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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 9 octobre 1996

.1540

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Nous sommes ici... [Difficultés techniques]... vous tous ou l'un d'entre vous seulement. Nous allons faire le tour de la table. Qui veut commencer?

Monsieur Ellard.

M. Jim Ellard (directeur, Mesures d'urgence, ministère ontarien du Solliciteur général et des Services correctionnels): Monsieur le président, je voudrais tout d'abord vous dire que je suis ravi d'avoir été invité à témoigner aujourd'hui devant votre comité.

Je vais vous expliquer ce qui m'intéresse particulièrement dans les questions nucléaires. Je suis directeur des Mesures d'urgence de l'Ontario sous la direction du solliciteur général et du ministre des Services correctionnels de l'Ontario. Je suis chargé de suivre, coordonner et faciliter la formulation et la mise en application des plans d'urgence de la province et de veiller à ce que les plans ontariens soient coordonnés avec ceux des municipalités et du gouvernement fédéral.

Dans ce mandat, je suis en particulier chargé du plan d'urgence nucléaire provincial et des plans nucléaires des municipalités, lesquels visent à protéger la santé, la sécurité et le bien-être des résidents qui pourraient être touchés par un accident dans une installation nucléaire.

Je m'arrêterai sur mes responsabilités liées aux effets hors-site d'un accident nucléaire. Je ne suis pas responsable de la sécurité des employés de la centrale ni chargé de m'occuper des conséquences d'un accident sur le site du réacteur.

Il y a, en Ontario, 20 réacteurs nucléaires exploités par Ontario Hydro à trois endroits différents: Bruce County, Darlington et Pickering, dans la région de Durham. Il y a un quatrième site, près de Chalk River, où Énergie atomique a un réacteur de recherche. D'autre part, les plans ontariens comportent des dispositions d'urgence pour les réacteurs nucléaires de l'extérieur de la province. Il y en a un au Michigan, qui est le réacteur Fermi II et qui est suffisamment proche de la frontière pour exiger une planification d'urgence nucléaire pour les trois municipalités du comté d'Essex.

L'organisation des secours en cas d'urgence exige du temps et des ressources à tous les paliers de l'administration et dans les entreprises nucléaires qui exploitent les réacteurs. On ne dispose pas toujours de toute l'aide souhaitable, et c'est une des raisons pour lesquelles je suis probablement ici aujourd'hui.

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Le projet de loi C-23 que vous étudiez habilite la Commission canadienne de sûreté nucléaire, qui remplace la Commission de contrôle de l'énergie atomique, à adopter et à faire appliquer des normes nationales pour prévenir les risques déraisonnables pour l'environnement, la santé et la sécurité des individus. J'estime que le cadre législatif actuel, confirmé par les amendements proposés, autorise la CCEA, et son successeur, la CCSN, à exercer ses fonctions de réglementation de façon à favoriser la coordination des secours d'urgence nucléaire conformément à ses obligations statutaires.

Plus précisément, le projet de loi C-23, à l'article 3, précise clairement qu'il s'agit d'assurer la limitation, à un niveau acceptable, des risques liées au développement, à la production et à l'utilisation de l'énergie nucléaire tant pour la préservation de la santé et de la sécurité des personnes que pour la protection de l'environnement. À l'article 9, la mission de la commission précise cette responsabilité.

À l'article 24, la CCSN se voit interdire de délivrer, renouveler, modifier ou remplacer une licence ou un permis si elle n'est pas d'avis que l'auteur de la demande prendra, dans le cadre de ses activités, les mesures voulues pour préserver la santé et la sécurité des personnes et pour protéger l'environnement.

Bref, je crois que le projet de loi confie à la Commission canadienne de sûreté nucléaire une mission précise visant à arrêter et à faire respecter des normes nationales dans ce domaine.

Ma direction est avant tout chargée de la sécurité du public, et c'est le premier objectif du programme de secours d'urgence nucléaire que je dirige. Il ne fait aucun doute que des normes nationales minimums, fixées et mises en application par la CCSN, contribueraient à la sécurité du public dans les régions où se trouvent des réacteurs nucléaires.

D'autre part, une coordination efficace des secours d'urgence nucléaire permettra d'atténuer les effets néfastes d'un accident nucléaire et réduira donc la responsabilité aux termes de la Loi sur la responsabilité nucléaire. Toutefois, une loi en soi ne suffit pas à assurer la sécurité du public. Son interprétation et son application sont tout aussi importantes.

Le projet de loi C-23 donnera à la CCSN les pouvoirs nécessaires pour recouvrer ses frais d'exploitation. Elle pourra d'autre part, si elle le souhaite, faire payer aux exploitants de réacteurs nucléaires certains droits afin de procurer à l'Ontario les ressources nécessaires pour parvenir à atteindre les normes de sécurité publique nationales qui seront fixées.

Si l'on stipule dans une loi des normes nationales visant à assurer la sécurité du public en cas d'accident nucléaire, je crois qu'il nous faut également faire le pas suivant, c'est-à-dire veiller à ce que l'on ait les ressources voulues pour faire respecter la loi. La Commission de contrôle de l'énergie atomique a choisi de ne pas le faire, et je crois que si la CCSN ne s'inquiète pas de cette question des ressources financières les difficultés ne disparaîtront pas dans ce domaine.

Je vous remercie beaucoup de m'avoir entendu. Je serai heureux de répondre aux questions que vous voudrez me poser tout de suite ou plus tard. Au cas où je ne pourrais répondre moi-même aujourd'hui, je ferai tout mon possible pour vous envoyer les renseignements voulus au plus vite. C'est la raison pour laquelle j'ai ajouté mon nom, mon adresse et mon numéro de téléphone au bas de ma déclaration.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Ellard.

Monsieur Walter.

M. John Walter (sous-ministre adjoint, Division des normes techniques, ministère ontarien de la Consommation et des Relations commerciales): Merci beaucoup, monsieur le président. Comme M. Ellard, je suis très heureux d'avoir l'occasion de venir vous entretenir de ce sujet important.

La Division des normes techniques du ministère ontarien de la Consommation et des Relations commerciales est chargée de la réglementation de la sécurité publique dans un certain nombre de domaines, et en particulier dans celui des ascenseurs, des manèges et autres appareils de parcs d'attractions, de la sécurité des carburants, c'est-à-dire pétrole, gaz naturel et propane et, évidemment, ce qui nous occupe ici aujourd'hui, des chaudières et des appareils sous pression.

Afin d'expliquer nos rapports avec la Commission de contrôle de l'énergie atomique, je vous ferai remarquer que, conformément à la politique générale de cette commission, les licences délivrées aux termes des dispositions de la Loi actuelle sur le contrôle de l'énergie atomique exigent que le détenteur de la licence se conforme à toutes les lois d'application générale de la province dans laquelle se situe son installation. C'est la raison pour laquelle l'Ontario intervient. C'est en fait à l'invitation de la commission. Depuis longtemps, le personnel de la CCEA et celui du ministère de la Consommation et des Relations commerciales réglementent ensemble les éléments d'appareils sous pression déjà installés ou qui doivent être installés dans les installations nucléaires situées en Ontario.

