[Enregistrement électronique]
Le mardi 8 octobre 1996
[Traduction]
Le président: Je déclare la séance ouverte. Aujourd'hui, le comité étudie de nouveau le projet de loi C-23, Loi constituant la Commission canadienne de sûreté nucléaire et modifiant d'autres lois en conséquence.
Nous sommes censés entendre quatre témoins aujourd'hui; trois d'entre eux sont déjà présents et nous allons donc commencer. Je voudrais dire quelques mots au sujet de la démarche que nous allons suivre. Les témoins auront à tour de rôle dix minutes au maximum pour faire une brève déclaration, dans l'ordre où ils apparaissent à l'ordre du jour.
Je demande aux témoins de ne pas s'écarter du sujet; j'ai d'ailleurs rappelé cette règle aux membres du comité ces deux dernières semaines. Nous discutons du projet de loi C-23 et j'aimerais que l'on s'en tienne strictement au sujet. Après les déclarations liminaires, nous aurons une discussion avec les membres du comité, en commençant par l'Opposition et en faisant ensuite un tour de table jusqu'aux députés ministériels. J'espère que chacun pourra prendre la parole. Je demande à tous d'être le plus concis possible dans les questions, les réponses et les commentaires.
M. Gordon Edwards représente le Regroupement pour la surveillance des responsabilités nucléaires. Kristen Ostling représente la Campagne contre l'expansion nucléaire. Nous attendons toujours deux témoins du Nuclear Awareness Project, mais nous allons commencer. M. Boyd représente la Société nucléaire canadienne.
Vous êtes accompagné de deux personnes, monsieur Boyd.
M. Fred Boyd (membre, Société nucléaire canadienne): Oui, monsieur le président. Permettez-moi de vous présenter M. Hong Huynh, qui est l'actuel président de la Société nucléaire canadienne, et M. Ken Smith, qui en est le trésorier.
Le président: Merci beaucoup. Je donne la parole à M. Edwards.
M. Gordon Edwards (président, Regroupement pour la surveillance des responsabilités nucléaires): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis très heureux d'avoir l'occasion de vous parler du projet de loi C-23. En guise d'introduction, je vous ai remis un bref texte de deux pages, auquel j'ai joint un article qui a été écrit dans les années quatre-vingt à la demande du rédacteur en chef de la Canadian Business Review.
Mais d'abord, deux mots sur moi-même et les activités que j'exerce dans ce domaine depuis de longues années. J'ai obtenu la médaille d'or en mathématiques et en physique de l'Université de Toronto. À l'heure actuelle, je suis professeur de mathématiques au collège Vanier de Montréal. J'ai travaillé comme expert-conseil en questions nucléaires pendant de nombreuses années auprès d'organismes comme la Commission royale de l'Ontario sur la planification de l'énergie électrique. J'ai été l'un des deux experts-conseils dont le vérificateur général du Canada a retenu les services quand il faisait une vérification intégrée de la Commission de contrôle de l'énergie atomique. J'ai agi à titre d'expert-conseil en questions nucléaires auprès de nombreuses organisations gouvernementales et non gouvernementales partout au Canada.
Pour ce qui est du projet de loi à l'étude, je suis très heureux de constater que l'on remplace la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique; après tout, cette loi a été adoptée en 1946 dans le plus grand secret. À l'époque, il n'y a presque pas eu de débat au Parlement sur ce projet de loi et l'énergie nucléaire était encore très mystérieuse. C'était en grande partie secret parce que c'était lié au projet de bombe atomique de la Seconde Guerre mondiale et les parlementaires canadiens, de même que le grand public, ont été fort étonnés d'apprendre que le Canada avait quelque chose à voir avec ce projet.
Nous voici donc 50 ans plus tard en train de réexaminer cette loi et je me demande si un autre demi-siècle s'écoulera avant que nous nous penchions de nouveau sur la question. J'ai la conviction que nous devons nous assurer d'avoir une loi solide qui pourra nous guider au cours des cinq prochaines années, au besoin.
Il ne faut pas perdre de vue que 50 ans, c'est très long. Nous devons être prêts à toutes les éventualités. Je suis convaincu que ce qui manque dans le projet de loi, et c'est l'un des éléments les plus importants, c'est le partage des responsabilités entre l'organisme de réglementation, quel que soit le nom qu'on lui donne, et une quelconque organisation chargée de faire la promotion de l'énergie nucléaire.
Cela veut dire que le nouvel organisme de réglementation dont on propose la création ne devrait vraiment pas relever du même ministre qu'Énergie atomique du Canada Limitée. De nombreuses raisons d'ordre pratique militent en faveur de cette séparation et j'en ai indiqué quelques-unes dans mon texte écrit.
D'abord et avant tout, il y a la question du conflit d'intérêts. Le texte même du projet de loi comporte des dispositions visant à empêcher que les membres de la Commission de sûreté nucléaire soient en conflit d'intérêts.
Un ministre est dans la même situation. Comment un ministre peut-il être, auprès de ses collègues du Cabinet, à la fois le défenseur et le promoteur de l'énergie nucléaire et un critique impitoyable, si nécessaire, en matière de sécurité et d'environnement? Le même ministre peut-il jouer les deux rôles?
Cette question prend une importance particulière si le secteur ne va pas bien, ce qui est nettement possible.
En effet, il est tout à fait possible qu'au cours des 50 prochaines années, ce secteur n'aille pas bien. Actuellement, sa croissance est nulle au Canada. Ontario Hydro éprouve d'énormes difficultés financières. Rien n'indique que les autres provinces qui ont des réacteurs nucléaires vont en ajouter d'autres. Quand des difficultés de ce genre surgissent, les frictions s'accentuent entre le rôle de la réglementation et celui de la promotion. Je ne pense pas qu'il soit sage de confier les deux rôles au même ministre.
Il y a par ailleurs une autre considération, à savoir que l'on ajoute une toute nouvelle dimension qui n'était pas explicitement présente jusque-là. Je veux parler de la responsabilité environnementale. Certains seront peut-être étonnés d'apprendre qu'encore aujourd'hui, alors que nous sommes engagés dans la voie nucléaire depuis fort longtemps, il n'existe aucune réglementation environnementale fédérale efficace en ce qui a trait par exemple aux émissions radioactives. Il n'y en a pas. En fait, j'ai posé la question à un représentant d'Environnement Canada pendant les audiences tenues à Toronto sur l'élimination des déchets nucléaires fortement radioactifs et c'est ce qu'il m'a répondu. Il a dit qu'il n'y en avait pas à sa connaissance.
On envisage de confier à cet organisme un tout nouveau mandat. Il est question d'établir des normes environnementales. Il me semble que ce n'est pas le ministère des Ressources naturelles qui possède les compétences voulues pour ce faire. Je trouve qu'il serait très avantageux, si l'on veut établir des normes qui s'harmonisent avec celles qu'on applique dans d'autres secteurs et qui régissent d'autres polluants, de faire en sorte que la Commission de sûreté nucléaire relève du ministre qui s'occupe de ces problèmes, soit le ministre de l'Environnement.
Je voudrais toutefois insister sur un troisième point. Je possède moi-même une formation scientifique et, à ce titre, je crois que le Canada se doit, que nous devons à la population canadienne de diversifier davantage les compétences en matière nucléaire. C'est ce qui s'est passé chez nos voisins du Sud, aux États-Unis, et dans d'autres pays.
Au Canada, je crois que l'industrie nucléaire s'est développée en vase clos, avec des conséquences malheureuses. L'une de ces conséquences malheureuses, c'est qu'il y a une certaine similitude des points de vue, de sorte que nous n'avons pas vraiment de débat sur les questions nucléaires. Nous devons nous contenter du point de vue de l'industrie. Bien sûr, il y a aussi le point de vue des responsables de la réglementation, mais en l'occurrence, ces derniers relèvent du même ministre.
Je crois que nous devrions faire des efforts délibérés pour diversifier les compétences dans ce domaine. Je vais vous donner des exemples des avantages qu'on en a tirés aux États-Unis, où l'on trouve maintenant des noyaux d'experts dans des organismes comme l'Environmental Protection Agency, le Geological Survey et le General Accounting Office. Il y a même une section spéciale de ce dernier bureau qui s'occupe exclusivement des matériaux nucléaires. Il y a aussi un certain nombre d'organismes qui relèvent des États et qui sont particulièrement bien équipés pour s'occuper de questions nucléaires; je songe notamment à l'Energy Resources and Conservation Commission de la Californie.
Cette diversification des compétences a plusieurs conséquences. D'abord, les gens qui possèdent des compétences dans le domaine nucléaire et qui ne veulent pas nécessairement travailler dans l'industrie nucléaire ont d'autres possibilités d'emploi. Ainsi, ceux qui quittent l'industrie nucléaire peuvent travailler ailleurs. Cela veut aussi dire que lorsqu'une question surgit, divers organismes s'y penchent et donnent différents points de vue sur les façons possibles de l'aborder.
Je vous en donne un exemple. Voici une photo noir et blanc prise par l'un de mes collègues et qui représente les résidus radioactifs laissés à Elliot Lake. Il y là environ 70 millions de tonnes de sable radioactif provenant des mines d'uranium d'Elliot Lake.
Aux États-Unis, en partie à cause de la diversification des compétences, les Américains ont adopté une loi spéciale pour régler ce problème. On trouve 220 millions de tonnes de résidus semblables aux États-Unis. Au Canada, nous en avons à peu près autant. Aux États-Unis, il existe une loi spéciale intitulée Uranium Mine Tailings Reclamation Legislation. Des fonds sont disponibles pour stabiliser ces sables radioactifs qui, soit dit en passant, vont demeurer dangereusement radioactifs pendant des centaines de milliers d'années.
Ce n'est qu'un seul exemple. Il y en a d'autres.
Prenons le déclassement des réacteurs nucléaires. Au Canada, nous avons deux réacteurs qui ne fonctionnent plus et qui pourraient être déclassés, mais tant que nous ne le ferons pas, nous ne saurons pas ce que cela implique.
Il y a aussi la question de l'inventaire de la radioactivité. Au Canada, il n'existe aucun inventaire officiel de la radioactivité, c'est-à-dire que nous ne possédons pas d'inventaire officiel des sites radioactifs disséminés au Canada, avec une estimation de ce qu'il pourrait en coûter pour les assainir. En fait, d'après le vérificateur général du Canada, notre propre société d'État, Énergie atomique du Canada Limitée, n'a même pas comptabilisé ce que pourrait lui coûter le problème de la contamination radioactive.
Pourquoi mentionner cela en rapport avec le projet de loi C-23? Parce que, mesdames et messieurs, je crois que si cet organisme relevait d'un ministre différent, par exemple le ministre de l'Environnement, il se constituerait dans ce ministère un noyau de compétences en matière d'énergie nucléaire. Je crois que l'on verrait davantage d'initiatives visant à régler des problèmes individuels que l'on néglige actuellement.
Malheureusement, je ne crois pas que ce soit la faute de la Commission de contrôle de l'énergie atomique, mais l'histoire de cet organisme démontre qu'il faut que les événements atteignent des proportions de crise avant que l'on ne donne à la commission les pouvoirs voulus pour intervenir et agir. Je songe notamment à Port Hope, à Scarborough et à d'autres situations devenues critiques. C'est alors seulement que l'on donne à la Commission de contrôle de l'énergie atomique le pouvoir d'intervenir et d'agir.
Je suis convaincu qu'il faut légiférer de manière à ce que la Commission de sûreté nucléaire relève d'un ministre qui peut prendre l'initiative pour s'attaquer à certains de ces problèmes sans être en conflit d'intérêts.
Merci.
Le président: Merci beaucoup. Je donne la parole à Mme Ostling.
Mme Kristen Ostling (Campagne contre l'expansion du nucléaire): Premièrement, je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de vous présenter aujourd'hui notre point de vue sur cette mesure législative très importante.
Je voudrais vous donner quelques renseignements sur la Campagne contre l'expansion du nucléaire. Fondé en 1989, l'organisme est une alliance à but non lucratif de groupes d'un peu partout au Canada qui militent en faveur d'une énergie sûre et de la protection de l'environnement. Depuis notre fondation, plus de 300 organisations qui représentent un vaste échantillonnage de la population canadienne nous ont donné leur appui.
Le projet de loi comporte certains éléments nouveaux et importants. Premièrement, le texte de loi proposé marque le début d'une ère nouvelle en matière de législation nucléaire au Canada. Pour la première fois, la protection de l'environnement sera explicitement mentionnée. La nouvelle Commission de sûreté nucléaire, qui remplacera la Commission de contrôle de l'énergie atomique, aura le pouvoir d'exiger des garanties financières, d'ordonner des mesures correctives et d'obliger les parties responsables à payer les activités d'assainissement. C'est un élément important de la loi.
Il ressort de notre analyse du secteur nucléaire non seulement qu'il est possible d'éliminer graduellement la production d'énergie nucléaire, mais aussi que ce mouvement est déjà amorcé. Ce nouveau texte de loi devrait être structuré en fonction de cette future élimination graduelle. Il devrait mettre l'accent sur la sûreté et ne devrait pas être fondé sur des hypothèses qui perpétuent l'industrie nucléaire.
Le bilan montre clairement que les centrales nucléaires ne sont pas sûres. Les accidents de Three Mile Island en 1979 et de Tchernobyl en 1986 ont favorisé la tendance internationale au désengagement nucléaire. Des problèmes chroniques de sécurité au Canada ont incité la CCEA à suggérer que le permis de la centrale nucléaire de Pickering ne soit renouvelé que pour une période de six mois.
En 1995, 786 événements inhabituels se sont produits dans des réacteurs opérationnels. Ces incidents allaient de petits déversements d'eau lourde radioactive jusqu'à une panne importante de l'un des deux systèmes d'arrêt du réacteur dans une centrale.
La mesure proposée pourrait être renforcée de diverses manières. Par exemple, la loi désigne le ministre des Ressources naturelles comme ministre responsable aux termes de l'article 2. Il y a manifestement conflit d'intérêts quand le ministre qui est chargé de faire la promotion de l'industrie nucléaire est également responsable de l'organisme de réglementation qui régit l'industrie nucléaire. Par conséquent, nous recommandons que le ministre de l'Environnement soit désigné ministre responsable, afin de séparer les fonctions de réglementation et de promotion.
