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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le vendredi 11 octobre 1996

.1505

[Traduction]

La présidente: Nous avons le plaisir d'avoir avec nous, cet après-midi, l'un de nos députés de la région, David Walker. Merci, David, d'être venu nous voir.

Nous recevons George Munroe, de Ma Mawi... ou est-ce votre nom traditionnel?

M. George Munroe (directeur général, Ma Mawi Wi Chi Itata Centre, Inc.): Non, c'est le nom de notre organisme.

La présidente: Nous nous réjouissons de vous accueillir, George. Nous recevons également Troy Orhling, de la Winnipeg Native Alliance, et soeur Bernadette, de Rossbrook House.

Nous avons choisi cette forme de discussion pour nos audiences aux quatre coins du pays. Nous estimons, en effet, qu'après avoir entendu des témoignages dans un contexte plus formel, il est bon de discuter avec les gens de la région de ce qui se passe et d'essayer de résoudre certains problèmes dont on nous a parlé.

Généralement, nous vous demandons de nous parler un peu de votre organisme et de ce que vous faites - juste quelques mots. Puis nous commencerons à vous poser des questions. Nous ne savons absolument pas où la discussion nous mènera, mais nous n'y voyons pas d'inconvénient.

Alors George, à vous de commencer.

M. Munroe: Je suis le directeur général du Centre Ma Mawi Wi Chi Itata, un organisme non autorisé de services à l'enfant et à la famille. La majeure partie de notre travail se situe dans le domaine de la prévention et de la défense des intérêts des familles. Nous essayons d'éviter que les enfants aient à être placés et nous travaillons en collaboration très étroite avec les organismes de services provinciaux à l'enfant et à la famille, les organismes autorisés ainsi que les organismes des premières nations. Nos bureaux sont situés à Winnipeg et nous travaillons exclusivement dans les limites de la ville. Nous n'allons pas à l'extérieur, même si nous avons travaillé avec des communautés des premières nations du Manitoba, de l'Ontario et d'autres provinces. Voilà, en quelques mots, ce que nous faisons.

La présidente: Comment êtes-vous financés, George?

M. Munroe: Nous sommes financés exclusivement par le gouvernement provincial.

La présidente: Merci.

Troy.

M. Troy Orhling (directeur, Winnipeg Native Alliance): Je suis le directeur de la Winnipeg Native Alliance. Il s'agit d'un centre d'accueil situé au 380, avenue Selkirk. C'est un organisme sans but lucratif qui fonctionne depuis environ un an et demi. La clientèle que nous desservons dans notre secteur est sans doute à 90 p. 100 autochtone. Il y a probablement 5 p. 100 d'Indiens non inscrits et les 5 p. 100 restants sont non-Autochtones.

Nous avons un programme d'action sociale dans le cadre duquel je visite différents établissements tels que des écoles, des institutions, le Manitoba Youth Centre, pour parler aux jeunes. Notre programme de prévention m'amène à aborder avec eux des questions telles que les activités des bandes organisées et la violence. Nous organisons un tas d'activités sportives et de programmes culturels et spirituels autochtones dans notre centre.

La présidente: Merci, Troy.

Soeur.

Soeur Bernadette O'Reilly (Rossbrook House): Je suis soeur Bernadette O'Reilly, de Rossbrook House. Rossbrook est un centre de développement communautaire qui existe maintenant depuis 20 ans, au coeur de Winnipeg.

Notre raison d'être est d'offrir aux enfants et aux adolescents une autre possibilité que celle de traîner dans la rue. Nous sommes ouverts tous les jours de l'année et, pendant les congés scolaires, nous sommes ouverts 24 heures sur 24. Nous restons ouverts en permanence tous les week-ends des mois d'été et des congés de Noël.

Au cours d'une année, nous avons une clientèle de 4 000 jeunes et le nombre total de visites dépasse 150 000. Il y a donc de nombreux enfants et adolescents qui passent par nos portes et leur nombre ne cesse d'augmenter.

.1510

Nous nous occupons de jeunes à risque ou qui ont déjà eu maille à partir avec la justice. Nous avons des programmes éducatifs, trois programmes scolaires qui sont reliés à Rossbrook House et un grand nombre de programmes d'auto-assistance. Nous avons aussi un programme pour les jeunes mères.

Notre personnel est recruté parmi notre clientèle. Les directeurs, dont je fais partie, sont des bénévoles et notre personnel est constitué des jeunes qui viennent à Rossbrook et qui reçoivent une formation pendant qu'ils travaillent chez nous.

Je pourrais en dire beaucoup plus, mais cela suffit peut-être pour commencer.

La présidente: Merci. Soeur Bernadette.

Je voudrais seulement signaler qu'il y a, parmi notre auditoire d'aujourd'hui, des représentants de la Southeast Assembly of First Nations qui sont là comme simples observateurs. Jim Bear, leur conseiller politique, m'a dit qu'ils nous soumettraient un mémoire par écrit.

Vous êtes les bienvenus et nous apprécions votre participation. Merci.

Monsieur Nunez.

[Français]

M. Nunez (Bourassa): Je vous remercie beaucoup de la présentation que vous avez faite au nom de votre organisme.

Quelle clientèle desservez-vous? Je sais que ce sont des jeunes, mais de quel milieu social sont-ils issus? Proviennent-ils de milieux pauvres? Éprouvent-ils des problèmes sociaux? Parlez-nous un peu de votre clientèle. Je ne sais pas qui veut commencer.

[Traduction]

Soeur Bernadette: Je pourrais peut-être commencer. Nous sommes un centre d'accueil situé au coeur de la ville. Les jeunes qui viennent nous voir vivent certainement dans la pauvreté. Presque tous les enfants et les adolescents qui viennent à Rossbrook sont de familles qui vivent de l'aide sociale, souvent depuis plusieurs générations. Ce sont surtout, mais pas exclusivement, des familles autochtones.

M. Munroe: Notre clientèle est entièrement constituée de familles autochtones. Nous essayons de travailler avec l'ensemble de la famille et pas seulement les jeunes. La majorité de notre clientèle vit dans la pauvreté. Elle vient de milieux socio-économiques différents, mais ce sont avant tout des familles pauvres.

M. Orhling: La plupart des gens dont nous nous occupons sont des jeunes Autochtones qui vivent de l'aide sociale. Leurs parents sont assistés sociaux. Ils n'ont pas beaucoup d'argent. Les enfants ont toujours faim. Nous avons un programme qui nous permet de les approvisionner en nourriture une fois par semaine. Certains de ces jeunes viennent de réserves différentes et sont en ville où ils fréquentent l'école de septembre à juin.

[Français]

M. Nunez: Est-ce que votre clientèle comprend des immigrants, jeunes ou adultes, issus de minorités ethniques? D'où viennent ces personnes? Y a-t-il ici un problème de criminalité chez les personnes d'origine ethnique, non pas les autochtones mais les gens venant d'autres pays?

[Traduction]

Soeur Bernadette: Je pourrais commencer encore une fois.

Les jeunes qui viennent à Rossbrook sont presque tous autochtones, mais nous avons aussi une vaste communauté portugaise ainsi qu'une communauté asiatique. Oui, il y a des problèmes de criminalité, surtout dans la communauté asiatique, mais nous ne recevons pas un grand nombre de ces jeunes à Rossbrook.

.1515

La présidente: Je pourrais peut-être vous interrompre un instant pour vous présenter Wayne Helgasson, du Social Planning Council.

Wayne, vous êtes le bienvenu. Si vous en ressentez le désir, n'hésitez pas à intervenir.

Continuez, monsieur Nunez.

