[Enregistrement électronique]
Le mercredi 1er mai 1996
[Traduction]
Le président: Je déclare la séance ouverte.
Je voudrais souhaiter la bienvenue à l'honorable Anne McLellan, ministre des Ressources naturelles. Nous poursuivons aujourd'hui l'étude du Budget des dépenses principal. C'est la deuxième de deux séances; la sous-ministre McCloskey était ici la semaine dernière.
Je m'excuse auprès des députés. Nous avons un peu de retard en raison d'un vote et nous devrons sans doute lever la séance un peu plus tôt en raison d'un autre vote. Aussi devrions-nous peut-être commencer sans plus tarder. Je demanderais à la ministre de nous présenter ses remarques liminaires.
[Français]
L'honorable Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Merci, monsieur le président, pour l'occasion que vous me donnez de discuter avec vous du Budget des dépenses principal du ministère des Ressources naturelles du Canada.
Je suis accompagnée aujourd'hui de plusieurs membres de l'équipe de gestion de mon ministère, que j'ai le plaisir de vous présenter.
[Traduction]
Comme je viens tout juste de le mentionner, je suis accompagnée aujourd'hui de plusieurs fonctionnaires de mon ministère: ma sous-ministre, Jean McCloskey; Yvan Hardy, sous-ministre adjoint, Service canadien des forêts; Mike Cleland, sous-ministre adjoint, Secteur de l'énergie; Marc Denis Everell, sous-ministre adjoint, Secteur des sciences de la terre; Simon Labrie, sous-ministre adjoint par intérim, Secteur des services intégrés; Bill McCann, sous-ministre adjoint par intérim, Secteur des minéraux et des métaux; Hugh MacEachern, agent des finances; et Monique Carpentier, gestionnaire des relations gouvernementales. Ils sont tous ici aujourd'hui pour m'aider à répondre à vos questions.
Lors de discussions antérieures concernant le Budget des dépenses principal, mes fonctionnaires ont décrit les grandes lignes des plans stratégiques et budgétaires du ministère. Aujourd'hui, je voudrais axer mon discours sur le rôle de mon ministère dans le secteur des ressources naturelles et sur l'importance de ce rôle pour le Canada.
Vous vous souvenez sans doute que le discours du Trône indiquait que:
- ...le gouvernement est disposé à se retirer des fonctions qu'il exerce dans des domaines tels
que... les forêts, les mines... dont la responsabilité convient mieux à d'autres instances, qu'il
s'agisse des provinces, des municipalités ou du secteur privé.
Je suis consciente que le retrait du gouvernement fédéral de programmes qui avaient financé des activités dans le secteur des ressources naturelles a engendré un certain mécontentement. Ressources naturelles Canada ne participe plus, par exemple, aux ententes de mise en valeur des ressources forestières et minières. Celles qui sont toujours en vigueur, notamment l'entente de mise en valeur des ressources minières avec la province de Québec, prendront fin à la date prévue initialement au Québec, soit en 1998. Ces ententes ne seront pas renouvelées lorsqu'elles arriveront à échéance.
Mais les activités de Ressources naturelles Canada s'inscrivent dans le sens des responsabilités fondamentales du gouvernement fédéral dans les secteurs où un effort national et la coordination à l'échelle nationale s'imposent, par exemple, le commerce et les investissements internationaux, la science et la technologie, les questions autochtones, la gestion des terres de l'État, les statistiques nationales et les questions environnementales.
Permettez-moi de vous parler des activités de mon ministère dans le domaine de la science et de la technologie. La réorientation de nos stratégies en ce domaine est la clef de notre nouvelle façon de faire des affaires.
Mon ministère a mis en oeuvre un programme de partage des coûts, d'abord en collaboration avec les provinces, puis avec l'industrie et les services publics provinciaux, pour l'acquisition de données numériques nécessaires aux fins de cartographie topographique. Le Réseau canadien de recherche développement sur les sables pétrolifères, le CONRAD, réunit neuf sociétés pétrolières, deux universités, trois organismes de recherche et un organisme provincial qui, ensemble, poursuivent des recherches environnementales, la récupération in situ, la valorisation des produits, de même que l'exploitation des sables et l'extraction du pétrole.
Mon ministère élabore des stratégies de luttes intégrées contre les ravageurs forestiers, incluant des mesures de lutte biologique contre les insectes ravageurs. En outre, RNCan met au point divers outils novateurs, notamment des systèmes d'aide à la décision pour accélérer la transition vers une gestion axée sur l'aménagement durable des forêts.
Ressources naturelles Canada utilise aussi l'autoroute de l'information pour transférer rapidement des données scientifiques et technologiques de haute qualité qui peuvent être organisées et récupérées selon les emplacements géographiques. Nos travaux relatifs à l'Infrastructure canadienne des données spatiales et au Service d'information de l'Atlas national ne sont que quelques exemples de l'engagement que nous avons pris de maintenir une excellente base de connaissances au sujet de la masse continentale du Canada.
Notre ministère cherche à consolider ses liens internationaux afin d'élargir les marchés existants et d'en créer de nouveaux, d'améliorer l'accès aux technologies étrangères et de collaborer aux efforts mondiaux qui vont dans le sens des priorités nationales. Dans le secteur des forêts, par exemple, Ressources naturelles Canada collabore avec d'autres pays à l'élaboration de normes internationales, de critères et d'indicateurs scientifiques et d'un système d'accréditation en matière d'aménagement durable des forêts.
Voilà seulement quelques exemples de nouvelles directions que nous suivons en science et en technologie et qui ont des incidences positives sur le bien-être social et économique du Canada. Je voudrais maintenant vous faire part de quelques exemples précis qui illustrent comment Ressources naturelles Canada entend poursuivre cette orientation au cours des trois prochaines années.
L'initiative des bâtiments fédéraux, ou l'IBF, est un programme novateur qui, directement et indirectement, rehausse la qualité de vie de tous les Canadiens. Ce programme a pour but de réduire la consommation d'énergie dans les bâtiments fédéraux d'un bout à l'autre du Canada et ce, en accroissant l'efficacité énergétique des activités liées à leur exploitation et celle de leurs systèmes fonctionnels.
En plus de contribuer à la réalisation d'épargnes financières grâce à la réduction de la consommation d'énergie, le gouvernement fédéral contribue à la réalisation de nos objectifs environnementaux, sans qu'il en coûte un sou au contribuable. Et nous encourageons d'autres ordres de gouvernement à adopter ce programme. La Fédération canadienne des municipalités, par exemple, travaille avec mon ministère en vue d'accroître l'efficacité énergétique des bâtiments et des installations municipales. Nous avons même une liste, une longue liste, d'entreprises du secteur privé qui se sont jointes à mon ministère dans le cadre d'un programme similaire dénommé l'initiative des innovateurs énergétiques, donnant ainsi l'exemple pour réduire le gaspillage d'énergie.
Sur le plan de l'environnement, le changement climatique est une préoccupation mondiale. Les gouvernements fédéral et provinciaux travaillent en étroite collaboration pour stabiliser les émissions de gaz à effet de serre dans le cadre du Programme d'action national sur le changement climatique.
