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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 14 mai 1996

.1105

[Traduction]

Le vice-président (M. Thalheimer): Je déclare la séance ouverte.

C'est la dernière séance prévue dans le cadre de l'étude de la réglementation environnementale dans le secteur minier. Nous accueillons aujourd'hui M. Mel Cappe, sous-ministre de l'Environnement, accompagné, si j'ai bien compris, de Tony Clarke, sous-ministre adjoint.

Monsieur Cappe, je vous demanderais de bien vouloir commencer.

M. Mel Cappe (sous-ministre de l'Environnement): Je vous remercie, monsieur le président.

[Français]

Je ne ferai pas de discours d'ouverture puisque j'imagine que vous avez beaucoup de questions à poser.

[Traduction]

Je me contenterai de dire que le gouvernement reconnaît le rôle important de l'industrie minière et qu'il a certes prévu, dans son Règlement sur les effluents liquides des mines de métaux, un régime qui établit un climat de plus grande certitude pour l'industrie et qui cherche à mieux s'harmoniser avec celui des provinces, lorsque c'est possible.

Plusieurs initiatives sont en cours pour appliquer nos règlements en collaboration avec les provinces. De plus, quelques autres efforts sont déployés en vue d'harmoniser notre processus d'évaluation environnementale avec celui des provinces.

Je ferai simplement remarquer que, d'après l'édition du Vancouver Sun d'aujourd'hui, la ministre des Ressources naturelles aurait annoncé que nous avons ouvert des bureaux d'évaluation environnementale à guichet unique en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba et en Nouvelle-Écosse. Nous sommes en train de négocier des ententes analogues avec la Saskatchewan et l'Ontario et nous collaborons avec Terre-Neuve à l'élaboration d'une méthode efficace d'évaluation du projet de Voisey Bay.

Le Canada a à coeur son industrie minière. Il affiche d'ailleurs une très bonne feuille de route à cet égard. En fait, la nature de la réglementation environnementale est telle que les entreprises canadiennes jouissent d'un avantage concurrentiel à l'étranger, en ce sens qu'elles sont reconnues comme des leaders mondiaux dans le domaine de l'écotechnologie.

Je vous remercie.

Le vice-président (M. Thalheimer): L'exposé est effectivement bref.

M. Cappe: Je suis ici pour répondre aux questions, monsieur. Si nous pouvons vous être utiles...

Le vice-président (M. Thalheimer): Avez-vous une déclaration à faire?

M. Tony Clarke (sous-ministre adjoint, Environnement Canada): Non, je n'en ai pas.

Le vice-président (M. Thalheimer): Monsieur Canuel, vous serez le premier à interroger les témoins.

[Français]

M. Canuel (Matapédia - Matane): Lors de sa brève intervention, le sous-ministre disait qu'entre les provinces et le fédéral, on était dans le meilleur des mondes. Il a nommé plusieurs provinces avec lesquelles des ententes avaient été conclues, mais il n'a pas mentionné le Québec.

Les renseignements que j'ai recueillis au sujet du Québec révèlent que de prime abord, c'est compliqué, qu'on se recoupe de temps en temps et que les normes, sans forcément être disparates, sont similaires. Depuis des années, nous constatons, à l'encontre de ce qu'indiquent les personnes ressources qui viennent ici, qu'il y a des problèmes au Québec.

Comment les résoudre? C'est là une autre question. Cela dépend-t-il du fédéral? Du provincial? Je ne suis pas en mesure de le dire. Y a-t-il de la bonne volonté des deux côtés? Je ne le sais pas non plus.

.1110

Je me demande pourquoi on ne laisserait pas tout cela aux provinces, et je pense en particulier à ma province, le Québec. Pourquoi ne lui donnerait-on pas la responsabilité entière de gérer son environnement? Je suis ce dossier depuis des années et constate de véritables problèmes dans plusieurs coins du Québec.

Ma question est très simple. On dit au comité que certains domaines seraient mieux gérés par les gouvernements provinciaux, entre autres le gouvernement du Québec. Dans quelle mesure serait-il possible d'adopter le principe du guichet unique pour l'application des lois environnementales fédérales à l'échelon provincial?

