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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 29 octobre 1996

.0929

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte. Nous pouvons commencer.

Monsieur Keyes, je ne voudrais pas rater ça. C'est le syndicat du blé des Prairies.

M. Keyes (Hamilton-Ouest): Je retiens mon souffle.

Le président: J'en suis sûr.

Bienvenue. C'est la trentième réunion de notre comité à ce sujet. Nous étudions la commercialisation des ports et de la voie maritime.

.0930

Vous avez déjà comparu devant un comité parlementaire, vous avez donc une idée de notre procédure. Nous aimerions que votre déclaration ne dépasse pas 10 minutes afin que les membres du comité puissent avoir quelques mots avec vous - de la façon la plus aimable possible.

Veuillez commencer.

M. Alex Graham (président, Alberta Wheat Pool): Merci beaucoup. Bonjour, monsieur le président, membres du comité. C'est assurément un plaisir pour nous que de pouvoir vous rencontrer aujourd'hui.

Je suis président de l'Alberta Wheat Pool ainsi que de Prince Rupert Grain, le nouveau silo à grain de l'île de Prince Rupert. Je suis accompagné de Rick Dalgliesh de la division des silos de Manitoba Pool et de Rick Wansbutter, directeur, marketing et transport, du Saskatchewan Wheat Pool.

Je vais consacrer quelques secondes à vous présenter nos coopératives. Ensemble, les silos d'Alberta Pool, de Sask Pool et de Manitoba Pool manutentionnent près de 60 p. 100 des grains, des oléagineux et des cultures spéciales qui sont livrés à l'un des 800 silos de notre réseau dans les Prairies. Plus de 30 millions de tonnes des grains, des oléagineux et des cultures spéciales que nous produisons dans l'Ouest sont exportés chaque année. Les exportations jouent donc un rôle important pour nous.

Seul ou conjointement, les trois syndicats possèdent et exploitent collectivement des silos à grains dans les ports de Vancouver, Prince Rupert, Thunder Bay et Hamilton. Nous sommes d'importants utilisateurs de tous les services maritimes touchés par le projet de loi sur lequel nous nous penchons, le projet de loi C-44.

Prairie Pools a envoyé un mémoire à votre comité, il y a quelque temps. Je suppose que vous en avez tous un exemplaire. Vu le peu de temps dont nous disposons, je ne vous en donnerai pas lecture. Nous aimerions plutôt en aborder les points principaux et entamer rapidement la discussion avec votre comité.

Je pense que c'est ce que vous souhaitez, monsieur le président.

D'importants changements se sont produits depuis quelques années dans notre secteur en ce qui concerne la production, la manutention et le transport des grains et des oléagineux. La Loi sur le transport du grain de l'Ouest, qui protégeait le transport du grain en le réglementant, contenait des dispositions relatives à la répartition des wagons par le gouvernement et accordait d'importantes subventions au transport, a été abrogée le 1er août 1995. Avant même que notre secteur n'ait pu s'habituer à la Loi de 1987 sur les transports nationaux, le gouvernement l'a modifiée.

Comme de nombreux membres du comité s'en souviendront, nous avons comparu devant vous et nous restons convaincus que les dispositions de cette loi qui protégeaient les expéditeurs ont été fortement affaiblies et les expéditeurs n'ont plus aucun moyen efficace de faire contrepoids au monopole qu'exercent les compagnies de chemin de fer.

Vous savez certainement, monsieur le président, combien je suis déçu de n'être pas parvenu à obtenir que cette loi soit amendée comme il l'aurait fallu.

À cause de tous ces changements, le regroupement et le remodelage du secteur du grain dans les Prairies se sont accélérés. Les syndicats et les autres sociétés céréalières des Prairies sont en train de consacrer des centaines de millions de dollars à la destruction des vieilles installations de manutention et à la construction d'installations multifonctionnelles plus grandes et plus centrales.

Notre secteur s'efforce d'améliorer l'efficacité du réseau de transport du grain et le gouvernement devrait lui aussi jouer un rôle important. Nous pensons notamment qu'il pourrait faire preuve de leadership en matière de transport maritime.

Nous étions très optimistes quand le comité a publié son rapport intitulé Une stratégie maritime nationale en 1995. Cette stratégie signalait sans ambiguïté de nombreux problèmes existant dans le réseau des transports maritimes et elle proposait des mesures audacieuses pour y remédier. Or, le projet de loi C-44 va beaucoup moins loin que cette stratégie. Au lieu d'améliorer l'efficacité et de réduire les coûts, il risque fort d'augmenter les dépenses dans l'ensemble du réseau.

Nous sommes en faveur de la commercialisation des ports canadiens. La dissolution de la Société canadienne des ports et la création des autorités portuaires canadiennes accordera aux ports une plus grande souplesse pour répondre aux besoins des utilisateurs. Nous espérons que cela veut également dire que des ports commercialement viables comme celui de Vancouver ne seront plus obligés de payer de gros dividendes au gouvernement fédéral, principalement pour subventionner l'exploitation de ports moins viables.

Cela supprimera un élément de coût, mais d'autres dispositions de ce projet de loi - ou plutôt l'absence d'autres dispositions - annulera cet effet positif, en particulier dans le domaine du pilotage. Bien que le comité des transports ait recommandé que les services de pilotage soient commercialisés et que l'on examine les zones de pilotage obligatoire pour voir si leur existence est encore nécessaire pour assurer la sécurité et la protection de l'environnement, le projet de loi C-44 ne prévoit aucune mesure pour accroître la concurrence dans ce domaine. Le pilotage représente plus de 20 p. 100 des redevances portuaires à Vancouver et à Prince Rupert. Il coûte plus cher pour les gros navires et les chargements nécessitant plusieurs accostages.

.0935

Les expéditeurs sont tenus par la loi d'utiliser les pilotes et, en conséquence, ils doivent assumer le coût élevé de ce service sans que les administrations compétentes n'aient à en améliorer l'efficacité ou la qualité. Cela n'est pas conforme à l'orientation adoptée par le gouvernement en matière de transport du grain.

Comme je l'ai déjà expliqué, d'importants changements sont intervenus dans notre secteur sous les auspices de la réglementation et de la commercialisation. La commercialisation du pilotage nous permettra de faire des économies et sera également conforme à l'orientation adoptée par le gouvernement du Canada. Nous prions instamment votre comité de présenter à nouveau au gouvernement du Canada les recommandations sur le pilotage qui figuraient dans la stratégie maritime nationale de 1995.

À notre avis, ce projet de loi présente également d'autres carences. Il est nécessaire - vraiment nécessaire - d'avoir un mécanisme de règlement des différends afin d'offrir un recours aux utilisateurs lorsqu'ils ont l'impression de n'être pas traités de façon équitable par une administration portuaire ou qu'ils ont l'impression d'être désavantagés par rapport à leurs concurrents.

Le paragraphe 42(1) stipule que l'administration portuaire est tenue d'éviter la discrimination entre les utilisateurs ou l'octroi d'un avantage déraisonnable à un utilisateur. Elle ne prévoit toutefois aucun mécanisme permettant de faire respecter cette disposition.

Les autorités portuaires devront également financer les investissements destinés aux utilisateurs des installations portuaires. Le projet de loi ne les autorise pas à offrir en garantie des biens leur appartenant. À notre avis, cela crée deux problèmes. Le coût des investissements sera plus élevé si de telles garanties ne peuvent pas être offertes. Deuxièmement, tous les utilisateurs seront obligés de contribuer au coût de ces investissements même s'ils n'en profitent pas et même, en fait, si c'est un concurrent qui en profite. Les expéditeurs n'ont aucun recours s'ils sont d'avis qu'ils sont défavorisés par rapport à leurs concurrents.

Prairie Pools juge inquiétantes les dispositions du projet de loi concernant la constitution du conseil d'administration des nouvelles autorités portuaires canadiennes. Il ne faudrait pas limiter l'éventail possible des candidats potentiels et les utilisateurs devraient activement participer à leur sélection. Nous pensons que le système utilisé pour la constitution du conseil d'administration du groupe à but non lucratif qui exploitera la Voie maritime du Saint-Laurent pourrait être également utilisé pour les autorités portuaires canadiennes.

En ce qui concerne la voie maritime, la proposition d'en confier l'exploitation à une organisation à but non lucratif ne nous inquiète pas particulièrement. Nous voudrions toutefois lancer une mise en garde au comité et au gouvernement du Canada: les coûts supplémentaires imposés à notre secteur par ce projet de loi et le recouvrement des dépenses de la Garde côtière pourraient très facilement rendre la voie maritime non concurrentielle.

Certains ont estimé que, si ce projet de loi avait été en vigueur l'année dernière, les frais correspondants auraient ajouté plus de 2 $ par tonne aux coûts d'utilisation de la voie maritime. Cela aurait suffi pour que, du point de vue financier, on puisse envisager de passer ailleurs, en empruntant par exemple les voies fluviales du Missouri et du Mississippi. Nous sommes en effet actuellement très proches de cette limite.

Pour conclure, nous pensons que ce projet de loi néglige des possibilités très réelles de réaliser des économies et de réduire fortement le coût du réseau de transport maritime. Nous prions instamment votre comité de s'inspirer de son propre rapport de mai 1995 au moment d'apporter les modifications nécessaires à ce projet de loi.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Crête.

[Français]

M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): Merci de votre présentation. J'ai parcouru rapidement votre mémoire et j'aimerais que vous précisiez un peu la question du recouvrement des coûts. Vous affirmez que si l'opération gouvernementale se réalisait, on pourrait assister à un changement dans votre choix de routes de transport pour vos produits. Vous parlez entre autres de la ligne Missouri - Mississippi et d'autres effets qui résulteraient du recouvrement des coûts. J'aimerais que vous précisiez votre pensée à cet égard.

.0940

Est-ce que vous seriez favorable à ce que le projet de loi C-44 prévoie un mécanisme qui ferait en sorte que l'on exige une autorisation à la fois du ministère des Transports et du ministère des Pêches et des Océans avant que des changements au système actuel n'entrent en vigueur?

[Traduction]

M. Graham: Vous pourriez peut-être préciser un peu mieux le sens de la deuxième question.

[Français]

M. Crête: En ce qui concerne la politique de recouvrement des coûts, je me demande si une solution possible ne serait pas d'inclure dans le projet de loi C-44 une espèce de poignée de contrôle pour le ministère des Transports, afin de s'assurer que le ministère des Pêches et des Océans ne procédera pas à des changements par l'entremise de la Garde côtière sans tenir suffisamment compte des implications pour le réseau portuaire et le réseau des transports. Est-ce que cela vous semble une voie intéressante ou si vous avez d'autres solutions à nous proposer?

[Traduction]

M. Graham: Merci beaucoup.

J'aborderai d'abord la première question de Paul, qui porte sur le recouvrement des coûts. Nous ne nous opposons pas à ce que les utilisateurs de notre réseau paient les frais appropriés, mais ce qui nous inquiète est que, dans de nombreux cas, nous n'avons aucun contrôle sur ce qu'ils recouvrent réellement. Nous en faisons actuellement directement l'expérience pour ce qui est des programmes de lutte antiparasitaire en agriculture; avec la façon dont le gouvernement a structuré le recouvrement des coûts, nous devenons si peu compétitifs dans le monde que cela nous crée un gros problème.

Pour en revenir au secteur maritime, il y a plusieurs domaines dans lesquels on peut effectuer ce recouvrement des coûts auprès de nous. Nous sommes très directement concernés par le faitque - cela se rattache à votre deuxième question - le ministère des Pêches peut fortement influencer la façon dont le recouvrement des coûts est imposé ou rétabli. Deuxièmement, il exerce un certain contrôle sur la nature réelle de ces coûts. L'utilisation des brise-glace et d'autres services de ce genre sont certainement importants.

La disposition concernant le recouvrement des coûts nous inquiète parce que ce projet de loi omet, entre autres choses, d'introduire la concurrence dans le secteur du pilotage. Nous sommes forcés d'utiliser des pilotes. Cela ne nous cause pas de problème. Si on considère qu'ils sont nécessaires, il faut peut-être que nous utilisions leurs services, pour des raisons de santé et de sécurité, pour protéger l'environnement ou je ne sais quoi. Mais il serait certainement dans notre intérêt d'ouvrir quelque peu ce secteur à la concurrence afin que les utilisateurs comme nous puissent choisir les gens qu'ils utilisent et le prix qu'ils paient; or, nous ne voyons aucune disposition de ce type.

Pourrait-on ajouter un mécanisme de contrôle quelconque dans ce projet de loi? Peut-être. Je ne suis malheureusement pas expert en la matière. Je ne sais pas comment on pourrait créer un tel lien. Je trouve toutefois inquiétant qu'un autre ministère, celui des Pêches dans ce cas-ci, puisse transférer des coûts au ministère des Transports et que nous, les utilisateurs, ayons à en supporter les conséquences, à moins que nous ne disposions d'un mécanisme de règlement des différends très efficace ou d'une façon de faire appel de ces coûts s'ils ne sont pas justifiés.

[Français]

M. Crête: Le secrétaire parlementaire nous a déjà annoncé que l'étude actuelle sur le recouvrement des coûts serait soumise à un sous-comité conjoint des Transports et des Pêches et des Océans. Le sous-comité se penchera sur l'étude qui est présentement en cours et qui sera déposée. Je voulais m'assurer qu'on trouve une solution permanente dans l'avenir, parce qu'il y aura sûrement, au cours des prochaines années, d'autres opérations qui toucheront à la question de recouvrement des coûts. C'est en ce sens que je cherche une solution plus permanente. Je voulais savoir si vous aviez une idée à ce sujet.

.0945

[Traduction]

M. Graham: Rick, voulez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?

M. Richard Wansbutter (directeur, marketing et transport, Saskatchewan Wheat Pool): Ce que je voudrais réellement ajouter aux commentaires de M. Graham est la chose suivante. Plutôt que d'essayer d'instaurer des formules ou des procédures qui doivent être appliquées par un autre ministère - ce qui est toujours complexe parce que différentes interprétations sont alors toujours possibles et que cela entraîne toujours un risque d'erreur - nous pensons qu'il serait beaucoup plus efficace et certainement beaucoup plus approprié d'instaurer la concurrence. La concurrence permet, d'une façon ou d'une autre, de stabiliser les prix et de s'adapter très rapidement aux conditions du marché.

M. Graham: J'ajouterai une chose, monsieur le président, au sujet du recouvrement des coûts et de la façon de faire face à ces problèmes. Il ne faut pas oublier que les répercussions des coûts se font finalement sentir sur le marché et il faut en tenir compte. Donc, si la structure des prix dans notre pays n'est pas adaptée et si, en fait, les utilisateurs du système finissent pas payer des coûts qui ne sont pas directement reliés au transport de marchandises que ce soit sur la voie maritime ou dans les ports, notre pays se retrouvera en fin de compte non compétitif. Nous devons réellement trouver une façon de permettre à notre pays d'affronter de façon efficace ses concurrents du reste du monde et la situation dans le secteur maritime nous nuit vraiment.

Un exemple parfait de cette situation est le coût élevé des services à Prince Rupert. Pourquoi faut-il payer le pilotage 800 $ environ de l'heure au lieu de 300 $ à Vancouver? C'est parce qu'il n'y a pas de concurrence. Il faut trouver une façon de régler le problème des coûts de façon efficace.

[Français]

M. Crête: Si je comprends bien, on ne trouve pas actuellement de solutions adéquates dans le projet de loi C-44 à cet égard.

[Traduction]

M. Graham: Pas avec la structure actuelle.

[Français]

M. Crête: Merci.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Crête.

Monsieur Scott.

M. Scott (Skeena): Merci, monsieur le président.

Mon intérêt a été éveillé quand vous avez cité Prince Rupert parce que c'est la circonscription que je représente. Vous savez probablement que Kitimat est aussi un grand port. C'est sans doute le troisième pour ce qui est du volume d'expédition, mais il n'a jamais été exploité véritablement en tant que port.

Il y a trois expéditeurs privés qui sont installés à Kitimat; ils ont leurs propres quais, jetées, etc. Or, ces trois entreprises doivent payer une forte somme à Ports Canada - 150 000 $, je crois, l'année dernière - et elles ne reçoivent pratiquement aucun service en contrepartie. Pour elles, ces changements représentent une amélioration potentielle. Le système actuel ne correspond pas à ce qu'elles veulent.

J'ai quelques questions à votre intention. Premièrement, dans votre mémoire, je constate que vous avez insisté sur vos préoccupations et fait certaines observations, mais je ne trouve nulle part de recommandations spécifiques quant aux changements à apporter à ce projet de loi. Avez-vous des recommandations spécifiques de changements à faire?

M. Graham: Si vous consultez notre mémoire, vous constaterez que nous faisons en fait certaines recommandations concernant les changements à apporter à ce projet de loi et nous sommes tout à fait disposés à en discuter avec le comité.

Pour ce que vous avez dit, en commençant, au sujet de Kitimat, nous appuyons aussi fortement ce projet de loi et nous convenons qu'il faut apporter des changements radicaux à notre structure. Depuis longtemps, nous avons de vives réserves à propos de Ports Canada et du transfert de dollars depuis l'ouest du Canada vers d'autres secteurs des transports maritimes sous forme de subventions. Nous nous rendons bien compte que nous devrons parfois nous porter mutuellement aide d'une façon ou d'une autre, mais la façon dont on le fait actuellement ne convient certainement pas.