Au cours de la présente année, mon ministère travaillera avec des organismes provinciaux qui s'intéressent aux questions énergétiques et environnementales pour évaluer nos progrès sur le plan pratique. Pour ma part, je continuerai de promouvoir le programme Défi Climat (mesures volontaires et registres), de même que des initiatives complémentaires. Actuellement, plus de500 entreprises participent à ce programme et nous avons pour but d'augmenter ce nombre.
Outre ces initiatives et bien d'autres, je me propose, au cours de la présente année, d'élaborer une nouvelle politique fédérale sur les minéraux et les métaux qui tienne compte des principes du développement durable. Je publierai un document faisant état de la stratégie de mon ministère sur le plan des énergies renouvelables. Je publierai aussi un document de discussion sur le développement durable qui servira de base aux consultations sur l'élaboration d'une stratégie d'ensemble pour le ministère dans ce domaine.
La croissance économique et la création d'emplois sont des objectifs prioritaires du gouvernement du Canada. Dans le secteur des ressources naturelles, les sables pétrolifères présentent un énorme potentiel de croissance. C'est un projet qui m'intéresse tout particulièrement en tant qu'Albertaine. On estime que les gisements recèlent plus de 300 milliards de barils de pétrole brut récupérable. Le Groupe de travail national sur les sables pétrolifères prévoit que les investissements liés à l'exploitation des sables pétrolifères, au cours des 25 prochaines années, atteindront 25 milliards de dollars et créeront 44 000 nouveaux emplois permanents dans l'industrie des sables pétrolifères. Des études ont d'ailleurs indiqué que les dépenses d'approvisionnement liées à ces projets s'étendront à plus de 50 groupes d'activités économiques partout au Canada.
Vous vous rappellerez que le ministre des Finances, Paul Martin, a annoncé des modifications importantes au régime fiscal, qui stimuleront les possibilités de création d'emplois et de croissance de l'industrie des sables pétrolifères de l'Alberta. Et par le truchement de ses activités de recherche et de développement, Ressources naturelles Canada contribuera à assurer la mise en place de perspectives prometteuses pour l'industrie des sables pétrolifères, pour l'Alberta et pour le Canada.
L'initiative des bâtiments fédéraux présente aussi un bon potentiel de création d'emplois et de croissance économique au Canada. J'ai donné les grandes lignes de ce programme il y a quelques instants. On estime que la mise en oeuvre de cette initiative par les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux créera 80 000 années-personnes d'emplois et ce, encore une fois, partout au Canada.
Nous sommes tous conscients des découvertes minérales extraordinaires qui ont été faites au Canada au cours de l'année dernière. En fait, pour la première fois depuis 1989, l'ouverture de mines et les réouvertures de mines au Canada l'emportent sur les fermetures. Cette activité de relance a créé quelque 2 300 emplois et engendré des retombées économiques importantes.
Dans le secteur de l'exploration minière au pays, la bonne nouvelle est liée à la perspective que les dépenses d'exploration atteindront 945 millions de dollars cette année, soit une augmentation de 24 p. 100 par rapport à l'année dernière et presque deux fois et demie de plus que les dépenses effectuées en 1992. Ces données montrent que le gouvernement du Canada respecte son engagement de créer un climat propice à la création d'emplois et à la croissance économique.
Mon ministère veille aussi à appuyer l'industrie minière au Canada. Vous avez peut-être lu dans le Financial Post d'hier que les gouvernements du Canada et de Terre-Neuve ont créé un comité intergouvernemental pour cerner et résoudre les problèmes liés à la réglementation. Cette initiative vise à accélérer la mise en valeur du gisement de Voisey Bay. Nous sommes résolus à réduire les contraintes imposées par les chevauchements et les dédoublements sur le plan des évaluations environnementales fédérales-provinciales.
Grâce à l'apport de mon ministère, le gouvernement du Canada joue un rôle important en vue d'assurer un avenir prometteur à l'industrie minière au pays. L'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs et l'Association des prospecteurs du Québec ont indiqué qu'elles tenaient à des modifications au régime des actions accréditives. Nous avons réagi, et mon collègue le ministre des Finances a réagi, en prolongeant de 60 jours 12 mois la période rétrospective liée à ces actions. Je peux vous assurer que les modifications proposées au régime fiscal concernant les activités d'exploitation minière et de gisement de pétrole et de gaz contribueront à la découverte de nouveaux gisements et à la création d'emplois dans les collectivités qui dépendent du secteur des ressources naturelles.
Ressources naturelles Canada maintiendra aussi sa participation aux travaux axés sur le renforcement de la compétitivité du secteur des ressources naturelles. En mettant au point des critères scientifiques sensés, en aidant les entreprises à acquérir l'expertise et les connaissances avancées dont elles ont besoin, et en participant aux missions commerciales d'Équipe Canada, le ministère contribuera au maintien et au renforcement de l'avantage concurrentiel du secteur sur le marché global. Cette année, par exemple, nos spécialistes des technologies énergétiques termineront la mise à l'essai de petites turbines conçues pour les marchés du Canada, de l'Europe de l'Est et de l'Asie du Sud-Est.
Mon ministère continue de fournir une expertise scientifique et technique irremplaçable à l'industrie géomatique du Canada, un chef de file à l'échelle mondiale. Avec des ventes annuelles qui atteignent actuellement un milliard de dollars, cette industrie affiche l'un des taux de croissance les plus rapides de l'économie du Canada. Comme vous pouvez le constater, ces activités de mon ministère sont d'une importance cruciale parce que la compétitivité accrue du secteur des ressources naturelles augmentera sa contribution à la balance commerciale positive du Canada, ce qui contribuera à la croissance économique et à la création de nouveaux emplois de qualité pour les Canadiens.
Comme vous le savez, le gouvernement continue de promouvoir et de nouer des partenariats. Les partenariats sont, naturellement, un élément clé du plan national d'unité de notre gouvernement. Ressources naturelles Canada a forgé et continuera de forger des partenariats fondés sur la collaboration étroite avec tous les ordres de gouvernement, nos clients et les autres intervenants. J'aimerais souligner certaines initiatives de partenariats auxquelles mon ministère participe.
En mars 1996, j'ai annoncé que nous étions prêts à signer un nouvel accord intergouvernemental sur les sciences de la terre. Cet accord constitue un jalon sur le plan des relations fédérales-provinciales concernant les inventaires géologiques. L'accord définit les rôles et responsabilités respectifs des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Il jette aussi les bases d'ententes bilatérales avec les provinces. Ce nouvel accord est un excellent exemple du potentiel de l'approche axée sur les partenariats.
En janvier 1995, le Conseil canadien des ministres des forêts a approuvé le Cadre de coopération en foresterie. Nos priorités englobent les domaines des sciences et de la technologie, les affaires internationales et le commerce international, le développement régional, la foresterie autochtone et la coordination des questions de portée nationale. Il convient de signaler, par ailleurs, que dix nouveaux réseaux de science et de technologie, opérant dans cinq établissements de recherche nationaux, parrainés par Ressources naturelles Canada, se penchent sur des questions nationales et internationales concernant le secteur forestier.
