[Enregistrement électronique]
Le mercredi 22 janvier 1997
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Nous pouvons commencer. Bienvenue à tous.
J'aimerais d'abord faire quelques observations. On nous apprend que MM. Donald Macdonald et John Beck sont sur un vol en provenance de Toronto. J'ai envoyé le greffier tirer l'alarme d'incendie pour gagner du temps, mais cela ne suffit pas. Ils se joindront à nous sous peu.
Je remercie tout le monde d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui pour réfléchir à cette question qui occupe le comité depuis près d'un an maintenant.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je dois vous faire part d'une mauvaise nouvelle. Le porte-parole du Bloc, M. André Caron, est décédé. Il était assez souffrant pendant nos récents travaux sur ce texte de loi, et il est décédé pendant les Fêtes. J'aimerais simplement rappeler la contribution qu'il a faite à notre comité. C'était un membre très vaillant de notre comité, et nous le regretterons tous. J'ai demandé au greffier d'envoyer un message de condoléances à sa famille en notre nom à tous.
J'aimerais aussi vous dire que Jim Gouk, le porte-parole du Parti réformiste, ne peut pas être parmi nous. Jim avait prévu tenir une série de rencontres dans son comté bien avant que nous décidions d'avoir cette table ronde. Plutôt que de faire reporter la réunion, il a accepté que nous allions de l'avant. Il prendra connaissance des transcriptions des délibérations et fera part des préoccupations qu'il pourrait avoir. Jusqu'à maintenant il a très bien soutenu ce processus.
Étant donné l'ampleur de la question et les positions très divergentes qu'on soutient tant dans votre collectivité qu'à la Chambre des communes, le consensus a vraiment été remarquable.
Ce que j'aimerais et ce que nous voulons faire aujourd'hui, c'est vraiment faire le point sur la question de savoir comment on peut obtenir le financement assez important qu'il faut pour procéder à la réfection du réseau routier. Je pense qu'il y a consensus au sein tant de la collectivité que du comité quant à la nécessité de cette réfection, mais il n'y a pas consensus sur la façon de trouver les fonds nécessaires pour y parvenir.
Ce que je pense que nous pourrions faire aujourd'hui, plutôt que de simplement entendre un très grand nombre d'exposés, c'est de nous entretenir avec les représentants de l'ensemble des utilisateurs, à partir de la communauté des bailleurs de fonds et des constructeurs... et pour aller crescendo, pourrait-on dire, nous pourrions aussi entendre des représentants du Bureau du vérificateur général, qui feront les mises en garde nécessaires, je pense bien.
Peut-être pourrions-nous commencer par un tour de table. Chacun peut se présenter et dire qui il représente, après quoi nous demanderons au premier groupe d'entamer les discussions.
Monsieur Lahaie.
[Français]
Le greffier du comité: Je m'appelle Jacques Lahaie et je suis le greffier du comité.
[Traduction]
M. John Christopher (attaché de recherche du comité): Je fais partie du personnel du comité.
M. David Cuthbertson (attaché de recherche du comité): Je fais aussi partie du personnel du comité.
M. Keyes (Hamilton-Ouest): Je m'appelle Stan Keyes; je suis député de Hamilton-Ouest et secrétaire parlementaire auprès de l'honorable David Anderson, ministre des Transports.
M. Cullen (Etobicoke-Nord): Je m'appelle Roy Cullen; je suis député d'Etobicoke-Nord.
[Français]
M. Gérard Laganière (vice-président, Groupe S.M.) Je m'appelle Gérard Laganière et je suis vice-président du Groupe S.M.
[Traduction]
Mme Moya Greene (représentante, Association des banquiers canadiens): Je représente l'Association des banquiers canadiens, et je travaille au service des valeurs mobilières de la Toronto- Dominion.
M. Warren Thomson (vice-président et directeur, Newcourt Credit Group): Je suis vice-président et directeur du Newcourt Credit Group, à Toronto.
M. Liam Rafferty (directeur adjoint, Hambros Canada Inc.): Je travaille chez Hambros Canada, à Toronto.
M. Harry Swain (directeur, Hambros Canada Inc.): Je m'appelle Harry Swain; je travaille pour Hambros Canada et pour Hambros Bank Limited, à Londres. C'est avec grand plaisir que je comparais devant le comité.
M. Michael Atkinson (président, Association canadienne de la construction): Je m'appelle Michael Atkinson; je suis le président de l'Association canadienne de la construction.
Mme Michelle Landreville (directrice des Affaires publiques, Association canadienne de la construction): Je m'appelle Michelle Landreville; je suis directrice des Affaires publiques de l'Association canadienne de la construction.
M. John Redfern (président du conseil, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada): Je m'appelle John Redfern; je suis président du conseil de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, et je suis de Montréal.
M. Jim Facette (président, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada): Je m'appelle Jim Facette; je suis président de la coalition.
M. David Rattray (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Je m'appelle David Rattray; je suis vérificateur général adjoint du Canada. Je suis peut-être le dernier, mais non pas le moindre, je l'espère.
Des voix: Oh, oh!
M. Hugh McRoberts (directeur, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Je m'appelle Hugh McRoberts; je suis directeur au Bureau du vérificateur général du Canada.
M. Brian A. Hunt (président, Association canadienne des automobilistes): Je m'appelle Brian Hunt; je suis de l'Association canadienne des automobilistes.
Mme Debra Ward (présidente, Association de l'industrie touristique du Canada): Je m'appelle Debra Ward; je suis présidente de l'Association de l'industrie touristique du Canada.
M. Gilles J. Bélanger (président, Association canadienne du camionnage): Je m'appelle Gilles Bélanger; je suis président de l'Association canadienne du camionnage et de l'Association des transports du Canada, mais je représente ici l'Association canadienne du camionnage.
[Français]
Mme Louise Pelletier (directrice générale, Association des transports du Canada): Je m'appelle Louise Pelletier et je suis directrice générale de l'Association des transports du Canada, the Transportation Association of Canada.
[Traduction]
M. John Pearson (conseiller technique, Association des transports du Canada): Je m'appelle John Pearson; je représente l'Association des transports du Canada.
[Français]
M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): Paul Crête, député du Bloc québécois de Kamouraska - Rivière-du-Loup et porte-parole de l'Opposition officielle en matière de transport.
[Traduction]
M. Jordan (Leeds - Grenville): Je m'appelle Jim Jordan; je suis député de Leeds - Grenville.
M. Byrne (Humber - Sainte-Barbe - Baie-Verte): Je m'appelle Jerry Byrne; je suis député de Humber - Sainte-Barbe - Baie-Verte, à Terre-Neuve.
Le président: Il est important de souligner que même si M. Byrne va longuement parler de la route du Labrador, il n'est pas du Labrador.
Des voix: Oh, oh!
M. Byrne: Je vais saisir toutes les occasions qui se présenteront.
Le président: Peut-être pourrions-nous commencer par Mme Pelletier, de l'Association des transports du Canada (ATC), qui en fait a accompli une tâche énorme avant que le comité n'entame les travaux en cours.
Mme Pelletier: Merci, monsieur le président.
[Français]
Il me fait plaisir d'être ici ce matin et de participer à cette table ronde à titre de personne ressource.
[Traduction]
Je suis accompagnée par M. John Pearson, conseiller technique auprès de l'association, qui a beaucoup participé à la conception de l'étude nationale sur le réseau routier. John est un conseiller technique, et à différents égards il connaît très bien les tenants et les aboutissants qui expliquent notre position ainsi que l'orientation que nous aimerions peut-être prendre. Ne vous étonnez donc pas s'il prend la relève pour traiter de certains aspects techniques, étant donné que je n'ai pas de formation en génie ni sur le plan technique.
L'association félicite le comité permanent d'examiner l'état de nos infrastructures de transport ainsi que les relations qui existent entre le transport, le commerce et le tourisme.
Comme il est souligné dans le mémoire déposé l'été dernier, l'ATC a constamment rappelé l'état déplorable du réseau routier national et incité les gouvernements à collaborer en vue de la mise en place d'une politique nationale dans ce domaine.
Depuis 80 ans, l'Association des transports du Canada réclame pour le Canada un réseau de transport efficace, sécuritaire et respectueux de l'environnement. Il est intéressant de rappeler l'évolution historique du réseau routier, depuis la période d'agrandissement du réseau dans les années 60 et 70 jusqu'à la forte croissance de l'utilisation constatée dans les années 80 et 90.
Pour diverses raisons, les routes sont devenues l'épine dorsale de notre système de transport et transportent maintenant plus de voyageurs et de marchandises que tout autre mode de transport.
[Français]
Janvier 1997 est un moment significatif dans l'histoire du Canada et celle du transport autoroutier. Il y a 50 ans, deux membres de l'Armée canadienne intéressés à décrocher un prix effectuaient le premier voyage par automobile d'un bout à l'autre du Canada, une aventure alors considérée assez exceptionnelle. Il y a 30 ans, on complétait la construction de la Route transcanadienne à temps pour l'Expo 67 qui se tenait à Montréal.
[Traduction]
Bien des choses ont changé depuis 1967. Le réseau routier a pratiquement cessé de s'étendre, et l'infrastructure existante vieillit rapidement. Si les taxes liées à l'utilisation des routes, les frais d'utilisation et les recettes fiscales ont continué d'augmenter, les ressources disponibles pour le maintien et la réfection du réseau routier diminuent et ne répondent plus à nos besoins.
On craint que la sécurité de notre système routier ne soit menacée. On est en mesure de constater que la congestion et la détérioration du réseau routier nuisent à la croissance de notre économie.
Il est clair qu'en tant que nations, le Canada doit maintenant faire face à plusieurs grandes questions, à l'heure d'évaluer ses besoins actuels et futurs en matière de transport routier.
Pouvons-nous concevoir et mettre en place un système de gestion financière durable et responsable pour le réseau routier national en tant qu'actif vital pour la nation? Quand nous parlons d'actif, nous voulons aussi dire que son maintien suppose des obligations et des responsabilités. En dépit des demandes pressantes de financement qui nous parviennent de toutes parts, saurons-nous trouver la volonté de considérer comme prioritaire l'octroi d'un financement approprié pour le système routier national, non pas simplement en tant que projet d'infrastructure à court terme, mais en tant que responsabilité continue?
Il faut aussi qu'au niveau national les propriétaires des routes se donnent une approche coordonnée.
Dans son document d'étude, le comité s'est à juste titre penché sur la question du financement et a suggéré diverses idées de discussion pour aujourd'hui. On accorde beaucoup d'attention à la nécessité d'opter pour une vision novatrice et de saisir les possibilités qu'offrent les partenariats entre le secteur privé et le secteur public.
L'Association des transports du Canada, qui est elle-même un partenariat entre le public et le privé, est heureuse d'être invitée à participer à ces échanges. Toutefois, ni John Pearson ni moi-même ne sommes en mesure de répondre au nom de notre organisation aux questions proposées pour la discussion d'aujourd'hui. Néanmoins, nous sommes disposés à aider le comité et à discuter de l'expérience acquise et des discussions que nous avons eues tout au long de l'étude sur la politique relative au réseau routier national. Comme vous le savez sans doute, cette étude a été menée et gérée par l'association pour le Conseil des ministres responsables des transports et de la sécurité routière.
[Français]
C'était là notre contribution aux travaux du comité, à titre de personne ressource auprès du comité. L'Association des transports du Canada représente des intérêts très divers et fort diversifiés. Plusieurs membres de notre conseil d'administration sont ici présents. Bien que certains soient absents, nous représentons l'ensemble des propriétaires du système de transport autoroutier. Nous vous offrons notre collaboration et vous assurons que l'ATC est toute disposée à vous appuyer dans le cadre de vos travaux au niveau de la pensée qui nous mènera vers l'an 2000. Je vous remercie.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Pelletier.
J'aimerais maintenant donner la parole à Brian Hunt, de l'Association canadienne des automobilistes. L'organisation de Brian a déjà commencé à fournir des fonds pour la reconstruction du réseau routier en faisant parvenir un grand nombre de contributions de deux cents aux bureaux des députés.
Brian.
M. Hunt: Merci, monsieur le président.
Nous estimions qu'il était nécessaire de lancer la campagne de financement. L'initiative ne vient pas que de notre organisation; c'est aussi celle de nos membres et de Canadiens de tout le pays qui font parvenir leur contribution de deux cents aux députés. Nous allons surveiller la question avec beaucoup d'intérêt pour voir ce que les députés feront, partant de là, pour constituer ce fonds. Nous nous en réjouissons.
Nous sommes heureux de pouvoir participer ce matin à cette table ronde. Nous croyons vraiment que le gouvernement fédéral doit assumer un rôle de leadership au sujet de notre réseau routier national. Nous venons de passer la dernière année en allées et venues pour aller rencontrer non seulement nos membres, mais aussi tous les Canadiens, pour parler de la nécessité d'investir dans l'infrastructure - d'investir dans deux secteurs, en fin de compte.
Quand on parle de routes, il n'est pas question que de sécurité. L'Association canadienne des automobilistes s'occupe beaucoup de la sécurité des automobilistes sur les routes. Mais c'est aussi une question économique. Nous estimons que sans une solide infrastructure le Canada n'est pas bien placé pour assurer sa croissance et sa prospérité dans l'avenir. Il ne s'agit pas que de construire ou de reconstruire les routes du réseau national qui en ont le plus gravement besoin. Une fois ces routes construites, c'est le flot de la circulation - la valeur économique de ce flot - qui crée des emplois à long terme.
Qu'on pense à ce que les États-Unis et le Mexique, nos partenaires de l'ALENA, investissent dans leurs routes. Ces deux pays ont des programmes de réseaux routiers nationaux et y investissent des sommes considérables. Le fait que la moitié, selon notre estimation, de notre réseau routier national ne réponde plus aux normes et doive être réparé constitue un grand sujet d'inquiétude pour l'avenir du Canada.
Au cours de la campagne que nous avons menée l'année dernière, il y a une chose que nous avons répétée à maintes reprises - et on exagère à peine - c'est que nos routes sont dans un tel état de détérioration qu'on en arrive au point où de nombreux Canadiens auront à l'avenir besoin d'un véhicule tout terrain pour emprunter ces routes et contourner les nids-de-poule.
Nous estimons que le Comité permanent des transports a rédigé un excellent document de travail qui met en lumière la nécessité d'investir dans le réseau, et je ne vais donc pas insister beaucoup sur ce point aujourd'hui. Je félicite le comité pour le travail qu'il a accompli. Je trouve que c'est remarquable. Il a clairement fait état des besoins.
Nous sommes ici pour discuter des moyens de financer ces travaux. Cette discussion vient à point nommé. Il y a selon la CAA quelques critères à respecter que nous aimerions nous permettre de rappeler. Ils nous semblent logiques et assez simples, tout du moins nous l'espérons.