Il nous faut donc un mécanisme permettant à des ports comme Kitimat ou Prince Rupert d'avoir un bon rendement financier par eux-mêmes. Il faut assurément modifier certaines choses: leur structure, la façon dont les conseils d'administration rendent des comptes, la façon dont les administrateurs sont sélectionnés; et il faut aussi que les utilisateurs soient associés au conseil d'administration. Il faut combiner toutes sortes de choses, monsieur Scott, pour que cela puisse fonctionner.

.0950

Le président: Monsieur Jordan.

M. Jordan (Leeds - Grenville): Je pense que je pourrais être d'accord sur le plan théorique avec votre réponse à M. Scott. Notre gouvernement a cependant d'autres préoccupations.

On pourrait simplement dire qu'on peut laisser les loups se dévorer entre eux, mais je pense que nous avons aussi une obligation, nous devons continuer en quelque sorte à construire notre pays. Dans certains cas, dans les régions éloignées, on ne peut pas recouvrer tous les coûts, mais il faut néanmoins préserver le port dans l'intérêt de la population locale, en quelque sorte.

Cela n'est pas très compatible, j'en suis persuadé, avec ce que j'ai l'impression que vous dites ce matin, mais il faut de temps en temps le faire dans un pays comme le nôtre. Il ne faudrait pas que tout fonctionne de cette façon-là, sinon notre pays ne serait pas compétitif, vu la situation actuelle dans le monde. C'est toutefois un dilemme auquel les gouvernements sont très souvent confrontés. Il ne s'agit pas simplement de savoir si on réalise des profits ou des pertes, car d'autres facteurs doivent être pris en considération.

Je remarque que vous êtes particulièrement déçus par la question du pilotage, et je dois dire que vous n'êtes pas les seuls. Je pense que les seuls à apprécier ce que fait ce projet de loi en matière de pilotage sont les pilotes eux-mêmes. Ils ont une immense reconnaissance envers nous. Ils pensent que nous sommes fantastiques. Je pense donc que nous devrons réexaminer cette question.

M. Keyes: Il y aura des changements.

M. Jordan: Avez-vous entendu ce qu'il a dit?

M. Graham: Merci, monsieur Keyes. Je suis ravi de vous entendre dire qu'il y aura peut-être des changements, parce que ces mesures ne reflètent pas ce que vous disiez il y a un an et je suis content que vous soyez peut-être en train de revenir aux idées que vous aviez avant.

Pour en revenir à votre question...

M. Jordan: Ce genre de choses progresse parfois lentement, mais tant que l'on progresse...

Ma question est la suivante. On entend toutes sortes de chiffres. Hier, les pilotes nous ont dit que le coût de leurs services se montait, je crois, à deux pour cent. Vous nous dites maintenant que c'est 20 p. 100. Je pourrais comprendre que certains disent deux pour cent et d'autres quatre pour cent, ou deux pour cent et huit pour cent, mais je ne suis pas d'accord si quelqu'un dit deux pour cent et quelqu'un d'autre 20 p. 100.

Sur quoi ces chiffres sont-ils fondés? Il doit y avoir une différence dans la façon dont vous déterminez... Comment expliquez- vous cette grande différence entre deux pour cent et 20 p. 100?

M. Graham: Je ne sais pas sur quoi ils fondent leurs chiffres et je ne suis même pas sûr à100 p. 100 sur quelle base ces chiffres pourraient être calculés. Toutefois, d'après les renseignements fournis par nos gestionnaires, le coût du pilotage - en particulier à Prince Rupert, mais aussi à Vancouver dans une moindre mesure - représente très près de 20 p. 100 de l'ensemble des redevances portuaires. C'est bien de cela que nous parlons. Les pilotes peuvent recalculer ce chiffre comme ils le veulent.

Je vous dirai simplement que, pour ce qui est des pilotes, il faut en avoir un depuis les limites extérieures de la zone portuaire de Vancouver jusqu'au bassin principal, soit une distance deux fois plus grande qu'à Prince Rupert; or, le coût est deux fois plus élevé à Prince Rupert qu'à Vancouver.

M. Jordan: Oui, mais pensez-vous qu'il est juste d'attribuer l'ensemble des redevances portuaires aux services de pilotage?

M. Graham: Je parle de l'utilisation et du coût des pilotes, de rien d'autre.

M. Jordan: Mais le chiffre de 20 p. 100 inclut certaines autres choses, n'est-ce pas?

M. Graham: Les pilotes représentent 20 p. 100 de la totalité des redevances portuaires. Je veux simplement souligner qu'il faut se pencher sur cette question. Il faut introduire la concurrence dans le secteur du pilotage.

M. Jordan: Nous sommes d'accord avec vous.

M. Graham: Revenons à votre premier commentaire, votre inquiétude parce que vous avez eu, je crois, l'impression que je pensais qu'il fallait laisser les loups se dévorer entre eux.

Ne vous méprenez pas; je ne suis pas en faveur de cette mentalité. Je pense que les Canadiens doivent coopérer. Nous devons nous efforcer de faire face à nos concurrents ensemble. Nous devons trouver des solutions ensemble et, pour y parvenir, nous devons faire très attention et mettre l'accent sur ce que sont réellement nos coûts sans laisser mettre en place un système qui permet à des gens de transmettre certains coûts sans qu'on ait un mot à dire à ce sujet.

.0955

Donc, si le gouvernement du Canada est d'avis que, dans l'intérêt général de la nation canadienne, il faut faire quelque chose de particulier en matière de transport, de marine ou d'autre chose, je suis tout à fait d'accord, pourvu que tous les contribuables du Canada contribuent à ce qui est censé assurer la construction du pays et non pas seulement les utilisateurs du système. Il faut répartir les coûts et traiter tout le monde de façon juste et équitable.

Donc, monsieur Jordan, je ne suis pas de ceux qui disent qu'il faut laisser les loups se dévorer entre eux. On n'a pas une telle mentalité au Canada et nous ne survivrions pas très longtemps ainsi.

M. Jordan: Je suis content que vous ayez dit cela.

Je n'ai pas d'autre question.

M. Wansbutter: Monsieur le président, je voudrais ajouter quelque chose à ce qu'a ditM. Graham au sujet des frais de pilotage, parce qu'il me semble qu'il règne une certaine confusion à cet égard. Pour ce qui est des chiffres, je peux vous citer certains de nos coûts totaux: pour un navire de 40 000 tonnes, par exemple à Vancouver, ils se montent à environ 59 000 $ et le pilotage représente 13 500 $. C'est certainement conforme au chiffre de 20 p. 100 du total des redevances cité par M. Graham et nous pouvons certainement vous fournir des détails à ce sujet.

M. Keyes: Il y a une certaine confusion au sujet du rapport entre les redevances portuaires et le coût total. Je pense que le chiffre de deux pour cent est calculé par rapport au coût total de l'expédition de grain.

Plusieurs nouveaux problèmes concernant les coûts se posent aux expéditeurs des régions captives. Je crois que certains ont parlé du coût de l'utilisation des silos dans le cadre du coût total de l'expédition de grains.

Vous mentionnez, dans votre mémoire, quelque chose que j'aimerais que vous précisiez un peu. En ce qui concerne ce mécanisme d'appel ou de recours pour les utilisateurs qui ont un problème ou un conflit au sujet de l'établissement des droits, voulez-vous dire que vous pourriez utiliser le mécanisme prévu par la LTC ou voudriez-vous une structure supplémentaire pouvant effectuer une médiation? Pouvez-vous nous dire en quelques mots comment cela pourrait fonctionner?

M. Graham: Je ne sais pas exactement quel serait le mécanisme le plus parfaitement adapté. Nous pourrions utiliser le mécanisme de règlement des différends prévu par la LTC ou l'Office des transports du Canada s'il était efficace. Nous avons l'impression que l'autre projet de loi sur les transports nous a réservé un si mauvais traitement que nous ne sommes pas sûrs que ce mécanisme nous conviendra.

M. Fontana (London-Est): Comment pouvez-vous dire qu'il ne vous conviendra pas tant que vous ne savez pas comment il va fonctionner? Vous n'avez pas été maltraité, excusez-moi.

M. Graham: Nous avons tendance à croire que si et nous ne pensons donc pas que ce mécanisme va en fait donner des résultats satisfaisants. Si on établissait un lien avec celui-ci, avec peut- être quelques modifications... à moins qu'il ne faille régler cela dans la Loi maritime du Canada elle-même et je vous laisse le soin d'en décider parce que c'est votre rôle quand vous décidez quel type de loi il faudrait adopter.

Le président: Absolument.

Si vous me le permettez, il y a une autre chose qui m'a intéressé, moi qui découvre seulement tout ce système. Étant donné l'accent que l'on met sur le pilotage, j'ai été étonné, lorsque nous sommes allés sur la côte ouest, du peu de commentaires présentés à ce sujet. En fait, j'ai posé personnellement plusieurs questions aux administrations portuaires. Cette question suscitait peu de préoccupations.

J'ai remarqué qu'on s'en préoccupait plus, un peu comme vous le faites, sur la côte est et le long de la voie maritime, mais très peu sur la côte ouest. Je pense qu'il y a eu seulement une intervention...

Cela m'a paru étrange parce que j'avais entendu soulever cette question, me semble-t-il, dans les Prairies. La question des pilotes vient quelque part après celle du Canadien Pacifique et des banques, mais ce n'est pas ce que j'ai entendu dire par les gens de ce secteur sur la côte ouest.

M. Graham: Il y a peu de chances qu'on vous en parle beaucoup à Vancouver, si c'était là que vous étiez, parce que les services de pilotage sont répartis sur un groupe beaucoup plus important de participants et d'utilisateurs. La nature de leurs rapports est définie depuis longtemps à Vancouver et on craint toujours de risquer d'offenser quelqu'un. En gros, ils ne se critiquent jamais mutuellement quand ils interviennent ensemble dans une audience publique, et cela n'est donc pas surprenant.

.1000

Quoi qu'il en soit, le problème reste très clair. Il y a une absence flagrante de concurrence. On le remarque vraiment à Prince Rupert quand on essaie d'y faire venir les pilotes puisqu'il ne peut y avoir tout simplement aucun pilote qui vive sur place. Pourquoi est-ce impossible? Parce que la question est du ressort des administrations du pilotage et que, d'après elles, leurs membres doivent habiter à Victoria ou Vancouver. Donc, chaque fois qu'il nous en faut un, nous payons le billet d'avion, nous payons les notes d'hôtel, nous payons les repas, nous payons le logement, nous payons les frais de divertissements. Nous assumons tous ces frais chaque fois que les pilotes décident de venir nous fournir leurs services d'une façon ou d'une autre. Il nous manque un mécanisme instaurant une concurrence.

Le président: Je meurs d'envie de vous interroger au sujet de ces frais de divertissements, mais je ne le ferai pas.

M. Graham: Vous préféreriez sans doute rester dans l'ignorance et moi aussi.

M. Fontana: Vous voulez parler de la concurrence et nous convenons tous que, collectivement, en tant que partenaires dans nos efforts pour livrer nos produits sur les marchés mondiaux... le transport représente bien entendu un facteur de coût très important. C'est fondamentalement pour cette raison qu'a été adoptée la Loi sur les chemins de fer et qu'on a pris différentes autres initiatives pour diminuer le coût global des transports. C'est le seul moyen pour nous d'être concurrentiels.

Mais vous avez également un rôle important à jouer à cet égard, il s'agit des droits que vous imposez à vos utilisateurs. Vous pouvez peut-être me le dire parce que je crois que vous avez essayé de régler ce problème pour ce qui est des droits d'utilisation et de tout le reste... si le gouvernement peut récupérer seulement quatre pour cent des dépenses de la Garde côtière, par exemple, quatre pour cent des 700 millions de dollars environ que coûtent les services que nous fournissons à la population canadienne, aux utilisateurs canadiens du système... Il est certain que si vous appliquez le même genre de principe à vos propres activités, cela serait pour vous un élément déterminant. Il est évident que le gouvernement a un rôle important à jouer pour faire en sorte que nous récupérions certaines dépenses.

Ma première question devrait donc peut-être être la suivante. Dites-nous quels frais d'utilisation ou droits d'utilisation vous paraissent injustifiés. Vous avez dit que vous ne pouviez pas fixer ces coûts ou n'avez pas votre mot à dire à leur sujet. Quels sont les coûts qu'il vous paraît injuste de faire payer aux utilisateurs du système?

Deuxièmement, en ce qui concerne les droits que vous imposez aux producteurs, les frais d'utilisation des silos sont beaucoup plus élevés au Canada qu'aux États-Unis, même si le coût du transport de nos produits par chemin de fer est beaucoup plus bas qu'aux États-Unis. Pouvez-vous me dire comment nous allons devenir plus concurrentiels avec les frais que vous imposez à vos producteurs.

M. Wansbutter: Je vais essayer de répondre d'abord aux dernières questions.

Vous avez tout à fait raison, monsieur Fontana. Nous prélevons des droits plus élevés au Canada qu'aux États-Unis, mais les deux situations ne sont pas toujours comparables.

M. Fontana: Pourquoi?

M. Wansbutter: Premièrement, nous réduisons nos coûts. Ce que les producteurs peuvent voir ou ce que vous pouvez voir dans le tarif tel qu'il est publié ne correspond pas nécessairement à ce que paient les producteurs. Chacune des sociétés céréalières comme nous restitue des sommes importantes. Je veux dire par là que nous subventionnons ou couvrons une part importante du coût du transport par camion. Je sais que les trois syndicats du blé des Prairies, de même que nos concurrents, assument une part importante des frais de transport par camion payés par les producteurs, jusqu'à5 $ et parfois 6 $ la tonne. Il faut tenir compte de cela.

L'autre élément très important est que le barème des frais de silo est peut-être aussi publié, mais ces frais sont réduits pour plusieurs produits afin de nous permettre de rester concurrentiels. C'est un élément tout à fait primordial.

En disant qu'on ne peut pas comparer notre situation avec celle des États-Unis, je voulais dire que la grande différence entre les deux pays, tout au moins pour les sociétés de manutention, est que nous faisons payer 7 $ l'entreposage dans un silo primaire alors qu'aux États-Unis, cela coûte entre 2,50 $ et 3,50 $. Les Américains préfèrent renoncer à ces droits et s'assurer d'importants revenus par la commercialisation. C'est de cette façon que des sociétés comme Cargill, ADM, ConAgra et Harvest peuvent survivre. Ce n'est pas au niveau des services primaires ou des silos mais avec les droits de commercialisation qu'elles ont de gros revenus. Les sociétés céréalières comme nous ne peuvent pas le faire avec les grains relevant des offices de commercialisation. Nos revenus proviennent seulement des services tarifés et non pas des droits de commercialisation. Cela fausse un peu la situation, monsieur Fontana.

M. Fontana: Mais vous subventionnez certains de vos bons clients, comme le fait le gouvernement canadien.

M. Wansbutter: Je n'appellerais pas cela un subventionnement, mais un souci de rester compétitifs. C'est pour cela que nous choisissons de faire livrer le grain en camion.

M. Fontana: C'est donc comme nous pour certaines des subventions concernant la Garde côtière que nous facturons à l'ensemble des contribuables et non pas seulement aux utilisateurs.

.1005

M. Wansbutter: Je pense que la différence est néanmoins que notre système doit fonctionner en autarcie. Nos revenus doivent nous permettre de couvrir nos frais et de reverser quelque chose à nos membres.

M. Fontana: Le gouvernement n'a-t-il pas des obligations identiques?

M. Wansbutter: Je ne le conteste pas.

Le président: Monsieur Dalgliesh, voulez-vous dire quelque chose?

M. Richard Dalgliesh (directeur, Administration et commercialisation, Manitoba Pool Elevators): J'allais juste intervenir au sujet de la première partie de votre question qui portait sur les coûts.

Avant tout, les aides à la navigation que nous utilisons dans la voie maritime servent dans une large mesure non pas à la flotte commerciale mais aux utilisateurs privés, comme les navires de plaisance et les utilisateurs non commerciaux. Je pense que je dois également parler de la différence entre les taxes que nous devons payer et celles qui sont prélevées aux États-Unis - les taxes qui nous sont imposées à Thunder Bay. Je parlerai seulement de Thunder Bay, mais si M. Graham veut parler de Prince Rupert, il pourra le faire. Elles sont également intégrées dans notre barème, nous ne pouvons pas faire autrement. Comme Rick l'a souligné, nous abaissons nos barèmes pour certains produits afin d'être concurrentiels non seulement à Thunder Bay, mais dans tout le pays.

M. Fontana: Quand vous parlez des taxes, disons les choses comme elles sont. Ce ne sont pas des taxes fédérales, mais municipales. Vous devriez donc critiquer les autorités municipales. Nous avons critiqué hier les gouvernements provinciaux à cause de leurs politiques en matière de taxe d'accise et tout le reste. Disons les choses comme elles sont.

M. Dalgliesh: Mais vous vouliez qu'on parle de ce qui entre dans les droits que nous faisons payer.

M. Fontana: Jusqu'à présent, vous ne m'avez parlé que des aides à la navigation. Pour dire vrai, nous imposons des droits d'utilisation aux navires de plaisance, au grand dam des plaisanciers qui vont maintenant avoir à payer quelque chose pour l'utilisation de l'infrastructure publique. Je comprends cette politique.

Donc, à votre avis, les droits concernant les aides à la navigation ne sont pas justifiés?

M. Dalgliesh: À l'heure actuelle, non. L'utilisation que nous en faisons est loin de correspondre aux droits qu'on nous fait payer.

Le président: Monsieur Graham.