Dans le secteur minier, mon ministère continuera de poursuivre les buts visés par l'initiative minière de Whitehorse qui s'inscrivent dans le champ de compétences fédérales. Le ministère s'est engagé à favoriser le succès de ces nouveaux partenariats. Ressources naturelles Canada restera toutefois à l'affût d'autres possibilités de nouer des partenariats avec tous les ordres de gouvernement, le secteur privé et tous les autres intervenants.
Pour terminer, je tiens à vous signaler que Ressources naturelles Canada continuera de faire des progrès sur les plans du développement durable, de la création d'emplois et de la croissance des secteurs de l'énergie, de l'exploitation minière, des forêts et des sciences de la terre. Mon ministère continuera aussi de promouvoir le renforcement de la compétitivité internationale des secteurs des ressources naturelles et des secteurs connexes, de même que la bonne gérance de l'environnement.
Mon ministère continuera de créer des partenariats avec ses clients et ses intervenants, y compris les provinces, tout en renforçant les partenariats existants en vue d'améliorer la prestation des programmes et d'assurer une saine gestion publique. Je crois que l'approche de Ressources naturelles Canada constitue un excellent modèle d'efficience et d'efficacité pour la réalisation d'activités fédérales, qui s'inscrit dans le sens des objectifs exposés dans le discours du Trône.
Enfin, monsieur le président, j'aimerais dire quelques mots sur l'EACL, Énergie atomique du Canada Limitée. Je sais que certains d'entre vous s'intéressent tout particulièrement au défi que doit relever cette entreprise.
Comme je l'ai signalé à la Chambre, le budget d'EACL sera réduit, passant de 174 millions de dollars pour l'exercice de 1996-1997 à 100 millions de dollars pour l'exercice de 1998-1999. La société réduira certaines de ses activités pour se concentrer sur le maintien d'une filière CANDU rentable et compétitive à l'échelle internationale.
Je tiens à rappeler aux députés de ce comité que le gouvernement fédéral souscrit à l'importance de la science fondamentale et des résultats à long terme. Il doit toutefois appuyer des initiatives de recherche-développement qui permettront au Canada d'être innovateur et compétitif à plus court terme. Étant donné nos contraintes budgétaires, il nous est impossible d'appuyer tous les secteurs de science fondamentale. Il faut faire des choix difficiles.
Dans le domaine de l'énergie nucléaire, la priorité du gouvernement se porte sur la filière du réacteur CANDU. L'électricité produite par les réacteurs CANDU est aujourd'hui une réalité commerciale. En outre, le CANDU est un produit compétitif qui a de bonnes chances de soutenir la concurrence à l'échelle internationale.
Les ventes à l'étranger de la technologie liée au réacteur CANDU créent d'importantes retombées pour le Canada. Les projets de construction de trois réacteurs CANDU en Corée du Sud, par exemple, ont engendré des contrats avec des entreprises canadiennes dont la valeur se chiffre à plus de 1 milliard de dollars, de même que la création d'emplois de qualité.
[Français]
Monsieur le président, cela met fin à ma présentation concernant le budget des dépenses principal de mon ministère et d'EACL.
[Traduction]
Permettez-moi de terminer en invitant les membres de ce comité à participer aux activités de la Semaine nationale de l'arbre et des forêts et de la Semaine minière du Canada. Il s'agit de deux événements très importants, certainement aux yeux des membres de ce comité qui s'intéressent tout particulièrement au secteur des ressources; je vous demanderais de sensibiliser vos commettants et les Canadiens à l'importance du secteur des forêts et du secteur des mines pendant ces deux semaines importantes. Mon ministère prévoit organiser des événements non seulement sur la Colline parlementaire et à Ottawa, mais dans toutes les régions du pays.
Je crois qu'il importe que les députés deviennent des intervenants importants lors de ces semaines et qu'ils aident le plus grand nombre de Canadiens possible à comprendre l'importance de ces deux secteurs clés au sein de l'économie canadienne. Je compte sur votre aide et votre collaboration lors de ces deux semaines spéciales.
Cela conclut ma présentation. Merci. Mes gestionnaires et moi serons maintenant heureux de répondre à vos questions.
Le président: Merci beaucoup, madame la ministre.
Nous commencerons par un représentant du Bloc, M. Canuel.
[Français]
M. Canuel (Matapédia - Matane): Comme c'est la Semaine de l'arbre et des forêts, du 5 au 11 mai, je commencerai par la forêt, mais j'ai auparavant un commentaire général à faire.
Après avoir entendu des sous-ministres, la semaine dernière, et par suite de la présentation du Budget, je m'inquiète réellement quand je constate que le budget du ministère diminue de presque50 p. 100.
Pour moi, c'est un non-sens, parce que les ressources naturelles d'un pays sont celles qui permettent de créer de nombreux emplois à coût modique. Quant aux emplois créés en foresterie, essayez de les comptabiliser. Vous allez alors constater qu'on en arrive à un taux minime.
Pour moi, c'est une tragédie que de voir un ministère dépouillé de l'argent nécessaire à la recherche et au développement et être obligé de couper des emplois dans ce domaine. On y reviendra plus loin et mon collègue aura sûrement des questions à poser sur le projet du tokamak de Varennes. Ce n'est pas acceptable et il faudrait réellement s'interroger là-dessus.
Quand on voit le ministre des Finances mettre la hache et diminuer de 50 p. 100 le budget d'un ministère, on peut se demander si un tel ministère a encore sa raison d'être.
Je reviens plus précisément à la foresterie. Au cours des années 1983 à 1996, le gouvernement fédéral a mis en oeuvre, dans la région du Bas-Saint-Laurent, dans la grande région de la Gaspésie, le programme de développement de l'Est du Québec, qu'on appelle communément le Plan de l'Est.
Ce programme, qui s'adressait aux petits propriétaires de boisés privés - au Nouveau-Brunswick, il y avait autre chose - était quand même très bien. Il a été mis sur pied afin de donner une aide exceptionnelle à une région aux prises avec une situation économique très difficile. Sept des dix MRC les plus pauvres du Québec s'y trouvent.
Ce programme offrait à ces propriétaires de l'aide technique et financière pour l'exécution de travaux sylvicoles. Il a également permis la mise sur pied d'initiatives régionales complémentaires telles que le Service d'extension en foresterie, à Causapscal, le développement d'une capacité géomatique appliquée à la foresterie et un autre programme formidable, Essais et Expérimentation.
Le Plan de l'Est a pris fin, comme vous le savez tous, le 31 mars dernier. Le gouvernement du Québec devait prendre la relève sauf en ce qui a trait aux trois services que je viens de mentionner.
J'aurais quelques questions pour Mme la ministre. Elle pourra les prendre en note, mais si elle préfère répondre immédiatement à chacune d'elles, elle le pourra.