À l'article 3, qui traite de l'objet du projet de loi, on lit que le développement et la production d'énergie nucléaire sont l'objet même de la mesure; pourtant, si la mesure a pour objet d'assurer la sûreté nucléaire, comme l'indique le titre du projet de loi, la sûreté et la réglementation devraient avoir préséance sur le développement et la production de l'énergie nucléaire.
Au lieu de mettre l'accent sur le développement et la production de l'énergie nucléaire, le projet de loi devrait avoir pour objet d'assurer la sûreté nucléaire et de réglementer le secteur, essentiellement dans le cadre du démantèlement graduel de l'industrie. Des études internationales montrent que l'énergie nucléaire est en déclin partout dans le monde. Même au Canada, qui tente actuellement de vendre la technologie CANDU à des pays comme la Chine, l'Indonésie, la Corée du Sud et la Turquie, on ne prévoit construire aucune nouvelle centrale nucléaire. Sur la scène internationale, des préoccupations en matière de sécurité, d'incidence environnementale et de coût de revient ont fait de l'énergie nucléaire une option moins attrayante.
À l'article 3, on reconnaît également les nombreux risques qui sont inhérents à la technologie nucléaire. Il faut renforcer cet article de manière à préciser ce qui constitue un risque acceptable et un risque inacceptable.
L'article 6 du projet de loi traite des navires à propulsion nucléaire ou à capacité nucléaire et les exempte de l'application de la loi. Un professeur au département de politique nucléaire de l'Université de Californie a étudié les effets potentiels d'un accident nucléaire à bord d'un navire militaire en Colombie-Britannique. Il a analysé deux scénarios. Le premier comporte l'incinération d'une arme nucléaire et le deuxième, un accident dans un réacteur nucléaire. Dans les deux cas, il y aurait des morts à court et à long terme, en plus des cancers et des défauts génétiques latents.
Compte tenu des répercussions potentiellement catastrophiques d'un accident à bord d'un navire à propulsion nucléaire ou à capacité nucléaire, il faut légiférer en la matière. Si cela ne relève pas de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, quelle autre loi devrait donc s'appliquer?
L'article 7 du projet de loi permet de soustraire à l'application de la loi une activité, une personne ou une quantité de substance nucléaire. Il n'est pas précisé pour quelle raison une telle exemption serait accordée. Il faut donc décrire clairement dans quelles circonstances cela s'appliquerait, à défaut de quoi il faudrait simplement supprimer cette disposition.
À l'article 9, on expose les objectifs de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Comme on l'a déjà vu, la nouvelle commission a un double mandat, celui de réglementer l'énergie nucléaire et d'en faire la promotion. Les éléments de sécurité et de réglementation du mandat de la commission sont secondaires et ne visent qu'à éviter les risques inacceptables. Toutefois, on ne précise pas dans le projet de loi ce qui constitue un risque inacceptable. Par conséquent, il faut récrire l'article 7 du projet de loi de manière à donner à la nouvelle Commission de sûreté nucléaire un mandat plus clair pour garantir la sûreté nucléaire.
Dans un certain nombre de dispositions du projet de loi, il est question de la Loi sur la responsabilité nucléaire. Cette loi limite la responsabilité financière de l'industrie nucléaire à 75 millions de dollars en cas d'accident nucléaire. Cette limite est manifestement sans commune mesure avec le coût réel d'un accident nucléaire. Par exemple, certaines estimations montrent qu'un accident grave qui surviendrait à Darlington coûterait plus d'un billion de dollars. Nous savons déjà que l'accident de Tchernobyl a coûté des centaines de milliards de dollars.
Cette limitation de la responsabilité de l'industrie nucléaire constitue une importante subvention de cette industrie, ce qui suscite manifestement des inquiétudes au Parlement. Il y a par exemple deux projets de loi d'initiative parlementaire qui visent à augmenter ce montant de 75 millions. Dans un cas, le projet de loi C-289 proposé par le député Chuck Strahl cherche à porter ce montant à 350 millions de dollars, tandis que le projet de loi C-249 proposé par Warren Allmand recommande que ce montant soit porté à 500 millions de dollars. De plus, Charles Caccia, dans son allocution à la Chambre, a déclaré que la Loi sur la responsabilité nucléaire devrait faire l'objet d'un débat à la Chambre en vue d'une refonte complète visant à moderniser tout le cadre législatif.
Les articles 87 à 89 de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires modifient la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique et créent la nouvelle Loi sur l'énergie nucléaire. À l'article 87, on précise que cette loi viserait le développement et l'utilisation de l'énergie nucléaire. Il faut modifier cette disposition de manière à refléter le besoin d'assurer la réglementation, la sûreté et l'élimination graduelle de l'énergie nucléaire. La nouvelle Loi sur l'énergie nucléaire devrait être perçue comme un instrument législatif visant à assurer la disparition graduelle, en toute sécurité, de l'industrie nucléaire au Canada.
Dans un récent rapport d'une ONG qui a son siège à Washington, on indique que l'augmentation des coûts, les problèmes difficiles d'élimination des déchets, ainsi que des solutions de rechange plus sûres et moins coûteuses pour la production d'énergie ont entraîné la stagnation des commandes de nouvelles centrales nucléaires à l'échelle internationale et le rejet graduel, dans le monde entier, de cette technologie.
On peut donc voir que déjà, au Canada et dans le reste du monde, le nucléaire est en voie d'être éliminé. Comme Charles Caccia l'a signalé dans son allocution à la Chambre sur le projet de loi C-23, il faut se pencher sur la dépendance du Canada envers les hydrocarbures et le nucléaire afin de l'éliminer graduellement.
Nous recommandons que la nouvelle Loi sur l'énergie nucléaire soit accompagnée d'une législation faisant en sorte que l'énergie nucléaire canadienne soit remplacée par des sources d'énergie propres et sûres.
Un autre élément important du projet de loi se trouve à l'article 94. On y stipule que l'article 15 proposé de la Loi sur l'énergie nucléaire permet au gouvernement de continuer à subventionner l'industrie nucléaire. Au lieu de cela, nous recommandons que la nouvelle Loi sur l'énergie nucléaire prévoie que les subventions à l'industrie nucléaire seront éliminées graduellement. Cette élimination graduelle des subventions doit se faire de manière à ce que la santé et la sûreté des personnes et la protection de l'environnement ne soient nullement menacées pendant la période de déclassement des centrales et d'assainissement des sites.
L'industrie nucléaire est l'une des industries les plus fortement subventionnées au Canada. En 1995, Énergie atomique du Canada Limitée avait reçu au total 13 milliards de dollars. La décision d'Ottawa de subventionner l'EACL pendant 42 ans a contribué sensiblement à alourdir notre dette nationale, ce dont nos décideurs politiques ne se rendaient pas vraiment compte auparavant.
L'économiste David Argue a établi récemment que si les subventions versées à l'EACL avaient servi à rembourser la dette nationale, la dette du Canada serait actuellement inférieure de 33 milliards de dollars. Il est très important que la question des subventions soit abordée dans la nouvelle loi proposée.
En fait, le gouvernement s'occupe de la question des subventions. Dans le budget de février 1996, on a annoncé des compressions aux subventions à l'EACL. La subvention a été presque réduite de moitié. En 1998-1999, elle ne serait plus que de 100 millions de dollars.
Nous recommandons que la nouvelle loi proposée reflète l'engagement du gouvernement de réduire les subventions. Il faut faire en sorte que le secteur nucléaire dispose de fonds suffisants pour assurer l'assainissement, le déclassement des centrales, l'élimination des déchets nucléaires et pour payer d'autres coûts associés à l'énergie nucléaire au Canada.
Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a déjà recommandé que le gouvernement mette fin à sa participation au groupe de propriétaires du CANDU. Le protocole d'entente vient à échéance en mars 1997. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait suivre le conseil du Comité permanent de l'environnement et du développement durable et ne pas renouveler cette entente.
Aux termes de l'article 21, le projet de loi délègue aux provinces des pouvoirs en matière de réglementation. Nous croyons que ce n'est pas une bonne chose. Compte tenu des risques associés à l'énergie nucléaire, ce sont les autorités fédérales qui doivent assurer la réglementation en la matière.
Il n'est nullement question dans le projet de loi des exportations et des importations nucléaires. Nous croyons que c'est une lacune. La nouvelle loi proposée doit modifier le régime des permis d'exportation et d'importation pour faire en sorte que le Canada se retire du secteur de l'exportation nucléaire et qu'il ne contribue pas à l'avènement d'une économie du plutonium en important du combustible MOX dérivé des armes nucléaires.
Le projet de loi doit veiller à ce que le Canada ne prenne pas à son compte le fardeau des déchets nucléaires produits dans d'autres pays, que ce soit dans le secteur civil ou militaire.
En terminant, je recommande que tout le dossier nucléaire fasse l'objet d'un débat approfondi au Parlement et parmi le grand public. Merci beaucoup.
Le président: Merci.
Nous accueillons maintenant Irene Kock et Douglas Chapman, du Nuclear Awareness Project.
Bienvenue. Si vous n'étiez pas là au début, je vous rappelle que vous avez dix minutes pour faire une déclaration. Par la suite, quand tous les témoins auront terminé leur déclaration liminaire, nous passerons aux questions des membres du comité. Vous avez la parole.
Mme Irene Kock (Nuclear Awareness project): Merci beaucoup. Nous nous excusons d'être en retard.
Je m'appelle Irene Kock et je parle au nom du Nuclear Awareness Project, qui est un groupe de défense de l'environnement animé par des citoyens de la région de Durham, où se trouvent les centrales nucléaires de Pickering et de Darlington et la décharge de déchets radioactifs de Port Granby.
Notre organisation, le Nuclear Awareness Project, ainsi que notre groupe affilié, Durham Nuclear Awareness, consacrent leurs efforts à la sensibilisation du public sur les questions nucléaires et les solutions de rechange en matière d'énergie. Je suis accompagnée de Doug Chapman, qui est avocat au Sierra Legal Defence Fund, lequel se spécialise dans les litiges environnementaux et fournit gratuitement des conseils juridiques et des services d'avocats à des groupes de protection de l'environnement et de citoyens au sujet de diverses questions environnementales. M. Chapman a rédigé notre mémoire.
Le Nuclear Awareness Project suit depuis plusieurs années les délibérations et les activités de la Commission de contrôle de l'énergie atomique. Nous sommes intervenus aux réunions de la commission portant sur le renouvellement des permis des centrales nucléaires de Pickering et de Bruce, sur les laboratoires nucléaires de Chalk River, sur la raffinerie d'uranium Cameco à Port Hope et sur la décharge de Port Granby. Nous préparons actuellement des interventions portant encore une fois sur le renouvellement du permis de Pickering et sur les laboratoires nucléaires de Chalk River. Notre expérience dans tous ces dossiers nous a amenés à conclure qu'une refonte de la Commission de contrôle de l'énergie atomique s'impose.
Nous avons également été consultés par le Bureau du vérificateur général dans le cadre de son examen détaillé de la commission, dont les résultats ont été publiés en 1994. Nous avons bon espoir que la nouvelle loi proposée entraînera une amélioration sensible de la réglementation de l'industrie nucléaire au Canada.
Nous allons maintenant passer en revue certains aspects précis du projet de loi C-23 et nous prendrons la parole à tour de rôle pour mettre en relief les principaux éléments de notre mémoire. Je cède la parole à M. Chapman.
M. Douglas Chapman (avocat, Sierra Legal Defence Fund): Je note que d'après le numéro du printemps 1996 de la publication de la Commission de contrôle de l'énergie atomique intitulée Reporter, le projet de loi C-23 renfermerait des dispositions prévoyant la participation du public dans le cadre d'audiences, d'examens et d'appels. Bien sûr, rien dans le projet de loi ne prévoit obligatoirement la participation du public à un quelconque processus de la commission.
Nous savons par ailleurs que le projet de loi renferme une disposition, nommément l'article 66, qui stipule que les commissaires et toutes les personnes qui travaillent pour la commission sont tenus de prêter un serment de confidentialité. Ma question est celle-ci: pourquoi ce serment de confidentialité est-il nécessaire? Nous ne sommes pas en temps de guerre. Il n'y a plus de guerre froide. Le gouvernement a interdit tout ce qui a trait aux armes nucléaires.
On nous demande maintenant d'accepter l'importation de plutonium américain pouvant être utilisé à des fins militaires et de faire des essais pour voir ce que nous pourrions en faire au Canada. Autrement dit, nous prenons à notre charge les déchets nucléaires américains, alors même que le gouvernement du Canada s'est orienté dans une voie qui interdit tout ce qui touche de près ou de loin aux armes nucléaires.
Les résidus miniers radioactifs de la région d'Elliot Lake dont M. Edwards a parlé ont été décrits en ces termes par un comité de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale: «Les résidus miniers provenant des mines d'uranium d'Elliot Lake présentent un risque environnemental perpétuel». Cela veut dire pour toujours.
La première chose qu'il faut se demander, c'est comment il se fait que nous ayons dans une région de l'Ontario un risque environnemental perpétuel. Qu'allons-nous faire à ce sujet? Eh bien, laissez-moi vous dire ce que l'on va faire. Le gouvernement du Canada a conclu une entente avec la province de l'Ontario aux termes de laquelle ces gouvernements en assument la responsabilité; cette entente se trouve également dans un rapport du comité d'évaluation environnementale daté de juin 1996 et intitulé Le déclassement des résidus des mines d'uranium dans la région d'Elliot Lake. Elle constitue l'annexe D de ce rapport. Les gouvernements du Canada et de l'Ontario ont convenu d'assumer la responsabilité de la gestion perpétuelle de ces résidus miniers.
Nous savons que Rio Algom et Denison Mines ont fait beaucoup d'argent en exploitant ces mines d'uranium pendant des années. Pourquoi les contribuables du Canada devraient-ils en assumer la responsabilité à perpétuité?