Je prévois un peu votre réponse. On minimise très souvent le dédoublement. Le discours du Trône prévoyait remettre la forêt et les mines aux provinces. Les provinces n'auraient-elles pas la possibilité d'établir des règles sur l'environnement? Dans cette éventualité, le fédéral se retirerait-il complètement? Il y a tout le temps un double jeu là-dedans.

Lorsque je parle de ce retrait, la ministre dit qu'elle serait disposée à se retirer mais qu'elle conserverait les fonds qui y sont associés. Les provinces se retrouvent alors mal prises. J'estime que nous devrions retirer les sommes investies par le fédéral depuis un certains nombre d'années, en se basant sur la moyenne des 10 dernières années. Il faudrait remettre directement aux provinces les sommes qui ne serviraient plus.

Ce serait une heureuse solution, qui aurait dû être mise en vigueur il y a des années. J'aimerais avoir quelques commentaires à ce sujet.

M. Cappe: En ce qui concerne la volonté des gouvernements de créer un guichet unique, nous en avons déjà établi un, où un fonctionnaire provincial fait les inspections aux usines de pâtes et papier pour le compte du fédéral, selon les dispositions de la Loi sur les pêches et de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Nous avons conclu un accord avec le gouvernement de la province pour la gestion des dispositions de la Loi sur les pêches. Nous n'avons pas de tel accord pour les mines, bien que le gouvernement fédéral soit prêt à négocier le même genre d'accord avec la province. Le problème ne résulte pas d'un dédoublement ou d'un chevauchement au niveau des normes de réglementation, mais porte sur l'application comme telle.

Bien que l'on retrouve des fonctionnaires fédéraux et provinciaux qui transigent avec les mêmes gens, ils ne s'acquittent pas des mêmes tâches. Dans le cas d'une compagnie minière, le fédéral fait les inspections pour faire respecter la Loi sur les pêches ou la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Les provinces, quant à elles, s'acquittent d'autres aspects, dont les inspections au niveau de la santé et d'autres questions reliées au travail.

.1115

Nous sommes donc prêts à négocier avec les provinces la mise sur pied d'un guichet unique pour l'application de la Loi sur les pêches. Nous sommes aussi prêts à négocier avec le Québec un accord sur les évaluations environnementales, tout comme dans les autres provinces. Je dois souligner qu'au Canada, il n'y a jamais eu de panel sur les évaluations environnementales.

Nous avons trouvé des moyens de régler le dédoublement et le chevauchement. Pourrions-nous faire plus? Oui, et nous sommes prêts à régler tous ces problèmes. Il faut donc trouver une façon d'établir un partenariat en matière de gestion de l'environnement avec les provinces.

Quant à la question des fonds, comme je le disais, on en retrouve deux sortes. Lorsqu'il accorde une subvention à une compagnie quelconque, le gouvernement fédéral exige, selon la Loi sur l'évaluation environnementale, qu'une évaluation soit faite. Le gouvernement fédéral s'est toutefois retiré de la plupart des subventions de ce genre.

Quant aux fonds d'administration qu'on utilise pour mettre en oeuvre nos lois, nous avons versé à la province la somme que nous n'avons pas dépensée, tout comme nous l'avons fait dans le secteur des pâtes et papier. Nous sommes donc disposés à négocier une solution convenant aux deux paliers de gouvernement.

[Traduction]

Le vice-président (M. Thalheimer): Merci. Si nous en avons le temps, vous pourrez poser d'autres questions plus tard.

Monsieur Stinson, vous avez la parole.

M. Stinson (Okanagan - Shuswap): L'un des facteurs dont il est constamment question dans cette approche environnementale en matière de ressources naturelles est l'absence de calendrier. Nous butons continuellement contre cette difficulté. Les membres de l'industrie que nous rencontrons se plaignent toujours du manque d'échéances. Je pourrais vous en donner plusieurs exemples, mais je ne devrais pas avoir à le faire. Vous devriez déjà être au courant. Par conséquent, j'aimerais vous demander si vous êtes en train de travailler à l'établissement d'un échéancier qui injecterait un peu de certitude dans le cadre de réglementation.

De plus, vous dites travailler à l'établissement de guichets uniques. J'en entends parler depuis longtemps et, pourtant, je n'ai rien vu de concret jusqu'ici. On pourrait s'étendre longuement sur les raisons des retards, mais soyons honnêtes: l'industrie en a ras le bol des excuses et des retards. Moi aussi, en tant que membre de ce comité, j'en ai assez. On parle sans rien faire depuis que je suis membre du comité.