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Cette longue collaboration entre les deux organismes a très bien servi la population et l'industrie en Ontario. Nous avons utilisé des codes et des normes publiés par l'Association canadienne de normalisation pour, notamment, la construction et l'inspection des chaudières et des appareils sous pression, les conditions générales pour les systèmes et éléments sous pression dans les usines nucléaires CANDU ainsi que l'inspection périodique des composantes de ces usines. Avec le projet de loi C-23, nous supposons que cette collaboration pourra se poursuivre.

Bien que le système actuel ait bien fonctionné et nous ait permis d'assurer un bon niveau de sécurité dans les centrales nucléaires, nous estimons que ce projet de loi précise mieux les questions de compétence. Il est évident qu'avec cette nouvelle loi tous les aspects de l'énergie nucléaire seront réglementés par les autorités fédérales. La commission fixera et fera appliquer des normes nationales et veillera à ce qu'elles soient conformes aux normes internationales. Ces éclaircissements donneront aux deux organisations - à la Commission canadienne de sûreté nucléaire et à notre ministère - la possibilité de revoir les choses et d'éviter les chevauchements et le double emploi afin d'essayer de réduire certaines activités de part et d'autre tout en maintenant un degré élevé de sécurité, de santé, de sûreté et de protection de l'environnement.

La modernisation de la réglementation de l'énergie nucléaire est attendue depuis longtemps, En particulier, nous pensons qu'il est bon de séparer les fonctions de réglementation de celles de recherche, de développement et de commercialisation de l'énergie nucléaire, car cela évite tout conflit d'intérêts réel, possible ou perçu. Ceux qui sont chargés de la réglementation de l'énergie nucléaire ne feront pas en même temps sa promotion. Nous sommes également favorables à ce que les pouvoirs disciplinaires des inspecteurs et les pénalités en cas d'infraction soient actualisés.

Du strict point de vue des affaires, nous voulons bien que la commission puisse exiger des garanties financières pour veiller à ce que les coûts associés à la fermeture d'une installation nucléaire soient assumés par le détenteur de permis, et non par les contribuables. Nous sommes également en faveur de l'intégration des lois provinciales à celles qui relèvent de la commission. En faisant des correspondances entre ces lois, la commission pourra déléguer des pouvoirs aux provinces dans les domaines que celles-ci sont plus aptes à réglementer.

Contrairement à d'autres témoins, particulièrement M. Ellard, nous ne sommes pas tellement préoccupés par ce que cela nous coûtera. Nous offrons un service de grande qualité, nous avons un bon sens des affaires, et les frais que nous exigeons sont suffisants pour financer nos services. Nos revenus nous permettent de conserver un nombre suffisant d'employés bien qualifiés, afin de maintenir la qualité de nos services.

En terminant, je dirai que, bien que le système et le partenariat actuels fonctionnent bien, nous estimons que le projet de loi C-23 nous permettra d'améliorer encore ce partenariat dans l'avenir. Merci.

Le président: Merci, monsieur Walter.

Docteur McQuigge.

Dr Murray McQuigge (médecin hygiénique, Services de santé de Bruce-Grey-Owen Sound): Je remercie le comité de me permettre de lui présenter mon exposé. J'espère que vous avez la documentation que j'ai préparée.

Il y a deux médecins hygiénistes de l'Ontario qui ont des centrales nucléaires dans leur district. Je suis celui des comtés de Grey et Bruce, où se trouve le complexe nucléaire de Bruce, et le Dr Bob Kyle est responsable de la région de Durham, où se trouvent les centrales de Pickering et Darlington.

En Ontario, les médecins hygiénistes ont la responsabilité de protéger la santé publique. Depuis quelques années, nous-mêmes et d'autres avons travaillé à mettre sur pied des ressources médicales dans nos secteurs respectifs pour gérer une situation où un petit accident nucléaire causerait des blessures ou des victimes contaminées.

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Nous nous sommes renseignés et avons essayé de renseigner notre personnel au sujet des réacteurs nucléaires et du risque qu'ils peuvent représenter pour le public. Nous nous sommes efforcés de comprendre le plan d'urgence nucléaire ontarien pour être en mesure d'assumer nos rôles de médecins hygiénistes dans le cadre de ce plan. Nous nous sommes renseignés pour pouvoir communiquer avec le public au sujet des risques de radiation, qu'il s'agisse d'émissions normales ou accidentelles, et nous avons créé des procédures d'information pour nous-mêmes et les responsables municipaux en cas de situation anormale dans les centrales nucléaires.

Quel est le rapport avec le projet de loi C-23? Il y en a en fait beaucoup. En août de l'an dernier, le Dr Kyle et moi-même avions déjà été impliqués dans quelques urgences nucléaires: à Pickering, en 1992 et en 1994, à Bruce, en mai et novembre 1995. Nous étions si préoccupés que nous avons demandé à rencontrer le Dr Agnes Bishop, chef de la Commission de contrôle de l'énergie atomique. Nous l'avons rencontrée ici, à Ottawa, en octobre dernier, et même si nous croyons tous les deux que ce fut une rencontre fructueuse, un an plus tard on voit peu de résultats.

Après cette réunion... Le Dr Kyle et moi-même étions préoccupés au sujet de l'industrie nucléaire et de la CCEA. Nous deux et notre personnel partageons les même préoccupations. Nous voyons des lacunes dans les procédures d'information et de notification lorsqu'une situation anormale survient aux centrales nucléaires. Nous l'avons vécu. Jusqu'ici, la Commission de contrôle de l'énergie atomique semble s'être préoccupée uniquement de ce qui se produisait à l'intérieur des clôtures des centrales nucléaires. Nous souhaitons une participation et un engagement de la CCEA dans le domaine de la sécurité publique, de l'éducation du public, de la planification d'urgence et des partenariats avec les provinces.

Il y a de grands écarts entre les niveaux de réglementation de la CCEA et les niveaux provinciaux: la CCEA n'a aucunement tenté de réduire ces écarts. Prenons l'exemple du tritium dans l'eau potable. Actuellement, les limites de la CCEA sont de 1 p. 100 des émissions dérivées, ce qui permettrait à la centrale Bruce A de rejeter 100 000 becquerels par litre aux points de rejet. Or, la norme ontarienne pour l'eau potable est de 7 000 becquerels par litre. On dépasse facilement cette norme à la prise d'eau de Port Elgin. Nous nous demandons pourquoi il n'y a pas un comité mixte qui examine ces niveaux pour au moins reconnaître l'existence du problème.

Nous sommes préoccupés par le fait que les inspecteurs de la CCEA doivent avoir une certaine expérience des centrales. Pour acquérir cette expérience, il leur faut nécessairement avoir été employés par une centrale nucléaire; ils peuvent donc avoir un préjugé favorable à l'industrie.

La Commission de contrôle de l'énergie atomique n'est pas d'une grande transparence pour sa clientèle à l'extérieur des centrales nucléaires. Les médecins hygiénistes de l'Ontario ont besoin des conseils fournis par un expert technique indépendant si une situation anormale se produit; ils doivent également obtenir des informations à jour, notamment sur les tendances dans l'industrie.

