débattre pleinement de vos préoccupations.

M. Mayfield: Permettez-moi d'insister sur ce que vous venez de dire. Un certain nombre de secteurs des milieux d'affaires ont indiqué qu'il s'agit d'une question qui les préoccupe beaucoup. J'espère que le comité et le ministère de l'Industrie examineront sérieusement cette question avant de donner suite au projet de loi. Je songe en particulier aux ramifications que cela pourrait avoir au niveau des prêts pour les industries d'utilisation des ressources, non pas que je veuille que la stabilité environnementale des régions en question soit compromise. J'estime que c'est une question très complexe qui nécessite un examen approfondi.

Le président: Je vous remercie. En l'absence de M. Bodnar, qui vient de nous quitter, puis-je partir du principe que les hauts fonctionnaires ont entendu ce qui vient d'être dit et comprennent les préoccupations exprimées par les membres et y donneront suite? Je vous remercie beaucoup.

La séance est levée jusqu'au mardi 1er octobre à 15 h 30, lorsque nous entendrons nos derniers témoins.

La séance est levée.

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