M. Graham: Monsieur le président, pour terminer cette partie de la séance et cette discussion avec M. Fontana, je voudrais dire que nous comprenons tous qu'il est nécessaire que les utilisateurs du système paient leur juste part des coûts correspondants, quel qu'en soit le montant. Ce projet de loi nous inquiète parce que nous trouvons frustrant de ne pas avoir notre mot à dire au sujet de ce en quoi consistent vraiment ces coûts. Voilà le problème. Quand on doit payer la facture, on devrait avoir son mot à dire au sujet de ce qui est facturé. Il ne nous semble pas que ce projet de loi reflète une telle attitude et nous pensons que nous n'allons pas être en mesure de régler cette question de façon appropriée. Nous lançons seulement une mise en garde parce que nous nous engageons sur un terrain entièrement nouveau.

Je vous ai parlé brièvement de l'examen des pesticides et du groupe chargé de la lutte antiparasitaire. La situation échappe maintenant à tout contrôle. Il faut pouvoir régler ce genre de problèmes.

Pour ce qui est des systèmes de positionnement global, le chiffre de cinq pour cent nous paraît insuffisant. Voyons, si un navire qui a un GPS à bord entre dans le port de Prince Rupert ou de Vancouver, qu'est-ce que cinq pour cent? C'est un chiffre insuffisant. Je pense que ce devrait être au moins 20 p. 100.

Sur la côte ouest, nous utilisons les services d'un pilote pour faire rentrer un navire alors que le capitaine lui-même est déjà passé par ce détroit plus souvent que le pilote. Or, ces restrictions nous sont imposées. Il n'y a pas de moyen terme entre les cas où il faut y avoir recours et les cas où ce n'est pas nécessaire, pas plus que pour la latitude dont on devrait disposer au moment de décider si on a ou non besoin d'un pilote et si on devrait utiliser ou non ses services. Les GPS ont certainement un rôle important à jouer en matière de sécurité et de choses de ce genre.

Le président: Nous nous sommes attardés un peu plus que prévu sur cette question, mais je pense qu'il s'agissait d'une discussion importante. Il est question ici de certains éléments sur lesquels nous allons nous pencher de très près. Nous allons prendre en considération ce que vous avez dit au sujet de la détermination du niveau des services et des droits ainsi que de la possibilité de mettre en place une forme de mécanisme d'appel.

Je vous remercie pour le temps que vous avez passé ici aujourd'hui.

Je voudrais saluer le retour de monsieur Caron.

.1010

C'est très bien de vous revoir parmi nous, vous nous avez manqué.

J'invite à présent Mme Paquin et M. Dubreuil de Logistec Corporation à s'avancer.

[Français]

Mme Madeleine Paquin (présidente et chef de la direction, Logistec Corporation): Merci, monsieur le président. Je m'appelle Madeleine Paquin et je représente Logistec Corporation. Mon collègue, Serge Dubreuil, est président de Logistec Arrimage, qui est l'activité principale de Logistec.

Premièrement, nous tenons à vous remercier de nous permettre de vous faire part de nos commentaires quant au projet de loi sur la nouvelle Loi maritime.

Logistec est une compagnie publique canadienne qui fournit des services dans le secteur maritime et environnemental aux sociétés industrielles. Fondée en 1952, elle offre ses services dans le domaine de l'arrimage et gère des terminaux maritimes. Pour répondre constamment aux exigences de sa clientèle, elle a étendu ses activités grâce à diverses acquisitions de terminaux maritimes spécialisés. Les activités d'arrimage et de gestion de terminaux maritimes constituent80 p. 100 du revenu annuel de Logistec, soit quelque 95 millions de dollars.

De plus, dans le secteur de la navigation, on reconnaît Logistec pour son implication dans le cabotage et plus particulièrement pour son rôle dans le ravitaillement annuel des villages de l'Arctique. Logistec veille également aux opérations d'un vaste réseau de services d'agences maritimes d'un océan à l'autre.

En tout et pour tout, Logistec compte quelque 350 employés permanents au Canada seulement. La compagnie embauche aussi quelque 3 000 débardeurs qui oeuvrent dans les divers ports de l'Est du Canada. Comme vous pouvez le constater, le principal champ d'activités de Logistec gravite autour des activités portuaires. Pour nous, il est d'une importance capitale que tout changement au réseau assure un environnement d'affaires compétitif et équitable.

[Traduction]

Quand il a introduit cette loi, le gouvernement fédéral avait pour objectif d'améliorer l'efficacité de notre système portuaire. Cela étant, il doit tenir compte des changements que nos ports ont subis sur les plans politique et économique, afin que notre système portuaire canadien soit concurrentiel et efficace, et qu'il ait une vocation commerciale. Les ports doivent être exploités comme des entreprises, avec transparence. Nous nous réjouissons de voir que le gouvernement a proposé cette mesure et nous appuyons les objectifs auxquels elle doit répondre.

C'est d'ailleurs en regard de ces objectifs que Logistec va vous faire part de ses préoccupations, aujourd'hui. À noter, cependant, que nous nous limiterons au secteur de la politique portuaire. Les fondations et l'avenir de notre entreprise dépendent de cette mesure législative, puisqu'elle instaurera un contexte dans lequel nous prendrons nos décisions, surtout en ce qui a trait à notre stratégie de croissance.

Nous allons commencer par vous parler de ce qui nous préoccupe dans le cas des APC. Nous allons donc vous parler du rôle et du mandat à confier aux administrations portuaires pour qu'on soit certain de disposer d'un système efficace favorisant la participation des utilisateurs. Deuxièmement, nous vous parlerons de la structure de coût des APC et de l'incidence des droits qu'on entend imposer. Troisièmement, nous vous ferons part de nos remarques sur les politiques et les procédures en matière de reddition de comptes ainsi que sur la composition des conseils.

Nous conclurons par quelques mots sur le critère d'admissibilité et sur l'importance qu'il y a d'appliquer ce critère. Nous vous parlerons ensuite des ports régionaux et de leur cession par le gouvernement fédéral, enfin, nous soulignerons à quel point il est nécessaire de pouvoir compter sur un organisme de réglementation et d'application pour cette loi.

D'abord, le rôle que les APC devront remplir, par rapport à celui de l'entreprise privée, en ce qui a trait à la prestation des services offerts dans le périmètre des ports.

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Nous, qui sommes l'une des plus grosses entreprises d'acconage, croyons que les exploitants de terminaux ont un rôle clé à jouer dans le succès d'un port à vocation commerciale. Ils remplissent un rôle qu'on ne doit pas sous-estimer.

La clientèle étant moins nombreuse, mais composées d'entreprises plus grosses, les besoins se sont spécialisés et il est désormais plus coûteux d'y répondre. À l'instar des ports, nous essayons de maximiser les volumes traités et nous efforçons d'appliquer des solutions à la pointe de la technologie pour répondre aux besoins spécialisés. Tout comme les ports, et contrairement à la plupart de ses utilisateurs-clients, c'est l'importance de nos investissements, difficilement transférables, qui assure notre pérennité.

Outre le phénomène de spécialisation accrue, une deuxième raison fait que les exploitants de terminaux ont un rôle plus important à jouer dans la réussite des ports.

Comme le gouvernement débloque de moins en moins de subventions pour la construction d'infrastructure, il est de plus en plus nécessaire de se tourner vers le secteur privé pour combler la différence. Au cours des douze derniers mois seulement, Logistec a été invité à investir dans les entrepôts de Contrecoeur, de Montréal et de Saint John. Cela étant, il est essentiel que le nouveau contexte soit intéressant pour attirer les investissements privés et permettre l'exercice d'une concurrence loyale.

Cela étant posé, il faut modifier et bien préciser la répartition des responsabilités entre l'administration portuaire et les exploitants de terminaux. À cet égard, nous estimons que vous n'allez pas assez loin quand, dans l'article 24, vous limitez le mandat des ports aux seules activités directement liées aux expéditions, à la navigation, au transport de passagers et de marchandises ainsi qu'à la manutention et à l'entreposage de marchandises.

Il conviendrait de réduire davantage les pouvoirs confiés aux ports. Il faudrait que le mandat de ces organismes soit limité à la gestion, à l'administration ainsi qu'à l'aménagement des terrains et des autres infrastructures aux fins de la navigation commerciale, ainsi qu'à la réglementation de la sécurité du trafic et aux politiques et règlements environnementaux.

Nous avons cru comprendre que le gouvernement s'est fixé pour politique de confier à l'entreprise privée tout ce qu'elle est en mesure d'assumer. Eh bien, on tendrait beaucoup plus à la réalisation de cette politique si la loi interdisait aux ports de faire concurrence à l'entreprise privée. Ainsi, les entreprises qui ont déjà investi beaucoup pour offrir des services spécialisés auraient confiance dans le système et l'on encouragerait l'entreprenariat, qui est la pierre angulaire de la création d'emplois au Canada.

Ainsi, les ports ne devraient pas pouvoir entreprendre des activités telles qu'on pourrait avoir l'impression qu'ils font concurrence à leurs utilisateurs, autrement dit, aux compagnies d'acconage ou aux exploitants de terminaux, aux services de remorquage maritime, aux entreprises de transport de passagers ou de transbordement, etc. Cela ne revient pas à dire, cependant, que les terrains réservés à des aménagements futurs devraient être loués à des tierces parties, à court terme.

Qui plus est, nous ne pensons pas qu'il faudrait faire d'exceptions dans le cadre des opérations actuelles. Les orientations et les mandats doivent être clairs. À l'heure actuelle, les exceptions à ces pouvoirs limités sont formulées de façon que les choses puissent fonctionner comme d'habitude. Ne devrait-on pas en profiter pour corriger les anomalies du passé? Il est préférable de privatiser et de changer les choses.

Ainsi, si une activité ne relève pas du mandat confié aux APC, on devrait pouvoir disposer d'un mécanisme permettant de supprimer les exceptions. Par exemple, un terrain qui ne servirait pas aux activités portuaires, et qu'on ne compterait pas utiliser à ce titre dans l'avenir, devrait être classé excédentaire et retirer de la responsabilité des ports. Les filiales ou les activités entreprises par les filiales devraient être mises aux enchères pour être confiées à une tierce partie. Il faudrait imposer un certain délai à la correction des exceptions.

Les ports doivent être rentables et efficaces. Ils doivent être compétitifs, par rapport aux ports américains et par rapport aux ports régionaux.

En tant qu'organe de l'État, les ports étaient exemptés de certaines taxes, qu'ils compensaient parfois sous la forme de versements. N'y aurait-il pas une façon de limiter le fardeau des ports et d'éviter une augmentation importante des droits, afin d'assurer la compétitivité sur le plan des coûts? Les ports américains, eux, ne paient pas ou presque pas de taxes et, la plupart d'entre eux sont fortement subventionnés. Comme nous devons leur livrer concurrence, en tant que voisins, nous recommandons d'adopter des structures tarifaires s'approchant de celles en vigueur aux États-Unis.

Nous recommanderions, par exemple, que les appointements prennent la forme de dividendes plutôt que de droits prélevés sur les recettes. Même si nous ne remettons pas en question l'adoption d'une redevance destinée au gouvernement fédéral au titre l'utilisation de ces installations portuaires essentielles, nous croyons qu'il serait inapproprié, dans certains cas, d'imposer une redevance sur le chiffre d'affaire brut, car celle-ci pourrait miner la compétitivité du port. Après tout, chaque port a une structure de coût qui lui est propre.

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Par exemple, le port de Saint John va devoir se lancer dans d'importantes dépenses de dragage. En outre, puisqu'on veut à présent que les ports fonctionnent de plus en plus comme des entreprises, ne conviendrait-il pas davantage d'adopter un ratio des dividendes aux bénéfices, semblable à ce qu'on attend normalement des sociétés cotées en bourse? Ces ports devront fonctionner comme des entreprises sans but lucratif, mais ils devront tout de même dégager des excédents pour pouvoir entreprendre les énormes investissements qui seront nécessaires à leur viabilité à long terme.

Notre troisième sujet de préoccupation relativement aux APC, concerne principalement le plan d'utilisation des sols. Nous nous sommes réjouis de voir que tout ce qui entoure la reddition de comptes est désormais plus structuré et, dans le fond, on se rapproche des exigences faites aux sociétés bourse, comme la nôtre. De plus, nous sommes d'accord que l'on exige désormais un préavis en cas de changement important devant être apporté au plan et nous croyons que cette disposition garantira le respect des objectifs clés.

Mais pour aller encore plus loin dans ce sens, nous suggérons le retrait de l'article 49 qui énonce toutes les exceptions à l'obligation de publier un avis public en cas de modification projetée au plan d'utilisation des sols. Nous souhaiterions qu'une version publique de ce plan puisse être rendue publique n'importe quand sur demande. Le plan d'utilisation des sols est le document le plus important qui décrit le développement commercial stratégique. Il présente en effet l'aménagement des installations terminales qui, dans tous les cas, doit répondre aux besoins d'un utilisateur et se justifier sur un plan économique. Cela permettra de favoriser la transparence ainsi que des communications positives et ouvertes, pour tous les utilisateurs.

M. Serge Dubreuil (président, Logistec Stevedoring Inc.): Notre quatrième préoccupation touche à la composition des APC, et plus exactement à la taille des conseils ainsi qu'aux procédures de nomination à ces conseils.

Tout d'abord, nous sommes d'avis que le nombre d'administrateurs devrait être maintenu au minimum et nous recommandons d'opter pour un maximum de neuf plutôt que pour un minimum de neuf et un maximum de onze. Les conseils doivent être le reflet de ce qui se passe du côté de la clientèle, puisqu'il y a de moins en moins de clients et que ceux-ci ont de plus en plus de pouvoir, qu'ils sont de plus en plus présents. On retrouve ce même phénomène au niveau des conseils d'administration des entreprises canadiennes, où les administrateurs en nombre réduit ont plus de pouvoir et plus de responsabilités qu'auparavant. Il serait plus utile de pouvoir compter sur de petits conseils, composés de gens disposés à consacrer plus de temps pour comprendre les activités des ports et leur imprimer l'orientation voulue, afin de s'assurer qu'ils répondent aux besoins des clients, dans les limites de leur mandat, que de s'en remettre à de gros conseils, contribuant peu à la mission des ports.

Deuxièmement, pour ce qui est de la composition des conseils, nous avons cru comprendre que des représentants seraient nommés par les trois ordres de gouvernement: le fédéral, le provincial et le municipal. Nous nous réjouissons, également, de voir qu'on exigera des candidats qu'ils possèdent une expérience dans le domaine du transport ou dans celui des affaires. Il est également intéressant de constater qu'il ne pourra s'agir de fonctionnaires. Cependant, il conviendrait de préciser davantage les conditions des nominations. Voici, pour l'instant, comment se lit l'alinéa 12(1)e):

Nous avons trois recommandations à vous faire en vue de donner plus de poids à cette disposition, en regard des objectifs d'ensemble de la politique.

Premièrement, afin d'atténuer le poids du politique, nous croyons que les candidats devraient être recommandés par les utilisateurs. Pour cela, il devrait exister un mécanisme leur permettant de coucher un nom ou plus sur une liste à partir de laquelle on choisirait les candidats.

Deuxièmement, les utilisateurs ne devraient pas être écartés des conseils d'administrations. À ce propos, nous recommandons très fortement d'abroger le paragraphe 14e) qui exclut les utilisateurs des conseils APC. Il faudrait réserver un siège aux fournisseurs de service et un aux transporteurs-clients. Ce faisant, on aurait la certitude que les utilisateurs ont directement voix au chapitre et qu'ils n'auront pas, pour se faire entendre, à se tourner vers leur avocat ou vers une partie neutre ne possédant aucune une expérience directe des activités portuaires.

On pourrait facilement surmonter les problèmes de conflits d'intérêts, dans la mesure où ils seront étalés au grand jour et où les utilisateurs voudront effectivement les régler. En outre, il serait possible de prévoir dans le processus de mise en candidature différentes catégories d'utilisateurs ainsi que des mandats limités au conseil, par utilisateur.

Troisièmement, il nous apparaît important, à ce stade, de préciser la définition d'utilisateur. Il faut définir l'utilisateur comme étant une entreprise ayant versé, directement ou indirectement à une commission portuaire, et dans un délai donné - par exemple au cours des deux années écoulées - , des droits de port, des droits de desserte, un loyer ou des droits de quai. Cette définition devrait clairement englober les exploitants de terminaux et les entreprises d'acconage, ainsi que les autres fournisseurs de services essentiels.

.1025

En conclusion, nous sommes tout à fait favorables au concept qui nous est présenté et nous souscrivons au critère énoncé pour devenir APC et le demeurer. S'il était strictement appliqué, le critère énoncé au paragraphe 6(1) nous permettrait de disposer d'un système portuaire fort, viable, qui continuera de croître de façon efficace et rentable en fonction des échanges que le Canada entretiendra avec l'étranger. Nous insistons cependant sur le fait que ce critère doit être respecté.

Nous nous proposons à présent de passer à la question des ports régionaux, qui sont tout aussi importants dans cette problématique qui consiste à créer un système portuaire fort et viable susceptible d'appuyer et d'améliorer l'activité commerciale du Canada. Dans la Loi maritime du Canada, il est moins question des petits ports, classés ports régionaux, que des grands ports. À la façon dont nous la voyons, la loi donnera au gouvernement le pouvoir de céder ou de vendre ses propriétés. Dans certains cas, la loi donne même à des représentants du gouvernement le pouvoir de payer quelqu'un pour lui demander de reprendre un ou plusieurs ports. Il s'agit encore là d'une zone particulièrement grise pour nous, et cela nous préoccupe beaucoup. Il est encore plus troublant de savoir que cinq ports auraient déjà été vendus et que 70 lettres d'intention auraient déjà été reçues pour d'autres installations portuaires.