[Français]

M. Nunez: Ma deuxième question a trait aux deux tendances qu'on constate aujourd'hui, soit ceux qui veulent des mesures très sévères pour faire face à la criminalité, particulièrement parmi les jeunes, et les autres qui mettent l'accent sur la prévention, l'éducation et le soutien aux familles, aux jeunes et aux enfants. Comment voyez-vous la loi actuelle? Est-elle suffisante? Doit-elle être plus sévère? Est-ce qu'on doit prendre des mesures particulières même si ce ne sont pas des mesures juridiques?

J'aimerais savoir également si le budget dont vous disposez pour financer votre organisme est suffisant. Est-ce qu'il y a eu des coupures ces dernières années? D'où vient cet argent? Est-ce qu'il vient des gouvernements provincial et fédéral et dans quelle proportion?

[Traduction]

M. Munroe: Je peux commencer.

Bien entendu, le financement a toujours posé un sérieux problème pour nous. Je pense que c'est la même chose pour tout le monde ici.

Mais le vrai problème, c'est qu'on semble trop centrer son attention sur la criminalité et les problèmes sociaux-économiques alors qu'il faudrait voir la situation dans son ensemble.

D'après nos études, la majeure partie de la population autochtone est âgée de 13 à 26 ans. Cela vaut pour l'ensemble du pays, et pas seulement pour Winnipeg. Malheureusement, le gouvernement fédéral et les provinces ne font pas grand-chose pour résoudre le problème de façon beaucoup plus globale.

Je voudrais m'éloigner de cette notion de crime et de châtiment, car le problème me paraît beaucoup plus profond. Certains membres de la société réagissent toujours instinctivement en blâmant les Autochtones pour tout ce qui va mal alors que cela ne se limite pas à la population autochtone.

En fait, il s'agit de voir comment améliorer le climat économique, social et politique pour les Autochtones qui vivent dans les grandes villes comme Winnipeg. C'est de programmes éducatifs, culturels, économiques et sociaux dont nous parlons ici.

Notre budget - si je peux revenir à cette question - a été sérieusement comprimé depuis trois ans. Le même problème existe certainement ailleurs. Je trouve très décourageant que le gouvernement fédéral ou provincial n'ait pas prévu quoi que ce soit pour s'attaquer sérieusement aux difficultés des jeunes qui ont maille à partir avec la justice.

M. Wayne Helgasson (directeur, Social Planning Council of Winnipeg): Je voudrais demander au comité de m'excuser de mon retard. J'en suis désolé.

La présidente: Wayne, ce n'est pas non plus le groupe le plus ponctuel qui soit.

Des voix: Oh, oh!

M. Helgasson: Je suis actuellement directeur général du Social Planning Council de Winnipeg.

En 1991 et 1992, nous avons entrepris des études sur les jeunes sans abri, l'interaction entre ces jeunes et les systèmes alors en place, y compris la justice, mais surtout les services d'aide à l'enfance. Également en 1991, nous avons publié un rapport sur la sécurité de la ville de Winnipeg pour les femmes et les enfants. J'en ai apporté des exemplaires que je vais vous remettre.

Avant d'occuper ce poste, je travaillais pour les services d'aide à l'enfance et de soutien du Centre Ma Mawi.

Je voudrais dire une ou deux choses.

Pour répondre à la question de M. Nunez, nous avons eu certaines difficultés il y a cinq ou six ans, tel qu'indiqué. Des jeunes Vietnamiens se sont associés à des membres de la communauté autochtone. La police de Winnipeg a déployé de sérieux efforts pour s'opposer à ces contacts. Il s'agissait, en fait, d'empêcher une association entre ces deux populations.

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Les dirigeants de la communauté nous ont dit que cela avait eu l'effet inverse. On semble avoir quasiment lancé un défi aux jeunes. Comme ces gens viennent de pays où l'État est très punitif, ces restrictions n'ont pas eu d'effet dissuasif. Il semble qu'on ait assisté au phénomène inverse.

Pour ce qui est de votre question quant à notre orientation générale, j'ai un document récent qui laisse entendre que les jeunes d'aujourd'hui, surtout à Winnipeg, mais c'est sans doute vrai pour l'ensemble du pays, s'inquiètent de leur avenir et du rôle qu'ils pourraient ou non être appelés à jouer dans la société que nous développons ensemble. Ils s'inquiètent de la situation de l'emploi et du fait que l'économie ne produit pas suffisamment. Le rôle ou la place qu'ils peuvent espérer sur le marché de l'emploi et les effets de la pauvreté qui en résultent incitent de nombreux jeunes à se livrer à d'autres formes d'activités. Le jour où nous pourrons offrir aux jeunes d'autres solutions que ces secteurs d'activités qui se développent... ce que nous constatons à Winnipeg dans des proportions alarmantes: je veux parler des jeunes qui s'organisent en bandes, ce qui représente un grave problème.

J'ignore si nous aurons un jour suffisamment de ressources, du côté des forces de l'ordre, pour combattre ce phénomène. Je crois qu'il y a plutôt, dans le secteur du bénévolat, dans le secteur communautaire et dans des quartiers ou des centres comme Rossbrook House et le Andrew Street Family Centre, des moyens bien réels d'orienter les jeunes vers des activités beaucoup plus constructives et productives, des services communautaires en transition, dans un certain sens.

Nous savons qu'à tous les niveaux, le gouvernement semble vouloir réduire ses dépenses. Nous espérons être en période de restructuration quand on voit le rôle que les associations de quartier et les associations communautaires - le troisième secteur largement défini de façon à inclure les associations et les groupes - peuvent jouer et ce qu'elles peuvent faire si on leur en confie la responsabilité.

Depuis plusieurs décennies, nous avons assisté à une institutionnalisation de nos services qui a été relativement inefficace. Le système pénal ou judiciaire est lent. Personne ne semble vraiment satisfait. Il est toutefois encourageant de tenir compte du rôle positif qu'un grand nombre de nos anciens, de nombreux leaders communautaires, peuvent jouer pour résoudre ces problèmes à un niveau très local. J'espère qu'on en tient compte pour résoudre certains des problèmes contre lesquels nous luttons tous.

La présidente: Monsieur Ramsay.

M. Ramsay (Crowfoot): Madame la présidente, je voudrais remercier nos témoins d'être venus aujourd'hui.

Wayne, nous savons que nous avons tous un horaire très chargé, alors ne vous en faites pas si vous êtes arrivé un peu en retard.

Je voudrais revenir sur ce que vous avez mentionné quant à la réduction du soutien financier. Vous savez certainement qu'en 1997, nous allons dépenser environ 50 milliards de dollars rien que pour rembourser l'intérêt sur la dette. D'après certains, ce qui menace le plus notre capacité de financer nos programmes de protection sociale, c'est la part de plus en plus importante des recettes qu'il faut consacrer à l'intérêt sur une dette qui ne cesse de croître. Cela peut faire disparaître certaines des branches les plus petites de l'arbre, ce qui est regrettable.

Bien entendu, on ne cesse de nous répéter qu'il faut redonner des pouvoirs aux communautés, aux premiers intéressés. C'est une simple question de bon sens. Le simple fait que nous voyagions d'un bout à l'autre du pays, pour écouter ceux qui représentent la population, révèle que c'est bel et bien un besoin.

.1525

J'espère - et nous verrons ce qui sortira de nos réunions aux quatre coins du pays - que les souhaits exprimés, surtout pour ce qui est de redonner aux communautés le pouvoir de faire face aux problèmes familiaux, aux problèmes des enfants, etc., se réaliseront et que nos ressources seront dirigées dans cette voie.