Il faut que les propositions de renouvellement du réseau routier national soient accompagnées d'engagements financiers adéquats. Quand je dis «engagements financiers adéquats», il existe déjà un certain nombre d'études... et il faut que le financement prévu pour ces travaux coure sur une période d'au moins 5 à 10 ans. Nous ne voudrions pas qu'il y ait simplement un poste à crédits limités dans le budget de l'année prochaine. Nous voulons un engagement permanent qui permettra non seulement de renouveler le réseau national au cours des 5 ou 10 prochaines années, mais également d'entretenir ce réseau afin que nous ayons une des meilleures infrastructures routières du monde, ce qui est selon nous indispensable pour l'avenir de notre pays.
Deuxièmement, nous ne voudrions pas que les usagers de la route d'aujourd'hui subissent une taxe supplémentaire. Nous estimons qu'ils assument déjà largement leur part, et nous ne voudrions pas qu'elle soit augmentée.
Voilà nos deux critères. Plutôt que d'énumérer les raisons de notre présence, que nous soyons tous là est déjà très significatif.
Je vous remercie de m'avoir donné la parole. Je me ferai un plaisir de participer à la conversation. Nous sommes ici pour discuter, dans l'espoir qu'à la fin de cette journée des solutions novatrices de financement de nos routes auront été proposées.
Merci.
Le président: Avant de passer au suivant, je voudrais vous signaler que je tiens une liste. Si vous avez des questions ou si vous voulez intervenir, faites simplement signe au greffier ou faites-moi signe, et je vous inscrirai. J'aimerais que la réunion se déroule d'une manière plus ou moins ordonnée. Le premier sur ma liste est M. Crête.
Je peux peut-être maintenant passer à un autre usager important de la route après les automobiles, les camions.
Monsieur Bélanger.
[Français]
M. Bélanger: J'ai le plaisir d'être ici ce matin pour parler du renouvellement, de l'entretien et de l'amélioration du système d'infrastructure routière au Canada.
[Traduction]
Je sais que nous sommes ici pour discuter les divers moyens de financer le renouvellement de l'infrastructure, mais je crois qu'avant tout financement de ce genre il nous faut nous engager à protéger et à renouveler ce qui existe déjà. Nous avons un système dans lequel il y a 10 propriétaires avec un dirigeant non propriétaire, ou simplement partiellement propriétaire, qui n'a pas beaucoup de poids à cause de son manque de contribution à l'infrastructure elle-même.
L'infrastructure canadienne est un bien d'équipement de 197 milliards de dollars dont la gestion est laissée à l'abandon depuis des années. Est-il imaginable de ne pas gérer un bien d'équipement de 200 milliards de dollars? Non, et pourtant c'est la situation au Canada. Je crois qu'il est temps que les 10 gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral s'entendent pour faire de la gestion de cet énorme bien d'équipement une priorité.
On entend souvent dire que les camions devraient financer le réseau routier. C'est ce qu'on entend beaucoup dire. Permettez-moi de vous rappeler une ou deux petites choses.
Les taxes perçues par le seul gouvernement fédéral, environ la moitié des taxes perçues sur les carburants, représentent le chiffre d'affaires brut de l'ensemble de l'industrie du camionnage au Canada. Vu sous cet angle, il n'y a plus grand-chose à gratter.
Deuxièmement, l'industrie du camionnage n'a pas d'argent et ne gagne pas d'argent. Elle arrive tout juste à rentrer dans ses frais. En 1996 la moyenne de ses membres n'y est même pas arrivée. En 1995 la situation était un peu meilleure, mais 1997 ne démarre pas trop bien.
Quand l'industrie du camionnage est soumise à des pressions financières supplémentaires il lui faut trouver le moyen de compenser ces coûts. Dans certains cas c'est possible en améliorant l'infrastructure routière, autrement il lui faut réduire les coûts ailleurs. Et qu'est-ce qui souffre en premier de cette réduction des coûts? Les mesures de sécurité.
Il y a déjà eu assez de roues qui se détachent. Malheureusement, si nous obligeons l'industrie à réduire ses coûts, il y en aura d'autres. Il ne peut pas y avoir de camions sans chauffeurs, et la main-d'oeuvre représente plus de 50 p. 100 de nos coûts. Notre marge de manoeuvre est donc très limitée. La technologie nous aide beaucoup, et de meilleures routes nous aideraient beaucoup, mais il n'y a pas que cela.
Il faut donc examiner l'incidence sur les coûts. S'il n'y a ni remplacement de coûts ni réduction de coûts possible, il faut une compensation au niveau du prix. Quelle est la conséquence d'une augmentation du prix? Le prix des produits canadiens augmente sur le marché international.
J'ai entendu au National il y a deux jours qu'une augmentation d'un cent de la valeur du dollar canadien entraîne une réduction de 400 millions de dollars au niveau des exportations. Le coût des produits canadiens a une incidence directe sur l'économie canadienne. C'est ce qui arrive quand on augmente le coût du transport par camion.
Cela dit, cela ne veut pas dire que l'industrie est contre tout changement. Bien sûr que non. Nous sommes favorables à cette proposition de caisse financée par une partie des taxes prélevées sur les carburants, deux cents par litre. Ce serait la preuve que le gouvernement est vraiment sérieux. D'une manière analogue, nous ne sommes pas contre des solutions ponctuelles comme la 407, route financée par les péages. Dans certaines circonstances, c'est possible.
Nous sommes contre la 104, car là il n'y a pas le choix entre une route à péage et une route sans péage. Pour la majorité des routes canadiennes ce n'est pas une solution envisageable. Par contre, l'industrie était favorable à la construction de la 407 à péage.
Nous sommes donc prêts à discuter de toutes ces questions et nous sommes prêts à assumer la part de coûts supplémentaires que notre industrie peut absorber. Il ne faut pas oublier l'élément économique. Un coût supplémentaire au niveau des transports est un coût supplémentaire au niveau du prix des produits que nous vendons sur le marché international, et l'incidence est directe sur l'économie canadienne.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Bélanger. Vous devriez discuter avec M. Gauthier, des chemins de fer. Vous pourriez échanger vos notes.
M. Bélanger: Nous discutons très souvent avec les chemins de fer, monsieur le président. On parle beaucoup de changements des modes de transport. De nombreuses études ont démontré que c'était une illusion. Ils ont essayé en Europe; regardez ce qui s'y passe. Prenez la Suisse, par exemple. Si nous sommes tous prêts à payer nos 50 $... Ce serait peut-être une idée. Mais c'est ce qui est arrivé en Suisse.
Le président: Merci, monsieur Bélanger. C'est une question très importante.
Vous avez aussi parlé de sécurité. C'est une question qui préoccupe énormément ce comité. Évidemment, il y a eu quelques graves accidents en Ontario. En fait, le bus dans lequel ce comité se déplaçait a été touché par une roue qui s'était détachée - je n'étais pas dans le bus - et un des membres du personnel a dû être hospitalisé. C'est un très gros problème qu'il ne faut pas perdre de vue.
La parole est maintenant à M. Redfern, de la CRIC.
M. Redfern: Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invité à participer à cette table ronde.
Vous pouvez vous imaginer que, présidant depuis quatre ans la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada, combien je suis heureux de participer à cet exercice. Monsieur le président, je vous félicite, ainsi que votre comité, de l'excellent travail que vous avez accompli pendant vos audiences et de votre initiative d'aujourd'hui.
Je peux vous confirmer, étant venu hier soir de Montréal par la route, qu'il y a du travail à faire. Nous devrions pouvoir aujourd'hui donner l'impulsion nécessaire au lancement d'un programme à long terme de renouvellement et d'entretien du réseau routier national.
Il est vraiment dommage que les acteurs, à la fois fédéral et provinciaux, qui ont participé si activement et avec tant de succès à l'étude du plan routier national de 1988 à 1992 n'aient pu traduire concrètement les résultats de cet excellent travail. Leurs efforts au niveau de la conception et de la programmation et leurs arguments au niveau de la nécessité économique du projet ont fait la démonstration unique d'une coopération efficace entre le gouvernement fédéral et les provinces.
Ils avaient tous les outils, les informations et les munitions nécessaires pour justifier ce projet tant sur le plan de la sécurité économique et de l'environnement que sur celui de l'unité, mais ils n'ont pu rassembler la volonté politique pour le faire accepter. Pour l'essentiel, ils ont achoppé sur le financement, raison de l'importance de notre étude d'aujourd'hui.
J'aimerais également féliciter les rédacteurs du document de travail. Il est factuel et bien écrit et tire des conclusions très valables sur la nécessité et les moyens d'actualiser le plan routier national tout en décrivant les formidables retombées d'une telle entreprise. C'est avec enthousiasme que la CRIC entérine le contenu de ce document.
J'aimerais également déclarer que malgré les commentaires et les réflexions de nombre de nos politiciens, à la fois fédéraux et provinciaux, le réseau routier n'est pas une dépense discrétionnaire. C'est un coût économique essentiel. La véritable réalité économique, c'est que nous ne pouvons nous permettre de ne pas avoir un réseau routier digne de ce nom.
Les autres solutions de financement m'intéressent tout particulièrement dans la mesure où elles permettent d'étaler le financement sur la durée de vie des projets d'infrastructure et où elles nous permettent de lancer ces projets plus vite. Cependant, il ne faut pas oublier, comme l'a rappelé l'étude sur le plan routier national, qu'une grande partie du réseau national ne se prête pas à la tarification des usagers. D'une part parce que ce réseau existe déjà et d'autre part parce que le trafic n'est pas partout suffisant.
Il n'y a peut-être pas d'autre solution sans péage, mais en revanche, comme l'étude l'a montré et comme il a déjà été dit, certains tronçons du réseau routier national pourraient se prêter à cette tarification, surtout qu'aujourd'hui les systèmes de péage sont devenus plus efficaces, évitant les goulots d'étranglement aux postes de péage d'autrefois.
En fait, nous attendons aujourd'hui du gouvernement fédéral qu'il prenne l'initiative de ce renouvellement du réseau routier national, qu'il s'engage en partenariat avec les provinces dans un projet global, à long terme, et non pas ponctuel et parcellaire. C'est ce qu'il nous faut.
Il sera peut-être nécessaire de confier la charge de ce réseau national à un nouvel organisme, mais avant tout il nous faut un engagement, une initiative du gouvernement fédéral en partenariat avec les provinces et les territoires pour que le projet soit global.
Le président: Merci, monsieur Redfern.
C'est avec grand plaisir que nous avons entendu comme témoins pendant cette discussion plusieurs ministres fédéraux. Le ministre du Commerce nous a envoyé une lettre dans laquelle il s'inquiétait du potentiel d'exportation du pays, et le ministre du Tourisme est également venu nous voir.
Je pourrais peut-être demander à Debra Ward, de l'Association de l'industrie touristique, de nous parler un peu de l'importance du réseau routier national pour l'industrie touristique.
Mme Ward: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je me joins à mes collègues pour vous remercier de m'avoir invitée à venir discuter aujourd'hui de cette question et pour vous féliciter du travail incroyable réalisé par votre comité et par d'autres qui nous ont aidés à préparer notre mémoire. J'espère que ces circonstances nous permettront de progresser davantage aujourd'hui que nous n'avons pu le faire depuis un certain temps.
Pour vous donner une idée de l'impact des transports et du réseau routier sur le tourisme et vice-versa, le tourisme est une industrie qui rapporte annuellement 42 milliards de dollars au Canada. Sur cette somme environ 18 milliards de dollars correspondent aux recettes réalisées par les transports. Sur ces 18 milliards, la moitié, 9 milliards, sont liés directement à l'usage de véhicules privés. Cela inclut les réparations, le carburant et la location.
Donc, une énorme partie des recettes touristiques ont un impact direct sur le réseau routier et sur les coûts associés à l'utilisation de ce réseau.
Nous n'avons pas de chiffres précis, mais selon nos meilleures estimations près de 70 à 80 millions de personnes se déplacent annuellement sur nos routes pour des voyages touristiques d'une nuit ou plus. Il y a donc beaucoup de touristes sur nos routes, tant étrangers que canadiens.
Bien entendu, en conséquence, le renouvellement et l'entretien non seulement de notre réseau national, mais aussi de tout le réseau routier sont d'une importance cruciale pour l'industrie touristique, qui est toujours en quête de croissance.
Le problème actuellement pour notre industrie, c'est que de nombreux et graves goulots d'étranglement freinent sa croissance. Ces goulots d'étranglement revêtent plusieurs formes en fonction des régions. Certains sont étroitement liés au réseau routier national et à ses interconnexions avec les réseaux routiers provinciaux; d'autres sont plus liés aux aéroports internationaux.
Il est essentiel de savoir avant toute chose que d'après nos estimations environ 80 p. 100 des destinations touristiques se trouvent dans un rayon de deux heures de voiture des aéroports internationaux. Nous avons du mal à inciter les gens à se rendre dans des régions plus éloignées à cause de la pauvreté de notre réseau routier.
Autre chose à ne pas oublier, bien entendu, les touristes peuvent très facilement dans de nombreux cas être incités à utiliser les routes secondaires parce que souvent ce sont les routes qui offrent le plus d'attraits touristiques et où il fait bon se promener sans être pressé pour aller du point A au point B. Nous espérons donc des solutions imaginatives sur ce plan.
Comme vous le savez, monsieur le président - et monsieur Keyes, je suis certaine que vous le savez aussi - le ministre, M. Anderson, a organisé une table ronde de hauts-fonctionnaires du Tourisme et de PDG d'entreprises de tourisme et de transport pour discuter de questions liées au transport et au tourisme et voir si ensemble nous pourrions dresser la liste de problèmes essentiels à résoudre pour stimuler encore plus le tourisme. La discussion a été très générale et a porté sur beaucoup de choses, mais il y a un ou deux points communs sur lesquels j'aimerais attirer votre attention, car ils seront utiles pour la suite de notre discussion.
Le problème numéro un, c'est que d'après certains, même si le Canada ne fait rien pour améliorer son réseau de transport et son potentiel touristique, le tourisme continuera quand même à bien se porter. Nous avons un produit très solide, et tout se passe à peu près bien. Ce n'est pas un caillou dans la chaussure qui nous empêche de marcher.
Cela ne devrait pas vous surprendre que tant les représentants des transports que ceux du tourisme lors de cette table ronde ont estimé que cet argument ne tenait tout simplement pas debout. Pour que le tourisme prospère et rapporte des avantages sociaux et économiques, il faut que sa croissance soit gérée et planifiée. Et ce sont presque exclusivement des problèmes de transport qui limitent ou qui freinent cette croissance gérée et planifiée.
D'où l'importance du réseau national et des réseaux subsidiaires si nous voulons vraiment que notre industrie touristique connaisse la croissance, que notre pays devienne une des deux ou trois destinations préférées du monde et que soient créés les emplois et les entreprises générés par ces industries.
Ce sont simplement quelques petites observations très rapides sur cette réunion d'une journée.