Tout ce processus de cession ne devrait-il pas être soumis à une procédure officielle et ouverte? Ne devrait-on pas s'appuyer sur un code de conduite pour veiller à ce que ces installations soient exploitées dans le meilleur intérêt des expéditeurs canadiens et qu'elles soient entretenues dans l'avenir? Si ces ports sont offerts au secteur privé, ne faudrait-il pas avoir recours à une procédure officielle d'appels d'offres ou de soumissions publiques?

Enfin, nous voulons rapidement parler de la question du secrétariat des ports. Bien qu'il ne soit ni nécessaire ni souhaitable de disposer d'une Société canadienne des ports de prestige, Ottawa doit veiller à ce que sa responsabilité en la matière soit assumée par un organisme crédible, faute de quoi l'objectif énoncé pourrait ne jamais être réalisé.

[Français]

En terminant, nous aimerions résumer les commentaires que nous venons d'émettre. Nous applaudissons l'initiative entreprise par le gouvernement quant à la réforme et à la modernisation du réseau portuaire. Nous sommes prêts à participer et à investir afin de nous assurer que notre réseau portuaire se développe à partir des besoins de la clientèle. Cela se fera en autant qu'on aura les dispositions nécessaires au respect d'une pratique juste, équitable et transparente.

Logistec, tout comme le gouvernement, croit qu'elle a un rôle défini à jouer. Nous entendons travailler en partenariat avec les clients et les administrations portuaires pour fournir des services efficaces et compétitifs.

Monsieur le président, distingués membres du comité, nous vous remercions de l'attention que vous avez portée à notre présentation et de nous avoir invités à vous faire part de nos commentaires sur le projet de loi C-44. Merci.

Le président: Thank you very much. Monsieur Caron.

M. Caron (Jonquière): Je vous remercie de votre présentation. Elle était très claire en ce qui concerne l'orientation que vous voyez pour les APC.

À la page 9, vous dites qu'il y a un certain nombre de critères et que ceux-ci devraient être suivis avec exactitude ou une certaine rigueur. Vous savez que l'annexe de la loi définit déjà un certain nombre d'APC.

D'après ce que je peux voir et d'après votre expérience, vous ne semblez pas entrevoir la possibilité d'augmenter le nombre d'APC au Canada au-delà de celui qui est prévu actuellement.

M. Dubreuil: Dans le projet de loi original, on parlait de sept à huit APC, alors que dans les différentes interventions publiques des derniers mois, on a vu s'accroître ce nombre jusqu'à 16. Il semble que certains critères ont peut-être été ajoutés ou que certains critères n'ont pas été complètement modifiés.

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Par contre, il nous est impossible de dire lesquels ont été respectés ou pas, parce qu'on ne connaît pas les noms des 16 ports. Lors de leurs différentes interventions publiques, le ministre Anderson et certains de ses collègues du ministère des Transports ont toutefois fait allusion à un plus grand nombre de ports. Nous sommes portés à croire que certains critères ont peut-être été élargis ou restreints, mais on ne sera pas en mesure de commenter tant qu'on ne connaîtra pas le nombre de ports impliqués et leur identité.

M. Caron: C'est une question de développement. Certains ports ne sont peut-être pas actuellement admissibles, mais le seront peut-être dans 10 ou 15 ans.

À première vue, vous ne me semblez pas voir d'un bon oeil la possibilité que des nominations dites politiques soient faites au conseil d'administration des APC, que le gouvernement au pouvoir nomme par exemple un membre qui, sans être un représentant du gouvernement, siégerait sur le conseil, puisque dans l'APC, le gouvernement a des responsabilités en termes de propriété, etc.

Nous nous retrouverions ainsi avec un modèle où le gouvernement céderait l'administration de l'APC aux usagers ou à ceux qui paient des droits. Ne limiterions-nous pas alors un peu le rôle d'intervention future du gouvernement par rapport aux orientations de certaines APC?

Mme Paquin: Trois personnes sont déjà nommées par le gouvernement, aux paliers fédéral, provincial et municipal. Les autres membres seront aussi nommées par le gouvernement à partir d'une liste que lui auront soumise les usagers. On retient toujours l'importance du rôle du gouvernement fédéral dans l'enjeu de ces ports. Ce sont des ports qui sont très importants du point de vue stratégique pour le Canada. Nous croyons que si l'entreprise privée est amenée à siéger à ces conseils, nous nous retrouverons peut-être avec un développement qui sera davantage basé sur les besoins de la clientèle.

[Traduction]

Le président: Vous avez des questions, monsieur Scott?

M. Scott: Oui, monsieur le président.

Vous avez dit que les ports américains ne paient que peu de taxes, voire aucune, et qu'ils sont fortement subventionnés. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Qui les subventionne? Le gouvernement? À quoi correspond la disparité fiscale entre le Canada et les États-Unis? Cela m'intéresse vraiment.

M. Dubreuil: Il existe toute une diversité de cas de figure aux États-Unis. Il y a les ports publics et il y a les ports privés, exploités par des entreprises privées. Certains ports publics ne paient pas d'impôts municipaux et certains financent leurs immobilisations par l'émission d'obligations municipales, à des tarifs préférentiels, non imposables pour les acheteurs. Les Américains ont recours à toute une gamme de mécanismes qui leur permettent de bâtir des infrastructures portuaires à des coûts moindres que ceux que doit subir l'entreprise privée au Canada. C'est là, la différence.

M. Scott: Vous recommandez également qu'on opte pour des dividendes à la place de droits. Ce qui vous inquiétait, c'est que ces droits étaient calculés sur le chiffre d'affaires brut. Vous préféreriez un dividende, calculé tout en bas des états financiers. D'ailleurs, je crois que ce que vous voulez vraiment, c'est un partage des bénéfices.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, ou ce qu'on peut lire dans votre mémoire est-il le reflet de l'état actuel de vos réflexions en la matière?

M. Dubreuil: Ce qui nous préoccupe surtout dans les droits calculés sur le chiffre d'affaires brut, c'est que les ports devront effectuer d'importants investissements de capitaux dans l'avenir. Certains se trouvent dans une fort bonne position, autrement dit avec des installations sur lesquelles ils pourront compter dans les 20 prochaines années, mais certains devront effectuer des réparations d'envergure.

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Nous pensons que des honoraires fixes, correspondant à un pourcentage du chiffre d'affaires brut, pourraient imposer une charge aux administrations portuaires, qui seraient appelées, plus tard, à investir lourdement dans des grands travaux d'infrastructure. Tant que l'administration portuaire locale peut s'appuyer sur un plan bien articulé et qu'elle peut justifier la constitution de réserves en vue d'entreprendre plus tard des grands travaux d'infrastructure, nous pensons qu'il serait préférable qu'elle verse des dividendes, calculées d'après une rentabilité réaliste, étant entendu que le port devra dépenser d'importantes sommes pour cela.

Le président: Merci, monsieur Scott.

Monsieur Byrne.

M. Byrne (Humber - Sainte-Barbe - Baie Verte): Merci pour votre exposé. Votre point de vue est intéressant et il est assez original pour des gens du secteur auquel vous appartenez.

L'un des aspects que vous avez mis en exergue à la page 9 de votre mémoire, touche aux ports régionaux. Pour vous, le processus de cession n'est pas aussi ouvert qu'il le devrait dans le cas des ports régionaux. J'avais cru comprendre que ces ports publics devaient d'abord être proposés à des groupes sans but lucratif et à des municipalités. En cas de refus, on se tournerait alors vers des tierces parties appartenant au secteur à but lucratif.

En quoi estimez-vous que cette façon de faire n'est pas ouverte?

Mme Paquin: Je commencerai par vous dire que nous avons entendu parler de cette procédure entre les branches. Nous n'avons jamais rien vu par écrit. On nous a essentiellement dit que ces ports seraient d'abord proposés aux gouvernements provinciaux. Si ces derniers décidaient de ne pas les reprendre, ils seraient alors proposés aux municipalités, mais après cela, il n'y a plus aucune procédure officielle. N'importe qui pourrait se présenter et essayer de tirer le meilleur... il pourrait s'agir de n'importe quel particulier, d'un groupe d'utilisateurs, ou encore d'une association constituée à la dernière minute. Il n'y a pas de transparence.

Nous avons entendu dire que cinq ports ont déjà été vendus. Je ne sais pas desquels il s'agit. On ne nous a même jamais annoncé qu'ils étaient sur le marché. De toute évidence, il ne s'agit pas des ports qui auraient pu nous intéresser, parce que nous aurions sans doute alors poussé des hauts cris.

M. Byrne: Peut-être devrais-je intervenir ici. Quand vous avez parlé de l'administration des ports régionaux, vous avez dit que celle-ci allait dans le meilleur intérêt des utilisateurs appartenant au milieu de la navigation maritime. Alors, si un gouvernement provincial renonçait à ses intérêts dans un port donné, si la municipalité renonçait à son droit de propriété ou à ses droits de maintenance d'un port, ne devrait-on pas s'attendre à ce que Transports Canada et les fonctionnaires des havres et des ports se tournent d'abord vers ceux dont ils savent qu'ils ont un intérêt direct dans le port en question?

Dans votre mémoire, vous dites qu'on aurait dû proposer ces ports dans le cadre d'une procédure officielle d'appels d'offres ou de soumissions publiques; mais alors, on pourrait se trouver à les proposer, par voie de soumissions publiques, à un organisme ou à une entreprise n'étant pas vraiment pas désireux d'exploiter le port mais cherchant surtout à écarter un concurrent, ou à tenter une manoeuvre du genre. Je voudrais que vous me disiez si l'on peut parler de transparence quand Transports Canada traite directement avec ceux qui ont un intérêt direct connu dans tel ou tel port et que Logistec, qui n'avait pas le même intérêt, n'a pas été consultée?

Mme Paquin: Je vois tout à fait où vous voulez en venir. Simplement, on ne nous a jamais dit que notre gouvernement provincial n'était pas intéressé par telle ou telle installation. Avant de se tourner vers le secteur privé, il faudrait assurer au moins un semblant de transparence, donner un minimum d'information publique, il faudrait que l'information circule, que ce soit à l'échelon municipal, auprès des utilisateurs, parmi les exploitants d'installations ou parmi les clients. Il est simplement question d'être informé. C'est tout.

M. Byrne: Noté!

Est-ce que Logistec est un important utilisateur de ports régionaux?

.1040

Mme Paquin: Oui. Nous offrons des services dans un grand nombre de ports régionaux. Nous comptons 20 installations au Canada et nous nous agrandissons aux États-Unis. Nous y avons environ 6 installations.

Le président: Merci, monsieur M. Byrne. Merci, chers collègues et merci beaucoup à vous aussi, monsieur Dubreuil et madame Paquin.

M. Dubreuil: Merci.

Le président: Nous allons à présent accueillir M. Robert Kalvaitis et M. Marc LeBlanc, de la Ligue canadienne de transport industriel.

Monsieur Kalvaitis, est-ce vous qui allez ouvrir la présentation?

M. Robert Kalvaitis (vice-président, Conseil d'administration, Ligue canadienne de transport industriel): Oui.

Le président: Alors vous allez limiter vos réflexions à dix minutes environ, après quoi nous pourrons passer aux questions?

M. Kalvaitis: Merci, monsieur le président et merci aux membres du comité pour avoir donné l'occasion à la Ligue canadienne de transport industriel de vous présenter son point de vue sur le projet de loi C-44. Comme vous le savez, je m'appelle Rob Kalvaitis et je suis vice-président de la Ligue canadienne de transport industriel, mais je suis également directeur des transports à Dofasco.

Je suis accompagné de M. Marc LeBlanc, trésorier de la LCTI et directeur de la logistique et des services à la clientèle à JM Asbestos, à Asbestos au Québec.

Nous vous avons fait parvenir notre mémoire. Nous souhaitons discuter de certains éléments qui concernent directement les compagnies de transport maritime et qui, selon nous, pourraient faire l'objet de certaines améliorations. Nous allons donc vous parler de la structure proposée pour l'administration portuaire, notamment la représentation au conseil, l'autonomie des ports et le nombre d'administrateurs, la question du pilotage, les droits et les tarifs le long de la voie maritime et la question du groupe des utilisateurs.

Je vais passer tout de suite aux recommandations. Nous sommes d'avis que les utilisateurs devraient être présents aux conseils d'administration des ports. C'est essentiel si l'on veut que les ports conservent leur vocation d'installation de manutention de marchandises et si l'on veut que la direction bénéficie d'une expérience dans le domaine maritime. Ces deux éléments sont essentiels à la réussite à long terme des ports.

Nous recommandons la suppression du paragraphe 14e) afin de permettre aux utilisateurs de siéger au conseil des ports. Chaque administration portuaire devrait pouvoir déterminer le nombre d'administrateurs dont elle a besoin et l'on devrait pouvoir en compter plus que les 9 à 11 actuellement prévus. Nous estimons que ce maximum est un peu trop restrictif. Les situations diffèrent d'un port à l'autre et les ports doivent servir des clientèles qui n'ont pas toutes les mêmes besoins, et il n'est donc pas raisonnable de déclarer arbitrairement que les conseils doivent être composés de 9 à 11 administrateurs.

Le paragraphe 24(2), qui traite des activités portuaires, est trop limitatif. Les ports devraient pouvoir entreprendre des projets destinés à augmenter leurs recettes, sans que ceux-ci obéissent nécessairement au critère énoncé. Un port est plus qu'un simple quai bordé de garde-fous. Encore une fois, si les utilisateurs sont représentés, ils auront intérêt, comme le reste de la collectivité, à ce que le port soit viable et qu'il réponde aux besoins de ceux qui l'utilisent.

Donc, nous recommandons en deuxième lieu que le paragraphe 24(2) soit modifié pour faire mention d'un éventail plus large de services portuaires, susceptibles de garantir l'autonomie financière des ports.

Je vais à présent céder la parole à mon collègue, Marc LeBlanc, qui va vous parler de la question du pilotage.

M. Marc LeBlanc (trésorier, Ligue canadienne de transport industriel): Merci. La LCTI recommande l'abrogation de la Loi sur le pilotage demande que les certificats de pilotage soient plus facilement accessibles pour les capitaines de navire. Le terme «pilote», devrait devenir un titre professionnel auquel on aurait droit après avoir acquis une certaine expérience et une certaine formation, et après avoir subi des examens, le tout étant reconnu à l'échelle nationale.

Ce projet de loi est l'occasion de restructurer, enfin, les services de pilotage pour en arriver à une navigation plus sûre, plus efficace et plus rentable sur l'ensemble de nos eaux intérieures. La LCTI demande avec instance au comité de ne pas passer à côté de cette occasion.

.1045

Nombreux sont les capitaines qui possèdent toutes les compétences voulues pour piloter leur navire le long de la voie maritime canadienne et dans les eaux adjacentes. Beaucoup croisent dans ces eaux depuis des décennies. Grâce à la technologie actuelle et à l'expérience des capitaines de navire, il arrive bien souvent que les pilotes sont inutiles.

Nous recommandons en outre que l'article 137 soit modifié afin d'exiger que le plan d'action du ministre soit déposé le 31 décembre 1997 et non le 31 décembre de l'année suivante. Les gouvernements qui se sont succédé ont bien étudié cette question et nous croyons que le moment est venu d'agir.

M. Kalvaitis: De plus, nous croyons que le projet de loi C-44 est muet sur les recours en cas de différend ou, s'il n'est pas muet, qu'il est plutôt incohérent. Cinquièmement, nous recommandons l'adoption d'un mécanisme de règlement des différends qui soit à la fois cohérent, impartial et opportun, et qui s'applique aux droits et aux tarifs de pilotage de la voie maritime et des ports.

La LCTI est satisfaite du libellé du paragraphe 82(1), qui interdit toute discrimination parmi les utilisateurs de la voie maritime. Sixièmement, nous recommandons que le gouvernement du Canada continue de négocier avec les États-Unis pour rationaliser les coûts de la voie maritime. Un organisme binational pourrait parvenir à réduire encore plus ces coûts.

Voilà donc les recommandations que nous voulons vous faire. Encore une fois, merci de nous avoir donné l'occasion de vous en faire part.

Le président: Merci beaucoup. Votre efficacité devrait inspirer les autres témoins.

Monsieur Scott, vous avez des questions?

M. Scott: Juste une.

Je n'ai pas très bien compris une des recommandations que vous avez formulées, celle où il était question d'élargir les dispositions du paragraphe 24(2). Dans le mémoire que vous nous avez soumis, vous semblez recommander la même chose que les autres témoins qui ont comparu ici aujourd'hui, parce que vous souhaiteriez que le gouvernement demeure propriétaire des installations dont l'exploitation n'obéit qu'à des objectifs sociaux ou à des objectifs de développement fondamentaux, qui n'attireraient pas le capital privé. Que souhaiteriez-vous au juste de ce paragraphe 24(2), auquel vous faites allusion.

M. Kalvaitis: Nous avons eu l'impression qu'à la façon dont il est rédigé, cet article risque de restreindre certaines activités auxquelles les ports se livrent actuellement. Nous citons l'exemple du port de Vancouver, qui effectue des petits travaux d'assemblage. Nous croyons qu'on aurait tort de choisir entre deux cas de figure: un droit acquis pour tout le monde ou l'interdiction généralisée de se lancer dans ce genre d'entreprise. Ce genre d'activité bénéficie à tous les utilisateurs du port. Elle bénéficie au port lui-même. Nous devons veiller à ce que la loi permette l'accomplissement de certaines choses. Là encore, la composition du conseil peut être une façon d'y parvenir. Si les utilisateurs sont représentés au conseil, toutes les activités logiques ne feront pas que bénéficier au port, elles bénéficieront également aux utilisateurs qui constituent le milieu portuaire. Voilà pourquoi nous estimons que cela est important.

