[Enregistrement électronique]
Le mardi 22 octobre 1996
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Bienvenue à tous à notre 26e séance, sur le projet de loi C-44, Loi favorisant la compétitivité du réseau portuaire canadien, par une rationalisation de sa gestion.
Messieurs, vous avez certainement déjà témoigné devant notre comité. Nous vous demandons de prendre de dix à quinze minutes, au maximum, pour faire votre déclaration. Vous avez une demi-heure en tout. Nous aurons ainsi du temps pour un tour de questions avec les membres, qui vous interrogeront sur les thèmes qui les intéressent. Je vous souhaite la bienvenue et vous cède la parole.
[Français]
M. Claude Cantin (vice-président exécutif, Ville de Québec): Merci beaucoup, monsieur le président. Je m'appelle Claude Cantin. Je suis le maire suppléant de la Ville de Québec. Je viens aujourd'hui vous présenter le mémoire de la Ville de Québec concernant le Port de Québec ainsi que d'autres éléments de la politique fédérale qu'on voudrait toucher.
Je voudrais d'abord présenter les deux fonctionnaires du Service de la planification de la Ville de Québec qui m'accompagnent. Ce sont M. Michel Campeano et M. Laurent Lampron.
Le mémoire que la Ville présente aujourd'hui concerne une étude sur le transport, le commerce et le tourisme ainsi que le projet de loi C-44. On me confirme que vous étudiez les deux questions à la fois.
La Ville de Québec juge essentiel de déposer ce court mémoire dans le cadre de l'étude sur les relations entre le transport, le commerce et le tourisme, ainsi que sur le projet de loi C-44, étant donné l'importance pour la ville et la région de compter sur des infrastructures de transport modernes et efficaces pouvant les relier aux autres villes du Canada et d'Amérique.
Il faut savoir que la région de Québec est en voie de se doter d'une stratégie économique fondée sur quatre principaux axes de développement, soit le tourisme, l'activité portuaire et maritime, la technologie et l'aide à l'entrepreneurship.
Vous trouverez, relativement à l'étude sur les transports, le commerce et le tourisme, des recommandations convergentes avec les propositions de nos partenaires, que nous avons consultés sur cette question, à savoir l'Office du tourisme et des congrès de la Communauté urbaine de Québec, la Société de développement économique du Saint-Laurent et le Port de Québec.
Nous traiterons en premier lieu du fleuve Saint-Laurent et des coûts de la Garde côtière canadienne. Nous avons notamment demandé de réaliser une étude d'impact avant l'application de la tarification, de réviser les niveaux de service de la Garde côtière, de trouver des méthodes moins coûteuses pour assurer ces services, d'adopter un mode de recouvrement uniforme pour tout le Canada et de développer avec l'industrie une formule juste et équitable de recouvrement des coûts de la Garde côtière.
Malgré ces demandes, le gouvernement du Canada a décidé de mettre en application dès le 1er juin une tarification dont les modalités varient selon cinq régions. Parallèlement, une étude d'impact économique des diverses réformes maritimes est en cours de réalisation par Pêches et Océans Canada et Transports Canada. La ville entend continuer à suivre de près ce dossier afin de s'assurer que la région de Québec soit traitée de façon équitable et qu'elle demeure compétitive.
L'objectif est de ne pas affecter la compétitivité du Saint-Laurent au profit des ports de la côte est américaine, qui sont davantage à proximité des marchés. C'est la position que vous entendrez la Sodes formuler. Nous recommandons une meilleure concertation du gouvernement fédéral avec les intervenants régionaux.
La Ville de Québec souhaite que le gouvernement fédéral en vienne à une entente avec la région pour minimiser les impacts négatifs de la politique de recouvrement des coûts de la Garde côtière et pour maintenir et accroître l'importance commerciale et touristique de la Voie maritime du Saint-Laurent.
Quant au réseau routier, comme le précise le mémoire de l'Office du tourisme, 77 p. 100 de la clientèle touristique de la région de Québec accède à la région par automobile. On comprend dès lors l'importance des infrastructures routières dans le développement touristique de la région. En ce sens, nous souhaitons que le réseau autoroutier soit amélioré pour favoriser un meilleur accès aux Maritimes, à l'Ontario et au nord-est des États-Unis.
Nos liens par route avec Montréal sont relativement simples, mais ce n'est pas le cas lorsque l'on se dirige davantage vers l'Ontario, ou surtout du côté est, vers les Maritimes et vers les États-Unis, où les routes n'ont pas la même qualité sur toute leur longueur. Si vous quittez Québec et vous dirigez vers les États-Unis, vous arrivez rapidement à des routes secondaires.
Nous appuyons la recommandation de la Communauté urbaine de Québec qui demande que soit considérée, dans le cadre de l'entente Canada-Québec, une amélioration notable de la qualité, du confort et de la sécurité des infrastructures autoroutières, tout particulièrement celles reliant l'Est canadien au nord-est des États-Unis, ainsi que le corridor Toronto-Québec.
Quant au réseau ferroviaire, la Ville de Québec croit qu'un train rapide dans le corridor Québec-Toronto est un projet qui constitue un point tournant du développement économique et social de la région de Québec et de l'est du Canada. En plus de créer des emplois, ce projet viendra mobiliser les Canadiens et stimuler l'économie, tout en assurant des retombées fiscales intéressantes pour les gouvernements.
En effet, l'étude tripartite Canada-Québec-Ontario a déterminé que, même dans le scénario le moins rentable, soit le corridor Québec-Windsor, des surplus d'exploitation très importants, atteignant près de 500 millions de dollars la première année et croissant annuellement, permettraient aux gouvernements de récupérer leurs investissements sur une période de 30 ans.
Bien que les trois gouvernements se soient dits disposés à recevoir de TGV-Canada une proposition sur un projet moins coûteux que les estimations produites lors de la dernière étude, nous nous permettons de mettre en garde le Comité permanent des transports contre de fausses économies. Souvent, et nous en sommes assurés dans le cas de ce projet, les solutions dites de compromis comportent des coûts directs moins élevés, mais leur efficacité et leur efficience sont grandement inférieures.
Le premier compromis à éviter, à notre avis, est de se satisfaire d'une technologie moins performante que le TGV sur l'ensemble ou une partie du tracé. L'étude a clairement démontré que seule une technologie à 300 kilomètres à l'heure doit être retenue, sinon elle ne fera concurrence ni à l'avion ni à l'automobile.
Deuxièmement, le projet doit inclure le tronçon Québec-Montréal. Le compromis Montréal-Toronto est tout à fait inacceptable. Il relèverait d'une approche strictement comptable à courte vue. Les gouvernements, leurs capitales et les métropoles n'y trouveraient pas leur compte. Il est inutile de reproduire ici les données maintes fois citées quant au potentiel et au nombre élevé de déplacements dans le corridor Québec-Montréal ou de rappeler l'importance stratégique d'une liaison ferroviaire efficace entre Québec, Montréal, Ottawa et Toronto.
Bien qu'une révision du tracé puisse se traduire par une certaine réduction des coûts, nous croyons qu'on doit davantage compter sur une nouvelle formule de financement qui réduirait la mise de fonds des gouvernements, comme le suggérait en avril dernier M. Bernard Lamarre. TGV-Canada devra donc examiner de près cet aspect en préparant sa proposition.
Quatrièmement, nous traiterons de l'accès aérien et tout d'abord de l'aéroport international Jean Lesage.
Comme vous le savez, cette année, la Ville de Québec s'est dotée d'un nouveau Centre des congrès tout à fait moderne. Évidemment, pour que les touristes et congressistes puissent facilement accéder à Québec, il est nécessaire d'avoir des installations aéroportuaires importantes. Le gouvernement avait envisagé des améliorations importantes à l'aéroport international Jean-Lesage, dont l'élargissement de la piste principale, la reconnaissance du statut international, l'agrandissement en cours d'une aérogare et la nouvelle tour de contrôle.
D'autres décisions se sont toutefois avérées moins heureuses. Ainsi, le départ des contrôleurs aériens s'est traduit par la perte de 15 emplois. On nous avait alors promis la construction du Complexe aviation sur les terrains de l'aéroport. Ce complexe, évalué à environ 14 millions de dollars, devait comprendre la nouvelle tour de contrôle, un centre d'entretien de services techniques et des bureaux administratifs, ainsi qu'un centre d'information de vol régional. Pour le moment, le projet est réduit à 9,5 millions de dollars et ne comprend que la tour et les bureaux. Il semble que le centre d'information de vol, qui devait créer environ 55 nouveaux emplois, ne verra pas le jour, du moins à moyen terme. La Ville demande donc qu'on revoie cette décision et qu'on procède dans les meilleurs délais à la réalisation complète du Complexe aviation.
Par ailleurs, la Ville appuie la démarche de privatisation de la gestion de l'aéroport. À titre d'entité de désignation, elle a nommé deux membres du conseil d'administration de la Société aéroportuaire de Québec. La ville compte sur la collaboration et la bonne volonté des représentants de Transports Canada dans les négociations à venir. On devra viser une entente équitable qui assure des revenus suffisants à la société aéroportuaire, sans taxer trop lourdement les transporteurs ou les voyageurs. Le gouvernement fédéral devra avoir le souci d'appuyer le développement de la région plutôt que de se cantonner dans une attitude de recherche du maximum de revenus. Nous n'accepterons pas que les négociations achoppent ou que la gestion de l'aéroport soit offerte à un autre groupe.
La Ville désire aussi rappeler au gouvernement qu'il devra procéder à tous les investissements actuellement prévus avant de procéder à la cession.
L'autre aspect est celui des lignes aériennes. Nous constatons que, malgré la libéralisation du transport aérien, la ville de Québec n'est reliée qu'avec deux villes américaines, et ce de manière sporadique et par des équipements à petit gabarit. La croissance de l'industrie touristique et de l'industrie des congrès, que j'évoquais tout à l'heure, passe par l'établissement de liaisons par jet vers certaines villes américaines, notamment Boston et New York, et ce sans escale à Montréal. Il serait possible de développer ces marchés en autant que les transporteurs aériens, notamment Air Canada, s'engagent de manière résolue et constante pour une longue durée à développer ces liaisons aériennes. Une intervention du ministre des Transports auprès de la Société Air Canada pourrait avoir une influence positive.
Cinquièmement, nous parlerons des navires de croisière. Nous souhaitons l'implantation à Québec d'un terminal pour les navires de croisière. Les escales sont de 12 à 24 heures, mais Québec n'est pas considérée à l'heure actuelle comme un port d'embarquement ni de débarquement, sauf pour les croisières fluviales sur le Saint-Laurent. C'est un marché important pour l'industrie touristique, en termes de nuitées et d'achalandage pour l'aéroport international Jean-Lesage. Nous désirons développer Québec comme ville de départ pour des excursions maritimes vers Terre-Neuve et le Labrador, en particulier à la saison des icebergs. L'implantation d'un terminal de navires de croisière dans les bâtiments de Travaux publics Canada pourrait aider à développer ce nouveau créneau. Le coût anticipé de cet équipement est inférieur à six millions de dollars.
Ce n'est sûrement pas la première fois que vous entendez parler d'une demande d'autorisation en vue d'exploiter des casinos sur les navires de croisière. Vous savez que les casinos ne peuvent opérer lorsque les bateaux sont en rade de Québec et même lorsqu'ils entrent dans les eaux canadiennes. Vous comprendrez, par la configuration du golfe du Saint-Laurent, que l'entrée dans les eaux canadiennes se fait longtemps avant l'arrivée à Québec, ce qui pénalise les organisateurs de croisières qui comptent sur les casinos pour générer de 12 à 15 p. 100 des revenus de leur entreprise.
En conséquence, nous demandons que la révision de la réglementation fédérale concernant l'opération de casinos sur les voies maritimes soit une priorité pour le gouvernement fédéral. Nous demandons que cette réglementation soit assouplie.
Nous en venons maintenant à la question du Port de Québec et du projet de loi C-44. Le port est un équipement collectif essentiel au soutien des activités économiques de la région. Depuis les débuts de la Nouvelle-France et jusqu'à aujourd'hui, Québec a assumé un rôle portuaire important. Né dans l'anse circonscrite aujourd'hui par la rue du Marché-Champlain, le havre de Québec a graduellement allongé ses quais.
Sous le régime anglais particulièrement, on a favorisé le développement de toute une batterie d'infrastructures portuaires: l'aménagement du bassin Louise et, vers 1892, la jetée nord; ensuite, au début de ce siècle, la construction des premiers élévateurs à grain et enfin, en 1970, l'ouverture du terminal de vrac de Beauport.
Une étude réalisée par le Centre de recherche en aménagement et en développement de l'Université Laval révèle qu'en 1994, dans la région métropolitaine de Québec, l'industrie maritime a généré des retombées économiques globales d'environ 350 millions de dollars. Ces retombées ont permis de créer ou de maintenir l'équivalent de 6 500 emplois à temps plein, et le gouvernement du Canada a récolté environ 40 millions de dollars en taxes et impôts de toute sorte.
Le gouvernement, par diverses décisions récentes et par des projets de loi, dont le C-44, Loi maritime du Canada, vient modifier substantiellement les conditions d'exploitation du port et de l'industrie maritime par la création d'une administration portuaire, une privatisation semblable à celle de l'aéroport, la commercialisation de la Voie maritime, la modification de la Loi sur le pilotage, la récupération des coûts de la Garde côtière, le transfert du dragage à des autorités locales, etc.
Encore ici, l'objectif du gouvernement ne doit pas se limiter strictement à la réduction de son déficit. Dans tous ses gestes et décisions, le gouvernement devra s'assurer de ne pas compromettre la compétitivité du port ou de ses utilisateurs. Dans le contexte de globalisation des marchés, les coûts du transport deviennent un enjeu important et il ne faudrait pas non plus nous placer en position de faiblesse par rapport à des pays qui soutiennent des activités maritimes et portuaires.
Il faut aussi traiter la région du Saint-Laurent, dont Québec, avec équité et tenir compte du fait que cette voie d'accès bénéficie à une grande partie du pays.
En collaboration avec ses partenaires, notamment la Société du Port de Québec et la Sodes, la ville de Québec suit de près le développement de ce projet de loi. Elle participe également aux travaux de la Fédération canadienne des municipalités, dont j'ai le plaisir d'être le deuxième vice-président.
La Ville de Québec désire faire connaître sa position sur le projet de loi C-44, notamment vis-à-vis des aspects suivants.
Premièrement, concernant les administrations portuaires canadiennes, la Ville est favorable à la création des administrations portuaires canadiennes et à la désignation du Port de Québec à ce titre.
Représentants au conseil d'administration d'une APC: La Ville de Québec est favorable à la composition du conseil d'administration proposée par l'article 6 du projet de loi, notamment en ce qui concerne la désignation d'un représentant des municipalités mentionnées dans les lettres patentes. C'est une chose qui devrait être faite depuis très longtemps.
La Ville de Québec s'oppose cependant aux exclusions prévues à l'alinéa 14a), compte tenu de l'exclusion prévue pour les maires, les conseillers, les dirigeants et les employés des municipalités concernées. On pourra avoir un délégué, mais ce ne sera pas quelqu'un de chez nous. En ce qui concerne le cas particulier du Port de Québec, il faudra tenir compte de l'importance et de la présence réelle des activités du Port de Québec sur le territoire des municipalités concernées lorsque viendra le moment de désigner le représentant desdites municipalités, car le port est situé sur plus d'une municipalité.
La capacité d'emprunt sur les marchés d'une APC, à l'article 27: La Ville de Québec, en collaboration avec ses partenaires, considère qu'il faut prendre en considération le principe d'équité. Tous les ports concernés doivent être traités par le gouvernement fédéral avec justice et équité.
À cet égard, la Ville se réjouit de constater que le Port de Québec bénéficiera du même traitement que celui accordé par les gouvernements fédéral et du Nouveau-Brunswick au Port de Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, en effaçant sa dette à long terme de 38 millions de dollars, tel qu'annoncé en juillet dernier.
Nous tenons pour acquis que la dette de la Société du Port de Québec de 7 millions de dollars au 31 décembre 1995 sera également effacée, d'autant plus que dans le passé, les surplus de la caisse du Port de Québec ont été rapatriés par Ports Canada.
Enfin, nous sommes également favorables à ce que le projet de loi accorde aux APC la capacité d'hypothéquer leurs actifs pour réaliser de nouveaux projets de développement des activités portuaires.
En ce qui concerne l'obligation pour les administrations portuaires de verser des paiements au gouvernement selon une formule établie dans les lettres patentes, la Ville de Québec s'oppose au versement de tout montant, à l'exception des frais prévus à l'alinéa 6(2)h) pouvant être exigés par le gouvernement fédéral. En effet, puisque le gouvernement fédéral n'absorbera plus aucun risque en matière de financement direct ou de garantie de prêts en faveur des APC, il ne peut pas s'attendre, en retour, à en recevoir les avantages.
Zonage et fiscalité municipale: Notre position s'approche davantage de celle de la Fédération canadienne des municipalités que de celle du Port de Québec, par exemple, mais je pense qu'il y a des questions raisonnables dont il faut tenir compte.
La Ville de Québec appuie la position défendue par la FCM, à savoir que les associations portuaires canadiennes devraient assumer leurs responsabilités de contribuables et adhérer aux règles de la fiscalité municipale et au respect de l'autonomie municipale en matière de zonage et d'urbanisme. Il y a lieu cependant d'envisager une discussion au niveau local pour encadrer l'adhésion de l'APC à ces obligations.
Enfin, la Ville de Québec est favorable à la conclusion d'ententes locales, notamment en matière de sécurité.
Voilà, messieurs, notre mémoire. Nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci beaucoup de votre attention.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Cantin. La période de questions sera plus courte que prévu.
[Français]
Monsieur Crête.
M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): Je remercie la Ville de Québec pour la qualité de sa présentation, particulièrement sur l'approche globale par rapport à la question des transports. Cela nous permet d'avoir une perspective complète des enjeux pour les prochaines années. J'ai trouvé cela très intéressant, mais comme nous avons très peu de temps, je vais vous poser des questions sur deux points assez spécifiques.
Tout d'abord, je crois comprendre, à partir de votre présentation, que si le gouvernement va de l'avant sur C-44 mais adopte en contrepartie des propositions concernant les frais de déglaçage, les frais d'aide à la navigation comme les bouées et le dragage qui viennent jusqu'à un certain point tuer la compétitivité de Québec, du golfe et du fleuve Saint-Laurent, il risque d'y avoir des problèmes. Est-ce que vous jugeriez pertinent que le gouvernement intègre dans le projet de loi C-44 quelque chose qui permettrait de s'assurer que Transports Canada ait un droit de regard sur les résolutions que Pêches et Océans Canada prendra par rapport à la question des frais de déglaçage, du fait que deux ministères différents s'occupent de ce dossier?
Ma deuxième question porte sur vos recommandations par rapport à la question du réseau autoroutier. Vous dites appuyer la recommandation de la Communauté urbaine de Québec qui dit:
- Que soit considérée, dans le cadre de l'entente Canada-Québec, une amélioration notable de la
qualité, du confort et de la sécurité des infrastructures autoroutières...
- Est-ce que vous seriez favorables à ce que le gouvernement donne suite à la recommandation de
la campagne du Club automobile du Québec, qui est d'ailleurs en tournée pancanadienne
là-dessus, à savoir que 2 cents sur chaque 10 cents de taxe prélevés par le gouvernement fédéral
soient consacrés au renouvellement du système autoroutier canadien?
M. Cantin: Pour ce qui est de la question des frais de déglaçage et de dragage, nous avons souhaité dès le début que l'étude soit faite globalement sur l'ensemble des coûts d'utilisation des installations portuaires à Québec.
Quand on parle d'une étude globale, cela comprend non seulement l'utilisation des installations portuaires, mais aussi les coûts d'accès au Port de Québec et les coûts de départ du Port de Québec, tout comme les coûts de transport.
On est à une époque où il faut regarder les choses très globalement. Il nous a semblé que le gouvernement fédéral donnait à Pêches et Océans Canada et à Transports Canada des mandats qui n'étaient pas nécessairement coordonnés. La seule coordination qui a été faite avait trait à la réduction des coûts.
Je ne sais pas si c'est Transports Canada qui devrait gérer l'ensemble ou Pêches et Océans, mais il semble clair qu'il faut un seul gestionnaire ou un seul interlocuteur qui puisse faire la synthèse de tous les programmes et qui parle d'une seule voix au niveau de l'administration maritime. Si cela n'est pas fait, le port, tel qu'il est maintenant ou tel qu'il sera plus tard, aura affaire à différentes entités gouvernementales ayant des objectifs un peu différents, qui se parlent mais ne se parlent pas toujours de façon très efficace.
Deuxièmement, en ce qui concerne l'entente Canada-Québec sur l'amélioration des autoroutes et la position du CAA, je ne crois pas qu'on ait pris position, en tant que ville, sur la position du fédéral qui dit que les 2 cents qui sont récupérés des taxes sur l'essence devraient être à disposition, mais il me semble qu'il serait bon de réserver un certain montant de cet argent-là pour entretenir le réseau autoroutier.
Évidemment, les gouvernements ont toujours beaucoup de réticence à affecter des revenus à des choses particulières. C'est vrai au fédéral, au provincial et même au municipal, mais il faut tout au moins avoir un budget annuel de réfection des autoroutes.
Je ne sais plus quelle était votre dernière question. Est-ce qu'elle concernait les Maritimes?
M. Crête: Oui, c'est ça.
Le président: Merci, monsieur Crête.
[Traduction]
Monsieur Gouk.
M. Gouk (Kootenay-Ouest - Revelstoke): Merci, monsieur le président.
Messieurs, je voudrais aborder trois aspects et vous demander ensuite ce que vous en pensez.
Premièrement, dans votre analyse des éléments du projet de loi C-44, vous déclarez au troisième élément que vous êtes favorables à ce que le projet de loi accorde aux APC la capacité de pouvoir hypothéquer leurs actifs. Je vous fais remarquer, messieurs, que contrairement à ce que vous croyez, dans sa forme actuelle, le projet de loi interdit expressément aux APC de grever leurs biens d'une hypothèque.
Deuxièmement, dans la partie 1.4 sur l'accès aérien, vous mentionnez qu'il y a actuellement un projet de construction d'une nouvelle tour de contrôle, évalué à environ 14 millions de dollars. Pourtant, dans le même paragraphe, vous indiquez que vous n'avez plus de contrôleurs. Je me demande simplement à quoi cette nouvelle tour est censée servir. Je vous fais remarquer également que la tour et le centre d'information de vol, que vous évoquez dans le même paragraphe, ne relèvent plus du gouvernement fédéral. Ils relèvent désormais de NAV CANADA.
Enfin, dans la partie 1.3, sur le train à grande vitesse, si ce projet est rentable - et je suis convaincu que s'il l'est vraiment, Bombardier saura comment en tirer des profits, parce que cette société réussit très bien dans ce domaine... Mais s'il n'est pas rentable, pensez-vous que le déficit devrait être épongé par la région qui profite du TGV ou par tous les contribuables canadiens?
[Français]
M. Cantin: Pour répondre à la première question, nous comprenons que le projet de loi C-44 ne permet pas actuellement aux autorités portuaires de mettre en garantie les propriétés ou d'avoir des garanties de prêts, mais nous souhaitons que cela soit possible. Nous ne sommes donc pas d'accord sur le projet de loi tel qu'il est, étant donné que nous souhaitons que la nouvelle administration portuaire puisse hypothéquer ses actifs pour réaliser de nouveaux projets.
Deuxièmement, pour ce qui est de la tour de contrôle, il y a un certain nombre de contrôleurs qui sont partis. Nous ne croyons pas que c'est la meilleure décision au monde. Il faut qu'il y ait un minimum de contrôle aérien à l'aéroport de Québec. Si on construisait le Centre d'information et de contrôle régional, un certain contrôle aérien pourrait se faire de nouveau par la région de Québec.
Troisièmement, pour ce qui est des coûts du TGV, nous estimons qu'il s'agit d'un projet national, comme le pont qui relie l'Île-du-Prince-Édouard à la terre et d'autres projets. En conséquence, si jamais il y avait un déficit, on pense qu'il devrait être assumé par l'ensemble du pays.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Keyes.
M. Keyes (Hamilton-Ouest): Merci, monsieur le président.
Bonjour messieurs. Merci beaucoup pour votre exposé.
Monsieur Cantin, au bas de la page 9, vous déclarez, avec raison que:
- Dans tous ses gestes et décisions, le gouvernement devra s'assurer de ne pas compromettre la
compétitivité du Port ou de ses utilisateurs. Dans le contexte de la globalisation des marchés, les
coûts de transport deviennent un enjeu important et il ne faudrait pas nous placer en position de
faiblesse par rapport à des pays qui soutiennent les activités maritimes et portuaires.
Étant donné que vous affirmez ne pas vouloir mettre votre port ou vous-mêmes en position de faiblesse par rapport à d'autres pays et vu que nous savons que certaines municipalités américaines ne perçoivent pas de taxes auprès de leurs ports et donnent même à leurs ports un pouvoir d'imposition, voyez-vous une certaine contradiction dans vos affirmations?
M. Cantin: Comme vous l'avez déclaré, la situation varie d'une ville à l'autre. Même aux États-Unis, certaines villes perçoivent de l'impôt foncier auprès des administrations portuaires, d'autres pas. En Europe, la plupart des villes en perçoivent. Et au Canada, toutes les villes en perçoivent, d'un océan à l'autre.
M. Keyes: Oui, mais vous faites erreur. Elles ne perçoivent pas de taxes municipales directement de leurs ports. Elles perçoivent de l'impôt foncier sur les propriétés que le port loue aux utilisateurs, alors ce sont les utilisateurs qui paient. Vous ne proposez pas que le Port de Québec commence à payer des taxes municipales sur des terrains vacants, n'est-ce pas?
M. Cantin: C'est également la position de la FCM. Tous les propriétaires paient de l'impôt foncier, et nous ne voyons pas pourquoi les aéroports, les ports et d'autres ne le feraient pas. Alors, nous disons que la règle générale pour tout le monde, même le gouvernement fédéral, est de payer de l'impôt.
M. Keyes: Je pense que nous nous lançons parfois dans de trop grandes généralisations. Oui, les propriétaires fonciers paient de l'impôt, mais en soi, à Québec ou ailleurs, les propriétaires fonciers ne sont pas de grandes sources de richesse économique, d'emplois et de débouchés. Votre port, par contre, dans cette ville et cette province, est le gagne-pain, le créateur d'emplois, le créateur de débouchés économiques. Vous ne voudriez donc pas le mettre dans une position délicate non seulement en imposant les locataires - les municipalités - et en l'obligeant à payer des subventions tenant lieu d'impôt foncier s'il le fallait un jour, mais aussi des taxes municipales sur ses biens immobiliers. Cela réduirait la capacité d'agrandir le port, d'attirer des clients au port et d'avoir des prix concurrentiels, parce qu'au bout du compte, les utilisateurs paieront la note.
M. Cantin: Oui, mais le port est l'un des nombreux créateurs d'emplois de notre territoire. Les hôtels et d'autres industries créent des emplois eux aussi. Et tout le monde paie ses taxes.
Par contre, nous affirmons dans notre mémoire que nous sommes prêts à discuter de ce problème avec l'administration locale. Mais la ville ne peut pas renoncer à percevoir de l'impôt foncier. Environ 85 p. 100 des recettes d'une ville proviennent de l'impôt foncier. Si nous disons que le port est trop important pour que nous exigions qu'il paie de l'impôt foncier, si nous disons la même chose des hôtels, parce que nous sommes une ville touristique, et du gouvernement, parce qu'il crée des emplois, qui paiera de l'impôt foncier? Seuls les propriétaires d'immeubles résidentiels, et je ne pense pas qu'ils puissent assumer ce fardeau.
M. Keyes: Monsieur le président, très brièvement, il n'a pas été question de ce sujet dans le rapport, mais je voudrais l'aborder ici. Avec l'adoption du projet de loi C-44, la Société canadienne des ports sera abolie et, par le fait même, sa police. L'Association canadienne des policiers a déclaré aussi récemment qu'hier, si je ne m'abuse, que ne pas fournir une force policière aux ports serait faillir à notre devoir. On estime qu'il ne reste actuellement qu'environ 89 agents dans six ports.
Seul le Port de Vancouver a abordé la question des forces policières. D'autres ports affirment qu'ils peuvent fournir un service de sécurité complet en collaborant avec les municipalités, avec les forces policières du secteur privé, afin de faire économiser aux ports des dizaines de milliers de dollars.
Le Port de Québec et la Ville de Québec ont-ils discuté des services de police dans le port?
M. Cantin: Nous avons conclu une entente de principe avec le port, afin de transférer la surveillance policière du port à la ville. C'est bloqué quelque part à Ottawa, mais sinon, c'est presque fait.
M. Keyes: C'est bloqué à Ottawa ou par le ministre provincial responsable, qui doit vous donner sa bénédiction pour que vous puissiez aller de l'avant?
M. Cantin: Je le croyais aussi, mais après m'être renseigné, je constate que ce n'est pas le cas. C'est ce qui est arrivé à Montréal, mais pour Québec, c'est à Ottawa qu'on met des bâtons dans les roues.
M. Keyes: Vu l'adoption prochaine du projet de loi, monsieur le président, il est bon d'entendre dire qu'ils ont conclu une entente prête à entrer en vigueur...
M. Cantin: Oui, prête à signer.
M. Keyes: ... et que la municipalité est prête à prendre la relève.
M. Cantin: Ces ententes entre le port et la ville ressemblent à celles que nous avons avec d'autres villes, en ce qui concerne le partage des bénéfices. Toutes les villes doivent en profiter un peu, et le port ne fait pas exception.
M. Keyes: Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Keyes. Je suis convaincu que vous pouvez débloquer le dossier.
M. Keyes: Le projet de loi le fera certainement.
Le président: Merci beaucoup, messieurs. Je vous remercie de nous avoir consacré du temps aujourd'hui.
[Français]
M. Cantin: Merci beaucoup, monsieur.
[Traduction]
Le président: Nos prochains témoins représentent la Société de développement économique du Saint-Laurent.
Nous avons 30 minutes par témoin. Si vous pouviez limiter vos remarques à une dizaine de minutes, nous aurions le temps de discuter avec vous.
[Français]
M. Marc Gagnon (directeur général, Société de développement économique du Saint-Laurent): C'est ce que nous allons faire.
Je m'appelle Marc Gagnon. Je suis directeur général de la Sodes, la Société de développement économique du Saint-Laurent. Nous sommes déjà venus vous présenter un mémoire. Je pense donc que vous connaissez un peu notre organisme. C'est un regroupement de sociétés, d'entreprises et d'organismes voué à la défense des intérêts du Saint-Laurent et à la promotion du développement économique. Nous sommes en quelque sorte la Chambre de commerce du Saint-Laurent.
Sans plus attendre, je vous présente M. Claude Mailloux, le directeur général adjoint de la Sodes, et notre présentateur, M. Alain Pilotte, qui est membre du conseil d'administration de la Sodes et président de notre comité de réglementation.
M. Alain Pilotte (membre du Conseil d'administration de la Société de développement économique du Saint-Laurent): Monsieur le président, membres du comité, en premier lieu, je voudrais vous résumer un peu le processus que le comité d'éducation et de réglementation de la Sodes a adopté pour préparer le mémoire qu'elle vous présente aujourd'hui.
Notre comité a rencontré ses membres, à Québec et à Montréal, à la suite de réunions de consultation qui avaient été organisées. Le comité a ensuite fait un sommaire des points qui avaient été soulevés par tous les membres. Après l'examen du projet de loi et de toutes les recommandations des membres, nous avons préparé ce rapport qui a été adopté par le conseil d'administration de la Sodes.
Cela dit, je vais d'emblée vous préciser que ce rapport ne doit pas être vu comme représentant la voix unanime de tous les membres de la Sodes. Il y a des villes, des autorités portuaires qui sont membres de la Sodes et des sociétés dont les intérêts sont énormément divergents. Je ne voudrais pas que l'on croie que la Sodes prétend être le porte-parole de tous.
Cependant je peux vous assurer d'une chose: le contenu du rapport représente les éléments qui ont réuni le plus grand consensus sur certains aspects du projet de loi.
Cela dit, je vais résumer ce que je considère les points essentiels du mémoire. Tout d'abord, on applaudit les buts poursuivis par le projet de loi C-44, on les appuie et ils nous satisfont. Cependant, notre crainte, c'est que le résultat obtenu ne soit pas équitable en ce qui concerne les APC et les ports régionaux.
Le projet de loi tel qu'il existe responsabilise les ports qui vont devenir des APC, ce qui est une bonne chose. Mais il faut leur donner les outils nécessaires pour qu'ils soient autonomes et responsables et n'aient pas à revenir se présenter devant le gouvernement fédéral dans 15 ans pour lui demander de l'argent parce qu'ils seraient au bord de la faillite. Le projet de loi, tel qu'il existe, ne fournit pas ces outils.
On sait que, pour chaque APC, les lettres patentes vont être rédigées par un comité. Ce que vous dit le rapport, entre autres, c'est que non seulement les municipalités et les provinces doivent participer à l'élaboration de ces lettres patentes et être consultées en ce qui les concerne, mais aussi que toutes les personnes concernées - la communauté maritime, si vous préférez, d'une APC donnée - , doivent être consultées et appelées à donner leur point de vue sur ledit contenu.
En d'autres mots, les lettres patentes vont prendre autant d'importance que le projet de loi C-44 quand ces APC auront à agir quotidiennement.
Dans le mémoire de la Sodes, on a introduit la notion de protection des utilisateurs. Cette protection des utilisateurs, dont la formule finale est, bien entendu, sujette à la discrétion du ministre, a essentiellement pour but de garantir que, tant du point de vue déontologique, pour ce qui est des agissements des administrateurs, que du point de vue de la gestion journalière des affaires commerciales, les utilisateurs puissent avoir recours à une bouée de sauvetage pour être certains qu'en tout temps une APC donnée agit de façon équitable, dans le cadre de la loi, comme cela existe actuellement.
Par exemple, je crois que l'article 42 prévoit le cas où une APC passerait une entente discriminatoire en ce qui concerne le volume ou la valeur des marchandises. Nous sommes d'accord sur les principes exposés dans cet article. D'un autre côté, étant donné que tous les documents sont stipulés confidentiels, et compte tenu également de l'exclusion de la Loi sur les transports à l'article 142, on croit qu'il est important de donner aux utilisateurs accès à ces documents et, en cas de doute, un moyen de s'assurer que quelqu'un pourra les examiner pour eux.
Quant aux critères qui permettent de devenir une APC - je fais allusion à l'article 6 - , nous recommandons dans le rapport, et je tiens à le réitérer, que l'alinéa 6(1)c) soit retiré, simplement parce que les autres conditions mentionnées dans l'article 6 sont amplement suffisantes, à notre avis, pour décider si un port donné peut ou non devenir une APC.
Pour ce qui est de la composition du conseil d'administration, je dirai deux choses. Nous avons toujours maintenu, et nous le maintenons toujours, que le conseil d'administration doit être majoritairement composé de membres choisis parmi les candidats proposés par les utilisateurs.
Quant au premier dirigeant, nous croyons que même s'il doit être présent aux séances du conseil d'administration, il ne devrait pas avoir droit de vote. À cet égard, je soulignerai que c'est le conseil d'administration qui nomme le premier dirigeant; il serait donc un peu difficile d'admettre que ce même premier dirigeant puisse participer à sa propre élection.
En ce qui concerne les ports régionaux, je dois dire qu'à la première lecture du projet de loi, j'étais dans une nuit complète. Tout ce que l'on saisit, c'est une volonté claire, nette et précise de céder ces ports régionaux sans pour autant leur donner des balises ou définir des paramètres principaux, ce qui nous fait énormément peur. Sans vouloir entrer dans la problématique des régions, disons que nous avons des ports régionaux, comme celui de Québec et celui de Montréal, qui sont très rapprochés et qui interagissent déjà. Ils vont continuer de le faire à l'avenir. Il faut harmoniser les conditions d'opération des APC avec celles des ports régionaux afin qu'en bout de ligne, ils n'entrent pas en concurrence indue avec les APC.
J'en donne un exemple exagéré, je l'espère. Si, demain matin, un de ces ports régionaux devait trouver preneur à la dernière minute pour un dollar, on peut facilement s'imaginer que cette société pourrait concurrencer le Port de Québec. Ce dernier aura énormément de responsabilités par rapport à ses redevances au gouvernement fédéral, lesquelles, nous l'espérons, seront basées sur les revenus nets et aussi sur sa capacité financière. Il va falloir qu'ils se financent et quand on n'a qu'un dollar à financer, ce n'est pas la même paire de manches.
Un deuxième point concerne les ports régionaux. Nous recommandons fortement que le projet de loi définisse les limites par rapport aux transferts. Il faut poser des exigences aux cessionnaires, pas nécessairement à tous les ports régionaux ou locaux qui devront être cédés, nous le concédons, mais il faudra que le ministère fasse un examen et détermine quels sont les ports commercialement importants pour qu'on puisse leur appliquer les critères suivants: la protection de la vocation portuaire commerciale, l'entretien des installations portuaires et, troisièmement, le maintien de l'accessibilité publique de ces installations.