La formation pour ce qui est des situations d'urgence n'est pas suffisamment approfondie au Canada. Bob et moi-même avons dû nous rendre à Oak Ridges, au Tennessee, là où sont stockés les ogives et les missiles nucléaires, pour obtenir ce genre de formation. Il n'y en a pas au Canada.

Il n'y a pas non plus suffisamment de spécialistes en matière d'urgences. Ce que je veux dire, c'est que s'il y a une urgence et que j'ai besoin d'un bon conseiller technique pour prendre une décision en matière de sécurité publique, pour l'instant, j'ai une liste sur mon bureau de personnes que je peux appeler ailleurs au Canada. Je ne peux qu'espérer rejoindre l'une d'elles. Mais il n'y a pas de centre officiel, comme il pourrait y en avoir un à la CCEA, à mon avis, où je peux appeler pour obtenir des conseils techniques indépendants et fiables en cas d'urgence. Aux États-Unis, particulièrement au Tennessee, il y a le REAC/TS, qui donne de la formation et des conseils d'experts. On a donc cette capacité de coordination de la planification et des conseils.

Les centrales ontariennes de Pickering et de Bruce vieillissent. Si vous êtes comme moi un baby-boomer, vous savez que cela veut dire qu'on répare ponctuellement ici et là. Cela signifie aussi certainement qu'il y a un risque de multiplication des problèmes. Cela nous inquiète.

A la Commission de contrôle de l'énergie atomique, aucun mécanisme n'est prévu pour que les centrales nucléaires ontariennes apprennent les unes des autres, à partir de leurs expériences et de leurs problèmes. C'est une préoccupation que nous avons depuis de nombreuses années et qui ne fait qu'augmenter. Prenons l'exemple du manque de formation à la centrale de Bruce, après l'accident de 1994 à Pickering. En mai 1995, la centrale de Bruce a eu un accident de perte de réfrigérant, même si on a refusé de le décrire ainsi. Cet accident était très semblable à celui qui s'était produit à Pickering, à peine quelques mois plus tôt. La centrale de Bruce n'avait pas examiné la situation qui s'était produite à Pickering.

J'ai bien examiné ce qui s'est produit lorsqu'on a simulé l'accident sur les ordinateurs du centre de formation. A la fin, j'ai répété ce que l'on m'avait dit au sujet de l'accident de Pickering: si on avait suivi le manuel technique pour ce qui est du flux décisionnel pour ce genre d'accident... les choses ont en fait empiré. On m'a dit qu'on ne savait pas, parce qu'on n'avait pas encore examiné la situation. C'était un accident très semblable, avec des petits bruits de tuyaux en aval, comme à Pickering. Vous constaterez que des organismes extérieurs ont maintes fois répété cette critique au sujet d'Ontario Hydro: on n'y apprend pas à partir des problèmes des autres.

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J'ai en outre constaté un manque de communication entre les centrales A et B de Bruce. Elles sont juste en face l'une de l'autre, mais fonctionnent comme deux centrales indépendantes. Il n'y a pas une bonne communication entre les deux centrales. De même, il n'y a apparemment pas de mécanisme pour tirer des leçons de l'expérience d'autres centrales au Canada ou ailleurs dans le monde, pas plus que pour nous, médecins hygiénistes, la possibilité d'avoir accès à ce processus d'information.

Les interventions de la Commission de contrôle de l'énergie atomique ne semblent pas assez musclées. Les centrales nucléaires ontariennes font partie de l'INPO, un programme de surveillance par les pairs qui a été mis sur pied aux États-Unis après l'accident de Three Mile Island. Les centrales américaines estimaient que l'organisme fédéral ne réglementait pas suffisamment; elles ont décidé de prendre les choses en main et de se surveiller les unes les autres, en présentant des rapports.

Aux États-Unis, les centrales nucléaires sont vérifiées de manière indépendante, et des recommandations sont faites. Si les recommandations ne sont pas mises en oeuvre avant une certaine échéance, le gestionnaire responsable fait l'objet de mesures disciplinaires. On m'a dit qu'aux États-Unis, il pouvait être congédié s'il ne mettait pas en oeuvre les recommandations avant l'échéance fixée.

Ontario Hydro fait partie de ce groupe, mais la société a renoncé au principe du licenciement du gestionnaire fautif; lorsque la direction n'applique pas la recommandation, il n'en subit aucune conséquence. Dans son examen annuel de la sécurité nucléaire de 1995, elle avoue même qu'elle a adhéré à l'INPO et qu'elle se soumet à un examen des pairs, mais qu'apparemment, les effets ne sont pas les mêmes qu'aux États-Unis. Cette absence d'effets ne devrait pas surprendre, puisque personne n'est tenu responsable de ses actions. Tout cela est très préoccupant.

Dans un récent article d'Ontario Hydro, la société se déclarait elle-même très préoccupée de la mauvaise gestion des centrales nucléaires et de l'absence d'engagement sur les questions de sécurité. L'article fourmille d'exemples inquiétants, et il provient d'Ontario Hydro. La société s'inquiète de sa propre industrie nucléaire, et nous avons donc doublement raison de nous en inquiéter. Dans le document que voici, il est question de la mesure législative dont le comité est saisi. C'est à la rubrique «Initiatives réglementaires», à la page 27. On y lit ceci:

Qu'est-ce que cela veut dire? Que de l'avis même d'Ontario Hydro, les modifications de la réglementation seront sans conséquence pour nous.

Nous sommes favorables - et je pense pouvoir m'exprimer au nom du Dr Bob Kyle - à la modification de la loi. Le changement de nom, qui met l'accent sur la sûreté, est très opportun. Les arguments que j'ai essayé de faire valoir montrent bien, je crois, qu'il est indispensable de lever le secret et de renforcer la sûreté dans l'industrie nucléaire.

Malheureusement, à la page 5 du projet de loi, sous le titre «Mission», où l'on trouve le nouveau mandat de la Commission de contrôle de l'énergie atomique, on ne trouve aucune référence aux responsabilités en matière d'éducation du public, de sûreté du public, de planification d'urgence ou de coopération avec les provinces.

À la page 13 - cela ne relève pas de ma compétence, mais je n'ai pu m'empêcher de le remarquer - on trouve énoncé le remboursement des droits. Cette disposition est reprise dans le document, mais on ne précise pas les circonstances dans lesquelles la commission peut appliquer ce principe. À la place d'Ontario Hydro, après avoir lu ce projet de loi, et même si je ne suis pas totalement certain de la signification de ce message, je me dirais que si l'on m'impose une amende je pourrais fort probablement en obtenir le remboursement, ou du moins j'estimerais que ces droits sont plus ou moins négociables. Je ne sais pas si c'est simplement une question de jargon juridique qu'on a employé dans le projet de loi pour indiquer que dans certaines circonstances l'amende ou les droits peuvent être remboursés, mais je pense qu'il serait préférable, dans l'intérêt de tous, d'énoncer explicitement les circonstances en question.