Ce qui nous a semblé le plus essentiel, c'était la nécessité de mettre en place de véritables programmes de partenariat à long terme entre les trois paliers de gouvernement. Il est impensable d'oublier les administrations municipales dans ce domaine.
J'aimerais aussi vous rappeler que le tourisme n'est pas uniquement un problème interurbain. Ce n'est pas seulement un problème de réseau routier national. C'est aussi la nécessité d'un accès direct et approprié à nos étoiles touristiques, Whistler étant un exemple typique, et le 99 un exemple typique de l'importance de cette coopération.
Il y a aussi quelques problèmes périphériques inhérents au réseau routier national et à la Transcanadienne, quand la Transcanadienne, par exemple, traverse un parc national comme Banff. Il y a des problèmes d'utilisation qu'il ne faudrait pas oublier.
Le concept de la tarification ne nous pose pas vraiment de problèmes, à condition de respecter certains principes. Il faudrait éviter de prendre toujours dans la même poche. Si tarification il y a, alors il faut rationaliser les taxes sur les carburants, les taxes d'accise, pour qu'elles soient plus justes et que si l'usager paie, il ne paie qu'une fois, et non pas deux. Il ne faut ni double facturation ni double taxation.
Il faudrait aussi qu'il y ait un autre itinéraire pour ceux qui ne veulent pas, pour quelque raison que ce soit, payer de péage.
Cela dit, il est, je crois, utile de rappeler que Brewster Transportation, de Banff, est très heureuse d'acquitter un droit pour ses autocars - je crois qu'il est analogue à celui qui est prévu pour les camions, donc un peu plus élevé que pour les voitures particulières - pour emprunter la route Coquihalla. La compagnie a fait une étude de rentabilité et s'est rendu compte que ce droit était largement inférieur aux coûts supplémentaires en essence, en usure et en temps des autocars qui empruntent l'autre route. Certaines de ces routes offrent donc des avantages qu'il ne faudrait pas oublier dans les calculs de rentabilité.
Pour conclure, j'attends avec impatience aujourd'hui de discuter de ces questions. J'aimerais qu'aucun de nous n'oublie que ce n'est qu'un début et que le réseau routier national n'est qu'un réseau parmi beaucoup d'autres, comprenant fort bien que ce soit celui dont nous discutons aujourd'hui, puisqu'il relève du gouvernement fédéral. Mais une fois ce processus lancé, j'aimerais qu'il aboutisse à la constitution d'un réseau sain et en bon état de routes et de services véritablement canadiens.
Merci beaucoup.
Le président: Nous vous donnerons l'occasion de revenir sur ces points.
[Français]
Monsieur Crête.
M. Crête: J'ai été très impressionné par les différentes présentations puisqu'elles reprennent un certain nombre d'éléments qui figuraient dans notre document de travail, dont la question de l'engagement à long terme du gouvernement.
Il est important de souligner l'approche non partisane qui existe dans ce secteur. Nous constatons que c'est vraiment un choix important pour tout l'espace pancanadien. Tous les partis reconnus au Parlement ont participé de façon commune à ce projet parce que nous savons que, quelles que soient les structures politiques existantes, l'espace économique canadien va continuer d'être très important à l'avenir.
Nous constatons tous qu'on accuse un certain retard stratégique depuis trois ou quatre ans ou peut-être un peu plus. Je ne ferai pas de partisanerie, mais à partir du moment où l'étude dont nous parlions plus tôt est mise sur la table, nous sommes tenus de faire des choix stratégiques. Compte tenu de l'Accord de libre-échange, si on ne prend pas de décisions au cours des prochaines années, on risque d'en souffrir les conséquences pendant 10, 15, 20 et 25 ans.
Beaucoup de choix stratégiques importants s'imposent au niveau du tourisme et du développement de nos économies régionales. Puisque la réforme de l'assurance-emploi vient de transformer complètement la relation entre le travailleur et l'employeur dans les provinces Maritimes et dans l'Est du Québec, on devra prévoir des formes d'indemnisation pour transformer ces économies, notamment assurer un réseau routier intéressant.
Par exemple, chez moi, la route 185 est sur le réseau routier pancanadien. Il y a 25 ans, c'était une route somme toute campagnarde, qui est maintenant devenue un lieu de passage routier et de camionnage fantastique. Des problèmes de sécurité et de volume ont surgi et il est urgent qu'on intervienne pour les régler.
J'aimerais discuter de la question du développement nord-sud puisqu'elle m'apparaît importante. On a fait des choix dans le passé relativement au développement des autoroutes. Par exemple, depuis la construction de la Transcanadienne, on n'a peut-être pas fait une mise à jour de nos orientations stratégiques. Nous devrons décider si nous nous contenterons de rénover ce qui existe ou si nous développerons de nouveaux axes routiers. Ce seront des choix fondamentaux pour l'avenir du Québec et du Canada.
Notre comité vient aujourd'hui d'une part vous consulter sur ce que vous pensez de la situation, mais d'autre part, à mon avis, la question la plus importante que le comité étudie ce matin et à l'égard de laquelle nous avons tous une part à faire est celle du financement, de l'effort que tous peuvent faire pour régler la question du financement.
Les modes de financement traditionnels par les gouvernements des autoroutes ou de toute infrastructure routière sont complètement bloqués en raison des problèmes financiers que nous avons accumulés dans le passé. Il faut trouver des solutions. On a par exemple proposé une affectation de 2 cents. C'est une approche, une forme de solution, mais il faudra en développer d'autres. À cet égard, toute la question du partenariat privé et public est importante.
Lorsque nous avons à intervenir, chacun de notre côté, nous devons aussi nous demander ce que nous pouvons faire en termes de contribution. Quel package deal ou opération corvée peut-on faire tous ensemble? Quelle contribution chacun des partis peut-il apporter? Je ne propose pas qu'on mette des millions sur la table ce matin, mais qu'on regarde ensemble quelle contribution chacun est en mesure de faire. Qu'est-ce que les gens du camionnage, du tourisme, de l'automobile, ceux qui assurent les modes de financement et les gouvernements peuvent faire ensemble et de quelle façon?
Il est important qu'on agisse dans ce dossier en misant toujours sur la collaboration, tant entre les différents utilisateurs du réseau routier qu'entre les gouvernements concernés. Je termine en vous demandant quelle sera votre contribution à la suite de l'engagement des gouvernements à vraiment en faire une priorité.
[Traduction]
Le président: Quelqu'un veut-il répondre?
M. Atkinson: Monsieur le président, après avoir entendu ce que certains usagers avaient à dire, et ce que M. Crête avait à dire, je crois qu'il importe de rappeler et de souligner certains termes ou certains mots souvent répétés: «long terme», «non partisan» et «financement durable».
L'Association canadienne de la construction a conclu à la nécessité, entre autres, et elle est d'ailleurs évoquée dans votre document de travail, de la création d'une sorte d'organisme quasi indépendant - donnons-lui le titre pour le moment d'administration routière nationale - qui aurait pour mandat et qui aurait le pouvoir et la responsabilité en fait de gérer intelligemment et à long terme ce bien d'équipement de très grande valeur.
Cependant, nous y ajouterions la réserve suivante: nous ne voudrions pas du tout que cet organisme permette au gouvernement fédéral et aux autres gouvernements, aux propriétaires des routes, de se croire désormais dispensés de toute autre responsabilité. En fait, à cette suggestion de création de cette entité comme première étape, nous ajoutons la nécessité absolue pour ce groupe d'un financement public durable assumé en particulier par le gouvernement fédéral. Que ce soit les taxes actuelles sur les carburants - ce que, j'en suis sûr, souhaiteraient de nombreux usagers - ou une autre source qui l'alimente, il est indispensable qu'il soit financé d'une manière durable et continue.
Monsieur le président, je crois que l'autre point dont il va être question pendant nos discussions, surtout lorsque la communauté financière interviendra, c'est que rechercher une seule solution magique pour financer prudemment et à long terme notre réseau routier national relève du rêve en couleurs. Étant donné l'énormité de ce bien collectif, étant donné ses variations de caractéristiques, il est possible qu'une solution universelle ne convienne pas. Il est donc d'autant plus important que cet organisme compte dans ses rangs une forte représentation des principaux intéressés, des usagers qui participeraient aux décisions de gestion de ce bien collectif.
Il importe aussi de comprendre que bien que le travail de ce comité ait été excellent, que bien que ce document de travail soit certainement très complet et très précis dans ses conclusions, le temps n'est plus aux discussions. Je crois qu'un des usagers a parlé de décrépitude, d'agonie du réseau routier. Il faut arrêter de discuter et prendre les mesures indispensables que nul n'ignore.
Nous sommes certes très heureux de participer à cet exercice, de participer à cette discussion. Nous espérons seulement que cette série d'audiences, cette série de tables rondes, sera la dernière.
Le président: Qui a parlé de rêve en couleurs?
Des voix: Oh, Oh!
Le président: Monsieur Hunt.
M. Hunt: Il est clair tant pour les usagers que pour tout le monde qu'il est indispensable de faire quelque chose. Il faut investir. Il faut investir de manière durable et à long terme. Par contre, si nous sommes ici aujourd'hui, c'est pour réfléchir à d'autres formes ou solutions de financement qui nous sont peut-être un peu étrangères.
Les routes aujourd'hui sont financées - et je m'excuse d'être aussi élémentaire - comme la majorité des Canadiens achètent du pain et du lait. On les finance comme des articles à emporter. Quand on considère l'importance de ce bien collectif, 197 milliards de dollars... et je n'ai pas l'intention de contester ce chiffre. Disons 200 milliards de dollars. D'après nos calculs, la simple réfection du réseau national coûtera 15 milliards de dollars.
Le financement à l'ancienne est révolu. J'espère qu'aujourd'hui nous commencerons à réfléchir à la manière dont la majorité des Canadiens achètent une voiture ou une maison. Ils n'achètent pas comptant, autrement il n'y aurait pas beaucoup de Canadiens propriétaires d'une maison aujourd'hui.
Il faudrait d'après moi arrêter de penser en termes de comptabilité publique et penser un peu plus en termes de comptabilité commerciale pour renouveler et gérer sur une durée déterminée ce bien collectif. L'infrastructure routière du pays est la ligne de vie économique du pays. Nous ne pouvons laisser nos routes continuer à se détériorer. Que ce soit pour le tourisme, l'industrie, ou même simplement pour la sécurité, il nous faut régler cette question.
J'espère donc que tout le monde oubliera un peu les cadres traditionnels pour aboutir à des solutions novatrices.
Le président: Merci, monsieur Hunt.
Permettez-moi de donner la parole à quelqu'un qui, pourrait-on dire, peut-être, est plus près du chéquier du gouvernement que nous tous ici rassemblés.
Monsieur Keyes, puis-je vous demander de dire un mot?
M. Keyes: Merci beaucoup, monsieur le président. Je devrais peut-être commencer mes remarques en vous félicitant d'avoir propulsé cette question sur l'avant-scène. C'est grâce à votre esprit d'innovation et à vos efforts que nous avons réussi ensemble à donner la priorité à cette question.
Tout en vous félicitant, je crois que tous les députés ministériels - puisque nous parlons de chéquier - savent que c'est Paul Martin, je crois, notre ministre des Finances, qui dans un de ses premiers budgets a dit que les gouvernements ne devraient pas avoir de vocation commerciale. À cette époque, Doug Young, qui était ministre des Transports, s'est empressé de le prendre au mot. Il en a fait la démonstration dans les chemins de fer avec le CN, qui a été commercialisé et privatisé... Il y a eu les aéroports et la politique des aéroports nationaux, qui est en train d'aboutir à la commercialisation des aéroports. Et les systèmes de navigation ont été confiés à NAV CAN.
Je crois donc qu'on commence à comprendre que le secteur public est un bien mauvais gestionnaire d'entreprises, contrairement au secteur privé, et que nous pouvons aller dans cette direction.
Je me sens obligé de répondre aux observations de M. Atkinson concernant la création d'un organisme quelconque, quasi judiciaire ou autre, qui essayerait de gérer ce qu'on appellerait le «programme routier national». Très franchement, la dernière chose que je veux voir, c'est un autre groupe de bureaucrates, ou de personnages, qui se réunirait autour d'une table pour gérer un programme routier national pour notre pays.
Je dis cela parce qu'il n'y a qu'à voir comment s'est bâti le programme d'infrastructures, qui était dénué de partisanerie, où le gouvernement fédéral a pris effectivement l'initiative, a consulté le gouvernement de l'Ontario ainsi que les municipalités. Les trois paliers de gouvernement se sont concertés d'une manière très efficiente pour mettre de l'avant un programme qui, à mon avis, a extrêmement bien réussi aux trois niveaux de gouvernement. Et s'il a été prolongé, c'est parce qu'il a été très bien reçu.
Je pense donc que les gouvernements peuvent travailler ensemble. Nous n'avons pas besoin de créer un nouvel organisme chargé de mettre en oeuvre ce programme.
On ne peut pas oublier non plus toutes les considérations globales. À l'heure où nous tâchons de trouver des moyens de financer une telle entreprise - et je pense qu'on admet généralement que pour des raisons qui ont trait au tourisme, au commerce et à la sécurité, un programme routier est une initiative essentielle pour notre pays - il y a d'autres possibilités auxquelles il faut à tout le moins songer, ou qu'il faut garder à l'esprit dans la conception d'un tel programme. Il faut en effet se demander combien de voies il doit y avoir sur une autoroute. Il faut s'interroger aussi sur leur coût.
Lorsque j'étais à votre place, monsieur le président, nous avons parcouru le pays et nous sommes allés à l'étranger lorsque nous avons fait enquête sur l'opportunité d'instaurer un train à grande vitesse dans notre pays. Nous avons vite compris, si nous nous comparons au reste du monde, que les Canadiens sont très attachés à leur voiture. Il faut tenir compte d'un tel facteur lorsqu'on examine les considérations globales.
Si nous avons 11, 15 ou 16 voies de London jusqu'à Québec, et que le circuit est engorgé entre Hamilton et Toronto parce que les gens tiennent à prendre leur voiture pour faire 50 km jusqu'à leur travail, il faut s'assurer que le public est bien informé des diverses possibilités qui s'offrent à lui, et il faut, de là, encourager les transports en commun, encourager le train de banlieue, encourager le covoiturage - toutes ces initiatives, non seulement parce qu'il s'agit d'économiser des dollars fédéraux, parce que c'est le contribuable qui finance la construction des autoroutes toujours plus nombreuses et plus accessibles, mais aussi parce qu'il y a un coût environnemental à tout cela, et les gens ont ainsi la possibilité d'économiser des sous qui sortiraient directement de leur poche à cause des primes d'assurance, de l'essence, du prix des voitures, etc.
Je veux donc m'assurer qu'on garde tout cela à l'esprit. Je ne veux pas donner aux gens qui assistent aux travaux du comité aujourd'hui l'impression que nous traversons une crise quelconque. Nous n'en sommes pas encore là.