Il serait trop facile, croyez-moi, qu'un port donné, passant aux mains d'une société donnée, se retrouve complètement coupé de toute l'économie régionale à cause des intentions d'un utilisateur qui aurait pu s'emparer du port en question.
À l'appui de ces critères, je vous dis qu'il faut protéger les économies régionales et s'assurer qu'elles ne seront pas mises en péril parce qu'on aura vendu un port régional dans une vente de feu.
Pour terminer, parlons des casinos. S'il vous plaît, grands dieux, demandez au ministre de la Justice de modifier au plus tôt le Code criminel. Il y va de l'avenir de l'industrie touristique maritime, entre autres dans le Saint-Laurent. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci.
Messieurs, je veux aborder deux sujets, brièvement. Je suis entièrement d'accord avec tout ce que vous déclarez dans votre mémoire. Il y a quelques divergences de vues mineures, mais essentiellement, nous allons dans la même direction.
Je voudrais d'abord parler des taxes municipales. Le comité est sur le point, je crois, de modifier le projet de loi afin que les ports obtiennent le statut d'agence fédérale. Cela veut dire qu'ils paieraient des subventions tenant lieu d'impôt foncier. Beaucoup en paient déjà, mais pas tous. J'ai l'intention de proposer une modification afin que les ports qui ne versent pas de telles subventions n'aient plus à payer le montant qu'ils paient actuellement et le remplacent plutôt par des subventions, la transition s'échelonnant sur cinq ans. Je me demande si cette proposition vous paraît acceptable.
Deuxièmement, vous avez mentionné le Code du travail du Canada, sans donner d'explications. J'aimerais que vous m'expliquiez quelques-uns des changements que vous avez en tête.
M. Pilotte: Premièrement, en ce qui concerne les taxes municipales, nous savons bien que l'une des grandes questions qui nous étaient posées était de savoir si les administrations portuaires canadiennes devraient devenir une agence fédérale. Nous croyons que ce ne serait pas nécessairement une bonne solution.
Nous sommes conscients que le statut d'agence réglerait le problème des taxes municipales. Nous espérons toutefois que le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les municipalités pourront s'entendre entre eux, afin que demain, lorsque nous céderons les rênes aux administrations portuaires canadiennes et aux nouveaux ports locaux, il existe un accord à propos des taxes municipales semblable à ceux qui existent pour la police, par exemple. Au bout du compte, les ports ne paieront pas plus d'impôt que dans le régime actuel.
Nous n'avons pas fait d'analyses en profondeur pour déterminer si le statut d'agence est la seule solution, mais nous pensons qu'il faudrait y réfléchir, parce que ce statut n'est peut-être pas nécessairement la bonne solution.
En ce qui concerne le Code du travail du Canada, nous croyons que, dans sa forme actuelle - et je vous renvoie à l'article 34, qui porte sur le secteur du débardage - le Code du travail ne convient peut-être pas actuellement. Il faudrait peut-être le modifier pour tenir compte de la réalité actuelle, non seulement au Port de Québec mais aussi au Port de Montréal, dans les ports des Maritimes et ceux de la côte Ouest.
La situation a évolué depuis que M. Picard a déposé son rapport. Elle n'est plus la même dans les ports, alors l'article 34 devrait être modifié. Nous ne proposons pas de réponse ni de meilleure solution pour l'instant. Nous affirmons qu'il importe qu'une commission étudie la question et essaie de déterminer s'il faut modifier le Code ou non et, dans l'affirmative, qu'elle propose une solution.
Voilà, en gros, ma réponse.
Le président: Merci.
Monsieur Comuzzi.
M. Comuzzi (Thunder Bay - Nipigon): Merci, monsieur le président.
Au troisième paragraphe de la page 2 de votre mémoire, vous affirmez que vous laissez à d'autres la tâche d'élaborer sur les questions du pilotage et de la Voie maritime du Saint-Laurent. Entendrons-nous ces autres personnes un autre jour? Sinon, quelle serait votre position? Qui défendra ce dossier?
M. Pilotte: Si je ne m'abuse, certaines administrations de pilotage témoigneront aujourd'hui.
M. Comuzzi: Qu'en est-il de la Voie maritime? Quelqu'un prendra-t-il position à ce sujet?
M. Pilotte: Pas que je sache.
M. Comuzzi: Alors, vous n'avez rien à dire sur...
M. Pilotte: Notre position est essentiellement ce qui se trouve au troisième paragraphe de la page 2. Il faut faire attention à la forme que prendra finalement l'organisme qui sera chargé de la gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent. Tout le monde doit se sentir à l'aise.
Ainsi, nous ne voulons pas que les navires étrangers qui naviguent dans la Voie maritime du Saint-Laurent aient l'impression que leur capacité de faire du commerce est menacée ou qu'ils sont désavantagés par rapport à ceux qui sont liés de plus près à la gestion de la Voie maritime. C'est tout ce que nous affirmons. Nous ne prétendons pas que c'est le cas ni que nous avons des craintes. Nous vous prions seulement d'être prudents.
M. Comuzzi: Une dernière question. Dois-je déduire de vos remarques que vous êtes d'accord avec les témoignages des pilotes que nous entendrons aujourd'hui et des rapports que nous pourrions recevoir sur la Voie maritime?
M. Pilotte: En ce qui concerne le pilotage, nous pensons essentiellement que d'autres parties intéressées comprennent peut-être mieux le problème.
M. Comuzzi: Ma dernière question sera une espèce d'analogie. Au premier paragraphe, vous affirmez que vous représentez tous les secteurs de l'économie maritime: des armateurs, des ports, des agences maritimes, des villes portuaires, des organismes gouvernementaux, etc. Pouvons-nous supposer que, dans le cas de la gestion des Grands Lacs et de la Voie maritime du Saint-Laurent, vous affirmeriez également qu'elle ne devrait pas relever d'un des groupes que vous avez mentionnés et qu'il existe dans le réseau du Saint-Laurent et des Grands Lacs d'autres intérêts à protéger?
M. Pilotte: Nous n'affirmons pas éprouver des craintes en ce qui concerne la façon dont le dossier semble évoluer actuellement. Nous affirmons que, d'après les consultations que nous avons menées, tout ce qu'on a porté à notre attention c'est qu'il fallait vous passer un seul message, soit que le résultat final - le ministère a déjà presque décidé ce qu'il veut faire - tienne au moins compte de la capacité de tout le monde de faire du commerce dans la Voie maritime. C'est tout.
Le président: Merci. Roy.
[Français]
M. Cullen (Etobicoke-Nord): Merci beaucoup, monsieur Pilotte, monsieur Gagnon et monsieur Mailloux.
Vous ne voudrez peut-être pas répondre à ma question, mais je la poserai quand même. Est-ce que vous pouvez nous faire part des points majeurs sur lesquels vous n'avez pas obtenu le consensus de tous vos membres?
M. Pilotte: Vous comprendrez, puisque vous faites essentiellement le même travail que nous, qu'il n'y a peut-être pas toujours consensus lorsqu'on est appelé à travailler en comité et qu'on essaie de tracer des lignes directrices, d'en arriver à une entente de représentation et de points de vue, de faire un échange entre membres et d'arriver en bout de ligne, dans la mesure du possible, à des conclusions.
Les points sur lesquels il n'y a pas nécessairement eu consensus ne sont pas pour autant non valables. Nous avons tout simplement voulu cerner les points que nous considérions les plus cruciaux. Par exemple, M. Cantin de la Ville de Québec a participé à certaines de nos réunions et nous a présenté son point de vue au sujet de la taxation municipale.
Les intervenants ne partageaient pas tous nécessairement l'opinion de M. Cantin. C'est pourquoi la Sodes a exprimé l'opinion contenue dans son rapport.
Cela ne veut pas dire que la Sodes a tout simplement rejeté du revers de la main les autres points qui ne figurent pas dans le rapport en raison de la priorité que nous avons accordée à certains autres points.
Le président: Merci. Monsieur Crête.
M. Crête: Je vous remercie de votre mémoire. Trois principaux points retiennent mon attention et j'aimerais que vous développiez votre pensée à leur sujet.
Je partage vos inquiétudes sur l'absence de précisions sur le statut des ports régionaux. Il serait peut-être bon que vous décriviez davantage les impacts que vous prévoyez si on ne précise pas ce statut.
Le deuxième point porte sur la nomination d'une personne chargée de protéger les utilisateurs. Vous résumez dans un paragraphe les fonctions qui lui seraient attribuées, mais j'aimerais que vous reveniez sur ce sujet et précisiez les raisons pour lesquelles vous considérez ce rôle important.
En dernier lieu, je vous pose la même question qu'à la Ville de Québec, mais en votre qualité d'utilisateurs, relativement au recouvrement des coûts. Ne croyez-vous pas qu'il y a là une menace aussi importante, sinon plus importante, que celle de l'absence d'un statut pour les ports régionaux? Croyez-vous, comme la Ville de Québec nous l'affirmait plus tôt, qu'il serait important que la prise de décisions soit regroupée sous un seul chapitre ou une seule tête afin que l'impact puisse être complètement évalué?
M. Pilotte: Au niveau des ports régionaux, comme je le précisais plus tôt, notre plus grand problème est qu'à toutes fins pratiques, nous sommes dans l'obscurité. Nous ignorons de quelle façon les choses vont se passer.
Bien entendu, nous sommes tout à fait conscients que le processus est enclenché. Nous avons même entendu dire, à notre surprise, que certains ports de la côte est seraient vendus. Tout ce que nous savons pour le moment, c'est qu'on va céder les ports régionaux, mais on ne sait pas sur quelle base, financière ou autre. Nous pourrons nous retrouver avec des aberrations, bien que nous ne croyions pas que ce soit le but visé. Cela nous fait énormément peur parce que tout ce que la loi prévoit, c'est qu'on peut les céder.
J'ai donné un exemple quelque peu exagéré tout à l'heure quant à la possibilité qu'on ne trouve pas preneur et qu'une certaine société mette la main sur un de ces ports régionaux pour un dollar. On pourrait se retrouver dans une situation où, puisqu'une entité portuaire n'aurait absolument aucun frais financier, elle attirerait des cargaisons qui auraient autrement transité par une APC située à proximité. On ne peut pas se permettre cela.
Je tiens à préciser que le concept de réseau qui figure au mémoire ne vise pas la création d'un réseau officiel. Nous disons qu'il existe un ensemble de ports qui sont importants, tant pour le Canada que pour le Québec ou les autres provinces et pour l'économie régionale. Nous devons nous assurer qu'en bout de ligne, nous aurons un ensemble de ports qui pourront se compléter et non pas s'entretuer. Si nous nous retrouvons dans cinq ans avec des ports régionaux qui auront éliminé deux ou trois APC, nous ne serons pas plus avancés. C'est un exemple.
Nous faisons la suggestion relative à un protecteur des utilisateurs à la suite de représentations de plusieurs intervenants qui nous ont confirmé que ce serait une bonne chose. Bien souvent, dans le passé, on s'est posé des questions sérieuses et on a émis des doutes. Le processus n'était pas clair; on ne savait ce que l'on pouvait faire.
La loi consacre la confidentialité des documents commerciaux. Ils sont exclus de l'application de l'article 142 de la Loi sur les transports, qui permettait autrefois, si je me souviens bien, de porter plainte auprès de l'Office national des transports dans le cas de problèmes. Cela n'existera plus. On va se retrouver avec des APC, des sociétés fermées, et on ne pourra faire quoi que ce soit.
D'un côté, les documents sont confidentiels et, de l'autre, on dit que les APC doivent agir de façon équitable, sous certaines bannières, bien entendu. Par exemple, le taux peut être différent selon les quantités, etc. On le comprend. Cela a du bon sens. Mais si un utilisateur donné croit que ce n'est pas le cas, à quelle porte va-t-il frapper? Il n'y a pas de mécanisme actuellement.
M. Crête: Et le troisième point?
M. Pilotte: La position de la Sodes au sujet du recouvrement des coûts est bien connue. Je crois qu'un des problèmes majeurs jusqu'à maintenant, c'est qu'on a compartimenté à outrance les études d'impact économique, à un point tel qu'on se demande si ces études-là vont avoir un impact et vont être utiles.
Comme on l'a mentionné dans notre rapport, il faut regrouper sous une même étude tous les impacts économiques, que ce soit au niveau du recouvrement des coûts, au niveau du dragage, au niveau de la réforme portuaire, etc.
C'est en regardant l'ensemble qu'on va savoir si on va avoir un système portuaire qui sera efficace et compétitif, et non en regardant les choses de façon segmentaire. Pour le recouvrement des coûts, on parle de seulement 20 millions de dollars pour l'instant. Ce n'est pas si mal, dit-on. Mais si on ajoute à cela le dragage et telle ou telle autre chose, on va peut-être se retrouver avec des ports qui, au niveau de leur capacité de faire les choses... On devra peut-être leur donner une vocation élargie, parce qu'il n'y aura peut-être plus de bateaux qui vont venir dans les ports.
M. Crête: Vous avez imploré le gouvernement fédéral d'agir dans la question des casinos maritimes. Pourquoi ce changement ne se fait-il pas? Pouvez-vous me donner un exemple qui nous montrerait pourquoi il serait important qu'on se donne cet outil touristique à court terme?
M. Pilotte: Je ne sais pas si vous avez déjà regardé la carte officielle des eaux canadiennes. Il faut le faire. Les casinos doivent être fermés avant que le navire entre dans les eaux canadiennes. À bord d'un bateau, après avoir mangé et regardé le paysage, il faut faire des choses. Il y a le cinéma et beaucoup d'autres choses, mais quand on est sur un bateau, on est restreint. Le casino, c'est une façon pour les armateurs de faire vivre leurs navires. C'est difficilement explicable aux passagers. Selon les études, un passager fait plusieurs croisières au fil des années. Au Canada, c'est différent: il n'y a pas de casinos.
Maintenant, on a des casinos à terre. On ne demande pas que les navires puissent faire la concurrence aux casinos de terre. Donner aux passagers la permission de jouer à bord jusqu'à une certaine limite avant l'arrivée du bateau ne fera de mal à personne. Ça va seulement aider l'économie. Croyez-moi, les armateurs et l'économie touristique maritime en ont énormément besoin, parce qu'on joue très serré dans ce domaine.
M. Crête: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, messieurs. Cette question des ports régionaux est nouvelle. Nous l'examinerons avec soin.
M. Keyes: Monsieur le président, je voulais simplement m'assurer que M. Crête sait que le ministre de la Justice a été informé du problème compliqué des casinos et de la modification qu'il faudrait apporter au Code criminel. D'ailleurs, le gouvernement est en train d'examiner cette solution.
M. Comuzzi: Monsieur le président, j'ajouterais simplement aux propos de M. Keyes qu'il importe aussi de savoir que le comité est au courant de ce problème depuis des années et que nous faisons tout ce que nous pouvons. Nous sommes conscients de l'importance de l'industrie des croisières au Canada, pas seulement dans le Saint-Laurent, mais aussi sur la côte Ouest, et il importe de modifier les lois. Alors, les propos des témoins au sujet de la nécessité de modifier les lois ne nous apprennent rien de neuf. Mais nous les remercions beaucoup de ramener le sujet sur le tapis.
Le président: C'est aussi ce que nous avons entendu du Port de Halifax.
Merci beaucoup.
Nous accueillons maintenant le Port de Québec.
Messieurs, vous connaissez notre façon de procéder. Vous avez environ une demi-heure, alors, essayez de limiter vos déclarations pour nous donner l'occasion de discuter avec vous.
[Français]
M. René Paquet (président du conseil d'administration de la Société du Port de Québec): Monsieur le président, je m'appelle René Paquet et je suis le président du conseil d'administration de la Société du Port de Québec.
Je suis accompagné ce matin de M. Ross Gaudreault, président-directeur général du Port de Québec, et de M. Alexis Ségal, vice-président au marketing.
Je vous remercie de l'occasion qui nous est offerte de participer et d'échanger avec vous sur le projet de loi C-44 déposé à la Chambre des communes au mois de juin dernier.
Nous n'avons pas l'intention de reprendre le mémoire en détail. C'est un document que vous aurez le loisir de lire si vous ne l'avez pas déjà fait.
Pour permettre un échange, nous nous limiterons aux principaux points auxquels le ministre vous a demandé, le 26 septembre dernier, de porter une attention particulière, à savoir le statut d'agence fédérale, la structure des futures administrations portuaires, la question de la taxation, la question des pouvoirs et finalement la question de la redevance à payer au gouvernement fédéral par les administrations portuaires.
Je voudrais tout d'abord vous dire que la Société du Port de Québec souscrit en principe à la réforme qui est proposée par le gouvernement fédéral dans le projet de loi C-44 dans la mesure où cette réforme contribuera effectivement à améliorer le système portuaire canadien, qui est quand même financièrement rentable.
Ce système pourra l'être par l'élimination d'une bureaucratie. Le projet de loi C-44 prévoit déjà l'abolition de Ports Canada, un organisme qui, dans le passé, s'est avéré encombrant et coûteux et qui n'a pas fourni aux administrations portuaires l'appui auquel elles avaient droit.
Il faudra donc, lorsque le projet de loi C-44 aura été adopté par la Chambre des communes, qu'aucun des principaux ports canadiens ne se retrouve dans une situation moins favorable que la situation actuelle. Je pense que c'est facile à expliquer.
Nous vivons dans un monde de globalisation des marchés, et il faut toujours avoir à l'esprit que la concurrence du Port de Québec, ce n'est pas le Port de Montréal ou celui de Halifax, mais bien les ports américains.
Nous souscrivons au principe. D'ailleurs, vous avez eu l'occasion d'entendre les représentants des autres ports du pays s'adresser à vous. Ce n'est pas le fruit du hasard si nos commentaires de ce matin rejoignent ceux que les principaux ports canadiens ont déjà formulés.
Le projet de loi C-44 aura permis aux différents ports canadiens de se parler, de se comprendre et finalement de voir que le Canada jouit d'un système portuaire qui doit continuer à fonctionner efficacement dans le meilleur intérêt du Canada.
Il faut permettre à un port comme celui de Québec de poursuivre sa double mission, qui est de participer à l'amélioration et au bon fonctionnement du commerce international du Canada et de contribuer au développement économique de la grande région de Québec.
Je vous rappelle rapidement l'importance pour les ports canadiens de garder le statut d'agence fédérale. Vous avez entendu des commentaires des gens qui m'ont précédé. Vous les avez entendus partout au Canada. Toute la question du statut fédéral est extrêmement importante.
C'est un outil dont les ports ont besoin. Lorsqu'on parle du développement des ports et du marketing au niveau international, il est primordial d'avoir le statut d'agence fédérale. C'est aussi un statut dont nous avons besoin au niveau de la taxation, au niveau des règlements de zonage et au niveau de l'environnement.
Ceci ne veut pas dire que les administrations portuaires ne se comportent pas en bons citoyens corporatifs. On a longuement fait état de la question de la taxation municipale. Vous me permettrez de vous rappeler que les sociétés de port locales actuelles, que ce soit Montréal, Vancouver ou Québec, paient déjà des contributions tenant lieu de taxes. La Société du Port de Québec verse chaque année à elle seule à la Ville de Québec 1,4 million de dollars comme contribution tenant lieu de taxes.
Les utilisateurs du Port de Québec lui versent plus de trois millions de dollars. C'est donc presque cinq millions de dollars qui sont générés par la présence du Port de Québec et ses utilisateurs aux fins de la taxation municipale.
Nous avons actuellement une formule qui fonctionne bien. Les relations entre le Port de Québec et la Ville sont excellentes. Nous en sommes toujours venus à une entente à tous les niveaux, qu'il s'agisse de contributions tenant lieu de taxes, de l'environnement ou du zonage.
Il faudrait peut-être ajouter que le statut d'agence fédérale pourra aussi contribuer à faciliter le financement que les ports devront pourvoir eux-mêmes à l'avenir pour des projets de développement ou de rénovation de leurs infrastructures.
Les priver du statut d'agence fédérale, c'est, à mon avis, les priver d'un statut primordial à la survie d'un système portuaire canadien.
J'aimerais maintenant vous parler de la structure et de la composition des futures administrations portuaires. Nous souscrivons d'emblée au principe qui sous-tend le projet de loi C-44. D'ailleurs, le rapport Keyes, préparé par M. Stan Keyes, est à la base de nos représentations. Quant à nous, il devrait être la Bible de la réforme du système portuaire canadien.
Nous souscrivons au principe que les utilisateurs doivent avoir un rôle extrêmement important à jouer dans les administrations portuaires. Nous ajoutons qu'aucun groupe particulier, ni les utilisateurs, ni les représentants des corps publics, ne devrait détenir une majorité aux conseils d'administration.
Pour contourner cette difficulté apparente, le Port de Québec propose d'avoir de la souplesse au niveau des conseils d'administration. Au lieu que la loi prévoie la composition ou la structure des ports, nous suggérons une structure souple, adaptée à chacun des ports, qui pourra faire l'objet de discussions lorsque des lettres patentes seront émises pour chacune des administrations portuaires canadiennes.
Le Port de Québec propose à cet égard un conseil d'administration de sept personnes, soit trois utilisateurs, un représentant du gouvernement fédéral, un représentant du gouvernement du Québec, un représentant des villes touchées par les activités portuaires et, comme septième personne prévue par le projet de loi C-44, le président-directeur général de la Société.
Le président-directeur général a un rôle important à jouer; c'est le premier officiel de la société et il a la responsabilité des opérations. C'est un homme qui assume une lourde responsabilité. Si on engage un président-directeur général, on veut que les ports continuent à fonctionner comme des entreprises commerciales. Cette personne-là doit assumer elle aussi ses responsabilités: siéger au conseil d'administration et y voter.
Avec une représentation de chacun des trois paliers de gouvernement, la présence de trois utilisateurs qui auront la pluralité des votes, mais peut-être pas la majorité, et la présence du président-directeur général, l'équilibre sera maintenu.
Nous voulons rapidement formuler des commentaires sur les pouvoirs et sur la redevance qui devra être payée au gouvernement fédéral. J'invite le président-directeur général du Port de Québec, M. Ross Gaudreault, à prendre la parole.
M. Ross Gaudreault (président-directeur général, Port de Québec): Monsieur le président, bonjour et bienvenue à Québec. J'aimerais souhaiter la bienvenue d'une façon particulière à quelques visages connus qu'on revoit à Québec aujourd'hui.
M. Keyes a écrit un rapport, le Rapport Keyes. Voilà dix ans que je suis président du Port de Québec, et je n'ai jamais vu autant d'appui à un rapport qu'à celui-ci.
Nous étions tous d'accord au Canada sur les conclusions de ce rapport, mais vos fonctionnaires à Ottawa ne l'on pas bien lu et ses recommandations n'ont pas été traduites dans le projet de loi C-44. On a oublié des choses. Tout le monde aurait été heureux si on avait bien compris le rapport et bien rédigé le projet de loi. Si tel avait été le cas, nous n'aurions pas eu à nous rencontrer ici ce matin.
Cependant, on a des choses à corriger, et c'est le temps de le faire. On parlait tantôt des croisières; ça ne fait que cinq ans qu'on vous en parle, et ce n'est pas encore réglé.
Alors, il nous faut vous donner des amendements qui nous permettront d'administrer nos ports d'une façon plus correcte.
En ce qui concerne les pouvoirs, on a manqué le bateau. Vous voulez qu'on soit de meilleurs administrateurs et vous nous dites de nous limiter à des opérations maritimes.
Il faut savoir qu'on a des bandes de terrains. Les terrains portuaires ne sont pas au milieu de parcs provinciaux. Ils sont au bord de l'eau.
On veut continuer à les exploiter en attendant de les développer quand on aura des projets portuaires. Cela nous permet d'aller chercher d'autres revenus. Il nous faut des zones tampons, monsieur le président. On ne peut pas construire des résidences juste à la limite du port. On va se faire tirer des poireaux. Il nous faut donc des zones tampons. À l'heure actuelle, c'est le Port de Québec qui les exploite. On administre des marinas avec lesquelles on fait de l'argent. On administre des terrains de tennis et des stationnements temporaires.
C'est ça qu'il faut corriger. Il faut que vous nous donniez le droit d'exploiter ces terrains en bons gars d'affaires. Si vous voulez qu'on devienne de bons gars d'affaires, donnez-nous les outils nécessaires. Avez-vous déjà vu une entreprise qui verse des redevances sur ses profits bruts? Tout de même! Les redevances, ça se paie sur les profits nets et non sur les profits bruts. C'est ce qu'on vous recommande, comme tout le reste du Canada. Si vous avez peur qu'on vous cache des choses, il n'y a pas de problèmes. Nous sommes de bons administrateurs. Comme toute bonne entreprise au monde, on préférerait vous payer des redevances sur le profit net et non sur le profit brut.
Monsieur le président, ça fait cinq ans qu'on vous parle des casinos. L'autre jour j'étais à bord du ms Veendam de la Holland America, un navire de 1 367 passagers. Parmi les 250 ports du monde où les navires de la Holland America font escale, il y en a quatre où ils s'arrêtent plus de 24 heures. Le Port de Québec en est un.
Ils font deux jours à Québec, un jour à Montréal, et ils reviennent deux jours à Québec. Cela fait cinq jours sur le Saint-Laurent. On m'a dit: «Chaque fois que je viens à Québec, je perds 500 000 $». Il faut qu'ils nous aiment pour venir à Québec! Chaque fois qu'ils viennent ici, ils perdent 500 000 $.
J'étais à Vancouver la semaine dernière. Ils sont maintenant à 800 000 passagers. C'est une industrie de 200 millions de dollars, et on tolère les casinos.
Ici, il faut les fermer à environ 800 milles de Québec. Il faut modifier le Code. Ce n'est pas compliqué. Cela fait cinq ans qu'on vous le demande. C'est important pour le développement touristique du Saint-Laurent, de Québec et de Montréal.
Québec est l'une des destinations les plus recherchées au monde. On a besoin d'un outil. On nous annonce que pour la première fois l'an prochain, on aura des bateaux de la ligne Royal Caribbean. Ce sera 2 500 passagers. Est-ce que vous pouvez vous imaginer la perte de revenus que ces bateaux-là va subir? On a besoin d'un petit amendement. Ce n'est pas grand-chose.
On est bien inquiets quant au recouvrement des coûts pour le déglaçage et pour le dragage.
Faut-il être pauvres? On n'a pas un million de dollars pour draguer une des voies maritimes les plus importantes au monde: le Saint-Laurent. À la Garde côtière, sur un budget de 800 millions de dollars, on n'a pas un million de dollars pour draguer la traverse nord! Un million de dollars!
La semaine dernière, j'étais à bord d'un bateau de guerre au Port de Québec, et un jeune officier me faisait visiter son bateau tout neuf. Il me montre un canon avec lequel on tire des fusées et me dit que chaque fois qu'il en lance une, cela coûte un million de dollars. Une fusée d'un million! C'est mon dragage au Port de Québec qu'il tire au large!
Le dragage est très important. Plus de 15 000 navires passent sur la traverse nord, et on n'a pas un million de dollars pour draguer cela. Nous sommes très inquiets, monsieur le président.
Je vous laisse maintenant la parole, messieurs, pour nous poser quelques questions.
[Traduction]
Le président: Monsieur Comuzzi, puis monsieur Keyes.
M. Comuzzi: Merci, monsieur le président.
Je ne passerai pas de remarques sur le canon, même si j'ai un peu de sympathie pour vous, monsieur Gaudreault, quand il est question du recouvrement des coûts, mais nous en reparlerons un autre jour.
Vos remarques au sujet de la nouvelle structure portuaire m'ont beaucoup intéressé, monsieur Paquet. Je ne veux pas vous paraphraser, mais je pense que vous avez déclaré que les utilisateurs ont un grand rôle à jouer mais qu'ils ne devraient pas être les seuls à contrôler et à régir le système, en ce qui concerne vos ports, évidemment.
Je suis convaincu que vous êtes au courant de l'intention de céder l'ensemble du système du réseau du Saint-Laurent et des Grands Lacs aux utilisateurs. Une telle cession irait à l'encontre de votre philosophie, n'est-ce pas?
M. Paquet: Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?
M. Comuzzi: Certainement. Vous avez une philosophie concernant la régie des ports. Vous pensez que les utilisateurs devraient avoir un grand rôle à jouer mais qu'ils ne devraient pas être seuls à régir vos ports. Il est question de céder l'administration de tout le réseau des Grands Lacs exclusivement aux utilisateurs. Si votre philosophie était appliquée à la régie des ports, elle devrait aussi s'appliquer au réseau des Grands Lacs et du Saint-Laurent, n'est-ce pas?
M. Paquet: Je sais que le gouvernement est sur le point de proposer une politique concernant la Voie maritime du Saint-Laurent. En principe, pour être logique, ma réponse serait affirmative. Nous pensons que les utilisateurs devraient être bien représentés mais ne pas détenir la majorité. Ce devrait être un effort d'équipe. Dans une équipe, tout le monde a un rôle à jouer et je ne pense pas que quelqu'un devrait accaparer la plupart des rôles. C'est la base de notre raisonnement. Il pourrait probablement s'appliquer à la Voie maritime, bien que je ne participe pas à la réforme de la Voie maritime. Je sais que le processus est bien avancé et je pense qu'en principe, ma réponse serait oui.
M. Comuzzi: Même si vous êtes un port en eau profonde, auriez-vous la gentillesse de nous expliquer l'importance, dans le réseau de transport maritime du Canada, du réseau des Grands Lacs et de la Voie maritime pour le port de Québec?
M. Paquet: Je vais demander à M. Gaudreault de répondre à cette question.
M. Gaudreault: Nous sommes un partenaire de la Voie maritime. Notre port dépend probablement plus de la Voie maritime que tout autre port sur le Saint-Laurent. Qu'il s'agisse du minerai de fer transporté du Brésil à Chicago ou des céréales, la Voie maritime est très importante pour nous. Sans Voie maritime, le port de Québec serait dans le pétrin. Il n'y a pas de livraisons de céréales en été et nous pouvons expédier du charbon ou du minerai de fer, alors nous avons besoin de la Voie maritime.
M. Comuzzi: Je vais vous poser une dernière question.
Vous avez évoqué les ports américains de Chicago et de Burns Harbour, par exemple. Le Port de Québec fait-il beaucoup affaire avec les ports américains?
M. Gaudreault: Nous sommes aussi un partenaire de la partie américaine de la Voie maritime parce que tout le minerai de fer destiné à Bethlehem Steel qui se rend du Brésil à Chicago passe par le port de Québec et par Burns Harbour.
Le président: Monsieur Keyes.
M. Keyes: Merci, monsieur le président.
Je veux remercier M. Paquet et son personnel pour un mémoire très complet et un excellent résumé à notre intention.
M. Comuzzi: Surtout la partie sur le rapport Keyes.
M. Keyes: D'ailleurs, Jim, je veux remercier Ross pour ses mots si gentils à propos du rapport Keyes ou plutôt du Comité permanent des transports de 1995. Il affirme que c'est magistral et qu'il y trouve tout ce qu'il cherchait. Je ne suis pas convaincu que les pilotes seraient d'accord avec vous...
M. Gaudreault: Je parlais du port, monsieur Keyes.
M. Keyes: ... sur le contenu de ce rapport, mais nous les entendrons plus tard.
Je pense qu'il faut rappeler que la Garde côtière, le dragage et les aides à la navigation ne relèvent pas de notre comité ni même du ministère des Transports, mais plutôt de Pêches et Océans. Afin de ne pas oublier complètement le dragage, la Garde côtière et les aides à la navigation, le gouvernement publiera un rapport sous peu, et le ministère des Transports ainsi que celui de Pêches et Océans uniront leurs efforts pour examiner de près ces questions.
Quant aux casinos, comme l'a déclaré M. Crête ce matin, le ministre de la Justice est informé de la nécessité de modifier le Code criminel. Ce n'est pas un changement que nous pouvons apporter dans le cadre du projet de loi qui nous intéresse, mais il est certainement au courant de la situation.
Je me demande si M. Paquet pourrait nous parler de la présence du président-directeur général au conseil d'administration. Franchement, la majorité des ports du pays nous demandent de ne pas faire siéger le pdg au conseil d'administration. Nous venons à Québec et on nous demande de faire le contraire.
Pouvez-vous expliquer le raisonnement qui vous incite à recommander qu'un pdg siège au conseil d'administration, quand Vancouver estime au contraire que le pdg devrait être indépendant du conseil?
[Français]
M. Paquet: Vous avez raison de le mentionner, monsieur Keyes.
La présence des présidents-directeurs généraux sur les conseils d'administration est peut-être un des rares points sur lesquels il n'y a pas eu unanimité au Canada. Je pense que cela peut tenir, dans certains cas, à des situations particulières. Si la structure actuelle était maintenue pour ces ports-là et qu'elle ne permettrait pas d'avoir une personne de plus, à ce moment-là, il ne serait pas nécessaire d'avoir un président-directeur général.
Dans d'autres cas, cela peut tenir à des conflits de personnalité entre certains membres du conseil et le président-directeur général. Je dois vous dire que l'approche du Port de Québec a été celle de l'entreprise privée, des grandes sociétés commerciales, où les présidents et les directeurs généraux des entreprises commerciales siègent sur le conseil d'administration.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, le président-directeur général a la responsabilité des opérations courantes de la société. C'est une personne qui est bien payée pour faire son travail et qui a beaucoup de responsabilités. Pour les administrateurs, il est important que la personne qui a le contrôle des opérations partage ses responsabilités avec les autres administrateurs.
Les administrateurs ont des responsabilités qui, dans certains cas, peuvent être énormes. On n'a qu'à penser à la responsabilité des administrateurs au plan environnemental, ce qui est une grande préoccupation pour les ports. Je pense qu'en toute équité, les présidents-directeurs généraux doivent partager cette responsabilité avec les autres membres du conseil d'administration.
Évidemment, le conseil d'administration peut nommer le président-directeur général et, après avoir embauché un bon président-directeur général, le nommer au conseil d'administration. C'est une chose qui se fait couramment dans le milieu des affaires. Comme on veut que les sociétés portuaires fonctionnent comme de véritables entreprises commerciales, on doit leur appliquer les mêmes principes.
[Traduction]
M. Keyes: J'ai une brève question sur le statut d'agence fédérale qui serait accordé au port.
Nous avons parlé des liens durables. La Société canadienne des ports disparaîtra. Mais malgré tous ses défauts, malgré la lenteur bureaucratique de ses efforts visant à rendre les ports aussi commerciaux que possible, elle a eu au moins le mérite de rassembler tous les ports dans une même structure, qu'il s'agisse de Vancouver, de Québec ou de Halifax, et elle travaillait en équipe avec les ports d'un océan à l'autre.
Pensez-vous que la mise en oeuvre du statut d'agence fédérale que vous suggérez prendra la relève de la Société canadienne des ports?
Je sais que la SODES ne tient pas particulièrement au statut d'agence fédérale. Ses raisons ne sont pas très claires, mais en ce qui concerne la fiscalité, pour la protection des ports et pour qu'il y ait des liens durables, pensez-vous que le statut d'agence fédérale serait un atout?
M. Paquet: La nouvelle politique maritime et le projet de loi C-44 nous ont donné - et par «nous» j'entends les ports canadiens - une occasion en or d'apprendre à nous connaître, de travailler ensemble et de porter les enjeux clés à l'attention de votre comité et du gouvernement. Je pense que le statut d'agence fédérale contribuera à maintenir ce lien, que je trouve essentiel pour les ports canadiens.
Dans certains domaines, nous sommes peut-être des concurrents, mais nous avons beaucoup d'objectifs communs. Nous avons beaucoup d'information à échanger, et faire partie du réseau portuaire canadien tout en ayant un statut d'agence fédérale facilitera beaucoup notre tâche.
M. Keyes: Merci, monsieur Paquet.
M. Paquet: Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose, et je sais que M. Comuzzi peut le confirmer. Nous avons des clients dans le monde entier et nous sommes un port canadien, un port du réseau canadien, une agence fédérale, mais nous collaborons aussi avec les ambassades, et cela nous apporte beaucoup de travail. Lorsque nous faisons des missions commerciales, nous travaillons avec l'ambassade locale, qui nous aide. Si nous perdons notre statut d'agence fédérale, nous n'aurons plus accès à cette aide. Je pense que c'est un autre aspect très important.
Le président: Merci.
Monsieur Jordan, vous avez une très brève question.
M. Jordan (Leeds - Grenville): En ce qui concerne la composition du conseil d'administration, des témoins ont proposé à d'autres séances que les travailleurs soient représentés au conseil. Je suis d'accord avec ce que propose M. Keyes, je crois, c'est-à-dire donner au président-directeur général un siège au conseil.
Je peux imaginer une situation où il faut procéder à un vote, pour essayer de déterminer si vous devez prendre une mesure ou non. Je me demande si le président-directeur général devrait participer à ce niveau, étant donné le poste qu'il occupe.
Que pensez-vous de l'idée que les travailleurs soient représentés? Cela pourrait vous obliger à accroître le nombre de sièges - vous en proposez sept, dont le pdg. Vous pouvez peut-être le maintenir à sept mais réserver un de ces sièges aux travailleurs et demander au pdg de faire tout simplement son travail de gestion. Il est une personne-ressource concernant tous les aspects des activités et probablement la personne la plus renseignée qu'on puisse trouver.
Que pensez-vous de l'idée que les travailleurs soient représentés au conseil?