Pour ce qui est du secret, une demande a été présentée aux termes de la Loi ontarienne sur l'accès à l'information pour obtenir des renseignements sur les installations et la décharge nucléaires de Chalk River. On voulait avoir tous les renseignements sur le contenu de cette décharge et sur les rayonnements qui ont été émis dans l'environnement naturel. Nous savons qu'il y a des déversements dans la rivière des Outaouais. On a répondu que pour des raisons de sécurité nationale, beaucoup de ces documents nous sont interdits.
Il est question de sécurité nationale et de refus de divulguer des renseignements. J'affirme que la seule sécurité qui soit en cause dans cette affaire, c'est la sécurité de l'établissement nucléaire. Il est dangereux pour eux de confier au public tous les renseignements sur les déchets nucléaires de Chalk River, tout comme il est dangereux pour l'établissement nucléaire que des groupes de défense de l'environnement mettent la main sur les renseignements concernant les dangers de la centrale nucléaire de Pickering. Nous avons également essuyé des refus dans ce dossier.
Je pose la question suivante: pourquoi tous ces renseignements relèvent-ils de la sécurité nationale et sont-ils tenus secrets? Je connais la réponse à cette question. C'est que la publication de ces renseignements mettrait en danger l'établissement nucléaire. Il n'y a aucune autre raison possible.
Pour ce qui est du projet de loi lui-même, je veux faire quelques brèves observations sur les dispositions relatives aux infractions et aux pénalités. Premièrement, je voudrais toucher un mot de la disposition sur les dénonciateurs. L'alinéa 48g) interdit à un employeur de prendre des mesures disciplinaires contre un employé qui donne des renseignements aux autorités. Cela s'appelle une loi de protection des dénonciateurs. Le projet de loi stipule que c'est une infraction, mais ne prévoit par ailleurs aucune disposition pour s'occuper de l'employé qui s'est porté à la défense de l'environnement et qui a fourni des renseignements aux autorités. On en trouve dans la Loi sur la protection de l'environnement de l'Ontario, la Loi sur les ressources hydriques de l'Ontario et la Déclaration des droits en matière d'environnement de l'Ontario. Il faut insérer dans le projet de loi une disposition assurant un recours à l'employé qui a été congédié, mis à pied, dont on a réduit le salaire ou qui a subi un préjudice quelconque parce qu'il a collaboré avec les autorités. J'affirme que c'est une grave lacune.
Au sujet des pénalités et des infractions, je suis heureux de constater que l'on a renforcé les pénalités, mais il reste de graves omissions. Par exemple, la disposition sur les peines ne prévoit aucune aggravation de la peine en cas de deuxième infraction. C'est une chose courante dans la législation environnementale et dans presque toutes les lois qui établissent des infractions et des peines. Il n'y a rien de tel dans le projet de loi. Chose intéressante, voici ce qu'on lit au paragraphe 20(2) de la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique:
- En cas de perpétration par une personne morale...d'une infraction..., ceux de ses dirigeants,
administrateurs ou mandataires qui l'ont ordonnée ou autorisée, ou qui y ont consenti ou
participé, sont considérés comme des coauteurs de l'infraction...
- C'est une disposition courante en matière d'infraction qui figure dans le Code criminel, dans
toutes les lois environnementales au Canada et même dans l'ancienne Loi sur le contrôle de
l'énergie atomique.
Chose tout aussi importante, je ne crois pas avoir vu, dans quelque pays que ce soit, de mesure législative environnementale qui ne stipule pas expressément qu'il est interdit de rejeter ou de permettre que soient rejetées dans l'environnement des substances radioactives. Aucune disposition du projet de loi ne le prévoit explicitement. Une telle infraction pourrait entraîner le retrait d'un permis, mais qu'arrive-t-il lorsqu'il n'y a aucun permis? Il existe de nombreuses façons pour les gens d'entrer en possession de substances radioactives et, par négligence, de laisser échapper dans l'environnement de la radioactivité nocive pour la santé. Une telle disposition doit figurer dans le projet de loi.
Au sujet des peines contre les personnes morales, nous proposons d'augmenter le montant des amendes. Autrement, les sociétés considéreront que cela fait simplement partie du coût normal de leurs activités. De plus, le projet de loi doit comprendre une disposition qui impose aux dirigeants et aux administrateurs de société le devoir de faire diligence raisonnable pour empêcher des rejets évitables et inutiles de substances radioactives dans l'environnement. On pourrait donner comme exemple d'une telle mesure l'article 194 de la Loi sur la protection de l'environnement de l'Ontario.
Le projet de loi comme tel ne prévoit aucune évaluation environnementale et il reste à voir comment la législation canadienne sur l'évaluation environnementale s'appliquera à ce projet de loi, mais nous allons suivre cela de près. Par exemple, ne croyez-vous pas qu'il devrait y avoir une quelconque enquête publique ou que des éléments de preuve devraient être recueillis dans une arène publique en ce qui concerne l'importation de plutonium en provenance des États-Unis? Il doit être transporté par camion ou par avion; il faut que ce soit l'un ou l'autre. Ne devrait-il pas y avoir des audiences à ce sujet?
Enfin, pour revenir à mon premier propos, quelle sécurité est menacée dans cette affaire? Est-ce la sécurité de la nation canadienne ou celle des citoyens du Canada? Ou bien est-ce seulement l'établissement nucléaire qui est en danger, parce que ces gens-là ne veulent pas que les citoyens du Canada soient au courant de ce qui se passe dans leur secteur? Tout indique que c'est la seule et unique raison.
Merci.
Mme Kock: Je voudrais ajouter quelques mots. L'article 24 traite de l'octroi de licences et de permis à l'égard d'installations. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons acquis une certaine expérience à ce sujet dans le cadre de nos interventions. Je ne saurais trop insister sur le besoin de retrancher les mots «la Commission...si elle est d'avis que», qui définissent le pouvoir de la commission d'octroyer des permis. La commission doit prendre ses décisions en toute objectivité. Toutefois, ce passage laisse supposer une approche subjective, ce qui est inacceptable à notre avis.
Il doit également y avoir des dispositions spécifiques pour la participation du public à tous les processus d'octroi et de renouvellement des permis. La participation du public n'est jamais mentionnée dans ce projet de loi dans le contexte de l'octroi et du renouvellement des permis; nous sommes d'avis que cela devrait être explicitement précisé.
Enfin, une question qui revêt une grande importance pour nous dans la région de Durham est la planification des mesures d'urgence. Je vous invite à réfléchir à la possibilité d'inscrire cela dans la loi, c'est-à-dire que la planification des mesures d'urgence soit une condition nécessaire pour l'obtention d'un permis. C'est le cas aux États-Unis; dans ce pays, on ne peut obtenir de permis pour l'exploitation d'un réacteur nucléaire sans avoir établi un plan complet de mesures d'urgence en cas de catastrophe nucléaire, plan qui doit être mis à l'épreuve régulièrement.
En Ontario, nous avons beaucoup de mal à obtenir que la planification des mesures d'urgence soit satisfaisante aux environs des trois installations nucléaires de Bruce, Pickering et Darlington, parce qu'Ontario Hydro répugne à le faire. C'est perçu comme un cauchemar de relations publiques, mais ce n'est pourtant pas le cas. Il est vraiment important pour notre collectivité de pouvoir compter sur un bon plan de mesures d'urgence. Nous proposons donc que les plans de mesures d'urgence nucléaire, leur mise en oeuvre et leur mise à l'épreuve régulière deviennent une condition d'obtention ou de renouvellement des permis pour les grandes installations nucléaires comme les centrales exploitées par Ontario Hydro.
Cela met fin à notre présentation. Je vous remercie de votre attention.
Le président: Merci. Je donne maintenant la parole à M. Boyd.
M. Boyd: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je voudrais vous présenter M. Hong Huynh, qui est président de la Société nucléaire canadienne et qui fera une brève introduction.
[Français]
M. Hong M. Huynh (président, Société nucléaire canadienne): Nous vous remercions de nous donner l'occasion de commenter le projet de loi C-23. Je m'appelle Hong Huynh et je suis le président de la Société nucléaire canadienne.
[Traduction]
La Société nucléaire canadienne est une organisation qui regroupe des professionnels oeuvrant dans le domaine de la science et de la technologie nucléaires au Canada ou qui s'intéressent à ce domaine. Nous avons actuellement environ 1 000 membres. Les principaux objectifs de la société sont les suivants: tenir lieu de tribune d'échange d'information sur la technologie nucléaire, plus précisément pour les membres des sociétés savantes et scientifiques nationales et internationales; tenir des assemblées afin de présenter des exposés scientifiques et techniques dans le domaine de la technologie nucléaire, de discuter des questions qui y sont abordées et d'en assurer la publication; et favoriser le développement et l'application de la science et de la technologie nucléaires à des fins pacifiques.
[Français]
La Société nucléaire canadienne est dirigée par un conseil élu par les membres et responsable de l'élaboration des politiques et des programmes. Plusieurs membres du conseil sont également présidents de comités.
La Société nucléaire canadienne comprend 12 chapitres locaux et cinq divisions techniques, tous visant l'implication personnelle des membres. Les chapitres locaux ont été fondés sur une base géographique. La principale activité est la tenue de réunions et de colloques sur des sujets précis, souvent d'intérêt local. Les divisions techniques sont appelées, sur une base disciplinaire, à s'occuper des domaines techniques et spécifiques. Elles organisent des conférences nationales et internationales et s'assurent d'une participation canadienne aux forums d'échange d'idées et de savoir sur le plan mondial.
[Traduction]
Les activités de la société portent sur tous les aspects de l'utilisation de l'énergie nucléaire, y compris l'extraction et le raffinage de l'uranium, les centrales nucléaires, l'utilisation des radio-isotopes à des fins médicales et industrielles, la gestion des déchets radioactifs et les travaux de recherche et de développement qui y sont associés.
Chaque année, la société organise plusieurs conférences, symposiums, séminaires et cours techniques traitant d'une grande variété de questions du domaine nucléaire. La société publie un bulletin trimestriel intitulé CNS Bulletin, qui est à la fois une publication technique et un outil de communication pour la société et ses membres.
La Société nucléaire canadienne est membre de l'International Nuclear Societies Council et, de concert avec ce dernier, a participé à des études internationales sur l'avenir de l'énergie nucléaire et à des activités internationales dans le domaine de la sûreté nucléaire.
Le mémoire qu'on va lire a été préparé par un comité spécial constitué par le conseil d'administration de la société. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Ken Smith et de M. Fred Boyd, qui sont membres du conseil de la société. M. Fred Boyd poursuivra la présentation au nom de la société.
M. Boyd: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, M. Huynh vous a exposé la nature, la composition et les activités de notre société. Je voudrais maintenant vous présenter notre mémoire; j'espère que vous en avez un exemplaire sous les yeux, car nous l'avons envoyé la semaine dernière.
Notre mémoire reflète le point de vue de professionnels qui travaillent au programme nucléaire canadien ou qui y sont associés. Comme on pourrait s'y attendre, nous sommes convaincus que la science et la technologie nucléaires ont été et continuent d'être très avantageuses pour la population du Canada et du monde entier.
L'énergie nucléaire fournit à peu près un sixième de l'électricité au Canada et élimine donc des milliers de tonnes de gaz à effet de serre et d'autres émissions nocives qui proviendraient de la seule solution de rechange praticable, à savoir les hydrocarbures.
Les radio-isotopes produits au Canada sont utilisés dans des centaines de milliers d'applications à des fins médicales, diagnostiques et thérapeutiques. La recherche et le développement entourant le programme nucléaire ont eu de nombreuses retombées et ont été à l'origine de percées dans beaucoup d'autres domaines.
Notre société se réjouit de la présentation du projet de loi visant à instituer une nouvelle Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires. Nous reconnaissons que la Commission de contrôle de l'énergie atomique a rempli efficacement son rôle de réglementation depuis 50 ans, mais nous sommes d'accord avec la conclusion du vérificateur général dans son rapport de 1995, à savoir qu'il y a lieu de remplacer la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique, vieille de 50 ans.
Nos observations visent spécifiquement les dispositions du projet de loi. Premièrement, nous sommes d'accord avec l'objet du projet de loi, énoncé à l'article 3, qui dit notamment que la loi proposée a pour objet de limiter «à un niveau acceptable» les risques liés au développement, à la production et à l'utilisation de l'énergie nucléaire relativement à la santé et à la sécurité des personnes, à la protection de l'environnement et à la sécurité nationale.
Nous soulignons l'adjectif «acceptable» et nous nous réjouissons de voir qu'il est repris à l'article 9, qui établit la mission de la commission. Dans notre esprit, cette expression «à un niveau acceptable» est très importante. Dans le monde d'aujourd'hui, on a tendance à rechercher un degré zéro de risque. Aucune activité ne comporte aucun risque. Certains risques sont très minimes, au point qu'on n'en tient pas compte. Le juste rôle d'un organisme de réglementation comme la commission de sûreté et de réglementation nucléaires dont on propose la création est de s'assurer que le risque est acceptable, et non pas d'essayer de supprimer tout risque. Nous sommes heureux de constater que le projet de loi reconnaît cette réalité.
Il y a toutefois des dispositions du projet de loi où cette modification est omise, en particulier à l'article 44 qui porte sur le pouvoir de réglementation. À cet égard, nous avons fait un certain nombre de recommandations précises visant à faire modifier certaines dispositions de l'article 44 afin de s'assurer de conserver cet aspect.
Nous souscrivons à d'autres éléments importants du projet de loi: le pouvoir d'obtenir des garanties financières pour le déclassement et la gestion des déchets, et celui d'établir une collaboration plus officielle avec les provinces, dans les dossiers où il s'est déjà fait beaucoup de travail au fil des années.
Dans notre mémoire écrit, nous faisons des recommandations précises à l'égard de plusieurs articles du projet de loi. Veuillez d'abord noter, si vous avez le texte sous les yeux, qu'il y a une faute de frappe aux paragraphes 2.3 et 2.4 de la version anglaise. La disposition dont il y est fait mention est bel et bien le paragraphe 21(1), et non 20(1).