M. Hunt a dit que nous allons bientôt avoir besoin de véhicules tout terrain pour circuler sur les routes canadiennes. C'est exagéré. Nous prenons la 401 pour nous rendre de London à Québec, et très franchement, la 401 est une excellente route.
Comme le disait Mme Pelletier, allons-nous trouver la volonté qu'il faut pour financer le rajeunissement d'un programme routier national? Oui, je pense que le comité a la volonté qu'il faut. Chose certaine, les députés qui siègent à ce comité ont la volonté qu'il faut. Telle est la volonté des dames et des messieurs ici présents. C'est aussi la volonté d'au moins quatre ministres fédéraux qui vont témoigner devant notre comité. C'est aussi la volonté, j'ose le dire, des Canadiens qui nous regardent aujourd'hui. Un système routier national peut mieux soutenir le commerce interne et international ainsi que le tourisme. Et chose encore plus importante, bien sûr, un tel système peut sauver des vies et épargner des blessures.
À mon avis, la volonté politique existe à notre niveau, ainsi qu'au niveau provincial, et même municipal... quoiqu'il n'y ait plus beaucoup de municipalités en Ontario qui veulent entendre parler de dévolution provinciale, mais même là elles comprennent que la volonté politique est là, que les preuves sont là. Mais tout se résume à combien: combien ça va coûter, qui va payer, et qui va partager les coûts de ce programme?
Étant donné les contraintes financières qui lient notre gouvernement ainsi que tous les gouvernements provinciaux, étant donné les contraintes financières dans le secteur privé, étant donné la responsabilité que notre gouvernement a envers les Canadiens, à qui il a promis de bien gérer les finances publiques, de bien gérer la dette, j'ai très hâte d'entendre ce que vont nous dire Liam Rafferty ou Harry Swain, de la Banque Hambros, et d'autres institutions financières, qui disent: «Voici comment nous pouvons former des partenariats, voici comment nous pouvons faire des choses pour les Canadiens, parce que nous comprenons qu'un système routier national sera une bonne chose pour notre pays pour beaucoup de raisons.»
Comment allons-nous former des partenariats? Comment allons-nous partager les coûts? Comment allons-nous trouver la créativité financière qu'il faut pour créer ce système routier national?
Merci, monsieur le président.
Le président: J'ai plusieurs personnes sur ma liste et j'ai moi-même des questions à poser à nos témoins. Cela dit, je remarque que certaines personnes ont inscrit leur nom sur ma liste pour répondre à des observations qui ont été faites. Je vais donc y aller un peu au hasard pour l'instant afin de permettre aux gens d'intervenir pendant que c'est encore frais dans leur mémoire.
Debra.
Mme Ward: Merci, et merci, monsieur Keyes, pour ce que vous avez dit.
J'aimerais répondre à ce que M. Atkinson a dit sur «l'administration». Avant d'écarter tout à fait cette idée - et je crois comme vous que nous n'avons absolument pas besoin d'une nouvelle bureaucratie - , il y a des solutions émanant d'une table de concertation qui peuvent être très intéressantes. Nous avons le même mécanisme à la Commission canadienne du tourisme, qui est composée de représentants des gouvernements provinciaux, du gouvernement fédéral et du secteur privé, qui ont tous pour responsabilité de faire connaître le Canada.
En un mot, la commission dispose de 50 millions de dollars en financement fédéral. Nous allons bientôt trouver 70 millions de dollars de plus de sources privées et provinciales aussi. Nous aurons donc entre 100 et 120 millions de dollars pour faire connaître le Canada, ce qui est beaucoup plus que les 15 millions de dollars que nous avions en 1992.
Un organisme de ce genre, de la façon dont il est structuré, donne au débat une vigueur que ne peut donner aucune autre organisation homogène. C'est ce que nous avons constaté au niveau du tourisme. Le gouvernement fédéral a son point de vue à lui; c'est aussi le cas des gouvernements provinciaux et du secteur privé. Si l'on réunit tous ces points de vue, on obtient une synergie d'idées et d'approches qui donnent une capacité d'intervention et de planification qu'aucun groupe homogène ne possède. C'est essentiel dans ce débat. Il est évident qu'aucune institution ne peut agir seule ici. Il faut trouver des tables de concertation.
Ce qui est également essentiel, c'est qu'il faut avoir des mécanismes à long terme capables de planifier pour les 20, 30 ou 50 années à venir, particulièrement s'il s'agit d'élargir le processus de financement.
Donc, nous n'avons pas besoin d'une nouvelle bureaucratie, absolument pas, mais nous avons besoin d'un lieu de rencontre amical où nous pouvons discuter de ces questions en profondeur.
Le président: C'est intéressant, mais l'idée d'avoir une entité dont la seule raison d'être consisterait à financer la construction et l'entretien des routes n'est pas nouvelle et soulève la question des critères dont nous avons parlé au niveau de l'uniformité, de la concentration, de la dépolitisation et de toutes ces choses-là.
Pour confirmer ce que dit M. Keyes, je dirai cependant que lorsque j'ai pris la parole à la conférence de l'ATC à Charlottetown et que j'ai lancé cette idée, je n'ai pas eu le temps de quitter le podium que j'ai été assailli par plusieurs représentants des gouvernements provinciaux qui m'ont fait savoir que j'avais perdu la raison. C'est donc sûrement une idée qui mérite discussion, mais qui suscite de vives réticences.
Je remarque que M. Beck, de la Canadian Highways International Corporation, vient d'arriver.
Bienvenue. Je crois savoir que le vol a été un peu difficile. Je vais vous donner quelques minutes pour vous acclimater, après quoi je vous donnerai la parole.
Je cède la parole à M. Cullen, et ce sera ensuite au tour de M. Bélanger.
M. Cullen: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à souhaiter la bienvenue à toutes les personnes ici présentes aujourd'hui. La question qui nous occupe est à mon avis très importante. Comme l'a dit le président, tout le monde est pas mal d'accord pour dire qu'il faut faire quelque chose pour rajeunir nos routes. La question est de savoir comment. Je ne crois pas que le moment soit venu de discuter de la manière de faire les choses - par exemple, cette idée d'administration routière nationale - je crois que ce ne serait qu'un mode d'opération parmi bien d'autres. Il y a d'autres idées sur lesquelles nous devons nous entendre avant de discuter de cela.
Je poserai une question plus tard - je le ferai peut-être au cours du second tour, monsieur le président - au vérificateur général au sujet du financement hors bilan et des coûts équivalents pour la longévité des biens, parce que je veux savoir comment cela s'insère dans un contexte fédéral, disons, ou un contexte d'administration routière. Mais j'y reviendrai plus tard.
En fait, ce que j'ai entendu aujourd'hui et les informations que j'ai vues jusqu'à maintenant m'amènent à conclure simplement que si nous voulons investir entre 13 et 18 milliards de dollars dans nos routes, la seule façon de le faire, me semble-t-il, c'est de conclure des partenariats entre le secteur public et le secteur privé. J'aimerais que cela soit le sujet de discussion du prochain tour.
Quand j'examine les diverses possibilités, il me semble qu'il y a un concept très simple - à savoir, comment maximiser les avantages au niveau privé, sachant qu'il y aura probablement des avantages qui seront considérés comme des avantages sociaux ou publics? Franchement, si on en arrive là, je pense que notre comité serait mieux avisé de s'adresser à notre ministre des Finances, M. Martin, et de lui dire que nous avons défini tous les avantages que nous pouvions au niveau du privé et qu'il y a des avantages sociaux que nous devons financer, ou pour lesquels il faut obtenir la collaboration des provinces et des municipalités.
J'ai lu avec grand intérêt un rapport qui a été fait sur l'expérience du Royaume-Uni. Je dois féliciter la Banque Hambros, qui a réalisé l'étude pour le compte de Transports Canada, je crois. Les auteurs de cette étude se sont longuement penchés sur l'expérience du Royaume-Uni. Je crois qu'il y a là des leçons très utiles pour nous. Je ne vais pas ennuyer le groupe avec... Le rapport a été rendu public. Je tiens simplement à souligner quelques éléments du rapport qui méritent réflexion à mon avis.
Tout d'abord, ce qu'on dit ici, c'est que, encore là, le secteur public au Royaume-Uni contribue afin de garantir les avantages sociaux globaux qui ne peuvent être calculés en termes financiers. Il pourrait s'agir ici de la congestion des autoroutes ou d'une foule d'autres choses.
Autre chose, c'est que toute l'expérience du Royaume-Uni nous dit qu'il faut optimiser le transfert du risque. Si nous avons aujourd'hui de la difficulté à financer ces projets, c'est parce que le gouvernement absorbe tout le risque. Il s'agit donc de transférer, de la manière appropriée, certains risques au secteur privé. Ce faisant, on abaisse le coût général des immobilisations. À mon avis, c'est ce qui permet vraiment au partenariat État-secteur privé de marcher dans ce domaine.
Mais comment assurer des avantages pour le secteur privé? C'est la question que je désire poser à nos témoins, tout particulièrement à Hambros, à Newcourt et aux représentants des banques, ou à ceux qui voudront bien répondre à cette question.
À mon avis, il y a deux facteurs importants. Tout d'abord celui des routes à forte densité et de celles à faible densité. Il y a des routes à forte densité, et c'est facile à ce moment-là de déterminer les avantages pour le secteur privé. Par exemple, si on optait pour un système d'utilisateur-payeur, il faudrait ajouter une certaine valeur et prévoir des solutions de rechange pour ceux qui voudraient circuler sur une route qui ne fait pas partie du réseau où l'on demande à l'utilisateur de payer. Il faut que cette option soit offerte aux automobilistes. Il faut donc offrir des solutions de rechange et profiter pleinement des avantages que ce système offrirait au secteur privé. À mon avis il faut que quelqu'un, nous ou un autre groupe, mette ces propositions à l'essai.
J'aimerais poser aux témoins les questions suivantes. Puisqu'il existe des routes ou des régions à forte densité de circulation et d'autres qui ont beaucoup moins de circulation, est-il possible d'essayer d'assurer les avantages possibles à une échelle régionale? Est-ce que cela vaut la peine d'étudier la question? Ce ne sera peut-être pas du tout possible, mais je me demande si on pourrait préparer des appels d'offres disant que nous invitons le secteur privé à construire, exploiter et entretenir des routes, disons, par exemple, en Ontario ou dans les Maritimes ou dans les Prairies. Peu importe la région. Ainsi, la soumission préparée par les intéressés serait fondée sur tout ce système régional, et non pas simplement sur des endroits choisis, comme Toronto ou Halifax, etc.
Serait-ce possible, ou est-ce qu'il ne sert à rien d'y penser? Parce qu'à mon avis un des gros problèmes, c'est que les intéressés choisiraient probablement les endroits les plus rentables et les plus avantageux. C'est ce que le secteur privé fera.
Serait-il donc possible d'étudier cette proposition? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Il faut de plus assurer les plus grands avantages possible au secteur privé. On a parlé de diverses choses comme l'entretien des autoroutes et le rendement possible pendant le cycle de vie d'une route. Celui qui construira l'autoroute devra respecter un devis qui lui convient pour assurer l'entretien et un cycle de vie de l'autoroute qui pourrait être de 25, de 30 ou de 40 ans.
Il faut donc se demander quels autres avantages on peut inclure dans ce réseau. Il y a l'exploitation et l'entretien. Il y a également le système de franchisage pour les installations le long de cette autoroute, les postes d'essence ou les restaurants. De plus, au Royaume-Uni, je crois, et peut-être même aux États-Unis, on tient également compte des biens immobiliers et des terres. Ainsi, quand vous discutez avec les intervenants du secteur privé vous pouvez dire: si vous pouvez construire, exploiter, entretenir et financer ce long tronçon de l'autoroute, voici les avantages que vous pourrez en tirer. Nous voulons mettre ces propositions à l'essai. Nous voulons avoir un point de référence pour le secteur public qui indique qu'il y a un certain seuil au-dessous duquel nous ne croyons pas pouvoir financer ces travaux. Nous croyons qu'en deçà de ce seuil il y a très peu d'avantages publics. Mais il faut quand même mettre ces choses à l'essai.
Je pourrais parler encore longuement de la question, mais j'aimerais savoir ce que les témoins pensent des questions que j'ai soulevées. Peut-être même pourrons-nous en discuter en de plus amples détails tout à l'heure.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen.
J'aimerais limiter pour l'instant l'intervention des représentants du secteur financier. Je dois signaler que dans une large mesure, c'est grâce aux connaissances de M. Cullen dans le secteur que j'ai pu arriver à comprendre quelque peu la question dont nous parlons. C'est un concept qui est en fait le fruit de notre étude. M. Cullen et moi avons consacré plusieurs heures à mon éducation dans ce secteur pour que je puisse comprendre ce qui se passe.
Avant de passer aux partenariats État-secteur privé, j'aimerais qu'on discute d'abord des problèmes dont les utilisateurs nous ont fait part à l'égard du système actuel. Nous avons étudié la question avec certains des utilisateurs qui sont ici aujourd'hui, certains de ceux qui ont construit les routes. Je suis heureux de voir que M. Beck, le groupe SM et l'Association de la construction sont ici aujourd'hui. Peut-être pourrions-nous les inviter à discuter de la question avant de laisser la parole aux représentants du secteur financier, qui nous offriront les solutions à ce problème, et, je l'espère, pratiquement tout l'argent nécessaire pour les régler.
Monsieur Bélanger.
[Français]
M. Bélanger: M. Crête parlait de l'importance de regarder le réseau nord-sud en fonction de l'ALENA. Cette question devient de plus en plus importante lorsqu'on regarde la croissance du commerce international et celle des besoins en transport sur l'axe nord-sud. L'importance du réseau routier dans cette direction devient de plus en plus grande.
Je voudrais aussi revenir sur une remarque de M. Hunt. Quand on parle de nouveaux modes de financement et de regarder de l'extérieur, comme il le mentionnait tout à l'heure, il faut considérer l'impact de cela. Si on regarde un financement plus à long terme plutôt qu'un financement au départ, l'amélioration du réseau ou tout travail en ce sens se traduira par un impact positif sur l'économie. La Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada avait compilé ces données lors de son étude de l'impact sur l'économie. Lorsqu'on parle de financement plus à long terme, il faut aussi tenir compte de cet aspect. Les entreprises commerciales réaliseront sans contredit des bénéfices, mais le renouvellement de l'infrastructure aura aussi un impact sur les fonds publics, surtout lorsqu'on parle de financement à long terme.
Tout comme le disait M. Cullen, si on examine le réseau tout entier et qu'on se penche sur les sections où il y a très peu de transport commercial ou d'utilisation commerciale du réseau, on se rend compte rapidement que la grande majorité du réseau ne pourrait pas être supportée uniquement par le principe de l'utilisateur-payeur. L'usage individuel deviendrait évidemment trop coûteux pour que ce soit réalisable. Le réseau routier au Canada existe pour les besoins de la population canadienne, et non pas pour le transport.