M. Paquet: Je pense que personne ne devrait être exclu. Quiconque peut démontrer qu'il représente les utilisateurs devrait siéger au conseil. Si l'une de ces personnes fait partie des effectifs, pourquoi pas?
M. Jordan: En ce sens, donc les travailleurs pourraient être représentés s'ils étaient désignés par les utilisateurs. Si les utilisateurs décident entre eux que M. Alcock, qui fait partie des effectifs, peut être un bon représentant, il se retrouverait au conseil, pas à titre de représentant des travailleurs mais plutôt de représentant des utilisateurs, s'il est admissible.
J'ai une deuxième question, très brièvement. On s'est déjà demandé, et c'est toujours une source de controverse, s'il faudrait se fonder sur les revenus bruts ou le bénéfice net. Je pense personnellement que les bénéfices nets posent une difficulté parce qu'il y a des méthodes comptables très ingénieuses pour déterminer ce qui constitue le bénéfice net, tandis que les revenus bruts sont relativement clairs.
Je pense que la plupart d'entre vous déclarez que vous paieriez beaucoup plus si les redevances se fondaient sur le revenu brut plutôt que le bénéfice net. Ce serait effectivement le cas, si le taux restait identique, mais je proposerais d'abaisser le taux et de le calculer sur le revenu brut parce qu'il est plus facile d'établir de manière cohérente ce qui constitue le revenu brut.
Le bénéfice net est beaucoup plus vague. Il y a plus de place pour des méthodes comptables ingénieuses. Je ne sais pas comment vous le détermineriez. Il faudrait l'appliquer également à tout le monde. Vous devriez amener les comptables à s'entendre sur la façon de le calculer. C'est la difficulté que je vois.
[Français]
M. Paquet: Je comprends que cela peut créer une difficulté que d'imposer une redevance, un droit ou une taxe sur les revenus bruts. Mais il faut quand même voir que toutes les sociétés commerciales, et les ports vont fonctionner comme des sociétés commerciales, sont assujetties à la vérification annuelle de leurs livres par des comptables agréés, qui sont eux-mêmes assujettis à une réglementation et à des normes qui sont les mêmes partout à travers le Canada.
Donc, de la façon dont la vérification se fait et de la façon dont le contrôle et la surveillance pourront être exercés par un secrétariat ou un bureau quelconque rattaché au bureau du ministre des Transports, on pourra facilement vérifier les états financiers et voir si une administration portuaire, de façon systématique, année après année, ne présente pas de profits. On pourra, à ce moment-là, facilement déceler les lacunes dans les procédures comptables.
Il faut faire confiance aux gens qui seront nommés. N'oublions pas une chose: la représentation des utilisateurs tient à une chose, et c'est la qualité des gens qui seront nommés à ces conseils d'administration pour administrer et faire fonctionner les administrations portuaires.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, d'autant plus que vous m'avez invité à siéger à votre conseil. Je vous remercie de votre appui.
Certaines de ces questions - le président-directeur général, les représentants des travailleurs - peuvent aussi être réglées dans vos lettres patentes plutôt que dans la loi.
En ce qui concerne l'ingéniosité des comptables, évoquée par M. Jordan, c'est une autre question, dont nous devrons discuter entre nous, monsieur Jordan.
[Français]
Monsieur Crête.
M. Crête: Les derniers mots de M. Paquet sur la nomination des administrateurs me paraissent très pertinents.
À la page 6 de votre mémoire, vous dites et je cite:
- La Société du port de Québec suggère que les administrateurs soient nommés pour des termes
de trois ans renouvelables aussi souvent qu'il sera jugé utile par les responsables des
nominations.
La suggestion ne vise-t-elle pas justement à permettre que les administrateurs soient nommés directement par les utilisateurs au lieu que le ministre procède aux nominations à partir d'une série de noms qui lui seront suggérés? Je retiens aussi que vous précisez que, par la suite, le président et le vice-président du conseil pourront être nommés par le ministre. Recommandez-vous que les administrateurs de base soient nommés directement par les usagers?
C'est à la page 6 du document, au cinquième paragraphe.
M. Paquet: Quand on parle des responsables des nominations, on pense au ministre. Il devrait nommer à partir d'une liste qui lui sera fournie par les utilisateurs.
M. Crête: Vous ne voyez pas là de danger de politisation?
M. Paquet: Il y a de la politique partout. Un gouvernement donné va nommer certaines personnes, un autre pourra en nommer d'autres. Si le ministre se donne la peine de mettre dans la loi un processus de sélection qui lui permet de choisir parmi les meilleurs éléments, il est normal à ce moment-là que le ministre puisse les nommer; en bout de ligne, la qualité des personnes suggérées par les utilisateurs sera telle, à mon avis, que le ministre aura un choix facile.
Il ne me semble pas indécent, non plus, que le ministre des Transports du Canada procède lui-même à ces nominations-là, parce qu'il faut quand même garder à l'esprit que, dans la formule proposée tout comme dans la formule actuelle, c'est le gouvernement du Canada qui demeure propriétaire des actifs. Quand on est propriétaire d'actifs importants, il est essentiel qu'on garde un certain contrôle sur la société. Tant que ça ira bien, il n'y aura pas de problème. Mai le jour où ça ira mal, même s'il y a un désengagement au plan financier du gouvernement fédéral, celui qui recevra un appel pour se faire dire que ça ne marche pas au Port de Québec, ce sera le ministre des Transports.
M. Crête: Mais ne trouvez-vous pas que ça porte un coup important à l'autonomie des ports? Que le président et le vice-président du conseil soient nommés par le ministre, comme vous le suggérez, peut paraître intéressant. Quant aux administrateurs, les représentants du port vont suggérer sept, huit, dix ou quinze noms parmi lesquels le ministre va en choisir quatre ou cinq. Vous trouvez cela acceptable?
M. Paquet: Ça ne m'empêchera pas de dormir.
M. Crête: D'accord.
Dans le passé, on a connu des situations assez particulières. Souvent, les administrations portuaires ont présenté des lacunes importantes à cause du manque de qualité des membres du conseil.
M. Paquet: Vous avez tout à fait raison, mais il y a des solutions à tous les problèmes; dans l'ensemble, il faut faire confiance à la qualité des gens. Les utilisateurs, j'en suis assuré, se choisiront des représentants qui seront capables de les représenter, qui auront les qualifications, l'expérience et la disponibilité nécessaires pour s'assurer que le port est géré dans le meilleur intérêt du public.
M. Crête: Je partage à 100 p. 100 votre avis que les utilisateurs vont suggérer des noms intéressants. Je souhaite que le ministre fasse ses choix de façon à permettre beaucoup d'autonomie aux utilisateurs dans les suggestions qu'ils feront.
À Vancouver, on a rencontré des gens du Port de la rivière Fraser, qui est jumelé avec le Port de Québec; ils ont le statut de commission portuaire, un statut qui existe pour les ports de l'Ontario et de Colombie-Britannique.
Si demain vous aviez le choix entre le statu quo, le projet de loi C-44 actuel et le statut de commission portuaire, quel statut vous semblerait le plus approprié?
Les gens qui sont venus nous présenter des choses sur les commissions portuaires nous ont dit que c'est le statut qui leur semblait le plus intéressant par rapport à ce qu'il y a dans le projet de loi. Ils étaient contre l'abrogation de la loi des commissions portuaires.
Est-ce une avenue que vous avez envisagée pour Québec? Vous nous dites poliment aujourd'hui que le projet de loi C-44, c'est beau au niveau des principes, mais que s'il n'y a pas des changements majeurs, il risque d'être difficile à accepter.
M. Paquet: Je pense que poser la question, c'est y répondre. Je vous rappellerai que les commissions portuaires ne paient pas de taxes municipales. Il y a déjà là un avantage énorme à avoir le statut de commission portuaire.
M. Lallier ne sera peut-être pas d'accord avec moi, mais si on avait la possibilité de ne payer ni taxes ni compensations qui tiendraient lieu de taxe, ce serait extrêmement intéressant pour le Port de Québec.
M. Crête: Certaines municipalités sont venues témoigner à Vancouver en faveur du maintien du statut de commission portuaire. Ce sont les maires de ces municipalités qui sont venus nous dire cela.
Je réitère ma question. Entre le statu quo, le projet de loi C-44 tel qu'il est et le statut de commission portuaire, quel serait le modèle le plus intéressant pour vous? Avez-vous fait cette analyse?
M. Paquet: Le projet de loi C-44 modifié se rapprocherait grandement du statut de commission portuaire. C'est ce qu'on dit.
M. Crête: Êtes-vous capables de vivre avec le projet de loi C-44 non modifié?
M. Paquet: Le projet de loi C-44 nous met des menottes et restreint nos pouvoirs. On aura moins de pouvoirs qu'on en a actuellement avec la Loi sur la Société canadienne des ports adoptée en 1983.
Les ports ont quand même réussi à faire bonne figure au plan financier. On ne voudrait pas que, cette fois-ci, le bateau soit manqué. Quant à le faire, faisons-le comme il le faut. Comme on dit en anglais, when it works, don't fix it. But you can improve it.
M. Crête: Nous sommes bien d'accord avec vous, monsieur Paquet. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci. Si je n'avais pas d'impôt à payer, ce serait très avantageux pour moi, Paul.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président. Nous pourrions abaisser votre revenu au point où vous n'auriez plus d'impôt à payer. Vous seriez alors certainement un homme très heureux.
Des voix: Oh, oh!
M. Gouk: Monsieur, nous venons d'entendre mon collègue du Bloc demander si vous pourriez vivre avec le projet de loi C-44 non modifié, si ce serait acceptable. Je ne crois pas que cela se produira. Je pense qu'il y aura plusieurs modifications qui obtiendront l'accord de tous les partis. La plupart de vos suggestions concordent avec ce que nous avons entendu et avec les modifications que nous envisageons.
Vous avez d'ailleurs adopté la position d'un grand nombre de ports. Dans votre chapitre intitulé «Autres considérations», vous évoquez la Loi sur la Société canadienne des ports. Je devrai la consulter, parce que je ne la connais pas bien. Je vais aussi examiner cette question. Je vais analyser vos recommandations, et elles seront prises en considération.
Merci.
[Français]
M. Crête: On peut comprendre vos inquiétudes par rapport au projet de loi C-44 quand on voit ce qu'on a fait du Rapport Keyes. Il faudrait être très attentif à l'avenir.
M. Paquet: On va l'être.
[Traduction]
Le président: Répondez-vous à la question de M. Gouk?
[Français]
M. Crête: Il n'avait pas de question.
[Traduction]
Le président: Oui, je comprends. Merci beaucoup, messieurs. C'est gentil.
M. Paquet: Merci, monsieur le président. Merci, messieurs.
Le président: Du Port de Trois-Rivières... Monsieur Crête, connaissez-vous ce port?
Capitaine Tremblay, monsieur Masson, bienvenue. Vous connaissez le processus. Vous pouvez essayer de limiter vos remarques et je vais essayer de limiter les interventions des membres. Nous aurons un échange intéressant.
M. Robert Masson (gestionnaire de projets et de développement, Port de Trois-Rivières): Oui. Monsieur le président, nous avons beaucoup à dire. C'est la première fois que nous témoignons à un comité. Nous n'avons jamais eu la chance de nous expliquer. Avec votre permission, nous aimerions prendre de quinze à vingt minutes pour vous présenter notre exposé.
Le président: Absolument. Nous limiterons le nombre de questions. Vous faites ce que vous voulez du temps qui vous est alloué.
[Français]
Le capitaine Serge Tremblay (directeur général, Port de Trois-Rivières): Je suis le capitaine Serge Tremblay, directeur général du Port de Trois-Rivières. Je suis accompagné de M. Robert Masson, gestionnaire de projets et de développement au Port de Trois-Rivières.
Nous tenons à remercier le Comité permanent des transports de nous donner la possibilité d'exprimer notre point de vue sur le projet de loi C-44.
La direction du Port de Trois-Rivières a toujours excellé dans la gestion de son port afin de répondre avec efficacité et ouverture aux demandes de sa clientèle, et c'est dans cet esprit que nous nous présentons aujourd'hui devant votre comité. Nous voulons que vous nous aidiez à poursuivre notre démarche en vue d'une gestion portuaire dynamique et efficace.
Nous voulons également que soient mises de l'avant des propositions de modifications de façon à présenter le meilleur projet de loi maritime possible, comme le déclarait le ministre des Transports dans son allocution du 26 septembre dernier devant ce comité.
Notre mémoire se divisera en cinq parties: le port et son environnement; la justification de devenir une APC; les points à modifier au projet de loi C-44; les conséquences du projet de loi C-44 sur les ports; et la conclusion.
Situé au confluent de la rivière Saint-Maurice et du fleuve Saint-Laurent, dans la partie nord du littoral, le Port de Trois-Rivières est à mi-chemin entre les villes portuaires de Québec et de Montréal.
La région administrative Mauricie - Bois-Francs, dont Trois-Rivières constitue la ville centre, est la troisième au Québec pour l'importance de sa population. Par ailleurs, il importe de souligner que plus de cinq millions de consommateurs et 96 p. 100 des industries manufacturières québécoises se trouvent concentrés dans un rayon de 150 kilomètres autour de Trois-Rivières.
Historiquement, le port a été un outil majeur de développement pour la région. C'est ainsi qu'à travers les diverses époques, son évolution s'est faite à partir de la fourrure, du bois, du grain, des minéraux, de l'amiante et des produits du papier, qui ont tous joués un rôle important dans son développement et sa croissance.
Au fil des ans, les hinterlands des ports se sont agrandis, notamment à la suite du développement de l'intermodalité, de la technologie et de la taille des navires et de l'intensification des échanges commerciaux à l'échelle mondiale. C'est ainsi que le Port de Trois-Rivières a vu sa vocation changer et s'orienter de façon à bien s'adapter à ces nouvelles réalités. On peut donc affirmer aujourd'hui, en 1996, que le Port de Trois-Rivières s'est spécialisé et diversifié dans divers produits comme, par exemple, l'alumine. D'ailleurs, un port performant est reconnu de nos jours non pas par sa dimension, mais par la diversification de ses produits et aussi par sa capacité de réagir et de s'adapter au contexte présent lorsqu'un événement se produit.
Au cours des cinq dernières années, 72 p. 100 du trafic total manutentionné au port était à vocation internationale. En tout, le port manutentionne une vingtaine de produits différents sur une base régulière, et le volume total annuel oscille généralement autour de 2,5 millions de tonnes.
Les activités engendrées par les opérations portuaires du Port de Trois-Rivières ont des retombées très significatives sur l'économie locale, régionale et nationale. Une étude réalisée au cours de l'année 1996, et à partir des résultats de 1995, a démontré l'impact économique du port de la façon suivante: emplois totaux, 776; revenus, 48,5 millions de dollars; salaires directs, 16,5 millions de dollars; dépenses induites de consommation, 47,5 millions de dollars; taxes, 15 millions de dollars.
Sur le plan financier, peu de ports canadiens bénéficient d'une situation aussi enviable que celle du Port de Trois-Rivières. Au fil des ans, des efforts continus de développement de marchés, de diversification des produits, de programmes efficaces d'entretien préventif des installations portuaires et de contrôle rigoureux des dépenses nous ont permis de développer une gestion efficace et exemplaire pour d'autres institutions, tant du secteur public que parapublic.
Depuis de nombreuses années, le port est en mesure d'assumer lui-même le financement de ses projets à partir de ses propres fonds. Par exemple, en 1978, lors de l'affaissement des quais nos 10 et 11, le port à lui seul a dépensé, à même ses réserves, huit millions de dollars pour leurs reconstruction.
Toutes les réparations et projets d'entretien ont été exécutés à partir des réserves du port. Jamais le Port de Trois-Rivières n'a reçu du gouvernement fédéral des subventions ou des emprunts. Le port est libre de toutes dettes. De plus, en mars et août 1986, ainsi qu'en août et décembre 1990, le Port de Trois-Rivières a contribué au paiement de la dette nationale un montant de 11 millions de dollars, soit 12 canons. En ce moment, la réserve du port est de 12 millions de dollars et nous avons également, au cours des ans, payé des dividendes au gouvernement pour plus d'un demi-million de dollars.
Les résultats financiers pour l'année 1995 montrent des résultats révélateurs. Pour des revenus de 3,5 millions de dollars, le bénéfice d'exploitation est de 1,1 million de dollars et le bénéfice net, de 1,9 million de dollars. Nous anticipons pour l'année 1996 à peu près les mêmes résultats.
Dans un but bien précis, celui d'améliorer de façon continue la qualité de la gestion portuaire et de répondre efficacement aux besoins de sa clientèle, le port lançait, en 1994, un ambitieux programme d'amélioration continue de la qualité. Ce programme très innovateur en matière de gestion portuaire, devrait conduire le port, à la fin de 1996, à l'obtention de l'accréditation ISO 9002, une grande première dans les annales portuaires canadiennes. En effet, le Port de Trois-Rivières deviendra le premier port en Amérique du Nord où les politiques et les procédures de travail seront exécutées selon des normes internationales reconnues.
Dans son statut actuel, le Port de Trois-Rivières est considéré comme un port divisionnaire, c'est-à-dire un port administré par la Société canadienne des ports. Cependant, la loi et les règlements qui le régissent sont les mêmes que pour les sociétés portuaires locales. C'est surtout au niveau administratif, par des conseils d'administration différents, que l'on peut les reconnaître.
Au moment où la réforme portuaire a été proposée, il y a quelque temps, le Port de Trois-Rivières s'apprêtait déjà à demander un statut de société portuaire locale puisque son autonomie financière l'autorisait à entreprendre une telle démarche.
Selon le projet de loi C-44, au paragraphe 6(1), le ministre des Transports pourra délivrer des lettres patentes de constitution pour une administration portuaire sans capital-actions en vue d'exploiter un port spécifique au Canada s'il est convaincu que les conditions suivantes sont réunies: le port est financièrement autonome et le demeurera vraisemblablement; il présente une importance stratégique pour le commerce du Canada; il est rattaché à des lignes principales de chemin de fer ou des axes routiers importants; et il a des activités diversifiées.
Convaincu que le Port de Trois-Rivières répondait aux critères ci-dessus mentionnés, nous déposions, le 6 septembre dernier, une demande officielle pour la formation d'une administration portuaire canadienne auprès du directeur exécutif de Havres et Ports. L'objectif premier de cette demande est d'assurer la continuité du développement du port en harmonie avec la communauté locale et régionale.
Le bilan financier du port démontre que celui-ci est en mesure de faire face à ses responsabilités financières pour son développement au cours des années à venir. Appuyé par une réserve financière de 12 millions de dollars et des opérations qui engendrent un profit d'exploitation annuel de un million de dollars, le Port de Trois-Rivières est en mesure de poursuivre sa croissance et de financer à même ses propres fonds les projets d'immobilisation comme il l'a toujours fait dans le passé.
En plus de jouir d'une situation financière enviable, le Port de Trois-Rivières est un outil majeur pour le développement de sa région et joue un rôle stratégique pour plusieurs de ses utilisateurs et clients, qui se trouvent un peu partout dans l'est du Canada et le nord-est des États-Unis.
D'ailleurs, les statistiques de 1995 démontrent que les produits manutentionnés à nos installations de Trois-Rivières ont une valeur de plus de 600 millions de dollars et que le port génère pour les diverses entreprises des revenus de l'ordre de 48,5 millions de dollars, crée 776 emplois et contribue des salaires et des dépenses induites de consommation de 47,5 millions de dollars ainsi que des revenus en taxes pour les divers paliers de gouvernement de 15 millions de dollars.
La Ville de Trois-Rivières, étant la capitale administrative industrielle de la région administrative 04, est desservie par d'excellents réseaux routiers et ferroviaires. Des liens intermodaux d'une telle efficacité font de Trois-Rivières un carrefour comparable aux grands centres industriels de l'Amérique du Nord.
Quant à la diversité de nos activités, le Port de Trois-Rivières repose sur une large base de clients ainsi que sur une variété de produits et de terminaux spécialisés ou polyvalents. De façon à bien évaluer l'ampleur de notre diversification, on peut affirmer que nos cinq plus importants clients comptent, en fait, pour 51 p. 100 de nos revenus, ce qui constitue une base solide à laquelle s'ajoutent d'autres sources de revenus provenant d'autres activités.
Les points à modifier au projet de loi C-44: Les commentaires que nous désirons faire sur le projet de loi C-44 ressortent d'une analyse approfondie du document présenté à la Chambre des communes au mois de juin dernier. Nous avons tenu compte également de notre statut de port divisionnaire et du statut des sociétés portuaires locales, puisque nous sommes régis par les mêmes politiques et règlements. De plus, nous avons tenu compte des arguments soulevés par l'Association des ports et havres du Canada. De cette façon, nous émettrons des commentaires généraux sur le projet de loi et d'autres plus spécifiques au Port de Trois-Rivières.
Nous n'avons pas l'intention de revoir un à un les articles du projet de loi, puisque d'autres l'ont déjà fait ou le feront éventuellement, entre autres l'Association des ports et havres du Canada, dont nous appuyons les recommandations. En principe, nous sommes d'accord sur ce qui a déjà été proposé par d'autres ports ayant un statut de société portuaire locale, mais nous désirons nous attarder sur trois ou quatre dispositions de la loi qui pourraient réellement être inefficaces pour les administrations portuaires canadiennes, en particulier pour le Port de Trois-Rivières, à savoir: le conseil d'administration et rôle du premier dirigeant; le statut d'agence fédérale; le transfert des propriétés, les taxes foncières, la capacité d'emprunt, et l'article 52.
Nous sommes par ailleurs déçus de constater que les recommandations contenues dans le rapport du Comité permanent des transports n'aient pas été suivies à la lettre et inscrites dans l'ébauche du projet de loi C-44.
Conseil d'administration: Nous croyons que le nombre d'administrateurs proposé dans le projet de loi est trop élevé. À notre avis, il serait préférable d'établir un nombre d'administrateurs pour les plus grands ports et un nombre moindre pour les ports moyens.
Par exemple, le Port de Trois-Rivières, avec un personnel administratif restreint de six personnes, pourrait s'accommoder d'un conseil d'administration de cinq personnes, ce qui nous permettrait de diminuer les coûts de fonctionnement du conseil d'administration et, d'autre part, d'être plus efficaces. Si on avait un conseil de 11 personnes, cela nous coûterait plus cher pour le conseil d'administration que pour le personnel en place.
La représentativité des divers intervenants pourrait être la suivante: deux représentants du gouvernement fédéral; un représentant du provincial; un représentant du municipal; et un représentant des utilisateurs nommés par le ministre en consultation avec les usagers.
Pourquoi un représentant des usagers? Cette logique s'impose afin d'éviter tout conflit d'intérêts qui pourrait mettre en péril la survie financière du port. À cet égard, peut-on imaginer le CRTC avec un conseil d'administration dont la majorité serait des représentants des diffuseurs ou télédiffuseurs, ou un Wal-Mart dont le conseil d'administration serait composé de représentants des consommateurs, ou une compagnie privée dont le conseil serait formé d'une majorité de clients? Il y a des barrières qu'on ne peut franchir.
À notre avis, tous les conseils d'administration d'entreprises respectables et performantes sont composés de gens d'affaires dont l'entreprise excelle dans le monde des affaires. Il est grand temps, au niveau des institutions gouvernementales, d'innover, et l'occasion s'en présente actuellement.
Le gouvernement fédéral devrait se garder la prérogative des nominations au conseil d'administration, ce qui ne l'empêcherait pas, d'autre part, de consulter les usagers du port pour la nomination de leur représentant au conseil d'administration. Une durée des mandats de trois ans nous semble appropriée. Quant à la possibilité de renouvellement, nous sommes d'avis qu'un maximum de deux renouvellements assurerait une bonne continuité.
Quant au rôle du premier dirigeant, nous considérons que s'il ne faisait pas partie du conseil d'administration, il pourrait faire preuve d'une plus grande objectivité et que son efficacité en tant que gestionnaire portuaire n'en serait que plus grande.
Statut d'agence fédérale: Comme nous sommes d'avis que le gouvernement fédéral devrait préserver ses intérêts dans un réseau portuaire national amélioré, il va de soi que la position d'agence fédérale serait tout indiquée pour les ports obtenant le statut d'administration portuaire canadienne. Le projet de loi n'indique pas clairement quelle sera la position du gouvernement à ce sujet, mais il faudra rapidement régler cette question cruciale.
Avec une reconnaissance de statut d'agence fédérale, les ports seraient mieux placés pour collaborer à la réalisation des objectifs gouvernementaux à caractère économique. De plus, cela permettrait aux ports de discuter et de négocier plus facilement avec les autres agences gouvernementales et les différents ministères d'une façon plus simple et directe tout en préservant les actifs du gouvernement canadien évalués à plusieurs milliards de dollars.
Finalement, le gouvernement fédéral conserverait ainsi un pouvoir d'intervention qui pourrait se limiter à des circonstances précises, lorsque, par exemple, l'ensemble du réseau portuaire canadien pourrait être menacé ou, encore, lorsque la survie d'un port pourrait être en danger.
Nous sommes d'avis que les recommandations du rapport du Comité permanent des transports devraient s'appliquer à la présente situation.
Relativement au montant des frais annuels à verser au gouvernement et dont le mécanisme sera prévu aux lettres patentes, il devrait être raisonnable afin de permettre aux ports d'assurer leur rentabilité et leur développement à moyen et long termes. Ainsi, nous proposons que le versement soit calculé à partir des bénéfices nets et qu'il soit nul jusqu'à concurrence d'un bénéfice net de trois millions de dollars. Pour tout montant supérieur, 10 p. 100 seraient remis annuellement.
Transfert des propriétés, taxes foncières, capacité d'emprunt, article 52: Afin de réaliser leurs objectifs, les ports doivent jouir d'installations d'excellente qualité, mais souvent fort coûteuses à entretenir. Pour pouvoir gérer ces équipements et installations d'une manière efficace et rentable, les ports doivent bénéficier de mécanismes souples, notamment en matière d'acquisition et de disposition.
Le projet de loi actuel prévoit que les immeubles transférés aux ports le seront par le biais des lettres patentes. Cette façon de procéder pourrait constituer une certaine entrave à la bonne gestion du port. À notre avis, le transfert par décret serait une façon plus simple de permettre aux ports d'agir ou de réagir plus rapidement.
La question des taxes foncières dans la loi en est une dont les conséquences peuvent avoir un effet désastreux sur la rentabilité d'un port. Dans le cas du Port de Trois-Rivières précisément, si ce dernier n'était pas couvert par la disposition sur les subventions tenant lieu de taxes, le surplus annuel de taxes à payer pourrait atteindre un montant substantiel. D'autre part, les taxes payées pour services rendus peuvent être considérées comme une autre alternative.
En ce qui a trait à l'article 24, le libellé actuel a pour effet de limiter les activités potentielles qu'un port pourrait entreprendre pour améliorer sa rentabilité. Il est essentiel, sous le nouveau régime, que les ports puissent diversifier au besoin leurs activités traditionnelles en ayant accès à toute autre activité reliée de façon indirecte à la navigation, au transport de passagers et marchandises, et à la manutention et à l'entreposage des marchandises.
Toujours en ce qui a trait au même article, la description restrictive du port au paragraphe (1) a pour conséquence de limiter le port à son site actuel. Avec un pouvoir et un mécanisme d'acquisition approprié, il serait important que cet article puisse faciliter une modification territoriale permettant d'agrandir, au besoin, le site portuaire initial.
Quant au pouvoir d'emprunt, nous considérons que tout port formé en administration portuaire canadienne devrait avoir un pouvoir d'emprunt qui puisse lui assurer des conditions de financement raisonnables.
Quant à l'article 52 sur les opérations portuaires, il devrait être retiré du projet de loi et faire partie des règlements.
Les conséquences du projet de loi C-44 sur les ports: Nous voyons aussi des conséquences inquiétantes au projet de loi C-44 suivant sa forme actuelle. Nous sommes d'avis que d'ici 10 ans, ou peut-être même moins, plusieurs administrations portuaires canadiennes sur le Saint-Laurent, et ailleurs au Canada, auront disparu, et cela pour trois raisons principales:
1) De par leur représentation majoritaire au conseil d'administration, les utilisateurs seront en mesure de fixer des droits et tarifs à un niveau tel que la compétition qui s'ensuivra sera fatale pour les ports moins bien nantis financièrement. Ces administrateurs seront en conflit d'intérêts.
2) L'absence de conditions de transfert des ports à statut local ou régional est de nature à créer un système pouvant entraîner des conséquences financières très négatives pour les administrations portuaires canadiennes. L'utilisateur ou l'opérateur de terminal se portant acquéreur d'un port ayant un tel statut à des conditions peut-être très avantageuses et dont les installations seront de très bonne qualité pourra mettre en place une tarification pour le passage portuaire des marchandises ne pouvant être égalée par les administrations portuaires canadiennes.
En effet, sans exigences fermes envers le port local ou régional en matière de développement d'infrastructures et d'entretien, la portion devant compenser pour ces exigences dans le passage portuaire pourra être nulle. L'administration portuaire canadienne qui, pour sa part, devra avoir une vision à plus long terme, pourrait ne pas être en mesure de soutenir une telle situation compétitive.
D'autre part, lorsque viendra le temps de procéder à des investissements pour maintenir des installations portuaires dans des sites locaux ou régionaux, des octrois ou subventions venant d'un ou plusieurs paliers gouvernementaux, pour favoriser la création d'emplois locaux et régionaux, résulteront en une distorsion très nuisible dans le marché.
3) Sur le Saint-Laurent, et probablement dans les autres régions du Canada également, les utilisateurs d'un port sont aussi les utilisateurs d'un ou plusieurs autres ports. Donc, le même utilisateur sera représenté au conseil d'administration de diverses administrations portuaires canadiennes. De plus, il pourra en même temps être opérateur ou propriétaire d'un port local ou régional. Une telle situation facilitera davantage la croissance d'une entreprise privée particulière que le développement d'un bien devant servir les intérêts d'une collectivité.
À la lumière des points que nous venons de soulever, comment peut-on espérer ou croire que les utilisateurs du domaine privé vont assurer la mise en place et le développement d'un système portuaire durable, efficace et compétitif qui permettra au Canada d'atteindre ses objectifs commerciaux?
Conclusion: Le rôle des administrations portuaires comporte trois fonctions principales: la fonction administrative; la fonction responsabilité de propriétaire; et la fonction reliée aux opérations, qui est presque toujours associée au secteur privé en collaboration avec l'autorité portuaire.
La fonction administrative sert à coordonner les deux autres groupes d'activité en plus de faire d'un port une entité responsable vis-à-vis des différents intervenants.
Notre système est en voie de subir une troisième réforme afin de définir la meilleure façon d'exécuter des fonctions administratives. Le but de cette réforme est réellement le même que celui des précédentes.
La première réforme avait pour objet de corriger les problèmes d'une administration locale et la deuxième, de corriger ceux d'une administration centrale. La présente réforme est concentrée seulement sur des changements administratifs. Elle élimine le principe de l'équité et les avantages d'un système plus ou moins uniforme pour les remplacer par des principes strictement commerciaux, ce qui est un peu un retour à la situation d'avant la première réforme, mais avec beaucoup plus de transparence envers le public que dans le temps des Trinity Houses et des commerçants qui les dirigeaient.
Au moment de délaisser son rôle de propriétaire à la faveur d'un groupe dont la majorité proviendrait des utilisateurs, le gouvernement fédéral cédera aussi à ce groupe la responsabilité de la fonction administrative en plus du secteur des opérations qu'il contrôle déjà. Les responsables de la réforme actuelle doivent être aussi conscients de toute la place et de tous les pouvoirs qui seront conférés aux utilisateurs d'installations publiques dont la propriété sera gouvernementale.
Plusieurs aspects de la gestion portuaire pourraient devenir problématiques, notamment les budgets et plans de développement, la commercialisation et la promotion, la planification et le financement des projets, l'entretien général et le dragage, la négociation des baux, servitudes, ententes et permis, la navigation, la sécurité et les plans d'urgence, la protection et la vérification des infrastructures, la vérification environnementale, qui sont du domaine du gouvernement fédéral, la planification et la mise en place d'objectifs nationaux, l'abandon ou le transfert d'installations, l'enregistrement et la clarté des titres de propriété, l'utilisation du territoire et les relations avec les autres agences gouvernementales et ministères.
Pour terminer, nous trouvons que le projet de loi C-44 du ministre des Transports est louable dans son effort d'améliorer l'efficacité du réseau portuaire canadien, mais à la condition que des amendements importants y soient apportés.
De plus, dans ce nouveau contexte, le gouvernement fédéral devra accorder à tous les ports qui répondent aux critères énoncés dans la loi, le statut d'agence fédérale aux administrations portuaires canadiennes pour que les objectifs commerciaux du Canada soient atteints. Cette recommandation était déjà inscrite dans le rapport du Comité permanent des transports et assurerait une présence fédérale.
Une administration décentralisée avec plus de pouvoirs au niveau local, des procédures de gestion qui prennent en considération les intérêts locaux et l'obligation d'être financièrement autonome sont tous des facteurs qui devraient permettre au réseau portuaire canadien de jouer un rôle de premier plan dans la croissance économique du pays à l'aube du XXIe siècle.
Quant à l'avenir du Port de Trois-Rivières, nous sommes en attente d'une réponse favorable à notre demande pour devenir une administration portuaire canadienne. Nous répondons à tous les critères établis par le ministre dans son projet de loi et nos performances ainsi que nos résultats financiers ne font qu'appuyer concrètement notre demande.
Il est primordial pour le Port de Trois-Rivières d'obtenir le statut d'administration portuaire canadienne dès que la nouvelle loi entrera en vigueur de façon à éviter une période d'incertitude et de spéculation dont les répercussions pourraient être désastreuses pour la viabilité financière du port. Comme chacun le sait, l'incertitude et les affaires ne font pas bon ménage.
Nous voulons également ajouter que, dans l'hypothèse où le législateur refuserait de changer quoi que ce soit dans le projet de loi C-44 alors que l'ensemble des experts portuaires le suggèrent, nous souhaitons ardemment que votre comité impose les recommandations originales du rapport du Comité permanent des transports et que celles-ci soient introduites intégralement dans l'actuel projet de loi C-44 pour la survie des ports canadiens et la croissance économique du Canada.
Nous espérons que notre mémoire vous aidera à comprendre nos inquiétudes sur la réforme portuaire et aussi à découvrir l'apport économique du Port de Trois-Rivières.
Merci
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup. Je note trois choses. Premièrement, vous avez pris presque tout le temps qui vous était imparti.
Deuxièmement, je veux vous féliciter pour la gestion de votre port. C'est un port très actif et un atout très important pour la région. Je remarque que vous avez demandé presque immédiatement de statut d'APC.
Troisièmement, je vais permettre à M. Crête de vous interroger, parce qu'il vient de votre région.
[Français]
M. Crête: Le mémoire est très clair et rattaché à la réalité qui est vécue dans le port.
J'aimerais, pour le bénéfice des membres du comité, que vous nous disiez pourquoi vous préférez devenir une administration portuaire canadienne plutôt que de garder le statut de port régional.
Vous apportez des éléments qui démontrent bien que vous répondez aux critères d'agence portuaire, mais j'aimerais quand même savoir si vous avez envisagé l'autre possibilité et ce qui fait que vous avez privilégié ce statut plutôt que l'autre.
Capt Tremblay: D'abord, les ports canadiens qui vont obtenir ce statut sont des ports de classe. Il faut admettre qu'une administration portuaire canadienne, c'est un first-class type port.
Les ports locaux ou régionaux, sans leur enlever de leur valeur, n'ont pas la même valeur au niveau international. Aujourd'hui, la compétition se situe au niveau international. Les gens de l'autre côté de l'océan sont plus attirés par les ports à caractère international que par les ports à caractère local ou régional.
Le port local ou régional répond à la demande d'une région, tandis que nos produits sont au niveau international. Soixante-douze pour cent de nos produits sont de niveau international.
Un autre critère nous a également influencés. Si on fait un bilan financier des ports canadiens, on verra que le Port de Trois-Rivières se classe parmi les trois ou quatre premiers, après Vancouver, Montréal et certains autres ports. Financièrement, je pense qu'on est un des meilleurs au Canada.
M. Crête: Dois-je comprendre que puisque que vous êtes situés entre les Ports de Québec et Montréal, qui ont tous les deux le statut d'administration portuaire canadienne, vous vous trouveriez dans la situation que vous craignez, soit celle d'un port régional?
Capt Tremblay: On est capables de poursuivre l'élan qu'on a entrepris au niveau financier et au niveau de la diversification des produits. Notre port est reconnu comme étant extrêmement efficace au niveau international. Les utilisateurs qui viennent à Trois-Rivières sont enchantés. Nous croyons que, pour avoir une continuité dans l'avenir, nous devons absolument obtenir le statut d'APC.
M. Crête: Vous avez déjà fait votre demande. Si le projet de loi C-44 n'était pas modifié, préféreriez-vous toujours ce statut au statu quo?
Capt Tremblay: Si on ne modifie pas le projet de loi C-44, je pense qu'on performe très bien actuellement.
M. Crête: Donc, vous êtes capables de vivre avec le statu quo, mais si le projet de loi est modifié de façon intéressante, vous allez, parce que vous êtes proactifs, tenter d'obtenir le statut d'APC.