Des représentants comparaissent devant nous, des gens nous écrivent et nous téléphonent ou nous envoient des pétitions pour faire valoir les deux points de vue opposés. D'une part, on souhaite la réinsertion du jeune contrevenant ainsi qu'un dépistage hâtif et des mesures de prévention, et de l'autre, vous avez le faible pourcentage de jeunes qui commettent des actes de violence. Nous devons donc nous pencher sur le problème. Nous avons visité certains établissements de garde en milieu fermé et nous avons eu en face de nous des jeunes délinquants qui ont commis des crimes assez graves. Ils représentent une menace pour la société, à moins qu'ils ne puissent être réinsérés.

Je voudrais vous poser la question suivante. Quelles recommandations feriez-vous au gouvernement pour les jeunes délinquants violents qui ont purgé leur peine, mais qui n'ont pas été réinsérés, qui n'ont peut-être même pas voulu participer à certains programmes de l'établissement carcéral et qui risquent fort de récidiver s'ils sont libérés? Que devrions-nous faire en pareil cas?

Soeur Bernadette: Je dirais seulement que la situation que vous décrivez ne représente qu'un très faible pourcentage du problème. Je commencerais par examiner le système. Qu'avait-il à offrir à ce jeune délinquant? S'il n'a pas pu se réinsérer, c'est peut-être non seulement de sa faute, mais aussi à cause du système dans lequel il a été placé.

Quand vous vous retrouvez devant un échec, c'est peut-être de l'autre côté qu'il se trouve. Selon moi, il faudrait donc examiner ces deux aspects.

Je me base sur l'expérience de certains jeunes délinquants avec qui j'ai travaillé et qui, à leur sortie d'un établissement de garde en milieu fermé, sont pires que lorsqu'ils y sont entrés. Il arrive qu'ils n'aient commis qu'un délit mineur et qu'ils soient placés en milieu fermé parce que leur famille a trop de problèmes pour pouvoir faire face à la situation. Un jeune d'un autre milieu socio-économique aurait sans doute été renvoyé chez lui. Il ne fait aucun doute que les jeunes sont à l'école du crime en prison. Selon moi, il faudrait examiner tout le système et pas seulement les jeunes contrevenants.

À part cela, il est sans doute vrai que nous devons appliquer la loi et, si le jeune délinquant a purgé sa peine, il doit être libéré au même titre qu'un délinquant adulte, même s'il n'a pas été réinséré.

M. Ramsay: Je voudrais que Wayne, Troy et George répondent également à cela, s'ils le veulent bien.

M. Orhling: Chaque personne est différente et, ce qui vaut pour l'un ne s'applique pas nécessairement à l'autre. Pour un jeune, ce peut être un problème de toxicomanie et chez un autre, quelque chose qui ne va pas à la maison. Chaque personne est différente.

Pour les délinquants violents, il faut parfois un événement important dans leur vie pour les changer. Il se peut qu'ils aillent dans le système judiciaire et qu'ils ne changent jamais, quoi que vous fassiez. Ils peuvent rester dans ce système jusqu'à l'âge de 30 ou 40 ans. C'est eux qui choisissent ce que sera leur vie.

.1530

La meilleure chose à faire est d'établir quel est le véritable problème du jeune ou de sa famille, que ce soit un problème de toxicomanie ou des troubles psychologiques, et de prendre des dispositions en conséquence.

M. Ramsay: Merci. George, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Munroe: À mon avis, tout le processus de réinsertion sociale, non seulement pour les jeunes contrevenants, mais pour tous ceux qui ont été en prison, est très souvent un échec total étant donné que les gens ne cessent de retourner en prison. Nous travaillons avec l'établissement de Stony Mountain et le centre correctionnel Portage pour les femmes et nous voyons beaucoup de récidive. C'est dû, en grande partie, à la façon dont le système fonctionne et au fait qu'on ne donne pas à ces personnes le soutien dont elles ont vraiment besoin pour décider de ce qu'elles feront de leur vie.

Lorsqu'on a commencé à tenir des cérémonies dans les pénitenciers, il y a quelques années, il y a eu une vive opposition. Mais c'est le genre de choses qui permettent aux gens de s'exprimer sur le plan culturel. C'est très important pour les jeunes. Il faut chercher à stimuler leur amour-propre, à les rendre fiers de ce qu'ils sont et à les réintégrer dans la collectivité en leur donnant une raison de vivre.

C'est là que des organismes comme le nôtre, celui de Troy et celui de soeur Bernadette, doivent coopérer avec le système pénal pour chercher des moyens de le faire fonctionner beaucoup mieux. Pour le moment, il est évident qu'il ne fonctionne pas compte tenu de tous les problèmes qu'il y a dans la société.

Une initiative importante s'impose de la part du système pénal et des organismes communautaires comme les nôtres. Il faut que nous établissions un plan pour régler cette question de la réinsertion sociale.

M. Helgasson: On a certainement beaucoup discuté de la dette et du déficit et je pense que cela pose des défis, notamment en ce qui concerne le rôle de la Banque du Canada et la nationalisation de la dette. Néanmoins, dans certains cas, cela a mené à des discussions sérieuses non seulement sur le capital financier, mais aussi sur le capital social.

Dans le cadre de cette unité sociale à laquelle nous commençons à nous intéresser, il s'agit de voir comment la collectivité et les réseaux établis utilisent les ressources à leur disposition. Le rôle de la jeunesse, son attitude et les communications à ce niveau sont des aspects très importants d'un indice du capital social.

Je dirais plus précisément que, pour ce qui est des délinquants dont vous parlez, il s'agit de voir si leur incarcération a contribué d'une façon quelconque à préparer leur réinsertion sociale ou s'il s'agit d'un moyen de dissuasion qu'ils voudront éviter.

Cela dit, je crois que, dans des établissements comme Rossbrook - et je l'ai constaté pour avoir déjà travaillé avec des adolescents plus âgés, pendant un certain nombre d'années, dans un contexte relié à la fois au système pénal et au service d'aide à l'enfance - la connexion est importante. Je ne pense pas que notre système assure une connexion entre le jeune et la société.

J'ai dirigé le projet Flying on Your Own, à Alkali Lake où, si j'étais en retard comme je l'étais aujourd'hui, quelqu'un d'autre en assumait les conséquences. Nous voulions faire comprendre au jeune que tout le monde est guidé par une série de valeurs, mais que nous déterminons notre expérience en fonction des effets qu'elle aura.

Si le jeune pouvait profiter d'un centre comme Rossbrook, où il jouerait un rôle utile, guidé par un mentor, ou s'il avait quelqu'un d'autre pour l'épauler, il aurait un véritable soutien et la possibilité d'une réinsertion, mais notre système n'offre pas vraiment cela de façon uniforme. Vous avez, par-ci par-là, un travailleur social ou un agent de probation qui joueront un rôle important, mais nous n'examinons pas quelle est la solution qui marchera pour le jeune en question et nous ne veillons pas à la lui apporter dans le cadre de l'éventail de services disponibles.

M. Ramsay: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Ramsay.

.1535

La présidente: Monsieur Ramsay, je voudrais seulement mentionner que M. Lance Harper, de la première nation Cri de St. Theresa Point et M. Moses Okimaw, de l'assemblée des premières nations du Manitoba, se sont joints à nous spontanément.

Ai-je raison? Je ne peux pas très bien lire votre écriteau, Moses.

M. Moses Okimaw (Assembly of Manitoba Chiefs): C'est l'Assembly of Manitoba Chiefs.

La présidente: Merci.

Bienvenue. Pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet de votre communauté et du rôle que vous y jouez, Lance?

M. Lance Harper (Première nation Cri de St. Theresa Point): Je m'appelle Lance Harper et je viens de la première nation Cri de St. Theresa Point, qui se trouve à environ 412 kilomètres au nord-est de Winnipeg. Je suis le coordonnateur d'un projet qui est un système de tribunal pour la jeunesse du gouvernement indien. Il a été mis en place en 1980 à cause de la criminalité chez nos jeunes. Le principal problème, à l'époque, était l'inhalation de solvants et cela a mené à une série de consultations avec des groupes ressources. La communauté a dû intervenir pour aider ses jeunes et a donc mis sur pied ce tribunal de la jeunesse. C'est le seul du genre au Canada et il fonctionne depuis ce moment-là.