Notre première recommandation précise porte sur la définition de «substance nucléaire», ce qui est l'un des domaines de réglementation fondamentaux envisagés dans le projet de loi. Ce qui nous préoccupe, c'est l'alinéa 2c) qui inclut dans la définition de «substance nucléaire» l'expression «les radionucléides». Cela nous inquiète parce que les radionucléides sont omniprésents, y compris dans notre propre corps. Nous ne croyons pas que le Parlement souhaite que la nouvelle commission réglemente absolument tout, y compris les gens.
À l'occasion de séances précédentes et devant d'autres témoins, des membres du comité ont posé des questions sur le rôle de la nouvelle commission en matière d'éducation. Nous remarquons que le projet de loi prévoit la diffusion de l'information, ce à quoi nous souscrivons, mais nous voudrions que l'on précise que cette information doit être scientifique et objective. Peut-être pourrait-on modifier en ce sens cette disposition du projet de loi.
D'autres témoins ont exprimé des préoccupations concernant le coût des permis et de la délivrance des permis. À l'heure actuelle - et cette situation semble reconduite par le projet de loi - le responsable de la réglementation peut augmenter son effectif et sa charge de travail et faire payer n'importe quel montant, selon les besoins. Toutefois, en sus des frais, les exigences de la réglementation impliquent énormément de travail. Nos membres sont très conscients de cette charge de travail. Beaucoup d'entre eux s'occupent de répondre à ces questions. Nous croyons qu'il faut imposer une certaine limite ou un contrôle quelconque quant au montant et quant au nombre et à la portée des questions posées par l'organisme de réglementation. Nous proposons d'inclure dans le projet de loi un mécanisme qui assurerait un examen transparent du programme de la commission et de ses dossiers financiers, c'est-à-dire la raison d'être des droits dont on exige le paiement.
Nous avons fait plusieurs recommandations précises en vue d'apporter des changements au paragraphe 44(1), qui traite du pouvoir de réglementation, afin d'y reprendre l'objet du projet de loi auquel nous souscrivons, c'est-à-dire de faire en sorte que le risque soit acceptable.
Nous craignons que les dispositions des alinéas 44(1)h) et 44(1)k), toujours sous la rubrique du pouvoir de réglementation, n'aboutissent à des règles contraignantes touchant les fonctions des travailleurs du secteur nucléaire. Comme l'expérience l'a montré, tant au Canada qu'à l'étranger, cela peut être dangereux. L'organisme de réglementation ne doit pas définir les fonctions individuelles des travailleurs. Cette responsabilité en matière de sûreté doit demeurer la prérogative des détenteurs de permis.
À l'article 49, la stricte obligation pour les travailleurs de se présenter au travail, même en cas de grève ou de débrayage, est à notre avis d'une portée trop vaste. On peut imaginer des situations où un travailleur est dans l'impossibilité de se présenter au travail. Étant donné le nouveau barème des amendes, qui peuvent atteindre un million de dollars, cela peut être trop sévère pour un travailleur. C'est pourquoi nous recommandons de prescrire des amendes distinctes et moins élevées pour les particuliers, par opposition aux sociétés.
Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant le comité et de vous faire part de nos réflexions sur cette importante mesure législative. Comme nous avons fait des recommandations précises à l'égard de dispositions précises du projet de loi, nous espérons que vous vous reporterez à nos recommandations quand vous procéderez à l'étude article par article.
Avant de terminer, je voudrais dire quelques mots sur certaines observations qui ont été faites tout à l'heure. On a dit que l'industrie nucléaire était stagnante dans le monde. Ce n'est pas vrai. C'est vrai en Amérique du Nord, mais pas en Europe de l'Est et assurément pas...
Le président: Excusez-moi de vous interrompre, mais les dix minutes sont écoulées. Pendant la période de questions, chacun aura l'occasion de revenir sur ce que les autres ont dit. J'essaie d'être juste envers tous les groupes.
M. Boyd: Merci, monsieur le président. Je m'excuse. Merci encore de nous avoir invités à comparaître.
Le président: Merci, monsieur Boyd. Je suis certain que vous aurez l'occasion d'y revenir pendant la période de questions.
Monsieur Canuel.
[Français]
M. Canuel (Matapédia - Matane): Les exposés de ces dames et de ces messieurs, et je les en remercie, m'éclairent et me confondent en même temps. On donne tellement d'information. À écouter les uns, et vous me le direz si j'ai mal compris, j'ai l'impression qu'il faudrait presque en arriver à bannir le nucléaire au Canada. D'autres disent que le nucléaire est une énergie propre et très sécuritaire - et je ne dis pas sécuritaire, mais très sécuritaire - et qu'il n'y a rien là. D'autre part, vous dites qu'il faut mettre l'accent sur la sécurité. Je suis tout à fait d'accord. Si on donne un permis, qu'on exige des abris. On ne peut certainement pas traiter le nucléaire à la légère.
Si, dans mon coin de pays, les gens descendent dans la rue pour ne pas avoir une porcherie dans leur cour, cela veut dire que l'environnement est très important. Si on me demandait si je veux une centrale nucléaire dans ma cour, je ne suis pas sûr que je dirais oui immédiatement.
D'autre part, on sait que l'énergie nucléaire est valable, que cette industrie crée des emplois et que c'est exportable. D'autres pays à travers le monde la réclament.
Il y a une espèce d'ambivalence ou de dichotomie qui est difficile à gérer. Oui, il faut protéger l'environnement, mais je ne suis pas prêt à dire non au nucléaire. À moyen terme, il faut adopter le projet de loi C-23, mais j'y présenterai probablement des amendements.
Devrait-on présenter ce projet de loi au public et consulter la population en lui en faisant comprendre l'importance? Comme monsieur le disait plus tôt, nous l'aurons pour les 25 prochaines années. Il vaut peut-être la peine d'y penser deux fois.
Quant à la réglementation, les industriels du nucléaire se demandent si elle devrait relever du ministère de l'Environnement ou du ministère des Ressources naturelles.
J'ai écouté vos arguments et vous avez parfaitement raison. Si l'un des ministère en est le promoteur et que l'autre doit protéger l'environnement, il est assez difficile de concevoir que la réglementation relève du même ministère. J'en suis conscient.
Cette ambivalence pourrait compliquer les choses si on avait des réglementations fédérale et provinciales et si les deux ministères ne se parlaient pas.
Au Canada, quant à moi, il y beaucoup trop de réglementation. Comment pourrit-on en arriver à quelque chose de valable, qui pourrait rendre service à tout le monde? Il faudrait presque une réglementation internationale sur l'environnement. Tous les pays auraient sensiblement la même réglementation. On pourrait aussi créer une commission qui siégerait de temps en temps.
Donc, je demanderais à ceux qui sont plus spécialisés dans l'environnement d'examiner s'il est possible pour nous, parlementaires, de provoquer cela. Cela ne se ferait pas du jour au lendemain, mais on pourrait y arriver d'ici quelques années.
Des spécialistes sont venus nous dire qu'il y avait déjà eu certaines réunions à ce sujet. J'ai dit: «Bravo! Mais cela n'a quand même pas force de loi.» L'ONU devrait-elle prendre cela en main? Je ne le sais pas.
J'aimerais que vous puissiez m'éclairer sur ce point. J'aimerais que vous précisiez votre pensée. J'ai certaines réticences, surtout que vous dites que le nucléaire progresse au lieu de diminuer. J'aimerais que vous commentiez là-dessus.
Si vous me dites que le nucléaire est en voie de diminution, j'aimerais que vous m'apportiez des preuves.
[Traduction]
Le président: Merci.
Qui veut répondre en premier?
Monsieur Edwards.
M. Edwards: La question de savoir de quel ministre l'organisme doit relever est extrêmement importante, parce que, disons-le franchement - et je crois que c'est vrai pour bien des gens d'un côté comme de l'autre, autant les pro-nucléaires que les anti-nucléaires - bien des gens qui se rendent pleinement compte de la difficulté d'établir des politiques dans ce domaine admettent que la politique nucléaire du Canada est marquée depuis le début par une manie exagérée du secret dont on n'a jamais réussi à se débarrasser complètement.
Il est vraiment regrettable qu'il n'y ait aucune obligation de tenir des audiences publiques sur les permis et licences ou de faire participer le public à ce processus, ce qui est d'ailleurs tout à fait contraire au point de vue exprimé publiquement par l'ex-président de la Commission de contrôle de l'énergie atomique, M. René Lévesque.
Il y a quelques années, ce dernier a fait une présentation au Conseil du Trésor, dont je me ferai un plaisir de remettre copie aux membres du comité qui en feront la demande, présentation dans laquelle il énonce l'orientation que devrait prendre à son avis la Commission de contrôle de l'énergie atomique. Cette orientation est très différente de celle du projet de loi à l'étude. À son avis, il était essentiel de prévoir des audiences publiques obligatoires et il affirmait que la Commission de contrôle de l'énergie atomique devrait s'orienter dans cette voie.
Il a dit également que la commission devrait être élargie, non pas, comme il est proposé dans ce projet de loi, pour y inclure d'autres domaines de spécialisation... Enfin, cela n'est pas dans le texte de loi lui-même, mais plutôt dans le préambule du projet de loi, où le ministère des Ressources naturelles présente un sommaire dans lequel on dit qu'en augmentant le nombre des commissaires, on obtiendra une gamme plus étendue de spécialisations.
Ce n'est pas ce que réclamait M. René Lévesque. Il préconisait une plus grande participation du public et des travailleurs aux travaux de la commission. C'est bien différent.
Il serait intéressant pour les membres du comité de prendre connaissance de la présentation que M. Lévesque a faite au Conseil du Trésor il y a quelques années. Si vous n'en avez pas le texte, je me ferai un plaisir de vous en faire parvenir une copie. On peut alors comparer point par point sa vision de ce que la commission devrait devenir et ce que nous avons sous les yeux dans ce projet de loi.
Le vrai problème tient en partie au fait que le dossier relève du ministre des Ressources naturelles. Si ce projet de loi était parrainé non pas par le ministre des Ressources naturelles, mais plutôt par le ministre de l'Environnement, le texte serait différent, le ton serait différent, les dispositions seraient différentes et tout serait beaucoup plus sain.
Le président: Quelqu'un d'autre veut-il intervenir à ce sujet?
Mme Ostling: Je voudrais premièrement dire quelques mots au sujet du déclin de l'industrie nucléaire dans le monde.
L'étude à laquelle je faisais allusion vient du Safe Energy Communication Council. Elle montre qu'au 1er janvier 1996, seulement 34 centrales nucléaires étaient en construction, 84 réacteurs avaient été fermés définitivement et la durée de vie moyenne était inférieure de moitié aux 40 ans que l'on avait prévus. On comptait 434 centrales nucléaires commerciales en activité dans le monde, soit seulement neuf de plus que le nombre de centrales en activité en 1990.
Je peux vous fournir des exemplaires de cette étude. J'ai moi aussi un mémoire écrit à vous remettre et si vous souhaitez de la documentation supplémentaire sur un point quelconque, je serai heureuse de vous en faire parvenir.
L'autre question que M. Canuel a soulevée est celle de la réglementation internationale. Depuis quelques années, je suis de près les sommets du G-7. Ces deux dernières années, des déclarations sur la sûreté nucléaire ont été publiées à l'occasion des sommets du G-7. Je pense que c'est parce que la pollution que provoquerait un grave accident nucléaire transcende les frontières, comme on l'a vu dans le cas de Tchernobyl. C'est pourquoi cette question retient de plus en plus l'attention sur la scène internationale.
Je conviens qu'il faut examiner la loi actuelle en tenant compte de la réglementation internationale existante.
Le président: Merci.
Monsieur Boyd, je soupçonne que vous avez un commentaire à faire.
M. Boyd: Oui. Je vais aborder les observations de M. Canuel dans l'ordre inverse.
Sur la scène internationale, la Convention internationale sur la sûreté nucléaire entre en vigueur ce mois-ci. Le Canada a joué un rôle de chef de file pendant l'élaboration de cette convention internationale. Le Dr Bishop a été le premier signataire de la convention quand elle a été rédigée il y a environ un an et demi.
Je le répète, un nombre suffisant de pays l'ont maintenant ratifiée, de sorte qu'elle entrera en vigueur ce mois-ci. Cela créera un nouveau régime international pour la standardisation des mesures visant à assurer la sûreté des centrales nucléaires.
Au sujet des relations fédérales-provinciales, le projet de loi confie explicitement à la nouvelle commission le pouvoir de travailler en plus étroite collaboration avec les provinces. La Commission de contrôle de l'énergie atomique s'est efforcée de le faire au fil des ans, mais a dû se contenter de procéder de façon officieuse, ce qui ne l'a pas empêchée d'être relativement efficace.
Sur la question de savoir si l'énergie nucléaire est en croissance ou en déclin dans le monde, je n'ai pas de chiffres sous les yeux. Je crois que les chiffres de Mme Ostling sont quelque peu désuets, mais il y a assurément une forte croissance de l'énergie nucléaire, surtout en Asie et en Europe de l'Est. Comme on a pu l'observer, le secteur est stagnant en Amérique du Nord.
Le président: Monsieur Canuel, pour une question supplémentaire.
[Français]
M. Canuel: Les pays qui ne signent pas une convention ne sont pas régis par cette convention. S'il y avait une obligation commandée par l'ensemble des pays, à mon avis, ce serait beaucoup plus fort qu'une convention. Je ne dis pas que ce n'est pas un bon pas que de commencer par cela, mais un pays est libre d'adhérer ou non à une convention.
[Traduction]
M. Boyd: Malheureusement, nous abordons ici le domaine du droit international, ce qui n'est pas de ma compétence. Par ailleurs, nous savons qu'il n'existe aucun mécanisme pour assurer l'application des règles à l'échelle internationale. Le seul moyen de procéder est donc d'élaborer des conventions comme celles qui sont en voie d'élaboration. Je répète que le Canada a joué un rôle de chef de file à cet égard.
Le président: Madame Kock, avez-vous un commentaire à formuler?