Vous avez dit être disposé à négocier avec les provinces, ce que vous avez fait. Je reviens donc à ma question sempiternelle: qu'est-il arrivé dans le dossier de la mine Kemess, en Colombie-Britannique? La province a tout approuvé. Elle a affirmé qu'on avait répondu à ses préoccupations environnementales et à tout le reste. Néanmoins, dès l'entrée en jeu du gouvernement fédéral, tout le dossier a été mis en attente par souci de quelques poissons qui ne figuraient même pas sur la liste des espèces menacées d'extinction. Lorsque la province a essayé, tout comme les compagnies minières, d'en discuter avec les autorités fédérales, tout le processus s'est enrayé.

.1120

M. Cappe: Je discuterai des trois points séparément. Le point que vous soulevez au sujet des échéances est important, et vous avez raison de dire que, si l'on réglait ce point, on ajouterait un élément de certitude au processus. L'objectif consiste à donner un certain caractère de permanence à la réglementation. Je ne crois pas que les gens soient opposés à l'idée de faire des évaluations environnementales. Ce qu'ils veulent, c'est que nous le fassions de manière à éliminer l'incertitude et tout le reste.

Pour ce qui est de l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, mon collègue Michel Dorais est le président de l'agence, et je sais qu'il a témoigné devant le comité durant la première série d'audiences. Sans vouloir m'esquiver, je dirais que c'est lui l'expert.

Le manque d'échéances est en fait une question que nous nous sommes engagés à régler. Dans le budget de février 1995, le ministre a déclaré que le gouvernement adoptait deux principes qui le guideraient dans les changements à apporter au régime d'évaluation environnementale: d'une part, il recouvrera du proposant le coût de l'évaluation et, d'autre part, il injectera un certain élément de certitude dans l'échéancier. Le gouvernement ne l'a pas encore fait unilatéralement; par conséquent, voilà un an que la situation perdure et que nous n'avons toujours pas de solution.

Nous avons amorcé un processus de consultation avec l'industrie - non seulement avec l'industrie minière, mais aussi avec d'autres secteurs - ainsi qu'avec des groupes environnementaux et d'autres groupes communautaires en vue de trouver des moyens de raffermir l'échéancier sans nuire au principe de l'évaluation environnementale et au respect des normes de qualité.

Le processus cause deux genres de problèmes temporels, si je puis m'exprimer ainsi. D'une part, il y a l'évaluation environnementale et, d'autre part, les permis, autorisations et autres exigences qui s'appliquent selon les circonstances. Bien des préoccupations concernant l'opportunité découlent du processus de prise de décision qui entoure l'autorisation de détruire l'habitat du poisson, de la Loi sur la protection des eaux navigables ou des autres autorisations fédérales particulières qui sont requises.

L'autre source de friction est l'échéancier fixé pour l'évaluation environnementale. Nous en avons discuté. Nous aimerions que soient mises en place des échéances fixes. Ainsi, lorsqu'ils se lancent dans le processus, les gens auraient une norme précise à respecter et pourraient fournir des renseignements au gouvernement. Le gouvernement pourrait alors dire qu'ils ont satisfait aux exigences de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et qu'il dispose maintenant d'un dossier complet. Ce serait alors au ministre compétent de décider s'il délivre le permis, l'autorisation ou je ne sais quoi encore qu'exige la loi. À ce stade, on en revient au pouvoir discrétionnaire de l'agent d'autorisation. En dépit des apparences, il ne s'agit plus d'un problème d'évaluation environnementale.

Encore une fois, je n'essaie pas de m'esquiver, mais j'aimerais bien faire comprendre qu'il faut régler les deux genres de problèmes. Nous avons examiné des moyens de concerter l'action des divers ministères fédéraux qui entrent en jeu, par exemple, celui des Ressources naturelles, celui des Pêches et des Océans et celui de l'Environnement. Nous avons essayé d'établir une espèce de guichet unique fédéral, ce qui nous amène à votre deuxième point. Même au niveau fédéral, les ministères ont chacun un mandat différent. Nous essayons de trouver le moyen de concerter leur action.