Il y a évidemment des endroits où l'usage commercial est abondant, comme dans la région de Toronto, bien que ces endroits ne représentent qu'un petit pourcentage du réseau.
Lorsqu'on étudie le financement, il faut tenir compte de tous ces éléments. Comme plusieurs intervenants le mentionnaient, le financement du réseau routier devra être une combinaison de nombreux aspects, sinon ce ne sera pas possible.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Bélanger. J'ai remarqué que lorsque Mme Ward a parlé des avantages économiques, en disant qu'il était dans leur intérêt de payer, vous avez fait signe de la tête.
M. Bélanger: C'est vrai. Il y a des entreprises de camionnage qui réagissent de la même façon que la société d'autocars Brewster en ce qui a trait à l'autoroute Coquihalla. L'industrie en Ontario a appuyé le principe des péages sur la 407. Il faut déterminer le montant de ces péages, mais le principe en soi a été appuyé par ce secteur.
Le président: J'étais en Saskatchewan vendredi dernier et j'y ai rencontré un groupe pour discuter de la question. J'ai remarqué que certaines entreprises de camionnage avaient en fait négocié des contrats avec le gouvernement en s'engageant à participer à l'entretien permanent des tronçons particuliers de l'autoroute où elles circulent.
M. Bélanger: Je n'étais pas au courant de cette situation.
Le président: C'est un aspect intéressant.
Madame Pelletier.
[Français]
Mme Pelletier: On a parlé d'une agence nationale pour la gestion de ce fonds consacré aux routes. Évidemment, j'en profite pour mentionner que c'est exactement ce que l'ATC prônait. L'étude de recherche terminée en 1992 a été faite pour le compte du Conseil des ministres des Transports et recommandait que ce dernier soit le forum qui permette le développement ou assume la gestion de tels fonds.
C'est essentiellement ce que recommande l'ATC, qui fournit son appui au Conseil des ministres et des sous-ministres et qui est un forum national neutre regroupant toutes les parties, que ce soit le tourisme, la construction, le camionnage, le club automobile canadien ou l'ensemble. Si je participais aujourd'hui à un conseil d'administration de l'ATC, ce serait semblable à quelques égards.
Certaines structures existent déjà et ont une expertise en la matière, entre autres au niveau de la gestion du programme de recherche stratégique sur les routes que l'ATC dirige pour le moment et gère pour le compte des provinces qui y participent.
L'ATC a déjà tenu un colloque au sujet du concept de l'utilisateur-payeur l'année dernière et en tiendra un autre bientôt. Le conseil d'administration n'a pas manifesté d'opposition particulière à ce sujet. Ce concept est toujours étudié au même titre que le partenariat des sociétés publiques et privées. Plusieurs de ces organisations ont participé aux discussions et au forum que l'ATC tente d'encadrer.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Pelletier.
Il serait peut-être utile maintenant de céder la parole à ceux qui construisent les routes. Nous pourrions commencer avec vous, monsieur Atkinson, puis laisser la parole à M. Laganière.
M. Atkinson: J'aimerais dire quelques mots sur certains des commentaires qu'on a faits.
Je dois dire que je suis parfaitement d'accord avec M. Keyes, qui signale que nous n'avons certainement pas besoin d'un nouveau palier d'administration entre nous et l'amélioration du réseau routier national. On a dit que cela permettrait d'accomplir ce dont M. Cullen a parlé - et j'aimerais savoir ce qu'en pensent les représentants du Bureau du vérificateur général - pour en arriver à un système qui devrait nous permettre de savoir combien a été dépensé, combien a été investi dans l'infrastructure routière, combien a été investi pendant la durée d'utilisation de ce bien. Nous pourrions utiliser l'expression «financement hors bilan». Pour procéder de cette façon dans certaines structures gouvernementales il faut créer une entité distincte... pour lui permettre d'avoir la marge de manoeuvre nécessaire pour aller sur le marché créer des partenariats État-secteur privé, lorsqu'il est logique de procéder de cette façon pour financer la remise en état d'un tronçon en particulier; monsieur le président, je dois signaler qu'il faut être en mesure de financer et de gérer un réseau routier au-delà des prochaines élections, car il nous faut avoir, comme le signale l'ATC, une planification à long terme.
Le secteur qui doit assurer cette construction est le secteur de la construction, le plus important employeur au Canada, et il est très difficile pour un employeur ou une entreprise de ne planifier que pour un cycle d'un ou deux ans. Si vous ne savez pas ce qu'on prévoit vraiment faire un jour, si vous ne connaissez que les projets pour les deux ou trois prochaines années, c'est très difficile. Lorsqu'on étudie la remise en état et l'amélioration d'une installation physique aussi importante que le réseau routier, il faut procéder à une planification à plus long terme.
M. Hunt a raison de dire qu'il faut chercher des solutions de rechange. D'aucuns proposent la création d'un organisme quelconque; il existe peut-être déjà une structure... il serait bon de procéder de cette façon et d'avoir un groupe d'experts représentant tous les secteurs touchés, des utilisateurs au secteur financier et aux propriétaires, qui puissent se rencontrer et étudier la meilleure façon de procéder en ce qui a trait à un tronçon particulier de l'autoroute, compte tenu des paramètres qu'a déjà mentionnés M. Cullen.
En fait, si vous étudiez ce que font les autres pays, comme le Royaume-Uni, qu'on a déjà mentionné tout à l'heure, c'est la façon dont on a procédé. Une entité distincte a été mise sur pied à cette fin. Certains gouvernements provinciaux au Canada ont procédé de cette façon pour arriver à des partenariats État-secteur privé, comme on les appelle. Cela a été une des premières mesures que l'on a prises pour assurer une plus grande souplesse: on a confié à un groupe la responsabilité de trouver des mécanismes et des méthodes de financement pertinents pour un projet ou un programme particulier, de sorte qu'on ne soit pas forcé d'avoir toujours recours aux mêmes méthodes.
Le président: Merci, monsieur Atkinson.
Je tiens à vous assurer que je ne voulais pas dire que les témoins qui représentent le secteur financier ne devraient pas participer aux discussions, ou quoi que ce soit de ce genre. N'hésitez pas à faire des commentaires. Moya commencera.
Mme Greene: Merci, monsieur le président.
J'ai déjà eu l'occasion, lorsque j'occupais un autre poste, d'étudier cette question en détail. J'aimerais appuyer certains des commentaires qu'a faits M. Atkinson.
Je suis d'accord avec nombre des commentaires qu'a faits M. Keyes sur le fait qu'il était important pour Transports Canada de confier l'exploitation à quelqu'un d'autre et de s'éloigner des structures bureaucratiques qui l'empêchaient de procéder au développement des investissements si nécessaires dans le domaine de l'infrastructure des transports. En fait, je dois dire que, contrairement à M. Keyes, je crois que cette même décision serait très utile pour le système routier.
L'expérience m'a appris que M. Atkinson a raison. Le réseau routier national est un orphelin politique. Au Canada, nous dépensons beaucoup pour les routes. En fait, actuellement au palier fédéral nous dépensons environ 250 millions de dollars par année. C'est un montant important. Le problème, c'est que nous dépensons cet argent sur un échéancier d'un ou deux ans, à court terme. C'est pourquoi personne ne peut vraiment faire de planification. On ne peut pas choisir de façon logique les projets. On s'empresse tellement de conclure les négociations fédérales-provinciales qu'on n'a pas tellement le temps d'assurer des partenariats avec le secteur privé.
J'ai déjà étudié la question sous plusieurs aspects et je sais pertinemment qu'il y a des intervenants du secteur privé qui pourraient jouer un rôle très important et permettre non seulement de réduire les coûts, mais aussi de choisir et de définir les projets qui pourraient s'avérer rentables; je crois que M. Atkinson fait une contribution importante lorsqu'il dit que nous devons trouver une façon de réunir des gens qui sont des experts dans le domaine des finances et d'autres qui comprennent vraiment le secteur de la construction. Il ne doit pas nécessairement s'agir de fonctionnaires. De fait, il serait préférable que ces gens ne soient pas des fonctionnaires.
Peut-être pourrait-on s'inspirer de ce qu'ont accompli M. Young et M. Anderson dans d'autres secteurs des transports, soit réunir un groupe d'experts de tous les domaines du secteur privé qui serait chargé de gérer la participation du gouvernement fédéral au réseau routier, qui a représenté 250 millions de dollars par année au cours des 20 dernières années, ce qui est quand même un montant assez important.
Monsieur le président, votre comité étudie une question très importante. À mon avis, si nous avions investi ces 250 millions de dollars par année pendant ces 20 années, les choses seraient bien différentes maintenant.
Le président: C'est vrai.
Monsieur Redfern.
M. Redfern: Merci, monsieur le président. J'ai pris note des diverses interventions pour me préparer une sorte de résumé. D'abord, M. Keyes a mentionné les normes et a parlé de ce qui était trop élevé, trop large et de choses de ce genre. Fort heureusement, pour ce qui est de ce problème, il ne faut pas oublier que les experts du secteur des transports, à la fois au niveau fédéral et au niveau provincial, dans le cadre du plan routier national, ont établi des normes pour déterminer le type de routes qui seraient adéquates, la largeur qu'elles devraient avoir, et où elles devraient être construites. Aucun groupe ne peut essayer d'influencer cela. Nos experts ont établi ces critères, et ces paramètres sont intégrés dans le plan, ce qui est une très bonne chose.
Il ne faut pas oublier non plus qu'il s'agit d'un programme de réfection sur dix ou douze ans. Ainsi, les routes qui sembleraient en bon état pourraient fort bien, dans huit, neuf ou dix ans avoir besoin de travaux et s'inscrire dans le cadre du programme. Cela ne se fera pas en un seul coup, mais par étape. Nous allons donc l'inclure.
En ce qui concerne le financement, dont parlait, je pense, M. Cullen, il ne faut pas oublier, entre autres, qu'il y a encore environ vingt ans, ou peut-être un peu moins, les gouvernements finançaient le réseau routier à même les recettes générales. Il s'est produit trois choses depuis lors. Les recettes générales comprennent les taxes, les droits de permis et l'impôt sur le revenu qui ont tous augmenté depuis lors. Il semblerait que maintenant, il n'y ait plus suffisamment d'argent pour ces routes. Ce n'est pas comme si cela ne faisait pas partie intégrante du programme.
L'autre aspect à noter, c'est qu'une route constitue une unité. Vous pouvez en isoler des tronçons où la circulation est dense, mais pour l'unité, le maintien et la compréhension du réseau, il faut d'autres routes aussi, surtout, comme d'autres l'ont dit, quand il est question de couper le lien est-ouest du réseau routier canadien et revenir à ce que nous faisions, passer par Sault Ste. Marie en Ontario, couper par les États-Unis en privilégiant le ferroutage du côté américain. Ce n'est pas ce que nous voulons vraiment faire, je pense.
Quant à réduire les coûts, je pense que Moya a trouvé un bon programme ou une bonne idée, à savoir qu'il est très difficile de mettre en place un programme si vous procédez de façon ad hoc, si vous envisagez de construire quelque chose cette année mais peut-être pas, en fonction de telle norme ou de telle autre. S'il y avait un programme qui prévoyait un budget constant de construction permettant aux entrepreneurs et aux constructeurs de prévoir leurs coûts sur une longue période, sachant qu'ils obtiendront ce travail, et si on ne s'en tenait pas au plus bas coût auquel on peut en arriver, mais bien au coût le plus bas, par année, par mille, pour la construction d'une route, alors ce serait un peu différent.
Malheureusement, depuis toujours, à dessein, les ministères provinciaux des Transports ont séparé leur budget d'immobilisations et leur budget d'entretien. C'est délibérément qu'ils font cette distinction. Or ce n'est pas ce qu'il faut faire. Il faut tenir compte du coût global, par année, par mille. Je pense qu'en mettant en place un plan qui définisse les modalités et en prévenant les intéressés de façon à ce qu'ils puissent soumissionner et bien faire le travail, vous allez en avoir beaucoup plus pour votre argent.
Le président: Il faut également souligner que ce financement au fur et à mesure, ad hoc, signifie que rendu au dernier kilomètre, il faut recommencer la réfection du premier kilomètre. Vous n'avez donc jamais un réseau routier en bon état, d'un bout à l'autre.
Peut-être pouvons-nous passer à M. Laganière.
[Français]
M. Laganière: J'aimerais d'abord mentionner que je suis d'accord avec M. Atkinson lorsqu'il parle de la nécessité de dégager des fonds à long terme. J'ajouterais que c'est nécessaire non seulement pour planifier les travaux des entreprises de génie de construction canadiennes, mais également afin de maintenir en place et de développer des entreprises ou un secteur industriel aptes à faire des exportations. L'exportation canadienne est très importante dans ce domaine.
Depuis une dizaine d'années, j'ai la chance de participer aux travaux de l'Association mondiale de la Route, bien connue sous le nom d'AIPCR ou Association internationale permanente des Congrès de la Route. Cette question y est débattue depuis près de dix ans dans la plupart des pays développés. Elle est également débattue depuis le début des années 1990 dans les pays en voie de développement, où le problème d'entretien et de réhabilitation du réseau routier est encore plus grave qu'au Canada.
Partout dans le monde, on discute de privatisation. Jusqu'à présent, les travaux de développement de réseaux ont fait l'objet de contrats de privatisation, tandis que la plupart des travaux d'entretien, de réhabilitation et de conservation du patrimoine routier ont été confiés aux administrations publiques, aux différents ministères et aux municipalités.
On n'a pas beaucoup parlé de cette dimension dans le document ni autour de cette table. Au fil des ans, on a constaté que la plupart des problèmes de congestion, qui rendent nécessaire le développement ou l'expansion de grands réseaux, se retrouvaient en périphérie et dans les grandes villes. Ces tronçons de réseau sont aujourd'hui utilisés bien davantage comme artères urbaines que comme réseau routier national.
Certains pays ont résolu la question en faisant ce qu'on a appelé de la tarification de la congestion. L'exemple de l'autoroute 417, quoique ne portant pas ce qualificatif, peut être associé à cette formule. On fait un détournement en remplacement de la tarification de la congestion. Nous pourrions également nous pencher sur la tarification de la congestion, une pratique existante qui va quelque peu à l'encontre de certaines discussions, où on a recours non pas à une agence de route, mais à une agence plus globale ou plus intégrante. Si on fait de la tarification routière, on doit être en mesure d'optimiser le réseau en maintenant les autres modes de transport, dont le transport urbain, tout en libérant les routes en faisant vraiment de la gestion de l'achalandage ou de la gestion des déplacements des usagers.