Mme Kock: Seulement une brève observation. Je pense qu'il est important de ne pas perdre de vue, quand il est question d'entente et de convention internationales en matière de sûreté nucléaire, que beaucoup de ces initiatives émanent de l'Agence internationale de l'énergie atomique, qui est un organe des Nations unies. Nous croyons que son mandat pose un problème dans ce domaine parce qu'elle fait la promotion de l'utilisation de la technologie nucléaire à des fins pacifiques. Il est implicite que le rôle de l'AIEA est de protéger la population mondiale contre les accidents nucléaires et d'assurer la sécurité à l'échelle nationale et internationale, mais son rôle primordial est de promouvoir l'énergie nucléaire partout dans le monde. C'est l'objectif qu'elle doit s'efforcer d'atteindre. Nous sommes donc en présence d'un organe de l'ONU qui n'a pas le mandat dont la population du monde entier a besoin.
Le président: Merci beaucoup. Nous passons maintenant à M. Ringma.
M. Ringma (Nanaïmo - Cowichan): Merci, monsieur le président.
Premièrement, je veux aborder la question de l'expansion ou du déclin du secteur nucléaire, selon le cas. À titre de citoyen de la Colombie-Britannique, je fais remarquer que nous n'avons nullement besoin d'énergie nucléaire là-bas, parce que nous avons suffisamment d'hydroélectricité. Mais ce qui s'est passé en Colombie-Britannique et qui, je crois, est pertinent, c'est que la B.C. Hydro a pris du recul et a décidé qu'il n'était plus nécessaire de construire de nouveaux barrages, qu'il fallait plutôt économiser. L'entreprise a eu du succès à cet égard, ce qui a réduit le besoin de trouver de nouvelles sources de production d'électricité.
À mon avis, et je soupçonne que l'on observe un mouvement semblable en Ontario, c'est pourquoi il y a une baisse de la demande, du moins à l'échelle nationale, à la fois pour l'électricité hydroélectrique et pour les centrales nucléaires.
Mais quand je me tourne vers la scène internationale, je vois que la réalité est différente. Comme M. Boyd l'a dit, on observe une croissance en Asie et en Europe de l'Est. Je pense donc qu'il est important que le comité connaisse les faits. C'est pourquoi je serais heureux si Mme Ostling et vous, monsieur, pouviez nous transmettre tous les renseignements que vous possédez sur cette question. Je pense que cela nous serait utile.
Cela m'amène à mon autre sujet de prédilection, à savoir l'éducation du public. Je suis tout à fait d'accord pour dire que ce dossier, auquel je me suis intéressé toute ma vie, a toujours été entouré du plus grand secret, avec le résultat que le public n'est pas au courant de ce qui se passe. Je pense que notre pays et même le gouvernement devraient diffuser davantage d'information et encourager l'éducation du public en la matière.
Ce qui nous amène au projet de loi C-23 et aux dispositions qu'il devrait renfermer, non pas seulement pour l'octroi de licences et de permis et pour la tenue d'audiences publiques, mais aussi - j'ignore si c'est possible - pour confier à la nouvelle commission le mandat de contribuer à éclairer le public, en plus de tenir les audiences publiques qui pourraient s'avérer nécessaires sur tous les aspects du dossier, qu'il s'agisse de l'importation de déchets nucléaires ou de quoi que ce soit d'autre.
Je voudrais vraiment que l'on s'oriente collectivement dans cette voie. Je me demande si vous avez des observations à nous faire quant à la façon dont cela pourrait être facilité, surtout pour ce qui est des dispositions que le projet de loi C-23 devrait renfermer pour aider la nouvelle commission dans son travail.
M. Edwards: Je suis entièrement d'accord avec vous. Je crois qu'il est peu probable que cela se produise dans des conditions idéales si l'organisme relève du ministre des Ressources naturelles, parce qu'à mon avis, ce ministère se préoccupe essentiellement d'assurer l'essor du secteur minier et énergétique. Il assume des responsabilités dans le domaine des mines, de la construction de réacteurs nucléaires, etc., et je crois donc que la fonction d'éducation, dans la mesure où il devrait y en avoir une, devrait plutôt relever d'un autre ministère.
Je pense que l'éducation devrait être obligatoire et qu'elle ne devrait pas prendre la forme d'une promotion, mais plutôt d'une information générale. Ce qu'il faut faire, c'est de renseigner les gens sur la sécurité et les risques environnementaux, non pas simplement de manière à les rassurer, à les réconforter ou à les engourdir, mais plutôt pour leur faire comprendre la vraie nature des risques.
Nous savons qu'il y a des risques. Les gens savent que tout cela est risqué, mais ils ne savent pas pourquoi, parce qu'on ne le leur a jamais expliqué clairement. Quand ils s'adressent à un organisme comme la Société nucléaire canadienne ou la Commission de contrôle de l'énergie atomique, ils obtiennent rarement une véritable explication qui leur permet de dire «maintenant, je comprends pourquoi c'est dangereux». Non, on s'efforce plutôt de les rassurer. Ce n'est pas cela, l'éducation. Rassurer, ce n'est pas informer.
De plus, peu importe que l'énergie nucléaire aille dans un sens ou dans l'autre, qu'elle soit en croissance ou en déclin, nous avons besoin d'un organisme qui peut vraiment s'attaquer aux problèmes.
Au cours des 50 premières années de l'industrie nucléaire, ces problèmes tournaient surtout autour des permis et licences, du développement, des autorisations et du contrôle. Mais aujourd'hui, les problèmes se multiplient et beaucoup sont négligés, comme ces résidus miniers dont j'ai parlé tout à l'heure. C'est un problème dont personne ne veut assumer la responsabilité. L'Ontario se retrouve avec ce problème sur les bras. On nous a dit tout à l'heure que même dans le cas de résidus miniers dont quelqu'un est encore responsable, les gouvernements sont disposés à assumer, ou plutôt à faire assumer aux contribuables le fardeau de ces problèmes. Je crois qu'il nous faut un organisme qui soit capable de s'attaquer à ces problèmes de manière plus interventionniste, non pas en se contentant d'octroyer des permis à des installations et de réagir aux initiatives de l'industrie, mais plutôt en décelant les problèmes et en les définissant.
Par exemple, le projet de loi renferme des dispositions sur le déclassement. La commission a le pouvoir d'ordonner l'exécution d'arrangements financiers pour assurer le déclassement d'installations. Est-ce bien exact? Comment peut-elle le faire si elle ignore le coût du déclassement envisagé? Comment peut-elle savoir combien il en coûte avant d'en avoir fait?
Je le répète, quelques réacteurs pourraient être mis hors service. L'industrie n'est pas intéressée à le faire, parce que c'est une dépense que l'on préfère éviter. Mais dans l'intérêt du public, il faudrait déclasser ces réacteurs parce qu'il faut savoir combien cela va coûter. Si nous n'avons pas d'estimation réaliste des coûts, nous ne saurons pas où nous en sommes dans ce dossier.
Je crois donc qu'il faut un ministère distinct, doté d'un mandat propre qui ne consiste pas simplement à répondre aux demandes de l'industrie en matière de permis et de licences et à réglementer les émissions radioactives ici ou là, mais plutôt à faire de l'éducation, à faire participer le public et à prendre l'initiative à l'égard de certains problèmes qui touchent l'intérêt public, à les pointer du doigt et à les porter à l'attention du public.
Le président: Madame Kock.
Mme Kock: C'est un domaine très intéressant que l'on aborde en ce moment avec ce projet de loi. Cela me rappelle une expérience que j'ai vécue quand je travaillais auprès de collègues aux États-Unis.
Aux États-Unis, toute compagnie de service public qui exploite un réacteur est tenue de déposer de la documentation dans la bibliothèque publique de la localité où est située l'installation nucléaire. Je suis allée à la salle de lecture de la Nuclear Regulatory Commission, dans la bibliothèque publique de Monroe, au Michigan, à côté de la centrale nucléaire de Fairmeath. Il y avait là un terminal d'ordinateur permettant de communiquer directement avec la salle de documentation de Washington. Soit dit en passant, la commission dont j'ai parlé, la Nuclear Regulatory Commission, est l'homologue de la Commission de contrôle de l'énergie atomique aux États-Unis.
Il y a donc des façons très novatrices de permettre au grand public d'avoir accès aux documents concernant les installations qui se trouvent dans nos collectivités. Toutefois, à l'heure actuelle, je dois passer une commande auprès de la Commission de contrôle de l'énergie atomique qui me fait ensuite parvenir les documents demandés. Je n'ai plus de place. Je m'intéresse aux deux principales installations de notre région, Pickering et Darlington. Il est très difficile d'avoir accès à tous ces documents si l'on n'est pas disposé à les recevoir et à les entreposer chez soi.
J'espère que le comité tiendra compte de ma suggestion.
M. Ringma: Pourrais-je poursuivre dans la même veine?
Le président: M. Boyd veut d'abord faire un commentaire, après quoi je vous redonnerai la parole.
M. Boyd: Monsieur Ringma, notre société est tout à fait d'accord sur la nécessité de renseigner le public. En fait, l'une de nos activités consiste à se rendre dans les écoles et d'autres établissements pour y rencontrer les enseignants, les élèves, etc.
Pour ce qui est du projet de loi lui-même, le paragraphe 21(1) donne à la commission le pouvoir d'informer le public, etc. Nous sommes tout à fait en faveur de cela, mais je voudrais dire - et à ce sujet, je suppose que ma position est légèrement différente de celle de M. Edwards - qu'à notre avis, le rôle primordial de cette commission est de réglementer de manière efficace et crédible. Cela veut dire qu'elle doit être perçue comme tout à fait objective. Par conséquent, la documentation qu'elle publie à titre d'information doit être perçue comme entièrement objective. C'est un rôle difficile.
J'ignore s'il convient d'inscrire cela dans une loi, mais l'une de nos suggestions précises est justement d'inscrire le mot «objectivement» dans cette disposition, de manière qu'elle se lirait ainsi: «La commission peut...informer objectivement le public». Autrement, on croira qu'elle a un parti pris dans un sens ou dans l'autre et elle perdra donc une partie de sa crédibilité à titre de responsable de la réglementation.
Le président: Merci, monsieur Boyd.
Monsieur Ringma, vous pouvez poser une brève question supplémentaire.
M. Ringma: Je suis réconforté de voir que nous nous dirigeons collectivement dans la bonne voie, c'est-à-dire que nous cherchons peut-être un autre organisme ou un service idoine qui se chargerait de cette fonction.
Je voudrais vous faire part d'un incident précis et vous demander vos commentaires. Juste à côté de ma circonscription de Nanaïmo - Cowichan se trouve une installation qui s'appelle la zone d'essai et d'expérimentation maritimes des Forces canadiennes. On y trouve les deux aspects du problème. Le public ne sait pas vraiment ce qui s'y passe et le ministère de la Défense nationale affirme que c'est secret et refuse de lever le voile. D'autre part, il y a de la désinformation. On entend des histoires exagérées quant aux risques énormes de cette installation, qui ne sont pas entièrement fondées sur des faits.
Il y a donc un double problème: d'une part une organisation secrète qui divulgue les renseignements au compte-gouttes, et d'autre part des gens qui lancent des histoires sans fondement. C'est le public qui en est victime parce que les gens ne savent pas ce qui se passe et se demandent qui croire.
Je crois que sommes dans la bonne voie. Je crois aussi que tous s'entendent pour dire qu'il faut examiner soigneusement la question de savoir qui ou quel organisme devrait s'en occuper et comment s'assurer que l'organisme en question donne de l'information objective et perçue comme telle.
Le président: Monsieur Chapman ou madame Kock.
M. Chapman: Je vous renvoie plus précisément, monsieur, aux alinéas 9b) et 21(1)e). L'alinéa 9b) du projet de loi dit que la mission de la commission est notamment d'«informer le public sur les plans scientifique ou technique ou en ce qui concerne la réglementation». La version anglaise de cette disposition ne précise nullement que le public doit bénéficier de cette information. On ne précise pas quel doit être le destinataire de ces renseignements. Il faut donc y apporter un amendement.
Je vous renvoie ensuite à l'alinéa 21(1)e). On y décrit les pouvoirs de la commission en ce qui concerne l'information du public. Autrement dit, on permet seulement à la commission de le faire. Cet alinéa devrait spécifier qu'il est obligatoire pour la commission d'informer le public. Qu'y a-t-il donc à cacher?
M. Ringma: D'accord, merci beaucoup.
Le président: Madame Ostling.
Mme Ostling: J'ai une question concernant l'information qu'on m'a demandé de déposer au sujet du déclin de l'industrie nucléaire. Comment dois-je procéder? Dois-je seulement remettre les documents...
Le président: Il faut les remettre au greffier.
Mme Ostling: D'accord.
Je voudrais aussi faire une observation à ce sujet. L'une des raisons pour lesquelles on constate qu'il y a croissance de la technologie nucléaire dans les pays d'Asie et d'Europe de l'Est, c'est précisément parce que cette industrie est en déclin en Amérique du Nord. Pour compenser son déclin en Amérique du Nord, l'industrie intensifie ses efforts afin de vendre sa technologie dans d'autres pays. Il faut en tenir compte.
Le président: Bien, merci.
Vous pouvez intervenir brièvement, monsieur Boyd, parce que je dois accorder la parole à quelqu'un d'autre.
M. Boyd: Très rapidement, ce n'est pas parce que l'on fait des efforts pour vendre le nucléaire. Cela tient vraiment au fait que les économies de ces pays sont en croissance et qu'ils ont donc besoin d'énergie.
Pour revenir à votre question, monsieur Ringma, quelqu'un a fait allusion aux problèmes de communication avec le ministère de la Défense nationale. Si cela vous intéresse, vous voudrez peut-être vous attarder davantage à l'article 5 du projet de loi, qui prévoit certaines exemptions à l'égard du MDN.
Le président: Merci.
Monsieur Reed.
M. Reed (Halton - Peel): Merci, monsieur le président. Je crois que je m'intéresse à cette question depuis presque aussi longtemps que mon ami Gord Edwards.
