[Enregistrement électronique]
Le jeudi 18 avril 1996
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Nos témoins pour ce matin nous viennent de la baie des Chaleurs. La Commission canadienne du blé s'est désistée pour ce matin.
Le porte-parole de la délégation est M. Brian McGurk.
Je vous demanderai de nous présenter vos collègues après quoi ce sera parti.
M. Brian P. McGurk (Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Merci beaucoup, monsieur le président. Nous sommes très heureux d'être parmi vous aujourd'hui.
Afin que les choses soient un petit peu plus faciles, je demanderai aux membres de notre groupe de travail de se présenter eux-mêmes à vous.
M. Andrew Flanagan (Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Andy Flanagan, maire, Belledune.
M. Joseph Noel (Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Joe Noel, vice-maire, Belledune.
M. Richard Leduc (président, Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Je m'appelle Richard Leduc et je suis directeur général de la commission économique régionale à Chaleur.
M. McGurk: Je m'appelle Brian McGurk, et je suis, aux fins de la présente, le porte-parole du Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs.
M. William A. MacAvoy (Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Je m'appelle William MacAvoy et je représente la division du Nouveau-Brunswick de Noranda Inc.
M. Wallace Coulombe (Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Je suis Wally Coulombe et je suis maire de Dalhousie.
M. Guy Desgagnés (Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs): Je m'appelle Guy Desgagnés et je suis directeur général du port de Belledune.
Le président: Bienvenue à tous. Les membres du comité vont continuer d'arriver, mais je vous demanderais de commencer sans plus tarder votre exposé. Nous disposons d'une heure pour entendre votre présentation et vous poser des questions.
M. McGurk: Merci. Les ports de Belledune et de Dalhousie jouent un rôle prépondérant dans l'économie de la région et de l'ensemble du Nouveau-Brunswick. Le Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs réunit les municipalités, les principales industries, les affréteurs et les agences de développement économique de la région. Il a été mandaté par eux pour les représenter.
Nous sommes heureux de l'occasion qui nous est ici donnée de nous prononcer sur les frais des services maritimes dans le contexte de la récupération des coûts de la Garde côtière, solidaires que nous sommes du gouvernement fédéral dans ses efforts visant à réduire le déficit et à faire que le pays soit compétitif sur les marchés internationaux. Pendant que nous nous efforçons de produire et de commercialiser des produits supérieurs pour nos clients partout dans le monde, tout en tentant de prévoir les conditions de marché cycliques et d'y réagir, la compétitivité permanente constitue un défi de taille pour les industries axées sur les ressources qui utilisent les ports de Belledune et de Dalhousie.
Nous applaudissons à la vision du gouvernement d'un système de transport national intégré et abordable et nous reconnaissons l'importance, à l'intérieur de celui-ci, d'un système de transport maritime efficient. Nous appuyons le principe de l'utilisateur-payeur dans la répartition des coûts des services de la Garde côtière. Cependant, cette répartition doit être juste, équitable et cohérente, caractéristiques non visibles d'emblée dans les propositions présentées jusqu'ici.
Tout au long des deux dernières années, la Garde côtière canadienne a été obsédée par l'idée que la récupération des coûts auprès des utilisateurs commerciaux est le seul moyen d'atteindre les objectifs énoncés dans le budget de 1995. Pour appuyer cette position, plusieurs études mal conçues et réalisées de façon hâtive sont venues promouvoir l'idée que les utilisateurs ne subiraient que très peu, voire pas du tout, de conséquences économiques néfastes. Malheureusement, il n'a été aucunement tenu compte des énormes possibilités de réduire d'abord les coûts de la Garde côtière. Tout cela ne tient aucunement compte de la recommandation 23 du rapport Keyes selon laquelle:
- Aucun programme de recouvrement des frais ne doit être mis en oeuvre avant que la Garde
côtière ait clairement démontré qu'elle maîtrise ses frais et les maintient au niveau le plus bas
possible.
Étant donné les préoccupations que je viens de mentionner, les intervenants dans notre région se sont réunis pour constituer le Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs et se sont entendus sur les principes directeurs qui suivent.
Tout d'abord, la Garde côtière doit immédiatement entreprendre de revoir, de rationaliser, de simplifier et de dégraisser son processus de prestation de services, pour le faire correspondre au niveau de service requis, avant la mise en oeuvre de tout programme de recouvrement des coûts. Cela cadre avec la recommandation 23 du rapport Keyes.
Deuxièmement, des études d'impact socio-économique exhaustives pour tous les ports commerciaux doivent être réalisées avant l'imposition de quelque droit de services maritimes que ce soit.
Troisièmement, les intervenants doivent comprendre l'incidence complète des taxes, redevances et frais prévus et doivent disposer d'un délai suffisant pour assurer une planification financière efficace et apporter tous les changements nécessaires.
Quatrièmement, les services de la Garde côtière doivent être définis et leurs coûts propres établis pour chaque port.
Cinquièmement, la commercialisation des aides à la navigation et des services de brise-glace doit être examinée de très près. La réduction des coûts réalisée grâce aux initiatives prises devrait bénéficier aux utilisateurs. Cela va dans le sens de la recommandation 25 du rapport Keyes.
Enfin, bien que l'approche régionale du recouvrement des coûts puisse être considérée comme plus équitable qu'une taxe nationale uniforme sur le transport maritime des marchandises, le degré d'utilisation des services par les ports d'une même région varie beaucoup. La répartition des coûts doit donc être établie par port, en fonction des services fournis au port par la Garde côtière. Nous pensons que cela est tout à fait réalisable. Dans le cas contraire, il nous faudrait appuyer une formule nationale.
Étant donné les principes susmentionnés, on ne devrait pas nous imposer, pour le moment, de taxes sur les aides à la navigation dans la mise en oeuvre prévue pour le 1er juin 1996.
Nous ne cherchons pas à retarder simplement le processus. Nous estimons que les étapes préalables doivent être franchies avant l'entrée en vigueur de frais de services maritimes. Toutefois, si l'échéancier de mise en oeuvre de la première série de frais est vraiment incontournable, il en va de notre intérêt de veiller à ce que ces frais soient à tout le moins équitables dès le départ.
Au cours des derniers mois, une myriade de propositions en matière d'aides à la navigation ont été avancées. Ces propositions faisaient ressortir des différences régionales arbitraires et une variété de barèmes de tarifs.
Dans le cas de la région de l'Atlantique, ont compté parmi les propositions des formules axées sur le seul tonnage, une formule tonnage-distance et, plus récemment, un mécanisme prévoyant que les droits des services maritimes s'appuient toujours sur le tonnage mais soient rajustés pour les chargements de 50 000 tonnes et les marchandises transbordées.
Selon nous, aucune de ces propositions ne s'appuie sur le coût véritable des aides à la navigation fournies. Posent problème pour nous les aspects pratiques de ces régimes, les précédents qu'ils établiraient et les énormes distorsions qu'ils amèneraient. Nous croyons que ces iniquités et distorsions bénéficieraient à nos concurrents, pouvant même mettre en péril la viabilité à long terme des ports de Belledune et de Dalhousie.
Nous pensons que notre région serait défavorisée à trois niveaux par la mise en application de l'une ou l'autre des propositions déposées à ce jour.
Tout d'abord, la part de la récupération des coûts pour les aides à la navigation qui reviendrait à la région de l'Atlantique s'élèverait à près de 30 p. 100 du total national. Un rapide examen du dossier montre que les aides à la navigation prévues pour la navigation commerciale dans notre région sont négligeables. Les aides à la navigation pour Dalhousie et Belledune sont en fait contenues dans chacun des deux ports et pourraient facilement être assurées s'il y avait commercialisation.
Deuxièmement, la répartition entre Terre-Neuve et les trois autres provinces maritimes vient distordre encore plus la situation à notre désavantage.
Troisièmement, si les coûts s'appliquaient selon une formule de tonnage-distance, notre région, qui n'a presque pas d'aides à la navigation, serait sérieusement défavorisée. Étant donné que les distances parcourues dans le golfe du Saint-Laurent et la baie de Fundy sont exemptées parce que les deux régions sont - et je cite le rapport de la Garde côtière - «largement libres d'aides à la navigation», l'on se demande pourquoi les distances dans la baie des Chaleurs sont appliquées, la baie étant elle aussi dépourvue d'aides à la navigation commerciales, à l'exception de celles qui existent à l'intérieur des deux ports et dont je viens de parler.
Si on les compare aux ports intérieurs de Montréal ou de Québec, ou d'ailleurs de Chandler, qui est situé du côté québécois de la baie des Chaleurs, nous ne voyons aucune raison pour laquelle les ports de Dalhousie et de Belledune devraient se voir imposer un tarif supérieur, et encore moins un tarif qui serait le double de celui prévu dans la proposition utilisant la formule tonnage-distance.
En conclusion, nous appuyons le principe de l'utilisateur-payeur dans la répartition des coûts et sommes prêts à payer notre juste part. Notre juste part doit correspondre aux services que nous utilisons et dont nous avons besoin. Nous nous opposons donc fermement à toute formule de partage des coûts des aides à la navigation qui nous désavantagerait par rapport aux ports intérieurs et aux ports de Halifax et de Saint John.
Nous croyons fermement qu'étant donné le très petit nombre d'aides à la navigation qui existent aux ports de Belledune et de Dalhousie comparativement aux autres ports, nous devrions payer un taux sensiblement inférieur. Mais encore, si l'on donne sa chance à la commercialisation, nous croyons fermement que nous ne devrions rien payer du tout pour les aides à la navigation.
Nous sommes également convaincus que lorsqu'il sera question de discuter des frais de déglaçage, les ports libres de glace argueront en faveur d'un taux inférieur, s'appuyant sur les principes de la nécessité et du niveau de service. Nous invoquons par conséquent le même argument en ce qui concerne les aides à la navigation.
J'aimerais, au nom du Groupe de travail maritime de la baie des Chaleurs, vous remercier de votre temps et de votre attention. Nous sommes prêts à répondre aux questions que vous voudrez nous poser.
Le président: Merci beaucoup pour votre excellente présentation.
Combien cela vous coûtera-t-il si les redevances sont appliquées dès cette année?
M. McGurk: Il s'agirait d'un tarif forfaitaire de 17,6c. la tonne. C'est ce que prévoit la proposition actuelle, si nous avons bien compris. Si cela se faisait selon une formule tonnage-distance, cela varierait d'un port à un autre. Je sais que pour le port de Dalhousie, ce serait 33c. la tonne. Bill, qu'en est-il de Belledune?
M. MacAvoy: Ce serait 29c. pour Belledune.
Le président: Avez-vous prévu combien cela vous coûterait pour cette année?
M. McGurk: Oui.
Le président: Quel serait donc ce coût?
M. McGurk: Encore une fois, cela dépendrait de la proposition retenue.
Le président: Je veux dire avec la proposition la plus récente.
M. McGurk: Celle prévoyant 17,6. la tonne?
Le président: Oui.
M. McGurk: Entre 30 000 et 40 000$.
Le président: Pour les deux ports, ce serait 30 000 à 40 000$?
M. McGurk: Pour le port de Dalhousie et le port de Belledune.
M. Guy Arseneault (Restigouche - Chaleur): Mais ce serait pour une seule compagnie.
M. McGurk: Ce serait pour une seule compagnie. Excusez-moi.
M. Arseneault: Il y a davantage de compagnies qui exploitent...
Le président: Connaissez-vous le total pour les ports?
M. McGurk: Nous avions tous ces chiffres.
M. Leduc: Ce serait environ 200 000$ pour Belledune et un tout petit peu moins pour Dalhousie. Je ne fais que prendre le tonnage de 1994 et le multiplier par 17,5c. Ce n'est donc qu'un nombre très approximatif.
Le président: Cela tourne autour de 400 000$.
M. Leduc: Entre 400 000 et 500 000$.
M. MacAvoy: Depuis 1994, le trafic a augmenté sensiblement et à Dalhousie et à Belledune.
Le président: Très bien. Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité. C'est M. Bernier qui va commencer.
M. MacAvoy: Depuis 1994, le trafic s'est sensiblement accru et à Dalhousie et à Belledune.
Le président: Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité.
Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier (Gaspé): Tout d'abord, je tiens à saluer les témoins de ce matin. Leur exposé était succinct et m'a paru assez clair.
À la page 3 du document que j'ai eu, vous nous transmettez les points principaux qui guident votre réflexion.
J'essaie de replacer les idées dans l'ordre que nous suivrons pour la rédaction du rapport que nous entreprendrons ce soir. Si j'ai bien compris votre exposé et les points inclus dans votre mémoire, vous nous dites souhaiter qu'il y ait une étude d'impact, c'est-à-dire qu'on puisse déterminer quels seront réellement les coûts pour chacun des ports dans chacune des régions. Vous souhaitez qu'on puisse connaître l'impact de ces coûts qui seront transmis aux différentes entreprises de vos régions et que ce soit fait avant toute imposition de frais.
Dois-je comprendre par là que vous souhaitez qu'on décrète un moratoire? Ou souhaitez-vous, dans le cas où ces études ne pourraient nous donner les réponses quant à la détermination des dépenses ou à leur impact sur vos entreprises, qu'il y ait une forme de transition imposée par la Garde côtière? Vous terminez en parlant d'un coût qui s'appliquerait à tout le pays. Est-ce que cela signifie que, dans le cas où on ne pourrait arriver à les déterminer, en attendant le résultat des études, vous souhaiteriez qu'il y ait une imposition des coûts de base?
M. Leduc: C'est bien cela. Évidemment, nous trouvons que certaines choses devraient être faites au préalable, avant l'imposition de quelque taxe ue ce soit. Par exemple, la Garde côtière devrait d'abord réduire ses coûts.
Deuxièmement, il faudrait avoir une étude d'impact non seulement sur les communautés mais aussi sur les ports, les industries et les plans de navigation qui vont en découler.
Si la date est définitivement arrêtée, s'il faut que cela soit mis en application le 1er juin, peut-être que la manière la plus juste de le faire serait d'imposer une charge équitable pour tout le monde. Malheureusement pour nous, nous recevons très peu d'aide à la navigation et toute imposition qui nous met sur le même pied que tout le monde nous défavorise.
Nous sommes toutefois prêts à l'accepter, au pis-aller. Cependant, la dernière proposition nous désavantage au Port de Montréal et aux ports intérieurs du Canada. C'est absolument fou. Il n'y a encore mille milles à faire, avec toutes les aides à la navigation que nous avons à partir de chez nous. Donc, il y a des choses qui ne sont pas équitables.
M. Bernier: J'ai aimé votre comparaison entre Chandler et le port d'en face; c'est Belledune, je crois. Dalhousie n'est pas loin. On parle de Dalhousie, de Paspébiac ou de... Vous êtes au bord de la baie. Vous êtes à quelle distance? À 15 minutes de traversée en baleinière ?
M. Leduc: On peut voir le port. Nous nous voyons. Ce n'est pas loin.
M. Bernier: Vous êtes les cousins de la péninsule du Nouveau-Brunswick?
M. Leduc: C'est ça.
[Traduction]
Monsieur Bernier, si cela ne vous ennuie pas, je vais répondre à la question en anglais, car je me débrouille un petit mieux en anglais qu'en français.
Notre compagnie, Avenor, est située dans le port de Dalhousie. Nous concurrençons une compagnie de pâtes et papier appelée Abitibi-Price, qui est située à Chandler. Pour de simples raisons de ligne de partage - en d'autres termes, Chandler se trouve au Québec et fait partie du centre du Canada et nous, nous faisons partie de la région de l'Atlantique - nous payons un tarif supérieur pour les mêmes services de navigation, ou presque.
Nous concurrençons directement Abitibi-Price dans les mêmes marchés d'exportation. Cette compagnie est pour l'instant avantagée par rapport à nous, et l'avantage dont elle jouit va sans doute grossir au fil du temps. Nous ne pensons pas que la Garde côtière comprenne cela. Elle ne comprend pas les réalités économiques. Elle ne comprend pas le fait que les ports se livrent concurrence et qu'il en est de même pour les industries.
Offrir à une compagnie ou à une industrie un avantage par rapport à l'autre par le biais de moyens artificiels n'est pas une très bonne recette pour l'avenir. Cela n'est pas approprié, et nous pose beaucoup de difficultés.
[Français]
M. Bernier: Oui, mais dans cette ligne de pensée, vous souhaiteriez qu'il y ait une approche nationale de toute façon, si vous voulez être à égalité avec les joueurs qui sont en face de vous.
Si jamais une analyse des coûts concluait que Chandler a de coûts moindres d'exploitation, il y aurait encore désavantage. Donc, vous préféreriez toujours une approche nationale.
Allons plus loin, pour que je sois bien sûr de comprendre votre position. Êtes-vous prêts à donner une chance au gouvernement? Croyez-vous que la Garde côtière a absolument besoin de 20 millions de dollars sur les 842 millions de dollars qu'elle doit administrer, alors que ces mêmes 20 millions de dollars, pour vous... À vous, gens de l'industrie, on demande d'accepter l'application d'un principe et d'apprendre à vivre avec ce principe dont on ne connaît pas les répercussions. Sur une échelle de un à dix, comment évalueriez-vous votre acceptation de laisser le ministère agir? Ou bien êtes-vous prêts à rester fermes?
Je remarque que vous êtes une bonne délégation. Il y a des élus parmi vous de même que des électeurs. Il y a des emplois en place qui peuvent être touchés. Êtes-vous prêts à vous tenir et à faire bloc? Vous avez des exemples parfaits, notamment celui de Chandler et de Belledune qui sont nez à nez et où il y a une différence de deux cents. Jusqu'où seriez-vous prêts à aller? Êtes-vous prêts à tenir le flambeau bien haut? Vous n'êtes peut-être pas des gens habitués à monter aux barricades, mais à un moment donné, lorsqu'on ne se sent pas respecté... Jusqu'où êtes-vous prêts à aller? C'est la question que je vous pose.
Vous l'avez remarqué, je ne défends pas la Garde côtière. Je suis dans l'opposition. Je suis peut-être un peu plus coloré que d'autres, bien que certains de mes confrères le soient aussi parfois.
[Traduction]
M. McGurk: Nous avons été très déçus que la Garde côtière ait choisi le trajet de moindre résistance et ait visé les commettants pour régler une question budgétaire. Nous sommes tous des gens d'affaires et il me semble que nous commencerions par regarder à l'interne pour voir quels sont nos coûts et si nous livrons les services au plus bas coût possible.
Effectivement, si la Garde côtière cherche à réaliser 20 millions de dollars, ça ne devrait lui prendre que très peu de temps pour trouver cet argent chez elle. En fait, je pense qu'il y aurait encore plus d'argent de disponible si elle faisait un examen réaliste, morceau par morceau. Je pense que nous autres, utilisateurs des systèmes de la Garde côtière, serions très heureux de payer tous les coûts de services de conseil auxquels il faudrait recourir pour aider la Garde côtière à examiner ses propres coûts.
Je pense qu'au bout du compte, s'ils essaient de ramasser 20 millions de dollars auprès des utilisateurs, cela va nuire aux propriétaires de navires. Le propriétaire de navire va réimputer ces frais à l'industrie. L'industrie va dire que c'est un coût d'exploitation et va demander au gouvernement une déduction d'impôt en conséquence. Au bout du compte, ces 20 millions de dollars sont 10 ou 12 millions de dollars. Ce ne sera pas 20 millions de dollars. Le meilleur moyen de trouver ces 20 millions de dollars serait de réduire les coûts.
Le président: Monsieur Arseneault, de Restigouche - Chaleur.
M. Arseneault: Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier les témoins d'être venus ici nous faire cet excellent exposé. Je suis certain que si les députés s'y penchent de façon sérieuse - et je suis convaincu que ce sera le cas - ils constateront que les témoins ont fait ressortir plusieurs iniquités. J'appuie entièrement leur point de vue.
Tout d'abord, j'aimerais dire quelques mots au sujet de la Garde côtière, car il a été dit ce matin que celle-ci ne comprend pas les réalités de la navigation commerciale. J'aimerais qu'on dise clairement quel genre de relations ont été établies.
Par exemple, combien de réunions la Garde côtière a-t-elle tenues à Dalhousie avec le Port de Dalhousie? Combien de réunions la Garde côtière a-t-elle tenues à Belledune avec le Port de Belledune? Combien de fois s'est-elle rendue dans le Nord pour rencontrer les utilisateurs, les intervenants? Combien de fois a-t-elle rencontré les représentants politiques? Avez-vous été invités à d'autres réunions? Quel genre de préavis vous donne-t-on lorsque de telles réunions sont organisées? Quel genre de renseignements vous fournit-on à l'avance? Quel genre de documentation vous est fournie sur place?
Mes questions s'adressent à tous ceux parmi vous qui aimeraient y répondre. J'aimerais tout simplement que le contexte soit clair afin que l'on puisse déterminer si les gens ont été traités de façon juste jusqu'ici.
M. MacAvoy: Je pense pouvoir répondre à vos questions. Je vais parler d'événements récents. Toutes les réunions de la Garde côtière relativement au barème de tarifs pour la région de l'Atlantique ont eu lieu soit à Saint John soit à Halifax et avec un très court préavis. Nous avons eu, vendredi dernier à Saint John, une réunion dont on ne nous avait averti que le mercredi, de telle sorte qu'il a été presque impossible pour la plupart des membres de la région du Nord de s'y rendre.
D'autre part, dans la lettre de mercredi dernier, la Garde côtière a donné les nombres pour les aides à la navigation dans la région. Elle a fait état de 18 pour le port de Belledune et de 26 pour le port de Dalhousie. Nous avions fait des recherches au sujet de ces chiffres quelques semaines auparavant en faisant appel aux départements de la Garde côtière elle-même. Lorsque nous sommes allés à cette réunion vendredi dernier, nous avons contesté ces chiffres de 18 et de 26 et les représentants de la Garde côtière sont revenus très peu après, s'excusant et reconnaissant que nous avions raison. Les bons chiffres sont en fait 4 pour Belledune et 13 pour Dalhousie.
Je suis donc tout à fait d'accord avec vous là-dessus, monsieur Arseneault. En ce qui concerne la région, je pense que la Garde côtière ne s'intéresse pas beaucoup à ses relations avec les intervenants le long de la côte nord.
M. Arseneault: Monsieur le maire Coulombe, auriez-vous quelques commentaires à faire?
M. Coulombe: Oui, j'aimerais dire quelque chose au sujet de cette question.
Il me faudrait vous faire un petit historique. Suite à notre élection en juin dernier, on nous a demandé d'assister à une réunion avec la Garde côtière à Newcastle, qui se trouve à 100 milles de chez nous. Cela ne nous ennuyait guère, mais on nous a dit dans l'après-midi qu'on devait être prêts dès le lendemain avec notre exposé pour dire combien d'aides à la navigation on voulait voir supprimer. On devait faire cela dans la nuit, j'imagine.
On leur a demandé de venir chez nous pour nous rencontrer, mais ils ont choisi de ne pas le faire, et c'est très bien ainsi. Nous avons profité de l'occasion pour nous rendre à Halifax, là où se trouve leur bureau central. Nous les y avons rencontrés à deux occasions différentes. Désireux d'éliminer certains des problèmes, nous avons fait une demande officielle de brise-glace. Nous en voulons un à Dalhousie, pour 1 dollar, et nous fournirons le personnel. Ils pensaient que nous blaguions, mais nous étions très sérieux.
Nous avons quelques difficultés: le député vient de poser des questions sur les coûts et a demandé si nous allions tenir ferme, etc.
[Français]
Je dois vous dire que nous devrions prendre assez fortement position, parce que les municipalités auront la charge des ports. Dans les nouveaux programmes offerts par le gouvernement, on nous dit: «Your destiny is in your hands». Je suis bien prêt à accepter la responsabilité de ces ports. Cpendant, j'ai demandé à la Garde côtière et à M. Thomas quel contrôle le gouvernement conservera. Est-ce que nous serons en charge des opérations portuaires? Est-ce que le gouvernement nous dira ce qu'il est permis et ce qu'il n'est pas permis de faire, alors que nous assumerons les coûts?