Dans le projet de Voisey Bay, par exemple, le ministère des Ressources naturelles joue le rôle de coordonnateur auprès des autres ministères fédéraux pour tout ce qui touche à la mise en valeur du corps minéralisé. Les Ressources naturelles ont pour rôle de réunir les intervenants et de servir de guichet unique. Nous nous efforçons donc de faire des progrès à cet égard.

Quant à l'établissement d'un guichet unique avec les provinces, nous avons signé des accords au cours des deux dernières années avec le Manitoba et l'Alberta en matière d'évaluation environnementale. Nous avons ouvert là-bas des bureaux d'évaluation environnementale afin de pouvoir le faire sur place et d'assurer ainsi un meilleur service.

Nous avons ici aussi paraphé, il y a environ six mois, une entente avec la Colombie-Britannique aux termes de laquelle nous sommes disposés à travailler en collaboration. En fait, l'entente avec la Colombie-Britannique va encore plus loin que celles de l'Alberta et du Manitoba, en ce sens que nous nous servirons de la norme provinciale. Donc, si vous satisfaites aux normes d'évaluation environnementale du gouvernement de la Colombie-Britannique, nous estimerons que vous avez respecté nos propres règles. Vous pourrez alors demander aux instances responsables de vous délivrer les permis, autorisations et tout le reste.

.1125

L'entente avec la Colombie-Britannique a été paraphée, il y a six mois, mais elle n'a pas encore été signée. Les consultations ont eu lieu au cours des six derniers mois, et nous avons entendu le point de vue de l'industrie et des groupes environnementaux. À condition d'apporter de légères modifications, nous sommes disposés à la faire signer par les ministres et à la proclamer en vigueur. Nous devrions donc arriver à nos fins bientôt.

Nous discutons aussi avec l'Ontario et la Saskatchewan en vue de conclure des ententes analogues. Le principe du guichet unique qui résoudrait le problème des deux processus parallèles intéresse ces provinces.

M. Stinson: Je tenais simplement à vous faire comprendre que le facteur temps prime ici. Il faut y voir au plus tôt. Les guerres de clochers ne m'intéressent pas. Je veux qu'elles cessent; tout le monde ici, d'après moi, en a assez. Les retards semblent causés, du moins c'est l'impression qu'on en a, par des guerres de clochers.

M. Cappe: Je voulais que la situation soit claire. Par ailleurs, je n'ai pas répondu à votre troisième question au sujet du projet Kemess et des quelques poissons, pour reprendre vos termes.

M. Stinson: Le plus cher du monde, pourrais-je préciser.

M. Cappe: Il y en a au Tennessee qui pourraient coûter plus cher, mais je ne veux pas en débattre avec vous.

Des voix: Oh, oh!

M. Cappe: L'essentiel à retenir, c'est qu'il existe des lois. Il n'est pas question ici du pouvoir discrétionnaire des bureaucrates, mais bien du respect des lois. La Loi sur les pêches impose certaines exigences que doit faire respecter le ministre des Pêches. Ce n'est pas seulement une question d'obliger un agent des pêches à accélérer le processus d'évaluation. Si le projet engage la destruction d'habitats de poisson, la loi s'y applique, tout comme le principe établi au règlement selon lequel il ne doit pas y avoir de perte nette.

Je ne maîtrise pas bien ce dossier particulier, mais je ne crois pas qu'il s'agisse uniquement de quelques poissons.

Le président: Je vous remercie. Pouvons-nous continuer?

Monsieur Reed, vous avez la parole.

M. Reed (Halton - Peel): Je n'aurais jamais cru être en accord avec M. Stinson.

M. Cappe: Je vous en donne plus pour votre argent.

Des voix: Oh, oh!

M. Reed: Quiconque fait affaire avec le gouvernement, peu importe où, accorde énormément d'attention à la question des échéanciers. Le temps, c'est de l'argent. Il est aussi synonyme d'intérêts financiers. Le temps influe également sur l'intérêt marqué par d'éventuels investisseurs à un projet particulier. La vie devient très difficile quand on ne sait pas trop si telle décision sera prise avant telle date. Cette incertitude a nui dans le passé et elle continue de le faire.

Quant à ce que vous avez dit au sujet des pêches et de la loi - et je me suis déjà prononcé publiquement à ce sujet - ,l'évaluation des pêches tient en partie de l'art, en partie de l'alchimie et en partie de la science. Votre opinion au sujet des conséquences sur les pêches dépend de l'université où vous avez fait vos études, et je puis vous citer des sources sûres à ce sujet. Donc, la Loi sur les pêches ouvre la porte aux préjugés particuliers des personnes qui font l'évaluation.