Je dois dire, madame Kock, que la documentation sur les centrales de Pickering et de Darlington devrait être disponible à la bibliothèque de Queen's Park. C'est moi qui ai présenté au comité spécial la motion visant à faire déménager toute la documentation relative au nucléaire d'Ontario Hydro à la bibliothèque de Queen's Park, y compris les documents commerciaux confidentiels, que l'on est autorisé à lire, mais pas à photocopier, ou quelque chose du genre. J'espère donc que votre salle de jeu ou votre cuisine n'est pas trop encombrée.
Quelque chose me tracasse, monsieur Chapman. Vous avez dit que vous aviez demandé des renseignements et qu'on vous avait répondu qu'il était impossible de vous les communiquer.
M. Chapman: C'est bien cela, monsieur.
M. Reed: Je me demandais si vous auriez l'obligeance de faire savoir au comité, par l'intermédiaire du greffier, quels sont les renseignements précis que vous avez demandés et que l'on vous a refusés. Pourriez-vous le faire?
M. Chapman: Oui, nous vous ferons parvenir copie de notre lettre de demande et des réponses que nous avons reçues.
M. Reed: Très bien, merci.
M. Chapman: En fait, madame Kock a récemment tenté d'obtenir par écrit le texte de la réponse. Nous ne l'avions pas sous la main, autrement nous l'aurions apporté avec nous aujourd'hui. Il y avait une dizaine de documents, dont certains nous ont été refusés pour des raisons de sécurité nationale. Mais nous nous intéressions essentiellement à la décharge radioactive de Chalk River.
M. Reed: Eh bien, cela me préoccupe beaucoup que l'on refuse apparemment de divulguer ces renseignements.
M. Chapman: Nous vous ferons parvenir les documents.
M. Reed: Madame Ostling, vous avez abordé certains points et je ne suis pas sûr de vous avoir bien comprise. Vous avez dit qu'en 1995, le montant des subventions était de 13 milliards de dollars.
Mme Ostling: Oui, nous avons calculé qu'en dollars réels de 1995, compte tenu de l'inflation, les subventions à l'industrie nucléaire s'élevaient à 13 milliards de dollars au 31 mars 1995.
M. Reed: Cela s'échelonne donc sur quatre ans.
Mme Ostling: Oui.
M. Reed: Par ailleurs, j'ai cru vous entendre dire que la Commission de contrôle de l'énergie atomique intervient seulement en cas d'urgence. Avez-vous bien dit cela?
Mme Ostling: Je ne le crois pas.
M. Reed: D'accord. J'ai dû mal comprendre.
Vous avez fait une autre déclaration sur le coût en vies humaines dans le secteur minier et nucléaire. Je ne sais trop si vous faisiez allusion à la situation mondiale ou plus précisément à ce qui se passe au Canada.
Mme Ostling: Vous parlez du coût d'un accident nucléaire?
M. Reed: Non. Je ne me rappelle plus comment vous avez formulé cela. Cela avait à voir avec les répercussions des accidents dans le secteur minier, etc., sur le plan des vies humaines et de la santé. Je voudrais en savoir plus long là-dessus, parce qu'il me semble que si l'on tient compte des mines de charbon par exemple, sur le plan de leurs dangers pour la vie humaine, on constaterait qu'elles n'ont pas un bilan très reluisant.
Mme Ostling: Même l'incidence de la combustion des hydrocarbures est très préoccupante, mais ce à quoi je faisais allusion dans ma présentation, c'était le coût d'un accident éventuel dans une centrale nucléaire au Canada. Ce coût serait très élevé.
Comme vous le savez, nous avons déjà les exemples de Tchernobyl et de Three Mile Island. Nous savons que l'accident de Tchernobyl a coûté des milliards de dollars et que celui de Three Mile Island a également été très coûteux. Voilà ce à quoi je faisais allusion.
Les autres coûts associés que j'ai mentionnés sont bien sûr les subventions au nucléaire. Ces subventions ont été très élevées au Canada, comme on vient de le dire. Elles ont considérablement alourdi notre dette. Elles ont également pu contribuer à orienter nos choix énergétiques vers le nucléaire plutôt que vers l'efficacité énergétique, par exemple.
Comme M. Ringma l'a dit, en Colombie-Britannique, on a fait d'énormes progrès sur le plan des économies d'énergie. Un des meilleurs moyens pour le Canada de réduire sa dépendance envers l'énergie nucléaire est d'encourager les économies d'énergie.
De nombreuses études montrent que les économies d'énergie et le recours aux sources renouvelables seraient plus rentables pour le Canada. Cela créerait plus d'emplois, tout en étant plus sûr et moins nocif pour l'environnement. Il importe de ne pas faire une dichotomie du choix entre l'énergie nucléaire et les hydrocarbures. Il y a tellement d'options possibles. Le Canada pourrait vraiment devenir un chef de file dans les technologies de ce genre qui ont grandement besoin de développement, autant au Canada que dans le monde.
M. Edwards: Au sujet des mines d'uranium, monsieur Reed, cela me rappelle un document qui a été publié il y a des années par l'Association médicale de Colombie-Britannique. On y examine spécifiquement les risques que subissent les travailleurs des mines d'uranium et l'on y fait des critiques assez vives des calculs de ces risques selon la Commission de contrôle de l'énergie atomique, en s'appuyant sur la science médicale pour donner la preuve du contraire. Si vous le voulez, je peux vous en faire parvenir une copie.
M. Reed: Je vous en serais très reconnaissant.
M. Edwards: Je pense qu'on y examine la question des mines dont vous avez parlé.
M. Reed: C'est un débat qui se poursuit. Il y a fréquemment des accidents mortels dans les mines de charbon au Canada.
M. Edwards: Cela revient en quelque sorte à se demander quel est le meilleur moyen de réglementer une industrie comme le secteur nucléaire. J'estime qu'il faut être prêt à toute éventualité.
Je ne crois pas que le gouvernement canadien ait vraiment étudié sérieusement la possibilité de fermer graduellement cette industrie. La difficulté est que si l'on ne se prépare pas à une éventualité, il en résulte le chaos.
Je me rappelle que le General Accounting Office des États-Unis a publié il y a quelques années un rapport dans lequel on disait que la perspective de la fin de l'industrie nucléaire américaine pose de graves problèmes politiques et économiques. Longtemps après que les institutions pertinentes auront disparu, nous serons aux prises avec des problèmes d'élimination de déchets et de décontamination, pendant au moins un siècle après la fermeture du dernier réacteur.
Je crois donc que le gouvernement adopterait une attitude responsable en ne tentant pas de décider à l'avance qu'il s'orientera dans telle ou telle voie à l'avenir, mais plutôt en se préparant à toutes les éventualités. Je ne crois pas que le projet de loi à l'étude tienne vraiment compte de la possibilité que l'énergie nucléaire soit tout simplement vouée à l'échec, en raison des circonstances et sans que ce soit nécessairement la faute des intervenants de ce secteur.
Le président: Merci, monsieur Edwards.
M. Reed: J'ai un dernier commentaire à faire à M. Boyd.
Dans votre déclaration d'ouverture, monsieur Boyd, vous avez laissé entendre que l'énergie nucléaire était la seule solution de rechange au combustible fossile. Je vous invite, monsieur, à venir à Haliburton d'ici quelques mois pour visiter ma centrale électrique. Elle n'émet pas de CO2 dans l'air et ne produit aucun déchet radioactif. Ses incidences sur l'environnement sont très minimes. Voilà où se situe mon conflit d'intérêts à ce comité.
Le président: Madame Cowling.
M. Boyd: Je ne veux pas me lancer dans un débat.
Bon nombre d'entre nous appuient sans réserve les diverses sources d'énergie de remplacement, mais beaucoup d'études, que je crois valables, démontrent que pour fournir de grandes quantités d'énergie, elles ne sont pas pratiques ou ne sont pas susceptibles d'être pratiques dans un avenir rapproché. Mais c'est un long débat.
M. Reed a parlé tout à l'heure des problèmes de la planification des mesures d'urgence. Je voudrais seulement signaler au comité que la planification des mesures d'urgence à l'extérieur des centrales nucléaires est du ressort des provinces. Vous n'ignorez sans doute pas que nous vivons dans un cadre fédéral-provincial qui comporte des avantages et des inconvénients. C'est un problème qui se pose depuis des années.
Aux termes de la législation fédérale, la Commission de contrôle de l'énergie atomique exige des exploitants de centrales nucléaires qu'ils mettent en place des plans d'urgence efficaces pour leur installation, mais à l'extérieur de la centrale, cela relève de la province. Il y a beaucoup d'incertitude dans ce dossier depuis des décennies.
Le président: Merci, monsieur Reed.
Je note que nous recevrons demain comme témoin M. Jim Ellard du ministère du Solliciteur général. Il est coordonnateur des mesures d'urgence en Ontario et nous pourrons donc lui poser la question directement.
Madame Cowling.
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Merci, monsieur le président.
Nous avons entendu plusieurs témoins au comité et l'on ne cesse de nous répéter qu'il est nécessaire de remplacer la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique, vieille de 50 ans. Je respecte votre point de vue sur la protection de l'environnement et notre gouvernement tient également à assurer un environnement sûr et sain pour l'énergie nucléaire. C'est bien sûr pour cela que nous avons reçu et entendu divers intervenants.
Je voudrais passer en revue diverses dispositions du projet de loi, car je crois que cela nous aidera à nous assurer que le texte de loi proposé reflète bel et bien toutes les préoccupations des témoins que nous avons entendus.
L'une des questions qui ont été soulevées aujourd'hui est celle du risque nucléaire acceptable. Je me demande si, à votre avis, il est nécessaire de le préciser à l'article 2 du projet de loi. Je voudrais aussi que vous définissiez à notre intention ce qui constitue à votre avis un «risque acceptable».
Le président: Qui veut se lancer?
M. Edwards: Je peux m'y essayer. Le seuil d'acceptabilité varie selon les gens. Pour les représentants, les partisans ou les défenseurs de l'industrie nucléaire, est inacceptable tout ce qui met en péril leur industrie. La fermeture d'une centrale pourrait être inacceptable. Par contre, quelqu'un qui travaille dans un organisme qui se consacre à la défense de l'environnement ou à la santé ou à la sécurité publique pourrait avoir un point de vue différent sur ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas.
Je trouve que c'est assez ironique. Cette industrie se targue bien souvent de s'en tenir aux chiffres, aux faits, à la physique et à la science. Ses défenseurs accusent souvent leurs critiques d'être plutôt vagues, mais quand il s'agit de protection de l'environnement et de normes de rayonnement, eux-mêmes se réfugient très rapidement dans le flou.
Il y a là un danger. Je crois que ces mots sont dangereux. Je trouve que c'est particulièrement dangereux si le projet de loi est administré par un organisme qui est en conflit d'intérêts réel ou apparent. Je trouve que c'est un réel problème. Il faudrait que ce soit quantifié. Cette industrie se vante de tout quantifier; il faudrait revoir ce libellé.
Mme Cowling: Pourrais-je vous demander, dans ce cas, de préciser à l'intention du comité ce qui, à votre avis, constitue un risque nucléaire acceptable et un risque inacceptable? Si vous pouviez nous donner une définition, cela nous serait très utile.
M. Edwards: Si vous voulez que je définisse les termes acceptable et inacceptable, je crois que vous avez déjà eu réponse à votre question. Cela dépend du point de vue.
C'est pourquoi je pense que René Lévesque, l'ancien chef de la Commission de contrôle de l'énergie atomique, proposait d'élargir la commission pour y inclure davantage de représentants des gens qui prennent vraiment les risques, à savoir le public et les travailleurs, et non pas seulement des experts en la matière. Ce dont la commission a besoin, ce n'est pas d'une gamme plus étendue de spécialisations, mais plutôt de représentants des gens ordinaires à qui l'on demande de prendre ces risques. S'il faut rendre un jugement quant à savoir si un risque est acceptable ou inacceptable, je crois qu'il faut s'assurer que les personnes chargées de se prononcer ne sont pas en conflit d'intérêts, non seulement sur le plan pécuniaire, mais aussi sur le plan idéologique. Il y a en effet un certain élément idéologique dans cette discussion sur le nucléaire et nous serions bien imprudents de ne pas en tenir compte.
À moins de pouvoir remplacer le mot «inacceptable» par des critères quantitatifs, je ne serais à l'aise avec une loi renfermant ce mot que si jugement était rendu par des gens plus représentatifs, quelque chose comme un jury. Le système de jury est fondé sur l'idée que si l'on prend 12 braves gens ordinaires, ces derniers prendront une décision meilleure que ne pourraient le faire les experts.
Le président: Avant que nous poursuivions, Mme Kock veut intervenir.
Mme Kock: Je pense que Norman Rubin vous en parlera longuement jeudi. Il a participé à une étude sur les normes relatives à la présence de tritium dans l'eau potable.
Mais je m'engage à vous faire parvenir l'information que je possède sur cette question précise. En Ontario, nous avons abouti à une évaluation de ce que devrait être la norme relative au tritium en se fondant sur des critères de santé. Il y avait désaccord total entre le comité qui fixe cette norme et les représentants de l'industrie, lesquels affirmaient que si l'on fixait une certaine norme, il leur faudrait fermer Pickering, ce qui était inacceptable. C'est du chantage que l'on fait avec nos normes de santé. Je vais vous faire parvenir ces documents afin que vous puissiez en prendre connaissance.
M. Edwards: Je vais également vous faire parvenir de l'information là-dessus.
Le président: Monsieur Boyd, vouliez-vous intervenir?
M. Boyd: Si vous souhaitez obtenir des documents, je peux vous en faire parvenir une pile haute comme ça sur l'évaluation du risque. Je dirais qu'il y a un consensus très solide au sein de la communauté scientifique sur ce qui est considéré comme un risque minime. Il est question d'un risque de décès de dix à la puissance moins six ou moins sept par année. On peut dire que c'est un consensus international.
Je conviens que cela dépend vraiment de la personne qui fait l'évaluation. Le comité de l'ACEE qui se penche sur le concept de l'élimination des déchets au Canada a examiné la question en profondeur et a fait faire un certain nombre d'études à ce sujet. En fin de compte, la question est de savoir ce qui est acceptable, ce qui revient à dire: acceptable pour qui? Évidemment, dans notre société, il faut que ce soit acceptable pour la majorité des gens. Comment établir cela? Il y a divers moyens.