[Traduction]
Les frais pour les aides à la navigation ont une incidence sur la municipalité ou sur la commission portuaire qui voudra peut-être prendre la chose en mains. Nous avons de la difficulté à résoudre certaines de ces questions, car s'il y a cette longue attache au gouvernement central, qui dit qu'ils vont nous facturer pour les aides à la navigation, les services de brise-glace, les vérifications environnementales, les activités de recherche et de sauvetage, etc., lorsque le moment sera venu pour nous, en tant que municipalité, d'exploiter un port, il ne restera plus d'argent. Nos affréteurs décideront que l'on demande trop cher et ils iront à un autre port.
Dans nos efforts visant à rester à jour et à continuer de participer, en tant que municipalité qui s'est déclarée intéressée à exploiter le port de Dalhousie, nous devons compter sur nos expéditeurs pour nous tenir à jour.
Il y a eu une réunion à Saint John il y a environ une semaine. Lorsque j'ai appelé le bureau à Ottawa pour obtenir une invitation, on nous a dit de but en blanc que nous ne figurions pas sur la liste d'invités. J'ai répondu que nous nous pointerions de toute façon en espérant qu'on ne nous mette pas à la porte. Il nous a été impossible de nous y présenter, encore une fois parce que nous apprenions dans l'après-midi qu'il nous fallait être à Saint John le lendemain, ce qui n'est pas évident. Le trajet demande six à huit heures en automobile. Il faut préparer une présentation. On ne peut pas tout simplement se présenter et faire perdre aux gens leur temps.
Nous avons dit à la Garde côtière que si nous étions un joueur, alors il fallait nous laisser jouer. Cependant, si nous sommes responsables du port, alors qu'on nous en donne la responsabilité et qu'on nous laisse l'exploiter, mais qu'on ne nous impose pas une réglementation telle qu'il nous faille fermer boutique.
[Français]
Pour répondre plus directement à la question, nous devrons prendre les mesures nécessaires pour nous assurer que le Port de Dalhousie, qui a été établi dans les années 1800, existe encore dans les années 2000.
[Traduction]
M. Arseneault: Monsieur MacAvoy, vous représentez les plus gros utilisateurs aux ports de Belledune et Dalhousie. Pourriez-vous donner au comité une idée de l'incidence économique qu'ont vos compagnies sur la région et de ce qui se passerait si les prix pratiqués dans les ports étaient tels que vous ne les utiliseriez plus? Qu'adviendrait-il de vos compagnies et qu'adviendrait-il ensuite de la région? Quelles seraient les conséquences économiques? Y a-t-il des retombées côté employés, ou d'autres choses du genre?
M. McGurk: Ma compagnie est Avenor Inc., à Dalhousie. Elle a récemment investi 141 millions de dollars dans ses installations à Dalhousie. À l'heure actuelle, vu les changements du côté de la Garde côtière et la question de la privatisation des ports, nous commençons à nous demander si cet investissement a été judicieux.
Nous employons environ 600 personnes à l'usine et nous sommes le principal employeur de la localité. L'usine est vitale pour nos marchés d'exportation. Elle a été conçue pour être une usine d'exportation. Si nous n'avons pas à l'usine un port efficient, nous risquons de nous trouver confrontés à l'une ou l'autre des deux éventualités qui suivent. Premièrement, devenus tout à fait non compétitifs sur les marchés d'exportation, nous pourrions nous voir obligés de nous tourner vers un port situé beaucoup plus loin, par exemple Halifax ou Saint John, et nous ne pourrions pas concurrencer les usines proprement côtières. Deuxièmement, à la fin de tout cela, nous serions peut-être obligés de fermer boutique.
Notre usine est un important expéditeur sur le marché japonais. Notre capacité de lui livrer un produit de haute qualité est essentielle pour lui. Si nous ne pouvons pas garantir cela, nous aurons de la difficulté à continuer d'exploiter l'usine de pâtes et papiers.
Il est vital que le port demeure où il est. Il est vital que le port soit rentable. Il est vital que nous approvisionnions nos clients de façon efficiente et en toute sécurité.
M. MacAvoy: À la façon d'Avenor, la division du Nouveau-Brunswick de Noranda a récemment investi beaucoup d'argent dans l'agrandissement du port de Belledune: 17 millions de dollars. Étant donné l'importance des tarifs envisagés, il est possible que nous ayons à envisager d'autres solutions de transport pour nos produits, mais tout dépend, encore une fois, de l'importance des redevances.
Nous employons bien au-delà de 1 000 personnes dans nos trois opérations au Nouveau-Brunswick, qui sont deux mines et une fonderie. Les conséquences seraient lourdes si nous devions changer nos opérations à cause des redevances imposées. Il nous faudrait envisager le rail, le camionnage ou encore d'autres options ou modes de transport, et cela pourrait avoir de graves conséquences, bien au-delà de simples changements d'habitudes d'expédition. Nos activités ont une incidence sur les niveaux d'emploi. D'autre part, tous les fournisseurs qui alimentent nos processus et notre production seraient eux aussi touchés par des frais qui ne correspondent selon nous pas au niveau de service que nous recevons.
Le président: Monsieur Culbert.
M. Culbert (Carleton - Charlotte): Merci, monsieur le président.
Bienvenue, monsieur le maire, et messieurs les délégués du Nouveau-Brunswick. Nous sommes heureux de vous accueillir parmi nous ce matin.
J'aimerais tout d'abord traiter de deux ou trois questions, car de l'autre côté de la province, comme vous le savez, les gens ont des inquiétudes semblables à celles que vous avez évoquées ici ce matin. Étant donné les diverses propositions que vous avez faites et après avoir écouté votre exposé, j'imagine, premièrement, que vous acceptez le principe de l'utilisateur-payeur. C'est la définition de ce que vous payez et de ce qui est requis qui vous préoccupe. Dans les ports de Dalhousie et de Belledune, avez-vous eu l'occasion de déterminer quelles aides à la navigation sont selon vous nécessaires et avez-vous fait une analyse du coût que celles-ci devraient supposer? Avez-vous fait quoi que ce soit dans ce domaine?
M. Desgagnés: Au port de Belledune, notre impression, et cela a été confirmé par la Garde côtière, est que le nombre d'aides à la navigation de courte durée nécessaires est quatre, dont deux sont la propriété du port, qui les entretient lui-même. Les deux autres sont entretenues par la Garde côtière.
M. Culbert: Connaissez-vous le facteur coût? En avez-vous la moindre idée? Vous dites que deux sont entretenues par le port lui-même.
M. Desgagnés: Oui.
M. Culbert: Avez-vous une idée de ce que coûte leur entretien?
M. Desgagnés: Il y a deux feux à secteurs. L'investissement en capital est d'environ 40 000$ pour chacun d'eux, et les frais d'entretien s'élèveraient à près de 200$ par an.
M. Leduc: Nous sommes tout à fait prêts à les acheter et à les entretenir tous nous-mêmes. Bien franchement, nous pensons que ce serait là une option tout à fait viable.
M. Culbert: Vous êtes devin, car c'était ma question suivante.
M. Leduc: Je ne pense pas que deux feux montent à grand-chose. On peut s'en occuper. Je ne voudrais pas parler au nom de M. Coulombe, mais nous en avons discuté hier soir et je pense qu'ils sont tout à fait prêts à faire la même chose. Ce serait peut-être l'option à envisager.
M. Culbert: Dans la même veine, si ces feux étaient commercialisés ou privatisés, vous seriez donc tout à fait prêts à absorber ou à payer les coûts correspondants, en fonction de vos besoins.
M. Leduc: Absolument.
M. Culbert: J'ai été très intéressé par un autre aspect de votre présentation. J'ai lu vos notes expliquant que vous préféreriez que les coûts soient répartis selon une formule port par port, encore une fois en fonction du niveau de service à assurer... ou, mieux encore, puisque le niveau de service pourrait varier, en fonction du niveau de service requis plutôt qu'assuré.
M. McGurk: C'est exact.
Une chose qui nous préoccupe est que si c'est vraiment une formule d'utilisateur-payeur, alors vous devriez payer pour ce que vous utilisez. Si l'on prend Dalhousie et Belledune et si les aides à la navigation de courte portée sont commercialisées, alors il faudrait que ceci soit réduit par rapport au COSICS et nous ne devrions rien payer à la Garde côtière pour ces services.
Dans le cadre de l'actuel barème de tarifs, ou de n'importe lequel d'entre eux à l'heure actuelle, nous appuyons Halifax et Saint John qui sont de très gros ports, dotés d'un nombre considérable d'aides à la navigation. Nous ne pensons tout simplement pas que ce soit raisonnable.
M. MacAvoy: Pour compléter ce que vient de dire mon collègue, le document de discussion original qui nous a été remis en octobre définissait ce qu'englobaient les aides à la navigation, et il y avait trois sous-catégories. Il y avait les aides de longue portée, les aides de courte portée et les services de communications et du trafic maritimes.
Dans la baie des Chaleurs, il n'y a pas de service du trafic maritime et il n'y a pas non plus de service de communications maritimes. Il y a les aides de courte portée dont on a déjà parlé. La seule aide de longue portée est le LORAN-C, à la limite des 200 milles, qu'on partage avec tout navire qui pénètre dans les eaux canadiennes, quel que soit le port dans lequel il veut se rendre.
Par conséquent, si cela était retiré et si l'on ne payait que pour ce que l'on consomme, côté trafic maritime, il n'y aurait rien. Côté aides de longue portée, c'est très limité. Sur le plan coûts, donc, il s'agirait de quelques cents seulement, par opposition à 18c. la tonne.
M. Culbert: L'autre question qui m'occupe est que le comité ici réuni ne peut pas prendre de décision. Il ne peut que fournir conseils, suggestions et(ou) recommandations.
Si, en dépit des recommandations que le comité pourrait faire par suite de son étude, le ministère ou le gouvernement estime qu'il doit aller de l'avant avec la répartition de 20 millions de dollars prévue pour cette année, auriez-vous des recommandations ou des conseils à donner sur la façon dont cela devra être fait?
Je devrais peut-être préciser un peu ma pensée. Vous devez savoir qu'une partie de la recommandation sera qu'on entreprenne une étude socio-économique exhaustive. Les critères précisent que c'est la première fois que le Canada impose des tarifs du genre, alors il faudra sans doute prévoir certains rajustements après la première année pour s'assurer que le système est juste et équitable.
Auriez-vous des conseils ou des suggestions à nous donner à cet égard?
M. McGurk: Il est louable que la Garde côtière envisage la réalisation d'une étude socio-économique. Ce que nous disons, c'est que nous aurions espéré qu'une telle étude soit effectuée avant l'imposition de quelque redevance que ce soit.
En ce qui concerne notre région en particulier, il serait bon cette fois-ci que la Garde côtière envoie des groupes de recherche dans notre région pour s'assurer qu'ils la comprennent, qu'ils en comprennent la dynamique et qu'ensuite, au niveau plus macro, ils comprennent la dynamique à l'intérieur des provinces, puis la dynamique du pays. Cela est essentiel avant qu'ils n'envisagent d'autres changements.
Je ne pense pas que la Garde côtière comprenne bien sa clientèle. J'espère qu'elle la comprendra mieux grâce à ces études.
M. Culbert: Au sujet de cette même question, et pour donner suite à ce qu'a indiqué M. Arseneault dans ses questions - auxquelles vous avez répondu que vous vous êtes rendus à Saint John et Halifax - depuis que tout ce scénario s'est dessiné, c'est-à-dire depuis environ un an, y a-t-il eu des visites aux ports de Dalhousie et de Belledune ou en tout cas dans la région, pour des réunions ou pour une observation directe de la situation?
M. McGurk: À ma connaissance, aucun des participants aux études d'IBI ou de Mariport ne s'est rendu dans notre région. Que je sache, il n'y a jamais eu, dans l'un ou l'autre de ces deux ports, d'audiences ou de visite de responsables de la Garde côtière. Je me trompe peut-être, mais c'est le cas d'après les renseignements dont je dispose.
M. Culbert: Y a-t-il eu quelque contact que ce soit pendant toute la durée de cette étude?
M. McGurk: Les contacts ont été établis par nous, car nous tenions à être inclus dans le processus. Si nous n'avions pas insisté et poussé, nous n'aurions été ni entendus, ni inclus.
M. Culbert: Merci beaucoup, messieurs, pour votre excellent exposé. Je l'ai apprécié.
Le président: Merci, monsieur Culbert.
Monsieur Verran.
M. Verran (South West Nova): Merci, monsieur le président.
J'aimerais, moi aussi, exprimer mes félicitations et mes remerciements. Je sais à quel point il est difficile pour des représentants municipaux de s'absenter des petites villes et municipalités. Je sais, monsieur le président, qu'ils ne se rendent en général à Ottawa que lorsque les résidents de leurs localités sont vraiment très inquiets.
Je sais par ailleurs que vous ne fonctionnez pas à l'intérieur d'un budget fédéral ou provincial. Vous avez un budget de petite ville ou de petite municipalité et je suis sensible au fait que vous ayez pris sur vous, aux côtés des centres de représentation des industries, de venir jusqu'ici.
La plupart des questions que j'avais en tête, monsieur le président, ont déjà été posées parMM. Culbert et Guy ainsi que par M. Bernier. Ceux-ci vous ont déjà interrogé au sujet du nombre de bouées, etc. J'aimerais néanmoins vous demander si vous pouvez m'expliquer cette distorsion entre vos ports et ceux des autres provinces de l'Atlantique. Cette question n'est pas claire dans mon esprit. Que voulez-vous dire lorsque vous déclarez qu'il y a une grosse distorsion? Je me rends compte que vous avez moins besoin d'aides à la navigation, mais pourriez-vous mettre cela en contexte afin que nous puissions mieux comprendre?
M. Leduc: Vous trouverez tout cela dans l'annexe 3, mais je peux brièvement parcourir cela avec vous.
Belledune a quatre feux dont deux appartiennent au port, qui en assure leur entretien. Dalhousie a 13 aides à la navigation. Cependant, quatre n'intéressent pas la navigation commerciale, et l'on parle donc en fait de neuf. Quant à Halifax, où il y a 120 aides à la navigation, il s'y trouve un service du trafic maritime. Cela est sensiblement plus coûteux. Il y a une permanence 24 heures sur 24, et cela coûte beaucoup plus cher que le maintien d'une bouée. À Saint John, encore une fois, il y a quarante et quelque aides à la navigation, et il y a également un service du trafic maritime. Comme vous pouvez le constater, la situation en matière d'aides à la navigation varie beaucoup d'un port à un autre, et c'est pourquoi nous tenons à nous faire entendre sur cet aspect de la répartition des coûts.
Comme nous le disons dans notre mémoire, lorsque quelqu'un soulève la question du déglaçag - et il y a certainement de la glace dans notre région - on dira qu'on n'acceptera que ce qui est juste, mais il faudra bien qu'on accepte quelque chose. Dans ce cas-ci, nous tenons à n'accepter que très peu, voire rien du tout, car nous n'avons que très peu, voire pas du tout d'aides à la navigation.
M. Verran: Merci.
Monsieur le président, je suis quelque peu troublé, car il semble que cela revient sans cesse, dans la bouche des différentes personnes qui comparaissent devant le comité. Il semble qu'il y ait des écarts importants entre le compte de la Garde côtière et le compte réel en ce qui concerne les bouées et les autres aides à la navigation qui existent bel et bien. La différence n'est pas juste d'un ou de deux éléments. Dans ce cas-ci, la différence est de l'ordre de 16 ou 14.
Je n'ai que deux petites questions, et pourra y répondre celui d'entre vous qui le désire. Avec qui traitez-vous à Halifax? Qui vous a demandé ou vous a dit de vous rendre à Halifax le lendemain de votre appel téléphonique au lieu d'aller à Saint John, la veille, il me semble? Vous ne savez pas qui au bureau est à l'origine de cela?
M. Leduc: Je laisserai M. Coulombe répondre à cette question.
Notre groupe de travail a été formé... il me semble... aux environs du 26 mars. Nous nous sommes mobilisés très rapidement en réaction à la proposition initiale. Jusqu'à ce moment-là nous n'avions été ni contactés ni consultés par la Garde côtière, ni par un quelconque groupe de travail ou autre à cet égard. Depuis environ une semaine, suite à une importante correspondance et à beaucoup de communications, nous avons été invités à la réunion de vendredi dernier, mais l'invitation n'est venue que le mercredi et il nous a fallu cavaler pour nous organiser. C'était la première fois qu'on reconnaissait officiellement qu'il y avait quelqu'un dans le Nord qui avait un port.
M. Coulombe a communiqué avec eux au sujet d'autres questions. Je lui cède la parole.
M. Coulombe: Pour répondre de façon plus précise à votre question, j'ai téléphoné au bureau de M. Thomas. Lorsqu'on a su par le bureau à Halifax que ces réunions avaient lieu, on a voulu y aller. Ils ont dit qu'il fallait appeler le bureau de M. Thomas. C'est donc ce que j'ai fait et j'ai parlé avec quelqu'un là-bas qui m'a dit que nous n'étions pas sur la liste d'invités.
M. Verran: J'imagine que ce n'est que grâce à l'initiative des gens de l'industrie et des membres intéressés des différentes communautés que vous avez pris connaissance de la réunion. M. Thomas était-il présent à la réunion de Halifax à laquelle vous avez assisté?
M. Coulombe: Oui.
M. Verran: Il était là et vous avez donc eu l'occasion de lui exposer votre point de vue.
Merci, messieurs.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, Harry.
Monsieur Byrne.
M. Byrne (Humber - Sainte-Barbe - Baie verte): J'aimerais moi aussi vous remercier tous d'avoir pris le temps de venir pour discuter avec nous de ces questions, qui sont si importantes pour vos localités et votre région.
Brian, vous avez dit que les 20 millions de dollars que la Garde côtière se propose de ramasser pendant l'exercice financier en cours pourraient, ce qui serait préférable, être absorbés à l'intérieur du ministère lui-même, à l'intérieur de la Garde côtière. La Garde côtière vous a-t-elle mis au courant de ses propres propositions en matière de réduction de coûts internes... en fait, il ne faudrait pas parler de propositions, mais de mesures?
M. McGurk: Il y a eu quelques indications, mais celles-ci ne sont pas très fondées, ni très bien comprises par notre groupe ni par d'autres, d'après ce que j'en sais.
M. Byrne: Les groupes industriels des deux ports ont-ils été inclus dans ces réunions à Halifax? Il me semble qu'il y a eu certaines difficultés et que les municipalités elles-mêmes n'étaient pas les bienvenues, mais les compagnies ont-elles participé?
M. McGurk: En bref, oui, mais le processus était quelque peu maladroit.
Il nous a fallu faire le nécessaire et pousser pour être là et, après des efforts très déterminés, nous avons réussi. Il nous a cependant fallu assister à toutes les réunions, car les questions changeaient d'une réunion à une autre, ou plutôt ce sur quoi on pensait s'être entendu à une réunion ne se trouvait plus refléter dans ce qui venait par la suite. Il nous a fallu être tenaces pour veiller à ce que chaque fois qu'il y avait une réunion, on l'apprenne et on trouve le moyen d'y être ou d'y envoyer un représentant capable de défendre notre position.
Ce fut, comme je l'ai déjà dit, un processus quelque peu difficile et désagréable.
M. Byrne: J'aurais une dernière question à vous poser. Des témoins qui vous ont précédés nous ont dit qu'ils n'aimaient pas les propositions fondées sur la formule tonnage-distance, qu'ils n'appréciaient pas beaucoup les propositions tonnage et qu'une formule fondée sur la distance serait plus appropriée. Vous avez quant à vous dit que cela devrait être fonction du nombre des aides à la navigation. Pensez-vous que cela serait accueilli favorablement par l'ensemble de la province du Nouveau-Brunswick?
M. McGurk: Je ne suis pas certain que nous puissions nous prononcer au nom de la province du Nouveau-Brunswick, étant donné que nous représentons la région de la baie des Chaleurs. Il me semble que nous devrions revenir à l'essentiel de ce qui nous a été soumis: il s'agit de frais pour les aides à la navigation et nous devrions payer en fonction des aides aux services de navigation que nous utilisons.
Le problème que nous avons avec les milles c'est que la distance retenue est un chiffre arbitraire correspondant à la distance à parcourir pour sortir des eaux canadiennes. Cela n'a rien à voir avec le niveau véritable de services reçus en matière d'aides à la navigation. Un mille n'est pas une mesure appropriée à moins de vouloir véritablement mesurer les milles.
Un cas très parlant est celui de Belledune, pour qui on a dit qu'il fallait 69 milles pour sortir des eaux canadiennes. Or, en fait, vous quittez le mouillage au port de Belledune et un mille et demi plus loin vous vous retrouvez en pleine mer libre. C'est là le vrai problème en ce qui concerne la distance. À moins que quelqu'un veuille aller mesurer les milles sur lesquels vous utilisez le service, alors la distance n'est pas la solution. Nous devrions nous appuyer sur le nombre d'aides à la navigation.
M. Byrne: Merci.
Le président: Merci, monsieur Byrne.
M. Arseneault, qui sait que vous avez des ports et qui a tenu à ce que vous soyez invités à ces audiences, aimerait poser la dernière question. Nous allons boucler la séance avec sa question.
M. Arseneault: Monsieur le président, je tiens tout simplement à dire que j'espère que le comité ne passera pas à côté de la question qui se pose ici. Je ne pense pas que nous voulions donner l'impression que le commissaire Thomas est un mauvais type. C'est le processus qui a été suivi qui n'est pas bon. Chaque fois qu'on a communiqué avec M. Thomas il a été très coopératif, mais le processus lui-même a été faible.
Les points qui ont été soulignés ici aujourd'hui sont les points que les intervenants ont soulignés dans leur exposé: il s'agit de frais pour les aides à la navigation et ces frais devraient donc être directement liés aux aides à la navigation en question. L'autre aspect, ce sont les preuves qu'ils fournissent. Regardez les aides à la navigation et prenez le cas d'un port qui va devoir payer 300 000$ au titre d'aides à la navigation mais qui ne dispose en fait que de quatre ou cinq feux: cela amène à s'interroger sur les autres qui ont cinq, six ou dix fois ce nombre de feux mais qui paient le même prix. L'autre aspect est l'incidence socio-économique sur la région.
J'espère que les membres du comité réfléchiront bien à leurs recommandations. Je suis pour ma part très préoccupé par ce que j'ai entendu ici ce matin. Nous avons entendu des propos très directs que les députés prendront, je l'espère, très à coeur. Merci.
Le président: Merci, monsieur Arseneault, et merci aux témoins d'être venus ce matin et de nous avoir fait leur présentation.
Nous allons maintenant entendre la Commission de port de Thunder Bay et la Seaway Bulk Carriers de Winnipeg.
Monsieur Paul Kennedy, est-ce vous le présentateur? Je vous demanderais de nous présenter vos collègues, après quoi nous vous écouterons.
M. S. Paul Kennedy (directeur de la commercialisation et des communications, Commission de port de Thunder Bay): Oui, monsieur.
Merci beaucoup, monsieur McGuire, et merci à tous les autres membres du comité. M'accompagne aujourd'hui Paul Earl. Paul est consultant pour le secteur du grain à Winnipeg et travaille pour la Western Canadian Wheat Growers, même s'il ne les représente pas ici aujourd'hui. Bruce Hayles est quant à lui vice-président de la Seaway Bulk Carriers, un important exploitant de navires transporteurs de grain sur les Grands lacs. Moi, je suis Paul Kennedy, de la Commission de port de Thunder Bay.