L'industrie minière nous a soumis une très importante préoccupation, et il faudrait, selon moi, la réitérer. Vous y avez peut-être déjà vu. Je parle des règles du jeu qui changent pendant la partie. Je ne connais pas d'autres questions qui fassent l'objet d'autant de préoccupations.

On suppose peut-être que chaque société qui exploite une mine, par exemple, est une grande société disposant de beaucoup de ressources, de sorte qu'elle peut soumettre et resoumettre son projet, selon les changements apportés aux règlements, en vue d'obtenir un permis l'autorisant à faire les travaux ou l'exploitation.

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Je parle en fonction d'une expérience très personnelle, peut-être pas dans le secteur minier comme tel, mais dans une entreprise connexe pour laquelle les règlements et les exigences changeaient au gré des caprices du bureau particulier avec lequel je faisais affaire.

J'estime que les projets devraient jouir de droits acquis. Par là j'entends que, s'il existe une série de règlements ou de règles, la décision financière est prise en fonction de ces règles. Si vous décidez de changer le règlement en cours de route, soit, mais que le nouveau règlement s'applique uniquement aux projets qui n'ont pas encore été soumis. Dès lors, tous sauront à quoi s'en tenir.

C'est peut-être la plus importante déclaration que je puisse faire ici. Seriez-vous assez bon pour me donner votre avis à ce sujet?

M. Cappe: Monsieur le président, je vais essayer de répondre aux deux questions. Pour ce qui est des modifications apportées aux règlements, les nouvelles sont à la fois bonnes et mauvaises. Je vous donnerai l'exemple d'une modification apportée aux règlements qui a fait des heureux et d'une autre qui ne s'est pas concrétisée, ce qui n'était peut-être pas une bonne nouvelle.

Ainsi, pour illustrer un changement qui s'est produit, nous avons laissé tomber le Décret sur les lignes directrices visant le PEEE, soit le Processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement. Il s'agissait d'un décret qui, en bout de ligne, entravait toute une série de projets parce que les règles étaient ambiguës. Le Cabinet avait émis des lignes directrices, mais la population et les entreprises ignoraient ce qu'étaient les règles. En fait, nous avons dû recourir à des tribunaux beaucoup trop souvent pour interpréter les règles.

Grâce à la proclamation de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, il y a environ un an, nous avons pu éliminer une grande partie de cette incertitude en prévoyant dans une loi un processus d'évaluation environnementale beaucoup mieux défini. Bien sûr, ce changement a créé des difficultés à certaines sociétés, puisque les règles ont changé en cours de route.

Nous avons donc prévu des droits acquis pour les projets qui étaient déjà en cours d'évaluation lorsque la loi a été changée. Toutefois, ceux dont l'évaluation n'avait pas encore débuté ont été assujettis aux nouvelles règles. Quand le projet a-t-il débuté? Était-ce lorsque a eu lieu la première prospection ou lorsqu'on a effectué les premiers travaux d'aménagement? C'est de là que vient la légère confusion qui a entouré l'application des nouvelles règles.

La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale comportait une disposition établissant des droits acquis qui permettait d'appliquer le décret sur les lignes directrices aux projets et aux évaluations qui étaient déjà en cours. Nous avons donc essayé d'en tenir compte, mais la solution n'était pas parfaite. Je n'ai rien de mieux à proposer.

Arrêtez-vous un instant aux changements qui n'ont pas été apportés. En toute franchise, je ne suis pas fier. Le Règlement sur les effluents liquides des mines de métaux date de 1977. Cependant, nos principes, tout comme ceux de l'industrie à cet égard, ont évolué. Il faudrait peut-être mettre le règlement à jour.

Cela ne veut pas dire que le règlement n'est pas bon. Son application est toujours valable. Toutefois, il y aurait peut-être lieu de l'examiner en vue d'y apporter certaines modifications. Je ne voudrais pas que vous croyez que j'estime inutile une mise à jour.