Ce n'est pas facile, mais je dirais, madame Cowling, qu'il y a des déterminants scientifiques précis permettant de cerner ce qui est considéré comme un risque minime. Je dirais que la terminologie du projet de loi est la plus rationnelle dans notre société; on s'en remet à un organisme compétent pour établir ce qui est acceptable, pas nécessairement de façon isolée, mais dans le cadre d'un mécanisme plus large.
Le président: Vous avez une question supplémentaire, madame Cowling?
Mme Cowling: Oui, et c'est au sujet du débat public dont il a été plusieurs fois question ce matin à propos de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires. Je m'interroge sur l'échéancier de ce débat et l'identité des participants.
M. Edwards: Vous voulez dire s'il y avait un débat sur cette question précise?
Mme Cowling: Oui.
M. Edwards: En fait, je suis président du Regroupement pour la surveillance des responsabilités nucléaires, qui a été constitué en 1975. Notre objectif était alors de susciter un débat public; nous étions d'avis que cela servirait les intérêts de tous. Les décideurs auraient l'occasion d'entendre des porte-parole des deux parties dans un cadre qui permettrait le contre-interrogatoire et l'examen des arguments de part et d'autre. C'est ce qui s'est passé à des degrés divers dans certaines provinces, par exemple à la Commission royale sur la planification de l'énergie électrique, dont j'ai parlé tout à l'heure. Je pense que cela a grandement contribué à légitimer le débat sur le nucléaire.
Les partisans du nucléaire ont souvent accusé les adversaires de l'énergie nucléaire d'être très mal informés, mais la commission royale a constaté qu'il y avait des arguments valables de part et d'autre. Le débat a fait ressortir des questions légitimes dont il fallait discuter. À titre de Canadien, je trouve honteux que notre pays n'ait jamais organisé au niveau fédéral le moindre débat public pour trancher la question de savoir si nous voulons vraiment poursuivre dans la voie du nucléaire. Je trouve stupéfiant, compte tenu de l'ampleur de l'établissement nucléaire et du montant des subventions que nous avons consacrées à ce secteur, que ce débat n'ait jamais eu lieu.
À mon avis, il est grand temps de s'y mettre. Nous célébrons le 50e anniversaire de cette loi que nous tentons maintenant de remplacer. Le moment est peut-être bien choisi de tenir ce débat public, de consigner publiquement au niveau fédéral les arguments pour et contre et de séparer l'ivraie du bon grain; ce débat pourrait servir de base et guider nos futures décisions à ce sujet.
Il y a une chose que je trouve vraiment affligeante. Je sais que bien des gens au ministère des Ressources naturelles, dont le ministre lui-même, ont été influencés par une étude qui a été commandée par l'industrie nucléaire et menée à bien par Ernst & Young. Je suis absolument sûr que si quelqu'un au gouvernement commandait un examen indépendant de cette étude, on constaterait qu'elle est peu solide, très mal faite et pleine de renseignements contradictoires. Pourquoi n'a-telle pas été soumise à un examen indépendant? Pourquoi n'y a-t-il eu aucune critique de la part du gouvernement à l'endroit de cette information, de ces conseils que leur prodiguait l'industrie nucléaire? Je pense que c'est directement lié à l'absence de toute forme de débat public.
Si nous avions eu un débat public ouvert et franc, permettant de mettre cartes sur table, ces hypothèses auraient fait l'objet de discussions, elles auraient été contestées, on aurait pesé le pour et le contre et je crois que le résultat serait bien différent aujourd'hui en ce sens que nous aurions un tableau beaucoup plus clair de la situation, au lieu de l'incertitude actuelle.
Le président: Madame Kock.
Mme Kock: J'ai une suggestion dans la même veine. À ma première lecture du projet de loi, j'ai été ravie de constater que l'on établissait deux mesures législatives distinctes. La première vise la réglementation et l'autre, le développement de l'industrie et son financement par le gouvernement. Dans notre mémoire, nous suggérons d'ajouter à la Loi sur l'énergie nucléaire une disposition visant à s'assurer qu'elle est réexaminée au moins une fois d'ici trois à cinq ans.
J'ajouterais qu'il faudrait peut-être prévoir une disposition exigeant un examen périodique. Cela exigerait de remettre en question toute la législation, de sa raison d'être et du besoin de légiférer en la matière. Cela ne nuirait pas nécessairement à l'établissement ni à la mise en oeuvre d'une solide mesure législative en matière de réglementation. Ce sont maintenant des choses séparées; c'est une excellente décision que nous appuyons sans réserve.
Le président: Merci. Monsieur Chatters.
M. Chatters (Athabasca): Merci, monsieur le président. J'ai une foule de questions que nous n'aurons évidemment pas le temps d'aborder toutes aujourd'hui. Bob a parlé du besoin de faire en sorte que le public comprenne ce dossier et de la nécessité d'un débat public et je suis entièrement d'accord avec lui.
L'autre point que je voulais aborder concerne le fait que la loi actuelle est vieille de 50 ans. Je voudrais savoir quelle est l'ampleur du passif financier que cette loi a laissé aux contribuables canadiens et à quel passif s'exposent les générations futures. Je trouve que c'est très important.
Le ministre est venu nous dire que les tarifs d'électricité reflètent le coût de l'élimination des déchets nucléaires et du déclassement. Je ne crois pas que ce soit possible parce que, comme vous l'avez dit, personne ne sait quels en sont les coûts. À votre avis, à combien s'élève le passif actuel du contribuable et avez-vous une estimation de ce que ce projet de loi nous réserve pour l'avenir?
M. Edwards: C'est une excellente question. Je crois que cela devrait être à l'ordre du jour, peu importe que ce soit directement lié à ce projet de loi. Le vérificateur général s'est penché sur la question, mais sans aller au fond des choses.
Dans ses derniers rapports, le vérificateur général signale que pour la seule Commission de contrôle de l'énergie atomique, sans même parler d'Ontario Hydro ni des compagnies minières d'Elliot Lake, on recense un passif non comptabilisé qui s'élève à des centaines de millions et peut-être à des milliards de dollars. Ce passif n'est pas consigné dans les livres de la commission, en dépit des critiques répétées du vérificateur général du Canada à cet égard.
Aucun fonds séparé n'est consacré à la rectification de ces problèmes. La commission dépense les crédits qui lui sont accordés comme bon lui semble. Il n'est pas précisé qu'une partie de l'argent doit être consacrée à des mesures d'assainissement pour s'attaquer à ces problèmes.
Quand on parle des compagnies de services publics, c'est une autre paire de manches. Ontario Hydro, la New Brunswick Power et bien sûr Hydro-Québec perçoivent un montant nominal - et vous avez raison de dire que l'on ne sait pas vraiment combien tout cela coûtera - qui est censé payer les frais de la décontamination ou de l'élimination des déchets, mais en réalité, il n'y a aucun fonds distinct. Cet argent n'existe pas vraiment. Il n'y a aucun compte dans lequel serait versé un certain montant devant servir à cette fin. Cela veut dire que quand vient le temps de se mettre au travail, pour opérer le déclassement des réacteurs ou pour ensevelir les déchets, il faut emprunter de l'argent. C'est un emprunt absolument non productif qu'il faudra contracter au moment des travaux. L'argent n'est pas mis de côté, il n'est pas versé dans un fonds qui rapporterait de l'intérêt.
Je suis convaincu que le gouvernement canadien doit s'engager à entreprendre une étude approfondie pour établir le montant du passif lié au déclassement des réacteurs et à l'élimination des déchets. Additionnons le tout et voyons ce que cela donne. Réfléchissons au montant que nous ajoutons peut-être à ce passif chaque fois que nous agrandissons nos installations.
Par exemple, l'EACL veut des crédits supplémentaires de 500 millions de dollars pour construire deux nouveaux réacteurs. En pareil cas, il ne faut pas tenir compte seulement des500 millions de dollars, mais aussi de ce qu'il en coûtera pour déclasser ces réacteurs à l'avenir et pour éliminer les déchets qu'ils produiront, etc.
Il est temps de soumettre cette industrie aux règles normales des affaires. Le vérificateur général du Canada a signalé à maintes reprises que la façon dont les livres sont tenus à jour est à son avis tout à fait inacceptable. Merci.
M. Chatters: À votre avis, est-ce le contribuable qui, en fin de compte, assume le coût éventuel de l'élimination des déchets et du déclassement?
M. Edwards: Absolument. Je pense que cela s'accumule et qu'il faudrait en rendre compte. Un jour ou l'autre, il faudra regarder les choses en face.
C'est la même chose que pour la dette. Quand on parle de la dette nationale, on peut remettre le problème à plus tard, mais seulement pendant un certain temps. Un jour ou l'autre, il faudra bien affronter la réalité et se dire, bon, qu'est-ce qu'on va faire?
M. Chatters: Je voudrais savoir ce que M. Boyd pense de cela.
M. Ken Smith (trésorier, Société nucléaire canadienne): Au sujet du déclassement des réacteurs et de l'élimination des déchets, je pense que si vous invitiez des représentants des services publics à venir vous expliquer ce qu'ils font dans ce domaine, vous seriez convaincus que ces entreprises ont bel et bien fait des provisions plus que suffisantes pour l'avenir, par exemple pour l'élimination du combustible usé. Récemment, nous avons vu un rapport de la New Brunswick Power indiquant que cette entreprise a mis de côté un montant trois fois supérieur à ce dont on aura vraiment besoin pour éliminer ce combustible. Je ne crois pas que notre société puisse répondre à des questions précises là-dessus; il faudrait s'adresser aux représentants des entreprises de services publics.
M. Chatters: Comment ces entreprises pourraient-elles dire qu'elles ont mis de côté un montant suffisant ou même excédentaire? Personne n'a calculé combien il en coûtera pour se débarrasser du combustible nucléaire.
M. Smith: Je crois que l'on a fait une estimation raisonnablement valable de ce qu'il en coûtera à l'avenir pour l'élimination. L'EACL a également fait une...
Une voix: [Inaudible - Éditeur]
M. Smith: Je crains de ne pouvoir vous donner un chiffre comme cela, spontanément.
Si vous vérifiez auprès de l'EACL et des entreprises de services publics, je pense que vous serez convaincus que l'on a fait une estimation assez valable. Vous avez raison de dire que dans toute estimation, il faut prévoir un montant raisonnable pour les imprévus, et je crois qu'on l'a fait.
Le président: Mme Kock a demandé la parole.
Mme Kock: Merci.
Je voudrais apporter des précisions sur les divers types de déchets dont il est question. Il importe de faire la distinction entre les déchets nucléaires fortement ou faiblement radioactifs provenant des entreprises de services publics et ce dont le gouvernement fédéral et les contribuables sont responsables. Dans ce dernier cas, il s'agit spécifiquement des installations financées par le Parlement, c'est-à-dire les installations de l'EACL à Chalk River et à Whiteshell.
Nous ne savons pas, et l'EACL n'est pas près de le révéler, combien coûtera la décontamination à Chalk River et à Whiteshell, mais nous connaissons le genre d'installations qui se trouvent à ces endroits. Notre groupe s'est efforcé de préciser exactement ce qui se trouve sur cette propriété, mais on nous a mis des bâtons dans les roues.
À mon avis, c'est un problème beaucoup plus important qu'on ne le croit. Par exemple, je viens de lire des documents qui indiquent que les gens qui travaillaient dans une installation de Chalk River où l'on traite du plutonium depuis des décennies ne sont plus employés par cette compagnie. Ils ignorent ce qui se trouve dans le bâtiment. C'est tellement contaminé qu'il faut revêtir une combinaison spéciale et photographier l'intérieur du bâtiment avec des appareils télécommandés avant de revenir dans une zone sûre pour décider de ce qu'il convient de retirer de là. La décontamination coûtera des milliards de dollars et personne n'est disposé à s'attaquer à ce dossier.
C'est tout à fait différent des déchets provenant des centrales électriques, dont les compagnies d'électricité prétendent assurer le financement. La facture est d'environ 13 milliards de dollars pour les déchets fortement radioactifs; c'est le chiffre dont parle M. Smith. Nous n'avons pas de chiffre pour le coût de l'assainissement de Chalk River/Whiteshell, c'est-à-dire le coût que le gouvernement fédéral doit assumer, puisqu'il finance ces installations aux termes de l'ancienne loi depuis 50 ans.
M. Chatters: Ce que je voudrais, tout comme dans le dossier des mines sur lequel votre comité s'est penché auparavant, c'est que le montant réel soit mis de côté et que l'argent soit disponible même quand la compagnie aura disparu depuis longtemps, afin que l'on ne se retrouve pas à assumer la paternité de ces problèmes dont vous avez parlé tout à l'heure et dont les contribuables canadiens doivent assumer le fardeau.
Mme Kock: Dans le cas présent, la compagnie en cause est une société d'État. C'est nous; c'est nous qui faisons cela.
M. Edwards: Je voudrais apporter une précision. Je suis bien sûr d'accord avec ce qu'a dit Irene pour ce qui est de séparer l'EACL et les entreprises de services publics. C'est d'ailleurs ce que je voulais faire moi aussi; peut-être n'ai-je pas bien réussi. Mais je voudrais dire qu'il y a aussi d'autres passifs qui relèvent du fédéral, pas seulement celui de l'EACL.
Nous avons des sables radioactifs dans cette province et nous avons aussi, au Québec, le réacteur Gentilly-1 qui n'est plus en service et qui est de propriété fédérale. Il appartient à l'EACL. Il faudra payer pour le déclasser. Il a été déclassé partiellement, mais pas totalement démantelé. Mon organisation insiste, depuis plus de dix ans, sur le fait que le réacteur Gentilly-1 serait un excellent banc d'essai qui permettrait au gouvernement fédéral de faire la démonstration de la technologie de déclassement.