M. Scott: Donc, vous n'êtes pas d'accord avec le fait que les ports puissent offrir des services d'acconage, de remorquage, d'entreposage et ainsi de suite.

M. Kalvaitis: Effectivement pas, mais nous ne voulons pas non plus qu'ils soient confinés au simple accueil des navires. On devrait leur permettre de se lancer dans d'autres genres d'activités.

M. Scott: Je voulais simplement préciser ce point-là.

M. Kalvaitis: C'est bien.

Le président: Monsieur Fontana.

M. Fontana: Je vais enchaîner sur la question du type d'activités qu'on devrait autoriser. Pensez-vous que l'aménagement de condominiums pourrait être une activité complémentaire d'un port ou d'un havre? Jusqu'où peut-on aller pour être certain que les ports ne feront pas concurrence au secteur privé ou aux marinas, sur ces plans-là? À cause du traitement fiscal préférentiel, nous allons sans doute permettre aux ports... si les ports ont un statut d'organisme fédéral et qu'ils bénéficient de toutes sortes de congés fiscaux, devrait-on leur permettre d'aménager des marinas alors que, juste à côté, sur des terrains municipaux ou autres, une entreprise privée voudrait, elle aussi, aménager une marina? Alors, est-ce que ces deux idées-là vous inspirent, celle de l'aménagement d'un condominium et celle de la construction d'une marina?

M. Kalvaitis: C'est une bonne question. Encore une fois, j'en reviens à la question de la représentation au conseil, pas uniquement des utilisateurs, mais de la collectivité et des autres parties prenantes du port. Le port n'est pas un simple quai où les bateaux viennent décharger; c'est tout un secteur d'activité. Si les différentes parties prenantes de ce secteur participent au processus décisionnel, elles veilleront à faire table rase de toutes ces incohérences, de ces iniquités, parce qu'autrement cela ne serait pas bien pour la collectivité, ni pour les utilisateurs.

M. Fontana: Estimez-vous que la loi devrait donner une certaine orientation ou établir des paramètres pour savoir ce qui est acceptable?

M. Kalvaitis: Bien sûr.

M. Fontana: Vous avez parlé de droits acquis. Dans une certaine mesure, je n'aime pas tout ce qui est rétroactif, alors je ne suis pas certain que nous devrions accepter cela, mais nous pourrions formuler certains paramètres pour rendre la chose acceptable de sorte que les conseils sachent ce qu'ils peuvent et ce qu'ils ne peuvent pas faire, et qu'ils ne se placent pas en position délicate, en situation de conflit ou autre.

.1050

M. Kalvaitis: Je suis d'accord. S'il y a un endroit où nous devons prévoir des lignes directrices censées, c'est bien dans la loi. Mais nous ne voulons pas menotter les administrations portuaires sous prétexte que dans la loi on exigerait qu'elles soient financièrement viables, et nous voulons que cela se passe dans le meilleur intérêt de la collectivité et du port.

M. Fontana: Vous voulez que les ports soient financièrement viables, parce que vous voulez votre part de gâteau?

Des voix: Oh, oh!

M. Fontana: Tout cela nous ramène à la question des appointements et des dividendes, et le gouvernement a intérêt à agir de la sorte.

J'aime votre position à propos de la voie maritime. Au bout du compte, tout cela devrait être confié à un organisme binational. La question de la propriété, ou peu importe la façon dont vous voulez la baptiser, se ramène à ce que le comité SCOT a recommandé auparavant.

Et vous suggérez que le groupe d'utilisateurs se charge d'administrer la chose en attendant que les États-Unis s'assoient à table et s'aperçoivent du bien-fondé d'une société binationale qui, je crois, devrait nous permettre de réaliser des économies et devrait rendre les choses un peu plus équitables pour les Canadiens. Nous commençons à en avoir assez de payer l'acheminement des marchandises pour les compagnies américaines. Elles ont tous les avantages et n'ont à subir qu'une partie des coûts. Donc, espérons que nous en arrivons là.

Mais d'ici là, vous estimez que c'est très bien de disposer d'un groupe d'utilisateurs, si ce n'est qu'il devrait peut-être... recommandez-vous aussi que les intérêts de la collectivité soient représentés au conseil, aux côtés de ceux des utilisateurs, dont certains membres vous représentent?

M. Kalvaitis: Oui.

M. Fontana: Que recommandez-vous?

M. Kalvaitis: Nous reconnaissons que la solution du groupe des utilisateurs est un moyen terme convenable. La LCTI appuie ce que le groupe d'utilisateurs essaie de faire.

S'agissant de représentation, nous estimons que la voie maritime est très différente des ports. Un port est captif d'une région géographique et il est plus facile de représenter tous les utilisateurs de cette région que dans le cas de la voie maritime. Ce serait un peu comme essayer de constituer un groupe d'utilisateurs de la transcanadienne; ce serait difficile et on ne parviendrait peut-être pas au genre d'économies qu'on rechercherait.

Si les utilisateurs siégeant au conseil représentent 80 p. 100 du volume de marchandises transitant par la voie maritime, il est certain qu'ils auront tout intérêt à faire en sorte que la voie soit, entre autres, économiquement et écologiquement viable. Donc, pourquoi ne leur en donneriez-vous pas la maîtrise et ne les laisseriez-vous pas l'administrer de leur mieux - et nous sommes d'accord sur ce point - en attendant que les États-Unis s'assoient à la table et qu'on puisse réaliser de toutes les autres économies envisagées?

M. Fontana: Mais vous reconnaissez que nous avons peut-être la possibilité d'ouvrir aussi le conseil de cet organisme sans but lucratif, à des personnes représentant l'intérêt du public; par exemple, d'admettre un représentant du gouvernement fédéral et deux représentants des gouvernements provinciaux, ou quelque chose du genre?

M. Kalvaitis: Bien sûr, mais je ne vois pas ce que vous y gagneriez, parce qu'ils s'occuperaient surtout d'exploitation. Je crois savoir que ces gens-là veulent rationaliser les opérations quotidiennes et en réduire le coût, au jour le jour. Ils ne s'intéressent pas à la situation à long terme et ne se demandent pas s'il faudrait, par exemple, construire d'autres écluses. Ce n'est pas leur mandat.

Donc, je ne vois pas en quoi d'autres utilisateurs pourraient apporter quelque chose de plus. Personnellement, je ne m'objecterai pas à ce qu'ils siègent au conseil, mais je ne vois pas ce qu'ils pourraient y apporter de plus.

M. Fontana: Très bien.

Le président: Merci, monsieur Fontana.

Monsieur Caron.

[Français]

M. Caron: Vous semblez assez sévères par rapport à la situation actuelle du pilotage au Canada. Vous entrevoyez en quelque sorte la disparition de toute la question du pilotage. Vous vous demandez si elle devrait être confiée à des gens à qui appartiennent certaines compagnies maritimes qui développeraient une compétence. Compte tenu des instruments ou de la technologie actuelle, vous ne voyez plus l'importance d'une loi régissant le pilotage. Vous auriez des gens spécialement constitués en corporations de pilotes qui auraient jusqu'à un certain point un monopole et qui auraient alors à faire leur travail de pilotage.

On doit aussi tenir compte des coûts qui sont actuellement engagés, parce que quand on parle de monopole ou qu'on parle de gens qui doivent absolument être sur un bateau pour faire office de pilote, des coûts s'ensuivent. Vous entrevoyez clairement des changements radicaux du côté du pilotage, du moins selon ce que j'ai pu voir rapidement dans votre document.

.1055

M. LeBlanc: Nos propos sont bien radicaux comparativement à ceux que vous avez entendus jusqu'ici, aux recherches ou aux recommandations de M. Keyes et à celles d'autres gens qui s'intéressent à ce sujet.

Bien sûr, nous ne voulons pas d'une situation où l'expéditeur se retrouvera avec toutes les inefficacités du système actuel, ou d'un monopole, comme vous le disiez, qui me dicterait mes coûts. Nous ne voulons pas que le gouvernement nous dise qu'à partir de maintenant, l'expéditeur devra assumer ces coûts et qu'on devra s'adapter à la situation qui existe présentement.

Si vous voulez qu'on assume les coûts, nous demandons que la situation soit changée afin qu'elle devienne plus efficace. Il faut quand même garantir la navigation sécuritaire dans le système. Nous aurons toujours besoin des pilotes; je ne vois pas de situation où nous pourrions nous en passer complètement.

Plusieurs compagnies de navigation, comme les compagnies canadiennes Groupe DesGagnés inc. ou Logistec Corporation, naviguent dans le fleuve Saint-Laurent depuis des années, parfois même depuis 30 ou 40 ans, et ne pensent pas qu'elles auront vraiment besoin d'un pilote.

La technologie actuelle est beaucoup plus avancée qu'elle ne l'était dans le passé. Chez GPS, on dit qu'aujourd'hui, on sait exactement où se trouve le bateau, à un mètre près ou quelque chose comme ça. La technologie est beaucoup plus avancée.

C'est pourquoi des compagnies comme Canada Maritime ou CAST, qui ne battent pas pavillon canadien mais dont le personnel a acquis beaucoup d'expérience à naviguer jusqu'à Montréal, se demandent s'il est vraiment nécessaire qu'un pilote les accompagne. Je ne pense pas que ce soit un point de vue radical si l'on considère ce que le gouvernement nous demande d'assumer comme coûts à titre d'expéditeurs.

Le président: C'est tout?

[Traduction]

Très bien.

Merci beaucoup, messieurs. Nous avons apprécié ce moment passé avec vous.

Nous accueillons à présent M. Art Ross, M. Richard Balnis et M. Robert Davidson de Police de Ports Canada.

Il n'est pas précisé ici qui est le responsable du groupe, messieurs.

Est-ce vous, monsieur Ross? Très bien, alors peut-être pourriez-vous nous présenter vos collègues.

Vous savez comment les choses se passent. Vous disposez d'une demi-heure. Nous vous invitons à couvrir les principaux aspects de votre exposé en dix minutes environ, après quoi nous donnerons aux députés un peu de temps pour vous poser des questions.

M. Jordan: Monsieur le président, nous pourrions peut-être rassembler les deux groupes. Je viens de remarquer que M. Davidson fait partie de ce groupe et du suivant. Ils ont certainement beaucoup de choses en commun. Pourrions-nous les réunir et concentrer le tout en une demi-heure, afin de gagner du temps?

Le président: Eh bien, je devrais peut-être poser cette question à M. Davidson.

Cela vous conviendrait-il, monsieur Davidson?

M. Robert Davidson (représentant du SCFP, Saint John, Nouveau-Brunswick): Nous estimons que nos points de vue sont tout de même différents. Le thème est commun, mais...

Le président: Très bien, je vous remercie. Ne perdons plus de temps.

Allez-y, monsieur Ross.

Le sergent Art Ross (Police de Ports Canada): Bonjour, messieurs les députés du Comité permanent des transports. Je m'appelle Art Ross et j'ai 22 ans d'ancienneté à la Police de Ports Canada. Je suis sergent et je suis stationné au détachement de Saint John.

Je suis accompagné de M. Richard Balnis, représentant du Syndicat canadien de la fonction publique, à notre bureau d'Ottawa, et de Robert Davidson, notre délégué local du Syndicat canadien de la fonction publique.

Les gens de la Police de Ports Canada de Saint John se sont syndiqués en 1968, au moment où le Conseil des ports nationaux a restructuré plusieurs services de sécurité et de police jusque-là indépendants, pour les regrouper en un seul et même organisme national ayant des détachements policiers dans les ports et son administration centrale à Ottawa.

Aujourd'hui, il reste dix employés au service de la Police de Ports Canada à Saint John, soit neuf agents de police à temps plein et un employé civil. De ce nombre, sept agents comptent vingt ans d'ancienneté et possèdent donc une vaste expérience ainsi qu'une solide formation dans toutes les facettes de la police des ports, notamment la sécurité des ports de mer et à la lutte contre le terrorisme. C'est donc forts de ce bagage de plus de 150 ans d'expérience directe et pratique du travail de policier dans un grand port de mer canadien, que nous venons vous exposer notre point de vue et formuler nos recommandations relativement au projet de loi C-44, la Loi maritime du Canada.

.1100

La loi et la nouvelle politique maritime du gouvernement touchent à de multiples aspects, mais aujourd'hui, nous allons nous limiter à un volet très important de ce nouveau régime réglementaire, à savoir la police des ports. Pour cela, nous allons articuler notre argumentation autour des thèmes suivants: l'absence d'analyse et de consultation adéquates; le caractère spécialisé du travail de la police des ports - les gardiens de sécurité privée ne pouvant remplacer les agents de la police des ports; les conséquences négatives pour la municipalité et son service de police; le financement des ports et le rôle national qui leur est confié et, enfin, les recommandations touchant au pouvoir de la police des ports et au financement de ce service.

Je vais commencer par le caractère spécialisé du travail de la police des ports et dans mon propos, je vais rejoindre la conclusion formulée par le juge René Morin, lors de son examen externe des services de protection de la Société canadienne des ports, en septembre 1992. L'industrie elle-même estime que le travail de la police des ports diffère, sur des plans non négligeables, de ce qui se fait dans d'autres milieux et exige la présence d'un service spécialisé et dédié dont les éléments comprennent bien le fonctionnement des ports.

L'unité du port de Saint John, consacre plus de 75 p. 100 de son temps de travail à des actions préventives comme la patrouille et la surveillance. Tous les ans, nous effectuons tout un éventail d'interventions, des opérations de sauvetage dans le port, à la recherche de navires, en passant par la lutte contre la pollution, contre la contrebande, contre le trafic de marchandises volées et de substances narcotiques, ainsi que par le contrôle de l'immigration illégale et la lutte contre le terrorisme. L'année dernière, par exemple, la Police de Ports Canada de Saint John, en collaboration avec Douanes Canada, a repéré et récupéré pour plus de 300 000 $ d'automobiles volées qui étaient sur le point de quitter le port. Enfin, la division maritime patrouille en mer en moyenne 100 heures par an, que ce soit à cause de la pollution par les hydrocarbures, pour assister les douanes dans leurs fouilles, pour porter assistance aux navires en détresse, pour assurer la sécurité des navires de croisière, pour intervenir en cas de pénétration interdite, pour effectuer des recherches de personnes portées disparues ou pour effectuer toute autre intervention dans les limites du port.

L'action policière dans un port est très différente de celle des municipalités.

Je passe à la page 11. Le tableau 1 montre que le transfert des responsabilités du service de la police des ports aux services de la police municipale n'a pas été une réussite dans d'autres pays. Pour nous, les leçons à tirer sont claires: la police des ports est un service spécialisé exigeant plus de ressources et de compétences que n'en possèdent les services policiers municipaux.

Les agences privées de sécurité ne peuvent remplacer le service public de police des ports. Certes, les agences privées de sécurité et les services de vigile ont un rôle à jouer dans les ports, mais le personnel ne possède ni la formation ni l'orientation voulue, il n'a pas accès aux services nationaux de police et il n'a pas non plus les pouvoirs voulus pour supplanter la police des ports. C'est précisément la conclusion à laquelle en est arrivé le juge René Morin, à l'occasion de son examen externe de la police des ports, en septembre 1992. Dans son rapport, il rejette l'idée de remplacer la police des ports par des agences privées de sécurité. Il estime que le personnel de ces dernières n'est pas suffisamment formé et n'a pas l'expérience voulue pour assumer les diverses fonctions que remplisse un agent de police dans les ports.

M. David Parks, du Syndicat canadien de la fonction publique, Section locale 61, va vous entretenir des conséquences négatives qu'aurait cette décision sur les municipalités et leur service policier.

Nous estimons qu'on ne peut sacrifier les intérêts du public aux intérêts privés des administrateurs des ports et des utilisateurs qui ne sont pas forcément préoccupés par la lutte contre le crime et par les autres interventions policières n'ayant pas d'effet direct sur les intérêts commerciaux des employeurs. Privés d'un service policier portuaire public spécialisé, qui aurait été appelé à effectuer un travail essentiel, les ports seraient laissés à l'abandon, ils connaîtraient une augmentation du taux de criminalité et perdraient leurs clients, comme ce fut le cas dans les années 60. Nous croyons que tel ne doit pas être l'objectif de l'actuel gouvernement fédéral. Dans son discours du 25 mars 1996 devant l'Association canadienne des policiers, le ministre des Transports, David Anderson, a déclaré son intention de maintenir, voire d'améliorer les services policiers dans les ports canadiens.

Dans notre conclusion, nous proposons un certain nombre de modifications à apporter au projet de loi C-44 afin que celui-ci traduise effectivement l'engagement pris par le gouvernement fédéral, et que nous partageons: assurer la sécurité dans nos ports. Ainsi, selon nous, afin de maintenir la sécurité du Canada, de réduire les pertes et de juguler la criminalité dans les ports, nous estimons qu'il faut apporter les modifications suivantes au projet de loi C-44.

.1105

S'agissant du rôle de la police des ports, et comme nous avons essayé de l'établir dans la solution que nous proposons, il faut continuer de compter, dans les ports nationaux du Canada, sur un service de police public pleinement habilité, afin de protéger l'intérêt du public. Cela étant, nous sommes d'accord avec ce que l'Association canadienne des policiers a recommandé, à savoir qu'il faut disposer d'un seul corps policier des ports, unifié, soudé et coordonné à l'échelle nationale, et cela grâce au maintien en poste des agents de la Police de Ports Canada, et peut-être même au recrutement de nouveaux agents.