À part le changement de nom et la possibilité de tenir des enquêtes publiques, où trouve-t-on l'indication d'un plus grand souci de sûreté ou d'un renforcement d'un engagement envers le public? Je m'attendais à trouver dans le projet de loi C-23 un nouveau mandat pour la Commission de contrôle de l'énergie atomique qui lui imposerait d'aborder dans un esprit de coopération les questions concernant la sûreté du public dans l'industrie nucléaire.

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Or, c'est un peu comme si on disait: «Faites-nous confiance; nous allons faire les choses comme il faut, même s'il n'y a rien à ce sujet dans la loi.» C'est peut-être ce qu'ils vont faire, mais cela ne figure pas dans le projet de loi.

Merci beaucoup.

Le président: Merci.

Nous allons passer aux questions.

Monsieur Deshaies.

[Français]

M. Deshaies (Abitibi): Je suis très heureux de la présentation faite par les témoins d'aujourd'hui. Dans les autres présentations, à l'exception de celle de mardi, on nous disait que tout allait bien, qu'il s'agissait d'un nouveau projet de loi qui allait réformer une loi vieille de 50 ans et que cela donnait aux Canadiens une outil qui leur permettrait de dormir en toute confiance.

En général, les gens ne dorment pas bien quand ils pensent à l'énergie nucléaire. Ils sont anxieux et stressés à l'idée d'avoir une usine nucléaire près de chez eux ou à une distance de 50 ou60 milles.

On pourrait commencer par M. McQuigge. Devrait-il y avoir plus de transparence au conseil d'administration de façon à ce qu'on puisse poser des questions plus pointues?

Vous avez dit qu'il n'y avait pas de mandat pour l'éducation du public et qu'il y avait des points d'interrogation sur le remboursement des frais. Ne serait-il pas important de permettre au public de poser des questions plus pointues au conseil d'administration?

[Traduction]

Dr McQuigge: Voilà un bon argument. Je ne prétends pas que l'industrie nucléaire est au bord de l'apocalypse; je dis simplement qu'il s'est passé suffisamment de choses pour qu'on ne puisse pas dire qu'il ne s'en passera jamais plus. C'est ce qu'on nous disait il y a sept ans, mais on ne peut plus le dire aujourd'hui, car nous avons eu deux accidents qui, selon toutes les normes dans le monde, doivent être considérés comme majeurs.

Lorsque je dis que la Commission de contrôle de l'énergie atomique manque de transparence, c'est de l'organisme que je parle. Je travaille dans le domaine du nucléaire depuis sept ans, mais je ne sais toujours pas exactement ce que la Commission de contrôle de l'énergie atomique peut faire pour moi.

Il faudrait un mécanisme permettant de lui poser directement des questions, et grâce auquel elle pourrait nous indiquer qui est en mesure d'y répondre. La Commission de contrôle de l'énergie atomique a d'excellents experts, mais j'aimerais bien les connaître.

[Français]

M. Deshaies: Je suis persuadé, moi aussi, qu'il y a du très bon monde à la Commission canadienne de sûreté nucléaire. J'avais suggéré aux gens de la Commission de désigner un membre du conseil d'administration qui pourrait représenter directement le public et un autre qui représenterait l'industrie.

[Traduction]

Dr McQuigge: Il ne serait certainement pas inutile que le public soit représenté au sein de la commission. La nécessité d'acquérir un grand nombre de connaissances en peu de temps peut toujours poser un problème, mais je pense que ce n'est pas une mauvaise idée.

[Français]

M. Deshaies: On a aussi dit qu'on scinderait l'ancienne commission en deux parties: l'une qui s'occuperait des normes et de la sûreté et l'autre qui ferait la promotion de l'énergie nucléaire.

[Traduction]

Dr McQuigge: Je ne peux pas vous donner la bonne réponse, et ce n'est pas à moi de le faire. Mais je pense qu'il doit y avoir une délimitation précise entre ceux qui vendent l'industrie nucléaire et ceux qui la réglementent. C'est le moins qu'on puisse exiger pour qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts et que chacun puisse faire correctement son travail. J'espère avoir bien répondu.

Le président: Merci.

Monsieur Ringma.

.1610

M. Ringma (Nanaïmo - Cowichan): Merci pour cet exposé; merci, docteur McQuigge, pour votre étude détaillée des insuffisances du système actuel. Tout cela nous sera très utile pour étudier le projet de loi C-23.

Comme pour mon collègue du Bloc, il y a là plusieurs questions qui me préoccupent. C'est le cas de l'éducation du public. Le secret qui a toujours entouré l'énergie nucléaire depuis que je la connais a empêché que de bonnes relations s'établissent avec le public, et je pense que la loi devrait y remédier.

Je voudrais vous poser une question. Pensez-vous qu'on puisse s'en remettre au projet de loi C-23 pour résoudre ce problème, pour l'intégrer dans le mandat de la nouvelle commission, ou faudrait-il qu'un autre organisme s'occupe d'éduquer le public de façon qu'il puisse faire face à ses préoccupations?

Je pourrais vous citer de nombreux exemples. J'ai entendu les préoccupations de M. Ellard et les vôtres, monsieur, et je pense en particulier au projet d'importation de tiges de plutonium qui seraient transformées en combustible. Ce n'est peut-être pas une mauvaise proposition, mais, pour le public, c'est très dangereux, puisqu'on parle ici d'une qualité de plutonium susceptible de servir à la production d'armes. On voit donc tout de suite le risque de danger ou d'explosion. Ce n'est peut-être pas du tout conforme à la réalité. Je pense qu'il faudrait agir sérieusement pour permettre au public de s'informer.

Tout d'abord, je voudrais savoir si cet effort d'éducation peut être entrepris dans le cadre du projet de loi C-23; je pense qu'il peut l'être partiellement, du moins pour ce qui est des lacunes actuelles. Ensuite, je voudrais savoir si d'autres organismes pourraient intervenir. Je vous cède maintenant la parole.

Dr McQuigge: Le paradoxe, c'est que dans notre société nous en savons beaucoup plus sur les radiations que sur un grand nombre de produits chimiques. Nous pouvons mesurer les radiations avec précision. Nous savons quelles mesures il faut prendre pour s'en protéger. Nous connaissons les situations où elles peuvent poser un problème. Le paradoxe, c'est que nous avons des connaissances assez complexes sur les radiations, mais, malheureusement, nous sommes incapables d'en informer le public.

Le Dr Kyle et moi-même avons l'impression d'être les dindons de la farce. Nous nous plaignons de ce problème depuis des années et nous nous trouvons maintenant dans l'obligation d'éduquer le public; nous essayons de lutter contre les idées préconçues qui font que dès qu'on parle de radiation les gens se figurent qu'on est au bord de la catastrophe alors qu'en fait, comme je l'ai dit, nous connaissons très bien le phénomène.

En ce qui concerne la Commission de contrôle de l'énergie atomique et sa nouvelle structure ou son nouveau statut, je pense qu'on ne s'est pas vraiment efforcé de l'amener à mieux éduquer le public. La commission se contente de publier quelques brochures.

Le député a parlé des gens qui habitent à proximité des centrales nucléaires et qui craignent... Nous constatons tous les deux que ces inquiétudes sont de plus en plus fréquentes et, comme nous sommes responsables de la santé du public, nous sommes amenés, malgré nous, à parler de sûreté pour les gens qui vivent à proximité des centrales.