Mme la ministre peut-elle me dire quelles mesures concrètes elle entend prendre pour assurer la poursuite de ces activités, après le 31 mars prochain, dans les trois domaines que j'ai mentionnés?
Les gens de chez nous, de toute la Gaspésie et du Bas-Saint-Laurent, entre autres le syndicat des producteurs et d'autres personnes que vous connaissez très bien, madame la ministre, parce qu'ils sont venus ici l'année dernière, sont très inquiets. Seriez-vous prête à les rencontrer de nouveau? Ils m'ont demandé de vous transmettre cette demande. Quand pourriez-vous les rencontrer?
Seriez-vous également prête à mettre sur pied un groupe de travail composé de fonctionnaires de votre ministère, bien sûr, et de gens de la région dont le mandat serait d'identifier des solutions à nos différents problèmes?
J'aurais une dernière question sur la foresterie. Dans une lettre que vous adressiez vous-même aux trois présidents des Syndicats de l'Office des producteurs de bois de l'Est du Québec le28 décembre dernier, vous affirmiez, et je vous cite, madame la ministre:
- Ces considérations n'excluent pas le développement de nouveaux partenariats avec des
organismes gouvernementaux ou non gouvernementaux, puisque le transfert technologique
représentera de plus en plus une priorité pour le SCF.
Je reviendrai par la suite sur le projet de Varennes.
[Traduction]
Mme McLellan: Je dois vous remercier, monsieur Canuel, des arguments que vous avez présentés pour que le ministère obtienne un budget plus important.
Cela dit, je crois qu'il est quelque peu ironique qu'à titre de représentant du Bloc québécois, vous demandiez que mon ministère joue un rôle accru dans un secteur qui, d'après certains, tout particulièrement le gouvernement du Québec, relève principalement de la compétence provinciale, soit le secteur des mines et des forêts. Le gouvernement du Québec est un de ceux qui exhortent avec le plus de vocifération le gouvernement fédéral à identifier ses principales zones de responsabilité et à confier aux provinces les tâches dont elles sauraient mieux s'acquitter. Nous l'avons fait; en général nous l'avons fait en collaboration avec les provinces, quoique l'on ait noté que lorsqu'on se retire de programmes comme les EMVRF et les EEM, il arrive souvent que les provinces qui veulent assumer la responsabilité de ces secteurs demandent quand même au gouvernement fédéral de continuer à payer la note.
Vos questions doivent donc être placées dans ce contexte, à savoir que les secteurs des forêts et des mines relèvent principalement des provinces. En fait, c'est une des principales raisons pour lesquelles nous avons cessé de participer aux EMVRF et aux EEM. Les EMVRF et le Plan de l'Est, qui est en fait une EMVRF, offraient dans des collectivités locales, dans l'Est du Québec, dans la région de Gaspé, et dans d'autres petites collectivités du pays, nombre de services importants, tout particulièrement aux propriétaires de boisés privés.
Mais le fait est, monsieur Canuel, que le gouvernement du Québec dirait qu'il s'agit là essentiellement d'une zone de compétence provinciale. La gestion des forêts, qu'elles appartiennent ou non à des propriétaires de boisés privés, est principalement, sinon exclusivement, une question de compétence provinciale. La responsabilité du gouvernement fédéral est de déterminer sa sphère de compétence et d'assumer les responsabilités qu'il tient pour étant les siennes.
Vous savez mieux que quiconque, monsieur Canuel, que les sciences et la technologie... Nous avons un important institut de recherche forestière dans notre province. Nous en avons quatre autres. Ces centres font des travaux de recherches d'importance nationale qui seront à l'avantage de toutes les provinces et de tous les Canadiens, qu'elles visent les boisés privés ou les terres de l'État.
Le fait est, monsieur Canuel, que nous ne pouvons pas continuer à faire tout ce que nous avons fait par le passé, parce qu'il en est résulté un déficit et une dette qui sont, comme l'a signalé le ministre des Finances, absolument insupportables. Pour assurer une bonne administration et maintenir l'unité nationale, il nous faut donc faire le partage des responsabilités entre le palier fédéral et le palier provincial.
Quant à de nouveaux partenariats avec des organisations gouvernementales ou non gouvernementales oeuvrant dans le secteur des forêts, nous sommes toujours disposés à discuter de la façon dont les activités qui découlent de nos responsabilités fédérales peuvent aider les gouvernements provinciaux ou municipaux ou même les organisations non gouvernementales. Cependant, nous n'avons pas un budget illimité où nous pouvons puiser pour conclure de nouvelles ententes ou de nouveaux partenariats.
Les gens doivent comprendre qu'ils ne peuvent pas simplement s'adresser à nous, à mon ministère ou à d'autres, pour obtenir de nouveaux programmes qui nécessitent l'investissement de sommes importantes. Mais si vous voulez discuter de la façon dont nos travaux scientifiques peuvent venir compléter les vôtres, répondre aux besoins en matière de recherche des propriétaires de boisés privés, nous serons heureux de le faire. Cela représente le type de partenariats stratégiques qui sont à l'avantage du pays et qui seront encore à son avantage au XXIe siècle.
Le président: Merci, madame la ministre. Nous reviendrons aux députés bloquistes lors du deuxième tour de questions. Nous passons maintenant à un député du Parti réformiste...
[Français]
M. Canuel: Cela ne fait pas dix minutes.
[Traduction]
Le président: Non, il s'agit de dix minutes par parti, puis nous passons à un tour de cinq minutes par parti.
[Français]
M. Canuel: Cela ne fait que quatre minutes.
[Traduction]
Le président: Nous avons commencé à 16 h 38 et ma montre indique 16 h 49.
[Français]
M. Canuel: Mme la ministre a mis du temps à répondre. Je n'ai qu'une petite question.
[Traduction]
Le président: Oui, mais vous avez également présenté un long préambule. Nous reviendrons à vous plus tard. Ne vous inquiétez pas.
Monsieur Strahl.
M. Strahl (Fraser Valley-Est): Merci, monsieur le président.
Bienvenue, madame la ministre. La visite d'un ministre est toujours un moment important pour un comité.
Un peu plus tôt aujourd'hui, je vous ai fait parvenir par télécopieur un communiqué que j'ai préparé. Vous nous avez demandé où nous pouvions économiser et je vous ai donné quelques exemples de gaspillage.
Mme McLellan: Je n'ai pas vu ce document.
M. Strahl: Je sais que malheureusement, vous ne l'avez pas reçu personnellement, même si la transmission a été faite à 10 heures. Je le regrette parce que même si j'ai fait tout ce que je pouvais pour que vous receviez ce document, vous ne l'avez pas reçu. J'ai des exemples de... Je ne sais pas... Comme je l'ai dit, j'ai essayé de vous donner un certain préavis pour que vous puissiez répondre à mes questions.
Mme McLellan: Ni ma sous-ministre ni mon adjointe législative n'ont vu ce document.