Nous allons chacun faire une partie de la présentation. Nous allons commencer avec M. Earl, qui va décrire au comité une étude d'envergure que nous avons réalisée relativement à la compétitivité des expéditions de grain empruntant la voie maritime. Nous pensons que la redevance que vous êtes en train d'examiner se rapporte à l'étude que nous avons effectuée. Sur ce, je cède la parole à M. Earl.
M. Paul Earl (directeur de politiques, Western Wheat Growers Association; gestionnaire de projet, Seaway Competitiveness Study): Merci, monsieur le président. Je vais commencer par vous faire un bref survol de l'historique de l'étude, du rôle que j'y ai joué et du rôle qui me revient ici aujourd'hui.
L'étude a été commandée par un groupe très diversifié d'intervenants du gouvernement et de l'industrie qui ont tous un intérêt considérable dans le maintien de la compétitivité et dans la survie du circuit de l'Est pour le transport du grain. Ces organisations ont été appelées les investisseurs dans le cadre de notre étude, c'est-à-dire les investisseurs dans l'étude, et c'est cette expression que je vais employer. Le groupe voulait que soit réalisée une étude exhaustive et tenait à ce que soient examinés tous les aspects du mouvement du grain vers l'Est et de la compétitivité de l'utilisation de la Voie maritime.
J'ai été retenu par l'Institut international du développement durable en tant que gestionnaire de projet pour l'étude et chargé de choisir les experts-conseils techniques qui seraient responsables du travail analytique et d'assurer la liaison entre les experts-conseils et les investisseurs. Pour expliquer ma relation avec l'Institut international du développement durable, je préciserai que mes antécédents sont dans le secteur des céréales, à l'intérieur duquel j'oeuvre depuis de nombreuses années. C'est à cette expérience que voulaient accéder les investisseurs dans l'étude.
Les experts-conseils qui ont en fait effectué le travail technique et rédigé l'étude elle-même étaient John Heads et Art Wilson, de l'University of Manitoba Transport Institute, et Dave Hackston et Richard Lake, du Groupe de la recherche et du trafic ici à Ottawa. Toutes ces personnes sont des professionnels très respectés dans les domaines des transports et de l'agriculture. Étant donné l'envergure des groupes qui ont financé l'étude, ils ont eux aussi fait appel à une vaste gamme d'experts. J'ai pu assurer une certaine liaison entre ces professionnels et les investisseurs.
La quasi-totalité des organisations qui ont financé l'étude, c'est-à-dire des investisseurs, étaient tout à fait prêts à participer à ma comparution ici et à ma présentation de certains des résultats clés. M. Kennedy vous a fourni le texte du mémoire que nous allons suivre et qui contient les exposés qui seront faits par moi-même, M. Hayles et M. Kennedy.
Je tiens à ce qu'il soit très clair que mon rôle est de vous présenter les conclusions techniques de ces études. Diverses autres organisations ont déjà comparu devant vous ou bien vont le faire, pour faire ressortir diverses questions particulières. Je tiens également à souligner que tous ces groupes ont une préoccupation commune: ils seront tous touchés si les politiques gouvernementales ont une incidence négative sur la compétitivité de ce parcours oriental. Je vais insister sur certains des éléments clés de l'étude qui concernent précisément la compétitivité de ce routage par rapport à d'autres.
Suite à ces mots d'introduction, je vais maintenant revenir au mémoire que vous avez devant vous. Je vais vous en présenter la première partie.
Cette étude de 1996 intitulée Future Changes in Eastbound Grain Traffic, a été réalisée, comme je l'ai dit tout à l'heure, par l'University of Manitoba Transport Institute pour le compte des organisations suivantes, qui sont toutes très intéressées par la viabilité future de ce trajet oriental pour les exportations.
Les investisseurs dans l'étude sont énumérés à la page 1: l'Ontario Wheat Producers' Marketing Board, la Commission de port de Thunder Bay, la ville de Thunder Bay, l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent, la Lakehead Terminal Elevators' Association, les Élévateurs de Trois-Rivières, le ministère de la Voirie et du Transport du Manitoba, le ministère du Transport du Québec, l'Association de producteurs de maïs en Ontario, le ministère des Transports de l'Ontario, le port de Trois-Rivières, la Société du port de Montréal, la Société du Port de Québec, la Seaway Bulk Carriers, l'Association des armateurs canadiens et le Lakehead Port Council. Comme vous pouvez le constater, une vaste gamme de groupes s'intéressent à la question.
L'étude fut entreprise en vue de trouver une réponse à la seule question de savoir si le transport du grain à destination de l'Est en empruntant la Voie maritime peut être compétitif dans l'environnement post-LTGO - c'est-à-dire Loi sur le transport du grain de l'Ouest - et post-réforme du GATT. L'étude, qui a été remise au greffier du comité, est très volumineuse et très complète, comme vous pourrez le constater. Elle fournit énormément de détails, de données descriptives et analytiques sur les installations, les coûts, les méthodologies et les marchés.
Les six derniers chapitres sont ceux qui cherchent à fournir des réponses aux préoccupations des investisseurs. Quel sera le volume probable des mouvements de grain à destination de l'Est? Quels seront les effets de la concurrence de parcours de transport de rechange au Canada et aux États-Unis? Que peuvent faire les intervenants pour améliorer la situation?
Au sujet du marché de l'Est ou du mouvement du grain vers l'Est, l'étude conclut que les exportations de grain canadien via les parcours de l'Est passeront à 6 millions de tonnes par an en 1996-1997 par rapport à une moyenne de 7,8 millions de tonnes métriques au début des années 1990. L'étude prévoit par ailleurs que cela remonte à environ 7 millions de tonnes métriques par an d'ici l'an 2005.
Il est important de souligner que ce total comprend les exportations aux États-Unis via les Grands lacs et qui se chiffrent à environ 1 million de tonnes. Ces cargos à destination des États-Unis n'empruntent pas la Voie maritime et ne font pas appel aux silos de transbordement du Saint-Laurent.
En ce qui concerne le potentiel du marché, les auteurs de l'étude concluent que même si l'on prévoit une certaine stabilité dans la circulation totale du grain des Prairies vers l'Est au cours de la décennie à venir, cette stabilité ne va pas forcément s'étendre au transport traditionnel par rail-laquier au Canada. Il y aura concurrence de la part des lignes de chemin de fer directes des Prairies à Québec. Cette tendance va aller s'accentuant. Le transport entièrement par rail jusqu'à la Nouvelle-Orléans pourrait lui aussi attirer un certain trafic.
Le comité devrait savoir que même si certains volumes de marchandises seront disponibles pour le transport par les lacs et par la Voie maritime, le développement de la concurrence signifiera que la Voie maritime devra livrer concurrence, et ce de façon très énergique d'ailleurs, pour chaque tonne de grain.
J'aimerais attirer votre attention sur le tableau qui figure à la page 12 de notre mémoire. J'aimerais prendre quelques instants pour parcourir avec vous ces chiffres, qui sont, je pense, importants.
Comme vous pourrez le constater, il y a dans ce tableau deux colonnes. Les chiffres dans la première s'appuient sur un taux de change de 74c. américains pour un dollar canadien. Ceux de la deuxième colonne correspondent à ce que l'on obtiendrait si le dollar canadien était plus fort.
Ce tableau montre les coûts du transport du grain de Rosetown à Québec, puis de Rosetown à différents endroits. Je tiens à préciser que Rosetown est une localité qui se trouve dans le centre de la Saskatchewan. Le coût total du transport du grain par chemin de fer jusqu'à Thunder Bay, puis par laquier jusqu'aux lacs, s'élève à l'heure actuelle à 55,49$ canadiens la tonne métrique.
L'autre solution habituelle pour le transport du grain est le transport direct par chemin de fer: vous chargez le grain dans un wagon à Rosetown et vous le transportez par train jusqu'à Québec. Cela vous coûtera 54,51$ canadiens la tonne.
Si le grain devait être transporté par chemin de fer jusqu'à Thunder Bay pour y être nettoyé et rechargé dans des wagons de train pour ensuite être acheminé jusqu'à Québec, le coût s'élèverait alors à 64,35$ la tonne. Le coût du transport direct par train jusqu'à Halifax, sans arrêt à Thunder Bay, est de 63,34$. Les parcours suivants passent par les États-Unis. Si le grain va de la Saskatchewan à Baltimore, dans le Maryland, entièrement par rail, le coût s'élève à environ 57,71$ avec le taux de change actuel, mais si le dollar canadien remontait, ce coût baisserait à près de 52$.
Le parcours le plus compétitif, et c'est sans doute celui qui inquiète le plus les gens dans les Prairies, est celui qui part des Prairies et qui passe par la Nouvelle-Orléans. Aujourd'hui, le transport entièrement par rail coûte 58,49$, mais avec un dollar plus fort, il passerait à 52,43$. Si une barge est empruntée pour descendre le Mississipi, les prix passent alors à 55,01$ et à 49,52$.
Les deux dernières colonnes documentent quant à elles le coût du transport depuis la tête des lacs au Canada et les États-Unis. Le parcours Rosetown-Thunder Bay coûte 35$. Le parcours Rosetown à Duluth, dans le Minnesota, s'élève aujourd'hui à 39$ et passerait à 37,50$ avec un dollar canadien plus fort.
Les chiffres les plus importants dans ce tableau - et je m'excuse d'avoir pris autant de temps pour les passer tous en revue, mais ce tableau est extrêmement important - se trouvent à la deuxième ligne, celle correspondant au transport direct entièrement par rail jusqu'à Québec qui, comme vous pouvez le constater, est déjà légèrement moins coûteux que le transport par rail et par laquier.
Le transport entièrement par rail en passant par la Nouvelle-Orléans n'est pas compétitif avec le taux de change actuel, mais il le serait, et en fait le coût serait légèrement inférieur à celui correspondant au mouvement traditionnel, si le dollar canadien remontait. Bien sûr, pour le rail et pour le transport par barge, les deux chiffres donnés sont légèrement inférieurs au coût actuel, étant donné la valeur du dollar canadien.
Les auteurs de l'étude font ensuite plusieurs recommandations quant à des mesures que peuvent prendre les intervenants ou les investisseurs, soit les organisations situées tout au long de la voie maritime, pour amener des améliorations sur le plan efficience. Les recommandations soulignent qu'il s'agit d'une question qui exige une certaine coopération et que tous les segments du mouvement du grain doivent collaborer en vue de la réalisation de ces améliorations.
Les différents segments sont énumérés à la page 3. Il s'agit: des exploitations rurales des compagnies céréalières, du rail jusqu'à Thunder Bay, du rail à Thunder Bay, des terminaux de grain à Thunder Bay, des exploitants de laquiers, des administrations de la voie maritime, des exploitants de silos de transbordement, des pilotes et d'autres organisations de réglementation. Chacun d'entre eux doit consentir de petites contributions concurrentielles pour maintenir le volume d'exportations de grain via les lacs.
Les consultants ont conclu à juste titre - et le tableau le fait ressortir - que de très petites augmentations sur les plans productivité et efficience dans l'exploitation de la part de tous les participants au système assureront l'utilisation future des parcours une fois ces améliorations sur le plan efficience répercutées sur les prix.
Je pense que la conclusion la plus importante qui découle de l'étude et tout particulièrement des chiffres que je vous ai donnés est que la compétitivité de la voie maritime est extrêmement sensible à la possibilité de l'imposition de nouvelles redevances. Cela va à l'encontre de la conclusion de la Garde côtière voulant que les nouveaux droits n'aient aucune incidence.
Si vous me permettez, j'aimerais conclure ma partie de l'exposé avec un bref commentaire: je pense qu'il est très important, de votre point de vue, qu'une si vaste gamme d'intervenants dans l'industrie et dans le transport par la voie maritime ait, dans un premier temps, voulu financer une étude d'envergure de ce type et, dans un deuxième temps, ait jugé important que je vienne ici avec MM. Kennedy et Hayles vous présenter les résultats de cette étude. Je m'arrêterai là pour céder la parole à M. Kennedy.
M. Kennedy: C'est Bruce Hayles qui va maintenant prendre la relève.
M. Bruce Hayles (vice-président, Seaway Bulk Carriers): Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir ainsi donné l'occasion de venir comparaître devant le comité. Ce que nous aimerions faire c'est esquisser nos principales préoccupations - et elles sont nombreuses - relativement à ce qui a été proposé par la Garde côtière.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais vous expliquer un petit peu ce qu'est la Seaway Bulk Carriers. La Seaway Bulk Carriers a été constituée en société de personnes en 1990, dans le cadre d'une rationalisation optimiste des transports sur les Grands lacs. Il y avait trop de navires qui se faisaient tous concurrence et il devenait très difficile de survivre.
La société de personnes a réuni Algoma Central Railway, aujourd'hui devenue Algoma Central Marine, et la ULS Corporation. Vous avez entendu Marcel Rivard hier. Au départ, la flotte était composée de dix navires, des vraquiers sans gréement, appartenant à la ULS Corporation, et de six navires appartenant à l'Algoma Central Marine.
En 1994, une rationalisation plus poussée a été entreprise: l'achat de vraquiers sans gréement de CSL, Misener Shipping et James R. Richardson Pioneer Grain. Cela a porté à 20 le nombre de navires dans la flotte, et nous en comptons aujourd'hui 24. Si cela était nécessaire, nous pourrions aujourd'hui avoir accès à un autre navire.
Les opérations de la Seaway Bulk Carriers tournent autour de la commercialisation de ces 24 navires sur les Grands lacs. Nous nous occupons principalement, sur les Grands lacs, bien sûr, de grain canadien et américain empruntant la Voie maritime du Saint-Laurent, ainsi que de minerai à destination des Grands Lacs et du lac Michigan.
Pour vous donner une petite idée de ce que nous avons pu faire avec notre flotte en 1995, nous avons transporté 8,9 millions de tonnes de grain, 5,3 millions de tonnes de minerai et 300 000 tonnes d'autres marchandises, pour un total de 14,5 millions de tonnes. Nous avons, nous-mêmes et nos clients, contribué avec ces volumes 17,5 millions de dollars à l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent. Viennent s'ajouter à cela les 3,1 millions de dollars que nous avons contribués à l'association des pilotes au titre de notre part des droits de pilotage sur les Grands lacs.
Ces volumes et ces chiffres vous convaincront, je l'espère, que notre contribution à ce qui se passe sur les Grands lacs est importante. L'administration de la Voie maritime du Saint-Laurent nous a dit l'an dernier que nous avions été en 1995 son plus important transporteur sur le plan volume.
Nos flottes exigent énormément d'entretien. La Commission canadienne du blé, dont vous avez, je pense, reçu un mémoire, les usines de concassage de l'Est, qui sont les ADM de Windsor et de Hamilton, les CanAmeras, les producteurs de blé de l'Ontario, les producteurs d'aliments de bétail et les utilisateurs de graines fourragères, de l'Ontario et du Québec, les usines sidérurgiques des États-Unis et du Canada, etc., comptent toujours sur nous pour le transport de leurs produits.
Le maintien d'une flotte composée de navires battant tous pavillon canadien devient de plus en plus difficile chaque année. Les navires sont âgés d'environ 31 ans en moyenne. Le mémoire qui vous a été remis comporte un graphique sur leur longétivité. À cause de leur âge, ces navires exigent de plus en plus de travaux de réparation pour les maintenir en l'état requis par les exigences en matière d'exploitation et de sécurité. Le coût de ces travaux peut atteindre 300 000 à 500 000$ par an par navire, ce qui correspond à un investissement considérable.
Les coûts de main-d'oeuvre et de carburant montent en flèche. Depuis à peine une semaine ou dix jours, le prix du carburant a connu une augmentation telle que cela nous coûtera environ 600$ de plus par jour. En ce qui concerne les péages pour l'utilisation de la voie maritime, nous devons payer les pilotes, des frais de port et des coûts élevés d'utilisation d'élévateurs commerciaux et de manutention lorsque nous faisons escale dans un port céréalier pour faire charger le grain dans nos bateaux.
Au contraire de ce qui se passe dans un certain nombre d'autres secteurs d'activité, ces coûts ne peuvent pas être automatiquement répercutés sur le prix que paie le client, étant donné la réalité concurrentielle à laquelle nous nous trouvons confrontés et dont M. Earl vous a déjà parlé.
Les services de laquier sont exposés à une très vive concurrence. Nos clients céréaliers canadiens peuvent assurer le gros de leur transport de grain et de marchandises par la côte ouest, et c'est ce qu'ils font. Le rail continue de menacer le transport par eau avec des tarifs directs très bas, des Prairies jusqu'à l'élévateur de Bunge, au Québec, comme l'ont fait ressortir les chiffres fournis par M. Earl.
Les villes et les ports américains font eux aussi partie du tableau avec ces nouveaux coûts ferroviaires. Comme cela a déjà été dit, le Mississipi est un système qui a toujours constitué une menace pour nous. Lorsqu'on discute avec la Commission canadienne du blé, une fois sur deux elle nous dit que si nous insistons pour exiger des taux de fret supérieurs, elle optera pour le Mississipi.
Nous avons un bon volume d'affaires avec les compagnies céréalières américaines. Or, tout juste hier, elles sont venues me voir pour me dire qu'à leur grand regret elles feront peut-être moins appel à nous. Le taux barge est passé de 200 à 100$, coupant de moitié les tarifs que nous concurrencions. Il est impossible pour nous de réduire de moitié nos tarifs de transport marchandises. Voilà donc le genre de situations auxquelles nous nous trouvons confrontés.
L'autre grosse source de concurrence pour nous - et ce sera encore plus le cas avec le barème tarifaire proposé par la Garde côtière - ce sont les navires battant pavillon étranger. Une fois ces navires étrangers arrivés dans les Grands lacs - et ils y viennent pour acheminer des produits sidérurgiques aux usines canadiennes et américaines - ils vont chercher du grain pour le voyage retour. Il leur faut des marchandises pour le voyage retour en partance des Grands lacs.
Pour passer maintenant à ce qui nous occupe véritablement et à ce dont nous tenons à saisir le comité, si l'on revient à avril 1994, le ministre Doug Young, responsable à l'époque de la Garde côtière, avait demandé trois choses: que la Garde côtière soit plus efficiente dans la prestation de ses services; que la Garde côtière travaille avec l'industrie pour évaluer les catégories et les niveaux de services requis par l'industrie; et qu'un barème de tarifs visant le recouvrement des coûts soit élaboré avec l'industrie en vue du financement de ces services.
En mai dernier, le Comité permanent des transports avait recommandé qu'aucun programme de recouvrement des coûts ne soit mis en oeuvre tant que la Garde côtière n'avait pas clairement déterminé ses coûts de services et que la Garde côtière et les usagers n'avaient pas entrepris conjointement la réduction du nombre des aides à la navigation grâce à l'introduction de nouvelles techniques et de nouveau matériel.
Nous croyons qu'aucune de ces recommandations n'a été exécutée comme il se devait. Il n'y a en tout cas pas eu de discussion approfondie sur la méthode de récupération des frais pour les Grands lacs.
La première discussion à laquelle ont participé la Seaway Bulk Carriers et un nombre important des intervenants dans le secteur du commerce du grain de l'Ouest canadien fut à l'occasion d'une réunion convoquée par la Chambre de commerce maritime à Winnipeg.
Le groupe Mariport, l'un des groupes d'experts-conseils retenus par la Garde côtière, nous a présenté les différentes formules qui avaient été élaborées, nous recommandant d'en choisir une. C'était notre première introduction au système de frais d'utilisation. Il n'a pas du tout été question des répercussions possibles pour notre secteur. Personne n'y avait même réfléchi.
Peu après, nous recevions de la Garde côtière un rapport sommaire disant que l'industrie était tout à fait d'accord et qu'on allait aller de l'avant avec les différentes formules de recouvrement des coûts.
Au départ, on nous avait parlé d'un coût uniforme de 6 à 8c. la tonne pour tout le Canada, mais on nous dit maintenant que cela ne s'appliquera qu'au transport sur la côte ouest. Je ne dispose pas du chiffre exact, mais avec le volume concerné et le barème tarifaire en place pour l'Ouest, je doute que ce soit entre 6 et 8c. la tonne. J'ai plutôt l'impression que le coût sera de 5c. la tonne.
Bien sûr, les pourcentages visés en matière de revenu ont changé pour la côte ouest comparativement aux autres régions. Pour ce qui est des 20 millions de dollars, aux dernières nouvelles - car il semble que la Garde côtière puisse faire cela de temps en temps - la Garde côtière voulait 28,1 millions de dollars, ce qui a donné lieu à notre estimation de 4,48$ par tonneau de jauge brute.
On nous a dit que les propriétaires de navires battant pavillon canadien se verront imposer des droits établis en fonction de la jauge brute de leurs navires. Il s'agit ici des navires qui sont enregistrés en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada. Que ces navires sortent au début de la saison ou qu'il nous faille les rentrer au milieu d'une saison, nous nous ferons imposer ces frais de 4,48$ par tonneau de jauge brute.
À la page 15 de notre mémoire, je traite du volume d'affaires potentiel qui pourrait nous revenir. Je pars du principe que les frais de la Garde côtière nous seront imposés à partir du 1er juin. Nous indiquons les exigences prévues pour l'ensemble de notre flotte étant donné le tonnage qu'il nous faudra transporter. À droite, nous expliquons qu'avec 4,48$ par tonneau de jauge brute pour l'ensemble de notre flotte, c'est-à-dire 24 navires, nous devrons verser à la Garde côtière 1,932 million de dollars.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, cela pourrait diminuer quelque peu à cause de la situation aux États-Unis et du problème posé par la concurrence des barges, mais nous avons calculé qu'avec le tonnage qu'il nous reste à transporter - et nos clients nous ont tous dit qu'ils nous aideront cette année, et ils se demandent d'ailleurs depuis quelque temps à combien le coût va s'élever - il y aura un coût additionnel pour nos clients de 21,7c. par tonne métrique de marchandises transportées par nos soins.
Les clients qui se sont lancés là-dedans avec nous en novembre 1995 ont, dans certains cas, inscrit nos taux de fret dans leurs livres et ils doivent maintenant se débrouiller pour trouver ces 21,7¢. Vient s'ajouter à cela l'augmentation du prix du carburant, dont ils doivent tous assumer une part. Leurs coûts additionnels vont ainsi s'élever à environ 30c. la tonne par suite de tout cela.
J'ai également dit que nous avons appris quelle sera la formule. Sur la base de ces 4,48$, cela passera en 1997 à 6,72$ le tonneau de jauge brute, car ils voudront ramasser 40 millions de dollars. Si nous transportons 14 millions de tonnes, cela correspondra à environ 20,5c. Cependant, si en 1997 nous ne pouvons pas transporter 14,5 millions de tonnes mais seulement 10, cela donnera 29c. par tonne de marchandises transportées.
En 1999, lorsqu'il leur faudra ramasser 60 millions de dollars, si nous ne transportons que 10 millions de tonnes, cela nous coûtera 43,5c. la tonne. Ce sont là d'importantes augmentations qui ne vont pas nous aider à être compétitifs sur les Grands lacs.
Notre contribution pour chaque année a été déclarée sans tenir compte du volume de certaines années et du nombre de journées-navires. Nous avons un problème avec cela. Ce ne sont pas tous nos navires qui sont sortis en permanence. Or, bon an mal an, il semble que l'on va nous demander de contribuer le même pourcentage. Évidemment, les mauvaises années, ce sera catastrophique pour les propriétaires de navires qui devront imposer une augmentation considérable au coût facturé à leurs clients.
Nous nous retrouverons dans une situation où la concurrence sera encore plus grande étant donné que les navires étrangers desservant les ports américains ne se verront pas imposer ces frais de service. Ils pourront se rendre dans ces ports américains, repartir tout de suite à l'étranger et ne rien contribuer à ces frais de service de la Garde côtière.