Dans ma région, le phénomène ne fait que commencer, mais, à Durham, il est très fort depuis déjà un certain temps. Nous avons l'obligation d'expliquer au public ce qui se passe autour des centrales nucléaires, de lui parler des risques auxquels il est exposé, de lui dire ce qu'il peut faire pour se protéger et de mesurer les possibilités qu'un problème apparaisse.

M. Ringma: On parle également ici de la séparation des responsabilités entre ceux qui assurent la promotion du nucléaire et ceux qui le réglementent. Aujourd'hui, nous avons parlé de la loi et des organismes en cause, mais d'autres témoins ont dit au comité qu'il faudrait peut-être diviser cette responsabilité entre les ministres concernés.

.1615

Évidemment, le ministre des Ressources naturelles est chargé, de par son mandat, de la promotion et de l'utilisation de l'uranium et de l'énergie nucléaire, mais la responsabilité de la promotion ne devrait-elle pas être séparée de la responsabilité de la réglementation?

Pensez-vous qu'il soit souhaitable de séparer les responsabilités, ou est-ce que cette question sort du domaine qui vous intéresse?

C'est une question très tendancieuse.

M. Ellard: Tout à fait.

Vous savez certainement qu'Ontario Hydro est une société d'État qui jouit d'une autonomie limitée par rapport au ministère conjoint de l'Énergie et de l'Environnement. On a ici une situation dans laquelle le même ministre est responsable de la production, grâce au nucléaire, de 60 p. 100 de l'électricité ontarienne, alors qu'il est en même temps responsable de la protection de l'environnement. Le conflit d'intérêts est manifeste.

Mon ministre, le solliciteur général, se préoccupe de la sécurité du public. Nous avons évidemment un point de vue différent de celui du ministre de l'Environnement et de l'Énergie; parfois nous sommes d'accord, parfois nous ne le sommes pas.

De mon point de vue, il y aurait intérêt à séparer les responsabilités de la sûreté du public et de la production d'électricité dans un tel contexte.

Pour en revenir à votre question précédente concernant l'éducation du public, je considère, avec le Dr McQuigge, que le public se fait une idée très déformée des risques d'accidents dans les centrales nucléaires. Je ne suis pas ici pour vous convaincre que le nucléaire est sans risques, car tel n'est pas le cas, et les accidents mentionnés par le Dr McQuigge se sont effectivement produits. Mais, comme je l'ai dit, le public se fait une fausse idée des conséquences qu'il aurait à subir d'un éventuel accident.

Je sais qu'Ontario Hydro s'efforce, à l'aide de ressources importantes, d'informer le public du mode de fonctionnement des centrales nucléaires et des risques qui en émanent. Mais je ne sais pas si son action est bien efficace.

Mon ministère a lui aussi entrepris d'apprendre au public comment réagir aux risques, et c'est certainement un sujet auquel on pourrait consacrer beaucoup plus de temps, d'attention et de ressources, car le public n'est pas suffisamment sensibilisé. Il est très inquiet - et, à mon sens, c'est une vaine inquiétude - des pires effets présumés de l'industrie nucléaire.

De toute évidence, l'industrie nucléaire a causé un tort considérable en répétant constamment qu'elle ne comportait aucun risque, alors qu'elle en comporte, comme l'ont bien montré les événements des dernières années.

Je pense donc qu'il y aurait lieu de consacrer des ressources supplémentaires à l'information du public.

M. Ringma: J'aimerais discuter avec vous d'une idée qui a commencé à émerger dans mon esprit depuis que j'ai entendu non seulement votre témoignage, mais aussi ceux des jours précédents. Plutôt que de prendre une approche défensive et de dire que les règles ne valent rien, que tout est secret et que tout le monde a une couverture - c'est-à-dire l'approche de la CIA - , on pourrait dire au contraire qu'on en sait suffisamment sur toute la question des radiations nucléaires, comme vous le dites vous-même, docteur McQuigge. Nous disposons d'une expertise au Canada dans ce domaine parce qu'il y a plus de 50 ans que nous manipulons ces matières. Il faudrait peut-être renverser la vapeur ici et changer de méthode, non seulement éduquer les gens, mais aussi exporter notre technologie de sécurité, nos contrôles, nos règlements et tout le reste. Il existe un besoin en ce sens dans le monde, et je pense que nous pourrions faire beaucoup de bien à notre pays et à notre industrie en prenant cette approche.

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Dites-moi ce que vous en pensez en deux mots.

M. Walter: Je suis d'accord. Je pense que nous avons d'excellents états de service au niveau de la sécurité. Je pense que la coopération entre les provinces et la commission ne peut être qu'accrue si l'on veut exporter ce produit, et ce, même si notre province vend des réacteurs nucléaires à l'extérieur du Canada. Étant donné que la division que je dirige est accréditée à l'échelle internationale, nous sommes en mesure d'aider l'industrie à vendre ce produit dans d'autres pays.

Trois membres de mon personnel reviennent justement du Japon, où nous accréditons des inspecteurs des fabricants qui vendent des centrales nucléaires en Chine. Mais nous n'avons pas bien fait ce genre de choses jusqu'à présent à cause du manque de ressources des gouvernements. On n'y voit pas toujours un bon usage des deniers publics. Avec ce qui vient d'être dit sur la sensibilisation du public, j'espère que la commission aura les fonds suffisants pour bien faire son travail.

Dr McQuigge: Corrigez-moi si j'ai tort, mais si je vous comprends bien, vous dites que nous avons le savoir technique qu'il faut.

Personne ne va dire, en lisant le rapport d'Ontario Hydro de 1995, que nous allons nous mettre à exporter des techniques de sécurité; ce n'est pas le cas. Il y a un ou deux ans que nous cherchons aux États-Unis des gens qui nous aideront à corriger les problèmes de notre industrie, et c'est ce que nous disons ici. Personne dans l'industrie ne peut me contredire. C'est ce que nous faisons.

Il se peut bien qu'il existe un potentiel en ce sens, mais nous avons encore beaucoup à faire.

Le président: Merci, docteur.

Madame Cowling.

Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Merci, monsieur le président.

Ma question s'adresse au Dr McQuigge et porte sur l'énergie nucléaire et ses effets sur la santé au niveau de la radiation, dans tous ses aspects - par exemple, les fours à micro-ondes, nos montres, ce genre de choses. Nous pouvons donner ici un emploi très positif à l'énergie nucléaire.

Ma question est celle-ci: que doit faire notre comité pour mieux faire connaître les emplois de l'énergie nucléaire? Il y a beaucoup de bonnes choses à dire ici.

Dr McQuigge: Il y avait beaucoup de bonnes choses à dire. Ces dernières années, c'était moins le cas. Ceux qui sont mêlés de près à la protection civile ou qui ont été témoins des accidents dans les centrales n'ont rien de bon à dire pour le moment.

Mais je suis d'accord avec vous pour dire que nous sommes des chefs de file dans ce domaine. Nous avons fait une bonne chose lorsque nous avons réussi à faire sortir en douce 400 kilos d'eau lourde de Norvège au cours de la dernière guerre pour donner naissance à notre industrie.