C'est là la solution la plus économique. Nous devons, pour le moins, pouvoir compter sur des services de police rattachés au port et spécialisés dans ce genre d'activité. Nous ne pouvons absolument pas nous reposer sur une structure à caractère réactif, fragmentée, basé sur les services de police municipaux qui manquent déjà des ressources nécessaires pour remplir leur mission.

L'article 126 du projet de loi C-44 propose la dissolution de la Société canadienne des ports et, avec elle, celle de la Police de Ports Canada qui s'y rattache. C'est là une erreur. Nous pensons qu'il ne faut pas adopter cet article.

En outre, le projet de loi C-44 ne précise pas l'autorité hiérarchique ni la responsabilité publique en ce qui a trait au remplacement des agents de police. Nous avalisons donc la recommandation formulée par l'Association canadienne des chefs de police, à savoir qu'il faut maintenir la Police de Ports Canada en tant que service national relevant du fédéral. Celui-ci pourra continuer d'exister à part ou, à long terme, il pourra être intégré à un organisme policier national, plus important, intégré et correctement financé, à condition que l'on maintienne les conventions collectives actuelles ainsi que les droits de négociation.

De plus, nous avalisons la recommandation de l'Association canadienne des policiers, soit de modifier ainsi l'article 3 du projet de loi C-44:

Pour ce qui est des autres pouvoirs de la police des ports, le projet de loi C-44 abroge l'article22 de l'actuelle Loi de la Société canadienne des ports pour le remplacer par l'article 96. Pour l'essentiel, cet article permet à Transports Canada de se dégager de ses responsabilités en matière de constitution ou d'administration des services de police dans les ports, quel que soit le statut des agents. Cela étant, le ministre a abdiqué son pouvoir de nommer des agents de police pour assurer le maintien de l'ordre dans les ports, dans l'intérêt du public. Désormais, en vertu du projet de loi C-44, les agences de surveillance privées ne feront que protéger les intérêts des exploitants commerciaux des ports.

Cela étant, nous appuyons la recommandation formulée par l'Association canadienne des policiers qui est d'amender l'article 96 afin de maintenir le pouvoir du ministre de nommer, d'employer, d'encadrer et de payer des agents de la paix de plein titre, dans les ports nationaux du Canada.

Le projet de loi C-44 n'exige pas des nouvelles administrations portuaires, ni d'ailleurs des autres services municipaux, de financer le service de police des ports. Pourtant, un mécanisme de financement prévu par la loi s'impose dans le cas du port de Saint John. Celui-ci ne veut pas s'acquitter de ses obligations financières, malgré l'engagement que le ministre des Transports a pris envers nous le 8 juillet 1996, à savoir que si la police municipale offrait aux installations portuaires d'autres services que ceux normalement offerts au public, Port Canada négocierait un dédommagement approprié au titre de ces services.

Nous ne croyons pas cependant que les ports devraient assumer la totalité des coûts des services policiers portuaires. Comme la police des ports et l'application des lois canadiennes répondent à un intérêt public plus large, le gouvernement fédéral doit continuer d'assumer les frais associés au service de la police des ports, les ports les plus importants devant assumer 50 p. 100 de la facture en vertu d'un programme de récupération des coûts.

Notre proposition présente plusieurs avantages: on pourrait maintenir, à Saint John, les services de la police des ports, dans l'intérêt du public; le corps de police municipal et le corps des pompiers pourraient maintenir le niveau de service qu'ils offrent actuellement aux résidents; les résidents de Saint John ne seraient pas exposés à un taux de criminalité plus élevé ni à une augmentation des impôts municipaux rendue nécessaire pour subventionner la police dans le port et, enfin, on pourrait conserver au moins sept emplois de policiers compétents et expérimentés dans le domaine portuaire.

Mais aucune de ces solutions n'est possible si le projet de loi C-44 ne prévoit pas de mécanisme de financement d'une police nationale des ports. Nous demandons respectueusement au comité d'accueillir favorablement les modifications que nous recommandons d'apporter au projet de loi C-44.

Merci.

Le président: Voilà qui est remarquable: 25 pages de mémoire en 10 minutes exactement.

Le sergent Ross: Comme vous pouvez le voir, monsieur, ce mémoire est assez épais et j'ai dû considérablement l'élaguer dans ma lecture.

Le président: Je suis prêt à vous recommander auprès de tout groupe qui voudrait faire un exposé. Je sais que cela est très difficile et j'apprécie vos efforts. Bien! Ces aspects soulèvent plusieurs questions.

Monsieur Fontana.

.1110

M. Fontana: Merci, monsieur le président, et merci pour votre exposé, monsieur Ross. Je comprends que vous vous trouvez dans une situation difficile. Contrairement à M. Jessop, qui a comparu la semaine dernière ou la semaine d'avant et qui, en fait... je ne me rappelle pas l'avoir entendu couvrir d'éloges le comité ou le gouvernement, et je ne m'attends pas d'ailleurs à ce que qui que ce soit le fasse. Mais il est passé à deux doigts de menacer la collectivité ou le pays d'une insurrection civile si ce comité ou le gouvernement ne renonçait pas à son projet de démanteler la police des ports.

Cette rhétorique malheureuse me laisse de marbre. Comme j'estime que vous êtes un organisme très professionnel, j'ai envie de vous entretenir de certains des aspects que vous avez abordés aujourd'hui.

Vous êtes la seule organisation réclamant le maintien de la Société canadienne des ports, et je comprends pourquoi, puisqu'elle est votre employeur.

Aucun autre organisme au pays, à l'exception du service de police des ports, n'a réclamé le maintien de ce cauchemar bureaucratique qui nous a causé tant de problèmes.

Mais c'est fini, il ne sera plus là et vous devez vous en convaincre, parce que c'est écrit.

Et si cette structure disparaît et que vous voulez maintenir la fonction de police des ports, il faudra le faire par le biais de négociations directes avec les ports dont vous vous occupez actuellement. D'après ce que je crois savoir, vous êtes 85 et vous êtes présents dans six ports. Ce que j'ai dit à M. Jessop et à ses collègues qui ont comparu ici il y a deux semaines, c'est qu'en essayant de promouvoir vos services, j'ai eu l'impression qu'il minimisait la valeur des corps policiers municipaux et des autres corps policiers, qui collaborent en fait avec vous dans les ports.

Eh bien, vous avez commencé à faire la même chose, car vous avez déclaré que les corps policiers municipaux ne sont pas en mesure de remplir vos fonctions, bien que ce soit des gens très compétents, et vous avez aussi laissé entendre que la GRC n'a pas à intervenir, ce qui n'est pas le cas, je pense. Il est certain que vous devez faire appel à la GRC ou aux agents de l'immigration ou à d'autres encore, pour vous aider.

Alors, j'aimerais que vous nous disiez quelle est la différence entre les fonctions policières que vous remplissez actuellement dans les quelque 16 ou 17 grands ports au pays qui éprouvent les mêmes difficultés que ceux de Saint John, de Montréal, de Québec et de Vancouver - les seuls ports où vous êtes présents - , et les fonctions assumées dans tous les autres ports où le maintien de l'ordre est assuré par des corps policiers municipaux ou d'autres? J'ai cru vous entendre dire que vous êtes les seuls en mesure de remplir les fonctions de police des ports, alors que vous n'êtes même pas présents dans la majorité des ports du Canada.

Essayez donc de me convaincre que ce que vous faites est unique et tellement différent pour que les autres services de police ne puissent pas le faire, parce qu'il se trouve, voyez-vous, que d'autres corps policiers interviennent à présent à Hamilton, à Windsor et dans d'autres ports frontaliers, et qu'ils se heurtent aux mêmes difficultés et aux mêmes défis que vous.

Le sergent Ross: Monsieur, quand j'analyse la question et que je m'arrête aux statistiques sur le volume de fret transitant par les ports, et que je m'intéresse plus particulièrement aux six ou sept grands ports canadiens, il faut savoir que ces ports manutentionnent plus de la moitié du fret. C'est à cause de cela qu'en 1968 on a jugé nécessaire de confier la surveillance policière des ports à un service spécial, et surtout à cause des problèmes qui régnaient à l'époque. C'était alors des grands ports, ce qu'ils sont toujours, et je crois que c'est l'une des raisons pour lesquelles on a opté pour un service de police spécialisé.

Comme je le disais, j'ai 22 ans d'ancienneté à la Police de Ports Canada. Comme on vous l'a indiqué, il s'agit d'un organisme qui a bonne réputation et qui a très bien effectué son travail. On m'a même laissé entendre qu'il s'est peut-être même trop bien acquitté de sa tâche quand on analyse les données concernant chaque port, données qui sont à la baisse... Pour en revenir à la question du travail préventif de la police, la Police de Ports Canada a pu s'acquitter de ce genre de mission ces dernières années, alors que certaines municipalités ont éprouvé des difficultés à le faire, à cause d'un manque d'effectifs.

M. Fontana: Mais dans les ports où vous êtes présents, vous n'avez pas pleine et entière compétence. Autrement dit, vous devez parfois faire appel à la GRC. Vous devez parfois réclamer d'autres types d'appuis. Selon la nature des crimes auxquels vous avez affaire, vous ne disposerez pas forcément d'une compétence policière exclusive. Vous devrez faire appel à d'autres corps policiers pour vous assister.

.1115

Le sergent Ross: Les services que peuvent nous rendre d'autres corps policiers, dans notre secteur, sont les services médico- légaux, les services de chiens policiers et les services de l'identité judiciaire, ou des choses du genre, que nous obtenons par le truchement de la municipalité de Saint John. Bien sûr, nous travaillons en étroite relation avec le ministère de l'Immigration. Comme vous le disiez, nous ne sommes pas le seul organisme responsable en matière d'immigration ou de douanes, mais nous collaborons étroitement avec ces ministères et je pense que cette collaboration fonctionne très bien.

M. Fontana: Excusez mon ignorance en la matière, mais pouvez- vous enquêter en cas de meurtre dans un port?

Le sergent Ross: Oui.

M. Fontana: Certes, mais pouvez-vous porter des accusations, pouvez-vous inculper quelqu'un?

Le sergent Ross: Oui.

M. Fontana: Vous ne faites pas appel au service policier municipal ou à la GRC en cas d'affaire de drogue? Avez-vous compétence exclusive pour faire tout ce qui est nécessaire afin de conduire une enquête et de poursuivre ou au moins de porter des accusations?

Le sergent Ross: Oui, monsieur. Nous avons seulement besoin, parfois, de l'aide de services spécialisés. Encore une fois, il est question des services de l'identité judiciaire que nous obtenons en passant par la municipalité, et également des services médico- légaux et des services de chiens policiers. En cas de meurtre, nous seuls avons la responsabilité d'enquêter et, éventuellement, de porter des accusations au criminel.

M. Fontana: Merci.

Deuxièmement, pour ce qui est de la création d'une structure après la disparition de la SCP, si vous parveniez à convaincre un port... Cette loi maritime a essentiellement pour objet de donner une autonomie aux administrations portuaires pour qu'elles puissent gérer leurs installations comme elles l'entendent, ce qui veut dire qu'elles auront la possibilité d'envisager la question des services policiers de différentes façons. Vous-mêmes avez parfois parlé de fonctions différentes. Il y a les fonctions de sécurité qui peuvent être assurées par d'autres services que des corps policiers, parce que de toute évidence, cela revient moins cher. Et puis il y a les fonctions de maintien de l'ordre qui peuvent être assumées par les municipalités, parce que, dans certains cas, il se trouve que les ports sont à cheval sur plusieurs territoires municipaux. Ne serait-il pas possible pour votre organisation et vos collègues policiers d'offrir directement leurs services à contrat aux ports concernés?

Le sergent Ross: Vu sous cet angle, je crois que tout est possible, monsieur. Cependant, pour en revenir à la nature même de notre action de police portuaire et au genre de formation que nous avons reçue sur plusieurs années, nous estimons - et encore une fois, je vous exprime ici le point de vue d'un agent de police - que nous sommes le meilleur organisme qui soit. Que ce soit dans le cadre du service actuel ou non, c'est nous qui sommes les mieux formés pour nous occuper des grands ports au Canada.

M. Fontana: Eh bien c'est précisément là où je voulais en venir. Si vous êtes les meilleurs qu'on puisse trouver dans le domaine à Saint John ou à Vancouver, et que d'autres veuillent vous engager, veuillent engager votre corps policier, vos collègues, pourquoi vous y refuseriez-vous?

Bien sûr, on va vous dire que c'est parce que ces nouveaux organismes ne veulent pas y mettre le prix. Eh bien, je suis désolé, si l'on veut un service il faut payer et il se déroule suffisamment d'activités économiques dans un port pour que ce soit intéressant pour les municipalités. J'en ai assez d'entendre les responsables municipaux dire: «Donnez-nous l'argent en même temps que les responsabilités». En fait, ils ont déjà des avantages par le simple fait qu'un port se trouve dans leur municipalité et les moteurs économiques que sont les ports permettent de créer énormément d'emplois et de générer une importante activité. Donc, la question n'est pas de savoir qui doit payer, la question est de savoir si l'on a vraiment besoin de bons services policiers dans les ports.

M. Davidson: Si je puis ajouter quelque chose à ce que M. Ross vient de déclarer, je dois préciser que dans notre région, il n'y aura aucune négociation directe avec les administrations portuaires locales. Celles-ci ont déjà déclaré ouvertement qu'elles ne sont pas intéressées. Elles croient que les ports ne sont pas différents des autres emplacements industriels.

Eh bien, j'estime que c'est là le problème essentiel auquel vous avez affaire. Si tout le monde ici croit qu'un port n'est pas différent d'un autre site industriel, alors nous sommes dans de beaux draps dans ce pays. Non, un port n'est pas comme n'importe quel autre emplacement industriel. M. Ross et tous les autres policiers des ports ont reçu une formation spécialisée en plus de la formation que suivent les policiers municipaux, parce qu'ils veillent à l'intérêt du public dans les ports, et pas simplement à ceux des utilisateurs et des locataires.

Cela, c'est fondamental. Il n'y aura pas de négociations. Tout vous est présenté pour... Par exemple, les dettes de notre port envers le provincial et le municipal ont été effacées. On vous demande à présent de modifier le projet de loi C-44 pour que les administrations portuaires soient considérées comme étant des représentants de l'État et ne paient pas d'impôts municipaux.

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La liste de tout ce que ces gens font se trouve à la fin du mémoire qui vous a été remis, où l'on décrit le programme des services de protection. Celui-ci va bien au-delà des services rendus par les corps policiers municipaux. On dirait que les administrations portuaires, les utilisateurs et les locataires veulent protéger leur propriété en engageant des vigiles privées. Mais cette formule laisse un vide qu'il faut combler, et si ce comité et ce gouvernement ne le reconnaissent pas, l'intérêt du public ne sera pas protégé.

Les corps policiers municipaux sont pieds et poings liés. J'y reviendrai dans un instant. Si ce service de police spécialisé doit disparaître pour laisser la place à un corps policier normal, il ne fait pas de doute que l'intérêt du public s'en trouvera menacé.

Le président: Monsieur Keyes.

M. Keyes: Merci, monsieur le président.

Messieurs, je représente la grande ville portuaire de Hamilton - ou du moins la moitié - Hamilton-Ouest. Le port de Hamilton est plus grand que celui de Saint John. C'est un port où l'on compte plus d'utilisateurs qu'à Saint John. C'est aussi l'un des dix premiers ports canadiens en volume de marchandises manutentionnées.

Dans votre mémoire, je trouve des passages du genre «la protection de la collectivité et du port ne sera plus assurée». Vous dites aussi que sans corps policier résident, les ports seront laissés à l'abandon et que le taux de criminalité y sera élevé. Vous dites aussi que nous ne pouvons nous en remettre à une structure policière fragmentée et réactionnaire dépendant des services policiers locaux. Eh bien, ce que vous décrivez, c'est la situation du port de Hamilton, parce qu'à ce port, qui est plus important, qui compte plus d'utilisateurs que le vôtre et par lequel transite un plus gros tonnage, le maintien de l'ordre est assuré par le Service régional de police de Hamilton-Wentworth, pour lequel le port paie. Vous venez juste de dire que mon corps policier est «fragmenté», «réactionnaire», qu'il favorise le laisser- aller dans les ports et des «taux de criminalité élevés».

Qu'avez-vous à répondre à cela?

Le sergent Ross: Quand nous avons rédigé le mémoire, monsieur, nous ne voulions pas parler du port de Hamilton comme étant un endroit laissé à l'abandon et où le taux de criminalité est élevé. Si l'on remonte dans l'histoire, on se rend compte qu'un grand nombre de ports où l'on trouve à présent des détachements de la Police de Ports Canada, éprouvaient de graves problèmes, comme l'avait précisé M. Don Cassidy, ancien directeur général, dans son étude effectuée avant 1968. Dans cette étude, on parle des graves problèmes auxquels étaient confrontés les grands ports dont s'occupe maintenant la Police de Ports Canada. Nous ne voulions absolument pas dire que Hamilton est un port laissé à l'abandon ni que le taux de criminalité y est élevé.

M. Keyes: Très bien monsieur Ross. Progressons dans le temps pour passer des années 60 aux années 90 où les services de police régionaux, comme ceux de Hamilton, augmentent leurs effectifs et accroissent le niveau de services offerts à la collectivité et aux ports, parce que l'administration portuaire assume une partie des coûts. Ainsi, la ville de Hamilton, qui est plus grosse que celle de Saint John, peut assumer les services policiers dans le port pour une fraction du coût, j'ose le dire, de ce que représentent les droits versés à la SCP pour le même service.