D'autre part, comme le mentionnait M. Cullen, lorsqu'on a des tronçons ou des routes à grand trafic, il est facile de faire des études économiques pour établir une tarification ou des projets BOT pour la gestion des réseaux. Quand on a du trafic, on est capable d'installer des péages qui soient assez rentables pour attirer l'entreprise privée.
Dans les réseaux à faible trafic, il faut songer à une approche plus globale. Les municipalités parlent actuellement beaucoup de la privatisation de l'entretien et de la gestion des autres infrastructures municipales, non seulement des routes, mais aussi des réseaux d'eau et d'égouts. Et il y a également les réseaux routiers municipaux.
Lorsqu'on n'est pas dans un grand centre, où le volume du trafic s'élève à 80 000 ou plus de 100 000 véhicules par jour, la seule façon de rentabiliser des formules faisant appel à des entreprises privées, c'est d'englober plus que la gestion ou l'entretien des petits réseaux régionaux. Si nous pouvions en arriver à une formule qui permette à des entreprises canadiennes de faire des montages d'entretien et de gestion de réseaux d'infrastructure, peut-être pourrait-on avoir sur la table des projets-pilotes très intéressants grâce auxquels on économiserait énormément d'argent. Nous ne parlons pas ici d'importants contrats dans le cadre desquels il nous faudrait nous demander si nous favoriserons le développement économique canadien ou la venue au Canada d'entreprises étrangères et leur prise en charge de notre patrimoine routier à la place d'entreprises canadiennes qui n'ont pas actuellement l'habitude ou les capacités de monter de tels projets.
[Traduction]
Le président: Merci. Vous soulevez là un point intéressant que de nombreux groupes, partout au pays, nous ont signalé.
Monsieur Beck, êtes-vous remis maintenant, voulez-vous vous lancer à l'eau?
M. John M. Beck (président, Canadian Highways International Corporation): Merci beaucoup.
Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité. Dans le cadre de la discussion d'aujourd'hui, j'aimerais m'arrêter aux questions soulevées dans le document de travail que le comité publiait récemment sur le renouvellement du réseau routier national par des partenariats État-secteur privé. Plus particulièrement, j'aimerais aborder l'opportunité d'avoir recours à des péages et à d'autres moyens de financement de l'infrastructure routière, la possibilité de retenir l'option de péage fantôme au Canada, et les partenariats État-secteur privé comme composante essentielle de notre stratégie de renouvellement de l'infrastructure.
Canadian Highways construit actuellement deux grandes routes à péage en Ontario et en Nouvelle-Écosse dans le cadre d'un partenariat État-secteur privé. Ces deux projets, la route 407 en Ontario et la route 104 en Nouvelle-Écosse, ont créé beaucoup de travail pour des centaines de sous-traitants locaux et des milliers d'emplois dans le secteur de la construction. Nous constatons que cette approche coopérative État-secteur privé nous permet d'obtenir des routes plus rapidement et à un coût moindre pour le gouvernement que par le passé.
Ces projets démontrent qu'au Canada, nous entrons dans une ère où la population accepte davantage la notion de l'utilisateur-payeur et la participation du secteur privé dans des projets publics. Je pense que maintenant, plus que jamais, les partenariats État-secteur privé pour la construction d'une infrastructure routière financée par des péages deviennent acceptables pour la construction de nouvelles installations ou leur réfection, qu'il s'agisse de grandes voies périphériques ou de ponts, surtout si ces projets offrent de nouveaux avantages et un service supérieur et que la densité de la circulation permet de prévoir un financement adéquat pour la conception, la construction et l'exploitation de la route en question.
Les routes 407 et 104 sont de nouvelles routes qui offrent aux usagers une option plus rapide et plus commode aux routes existantes congestionnées. Toutefois, bon nombre de gens feront valoir que l'utilisation des péages pour défrayer la réfection et l'amélioration de certains tronçons de notre réseau routier national n'est ni possible ni acceptable, étant donné l'absence d'une autre route gratuite, l'impression d'une double imposition puisque l'on a déjà perçu des taxes pour la construction et l'entretien de ces installations, ou la faible densité de la circulation. S'il en est ainsi et si les péages ne constituent une option envisageable que si le projet répond à certains critères, il faut alors voir comment nous pouvons financer nos autres projets d'infrastructure. Je dirais que ces projets où le péage direct produit des recettes insuffisantes ou encore où le péage direct ne semble pas approprié, peuvent être financés aujourd'hui grâce à des capitaux du secteur privé par le biais de baux ou de péages fantômes.
Le pont Charles Wood de 30 millions de dollars à Winnipeg, inauguré en 1995, est le premier pont au Canada donné à concession à un entrepreneur privé pour qu'il en fasse la conception, la construction et le financement. Le promoteur, au lieu de faire payer directement les utilisateurs, reçoit des redevances mensuelles du gouvernement sur une période de 30 ans.
Il y a ensuite le concept du péage fantôme dont il a été beaucoup question dans le rapport du comité, une autre option qu'il serait tout à fait possible d'envisager, je pense, pour une grande partie du réseau routier national. Un partenariat État-secteur privé financé par des péages fantômes pourrait offrir nombre des avantages qui existent dans les péages plus traditionnels et constituer une solution de rechange tout à fait acceptable dans le cas de projets où il n'est pas souhaitable d'avoir recours au principe de l'utilisateur-payeur.
De la même façon que les péages directs, les péages fantômes permettent au gouvernement d'échelonner les coûts d'un projet sur de nombreuses années plutôt que de le forcer à avancer l'argent dès le départ. Les projets financés de cette manière donnent beaucoup plus de latitude au gouvernement et lui permettent d'entreprendre un plus grand nombre de projets pendant une même période que le processus habituel de financement.
Je dirais donc que la question à laquelle le gouvernement doit répondre aujourd'hui, ce n'est pas de savoir lequel, de ces arrangements financiers, est le meilleur pour financer notre infrastructure routière. Il faut plutôt se demander quelle combinaison d'options, parmi celles offertes, répond le mieux aux problèmes précis de chaque segment de notre réseau routier national.
Il est important de noter dans le cadre de cette discussion que toutes les options que j'ai mentionnées - les partenariats État-secteur privé comme la route 407 en Ontario, les projets financés par le secteur privé comme la route 104 en Nouvelle-Écosse, les concessions comme le pont Charles Wood, ou les péages fantômes utilisés en Grande-Bretagne - reposent sur des partenariats entre le secteur public et le secteur privé. Dans chaque cas, c'est l'idée d'un partenariat est un État-secteur privé qui permet de maximiser les avantages d'un projet. Grâce à ce genre de partenariat, le secteur privé peut utiliser de nouvelles technologies, notamment au niveau de la conception, et construire de façon plus efficace afin d'améliorer le processus, puisqu'il devient possible de mettre l'accent sur les innovations qui rehaussent la qualité, réduisent les coûts et accélèrent la construction.
Dans le cas par exemple de la route 407, nous avons pu utiliser pour les ponts de nouveaux plans qui nous ont donné des structures plus légères, plus minces, de la plus grande qualité entraînant des économies considérables. L'échéancier garanti de fin des travaux de 20 mois signifie que la route 104 sera l'une des réalisations les plus rapides au pays. Selon le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, sans cette approche de partenariat État-secteur privé, il aurait fallu jusqu'à 10 ans et 20 à 30 millions de dollars de plus pour terminer cette route en utilisant le processus budgétaire habituel.
Le facteur déterminant de la réussite de tels partenariats vient de la répartition et de la gestion du risque entre le gouvernement et le partenaire du secteur privé. Dans un monde idéal, chaque partenaire contribuerait ce qu'il fait le mieux et de la façon la plus rentable. Chaque partenaire doit assumer le risque de l'aspect qu'il peut le plus directement influencer et contrôler. Si l'on adhère à ce principe, il en résulte un partenariat réalisable et équilibré.
À l'exception des éléments que les processus politique et législatif sont les plus aptes à contrôler, les entrepreneurs du secteur privé peuvent en général assumer la grande partie du risque lié à la conception, à la construction, à l'exploitation et à la circulation. Par exemple, les routes 407 et 104 sont des projets que le partenaire du secteur privé a pleinement garantis et assurés. Ces projets prévoient un prix maximal garanti ainsi qu'un échéancier qui prévoit des sommes importantes en pénalités si les échéances ne sont pas respectées.
Ces aspects signifient que le secteur privé assume la plus grande partie des risques de construction associés à ces projets. De même, le financement par le secteur privé permet de soulager les gouvernements endettés d'une grande partie des risques de financement, de circulation et de recettes. Il est possible de structurer le financement privé afin qu'il soit hors bilan et n'ait aucune incidence sur les emprunts gouvernementaux, ce qui peut contribuer à réduire le coût global de financement du gouvernement et lui permettre d'utiliser ses faibles ressources afin de financer d'autres priorités où la seule option viable est justement un financement gouvernemental.
En conclusion, j'aimerais vous faire comprendre qu'aujourd'hui, au Canada, on a de plus en plus tendance à accepter que l'utilisateur paie les services publics et on comprend de mieux en mieux les avantages des partenariats État-secteur privé dans la prestation de ces services. Ces tendances, associées aux nouveaux mécanismes de financement qu'offre aujourd'hui le marché, nous donnent les outils pour faire face aux problèmes auxquels le comité est confronté.
Monsieur le président, j'espère que vous me permettrez également de vous féliciter ainsi que les membres de ce comité de l'approche ouverte et consultative que vous avez adoptée et de votre empressement à examiner ces approches nouvelles et innovatrices aux questions importantes que vous examinez.
J'aimerais mentionner aussi que M. Cullen a parlé de l'écrémage. Il y a deux aspects à cela. D'abord, il y a la construction et ensuite il y a l'exploitation et l'entretien. Je pense qu'il faut les séparer en deux catégories, bien que la solution globale les réunira peut-être.
Oui, les projets les plus viables sur le plan financier sont ceux qui seraient naturellement dans l'intérêt du secteur privé, mais il y a moyen de combiner les infrastructures très profitables à celles qui le sont moins, de créer un ensemble où le secteur le plus profitable subventionne celui qui l'est moins pour aboutir à quelque chose de rentable tout en fournissant un niveau élevé de services à l'élément de l'infrastructure qui rapporte moins.
En ce qui concerne le fonctionnement et l'entretien, il faut une masse critique qui justifie l'investissement et les idées créatrices si on veut, qui ne sont rentables que si l'on peut en répartir les coûts sur un assez grand réseau.
En ce qui concerne ce que j'appelle les revenus d'autres sources que les péages, et ce que vous avez qualifié d'autres sources éventuelles de revenus, les centres de services, les affiches, très certainement l'aménagement du terrain le long de l'infrastructure, et les installations de câbles optiques utilisés ou loués à des usagers du secteur des communications - tout cela contribue au financement en sus des recettes de péages. Il est possible d'inclure ces rentrées d'argent dans l'ensemble du financement et de réduire ou d'éliminer la participation ou le financement gouvernemental. Nous appuyons tout à fait l'idée d'aller chercher le maximum de recettes possible sous forme de péages.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Beck.
C'est un processus intéressant. Lorsque l'an dernier, j'ai assumé la présidence de ce comité, j'ai constaté que le gouvernement avait modifié le règlement des comités afin de permettre à ceux-ci de choisir, jusqu'à un certain point, les sujets qu'ils souhaitaient examiner, en sus du travail qui leur vient normalement des ministères et de la Chambre. Lorsque je me suis renseigné auprès des responsables du ministère - Mme Greene y était, ainsi que d'autres membres du comité et d'autres personnes intéressées - on nous a mentionné qu'il y avait eu d'énormes changements dans le cadre de la commercialisation des chemins de fer et des aérogares - et nous examinions les installations portuaires - mais qu'un secteur qu'on n'avait pas bien examiné, c'était la question des grandes routes. Il nous est apparu très rapidement qu'on souhaitait que nous y consacrions quelque temps.
Nous nous sommes engagés sur cette voie, dans une optique un peu plus vaste. Nous avons tenté de voir ce que deviendrait la réglementation suite à toutes les modifications dans les autres modes de transport. Y avait-il moyen de réunir le tout de façon à ce que cela fonctionne comme un seul système? Nous nous sommes engagés plus profondément dans cette affaire des routes. Comme il s'agissait d'une initiative du comité plutôt que de la Chambre, nous avons associé notre travail aux travaux financés par la Chambre, ce qui nous a amenés à la grande ville portuaire de Winnipeg dans le cadre de notre examen des installations portuaires. Tout en examinant le projet de loi sur les ports, nous avons en fait examiné la question des routes.
Il est intéressant de constater l'évolution de notre propre pensée depuis le début. Les frères Thomson et Thomson, qui sont ici à la table, ont communiqué avec moi au tout début. En fait, ils ne sont pas frères, mais il est difficile de faire la distinction entre eux. Ils sont venus à mon bureau à Winnipeg, un après-midi particulièrement chargé - je pense qu'ils avaient du temps libre pour aller voir un politicien - et ils voulaient me parler de la 104 et du genre du travail qu'on y faisait et me faire comprendre comment cela reflétait une façon différente de mener les affaires gouvernementales. J'ai écouté, parce que ce genre de chose m'intéresse, tout en me demandant ce que ces deux types de Toronto faisaient dans mon bureau de Winnipeg. Nous nous sommes serré la main lorsque je les ai raccompagnés et Warren ici a dit quelque chose comme: en passant, on pourrait utiliser cette formule pour l'ensemble de la Transcanadienne. Je l'ai remercié, je me suis tourné vers Steve, de mon bureau, m'interrogeant sur sa santé mentale, et je les ai fait sortir du bureau. Toutefois, avec le temps, toute cette question est revenue sur le tapis.
Je tenais à le mentionner en guise d'introduction à Warren, Harry, Liam, et d'autres qui nous ont beaucoup aidés dans notre réflexion, car il s'agit d'une nouvelle façon de penser pour le gouvernement dans ce genre d'affaires. Nous revenons constamment à la question soulevée par M. Cullen, à savoir les tronçons de route les plus difficiles, où la densité est moindre, qui sont les plus longs et les plus coûteux. À titre d'exemple, songez à la route de Wawa à Winnipeg ou de Sault Ste. Marie à Kenora, ou un peu plus loin. Il faut résoudre ces problèmes sans imposer un fardeau énorme au groupe de M. Bélanger ou aux groupes touristiques qui souhaitent utiliser ces tronçons, car cela irait à l'encontre de l'objectif.
Parce que l'on m'a interviewé à ce sujet, à divers moments, je sais que la question revient constamment à l'avant-scène. Allons-nous tout simplement permettre que continue de se détériorer notre seul lien est-ouest?
Monsieur Thomson, voulez-vous commencer? Abordons d'une façon plus détaillée la question de savoir comment nous allons payer pour ce réseau.
M. Thomson: Merci, monsieur le président, de l'occasion qui m'est offerte de participer aux discussions de cette table ronde.