Voilà en quelques mots et je peux répondre à vos questions concernant notre programme et ce que nous faisons.

La présidente: Peut-être pourriez-vous nous parler de votre expérience à ce sujet.

Pour le moment, je vous poserai seulement la question suivante: la localité de St. Theresa Point est-elle située près de la région d'Elijah Harper?

M. Harper: Oui, nous sommes voisins.

La présidente: Nous le connaissons assez bien.

Moses, pouvez-vous nous parler un peu de votre rôle?

M. Okimaw: Je fais partie de l'Assembly of Manitoba Chiefs, qui regroupe une soixantaine de premières nations. C'est surtout une organisation politique et un groupe qui défend les intérêts de tous les membres des premières nations et je suis l'un de ses avocats.

La présidente: Nous ne vous en voudrons pas pour autant.

M. Okimaw: C'est seulement la semaine dernière qu'on m'a assigné ce domaine de la justice, quand vous avez appelé notre bureau. Merian nous a téléphoné et voilà pourquoi je suis ici.

Je me suis intéressé à la justice en tant qu'avocat. Quand je faisais mon stage, à Winnipeg, j'allais dans le vieux centre de détention provisoire pour m'occuper de cas de jeunes contrevenants. Je n'aimais pas cela. Je n'ai pas travaillé dans le domaine du droit pénal, simplement parce qu'il y avait trop de gens des premières nations au tribunal, pratiquement chaque matin. J'en connaissais certains et ils me demandaient ce que je faisais. Voilà pourquoi je n'ai pas travaillé dans ce domaine, mais je m'occupe de questions touchant la justice.

L'Assembly of Manitoba Chiefs estime qu'il faudrait avoir un système de justice distinct pour les Autochtones. La commission royale a présenté son rapport - le livre violet - et nous avons souscrit à la plupart de ses recommandations, surtout en ce qui concerne l'établissement d'un système de justice distinct et séparé. Nous allons donc travailler à l'établissement d'un système de justice séparé et distinct pour les peuples des premières nations, car c'est la seule façon, selon nous, de réaliser des progrès.

La présidente: Merci.

Comme vous pouvez sans doute le constater, nous ne suivons aucune règle. Lorsqu'un de nous pose une question, ceux qui veulent y répondre peuvent le faire. Il vous suffit de me le signaler et je vous accorderai la parole.

Monsieur Walker, voulez-vous commencer?

M. Walker (Winnipeg-Nord-Centre): Merci, madame la présidente.

Comme je connais beaucoup de gens ici, je préférerais que le comité continue son travail. Je dirais seulement que, si je puis me permettre une suggestion même si je ne participe pas à vos travaux, ce serait d'être sensible à la façon dont la communauté autochtone cherche à résoudre elle-même ses problèmes. Les solutions résident non seulement dans la justice pénale, mais aussi dans la justice sociale. Mais ils pourront vous l'expliquer beaucoup mieux que moi.

Je pense qu'à l'échelle nationale nous avons été très lents à comprendre comment résoudre le problème. C'est très complexe et très difficile pour le gouvernement fédéral, mais je pense qu'il vaut la peine d'écouter attentivement les solutions suggérées. Nous avons également ici des gens représentant divers organismes, comme Bernadette et Wayne qui travaillent dans ces milieux différents de la communauté autochtone - une tâche très difficile - des gens qui ont participé, en première ligne, à ce dur travail.

.1540

Je préfère m'assurer que vous compreniez bien, que vous vous sensibilisiez à ce genre de choses et que vous fassiez en sorte que cela se reflète dans votre rapport final.

La présidente: Merci.

Monsieur Maloney.

M. Maloney (Erie): Lance, j'aimerais beaucoup que vous nous parliez du système de tribunal pour la jeunesse du gouvernement indien. Comment cela fonctionne-t-il?

M. Harper: Tout d'abord, pour ce qui est du contexte, le système de tribunal pour la jeunesse du gouvernement indien que nous avons à St. Theresa Point a été mis au point pour répondre aux inquiétudes de notre communauté devant la criminalité et la délinquance chez les jeunes de notre première nation. À l'époque, le principal problème était l'inhalation de solvants et les effets que cela pouvait avoir sur le comportement de nos jeunes dans les réserves.

Le conseil de bande a lancé une série de consultations avec les membres de la communauté et les organismes du secteur de la justice pénale et des services sociaux pour s'attaquer à ces problèmes. Ces consultations nous ont conduits à examiner diverses questions, dont la nécessité d'intégrer les besoins de la communauté et les stratégies dans l'administration de la justice pénale à St. Theresa Point.

Au cours de ce processus, nous avons mis en lumière les besoins de la communauté. Il s'agissait notamment de la nécessité, pour la communauté, de reconnaître les problèmes reliés à la criminalité et de les résoudre et, pour les jeunes, d'apprendre à respecter les institutions communautaires, grâce à l'éducation.

Au lieu de mesures punitives, nous réformons et nous éduquons les jeunes. Par exemple, nous avons des artisans qui fabriquent des pagaies et des raquettes. Nous avons une série de lois communautaires, que nous appelons des lois sacrées, qui sont en vigueur depuis des générations. Elles ne sont pas gravées dans la pierre, mais ce sont les coutumes qui nous ont été transmises depuis des temps immémoriaux.

Disons, par exemple, qu'il y ait un vol par effraction au magasin. Plusieurs personnes de la communauté appellent l'équipe chargée de discuter de la situation. Cette équipe examine les faits et tient une conférence pour déterminer les mesures à prendre à l'égard du jeune. Au lieu de le punir, on lui donne quelque chose à faire, quelque chose de créatif et d'éducatif. Disons que le jeune devra, d'ici deux semaines, fabriquer une pagaie ou un objet de ce genre.

Cela donne de bons résultats. Notre programme amalgame à la fois le système judiciaire actuel et nos propres pratiques traditionnelles pour répondre à cette criminalité.

Nous avons également mis en lumière d'autres aspects reliés à la justice tels que la nécessité d'établir un système pour rendre le contrevenant responsable de ses actes, de traiter les jeunes contrevenants selon les normes et les traditions de la communauté, et d'intervenir dès le début, ce que ne fait pas le système de justice ordinaire.

Nous avons notre propre juge, qui est nommé par le chef, le conseil et le magistrat. Les audiences ont lieu deux fois par mois. Depuis sa mise en place, en 1982, ce programme a largement contribué à réduire la criminalité au sein de notre communauté.

Où que vous alliez, il y a toujours une certaine criminalité. Il n'est pas possible de la supprimer entièrement. Mais c'est une formule qui donne de bons résultats chez nous, et nous espérons que d'autres communautés suivront la même voie.

.1545

Mais pour ce qui est de formuler des recommandations d'ordre politique, notre programme a démontré sa viabilité au cours des années. Sa stabilité est menacée sur le plan du financement étant donné que le gouvernement poursuit ses compressions. Notre communauté est isolée et compte une population d'environ 2 400 personnes. Les débouchés pour les jeunes restent stagnants dans le domaine de l'emploi et des loisirs. Nous n'avons pas d'installations de loisirs chez nous.

Souvent, les jeunes ont une influence négative les uns sur les autres. Ils s'ennuient et sont découragés parce qu'il n'y a pas d'emplois. Ils inhalent des solvants et ce qu'ils voient à la télévision... par exemple, il y a également une certaine criminalité et des bandes organisées dans notre communauté.