Cependant, nous disons que nous sommes préoccupés aujourd'hui en Ontario, et c'est aussi le cas d'Ontario Hydro. J'aimerais que ce projet de loi fasse mention de la sensibilisation du public. J'aimerais que le projet de loi fasse mention d'un mécanisme qui permettrait à la Commission de contrôle de l'énergie atomique et aux provinces de collaborer au niveau de l'industrie nucléaire.

Mme Cowling: Monsieur le président, je me demande si le Dr McQuigge ne pourrait pas signaler au comité quels articles du projet de loi pourraient être amendés afin que nous puissions en discuter en comité.

Dr McQuigge: Oui, je peux vous le dire tout de suite. À la page 5, sous la rubrique «Mission» de la commission, on pourrait faire les mentions que j'ai dites, parce que je crois sincèrement que cela répond au mandat de la commission de plusieurs façons. À mon avis, c'est la partie la plus importante.

Je ne pense pas que la loi peut obliger les gens à faire de grandes choses, mais je pense qu'elle peut les y encourager et leur montrer la voie.

.1625

Mme Cowling: Merci.

Le président: J'ai quelques questions à vous poser.

Désolé, monsieur Bélair, je ne savais pas que vous vouliez poser une question. Allez-y.

M. Bélair (Cochrane - Supérieur): Je ne savais pas que vous étiez un dictateur.

Le président: On m'a dit bien pire.

M. Bélair: Me donnez-vous la parole, monsieur le président?

Le président: Absolument.

M. Bélair: Ce qui me surprend un peu dans les exposés du Dr McQuigge et de M. Ellard, c'est le fait qu'ils peuvent se résumer à une seule expression, et cette expression, c'est l'application de la loi. L'ancienne loi prévoyait des mesures d'application, et vous dites tous deux que la loi n'est pas respectée.

Vous dites tous deux, vous et M. Ellard, et je vous cite, que la CCEA a décidé de ne pas respecter la loi. Il y a quelque chose qui ne va pas ici.

M. Walter s'interroge sur la compétence des inspecteurs. Je n'en sais rien.

Vous avez rencontré Mme Bishop et vous étiez satisfaits de la rencontre, mais rien ne s'est fait par la suite au niveau de la transparence, de la mise en oeuvre et de l'application de la loi.

Vous semblez dire la même chose tous les deux. Est-ce grave au point que le gouvernement fédéral, ou le gouvernement provincial d'ailleurs, ne fait même pas respecter la loi qui existe déjà?

Dr McQuigge: Je pense qu'il y aura toujours des difficultés. Ontario Hydro a eu beaucoup de mal à l'admettre par le passé parce qu'elle craint de perdre la confiance du public. Nous commettons tous des erreurs et nous avons tous nos difficultés. Ce qu'il faut faire, c'est déceler les risques au plus tôt, et, s'il y en a, les éliminer.

Pickering est menacée à l'heure actuelle. On a dit essentiellement à ses responsables qu'on fermerait la centrale si elle ne respectait pas la loi. Je pense que la Commission de contrôle de l'énergie atomique a montré plus d'initiative ici, mais c'est aussi le cas d'Ontario Hydro, disons-le franchement.

Il y a lieu de croire que c'est une industrie qui n'a pas été beaucoup dérangée, pour toutes les raisons que vous soupçonnez. On comprend donc aisément, comme je l'ai dit, pourquoi la CCEA doit recruter les plus compétents, et ce n'est que dans l'industrie qu'on va trouver des gens très compétents.

Dans une large mesure, l'industrie se réglemente elle-même. La CCEA compte sur Ontario Hydro pour lui signaler ses problèmes ou lui adresser des rapports. Ensuite, la CCEA doit faire enquête et décider si elle doit agir ou non.

Pour ce qui est de l'application de la loi, ce que nous constatons et ce qui nous préoccupe en notre qualité de médecins hygiénistes, c'est que nous avons frôlé la catastrophe à quelques reprises en Ontario. Il y a eu des cas qui, franchement, ne posaient aucun problème, mais où le public voyait un problème énorme. Donc, il faut en parler et il nous faut trouver des moyens de nous assurer qu'on respecte la loi.

Le problème ici, et vous ne l'avez peut-être pas compris, ou je me suis peut-être mal exprimé, c'est qu'aux États-Unis l'industrie nucléaire a fait comprendre à l'autorité réglementaire fédérale qu'elle était impuissante. Depuis l'incident de Three Mile Island, l'industrie a formé l'INPO pour se réglementer, pour assainir l'industrie.

Je ne peux pas parler de la situation au Canada, sauf pour dire que Ontario Hydro a choisi de se joindre à cette organisation, mais elle n'a jamais donné du mordant aux recommandations. Je pense donc que nous devrions doter la Commission de contrôle de l'énergie atomique d'un tel mécanisme qui soit efficace.

M. Bélair: Monsieur Ellard, pourriez-vous nous donner des précisions là-dessus?

M. Ellard: Oui, avec grand plaisir.

Personnellement, je ne crois pas qu'une réglementation soit efficace à moins qu'elle ne soit appliquée.

.1630

Au Canada, il y a trois provinces qui produisent de l'énergie par des moyens nucléaires, et nous avons trois normes différentes de protection de la sécurité publique. À mon avis, aucune de ces normes ne répond entièrement aux exigences de chaque situation. Je crois qu'il faudrait adopter une norme nationale, ce qui serait à l'avantage non seulement de l'industrie nucléaire...

M. Bélair: Cette norme n'existe-t-elle pas déjà?

M. Ellard: Pas que je sache.

M. Bélair: Le projet de loi C-23 règle-t-il le problème?

M. Ellard: Il donne à la Commission le pouvoir de régler le problème. Toutefois, comme je l'ai dit dans ma déclaration, la preuve reste à faire, tout d'abord, en ce qui concerne la façon d'établir une norme nationale et la rigueur avec laquelle cette norme est appliquée.

Nous ne nous préoccupons pas seulement du producteur ou de l'exploitant des installations nucléaires ici. Nous ne parlons pas seulement d'Ontario Hydro. Les provinces ont également une responsabilité et un rôle à jouer. J'estime donc qu'elles ont également besoin de mesures d'application.

M. Bélair: Monsieur Walter, vous semblez désapprouver dans votre mémoire quand vous dites: «Tous les aspects de l'énergie nucléaire seront réglementés par le gouvernement fédéral». Avant cela, vous parliez de la collaboration qui existe depuis longtemps entre les deux paliers de gouvernement. Ainsi donc, contestez-vous vraiment cet état de chose? Pensez-vous que tel soit l'objet du projet de loi C-23?

M. Walter: Je suis d'accord avec M. Ellard. Je pense que le projet de loi C-23 nous donne les outils nécessaires. Tout dépend des modalités d'application de cette loi et de la fermeté de la position que prendra la nouvelle commission.

En fait, la collaboration entre l'Ontario et la Commission est assez informelle. Elle existe parce que la Commission a adopté la loi provinciale en guise de politique. Elle n'est pas régie par un texte écrit, raison pour laquelle nous appuyons l'idée d'une norme nationale, comme M. Ellard l'a affirmé.