Capt Tremblay: À condition que le gouvernement considère les ports comme des entreprises qui sont là pour faire de l'argent. L'utilisateur du port est là pour faire de l'argent, mais le port doit lui aussi être une entreprise gérée par des gens d'affaires pour faire de l'argent, parce que ce n'est pas au public de payer pour les ports. À ce moment-là, je n'ai pas de problème avec cela.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Crête.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président.
J'ai une brève remarque, qui fait écho aux félicitations du président concernant votre santé financière. Je souligne votre bravoure. Il faut du courage pour brosser un tableau financier aussi positif à une bande de représentants gouvernementaux avides de revenus.
Des voix: Oh, oh!
M. Gouk: Vos remarques vont dans le droit fil de celles d'autres témoins. Nous allons certainement tenir compte de tous les éléments que vous avez évoqués et nous attendrons avec impatience des résultats positifs pour tout le monde.
Capt Tremblay: Je le répète, nous devons être gérés par des gens d'affaires. Oubliez l'agence fédérale. Nous devons être une agence fédérale jusqu'à un certain point, au sujet des terrains par exemple, mais nous devons nous rappeler que nous sommes une entreprise et que les entreprises sont là pour faire de l'argent.
Le président: Merci beaucoup.
M. Keyes: Je voudrais invoquer le Règlement, monsieur le président. Je rappelle aux témoins dans la salle qu'une partie importante des travaux du comité consiste à discuter avec les témoins qui comparaissent devant nous. Je veux qu'ils comprennent qu'ils n'ont pas besoin de lire tout leur mémoire. Ils peuvent demander à l'inclure dans le compte rendu, afin de nous donner la possibilité de les interroger.
Alors, si d'autres témoins craignent de ne pas avoir le temps de présenter tout leur exposé, ils peuvent le faire inclure dans le compte rendu et nous pourrons dialoguer avec eux.
[Français]
M. Claude Munger (président, Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay - Lac-Saint-Jean): Je m'appelle Claude Munger et je suis président du Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay - Lac-Saint-Jean. Je suis accompagné de Mme Ghyslaine Collard, directrice générale de Port Saguenay.
Nous tenons d'abord à vous remercier de nous offrir cette occasion de présenter la position de la région du Saguenay - Lac-Saint-Jean quant au projet de loi C-44 et à son incidence sur notre structuration industrielle et notre développement.
D'entrée de jeu, je dois vous dire que c'est d'abord un résumé que je vous présenterai le plus brièvement possible, quitte à répondre à vos questions par la suite. Nous désirons, bien sûr, faire inclure Port Saguenay comme administration portuaire canadienne. C'est l'objectif de notre présentation. En même temps, nous allons demander quelques modifications au projet de loi C-44.
Les administrations portuaires canadiennes devraient, selon nous, conserver leur statut d'agence canadienne. Les activités des administrations portuaires canadiennes, telles que définies dans le projet de loi, sont peut-être trop restrictives. Nous croyons qu'elles devraient inclure, outre les activités maritimes, toutes les activités qui sont liées directement ou indirectement aux activités maritimes. Nous voudrions aussi que les administrations portuaires puissent donner en garantie des biens pour obtenir du financement privé.
De même, les conseils d'administration des APC devraient compter un nombre d'administrateurs qui pourrait varier de 5 à 11; les lettres patentes de chacune des administrations pourraient s'adapter selon le contexte. Des commentaires ont déjà été faits par d'autres là-dessus. Nous croyons que l'administration ne devrait jamais être composée d'un groupe homogène majoritaire. Il devrait y avoir une hétérogénéité au sein du conseil d'administration qui fasse en sorte que personne n'ait le contrôle du conseil d'administration.
Permettez-moi de vous présenter brièvement le Conseil régional de concertation. Le Conseil régional de concertation et de développement est un organisme régional qui, par la concertation et des actions concrètes, doit exercer un certain leadership et prendre la défense et faire la promotion des intérêts du Saguenay - Lac-Saint-Jean.
Nous regroupons plus de 150 corporations, des municipalités, des municipalités régionales de comté, des entreprises privées et publiques, des corporations de développement, des centrales syndicales, des institutions d'enseignement, des institutions financières privées et publiques, des organisations coopératives, des conseils régionaux sectoriels, etc.
Cette organisation est dirigée par un conseil d'administration de 40 personnes fort représentatives de tous ces milieux.
Port Saguenay est actuellement un port divisionnaire sous la juridiction de la Société canadienne des ports. Port Saguenay a déposé auprès du directeur exécutif de Havres et Ports une demande pour la reconnaissance de Port Saguenay comme administration portuaire canadienne. Nous sommes convaincus que Port Saguenay répond correctement et amplement aux quatre critères auxquels un port doit nécessairement se conformer pour être reconnu.
La mission de Port Saguenay consiste à mettre en place, avec ses partenaires régionaux, des services et des conditions qui favorisent l'expansion du commerce canadien international.
Port Saguenay est un port moderne et polyvalent. Il est une administration portuaire efficace et financièrement autonome. Il a déjà su démontrer sa rentabilité. Actuellement, des surplus accumulés de l'ordre 6,3 millions de dollars, au 30 septembre 1996, lui permettent déjà d'envisager avec beaucoup d'optimisme ses principales activités de développement, qui sont de l'ordre de 8,5 millions de dollars.
D'ailleurs, les prévisions pour l'an 2001 présentent un bilan qui sera encore amélioré. Nous croyons que d'ici 2001, nous connaîtrons une augmentation des marchandises transitées de l'ordre de 100 p. 100.
Port Saguenay est un port d'une importance stratégique pour le commerce canadien international. Dans le cadre de la mondialisation des échanges, Port Saguenay est un élément de développement économique important dans son hinterland. Il offre une position concurrentielle à des entreprises qui peuvent accéder à des marchés d'outre-mer même si nous sommes profondément à l'intérieur des terres. Les entreprises régionales ont amélioré leur compétitivité, leur capacité concurrentielle sur les marchés mondiaux grâce à Port Saguenay.
La région du Saguenay - Lac-Saint-Jean a une situation géographique stratégique dans l'ensemble du Nord québécois. Nous sommes dans une sphère qui va aussi loin que la Baie James. Donc, on dépasse largement la région immédiate.
L'économie canadienne, qui est fondée largement sur l'exploitation des ressources naturelles et des produits qui en dérivent, doit nécessairement aller vers le marché extérieur, et nos régions ont l'obligation d'aller sur les marchés extérieurs et d'exporter leur produits.
En plus d'être un créateur d'emplois directs et indirects important, Port Saguenay nous aide à consolider des entreprises qui sont dans le milieu et à en développer de nouvelles. La présence de cette infrastructure portuaire publique a stimulé jusqu'à maintenant l'éclosion d'entreprises et nous en avons déjà d'autres qui sont en chantier et qui sont là parce que Port Saguenay existe.
Port Saguenay a aussi d'excellentes liaisons avec l'ensemble des autres moyens de transport régionaux, routiers ou autres. C'est un maillon important du réseau commercial puisque sa situation dans l'hinterland lui donne une qualité indéniable. Ses installations sont reliées à la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et à toute la Radissonnie, donc jusqu'à la Baie James, notamment par la route du Nord, qui a été construite justement parce qu'elle pouvait donner accès à la Baie James, à la mondialisation, au monde extérieur, par Port Saguenay.
Donc, compte tenu de sa situation géographique aux portes du Moyen Nord et du Nord, au coeur des ressources naturelles, Port Saguenay est nettement complémentaire aux autres installations portuaires canadiennes.
Nous croyons que Port Saguenay est un maillon essentiel à l'ensemble des ports canadiens. Port Saguenay a une mission essentiellement axée sur l'activité maritime avec un trafic de plus en plus diversifié, orienté sur l'exportation des produits de ressources naturelles et de ses dérivés.
L'émergence de nouveaux projets industriels au cours des prochaines années élargira encore l'éventail de l'assiette des produits transités par Port Saguenay.
L'évolution de la mondialisation exige que notre région ait cette installation portuaire. La création d'une administration portuaire canadienne aura de nombreux impacts positifs. Sur le plan financier, la création d'une administration portuaire canadienne nous permet de conserver un certain statu quo quant à la taxation municipale. Si on n'avait pas le statut d'administration portuaire canadienne, il y aurait une augmentation très forte des coûts de revient. Donc, on perdrait de la compétitivité.
Sur le plan opérationnel, le statut d'administration portuaire canadienne permettra à Port Saguenay de gérer efficacement la zone maritime de Port Saguenay. Il y a une zone environnementale un peu semblable à celle des Ports de Québec et de Montréal. Donc, il sera essentiel d'utiliser la même réglementation.
L'appui du milieu quant à la constitution d'une APC est sans équivoque. Les usagers, les débardeurs et leurs syndicats, l'opérateur principal, tout le milieu socioéconomique de la région du Saguenay - Lac-Saint-Jean de même que celle de la Radissonnie sont derrière ce projet. En acceptant de créer l'administration portuaire du Saguenay, on permettra de ramener la gestion de cet important outil de développement dans le milieu, parce que la composition du conseil d'administration le permettra.
L'appui unanime des villes, des MRC et du monde industriel et commercial de la région témoigne de l'intérêt des intervenants de la région.
En terminant, comme nous nous conformons aux critères pour obtenir le statut d'administration portuaire canadienne, nous demandons d'être inclus dans l'annexe du projet de loi C-44 et que Port Saguenay soit reconnu comme administration portuaire canadienne.
[Traduction]
Le président: D'abord, je vous félicite. Vous êtes le premier témoin à avoir présenté votre exposé en moins de dix minutes, alors je vous remercie beaucoup.
Votre conclusion m'intéresse. Je comprends que le port fonctionne extrêmement bien. Vous êtes un groupe très dynamique.
[Français]
M. Munger: J'avais compris ce passage. Hélas, je ne suis pas bilingue, mais je comprends un peu. J'ai un anglais de touriste.
[Traduction]
Le président: J'espère avoir une connaissance du français qui dépasse celle d'un touriste. Je suis venu étudier quelques semaines au Saguenay il y a deux ans. C'est une belle région.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président.
J'ajouterai simplement que j'ai une ébauche des modifications que vous avez demandées - des modifications qui règlent chacun de vos problèmes, comme vous le voulez. Je crois qu'il y a une espèce de consensus à ce sujet. Je pense que lorsque ces modifications seront apportées, bien des ports demanderont et obtiendront le statut d'autorité portuaire - et vous serez du nombre.
[Français]
M. Munger: Merci, monsieur le député.
M. Crête: Merci pour votre présentation. Je voudrais vous poser la question que j'ai posée au participant précédent. Pourquoi voulez-vous devenir une administration portuaire canadienne plutôt que de garder le statut de port régional? Quelles sont les raisons qui vous amènent à faire ce choix? Je ne vous pose pas cette question dans le but de questionner votre choix, mais dans celui de bien faire voir au comité ce qui amène un port de taille significative, bien qu'il ne soit pas un port aussi grand que Vancouver ou Montréal, à faire un tel choix. Qu'est-ce qui fait qu'une administration régionale prenne une décision semblable?
Quelles modifications apporteriez-vous au projet de loi pour le type de port que vous représentez?
M. Munger: Je vais amorcer la réponse et je laisserai Mme Collard compléter, parce que votre question a des aspects techniques importants.
Comme certains de mes prédécesseurs à cette table, je crois qu'il y a des éléments qui font que la reconnaissance du port comme une administration portuaire canadienne nous donnerait un statut important quand viendrait le temps d'échanger, de transiger à l'échelle du commerce mondial ou même avec d'autres ports à l'intérieur du Canada. C'est très important.
C'est aussi essentiel au point de vue de la fiscalité. La reconnaissance comme administration portuaire canadienne a des impacts fiscaux importants. Si l'on veut que le port continue d'être compétitif, il est absolument essentiel que nous ayons cette reconnaissance.
Quant aux autres aspects de votre question, monsieur Crête, je vais demander à Mme Collard d'y répondre.
M. Crête: J'aimerais poser une sous-question avant qu'on ne réponde aux autres.
Si vous aviez à choisir, croyez-vous qu'il y aurait un avenir dans une station portuaire canadienne qui regrouperait, par exemple, Québec et Cacouna? Selon vous, serait-il intéressant de faire cela ou si vous croyez que l'autonomie est plus importante en ce qui a trait à l'avenir de votre port?
M. Munger: Personnellement, je crois qu'une certaine autonomie est essentielle au port, parce que nous avons une situation géographique particulière et que avons aussi à répondre à des demandes particulières. Nous n'avons pas nécessairement les mêmes clientèles qu'un port comme Québec ou Montréal et nous n'avons pas les mêmes objectifs.
Un certain réseautage, sur certains aspects, serait-il possible? Ce sont les gens qui y travaillent quotidiennement qui pourront mieux répondre à cette question. Je laisse madame Collard développer davantage là-dessus.
Mme Ghyslaine Collard (directrice générale, Port Saguenay): En ce qui a trait au choix entre le statut de port régional et celui d'administration portuaire canadienne, nous croyons que des modifications au projet de loi C-44 nous donneraient, dans le quotidien, des outils qui nous permettraient de gérer le port.
Le port, c'est le plan d'eau. Ce n'est pas tout simplement les installations portuaires. On est dans le même environnement commercial que les Ports de Québec et de Montréal. On dessert la grande industrie canadienne et on fait affaire avec des lignes maritimes internationales. Donc, on est dans le même contexte. Quatre-vingt-dix pour cent des cargos qui viennent chez nous font de l'exportation ou de l'importation. On fait donc affaire avec des marchés étrangers.
Dans ce contexte-là, on a besoin d'avoir la même réglementation sur les plans d'eau et d'être capables d'utiliser les mêmes outils.
En ce qui a trait à un port régional, serait-il public ou privé? Il y a tellement d'inconnus dans un port, comme le statut concernant la taxation et le zonage. On ne sait pas tout à fait encore ce qu'est la définition d'un port régional. Pour vous, un port régional ressemble peut-être plus à un port comme Tadoussac, où les activités sont vraiment locales. Ils ne sont pas engagés sur les marchés étrangers. Ils font des excursions aux baleines, des choses d'une nature très locale. Donc, à ce niveau-là, peut-être qu'on peut parler d'un port régional.
Cependant, Port Saguenay - je pense qu'il faut regarder chaque port cas par cas - est vraiment engagé dans un commerce international. Donc, nous devons avoir les mêmes outils et travailler dans le même contexte que les grands ports.
Vous parliez plus tôt des critères qu'on pourrait modifier dans le projet de loi C-44. Dans le Rapport Keyes, on parlait de ports commerciaux et de ports non commerciaux, et non pas de ports qui sont reliés par le chemin de fer. On parlait de deux catégories de ports: les ports commerciaux et les ports non commerciaux.
Port Saguenay a déjà transféré une grande partie de ses activités aux municipalités. Pour tout ce qui a trait aux activités à caractère touristique ou urbain, le vieux port a été transféré à la municipalité de Chicoutimi. Les vieux quais ont été refaits et transférés à la municipalité de Ville de la Baie. Donc, ce sont les municipalités qui s'occupent des activités touristiques. Quant à nous, nous nous occupons du transport à 100 p. 100. Je pense qu'on pourrait parler de ports commerciaux et élargir un peu la façon dont on va appliquer ces critères-là. On pourrait conserver un réseau portuaire canadien qui regrouperait une quinzaine ou une vingtaine de ports.
Dans le fond, ce qui est important, ce n'est pas que chaque port soit d'envergure nationale, mais qu'on ait un réseau national qui desserve bien l'ensemble du pays et l'ensemble de notre industrie.
Quant à l'autonomie pour un réseau, je pense que chaque administration va souhaiter gérer localement. Bien sûr, il y a des économies quand on parle des services juridiques et des services techniques. Certains services pourraient être mis en commun. Cependant, je ne pense pas que la gestion pourrait être mise en commun.
M. Crête: Ce n'est pas ce que vous privilégiez comme voie d'avenir.
[Traduction]
Le président: Oui, on a fait du beau travail le long des vieux quais de Chicoutimi. C'est très réussi.
Le projet de loi a essentiellement pour but d'appuyer l'énergie, l'enthousiasme et le dur travail dans une région, afin d'optimiser les capacités. Je vous souhaite donc la meilleure des chances. Merci beaucoup. Nous vous remercions d'être venus ici aujourd'hui.
[Français]
Mme Collard: Merci.
M. Munger: Nous vous remercions, nous aussi, de votre accueil.
[Traduction]
Le président: Nous entendrons maintenant Jean-Marc Dion et Jean Maurice Gaudreau, du Port de Sept-Îles.
Messieurs, lorsque je corrigeais les travaux des étudiants à l'université, le poids était un facteur important. Alors, vous gagnez.
Je remarque que vous avez de nombreuses cartes sur lesquelles Sept-Îles est le centre de l'univers, mais j'ai de nombreuses cartes de Winnipeg, sur lesquelles Winnipeg est le centre de l'univers, alors il y a un peu de confusion.
M. Jean-Marc Dion (maire de Sept-Îles): Nous pourrions peut-être jumeler nos villes.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Vous avez vu comment nous procédons. Veuillez commencer.
M. Dion: Merci beaucoup, monsieur le président.
Messieurs les membres du comité, je suis très heureux d'accompagner M. Jean Maurice Gaudreau, directeur général de notre port, qui présente un mémoire au comité.
[Français]
Je m'appelle Jean-Marc Dion. Je suis maire de la ville de Sept-Îles depuis 23 ans. J'ai le plaisir de représenter les usagers et la communauté de Sept-Îles en général. En leur nom, j'ai l'honneur d'accompagner M. Jean Maurice Gaudreau, directeur général du Port de Sept-Îles dont nous appuyons les démarches.
La Ville de Sept-Îles, par le biais de la Chambre de commerce de la corporation industrielle et commerciale, a suivi l'évolution de la politique portuaire du gouvernement canadien et la préparation du projet de loi C-44. En maintes occasions, nous avons rencontré les fonctionnaires et les représentants de la Chambre des communes pour leur faire part de nos commentaires.
Nous croyons que le Port de Sept-Îles est un port vital pour le système portuaire canadien. Comme vous le savez, nous sommes la porte du Grand Nord québécois et du Labrador. C'est par ce port que transitent entre 20 et 23 millions de tonnes de marchandises par année destinées aux États-Unis, à l'Europe et à l'Asie.
En 1970, la Ville, appuyée par les gens d'affaires, a demandé d'être reconnue comme port national. En 1973, nous sommes devenus un des ports de la Société canadienne des ports et, en 1995, nous avons formulé une demande, encore une fois avec l'appui du milieu, pour devenir une société de port locale. Malheureusement, la nouvelle politique étant en préparation, le ministre nous a demandé d'attendre afin que notre cas soit pris en considération suivant les normes contenues dans cette nouvelle loi.
Nous croyons fermement que le Port de Sept-Îles doit être accepté comme un des grands ports du pays et doit devenir une autorité portuaire canadienne. D'ailleurs, la demande officielle a été acheminée aux autorités concernées. J'aimerais céder la parole au directeur général du port. Celui-ci vous fera ses quelques remarques spécifiques concernant certains changements qu'il aimerait apporter.
M. Jean Maurice Gaudreau (directeur général, Port de Sept-Îles): Monsieur le président,
[Traduction]
messieurs les membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de vous rencontrer aujourd'hui et d'exprimer les points de vue du Port de Sept-Îles.
Je serai bref. Je ne lirai pas tout mon mémoire, parce que j'ai fait de nombreuses suggestions de changements au projet de loi C-44. Elles sont assez nombreuses, mais si nous nous contentons de cinq aspects fondamentaux que je vais vous expliquer, le premier réglerait tous les problèmes.
[Français]
Le statut d'agence fédérale, pour nous, est essentiel afin de mieux servir l'intérêt national du Canada. Tel que recommandé dans le rapport du Comité permanent des transports, plus communément appelé Rapport Keyes:
- les ports devraient être désignés comme organismes fédéraux, au même titre que les
commissions portuaires;
- et avoir les pouvoirs nécessaires pour atteindre l'autonomie souhaitée et clairement exprimée
dans l'énoncé de cette politique et dans la politique du gouvernement canadien.
Nos concurrents américains reçoivent des subsides indirects et peuvent même parfois percevoir des taxes. Nous devrions être au moins libérés de cette taxation à tous les niveaux. Toutefois, on devrait reconsidérer la question des services municipaux fournis aux ports et peut-être fournir les sommes nécessaires pour les défrayer.
Les conseils d'administration doivent satisfaire aux normes de représentation, mais ces normes doivent aussi être réalistes et adaptées aux ports en question. Pour nous, un nombre de cinq à neuf membres comprenant un représentant du palier fédéral, un représentant provincial, un représentant municipal et un représentant des usagers ou, comme on le disait tout à l'heure, la force ouvrière du port, qui est très importante, seraient suffisants pour maintenir l'autonomie locale.
D'après nous, les montants payables au ministre pour maintenir nos lettres patentes ou notre statut - par exemple, si nous étions une commission - doivent provenir d'un pourcentage ou d'une formule appliqué aux revenus nets, ou bien on doit donner au ministre certains pouvoirs de les plafonner, de les changer ou de les suspendre, selon les conditions financières qui prévalent à un moment donné, pour un port qui serait en difficulté étant donné l'économie mondiale ou centrale.
[Traduction]
Je ne les passerai pas en revue, mais vous trouverez une liste de mes suggestions aux bureaucrates sur les moyens de répondre aux exigences du projet de loi C-44, si nous décidons de nous engager dans cette voie. J'oeuvre au sein de bureaucraties depuis dix ans, alors je me suis rendu utile. Mais je trouve essentiel que nous soyons généralement reconnus comme un organisme très autonome, semblable aux commissions ou à des organismes de ce genre. Je serais alors très heureux d'oeuvrer au sein d'un tel organisme.
Si je me souviens bien - j'étais très jeune à l'époque - nous avons décidé de créer une série de ports en 1936. Des ports ont été créés à ce moment-là - et il s'agit simplement d'une association d'idées - je suis né en 1936. J'espère ne pas être forcé de prendre ma retraite en 1996 parce que nous aurons tout démoli.
Avez-vous des questions?
Le président: Je pense qu'elles seront nombreuses.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président.
Messieurs, je n'ai pas vraiment de questions. Vous avez parlé de cinq modifications. Comme nous l'avons déjà indiqué, ces modifications ont été proposées par de nombreux autres témoins aujourd'hui. Je pense que nous nous entendons sur ces points, alors j'espère que le résultat final vous plaira.
Je vous remercie beaucoup, monsieur.
Le président: Les renvois au rapport précédent du Comité permanent des transports et au rapport Keyes ainsi que la nécessité d'apporter certaines modifications en conséquence sont aussi des aspects intéressants. Il y a de plus en plus de gens d'accord avec les positions que vous avez adoptées.
La question qui est moins claire, cependant, est celle de la tarification fondée sur le revenu brut ou le bénéfice net. Je sais que M. Jordan en a parlé par le passé. Vous voudrez peut-être donner votre opinion, simplement parce que si nous nous fondons sur le bénéfice net, nous remettons le nez dans vos affaires. Si une formule peut être conçue en fonction du revenu brut, la relation est beaucoup plus claire. Nous voudrions peut-être redresser la formule pour qu'elle ne crée pas un fardeau impossible, mais...
M. Gaudreau: C'est pour cette raison que, dans ma dernière recommandation, à la dernière phrase, je dis que si nous ne pouvons pas le faire... C'est à la page 2, au point v). Je dis que si nous ne nous fondons pas sur les revenus nets, le ministre devrait avoir les pouvoirs nécessaires pour suspendre ou changer ces redevances à sa discrétion pendant un certain temps. Il pourrait arriver de temps en temps qu'un port soit en difficulté. Alors, fondons-nous sur le revenu brut, trouvons une formule acceptable, mais donnons aussi au ministre la possibilité de sauver un port qui se retrouve dans le pétrin pendant un an ou deux en évitant de le démanteler ou de l'acculer à la faillite.
Est-ce que je réponds à votre question?
Le président: Oui. C'est très utile.
[Français]
Monsieur Crête.
M. Crête: Je vous remercie de votre présentation. Je pense que votre mémoire fait surtout la démonstration de la pertinence de reconnaître le Port de Sept-Îles comme une administration portuaire canadienne. Nous allons voir ce qui peut fonctionner correctement dans ce que vous proposez.
Vous avez proposé un certain nombre d'amendements au projet de loi C-44 et j'aimerais que vous souligniez celui ou ceux qui sont les plus importants pour vous, ceux que, même s'ils ne sont pas essentiels, vous souhaiteriez grandement voir apporter parce qu'ils rendraient plus intéressante l'obtention du statut d'administration portuaire canadienne.
M. Gaudreau: Si on devait vivre avec le projet de loi C-44, il serait important d'apporter des changements à l'article 3 et de compléter...
[Traduction]
La mise en oeuvre de la politique maritime nationale doit changer. Il faudrait faire très attention à l'article 24, qui limite nos pouvoirs, et ajouter quelques paragraphes qui nous permettraient d'exercer d'autres activités que celles qui nous incombent à titre de propriétaire, notamment administrer un port en assurant une saine administration financière des biens.
Je crois que nous devrions aussi examiner sérieusement l'imposition, aux articles 50 et 52, et examiner très sérieusement l'article 119. Les employés qui ont donné de nombreuses années de leur vie à la Société canadienne des ports et à certaines commissions portuaires ne sont pas protégés comme il faut. Je crois que l'article 119 devrait être modifié afin de les protéger, en ajoutant les administrations portuaires créées en vertu du projet de loi C-44 dans la Partie I de la Loi sur la pension de la fonction publique.
Pour moi, ces changements sont essentiels.
Le président: Monsieur Keyes, une dernière intervention.
M. Keyes: Monsieur le président, je voulais simplement féliciter moi aussi Jean Maurice. Il a comparu devant notre comité à diverses occasions et il a toujours réussi à disséquer certaines questions épineuses et à trouver leur dénominateur commun.
Je remercie tout particulièrement Jean Maurice pour sa cinquième suggestion. Je pense qu'elle est utile pour saisir pourquoi nous nous dirigeons vers une formule fondée sur le revenu brut. Il est utile de comprendre que les redevances devraient être calculées en fonction d'une espèce de formule, par exemple, deux-quatre-six, et qui pourrait ensuite être ramenée à quatre-deux, pour aider les ports à rester concurrentiels, et qu'il est aussi possible de faire reposer la formule sur la capacité de payer du port. On peut tenir compte de ce facteur lorsque la survie d'un port en dépend.
Merci encore une fois, messieurs.
Le président: Je vous remercie, monsieur Keyes, et vous aussi, messieurs.
Nous entendrons maintenant l'Association des armateurs du Saint-Laurent, représentée par M. Benoît Massicotte et par le capitaine Desgagnés.
Avez-vous apporté un mémoire?
M. Benoît Massicotte (directeur général, Association des armateurs du Saint-Laurent): Oui, ce mémoire vous a été remis quand nous sommes arrivés, il y a environ une heure et demie et j'en ai télécopié un exemplaire à Ottawa hier. Vous devriez donc l'avoir reçu.
Le président: Nous aurions dû le faire distribuer. Mais il nous sera remis.
Vous pouvez commencer.
[Français]
Le capitaine Rosaire Desgagnés (président du conseil, Association des armateurs du Saint-Laurent): Monsieur le président, messieurs les députés, merci d'être venus nous consulter à Québec. Je m'appelle Rosaire Desgagnés et je suis président de l'Association des armateurs du Saint-Laurent. Je suis accompagné de M. Benoît Massicotte, directeur général de l'Association. Notre association a été fondée en 1936 et regroupe 22 membres actifs sur le Saint-Laurent.
Le sujet dont nous voulons parler aujourd'hui est un sujet qui touche nos membres: le pilotage, surtout en ce qui concerne le mode de certification des capitaines des navires canadiens pour obtenir un certificat de pilotage.
Je laisse la parole à M. Massicotte qui va vous décrire la situation actuelle et vous présenter les propositions de l'Association.
M. Massicotte: Merci et bienvenue à Québec. Je regrette que vous n'ayez pu prendre connaissance de notre mémoire avant ce matin. Vous en avez une copie. N'oubliez pas que la première partie est en français et la seconde, en anglais. Donc, vous avez une copie de notre mémoire en anglais.
Vous n'êtes pas sans savoir que c'est la partie VII de l'actuel projet de loi C-44 qui traite du pilotage. Cette partie, du point de vue de nos membres, traite à peu près exclusivement des problèmes financiers actuels de l'État fédéral et tente, de diverses manières, de régler une partie des problèmes financiers de l'État fédéral. Évidemment, en tant qu'armateurs et gens d'affaires, on peut difficilement s'élever contre cela. D'ailleurs, nous appuyons et avons déjà appuyé plusieurs des recommandations qui se retrouvent dans le projet de loi C-44.
Évidemment, nous aurions aimé que le gouvernement fédéral traite également de certains des problèmes financiers de l'industrie maritime et tente de résoudre certains d'entre eux.
Dans le projet de loi C-44, un des articles dit bien que le ministre devra faire part de ses recommandations en ce qui a trait au processus de certification de nos officiers, mais seulement en décembre 1998, soit dans à peu près deux ans et trois mois. Ensuite, il y aurait évidemment un processus de consultation, des audiences publiques, un long processus qui nous amènerait jusqu'à l'an 2000, et sans doute bien après l'an 2000 avant que des décisions soient prises à cet égard. Pendant ce temps, les pertes de trafic s'accumuleraient sur le Saint-Laurent, ou certaines pertes de trafic continueraient de nous menacer.
Le processus de certification du pilotage, à notre point de vue, est l'enjeu central dans les questions qui touchent le pilotage. Il y a deux types de personnes qui peuvent piloter un navire sur le fleuve Saint-Laurent: des pilotes brevetés, donc des pilotes professionnels qui ont une expérience et qui peuvent faire naviguer les navires de tous les types, de toutes les catégories et de toute provenance, selon leur brevet; il existe également des capitaines certifiés, des capitaines qui ont étudié pendant 10 ans, qui doivent avoir 10 années d'expérience au minimum pour obtenir leur brevet de capitaine, qui dirigent leur propre navire avec leurs propres officiers, avec leur propre équipement et équipage, avec lequel ils peuvent échanger facilement dans une langue que tous connaissent. Donc, le brevet de pilotage est une chose et le certificat de pilotage en est une autre.
Actuellement, pour qu'un capitaine puisse obtenir son certificat de pilotage, après avoir fait ses classes, étudié et navigué pendant des années et des années, il doit, pendant six, sept ou huit mois, tout en naviguant et lorsqu'il n'est pas de quart, étudier ses cartes, les connaissances locales et réviser à peu près tout ce qu'il a vu depuis qu'il navigue. C'est ce que prouve l'expérience des dernières années, selon ce que disent certains capitaines qui ont réussi à obtenir leur certificat de pilotage.
L'expérience nous prouve encore que ces mêmes capitaines, trois ou quatre mois avant l'examen qu'ils auront à subir, doivent s'arrêter de naviguer et étudier à temps plein, seuls en général dans leur bureau ou dans leur sous-sol, entourés uniquement de leurs cartes. C'est évidemment coûteux pour leur entreprise. Ils ne sont pas disponibles pour naviguer. Ils manquent de stimulation; ils sont seuls pour étudier.
De plus, ils ne savent pas jusqu'où aller. On peut leur poser des questions sur n'importe quel sujet, à l'infini. Il y a donc une insécurité énorme qui existe. On ne sait pas jusqu'où on doit aller quand on est tout seul pour étudier. Après cela, le capitaine tentera de passer une fois, deux fois ou trois fois l'examen qui lui permettra d'obtenir son certificat de pilotage.
L'Association des armateurs du Saint-Laurent n'a jamais, mais jamais prôné l'octroi automatique de certificats de pilotage. Par contre, on pense que le Canada devrait reconnaître et favoriser certaines méthodes modernes d'enseignement qu'il reconnaît et favorise dans d'autres domaines. Ces méthodes d'enseignement existent. Il existe un peu partout dans le monde des simulateurs de navigation, que ce soit en Angleterre, en France, au Danemark, au Japon, en Pologne ou même au Canada.
L'industrie maritime québécoise est prête à investir du temps et de l'argent dans la formation de ses officiers, à la condition, toutefois, que ces nouvelles méthodes pédagogiques soient sanctionnées d'une quelconque façon par l'État.
Donc, la proposition de l'Association des armateurs du Saint-Laurent est que les officiers canadiens d'expérience aient accès à une formation supplémentaire pour parfaire leurs connaissances ou à tout le moins les vérifier. Nous pensons que certains de nos capitaines seraient immédiatement prêts à piloter, mais nous acceptons que cela soit vérifié par l'État.
Cette formation supplémentaire pourrait être dispensée par une école de marine reconnue au pays, dont l'Institut maritime du Québec est la principale ici, sur le Saint-Laurent. Cette formation devrait faire appel aux méthodes modernes d'enseignement. En ce qui a trait à la navigation sur le Saint-Laurent, on parle souvent de simulateurs de navigation.
L'école de marine, comme dans tout cours, serait chargée de faire savoir à Transports Canada que tel étudiant, capitaine ou officier, après tant de semaines ou tant de mois passés dans ses murs, est passé à travers tel ou tel processus et est considéré apte ou non à piloter son propre navire sur le Saint-Laurent entre, par exemple, Québec et Les Escoumins.
Après cela, la remise d'un certificat de pilotage à ce capitaine ou officier relèverait de l'autorité de Transports Canada, comme les autres brevets de navigation. Ce certificat ne serait valide que sur les navires de la compagnie qui emploie ce capitaine ou cet officier.
Selon nous, pour répondre à une des questions que le ministre vous a posées, je crois qu'il ne serait pas nécessaire de modifier la Loi sur le pilotage. À notre point de vue, l'article 20 de la Loi sur le pilotage donne aux administrations, à l'heure actuelle, beaucoup de latitude pour mettre en vigueur certaines de nos recommandations. Peut-être pourrait-on améliorer la distinction entre brevet et certificat de pilotage. Mais c'est là une question juridique dont on devrait discuter entre nous.
Cela ne signifie pas, et j'insiste là-dessus, que le Parlement canadien n'a aucun rôle à jouer à cet égard. En effet, les pouvoirs actuels de l'Administration de pilotage des Laurentides - des Laurentides parce qu'on est sur le Saint-Laurent, en vertu de la Loi sur le pilotage - existent depuis 25 ans. Depuis plusieurs années, 10 ou 15 ans, les armateurs sous pavillon canadien demandent des changements qui ne se produisent pas.
Donc, à notre point de vue, vous, les députés, avez un certain pouvoir de recommandation auprès du ministre. Faites en sorte que les choses bougent. Cela fait 25 ans qu'on a à peu près la loi actuelle, à peu près le règlement actuel, et rien ne bouge. Pour que les choses bougent, il faut faire pression et il faut une volonté politique.
Je sais par ailleurs qu'on vous a posé une certaine question en ce qui a trait à la résolution des différends. L'expérience nous prouve encore que les négociations ont souvent été ardues entre les administrations de pilotage et les corporations de pilotes. L'Association des armateurs du Saint-Laurent estime qu'un mécanisme de résolution des différends serait valable, permettrait et, dans certains cas, forcerait le rapprochement des parties, et éviterait que des positions extrêmes soient prises par les deux parties. Un tel mécanisme limiterait également la durée des négociations et éviterait l'interruption de la navigation sur le fleuve Saint-Laurent. Tant pour les armateurs canadiens qu'étrangers, ce serait important.
C'est tout ce que j'ai à vous dire pour l'instant. Nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci de votre attention.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup. Vous avez certainement beaucoup d'expérience.
Monsieur Crête.
[Français]
M. Crête: Je vous remercie pour votre présentation.
Je voudrais vous demander ce qui vous empêche actuellement d'autoriser l'Institut maritime du Québec ou toute autre institution à donner cette formation.
Qu'est-ce qui empêche les armateurs de payer un cours dans un établissement d'enseignement, de faire passer des examens pour devenir pilote et avoir la certification? Je ne vois pas ce qui, dans la loi et la pratique actuelles, interdit cela.
Et pourtant, vous voudriez qu'il y ait un outil pédagogique qui permettrait aux gens d'obtenir leur certification plus facilement. Pourquoi donc ne l'avez-vous pas fait au cours des dernières années?
M. Massicotte: Ça demande un certain investissement que les compagnies sont prêtes à fournir mais à la condition d'être sûres que cela va leur rapporter quelque chose à la fin. Il faut être sûr qu'ils ne seront pas obligés, en plus d'aller à l'école de marine, de passer par un double processus, celui de l'Institut maritime et le processus de certification actuel, qui est long et qui veut qu'un capitaine certifié soit aussi un pilote breveté. Ce sont deux choses différentes.
Actuellement, la loi dit qu'il doit y avoir une équivalence entre un certificat et un brevet. Les armateurs sont prêts à mettre de l'argent, mais il faut dire que cela coûte des millions de dollars. Les armateurs sont donc d'accord pour mettre de l'argent, mais ils veulent être sûrs d'avoir des résultats.
M. Crête: Il va sans dire que vous voudriez qu'il y ait une attestation du ministère de l'Éducation. Ça donne automatiquement l'entrée ou une équivalence sans avoir à passer l'examen prévu pour obtenir la certification. C'est ce que vous souhaitez?