Cela aura une incidence qu'il nous est encore impossible d'évaluer pleinement. La concurrence en provenance de la côte ouest, du Mississipi, des navires étrangers et du rail aura une très forte incidence sur nos volumes. Au fur et à mesure que les volumes baisseront, le coût pour les expéditeurs captifs augmentera, ce qui aura une incidence sur les activités d'affréteurs comme Dofasco et Stelco de Hamilton. Ces gens-là ont besoin du Labrador. C'est adapté à leur situation. Ils pourraient très bien se retrouver tout seuls là-haut.
En conclusion, nous tenons à vous rappeler l'une des lignes directrices originales du Conseil du Trésor. Avant d'imposer de frais, les ministères doivent réaliser une évaluation de l'incidence des changements, pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'effets imprévus, y compris sur le plan concurrence internationale et nationale. Nous sommes convaincus que cette ligne directrice n'a pas été suivie dans ce cas-ci. Il y a manifestement des iniquités dans l'application des frais de services maritimes proposés au transport de marchandises sur les Grands lacs, ce qui est notre activité.
Il semble qu'on nous place dans une situation où nous sommes victimes de discrimination. Selon nous, les expéditeurs opteront encore plus qu'ils ne le font à l'heure actuelle pour des solutions de rechange.
Nous demandons que l'application des barèmes tarifaires soit suspendue en attendant la réalisation d'une étude d'impact plus approfondie. Cette étude devra être effectuée par un groupe très responsable et hautement qualifié, qui devra en discuter pleinement avec les intervenants à qui l'on a demandé de contribuer le plus. Merci beaucoup.
M. Kennedy: Je vais poursuivre en vous parlant du facteur compétitivité pour Thunder Bay, où le port est un important moteur économique pour la localité. Notre tableau à la page 16 montre la contribution faite par les mouvements de marchandises dans le port à l'économie de Thunder Bay et à celle du pays tout entier, par le biais de taxes, etc. J'ose espérer que vous prendrez quelques instants pour l'examiner au fil de mes explications.
Le secteur céréalier à Thunder Bay a connu une réduction sensible au cours des dernières années. Cinq terminaux à grain ont fermé depuis 1988. J'ajouterais qu'une autre fermeture encore a été annoncée cette semaine. La raison donnée: encore une fois, des facteurs liés à la concurrence et mesurés en cents par tonne et non pas en$.
Je vous demanderais de ne pas oublier que même si les frais que vous vous proposez d'imposer ne semblent pas très élevés, ils sont tout à fait dans la moyenne des frais supplémentaires qui peuvent amener des conséquences importantes imprévues.
Vous trouverez à la page 17 de notre mémoire une lettre du syndicat des manutentionnaires céréaliers. Cette lettre explique l'incidence sur l'emploi sur le front de mer de la détérioration de la compétitivité du parcours transport passant par Thunder Bay et la voie maritime. Encore une fois, les frais dont nous discutons aujourd'hui auront une incidence négative sur cette compétitivité.
En plus des conséquences humaines importantes et de la perte d'infrastructures, il y aura une perte considérable d'impôts pour la ville par suite des fermetures d'élévateurs, y compris celle annoncée cette semaine: ces pertes s'élèveront à environ 6,5 millions de dollars. Près de 3,5 millions de tonnes de céréales qui passaient autrefois par les terminaux à Thunder Bay sont maintenant transportés par chemin de fer. Cela est attribuable à la compétitivité accrue du rail.
J'ai inclus, à la page 18, un article de la presse agricole citant la Commission canadienne du blé, dont les porte-parole se seraient dit favorables à certaines des conclusions dont M. Earl vous a parlé tout à l'heure. Cela cadre avec les résultats de notre étude et avec ce que les clients de M. Hayles lui disent.
Nous commençons, petit à petit, à mieux comprendre notre situation concurrentielle. Vous-mêmes et la Garde côtière devez faire la même chose. Il est impératif que ces droits ne viennent pas davantage défavoriser le transport du grain par les lacs. Or, si la structure prévue demeure inchangée, c'est ce qui en résultera. Pour des raisons qui nous échappent, nonobstant les conseils fréquents qui lui ont été donnés dans le sens contraire, la Garde côtière a choisi d'ignorer cette réalité.
Permettez-moi maintenant de vous exposer quelques scénarios qui pourraient avoir une incidence très néfaste sur Thunder Bay. Je me demande comment les défenseurs de ces droits réagiraient si je revenais ici en septembre ou en octobre pour leur dire que les exportations de grain... Il n'est pas nécessaire d'être un génie. Quiconque sait ce qu'il fait comprendra qu'il ne peut pas mettre des pois sur un bateau à Duluth - un bateau océanique en partance pour l'Europe du Nord - et éviter ces droits. Le chemin de fer va à Duluth. Les terminaux sont à Duluth. La même infrastructure y existe.
Iraient-ils à un autre port pour 15c. ou 10c.? Le seuil c'est à peu près un quart de cent le boisseau. À partir de là, les choses commencent à bouger. Il y a 36 boisseaux dans une tonne, et cela équivaut à 9c. Il ne faut pas grand-chose pour que cela commence à se faire sentir.
Si vous voulez transporter du grain aux États-Unis et que vous passez en général par Thunder Bay, vous pourrez passer par Duluth. Vous pouvez aller de Duluth à Toledo, dans l'Ohio, avec un navire battant pavillon américain. Un navire américain ne se verra pas imposer de droits établis en fonction de la jauge brute.
Vous accordez un coup de fouet concurrentiel aux navires américains par opposition aux navires canadiens. Je ne pense pas que c'était là l'objet de ces droits. Or, tout expéditeur intelligent va comprendre. Je ne suis pas affréteur, mais j'ai tout compris.
De toute façon, les lacs perdront. Le Canada perdra sur le plan emplois, et Thunder Bay perdra aussi.
Chacun des scénarios que je viens de vous exposer sera dressé par des affréteurs entreprenants. Il faudrait être vraiment naïf pour penser qu'ils ne vont pas trouver ces solutions de rechange. Or, ce semble être la position de la Garde côtière.
En conclusion, nous aimerions dire que nous trouvons les frais proposés injustes. Ces frais frapperont plus durement la compétitivité des Grands lacs par rapport aux autres ports et modes. M. Hayles vous en a expliqué quelques-unes des raisons. L'imposition de ces frais amènera les gens à opter pour des solutions qui leur permettront de les contourner, et le transport se fera autrement.
Nous espérons que nos propos amèneront le comité et, par la suite, la Garde côtière, à la conclusion irrévocable que l'application de ces frais aurait une incidence négative importante sur le plan concurrence.
Nous pensons qu'au mieux, le travail effectué par la Garde côtière lui disant qu'il n'y aurait aucune incidence sur la concurrence, a été fait par des incompétents. Je me demande parfois si cela ne frise pas carrément la malveillance.
En conséquence, les frais ne doivent pas être imposés cette année. Ces frais doivent être examinés par des analystes compétents en mesure de juger de leur effet sur la voie maritime et sur d'autres itinéraires. Je parle tout particulièrement de la voie maritime car c'est ce que nous représentons, mais il nous faut avoir une vision globale de la façon dont ces frais fonctionneront.
Cette analyse devra examiner la façon dont les droits imposés fonctionneront aux côtés d'autres frais à l'intérieur de la dynamique concurrentielle canadienne pour les différents routages. On ne peut pas les examiner isolément du reste du tableau.
Enfin, si des frais doivent être imposés, ils ne devraient l'être qu'une fois que la Garde côtière a modifié ses propres services conformément aux exigences minimales des armateurs canadiens.
Merci beaucoup. Nous nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Kennedy.
Avez-vous une question à poser, monsieur Bernier?
[Français]
M. Bernier: J'ai beaucoup apprécié le mémoire présenté par les témoins. Je dois dire que je suis fortement impressionné par tout le sérieux et le temps que les gens ont mis à la préparation du mémoire. Je pense à l'exposé des trois témoins, mais principalement au travail de recherche fait avec l'aide du premier consultant. Je dois avouer que pour moi, la question du transport des grains, c'est très nouveau. Ma circonscription est Gaspé. Je sais qu'il y a des barges qui se rendent jusqu'à Sept-Îles. Trois-Rivières est un peu loin de chez moi.
J'aurais aimé apprendre comment cela était exploité, mais l'étude de ce matin nous révèle que c'est toute une page d'histoire du transport du blé canadien qui risque d'être emportée par un coup de vent.
On s'aperçoit que notre économie est très fragile. Je pense qu'il faut y penser à deux fois avant de prendre une décision à la légère. Est-ce que l'économie qu'on tente de réaliser ou la facture que l'on tente de transférer à l'industrie en vaut la peine?
Dans tout cela, je remarque que les témoins ont essayé de demander à la Garde côtière de faire son propre ménage, sa propre rationalisation. Je crois comprendre que les témoins ont déjà, de leur côté, commencé à rationaliser leurs opérations. On ne peut que ressentir de l'empathie à leur égard. Vous pouvez être certains que je serai très vigilant lors de la rédaction du rapport, et peut-être aussi très agressif auprès du ministre des Pêches et des Océans pour m'assurer qu'il entende votre voix.
Si je vous ai bien compris, vous demandez qu'il y ait un moratoire. Pour le moment, aucune mesure transitoire ne vous intéresse. Vous voulez un moratoire jusqu'à ce que l'étude des coûts réels de la Garde côtière soit faite et vous voulez que les résultats de l'étude d'impact de ces coûts sur vos différentes industries soient connus avant qu'on impose quelque taux que ce soit.
Est-ce bien ce que je dois comprendre? Je souhaiterais que vous le disiez au micro parce que les signes de tête ne sont pas consignés au compte rendu de la réunion.
[Traduction]
M. Kennedy: Oui, c'est tout à fait cela que nous demandons. D'autre part, nous demandons que le service soit examiné et rationalisé pour le ramener au strict minimum qu'exigent les armateurs canadiens, suite à des consultations permanentes avec la Garde côtière. Il y a deux choses: d'abord un moratoire, puis ne rien faire tant que les services n'ont pas été revus et corrigés comme il se doit.
Bruce, auriez-vous quelque chose à ajouter?
M. Hayles: Non, je suis tout à fait en accord avec ce que Paul vient de dire en réponse à votre question. Je pense que d'autres propriétaires de navire et intervenants vous ont dit la même chose. En tout cas, ce qui a été fait à ce jour ne cadre en rien avec ce qu'on nous a dit il y a un an ou un an et demi. Cette consultation n'a jamais eu lieu.
On vous a dit hier qu'il y a des aides à la navigation montées à bord des navires. On consacre énormément d'argent à ces aides à la navigation aériennes. Je pense que cela a dû coûter environ 1,5 million de dollars à CSL. Je sais qu'Algoma a beaucoup fait sur ce plan également. Quant à ULS, cette compagnie va faire beaucoup de travail de nouveau cette année.
Ces aides seront en place, mais la Garde côtière sait que cela allait venir et, encore une fois, il n'y a pas eu de consultation. Il n'y en tout cas pas eu de consultation sur ce qui pourrait arriver du côté activité de ces 24 navires, qui sont gérés par notre groupe de commercialisation.
M. Kennedy: Permettez-moi de vous donner un exemple de ce dont Bruce parle. Nous avons une station de radio de la Garde côtière à Thunder Bay. Cette station émet des rapports météo 24 heures par jour moyennant un certain coût - je ne le connais pas, mais je sais qu'il y en a un - pendant les mois de janvier, février et mars. Je peux vous assurer que l'eau à Thunder Bay est un peu épaisse pour la navigation pendant les mois de janvier, février et mars.
Tant que l'on n'aura pas supprimé ces coûts injustifiables des opérations de la Garde côtière, personne ne sera à l'aise avec l'idée de subventionner ces dépenses. Cela ne tient tout simplement pas debout. Ils sont loin d'avoir fait assez jusqu'ici pour supprimer ces dépenses qui sont presque insensées. Je pense vraiment, pour ma part, qu'émettre des bulletins météo pour le lac Supérieur au beau milieu de la nuit en plein mois de janvier est une dépense insensée.
C'est là un seul exemple du genre de choses qu'il faudrait selon nous faire. Paul a peut-être quelque chose à ajouter à cela.
Le président: De quoi parlent-ils en janvier? Qu'est-ce qu'ils disent?
M. Kennedy: Ils parlent tout simplement des conditions météorologiques. Il fait venteux et froid en plein milieu du lac Supérieur en janvier.
Le président: Je me posais tout simplement la question, par curiosité.
M. Hayles: Les conditions sont excellentes pour le ski.
M. Earl: Je pensais tout simplement ajouter quelque chose en réponse à la question de M. Bernier. Je suis certain, monsieur Bernier, que vous connaissez l'importance de l'agriculture dans votre propre province. Vous êtes au courant de certaines des menaces auxquelles sont exposés les producteurs agricoles de votre province dans le contexte des négociations du GATT.
Je peux vous assurer que l'agriculture de l'Ouest canadien est elle aussi très vulnérable face aux augmentations de coûts. Nous sommes plus loin des points d'exportation que toutes les autres régions de production agricole concurrentielle dans le monde. Ces frais pèseront lourd sur le secteur agricole dans l'Ouest canadien.
Le président: Monsieur Scott.
M. Scott (Skeena): Merci, monsieur le président. J'aimerais tout d'abord remercier les témoins d'être venus nous rencontrer ici aujourd'hui. Je suis sensible au travail que vous avez consacré à votre présentation.
J'aimerais dire que votre présentation et les autres que nous avons entendues m'ont été très utiles, car nous entendons de plus en plus de personnes qui risquent d'être touchées par les propositions de la Garde côtière en matière de recouvrement des coûts, et cela m'a amené à voir les choses un peu différemment.
J'ai toujours pensé que la Garde côtière devrait mener des opérations efficaces, mais il ressort clairement des anecdotes et des récits qu'on nous fait qu'il y a de nombreux domaines dans lesquels la Garde côtière pourrait davantage rationaliser ses opérations et réduire ses coûts.
Je ne connais pas le chiffre, je ne sais pas de quel pourcentage la Garde côtière pourrait réduire ses opérations sans compromettre ses services, mais il me semble que ce doit être considérable.
On met la charrue avant les boeufs lorsqu'on demande aux gens de payer des services sans qu'on les ait définis, sans qu'on en ait déterminé le coût et sans savoir ce que les entreprises et l'industrie peuvent assurer elles-mêmes.
Il y a un terminal à grain dans ma circonscription, à Prince Rupert, le long de la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique, et je comprends donc certaines de vos préoccupations. Votre recommandation qu'une étude d'impact soit réalisée avant d'imposer quelque frais que ce soit est à mon sens excellente. C'est une chose que de très nombreux témoins n'ont cessé de nous répéter.
La question que j'aimerais vous poser est la suivante: si la Garde côtière parvenait à réduire ses coûts comme il se doit, si elle déterminait les services requis en consultation avec l'industrie, si elle n'assurait que les seuls services dont l'industrie a véritablement besoin et si cela se faisait selon une formule d'établissement de coûts juste, est-ce que vous pourriez accepter, en principe, l'idée d'un système utilisateur-payeur, ou bien demeurez-vous convaincu que...?
J'imagine qu'à long terme nous autres, députés réunis autour de cette table, devons rendre compte aux contribuables canadiens avant de rendre compte au secteur privé, à l'industrie ou à qui que ce soit d'autre. Ce sont les contribuables qui doivent être bien servis. Je me pose la question suivante: les contribuables seront-ils bien servis si, en augmentant ce que cela coûte à de nombreuses industries et entreprises canadiennes de faire affaire, nous n'allons pas en obliger certaines à déménager ou à carrément fermer, avec toutes les conséquences sur le plan de la perte de recettes fiscales et de retombées positives créées par ces entreprises que cela pourrait amener?
Je vous pose donc la question suivante: à long terme, si les coûts de la Garde côtière étaient réalistes, pourriez-vous, pour des raisons philosophiques ou d'affaires - et peut-être que c'est là la question à laquelle devrait répondre une analyse d'impact - accepter le recouvrement des coûts si l'on imposait aux utilisateurs les frais réels des services dont ils ont besoin, et ce de façon juste?
Ma question s'adresse à quiconque veut y répondre.
M. Kennedy: Je pense que jusqu'ici vous n'avez pas entendu de nombreux témoins vous dire qu'ils contestent, sur le plan philosophique, une forme ou une autre de système d'utilisateur-payeur.
Ce que nous tenons surtout à éviter c'est que cela nuise encore davantage à un routage dont la position concurrentielle est pour le moment très fragile. D'autre part, il conviendrait d'entreprendre une étude d'impact économique qui traite de questions du genre: vous ramassez 20 millions de dollars, mais vous perdez 40 millions de dollars lorsque l'industrie s'en va. Il y a également l'attrition, l'impôt et tout le reste. Votre gain net est en réalité moins 20 millions de dollars. Avez-vous réellement obtenu quoi que ce soit?
Un examen compétent et exhaustif de ces frais devrait selon nous répondre à ce genre de questions. Nous pensons que si ce travail est effectué de façon compétente cela fera peut-être ressortir, surtout pour un produit comme le grain qui emprunte un routage comme la voie maritime, que vous pourriez très bien essuyer une perte nette à la recherche d'un système de recouvrement des coûts qui, de l'avis de nous tous, n'est pas une mauvaise chose pour le Canada en cette fin des années 1990.
M. Earl: Pourrais-je ajouter une réflexion, monsieur Scott? Plusieurs choses me sont venues à l'esprit.
Premièrement, vu la circonscription que vous représentez, vous savez que lorsque la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a été abrogée et que les subventions ont été supprimées, Prince Rupert a perdu sa parité avec Vancouver. Vous savez combien ce port a fait pression pour éviter cela et vous savez que des répercussions se font sentir aujourd'hui.
En ce qui concerne votre question sur les redevances d'usager en général, aucun d'entre nous, et je pense aucune des organisations que nous représentons - certainement aucune de celles que je représenterais si je parlais ici au nom des organisations agricoles - ne s'opposerait au principe des redevances d'usager.
Je me spécialise dans les facteurs économiques du transport et je pense que les redevances d'usager dans ce domaine sont une chose extrêmement complexe et, ajouterais-je, extrêmement arbitraire. Pour prendre un exemple que tout le monde peut comprendre, l'autoroute 401 qui traverse le nord de Toronto couvre son coût environ tous les trois ans, par le biais des taxes sur l'essence, mais vous savez que dans votre région les routes ne couvrent pas leurs propres frais. Ce n'est pas pour rien qu'on les appelle les routes du roi.
Pour en revenir à la déclaration de M. Kennedy concernant la nécessité d'évaluer les conséquences des redevances pour s'assurer qu'elles n'auront pas de répercussions imprévues, notamment sur la concurrence intérieure et internationale, c'est là un problème extrêmement complexe sur le secteur des transports et qui mérite peut-être d'être étudié plus à fond qu'on ne l'a fait.
Le président: Monsieur Dromisky, l'homme qui connaît Thunder Bay.
M. Dromisky (Thunder Bay - Atikokan): Je vous remercie.
Oui, je connais très bien l'industrie du transport là-bas. En effet, c'est ma ville natale. J'ai grandi sur les rives de la Kaministiquia. Cependant, je suis très conscient, depuis deux ans et demi, plus que je ne l'ai jamais été auparavant, des problèmes qui se posent dans mon port et tout le long de la Voie maritime. Je suis très sensible à ces problèmes.
Je trouve que ce mémoire cadre bien avec les exposés que nous ont faits hier les trois grands groupes que nous avons reçus - les expéditeurs avec qui nous avons parlé. Nous avons entendu les préoccupations qui sont les leurs face aux propositions gouvernementales. J'y songe car la déclaration la plus dynamique que vous ayez faite dans tout votre rapport est celle qui dit:
- Toutes les composantes du mouvement... doivent apporter chacune leur petite contribution à la
compétitivité si le transport des céréales exportées via les Grands lacs doit se poursuivre.
Prenez les élus municipaux de Thunder Bay. Je les asticote et je les cajole, en leur disant: «Vous êtes de vrais collectionneurs d'antiquités - de silos anciens». Je suis allé à Duluth la semaine dernière et ai visité le port, et les élévateurs y sont florissants; leurs exploitants sont riches. À Thunder Bay, nous avons des silos à divers stades de dépérissement. On les démolit, ou ils sont vides, et l'industrie se meurt lentement mais sûrement.
Comme je l'ai mentionné hier, je considère sincèrement que nos politiques ne vont pas faciliter les choses au port de Thunder Bay pas plus qu'aux autres ports le long de la Voie maritime. Les subventions s'évaporent, bien que l'on subventionne à fond le camionnage. Globalement, d'une côte à l'autre, ces subventions représentent plusieurs milliards de dollars.
Je me demande réellement ce que nous sommes en train de faire. Veut-on que l'industrie du transport dans les Grands lacs dépérisse jusqu'au point où il ne restera plus qu'une petite quantité de services et où tout le reste sera transporté par chemin de fer, par CP via les États-Unis ou par CN, mais principalement par le CP? Je suis vraiment inquiet devant le manque de coopération entre toutes les parties concernées.
Toutes ces entreprises n'ont pas été, non plus, invitées à participer collectivement à une analyse des besoins. Il me semble que les recommandations de l'ancien ministre Doug Young n'ont pas été suivies, dont la plus importante voulait que la Garde côtière détermine quels sont les besoins réels, en collaboration avec les usagers de la Voie maritime. Il me paraît absolument indispensable que ce travail soit fait avant que l'on puisse prendre des décisions finales concernant la répartition des coûts.
Je suis d'accord avec votre rapport. Je suis d'accord avec vos recommandations. Je ne sais pas trop ce que vous entendez dans votre tableau de la page 16 - l'analyse d'impact économique - par «emplois indirects en dehors de la province» en 1994 et 1992. Que signifient réellement ces chiffres, 424 etc.? Parlez-vous là du Québec? Parlez-vous là de tout le système? Parlez-vous d'emplois perdus en Saskatchewan à cause de la fermeture de silos ou quelque chose du genre? Parlez-vous de tout le réseau ou bien uniquement du port de Thunder Bay?
M. Kennedy: Nous cherchons à déterminer l'impact sur les emplois dans le secteur des transports, donc les emplois ferroviaires pour l'acheminement jusqu'à Thunder Bay et les emplois sur les navires au départ de Thunder Bay, ce genre de choses.
M. Dromisky: Eh bien, monsieur le président, je veux simplement faire consigner mes recommandations en tant que député de Thunder Bay - Atikokan, et non en tant que membre de ce comité, puisque je ne suis qu'un invité ici, aujourd'hui.
Je vous remercie d'être venus et d'avoir présenté un rapport aussi étoffé.
Le président: Je vous remercie, Stan.
Monsieur Byrne, vous aviez une courte question. Nous allons très vite manquer de temps.
M. Byrne: Je me joins à mon collègue pour vous remercier de vous être joint à nous aujourd'hui. Nous apprécions toujours lorsque des gens du monde du transport et des spécialistes viennent nous faire part de leurs avis.
Je n'ai qu'une courte question. Vous dites craindre de perdre du fret au profit de Biloxi, aux États-Unis, et avoir fait une analyse de ce risque. J'ai cru comprendre que c'était l'un des...
M. Kennedy: Nous avons utilisé la Nouvelle-Orléans comme point de référence.
M. Byrne: Quel y est le taux de la taxe? Y a-t-il un barème de redevances dans les ports américains - par exemple, à la Nouvelle-Orléans - ou bien n'y a-t-il aucune redevance, c'est à dire que l'accès y est gratuit?
M. Hayles: Il n'y a pas de redevance et vous verrez également que les tarifs pratiqués à la Nouvelle-Orléans sont considérablement inférieurs à ceux de Thunder Bay, de la côte ouest et du Saint-Laurent. L'un des grands facteurs qui nous avantagent en ce moment, et qui nous permet de résister, c'est le taux de change favorable du dollar canadien.
M. Kennedy: Un autre aspect est que la voie fluviale du Mississipi est subventionnée à hauteur de 650 millions de dollars par le U.S. Army Corps of Engineers. Il y a une politique gouvernementale américaine voulant que le Mississipi soit entretenu par le U.S. Army Corps. Que cela nous plaise ou non, c'est la réalité, et c'est pourquoi les tarifs du transport par barge sur le Mississipi peuvent parfois atteindre des niveaux aussi bas.