Comme on l'a déjà mentionné, je suis le vice-président et directeur de Newcourt Credit Group, un des principaux prêteurs non bancaires d'Amérique du Nord et un participant important dans les partenariats État-secteur privé. Depuis plus d'une décennie, Newcourt conçoit des solutions innovatrices de financement d'immobilisations et de projets d'infrastructure pour tous les paliers de gouvernement.
Parmi nos transactions les plus récentes, on compte: la cession bail d'un système d'information à Postes Canada; des services consultatifs en vue de l'achat d'hélicoptères de recherche et de sauvetage au ministère fédéral de la Défense nationale; une structure de financement d'un contrat de cession de bail pour le matériel roulant de GO Transit en Ontario; et peut-être le plus intéressant pour votre groupe, nous avons souscrit le financement par emprunt à terme en vue de la construction et de l'exploitation du premier partenariat État-secteur privé réel au Canada en vue de la construction d'une route à péage, la route 104 en Nouvelle-Écosse. C'est en raison de cette dernière expérience que Newcourt est ici aujourd'hui.
Dans le cadre de la discussion d'aujourd'hui, permettez-moi d'abord de dire que chez Newcourt, nous sommes très encouragés par les activités de ce comité. Dans la conjoncture économique actuelle, il est essentiel que les gouvernements et les entreprises cherchent des façons innovatrices de financer leurs projets et leurs coûts d'exploitation.
La première question à l'ordre du jour aujourd'hui est la suivante: Le gouvernement devrait-il continuer de financer les infrastructures routières de la façon habituelle, à partir de ses recettes, ou est-ce l'usager qui devrait payer? Je pense qu'il convient plutôt de demander, le gouvernement peut-il continuer à payer, et combien?
Les ressources financières publiques, contrairement à la demande, ne sont pas illimitées. Il faut chercher d'autres sources de financement pour répondre aux besoins croissants d'infrastructure du Canada. Au coeur même de la discussion sur les sources de financement, on trouve la question de savoir qui doit payer. Les frais aux usagers et les taxes spéciales permettent de lier plus directement les bénéficiaires des dépenses gouvernementales et ceux qui paient, mais les frais d'utilisation peuvent être difficiles à vendre sur le plan politique.
L'idée de frais d'utilisations devient plus acceptable au Canada parce que les citoyens exigent, de plus en plus, d'en avoir pour leur argent. Toutefois, il est essentiel que les frais d'utilisation soient accompagnés d'une plus-value démontrable et qu'ils soient proportionnels à la perception que l'on a de leur avantage.
L'option d'une taxe spéciale semble particulièrement attrayante compte tenu du fait que l'argument que l'on entend le plus souvent pour rejeter les péages sur les routes, c'est que l'entretien et la construction ont déjà été payés grâce aux taxes sur l'essence. Cela dit, si l'on n'augmente pas le taux d'imposition, cette option n'entraînera pas une augmentation des ressources financières globales dont dispose le gouvernement.
Les Canadiens sont peut-être disposés à accepter une augmentation de la taxe sur l'essence à condition qu'elle s'accompagne d'une amélioration au service. Un fonds d'affectation spéciale créé en vue de gérer les recettes de la taxe spéciale servirait dans une grande mesure à en assurer les contribuables.
Les partenariats État-secteur privé constituent une option de financement qui peut aider les gouvernements à équilibrer les pressions entre les contraintes budgétaires et l'exigence des contribuables d'en avoir pour leur argent.
D'abord et avant tout, le financement privé en fonction de concession en ayant recours à un partenariat État-secteur privé fournit une source progressive de capital. On peut structurer ce financement de façon à éviter toute incidence sur la capacité d'obtenir du crédit des gouvernements, permettant ainsi à ceux-ci d'utiliser leurs ressources financières limitées dans les domaines où le financement par le secteur privé n'est pas une option viable. Cette structure élimine également essentiellement tous les risques associés à l'élaboration de projets et, d'une façon générale, entraîne une réduction du coût global du projet.
Il y a des réductions de coûts qui proviennent des économies d'échelle et de spécialisation que peuvent réaliser les partenaires du secteur privé et de la rigueur accrue dont font en général preuve les investisseurs privés dans le contrôle des dépassements de coûts et des retards dans l'exécution des travaux.
Enfin, la structure de la dette privée à long terme signifie que la génération qui bénéficie de l'infrastructure est celle qui la paiera.
Le modèle britannique de péages fantômes nous offre une façon innovatrice de profiter de nombreux avantages associés au financement privé dans le cadre d'un partenariat État-secteur privé sans avoir à payer le coût politique des frais d'utilisation. C'est tout particulièrement attrayant dans le cas des routes actuelles où il n'y a pas de valeur ajoutée démontrable en contrepartie des frais d'utilisation. Le principal inconvénient des péages fantômes vient du fait que ceux-ci n'entraînent pas directement une augmentation des recettes qui peuvent être utilisées pour le service de la dette.
Laquelle de ces options de financement est la meilleure en vue de financer le renouvellement de notre réseau routier national? À mon avis, la meilleure solution découlerait d'un mariage des meilleurs éléments de chacune de ces options. Je ne pense pas qu'une seule option puisse répondre aux besoins en infrastructure routière du Canada et répondre à toutes les préoccupations politiques du gouvernement.
Le financement de l'infrastructure routière doit venir de plusieurs sources. D'abord, il faut créer un fonds fédéral d'affectation spéciale, financé en réservant deux cents du litre de la taxe d'accise sur l'essence. Si cette somme est affectée au service d'une dette sur 30 ans, ces sommes suffiront à financer maintenant des constructions de plus de 10 milliards de dollars.
Il faut également avoir recours au péage fantôme avec facturation aux gouvernements fédéral et provinciaux fondée sur l'utilisation de la route. Le gouvernement fédéral pourrait en fait s'acquitter de ses obligations à ce titre, en utilisant les sommes recueillies dans le fonds d'affectation spéciale.
Troisièmement, on pourrait avoir recours aux péages, surtout dans le cas de la construction de nouvelles routes.
En vertu d'une telle structure, les contributions au fonds fédéral d'affectation spéciale reposeraient soit sur une formule de partage des coûts ou sur des demandes par projet des provinces. La source de financement pour la partie financée par la province serait laissée à la discrétion de celle-ci, c'est-à-dire que la province pourrait avoir recours à des péages fantômes versés à même les recettes générales ou financés par une taxe spéciale ou des frais aux usagers.
Le président: Merci, monsieur Thomson.
Monsieur Swain.
M. Swain: Merci, monsieur le président.
Je constate que je partage dans une grande mesure les opinions de M. Beck et de M. Thomson. Avec le temps, ce matin, notre discussion évolue, passant de l'aspect demande à celui de l'offre. Nous avons entendu des propos éloquents en faveur de nouveaux investissements, etc. Or maintenant, nous commençons à parler non plus de la source du financement, mais de la façon d'en obtenir le plus possible pour notre argent. Or l'humble banquier que je suis aimerait s'attarder à ce dernier point.
J'aimerais dire une seule chose. Je pense que si M. Barry Campbell était ici aujourd'hui, il nous dirait peut-être, au nom du ministre des Finances, ce qu'il pense des taxes spéciales. Les ministres et les ministères des Finances ont tendance à avoir des opinions bien arrêtées sur ce sujet, lesquelles ne sont pas sans fondement.
En ce qui concerne l'optimisation des ressources cependant, nous envisageons une gamme de méthodes, comme on l'a dit jusqu'à présent, selon la nature du projet, en vue de placer les risques et les responsabilités entre les mains de ceux qui sont le mieux placés pour les assumer. Il existe une certaine documentation sur ce sujet, qui porte non seulement sur les routes, mais sur le financement privé d'autres types d'infrastructure publique. Par exemple, dans le Financial Times de Londres, en octobre, on trouve une critique approfondie de ce qui se passe non seulement dans le secteur des transports, qui inclut notamment le service ferroviaire là-bas, mais également dans les secteurs de l'éducation, du commerce, de la défense, de la sécurité sociale, du patrimoine - tous des secteurs où l'on utilise maintenant ces nouvelles techniques d'approvisionnement.
Récemment Hambros a commencé à travailler en Finlande et au Portugal sur la conception, la construction, le financement et l'exploitation de projets routiers et comme l'a expliqué clairement, je pense, mon collègue Liam Rafferty dans son introduction en novembre dernier, nous étions les conseillers du gouvernement de la Grande-Bretagne pour ces huit premières routes. D'une façon générale, dans le cas des routes en Grande-Bretagne, l'expérience a démontré que les contrats acceptés se chiffraient, en moyenne, à 19 p. 100 de moins en coûts en capital et à 34 p. 100 de moins en coûts d'exploitation et d'entretien que les projets comparables du secteur public.
On peut donc dans un premier temps tirer la leçon importante que les techniques innovatrices et une plus grande participation du secteur privé réduisent le coût financier global de l'infrastructure routière d'environ 25 p. 100. Le Trésor public de la Grande-Bretagne a conclu, après examen de tous les autres secteurs de son activité, et pas uniquement les transports, qu'on peut raisonnablement s'attendre à une réduction de 18 à 20 p. 100 des coûts pendant la durée du bien d'immobilisation.
Selon la formule qui sera retenue, il est aussi possible d'opter pour le financement hors bilan. Il faut alors évidemment examiner la questions des péages virtuels et des péages réels. Ces dernières présentent un avantage évident pour les gouvernements à court d'argent, avantage que ne peuvent tout à fait égaler les obligations à long terme.
Outre le fait que cette formule présente un moyen de faire construire l'infrastructure et d'en assurer l'exploitation sans doute plus rapidement et plus efficacement, elle présente aussi un troisième avantage d'intérêt public, à savoir celui de stimuler une industrie naissante comme on nous l'a déjà dit ce matin. Bien que le recours à cette formule ne soit pas encore très répandu en Grande-Bretagne, on peut cependant dire qu'elle a donné naissance à une industrie importante de construction, mais aussi d'entretien et d'exploitation des routes, laquelle se tourne actuellement vers les marchés d'exportation. Il n'y a aucune raison de croire que d'autres sociétés ne peuvent pas connaître, sur une beaucoup plus grande échelle, le même succès que CHIC et d'autres sociétés canadiennes et que cela n'aboutira pas à une industrie d'exportation florissante.
La réalisation de cet objectif entraîne cependant certaines dépenses inévitables.
À un certain niveau, il faut engager des fonds publics pour l'achat de certains biens, monsieur Cullen. Tout ne peut pas être financé par le secteur privé, mais on peut tirer grandement parti de certaines des formules que vous avez mentionnées, des avantages qui découlent de la construction d'une nouvelle route et de l'inclusion de tous ces éléments dans le contrat.
L'une de ces dépenses prend la forme d'un investissement en réflexion, temps et gestion au moment de l'établissement de ces contrats. Certains ont exprimé ce matin de l'impatience à l'égard de mes anciens collègues de la fonction publique, mais je me permets de faire remarquer que le succès de ces initiatives dépend de l'intelligence de l'acheteur. Que les travaux relèvent d'un organisme provincial ou d'un organisme fédéral, il faudra pouvoir compter sur des fonctionnaires d'une grande compétence et d'une grande expérience pour pouvoir tirer vraiment parti des avantages de cette formule. Rien n'est plus frustrant pour un financier ou un constructeur de routes que de mener des négociations complexes avec des gens qui ne comprennent rien au sujet.
Cette dépense est cependant gérable. Il faut simplement s'assurer de prendre les mesures qui s'imposent dès le départ. L'analyse doit être faite soigneusement en particulier la première fois. L'une des tâches qui pourraient être confiées à un organisme conjoint du type dont on a parlé ce matin pourrait être de proposer des moyens permettant d'optimiser le processus. Il s'agit ici d'une nouvelle procédure en matière d'achats publics, c'est-à-dire une nouvelle relation contractuelle entre le secteur public et le secteur privé.
Lorsque vous organiserez une autre table ronde comme celle-ci, monsieur le président, je vous recommande d'inviter certains de nos collègues du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.
On pourrait sans doute économiser beaucoup de temps et d'énergie lors des négociations si l'on pouvait se reporter à des contrats, des dispositions et une méthode de calcul des risques types. Si les différents paliers de gouvernement et le secteur privé collaboraient à cet égard, cela permettrait de réduire considérablement les coûts de démarrage.
Monsieur le président, voilà qui met fin à ma déclaration préliminaire. Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Swain. Je vous remercie également de vos remarques au sujet des taxes spéciales. Le Comité des finances se réunit de l'autre côté du couloir et c'est ce qui explique que Barry ne soit pas ici maintenant. Il essaiera cependant de venir cet après-midi. Cette question a fait l'objet de longues discussions avec le CRCI et le CAA. M. Hunt a peut-être quelque chose à ajouter là-dessus.
Après avoir entendu les propos qui ont été tenus sur le sujet, j'en ai déduit qu'un investissement à long terme soutenu dans le réseau routier importe davantage que la formule de financement qui sera retenue et pourrait prendre la forme d'une taxe spéciale. On m'a aussi certainement présenté l'envers de la médaille. En Saskatchewan, le ministre de la Voirie a longuement expliqué pourquoi sa province n'aimait pas cette idée. Je crois d'ailleurs que cette idée ne plaît guère dans le reste du pays.
Permettez-moi maintenant de donner la parole à Mme Moya Greene qui m'a beaucoup encouragé à nous lancer sur cette voie et qui va maintenant nous présenter la position de l'Association des banquiers canadiens sur cette question. On m'informe que les banques canadiennes sont disposées à réinvestir leurs énormes profits dans la construction de routes.
Mme Greene: Monsieur le président, j'aimerais d'abord féliciter le comité pour ses travaux. J'ai beaucoup apprécié lire les rapports que le comité a fait paraître avant Noël. Comme vous le savez, c'est une question à laquelle je m'intéresse depuis un certain nombre d'années. Je suis heureuse de voir autour de cette table bon nombre d'anciens collègues qui pourront vous faire profiter de leurs conseils sur une question très complexe. Je remercie beaucoup votre comité d'avoir décidé d'étudier une question aussi exigeante.
Je suis également très heureuse de représenter les banques canadiennes à cette table ronde. Je suis une nouvelle venue dans le secteur bancaire, mais je suis tout de même en mesure de dire au comité que les banques canadiennes sont prêtes à participer au financement du programme d'infrastructure au Canada. Comme vous le savez sans doute, ces dernières années, les banques canadiennes - et je songe ici notamment à RBC Dominion Securities pour le financement de NAV CANADA et à CIBC-Wood Gundy dans le cas de l'aéroport de Vancouver - ont proposé les façons les plus imposantes et dans certains cas les plus originales de financer des entités nouvellement créées au Canada. Il s'agit, dans le cas de NAV CANADA, de la plus importante émission d'obligations jamais mises sur le marché par une société au Canada. L'expérience des quatre dernières années démontre donc que les banques canadiennes s'intéressent vraiment au financement de l'infrastructure pas seulement au Canada mais dans le monde entier. Toronto Dominion Securities, mon employeur, a profité de sa place prépondérante sur le marché des placements privés pour assurer une grande partie du financement de l'aéroport de Vancouver et nous avons été heureux de collaborer avec RBC Dominion Securities à lancer sur le marché la plus importante émission d'obligations relativement à NAV CANADA.