M. Massicotte: Ce que nous souhaitons, c'est une entente comme pour les certificats de pilotage ou un brevet de capitaine, par exemple. Nous souhaitons avoir une école maritime sous juridiction provinciale mais qui a une entente de service avec Transports Canada.
L'Institut maritime reçoit des étudiants. Il les forme tout en tenant compte de certain critères imposés par Transports Canada. Après un cours qui peut durer six mois, un an ou deux ans, l'Institut adresse à Transports Canada le dossier de la personne qu'il a été chargé de former pour obtenir un certificat de premier maître ou de capitaine, avec toutes les observations et les décisions de passage.
On voudrait qu'il y ait la même chose pour l'obtention d'un certificat. Il faudrait que Transports Canada, ayant reconnu la validité des cours dispensés par l'Institut maritime du Québec pour les certificats de pilotage, octroie ce certificat de pilotage à un étudiant qui serait passé par tout le processus scolaire de l'Institut maritime.
M. Crête: Vous suggérez donc de mettre de côté le processus actuel d'autorisation pour le pilotage maritime. Vous voudriez que le lieu de décision soit changé.
M. Massicotte: Je pense qu'avant de faire approuver un cours dispensé par l'Institut maritime, celui-ci devrait aller chercher l'input de Transports Canada, des armateurs et des pilotes également.
M. Crête: D'autre part, vous dites dans votre mémoire que le Canada est un peu en retard sur le reste du monde en ce qui concerne l'application de nouvelles technologies.
Est-il cependant réaliste de penser que la technologie permettra un jour de remplacer le pilotage? Il m'est arrivé de voir, sur des bateaux, que l'outil électronique nous donnait l'impression d'être en dehors du fleuve alors qu'on était encore dans le chenail.
Est-ce qu'on serait capable de rattraper assez rapidement ce retard par rapport à d'autres pays? Quels sont les endroits de la planète où on aurait intérêt à aller le plus rapidement?
Capt Desgagnés: On ne demande pas que les candidats fassent simplement un cours sur un simulateur. Les candidats qui se présentent à ce genre d'examen ont tout de même l'expérience de la rivière. Ils auront certainement fait au moins 25 ou 50 voyages sur la rivière. C'est un complément qui va leur permettre de démontrer aux autorités qu'ils sont capables de piloter leur propre bateau dans les eaux restreintes de certains secteurs. Il ne s'agit pas seulement de prendre un cours de simulateur pour piloter un bateau dans un endroit restreint. Il faut démontrer son expérience en utilisant un simulateur.
M. Massicotte: Pour compléter cette réponse concernant la qualité des simulateurs, je voudrais dire que ces simulateurs sont utilisés le plus souvent par des Canadiens dans des situations critiques, par exemple lorsqu'on a besoin de faire accoster un pétrolier de 150 000 tonnes à Québec, dans des situations très délicates. C'est à ce moment-là qu'on juge utile d'utiliser ces simulateurs. C'est un outil très utile, particulièrement dans les situations les plus dangereuses.
[Traduction]
Le président: Deux autres membres voudraient vous interroger dans le peu de temps qui reste.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président. Je n'ai que quelques remarques.
Je suis d'accord en principe avec la direction que vous prenez. Il y a bien des risques de problèmes. J'ai été contrôleur aérien. De fait, j'ai enseigné aux contrôleurs aériens, mais même au faîte de ma carrière, j'aurais été dans l'embarras s'il m'avait fallu passer à nouveau l'examen d'agrément parce que, comme vous l'avez déclaré, il faut se rappeler de tous ces petits détails dont nous n'avons pas besoin tous les jours et sur lesquels ils nous interrogent dans les examens. Il faut donc concevoir quelque chose qui soit différent du cours normal et qui réponde à vos besoins particuliers.
Mais je tiens à apporter une précision, aux fins du compte rendu. Vous indiquez au troisième paragraphe de la page 4 de votre mémoire que des avions transportant des centaines de passagers atterrissent souvent uniquement aux instruments, sans aucune intervention du pilote et que, de temps en temps, le pilote intervient. Je suis aussi pilote commercial et je peux vous assurer que je n'ai jamais entendu parler d'un avion commercial transportant des passagers qui aurait atterri sans intervention du pilote. La technologie le permet et cela s'est fait à titre expérimental, mais jamais, à ma connaissance, lorsqu'il y avait des passagers à bord de l'appareil.
[Français]
M. Massicotte: Merci de vos commentaires. Je vais vous faire part d'une information obtenue d'anciens commandants de bord qui m'ont dit qu'ils avaient un jour demandé au pilote de ne pas atterrir manuellement pour vivre une expérience d'atterrissage avec les instruments. Ils ont vécu cette expérience.
[Traduction]
Le président: Monsieur Keyes.
M. Keyes: Merci, monsieur le président.
Je veux remercier les témoins d'être venus nous présenter leur mémoire aujourd'hui, mais certaines expressions qu'ils ont employées me perturbent. J'en ai noté trois en particulier: «manque de motivation», «rien ne bouge» et «volonté politique».
Loin de moi l'idée de me porter à la défense des administrations de pilotage et des pilotes, comme en témoignent le rapport du Comité permanent des transports de 1995 et l'attitude que nous voulions adopter face à la question du pilotage, mais en même temps, je veux déclarer publiquement, monsieur le président, que le gouvernement n'est pas resté inactif.
D'ailleurs, en juin 1995, juste après la publication du rapport, le ministre des Transports à l'époque, l'honorable Doug Young, a écrit aux quatre administrations de pilotage pour leur demander de former des groupes de travail régionaux.
En tout, plus de 17 groupes de travail se sont rencontrés dans dix centres maritimes différents au pays. Ils ont participé à ces réunions avec plus de 120 représentants des propriétaires de navires, armateurs, pilotes et ports et ont procédé à l'examen le plus exhaustif jamais réalisé depuis l'adoption de la loi en 1972. Le groupe de travail a renforcé et revu les critères obligatoires désignés en matière de pilotage, étudié l'administration et le fonctionnement des quatre administrations et proposé des changements.
Beaucoup de travail a été accompli et, à en juger par ce qui est ressorti à ce niveau et par leur participation, je crois que les administrations de pilotage restent déterminées à régler le plus rapidement possible les questions en suspens.
Elles ont témoigné au comité et déclaré que, même si l'engagement législatif du ministre prévoit la réévaluation du régime de pilotage avant le 31 décembre 1998, elles sont disposées à ramener la date butoir à 1997, un an plus tôt. Il y aura donc environ un an, à partir de décembre, pour effectuer ce travail, qui sera ensuite évalué et examiné par notre comité.
L'appui du groupe de travail et d'autres mécanismes de résolution des différends ont été examinés. L'établissement des tarifs de pilotage, la réduction des coûts, rien n'a été oublié.
Les administrations de pilotage collaborent étroitement avec les armateurs, les propriétaires de navires et les ports, afin de faire partie de l'équipe qui rendra les ports très concurrentiels.
Je voulais m'assurer que le témoin comprend que la motivation ne manque pas; il y a beaucoup de motivation. On ne peut pas dire que rien ne bouge. Ça bouge beaucoup. Il existe une volonté politique d'atteindre ce but.
[Français]
M. Massicotte: Merci pour vos commentaires que j'apprécie particulièrement. Je vous prie de m'excuser si j'ai utilisé les mauvais termes. Je suis convaincu qu'un énorme travail a été fait. J'apprends que la date butoir n'est plus en décembre 1998, mais en décembre 1997. C'est déjà beaucoup et ça va dans le sens de ce que je vous disais il y a 15 minutes.
Étant donné qu'un gros travail a été déjà fait et que des discussions ont eu cours à travers le pays, est-ce qu'on ne pourrait pas maintenant passer aux décisions? Vous m'avez appris que ce n'était plus 1998, mais 1997, et je vous en félicite car je pense que c'est un grand pas dans la bonne direction.
[Traduction]
M. Keyes: Merci.
Le président: Je vous remercie moi aussi d'avoir pris le temps de venir discuter de cette question avec nous. C'est un problème qui se pose d'un océan à l'autre. Vous avez été très utile. Merci beaucoup.
[Français]
M. Massicotte: Si vous avez d'autres questions en dehors de ce comité, je vous invite à vous adresser à l'Association des armateurs du Saint-Laurent. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci.
De Baie-Comeau, nous entendrons M. Yvon Forest.
Bienvenue.
M. Yvon Forest (Conseil d'administration portuaire de Baie-Comeau): Merci beaucoup.
Combien de temps avons-nous?
Le président: Nous demandons habituellement aux témoins de prendre une dizaine de minutes pour faire leur déclaration, ce qui laisse du temps pour que les membres les interrogent. Allez-y et résumez les principaux aspects que vous voulez porter à notre attention.
M. Forest: Je vous remercie beaucoup, monsieur Keyes, monsieur Gouk, monsieur le président et tous les autres, de nous permettre de présenter certaines remarques et questions à propos de ce projet de loi.
Veuillez excuser M. Pierre Caron, qui devait présenter le mémoire. Il est retenu à Baie-Comeau par un engagement très important. J'étais son remplaçant, alors je me retrouve sur la sellette.
Le président: Mais pas au banc des accusés.
M. Forest: Nous nous trouvons juste à côté de Sept-Îles. J'ai entendu dire qu'ils ont remporté le championnat dans la catégorie poids lourd, en ce qui concerne l'épaisseur du mémoire tout au moins. Nous avons l'intention de remporter le championnat dans la catégorie poids plume.
Des voix: Oh, oh!
M. Forest: Blague à part, nous appartenons aussi à la catégorie poids plume, parce que la Corporation d'administration portuaire de Baie-Comeau vient d'être formée pour prendre en main l'exploitation du port de Baie-Comeau.
Nous sommes tout jeunes en affaires, comparativement à Sept-Îles. Nous sommes des amateurs. Nous devons apprendre assez rapidement les trucs du métier, afin de pouvoir fonctionner d'ici six ans.
Nous avons donc des questions plus ingénues, auxquelles on s'attend davantage d'un amateur, mais nous sommes néanmoins la corporation qui devrait prendre la relève. Vous devez comprendre qu'il s'agit néanmoins de questions très importantes, puisque nous allons prendre la relève.
Étant donné que mon mémoire est rédigé en français, je le lirai en français, avec votre permission.
[Français]
La Corporation d'administration portuaire de Baie-Comeau a été créée en 1995 dans le but d'assumer les responsabilités de gestion et de développement à long terme du Port public de Baie-Comeau et de ses installations portuaires.
Nous signalons que notre groupe a adopté cette orientation avant même que le gouvernement fédéral n'annonce son intention de remettre à des intérêts locaux la gestion d'infrastructures portuaires. C'est dire à quel point nous adhérons au principe de décentralisation des responsabilités de gestion. Nous avions d'ailleurs acheminé un mémoire en 1995 en ce sens au ministre des Transports.
Enfin, mentionnons que siègent au conseil d'administration de notre corporation tous les grands utilisateurs industriels du Port de Baie-Comeau: Cargill, Reynolds, Donohue Quno, etc. et tous les opérateurs d'équipement et d'infrastructures, ainsi que les autorités municipales et les organismes voués au développement de notre région.
Je vais maintenant vous faire part de nos observations sur le projet de loi. Nous avons pris connaissance du projet de loi C-44 et nous avons même pu profiter de l'éclairage des fonctionnaires de Havres et Ports Canada pour nous aider à interpréter les intentions du gouvernement. Si l'intention générale du projet de loi semble aller dans le même sens que les demandes formulées dans notre mémoire de 1995, certaines dispositions ou certaines absences de dispositions soulèvent cependant nos inquiétudes.
Premièrement, le gouvernement va-t-il louer ou vendre ses installations? Dans notre mémoire de 1995, nous proposions de devenir mandataires de gestion des installations publiques afin de rentabiliser ces opérations par une promotion et une commercialisation judicieuses des services. Cependant, dans notre esprit, le gouvernement fédéral demeurait propriétaire des infrastructures.
Dans le projet de loi C-44, particulièrement à l'article 60 et à l'article 61, le gouvernement semble se donner les deux options pour les ports qui ne seront pas des APC, soit de céder seulement la gestion, soit de céder la propriété de ses infrastructures à un tiers. Est-ce que cette décision sera prise à la pièce ou y a-t-il des critères pour cette décision? Le projet de loi ne le précise pas et nos commettants, nos compagnies, aimeraient bien savoir si nous allons être propriétaires ou locataires. Will we be tenants or landowners of such harbours in the future? Les droits de port seront-ils abolis ou transférables aux nouveaux acquéreurs?
Dans le projet de loi, le gouvernement fédéral se garde le droit de délimiter l'aire du port public, selon l'article 54. Dans l'ancienne loi, des droits de port s'attachaient à l'utilisation de ce bassin d'eau et constituaient une source de revenus non négligeable. Le projet de loi parle de transférer des installations portuaires plutôt que des ports publics. Qu'en sera-t-il des droits de port? Seront-ils transférés? Seront-ils conservés par le gouvernement?
Je précise que, dans le cas de Baie-Comeau, la majorité des revenus du Port de Baie-Comeau proviennent des droits de port. Les droits de quayage sont insignifiants puisqu'une compagnie se sert du quai, mais, par contre, le port est très utilisé pour la bonne raison que les compagnies privées ont chacune leur quai privé. Sans les revenus du droit de port, il n'y a tout simplement plus de CAPBC. Le pouvoir d'imposer des droits de port doit absolument être transférable aux nouveaux acquéreurs.
Une autre question est l'accès public au port par rapport à la privatisation des infrastructures portuaires. Nous nous demandons comment le gouvernement fédéral entend garantir le maintien d'un accès public au port si ces installations publiques sont achetées par une compagnie privée. Le maintien de cet accès public est primordial, évidemment, pour le développement et la vitalité de notre région, mais il ne faudrait pas que la privatisation de ces installations conduise à l'établissement de monopoles ou de petits fiefs par une ou quelques compagnies qui, par une tarification exclusive, pourraient écarter l'arrivée de tout nouveau concurrent. Nous avons, par exemple, le cas de Tadoussac qui n'est pas dans le mémoire mais qui pourrait être cité comme un cas à risque.
Dans le projet de loi, le gouvernement fédéral a voulu se garder toutes les portes ouvertes quant au type d'acquéreurs qu'il privilégiera. Nous croyons que le gouvernement fédéral doit impérativement donner priorité aux organismes sans but lucratif regroupant les principaux et différents utilisateurs ainsi que les autorités locales, régionales et publiques.
En ce qui concerne le programme de transition de 125 millions de dollars, le projet de loi est muet sur ce programme de transition annoncé dans la Politique maritime nationale. Que couvrira exactement ce programme? Les coûts de démantèlement des quais à abandonner? Les coûts de radiation des déficits accumulés par les ports? Les coûts de réparation déjà planifiés avant 1995 par Havres et Ports Canada? Les coûts de nouvelles réparations ou améliorations décidées par les administrations portuaires locales?
Pourra-t-on y aller sur la base de first in, first served, «premier arrivé, premier servi» ou avec une planification globale? Sachant que la somme de 125 millions de dollars est largement inférieure à la somme des besoins, l'adoption d'un minimum de critères s'impose et le projet de loi devrait les préciser. Je crois d'ailleurs que plusieurs l'ont mentionné avant nous dans cette audience.
Pour nous, cette enveloppe de 125 millions de dollars ne devrait servir qu'au financement de réparations et d'améliorations planifiées par les nouvelles administrations portuaires locales. Elles ne devraient certainement pas être utilisées par le fédéral pour financer le démantèlement, pour combler des déficits antérieurs ou pour assumer des responsabilités d'entretien antérieures à la décision finale de transfert.
Enfin, pour l'avenir, il faut prévoir un programme permanent de soutien. À plus long terme, il faut aussi considérer les besoins financiers des organismes sans but lucratif qui prendront la relève du gouvernement fédéral. Avec des revenus très faibles, avec un historique de déficit d'opération le plus souvent, et avec une valeur commerciale de leurs actifs proche du zéro absolu, quelle sorte de garantie est-ce qu'on pourra donner aux banques pour emprunter à long terme l'argent nécessaire à des travaux de réparation majeurs?
Par exemple, à Baie-Comeau, en 1989-1990,
[Traduction]
nous avons dû investir 27 millions de dollars, pour améliorer les infrastructures portuaires. Quelle banque aurait pris le risque d'accorder un tel prêt sans garantie?
[Français]
Et nous parlons ici d'un port qui n'est pas déficitaire.
[Traduction]
Le port de Baie-Comeau est rentable. Malgré tout, il nous est absolument impossible d'obtenir un tel prêt d'une banque compte tenu des actifs que nous possédons actuellement.
[Français]
Poser la question, c'est y répondre, et cette réponse est encore plus évidente pour la majorité des ports du réseau qui sont, eux, déficitaires. Pas une institution financière ne s'embarquera dans de telles aventures à moins que le gouvernement fédéral ne garantisse les prêts en question. Aussi est-il impératif que le gouvernement fédéral maintienne au-delà de six ans un programme d'aide pour soutenir ces ports.
Nous suggérons un programme à frais partagés avec les organismes de gestion des ports qui pourrait financer jusqu'à 50 p. 100 des coûts des améliorations et réparations nécessaires pour assurer la pérennité des infrastructures qui sont viables commercialement, assorti d'une possibilité de garantie du prêt contracté pour les travaux.
[Traduction]
J'aimerais remercier le comité d'avoir bien voulu prêter l'oreille à ces remarques.
Le président: Je vous remercie beaucoup d'avoir remplacé votre collègue au pied levé. Nous n'avons pas entendu beaucoup de témoignages concernant les effets du projet de loi sur les petits ports, alors je vous suis reconnaissant de vous être déplacé.
Monsieur Crête.
[Français]
M. Crête: Votre présentation est d'autant plus valable qu'on sait que Baie-Comeau a présenté une lettre d'intention pour que la gestion soit effectuée par un organisme à but non lucratif. D'autre part, concernant les commentaires que vous avez faits sur la somme de 125 millions de dollars, sans vouloir être indiscret, j'aimerais que vous nous fassiez part de vos idées sur la façon dont les sommes devraient être affectées, particulièrement dans le cas de Baie-Comeau.
Je voudrais vous dire aussi que je trouve très intéressante la suggestion que vous faites d'un fonds qui permettrait d'assurer une continuité avec des contributions à parts égales de 50 p. 100. Cela répondrait à une des inquiétudes des ports régionaux au sujet de ce qui arrive après la période de six ans.
M. Forest: Je vais ajouter quelques éléments en réponse à votre question. Il y a environ un mois, nous tenions une assemblée de fondation avec des compagnies comme Reynolds, Cargill et Donohue
[Traduction]
afin de mettre au monde cette bête, cette nouvelle société. À deux reprises, ces entreprises, qui ne sont pas les plus pauvres sur le continent, ont été tentées de se retirer. Et je le répète, jusqu'ici le port de Baie-Comeau est rentable.
La question est très simple. Si 6,5 millions de dollars ont été prévus simplement pour rénover l'infrastructure portuaire appartenant au gouvernement fédéral, si cette somme est prévue depuis cinq ans et qu'elle ne vient pas, comment pouvons-nous être assurés d'obtenir des fonds du programme de 125 millions de dollars? Nous n'avons aucune garantie.
[Français]
Je ne parle pas évidemment des quais qui sont en plus mauvaise posture et que nous connaissons sur la Côte-Nord, parce que je travaille aussi pour un organisme régional de développement qui couvre Tadoussac, Havre-Saint-Pierre, etc.
M. Crête: Est-ce que vous n'avez pas l'impression que le fonds de 125 millions de dollars, qui peut être valable à moyen terme, a pour effet de geler les investissements actuels dans les ports régionaux et qu'il y a des choses que le gouvernement était prêt à faire et qu'il a décidé de retarder sciemment pour rendre le programme plus attrayant?
M. Forest: Nous en avons la certitude, puisque le montant devait être dépensé cette année. Havre et Ports Canada avait planifié de corriger, au coût de 6,5 millions, le poste d'amarrage no 3, et cet argent ne sera pas investi.
M. Crête: Donc, vous voudriez que les travaux se réalisent mais pas nécessairement en utilisant ces 125 millions de dollars?
M. Forest: Imaginez l'accumulation de factures que ça peut représenter. Nous sommes un port parmi 150 ou 200 qui seront privatisés. Si chacun a un programme de rénovations de ce genre-là et en tenant compte des arrérages, comment pourrons-nous, avec des amateurs, préparer ces ports pour affronter le défi de l'an 2000?
M. Crête: Vous voulez dire que vous attendez un signal du gouvernement fédéral pour que ces choses-là soient claires?
M. Forest: Oui, en effet.
[Traduction]
Le président: Monsieur Keyes.
M. Keyes: Merci, monsieur le président. Je veux faire de mon mieux pour apaiser certaines inquiétudes du témoin.
Le port de Baie-Comeau est un port régional ou local. La propriété du port, l'aménagement du port, la structure tarifaire, tous ces aspects seront déterminés et calculés par le nouveau propriétaire. Alors, lorsque le gouvernement fédéral s'assoit avec le port de Baie-Comeau ou tout autre petit port régional ou local qui, pour de nombreuses raisons, ne remplit pas les critères pour devenir une administration portuaire canadienne, il examine la valeur de ce port. Le gouvernement fédéral décidera peut-être, après avoir bien négocié, qu'il veut vendre le port à la collectivité visée pour 1 $, parce qu'elle est disposée à tenter de faire quelque chose avec son petit port.
La prochaine étape logique consiste à libérer les nouveaux propriétaires du port de la bureaucratie gouvernementale, afin qu'ils puissent trouver des possibilités d'investissement et attirent des armateurs à leur port.
Les nouveaux propriétaires établiront donc des partenariats privés avec certains des grands noms que vous avez indiqués et feront valoir que, puisqu'il s'agit de l'endroit le plus stratégique pour transporter les produits sur notre continent ou pour expédier nos produits vers d'autres destinations, alors il faut s'associer à eux dans une administration portuaire sans attaches avec le gouvernement et créer le partenariat nécessaire pour que le port soit rentable.
Le programme d'infrastructures portuaires existera. Le chiffre avancé est de 125 millions de dollars, mais il pourrait être plus élevé. Le gouvernement fédéral reconnaît et comprend qu'il veut aider les petits ports comme celui de Baie-Comeau à démarrer sur des assises solides afin de réussir. S'il faut pour cela bâtir ou rénover un quai ou encore construire une infrastructure en particulier, afin de pouvoir faire le saut, alors les fonds seront débloqués pour que Baie-Comeau ou d'autres ports en profitent et puissent faire le saut et devenir rentables lorsqu'ils se lanceront en affaires.
Vous avez parlé des banques. Les banques seront très intéressées, je crois, par un port qui réussit. Les banques seront très intéressées par un port qui aura établi des partenariats avec le secteur privé pour en tirer des avantages, non seulement pour les partenaires du secteur privé mais aussi pour la rentabilité.
Vous-même, vous ne prêteriez pas d'argent à quelqu'un que vous connaissez si vous n'étiez pas assuré de recouvrer votre argent. Les banques seront intéressées si les bons mécanismes sont mis en place dès maintenant, avec l'appui du gouvernement, grâce au programme d'infrastructures, et avec les partenariats qui seront instaurés et maintenus avec le secteur privé, afin que le port devienne rentable.
J'espère, monsieur le président, avoir pu répondre à certaines questions du témoin.
M. Forest: Pour m'assurer que je vous ai bien entendu, avez-vous déclaré que les pouvoirs permettant d'exiger des droits portuaires seront accordés à cette nouvelle administration?
M. Keyes: Absolument. Vous déterminerez ce que vous exigerez des armateurs lorsqu'ils feront accoster leurs navires à votre quai, parce que ce port sera le vôtre.
M. Forest: D'accord. C'est un élément clé, parce que c'est une grande source de revenu. Nous avons un budget de 600 000 $, qui proviennent surtout des droits portuaires.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Forest. Merci d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui.
M. Forest: Merci beaucoup.
Le président: Le comité reprendra ses travaux à 13 h 30.
Le président: Débutons, s'il vous plaît. Premièrement, je vous prie de nous excuser de ce retard de quelques minutes. Nous sommes sortis nous promener dans Québec à l'heure du lunch. Nous ne raccourcirons pas vos témoignages. Nous vous donnerons le temps auquel vous avez droit pour présenter votre point de vue.
Nos témoins représentent la Chambre de commerce de Trois-Rivières. Monsieur Morin, auriez-vous l'obligeance de présenter la délégation?
M. Gilles Morin (président, Corporation des utilisateurs du Port de Trois-Rivières): Je demanderai à M. Bïgué de s'en charger. Il représente la Chambre de commerce. Nous représentons les utilisateurs.
[Français]
M. Michel Bïgué (représentant de la Chambre de commerce de Trois-Rivières): Bon après-midi, monsieur le président, messieurs les membres du comité.
Nous sommes de la Chambre de commerce de Trois-Rivières et de la Corporation des utilisateurs du Port de Trois-Rivières. Permettez-moi de vous présenter ceux qui m'accompagnent: M. Gilles Morin, président de la Corporation des utilisateurs du Port de Trois-Rivières; M. Édouard Rivard, qui est le secrétaire général de la Corporation; et M. Mario Côté, directeur général de la Chambre de commerce de Trois-Rivières.
Pourquoi la Chambre de commerce de Trois-Rivières présente-t-elle un dossier en collaboration avec la Corporation des utilisateurs? C'est d'abord parce que partout où il y a des ports au Canada, il y a des chambres de commerce. Après recension, on n'a pas trouvé un seul port où il n'y a pas de chambre de commerce. De plus, les chambres de commerce représentent d'une façon très importante le milieu des affaires. La Chambre de commerce de Trois-Rivières, pour votre information, compte parmi les chambres de commerce les plus reconnues au Canada.
Effectivement, elle est en opération depuis 1881. Vous trouverez dans notre dossier un document de référence qui témoigne du fait que la Chambre de commerce, même depuis 1881, travaille activement aux affaires du Port de Trois-Rivières. La Chambre de commerce a un comité permanent qui s'occupe des affaires du Port de Trois-Rivières.
Les utilisateurs représentant près de 90 p. 100 des transactions qui s'opèrent au Port de Trois-Rivières sont, notamment, les élévateurs à grain. Je les nomme pour que vous puissiez voir quel est le groupe en question: le groupe Somavrac, la compagnie Lauralco, Kruger, Tripap, Trois-Rivières Remorqueurs, les agences maritimes Malone, Watson et Lower St. Lawrence ainsi que Logistec.
Je commence notre présentation en vous mentionnant que, dans le contexte actuel, il y a un choix à faire pour les diverses villes portuaires entre devenir une APC ou un port régional. Indépendamment du choix que l'on pourra faire à Trois-Rivières, et sans égard à la formule de gestion future, nous nous permettons de recommander certaines modifications au projet de loi C-44 afin que celui-ci réponde davantage à nos attentes.
Dans sa formule actuelle, nous jugeons le présent projet de loi C-44 inacceptable, compte tenu de certains articles qui ne concordent pas avec nos voeux. Bien que dans l'ensemble, ces articles soient peu nombreux, ils n'en revêtent pas moins à nos yeux une importance capitale pour l'administration, la gestion et les opérations futures des administrations portuaires canadiennes. Dans son discours ainsi que dans le projet de loi qui s'en est suivi, le ministre a voulu accorder une importance accrue aux utilisateurs. Dans ce contexte, voici différents aspects ou articles du projet sur lesquels nous voulons apporter des commentaires.
En ce qui a trait à l'utilisateur, on le définit à l'article 4 de la partie I comme une «personne qui utilise le port à des fins commerciales ou y fournit des services». Cette définition ne convient pas parce qu'elle a une portée trop générale et peut, à certains égards, créer des ambiguïtés. Nous suggérons que le texte de loi soit plus explicite et, à cet effet, vous soumettons le libellé suivant, lequel permettrait de décrire de façon plus spécifique qui sont les utilisateurs. L'utilisateur d'un port est une:
- personne qui utilise le port à des fins commerciales ou y fournit des services. Les lettres patentes
de constitution ou les lettres patentes supplémentaires devront définir qui sont les utilisateurs du
port concerné.
Les lettres patentes devraient prévoir que la Chambre de commerce des municipalités désignées dans les lettres patentes peut nommer un administrateur. Par conséquent, le paragraphe 6(2) devrait être modifié, de même que l'article 12. On prévoit déjà un représentant de chacun des paliers gouvernementaux.
Au sous-alinéa 6(2)f)(iv), nous recommandons que le premier dirigeant ne fasse pas partie du conseil d'administration à titre d'administrateur votant.
Quant au reste des administrateurs devant compléter le conseil d'administration, nous recommandons que le sous-alinéa 6(2)f)(v) stipule que le ministre choisit le reste des administrateurs à partir d'une liste que lui soumettent conjointement les utilisateurs et la Chambre de commerce, qui serait déjà habilitée à nommer un administrateur.
À notre avis, l'alinéa 6(2)h) a une portée trop vaste et nous croyons qu'un cadre précis sur le paiement des frais à payer au ministre devrait apparaître clairement dans la partie de la Loi maritime du Canada qui traite des APC pour éviter toute ambiguïté et discussion.
Administrateurs: Au chapitre traitant des administrateurs, l'alinéa 12(1)d) devrait être retranché si le ministre fait droit à notre demande de modification au sous-alinéa 6(2)f)(iv). De plus, l'alinéa 12(1)e) devrait se lire comme suit:
e) le gouverneur en conseil nomme les autres candidats choisis par le ministre à même la liste prévue au sous-alinéa 6(2)f)(v);
C'est-à-dire que le ministre choisit le reste des administrateurs à partir d'une liste que lui soumettent conjointement les utilisateurs et la Chambre de commerce, qui sera déjà habilitée à nommer un administrateur.
Pour respecter le sens de la loi et le rôle qu'on entend voir jouer par les utilisateurs, il faut de toute nécessité enlever l'alinéa 14e) pour maintenir la cohérence de la loi à l'égard des utilisateurs. Cet alinéa se lit ainsi:
- e) les dirigeants ou employés de la personne qui, selon la détermination qu'en fait le ministre,
est un utilisateur.
- 19. (1) Les administrateurs sont tenus de nommer le premier dirigeant
- par
- 19. (1) Les administrateurs peuvent nommer le premier dirigeant et peuvent nommer les autres
dirigeants, selon qu'ils estiment indiqué.
Dispositions diverses: À la partie VI, portant sur les dispositions diverses, l'article 126 traite des conséquences de la dissolution de la Société canadienne des ports, tout particulièrement en ce qui a trait aux éléments d'actif détenus par ladite société.
Nous recommandons fortement que dans le cas des ports ayant accumulé des réserves, ces dernières fassent partie du transfert et demeurent à leur disposition. Toutefois, l'utilisation future de ce fonds de réserve devra être énoncée clairement dans les lettres patentes.
Commentaires généraux: En terminant, qu'il nous soit permis de vous transmettre quelques commentaires généraux quant à la nouvelle Politique maritime canadienne.
Le projet de loi devrait inclure le texte traditionnel qui suit, s'appliquant à tous les types d'administrations portuaires:
- Les contrats entre les utilisateurs et les administrations portuaires ne seront pas affectés et ils
seront exécutés par l'administration portuaire dans le respect des droits et obligations y
contenus.
Sur le plan fiscal, bien que nous soyons d'accord pour que l'autorité portuaire continue à payer son dû, nous croyons nécessaire que la future administration portuaire continue à bénéficier du statut d'agent fédéral.
Conscients que plusieurs articles du projet de loi C-44 pourraient s'appliquer à la formule de gestion dite «de port régional», nous déplorons grandement le vide créé par l'absence d'indication des attentes du gouvernement fédéral pour cette catégorie. En effet, nous sommes convaincus que les ports dits régionaux devront répondre à certaines attentes gouvernementales, respecter certaines obligations, exercer certains droits et pouvoirs de l'activité maritime canadienne, mais rien ne nous le laisse entrevoir.
Pour bien analyser les options qui s'offrent à nous, nous devons être en mesure de connaître les véritables données sur les activités actuelles, les mouvements, les coûts, les méthodes d'opération, les revenus, les charges, les redevances, les contrats et les transferts, s'il y a lieu.
Actuellement, il est quasi impossible d'avoir accès aux informations pertinentes sans opter au préalable pour l'un ou l'autre des choix offerts. Il faudrait que le ministre rende accessibles ces données aux groupes jugés sérieux sans plus de délais indéfinis. Nous espérons que cette intervention permettra à la Chambre de commerce du district de Trois-Rivières et à la Corporation des utilisateurs du Port de Trois-Rivières de continuer leur travail visant à dégager le plus large consensus possible au sein du milieu et ainsi déterminer une position claire quant à l'orientation future de nos installations portuaires. Respectueusement vôtre.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Crête.
[Français]
M. Crête: J'ai écouté votre présentation tout en lisant votre document en diagonale. J'aimerais que vous me précisiez si, dans votre vision des choses, le statut d'administration portuaire canadienne est véritablement celui qui correspond le mieux à la situation de Trois-Rivières et qui est vraiment pertinent, ou si les remarques que vous faites sur le manque de connaissances qu'on a à propos de l'avenir des ports régionaux signifient que vous pourriez être amenés à reconsidérer vos positions. Est-ce que la situation vous apparaîtrait différente selon ce que révélerait l'information qu'on obtiendrait? De façon plus précise, de quel genre d'information auriez-vous besoin?
Vous le dites assez clairement pour les ports, en général:
- Nous sommes convaincus que les ports régionaux devront répondre à certaines attentes
gouvernementales...
- Pourriez-vous m'en parler en ce qui a trait plus spécifiquement au Port de Trois-Rivières?
M. Crête: Cela veut dire que vous souhaitez - vous pourrez confirmer ce que je dis - , en fin de compte, que ces différences soient connues avant que la loi soit adoptée dans sa version finale, autant que faire se peut. Si j'interprète bien votre message, ces aspects devraient être intégrés au projet de loi C-44 afin que vous connaissiez exactement les règles du jeu quand vous aurez à faire votre choix.
M. Bïgué: À toutes fins utiles, oui. Monsieur Morin?
M. Morin: Pour compléter l'intervention de M. Bïgué, il y a un autre élément dans le mémoire qui fait allusion aux données concernant les coûts, les mouvements, les opérations actuelles du port, etc. Le groupe a demandé ces renseignements à plusieurs reprises. Comme on le souligne dans le mémoire, ces choses sont un élément important du choix. Le ministre devrait donc nous les rendre accessibles.
M. Crête: Entre votre statut actuel, que je désignerais par la situation du statu quo, et le statut que vous conférerait le projet de loi C-44 tel qu'il est, lequel préféreriez-vous pour le Port de Trois-Rivières?
M. Morin: Le statut du Port de Trois-Rivières est celui d'un port divisionnaire. En d'autres mots, ce n'est pas un port qui a une autonomie locale sur le plan de l'administration. On a fait connaître dans le passé, par la voix de la Chambre de commerce et à plusieurs reprises, la volonté du milieu de Trois-Rivières qu'on devienne autonomes. Cela voudrait dire, à toutes fins utiles, ne plus dépendre des décisions d'Ottawa, qu'elles passent par Ports Canada ou par des fonctionnaires du gouvernement fédéral. Cela voudrait dire être autonomes localement. Cela nous semble clair.
Par contre, on dit aussi que les éléments de cette économie et la façon de l'organiser doivent tenir compte de l'environnement, de la taxation, etc., quel que soit le choix qu'on fasse. Nous pourrons choisir à la lumière de la loi finale. Notre cas est un peu particulier, étant donné que nous sommes un port divisionnaire; il semble que cela nous laisse des choix que d'autres ports n'ont pas nécessairement.
M. Bïgué: J'aimerais ajouter que depuis qu'on tente de changer le statut des ports dans tout le Canada, soit depuis un an ou presque deux, le gouvernement a toujours privilégié que les groupes régionaux et même des groupes d'hommes d'affaires régionaux prennent charge des installations. C'est un peu l'approche qui nous amène à préférer l'établissement de ce système.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Crête.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Dubé, de la belle ville de Lévis. Je pense que la municipalité témoignera un peu plus tard cet après-midi.
M. Keyes: Quelle coïncidence!
Le président: M. Dubé est un habitué de notre comité.
Monsieur Keyes.
M. Keyes: Le Port de Trois-Rivières a indiqué au comité qu'il veut devenir une administration portuaire canadienne, une APC. Pourquoi la Chambre de commerce et les utilisateurs sont-ils en désaccord avec le port, qui croit pouvoir optimiser les débouchés en devenant une APC?
M. Morin: Comme vous l'avez indiqué, le Port de Trois-Rivières, ou plutôt les dirigeants du Port de Trois-Rivières, ou la Société canadienne des ports, représentée par son personnel à Trois-Rivières, ont demandé que le Port de Trois-Rivières devienne une APC.
Aujourd'hui, vous comprenez que d'autres personnes, essentiellement le groupe des utilisateurs, le milieu des affaires, ne sont pas convaincues que ce soit la meilleure solution et veulent discuter entre elles de ce qui constituerait la meilleure solution.
Nous n'avons pas considéré cette solution comme quelque chose de définitif. Nous aimerions que le ministre nous informe davantage sur les solutions de rechange. Nous aimerions aussi en savoir plus sur l'administration portuaire. Nous étions auparavant un port régional, contrôlé par Ottawa. Nous n'avons pas reçu d'information sur l'exploitation du port par la Société canadienne des ports.