Le secteur minier jouit d'une réglementation très stable. En fait, le problème posé par notre réglementation des effluents liquides des mines de métaux, c'est qu'en raison de son grand âge, il accuse du retard par rapport aux réglementations provinciales. D'une certaine façon, notre règlement est désynchronisé. Dans certaines provinces, les normes à respecter sont moins rigoureuses que les nôtres, ce qui place les entreprises dans de drôles de situations. Il serait agréable que tout le monde s'entende.

Donc, je suppose qu'il nous faut mettre à jour le règlement et le faire d'une manière qui tienne compte du fait que nous changeons les règles en pleine course et qu'il ne faudrait pas ainsi occasionner la perte d'un joueur. Il faut prendre votre préoccupation au sérieux. Je vérifierai certes que, quels que soient les changements apportés, ils comportent une disposition établissant des droits acquis pour tenir compte de certains de ces éléments.

Le vice-président (M. Thalheimer): Je vous remercie, monsieur Reed. Madame Cowling, c'est votre tour.

Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Monsieur le président, je vous remercie.

J'ai deux questions. Ma première concerne votre dernier commentaire.

.1135

Nous reconnaissons tous que les métaux recyclables sont essentiels à l'alimentation des installations métallurgiques du Canada. Quand prévoyez-vous que sera modifiée la définition de «déchets» afin que les matériaux recyclables en soient exclus?

M. Cappe: Je demanderai à mon collègue, M. Clarke, de commenter cet aspect. Pour ma part, je me contenterai de faire une remarque préliminaire.

En ce qui concerne le traitement des déchets, nous devons faire attention à la façon dont nous considérons les déchets, car ce mot, selon son acceptation courante, peut être assez lourd de sens. Le fait est qu'aux fins de la Convention de Bâle et de la convention internationale sur le commerce des déchets dangereux, certaines exigences sont prévues en matière de traitement des déchets.

Il faut s'occuper de cette définition. C'est ce que nous sommes en train de faire à l'échelle internationale. M. Clarke peut vous donner des précisions à ce sujet. Nous ne devrions toutefois pas oublier qu'il s'agit de substances qui peuvent être toxiques. Par conséquent, lorsqu'on parle du commerce du plomb, nous avons affaire à du plomb susceptible d'avoir des répercussions sur la santé humaine. Qu'on les définisse ou non comme des déchets, nous devons promouvoir le recyclage. Je crois que nous le pouvons. Mais nous devons également reconnaître l'importance d'établir certaines normes.

M. Clarke pourrait peut-être vous indiquer où en sont les négociations à l'échelle internationale.

M. Clarke: Il existe un groupe de travail international qui se compose des adhérents à la Convention de Bâle, là où tout ce problème a commencé lorsqu'on a voulu tout mettre dans la catégorie des déchets sans tenir compte de l'activité économique importante que représente le recyclage. Ce groupe veut tâcher d'influencer l'ensemble du projet et selon moi le Canada joue un rôle de premier plan à cet égard.

Nous n'avons pas hésité à vanter les vertus du recyclage. Notre pays mise beaucoup sur le recyclage. Nous exportons de nombreux métaux et nous nous attendons à les récupérer si nous le pouvons. Nous tâchons donc d'influencer ce processus. Je crois que la définition de déchets devrait être prête l'année prochaine et tiendra compte, du moins je l'espère, des déchets recyclables.

Mme Cowling: Très bien.

Si, sur le plan environnemental, la façon la moins coûteuse de se débarrasser des résidus de Voisey Bay était de les déposer en mer, y aurait-il des problèmes à obtenir les approbations réglementaires nécessaires? Quel serait un délai raisonnable pour l'obtention de ces approbations?

M. Cappe: Je demanderai de nouveau à M. Clarke de vous répondre de façon détaillée mais je tiens à préciser une chose: une partie de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement traite de l'immersion en mer des déchets. Cette pratique n'est pas interdite. Cette loi prévoit la possibilité de délivrer des permis d'immersion en mer. En fait, le ministère de l'Environnement délivre de nombreux permis de ce genre au cours de l'année. Par conséquent, l'immersion en mer de ces résidus pourrait être possible.

Ces permis seraient délivrés en fonction des incidences environnementales d'une telle mesure. Si ces résidus sont sous forme de limon fin ou de grosses roches, s'ils sont sédimentés ou dispersés et s'ils renferment ou non de l'arsenic, ce sont autant de facteurs à prendre en compte avant d'autoriser leur immersion en mer. Il nous est donc impossible de vous répondre tout de suite par oui ou par non.