Je pense que tous les outils existent, mais il faut donner à la nouvelle commission le mandat de réglementer plus activement et d'appliquer les mesures en vigueur.

M. Bélair: De concert avec les provinces?

M. Walter: Oui, je pense que cela se fera très facilement avec les provinces. Par exemple, notre personnel... cela nous ramène à d'autres questions.

Notre ministère est tout à fait distinct d'Ontario Hydro ou du ministère de l'Environnement et de l'Énergie; par conséquent, on nous considère comme un organisme agréé à l'échelle internationale. Nous sommes agréés par l'American Society of Mechanical Engineers comme organisme d'inspection d'installations nucléaires en Amérique du Nord. Notre position est donc tout à fait distincte de celle d'Hydro. À mon avis, on ne peut que renforcer cette situation. Je pense qu'il faut simplement appliquer de façon plus énergique les lois et les normes que nous avons.

Le président: Monsieur Chatters.

M. Chatters (Athabasca): Après avoir écouté les différents témoins que nous avons reçus au cours de nos audiences, il apparaît de plus en plus clairement qu'au Canada, nous avons vraiment besoin d'un véritable débat public sur l'énergie nucléaire, ses avantages et les risques qu'elle comporte. À mon avis, le projet de loi C-23 ne nous le permet pas. Je me demande comment susciter ce débat.

Au Canada, certains experts ont de graves préoccupations quant aux dangers de l'énergie nucléaire. Il y en a d'autres, surtout dans l'industrie, qui en ont fait la promotion en affirmant notamment qu'il s'agit de la source d'énergie la plus sûre et la plus propre. Dans ce contexte, comment peut-on avoir un débat public? Qu'est-ce qui va le susciter?

Dr McQuigge: Je pense qu'il existe dans le projet de loi un mécanisme qui le permet. En effet, les enquêtes publiques par exemple peuvent servir de cadre à ce genre de débat si on le veut.

M. Chatters: Tout dépend des membres de la commission.

Dr McQuigge: En effet.

M. Walter: Je suis d'accord avec le Dr McQuigge. Je pense que les objets commencent à y renvoyer, mais ils ne vont peut-être pas assez loin pour montrer la participation du public.

M. Chatters: En tant que député, je représente l'opinion de mes électeurs, comme nous le faisons tous. Généralement, nos électeurs sont assez mal informés en ce qui concerne l'énergie nucléaire; néanmoins, nous sommes censés représenter leurs opinions. Ici, nous sommes dans une situation étrange où un ministère du gouvernement du Canada assure la promotion et la vente d'un produit. Je ne pense pas que tel soit le mandat du ministère des Ressources naturelles, mais il me semble qu'il le fait quand même. Notre dilemme est que nous devons représenter nos électeurs, mais nous ne sommes pas en mesure de leur montrer les avantages et les inconvénients de l'énergie nucléaire afin qu'ils puissent prendre position.

.1635

Dr McQuigge: Je craignais un peu que l'on nous classe dans la catégorie des dingues, des pleurnichards et des cinglés.

L'ennui, c'est que certains le pensent. En effet, Ontario Hydro colle de temps en temps cette étiquette au Dr Kyle et à moi-même, alors que, franchement, nous ne sommes pas anti-nucléaires. Nous avons une conception originale de la protection du public et des mesures à prendre pour l'assurer.

Quelqu'un ici est-il déjà passé près de l'édifice de la Commission de contrôle de l'énergie atomique? C'est assez intéressant, car il s'agit d'un immeuble très protégé. Un citoyen ordinaire qui passerait par là serait très intimidé. Il n'existe pour ainsi dire aucun élément convivial de la CCEA, du moins à ma connaissance, à Ottawa. Si vous pénétrez dans cet immeuble, je pense que vous n'aurez pas l'impression de vouloir poursuivre quelque chose, par exemple.

Depuis que je m'intéresse à l'énergie nucléaire dans la guerre et que les États-Unis l'utilisent dans ses sous-marins, il y a tout un mystère qui entoure la prolifération des armes atomiques. Nous n'en voulons pas.

Je pense que nous recherchons un meilleur équilibre. Certes, nous avons besoin d'énergie nucléaire, mais il faut parallèlement accroître la participation du public et l'éducation de l'industrie.

Le président: J'ai quelques questions pour terminer.

Tout d'abord, une question d'ordre général pour les trois témoins. Vos organisations ont-elles le pouvoir de fermer une centrale nucléaire si vous estimez que la sécurité publique est menacée?

Dr McQuigge: Avec beaucoup d'inquiétude, mais c'est probablement possible.

M. Walter: Étant donné que la commission a adopté la législation provinciale, si cette législation n'est pas respectée, nous pourrions aller dans le même sens.

Le président: Ainsi donc, si vous aviez des préoccupations relatives à la sécurité, en tant que directeur de la santé, vous pourriez fermer la centrale si vous estimiez qu'elle était...

Dr McQuigge: En vertu de la Loi ontarienne sur la protection et la promotion de la santé - évidemment, certains ne sont pas contents que nous disposions de ces pouvoirs - si nous soupçonnons - et j'insiste sur le mot «soupçonner», car nous n'avons pas à le prouver - que la santé publique est menacée, nous pouvons demander immédiatement une interruption des activités.

Ce n'est pas le cas des autres organismes, qui doivent recourir à la cour d'appel avant de prendre quelque mesure que ce soit.

En tant que médecins hygiénistes, nous pouvons ordonner une cessation immédiate des activités. Les dirigeants de la centrale peuvent recourir aux tribunaux s'ils ne sont pas contents. Je suis convaincu que j'aurais beaucoup de partisans au palais de justice si jamais j'envisageais une telle mesure.

Le président: Voici ma deuxième question. Une fois de plus, elle s'adresse aux trois témoins. Au cours des dernières années, la CCEA a élaboré des règlements. Vos organismes ont-ils été consultés dans ce processus?

M. Walter: Pour ce qui est de mon ministère, oui, effectivement, nous sommes intervenus à différentes étapes. Nous avons été consultés par exemple lorsqu'a été préparé ce projet de loi et, auparavant, pour d'autres amendements.

Je ne voudrais pas être groupé avec tous les autres dingues et cinglés en me plaignant. Je répète qu'à mon avis le niveau de coopération entre mon ministère et la commission est excellente. Il y a en effet eu certains problèmes dans des centrales nucléaires mais il ne faut pas oublier qu'elles ont toutes fermé en toute sécurité. C'est un aspect très important pour tout système que nous réglementons, qu'il s'agisse d'un ascenseur, d'un réservoir de gaz propane ou d'une centrale nucléaire. Si cela se ferme sans danger, cela marche selon les règlements de sécurité.

.1640

Le président: Monsieur Ellard, est-ce la même chose pour vous? Avez-vous consulté la CCEA?

M. Ellard: Oui, je dois dire que nous aussi, nous avons de bonnes relations avec la CCEA. Nous ne sommes pas toujours d'accord sur ce qu'elle fait ou ne fait pas, dans certains domaines, mais nos rapports sont bons et nous nous consultons régulièrement.