M. Keyes: Monsieur le président, depuis le début de nos déplacements, depuis le début de ces séances, c'est le premier groupe qui n'est pas au courant de la différence entre une APC et le contrôle régional ou local.
En deux mots, le contrôle régional ou local signifie que le port vous appartient. Le statut d'APC, si le projet de loi est modifié comme nous l'ont suggéré d'autres ports, a ses avantages.
Si le Port de Trois-Rivières remplit les conditions pour devenir une APC, il y a beaucoup plus d'avantages du point de vue de la fiscalité, de l'impôt sur le revenu provincial, de l'impôt sur le revenu fédéral, et de tout ce qui découle d'une APC. Je suis surpris d'entendre des utilisateurs affirmer qu'ils ne savent pas s'ils devraient appuyer un port régional ou local quand il est évident que le fardeau fiscal serait beaucoup plus lourd et qu'ils devraient payer ces impôts à même leurs profits.
M. Morin: Dans notre mémoire, nous avons fait ressortir le problème de la fiscalité dans le cas du statut d'agence fédérale et, donc, que l'exonération d'impôt n'est pas claire dans la loi. Nous l'avons mentionné.
Si la situation devenait plus limpide, si ces suggestions étaient intégrées à la loi, il est évident dans notre esprit qu'il serait beaucoup plus facile pour nous de prendre des décisions concernant un grand nombre de ces questions et de choisir ce statut.
Vaut-il mieux être un port régional sans allégement fiscal ou un port régional où les problèmes environnementaux ne seront pas réglés? Voilà ce que nous disons.
Il n'y a pas de confusion quant aux choix possibles. Tout ce que nous voulons c'est que les choix soient clairs avant que nous en fassions un et appuyions l'administration portuaire au sujet du statut d'APC, ou décidions que nous voulons devenir un port régional et avoir une administration qui répond aux besoins de la collectivité, de la municipalité et de tous ceux qui seraient visés par le statut de port régional dans notre région.
M. Keyes: Merci, monsieur Morin.
Le président: Merci, messieurs, de nous avoir donné du temps.
De l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, nous accueillons M. René Brassard et M. Normand Pomerleau.
Maintenant que nous vous avons renseignés sur les ports, nous pouvons peut-être parler des routes.
Bienvenue, messieurs. Vous connaissez le processus. Nous vous demandons de limiter vos remarques à une dizaine de minutes pour que nous ayons le temps de vous interroger.
M. Normand Pomerleau (président, Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec): Nous représentons aujourd'hui l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. J'aimerais vous remercier de nous donner l'occasion de vous expliquer nos préoccupations et nos recommandations concernant le réseau routier du Québec et du Canada.
[Français]
C'est Robert Reich, professeur à l'Université de Harvard, qui disait:
- Les caractéristiques marquantes d'un pays dans l'économie mondiale sont les qualifications
des travailleurs et la qualité de son infrastructure.
Cette problématique n'est pas exclusivement québécoise; elle est constatée dans les autres régions du Canada. Devant cette situation, notre association s'est inquiétée. Consciente de l'importance du réseau routier pour le développement du Québec et du Canada et directement touchée par les politiques fiscales des gouvernements, notre association veut apporter sa contribution à la compréhension du problème.
C'est donc avec enthousiasme que nous répondons à l'invitation du Comité permanent des transports de la Chambre des communes de vous faire connaître notre point de vue sur cette importante question des transports et de son incidence sur le commerce et le tourisme.
L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec regroupe, sur une base volontaire, quelque 500 entrepreneurs oeuvrant dans le domaine du génie civil, de la voirie, des routes et du transport d'énergie.
Parmi les donneurs d'ouvrage importants de notre industrie, notons le ministère des Transports, le ministère de l'Environnement et de la Faune, celui de l'Agriculture et celui des Pêcheries et de l'Alimentation, la Société québécoise d'assainissement des eaux, les communautés urbaines du Québec et l'Hydro-Québec. Au niveau canadien, Approvisionnement et Services Canada, Construction de Défense Canada, CBC ainsi que la Défense nationale sont des clients réguliers de nos entreprises. La grande majorité des contrats obtenus par nos entrepreneurs le sont par le biais d'appels d'offres publics.
L'industrie de la construction générale, et le secteur du génie civil en particulier, a été au cours du dernier quart de siècle un moteur important de l'économie québécoise. Nous n'avons qu'à nous rappeler la réalisation des grands travaux tels la construction d'un barrage hydroélectrique...
[Traduction]
Le président: Monsieur Pomerleau, excusez-moi. Je n'aime pas vous interrompre, mais je constate que vous lisez votre mémoire page par page, ligne par ligne. Il compte quatorze pages, ce qui veut dire que vous aurez besoin de tout le temps à votre disposition pour le lire et que nous ne pourrons pas discuter. Vous êtes libre d'employer le temps comme vous le voulez. Je voulais seulement vous avertir...
M. Pomerleau: Je vais essayer de le condenser.
Le président: Merci.
[Français]
M. Pomerleau: En 1995, l'activité économique générée par l'industrie de la construction au Québec représentait un investissement de 15 milliards de dollars, soit 22 p. 100 du total canadien qui s'élève à 62 milliards de dollars. Près de 60 p. 100 de ces investissements étaient consacrés à la construction de bâtiments non résidentiels et au génie civil et voirie.
L'industrie de la construction dans son ensemble représente 16 600 employeurs et a créé au Québec, en 1995, 86 353 emplois directs, selon les données de la Commission de la construction du Québec.
En fait, le secteur génie civil dénombre 1 500 employeurs qui supportent directement 26 600 employés.
Je passe au chapitre suivant. L'économie du Québec est ouverte sur le monde. Le produit intérieur brut de notre province en 1995 avait une valeur de 175 milliards de dollars, ce qui représente 22 p. 100 du PIB canadien.
La structure économique du Québec est dominée par le secteur tertiaire. En 1995, ce secteur accapare 70 p. 100 de l'activité économique. Le secteur secondaire, quant à lui, compte pour 27 p. 100 du PIB, alors que 16 p. 100 des livraisons du secteur secondaire proviennent des industries plus intensives. C'est donc plus de 30 milliards de dollars de marchandises qui ont été expédiées par les entreprises québécoises.
Les entreprises du camionnage assurent 80 p. 100 des marchandises transportées à l'intérieur du Québec.
Si on regarde le tableau de la répartition du réseau routier, on a un réseau supérieur de 29 153 kilomètres, un réseau local de 41 666 kilomètres et un réseau d'accès aux ressources de 1 347 kilomètres.
L'étude menée en 1988 et 1990 sur la politique routière nationale a permis d'établir des critères afin de définir les routes dont les fonctions et les caractéristiques méritent d'être reconnues à l'échelle nationale. On en a reconnu au Québec 2 874 kilomètres de réseau routier satisfaisant à ces critères.
Je parlerai un peu de l'état dans lequel se trouve le réseau routier. Le réseau routier québécois démontre un niveau de déficience de 24 p. 100. Un kilomètre sur quatre nécessite des réparations. Au Québec, l'âge moyen des ponts est de 35 ans et, au niveau de la sécurité routière, le coût moyen des victimes dans le cas d'accidents mortels est passé de 55 800 $ en 1992 à 68 100 $ en 1995.
La sollicitation du réseau routier est également en croissance depuis 1982. La part des dépenses du ministère des Transports du Québec diminue continuellement. Nous estimons que le budget d'entretien et de réparations du ministère des Transports du Québec ne comblera que 58 p. 100 des besoins, les besoins étant requis pour abaisser de 1 p. 100 par année le niveau de dégradation du réseau.
Il se dégage de cela que cet important patrimoine routier se détériore, entraînant des coûts considérables pour notre économie. La capacité du Québec et de ses entreprises de compétitionner à l'échelle mondiale s'en trouve grandement affectée.
Je parlerai très brièvement de l'importance du programme d'infrastructures en comparaison des investissements. Le rapport issu du premier programme d'infrastructures concluait comme ceci:
- Si l'on considère le programme comme instrument anticyclique utilisé en période de stagnation
économique, il ressort clairement des constatations et conclusions ci-dessus:
- . que les fonds du programme travaux d'infrastructures du Canada ont été, dans l'ensemble,
dépensés à bon escient;
- . que l'état des infrastructures municipales s'est sensiblement amélioré;
- . que les emplois ont été créés pour des personnes qui étaient, la plupart du temps, en chômage;
- . que la relance économique, mesurée en fonction des changements dans le PIB et
l'investissement total, est jugée comparable à ce qu'aurait produit l'option de la réduction de la
dette;
- . que le programme n'a pas d'effets négatifs à court ou à long terme sur l'économie;
- . que le programme a amélioré la qualité de la vie, facteur que beaucoup jugent intrinsèquement
lié aux perspectives de développement économique, mais de manière difficile à évaluer.
Ces constatations nous portent donc à croire qu'un engagement de la part du gouvernement canadien à la rénovation et à l'amélioration du réseau routier national produirait des résultats du même ordre. On parle d'un deuxième programme d'infrastructures.
Au Québec, il y a eu une diminution des investissements de la part de ceux qui offrent des ouvrages publics. D'autres besoins d'investissements dans le réseau routier ont également été amplement démontrés. Le marasme dans lequel se trouve l'industrie de la construction est l'évidence même. De nombreuses études montrent qu'il est rentable d'investir dans l'amélioration des infrastructures de transport.
Au niveau du financement, le gouvernement fédéral a perçu depuis plusieurs années, auprès des utilisateurs du réseau routier, des sommes considérables de revenus. Pour l'ensemble du pays, en y incluant la TPS, Ottawa, en 1994, a perçu près de cinq milliards de dollars. La même année, au Québec, les automobilistes ont contribué la somme de 652 millions de dollars. En 1995-1996, selon les données fournies par Transports Canada, l'ensemble des programmes de contribution du réseau routier québécois représente un investissement de 28,9 millions de dollars. Le retour de taxes des usagers du réseau routier représente à peine 4 p. 100 des sommes perçues. Transports Canada prévoit même que sa contribution sera ramenée à zéro en l'an 2001.
La démonstration de la non-application du principe de l'utilisateur-payeur dans le domaine routier n'a donc plus besoin d'être faite. Le gouvernement fédéral n'est pas le seul à détourner à d'autres fins les sommes perçues par certains groupes de notre société. D'ailleurs, l'ACRGTQ pense que l'annonce, par le ministre des Finances du Québec, de l'acquisition d'un fonds spécial pour la conservation et l'amélioration du réseau routier est un pas dans la bonne direction. C'est désormais au moyen de ce fonds que sont gérées les sommes consacrées au réseau routier. Éventuellement, plusieurs sources de revenus spécifiques pourront être associées à ce fonds. Il en résultera une gestion autonome et transparente des sommes perçues.
Dans le contexte actuel de la réduction du déficit du gouvernement fédéral aussi bien que des provinces, à laquelle nous souscrivons pleinement, les choix budgétaires ne sont pas faciles à faire. Notre association est d'avis que les gouvernements doivent choisir d'investir et d'immobiliser là où les gains de productivité et la production économique seront les meilleurs. De nombreuses études menées au cours des 20 dernières années démontrent que les investissements publics dans l'infrastructure favorisent la productivité et la croissance économique de façon importante.
En terminant, l'amélioration du réseau routier génère pour les individus, les entreprises et les gouvernements une série de bénéfices. L'analyse approfondie réalisée entre 1987 et 1990 sur la politique routière du Canada a documenté de façon exhaustive ce sujet. La mise à contribution des gouvernements provinciaux et territoriaux dans l'élaboration de cette politique a permis d'établir un nombre important de consensus.
L'ACRGTQ est d'avis que, considérant la conjoncture économique à court terme et les besoins amplement démontrés d'investissements majeurs dans la rénovation du réseau routier du Canada et du Québec, la politique routière pour le Canada développée de 1988-1990 devrait être au centre de toute initiative dans ce domaine.
Afin d'assurer le financement d'un programme d'infrastructures, il faut que le gouvernement crée un fonds routier qu'il alimentera à partir de la taxe de carburant que les usagers de la route versent sur chaque litre de carburant.
Le transport routier restera, dans l'avenir, un élément majeur qui appuiera l'activité économique du Canada et du Québec. On prévoit que le trafic interurbain croîtra de 3 p. 100 par année d'ici l'an 2000. Les routes supportent 90 p. 100 du transport des passagers et 76 p. 100 du transport de la marchandise dans notre pays. Nous ne pouvons donc pas nous permettre de risquer d'affecter la performance de l'économie canadienne avec un réseau désuet. En 1941, le sous-ministre des Transports du Québec, dans un mémoire sur la situation de la voirie, écrivait:
- La confection des routes ne répond pas encore aux exigences du tourisme et du transport. Il
semble que l'amélioration du réseau soit un perpétuel recommencement.
[Traduction]
Excusez-moi, monsieur le président. Nous pensions avoir vingt minutes pour notre exposé.
Le président: Monsieur Pomerleau, je dois vous féliciter. Vous vous en êtes très bien tiré. Je vous remercie de votre patience.
Je suis conscient du temps et de l'attention que vous avez accordés à cette question. Je sais que les membres ont des questions. Je vais commencer par M. Jordan.
M. Jordan: En ce qui concerne la détérioration de l'état de nos routes, vous affirmez que c'est un problème national, que ce n'est pas simplement un problème québécois.
Vous appuieriez, je suppose, un nouveau programme d'infrastructures ou alors proposeriez-vous que le programme porte un peu plus sur la construction de routes? Voilà ma deuxième question.
Ma troisième question porte sur le financement de l'entretien, puis le financement de la construction de nouvelles routes. Un autre témoin a proposé aujourd'hui qu'une partie de la taxe d'accise que nous percevons actuellement sur le carburant soit consacrée à la construction de nouvelles routes et à l'entretien des routes.
Personne n'aime payer plus de taxes et d'impôt, mais s'il était démontré que cette taxe supplémentaire servait explicitement à la construction de routes ou à l'entretien des routes - et elle devrait être tout à fait transparente - appuieriez-vous l'idée d'une taxe d'accise supplémentaire de 2 cents le litre, disons, comme on l'a proposé?
J'ai regroupé deux ou trois questions.
M. Pomerleau: Je répondrai d'abord à votre deuxième question. Ce que nous affirmons, et ce que nous disons aussi au ministère québécois, le ministère des Transports du Québec, c'est que nous voulons un fonds routier - pas nécessairement une nouvelle taxe mais un fonds routier créé à partir de la taxe actuelle. Nous devons cependant nous assurer que le fonds sera efficace et permettra d'améliorer l'infrastructure routière.
M. Jordan: Mais vous n'appuieriez pas une nouvelle taxe, une taxe supplémentaire.
M. Pomerleau: Pas nécessairement une nouvelle taxe - et la même chose au niveau fédéral.
[Français]
M. René Brassard (directeur général, Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec): Pour la première question, la réponse est oui. L'Association des constructeurs de routes et grands travaux demande un deuxième programme d'infrastructure. Nous avons fait des représentations au niveau fédéral et au niveau du Québec pour promouvoir un deuxième programme d'infrastructures.
Nous croyons qu'un deuxième programme d'infrastructures devrait tenir compte d'une politique routière au pays. Cette politique-là a déjà été développée dans les années 1990, de 1988 à 1990, et elle aborde très bien toute la méthode de standardisation du réseau routier canadien.
Nous disons que cette politique routière qui avait été mise sur pied il y a cinq ans devrait faire partie du prochain programme d'infrastructures.
[Traduction]
M. Jordan: J'ai une brève question.
Le président: Très brièvement.
M. Jordan: Le problème cependant, c'est que le programme précédent était réparti en tiers. Beaucoup de grandes routes du pays ne relèvent pas des municipalités. Elles relèvent clairement des provinces. C'est pourquoi j'ai proposé...
Je ne crois pas que l'ancien programme d'infrastructures, tel qu'il existait... Les municipalités participaient parce que les coûts de la construction de routes au niveau local étaient acceptables, mais si vous ne le changez pas, je ne pense pas que beaucoup de municipalités seront enthousiastes. Elles pensent que les routes provinciales ne relèvent pas de leurs compétences et qu'elles ne devraient pas s'en mêler.
Il y aura des problèmes si le programme ne change pas, si vous pensez qu'il servira à l'amélioration des routes, à la construction de nouvelles routes ou à l'entretien des routes existantes.
Le président: Merci.
[Français]
M. Brassard: Pour ce qui est de la question des taxes, nous croyons que le gouvernement canadien devrait se tourner davantage vers le réseau routier. Dans le domaine portuaire, on applique beaucoup le principe de l'utilisateur-payeur. Nous souhaiterions que le gouvernement fédéral applique aussi ce principe aux routes et retourne ainsi plus d'argent au réseau routier.
Le gouvernement fédéral perçoit déjà 5 milliards de dollars par année. Je suis certain que les automobilistes accepteraient de payer une nouvelle taxe routière s'ils avaient l'assurance que cette taxe-là sera réservée à l'entretien et à la construction des routes.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Dubé.
[Français]
M. Dubé (Lévis): Pour une fois, je vais être à l'aise parce que je suis sûr d'être compris immédiatement. Je vous remercie d'être venus faire votre présentation. Je sais que votre présentation est appuyée par le Club automobile du Québec qui compte, comme vous le savez, beaucoup de membres. J'ai eu la chance d'aller siéger au sein du même comité à Winnipeg et à Thunder Bay, et j'ai entendu plusieurs témoins tenir à peu près le même discours que le vôtre.
En ce qui concerne les taxes, vous avez répondu à la question de M. Jordan en parlant essentiellement de 2 874 kilomètres de routes qui, selon vous, représentent la partie du réseau routier national canadien qu'il faudrait restaurer ou reconstruire, ce qui est beaucoup. J'aimerais que vous nous donniez des précisions, parce que cela va sûrement satisfaire les gens du Témiscouata qui espèrent une autoroute à quatre voies entre Rivière-du-Loup et Edmundston. Et il y a sûrement d'autres endroits où les gens attendent aussi.
Quelles seraient, d'après vous, les priorités à établir?
Je vais en profiter pour vous poser une deuxième question tout de suite. Si le ou les gouvernements sont réticents à adopter une nouvelle taxe, quel est votre point de vue concernant la possibilité de péages? Par exemple, quand on survole Toronto, on peut voir toute une série d'autoroutes, à l'intérieur de Toronto, qui sont maintenant privées et à péage, et pour lesquelles le gouvernement a une entente pour une période de 40 ans. Je voudrais connaître votre opinion à ce sujet.
M. Pomerleau: Pour répondre à votre première question, je dirais qu'on essaie de travailler sur deux plans, parce que vous avez vu que le taux de déficience était de 24 p. 100, ce qui est inquiétant puisque le taux acceptable est d'à peu près 10 p. 100. Dans un premier temps, on pourrait refaire et réparer ces routes et dans un un deuxième temps, entretenir et améliorer le réseau routier, en incluant de nouvelles constructions.
La première priorité est donc de combler cet écart entre 24 et 10 p. 100, qui est inquiétant, parce que passé ce taux-là, l'infrastructure est attaquée et les coûts de réfection sont de quatre à cinq fois plus élevés que si on s'en occupe pas à temps.
Pour la deuxième question, nous avons présenté, dans un autre mémoire présenté au ministère des Transports du Québec, une série de programmes de financement possibles des fonds routiers, et il avait été aussi question de postes de péage. Il est certain qu'il faut procéder à des installations de machines, mais c'est plus facile qu'avant. Mais cela peut venir dans un deuxième temps du fait qu'on peut mettre en place des systèmes plus simples au niveau du financement.
M. Dubé: Et comment voyez-vous la privatisation des travaux de réfection des routes?
M. Brassard: On est très ouverts aux propositions.
M. Dubé: On a parlé de privatiser le Port de Québec, par exemple, ce matin.
M. Pomerleau: Nous pensons que la création de sociétés mixtes va se faire et nous sommes d'ailleurs très favorables à cette idée.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Dubé.
Permettez-moi d'invoquer les prérogatives de la présidence pour vous poser deux brèves questions.
Le modèle américain, qui est souvent cité en exemple pour montrer la façon dont nous devrions procéder, a créé un fonds en fiducie, une fiducie nationale ou un fonds, où pourrait être versée la taxe routière et qui permettrait de financer le réseau routier national. Il a été question ici de la création d'un organisme fédéral-provincial qui pourrait administrer le fonds et recevoir les taxes affectées à cette fin et s'en servir pour améliorer le réseau routier national. Appuieriez-vous ce modèle ou quelque chose du genre?
[Français]
M. Brassard: Le gouvernement du Québec a mis sur pied cette année un fonds routier qui vise essentiellement à rendre transparentes les sommes reçues et les sommes dépensées. C'est un peu sur le modèle du Highway Fund américain. Je pense que l'objectif, lorsqu'on parle de fonds alloués au réseau routier, c'est d'être transparent concernant les coûts, les entrées et les sorties de fonds.
Le gouvernement du Québec a fait un pas dans cette direction en créant ce fonds dans son budget de cette année. Nous pensons que c'est une bonne façon de faire, et notre mémoire recommande justement au gouvernement canadien de mettre sur pied un fonds routier de cette nature.
[Traduction]
Le président: Je ne prendrai pas le temps d'entrer d'examiner davantage ces questions maintenant. Nous sommes pressés par le temps. Je lirai votre mémoire et je vous remercie beaucoup. Merci d'avoir pris le temps de venir témoigner.
Les prochains témoins représentent la MRC de Témiscouata. Il s'agit d'une municipalité régionale de comté.
Émilien Beaulieu.
[Français]
Il n'est pas ici?
M. Dubé: Si, ils sont là.
[Traduction]
Le président: Bon après-midi. Bienvenue. Nous vous prions de limiter vos remarques à une dizaine de minutes afin que nous puissions vous poser des questions.
Monsieur Beaulieu, vous êtes la personne indiquée sur notre ordre du jour. Pouvez-vous présenter votre délégation et commencer l'exposé?
[Français]
M. Émilien Beaulieu (président de la MRC de Témiscouata): Je m'appelle Émilien Beaulieu et je suis président de la MRC de Témiscouata. Je vous présente Paulette Griffin, maire de Cabano; Jean-Guy Lachance, maire de Ville Dégelis; et France Dionne, députée de Kamouraska - Témiscouata à l'Assemblée nationale du Québec.
C'est avec empressement que nous avons accepté l'invitation du député de Kamouraska - Rivière-du-Loup, M. Paul Crête, à présenter un mémoire devant ce Comité permanent des transports de la Chambre des communes. Notre empressement vient de l'objectif de ce comité d'étudier la loi C-44 et de tenter de définir les moyens par lesquels notre système national de transport pourrait mieux servir, appuyer et promouvoir le commerce et le tourisme aux niveaux national et international.
Par opposition à l'état de dégradation de ce réseau, le résumé d'études du gouvernement fédéral nous indique les effets positifs qu'aurait une amélioration significative du réseau routier. Soulignons qu'une augmentation de 10 p. 100 de la valeur des immobilisations publiques d'un réseau routier aurait pour effet d'augmenter de 0,8 p. 100 à 6 p. 100 la production des industries productrices de biens. Ces mêmes industries productrices de biens pourraient aussi épargner, au niveau de la logistique et de la production, jusqu'à 20 p. 100 en termes de frais de transport, de fiabilité des temps de voyage et de réduction d'inventaire. Il est donc indéniable qu'investir dans le réseau routier national a un impact majeur en termes de croissance économique et de développement régional.
Au Témiscouata, nous nous sentons directement concernés par la route 185, puisqu'elle fait partie intégrante du réseau routier transcanadien qui traverse tout le pays d'est en ouest. Cette portion de la route Transcanadienne prend sa source à l'est de la ville de Rivière-du-Loup, à la terminaison de la route 20, et traverse tout le territoire de la Municipalité régionale de comté de Témiscouata pour se terminer à la convergence des limites du territoire de la municipalité de Dégelis et de la province du Nouveau-Brunswick en direction des Maritimes.
Pour nous, dans la région du Témiscouata, se pencher sur le projet de loi C-44 signifie insister sur deux problématiques majeures qui caractérisent l'état actuel de la route 185: une progression constante du transport lourd et la multiplicité de secteurs «accidentogènes» qui affectent sous différents aspects la sécurité publique et les développements économique, touristique et régional.
Mme Paulette Griffin (maire de Cabano): La progression constante du transport lourd: Des études récentes sur les tendances et les prévisions du transport des marchandises nous révèlent que le camionnage lourd risque de devenir un secteur à forte croissance à court et à moyen termes, de 1993 à 1999, avec un taux de croissance annuel de 4,7 p. 100, et de connaître un taux de croissance de 2,3 p. 100 pour la période allant de 1999 à 2005. Le trafic transfrontalier et, dans une moindre mesure, les mouvements interprovinciaux devraient connaître des taux similaires.
Il faut comprendre qu'on ne peut plus compter en région sur le transport par rail pour compenser une grande affluence du transport lourd. L'entreprise ferroviaire du Canadien National, sur notre territoire, a récemment été démantelée et est maintenant utilisée pour des fins récréo-touristiques.
Dans l'Est du Québec, le nombre de camions en circulation a progressé plus vite que la moyenne au Québec. Par exemple, de 1988 à 1994, le nombre de camions et de tracteurs routiers a augmenté de 12,6 p. 100 pour le Bas-Saint-Laurent en comparaison de 9,7 p. 100 pour l'ensemble du Québec. Cette situation se reflète sur la route 185 où l'on a enregistré, en 1993, de 714 à 1 344 camions par jour, soit une proportion représentant de 15 à 20 p. 100 de tout le trafic.
Tout récemment, d'août à septembre 1996, on a compté de 500 à 1 500 camions par jour partant de Saint-Antonin, tout près de Rivière-du-Loup, et allant jusqu'à Ville Dégelis, pour une moyenne de 1 200 véhicules par jour.
Je vais vous parler de la multiplicité des facteurs accidentogènes. Dans une perspective de sécurité publique, il nous apparaît tout aussi important que des mesures correctionnelles exceptionnelles soient apportées à la route 185 pour réduire le nombre de points d'accès et adoucir certaines courbes.
Je vais vous vous nommer les principaux endroits où on trouve des anomalies importantes: premièrement, la jonction de la route 185 et de la route 295 à Ville Dégelis; ensuite, la jonction de la route 185 et de la rue Commerciale à Cabano et le poste de pesée des camions; la jonction de la route 185 et de la route de l'Église à Notre-Dame du Lac; la jonction de la route 185 et de la route 291 à Saint-Honoré; la jonction de la route 185 et de la rue Raymond à Saint-Louis-du-Ha! Ha!; la jonction de la route 185 et des premier et deuxième rangs de Saint-Antonin.
Il n'est pas exagéré d'affirmer que la plupart de ces jonctions nécessitent des mesures de correction urgentes.
M. Jean-Guy Lachance (maire de Ville Dégelis): Il s'agit donc de définir les caractéristiques générales ou spécifiques que peut comporter un tronçon routier, à savoir les circuits touristiques à valoriser, les paysages à mettre en valeur, les corridors industriels et commerciaux à protéger et les aménagements structurels à effectuer pour assurer la sécurité publique et rendre la route carrossable.
Il faut donc s'assurer que l'affectation des sols aux abords du réseau routier soit compatible avec les projets d'amélioration dudit réseau. Dans ce contexte, le schéma d'aménagement du territoire des municipalités régionales de comté et les règlements d'urbanisme locaux deviennent des outils indispensables pour atteindre ces objectifs.
Il nous apparaît donc essentiel qu'un vaste projet de réfection de la route 185 soit mis sur pied pour: régler les problèmes de capacité portante et rendre la route carrossable; régler les problèmes de sécurité publique et d'accidents; favoriser la pénétration au Témiscouata et dans le Bas-Saint-Laurent des touristes de l'Ontario, des Maritimes et des États-Unis; permettre le transport efficace des biens de consommation produits au Québec jusqu'à leurs marchés respectifs.
Mme France Dionne (députée de Kamouraska - Témiscouata à l'Assemblée nationale du Québec): Une étude d'opportunité de la direction régionale du ministère des Transports du Québec à Rimouski est en cours. Elle devrait être finalisée au plus tard au début de 1998 et des collaborations sont envisagées entre les gouvernements du Québec et du Nouveau-Brunswick pour la prolongation de l'autoroute à quatre voies qui est financée en partie par le gouvernement fédéral.
Nos recommandations: En conséquence de ce que nous venons d'exposer et de l'étude d'opportunité ayant lieu sur notre territoire, considérant bien entendu les coûts qu'un tel projet suscitera et considérant aussi les objectifs poursuivis par le Comité permanent des transports de la Chambre des communes, nous recommandons:
Que le gouvernement fédéral reconnaisse comme prioritaires l'aménagement et la réfection de la route 185, route dont les deux paliers de gouvernement reconnaissent le statut de route Transcanadienne, en considération des problèmes reliés au camionnage et à la sécurité publique, pour ainsi mieux servir et appuyer le développement économique et touristique de la région du Québec et du Nouveau-Brunswick;
Que le gouvernement fédéral perpétue les contributions financières aux provinces pour l'amélioration du réseau routier transcanadien, autant pour les réseaux routiers existants que pour les nouveaux réseaux;
Que le gouvernement fédéral évite de créer une distorsion économique entre les différentes régions du Canada en instaurant un principe d'équité devant prévaloir dans le transfert des subsides aux provinces;
Que le gouvernement fédéral perpétue la recherche et le développement dans le domaine routier afin d'assurer une plus grande sécurité routière, sécuriser le transport des matières dangereuses, soutenir le développement régional et touristique et favoriser l'innovation technologique dans la réfection, l'entretien et le développement des infrastructures routières.
En terminant, nous ne pouvons que remercier le député Paul Crête de Kamouraska - Rivière-du-Loup d'avoir informé la MRC de Témiscouata de telles audiences, et ce comité d'avoir pris la peine de nous entendre. Soyez assurés de notre collaboration pour tout complément d'information relatif aux éléments contenus dans ce mémoire.
[Traduction]
Le président: Nous aussi, nous aimerions remercier Paul Crête de vous avoir invités. Paul.
[Français]
M. Crête: Je vous remercie de votre présentation. Je voulais, dans cette consultation sur les relations entre le transport, le commerce et le tourisme, démontrer par des exemples que la route transcanadienne avait besoin d'investissements. Je trouve qu'un exemple concret comme celui-ci est intéressant parce qu'il nous montre des aspects de la sécurité mais aussi du tourisme et des transports de toutes sortes.
On a eu, ce matin, une présentation de la Ville de Québec qui nous disait que la voie vers les Maritimes devait être améliorée, ce qui confirme bien ce que vous dites.
Je voudrais vous demander si vous seriez favorables, en tant qu'intervenants régionaux, à ce que le gouvernement fédéral accepte, par exemple, de suivre la recommandation du Club automobile du Canada, qui dit que le fédéral devrait consacrer au réseau routier pancanadien deux cents sur chaque dix cents qu'il perçoit en taxes sur l'essence.
Deuxièmement, pensez-vous qu'il serait intéressant d'avoir, dans un nouveau programme d'infrastructures, un volet particulier pour le réseau pancanadien? Est-ce que ces deux idées vous semblent intéressantes, monsieur Beaulieu?
M. Beaulieu: Tout à fait. C'est très important. Ce qu'on veut faire reconnaître principalement dans notre mémoire, c'est que la portion de route qui relie Rivière-du-Loup à Edmundston, au Nouveau-Brunswick, a toujours été considérée comme faisant partie du réseau transcanadien parce que c'est par là que les gens passent pour se rendre dans les Maritimes.
C'est également par là que les gens passent pour aller des Maritimes en Ontario en traversant le Québec. C'est si important que nous appuierons toujours un programme pour que ce tronçon de route soit reconnu comme tel, peu importent les mesures qui vont être prises pour nous aider à l'améliorer, que ce soit par une redevance qui nous est due et qui pourrait nous être versée par le biais de n'importe quel programme.
Mme Griffin: Je voudrais renchérir là-dessus. Je crois que c'est une idée très intéressante, car si on consacrait 2 cents de chaque 10 cents pour l'amélioration de ces tronçons de route transcanadienne, ce serait important aussi bien pour les Maritimes que pour le Québec et le reste du pays.
Si on regarde le réseau routier des Maritimes tel qu'il est actuellement, il y a des routes à deux voies et d'autres à quatre voies. Mais la portion de route entre Edmundston et Rivière-du-Loup, c'est-à-dire 120 kilomètres environ, n'a que deux voies. Or, le transport lourd en provenance des Maritimes est énorme et il serait important qu'on puisse avoir de l'argent pour faire les améliorations nécessaires.
M. Crête: J'ai juste une dernière information pour les membres du comité. C'est exactement le même trajet que celui du réseau de Gaz Métro, si l'Office national de l'Énergie se décide à compléter un réseau gazier vers la Nouvelle-Écosse.
Mme Dionne: J'aimerais ajouter qu'en ce qui concerne le programme d'infrastructures, il est certain qu'il y a beaucoup de discussions en cours. Je dois dire que le programme d'infrastructures préconisé a été très apprécié dans le Bas-Saint-Laurent et dans tout le Québec.
Bien sûr, nous espérons qu'ils vont pouvoir continuer et qu'il y aura même une deuxième phase. Mais je crois qu'il faudrait regarder de très près les travaux majeurs comme ceux qui doivent être effectués sur ce tronçon qui est une partie de la Transcanadienne.
J'aimerais également ajouter que Transports Canada réfléchit sur la construction d'un réseau intercontinental en Amérique du Nord. Le fait d'investir dans la Transcanadienne, qui est le réseau pancanadien, permettrait de relier, dans ce futur réseau intercontinental, une grande partie du Québec et les provinces Maritimes, qui pourraient se joindre à la route 95 du Maine, ce qui permettrait un développement économique beaucoup plus poussé de l'est du Québec, des provinces Maritimes et également du Maine.
Je voulais porter cela à votre attention puisque vous allez sûrement avoir à étudier ce dossier et que ce serait probablement faire d'une pierre deux coups que de prévoir quelques sommes d'argent pour ce réseau intercontinental.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Gouk.
M. Gouk: Merci, monsieur le président.
Je n'ai qu'une question. J'appuie bien des déclarations du comité. J'ai d'ailleurs rédigé la politique de notre parti qui présente ces solutions.
Mais j'ai une question, que j'adresserais principalement à Mme Dionne. Je vous ai écoutée donner les conclusions du comité... et votre liste de souhaits, si je peux dire, ainsi que vos dernières observations. Par curiosité, j'aimerais savoir quel parti vous représentez.
Mme Dionne: Je suis du Parti libéral.
M. Gouk: C'est intéressant. Merci.
M. Keyes: C'est assez clair pour vous, Jim?
M. Gouk: Oui. Cela me plaît toujours de voir des Libéraux et des Réformistes trouver un terrain d'entente.
Le président: Monsieur Gouk, je pensais que c'était l'évidence même.
M. Gouk: J'essaie de «réformer» les Libéraux.
Le président: Je pourrais peut-être poser la question que M. Gouk avait vraiment en tête. On a discuté des taxes réservées à une fin particulière. On avance actuellement le chiffre de 2 cents, soit 1 cent par palier de gouvernement. Pour le réseau routier national - pas les autres routes du Québec, simplement le réseau national - une possibilité serait que chaque palier de gouvernement... La province verserait jusqu'à 2 cents de sa taxe sur l'essence et le gouvernement fédéral ferait de même. Ils créeraient un fonds qui serait administré par un organisme indépendant des deux gouvernements, même s'il y aurait une certaine coopération. Ce fonds servirait à l'amélioration du réseau national, d'un océan à l'autre.
Pensez-vous qu'un tel mécanisme serait appuyé dans la région?
[Français]
Mme Griffin: Je pense que ça n'a pas été vérifié auprès du gouvernement provincial. Je sais que le ministère des Transports est quand même concerné par la situation du Québec et conscient des problèmes que nous connaissons dans notre territoire. On doit y apporter des corrections et je pense qu'on pourrait négocier et arriver à des projets réalisables.
Mme Dionne: Je voudrais ajouter que, compte tenu de l'exemple qu'on vient de vous donner et du fait qu'il faut faire des corrections majeures, les gens seraient d'accord pour contribuer à un fonds qui serait spécialement destiné à la construction et à la réfection des routes.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Cullen.
[Français]
M. Cullen: Je vous remercie beaucoup pour votre présentation. Comme vous dites dans votre mémoire, l'amélioration de cette route coûtera très cher. À votre avis, est-ce que le secteur privé envisagerait de participer au financement des travaux de cette route?
Mme Dionne: Jusqu'à maintenant, les compagnies privées qui sont intéressées par un investissement dans des réseaux autoroutiers ou autres, le font dans les endroits où il y a un gros achalandage de voitures, près des grands centres comme Montréal, par exemple. Dans notre région, cela susciterait moins d'intérêt pour des compagnies privées. Mais même dans les grands centres, ces compagnies attendent la réponse du gouvernement du Québec. La question est à l'étude en ce moment, au Québec.