Pour ce qui est du délai - et c'est manifestement un thème de cette discussion - l'entreprise doit pouvoir nous préciser son plan et nous présenter une proposition dans laquelle elle demande un permis d'immersion en mer et indique les incidences environnementales du dépôt des résidus à tel ou tel endroit. L'endroit a évidemment de l'importance.

Par conséquent, jusqu'à ce que nous recevions une proposition de l'entreprise, nous ne sommes pas vraiment en mesure de nous prononcer et l'entreprise connaît très bien les facteurs dont nous tiendrons compte.

M. Clarke: Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais ajouter que le Canada a récemment cessé de rejeter des déchets industriels dans l'océan. Cela correspond à ce qui se fait dans les autres pays à l'heure actuelle. On a longtemps considéré l'océan comme un dépotoir bien pratique. Il existe maintenant des conventions qui nous dissuadent de continuer à rejeter en mer les déchets industriels.

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Je n'ai absolument aucun doute que l'immersion pure et simple des déchets en mer serait la façon la plus rentable de procéder. Cependant, comme M. Cappe l'a indiqué, cela sera déterminé par l'évaluation environnementale et par les incidences environnementales d'une telle mesure. Cela se réglera dans le cadre de ce processus.

Le vice-président (M. Thalheimer): Je vous remercie.

Avant de revenir à M. Stinson, j'aimerais avoir quelques éclaircissements.

Nous n'avons toujours par reçu la réponse du gouvernement à notre rapport provisoire. Pouvez-vous nous en donner la raison? Est-ce votre ministère qui retarde les choses? Nous ne comprenons pas pourquoi nous n'avons toujours pas reçu de rapport.

M. Cappe: Ce n'est pas notre ministère qui retarde les choses. Nous sommes en train de consulter le ministère des Ressources naturelles et je sais que le gouvernement est en train d'examiner et continue à examiner comment y répondre exactement.

La réponse du gouvernement - et je ne veux pas faire des conjectures sur les intentions du gouvernement - sera fonction de la nature provisoire du rapport. Les audiences que vous avez tenues ces derniers mois vous amèneront de toute évidence à préparer un rapport différent à la fin du processus, c'est pourquoi il y a un problème pour ce qui est de répondre au rapport provisoire. Le gouvernement devrait toutefois être en mesure de le faire au tout début du mois prochain ou d'ici la fin de ce mois-ci.

Le vice-président (M. Thalheimer): J'ai une autre question à poser avant de céder la parole à M. Stinson.

Depuis 1993, le Conseil canadien des ministres de l'Environnement a tâché de conclure une entente fédérale, provinciale et territoriale sur certains domaines de la gestion environnementale où il pourrait y avoir harmonisation. Les résultats de cette discussion font partie d'un projet de cadre et d'entente de gestion environnementale qui n'a toujours pas été approuvé. Comment décririez-vous les négociations qui se sont déroulées jusqu'à présent?

M. Cappe: Je préciserai que le cadre et l'entente de gestion environnementale, qui ont été établis par des hauts fonctionnaires, n'ont pas été approuvés par les ministres. On a d'abord voulu procéder à des consultations. Certaines consultations ont eu lieu avec des groupes de l'industrie, des groupes environnementaux, des groupes autochtones et d'autres groupes. Ces consultations nous ont fourni une évaluation utile du document à bien des égards: certains l'ont trouvé trop sévère, d'autres pas assez et ainsi de suite.

Je peux vous dire que le ministre fédéral de l'Environnement, M. Marchi, a communiqué avec ses homologues provinciaux pour discuter de la question. Le CCME, le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, se réunira à Toronto les 30 et 31 mai et c'est l'un des points les plus importants dont ils discuteront au cours de cette réunion. Par conséquent, les discussions se poursuivent.

Le vice-président (M. Thalheimer): Quand prévoyez-vous que cette entente sera approuvée, si elle l'est?

M. Cappe: Je tiens à préciser que le gouvernement fédéral s'est dit intéressé à essayer de faire porter la négociation sur certains problèmes environnementaux en particulier. Je pense que c'est ainsi que vous avez posé la question, en parlant de problèmes environnementaux.