Pour résoudre ce problème, nous avons procédé à une série de consultations pour les membres de notre communauté. Nos propres lois ont été appliquées. Le couvre-feu a été fixé à minuit pour tout le monde. Si vous êtes surpris au volant après minuit, votre véhicule vous est confisqué pour la nuit et vous devez aller travailler à pied le lendemain matin. Si vous recommencez trois fois, votre salaire sera saisi.

Par exemple, si vous avez cinq enfants et qu'ils enfreignent tous le couvre-feu, chacun d'entre eux doit payer 20 $. L'amende est prélevée sur votre chèque de paye.

Cela donne de bons résultats. Notre communauté est très paisible depuis que la bande a appliqué cette politique. Les parents ne veulent pas payer pour leurs enfants et veillent à ce qu'ils soient de retour à la maison à 10 heures. Cela donne de bons résultats chez nous. C'est dur, mais il fallait faire quelque chose.

La présidente: Merci.

Monsieur Maloney.

M. Maloney: Moses, comment envisagez-vous le système de justice autochtone? Comme celui de Lance ou autrement?

M. Okimaw: C'est exactement ce que nous envisageons quand nous parlons d'un système de justice autochtone distinct. Ils créent leur propre système dans leur propre communauté. Ils sont en mesure de faire respecter leurs lois et leur système par leur peuple.

Mais l'important est que les gens s'assujettissent eux-mêmes à ces sanctions et respectent le système mis en place par leurs dirigeants. C'est ce qui est important.

Lance a très bien décrit la raison pour laquelle nous devons mettre au point notre propre système en fonction de nos valeurs, de nos croyances et de notre sens de la justice. Je me réjouis donc de sa présence.

Voilà quelques-unes des réponses à vos questions. Nous devrions pouvoir élaborer nos propres systèmes au lieu d'être assujettis à la justice ordinaire, qui ne donne de bons résultats pour personne et encore moins pour les peuples des premières nations. Les femmes se plaignent du système, alors comment pourrait-il fonctionner pour les Autochtones? Voilà ce qui se passerait si nous étions autorisés à établir notre propre système.

La présidente: Merci.

Monsieur Nunez, vous avez cinq minutes.

[Français]

M. Nunez: Nous avons trop souvent recours à l'incarcération au Canada, particulièrement pour punir de jeunes contrevenants. Croyez-vous que l'incarcération donne les résultats escomptés ou qu'on devrait plutôt adopter des mesures de rechange comme le travail communautaire?

.1550

Est-ce que la prison est une bonne école pour les jeunes? Je pense que soeur Bernadette affirmait le contraire. Comment voyez-vous le système carcéral?

[Traduction]

M. Orhling: Je dois dire que c'est un aspect négatif. Dès qu'un jeune arrive au centre de détention, il commence par ressentir de la peur. C'est un endroit qui l'effraie vraiment. Il se cache aussitôt derrière un masque, un rôle de dur, pour se protéger. Il apprend très rapidement des autres qu'il faut être dur pour survivre dans ce milieu. Les faibles se font maltraiter. C'est la loi de la jungle.

Je ne pense pas que l'incarcération des jeunes soit la solution; c'est plutôt l'intervention et la prévention. La Winnipeg Native Alliance se rend au Manitoba Youth Centre. Je visite un pavillon par semaine. Je parle à une trentaine d'enfants à la fois. D'après leur attitude et ce qu'ils me disent, ils s'imaginent que leur présence là-bas leur confère du prestige. Ils pensent avoir accompli quelque chose et qu'à leur sortie, cela leur vaudra de l'admiration.

Je visite également une classe de l'école secondaire Gordon Bell. Il y a là dix membres d'une bande de jeunes délinquants. Cette classe a été spécialement choisie pour moi par la directrice, Brendar Longclaws. Certains de ces jeunes ont eu maille à partir avec la justice. Certains d'entre eux ont été incarcérés une ou deux fois. D'autres sont sur le point de se retrouver en prison. Ils doivent aller devant le tribunal et n'ont pas de très bons résultats scolaires.

Dans cette école, la bande locale s'appelle les Duces. Je vais parler à ces jeunes. J'emmène avec moi des victimes d'acte criminel. J'essaie seulement de leur faire comprendre dans quoi ils s'engagent et les répercussions auxquelles ils doivent s'attendre. Je me base sur ma propre expérience, car j'ai moi-même eu affaire à la justice.

Tout récemment, 50 billets de la World Wrestling Federation nous ont été donnés. J'en ai remis 25 à l'école secondaire R.B. Russell et quelques-uns à l'école Gordon Bell. Ces deux écoles sont assez éloignées l'une de l'autre. L'école R.B. Russell a la bande IP ou Indian Posse. À l'école secondaire Gordon Bell, c'est la bande des Duces.

La Winnipeg Native Alliance a fait venir Jake the Snake Roberts, de la World Wrestling Federation, pour parler à ces jeunes de la toxicomanie. J'ai dû faire venir les élèves de l'école secondaire Gordon Bell et les escorter à l'école R.B. Russell pour qu'il n'y ait pas de conflit.

La présidente: Cela fait cinq minutes. Monsieur Gallaway.

M. Gallaway (Sarnia - Lambton): Je voudrais poursuivre sur le même thème, car comme on vous l'a peut-être dit, c'est la première ville dans laquelle nous entendons beaucoup parler des bandes de jeunes délinquants. Je voudrais d'abord savoir si c'est exclusivement un problème autochtone ou un problème plus général?

M. Orhling: Non, ce n'est pas seulement autochtone. C'est la même chose pour tous les groupes ethniques. Il y a des non-Autochtones, des Blancs, des Philippins et des Chinois. Les bandes de cette ville sont en majorité autochtones et la plupart sont constituées de jeunes.

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M. Gallaway: Par conséquent, on peut dire qu'il s'agit surtout de jeunes Autochtones.

M. Orhling: Oui. C'est notamment dû au fait que nous avons la population autochtone la plus nombreuse.

M. Helgasson: C'est la même chose que pour la population carcérale.

M. Orhling: Les taux d'incarcération, au Manitoba, reflètent une forte participation autochtone.

M. Helgasson: Et c'est également très récent. Ce n'est pas...

M. Gallaway: Je comprends.

M. Helgasson: Oui. Si vous me permettez quelques observations personnelles, travaillant dans cette région urbaine depuis un certain temps et sachant que la sécurité est une question reliée aux jeunes... À Ma Mawi Wi, nous avions une assemblée de jeunes dont la première priorité cette année était la sécurité. C'est à la suite de cette préoccupation que nous avons établi le clan Bear. Il s'agit de bénévoles et d'autres membres de la communauté qui examinent le rôle que la jeunesse peut jouer à cet égard.

Il y a six ans environ, les Warriors ont cherché à faire le même genre de choses. C'est à propos des discussions sur le jeu et le reste. La sécurité est sans doute un secteur en expansion et nous avons fait des propositions à la police de Winnipeg pour amener les jeunes à participer à ce genre d'initiatives. Ce n'est pas sans rapport étant donné que, comme Troy l'a laissé entendre, les gens doivent être protégés dans une certaine mesure.

La sécurité pose un problème. Une formation a donc été dispensée. Nous avons formé15 Autochtones qui travaillent maintenant comme gardiens de sécurité, mais ils sont les... Leur rôle n'est pas toujours clairement défini. Je dirais seulement que les jeunes ont vu là un problème il y a quelques années, avant que les bandes de jeunes délinquants ne fassent leur apparition.

Selon moi, ces bandes sont seulement une forme mieux organisée d'une activité reposant sur des bases économiques. Je connais des jeunes qui ont des téléphones cellulaires et qui, à partir de l'hôtel St. James ou d'un autre hôtel, informent les autres des endroits où ils pourront trouver de l'alcool, de la drogue ou autre chose, car on les déplace régulièrement.