Vous avez également les ports du sud de la Louisiane, la série de terminaux céréaliers aux alentours de la Nouvelle-Orléans. Ils voient transiter près de 55 millions de tonnes de grain par an. Avec ce genre de volume, leurs coûts unitaires tendent également à être très bas. On entend parler de tarifs ne dépassant pas la moitié de certains tarifs canadiens; effectivement, s'ils ont deux ou trois fois le volume des nôtres, c'est très possible.
M. Byrne: Un témoin nous a dit hier qu'il y a aux États-Unis une taxe de 12,5¢ par tonne. Cette dernière est contestée comme étant anticonstitutionnelle, mais il existe une redevance portuaire. Ce n'est pas...
M. Hayles: Vous parlez des droits d'entretien portuaire qui sont prélevés dans tous les ports américains. Lorsque nos vraquiers des Grands Lacs font escale dans un port américain, nous sommes assujettis à cette taxe d'entretien portuaire. L'expéditeur, le vendeur, le transporteur de céréales américaines obtient... et c'est environ 12,5 p. 100. Et oui, cette taxe fait l'objet d'un recours en justice.
M. Kennedy: Et ce n'est pas 12,5 p. 100, c'est 0,125 p. 100. C'est un huitième de 1 p. 100 de la valeur de la cargaison; il s'agit donc d'une taxe ad valorem, d'une taxe à la valeur ajoutée, et c'est un huitième de 1 p. 100.
M. Verran: Juste une dernière petite question. Selon votre analyse, quel serait le coût en pourcentage de cette taxe pour les expéditeurs canadiens, comparé aux propositions les plus récentes de la Garde côtière?
M. Kennedy: La seule façon pour nous de faire le calcul est de partir d'une cargaison de blé valant 300$ la tonne, auquel cas une taxe ad valorem de 0,125 p. 100 représente 37,5c. la tonne. Du moins si mon cerveau arithmétique fonctionne bien ce matin.
M. Verran: En tant qu'experts de ce secteur... à 17c. la tonne, étant donné le cours actuel des céréales canadiennes, combien cela représente-t-il en pourcentage, environ?
M. Kennedy: C'est un peu plus cher sur un trajet canadien.
M. Verran: Plus cher, n'est-ce pas?
M. Kennedy: Oui.
Le président: Je vous remercie infiniment d'être venus ce matin avec votre exposé si bien documenté.
M. Kennedy: Je vais laisser un exemplaire de notre étude à votre président et à votre documentaliste.
Le président: Je vous remercie.
Nous allons maintenant inviter à la table Métallurgie Noranda, la Halifax-Dartmouth Port Development Commission et la Halifax Shipping Association.
Monsieur Zier-Vogel, je vous ai déjà vu.
M. Ted Zier-Vogel (vice-président, Transports, Métallurgie Noranda Inc.): Oui, en quelque sorte. Cette fois-ci, je parlerai.
Le président: Très bien. Nous allons donc commencer par vous et demander à tout le monde de se présenter.
M. Zier-Vogel: Je suis vice-président chargé des transports chez Métallurgie Noranda. Je suis basé à Toronto.
M. William A. MacAvoy (Analyste, logistique, Division Nouveau-Brunswick, Mines et exploration Noranda Inc.): Je me nomme William MacAvoy. Je représente la Division Nouveau-Brunswick de Mines et exploration Noranda, et je travaille à Bathurst, au Nouveau-Brunswick.
Le président: Votre deuxième comparution ce matin.
M. MacAvoy: Oui.
M. Fritz King (président, Halifax Shipping Association): Je me nomme Fritz King. Je suis le président de la Halifax Shipping Association.
M. Thomas Hayes (vice-président, Halifax-Dartmouth Port Development Commission): Je me nomme Tom Hayes. Je suis le vice-président de la Halifax Dartmouth Port Development Commission.
M. Wade Elliott (directeur général, Halifax-Dartmouth Port Development Commission): Je suis Wade Elliott, directeur général de la Halifax Dartmouth Port Development Commission.
Le président: Merci à tous d'être venus. Nous allons commencer avec l'exposé de Métallurgie Noranda.
M. Zier-Vogel: Mesdames et messieurs les membres du comité, Métallurgie Noranda Inc. et Mines et exploration Noranda Inc., que je désignerai par «Noranda», sont deux sociétés de ressources naturelles. L'expédition de leurs produits finis et la réception de leurs matières premières sont effectuées par transport océanique à raison, chaque année, de près de 1,5 million de tonnes métriques de métaux, de minerais concentrés et d'autres produits chimiques. Comme on le constate dans d'autres entreprises de ressources naturelles, la plupart de ces produits sont tarifés dans les marchés internationaux, ce qui empêche quasiment les expéditeurs de faire payer à l'utilisateur final une hausse des droits. Noranda s'inquiète donc à propos du nouveau droit envisagé qui ne correspond à aucune valeur ajoutée, car le droit des services maritimes entre dans cette catégorie.
Noranda est heureuse de pouvoir faire connaître sa position aux membres du Comité permanent des pêches et des océans dans le cadre de l'examen du droit des services maritimes. Noranda conseillerait normalement au comité de rejeter cette mesure discriminatoire qui vise un seul secteur de l'économie canadienne, soit celui qui recourt au transport océanique. En effet, si l'impôt doit servir à réduire le déficit du gouvernement, que l'équité soit maintenue parmi les entreprises et les particuliers. Noranda reconnaît néanmoins que le Comité permanent n'adoptera sans doute pas cette position et que les objectifs gouvernementaux prévus en matière de recettes subsisteront. Noranda recommande donc de retarder la mise en application du droit des services maritimes jusqu'en avril 1997.
Le droit des services maritimes n'a rien à voir avec le paiement d'un service à un organisme public, par exemple la Garde côtière, dans le double objectif de recouvrer des coûts ou de payer en fonction de l'utilisation. En réalité, ce double objectif se retrouve dans la proposition de la Garde côtière, mais le fait que les recettes prévues n'ont aucun rapport avec le mécanisme de fixation du droit explique mal le concept qui le sous-tend.
Ainsi, pour les navires dotés de certaines améliorations en matière de navigation, le droit sur les aides à la navigation sera réduit. Si tous les navires ont droit à cette réduction, la hausse du droit des services maritimes par unité (tonne ou tonnage brut) suivra pour permettre au gouvernement d'atteindre ses objectifs.
De même, si les quantités expédiées chutent nettement par rapport à celles de l'année de référence 1994, le droit devra être haussé à nouveau pour atteindre les objectifs prévus.
En fin de compte, les propriétaires de navire et les expéditeurs perdent sur tous les tableaux. Ils seront paralysés en raison de ces objectifs de recettes implacables et immuables. La véritable nature du droit transparaît alors: il s'agit d'un impôt prélevé sur les expéditions commerciales destiné à venir en aide au gouvernement.
Cet impôt sélectif est discriminatoire à l'égard des expéditeurs par bateau vers le Canada et vers l'étranger. En effet, pour réduire le déficit, le gouvernement a fait peser le fardeau fiscal plus lourdement sur un seul secteur de l'économie. C'est inopportun et injuste.
Pour cette raison, Noranda presserait ordinairement le gouvernement fédéral d'abandonner le concept et d'appliquer à tous les agents économiques une politique de taxation plus ouverte s'il cherche à réduire le déficit par une hausse d'impôt.
Noranda se rend néanmoins compte que si le comité permanent souhaite maintenir le concept, des modifications rendraient la mesure plus équitable.
Il est révélateur de voir l'effet des droits sur au moins un utilisateur de services maritimes commerciaux. Les installations minières et métallurgiques de Noranda se trouvent surtout au Québec et au Nouveau-Brunswick. Axées sur l'exportation, elles recourent, comme nous l'avons déjà mentionné, aux navires commerciaux pour l'expédition et la réception annuelles de près de 1,5 million de tonnes métriques de produits finis ou de matières premières.
Même si les propriétaires de navire paient le droit, Noranda, en qualité d'utilisateur final, assumera une partie du droit en payant davantage pour les services de transport. Comme nous l'avons aussi mentionné plus haut, les produits de Noranda sont tarifés dans les marchés internationaux, ce qui empêche notre société de faire payer à l'utilisateur final une hausse du droit.
Si la perception du droit commence en juin, Noranda devra débourser près de 180 000$ pendant l'exercice 1996 au titre du droit sur les aides à la navigation. Pour une année complète, le montant atteindra 240 000$ si le droit reste fixe en 1997 et 1998. Quand l'objectif de recettes augmentera de 50 p. 100, pendant l'exercice 1999, Noranda paiera aussi 50 p. 100 de plus, soit 360 000$. On ne doit pas non plus oublier le droit sur le déglaçage même si l'on ne peut en calculer le montant.
Si le droit atteint un dollar par tonne et le tonnage transporté en hiver reste inchangé, nous calculons que le coût d'ensemble - aides à la navigation et déglaçage - se montera à 900 000$ en 1999.
Supposons que nous nous trompions. Supposons que la redevance ne soit que de 50c. la tonne et que le tonnage soit réduit de moitié parce que nous prendrons des mesures pour alléger le fardeau. Dans ce cas, les droits combinés pour les aides à la navigation et le déglaçage seraient d'environ 500 000$. Cela fait une différence considérable et rien dans ces frais ne correspond à quelque valeur ajoutée pour Noranda.
La Garde côtière du Canada a eu du mal à concilier les opinions émises dans tout le pays au sujet de ce que devrait être la tarification sur les aides à la navigation. De ce fait, contrairement aux prévisions, la date d'entrée en vigueur du droit n'a pu tomber le 1er avril; elle a provisoirement été reportée au 1er juillet, puis fixée définitivement au 1er juin. Il en résulte qu'au lieu de percevoir, de tous les propriétaires de navire, 20 millions de dollars à ce titre dans l'exercice 1996, le gouvernement encaissera 28 millions de dollars pour une partie de l'exercice. Les propriétaires de navire qui utiliseront les transports maritimes à cette époque-là paieront.
Les expéditions effectuées en avril et en mai seront exonérées, mais celles qui suivront serviront à compenser cette perte. L'injustice est flagrante; l'opportunisme l'emporte sur l'esprit de justice et sur l'équité. On ne comprend vraiment pas pourquoi les utilisateurs commerciaux des voies d'eau canadiennes devraient payer plus pour compenser le retard imputable à la Garde côtière.
On ne proposera sans doute pas avant juin le droit sur le déglaçage. Vu ce qui s'est produit avec le droit sur les aides à la navigation, on peut s'attendre à une entrée en vigueur en automne. Le commerce en souffrira. Aucun propriétaire de navire ne communiquera de prix courant approprié, pour la saison des glaces à cause du montant incertain de ce droit. Les prix seront gonflés par mesure de protection et les opérations commerciales qui nécessiteront un transport océanique seront affectées au détriment des expéditions ou des réceptions à destination ou en provenance du Canada.
Les retards enregistrés à la fixation et à l'entrée en vigueur du droit sur les aides à la navigation, plus les retards imminents prévus au chapitre du droit sur le déglaçage, le manque d'équité et l'incertitude qui guettent de ce fait les entreprises canadiennes devraient justifier l'ajournement du droit des services maritimes jusqu'au début de l'exercice 1997.
Le calcul du montant à payer au titre du droit sur les aides à la navigation dépend de la région concernée. Les Maritimes ont été caractérisées par des litiges entre les régions à propos d'un droit calculé en fonction de la distance et du tonnage, ouvertement favorable aux deux principaux ports, soit Halifax et Saint John. Vendredi dernier, le 12 avril, on a opté pour un droit relié au tonnage mais des changements peuvent survenir.
D'autres intéressés, y compris la Division Brunswick Mining de Mines et exploration Noranda, favorisent un droit à la fois spécifique à un port et proportionnel au nombre d'aides à la navigation qui s'y utilisent. Dans la région, on ne parvient pas finalement à faire l'unanimité sur ce que devrait être ce droit.
En conclusion, le processus de fixation du droit des services maritimes par la Garde côtière a été long, difficile et perturbateur. Il a fallu rechercher un consensus. Toutefois, des rivalités inter-régionales et intra-régionales ajoutées au fait que les groupes intéressés n'ont pas cherché à aplanir leurs différences ont rendu impossible à toutes fins pratiques une entente nationale sur la forme et le fond en ce qui concerne le droit des services maritimes. C'est un fait symptomatique du problème que de faire maintenant intervenir le Comité permanent des pêches et des océans.
En tant qu'utilisatrice des services de navigation commerciale, Noranda estime qu'il y va de l'intérêt de l'économie de reporter d'un an, soit jusqu'en avril 1997, la date d'entrée en vigueur du droit des services maritimes. On connaîtra alors les détails concernant le droit sur les aides à la navigation dans les Maritimes, la nature du droit sur le déglaçage et tous les participants paieront leur juste part. Les répercussions sur les opérations commerciales seraient réduites au minimum et les entreprises canadiennes auraient le temps d'établir une planification en conséquence.
Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur King.
M. King: Bonjour.
La Halifax Shipping Association regroupe des compagnies maritimes, des agents affréteurs, des sociétés de manutention, des exploitants de terminaux, des exploitants de remorqueurs de pilotage et d'autres usagers et intéressés du port de Halifax. Les 36 membres de l'association couvrent les principaux éléments de l'activité commerciale du port, notamment le fret général et le vrac, de même que l'activité de croisière.
Le port de Halifax a traité plus de 13 millions de tonnes de fret en 1995, volume qui a dégagé 7 000 emplois, 333 millions de dollars de dépenses directes et plus de 240 millions de dollars de revenus.
Depuis l'annonce initiale de la phase un du programme de recouvrement des coûts de la Garde côtière canadienne, en 1989, jusqu'à la dernière intervention du sous-ministre adjoint des Pêches et des Océans, John Thomas, le 12 avril de cette année, à Saint John, les parties intéressées du port de Halifax représentées par la Halifax Shipping Association ont ardemment défendu la notion d'une redevance d'usager fondée sur la valeur des services consommés. Cependant, nous persistons à considérer les différentes formules de recouvrement des coûts auprès du secteur commercial conçues par la Garde côtière comme fondamentalement viciées.
La première mouture présentait un certain nombre d'injustices flagrantes, dues probablement, du moins en partie, à l'absence de consultation réelle des usagers régionaux et des premiers intéressés de la part de la Garde côtière. Cette dernière a plutôt choisi de se fier aux positions exprimées par la Commission consultative maritime, dont la représentativité laissait à désirer, puisqu'elle ne comprenait pas de membres de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, entre autres lacunes.
Ultérieurement, en réponse aux pressions publiques, une série de tribunes de discussion ont été tenues en divers lieux des régions Est et Intérieur pour tenter de dégager un consensus au sein de cette communauté diverse sur une démarche qui soit collectivement la moins dommageable possible, mais sans guère parvenir à calmer le mécontentement général.
Le zèle avec lequel la Garde côtière veut imposer dés 1996 la première tranche de ses droits de services maritimes semble dû au fait que le budget du ministère ait été réduit de 20 millions de dollars. En l'absence de données détaillées sur les coûts port par port sur lesquels asseoir des solutions, la Garde côtière a décidé, pour remplir son objectif, d'imposer un barème unique pour une région Est, barème axé sur l'idée que se fait la Garde côtière de la capacité des usagers à payer, et sans lien réel avec la valeur des services consommés. Cette approche est injuste et particulièrement préjudiciable au port de Halifax, car elle revient à annuler l'avantage naturel que présentent les eaux libres de glace et la profondeur du port, en lui infligeant des coûts dont il serait autrement exempt.
Une bonne partie du trafic que Halifax attire, et particulièrement celui de conteneurs, tient à sa proximité de la «grande boucle». Cela permet à Halifax de faire office d'escale supplémentaire pour les navires naviguant à destination d'autres ports du littoral atlantique américain, afin d'y charger et décharger des cargaisons partielles, sans guère de frais supplémentaires ou de perte de temps. Le coût de manutention du fret et le temps de transit sont par conséquent des facteurs clés lorsqu'il s'agit d'attirer et de fidéliser ce trafic. De fait, Halifax commence seulement maintenant à surmonter la perte d'un certain nombre de lignes intervenue dans le milieu des années 1980, lorsque le transport maritime a connu une importante restructuration.
La région Atlantique n'offre pas par elle-même un marché local suffisant pour justifier une escale des porte-conteneurs internationaux. Ce n'est donc que le volume de fret à destination de l'arrière-pays, c'est-à-dire le centre du Canada et, plus récemment, depuis l'ouverture du tunnel de Sarnia, le midwest américain, que Halifax peut survivre. Dans cette quête de fret, Halifax est en concurrence non pas tant contre d'autres ports canadiens comme Saint John ou Montréal, que contre les ports américains de New York, Philadelphie et Baltimore, qui cherchent activement et anxieusement à capturer ce même créneau.
Face à la possibilité très réelle d'un démantèlement des organismes réglementaires maritimes américains en 1997 et au programme de rabais consentis par les ports américains et assortis de concessions syndicales en vue de recapturer le trafic, Halifax voit disparaître nombre de ses avantages actuels et ses marges bénéficiaires deviennent exceptionnellement minces. Ajoutez à cela les distances par voie terrestre plus courtes vers les grandes villes américaines et canadiennes que ces ports offrent, ainsi que la modernisation récente du réseau ferroviaire au sud de la frontière, et vous voyez que rester compétitif sur la côte est du Canada devient une véritable gageure. Il ne faut pas perdre de vue que, dans la plupart des cas, les répercussions négatives ne peuvent être déterminées qu'après coup, c'est-à-dire à un moment où les mesures rectificatives arrivent souvent trop tard.
De même, les propositions les plus récentes de la Garde côtière mettent en difficulté d'autres usagers du port, tels que les transporteurs de cargaisons en vrac à faible valeur, les croisiéristes et les entreprises de soutien portuaire, comme les entreprises de remorquage. Ces dernières, à titre d'exemple, paient déjà une redevance annuelle fixe par remorqueur à la société portuaire pour recevoir le droit de travailler dans le port, plus des droits portuaires pour chaque sortie en mer. Les navires faisant escale à Halifax qui font appel à des remorqueurs paient déjà des tarifs répercutant ces frais. Cette conjugaison de frais doit certainement représenter une double facturation quelque part dans l'équation.
Nos membres s'inquiètent également de voir que cette première salve de recouvrement des coûts frappe de plein fouet les aides à la navigation en épargnant le reste des nombreux services de la Garde côtière canadienne et que cela, ajouté à une mise en application sans que l'on connaisse les coûts port par port, ne crée un précédent qui viendra fausser le jeu tout au long des phases futures du processus.
L'imposition d'une redevance forfaitaire indépendamment des circonstances individuelles ne peut manifestement pas répondre aux besoins divers des usagers locaux, et la Garde côtière ne devrait pas se considérer comme un instrument de compensation de l'impact socio-économique du recouvrement des coûts sur chaque port. L'intérêt général est un canon dont la place est ailleurs dans la politique gouvernementale.
Nos membres signalent également que la tendance de la Garde côtière à parer aux critiques en se contentant de redistribuer le fardeau entre les participants selon le principe de la roue grinçante, ne constitue pas une approche acceptable de la perception des droits aux yeux des entreprises.
Ce qui peut paraître de l'extérieur comme un prélèvement peu onéreux risque au contraire, en raison de la manière dont il est structuré, d'anéantir un port comme Halifax. Des droits sans relation avec les coûts, et susceptibles en outre de fluctuer en fonction de circonstances économiques échappant à l'influence du port, ne peuvent être que déclarés inacceptables.
En résumé, la Halifax Shipping Association souscrit à la notion d'usager payeur, et ses membres sont disposés à participer à tout programme de recouvrement fondé sur des principes raisonnables et qui ne fassent payer aux usagers - à tous les usagers - que les services qu'ils consomment: la redevance doit être fondée sur une formule initiale équitable en fonction de coûts d'utilisation port par port clairement déterminés; l'autosuffisance des ports doit être l'objectif ultime et le barème des redevances doit comporter des incitations en ce sens; une discipline doit être imposée aux usagers dans tous les ports; le mécanisme doit exiger en permanence un contrôle des coûts et des économies au sein de la Garde côtière elle-même; enfin, toute majoration future des redevances doit être justifiable sur la base des principes précédents.
Pour l'heure, la Halifax Shipping Association constate que la Garde côtière canadienne, de par son propre aveu, est incapable d'identifier les coûts d'utilisation réels port par port et que les coûts attribués aux régions ne peuvent être rationnellement fondés. En outre, la Garde côtière n'a pas encore la maîtrise de ses dépenses et est davantage motivée par la nécessité de récupérer les crédits dont son budget courant a été amputé que part tout autre facteur.
La Garde côtière a fait valoir qu'elle ne peut introduire le recouvrement des coûts du déglaçage en 1996 parce que les renseignements sur l'utilisation des services ne sont pas disponibles. En utilisant la même logique, la Halifax Shipping Association soulignait que la Garde côtière n'a pas établi l'existence des données détaillées nécessaires à la redevance pour les aides à la navigation et que l'effet sur les ports de la redevance actuellement projetée n'a pas été adéquatement étudié.
Nous pensons donc avoir toute justification - et, en réalité, ne pas avoir d'autre choix - que d'exhorter le gouvernement à interrompre ce processus jusqu'à ce que ces critères intrinsèques soient remplis.
La Garde côtière avait présenté en mars dernier aux usagers locaux un barème qui aurait prélevé environ 1 million de dollars par an, soit 8,4c. la tonne. Les usagers du port de Halifax avaient accepté avec réticence ce chiffre pour une période d'essai d'un an, mais ils ne sont certainement pas disposés à accepter les 17.6c. la tonne actuellement sur la table. Nous exigeons que, à tout le moins, et à défaut du report que nous demandons, la Garde côtière revienne à cette formule antérieure, nettement plus réaliste.
Je vous remercie de votre invitation à comparaître et de l'intérêt que vous manifestez pour notre position.
Le président: Je vous remercie, monsieur King.
Nous allons entendre M. Hayes, de la Halifax-Dartmouth Port Development Commission.
M. Hayes: La Halifax-Dartmouth Port Development Commission est très heureuse d'avoir été invitée à exposer ses vues sur la mise en place des droits de services maritimes de la Garde côtière.
La commission est un organisme provincial municipal ayant pour but de promouvoir et de développer l'activité du port de Halifax et d'exprimer des avis à tous les paliers de gouvernement sur des questions intéressant le port de Halifax.
La commission travaille de longue date à des projets de développement portuaire tels que l'Autoport, les terminaux de conteneurs Halifax International et Fairview Cove, le service ferroviaire porte-conteneur gerbé et les initiatives visant à établir Halifax comme un centre de chargement pour le fret du Midwest américain.
Halifax est un port moderne et polyvalent, capable de manutentionner une grande variété de cargaisons dans des installations de grande envergure. Étant donné ses retombées économiques considérables, le trafic de conteneurs joue un rôle particulièrement important, engendrant près de 2 000 emplois, 70 millions de dollars de recettes et 100 millions de dollars de dépenses.
En sus de fournir aux exportateurs et importateurs locaux un accès crucial aux marchés mondiaux, le port de Halifax est déterminant pour la viabilité à long terme du transport ferroviaire dans la région et est le seul port de la côte est du Canada qui puisse recevoir les nouveaux porte-conteneurs de dimension supérieure à la classe Panamax qui commencent à être mis en service.
Contrairement à la plupart de ses concurrents du littoral atlantique nord-américain, le port de Halifax ne jouit pas d'un marché local d'envergure. De fait, pour rejoindre nos marchés primaires du centre du Canada, et depuis l'ouverture du tunnel St-Clair de Canadien National nos nouveaux marchés du Midwest américain, notre fret doit emprunter un plus long trajet ferroviaire que celui de nos concurrents.