Il y a de bonnes raisons pour militer en faveur de ce projet. Premièrement, le réacteur Gentilly-1 s'est révélé un fiasco. Il n'a jamais bien fonctionné; en fait, il n'a fonctionné que pendant 180 jours en tout. Le résultat, c'est qu'il est moins radioactif qu'un réacteur commercial normal et que ce serait donc moins risqué pour les travailleurs. Il serait possible de déclasser ce réacteur en prétendant qu'il est dix fois plus radioactif qu'il ne l'est en réalité, ce qui permettrait d'acquérir de l'expérience sur la façon de procéder et sur le coût de l'opération. Je trouve que ce serait responsable d'agir ainsi.
Soit dit en passant, il s'agit même d'une technologie exportable, puisque l'Agence internationale de l'énergie atomique a déclaré que d'ici la fin du siècle, c'est-à-dire presque demain, il y aura dans le monde une centaine de réacteurs nucléaires commerciaux qu'il faudra déclasser, chacun coûtant de 500 millions à un milliard de dollars. Ce sont donc aussi d'intéressantes possibilités de faire des affaires. En fait, les activités d'assainissement, de démolition, etc., présentent davantage de possibilités d'affaires que l'expansion proprement dite.
Il y a également d'autres retombées; pour bien faire ce travail, en effet, il faut une bonne capacité en robotique, et le Canada est déjà à l'avant-garde dans ce domaine.
Le président: Nous devrons lever la séance très bientôt, et je voudrais poser quelques questions rapides et très précises.
Monsieur Chapman, vous ai-je bien entendu dire qu'à votre avis, on peut mener une foule d'activités qui mettent en cause des substances nucléaires et qui ne sont pas touchées par ce projet de loi, qui ne sont donc pas réglementées et qui peuvent être dangereuses? Est-ce bien ce que vous avez dit?
M. Chapman: Oui. Je dis que le projet de loi ne renferme aucune disposition stipulant qu'une personne qui, par négligence, rejette une substance radioactive dans l'environnement naturel est coupable d'une infraction punissable d'une peine déterminée.
Le président: D'accord. Vous me l'apprenez, car je croyais que la situation était différente. Je vous signale pourtant que l'alinéa 26a) du projet de loi dit ceci:
- 26. Sous réserve des règlements, il est interdit, sauf en conformité avec une licence ou un
permis:
M. Chapman: C'est exact.
Le président: Il faut donc être détenteur d'une licence ou d'un permis. Maintenant, par décret du conseil assorti de règlements, quiconque ne possède pas de permis ou ne se conforme pas au règlement qui régit ce permis peut faire l'objet d'une accusation.
M. Chapman: Mais il n'y a pas d'infraction spécifique pour le rejet de radioactivité dans l'environnement. Une personne peut être accusée de ne pas avoir respecté les conditions de son permis.
Le président: Ou bien être accusée de possession.
M. Chapman: Oui.
Le président: Vous ne dites pas que les outils voulus n'existent pas, mais seulement qu'ils ne sont pas suffisants, à votre avis. C'est bien ce que vous dites?
M. Chapman: Non, je dis qu'il devrait y avoir une disposition interdisant spécifiquement le rejet par négligence de substances radioactives dans l'environnement, peu importe que la personne en cause possède ou non un permis. Il est interdit d'être en possession d'une telle substance sans permis. C'est une chose...
Supposons que la personne ait volé la substance, mais ne l'ait pas laissé s'échapper dans l'atmosphère? Sûrement, cette personne s'exposerait à une pénalité différente de celle qui s'appliquerait à une personne qui a volé la même substance et l'a ensuite rejetée dans l'environnement. Il faut qu'il y ait une disposition du projet de loi qui stipule que le fait de rejeter de la radioactivité dans l'environnement naturel est une infraction, pour n'importe qui.
Le président: C'est là que je ne comprends plus. Si vous êtes en possession de la substance, vous possédez un permis et les conditions de ce permis stipulent qu'il est interdit de la rejeter dans l'environnement. Par conséquent, si vous le faites, vous serez accusé, ou alors vous êtes illégalement en possession de la substance en question, auquel cas vous serez accusé de possession illégale.
M. Chapman: Mais je le répète, c'est une chose que d'accuser quelqu'un d'être en possession d'une substance illégale, et c'en est une autre que de l'accuser d'une infraction portant sur le rejet dans l'atmosphère de cette substance qui peut tuer des milliers de gens. Il devrait exister une infraction spécifique. Cela figure dans toutes les autres mesures législatives environnementales au Canada. Il importe peu que la personne en cause soit titulaire d'un permis.
Le président: D'accord. Je comprends ce que vous voulez dire.
J'ai une deuxième question. Je crois que M. Edwards et vous aussi, monsieur Chapman, avez parlé de la mine d'Elliot Lake. Vous ai-je bien entendu dire que toutes les mines d'Elliot Lake sont aujourd'hui orphelines, en ce sens que le gouvernement fédéral en assume entièrement la responsabilité?
M. Chapman: Non.
Le président: Bon, peut-être pourriez-vous préciser.
M. Chapman: Tout ce que je dis, c'est que les gouvernements du Canada et de l'Ontario ont conclu une entente prévoyant qu'à l'avenir, selon les circonstances, ces deux gouvernements acceptent d'assumer la responsabilité. Et je dis que ce n'est pas bon.
Le président: Bon, voyons si j'ai bien compris. Vous dites que c'est mauvais que nous ayons laissé les choses en arriver là, mais maintenant que nous en sommes là, vous conviendrez certainement qu'il faut bien faire quelque chose.
M. Chapman: Je reconnais que c'est un problème auquel il faut s'attaquer et, en un sens, je suis donc d'accord avec vous, monsieur. Nous sommes en présence de cet épouvantable problème dont on a dit que c'était un risque environnemental à perpétuité. Je conviens qu'il faut s'en occuper.
Le président: Je pense que vous avez mentionné l'une des compagnies en cause, nommément la Rio Algom. A-t-elle assumé une partie du coût, ou bien s'en est-elle simplement lavé les mains?
M. Chapman: Non, elle assume une partie des coûts. Je crois savoir que la compagnie Denison est dans une situation financière précaire et ne sait pas trop quelle part de ces coûts elle pourra assumer.
Je suppose que les compagnies qui veulent se lancer dans cette sphère d'activité devraient - et dans une certaine mesure, ce projet de loi le prévoit - mettre de l'argent de côté pour ces éventualités.
Le président: C'est ce que ce projet de loi stipule. Mais M. Edwards laisse entendre que même si c'est ce qu'on réclame, on ne peut pas le faire de façon précise, parce que le coût est inconnu.
M. Edwards: Oui. Encore une fois, le problème tient en partie au fait qu'on s'attaque aux dossiers au cas par cas, au moyen de permis, plutôt que de façon globale.
Premièrement, pour préciser la situation d'Elliot Lake et d'autres endroits semblables au Canada, notamment Bancroft, il y a des résidus d'uranium qui sont des déchets radioactifs et qui ont été abandonnés. Ils sont orphelins en ce sens que plus personne n'en assume la responsabilité. Certains déchets miniers d'Elliot Lake tombent dans cette catégorie; d'autres non.
Dans le cas de Rio Algom et Denison, ces compagnies assument la responsabilité à l'égard de leurs déchets miniers, mais en réalité, il leur est impossible d'assumer l'obligation financière et de payer à perpétuité pour ce problème.
Le gouvernement envisage actuellement la possibilité de les laisser inonder d'eau ces déchets miniers, après avoir installé des digues, etc., et ensuite de s'en laver les mains après une période de contrôle. Par la suite, c'est le contribuable canadien qui en assumerait la responsabilité à perpétuité.
Le problème, c'est que tout cela peut devenir très coûteux, parce que si, après quelques décennies, il y a effondrement massif de ces digues et barrages, on pourrait être en présence d'importants déversements de matériaux radioactifs. Cela pourrait devenir très coûteux. C'est le contribuable qui devra en assumer le fardeau.
Le problème, à mon avis, est que le ministère des Ressources naturelles n'a jamais jugé bon de taxer les nouvelles mines. Encore aujourd'hui, il y a de nouvelles mines qui entrent en activité au Canada. On n'essaie pas d'imposer la moindre taxe à ces nouvelles activités minières en vue de recouvrer une partie des coûts engagés dans le passé.
Par exemple, aux États-Unis, au moment de l'épouvantable accident de Three Mile Island, la compagnie Générale Électrique était absolument incapable de payer les 2 milliards de dollars et plus qu'ont coûté les travaux d'assainissement. On a donc élaboré un système en vertu duquel les compagnies de services publics qui exploitent des réacteurs nucléaires en Amérique du Nord paient chacune une partie du coût de cet assainissement.
Il n'y a eu aucune initiative de ce genre au Canada et c'est pourquoi j'estime qu'il faut que la Commission de sûreté nucléaire relève d'un ministre qui est animé du désir de mener à bien ces dossiers et d'aller au fond des choses. La question des déchets miniers en est un exemple.
Une dernière réflexion sur cette question, si vous n'y voyez pas d'objection. Si nous nous étions attaqués au problème de ces déchets miniers abandonnés avant aujourd'hui, peut-être que nos arrangements en matière de permis seraient différents. Peut-être que nous n'accorderions pas de permis miniers comme nous le faisons maintenant si nous nous étions attaqués à ce problème. En fait, nous aurions peut-être mis au point des techniques de broyage qui auraient permis de réduire considérablement l'ampleur du problème.
Le président: J'ai une dernière question, après quoi nous lèverons la séance.
Messieurs Edwards et Chapman, vous vous êtes dits tous les deux inquiets du fait que cela relève des ressources naturelles et non pas de l'environnement. Ai-je raison de croire qu'il y a actuellement dans la législation environnementale des dispositions qui font en sorte que si quelqu'un tente aujourd'hui d'ouvrir une nouvelle mine d'uranium ou propose d'inaugurer un tout nouveau réacteur au Canada, il y aurait automatiquement une évaluation en application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale?
M. Chapman: Je n'ai pas vu le texte de la mesure proposée relativement à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Le président: Je crois savoir qu'il y a un mécanisme qui déclenche automatiquement une évaluation environnementale.
M. Edwards: Il y a eu récemment en Saskatchewan des évaluations environnementales de nouvelles mines d'uranium qui ont abouti à des recommandations très négatives relativement à certains projets miniers, recommandations dont les gouvernements en cause n'ont tout simplement pas tenu compte, parce qu'évidemment ils n'ont aucune obligation de suivre les conseils de ces comités d'évaluation. Donc, même si l'on tient des audiences environnementales, cela n'a pas force de loi.
Je crois qu'aux termes du projet de loi, ce sera différent. Est-ce le cas, ou bien n'est-ce encore qu'un rôle purement consultatif?
Une voix: Ce sera encore consultatif.
M. Edwards: C'est donc encore consultatif. C'est encore au gré des autorités. Cela veut dire que le rôle du ministre de l'Environnement est extrêmement limité. Essentiellement, le ministre de l'Environnement a simplement pour fonction de tenir des audiences et d'essayer d'obtenir de bons conseils. Ce qui se passe par la suite relève entièrement d'autres organismes.
Le président: Mais en réalité, ce que vous recommandez - quant à savoir si ce serait suffisant, on peut en débattre - , c'est que le dossier environnemental relève du ministre de l'Environnement et non pas du ministre des Ressources naturelles, de manière que ce soit le ministre de l'Environnement qui intervienne dès que quelqu'un tente d'exploiter une nouvelle centrale nucléaire ou une mine nucléaire au Canada.
Quant à savoir si ce ministre se voit accorder des pouvoirs suffisants à cet égard, on peut en débattre une autre fois, mais ce que vous réclamez, à savoir retirer le dossier à Ressources naturelles Canada ou faire intervenir le ministre de l'Environnement, c'est précisément ce qui arrive déjà à cause de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Mais nous en discuterons une autre fois. Je dois lever la séance, car il est 13h20 et nous devons quitter la salle.
Je vois trois mains levées. Je donne la parole à M. Edwards et à M. Chapman pour une minute.
M. Edwards: Je ne suis pas d'accord avec votre interprétation. Le projet de loi crée une commission de sûreté nucléaire. Il ne lui donne pas le pouvoir de tenir des audiences environnementales, mais il lui donne par contre le pouvoir d'établir des règlements et des normes en matière d'environnement, ce qui empiète sur le mandat du ministre de l'Environnement.
De plus, en ne faisant pas relever la commission de sûreté du ministre de l'Environnement, on exclut la possibilité d'acquérir une véritable expertise en matière d'énergie nucléaire au ministère de l'Environnement. Donc, oui, le ministère peut tenir des audiences, mais il ne possède pas vraiment de noyau d'experts.
Le président: Ce n'est pas qu'il peut tenir des audiences, il doit le faire. Je tiens à ce que ce soit clair.
Monsieur Chapman.
M. Chapman: Je n'ai pas eu le temps d'aborder la question dans mon intervention et je voudrais donc le faire en 30 secondes.
Je crois que le projet de loi comporte une grave lacune pour ce qui est des pouvoirs qu'il confère aux inspecteurs. Je l'ai indiqué dans mon mémoire écrit. Le seul moyen pour un inspecteur de pénétrer dans une installation sans le consentement des propriétaires, à l'heure actuelle, c'est d'obtenir un mandat de perquisition. Or, il ne peut obtenir un tel mandat que s'il a des motifs raisonnables de croire qu'un crime a été commis. Il faut une disposition prévoyant ce qu'on appelle une ordonnance judiciaire d'inspection. C'est la clé pour l'exécution de toute législation environnementale.
Le président: L'avez-vous indiqué dans votre mémoire écrit, que nous allons étudier?
M. Chapman: Oui, je l'ai fait.
Le président: Je voudrais remercier tous les groupes qui sont présents aujourd'hui. Vous nous avez présenté un point de vue différent de ce que nous avions entendu de la part d'autres personnes. Comme vous avez pu le constater par les questions qu'ils ont posées, les membres du comité sont grandement préoccupés par divers sujets et ils tiennent beaucoup à se pencher là-dessus dans le cadre de leurs délibérations.
Je vous suis donc reconnaissant d'avoir pris le temps et de vous être donnés la peine de venir ici aujourd'hui pour nous donner ce témoignage, en plus de vos mémoires écrits que nous étudierons dans le cadre des travaux du comité sur le projet de loi C-23.
La séance est levée.