M. Strahl: Non, je viens de lui en donner une copie, mais on l'a expédiée par télécopieur à votre bureau ce matin.
Je pourrais parler de certains des exemples que je présente dans ce document. En fait, je vais le faire. Par exemple, parlons de la location de bureaux dans un immeuble qui se trouve à l'angle des rues Robson et Seymour à Vancouver. J'ai cru comprendre qu'il y a beaucoup d'espaces à bureaux qui y sont loués depuis mai l'année dernière, des locaux qui sont vides depuis plus d'un an. Est-ce vrai? Cela représente beaucoup...
Mme McLellan: Je demanderai à Marc Denis de répondre à cette question.
M. Strahl: En attendant qu'il arrive à la table des témoins, j'aimerais vous donner certains détails. On m'a dit que les premier, quatorzième et quinzième étages de cet édifice sont libres. Toutes les questions que je pose dans ce communiqué portent...
Je veux faire ressortir deux choses. Tout d'abord, je veux que l'on comprenne qu'il y a des secteurs où vous pouvez économiser; mais ce qui est encore plus important, c'est que je crois déceler une tendance au sein de votre ministère à refuser de me donner les renseignements que je demande. On me dit toujours d'avoir recours à la Loi sur l'accès à l'information.
Voyez l'exemple huit sur ce communiqué; je demande ce qui se passe et on me dit qu'on ne me parlera pas et que je devrais invoquer la loi sur l'accès à l'information». Je ne suis pas du tout heureux de cette situation et j'espère que cela ne vous plaira pas non plus. Si je dois toujours avoir recours à l'accès à l'information simplement pour savoir pourquoi cet immeuble est inoccupé depuis un an, cela me pousse encore plus à me poser des questions. Je ne crois pas que cela représente un usage judicieux de mon temps ou des services du commissaire à l'information.
J'aimerais savoir si un de vos fonctionnaires peut me dire ce qui se passe.
Mme McLellan: Très bien. J'aimerais vous présenter Marc Denis Everell, un de mes fonctionnaires. Voulez-vous répondre?
M. Marc Denis Everell (sous-ministre adjoint, Secteur des sciences de la terre, ministère des Ressources naturelles): Oui, évidemment. Je ne pourrai peut-être pas donner une réponse complète, parce qu'on m'a pris de court.
L'immeuble dont vous parlez est celui qui sera occupé en partie par la CGC à partir du mois de septembre. Il est loué par Travaux publics et nous sommes en fait les locataires de ce ministère. Je ne connais pas les détails de l'entente financière que Travaux publics a conclue avec les propriétaires de l'immeuble.
Je peux cependant vous dire que nous nous servirons d'une partie de cet immeuble pour réduire certains de nos coûts pendant une période donnée en utilisant moins d'espace ou peut-être en utilisant mieux l'espace, un espace qui est plus accessible à nos clients de Vancouver. Ainsi, à notre avis, cela nous permettra de réaliser des économies à long terme; cependant je ne peux pas vraiment vous donner de détails sur l'entente qu'a conclue Travaux publics avec les propriétaires de l'immeuble.
M. Strahl: Très bien. Je suppose que vous essaierez de me procurer ces réponses.
Mme McLellan: Oui. Nous répondrons à tous les commentaires que vous avez faits dans ce communiqué.
M. Strahl: Très bien. On m'a dit que cet immeuble est libre depuis déjà un an; s'il ne doit pas être utilisé avant septembre, cela représente un bail de quinze mois pour un immeuble vide, c'est donc une longue période et cela a dû coûter près d'un million de dollars.
Mme McLellan: Je suppose que vous devrez en parler à Travaux publics parce que ce sont eux qui signent des contrats au nom du gouvernement du Canada.
M. Strahl: Permettez-moi de vous exposer l'autre problème - en fait,je ne sais pas comment vous pouvez contrôler cela - mais entre octobre et janvier l'année dernière, alors qu'on apportait des réductions aux effectifs et qu'on procédait à l'examen des programmes, les Ressources naturelles ont dépensé plus d'un million de dollars pour des services temporaires. Cela représente... je n'ai pas tous les renseignements, mais tout semble indiquer que des employés temporaires ont travaillé quelque 48 000 heures pendant cette période, à un salaire moyen de 16,86 $ l'heure. Tout cela à une période où vous avez licencié 100 employés de bureau. Tout cela semble représenter beaucoup de services temporaires en période de décroissance. Au lieu de dépenser un million de dollars pour des services temporaires, n'auriez-vous pas pu maintenir en poste certains employés permanents ou réembaucher certains employés mis à pied?
Mme McLellan: Je vais demander à la sous-ministre de répondre à cette question.
Mme Jean C. McCloskey (sous-ministre, ministère des Ressources naturelles): Merci, madame la ministre. Nous avons un comité et un programme de réaménagement de l'effectif très actif au ministère. Nous nous préoccupons énormément de l'incidence que les décisions prises par les ministres dans le cadre de l'examen des programmes ont sur nos employés. Vous savez sans aucun doute que quelque 1 600 postes seront éliminés pendant les trois années du premier volet de l'examen des programmes... et nous savons déjà ce qui se passera au cours du deuxième volet.
Nous avons donc mis en place un processus que nous avons élaboré en collaboration avec les syndicats représentés au ministère et, évidemment avec la direction du ministère, selon lequel chaque fois que nous devons doter un poste, nous regardons la liste des employés disponibles au ministère même, soit parce qu'ils sont en affectation soit parce qu'ils sont excédentaires, qui pourraient exercer les fonctions du poste.
Parfois nous trouvons quelqu'un, parfois pas, soit à cause du lieu de travail, des compétences ou d'autres critères, mais cette question nous préoccupe énormément et je pense que nous avons bonne réputation en ce qui concerne la façon dont nous traitons nos employés.
M. Strahl: Très bien. Là encore, j'aimerais savoir combien... Vous consacrez beaucoup d'argent aux services d'employés temporaires au moment même où vous réduisez le nombre d'emplois et licenciez du personnel de bureau. En règle générale, les employés temporaires sont des employés de bureau. Cela représente une somme considérable lorsque vous licenciez du personnel. Voilà ce que je voulais dire.
Mme McLellan: Nous pouvons vous fournir des renseignements plus détaillés sur ces dépenses.
M. Strahl: Je dois passer par l'accès à l'information pour tout, parce qu'on ne veut pas me parler au ministère. Cela ne me plaît pas. Je préférerais ne pas avoir à le faire mais je dois...
Mme McLellan: Comme vous le savez, monsieur Strahl, il y a une procédure officielle qui permet d'obtenir de l'information au gouvernement fédéral. Je pense que dans de nombreux cas, il faut avoir recours à cette procédure afin de s'assurer que l'on respecte les règles en matière d'accès à l'information.
Toutefois, je parlerai à mes fonctionnaires, car je pense qu'il y a probablement des demandes - je pense qu'il serait utile que les fonctionnaires du ministère s'entretiennent avec vous des questions - pour lesquelles il est préférable de suivre la procédure officielle d'accès à l'information. Je vais certainement leur parler et leur demander d'en discuter avec vous de façon à ce que nous définissions dans quels cas il n'est pas nécessaire de faire une demande officielle d'accès à l'information. Je vais m'en occuper.