Mais le jeune qui a cherché du travail sans succès dans d'autres domaines, quand l'occasion se présente... Il n'a pourtant pas le genre à ça. Mais nos jeunes ont le sentiment de réussir quelque chose en jouant un rôle dans ces bandes et c'est ce qu'il y a de désolant.

Soeur Bernadette: Pour ce qui est de ma propre expérience, Rossbrook est un quartier où il y a beaucoup de bandes à l'heure actuelle. J'y réside également. J'habite à un coin de rue de là. D'une certaine façon, j'en apprends plus en vivant dans le quartier que par mon travail à Rossbrook, car ces activités se déroulent surtout la nuit.

J'ai l'impression que c'est surtout parce que les jeunes pensent qu'ils n'ont rien à perdre. Comme je l'ai dit, notre personnel est recruté parmi notre clientèle. Récemment, j'ai demandé à sept jeunes, âgés de 10 à 17 ans, de parler devant un groupe. Six sur les sept ont dit que, sans leur travail à Rossbrook, - certains sont bénévoles et d'autres sont payés - ils se livreraient à des activités illégales. Ils l'ont dit sans hésiter. Un jeune de 17 ans a dit que s'il ne gagnait pas de l'argent légalement, à Rossbrook, il en gagnerait illégalement et a mentionné des façons dont il le ferait.

C'est donc absolument essentiel. Un Américain expert des bandes de jeunes a dit que le dénominateur commun des activités de ces bandes dans les villes d'Amérique était la pauvreté. Ce n'est pas racial, si ce n'est que la race est reliée à la pauvreté.

Cet été, nous avons fait faire dix heures de travail bénévole par semaine à des enfants âgés de10 à 14 ans. Après avoir travaillé pendant dix heures par semaine, pendant l'été, ils ont reçu 200 $. Ils sont allés acheter des vêtements et des fournitures pour l'école. Trois de ces jeunes avaient déjà eu des démêlés avec la justice. Deux d'entre eux avaient été inculpés lors de la semaine de congé de mars. Comme ils s'étaient ennuyés pendant ce congé... En tout cas, aucun de ces dix enfants et adolescents n'a enfreint la loi au cours de l'été.

Quant on pense au coût d'une comparution en justice - ne parlons même pas du coût de l'incarcération - ces 200 $ par jeune pour l'été ont eu un rôle préventif. Je suis convaincue que les jeunes ont le sentiment qu'ils n'ont rien à perdre. Et c'est pour des raisons économiques qu'ils font des mauvais coups.

La présidente: George, aviez-vous quelque chose à ajouter?

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M. Munroe: Oui. Je voulais simplement commenter ce qu'a dit soeur Bernadette. C'est bien là que se situe le problème. La prolifération de la violence chez les jeunes est symptomatique d'un problème très grave.

Une étude a été faite ici. Elle a été publiée l'année dernière. Elle disait que nous étions la capitale de la pauvreté chez les enfants et les adolescents au Canada. Cela m'amène à croire que quelque chose ne va vraiment pas dans la façon dont nous cherchons à résoudre le problème. Tous les niveaux de gouvernement doivent examiner la situation de plus près et développer des possibilités, non seulement pour les jeunes, mais pour les communautés dans lesquelles ils résident.

Je n'aime pas compartimenter les problèmes en disant qu'il s'agit là d'un problème qui touche les jeunes, les femmes ou les personnes âgées. C'est un problème de société. C'est à cause de l'attitude que nous avons toujours adoptée. Les membres d'une société sont tous solidaires, surtout dans la communauté autochtone et nous essayons de voir notre communauté dans cette optique. Tout ce qui s'y passe nous touche tous, qui que nous soyons et quoi que nous fassions. Nous devons donc prendre les mesures qui se répercuteront sur le plus grand nombre de gens. Il faut faire quelque chose.

Il nous est souvent très difficile de nous faire entendre du gouvernement. Nous nous réjouissons certainement d'une occasion comme celle-ci de vous parler de notre découragement et du manque de soutien auquel nous avons dû faire face au cours des années. Mon ami Troy a eu énormément de difficulté à lancer son programme à cause d'un manque de ressources. Lance vient de décrire les problèmes qui existent dans sa communauté.

Ce n'est pas tant que le gâteau à se partager est plus petit. Il s'agit peut-être de rediriger certaines des ressources déjà disponibles vers les communautés où elles produiront le plus d'effet.

M. Ramsay: Lance, vous avez parlé de mesures très précises que vous avez prises. Cela m'intéresse beaucoup. Nous avons parlé un peu, mais pas tellement, du couvre-feu. Cela se fait. On a décrété le couvre-feu dans ma circonscription de Coronation, en Alberta. Le maire et le conseil municipal tentent d'imposer un couvre-feu de 11 heures pour les enfants d'un certain âge. Cette solution fait sa réapparition car elle semblait donner des résultats par le passé. Nous y avions mis fin. Il semble qu'elle soit de retour.

Nous avons également parlé plus longuement de tenir les parents responsables de ce que font leurs enfants. Vous semblez avoir pris des mesures qui se fondent sur ce principe. J'aimerais que vous nous en parliez un peu plus.

Premièrement, si j'ai bien compris, vous avez dit que le couvre-feu était imposé à partie de minuit pour tout le monde, si bien qu'on pouvait saisir le véhicule d'un adulte s'il était surpris au volant après minuit. Vous avez dit aussi que si c'est un adolescent qui conduit le véhicule, le parent perd 20 $ sur son chèque de paye. C'est, je crois, ce que vous avez dit.

Je voudrais vous demander si cette politique a obtenu l'appui de toute la communauté lorsqu'elle a été proposée?

M. Harper: Avant que le couvre-feu ne soit imposé, la bande a tenu une réunion ainsi qu'une série de consultations avec la population pour voir comment nous allions résoudre le problème du vandalisme, par exemple.

Disons que quelqu'un ne soit pas d'accord. Cette personne invoquera ses droits individuels. La communauté s'est penchée sur la question. Qu'en est-il de nos droits collectifs? Nous faisons cela pour notre communauté.

Nous n'avons pas à imposer le couvre-feu ou d'autres restrictions pour assurer la sécurité de nos communautés, mais ce sont des mesures nécessaires et c'est aux parents qu'en incombe la responsabilité. C'est à eux de veiller à garder leurs enfants à la maison à certaines heures... ou ils auront des problèmes de comportement.

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Par exemple, mon grand-père m'a raconté que, lorsqu'un arbre commence à pousser, s'il pousse dans la mauvaise direction et devient tout tordu, vous pouvez le redresser parce qu'il est encore jeune. S'il a déjà atteint sa taille adulte, il est très difficile de le redresser. C'est la même chose pour les jeunes. Il faut les traiter à un jeune âge et c'est la responsabilité des parents.

M. Ramsey: Quels résultats cette politique donne-t-elle dans votre communauté?

M. Harper: Les avis sont très partagés. Quelques personnes s'y opposent, mais elles doivent l'accepter quand même. Nous avons un autre moyen de dissuasion. Notre station de télévision locale diffuse le nom des gens qui se font prendre.

M. Ramsay: La divulgation totale.

M. Harper: Oui. Par exemple, si j'ai conduit après 1 heure du matin, mon nom sera diffusé le lendemain. Je veille toujours à rentrer chez moi avant minuit.

M. Ramsay: Et les jeunes? Leurs noms sont-ils...?

M. Harper: Oui, cela vaut pour tout le monde.

La présidente: Merci, monsieur Ramsay.

Monsieur Helgasson.