Mme Griffin: Il faudrait peut-être vérifier cela auprès des grandes entreprises routières qui utilisent beaucoup l'autoroute pour faire le transport des marchandises. Peut-être que ces compagnies-là aimeraient bien rouler sur des routes plus accessibles et plus confortables pour le transport des marchandises. Il faudrait considérer tout cela et aller poser des questions à toutes ces grandes entreprises.
M. Cullen: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup. Je vous remercie de nous avoir consacré du temps aujourd'hui.
Une fois de plus, Paul, merci beaucoup. Je suis très heureux de voir que vous avez invité une Libérale. Je pense que c'est très bien. Ensemble, nous pouvons changer la vie de Paul.
[Français]
M. Crête: Pour pouvoir parler sérieusement de ces projets, il faudrait dégager des consensus au-delà des positions partisanes, parce qu'il va sûrement falloir passer par la voie du partenariat, quel que soit le choix de l'avenir du Québec.
[Traduction]
M. Keyes: L'argent devra provenir des goussets de tous les Canadiens.
Le président: Merci.
Nous entendrons maintenant, de la Ville de Lévis, Denis Guay et Gilles Lehouillier. Vous avez une dizaine de minutes pour votre exposé, puis nous vous interrogerons.
Bienvenue. Vous pouvez commencer dès que vous êtes prêts.
[Français]
M. Gilles Lehouillier (conseiller municipal, Ville de Lévis): Merci.
Nous tenons tout d'abord à remercier les membres de la commission d'avoir accepté de nous entendre malgré le délai très court auquel nous étions confrontés.
Nous vous demanderons d'excuser le maire de la ville de Lévis, M. Denis Guay, qui est en convalescence. Mais j'ai discuté avec lui ce matin encore de notre mémoire et je peux vous dire que c'est un point de vue qui est partagé par l'ensemble des élus de la Ville de Lévis. La Ville de Lévis est issue d'un regroupement de municipalités et a une population de 42 000 habitants.
La Ville de Lévis est directement interpellée par les projets de développement futurs du Port de Québec puisqu'elle dispose, sur son territoire, du seul site à grand gabarit encore disponible dans la région métropolitaine de Québec pour l'aménagement d'une zone industrielle et portuaire.
En ce sens, il apparaît important aux élus de Lévis et à son Conseil municipal de faire part de leurs doléances à l'égard des propositions qui sont contenues dans le projet de loi C-44, sur lequel portera essentiellement notre intervention.
De façon particulière, notre présentation va tourner autour de deux aspects du texte de loi: la composition du conseil d'administration des administrations portuaires et les capacités et pouvoirs qui seront dévolus à ces administrations.
Bien que nous ne soyons pas directement concernés par le projet de loi C-58 modifiant la Loi sur la marine marchande, nous avons considéré cette occasion comme propice pour vous entretenir également de certaines considérations ayant trait à l'avenir de la construction navale au Canada en général et à l'avenir du chantier MIL Davie, connu maintenant sous le nom de Industries Davie inc., de Lévis.
[Traduction]
Le président: Excusez-moi. Je déteste interrompre les gens, mais je note que l'exposé que vous êtes en train de lire compte treize pages, à simple interligne. Je pense que vous aurez besoin de tout le temps que nous pouvons vous consacrer si vous le lisez en entier. Vous êtes libre de le faire, mais alors, il ne restera plus de temps pour un échange avec les membres, puisque nous n'avons que 30 minutes par témoin. Vous pourriez peut-être le résumer. Mettez l'accent sur les aspects précis que nous devrions examiner, selon vous, afin que les membres puissent choisir ceux sur lesquels ils veulent insister, si c'est possible. Merci.
[Français]
M. Lehouillier: Je vais essayer de résumer le document. Je passe au point deux: le projet du Parc industriel et portuaire Québec-Sud.
Dans ce dossier-ci, il est important de retenir que l'expansion du Port de Québec, au niveau de la rive sud, passe éventuellement par le développement d'une zone industrielle et portuaire qui est située à l'extrême est du secteur de Lévis, dans l'ancien secteur de Lauzon.
Il faut dire que l'ensemble de la zone visée couvre 15 p. 100 de la superficie du territoire de la Ville de Lévis, ce qui est quand même énorme parce que, comme vous le savez, on est issu du regroupement de trois municipalités. Alors, ce qui nous motive, par rapport au projet de loi qui est sur la table, c'est qu'il est impératif que des infrastructures portuaires soient tôt ou tard aménagées à cet emplacement par le Port de Québec et que les terrains stratégiques soient le plus rapidement possible eux-mêmes sécurisés.
Le Port de Québec nous a confirmé avoir un intérêt à cet égard, mais il y a une insuffisance de moyens financiers pour réaliser les études de faisabilité technique.
Les installations portuaires, on le sait, sont des infrastructures qui sont généralement coûteuses, dont la construction peut être complexe et qui nécessitent la réalisation d'un grand nombre d'études préalables, notamment en raison de la mixité de leurs fonctions. Il en résulte des coûts élevés et un cycle portuaire de cinq à huit ans en moyenne.
Notre premier message est donc de vous dire qu'au niveau de la politique gouvernementale, il y a une entente auxiliaire Canada-Québec sur le développement industriel, mais il n'y a aucun financement qui est disponible pour l'aménagement d'infrastructures prévisionnelles.
Nous disons donc, dans un premier temps, qu'il va falloir que, dans la politique nationale, le gouvernement fédéral puisse planifier son développement à long terme. En effet, si on prend comme exemple l'expansion du Port de Québec, dans la région de Québec, on peut voir qu'actuellement, c'est la Ville de Lévis qui assume seule la responsabilité de «geler» un territoire complet qui correspond à 15 p. 100 de son territoire en attendant que les gens du Port de Québec aient un peu d'argent et se décident à développer l'expansion portuaire.
Cette expansion peut ne pas être jugée nécessaire à court terme - notre ville en est consciente - , mais à moyen et à long termes, elle sera essentielle. Dans cette perspective et dans le cadre de tout amendement au projet de loi, il faudra que le gouvernement fédéral soit en mesure de définir des grandes orientations de base et puisse continuer à soutenir les ports dans l'installation de certains équipements et infrastructures.
N'oublions pas que les gouvernements eux-mêmes ont mis sur pied des lois en matière d'environnement, des lois qui entraînent des délais énormes et exigent beaucoup d'argent uniquement pour faire des études environnementales.
Le problème que nous avons ici, c'est que l'ensemble de la population de Lévis nous a soutenus pour la zone industrielle et portuaire lorsque nous avons fait le plan d'urbanisme de la ville, mais on ne sait pas trop où sont les bons terrains.
Il ne faut pas oublier que la défunte Société interport, qui avait la mission de développer la zone industrielle et portuaire, avait acheté les mauvais terrains, ce dont on s'est aperçu 10 ans plus tard.
Vous vous souvenez que la Société interport a été abolie. On a créé une Société de promotion économique pour l'ensemble du Québec métropolitain et on a donné un petit lot de consolation en créant une petite société de développement industriel et portuaire Québec-Sud pour gérer les terrains de la Société interport.
Dans notre mémoire, nous vous recommandons d'éliminer les structures superflues et d'éliminer en particulier cette structure qui gobe des salaires inutilement et sans laquelle la ville pourrait facilement gérer les terrains qui ont été achetés à mauvais escient, soit en négociant avec le Port de Québec la possibilité de vendre ces terrains, soit en faisant de la promotion et en rachetant de bons terrains.
En ce qui concerne ce projet de loi, nous pensons qu'il faudrait avoir une perspective d'avenir pour les grandes orientations. Le financement public de base est essentiel à l'aménagement d'infrastructures lourdes. Il ne faut pas l'oublier.
Comme nous revoyons notre schéma d'aménagement en 1998, il est clair que la population va nous dire qu'elle en a assez que 15 p. 100 de notre territoire soit «gelé» et qu'elle veut connaître les intentions gouvernementales et portuaires.
Il ne faut pas oublier une chose: en l'an 2000, sera-t-il possible de continuer à faire du dragage entre Québec et Montréal, quel type de navires aurons-nous et est-ce que Québec ne deviendra pas le dernier lieu où on pourra s'arrêter pour faire du transport maritime? Dans le but de résoudre toutes ces questions, nous demandons que soient développées des orientations d'ensemble à cet égard.
Dans le cas du Parc industriel et portuaire Québec-Sud, il est impossible, sans financement public, de sécuriser les terrains stratégiques qui seront nécessaires à la réalisation du projet. On parle de 4 millions de dollars uniquement pour réaliser les études de faisabilité technique, architecturale et environnementale. Ce n'est pas la Ville de Lévis qui peut payer ça et ce n'est pas à nous de le faire.
Deuxièmement, en ce qui concerne la longueur du cycle portuaire, il faut considérer l'importance des superficies de terrain. Il ne faut pas oublier que, pendant 15 ans, nous avons «gelé» le territoire. Nous ne sommes pas allés jusqu'à appeler cela une zone industrielle et portuaire car nous aurions été poursuivis pour expropriation déguisée. Nous avons donc mis une affectation rurale, mais la patience de la population a atteint ses limites. Il faudra qu'il se passe quelque chose de ce côté-là.
Nous attendons donc que ce projet s'enclenche, mais en 1998, nous allons statuer à nouveau. Nous ne voulons pas donner la respiration artificielle à la société qui gère ça depuis quatre ans et nous avons décidé de lui donner un dernier délai pour agir dans ce dossier.
Pour terminer au sujet de cette société, la société qui a été créée pour remplacer la Société interport n'est absolument plus représentative du milieu. Voilà donc pour vous une bonne occasion, au niveau du gouvernement fédéral, de vous débarrasser de structures inutiles.
Vous en parlez, vous faites une réforme et on est capables de gérer tout ça. Actuellement, on paye des salaires pour rien. Je peux vous dire bien franchement qu'il y a des gens installés quelque part, on ne sait trop où, qui représentent on ne sait trop qui, et qui sont nommés par les gouvernements on ne sait trop comment. On trouve qu'il est temps de se débarrasser de ça.
Donnez-nous les terrains à gérer et nous négocierons avec le Port de Québec pour acheter les bons terrains. Les mauvais terrains ont été achetés. Déjà, on a fait subir à une population le contrecoup de l'achat de mauvais terrains. La population veut les racheter et la ville peut parfaitement s'occuper de la promotion alors que les gens de la société actuelle ne sont pas capables de le faire. Je regrette, mais ce n'est pas leur mandat, leur mission.
Je vais parler maintenant de la représentation des conseils d'administration. Nous aurions préféré qu'un plus grand nombre de sièges soit attribué aux représentants des municipalités. Dans la perspective où le projet de loi vise que l'on prenne davantage en considération les priorités et les besoins locaux, nous pensons que les municipalités sont les mieux placées pour refléter les besoins et les priorités.
La Ville de Lévis aurait donc souhaité pouvoir disposer d'un siège à part entière au conseil d'administration de la future administration portuaire de Québec. Actuellement, je tiens à vous dire que la ville s'entend très bien avec les autorités portuaires.
Mais les autorités portuaires sont conscientes qu'à moyen terme, il faut envisager d'acheter les terrains sur la rive sud et c'est pourquoi nous aimerions avoir une place prépondérante et au moins un siège.
Qu'on le veuille ou non, et là je fais une considération d'ordre général, à l'heure actuelle, il n'y a plus un seul type d'activités, dans une collectivité, qui puisse être développé en catimini sans consulter la population. Si on n'arrive pas à des consensus, il n'y a plus rien à faire. Je pense que le Port de Québec a fait cette expérience dans le passé. Nous savons tous qu'il faut absolument consulter la population.
Il faut donc que l'État soit capable de nous donner les grandes orientations en matière portuaire, à savoir où le gouvernement fédéral veut cibler ses interventions et quelles sont les chances de réussite dans l'avenir. Nous disons qu'il faut donner aux communautés les moyens de prendre en main les exploitations portuaires.
Nous souhaitons donc que la Ville de Lévis soit désignée comme telle dans les lettres patentes de l'APC de Québec qui seront délivrées en temps et lieu par le ministre. Nous apprécierions aussi, en fonction de ce que nous avons évoqué plus tôt, que le projet soit associé à la rédaction des lettres patentes, en participant au travaux du comité qui sera chargé de soumettre le projet au ministre.
Nous avons relevé, à la lecture du projet de loi C-44, plusieurs contraintes qui risquent également de handicaper, à terme, le développement portuaire de la région de Québec: ce sont les limites que le ministre souhaite imposer aux pouvoirs des administrations portuaires, notamment en termes de capacité d'emprunt.
En ce qui concerne la capacité d'emprunt, le législateur se propose d'interdire aux administrations portuaires de grever d'une sûreté les biens que celles-ci géreront ou détiendront, sauf pour donner en gage une somme égale à leurs revenus. Ce concept est contraignant et ces revenus sont, par définition, volatiles.
Il y a lieu de revoir cette disposition, éventuellement en assujettissant toute sûreté ou hypothèque du genre à l'autorisation préalable du ministre.
Également, nous avons relevé que les administrations portuaires ne pourront aliéner les immeubles fédéraux dont la gestion leur a été confiée, sauf à des fins spécifiques telles des emprises de rues ou des servitudes. Il s'agit là d'une position que nous partageons.
Nous sommes d'accord qu'on fasse en sorte qu'on n'ait pas à aliéner les immeubles fédéraux, parce que les infrastructures actuelles des activités portuaires ont été acquises par le gouvernement fédéral avec nos taxes et nos impôts. Le gouvernement fédéral doit donc veiller à ce que ces immeubles puissent rester propriété publique.
Pour ce qui est des dettes accumulées par les autorités portuaires, nous pensons qu'à l'instar de ce qui s'est fait dans le domaine aéroportuaire, les dettes imputables aux dépenses d'immobilisation des ports devraient être effacées par le gouvernement fédéral avant leur transfert aux administrations portuaires.
Le gouvernement devrait cependant s'assurer que chacune des administrations portuaires concernées soit placée sur un pied d'égalité à ce niveau. On devrait donc veiller à éviter que les ports qui ont eu, dans le courant des dernières années, la chance de bénéficier de crédits pour effectuer des travaux d'infrastructures et qui disposent d'un outil relativement moderne et efficient ne soient avantagés par rapport aux autres.
On sait qu'il y a des ports qui ont bénéficié de subventions exceptionnelles pour l'amélioration de leurs infrastructures, ce qui n'a pas été le cas dans d'autres secteurs.
Nous sommes d'ailleurs d'avis que le financement public demeure la pierre angulaire de tout développement portuaire. Il faut donc absolument s'assurer qu'à court terme, les infrastructures lourdes aient encore une aide fédérale pour leur permettre une planification à moyen et à long termes.
En ce qui concerne la fiscalité municipale, nous sommes attentifs au débat qui a cours présentement entre les tenants d'une taxation fondée sur la valeur des immeubles et ceux qui proposent plutôt de baser celle-ci sur les services offerts.
Je n'irai pas plus loin là-dessus. Je dirai simplement que nous sommes de ceux qui sont d'accord pour que les autorités portuaires soient soumises à la réglementation municipale. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il est impensable aujourd'hui, en 1996, de faire du développement si on ne réussit pas à avoir des consensus au sein de nos populations respectives.
Pour notre part, nous avons établi le consensus à la zone industrielle et portuaire. Personne ne nous l'a demandé, mais nous avons fait un plan stratégique d'intervention. Nous avons dit au Port de Québec que nous pouvions, dans la limite de la légalité, réserver nos terrains au niveau industriel et portuaire, mais que nous n'irions pas jusqu'à faire des zones industrielles et portuaires. Il y a donc une planification à faire.
En ce qui concerne le projet de loi C-58, nous voudrions dire qu'à Lévis, il y a le plus important chantier naval de l'est du Canada, le chantier des Industries Davie inc., l'ancienne MIL Davie. On se rappellera que le Parti libéral du Canada, lors du congrès du mois de juin 1993 à Montréal, avait indiqué trois points précis touchant ce dossier:
- premièrement, convoquer un sommet national dans la première année du mandat du Parti libéral, lorsque celui-ci serait porté au pouvoir, en vue d'établir une politique maritime nationale;
- deuxièmement, doter l'industrie maritime canadienne d'avantages comparatifs compétitifs;
- enfin, favoriser la consolidation de la recherche et du développement dans ce secteur d'activités.
Force est de constater que le sommet ne s'est pas encore tenu à ce jour et que les prochaines élections fédérales arrivent à grand pas. Vous remarquerez par ailleurs que le dossier de MIL Davie et de sa relance est l'un des rares dossiers à faire autant consensus parmi les décideurs.
Il ne faut pas oublier non plus que le chantier maritime MIL Davie est le dernier grand chantier maritime avec une cale sèche d'une aussi grande importance dans le système Grands-Lacs - Saint-Laurent.
En fonction de ces enjeux, nous demandons qu'on reconnaisse la nécessité de définir, au niveau des grandes orientations, les équipements majeurs qui devraient être maintenus pour desservir au minimum les utilisateurs.
Dans le cadre de la Politique maritime canadienne, nous savons très bien que le Québec est actuellement la seule province à avoir effectué des rationalisations au niveau de ses chantiers maritimes: il n'en reste qu'un. Nous savons qu'il en existe plusieurs dans l'Est canadien et que de grands projets, tels le projet Hibernia, se termineront sous peu. Il y aura des problèmes tout à l'heure. Il faut absolument que le gouvernement se dote d'une politique maritime nationale qui va permettre aux chantiers qui sont capables de le faire de percer vraiment le marché mondial.
Vous savez également que le gouvernement du Québec a adopté une telle politique maritime qui comprend entre autres des crédits d'impôt, des programmes de garantie financière pour la construction navale, une réduction du fardeau fiscal et un congé fiscal aux marins affectés au transport international des marchandises.
Pour en revenir au projet de loi C-44, j'aimerais parler de la représentativité. Nous sommes en faveur de ces dispositions si la gestion est ramenée au niveau du milieu. Il faut qu'il y ait la représentation la plus large possible du milieu. Nous recommandons donc de limiter les nominations politiques émanant du gouvernement et d'autres instances et de s'assurer que les autorités portuaires soient le plus représentatives possible du milieu. Pour nous, c'est la garantie que ces ports vont pouvoir se développer. On dit et on répète qu'il est fini, le temps des grandes infrastructures qu'on développe sans concertation avec le milieu.
Je m'excuse de terminer cette présentation à bâtons rompus, mais nous avons fait notre possible pour résumer nos recommandations comme vous nous le demandiez.
Merci.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup. Vous avez réussi à condenser votre mémoire avec brio.
Monsieur Dubé.
[Français]
M. Dubé: Bien qu'habituellement on essaie de poser des questions précises, j'aimerais ici poser une question ouverte à M. Gilles Lehouillier, qui a longtemps été le porte-parole du comité d'action pour la MIL Davie, le plus grand chantier maritime au Québec.
Une ville comme Lévis, qui a un chantier maritime, ne peut pas faire autrement que de se sentir concernée par l'avenir maritime et l'avenir des ports. C'est évidemment très important et je loue leur travail.
Gilles, on vous a un peu bousculé dans le temps. Y a-t-il des éléments importants de votre mémoire que vous n'avez pas eu le temps de nous livrer? J'ai évidemment lu votre mémoire avec intérêt et les députés vont le relire, parce qu'à mon avis il est très bien fait. Y a-t-il des questions dont vous voudriez absolument parler? Je vous en laisse le temps.
M. Lehouillier: De fait, nous croyons qu'il faut développer une complémentarité entre les deux rives au niveau portuaire dans la région de Québec et de Chaudière-Appalaches.
Ainsi, nous croyons qu'une ville comme Lévis devrait avoir un siège au sein d'un conseil d'administration d'une telle société portuaire. Les activités portuaires devraient dorénavant regarder l'ensemble d'un territoire, tenir compte qu'il y a un chantier maritime de l'autre côté et également faire en sorte que les gens puissent être partie prenante.
Depuis quelques années, la Ville de Lévis a enclenché un processus où tout est basé sur la consultation auprès des citoyens, et je constate à la lumière des consultations publiques que nous avons menées qu'il est faux que nous sommes incapables de convaincre les gens qu'il faut du développement et qu'il faut à certains moments réserver certains terrains à des fins industrielles.
Le problème surgit lorsqu'on arrive et dit: «Voici, tel port a pris telle décision». C'est là qu'arrive le problème. Nous pensons que dans cette perspective, le gouvernement fédéral doit, même s'il confie la gestion des ports à des entreprises du milieu, continuer à donner des orientations nationales. En quoi consiste l'orientation nationale portuaire et maritime par rapport à la grande région de Québec?
Est-ce que le gouvernement fédéral, qui est propriétaire de la cale sèche de la MIL Davie, dira demain matin qu'il ferme le chantier, que c'est fini, que plus rien ne se fera dans le système Grands-Lacs - Saint-Laurent, qu'on ne réparera plus les navires et qu'on ne peut plus rien faire? Il faut regarder ces éléments.
L'autre élément auquel on est confronté, et sur lequel j'insiste parce qu'actuellement la zone industrielle et portuaire de Lauzon représente 15 p. 100 du territoire, c'est que personne ne peut nous prédire ce qui va se passer dans cinq ans. On comprend qu'on n'a pas une boule de cristal, mais il faut quand même que nous sachions un peu où nous allons pour être capables de penser à développer l'avenir. Nous ne savons pas où le Port de Québec s'en va ni où le gouvernement s'en va relativement au développement. Si on faisait disparaître la structure dont nous parlions plus tôt, ce serait déjà un pas dans la bonne direction.
Mon collègue Philippe pourrait peut-être ajouter quelque chose sur la représentativité, qui est très importante pour nous.
M. Philippe Murat (conseiller économique, Ville de Lévis): Comme le disait M. Lehouillier, idéalement, la ville de Lévis souhaiterait pouvoir disposer d'un siège à part entière. Donc, il faudrait ne pas limiter à un seul le nombre de sièges attribués aux représentants de la municipalité. Mais si jamais c'était le cas, ce que nous ne souhaitons pas, on voudrait absolument pouvoir participer aux travaux du comité qui sera chargé de rédiger les lettres patentes du Port de Québec, de la future APC de Québec.
Une chose à laquelle on tiendrait beaucoup, c'est qu'on désigne des municipalités qui seraient appelées à se concerter dans le but de désigner elles-mêmes un représentant au sein du conseil d'administration.
M. Dubé: Il reste un point dont vous n'avez pas parlé. Vous semblez penser que tout le développement du port se fait du côté de la rive nord.
Il y a un intervenant majeur, Ultramar, qui affirmait représenter quelque 25 p. 100 de l'activité portuaire du port de Québec, activité qui se faisait sur la rive sud. Cette affirmation va à l'encontre de l'argument qu'invoquent les gens de la Ville de Lévis, qui sont de l'autre côté du fleuve, en vue d'avoir un représentant ou un plus grand rôle dans l'identification d'un représentant.
Québec étant la capitale, il est presque certain que ce sera toujours Québec. La seule possibilité d'avenir pour le développement du port se trouve maintenant du côté de la rive sud. Ce sera peut-être dans un avenir lointain, mais il ne faudra pas l'oublier. Il faut déjà le planifier. Merci.
M. Lehouillier: N'oublions pas qu'un site portuaire prend de cinq à huit ans à se développer.
Si on n'enclenche pas les études environnementales dès maintenant et qu'à un certain moment le Port de Québec prend de l'expansion, comment notre municipalité sera-t-elle en mesure de réagir? Que faire d'un schéma d'aménagement de deux ans? Dix ans passeront et rien ne sera fait. Que faire?
La population viendrait nous dire d'oublier cela. On ferait tout de même du développement, mais on compromettrait irrémédiablement ainsi tout potentiel de développement. C'est sûr que nous avons désigné ce territoire zone rurale. Nous pouvons vivre ainsi jusqu'aux prochaines consultations publiques, mais je puis vous assurer que des gens viendraient nous voir au Conseil municipal et que lors de la présentation du prochain schéma, ils nous mettraient cela sur le dos parce qu'ils voudraient procéder à d'autres types de développement.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Keyes, vous avez une brève question?
M. Keyes: Je voulais demander au témoin quel pourcentage des activités portuaires se déroule à Lévis.
[Français]
M. Murat: Lévis a la chance d'avoir les quais de la compagnie Ultramar. Vous savez que c'est l'une des deux plus grosses raffineries au Québec. Sa présence fait en sorte qu'environ le quart de l'activité portuaire du Port de Québec se fait sur le territoire de la Ville de Lévis.
Comme le disait M. Lehouillier, non seulement le plus grand chantier maritime de l'Est du Canada se retrouve-t-il sur notre territoire, mais aussi la plus importante raffinerie de l'Est du Québec. Nous avons aussi le seul site portuaire dans la grande région de Québec à avoir un gabarit.
Nous avons donc plusieurs atouts à mettre en valeur.
[Traduction]
M. Keyes: Alors, le travail de ces utilisateurs portuaires à Lévis ne pourrait pas défendre les intérêts de la municipalité si le représentant de ces utilisateurs siégeait au conseil, n'est-ce pas?
[Français]
M. Murat: Il n'est pas conflictuel, mais vous avez d'abord une compagnie qui construit des navires, et ensuite vous avez les compagnies qui les utilisent.
Finalement, comme le disait M. Lehouillier, n'oubliez pas que vous avez surtout le seul site qui est encore disponible à long terme pour du développement industriel et portuaire.
La municipalité est donc la principale responsable puisque c'est elle qui est directement concernée.
[Traduction]
M. Keyes: Ce que j'essaie de démontrer au témoin, c'est que les gouvernements fédéral, provincial et municipal ont chacun un siège et que, puisqu'il s'agit d'une municipalité, selon toutes les probabilités, la Ville de Québec aurait un siège. Supposons qu'on constitue un conseil comptant un nombre réduit de sept membres. Il resterait quatre postes à combler à partir de la liste fournie par les utilisateurs du port au ministre. Alors, si les intérêts des utilisateurs - MIL Davie, à Lévis, ou les utilisateurs de Québec - et des armateurs du port de Québec sont mieux servis par trois membres représentant divers utilisateurs ou armateurs de Québec, il serait possible de proposer au ministre un nom tiré de la liste pour représenter les utilisateurs de Lévis ou quelqu'un qui tiendrait compte de l'intérêt collectif, de l'intérêt de la collectivité en général. Il est possible d'avoir un siège.
[Français]
M. Murat: Dans le projet de loi, vous spécifiez bien que le représentant des municipalités, ou même celui du gouvernement, peut être révoqué à n'importe quel moment, à partir du moment où la municipalité ou la commission municipale le démet de ses fonctions.
Le représentant d'une municipalité serait donc indirectement responsable, à tout le moins auprès du conseil municipal ou de la commission municipale qui l'aurait désigné. C'est un grand avantage. Nous n'avons, en effet, aucune possibilité, non pas de contrôler, mais au moins de nous assurer que nos intérêts seront pris en considération quand on désigne un utilisateur qui n'a aucun contact ni rapport avec nous.
D'autre part, le projet de loi vise à dégager le plus large consensus, parce que c'est ce que le ministre souhaite, si j'ai bien compris le législateur. En effet, le conseil d'administration devrait pouvoir refléter le plus largement possible les préoccupations et les enjeux du milieu.
Alors, pourquoi limiter le nombre de sièges? C'est dommage. Vous savez comme moi que les municipalités transcendent tous les secteurs d'activités. On est impliqués dans toutes sortes de choses. Alors qui mieux que le représentant d'une municipalité peut représenter les intérêts d'un milieu?
[Traduction]
M. Keyes: Cela pourrait poser un autre problème d'équilibre. Si vous cédez tout le contrôle aux municipalités, alors les utilisateurs ne sont pas représentés.
Je serai ravi d'en discuter avec M. Beaulieu, hors de cette enceinte, monsieur le président. Nous ne retarderons pas davantage les travaux du comité.
Le président: Merci, monsieur Keyes.
Merci, messieurs, de nous avoir consacré du temps aujourd'hui. Je dois vous avouer que vous avez un représentant très dynamique en la personne de M. Dubé. Quand je suis venu ici avec le comité des ressources humaines, il ne nous a pas laissé manger avant que nous ayons visité le chantier maritime.
Merci. Je vous remercie de nous avoir donné du temps.
[Français]
M. Lehouillier: Merci beaucoup. Nous sommes tout à fait d'accord sur un certain équilibre dans la représentativité.
[Traduction]
Le président: De la Corporation régionale de développement économique de Rivière-du-Loup, nous entendrons MM. Gilles D'Amour et Bruno Gagnon.
Monsieur Gagnon, M. D'Amour n'est pas là?
[Français]
Une voix: Oui.
[Traduction]
Le président: Vous avez observé nos travaux, alors vous pouvez commencer.
[Français]
M. Bruno Gagnon (directeur général de la Corporation régionale de développement économique de Rivière-du-Loup et secrétaire exécutif de la Commission de développement du parc portuaire de Gros-Cacouna): Je m'appelle Bruno Gagnon et je suis directeur général de la Corporation régionale de développement économique de Rivière-du-Loup et secrétaire exécutif de la Commission de développement du parc portuaire de Gros-Cacouna.
Nous aimerions tout d'abord remercier les membres du Comité permanent des transports de nous donner l'occasion de participer aux audiences concernant le projet de loi C-44, Loi maritime du Canada.
L'organisme que nous représentons, qui est la Corporation régionale de développement économique de Rivière-du-Loup, joue un rôle primordial en faveur du développement économique de la région, non seulement au niveau des promoteurs et des entreprises, mais aussi au niveau du maintien et du développement des infrastructures qui appuient l'industrie manufacturière et l'industrie touristique de tout le Bas-Saint-Laurent.
Plus particulièrement au niveau maritime, notre organisme a créé, il y a deux ans, la Commission de développement de parc portuaire de Gros-Cacouna, laquelle a déposé le 1er août 1996, conjointement avec notre organisme, une déclaration d'intention auprès du ministre des Transports du Canada pour enclencher le processus de transfert du port de mer de Gros-Cacouna à une instance locale représentative des intérêts régionaux.
Plus récemment, notre organisme a collaboré à la mise sur pied du Comité de consolidation de la Traverse Rivière-du-Loup - Saint-Siméon. Ce comité, formé de représentant des deux rives, entend jouer un rôle dans l'élaboration de solutions et dans la mise en place de mécanismes nécessaires au maintien et à la consolidation de ce service de traversier qui fait partie intégrante de la vie économique des deux régions.
D'ailleurs, le 16 octobre dernier, le Comité de consolidation de la Traverse Rivière-du-Loup - Saint-Siméon a déposé, auprès du ministre des Transports du Canada et du ministre des Transports du Québec, une déclaration d'intérêt qui vient confirmer la volonté de nos régions de collaborer étroitement avec les autorités des ministères concernés dans un esprit de partenariat et ce, pour toutes les questions reliées à l'avenir de ce service de traversier, reconnu essentiel depuis 1972.
Vous comprendrez qu'en raison de la présence d'infrastructures portuaires importantes dans notre région, il était essentiel pour la Corporation régionale de développement économique de Rivière-du-Loup de participer aux audiences du Comité permanent des transports.
Notre intention, aujourd'hui, n'est pas de traiter de l'ensemble des éléments que l'on retrouve à l'intérieur du projet de loi, mais de nous attarder sur certains aspects de celui-ci qui nous apparaissent fondamentaux et sur lesquels nous souhaitons une attention particulière de la part du législateur.
Notre intervention portera essentiellement sur la nouvelle façon de commercialiser les ports publics en procédant au dessaisissement et au transfert des infrastructures portuaires à une instance locale. Nous aborderons donc les éléments suivants: les enjeux du développement régional face au processus de transfert; la capacité des instances locales à gérer et développer des installations portuaires; la reconnaissance des infrastructures portuaires à potentiel ou reconnues services essentiels; et enfin, l'utilisation du Fonds de cession des ports.
Les enjeux du développement régional face au processus de transfert: Tout comme le gouvernement canadien, nous sommes d'avis que le réseau maritime du Canada souffre de surcapacité et dépend trop lourdement des subventions gouvernementales. Nous sommes cependant conscients que si cette situation existe, c'est principalement attribuable à l'absence d'une politique maritime nationale, ce qui a permis au réseau maritime de se développer non pas uniquement à partir de réalités économiques, mais aussi à partir de réalités géopolitiques et ce, dans bon nombre de cas.
Également, le principe des subventions accordées faisait que les milieux ne jouaient qu'un rôle de revendication dans le développement des infrastructures maritimes. La représentation politique était prépondérante et omniprésente dans l'ensemble des dossiers, de sorte que la responsabilité des milieux se limitait à réclamer des infrastructures maritimes au gouvernement canadien, en profitant du fait que les subventions demandées n'étaient accompagnées d'aucune obligation de participation financière des milieux et des entreprises et d'aucune obligation de justifier des installations réclamées à l'intérieur d'une stratégie maritime.
La Loi maritime du Canada, qui est présentement à l'étude, nous propose une façon de faire totalement différente où l'on assistera simultanément à un retrait du rôle opérationnel direct du gouvernement du Canada et à l'obligation des régions concernées de prendre la relève dans des conditions que l'on peut qualifier de précaires si on les compare à celles reliées au système gouvernemental qui a prévalu jusqu'à tout récemment.
Nous sommes conscients que, dans une telle perspective, bon nombre d'installations portuaires seront abandonnées, puisqu'elles ne pourront plus répondre aux principes de commercialisation énoncés dans le projet de loi. Nous assisterons donc à une première onde de choc dans les régions qui ne seront pas en mesure de démontrer la rentabilité de leurs installations portuaires ou la nécessité du maintien de celles-ci.
L'activité économique reliée au transport maritime, si minime soit-elle, sera défendue chèrement par ces régions. Des entreprises auront à repenser leur mode de transport et, dans certains cas, leur relocalisation.
Il serait donc important pour ces collectivités que le gouvernement canadien participe à des études d'impact et au développement de solutions alternatives afin d'éviter que ces régions soient laissées à elles-mêmes pour redéfinir leur mode de transport.
Bien entendu, il y aura des régions qui seront favorisées par cette politique de rationalisation puisqu'il sera démontré que leurs infrastructures portuaires jouent un rôle important en faveur de leur développement économique, qu'elles sont jugées rentables ou reconnues essentielles.
À première vue, il peut nous sembler que ces régions tireront profit de cette situation et en sortiront gagnantes. Toutefois, lorsqu'on y regarde de plus près, l'on constate que ces régions, qui sont aujourd'hui qualifiées de privilégiées, se retrouvent dans l'obligation de se familiariser avec un nouveau rôle de gestionnaire d'infrastructures portuaires, avec la nécessité de rentabiliser les opérations et de prévoir les investissements nécessaires à la conservation et au développement des infrastructures et ce, sans appui financier du gouvernement canadien.
Cette politique de dessaisissement, conjuguée avec celle de recouvrement des coûts de la Garde côtière, pourrait avoir les effets contraires de ceux espérés si elle n'était pas accompagnée d'une stratégie tenant compte des entreprises utilisatrices, de la capacité de payer des transporteurs, de la concurrence et des besoins dans la modernisation des infrastructures. Nous croyons qu'en augmentant les charges et les obligations de l'ensemble des intervenants maritimes, nos ports qui sont présentement considérés rentables pourraient devenir non compétitifs comparativement à ceux des Maritimes et des États-Unis.
Si tel était le cas, nous assisterions à la fuite de notre réseau maritime québécois et nos entreprises manufacturières expéditrices deviendraient très vulnérables car elles ne pourraient demeurer compétitives bien longtemps en ne pouvant plus bénéficier des avantages actuels du réseau maritime.
[Traduction]
Le président: Excusez-moi. Permettez-moi de vous interrompre un instant. Nous sommes dans la même situation qu'avec le témoin précédent. Nous avons déjà pris dix minutes et vous n'avez pas encore lu la moitié de votre mémoire, ce qui veut dire que les membres n'auront pas le temps de vous interroger.
Si possible, pourriez-vous résumer les arguments que vous essayez de faire valoir, afin de donner aux gens une chance...? Je sais que les membres veulent poser un certain nombre de questions. Veuillez poursuivre.
[Français]
M. B. Gagnon: Je vais faire un résumé du mémoire, ce qui nous permettra d'échanger avec les membres du comité.
Dans un premier temps, nous espérons que le gouvernement canadien, par son projet de loi, pourra comprendre qu'il n'est pas seulement dans l'intérêt public de faire un dessaisissement de l'ensemble des infrastructures, mais bien d'enclencher un processus à l'intérieur duquel on pourrait retrouver une période transitoire. C'est un élément que nous jugeons très important.
En ce qui concerne la capacité des instances locales à gérer et à développer des installations portuaires, nous convenons que les régions, que ce soit le secteur privé ou une instance locale, peuvent être très performantes dans l'administration portuaire. En effet, les régions ou les entreprises pourraient être beaucoup plus prêtes que Transports Canada, par exemple, à réaliser des travaux à moindre coût.
Dans ce sens-là, nous ne mettons pas en doute la capacité des instances locales de gérer et de développer les infrastructures portuaires, mais dans le processus de dessaisissement, l'entreprise privée et l'instance locale ont besoin d'une période de transition.
Le gouvernement canadien a avantage à créer non seulement un fond de dessaisissement, mais aussi un fond de transition qui nous permettrait d'assurer les opérations et le développement des infrastructures portuaires.
Le troisième élément est la reconnaissance des infrastructures portuaires à potentiel ou reconnues comme une service essentiel. Nous aurions particulièrement apprécié que le gouvernement canadien, dans la catégorisation des ports, fasse des distinctions beaucoup plus nuancées ou beaucoup plus précises.