En revanche, et c'est heureux, Halifax offre des avantages géographiques remarquables qui compensent le problème de la distance de transport terrestre. Depuis le début, la raison première de son succès sont les avantages naturels considérables que présente le port, avec un bassin de 21 mètres de profondeur libre de glace et avec des hauteurs de marée minimes, situé à courte distance de l'océan. Tant que le port de Halifax restera en mesure d'exploiter pleinement ces avantages naturels, il continuera de jouer son rôle de porte d'accès pour le commerce transatlantique américain.
Cependant, la compétitivité du port reste fragile. Ainsi que Fritz l'a mentionné, la chute brutale, de l'ordre de 37 p. 100, du trafic de conteneurs du port entre 1990 et 1992 témoigne de l'instabilité de cette industrie et de la vulnérabilité de Halifax.
Grâce à la ténacité collective avec laquelle les parties intéressées du port ont entrepris de réduire les coûts d'exploitation, avec notamment des concessions fiscales de la ville de Halifax et un investissement dans des wagons porte-conteneurs gerbés du gouvernement de Nouvelle-Écosse, le port de Halifax commence à reconquérir une partie du trafic perdu. Mais, à l'évidence, l'imposition de toute redevance de services maritimes qui ne tienne pas compte des avantages naturels du port constituera un handicap injuste. Malheureusement, c'est précisément ce que fait l'approche indifférenciée du recouvrement des coûts que propose la Garde côtière.
La commission a conscience de l'endettement que connaissent tous les paliers de gouvernement et appuie pleinement les efforts visant à transférer le fardeau que représentent les services de la Garde côtière des épaules du contribuable vers celles des usagers. La commission se penche activement sur la question du recouvrement des coûts de la Garde côtière depuis de nombreuses années et a préconisé de longue date la mise en place de véritables redevances d'utilisation, solution la plus équitable et la plus efficace, par opposition à une taxe simple ou une redevance indifférenciée.
Notre conception est également conforme aux lignes directrices du Conseil du Trésor. À bien des égards, notre façon de voir est similaire à celle exprimée sur la côte ouest, en ce sens que nous admettons que les usagers du port de Halifax paient leur juste part, c'est à dire uniquement celle correspondant au coût des services qu'ils consomment.
Nous sommes profondément convaincus que la manière dont la Garde côtière a abordé le recouvrement des coûts jusqu'à présent est fondamentalement viciée et inopportune, surtout parce qu'elle n'a pas déterminé le coût des services fournis aux usagers individuels. Nous pensons que ces données sont cruciales si l'on veut élaborer une politique de recouvrement des coûts rationnelle.
Au lieu de cela, en procédant à l'envers, c'est-à-dire en partant de ce qu'elle estime arbitrairement chaque usager ou port est capable de payer, la Garde côtière a élaboré des barèmes successifs sans tenir compte du coût et de l'utilisation de ses services par les divers ports ou les différents usagers. Il en a résulté l'exercice futile consistant à lancer divers ballons d'essai, aucune de ces propositions n'ayant quelque lien que ce soit avec le coût des services, avec pour résultat prévisible que la Garde côtière est contrainte de réagir au tollé des usagers pénalisés et de consentir des concessions à quiconque crie le plus fort.
Pour prendre le port de Halifax comme exemple, on a vu le montant total de la redevance payé par les navires battant pavillon étranger varier de 300 000$ à 2,4 millions de dollars, au gré des formules successives.
La proposition la plus récente présentée par la Garde côtière imposerait à tous les ports du Canada atlantique la même redevance de 17,6c. par tonne, chiffre qui n'a rien à voir avec le coût des services dans le port de Halifax. De fait, si la Garde côtière parvenait à imposer cette formule, un même navire paierait davantage pour parcourir la courte distance entre la haute mer et Halifax que les milliers de milles de Voie maritime jusqu'à Thunder Bay.
La Garde côtière s'obstine dans cette stratégie en prévoyant de mener une étude d'impact pour déterminer ce que chaque port est en mesure de payer, encore une fois sans la moindre idée du coût réel des services dans chacun.
La commission considère que cette aberration n'a que trop duré et qu'il faut y mettre un terme. La Garde côtière doit recevoir pour instruction de déterminer d'abord le coût des services port par port et utiliser ces chiffres pour déterminer la part du recouvrement des coûts payée par chacun. Ce n'est qu'alors qu'une analyse d'impact véritable pourra être faite pour déterminer quels produits ou quelles routes sont vulnérables.
La commission considère que la seule façon équitable et efficace de recouvrer les coûts de la Garde côtière est une redevance spécifique pour chaque port, telle que les non-usagers ne soient pas obligés de payer les services qu'ils ne consomment pas et que ceux qui en font une consommation modeste paient proportionnellement moins que ceux qui consomment plus. On règle ainsi d'emblée la question de l'équité. Qu'est-ce qui pourrait être plus juste qu'un barème de redevance où chacun paie un montant directement proportionnel à l'usage?
Wade, à vous.
M. Elliott: Merci, Tom.
Monsieur le président, outre l'important objectif consistant à transférer le fardeau des services de la Garde côtière des épaules du contribuable à celles des usagers, nous pensons que le recouvrement des coûts devrait être structuré de manière à remplir d'autres grands objectifs généraux. J'aimerais les passer en revue, si vous le permettez.
Le dispositif de la redevance devrait être structuré de façon à inciter la Garde côtière à rechercher constamment des gains d'efficience dans la prestation de ses services. Comme vous l'avez entendu ces derniers jours, la Garde côtière continue à essuyer des critiques concernant la nature et le coût de ses activités. Une redevance calculée port par port directement liée au coût et à l'utilisation des services exercera des pressions commerciales sur la Garde côtière, la contraignant à rechercher continuellement des réductions de coût et des améliorations de son efficience. C'est également la seule méthode intégrant la notion essentielle d'usager payeur-décideur. Les usagers seront amenés à superviser constamment la Garde côtière et à la pousser à devenir plus efficiente s'ils voient un lien direct entre leur facture et les coûts et niveaux de service de la Garde côtière.
Le mécanisme de la redevance lui-même doit amener la Garde côtière à rendre des comptes et à justifier toute majoration future. Une redevance calculée port par port contraint la Garde côtière, comme tout autre fournisseur, à démontrer à ses clients en quoi ses majorations de tarif sont justifiées par des changements de coûts et de niveaux de service. On n'a pas besoin, ainsi, d'une administration coûteuse pour exercer une surveillance et examiner les objections opposées au relèvement des redevances.
Un autre principe important est que la redevance contienne une incitation inhérente à la discipline de la part des usagers. Quel que soit le service de la Garde côtière faisant l'objet d'un recouvrement des coûts, des redevances calculées port par port contraindront les usagers à consommer avec discernement, car ils sauront que le montant de la redevance sera lié directement à la quantité de services qu'ils consomment.
La redevance elle-même devrait également favoriser la protection de l'environnement, la sécurité et l'innovation technologique. Une redevance propre à chaque port est manifestement la façon la plus simple et la plus directe de le faire.
La structure de la redevance devrait faciliter la privatisation éventuelle des services de la Garde côtière. Une redevance calculée port par port introduit dans le système des pressions commerciales et constitue la première étape logique de l'établissement d'une relation client-fournisseur. Pour peu que la Garde côtière en ait l'ambition, elle pourrait même un jour exporter un service de classe mondiale.
La structure de la redevance devrait pouvoir être reprise ultérieurement pour recouvrer les coûts d'autres services de la Garde côtière, et le mécanisme d'une redevance d'usager l'autorise manifestement.
Enfin, je veux insister tout particulièrement sur un dernier grand objectif de politique. Il s'agit de la notion que toute répercussion négative sur la compétitivité de tel ou tel engendrée par le recouvrement des coûts de la Garde côtière soit compensée de manière transparente, au cas par cas, et non par le biais de subventions cachées au sein de la structure de la redevance.
Permettez-moi d'expliquer ce point de vue plus avant. Nous sommes fermement d'avis que si l'on juge qu'il est dans l'intérêt public d'atténuer les répercussions pour une route ou un produit vulnérable - une décision qui ne doit être prise qu'après une analyse serrée au cas par cas - toute concession ou subvention doit être clairement visible. J'insiste pour que le recouvrement des coûts ne soit pas utilisé comme instrument pour distribuer des subventions camouflées à des usagers ou à des routes, ou pour faire subventionner une route ou un usager par un autre.
À l'évidence, une approche globale du recouvrement des coûts de la Garde côtière ne peut remplir aucun de ces importants objectifs. Pourtant, c'est précisément celle que la Garde côtière prévoit de retenir. En particulier, son approche ne donne aucune incitation concrète à la Garde côtière à réduire ses coûts ni n'encourage la discipline chez les usagers, et elle constitue une manière inefficace et injuste de verser des subventions aux usagers.
Un facteur important à ne pas perdre de vue est que les services de la Garde côtière au Canada sont particuliers, en ce sens que l'étendue de notre territoire fait que l'on rencontre des variations beaucoup plus grandes entre les services requis dans les différents ports, comparés aux autres pays. Rien que pour cette raison, une approche globale n'est manifestement pas indiquée au Canada.
Le gouvernement, et plus récemment Transports Canada, l'ont reconnu dans l'étude exhaustive réalisée il y a six ans environ, où ils passaient en revue différentes options de recouvrement des coûts, notamment une redevance d'usager par opposition à une taxe spécifique. La conclusion était que les redevances d'usager, vu les avantages et inconvénients respectifs des deux options, constituaient clairement la meilleure solution pour le Canada.
Le rapport dit en outre que les redevances d'usager sont également préférables du point de vue de l'efficience et que les usagers sont moins susceptibles de choisir les options de transport les plus efficientes lorsque le coût réel des services est masqué par un lien faible avec les frais perçus pour ces services. Il dit qu'en établissant un lien plus direct avec le coût des services, les redevances d'usager incitent davantage à maîtriser les coûts, et bien que cette incitation soit proportionnelle aux niveaux du recouvrement des coûts, elle se fait jour même à des faibles taux de recouvrement.
Voilà ce qu'a indiqué Transports Canada à ce sujet il y a tout juste six ans. Pourquoi la démarche de la Garde côtière aujourd'hui reflète-t-elle si peu ces principes?
Pour ce qui est de la consultation, ainsi que Fritz King l'a mentionné, les intéressés du port de Halifax se sont vu refuser une représentation adéquate dans les consultations en cours touchant les droits de services maritimes du fait de leur absence de la Commission consultative maritime, l'organisme que la Garde côtière a le plus écouté jusqu'à présent. Après des requêtes répétées, la Garde côtière a finalement offert un seul siège au sein de la CCM à toutes les parties intéressées de Nouvelle-Écosse. Cependant, cette représentation n'interviendrait qu'une fois prise la décision relative à la mise en place des droits de services maritimes pour au moins la première année. C'est évidemment inacceptable.
En conclusion, il ne faut pas mettre en péril la compétitivité internationale de Halifax en lui faisant endosser le coût des aides à la navigation ou de tout autre service fourni à d'autres ports. Or, ce serait bien là l'effet de la proposition la plus récente de la Garde côtière et c'est pourquoi elle est inacceptable, à notre point de vue.
La Halifax-Dartmouth Port Development Commission recommande vivement de donner instruction à la Garde côtière de suspendre son initiative touchant les droits de services maritimes jusqu'à ce qu'elle ait déterminé le coût de la prestation de ses services port par port. Cette analyse devrait être entreprise en concertation étroite avec les parties intéressées de tous les ports. Ce n'est qu'alors, en possession de ces chiffres cruciaux, que l'on pourra imputer à chaque port la part des recettes totales qu'il doit payer et une véritable analyse des répercussions économiques - et je souligne le mot «véritable» doit être entreprise pour déterminer les routes et les produits vulnérables, sur la base de données fiables.
Nous recommandons également, pour des raisons d'équité et de cohérence, que les redevances pour les services de brise-glace soient introduites en même temps que celles pour les aides à la navigation.
Enfin, la commission recommande qu'une modification soit apportée à la Loi sur les océans de façon à aider la Garde côtière en la guidant sur la façon de mettre en oeuvre le recouvrement des coûts. Nous avons joint à votre intention une copie d'une lettre antérieure au vice-président du comité. Elle donne de plus amples précisions sur l'amendement que nous souhaitons.
Je vous remercie de l'intérêt que vous portez à nos vues. Les membres du comité auront peut-être quelques questions à poser.
Le président: Merci beaucoup. Je vais peut-être poser la première question.
Le groupe de M. MacAvoy a indiqué lors de sa comparution ce matin que Belledune subventionne Halifax. Vous dites maintenant que Halifax subventionne quelqu'un d'autre. Qui subventionne qui?
Je pense que nous avions la comparaison sur les aides dans l'exposé de ce matin. Je ne sais pas si vous l'avez vu. Cela vient de la région de la Baie des Chaleurs, au Nouveau-Brunswick. Ils affirment qu'ils subventionnent le port de Halifax. Le port de Halifax vient juste de nous dire qu'il subventionne d'autres ports. Il n'a pas expressément mentionné Belledune, mais j'imagine que vous subventionnez d'autres dans la région. Pourriez-vous donner des éclaircissements?
M. Elliott: Je vais essayer. Cette confusion est symptomatique du fait que, six mois après le début de ce débat, nous n'ayons toujours pas de données sur les coûts port par port. C'est pourquoi vous entendez des avis aussi divergents.
Je ne peux parler que de la situation de Halifax. La dernière proposition de la Garde côtière ferait assumer par Halifax 30 p. 100 de l'objectif de recettes pour toute la région. Or, il est évident que les coûts chez nous ne représentent pas 30 p. 100 des coûts de toute la région. La proposition la plus récente - je dis la plus récente car il y a eu une succession de formules - prévoit que Halifax paie plus de 1,5 million de dollars sur l'objectif de recettes totales pour les navires battant pavillon étranger de 5,5 millions de dollars. Or, toute évaluation de nos frais spécifiques aboutirait à une part nettement inférieure à celle-ci.
Le président: Souhaitez-vous répondre, monsieur MacAvoy?
M. MacAvoy: Je dirais seulement que lorsque nous parlons de droits calculés port par port, nous entendons le chiffrage des services effectivement fournis. Il est déplorable que les ports d'une même région soient forcés de se chicaner sur des chiffres qui auraient dû être déterminés il y a bien longtemps.
Si l'on y regarde de plus près, le port de Halifax se plaint de ce qu'il va payer 30 p. 100 des recettes. Je rétorque en demandant quelle proportion du tonnage il représente? Si l'on regarde les montants en valeur absolue, ils peuvent paraître excessifs, mais il faudrait plutôt considérer le niveau de service fourni. Si Halifax paie 30 p. 100 du coût, mais représente en réalité plus de 30 p. 100 du tonnage, on peut considérer qu'il y a subvention.
M. Elliott: On pourrait en discuter à l'infini sans jamais parvenir à une conclusion claire. Je pense que nous partageons une frustration commune devant l'absence de données, et c'est manifestement là la source du problème.
Pour ce qui est des intérêts de Halifax, on en vient immédiatement à une question de coût. Même en acceptant certains des chiffres sur les coûts spécifiques à Halifax que nous a fournis la Garde côtière - et qui à notre avis sont gonflés - on arrive à une part de 12 p. 100 du coût total. À l'évidence, on nous demande de payer considérablement plus.
Le président: Je vous remercie de votre contribution.
Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier: Je salue les témoins qui sont venus nous voir. J'ai manqué le début de la présentation du groupe Noranda. Même si vous soulignez, monsieur le président, qu'il semble y avoir des positions différentes quant à la façon de comparer ou de calculer les chiffres, lorsque je lis les conclusions, je me dis que les témoins arrivent probablement à la même conclusion sans s'entendre nécessairement sur la façon de calculer.
Tout le monde demande, à moins que je ne me trompe, qu'il y ait un moratoire sur l'introduction de la grille tarifaire tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas identifié les coûts de chacun des ports ou de chacune des régions auxquels la Garde côtière offre des services et tant et aussi longtemps qu'on ne connaîtra pas l'impact de ces coûts-là sur les différentes industries qui utilisent ces services.
Le travail de notre comité était d'écouter pour comprendre ce qui se passait là-dedans. On s'aperçoit qu'il reste encore des devoirs à faire. Je ne sais pas si les témoins sont d'accord, mais c'est la conclusion dont je me servirai pour rédiger le rapport à partir de ce soir.
Le groupe Noranda le dit clairement à la page 6 de son rapport quand il demande que cela soit reporté d'un an. Le dernier groupe qui vient de parler, celui du Port d'Halifax, le demande aussi clairement. Je ne sais pas si l'Association de transport d'Halifax l'a exprimé aussi clairement. J'ai noté tout à l'heure que vous souhaitiez qu'il y ait une forme de moratoire, mais vous dites que si on ne peut faire autrement, on pourrait peut-être revenir à la formule première. Autrement dit, vous êtes placés entre les deux groupes, mais vous seriez peut-être prêts à donner une chance à M. Thomas avec une formule intérimaire qui n'engagerait personne à court terme. Est-ce bien ce que je dois comprendre ou si vous faites partie du groupe qui veut un moratoire complet et qui dit à la Garde côtière de faire ses devoirs?
[Traduction]
M. King: Je suppose que je suis quelque peu influencé par ce que j'ai lu dans les journaux. J'ai lu récemment que le ministre a décrété qu'il n'y aurait pas de moratoire et j'ai axé mon exposé sur cette prémisse. Nous avions initialement réclamé un moratoire complet, mais j'ai dit que, à défaut, nous accepterions à contrecoeur la position qui nous avait initialement été soumise le 20 mars.
[Français]
M. Bernier: Pour la gouverne du comité et pour que je n'aie pas à relire tout cela, quel serait l'impact financier de la proposition de départ? Quel tarif proposaient-ils? Était-ce une proposition pancanadienne? Quel était le chiffre? Ils nous ont donné beaucoup de chiffres, et je voudrais être sûr qu'on retienne celui qui fait votre affaire.
[Traduction]
M. King: Vous avez touché juste. Comme Wade l'a dit, la cible a toujours été mouvante; la détermination du chiffre de cotisation a presque été faite à l'aveuglette.
À ce moment-là, le 20 mars, le chiffre de cotisation du port de Halifax, dans le cadre d'une région Est, était d'environ 1 million de dollars. Dans la dernière proposition, il est passé à près de 1,5 million de dollars. La hausse est de l'ordre de 400 000$ et elle est due... La formule n'a pas changé, simplement on a plafonné la redevance de certains des usagers et c'est à cela que je faisais allusion en parlant du fait que l'on graisse la roue qui grince.
Lors de la réunion du 20, certains usagers ont fait valoir les difficultés qu'ils rencontreraient et on a apporté des changements pour alléger leur fardeau, mais en le faisant porter à d'autres usagers qui ont, de ce fait, la même doléance.
[Français]
M. Bernier: Je déduis que les témoins qui comparaissent devant nous sont de très bons citoyens corporatifs. Personne n'a dit qu'il n'était pas intéressé à faire sa part pour réduire le déficit canadien, mais je tiens à rappeler aux clients qu'ils sont les patrons des députés et des ministres et que c'est avec leur argent qu'on administre le pays. Si vous dites qu'il faut un moratoire parce que ça n'a pas de bon sens... Pour moi, ce que Mifflin a dit auparavant n'est pas nécessairement parole d'Évangile. C'est ce qu'il dira à partir de lundi prochain qui compte et on devra vivre avec cela. Mais je voulais avoir votre son de cloche à vous aujourd'hui.
[Traduction]
Le président: C'est une déclaration.
Monsieur Scott.
M. Scott: Je vous remercie, monsieur le président.
J'ai écouté avec intérêt tous les exposés et je tiens à remercier tous les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Nous avons pris bonne note de vos objections et je vous apprends, si vous ne le savez déjà, que bon nombre des autres témoins qui ont comparu ces derniers jours ont fait valoir les mêmes.
Le grand problème que je perçois, et j'adresse la question à qui veut y répondre, est que nous aboutissons à une situation où l'industrie, qui a ramené ses coûts d'exploitation au minimum et survit dans bien des cas avec des marges bénéficiaires très minces, va être contrainte de payer pour des services qui lui étaient jusqu'alors fournis gratuitement, aux frais de tous les contribuables canadiens.
La Garde côtière, en prélevant ces droits, se livre à toutes fins pratiques à des transactions commerciales. Mais la Garde côtière n'est pas une entreprise, elle ne fonctionne pas comme une entreprise. Nous en avons suffisamment entendu ces derniers jours pour savoir que la Garde côtière n'est virtuellement assujettie à aucune discipline financière.
Elle n'éprouve pas les mêmes contraintes qu'une entreprise et n'a pas à rationaliser son fonctionnement de façon à réduire sans cesse ses coûts au strict minimum possible. D'après tout ce que les témoins nous ont dit, elle en est même très loin.
Ma question est de savoir comment imposer cette discipline commerciale à un organisme gouvernemental. Je ne sais pas comment amener la Garde côtière à fonctionner d'une manière telle que vous puissiez dire: «D'accord, nous payons ces services, mais ils nous sont fournis à un prix raisonnable».
Voilà la question que je vous pose. Comment faire en sorte que la Garde côtière soit astreinte à la même discipline économique que vous, dans vos entreprises? C'est peut-être très difficile à faire. Je cherche des solutions depuis pas mal de temps.
M. Zier-Vogel: Je suppose que nous nous sommes tous posés cette question depuis que nous avons appris que la Garde côtière allait introduire les droits de services maritimes.
Oui, c'est un énorme problème et une grande question. Mais ce n'est pas parce que nous, transporteurs commerciaux, pensons savoir comment exploiter des aides à la navigation pour nous-mêmes et peut-être gérer nous-mêmes le déglaçage que la Garde côtière va pouvoir être supprimée - car le gouvernement en a besoin et le Canada en a besoin pour faire un certain nombre d'autres choses.
Concrètement, on court le risque d'avoir deux organisations parallèles: la Garde côtière s'occupant des bouées et des aides à la navigation pour les plaisanciers ou les pêcheurs, et ensuite une autre qui va s'occuper des bouées et des autres services pour la navigation commerciale. Je ne sais pas trop dans quelle mesure cela serait rationnel.
Quelles sont les options? Quelle est l'autre solution? Va-t-on attraper la Garde côtière par le cou et lui dire qu'elle va devoir fonctionner comme nous sommes contraints de le faire sur le marché commercial? C'est peut-être une possibilité. Je penche plutôt vers la deuxième option, car la première me paraît beaucoup plus difficile à appliquer.
Je ne pense pas que le secteur privé serait réticent à assumer une partie des activités de la Garde côtière. Je pense que quantité de ports, surtout de la côte est, vous ont dit que s'il y a des bouées à mettre en place, ils s'en occuperont. Nous achèterons les bouées à la Garde côtière et nous observerons toutes les règles qu'il faut observer, mais nous ferons le travail nous-mêmes et nous pouvons le faire pour beaucoup moins cher.
Je n'ai rien à objecter à cela.
L'une des choses qui n'a pas été mise en lumière lors de la réunion d'hier soir était que, en tant que gestionnaire privé, je préconise plutôt une approche régionale des activités soumises à redevance d'usager, car on se rapproche ainsi davantage du fournisseur du service et on peut surveiller d'un peu plus près ce qui se fait et mieux veiller à ce que les normes requises dans chaque région soient respectées.
C'est un peu comme lorsqu'on dirige une entreprise possédant plusieurs usines, il vaut mieux avoir des directeurs régionaux supervisant chaque usine au lieu d'avoir une seule personne qui les supervise toutes à partir d'un point central.
C'est un problème difficile. Je ne sais pas trop comment le résoudre, mais j'ai l'impression qu'il y a suffisamment de compétences commerciales dans toutes les régions pour sensibiliser la Garde côtière aux impératifs commerciaux et l'aider à rationaliser les services fournis au secteur commercial, de telle façon que la redevance reflète la quantité de services fournis.