M. Strahl: Comme je l'ai dit, on peut regarder toute la liste, mais je dois soulever ces questions ici, parce que personne ne veut me parler.
L'autre exemple que j'ai est celui d'un Blazer, toutes options comprises, pour 34 000 $. C'est bien beau; c'est même mieux que le véhicule que vous pouvez vous payer comme ministre. À quoi sert ce véhicule et qui en est le conducteur? Personne ne veut me le dire. On me répond d'invoquer la Loi sur l'accès à l'information.
Mme McLellan: Je pense qu'il s'agit d'un véhicule du ministère et vous avez parfaitement le droit de savoir qui s'en sert et pourquoi. Les contribuables canadiens ont payé ce véhicule. Je vais m'assurer que vous obteniez cette information.
M. Strahl: Merci. Je vous en serais reconnaissant. Je me suis toujours bien entendu avec le personnel de votre cabinet, mais j'ai de la difficulté avec les employés de votre ministère. Si vous pouviez m'obtenir l'information, je vous en serais reconnaissant.
Le président: Il vous reste une minute.
M. Strahl: Je n'ai plus qu'une question. J'aimerais parler du chapitre sur l'énergie dans l'accord sur le commerce interprovincial. Jusqu'à présent, ce chapitre est vierge, la rédaction en ayant été reportée, comme vous le savez. On devait l'avoir au mois de juin de l'an dernier, ensuite en septembre, et on attend toujours. Avez-vous une date prévue? S'agit-il d'un accouchement long et difficile ou est-ce pour bientôt?
Mme McLellan: Je pense qu'on peut probablement dire que c'est un accouchement long et difficile, car comme vous le savez, la coopération fédérale-provinciale - disons qu'il est extrêmement difficile d'en arriver à une collaboration entre les provinces, même lorsque le fédéral n'est pas en cause. Je pense que l'on peut dire que mes collègues provinciaux ont travaillé très fort pour s'entendre sur ce chapitre qui traite de l'énergie.
On s'est entendu sur une bonne partie du chapitre, mais il reste des points épineux, surtout en ce qui concerne les marchés de l'électricité. Des changements fondamentaux s'opèrent dans ces marchés chez nos voisins du Sud. Ces changements vont manifestement se faire ici aussi.
Pour certains, il s'agit de changements prometteurs qui ouvrent la voie à de nouvelles possibilités sur le plan de la concurrence. Pour d'autres évidemment, ces changements sont inquiétants. Ces derniers ne souhaitent peut-être pas autant une restructuration des marchés de l'électricité au Canada. Certaines de leurs préoccupations sont légitimes, comme le sort des câbles, et d'autres aspects.
Donc, M. Manley, dont l'accord sur le commerce intérieur est la responsabilité, et moi-même tenons énormément à ce que ce chapitre soit terminé. Nous pensons que lors de la conférence des premiers ministres au mois de juin, le premier ministre et ses homologues provinciaux pourraient saisir l'occasion d'encourager leurs ministres de l'Énergie à terminer ce chapitre.
Toutefois, j'aimerais préciser qu'il ne faut pas reprocher à mon ministère ou au gouvernement fédéral d'avoir déployé trop peu d'efforts ou de n'avoir pas su faire la coordination nécessaire. Il ne faut pas non plus faire de tels reproches à certaines provinces qui sont tout aussi frustrées que vous de voir que ce chapitre n'est pas encore terminé.
L'un de mes objectifs, que je partage d'ailleurs avec M. Manley, est de terminer ce chapitre le plus tôt possible, mais il reste quelques questions intraprovinciales épineuses que des provinces ou des secteurs provinciaux doivent tirer au clair. Au palier fédéral, tout ce que nous pouvons faire, c'est fournir aux provinces aide et appui, jouer le rôle d'animateur.
Le président: Merci, madame la ministre.
Monsieur Wood.
M. Wood (Nipissing): Madame la ministre, dans le dernier discours du Trône, le gouvernement annonçait son intention, dans les domaines des mines et des forêts, de se départir de nombreux pouvoirs. Des témoins précédents nous ont laissé croire que le retrait du gouvernement fédéral de certains domaines de compétence et le transfert des responsabilités concordantes étaient déjà en cours, même presque terminés. Cette dévolution de pouvoirs découle-t-elle des restrictions budgétaires qui vous ont été imposées à vous et à vos fonctionnaires, ou s'insère-t-elle dans un plan à beaucoup plus long terme, dans une nouvelle vision de votre ministère?
Mme McLellan: Nous ne sommes pas motivés exclusivement ni même premièrement par les contraintes budgétaires. En fait, je pense que la situation déficitaire du gouvernement nous a donné la possibilité de tirer au clair les rôles du fédéral et des provinces, ce qui nous donnera une fédération qui fonctionne mieux.
Je pense qu'on peut dire que trop souvent, par le passé, certains se sont attendus à ce que le gouvernement fédéral assume - et ce dernier était peut-être trop pressé d'assumer - toute une série de problèmes, de programmes et d'initiatives et ce, parce qu'il pensait disposer des budgets nécessaires pour faire face à ces problèmes ou mettre en place ces programmes ou initiatives.
Je pense que nous connaissons tous les résultats et les conséquences de cette façon de procéder. La situation financière nous donne donc la possibilité de mieux comprendre quel rôle le gouvernement fédéral peut jouer dans les domaines des mines et des forêts où nous concédons que la compétence revient premièrement, mais non exclusivement, aux provinces.
Dans un pays comme le nôtre où les secteurs de ressources sont si importants pour le bien-être économique et écologique du pays, le gouvernement fédéral a manifestement un rôle important à jouer. Dans les autres États fédéraux tels que l'Australie et les États-Unis pour n'en nommer que deux, des pays riches en ressources, le gouvernement fédéral est une présence dans les secteurs de ressources, bien que la compétence en ces domaines repose essentiellement entre les mains des États ou des provinces.
Nous avons donc saisi l'occasion, dans le cadre de l'examen des programmes, de définir ce qui convient que nous fassions dans ce domaine en nous fondant sur la compétence première des provinces, pour y suppléer, et pour suppléer aux activités du secteur privé, des universités et des autres centres de recherche, afin de nous assurer que notre secteur des ressources disposera des connaissances, de la technologie et des possibilités commerciales qui lui permettront de demeurer compétitif et productif sur les marchés mondiaux.
Ces industries sont axées sur l'exportation. Regardez la foresterie. Nous exportons chaque année pour 28 milliards de dollars de produits forestiers. Nous en importons pour 4 milliards de dollars. La balance commerciale est donc tout à fait surprenante dans ce secteur.
Ces industries sont stimulées par l'exportation. Le gouvernement fédéral a donc un rôle à jouer non seulement pour s'assurer que les marchés du reste du monde nous sont ouverts de façon équitable, mais également pour faire en sorte que nos industries soient compétitives, productives et durables.