Le cadre et l'entente de gestion environnementale ne traitent pas de problèmes particuliers. Leur portée est générale. Dans ma réponse à M. Stinson, j'ai fait remarquer que nous avions réalisé des progrès avec le gouvernement de la Colombie-Britannique, à titre d'exemple, en établissant une entente bilatérale d'évaluation environnementale. Nous sommes disposés à faire de même avec d'autres provinces.

Je tiens à faire la distinction entre des négociations multilatérales axées sur un cadre général et des négociations multilatérales axées sur des problèmes particuliers, et à faire aussi la distinction entre des négociations multilatérales et des ententes bilatérales, sur lesquelles nous continuons à travailler.

Tout le monde aimerait que l'on précise le cadre d'ensemble et c'est ce dont les ministres discuteront à Toronto. J'espère qu'ils pourront ranimer ces discussions.

Le vice-président (M. Thalheimer): Selon vous, convient-il de demander à 13 partenaires de s'entendre sur une norme commune? Êtes-vous d'accord avec cette approche?

M. Cappe: Je n'ai pas d'opinion à ce sujet, monsieur le président. Je ne suis qu'un bureaucrate; je n'ai pas d'opinion.

Il faut toutefois dire que l'un des problèmes du cadre et de l'entente de gestion environnementale, et l'une des raisons pour lesquelles ils ont été critiqués par un certain nombre de gens, c'est qu'ils créent un conseil des parties, l'organisme chargé de prendre les décisions finales. Pour bien d'autres gens, c'est une formule qui peut mener à la paralysie car il est impossible que13 administrations s'entendent. De plus, ils créent une superstructure de 11 ou 13 comités de hauts fonctionnaires chargés de s'occuper de divers aspects. Je ne crois pas que cela permettra de régler le problème de lenteur que le comité a déjà soulevé à plusieurs reprises. Je crois qu'il est difficile d'obtenir que 13 administrations s'entendent. Je pense qu'il serait beaucoup plus facile si le gouvernement fédéral procédait de façon unilatérale. Je ne crois pas que cela se produira non plus.

.1145

Le vice-président (M. Thalheimer): Monsieur Stinson.

M. Stinson: Toutes les personnes présentes sont très soucieuses de l'environnement. Je ne voudrais donc pas qu'on se méprenne. Je ne voudrais pas non plus que vous vous mépreniez à propos de Kemess, puisque que vous n'êtes pas entièrement au courant de la situation. Nous parlions de18 ombles à tête plate.

M. Cappe: Je sais.

M. Stinson: La question que je me pose, puisque je me soucie de l'environnement, c'est pourquoi ce lac ne peut-il accueillir que 18 ombles à tête plate? Pourquoi n'y en avait-il pas 300 ou 400?

Je me suis entretenu avec certains responsables de Voisey Bay et cette question d'immersion des déchets en mer a été soulevée. D'après ce que j'ai cru comprendre, ce n'était même pas une option à envisager. Ils n'envisageaient même pas cette option. Cela leur est venu des médias et de gens qui ne travaillent pas à Voisey Bay. Est-ce que Voisey Bay a déjà présenté au gouvernement une proposition d'immersion en mer?

M. Cappe: Je ne veux pas parler non plus au nom de l'entreprise. Je ne suis au courant d'aucune de ces discussions, donc je n'en sais rien. Je répondais de façon générale à propos de l'application des dispositions de la LCPE relatives à l'immersion en mer. C'est une question qui concerne l'entreprise. Je ne suis pas au courant.

Je sais qu'il y a à l'heure actuelle des discussions importantes avec le ministère de l'Environnement et le ministère des Ressources naturelles. La semaine dernière, j'ai rencontré Fred Way, le sous-ministre des mines à Terre-Neuve. Nous avons discuté de ce processus mais nous n'avons pas traité des particularités du projet. Par conséquent, j'ignore ce qu'il en est.

M. Stinson: Je voulais simplement le mentionner. Ceux qui entendent ce genre de choses ne comprennent pas tout ce qui se passe et je ne voulais pas laisser l'impression que...

M. Cappe: J'ignore s'il s'agit d'une question cruciale ou non pour eux.

Le vice-président (M. Thalheimer): Comme il n'y a plus d'autres questions, je tiens à vous remercier d'avoir été des nôtres, monsieur Cappe et monsieur Clarke. Je suis sûr que le comité tiendra compte de vos commentaires.

La séance est levée.

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