M. Scott: Lorsque nous avons entamé ce processus, je considérais que la Garde côtière devait faire des économies, sachant qu'il s'agit d'un organisme gouvernemental souffrant nécessairement de quelques inefficiences. Mais après tout ce que nous avons entendu, je ne suis plus convaincu que cela suffise. Il faut plutôt changer radicalement tout son mode de fonctionnement. Il ne suffit pas de réduire un peu ici et de couper un peu là et ainsi peut-être faire une économie de 15 ou 20 p. 100. J'ai l'impression que la Garde côtière dépense tellement à tort et à travers que c'en est tragique.
C'est du moins l'avis de certains des témoins que nous avons entendus ici. Cela me préoccupe, car si l'on va imposer des redevances aux usagers commerciaux, ces redevances vont devoir être en rapport avec la valeur réelle du service. Je ne vois pas comment on y parviendrait si le service va être fourni par un organisme gouvernemental.
J'en viens presque à la conclusion qu'il faut le privatiser ou bien renoncer à la redevance.
M. Zier-Vogel: Peut-être bien. Je ne suis pas certain d'être qualifié pour me prononcer.
En voyant tous les chiffres que j'ai vu circuler en tant que membre de la Commission consultative maritime, je suis frappé de voir que la Garde côtière paie des tarifs canadiens pour ses navires et ses équipages, alors que nous, les usagers commerciaux, ne le faisons que lorsque nous y sommes contraints, c'est-à-dire lorsque nous nous limitons au transport intérieur.
Je ne sais pas trop ce qu'il adviendrait des coûts de la Garde côtière si on changeait cela et qu'on lui dise de s'aligner sur les normes internationales. Que se passerait-il si on lui disait de construire un navire à un coût comparable à ce que l'on peut obtenir en Chine, en Corée ou au Japon, de payer les équipages les salaires typiques du marché international et d'avoir des tailles d'équipage comme celles du marché international? Évidemment, il faudrait que la Garde côtière reste en mesure d'assurer toutes ses missions en matière de sécurité et de services aux usagers commerciaux etc.
Je ne sais pas quelle serait l'économie ainsi réalisée. Je ne sais pas quel serait le niveau des effectifs. Je pense que cela vaudra la peine d'y jeter un coup d'oeil, car si nous ne le savons pas, nous risquons de laisser passer des occasions. Mais c'est une vaste question. C'est une vaste question et quelqu'un va devoir déployer pas mal de travail pour y répondre.
Encore une fois, nous, dans le secteur privé, sommes accoutumés à certaines méthodes comptables et nous avons appris à nos dépens que les administrations publiques ont une comptabilité différente. L'une des choses que nous avons trouvé bizarres, par exemple, est que le gouvernement n'autorise pas la Garde côtière à accumuler des recettes, si bien que si la redevance est perçue fin mars, ce sont les liquidités en main le 1er avril qui comptent et toutes les commandes passées fin mars mais payées seulement en avril sont imputées à l'année suivante.
Ce genre de chose nous a réellement surpris. Nous avons beaucoup de mal, dans ces conditions, à nous y retrouver dans les chiffres, car c'est une comptabilité entièrement différente de celle à laquelle nous sommes accoutumés dans le secteur privé.
Si on pouvait changer cela, d'autant que la Garde côtière va être intégrée avec tous les navires de Pêches et Océans etc., cela pourrait grandement aider le comité à déterminer ce qu'il faut faire au niveau de la Garde côtière et aussi aider le secteur privé, j'ai l'impression, car il pourra mieux déterminer où il y a des gaspillages et ce que l'on pourrait faire pour réduire encore les coûts.
Le président: Merci beaucoup. Nous n'avons plus le temps que pour une question.
Monsieur Verran.
M. Verran: Je vous remercie, monsieur le président. Je veux moi aussi remercier les personnes qui ont pris la peine de venir aujourd'hui exprimer les préoccupations du port de Halifax vis-à-vis des services de la Garde côtière, et leur souhaiter la bienvenue.
J'ai une question qui s'adresse à qui veut y répondre. Est-ce que le volume de trafic, le nombre d'emplois et la masse salariale dans le port de Halifax ont augmenté au cours des deux dernières années? Pourriez-vous nous donner une idée générale de la situation? Y a-t-il eu expansion de l'activité, ou stagnation, ou recul au cours des dernières années? Quelqu'un peut-il répondre?
M. King: Parlez-vous des emplois portuaires ou bien des emplois dans l'industrie en général?
M. Verran: Je parle de l'industrie et de la main-d'oeuvre.
M. King: Il y a évidemment différentes activités commerciales dans le port, mais si nous considérons plus particulièrement la main-d'oeuvre portuaire elle-même, elle a été régie par une convention collective de cinq ans qui ne prévoyait aucune hausse de salaire l'année dernière. Cette convention est maintenant expirée et est en cours de renégociation.
Pour ce qui est du volume du trafic, il augmente graduellement. Je pense qu'il y a eu un taux de croissance raisonnable en 1994.
Wade, connaissez-vous le pourcentage?
M. Elliott: Pour répondre à votre question, le mieux est de comparer le volume d'aujourd'hui à celui d'avant le marasme. Comme nous l'avons mentionné dans notre exposé, nous avons perdu près de 37 p. 100 de notre trafic de conteneurs. Nous avions atteint un volume de près de quatre millions de tonnes de conteneurs et l'année dernière nous avons tout juste dépassé trois millions de tonnes, si bien qu'il nous reste pas mal de chemin à parcourir avant d'avoir remonté la pente.
M. Verran: Donc, si ce barème tel que proposé par la Garde côtière était mis en place, vous ne doutez pas que l'activité du port s'en trouverait considérablement déprimée. Du fait de l'accumulation des frais, l'activité se déplacerait ailleurs.
M. King: Tout dépend de la manière dont la redevance sera structurée et de l'influence que nous pourrons exercer. Il est très difficile d'estimer les répercussions futures car il y a tant de variables, mais l'effet pourrait être très sensible. Comme nous l'avons dit au début, du fait que les marges sont tellement minces et que nous sommes déjà en concurrence pour du trafic qui tend à nous contourner, nous avons négocié avec les dockers la convention collective qui vient d'expirer et qui réduisait de 4$ le tarif par conteneur à destination du Midwest. Vous voyez combien la concurrence est serrée: ces 4$ ont fait une différence.
M. Verran: Par conteneur.
M. King: Par conteneur, et cela vous montre combien la concurrence est serrée.
M. Hayes: Comme nous l'avons dit dans notre exposé, il faut bien voir que bon nombre des parties intéressées, notamment les syndicats, les exploitants de terminaux et les municipalités, ont déjà consenti des efforts pour réduire les coûts à Halifax. La redevance proposée pourrait réduire à néant tous ces efforts pour récupérer le trafic perdu.
M. Verran: Il me reste juste une dernière question, monsieur le président, si vous me permettez.
Je sais que vous savez que nous sommes tous préoccupés par les coûts et les dépenses de la Garde côtière relativement aux services qu'elle fournit. Quantité de personnes et de délégations ayant comparu ici ont dit que ces coûts sont réellement déraisonnables.
Je voudrais donc vous poser cette dernière question. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus sur ce graissage des roues grinçantes et nous disiez quelles concessions précises ont été accordées - du moins dans l'esprit de la Garde côtière et sans doute pour alléger le fardeau dans une autre région - au détriment du port de Halifax? Pouvez-vous citer des cas concrets, sans nommer telle ou telle compagnie ni rien du genre? Cela nous aiderait certainement, car je ne connais aucun cas précis où la roue grinçante ait été graissée, ou bien où les protestations les plus vigoureuses aient été suivies de concessions. C'est juste une impression que j'ai.
M. Elliott: Une bonne partie de ces préoccupations remontent au moment où la Garde côtière a présenté pour la première fois son concept régional. Celui-ci fonctionne bien sur la côte ouest, mais sur la côte est, vous avez des chevauchements de zones et du trafic qui transite par la région Atlantique à destination du Saint-Laurent et des lacs. Il y a également beaucoup plus de variations locales entre les ports sur le plan des services requis que sur la côte ouest. C'est donc une approche beaucoup plus difficile sur la côte est.
La Garde côtière nous a soumis cinq ou six propositions successives. Chacune revenait à déplacer le fardeau d'un port à un autre au sein de la région. La Garde côtière a lancé ces divers ballons d'essai pour voir qui était prêt à accepter quoi etc. Le problème est que, sans données élémentaires de coûts port par port, qui permettraient de savoir précisément comment structurer la redevance, cela revient à procéder par essais successifs. On a vu des situations où la Garde côtière a introduit une concession pour régler un problème, mais ce faisant a ressuscité un problème qu'elle avait essayé de résoudre au moyen d'une concession précédente.
Dans le même ordre d'idée, l'incertitude face à l'avenir nous préoccupe aussi beaucoup. Par exemple, si le Canada atlantique connaissait un ralentissement des affaires dans le domaine du vrac ou dans tout autre domaine ainsi qu'une baisse importante du trafic, cet objectif fixe de recettes devrait quand même être atteint. Il se pourrait donc que les tarifs augmentent tout à coup, à Halifax ou ailleurs dans la région. C'est un aspect important de nos préoccupations: où cela pourrait-il nous conduire. Cela nous ramène donc à notre argument premier: à moins de disposer de données sur les coûts permettant de structurer la redevance port par port, vous n'allez pas pouvoir surmonter ce problème.
Le président: Je vous remercie beaucoup de vos exposés.
En quittant la salle maintenant, vous allez nous mettre en difficulté, Stan Keyes. Nous allons peut-être vous envoyer la Garde côtière, monsieur Keyes.
Le président: Nous entendons maintenant M. Warry, de Stelco, et M. Mothersill, de Dofasco. Qui veut commencer?
M. B.W. Warry (vice-président, Achats, matières premières et transport, Stelco Inc.): Je vais commencer.
Le président: Bien.
M. Warry: En fait, nous aimerions tous deux faire un exposé de cinq ou six minutes et laisser ensuite autant de temps que possible pour les questions.
En notre nom à tous deux, mais certainement en celui de Stelco, je vous remercie de votre invitation à comparaître aujourd'hui.
Le transport par eau dans les Grands lacs et le Saint-Laurent, y compris les services fournis par la Garde côtière, revêt une importance énorme pour Stelco et je suis donc très heureux de vous parler de ce sujet aujourd'hui.
Stelco a comparu devant plusieurs comités permanents ces dernières années pour parler de la Voie maritime, de la Garde côtière et du recouvrement des coûts. Nous avons participé à maintes tribunes et siégé à différents comités. Tout au long de cette période, Stelco et les usagers en général ont exprimé une position pas mal cohérente.
La nôtre est très simple. Avant de vous l'exposer, j'aimerais vous en dire un peu plus sur le groupe Stelco, car je n'ai encore jamais comparu à votre comité permanent.
Stelco est le plus important groupe sidérurgique du Canada. Nous employons 11 000 personnes. Nous avons produit cinq millions de tonnes d'acier en 1995, dont la plus grande partie dans nos deux aciéries intégrées, l'une située à Hamilton et l'autre à Nanticoke, sur la rive nord du lac Érié.
Pour fabriquer cet acier, nous consommons sept millions et demi de tonnes de minerai de fer et de charbon chaque année, entièrement transportés par eau jusqu'à nos aciéries. Nos activités donnent à Stelco une présence dans six provinces canadiennes et six États américains. En outre, nous sommes le plus gros actionnaires de Wabush Mines, qui exploite des mines au Labrador et au Québec, emploie 700 personnes encore et paye des frais d'exploitation annuels de plus de 175 millions de dollars.
J'aimerais également vous donner quelques renseignements sur notre industrie, en guise de contexte.
Nous sommes une entreprise sidérurgique canadienne, mais nos clients et concurrents, ou peut-être surtout les clients et concurrents de nos clients, sont nord-américains. Nous devons donc rester compétitifs avec les aciéries de toute l'Amérique du Nord et non seulement avec l'usine d'à côté ou celle de Sault-Ste-Marie.
Deuxièmement, le transport maritime et tout ce qui l'entoure - la Garde côtière, la Voie maritime du Saint-Laurent, le pilotage, le dragage et les ports - est essentiel à notre survie. Il conditionne notre fiabilité et nous avons besoin qu'il soit à prix concurrentiel si nous voulons prospérer. Ce n'est pas pour nous une question triviale.
Enfin, si nous regardons nos coûts de transport par eau du charbon et du minerai, particulièrement comparé aux coûts de nos homologues américains, qui sont nos concurrents réels, nous constatons d'emblée quelques faits inquiétants. C'est le cas avant même de prendre en compte le recouvrement des coûts de la Garde côtière. Il en coûte à Stelco près de 56 000$ de redevances diverses pour transporter un chargement de minerai canadien de Sept-Îles, au Québec, jusqu'à notre usine du lac Érié. Le transport d'un chargement similaire de Duluth à Chicago coûte à une compagnie américaine 5 000$ en redevances.
Au cours des dix dernières années, les sociétés du groupe Stelco ont pris un certain nombre de mesures de réduction des coûts douloureuses pour rester compétitives. Nous comptions anciennement 26 000 employés; aujourd'hui, le chiffre est tombé à 11 000. Notre coût de production global est aujourd'hui moindre qu'en 1989. En revanche, les redevances associées au transport maritime ont suivi une escalade au cours de cette période.
La position de Stelco sur le recouvrement des coûts peut se résumer en deux points.
Premièrement, notre entreprise est disposée à payer les services dont elle a besoin. C'est ce que nous avons toujours dit. Nous avons appelé de nos voeux et continuons à appuyer les initiatives gouvernementales visant à réduire le déficit. Nous ne demandons pas l'aumône. Nous ne demandons pas de largesses. Nous payons actuellement plus de 7 millions de dollars par an sous forme de redevances diverses.
Mais le deuxième élément de notre message, c'est qu'avant d'admettre de payer, certaines conditions doivent être remplies. C'est sur la base de ces conditions préalables qu'il faut juger les propositions actuelles de recouvrement de la Garde côtière. Il y a un an, Stelco croyait, en raison du rapport du Comité permanent des transports et du dialogue avec le gouvernement, que ces conditions seraient remplies. C'est sur la base de cette croyance que nous avions approuvé le principe du recouvrement des coûts. Malheureusement, ces conditions ne semblent plus devoir être remplies.
Il existe, à notre avis, six grandes conditions que le prestateur de tout service, public ou privé, doit remplir avant de pouvoir les facturer. Nous sommes persuadés que les plans de la Garde côtière ne les respectent pas. C'est pourquoi nous sommes fermement d'avis que le recouvrement des coûts ne doit pas être mis en oeuvre à ce stade.
Premièrement, il faut minimiser les coûts. Ceux qui font payer leurs services ont l'obligation de minimiser leurs coûts. C'est la même obligation que possède Stelco avant de facturer ses clients. C'était un élément clé du rapport du Comité permanent des transports, qui disait que la Garde côtière devait établir qu'elle maîtrisait et minimisait ses coûts avant d'imposer des redevances d'usager. Cela n'a simplement pas été fait. La Garde côtière n'a pas réduit sensiblement ses coûts ni prévu des compressions budgétaires agressives mettant à profit les avantages de la fusion avec le ministère des Pêches.
Deuxièmement, les usagers ne doivent payer que pour les services dont ils ont besoin et non pour ceux qui sont arbitrairement fournis. La première partie du recouvrement des coûts intéresse des aides à la navigation dont la Garde côtière affirme qu'elles coûtent 263 millions de dollars par an. On s'accorde presque universellement à dire que la technologie moderne permet de ramener ces coûts à une fraction de ce chiffre. Si la Garde côtière prétend faire payer les usagers, elle doit le faire sur la base du coût réel de la prestation des services requis.
Troisièmement, les taux prélevés pour les services requis doivent être compétitifs. Si la Garde côtière n'est pas compétitive, elle devrait commercialiser le service, ou du moins facturer des taux compétitifs. Encore une fois, c'est une recommandation du Comité permanent des transports et elle semble être ignorée.
Quatrièmement, le gouvernement doit décider quels services sont requis pour des raisons stratégiques, binationales ou d'intérêt général et les retrancher du système de redevances. Encore une fois, les propositions actuelles de recouvrement des coûts ne remplissent pas cette condition.
Cinquièmement, tout nouveau recouvrement des coûts doit être considéré à la lumière du coût d'ensemble du système. Les droits de la Garde côtière ne doivent pas être appliqués isolément, sans considérer les péages de la Voie maritime, les droits de pilotage, les redevances portuaires etc. C'est le coût d'ensemble du système qui détermine la compétitivité des usagers du système.
Enfin, tout système de recouvrement des coûts doit être appliqué au moyen d'un barème de droits juste et équitable. Selon la proposition la plus récente, les compagnies américaines qui importent des produits transportés par des navires traversant les eaux canadiennes mais ne faisant escale dans aucun port canadien ne paieraient sans doute pas leur juste part du recouvrement des coûts. Ce n'est ni juste ni équitable.
En bref, nous ne pensons pas que la Garde côtière ait rempli les conditions préalables requises. Les propositions présentées sont prématurées et mal pensées. Nous avons cru que l'industrie collaborait avec le gouvernement à l'élaboration d'un système de recouvrement des coûts équitable, conforme aux recommandations du Comité permanent des transports dont nous approuvions les principes. Tel ne semble plus être le cas.
À nos yeux, il semble plutôt que la Garde côtière cherche un instrument pour se procurer des recettes, sans tenir aucun compte des principes qui devraient être le fondement de tout système de recouvrement des coûts. C'est pourquoi nous pensons qu'il ne doit pas être mis en oeuvre à ce stade.
Nous continuons à admettre que le recouvrement des coûts est nécessaire. Nous restons disposés à payer dans le cadre d'un système juste. Mais nous ne sommes prêts à payer que si le système est juste et uniquement si le système de recouvrement des coûts remplit les conditions que nous avons expliquées et que tant les usagers que le gouvernement semblaient avoir adoptées, il y a plus d'un an. Nous souscrivons aux principes énoncés par la Chambre du commerce maritime et, en tant qu'entreprise, sommes disposés à collaborer avec la Garde côtière et le gouvernement pour remettre le processus dans la bonne voie.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie.
M. David F. Mothersill (directeur, matières premières, Dofasco Inc.): Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de cette occasion d'exprimer le point de vue de Dofasco sur le recouvrement des coûts de la Garde côtière.
Je commencerai par dire ce qui est, je l'espère, une évidence. Une Voie maritime économique est un élément fondamental d'une infrastructure des transports canadienne saine, laquelle conditionne à son tour la compétitivité de l'industrie canadienne en général et de la sidérurgie en particulier. Je commencerai par vous donner quelques renseignements généraux sur Dofasco, comme point de départ de mon argumentation.
Nous jouons un rôle important dans notre région, non seulement en tant qu'employeur de 7 000 personnes dégageant 2,6 milliards de dollars de chiffres d'affaires, mais aussi, de concert avec notre amie Stelco, en tant que point focal du réseau de fournisseurs et transformateurs et consommateurs d'acier, sans parler des activités de service que nous faisons vivre.
Dofasco est implantée à Hamilton depuis 1912. La récession, conjuguée à l'amorce de la mondialisation au début de la décennie, a menacé notre existence comme jamais encore elle ne l'avait été tout au long de notre histoire. Après une restructuration et des réductions d'effectifs impitoyables, et une somme énorme de travail, nous avons réussi à passer le cap.
Le haut fourneau à arc électrique et la machine à couler que nous construisons en ce moment à Hamilton sur le front du lac témoignent de notre résolution et de notre foi en Dofasco Hamilton. Cette réalisation aura également des retombées positives sur la région, puisqu'une partie importante des frais d'exploitation de 375 millions de dollars par an alimentera l'économie de notre région. Nos chances de survie dans la région dépendent d'un système de transport maritime et de services de Garde côtière propres à préserver notre compétitivité.
Nous produisons actuellement près de trois millions de tonnes d'acier par an, volume qui passera à quatre millions lorsque le nouveau haut fourneau entrera en service plus tard cette année. Pour produire une telle quantité, nous consommons quatre millions de tonnes de minerai de fer et deux millions de tonnes de charbon, à quoi s'ajoutent un million de tonnes de plaques d'acier que nous importons pour alimenter nos installations de finition.
Le minerai de fer est acheminé, cela ne vous surprendra pas, par eau. Vous trouverez une carte dans le mémoire qui montre la provenance de nos matières premières. Le minerai de fer provient de nos filiales de la côte nord du Saint-Laurent. Il s'agit de la Quebec Cartier Mining Company, dont nous sommes propriétaires à 50 p. 100 et qui compte 2 000 employés; de Wabush Mines, dont nous possédons 24 p. 100 en copropriété avec notre ami Stelco, et qui emploie 7 000 personnes; enfin, de la Iron Ore Company of Canada, dont nous détenons 7 p. 100, et qui emploie 2 100 personnes.
Plus de deux millions de tonnes de charbon sont acheminées par rail, en provenance de la Virginie de l'Ouest, du Kentucky et de la Virginie, jusqu'au lac Érié, puis par eau jusqu'à Hamilton.
Sur le million de tonnes de plaques d'acier que nous achetons un peu partout dans le monde, 800 000 tonnes empruntent la Voie maritime. Ce transport disparaîtra lorsque le nouveau haut fourneau et la nouvelle machine à couler entreront en service, mais notre consommation de ferraille, de minerai de fer et de fonte crue augmentera et ces matières premières seront transportées par eau.
Tout cela vous donne une idée de l'importance du transport par eau pour notre viabilité à long terme. Il en va de même pour la scierie que nous exploitons aux États-Unis, dans l'État du Kentucky, en copropriété avec Gallatin Steel Corporation.
Nous sommes peut-être deux pays et il y a peut-être encore des litiges commerciaux, mais nous sommes un seul et même marché. Les grandes aciéries canadiennes sont de ce fait en concurrence moins les unes avec les autres qu'avec le reste de l'Amérique du Nord, et même le monde entier.
L'usine de Gallatin poursuit un double objectif - aider la clientèle américaine et offrir une source d'approvisionnement supplémentaire pour nos installations de finition de Hamilton. Gallatin est située sur les rives de l'Ohio et son fret emprunte le fleuve Mississipi. Son haut fourneau est alimenté principalement en ferraille dont le Midwest est la plus grosse source d'approvisionnement d'Amérique du Nord. Le Midwest consomme également 65 p. 100 des 20 millions de tonnes de laminats produits aux États-Unis, notamment par Gallatin. Gallatin reçoit des matières premières et expédie en retour des produits finis. Le transport par eau est un facteur. Je peux vous assurer que les responsables de l'usine connaissent le coût du transport sur le Mississipi.
Voici pour ce qui nous concerne. J'aimerais maintenant parler de la Garde côtière.
Il y a deux grands enjeux: la rentabilisation et le recouvrement des coûts. Le rapport de l'an dernier du Comité permanent des transports reliait les deux éléments, la réduction des coûts au strict minimum étant le préalable du recouvrement. Une fois la condition remplie, le recouvrement des coûts peut raisonnablement être mis en place; dans le cas contraire, il ne doit sûrement pas l'être.
Étant donné l'importance des coûts du transport par eau pour les divers usagers - et les aciéries n'en sont qu'un parmi d'autres - cette condition particulière revêt une signification à la fois éthique et pratique. Elle est impérative. On peut faire l'analogie avec un tribunal: ceux d'entre nous qui nous défendons contre les propositions actuelles n'ont besoin que d'établir l'existence d'un doute raisonnable pour faire pencher le verdict en notre faveur.
Permettez-moi de prendre un exemple, les aides à la navigation. La Garde côtière en chiffre le coût à 263,5 millions de dollars. Il existe aujourd'hui une technologie qui les rend inutiles. Le système de positionnement GPS peut guider les navires dans la Voie maritime à une fraction de ce prix.