Pour revenir à votre autre question qui portait sur le pouvoir de décision de fermer une centrale nucléaire, nous n'avons aucune illusion que cela nous revienne. Nous pensons que c'est la CCEA qui a ce pouvoir décisionnaire et qui l'exercerait dès qu'une situation dangereuse se présenterait. Je n'aurais aucune hésitation à le dire.

Dr McQuigge: Je dois dire que nos relations, entre la CCEA et le responsable de la santé, s'apparentent à celles de nouveaux amoureux. Nous nous fréquentons beaucoup en essayant de comprendre quel genre de relation nous avons.

C'est un peu la situation. Je n'ai été mis au courant du projet de loi C-23 que tardivement et, seulement parce que je fais partie du groupe de conseillers médicaux de la Commission du contrôle de l'énergie atomique que j'ai reçu ce texte à examiner.

Le président: Je voudrais vous poser une question sur le plan d'urgence nucléaire provincial. Depuis combien de temps existe-t-il?

M. Ellard: Depuis très longtemps, depuis que l'on produit de l'énergie nucléaire en Ontario. Cela n'a pas toujours relevé de mon ministère. En fait, c'est passé à mon ministère, si je ne m'abuse, en 1974 ou 1975. Le plan actuel a été approuvé en 1986. Nous en sommes à la première année d'un programme triennal de révision totale de nos plans. Ce sera terminé en 1998.

Le président: La CCEA y participe-t-elle?

M. Ellard: Certainement.

Le président: Y a-t-il aussi des audiences publiques?

M. Ellard: Pas à ma connaissance.

Le président: Le grand public ne participe donc pas à la mise au point du plan d'urgence?

M. Ellard: Non, sinon par l'intermédiaire des conseils municipaux qui participent avec nous à ce processus.

Le président: D'accord. J'ai là une ou deux autres questions.

Nous parlions de l'objet de la commission. C'est quelque chose dont beaucoup nous ont parlé. C'est une question que je vais poser pour obtenir une réponse du ministère.

Considérez l'objet de la commission, c'est à l'article 9. Voyez l'alinéa 9(b), il me semble qu'il est stipulé ici que la commission a cette obligation ou cet objectif. Il est stipulé ici qu'une des missions de la commission est:

Il me semble donc que la CCEA a aux termes des dispositions de cet article l'obligation d'informer le public sur les conséquences de ses activités pour la santé et la sécurité des personnes et pour l'environnement. Peut-être devrions-nous nous en assurer, dans les règlements qui découleront de cette loi. Est-ce que c'est le genre de choses que vous recherchez, docteur?

Dr McQuigge: Oui. Ce qui me préoccupe, c'est le terme «informer». Cela ne veut pas dire collaborer, planifier avec ni travailler en partenariat avec; cela signifie simplement qu'on va communiquer certains renseignements. C'est quelque chose qu'il faudrait préciser.

Le président: Une de vos recommandations pourrait être un amendement qui préciserait qu'il leur faut des consultations plus larges et la participation du grand public.

Dr McQuigge: Ce que M. Ellard n'a peut-être pas précisé c'est que l'Ontario met au point un nouveau plan d'urgence nucléaire. La Commission de contrôle de l'énergie atomique en fait autant. Je ne sais pas s'ils travaillent ensemble. C'est peut-être parce que je l'ignore mais je n'en ai pas connaissance.

Le président: L'autre chose que je voulais dire, c'est que je ne suis pas certain, mais je crois que dans 9(b), vous avez fait allusion à des droits. Je m'assurerai certainement auprès du ministère qu'au cas où quelqu'un présente une demande et paye un droit à ce moment-là, cette somme sera remboursée si la demande est rejetée. Que l'on ne se retrouve pas à payer quelque chose que l'on n'obtient pas. Je crois que c'est ce qui est prévu, mais nous en demanderons confirmation.

Je comprends lorsque vous nous dites de ne pas nous inquiéter d'une amende. Si nous vous faisons payer une amende, nous vous la rembourserons tout simplement. Ce serait évidemment inquiétant mais je ne pense pas que ce soit l'idée qui a inspiré cet article. Nous vérifierons lorsque les fonctionnaires du ministère comparaîtront. Nous devrions pouvoir calmer vos craintes.

.1645

Dr McQuigge: Je m'inquiète de la façon dont ça pourrait être interpréter.

Le président: Tout à fait.

J'aurais une dernière question, en particulier à vous, docteur. Vous avec manifesté quelque inquiétude à propos de l'Ontario Hydro. Avez-vous pris contact avec Ontario Hydro officiellement pour déclarer qu'à titre de responsable de la santé, vous aviez quelques préoccupations quant à leurs activités dans votre région? Avez-vous pris cette mesure?

Dr McQuigge: Je crois que le terme «constamment» serait exact et j'en dirais autant pour leDr Kyle.

Le président: Quel genre de réponse obtenez-vous de l'Ontario Hydro?

Dr McQuigge: Quelquefois bonne, quelquefois insuffisante.

Je ne veux pas entrer dans le jargon, mais il y a la notion de fluage dans les tubes à carburant. La notion de placements de joint torique. Une nouvelle notion à laquelle je ne connais absolument rien; je crois qu'il est question des tubes de déplacement entre la chaudière et la boucle secondaire des réacteurs. Il y a la notion de bruitement en aval, que la Commission de contrôle d'énergie atomique a déjà signalée et qui peut être un défaut de conception dans le réacteur.

C'est le genre de choses que le Dr Kyle et moi-même... Lorsque nous entendons ces termes, nous aimerions pouvoir les comprendre un peu mieux. Quel genre de risque cela représente? N'y a-t-il pas de risque? Certaines de ces informations techniques nous aideraient à comprendre les choses. Jusqu'ici, il nous faut toujours aller quêter ce genre d'information. Personne ne nous téléphone pour nous demander si nous avons lu tel ou tel rapport et si nous avons des questions à poser? Ce genre de suivi n'existe pas. On nous considère avec une certaine méfiance, je dirais.

Le président: Avez-vous jamais signalé directement à la CCEA un problème concernant un service d'utilité publique et déclaré que vous n'étiez pas satisfait des réponses que l'on vous avait fournies?

Dr McQuigge: C'est exactement la raison pour laquelle le Dr Kyle et moi-même sommes venus à Ottawa il y a un an.

M. Ellard: Peut-être me permettriez-vous d'ajouter quelque chose à cela. Lorsque certaines situations se présentent, nous utilisons régulièrement les avis de la CCEA pour interpréter et obtenir confirmation de ce que nous dit l'Ontario Hydro. Dans chaque cas, nous avons reçu très rapidement une réponse.

Le président: Messieurs, merci beaucoup. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir à Ottawa nous présenter ce point de vue. Il est important. Comme vous l'aurez deviné à nos questions, les membres du Comité ont été très intéressés par votre témoignage et il y a un certain nombre de choses sur lesquelles nous allons nous pencher. Je vous remercie donc à nouveau et vous prie de nous excuser d'avoir un peu tardé à commencer.

La séance est levée.

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