M. Helgasson: Je voudrais parler de la réalité urbaine à cet égard et appuyer la position adoptée par les premières nations dans leurs communautés. Je crois très important que certaines des mesures prises soient appuyées.

Dans un milieu urbain, cela devient un peu plus complexe, de toute évidence. Dans une ville comme Winnipeg, où nous avons des Métis et des Indiens non inscrits, 20 p. 100 des peuples des premières nations viennent de l'extérieur de la province. Un bon nombre sont originaires de l'Ontario. Mais cela ne veut pas dire que la capacité dont j'ai parlé n'existe pas dans notre pays. Je veux parler de la capacité de travailler en collaboration, comme le font les centres d'amitié, avec la police municipale, bien souvent, et d'autres organismes.

Il y a, dans les régions urbaines du pays, 114 centres d'amitié qui peuvent apporter de l'aide aux familles et aux jeunes. Par conséquent, je me dois de vous signaler qu'un des organismes externes ou de soutien qui pourraient collaborer à un nouveau plan, l'Association nationale des centres d'amitié, dont je suis actuellement le président, serait très intéressée à examiner des solutions dans une perspective urbaine.

Dans une large mesure, nous constatons, dans la plupart des grandes villes - et le fait est que70 p. 100 de la population autochtone vit en dehors des réserves, dans les centres urbains - que les solutions doivent être simplement élaborées en tenant compte de la perspective des premières nations et des Métis, et qu'elles doivent être appliquées par ceux qui vivent au sein de la communauté, qui travaillent et vivent comme les gens des centres d'amitié et des autres groupes urbains comme Ma Mawi.

Il est regrettable que le comité n'ait pas pris le temps de visiter une partie de l'infrastructure communautaire, les centres d'amitié comme Rossberg et Ma Mawi, le centre autochtone, qui a été emménagé dans l'ancienne gare, des organismes qui se penchent sur ce genre de choses et sont prêts à s'occuper des jeunes.

Il y a actuellement quatre programmes pour les jeunes dont deux du Service Jeunesse-Canada. Il y a là plusieurs anciens membres de bandes qui essaient de changer leur vie - et qui le feront sans doute s'ils ont le choix - et qui requièrent le soutien dont ils ont besoin.

Voilà donc quelques mots au sujet de la perspective urbaine et des centres d'amitié. Merci.

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La présidente: Merci.

Monsieur Maloney, aviez-vous une question?

M. Maloney: Oui. Pour en revenir plus directement à la Loi sur les jeunes contrevenants, on parle beaucoup d'abaisser l'âge et il y a des arguments pour et contre. Certains estiment que les jeunes de moins de 12 ans n'ont pas cette capacité. D'autres pensent qu'il faudrait un mécanisme pour régler le cas des jeunes contrevenants qui sont des délinquants chroniques ou graves. Comment envisagez-vous cela? Est-ce une bonne idée, une mauvaise idée et pourquoi?

M. Munroe: Comme nous travaillons surtout avec les familles et le groupe d'âge dont nous parlons, ce serait une très mauvaise idée, car cela ne ferait que créer davantage de problèmes. L'expérience de Stony Mountain, Headingley et la prison pour femmes de Portage nous ont montré qu'une cause importante de récidive est que le milieu carcéral devient une culture en soi. Cela contribue au problème quand vous commencez à vivre dans ce milieu; et plus vous commencez jeune, plus il est difficile de rompre le cycle. Par conséquent, si vous abaissez l'âge et mettez davantage d'adolescents en prison, vous ne ferez qu'aggraver le problème. Vous n'allez pas le résoudre.

Notre solution consiste donc à éviter que les jeunes se lancent dans ce genre d'activités. Et comme je l'ai mentionné, les ressources à cet égard sont malheureusement très limitées. Je suis très découragé, quand je regarde la situation à l'échelle nationale, de voir que le gouvernement n'a pratiquement tenu aucun compte du rapport sur la pauvreté chez les enfants et les familles. Je n'ai constaté aucune réaction. Quand on met en lumière ce genre de problèmes, cela révèle que la situation est bien réelle et qu'il faut y remédier.

Je sais que la commission royale a sillonné le pays pour recueillir des renseignements, auprès de la communauté autochtone, sur certains des problèmes que nous connaissons. L'incarcération n'est certainement qu'une solution de dernier ressort, selon moi, pour s'attaquer à un problème très grave.

Nous devons examiner le problème dans une optique globale. Vous ne pouvez pas le limiter à un seul élément. Vous devez voir la situation dans son ensemble et, si la pauvreté est la cause du problème, il faut se pencher sur la pauvreté. Nous devons nous y attaquer sous toutes ses formes et trouver une solution qui donnera aux familles la possibilité de se sortir de l'impasse socio-économique dans laquelle elles sont enfermées et qui devient la source de tous ces problèmes. Mais il ne faudrait certainement pas abaisser l'âge pour les jeunes contrevenants. Je considère que ce serait une mesure rétrograde.

La présidente: Soeur Bernadette.

Soeur Bernadette: Je voulais répondre à cela dans une perspective quelque peu différente. Je suis certainement d'accord pour dire que l'incarcération des jeunes enfants n'est pas la solution, quelles que soient les circonstances. Mais nous constatons souvent, dans le cadre de notre travail, que des jeunes plus âgés se servent d'enfants de moins de 12 ans pour commettre des actes criminels, parce qu'ils ne peuvent pas être punis. Je pense que ce système présente là une faiblesse réelle à laquelle il faut remédier dans la nouvelle loi.

M. Maloney: Comment?

Soeur Bernadette: Je pense qu'il faudrait punir ceux qui se servent des enfants. Il faudrait considérer que c'est un acte criminel et le punir sévèrement si des adultes ou des délinquants plus âgés se servent de jeunes enfants.

Mais je pense que des mesures de rechange peuvent être prévues afin que les jeunes enfants qui se livrent à des activités criminelles soient punis, mais pas par la détention. Il faut trouver un moyen de les aider à apprendre, car j'ai constaté que des enfants de 8 et 9 ans se faisaient recruter. C'est particulièrement vrai pour les activités des bandes organisées; ces bandes recrutent de très jeunes enfants pour se livrer à des activités criminelles et peuvent ainsi les entraîner dans une vie de délinquance.

C'est comme l'exemple de l'arbre que Lance a donné. S'ils sont détournés du droit chemin très jeunes, il leur sera difficile de choisir un autre mode de vie lorsqu'ils atteindront l'âge de 12 ans. C'est un choc énorme. J'ai vu des jeunes qui se font arrêter pour la première fois à 12 ans et qui se livraient déjà au même genre d'activité depuis deux ans.

La présidente: Merci.

Wayne.

.1615

M. Helgasson: J'aurais seulement une ou deux à dire pour abonder dans le même sens que soeur Bernadette.

J'étais un travailleur de l'aide à l'enfance quand cette loi a été déposée et a remplacé l'ancienne loi. Cela a causé des problèmes et des difficultés. Chacun sait qu'à un jeune âge vous pouvez... Vous le voyez en ce sens que le système ne prévoit rien pour les jeunes de 10 ou 11 ans qui se livrent à des activités criminelles graves. Il y a un échange entre les divers éléments du système à la suite duquel on semble insister pour que l'aide à l'enfance prenne la relève, du moins dans notre province. L'aide à l'enfance n'a jamais vraiment cherché à remédier à ce genre de problème.

L'enfant a-t-il besoin d'une protection? Peut-être que non. D'autres en ont peut-être besoin, mais ce n'est pas une question sur laquelle les services d'aide à l'enfance de la province ont voulu se pencher.