Si je m'attarde sur les aspects financiers - et je le dois, car c'est le coeur de la question - c'est pour signaler que le gouvernement américain paraît comprendre l'importance d'un transport compétitif le long de la Voie maritime. En effet, il absorbe le coût d'exploitation du côté américain. Je dois m'élever contre un barème de redevances qui fait qu'un navire battant pavillon étranger paie s'il touche à un port canadien mais non s'il touche à un port américain. Est-ce que cela n'équivaut pas à subventionner les emplois américains?
Mon collègue de Stelco a déjà indiqué que les redevances canadiennes sont dix fois plus élevées que les américaines. Si nous voulons être compétitifs - et nous sommes en concurrence permanente avec les aciéries américaines - il serait bon de le faire sur un pied d'égalité.
Pour souligner l'ampleur que revêt pour nous ce problème, le minerai de fer et le charbon représentent 20 p. 100 de notre coût de production total. Les péages représentent 18 et 13 p. 100 respectivement du coût de transport de ces matières premières. Si vous y ajoutez les frais d'écluses et les redevances TJR, nous payons 8,5 millions de dollars, soit près de 12 p. 100 des recettes totales de l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent.
Il faut dire aussi qu'au cours des dix dernières années, les majorations de péage dans le fleuve Saint-Laurent et le canal Welland ont non seulement largement surpassé l'indice des prix à la consommation mais aussi les hausses de prix de l'acier. Ces relèvements ne reflètent tout simplement pas la réalité du marché dans lequel les divers usagers doivent survivre.
Cela dit, je tiens à souligner que Dofasco soutient l'effort gouvernemental de réduction du déficit et l'initiative de la CCG. Nous sommes disposés à payer le service. Cependant, la condition de départ est que nous ayons besoin du service que l'on nous fait payer.
Nous vivons tous à l'ère de la convivialité et du client-roi. Privilégier le client signifie lui donner ce dont il a besoin et non pas ce que l'on pense qu'il devrait avoir. Il s'ensuit qu'il est logique de consulter le client. Comment savoir autrement ce dont il a besoin? Or, nous n'avons pas été consultés. En tant que client apportant plus de 10 p. 100 des revenus, je trouve cela déplorable et inacceptable.
Il importe de ne pas isoler un aspect en particulier: c'est tout le système de transport qu'il faut évaluer. Au lieu d'un bricolage ponctuel, il faut veiller à ce que chaque changement apporté soit fondé au regard de l'ensemble du système de transport.
Pour conclure, je veux attirer de nouveau l'attention sur les deux recommandations clés du rapport du Comité permanent des transports, dont j'ai déjà fait état. La recommandation 23 dit qu'aucun programme de recouvrement des coûts ne doit intervenir tant que la Garde côtière n'a pas identifié le coût de ses services et les niveaux de services futurs requis et n'a pas établi qu'elle maîtrise ces coûts et les a ramenés au plus bas niveau possible. La recommandation 25 dit que la Garde côtière et les usagers - et je répète, les usagers - devraient entreprendre aussi rapidement que possible de réduire le nombre des aides à la navigation, par l'introduction de technologies et matériels nouveaux, et d'envisager ensuite la commercialisation du reste.
Une ligne directrice du Conseil du Trésor sur la mise en oeuvre de redevances d'usager dit que les ministères doivent au préalable évaluer leur incidence, en particulier sur la concurrence intérieure et internationale. Ni les recommandations ni les lignes directrices n'ont été suivies en l'occurrence. La dernière proposition de la Garde côtière est inacceptable pour Dofasco, en tant qu'usager, car elle repose sur des chiffres tirés de nulle part, qui sont sans rapport avec la réalité économique et qui sont déterminés uniquement par la quête égoïste de revenus.
Au nom de Dofasco, je vous remercie de nouveau pour votre invitation et répète que nous sommes partisans du processus tel qu'esquissé par la Chambre de commerce maritime et serions même ravis de collaborer avec la Garde côtière et le gouvernement pour assurer sa mise en oeuvre équitable et raisonnable. Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup.
Si les droits étaient mis en place le 1er juin, combien chacune de vos sociétés paierait-elle cette année pour les aides à la navigation?
M. Warry: Le chiffre annualisé pour Stelco est légèrement supérieur à 500 000$, et le chiffre pour cette année serait donc le pro rata de cette somme.
M. Mothersill: Pour nous, ce serait aux alentours de 750 000$.
Le président: Nous essayons simplement d'établir pour chacun des témoins comparaissant ici combien cela va leur coûter.
Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier: Monsieur le président, votre question concernait seulement les aides à la navigation, c'est-à-dire le 500 000$ et le 750 000$, alors qu'on sait qu'il y a beaucoup d'autres choses qui s'en viennent. Je comprends l'inquiétude des témoins. Vous me permettez encore, monsieur le président, de louanger le bon esprit corporatif des clients qui se présentent devant nous. On voit qu'ils sont passés par le processus. Ils ont démontré qu'ils étaient intéressés à participer à la réduction du déficit canadien.
Cependant, c'est la formule qui les préoccupe. Ils sont prêts à faire leur chèque, mais comme tout bon gestionnaire, il faut qu'ils puissent l'indiquer dans une colonne d'un grand livre. Cette colonne, c'est-à-dire give me a chance, n'existe pas. Ce sont des hommes d'affaires et ils doivent classer les choses au bon endroit. On les avait invités à participer à un programme, mais les conditions préalables des articles 23 et 25 des rapports précédents n'ont pas été remplies.
Je partage leur inquiétude. Les deux clients semblent s'aligner sur les propositions de la Chambre de commerce maritime. La Chambre de commerce maritime a, elle aussi, demandé un moratoire, ce qui implique qu'on ne demande pas une mesure intérimaire au gouvernement. Est-ce bien ce que je dois comprendre? Les deux entreprises que vous représentez disent qu'elles sont prêtes à payer, mais seulement lorsque le gouvernement aura fait ses devoirs. Si ça prend un an, elle ne paieront que l'an prochain. Donc vous demandez le moratoire. C'est bien ce que je dois comprendre? Il n'y a pas de mesure intérimaire entre les deux?
[Traduction]
M. Warry: Du point de vue de Stelco, je dirais que la réponse est oui. Ce n'est pas différent, soit dit en passant, de la façon dont nos clients nous traitent. Nous n'aurions jamais l'effronterie d'aller voir General Motors et de demander une augmentation si nous n'avions rempli toutes les conditions préalables que nous demandons à la Garde côtière. Une entreprise comme la nôtre n'a nul droit de demander à ses clients de payer plus pour ses produits si elle ne peut démontrer qu'elle maîtrise ses coûts et qu'elle ne fournit au client que ce qu'il veut.
Donc oui, je dirais que vous avez très bien résumé notre position. Nous ne sommes pas prêts à payer quoi que ce soit tant que le gouvernement et la Garde côtière n'ont pas fait le travail que nous attendons d'eux, le même que nos clients attendent de nous.
M. Mothersill: La réponse est oui aussi pour Dofasco. Je souscris à ce que dit Brian et je pense que vous avez très bien résumé la situation. Nous sommes prêts à payer si le processus est correctement établi, si nous avons notre mot à dire et sommes certains que nous payons uniquement les services qui nous sont fournis.
Il nous faut également un terrain de jeu égal avec nos concurrents américains. Quoi qu'il advienne, si nous ne pouvons soutenir la concurrence sur le marché en raison des disparités entre ce que les Américains doivent payer et ce que nous devons payer, on entame un processus qui nous rendra non concurrentiels. Vous savez ce qu'il en résultera pour nous à long terme.
[Français]
M. Bernier: Je viens d'un comté rural assez éloigné du centre du pays. C'est celui de Gaspé, le nez du Québec. Je dois dire que je suis plutôt envieux. J'aimerais que de grosses compagnies comme Stelco et Dofasco viennent s'établir chez nous. Ces compagnies s'apprêtent à payer de gros montants sous forme de cotisations ou de taxes déguisées, si on peut les appeler ainsi, parce qu'on ne peut pas trouver de justification à ce que la Garde côtière veut faire.
Il y a une question qui me tracasse. Le témoin de Dofasco dit que sa compagnie effectue 10 p. 100 du trafic et n'a même pas été consultée. Stelco doit effectuer presque autant de trafic.
Vous venez de la région d'Hamilton. La vice-première ministre vient-elle de la même région? À qui avez-vous pu transmettre vos doléances? Vous êtes de gros joueurs. Vous n'avez jamais eu d'audiences avec la Garde côtière et le ministre ne vous a pas écoutés non plus? Aïe! Aïe!
Jusqu'où êtes-vous prêts à jouer le jeu? Vous êtes dans le contexte de la mondialisation. Des joueurs comme vous sont carrément dans tous les pays ou dans les échanges nord-américains. Vous achetez ou revendez, mais votre produit est directement en concurrence avec ceux des Japonais. Jusqu'où êtes-vous prêts à aller pour faire entendre raison au gouvernement? Je sais que ce n'est pas votre genre de prendre des pancartes et de descendre dans la rue, mais comme hommes d'affaires, vous avez peut-être d'autres moyens auxquels nous ne pensons pas nécessairement.
Je vais répéter votre message haut et fort, mais je suis étonné que de gros joueurs comme vous n'aient pas reçu plus d'attention dans le système.
Vous reste-t-il d'autres trucs dans votre sac au cas où nous échouerions lorsque nous allons remettre notre rapport lundi? J'espère que oui.
[Traduction]
M. Mothersill: Puis-je répondre à celle-ci, Brian?
[Français]
M. Bernier: Vous n'êtes pas obligé de me les dire, mais j'espère que vous en avez.
[Traduction]
M. Mothersill: Non, je ne pense pas que nous ayons des atouts cachés dans nos manches. Nous avons travaillé fort en collaboration étroite avec la CCM. Nous pensions avoir un processus qui allait être équitable, mais il n'en a pas été ainsi.
Jusqu'où nous faudra-t-il aller? Il est difficile de le dire, mais une fois le système en place, nous l'évaluerons sous l'angle commercial et nous ferons ce que nous penserons devoir faire. Nous avons déjà effectué un gros investissement dans un pays étranger jouissant d'un système de transport par eau efficient. Cela nous a permis de nous implanter sur le marché américain.
J'espère que nous pourrons continuer à renforcer Hamilton, mais ne mettez pas d'obstacles sur notre route qui nous empêcheront de continuer à investir là où nous comptons le faire - au Canada.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Lastewka.
M. Lastewka (St. Catharines): Je vous remercie, monsieur le président.
Je voudrais m'attarder sur les 263 millions de dollars et la fraction du coût. Si la réponse figure dans le rapport du Comité permanent des transports, dites-le-moi, car je ne le connais pas encore très bien, mais j'y remédierai bientôt.
Le rapport a-t-il expliqué comment passer des 263 millions de dollars à une certaine fraction de ce chiffre? Et quelle est cette fraction, 10 p. 100, 20 p. 100, 30 p. 100? Vous avez dit «fraction», mais quel est le chiffre?
M. Warry: Je ne pense pas qu'il existe un chiffre absolu. Différentes personnes mentionneront des chiffres différents.
La technologie dont il est question dans le rapport du comité semble être le positionnement global, qui est beaucoup utilisé dans le secteur des transports, et l'on s'accorde à dire que le recours à un tel système permettrait de faire baisser considérablement les coûts.
On a cité pour le Saint-Laurent des chiffres aussi faibles que 8 millions de dollars par an, à comparer au chiffre estimé par la Garde côtière, quel qu'il soit, mais si on prend comme base 263 millions de dollars, ce serait environ un dixième de ce chiffre. Certains diront que ce pourrait être 23 millions de dollars, 15 millions de dollars ou 30 millions de dollars. Je ne suis pas expert, mais voilà l'ordre de grandeur dont nous parlons, et il ne s'agit donc pas d'une simple réduction de 263 millions de dollars à 250 millions de dollars. Il ne s'agit pas d'économies de bout de chandelle.
M. Lastewka: Est-ce que le rapport du comité expliquait en détail comment passer des 263 millions de dollars à cette fraction du coût?
M. Warry: Je crois qu'il parlait simplement de recourir aux technologies nouvelles. Pendant ses déplacements, le comité a entendu des avis très détaillés émanant de gens qui connaissent la question. Je ne pense pas qu'ils aient dressé un plan aussi précis que ce que vous recherchez.
M. Lastewka: Étant donné votre expérience et celle de votre société, pourriez-vous nous donner des indications un peu plus détaillées?
M. Warry: Je pense qu'il faudrait plutôt vous adresser aux compagnies maritimes. Elles connaissent beaucoup mieux la question. Des études ont été faites. Une compagnie maritime va comparaître cet après-midi, je crois. Elle devrait pouvoir mieux vous renseigner que moi.
M. Lastewka: Je vous remercie.
Le président: Madame Brown.
Mme Brown (Oakville - Milton): Merci.
Je vous remercie, messieurs, de votre exposé. D'après ce que vous dites, il m'apparaît qu'un processus a été lancé et a été couronné par un rapport, que la plupart des principaux intéressés en ont accepté les recommandations, en renâclant plus ou moins, mais qu'aujourd'hui, sans doute en raison de pressions financières, on se précipite pour mettre en place les redevances en négligeant toutes les autres recommandations du rapport. Est-ce que je me trompe?
M. Warry: C'est juste.
Mme Brown: J'ai l'impression qu'il y a quelque temps Stelco et Dofasco étaient à peu près satisfaits du processus. Quand vous êtes-vous rendu compte que celui-ci ne se déroulait pas comme vous l'aviez pensé? Il y a combien de mois était-ce, ou bien est-ce tout récent?
M. Warry: En ce qui me concerne, j'ai réalisé graduellement que nous n'obtenions pas ce qui, pensions-nous, avait été promis. «Promis» est peut-être un mot trop fort, mais il y a un an nous pensions que le processus respecterait les conditions que j'ai énoncées.
Un conseil - peu importe son nom, la Commission consultative maritime - a été créé. Stelco y était représenté et l'est toujours. Au début, nous pensions que la commission se pencherait sur tous les aspects du recouvrement des coûts par la Garde côtière. Or, il est apparu presque dès notre arrivée que la commission était devenue une tribune où l'on parlait uniquement du recouvrement des coûts, au détriment de la réduction des coûts.
Nous nous sommes demandés à plusieurs reprises au cours des cinq ou six derniers mois si nous ne devions pas tout simplement cesser d'y siéger car nous pensons que la commission est utilisée à notre détriment au lieu de faire ce que nous pensions qu'elle ferait.
À chaque fois nous nous sommes dits qu'il valait mieux être à la table et de continuer à parler. Tant pis! Une fois nous partis, qui sait ce qui arriverait? Mais il ne fait aucun doute dans notre esprit que Stelco n'a pas retiré grand-chose de sa participation et nous avons l'impression de nous être fait un peu avoir.
Mme Brown: Je suppose donc que la Commission consultative maritime a été créée après la publication du rapport du Comité permanent des transports avec essentiellement pour mission, dans votre esprit, de mettre à exécution les recommandations du rapport du comité en prévision des nouvelles redevances.
M. Warry: C'est à peu près cela, mais ce n'était pas nécessairement écrit noir sur blanc. De par notre comparution au Comité des transports, nos entretiens avec les ministres, nos entretiens dans les comités et les diverses tribunes auxquelles nous avons participé, les séances de séminaire et tout le reste, Stelco pensait que le gouvernement, de manière générale, adhérait à la notion que seuls seraient recouvrés les coûts remplissant ces conditions: qu'ils soient identifiables, que les services visés soient effectivement requis par l'usager final et que les redevances soient justes et équitables - une fois le gouvernement ayant déduit la partie qui lui revient, celle qu'il lui incombe d'absorber parce que les services sont dans l'intérêt public, répondent à des engagements nationaux, visent le contrôle des inondations et ce genre de choses.
Dans mon esprit, la CCM était en quelque sorte le véhicule pour faire tout cela, mais je pensais qu'il y avait un accord général sur les conditions préalables à remplir avant que le recouvrement entre en vigueur. Mais il n'en a pas été ainsi.
Votre impression est sans doute bonne: dans le courant de l'année, quelqu'un a dit à quelqu'un d'autre: il nous fait tant d'argent, allez le chercher. Et c'est devenu une taxe au lieu de ce que c'était censé être. C'est cela qui nous gêne.
Mme Brown: Et tout se passe comme si cela avait enrayé un processus qui était positif. Nous savions tous qu'il fallait réformer dans une certaine mesure la Voie maritime.
M. Warry: Oui, je pense que c'est juste également.
Le président: Monsieur Culbert.
M. Culbert: Soyez les bienvenus, messieurs. Comme d'autres membres du comité l'ont indiqué, nous avons pleinement conscience de la situation et nous avons beaucoup de respect pour vos sociétés et le rôle économique important qu'elles jouent dans la région, notamment sur le plan de l'emploi et de toutes les retombées qui en résultent.
Venant moi-même des milieux d'affaires, j'attends toujours des pouvoirs publics qu'ils fassent les choses efficacement. Et même, je l'exige.
Dans le cas particulier qui nous occupe, je déduis de vos propos qu'aucun de vous deux n'est opposé au principe d'une redevance d'usager. Ma question est peut-être un peu déloyale, mais je vais la poser quand même.
En tant que membres du comité, nous devons jongler avec toutes sortes de positions contradictoires qui s'inscrivent dans des perspectives différentes. Je vous demande donc s'il y a, à l'heure actuelle, pour 20 millions de dollars d'aides à la navigation en place dans notre pays et, si oui, qui devrait les payer? Est-ce le contribuable qui doit continuer à payer, ou bien faut-il instaurer des droits de services, en quelque sorte?
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais certains témoins ont même dit qu'ils n'étaient pas opposés au principe et que peut-être même les services seraient plus efficaces ou efficients s'ils étaient eux-mêmes propriétaires de certaines de ces balises ou si elles étaient commercialisées ou privatisées.
J'aimerais savoir ce que vous pensez, selon la perspective commerciale, de cette façon de voir les choses.
M. Mothersill: Si vous parlez des 263 millions de dollars que coûtent les aides à la navigation, si le chiffre était ramené à 26 millions de dollars, nous ne serions pas là en ce moment. Je ne comprends donc pas très bien votre question. Il s'agit donc d'abord de faire le ménage pour voir exactement quels services sont requis.
De quels services va-t-on avoir besoin au cours des cinq prochaines années? Une fois cela déterminé, nous n'avons rien contre l'idée de payer notre juste part de ces services. Mais il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs. Il faut d'abord voir quels coûts on peut éliminer au niveau de la Garde côtière, et ensuite s'inquiéter de la répartition de ce qui reste. Déterminez donc comment réduire les coûts au plus bas niveau possible, et nous serons prêts à parler du recouvrement.
La question n'est donc pas de savoir quel chiffre nous pouvons accepter ou ne pas accepter. C'est un principe qui est en jeu, celui de s'attaquer aux coûts d'ensemble afin de réduire le déficit en abaissant ces coûts, avant de s'inquiéter de savoir comment en recouvrer une partie auprès des usagers.
M. Culbert: C'est évidemment là la responsabilité de la Garde côtière. Dans son exposé de janvier de cette année, M. Thomas a indiqué - et je le cite: «La Garde côtière est engagée dans un plan de réduction des coûts à hauteur de 133 millions de dollars par an sur une période de cinq ans». Voilà donc pour cet aspect; et bien entendu, les redevances d'usager n'interviendraient que pour une partie de la réduction de coûts totale et de toute la philosophie qui la sous-tend.
Ce à quoi j'essaie d'en venir, c'est de savoir, en fin de compte, une fois que vous avez ce critère des aides à la navigation requis par les transporteurs, dans quelle proportion la redevance d'usager doit couvrir les aides qui sont requises, que ce soit pour des raisons de sécurité ou pour répondre aux besoins des capitaines et des transporteurs dans les différentes régions? Voilà donc un élément; ensuite il s'agit de savoir si ces aides sont fournies de la façon la plus efficiente possible, comme vous le demandez.
M. Warry: Tout d'abord, je pense que la Garde côtière et le gouvernement ont entendu l'industrie indiquer très clairement il y a un an qu'elle est disposée à payer. La partie qu'ils n'ont pas entendue aussi clairement était que la Garde côtière avait certaines obligations avant que nous commencions à payer. Je frémis toujours un peu lorsque je lis la partie du discours disant que nous sommes prêts à payer, car c'est habituellement ce que la Garde côtière entend, ensuite de quoi elle débranche les écouteurs et n'écoute plus la suite.
Deuxièmement, si vous posez la question à la Garde côtière, je pense qu'elle vous répondra de ne pas vous inquiéter, qu'en fin de compte il doit bien y avoir pour 20 millions de dollars d'aides à la navigation en place, et donc nous allons faire payer 20 millions de dollars à l'industrie et tout ira bien. S'il s'avère qu'il n'y a que pour 6 millions de dollars d'aides à la navigation, la Garde côtière se frottera les mains parce qu'elle touchera quand même 20 millions de dollars. Ce chiffre n'a rien à voir avec ce qui est nécessaire ni même avec ce qui est effectivement fourni. C'est une tentative de soutirer 20 millions de dollars, et elle n'écoute rien d'autre.
C'est justement contre cela que nous protestons. Nous disons qu'il faut d'abord déterminer ce qui est requis. Ensuite, réduire le coût au maximum. Ensuite, nous pourrons discuter pour savoir qui est propriétaire de telle partie, qui est propriétaire de telle autre et qui doit payer. Une fois les deux premières tâches remplies, nous rédigerons des chèques. Mais tant que les deux premières conditions ne sont pas remplies, ils n'ont pas le droit de nous demander d'argent.
Je n'ai pas le droit d'aller voir General Motors et de leur demander une augmentation si je ne peux leur prouver que, pour ma part, j'ai fait tout mon travail. Je ne peux aller voir General Motors et leur dire que je vais augmenter le prix de l'acier de seulement 5$ par voiture, vous en avez les moyens, n'est-ce pas; est-ce que vous allez faire faillite si j'augmente le prix de l'acier de 5$? Nul n'a le droit de formuler une majoration de prix en ces termes, et je ne pense pas que la Garde côtière ait le droit de venir me voir et me dire, payez-moi 500 000$; allez-vous faire faillite l'année prochaine si vous payez 500 000$? Elle n'en a pas le droit, tant qu'elle ne fait pas le travail qui lui incombe; et elle ne l'a pas fait.
M. Culbert: Je comprends cela.
Nous allons entendre M. Thomas et la Garde côtière ce soir et nous allons évidemment lui poser toutes ces questions, que vous-même et beaucoup d'autres avez formulées ces derniers jours et ces dernières semaines.
Avant de terminer, avez-vous une idée des besoins en matière d'aides à la navigation qui existent dans votre région? Des témoins nous ont dit, par exemple, qu'il y a x nombre de balises mais qu'avec la technologie actuelle dont les navires disposent, beaucoup pourraient être enlevées sans que cela nuise à la sécurité de la navigation. Avez-vous une idée des besoins dans vos régions?
M. Mothersill: Je pense qu'il faudrait le demander aux compagnies maritimes. Nous sommes simplement les propriétaires de la marchandise à un bout, nous en prenons livraison à l'autre bout et payons les frais de transport, qui englobent tout.
Une chose qui est intéressante c'est que les aides à la navigation ne sont sans doute pas toutes en place en ce moment même. Or, les navires circulent déjà sur le Saint-Laurent.
Le président: Je vous remercie d'être venus, ainsi que de vos mémoires très réfléchis.
M. Mothersill: Une chose que je n'ai pas précisée, c'est que j'ai joint au mémoire un schéma de la fabrication de l'acier, à titre d'information. Si vous le regardez, vous verrez comment les matières premières sont transformées dans un haut fourneau et en aval. C'est tiré de notre rapport annuel.
Le président: Je vous remercie.
La séance est levée jusqu'à 15h30.