M. Davidson: Le fait est que, après le dépôt du projet de loi C-44, les utilisateurs du port de Saint John ont déclaré ne pas être disposés à verser un seul sou à la municipalité pour bénéficier d'une protection policière du même type que celle que vous avez à Hamilton. Cela va d'ailleurs constituer le thème central du prochain mémoire.

M. Keyes: Permettez-moi de ne pas être d'accord.

M. Davidson: Puis-je terminer? Ce que je veux dire, c'est que ce serait autre chose si les utilisateurs payaient pour une sorte de service municipal spécialisé, comme ils le font à Hamilton. Mais à Saint John, les gens ont officiellement déclaré qu'ils ne verseraient pas un seul sou de plus à la municipalité pour tout ce qui touche au port.

M. Keyes: Mais regardons la situation dans son ensemble, monsieur Davidson. La situation, c'est que sans la SCP et sans la Police de Ports Canada, l'administration portuaire économisera l'argent que lui versent les utilisateurs au titre du service que vous rend la Police de Ports Canada. Certes, le budget des services policiers est alimenté par les loyers et les charges versés par les locataires et les utilisateurs du port, au titre des services que vous leur rendez.

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Nous avons l'exemple des ports de Québec et de Montréal qui ont déjà signé ou qui sont sur le point de signer des ententes avec leurs services de police municipaux et où les utilisateurs et les locataires vont moins payer pour bénéficier de ces services, parce que tout cet argent ira à la municipalité plutôt qu'à la Police de Ports Canada ou à la Société canadienne des ports.

Ainsi, plutôt que d'avoir à verser 1,7 million de dollars pour les services policiers - je ne me souviens pas s'il s'agit du port de Québec ou de celui de Montréal; c'est celui de Montréal, je pense - l'administration portuaire n'aura plus qu'à remettre 380 000 $ au corps policier municipal pour bénéficier de meilleurs services que ceux offerts par votre organisation.

M. Davidson: C'est là où les choses sont différentes. Voilà pourquoi nous demandons à ce comité et au gouvernement de veiller à ce qu'on ne mélange pas tout dans cette question. L'administration portuaire de Saint John n'est pas disposée - et c'est connu - à imiter ce qui se fait ailleurs.

Voilà pourquoi il faut veiller à assurer une certaine uniformité dans les services de police portuaires, car, sinon, vous risquez de vous retrouver avec un groupe d'utilisateurs déclarant son intention de s'occuper lui-même de la question à Montréal ou à Québec en ayant recours à des vigiles parce qu'ils prétendraient que cela lui reviendrait moins cher. Si vous demandez aux administrations portuaires de Montréal ou de Québec de payer pour les services de police municipaux, et que vous embrouillez tout, qu'on permette différents niveaux de sécurité et de maintien de l'ordre dans les ports canadiens, les criminels vont vite repérer le port le plus vulnérable et commencer à y écouler leurs produits.

M. Keyes: Pensez-vous un seul instant qu'un grand port canadien pourrait instaurer le genre de climat propice aux activités criminelles que vous venez de décrire? Pas un seul port au Canada - pas plus celui de Vancouver que ceux de Halifax, de Hamilton, de St. John's, de Montréal ou de Québec - ne toléreront de telles activités. Il leur sera toujours possible, au besoin, de renforcer leur corps policier tout en payant toujours moins que ce que leur en coûte le service de police de Ports Canada.

M. Davidson: L'histoire nous apprend que, avant 1968, quand les administrations portuaires disposaient de ce genre d'autonomie, qu'elles avaient des services de sécurité, le crime était devenu un véritable problème.

M. Keyes: Nous ne parlons pas de service de sécurité, ici, monsieur Davidson, il est question...

M. Davidson: Il en est question à Saint John.

M. Keyes: ...des corps policiers municipaux, appuyés par la GRC et des agences privées de sécurité.

M. Davidson: Mais soyons justes, monsieur Keyes. À Saint John, au Nouveau-Brunswick, les gens ne sont pas d'accord avec cette formule. À moins d'une disposition dans la loi garantissant que les ports ne pourront pas dire non à une police portuaire spécialisée et ne pourront pas refuser de payer pour bénéficier des services de police municipaux en n'engageant que des agents de sécurité privés, alors les craintes exprimées par le juge Morin, comme M. Ross nous le rappelait, deviendront réalité.

Il existe bien un port à Saint John qui se fiche pas mal de ce que vous pensez. Là-bas, on va engager des agents de sécurité uniquement pour faire encore plus d'économies.

C'est de notoriété publique, monsieur Keyes. Nous pouvons vous remettre le document où il en est question, si vous le voulez. Je l'ai avec moi. Ces gens-là ont dit qu'ils ne veulent rien d'autres que des agents de sécurité.

M. Fontana: Mais ils n'auront peut-être pas le dernier mot.

M. Davidson: C'est pourquoi nous insistons.

Le président: Pourrais-je faire une suggestion? Puisque nous allons reprendre cette discussion avec les intervenants suivants, pourquoi ne remercions-nous pas tout de suite M. Ross et M. Balnis?

Monsieur Ross, si vous voulez faire un dernier commentaire bref, je vous en prie, allez-y. Après cela, nous passerons à la Saint John Police Protective Association et nous inviterons M. Parks à s'avancer à la table.

Le sergent Ross: Merci, monsieur. Je tiens à remercier le comité de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant lui une nouvelle fois pour lui faire part de nos points de vue et de nos préoccupations au sujet des services policiers dans les grands ports canadiens. Encore une fois, monsieur Keyes, je regrette que vous ayez pensé que notre remarque à propos des ports à haut taux de criminalité concernait Hamilton... Croyez bien que tel n'était pas notre propos.

Encore une fois, monsieur, je tiens à vous rappeler que j'ai 22 ans d'ancienneté à la police de Ports Canada et je suis très fier d'appartenir à ce corps. Au cours de l'année et demie qui vient de s'écouler, mes collègues ont dû travailler dans des conditions extrêmement difficiles. Ils se sont acquittés de leur mission avec loyauté et en faisant preuve quotidiennement d'un sens des responsabilités. Cela, je puis vous le garantir, monsieur. Enfin, je pense avoir comparu devant vous non seulement au nom du service de Saint John, mais au nom de tous nos autres détachements.

Merci, monsieur.

Le président: Merci, monsieur Ross. Je tiens à vous dire qu'appartenant moi-même à une famille de policiers, je connais les conditions difficiles dans lesquelles les agents sont appelés à assumer leurs responsabilités, surtout par les temps qui courent. Quoi qu'il en soit, je pense que les membres du comité tiennent à remercier la corporation que vous représentez. Je tiens aussi à vous garantir que nous tiendrons compte des intérêts de vos membres, tout au long du processus que nous avons entamé.

Le sergent Ross: Merci beaucoup, monsieur.

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Eh bien si M. David Parks veut bien s'avancer à la table, nous allons pouvoir parler de la situation de cette merveilleuse ville portuaire qu'est Saint John. Monsieur Parks, est-ce vous qui allez commencer?

M. David Parks (président, Saint John Police Protective Association): Oui, c'est moi.

Le président: Alors, je vais vous demander de faire la même chose: essayez de limiter vos remarques liminaires à environ dix minutes, parce que, comme vous avez pu le constater, nous avons des discussions animées.

M. Parks: Je me débrouillerai sans doute mieux dans la partie discussion que dans la partie présentation. Je ne sais pas si je pourrai imiter M. Ross, mais je vais faire de mon mieux.

Je tiens tout d'abord à remercier le comité de m'avoir donné l'occasion de venir l'entretenir de cette question. Je m'appelle David Parks et je suis président de la Saint John Police Protective Association. J'appartiens également au corps policier de Saint John depuis plus de 17 ans et je suis agent à la division de la patrouille.

Aujourd'hui, nous représentons les agents de police de la toute première cité canadienne constituée en corporation: Saint John au Nouveau-Brunswick. Rappelons que Saint John a été fondée par la charte royale du 18 mai 1785. Dès le début, la cité a veillé à se doter d'un service de police pour protéger et pour servir ses habitants. C'est en 1826 qu'a été créé l'actuel corps policier, trois ans avant la création du service de police de Londres, en 1829.

L'histoire du port de Saint John remonte avant la Confédération et la ville a joué un rôle important dans l'histoire de notre pays et de ses habitants. En tant que résidents d'une grande ville portuaire, qui remonte loin dans l'histoire - ville que votre comité ne visitera d'ailleurs pas - , nous tenons à vous dire que les préoccupations que le public entretient à propos du projet de loi C-44 semblent être injustement éclipsées par les exploitants, les utilisateurs et leurs représentants qu'ils paient. Nous espérons très sincèrement que tel n'est pas le cas. Je vous renvoie aux trois récents éditoriaux, joints à notre mémoire, où il est question du sentiment général qui règne dans la ville de Saint John.

À la fin des années 60, Saint John, comme la plupart des grands ports, disposait d'un service de sécurité qui était en mesure de répondre aux besoins d'un port national. Contrebande, vols, infractions en matière de drogue, crimes d'immoralité, agressions, avaries faites avec intention, conduite avec facultés affaiblies, délits de la route et délits d'abus de boisson, etc., étaient alors choses courantes.

L'escalade très marquée du crime dans les grands ports commerciaux entachés la réputation commerciale du Canada dans le monde. Elle a soulevé des inquiétudes relativement à la sûreté et à la sécurité des ports.

Le rapport Cassidy, concernant les services de police et de sécurité assurés sur les propriétés du Conseil des ports nationaux en 1967, attribuait le problème à l'administration des ports. Le Conseil des ports nationaux a adopté le rapport Cassidy en 1968 et a restructuré en un corps national son service de police et de sécurité, jusque là autonome et administré à l'échelon local.

Les agents de police de Saint John, les résidents et les utilisateurs du port ont été les témoins d'un véritable bouleversement quand le port de Saint John a, peu à peu, regagné sa réputation, au Canada et à l'étranger, de port sûr, d'exploitation peu coûteuse, où le taux de criminalité est faible.

Je vous renvoie à la lettre à l'éditeur écrite par l'ancien directeur du port.

Page 5. Cependant, nous ne pouvons pas permettre que les seules volontés et les seuls intérêts des exploitants et des utilisateurs du port éclipsent complètement les questions d'intérêt et de sécurité du public. Les exploitants et les utilisateurs de notre port veulent profiter du projet de loi C-44 pour utiliser des biens publics afin de réaliser plus de bénéfices encore, en faisant fi des intérêts du public. Les exploitants et les utilisateurs du port essaient de parvenir à leurs fins en prétendant que le port n'est pas différent des autres emplacements industriels en ville, où il n'y a pas lieu de se préoccuper des intérêts du public qui entravent d'ailleurs l'optimisation des profits.

Les exploitants et les utilisateurs veulent un retour à l'autonomie locale, pour pouvoir remplacer un corps policier professionnel spécialisé par des vigiles. Cela prouve que leur seul désir est de protéger leur propriété, et qu'ils se préoccupent peu de l'intérêt du public.

Plusieurs administrations portuaires américaines ont essayé de remplacer leur service policier portuaire spécialisé par des agences de sécurité privées, pour constater que c'était un vrai désastre.

Encore une fois, je vous renvoie à la citation de l'honorable René Marin.

Nous ne voudrions pas revenir aux conditions qui prévalaient à la fin des années 60, et que j'ai décrites plus tôt.

Page 7. Le service de police portuaire s'est montré efficace, malgré une diminution constante de ses effectifs, qui sont passés de 27 personnes en 1975 à neuf en 1996. Il faut surtout attribuer cette réussite à la formation spécialisée du personnel, à la coordination à l'échelon nationale, au fait que des agents sont rattachés à un emplacement particulier et à la capacité de ce service d'effectuer un travail de police préventif, dans l'intérêt du public et dans celui des utilisateurs et des exploitants privés. Notre corps policier municipal ne dispose ni des budgets ni des effectifs voulus pour s'acquitter du travail supplémentaire qu'exigerait une intervention dans les domaines de compétence fédérale. La municipalité de Saint John ne possède même pas d'embarcation pour assurer le service de police en mer, comme cela se fait actuellement.

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Cela étant, nous tenons à ajouter notre nom à l'impressionnante liste de particuliers et de groupes, ayant une expérience dans le domaine des services de la protection policière, qui accordent un appui non équivoque au concept de corps de la police des ports, national et spécialisé, voué à la protection des intérêts du public et du privé.

À cause du faible nombre de vigiles dans le port, toutes les fonctions policières seraient transférées au corps policier de la ville de Saint John. Cette situation imposerait une demande insoutenable sur les services de police municipaux. Ceux-ci reçoivent d'ailleurs plus de 60 000 appels chaque année, qui viennent s'ajouter à ses milliers de tâches qui lui sont propres, et, s'il leur faut en plus s'occuper du port, ils ne pourront plus fonctionner correctement pour assurer la protection des résidents de Saint John.

Nous avons vu passer le corps policier de Saint John de 197 agents à seulement 169, qui doivent maintenant surveiller une ville de 125 milles carrés. Le corps policier de Saint John ne sera absolument pas en mesure de répondre aux appels qui lui viendront du port, quand ces neuf agents ne seront plus là. Les délais de réponse en général passeront à des niveaux inacceptables.

Les utilisateurs et les exploitants des ports veulent pouvoir utiliser les biens publics à leur guise. Ils réclament une autonomie complète et veulent qu'Ottawa se retire de leurs jambes. Ils veulent devenir des représentants de l'État pour échapper aux règlements de zonage et aux impôts locaux, aux lois sur l'environnement et ainsi de suite. Les exploitants et les utilisateurs du port veulent que le port soit exempt d'impôt municipal, mais ils veulent que les fonctions de police au port soient remplies par les agents municipaux.

Si, dans le projet de loi C-44, on demande au corps policier municipal de remplir les services de police dans le port, alors l'administration portuaire locale ne doit pas recevoir le statut de représentant de l'État.

Il en coûte très cher pour un corps policier municipal de prendre la relève des services policiers portuaires à cause de l'augmentation nécessaire des effectifs et de la formation spéciale à donner aux agents. C'est pour cela que les administrations portuaires locales, exploitées par le secteur privé, ne peuvent être exemptées d'une juste imposition et qu'elles doivent payer pour bénéficier d'une protection policière adéquate.

Précisons bien, ici, que notre service policier municipal n'offre actuellement que des services spécialisés limités au port, comme l'identité judiciaire, les services de chien policier et les services de nos techniciens-alcotest.

Même le Comité permanent sur les transports de 1995 a déclaré:

Voilà pourquoi le gouvernement fédéral doit veiller à ce que le projet de loi C-44 exige des exploitants et des utilisateurs des ports qu'ils paient pour des services policiers adéquats.

Le chef de police de Saint John a bien siégé à un comité, mais tout l'exercice a consisté à chercher un moyen de répondre aux exigences en matière de sûreté et de sécurité sans avoir recours à un service policier spécialisé. Notre chef a alors publiquement déclaré, et nous sommes d'accord avec lui que s'il n'avait déjà pas assez de personnel pour remplir ses autos-patrouilles, il en avait encore moins pour enfourcher des bicyclettes reçues en don. Vous trouverez dans notre mémoire un article sur ce sujet.

Nous avons appris que les Hell's Angels cherchent à acheter une propriété au voisinage de notre port, en prévision de la disparition du corps national de police portuaire. De plus, le budget de la ville sera réduit de 6 millions de dollars en 1997 et l'on a demandé à notre service de police de couper500 000 $ de plus dans son budget, pour la même année. Comme vous le voyez, le corps policier municipal n'est pas en mesure de remplir les fonctions supplémentaires que représente la surveillance du port.

Je vous invite à consulter la lettre de l'honorable David Anderson.

À propos d'équité en matière fiscale, nous déclarons que le port, en tant que société d'État, ne paie actuellement que 47 p. 100 de la valeur évaluée des installations maritimes se trouvant dans notre municipalité; l'évaluation des propriétés des entreprises du port de Saint John a été réduite de un million de dollars, ce qui a abaissé d'autant le montant des impôts municipaux prélevés auprès de ces entreprises; enfin, on s'attend à ce que le gouvernement du Nouveau-Brunswick réduise sa part des impôts fonciers qu'il perçoit auprès des entreprises propriétaires d'immeubles dans le port. Je vous invite, à cet égard, à consulter l'article que nous avons reproduit dans notre mémoire.

Les administrations portuaires seront exemptées des impôts, fédéraux et provinciaux, sur le revenu des sociétés. Les compagnies portuaires et les utilisateurs veulent que ces nouvelles administrations soient des représentants de l'État et qu'à ce titre, elles soient exemptes des impôts municipaux. Des porte- parole de notre port ont déclaré qu'ils ne sont pas disposés à négocier une quelconque indemnisation au titre des services assurés par la police municipale.

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Le projet de loi C-44 est entièrement muet sur la question de l'imposition. Voilà pourquoi nous vous implorons de ne pas consentir aux administrations portuaires locales le statut de représentants de l'État et de ne pas leur permettre d'être exemptes des impôts municipaux ou d'échapper aux règlements de zonage et aux règlements environnementaux des différents ordres de gouvernement.

Pour terminer, je dirais qu'il faut absolument protéger l'intérêt du public, c'est-à-dire qu'il faut veiller à ce que nos ports soient sûrs, qu'ils ne soient pas envahis par les contrebandiers, les terroristes ou le crime organisé.

Je vais à présent laisser le soin à M. Davidson de vous présenter les amendements que nous vous proposons d'apporter au projet de loi C-44.