M. Wood: Une autre chose me préoccupe. C'est très certainement excellent de réduire le chevauchement et le double emploi dans le secteur des mines et des forêts. C'est une dévolution de nos responsabilités aux provinces, et j'appuie cette orientation.
Toutefois, je continue à m'inquiéter des normes nationales dans ces deux secteurs. À titre d'analogie, Santé Canada, comme vous le savez, voit à l'application de normes de soins de santé à l'échelle du pays, même si l'administration des soins de santé relève des provinces. Le ministre fédéral de la Santé dispose des outils nécessaires pour appliquer ces normes puisque c'est le gouvernement fédéral qui finance les soins de santé offerts par les provinces.
Dans le cas de votre ministère toutefois, je me demande si vos fonctionnaires disposent de ce pouvoir, ou même du personnel nécessaire pour appliquer des normes nationales dans la gestion des forêts et des mines.
Mme McLellan: Tout d'abord, revenons sur ce que vous avez dit: la dévolution de pouvoirs. Je ne veux pas qu'il y ait de malentendus. Dans le discours du Trône, il a été question de se retirer de certains secteurs si un autre palier de gouvernement ou un autre organisme pouvait exercer les fonctions de manière plus appropriée.
Depuis plusieurs années, nous faisons un tri dans les fonctions pour déterminer lesquelles sont de notre ressort et lesquelles il conviendrait de confier à d'autres. Je n'ai pas parlé de «dévolution», je n'ai pas parlé de «retrait», parce que je veux éviter les malentendus.
Nous allons continuer à nous intéresser aux secteurs des forêts et des mines, mais dans le cadre de compétences fédérales comme le commerce international, l'environnement et les accords internationaux sur l'environnement. Je tenais simplement à le préciser afin d'éviter tout malentendu.
Par ailleurs, nous avons assumé des fonctions qu'il serait plus approprié de confier aux provinces et qui relèvent de leur compétence. Nous avons travaillé en collaboration avec les provinces afin de conclure des ententes à cet effet. L'accord sur les géosciences en est un exemple parfait puisque nous avons déterminé ce qu'un relevé cartographique national devait être et ce que l'on devait inclure dans les relevés provinciaux. Essentiellement, c'est ainsi que doit fonctionner une fédération. Je tenais à le préciser.
En ce qui concerne les normes nationales, en fait, monsieur Wood, comme vous le savez probablement, puisque ce sont les provinces qui ont compétence dans les domaines forestier et minier, il y a très peu de normes nationales, comme telles, dans ces secteurs. La gestion des terres domaniales provinciales relève des provinces, qui peuvent conclure des ententes de gestion avec leurs entreprises du secteur privé pour gérer leurs terres domaniales. Elles déterminent les normes pour les propriétaires de boisés privés.
Dans l'industrie minière, les normes en matière de santé et de sécurité relèvent essentiellement des provinces.
Dans le cas de l'industrie nucléaire, les normes sont fédérales puisque ce secteur est essentiellement de compétence fédérale, quoique là encore, dans le cas de la santé et de la sécurité, nous soyons en train de répartir les rôles avec les provinces.
En ce qui concerne, donc, les normes nationales, à vrai dire, la Constitution ne confère pas une grande compétence au gouvernement fédéral. C'est aux provinces, comme il se doit, de déterminer leurs normes dans les secteurs minier et forestier.
Toutefois, nous travaillons de concert avec les provinces et le secteur privé pour élaborer des critères et des indicateurs pour le secteur forestier. Nous voulons pouvoir dire au reste du monde, que cela intéresse, que le bois, les produits usinés qui proviennent de la forêt sont issus de forêts gérées en fonction d'un développement durable. Nous voulons posséder des critères et des indicateurs nationaux qui nous aideront à déterminer si nos forêts sont gérées et exploitées dans l'optique du développement durable. Nous travaillons donc en collaboration avec les provinces et l'industrie.
Pour ce qui est de la situation nationale, il s'agira sans doute de critères et d'indicateurs facultatifs mis au point par l'ACN. Y aura-t-il des normes nationales? Peut-être un jour, mais elles ne seront pas appliquées par le gouvernement fédéral.
Le président: Merci, monsieur Wood.
Je vais demander l'avis du comité. La sonnerie va commencer dans cinq ou six minutes.
Madame la ministre, je crois savoir que vous êtes libre jusqu'à 18 heures. Si nous revenons du vote à 17 h 40, puisque le vote est censé avoir lieu à 17 h 30, il nous resterait une vingtaine de minutes.
Les membres du comité veulent-ils revenir profiter de ces 20 minutes? Oui? Dans ce cas, nous allons revenir.
Monsieur Bergeron, vous avez cinq minutes.
[Français]
M. Bergeron (Verchères): M. Canuel voudrait peut-être faire un court commentaire avant que je ne commence.
M. Canuel: Je voudrais simplement dire, madame la ministre, que vous avez parfaitement raison de remettre les mines et les forêts aux provinces. Cependant, tant et aussi longtemps que les travailleurs payeront des impôts à Ottawa, ce sera presque une injure que de dire: «Débrouillez-vous avec tout cela» sans accorder les fonds nécessaires. Merci.
M. Bergeron: Comme nous avons fort peu de temps, je vais laisser tomber les préambules, d'autant plus que nous les avons déjà faits à la Chambre des communes. Donc, je vous invite à prendre des notes parce que je vais parler rapidement.
La ministre nous disait que son gouvernement avait dû faire un certain nombre de choix, des choix difficiles, j'en conviens, et avait demandé à EACL de lui faire des suggestions quant aux choix que le gouvernement devait faire. Cependant, EACL est un petit peu juge et partie en cette matière puisqu'elle fait les choix, bénéficie des fonds du gouvernement et donne des orientations à ce dernier quant à ses choix. D'autre part, on sait qu'EACL est très intimement liée au développement de l'industrie CANDU, en Ontario plus particulièrement.
Madame la ministre, ne voyez-vous pas là une apparence de conflit d'intérêts pour EACL? D'une part, elle joue un rôle dans la détermination des choix du gouvernement. D'autre part, vous avez fait état des retombées du développement des CANDU pour le Québec. Mme la ministre aura certainement l'honnêteté de nous faire part du tableau complet et des retombées potentielles du développement des CANDU pour l'Ontario. On aurait alors une meilleure idée des avantages proportionnels des deux provinces, si on présente les chiffres pour les deux provinces.
La ministre a mentionné en Chambre, en répondant à une question de l'Opposition officielle, que son ministère dépensait 25 p. 100 de son budget de recherche et développement au Québec. Cette réponse a fait bondir les milieux de recherche au Québec, puisque les chiffres les plus généreux indiquent que la part totale des budgets de recherche et développement externes et internes du ministère des Ressources naturelles pour le Québec est de 17 p. 100 au Québec. Sans le tokamak, cette part passe à 12 p. 100. Ce chiffre est celui de la part de recherche interne du ministère qui, elle, représente 70 p. 100 des dépenses du ministère en termes de recherche et de développement.