On est d'accord sur la première catégorie, les APC, et on connaît très bien les ports qui pourront avoir accès à cette catégorie. Mais pour l'ensemble des autres ports, identifiés comme ports régionaux ou locaux, nous aurions aimé qu'il puisse y avoir des sous-catégories parce que dans cette grande catégorie, il y a les ports à potentiel, les ports qui font de l'import-export, les ports qui font uniquement du transbordement local et les quais de traversier.
On n'a fait aucune distinction entre ces ports. On n'a pas fait non plus de distinction pour les ports qui n'ont plus aucune activité ou qui n'ont plus aucun potentiel de développement.
Je terminerai en disant que le Fonds de cession des ports ne fait pas non plus cette distinction. On dit que, pour aider au dessaisissement de l'ensemble des infrastructures portuaires - il y en a 572 au Canada - , il existe maintenant un Fonds de cession de 125 millions de dollars qui sera accessible à l'ensemble de ces infrastructures.
Inévitablement, cette situation gênera et compliquera le processus de transfert, car toutes les régions, qu'elles aient ou non des infrastructures portuaires performantes, vont présenter des demandes, alors que le Fonds de dessaisissement ne devrait être là que pour les infrastructures portuaires à potentiel et pour le développement des régions.
Merci.
Le président: Thank you very much.
Monsieur Crête.
M. Crête: Merci, monsieur Gagnon.
La Corporation régionale du développement économique de Rivière-du-Loup a pris le départ à temps, et je pense qu'il faut l'en féliciter.
Si vous aviez à définir, pour les prochaines années, les conditions favorables dans lesquelles le dessaisissement devrait se faire pour qu'il soit une réussite, que diriez-vous pour Gros-Cacouna, par exemple? Quels seraient les ingrédients principaux que vous aimeriez mettre dans la recette et à quel moment devraient-ils apparaître dans la région?
M. B. Gagnon: Quand le processus de transfert est enclenché, on est en contact régulier avec l'équipe de dessaisissement de Transports Canada, qui nous fournit une foule de données existantes concernant, entre autres, le coût d'opération d'un port, la vie résiduelle des quais, les tarifs du transbordement et les tarifs de location d'espace. Toutes ces données sont connues et seront disponibles pour l'instance locale qui sera en mesure de finaliser le processus de transfert.
Mais nous voulons aller plus loin. Le gouvernement canadien parle d'un nouveau réseau maritime qui oblige à une rationalisation et à la privatisation des infrastructures. Il est évident que les infrastructures ne pourront pas toutes demeurer en place. Certaines règles du jeu vont changer, ne serait-ce qu'en ce qui concerne le coût de recouvrement de la Garde côtière au niveau des aides à la navigation.
Tous ces éléments doivent être connus avant qu'on procède à un dessaisissement. Dans ce sens, nous aimerions que Transports Canada puisse nous accompagner dans la démarche pour que la transaction soit faite de la façon la plus claire possible. On peut prouver qu'une infrastructure comme celle de Gros-Cacouna, qui transborde environ 500 000 tonnes de marchandises par année, est nécessaire au développement régional, pour nos entreprises expéditrices, et qu'elle est rentable. Il faudrait alors être capable d'établir l'ensemble de ces données pour que l'instance locale puisse être en mesure d'exploiter cette infrastructure de façon rentable.
Il est important aussi de savoir que ces infrastructures peuvent solliciter des investissements pour améliorer la performance des ports. Je pense particulièrement à Gros-Cacouna, dont certains éléments doivent être corrigés inévitablement. Alors, il faudra s'adresser non seulement au Fonds de transition, mais aussi au Fonds de cession des ports pour obtenir ces deniers.
Avant que le transfert ne soit possible, il faudra avoir la garantie que les travaux sont nécessaires et obligatoires pour rentabiliser l'infrastructure.
M. Crête: Nos avons entendu toute la journée des gens nous parler de grands ports qui sont sur le marché international, et vous nous avez parlé aussi des différentes catégories de ports.
J'aimerais que vous nous parliez un peu de la vocation particulière de Gros-Cacouna au niveau international. Ceci permettrait de démontrer que même un petit port peut être sur le marché international sans avoir nécessairement un volume d'activités extraordinaire. C'est un élément important et j'aimerais quelques informations là-dessus.
M. B. Gagnon: À Gros-Cacouna, l'activité principale est le transbordement du bois d'oeuvre de l'ensemble des industries du bois de sciage du Québec. C'est le port qui est reconnu, au Québec, comme étant celui qui fait le transbordement du bois d'oeuvre.
Naturellement, en plus du bois d'oeuvre, des marchandises générales sont transbordées pour être expédiées outre-mer, comme certains métaux ferreux. On pense aussi aux pâtes et papiers parce que, dans la région de l'est du Québec, il existe aussi une industrie des pâtes et papiers qui alimente le marché outre-mer par Gros-Cacouna. La rentabilité ou la compétitivité de ces entreprises-là est directement reliée à la présence de l'infrastructure de Gros-Cacouna.
Gros-Cacouna est un port régional dont l'incidence déborde la région immédiate de Rivière-du-Loup. Il est important pour l'ensemble de la région de l'est du Québec, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie particulièrement, et pour tout le Québec en ce qui concerne le bois d'oeuvre.
Il est donc clair, dans notre esprit, que, par rapport à la nouvelle Loi maritime, le milieu a l'obligation de conclure un partenariat avec le gouvernement canadien pour le processus de transfert. Dans notre esprit, il est clair que nous voulons procéder à l'exercice dans le cadre d'un réel partenariat.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Crête.
Monsieur Keyes.
M. Keyes: Je remercie le témoin pour son exposé. J'ajoute que le vrai partenariat, en matière de représentation régionale ou locale, ne doit pas exister seulement durant le processus de négociation entre le gouvernement fédéral et le port régional ou local; le port doit lui aussi connaître ses besoins.
Alors, M. Gagnon et d'autres devront s'asseoir et déterminer exactement ce dont a besoin le port pour lui donner des assises financières solides et stables. Lorsque ces besoins auront été définis, il faudra présenter une demande au fonds pour obtenir les montants permettant de faire le saut. Le jour où le port signe les documents de prise de possession, il a établi un partenariat avec le gouvernement fédéral mais doit désormais en établir un avec le secteur privé - avec la scierie et l'exportateur, par exemple - pour faire en sorte que les installations restent en parfait état et que le port puisse continuer à servir le secteur privé.
[Français]
M. B. Gagnon: Je suis heureux que vous mentionniez l'ensemble des étapes qui doivent être franchies. La Commission de développement du parc portuaire a déjà, dans un premier temps, constitué un fonds d'aide local. Il est clair que nous aurons besoin de ressources spécialisées pour nous accompagner dans le processus de transfert, pour aller chercher l'ensemble des données et aussi déterminer ce que nous, comme milieu ou région, voulons faire de notre port. C'est pour cette raison que le fonds d'aide constitue la première étape de notre action.
Naturellement, l'ensemble des intervenants du monde maritime s'est associé à la Commission de développement du parc portuaire. Autour de la Commission, il y a des entreprises expéditrices, des transporteurs, le syndicat des débardeurs du port de mer, qui siège même à notre commission, les instances locales au niveau municipal, les élus du gouvernement fédéral et provincial qui siègent à la Commission à titre d'observateurs, et une aide technique qui nous est offerte par Transports Canada et Transports Québec.
On peut dire que le milieu remplit bien ses responsabilités, mais on sait fort bien qu'au fur et à mesure que le processus va avancer, il nous sera difficile de faire une demande auprès des autorités de Transports Canada dans le cadre du Fonds de cession des ports, parce qu'il y aura une multitude de quais et de ports ayant une activité portuaire plus ou moins importante qui vont aussi faire des demandes.
Ce Fonds de cession des ports crée énormément d'attentes dans l'ensemble des milieux, et c'est pourquoi nous apprécierions que Transports Canada puisse créer plus de catégories, entre autres une les ports à potentiel et les services reconnus essentiels.
Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Keyes.
Monsieur Cullen.
[Français]
M. Cullen: Monsieur Gagnon, est-ce que Gros-Cacouna a des installations pour sécher le bois?
M. B. Gagnon: À l'heure actuelle, les industries du bois possèdent leurs propres séchoirs pour traiter, pasteuriser ou sécher le bois. On sait que le bois qui doit entrer en Europe, particulièrement, doit être séché et éventuellement pasteurisé. Gros-Cacouna ne dispose pas de ces installations.
M. Cullen: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Cullen.
Merci beaucoup, monsieur Gagnon. Je vous sais gré d'avoir tenu compte de nos contraintes et de nous avoir donné du temps.
Nous entendrons M. Richard Michaud, de la Traverse Rivière-du-Loup - St-Siméon.
Vous avez attendu patiemment et observé nos travaux. Vous connaissez la procédure. J'ai pris le temps de vérifier votre mémoire à l'avance. Je crois que dix minutes vous suffiront. Veuillez procéder.
[Français]
M. Richard Michaud (directeur général de la Traverse de Rivière-du-Loup - Saint-Siméon): Bonjour, monsieur le président, bonjour, messieurs.
Je vais faire un résumé de ce mémoire qu'on a voulu court et expressif au niveau des problèmes que l'on vit.
Je vais essayer de vous dresser un portrait de la Traverse de Rivière-du-Loup - Saint-Siméon et d'attirer votre attention sur un secteur dont vous n'avez pas beaucoup parlé aujourd'hui, celui des traversiers. C'est un secteur qui présente une problématique particulière.
La Traverse Rivière-du-Loup - Saint-Siméon est située à mi-chemin entre celle de Matane et celle de Québec. Elle existe depuis 1930 et est exploitée par Clarke Transport Canada. Elle a donc une certaine histoire, un certain vécu.
De 1930 à 1972, la Traverse a été exploitée sur une base saisonnière limitée, c'est-à-dire pendant la saison d'été principalement. C'est donc à peu près quatre mois et demi par année. C'est en 1972 que le gouvernement du Québec, via le Conseil des ministres, a reconnu cette traverse comme un axe prioritaire.
C'est à partir de ce moment-là que la saison de navigation est passée de quatre mois et demi à neuf mois par année, ce qui représentait l'essentiel de ce que pouvait fournir le navire, compte tenu de la glaciation du fleuve que nous connaissons en janvier, février et mars.
Le navire principal qui est en opération est le N.M. Trans Saint-Laurent, qui assure la liaison depuis 1963. Le Trans Saint-Laurent a été secondé pendant plusieurs années par le N.M. Radisson, un navire affrété de la Société des traversiers du Québec qui n'est plus là depuis 1992, parce que la Société a repris ses navires pour ses propres besoins durant la saison estivale.
C'est donc le troisième navire que Clarke opère sur cette ligne. Il est naturellement inspecté annuellement par la Garde côtière canadienne et par la société de classification Lloyds. Son état de conservation est excellent compte tenu d'un entretien minutieux et il est accrédité pour transporter 446 passagers et 100 véhicules automobiles.
Notre entreprise compte une cinquantaine d'employés réguliers et presque autant d'employés occasionnels. La Traverse détient un permis de la Commission des transports du Québec, qui approuve aussi les ajustements de tarifs.
C'est une traversée que l'on effectue sur 24,6 kilomètres et que l'on franchit actuellement en 65 minutes. Différents services personnalisés sont offerts à bord. Ils font la réputation de notre traverse et la différencient des autres qui opèrent sur le Saint-Laurent.
C'est une traverse qui transporte 185 000 passagers par année et 75 000 véhicules. L'achalandage est essentiellement touristique puisque qu'elle relie les régions de Charlevoix à celles du Bas-Saint-Laurent - Gaspésie et des provinces Maritimes, qui sont des zones touristiques très fréquentées, principalement durant la saison estivale.
Mais la traverse sert aussi à beaucoup de clients commerciaux et fait alors du transport de camions. On parle de 3 000 à 4 000 camions par année, ce qui rend un service appréciable aux entreprises de la région pendant neuf mois par an.
Nous aurions bien aimé vous remettre les conclusions de l'étude d'impact économique de la traverse réalisée par la Corporation régionale de développement économique, représentée ici tout à l'heure par Bruno Gagnon, mais elle n'est pas tout à fait terminée. Nous pouvons cependant déjà vous dire qu'il y a fort à parier que les retombées confirmeront le rôle moteur que joue la traverse dans le milieu.
Également, les revenus qu'en tirent les gouvernements devraient prouver que les sommes injectées sont davantage un investissement qu'une dépense.
Je précise que la Traverse Rivière-du-Loup - Saint-Siméon a toujours été un exemple de partenariat pour la bonne raison que plusieurs intervenants s'exécutent simultanément sur le site. Clarke possède le navire, le gouvernement du Québec exploite les postes d'accueil et le gouvernement du Canada, via Transports Canada, s'occupe, du moins jusqu'à maintenant, des quais et des stationnements des usagers. Jusqu'à présent, on a su travailler ensemble et dégager des consensus de façon à ce que chacun se respecte et que ce soit efficace.
Je vais en arriver au vif du sujet et parler de nos réactions par rapport à la Politique maritime nationale et aux implications que cela aura sur notre service. Je voudrais préciser, au départ, que la Politique maritime nationale nous apparaît davantage comme une décision du gouvernement de se retirer du transport maritime de façon structurée et organisée.
Nous sommes capables de comprendre que certaines infrastructures sont désuètes, que certaines opérations sont caduques, mais nous déplorons le fait que le gouvernement abandonne son rôle de soutien à l'industrie sans avoir dressé un plan d'affaires qui identifie les alternatives et le nouveau partage des rôles. Nous ne voulons pas être réduits à jouer le seul rôle de quémandeurs et à être toujours accrochés à la queue de chemise du gouvernement pour lui demander de l'aide.
On est capables de comprendre que des changements majeurs doivent s'opérer. Les régions, du moins en ce qui nous concerne, et je pense que Bruno Gagnon l'a clairement mentionné, sont prêtes à faire leur part et à devenir des collaborateurs pour partager les responsabilités.
Cependant, la politique maritime telle qu'elle nous apparaît semble être un exercice qui vise d'abord et avant tout la réduction des dépenses publiques. On ne semble pas avoir de plan très élaboré, à savoir qu'on ne voit pas ce que sera la politique maritime dans 10 ans, 15 ans ou 20 ans. C'est un sujet dont vous avez sûrement entendu parler ce matin par l'Association des armateurs du Saint-Laurent, dont je suis aussi le vice-président.
Il aurait peut-être fallu investir plus d'énergie ou du moins utiliser davantage les consultations qui ont été faites pour essayer de convaincre M. Tout-le-monde que le dessaisissement des quais, l'abandon des infrastructures et le recouvrement des coûts de la Garde côtière étaient des choses nécessaires. On aurait peut-être aimé voir l'amorce d'une véritable discussion pour susciter un partenariat entre les intervenants du monde maritime et les gouvernements, plus particulièrement le gouvernement fédéral.
Nous disons donc qu'il ne faut pas se contenter de se retirer, mais au contraire, essayer d'être un petit peu plus dynamique pour voir les possibilités de dynamiser notre industrie maritime nationale.
Il y aurait des choses à faire au niveau de la fiscalité que nous n'avons pas étudiées à fond. La bonification des initiatives efficaces serait certainement à envisager, ainsi qu'une meilleure concertation entre les gouvernements eux-mêmes. Je ne vous apprends rien en exposant les problèmes que l'on vit et en vous disant que tout cela ne nous aide pas beaucoup.
C'est une situation très difficile aussi pour les intervenants de l'industrie. Je pense que les gouvernements devraient essayer de se parler davantage pour s'entendre sur les orientations à donner, les pistes et le cadre dans lequel les intervenants pourront évoluer.
Le gouvernement fédéral devrait continuer de jouer un rôle actif dans le but d'obtenir sa juste part du commerce maritime mondial, ce qui se situe bien au-delà de la mission de base qu'il s'est donnée d'adopter des lois et des règlements qui, bien que nécessaires, gênent souvent le dynamisme et le développement de l'industrie.
Dans le secteur plus spécifique des traversiers, qui est celui qui nous intéresse plus particulièrement, ce manque de vision concernant la Politique maritime nationale risque d'avoir également de lourdes conséquences.
Quand on parle de dessaisissement des quais, l'impact est très négatif en ce qui concerne la Traverse de Rivière-du-Loup - Saint-Siméon. Bien qu'à Saint-Siméon, le quai ait encore une durée de vie utile assez respectable, d'une vingtaine d'années, il n'en est pas de même à Rivière-du-Loup, où on parle d'une vie utile du quai d'environ cinq ans.
Selon les estimations des spécialistes de Travaux Publics Canada, la réfection de ce quai coûterait entre 15 et 20 millions de dollars. Vous comprendrez que lorsqu'on parle de 15 à 20 millions de dollars, c'est une grosse somme pour une municipalité comme Rivière-du-Loup qui a une taille et un budget limités.
Tout à l'heure, Bruno vous parlait de la création du Comité de consolidation de la Traverse. Cela a été fait pour veiller à la survie de la traverse. C'est vraiment une survie. À partir du moment on ne peut pas procéder à la réfection de ce quai, nous avons un problème majeur. Quand un avion n'a pas d'aéroport pour se poser, c'est compliqué. Quand un camion n'a pas de routes pour rouler, c'est compliqué. Quand un traversier n'a pas de quai pour accoster, cela pose un sérieux problème.
Nous pensons qu'il faut trouver ensemble une solution de compromis et que chacune des parties pourra essayer de s'impliquer avec ses moyens techniques et financiers.
Ce n'est pas seulement l'affaire du fédéral, pas seulement l'affaire du milieu, ni seulement celle de la province. Tout le monde doit réfléchir ensemble pour essayer de trouver la solution à ce problème.
En conclusion, on peut dire que nous acceptons l'idée d'abandonner certaines structures désaffectées. Je viens d'essayer de vous dire qu'on ne devrait pas traiter à la légère le problème de la Traverse Rivière-du-Loup - Saint-Siméon, puisqu'on parle du transport de 200 000 passagers.
L'axe prioritaire est donc le prolongement de la route. Ceci concerne directement les gouvernements dans leur mission de mettre en place les infrastructures de base.
Depuis une dizaine d'années, les interventions fédérales nous ont souvent été défavorables. Je mentionnerai ici, entre autres, l'exonération du secteur des traversiers de l'application de la TPS qui nous prive des crédits pour intrants, ce qui a pour effet de hausser nos dépenses annuelles de150 000 $.
Ensuite, il y a le recouvrement des coûts pour les aides à la navigation auquel on ajoutera bientôt une partie des frais de déglaçage du Saint-Laurent. Tout cela coûte cher. On dit que cette réglementation est parmi les plus sévères au monde. Je voudrais vous faire remarquer qu'en tant que transporteur de passagers, on ne peut que souscrire au fait que le gouvernement soit exigeant au chapitre de la sécurité. Mais tout cela coûte très cher, d'autant plus que, la flotte étant vieillissante, il faut investir pour l'entretien de nos navires.
Bien que nous comprenions que tout cela soit nécessaire et que cette réglementation est déjà adoptée, nous voudrions vous demander de nous aider à obtenir la collaboration nécessaire pour trouver une solution au problème que nous cause la politique de dessaisissement des quais pour la continuité des opérations de la Traverse Rivière-du-Loup - Saint-Siméon.
Nous demandons donc au comité de nous aider à trouver un compromis parce qu'il s'agit du transport de personnes et que c'est le prolongement de la route.
Quand on sait que l'on dispose de 125 millions de dollars pour le Fonds de dessaisissement et qu'on parle chez nous de coûts de réfection d'un seul quai pouvant s'élever à 15 ou 20 millions de dollars alors qu'il faut réparer 245 quais environ, il y a sûrement un problème.
Il est certain que nous allons essayer de trouver une solution pour éviter des coûts aussi faramineux, mais il faut nous aider à trouver le compromis qui nous permettra de continuer nos opérations.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Michaud.
Ou bien vous avez déjà fait de la politique ou bien une belle carrière politique vous attend. M. Gagnon a raccourci un très long exposé. Vous avez grandement rallongé ce qui était très court, mais c'était très intéressant.
Quatre ou cinq membres veulent poser des questions. Monsieur Keyes, vous pouvez commencer.
M. Keyes: Merci, monsieur le président. Je veux remercier le témoin de son exposé.
Je poserai des questions dans deux domaines. Le premier porte sur les remarques du témoin au sujet du projet de loi C-44 et plus particulièrement sur le fait qu'il faut plus de discussion, plus de dialogue, que nous devons discuter davantage. Monsieur Michaud, nous avons passé plus de deux ans et demi à discuter de la question. Il y a d'abord eu le rapport du comité des transports en 1995, puis nous avons parcouru le pays et ramené au gouvernement un consensus sur les meilleurs intérêts du pays dans le secteur maritime.
Puis, j'ai moi-même sillonné le pays une demi-douzaine de fois. Le sous-ministre des Transports a fait de même. Deux ministres des Transports, à des moments différents, ont parcouru le pays. Ils sont tous revenus. Monsieur Michaud, nous avons discuté à n'en plus finir et le moment est enfin venu de prendre des décisions.
Il est vrai que ce projet de loi, à mon humble avis, ne correspond pas aux exigences du milieu portuaire et au consensus qui s'y est dégagé, comme en témoignait le rapport du Comité permanent des transports en 1995. C'est pourquoi nous nous réunissons à nouveau au comité des Transports et nous parcourons le pays pour entendre comment nous pourrions améliorer le projet de loi afin qu'il corresponde au consensus de 1995.
Avons-nous discuté avec les représentants de l'industrie? Absolument. Sommes-nous allés dans tous les ports du pays? Absolument. Avons-nous parlé avec les groupes d'utilisateurs, les armateurs et les gestionnaires? Absolument. Alors je ne suis pas d'accord avec vous. Nous avons assez discuté. Le temps est venu d'adopter un bon projet de loi.
Par ailleurs, je voulais vous poser une question sur votre service. Il s'agit bien d'un service de traversier intraprovincial, n'est-ce pas?
[Français]
M. Michaud: Oui.
[Traduction]
M. Keyes: Cela veut dire que vous n'avez pas droit au financement fédéral. Vous ne recevez pas de subventions fédérales, n'est-ce pas?
[Français]
M. Michaud: Non.
[Traduction]
M. Keyes: Recevez-vous des subventions provinciales?
[Français]
M. Michaud: Oui. Pour l'opération, nous touchons une allocation qui vise à combler les déficits de l'allongement de saison, des quatre mois et demi qu'on a ajoutés, en 1972, à la saison de navigation.
[Traduction]
M. Keyes: À la fin de votre exercice, quel est votre bénéfice net? Avez-vous un déficit important?
[Français]
M. Michaud: Actuellement, on parle de l'implication financière du gouvernement du Québec pour créer l'équilibre budgétaire. Cependant, ces budgets ne valent rien puisque le profit de l'opérateur est dans la location du navire.
[Traduction]
M. Keyes: Je veux vous comprendre correctement. Le gouvernement fédéral subventionne ce service de traversier par l'entremise du quai et du navire. Corrigez-moi si je me trompe. Quel est le montant des subventions fédérales et à quoi servent-elles?
[Français]
M. Michaud: L'argent du fédéral ne transite pas par les comptes de l'opérateur que nous sommes. L'argent du fédéral est investi directement dans l'entretien de l'infrastructure portuaire, c'est-à-dire les quais et les stationnements des usagers. Nous ne touchons donc pas un seul cent directement du fédéral.
Le gouvernement provincial pourvoit à un subside annuel pour l'opération d'équilibre budgétaire au niveau des opérations, compte tenu que nous fonctionnons à perte durant certains mois.
Je ne sais pas si cela répond clairement à votre question.
[Traduction]
M. Keyes: Oui, en partie. Quelle somme le gouvernement fédéral vous accorde-t-il pour les quais et les stationnements et quelle somme le gouvernement du Québec accorde-t-il aux opérations?
[Français]
M. Michaud: Il faudrait peut-être vérifier directement auprès des gens de Transports Canada qui sont ici présents pour voir combien ça coûte exactement au niveau des quais, parce qu'il y a différents stades.
[Traduction]
M. Keyes: S'agit-il de 1 million, 5 millions ou 20 millions de dollars? Donnez-moi un chiffre approximatif, une estimation.
[Français]
M. Michaud: Pour le quai, c'est 350 000 $, d'après Transports Canada.
Pour ce qui est de la participation provinciale, on parle d'un peu plus de un million de dollars. Ça tourne autour de 1 100 000 $.
[Traduction]
M. Keyes: Tirez-vous des revenus de vos stationnements? Faut-il payer pour stationner?
[Français]
M. Michaud: Non, absolument pas. Mais est-ce qu'il y a d'autres traversiers au Canada où ce n'est pas gratuit? Est-ce qu'on fait payer, ailleurs, dans les provinces Maritimes ou sur la côte ouest, les gens qui vont dans les stationnements des usagers pour traverser?
[Traduction]
M. Keyes: C'est une mentalité qui devra changer, un de ces jours.
Le président: Monsieur Comuzzi, avez-vous une question?
M. Comuzzi: Je pense qu'on y a répondu, merci.
Le président: Monsieur Cullen.
M. Cullen: Merci, monsieur le président. Je voudrais poser une question à M. Michaud.
S'il était impossible de se tourner vers le gouvernement fédéral, votre traverse survivrait-elle et comment survivrait-elle?
[Français]
M. Michaud: C'est un peu ce que je disais tout à l'heure. Il est évident qu'à partir du moment où il n'y a pas d'aide du gouvernement fédéral, ça remet tout en question, même la survie de la traverse. Comme je vous le disais, si on n'a pas de quai, ce quai qui est une infrastructure relevant de la collectivité au même titre que la route ou les aéroports, comment les transporteurs pourront-ils fonctionner?
Je ne veux pas qu'on pense que je suis un quémandeur. On ne vient pas vous demander la charité. On veut faire du développement économique à l'intérieur de nos régions et on veut s'identifier comme étant vos partenaires.
Vous devez comprendre qu'on ne vient pas demander la charité, mais qu'on est partie prenante au développement économique.
Nous sommes partie prenante au développement économique dans la mesure où on génère une activité qui a une incidence non négligeable au niveau de l'industrie touristique et qui rapporte des sous dans les coffres du gouvernement.
Il faut aussi comprendre que chez nous, comme ailleurs, les personnes qui travaillent paient des impôts. Mais tout le monde vous dira la même chose.
Au-delà de ces considérations, en tant qu'outil de transport, nous participons à l'essor économique du pays. L'infrastructure de transport n'est pas négligeable, et je pense que le fait de se retirer et de nous dire que c'est notre affaire est un peu cavalier, alors que nous ne demandons qu'à collaborer.
[Traduction]
Le président: Une dernière question.
M. Cullen: Monsieur Gagnon, je ne veux vraiment pas faire de discours partisan, mais il y a actuellement au Québec un gouvernement qui veut séparer la province du Canada. Je ne pensais pas à un retrait du programme en ce sens que le gouvernement fédéral ne respecterait pas ses engagements envers ce programme. Si le gouvernement provincial actuel réussissait dans son entreprise, le Québec se séparerait. Comment votre traverse survivrait-elle?
[Français]
M. Michaud: Je n'ai pas la prétention, aujourd'hui, de régler tous les problèmes politiques canadiens et québécois. Je regarde le problème sous le seul angle du transporteur et de l'opérateur qui doit fournir un service aux utilisateurs qui traversent, c'est-à-dire nos 200 000 passagers. Ce n'est pas ma mission de trancher le débat politique.
Je veux simplement vous dire que, quel que soit le devenir de la structure politique de notre pays, il restera quand même du monde pour l'habiter et il restera du monde pour utiliser les services de base que sont les transports.
Je vous disais tout à l'heure qu'il serait important de pouvoir se parler. C'est qu'il y a, au-delà de l'appareil politique, l'appareil technocratique qui est en place. Je pense que nous avons de très bons fonctionnaires à Transports Canada et à Québec qui font un excellent travail et qui nous donnent un bon appui.
Je peux vous assurer que si ces gens-là pouvaient parler à ceux qui veulent essayer de régler le problème, on ferait de grands pas en avant, et rapidement.
Si nous devions placer le Québec devant l'évidence au niveau du transport maritime, principalement au niveau du transport des passagers, il faudrait que nous ayons une bonne discussion. Mais il nous est difficile de prendre l'initiative de vous convoquer pour une telle discussion puisque vous êtes, jusqu'à maintenant, les propriétaires en titre des infrastructures portuaires.
C'est à vous de dire si le Québec doit jouer un rôle au niveau de cette infrastructure qu'est le quai de traversier. Si vous le dites, je peux vous assurer que nous serons partie prenante pour faire avancer les discussions.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Michaud.
Notre dernière question de la journée sera posée par M. Crête.
[Français]
M. Crête: Pour la culture politique des membres du comité, j'aimerais leur dire que les quais relèvent du fédéral et que le fédéral a donc la responsabilité d'assurer des services et des infrastructures adéquats.
C'est un des arguments principaux des Québécois qui pourraient être insatisfaits du système canadien, parce qu'on est devant des infrastructures qui, souvent, n'ont pas été remises en état. Rivière-du-Loup en est un exemple très concret puisque l'espérance de vie de son quai n'est plus que de cinq ans, et on vient de changer les règles du jeu par une politique.
Nous ne sommes pas contre le changement des règles du jeu, mais je vais vous poser une question à ce sujet. Aujourd'hui, nous apprenons que le quai a une durée de vie de cinq ans. Dans cinq ans, il ne pourra plus y avoir de traversier s'il n'y a pas de remise en état du quai.
Quel est un scénario réaliste en fonction du projet de loi C-44? Est-ce qu'il ne faut pas trouver une solution pour que les quais des traversiers soient considérés différemment des quais ordinaires? L'exemple de Gros-Cacouna est particulier parce qu'il y a là des revenus importants. Mais ici, nous sommes dans une situation où l'infrastructure ne permet que d'assurer le maintien d'un service. Comme M. Michaud le disait très bien, un traversier ne peut fonctionner sans quai. Il faut donc qu'il y ait un quai.
Voici une dernière information concernant le stationnement. Les gens qui utilisent le traversier traversent avec leur automobile. Personne ne reste sur le stationnement pendant une journée, deux jours, cinq jours ou dix jours. Cela n'existe pas. Tout le monde embarque sur le traversier. C'est quasiment comme la route, ces traversiers-là.
Si le gouvernement n'investit pas dans ce traversier, il sera obligé de bâtir un pont de plus à Québec parce que le pont de Québec ne suffira plus à la demande.
Quelles sont donc les solutions que vous voyez par rapport au projet de loi C-44? Quel genre de dispositions le gouvernement fédéral doit-il prendre pour assurer la viabilité de cette installation? Que doit-il faire dans le cas où il s'en désiste, et dans le cas où il la garde?
M. Michaud: Vous avez touché un point fort important du fait que nous n'opérons pas, à Rivière-du-Loup ou à Saint-Siméon, un quai commercial où il y a plusieurs utilisateurs. Nous sommes le seul utilisateur de ce quai-là. Par conséquent, les revenus qui sont générés sont trop modestes pour espérer que le milieu puisse à lui seul prendre en charge la réfection d'un quai comme celui-là.
Je prétends que la solution réside dans cette espèce de compromis qui doit être fait entre Ottawa et Québec pour la juridiction des quais de traversiers. Je sais d'ailleurs que des discussions sont en cours depuis quelque temps déjà.
Il faudrait peut-être arrêter de discuter et s'entendre sur une espèce de compromis pour savoir qui va faire quoi à l'avenir. En tant qu'intervenants, nous avons le rôle d'assurer le transport des personnes sur des embarcations sécuritaires. Nous nous acquittons de cette responsabilité, mais nous ne pensons pas pouvoir prendre le quai en charge. C'est comme si on demandait aux transporteurs de prendre en charge le réseau routier.
D'un autre côté, je pense que le Québec aussi devra, un jour ou l'autre, prendre une décision à ce sujet. Je ne veux pas parler pour les absents et les condamner, mais je pense que nous devons arriver à un compromis tous ensemble. Il faut entamer une discussion sur le cas précis qui nous concerne, le quai de Rivière-du-Loup.
Je ne suis pas contre l'adoption d'une politique, comme M. Keyes disait tout à l'heure. Il faudrait en effet qu'on finisse par adopter cette politique, mais il faudrait qu'on soit un peu plus proactif et ouvert à la discussion pour régler certains cas patents comme celui dont on parle présentement.
Comme je vous le disais tout à l'heure, il faut quand même reconnaître que les fonctionnaires concernés au niveau de Transports Québec et de Transports Canada, tout comme les instances du milieu, ont déjà fait un grand bout de chemin.
Il faudrait donc essayer d'attirer leur attention sur le fait qu'un quai de traversier n'est pas un quai commercial conventionnel, et que la problématique devrait être prise dans son ensemble pour ce secteur d'activités.
[Traduction]
Le président: Monsieur Dubé, voulez-vous intervenir?
[Français]
M. Dubé: Je crois connaître la réponse, mais je vous demanderais de nous préciser les choses.
À partir de Québec, il y a deux ponts pour traverser vers la rive sud, et il y a aussi un petit traversier, mais pour aller jusque chez vous, il n'y a pas d'autre traversier entre les deux rives.
M. Michaud: C'est ça.
M. Dubé: Quelle est la distance entre ici et chacune des rives?
M. Michaud: Entre Québec et Rivière-du-Loup, il y a 210 kilomètres. Entre Rivière-du-Loup et Matane, la traverse la plus rapprochée, qui opère sur une base permanente, il y a 210 kilomètres.
C'est donc un réseau bien intégré. Matane et Québec offrent des services 12 mois par année, tandis que nous opérons neuf mois par an. Comme vous le voyez, c'est complémentaire. Sinon, les gens devraient faire 420 kilomètres sur une rive et revenir ensuite de l'autre côté sur encore 420 kilomètres. On parlerait de presque 1 000 kilomètres.
Il faut se rendre compte que ce n'est pas un traversier de fantaisie, qui ne correspond pas à des besoins réels. C'est exactement le contraire.
Je pense que votre question concernant la géographie est très pertinente.
M. Dubé: Je veux aussi dire que ce n'est pas juste pour la petite région de Rivière-du-Loup et de Saint-Siméon. Il s'agit d'une communication entre les deux rives. Il faut bien traverser le fleuve.
M. Michaud: Je voudrais ajouter que Rivière-du-Loup, pour que vous compreniez bien, est sur l'axe qui relie les Maritimes. On a parlé tout à l'heure de la Transcanadienne dans le Témiscouata. Rivière-du-Loup est justement l'aboutissement de tout cet axe de la 185.
De l'autre côté, vous avez le Saguenay - Lac-Saint-Jean où il y a quand même une population de 250 000 personnes, et on parlait tout à l'heure du Bas-Saint-Laurent - Gaspésie, qui est un circuit touristique reconnu mais aussi un développement commercial non négligeable dans l'est du Québec. Il y a également le comté de Charlevoix qui est le joyau par excellence du développement touristique, puisque c'est même une réserve naturelle nationale.
Vous m'avez un peu surpris lorsque vous avez parlé de faire payer le stationnement aux usagers. Je ne m'attendais pas à cette question-là.
Il faudrait que vous veniez voir sur place comment ça se passe. On ne peut pas faire payer les gens pour le stationnement, pour ensuite les faire payer pour le traversier, les faire payer avant de débarquer, etc. C'est un service public. Dans le cas de l'autobus, on ne paie pas pour rester dans la salle d'attente. C'est un peu la même chose.
Aujourd'hui, il me semble que vous voyez seulement l'investissement du gouvernement fédéral au niveau des quais. Vous ne voyez pas que cela nous coûte aussi de l'argent. Nous investissons 700 000 $ par année dans l'entretien du navire pour garantir sa sécurité. Il est donc évident qu'on fait notre part.
Nous sommes tout à fait prêts à collaborer, mais nous ne pouvons assumer tous ces frais à nous seuls.
M. Dubé: Qu'est-ce qui arriverait si vous arrêtiez vos opérations?
M. Michaud: Si on arrêtait? Le gouvernement du Québec, en 1972, a considéré cet axe-là comme étant prioritaire. Si maintenant on arrêtait tout, il y aurait sûrement de la congestion au niveau de la route puisqu'il y aurait 200 000 personnes de plus demain matin sur la route.
Premièrement, ça congestionnerait la route et, deuxièmement, ça grèverait le développement socioéconomique de la grande région. On ne parle pas seulement de Rivière-du-Loup et de Saint-Siméon, mais aussi de la rive nord et de la rive sud.
M. Dubé: Merci.
[Traduction]
Le président: D'abord, je vous remercie beaucoup. C'est l'un des rares témoignages que nous avons entendus sur une situation de ce genre: un utilisateur unique d'une petite installation qui fournit un service important. De toute évidence, le monde va changer.
Nous ne vous tiendrons pas responsable de l'avenir du pays, mais nous compterons sur vous pour nous aider à réfléchir aux moyens de veiller à ce que la population de la région ait accès à ce service. Il y aura peut-être d'autres solutions à étudier à un moment donné. Merci. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir ici.
[Français]
M. Michaud: Merci de votre attention, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Messieurs les membres, c'est tout pour aujourd'hui. La séance est levée.