Je ne suis pas pour l'incarcération, mais s'il est possible de trouver, dans le cadre de la justice pénale, des solutions novatrices recommandées pour les jeunes de moins de 12 ans qui ont, de toute évidence, un comportement criminel, s'il est possible d'y remédier à cet âge-là, je serais d'accord. Je dirais que la justice pénale, sous une forme renouvelée et novatrice, pourrait s'occuper de certains de ces jeunes, encore une fois en faisant appel aux ressources communautaires.

Le Centre Ma Mawi a un système de justice pour les jeunes et de peines autres que l'emprisonnement. On s'intéresse beaucoup à ce qui pourrait être fait, dans le cadre du système pénal, à cet égard.

La présidente: Merci.

Monsieur Nunez.

[Français]

M. Nunez: J'apprécie beaucoup l'approche très humaine avec laquelle vous traitez des problèmes de criminalité et de délinquance. Ce matin, j'ai été bouleversé par des propositions draconiennes de certains témoins qui voulaient recourir aux punitions corporelles, à la peine capitale, à la douleur, au fouet, etc., pour combattre la criminalité.

Vous avez mentionné les causes sociales profondes qui engendrent la criminalité, soit la pauvreté, le chômage, la misère et les injustices sociales. Les gouvernements fédéral et provinciaux ne contribuent pas à solutionner ces problèmes avec leurs réductions budgétaires. Au contraire, ils les aggravent. Il y a beaucoup de criminalité dans les bidonvilles en Amérique latine parce que la pauvreté est associée à la criminalité.

Soeur Bernadette, quel rôle attribuez-vous dans la solution de ces problèmes de délinquance à la religion, aux Églises, aux écoles et aux parents?

[Traduction]

M. Munroe: Je pourrais peut-être commencer. Je n'ai pas trop d'espoir de ce côté-là.

Au niveau communautaire, nous avons essayé d'intégrer toutes les parties prenantes de notre communauté et les différents services qui s'y trouvent comme la police et les élus politiques. Nous avons essayé d'intégrer les diverses méthodes afin de regrouper nos efforts pour nous attaquer à ce très grave problème.

De toute évidence, il nous reste encore beaucoup à faire. Nous avons seulement commencé depuis quelques mois. Nous commençons à regarder notre communauté d'un autre oeil, en considérant la possibilité de faire participer certains éléments du secteur bénévole, comme Wayne l'a dit. Nous voulons réunir le milieu des affaires, la municipalité de Winnipeg, la police et tous les autres pour commencer à examiner le problème dans une optique beaucoup plus globale, parce que nous ne pouvons pas réussir à nous seuls.

.1620

Il est évident que si nous avions pu faire quelque chose, nous l'aurions fait depuis longtemps. Nous devons collaborer avec tout le monde. Cela comprend les églises et le secteur bénévole. Je crois qu'ils ont un rôle très positif à jouer.

Malheureusement, un bon nombre d'entre nous - je parle seulement pour moi et je ne voudrais pas donner une fausse impression - avons vécu de très mauvaises expériences avec l'Église. Si vous commencez à inclure les églises dans l'équation, vous allez créer encore davantage de problèmes. C'est ce que j'ai constaté personnellement. Mais je crois quand même que la solution consiste à unir nos efforts dans le contexte de la collectivité.

M. Helgasson: Je voudrais répondre par une mise en garde. Le document que je vous ai remis souligne les effets à long terme de la violence.

Ce que votre invité a proposé, je crois, pour ce qui est du fouet et des autres... Je dirais seulement qu'il y a sans doute des représentants des églises qui ont fini par comprendre - nous avons ici Stan McKay, de l'Église anglicane - et qui participent peut-être de façon plus productive que d'autres organismes.

Pour ce qui est du programme contre la violence familiale de Ma Mawi, par exemple, nous avons dépassé cette approbation de la violence contre les enfants. Nous avons pris fermement position pour ne pas retourner à cette époque.

Mais je m'arrêterai là. Y avait-il une deuxième partie à votre question?

M. Nunez: Non, c'est bien. C'était l'Église.

M. Helgasson: C'était le rôle de l'Église. Dans mon rapport, je fais allusion au nouveau livre intitulé The End of Work. Il y est question de cette conséquence que nous subissons tous.

Je crois que l'Église a un rôle à jouer. Il y a des aspects positifs dans le fait que ces personnes sont déterminées à aider leur prochain par des moyens spirituels ou religieux... Cela ne les empêche pas nécessairement d'accepter certains principes de la société. J'entends par là la société autochtone.

Selon moi, nous sommes à une époque où nous nous voyons forcés d'aller rejoindre les groupes et les personnes de ce qu'on appelle le troisième secteur. Avec la réduction de l'appareil gouvernemental et le milieu des affaires faisant ce qu'il fait, le reste d'entre nous représente le troisième secteur. Nous faisons partie de diverses associations, notamment du milieu des affaires, du Club Rotary et d'autres groupes, y compris les églises, qui ont été fondées pour des raisons différentes, mais qui s'inquiètent tout autant des défis auxquels notre jeunesse doit faire face.

M. Okimaw: Je voudrais seulement répondre à la question de la peine capitale. Si elle est rétablie, un bon nombre de ceux qui seront exécutés seront des Autochtones. S'il existe une corrélation entre la pauvreté et la criminalité, ces meurtres sont commis dans un accès de rage. La plupart d'entre eux ne sont pas prémédités.

D'autre part, en ce qui concerne la peine capitale, les études ont démontré qu'elle n'empêchait pas de tuer.

J'aimerais dire une dernière chose, à savoir que si l'individu n'a pas le droit d'ôter la vie, pourquoi l'État devrait-il en avoir le droit?

Pour ce qui est des églises, je répète ce que George Munroe a dit à savoir que nous avons eu malheureusement des expériences malheureuses. J'ignore quel rôle elles joueraient si ce n'est... j'hésite à le dire parce que soeur Bernadette est assise à côté de moi.

C'est tout ce que je dirai au sujet de l'Église et de la peine capitale.

.1625

La présidente: Je ne pense pas que vous ayez trop à craindre que le comité se penche sur la question de la peine capitale. Cela ne fait pas partie de notre mandat.

Troy, vous aviez quelque chose à ajouter.

M. Orhling: Je ne suis pas là pour promouvoir la spiritualité autochtone ou le christianisme. Je pense qu'en instillant certaines valeurs spirituelles aux enfants, à un jeune âge, on contribue à les conscientiser tout au long de leur vie. Tant que cela continue, c'est sans doute positif.

La présidente: Cela contribue également à vous attacher à votre culture.

M. Orhling: Oui.

La présidente: Soeur Bernadette?

Soeur Bernadette: Je pense avoir quelque chose à dire au sujet de l'Église. C'est un risque professionnel.

À mon avis, le rôle que doit jouer l'Église doit s'orienter davantage vers les membres de l'Église que les Autochtones. L'histoire de l'Église a été horrible vis-à-vis des Autochtones. Nous vivons dans une société malade sur le plan spirituel et l'Église doit chercher à guérir cette maladie, cette maladie qui fait que des gens vivent dans la pauvreté. La plupart des membres de l'Église ne sont pas pauvres. Je crois qu'il faut les mettre au défi de créer une société plus juste et de reconnaître les spiritualités différentes.

Nous ne sommes plus un pays chrétien. Notre société présente de nombreux visages différents. Les églises doivent reconnaître et soutenir les nombreuses formes de spiritualité.

La présidente: Je ne vois pas de meilleure façon de conclure, soeur Bernadette. Voilà qui est bien dit.

Je voudrais tous vous remercier d'être venus aujourd'hui, ceux qui s'étaient annoncés et ceux qui se sont présentés spontanément. Cela a été très enrichissant pour nous. Nous l'apprécions et nous avons eu deux journées très productives à Winnipeg. Merci.

Nous nous ajournons pendant une semaine à compter de lundi.

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