M. Davidson: Voici donc les modifications que nous vous proposons d'apporter:

Maintenir un corps policier national spécialisé continuant d'employer des agents de police de la SCP, bien formés, et cela en vertu de leur convention collective, même si la Société canadienne des ports n'existe plus;

Faire en sorte que les exploitants et les utilisateurs des ports publics financent, à partir de leurs recettes, le corps de police portuaire;

Ne pas permettre aux administrations portuaires locales d'être des représentants de l'État;

Préciser que les administrations portuaires locales ne peuvent être visées par les dispositions de la loi sur les subventions municipales;

Exiger des administrations portuaires locales qu'elles paient leurs impôts municipaux, en fonction de la valeur estimée de leurs biens, au même titre que tous les autres contribuables, qui ne devraient pas avoir à subventionner ni les exploitants ni les utilisateurs des ports;

Exiger des administrations portuaires locales qu'elles dédommagent les municipalités au titre des services de police spécialisés qu'elles recevront, pour l'unité maritime, en piochant dans leurs recettes, si l'on devait ne pas maintenir en place le service de police national des ports;

Adopter une disposition exigeant que les municipalités mettent sur pied une unité maritime grâce aux sommes versées par les commissions portuaires locales;

Engager les agents formés de la SCP pour constituer une unité maritime municipale.

Voici qui conclut notre exposé. Nous croyons qu'il en va de l'intérêt de toutes les Canadiennes et de tous les Canadiens que nos ports soient sûrs.

Le président: Merci, monsieur Davidson.

Monsieur Jordan.

M. Jordan: Je ne crois pas que quiconque remette en question le caractère essentiel et hautement spécialisé de votre travail. Nous ne remettons absolument pas cela en question. Le travail que vous effectuez devrait être confié à quelqu'un d'autre et je crois qu'il serait totalement irresponsable ne serait-ce que d'imaginer qu'après la disparition des ports, personne d'autre n'assumerait cette mission.

En fait, je crois que nous nous demandons, ici, qui doit être votre employeur. Le travail policier devra se poursuivre. Je sais que vous émettrez certaines réserves relativement aux conventions négociées, et ainsi de suite, mais supposons que nous puissions résoudre tous ces problèmes et que nous parvenions à une conclusion heureuse pour toutes les parties concernées, ne pensez-vous pas que la tendance actuelle est à...?

Ce matin, aux nouvelles, j'ai entendu dire que la police de Halifax a maintenant un sergent spécialisé dans le domaine du crime sur Internet et de tout ce que cela comporte.

Eh bien, si l'on retient cet exemple comme étant une orientation que la police municipale de Saint John pourrait adopter en matière de services spécialisés, on pourrait imaginer qu'un groupe très spécialisé de policiers, au sein du corps policier municipal, pourrait remplir ce genre de mission et je ne vois aucune raison pour laquelle votre employeur ne pourrait pas être la municipalité de Saint John, ni pour laquelle vous ne pourriez pas vous-même continuer d'assurer ce travail très spécialisé. Pourquoi tenez-vous tant à cette association nationale de police, à laquelle vous appartenez?

Combien êtes-vous au sein de cette association?

M. Parks: Je crois que vous confondez. Vous auriez dû vous adresser à M. Ross.

Je suis employé de la ville de Saint John et membre du corps policier de la municipalité. Eh bien, monsieur, je puis vous assurer que le corps policier de Saint John est plus qu'en mesure, moyennant la formation et les fonds voulus, d'assumer les fonctions de surveillance du port.

M. Jordan: Donc, si nous parvenons à vous trouver des fonds, vous seriez d'accord avec ce que nous proposons dans le projet de loi C-44.

M. Parks: Eh bien, monsieur, je vais vous faire part de mon expérience. Avant que la ville de Lancaster ne soit fusionnée à Saint John, nous avions un sergent et dix agents de police par quart, pour toute la partie ouest de Saint John. À présent, nous n'avons plus que quatre agents.

Si vous n'exigez pas que certaines choses soient faites, il va se passer la même chose qu'après le fusionnement de Lancaster avec Saint John. Ce sont les quatre agents qui patrouillent dans la partie ouest qui devront passer 90 p. 100 de leur temps dans le port, et les résidents de Saint John vont en souffrir.

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M. Jordan: Eh bien, si c'est ainsi que vous envisagez les choses, je ne puis que compatir. Quant à moi, je ne vois pas les choses de cette façon. J'estime qu'il est irresponsable de penser que nous voulons gruger les corps policiers pour économiser de l'argent. Je ne pense pas...

M. Parks: Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire, monsieur. Mais je puis vous assurer, parce que l'histoire se répète, qu'en 1967, avant la fusion de Lancaster avec Saint John, nous avions neuf à dix agents par quart. À présent, nous n'en comptons plus que quatre. Sauf si l'on prend les dispositions voulues, nous n'aurons pas le financement nécessaire et nous devrons assurer le service policier dans le port, que nous le voulions ou non, et ce sont les résidents de Saint John qui en pâtiront. Nous mettrons de plus en plus de temps pour répondre à leurs appels. Si je me trouve en plein milieu du port de Saint John, je ne pourrai pas me porter à votre secours en cas d'entrée par effraction.

M. Jordan: Non, mais je pense que nous ne parlons pas de la même chose.

Combien d'agents la police portuaire compte-t-elle actuellement, à l'échelon national?

M. Davidson: Une centaine, je crois.

M. Jordan: C'est l'effectif le plus important que vous ayez jamais eu?

M. Davidson: En 1968, il y en avait 300, je crois. Donc les effectifs ont été considérablement réduits.

Cette diminution est due au fait qu'à un moment donné on a confié aux administrations portuaires locales, les sociétés portuaires locales, le soin de déterminer les effectifs policiers nécessaires. Les sociétés de port locales ont joué un rôle déterminant dans la réduction des effectifs de la Police de Ports Canada, au cours des dernières années, parce que l'autonomie locale le leur permettait.

C'est tout ce que nous disons. Je crois que nous sommes sur la même longueur d'onde, mais nous, nous soutenons que si l'on ne prévoit pas dans la loi un mécanisme adapté de financement des services de police portuaires, il se trouvera au moins un port au Canada, celui de Saint John au Nouveau-Brunswick, où l'on engagera des vigiles à la place de policiers, parce que les gens ne semblent pas se préoccuper des intérêts du public contrairement à nous tous dans cette pièce, et parce que ça leur coûtera moins cher.

Voilà pourquoi nous ne pouvons que vous demander instamment de veiller à ce que la loi comporte un mécanisme permettant de financer comme il se doit des services policiers appropriés, autrement dit d'un corps policier se préoccupant de l'intérêt du public en général et ne se chargeant pas simplement de la sécurité de tel ou tel conteneur ou de tel ou tel bâtiment. Voilà, je crois, où il convient de tracer la ligne de démarcation, parce qu'il se trouve que les gens dans notre coin ont dit que le port n'est pas différent de Canadian Tire, qu'il n'était pas différent de l'entrepôt de Sears. C'est tout ce que ces gens veulent, ils demandent simplement à ce que les policiers interviennent quand ils en auront besoin. Eh bien, c'est là faire complètement fi du fait qu'un port est un point d'entrée et de sortie, et qu'il en va de l'intérêt du public là aussi.

Nous sommes inquiets quand nous entendons ces gens-là déclarer ce qu'ils ont déclaré en séance ouverte du conseil municipal et que leur propos trouve écho chez le procureur général de la province. C'est parce que les gens estiment qu'un port n'est pas différent d'un autre emplacement industriel qu'on va se retrouver avec des vigiles dans les ports, et je vous garantis que nous allons être confrontés à un problème de taille.

Personnellement, je crois que nous sommes tous, ici présents, sur la même longueur d'onde, mais nous devons veiller à ce que la loi comporte certaines dispositions, parce que si elle ne fait que conférer le statut de représentant de la Couronne aux administrations portuaires, qu'elle les exempte des impôts municipaux et de tout ce qui risquerait d'entamer leurs bénéfices, qui va protéger l'intérêt du public? Je pense que nous sommes en train de soutenir ardemment qu'il faut protéger l'intérêt du public dans les ports, tout comme l'intérêt des utilisateurs et des locataires. Voilà ce que nous pensons.

M. Jordan: Donc, nous allons devoir éduquer la municipalité de Saint John.

M. Davidson: Mais la municipalité est sur la même longueur d'onde que nous. Elle aimerait bien le faire, mais les utilisateurs du port lui ont dit qu'ils ne verseraient plus d'argent. La municipalité ne récupère que 47 p. 100 de l'évaluation fiscale des propriétés du port. Ça ne va pas. La municipalité dit qu'elle se fait avoir, parce qu'elle ne récupère que 47 p. 100 des impôts sur ces propriétés en vertu de l'actuel régime de subvention. Les administrations portuaires réclament le statut de représentant de l'État pour ne pas avoir à payer d'impôts municipaux, mais elles voudraient que nous assurions les services de police. Les utilisateurs, quant à eux, ne sont pas intéressés par les unités maritimes ni par le reste, et tout ce qu'ils veulent c'est ériger des clôtures, mettre en place leurs propres gardes de sécurité, protéger leur propriété, parce que c'est tout ce qui les préoccupe.

Je ne peux pas mieux vous résumer la situation. C'est ce que ces gens ont déclaré en séance ouverte du conseil municipal de Saint John.

Le président: C'est très intéressant, parce que vous nous présentez un point de vue assez différent de celui que nous avons entendu à propos des autres municipalités. Je suis très heureux que vous soyez venu, monsieur Parks. Si je comprends bien ce que vous dites, vous n'êtes pas en train de soutenir que seule la police de Ports Canada peut s'occuper des ports. Vous dites que moyennant un financement adéquat et une formation suffisante des agents de police municipaux, vous pourriez assurer des services de police convenables dans les ports, mais que, dans le cas qui nous intéresse, les choses achoppent au niveau des relations entre l'administration portuaire et la ville de Saint John.

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Si je comprends ce que vous dites, la question de la sécurité publique ne vous inquiéterait pas si l'administration portuaire avait agi comme celle de Québec ou de Montréal, si elle avait entamé, avec le corps policier local, des négociations en vue de recevoir le genre de service jusque-là offert par la police des ports, et si elle s'était intéressée aux questions très importantes touchant à la composition actuelle de la police des ports.

M. Davidson: Voici ce que nous disons, monsieur le président et messieurs les députés. Nous avons préparé un plan B. D'abord, à Saint John, nous estimons que le service de police portuaire national a fait un excellent travail jusqu'ici et qu'il faudrait le maintenir en place, peut être pas forcément sous l'égide de la Société canadienne des ports, mais certainement en tant que corps policier spécialisé.

Nous avons préparé une proposition en collaboration avec la municipalité et les gens de Ports Canada. Nous voulions savoir si les utilisateurs et les locataires du port seraient intéressés à relever Ports Canada et à faire en sorte que les agents de la police des ports soient intégrés au corps policier municipal, étant entendu que l'administration portuaire devrait ensuite payer une partie des coûts. On nous a dit, d'emblée, que notre proposition n'était pas acceptable et c'est justement cela qui nous inquiète beaucoup, monsieur le président, Si on vient vous dire une certaine chose, ici, et que les résidents de Saint John et les agents de police entendent autre chose, à savoir qu'on considère que les ports ne sont pas différents des autres emplacements industriels, alors je peux vous garantir qu'il y a des gens qui viennent vous dire des choses qu'on n'entend pas chez nous.

Le président: Monsieur Keyes, voulez-vous sauter là-dessus?

M. Keyes: Monsieur le président, et vous monsieur Davidson, ces propos sont tout à fait contraires à ceux que nous avons entendus de la bouche de la mairesse de Saint John. Elle était assise ici, dans la même chaise que vous, et elle nous a déclaré qu'elle était disposée à entamer des négociations avec le corps policier municipal en vue d'assurer les services nécessaires dans le port.

M. Davidson: Mais dans son mémoire, monsieur Keyes, la mairesse déclare que si la police municipale doit faire plus qu'elle fait déjà, il faudra qu'elle obtienne une compensation. C'est dans son mémoire, au tout début de ce qu'elle dit sur les services policiers.

M. Keyes: C'est raisonnable, c'est compréhensible.

M. Davidson: Mais la municipalité de Saint John et les services policiers des ports se sont entendus dire par les propriétaires, les locataires et les utilisateurs - et ne nous cachons pas qu'Irving a beaucoup d'intérêt là-bas - qu'ils peuvent se contenter des services de vigiles et qu'ils ne sont pas intéressés par une autre formule. C'est cela qu'on nous a dit.

M. Keyes: Monsieur le président, je pense qu'il était important pour nous d'entendre ce que MM. Davidson et Parks avaient à nous déclarer, parce que la majorité des futures administrations portuaires au Canada, de Vancouver à la grande ville portuaire de Québec, sont d'avis qu'elles devront pouvoir compter sur un solide système de sécurité dans les ports. Toutes ont cru comprendre que les services policiers seraient assurés de concert par la GRC et des agences de sécurité privées, que les utilisateurs emploieront dans les ports pour surveiller leurs propriétés, etc.

Je tiens à vous garantir que le gouvernement a bien l'intention de veiller à ce que la transition entre le présent et l'avenir - ce que déterminera l'acceptation ou le rejet de cette loi - se fasse dans le respect de la sûreté et de la sécurité des ports, par le biais d'une augmentation des effectifs de la GRC qui découlera forcément de ce processus de cession, et cela concerne aussi votre municipalité. Je suis heureux d'avoir entendu votre témoignage, parce que le comité tiendra certainement à lier langue avec la municipalité de Saint John pour obtenir d'elle son engagement à négocier.

Cela étant posé, les conseils des futures administrations portuaires, qui prendront la relève des ports, devront non seulement nous garantir qu'ils sont disposés à veiller au maintien des niveaux de sécurité et de sûreté, mais qu'ils comptent aussi l'accroître, au lendemain de la transition. J'ai hâte que la municipalité vienne nous expliquer ce qu'elle est disposée à faire de son côté. J'ai hâte d'entendre les conseillers municipaux de Saint John, autour de la table du conseil, déclarer que le port est un actif appréciable, que c'est un véritable bijou sur le plan économique pour la région. À la façon dont les choses vont dans le port et dans la collectivité en général, si nous ne parvenons pas à garantir la sécurité et la sûreté du port, nous en pâtirons tous.

M. Davidson: Nous nous réjouissons de votre déclaration qui est d'autant plus intéressante que Halifax et Saint John ont toujours été en concurrence. À Halifax, les utilisateurs vont tout à fait dans le sens de ce que vous venez de dire. Nous avons appris qu'ils ont entrepris des négociations avec les services de police municipaux en vue de mettre sur pied un genre d'unité maritime, ou quelque chose de la sorte.

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Mais à Saint John, les gens ont adopté une position radicalement opposée. La mairesse et le conseil se déclarent disposés à négocier avec les utilisateurs et les propriétaires du port, avec l'administration portuaire. Mais rien ne se passera si vous n'adoptez pas dans la loi une disposition contraignante, parce que les utilisateurs ont officiellement déclaré qu'un port n'est pas différent d'un autre emplacement industriel et qu'il leur suffit d'ériger des barrières et d'engager des vigiles.

Je dois vous souligner que la société Irving est un gros utilisateur au port de Saint John - elle n'est pas présente à Halifax - et qu'elle a sa propre entreprise de sécurité. Nous tenions à ce que cela soit dit, parce que nous n'avons pas fait tout ce chemin pour tourner autour du pot. C'est précisément pour la même raison que nous vous avons expliqué ce qui s'est passé lors de l'examen des questions de sécurité, quand notre chef a siégé à ce comité d'examen où il a été question des tâches et des responsabilités incombant à la police du port. La conversation n'a été qu'une valse hésitation: «la police pourrait-elle faire ceci?» «Oui, je pense que oui.» «La police ferait-elle faire cela?» «Eh bien, je pense que oui.» Il n'a jamais été question des fonds qui seraient nécessaires, puis on a déclaré à votre gouvernement et à votre ministre que tout avait été approuvé par le directeur de la police, par la GRC, par la police des ports, et par qui sais-je encore.

Eh bien nous sommes venus vous dire ici que la réalité est tout autre que ce que vous ont annoncé les utilisateurs et les locataires de Saint John. Si vous laissez des zones d'ombre dans la loi, nous nous retrouverons avec des vigiles dans le port de Saint John, ce qui nous sera préjudiciable. Je me demande si vous vous êtes rendu compte que cela allait procurer un avantage à Saint John par rapport à Halifax, parce que là-bas les gens devront assumer des coûts supplémentaires à l'échelon municipal et que nous, nous nous contenterons d'agents de sécurité qui coûtent peu. J'espère que ce n'est pas pour cela que les choses se passent ainsi, mais tout nous paraît tellement insensé.

Nous estimons qu'il vous incombe, à vous gardiens de l'intérêt public, de veiller à protéger cet intérêt public en stipulant dans la loi que des fonds doivent être spécifiquement consacrés au service de police spécialisé. C'est tout ce que nous vous demandons.

M. Keyes: Merci beaucoup de votre intervention.

Le président: Oui, merci beaucoup, messieurs Davidson et Parks. Merci d'avoir pris sur votre temps pour venir nous rencontrer. C'est un dossier fort délicat, très intéressant, et nous avons de nombreuses façons d'intervenir. Nous allons nommer les membres des conseils d'administration des futures commissions portuaires et nous allons négocier la teneur de leurs lettres patentes, etc.

M. Davidson: Merci.

M. Parks: Merci beaucoup.

Le président: Pour votre information, chers collègues députés, nous ajournons jusqu'à 15 h 30 et nous reviendrons dans la même salle.

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