Si on inclut dans le budget dont la ministre nous a parlé les budget d'EACL, la part du Québec en recherche et développement passe à 8 p. 100 et, sans le tokamak, elle descend à 6 p. 100.
Mme la ministre pourrait-elle nous indiquer sur quels chiffres elle s'est basée pour nous donner la réponse qu'elle nous a donnée? Et pourrait-elle, de plus, déposer les chiffres dont elle a fait état?
Madame la ministre, vous avez fait état, dans votre présentation, de partenariat et de concertation avec les provinces. Le projet du tokamak, est-il besoin de le rappeler, est l'un des rares projets au Canada qui sont menés conjointement par la province, le gouvernement fédéral, l'entreprise privée, les universités et une entreprise d'État.
La ministre est-elle consciente qu'elle lance actuellement le message que ce genre de projet conjoint ne peut pas fonctionner au Canada puisque le gouvernement fédéral peut se permettre, comme c'est le cas actuellement, de prendre des décisions sans jamais consulter ses partenaires, des décisions unilatérales? Comment peut-on parler, à ce moment-là, de partenariat et de concertation avec les provinces?
En tout dernier lieu, Mme la ministre peut-elle nous expliquer comment on a réussi à sauver le projet neutrino à Sudbury, et pourquoi on n'est pas en mesure, de la même façon, de sauver le projet du tokamak à Varennes?
Mme McLellan: Merci.
[Traduction]
À propos de votre première question concernant l'EACL et la détermination des choix du gouvernement, je peux vous assurer que c'était bien le gouvernement du Canada qui a décidé que la priorité pour l'EACL serait les réacteurs CANDU, surtout l'exportation de ces réacteurs.
Je ne vous apprends rien en vous disant que nous ne prévoyons pas vendre d'autres réacteurs CANDU ici au Canada dans un proche avenir. Mais il y a une forte croissance du marché de l'exportation, surtout dans le Sud-Est asiatique, et nous prévoyons aussi un marché en expansion en Europe de l'Est. Lors de sa visite récente en Roumanie, le premier ministre a constaté un regain d'intérêt dans cette région pour l'énergie nucléaire dans le cadre de la diversification énergétique.
Alors, dans le contexte actuel de restrictions budgétaires, le gouvernement a décidé que l'EACL devra mettre l'accent sur le marché de l'exportation des CANDU. Cela nous a obligés à faire certains choix difficiles. Comme je vous l'ai déjà expliqué à la Chambre, personne ne remet en cause la compétence des scientifiques qui travaillent à Tokamak. Dans un monde idéal où les ressources seraient sans limite...
M. Bergeron: Je le sais, vous avez déjà répondu à cette question.
Mme McLellan: Exactement. Alors,il faut se rappeler que ces choix ne sont pas pris de gaieté de coeur, mais il faut faire des choix difficiles pour gouverner. Nous avons fixé la priorité, c'est la vente de réacteurs CANDU à l'exportation. C'est en fonction de cela que nous établissons nos activités scientifiques de recherche et de développement dans le domaine nucléaire.
Permettez-moi d'apporter certaines précisions.
Pour ce qui est de la recherche sur la fusion à Varennes, il s'agit bien de recherche appliquée et non pas de recherche fondamentale. Il s'agit d'une application commerciale et il faut bien comprendre cette distinction. Le but à long terme de ces recherches, c'est l'application commerciale.
Qui va en profiter? Ce sera Ontario Hydro et Hydro-Québec. Puisque ce n'est pas la recherche fondamentale mais la recherche appliquée, il est tout à fait normal que ces deux services d'intérêt public, parmi les plus grands du monde, qui comptent en profiter... Leurs actionnaires - les contribuables des deux provinces - vont profiter aussi de ces recherches.
Nous avons mis ce projet en branle. Nous avons accordé le budget de démarrage, un montant assez important. Dans le cas du Québec, il s'est agi d'environ 50 millions de dollars sur plusieurs années. C'est un montant énorme pour un projet soutenu en raison de sa rentabilité commerciale. Il y a des entreprises qui vendent de l'électricité et ce projet devrait mener à la création d'une autre source d'électricité.
Après des contributions du gouvernement fédéral d'environ 40 millions de dollars au Québec et le même montant en Ontario, je pense qu'il est grand temps que ces deux services fassent leur part pour financer les recherches nécessaires.
Quant au budget de recherche de mon ministère, il ne s'agit pas de 27 p. 100. Je n'ai jamais utilisé ce chiffre. À la Chambre, j'ai parlé de 25 p. 100, et il s'agit de 25 p. 100 de notre budget régional en matière de recherche et de développement. Je précise bien qu'il s'agit du budget régional car si on comprend la région de la capitale nationale, ça fausse les chiffres tant pour Hull qu'Ottawa.
Donc, quand je parle de 25 p. 100, je dis que 25 p. 100 de notre budget régional en matière de recherche est dépensé dans la province de Québec dans des installations comme le Centre géoscientifique de Québec, le Laboratoire de Val-D'or, le Centre canadien de géomatique, le Centre de recherches forestières des Laurentides et le Laboratoire de recherches sur la diversification énergétique. C'est le genre de financement que nous assurons et je pense que si vous parlez aux personnes qui y travaillent et aux industries qui en profitent, elles feraient remarquer que c'est un apport précieux à l'économie du Québec et du Canada.
Pour revenir à cette question de fusion, les contrats prévus entre le gouvernement et Ontario Hydro et Hydro-Québec prévoient un avis d'un an pour signifier l'intention de se retirer des ententes en matière de contribution. Nous avons déjà donné cet avis. Alors le financement ne va pas cesser cette année, mais le 31 mars 1997.
Nous avons donc exercé notre droit de donner avis. Il y a une transition d'un an. En fait, nous allons collaborer très étroitement avec Hydro-Québec, Ontario Hydro et d'autres parties afin de mettre au point un régime de transition qui nous permettra de continuer les meilleurs travaux de recherches scientifiques.
Je sais fort bien que c'est un choix difficile, mais cela n'a pas été fait de façon brutale. Nous exerçons notre droit contractuel. Nous ferons tout notre possible afin d'assurer une transition sans heurts.
M. Bergeron: Voulez-vous me donner les chiffres que j'ai demandés?
Mme McLellan: Notre budget régional en matière de recherche et développement?
M. Bergeron: Oui. Pouvez-vous donner ces chiffres avec les retombées économiques des réacteurs CANDU pour l'Ontario et le Québec?
Mme McLellan: Oui. En fait, je pourrai vous donner une réponse plus détaillée quand nous reviendrons, si cela vous intéresse.
Le président: La séance est suspendue. Je demanderais aux membres de revenir aussi vite que possible après le vote.
Le président: Je rouvre la séance afin de l'ajourner officiellement. Malheureusement, nous devons quitter la salle. Je voudrais inviter la ministre à revenir un jour pour terminer son témoignage. Nous n'avons eu qu'une heure en tout à cause des votes. Je sais qu'une réunion pourra s'arranger dès que son calendrier le lui permettra.
La séance est levée.