J'aimerais maintenant vous parler brièvement des capitaux auxquels on peut faire appel pour ce genre de projets, car je crois que la situation à cet égard est encourageante. Si vous me le permettez, monsieur le président, je vais me reporter à l'expérience que j'ai acquise dans le secteur des transports à titre de fonctionnaire lorsque ma tâche consistait à trouver des sources de financement pour l'infrastructure qui, jusqu'alors, avait été financée exclusivement par des deniers publics. Cela m'amènera à faire quelques observations au sujet des problèmes que soulève mon collègue M. Swain quant à la façon d'atteindre l'objectif que nous nous fixons. Il s'agit de problèmes assez importants sur lesquels je sais que votre comité, monsieur le président, voudra sans doute faire des recommandations précises.
J'aimerais donc vous faire part de la façon dont j'envisage ces problèmes à titre de représentante du secteur privé ainsi qu'à titre d'ancienne fonctionnaire ayant étudié ces questions de financement.
Pour ce qui est de la disponibilité des capitaux, les banques canadiennes sont conscientes du fait qu'il faut répondre aux besoins de tous les clients cherchant du financement pour l'infrastructure. Il y a d'abord les besoins de financement à court terme et ensuite la question des placements à long terme et, dans ce cas, nous sommes en mesure d'aider les prêteurs institutionnels à prendre conscience du fait que ces organismes peuvent s'autofinancer et rembourser leurs dettes à long terme.
Voilà essentiellement quelle est la question. Ce nouvel organisme est-il structuré de façon à générer des revenus et à convaincre les marchés des capitaux publics et privés qu'il pourra rembourser sa dette à leur endroit? Voilà la question. Je crois qu'on s'en écarte souvent lorsqu'on commence à se demander si les revenus doivent être générés au moyen de la fiscalité générale ou de péages sur certains tronçons de routes.
En fait, je crois que ce qui importe davantage aux marchés des capitaux, c'est que ces revenus soient sûrs et stables et qu'ils suffisent à couvrir les dépenses de fonctionnement et le service de la dette.
Jusqu'ici je crois que les prêteurs ont été prêts à investir lorsqu'ils sont convaincus que les revenus générés par ces organismes suffisent pour s'assurer que les personnes pour le compte desquelles ils investissent dans ce domaine - les caisses de retraite et les fonds mutuels - vont pouvoir être remboursés. C'est très important.
Je pense donc que la demande pour le financement en infrastructure va croître et que les marchés obligataires vont répondre de plus en plus à cette demande. Plusieurs raisons l'expliquent.
Je crois que vous et votre comité pouvez compter, monsieur le président, sur le fait que les marchés obligataires contribueront à l'établissement de partenariats État-secteur privé pour le financement de l'infrastructure.
Le plus important facteur dont il faut cependant tenir compte pour que les marchés obligataires soient prêts à accorder ce financement au cours des trois ou quatre prochaines années, c'est que tous les paliers de gouvernement du pays réduisent leurs emprunts, ce qui a un effet salutaire sur les marchés obligataires pour ce qui est des nouvelles émissions. Je vous invite à ne pas l'oublier lorsque certains soutiendront que le gouvernement devrait accroître ses emprunts à d'autres fins.
À ma connaissance, les différents paliers de gouvernement ne souhaitent pas augmenter leurs emprunts. Cette situation a un effet positif sur le marché obligataire. Jusqu'ici, les acheteurs d'obligations semblaient préférer les obligations émises par des gouvernements plutôt que par des sociétés. À mesure que les gouvernements réduisent leurs besoins d'emprunt, les caisses de retraite ainsi que les fonds mutuels vont chercher à réinvestir leurs capitaux. L'offre en obligations gouvernementales ne présentant aucun risque va diminuer. Il leur faudra réinvestir leurs capitaux dans les obligations des sociétés.
Deuxièmement, il y aura plus de capitaux à investir. Les caisses de retraite et les fonds mutuels vont non seulement avoir plus de capitaux à investir dans les sociétés, mais il y aura plus de capitaux sur le marché de façon générale au cours des trois prochaines années. Cela s'explique en partie du fait que les gouvernements ne vont pas augmenter leurs emprunts sur les marchés obligataires, mais également par un taux d'épargne qui augmente lentement au Canada. Un taux d'épargne plus important signifie une offre plus importante de capitaux. Voilà donc une autre tendance salutaire qui se manifestera sur les marchés obligataires au cours des deux ou trois prochaines années et dont profiteront les sociétés.
Enfin, et ce qui est sans doute le plus important, c'est que les taux d'intérêt à long terme sur les emprunts pour ce genre de projet continueront sans doute d'être raisonnables au cours des trois à cinq prochaines années.
Les taux d'intérêt sur les émissions des sociétés diminuent depuis le début des années 90, suivant en cela les taux de référence s'appliquant aux obligations du gouvernement canadien. On s'attend, par exemple, à ce que les taux d'intérêt sur les obligations du Trésor canadien demeurent très bas au cours des trois prochaines années. À cet égard, monsieur le président, je crois que vous et vos collègues méritez des félicitations. Il est rare qu'on adresse des félicitations au gouvernement. Cette diminution des taux d'intérêt est attribuable à une bonne gestion macro-économique.
Les taux de référence ont diminué, ce qui signifie que les taux sur les obligations des sociétés vont aussi diminuer et l'écart traditionnel entre les taux sur les obligations des sociétés et les taux sur les obligations gouvernementales va commencer à diminuer. On pense donc que la situation va être dans l'ensemble favorable aux sociétés sur les marchés obligataires et notamment pour les sociétés qui construisent, exploitent et entretiennent l'infrastructure.
J'aimerais aussi vous dire quelques mots au sujet des méthodes traditionnelles de financement. Je crois qu'on a eu jusqu'ici un peu trop recours aux crédits gouvernementaux. À mon sens, il ne peut s'agir d'une base au partenariat État-secteur privé. Je crois plutôt que ces bases seront celles dont vous ont parlé mes collègues MM. Beck et Swain. Les gouvernements seront forcés d'envisager de faire appel à de nouveaux partenaires pour la mise en oeuvre de chaque projet et ces nouveaux partenaires auront voix au chapitre pour ce qui est des coûts, de la durée des projets, des dépassements de coûts éventuels, de la conception des projets et de la mise en oeuvre de ceux-ci.
Autrefois, les entrepreneurs attendaient chaque année à la queue leu leu que le gouvernement veuille bien consentir des investissements dans le domaine de l'infrastructure. Quand on construit un réseau routier à la pièce de cette façon, on ne se demande pas vraiment comment obtenir le meilleur réseau routier au moindre coût.
Je crois que c'est pourtant l'objectif qu'on visera par ces partenariats État-secteur privé, quelles que soient les ressources dont disposeront les gouvernements et quelle que soit la façon dont ils sont prêts à les dépenser. Cette méthode assure un meilleur réseau routier à moindre coût.
Certains de mes collègues ont souligné, monsieur le président, et je suis complètement d'accord avec eux, que le réseau routier national ne peut pas être complètement financé par les revenus dont pourra en tirer la société privée qui sera chargée de le construire. Dans bien des cas, aucun revenu ne sera généré. Même si l'on devait appliquer les idées très innovatrices proposées par M. Cullen au sujet de la mise en valeur de l'alignement, il n'en demeure pas moins que la publicité qui s'y trouverait ne serait pas vue par bien des gens à moins qu'elle ne soit intégrée à un réseau de communications. Le gouvernement doit donc réfléchir au type de projets qu'il souhaite mettre en oeuvre. C'est une question très importante.
Certains ont affirmé que la réfection du réseau routier national au Canada exigerait des investissements de 10 milliards de dollars. Ce n'est pas ce que je crois. Les projets les plus rentables pour le pays, ceux qui feront augmenter le plus le PIB du Canada, ne coûteront pas 10 milliards de dollars au total. Je crois qu'ils représentent plutôt des investissements totaux allant de 3 à 4 milliards de dollars.
Si les gouvernements commencent à axer leurs ressources - et des sommes considérables sont déjà dépensées au niveau fédéral seulement - sur les projets qui contribueront le plus à la croissance économique du Canada, ils en auront beaucoup plus pour leur argent que par le passé et je ne pense pas qu'on leur reprochera ces investissements parce que les gens comprendront qu'ils rapporteront bien davantage à l'économie.
Étant donné que par le passé la méthode de financement des projets n'était pas adaptée à chaque projet, on n'attachait pas autant d'importance qu'on aurait dû le faire à la réduction des coûts. En fait, on ne s'intéressait pas vraiment aux projets eux-mêmes. Dans mon expérience, on s'intéressait davantage aux ententes de financement fédérales-provinciales et aux négociations menées à la hâte pour aboutir à la signature de ces ententes. L'industrie de la construction, quant à elle, faisait de son mieux dans le temps habituellement insuffisant qu'on lui donnait pour faire le travail. Personne ne préconise plus cette méthode.
Quant au nouveau rôle qu'on voudrait voir le gouvernement assumer, il faut d'abord être prêt à investir dans la construction routière. Il est ressorti du long débat sur cette question qu'on ne semblait pas accorder la priorité à la construction routière bien qu'on y consacre 250 millions de dollars par année, ce qui est une somme importante pour un secteur non prioritaire, ou que les routes elles-mêmes ne sont pas une priorité. Ce qu'on considère comme une priorité, ce sont les dépenses régionales à ce titre.
C'est surtout grâce à vous, monsieur le président, qu'on commence dans ce pays à comprendre l'importance d'un réseau d'autoroute national pour le développement économique du pays. À mon avis, voilà pourquoi le gouvernement doit continuer d'investir dans ce domaine.
Je ne suis donc pas de ceux qui préconisent l'affectation au financement du réseau routier d'une partie des taxes sur le carburant. Il faudrait pour cela que le gouvernement compense la perte de ces revenus pour être en mesure d'atteindre ses objectifs en matière de réduction du déficit et, comme nous l'avons vu, c'est grâce à ses efforts de réduction du déficit que les sociétés privées peuvent trouver du financement sur le marché obligataire.
Je ne pense donc pas que la solution au problème réside dans l'affectation au financement du réseau routier d'une partie de la taxe sur le carburant. Je constate cependant depuis près de 20 ans qu'on dépense entre 200 et 280 millions de dollars par année sans pourtant très bien planifier l'affectation de ces fonds. Je suis d'avis qu'un groupe constitué de représentants des secteurs public et privé devrait discuter de la façon dont ces 250 millions de dollars devraient être dépensés.
Ce groupe devrait être constitué de gens qui ont les compétences et les ressources dont parlait M. Swain, c'est-à-dire de gens qui comprennent le fonctionnement des marchés financiers et qui comprennent quels sont les types d'emprunt susceptibles d'intéresser ces marchés. On confierait à ce groupe la tâcher de gérer cette dépense de 250 millions de dollars.
Je sais que M. Martin aime dire que les routes ne relèvent pas de la compétence fédérale et que le gouvernement fédéral ne consacre pas de fonds à ce domaine. Les faits le contredisent cependant. Le gouvernement fédéral consacre beaucoup d'argent au réseau routier.
À mon avis, on devrait confier à un organisme possédant les compétences voulues la tâche de gérer ces 250 millions de dollars et d'établir les projets prioritaires dans le domaine routier. Tous les tronçons du réseau routier national n'ont pas à être reconstruits au même moment. Nous pouvons nous fixer des priorités dans ce domaine qui n'a pas beaucoup retenu l'attention des hommes politiques. Je recommande qu'on permette à ce nouvel organisme d'accorder des contrats au secteur privé comme le suggérait M. Swain.
Si ces 250 millions de dollars peuvent être efficacement répartis entre des entreprises de construction et d'exploitation compétentes qui veilleront à construire différents tronçons du réseau routier national, monsieur le président, je crois que cela contribuera grandement à régler ce qui constitue à l'heure actuelle un problème très important.
Je vous remercie beaucoup de l'occasion qui m'a été donnée de vous faire part du point de vue de l'industrie financière au Canada, et notamment de celle de l'industrie bancaire, ainsi que de vous exposer mes réflexions sur le sujet.
Permettez-moi de conclure en faisant quelques mises en garde. Les négociations sur chaque projet sont incroyablement compliquées. J'ai déjà participé à de telles négociations. Elles sont longues et ardues. Les cadres doivent y consacrer beaucoup de temps. Voilà une autre raison pour laquelle je crois qu'il faut confier cette tâche à un groupe de gens qui connaissent bien la façon de mener des négociations.
Deuxièmement, je crois qu'il faut cesser de penser que le secteur privé ne doit pas tirer un avantage financier de la gestion de ces actifs. J'ai constaté que certains de mes collègues pensent qu'il y a du mal à ce que des actifs publics génèrent des profits pour le compte du secteur privé. On oublie dans ce cas que le secteur privé est en mesure d'exploiter ces actifs de façon beaucoup plus efficace et plus rapide que cela n'a été le cas par le passé.
Enfin, monsieur le président, ceux qui seront chargés de surveiller ces processus doivent veiller à ce que les négociations ne s'éternisent pas. Je sais beaucoup mieux que je ne le savais autrefois combien elles sont coûteuses. Je m'attendais autrefois à ce que le secteur privé soit prêt à présenter sur-le-champ des projets très détaillés. Maintenant qu'on s'attend à cela de ma part, je sais à quel point cette attente est déraisonnable et nous ne pouvons pas attendre pendant deux ans ou deux ans et demi que la décision soit prise.
Je vous remercie beaucoup de votre attention.
Le président: Je vous remercie. Votre seule présentation rend toutes ces séances utiles.
Qu'il me soit permis de dire que le temps passe vite lorsqu'on s'amuse. L'heure du déjeuner approche. Je vais permettre quelques brèves interventions et questions avant que nous ne prenions une pause pour le déjeuner. Je vais ensuite vous assigner des travaux à faire pendant le déjeuner. J'accorde d'abord la parole à Jim Jordan.
M. Jordan: Je vous remercie, monsieur le président. Je veux revenir à la question qui a été mentionnée par nos deux derniers conférenciers, c'est-à-dire la question de savoir quel moyen employer pour atteindre l'objectif que nous visons.
Du simple point de vue pratique, je crains que nous fassions une erreur... Bien qu'on se soit entendu de façon générale dans les localités que nous avons visitées pour reconnaître qu'il fallait améliorer le réseau routier et qu'il fallait également trouver une nouvelle façon de le financer, je crois qu'on commettrait une grave erreur si on donnait l'impression qu'à partir de maintenant ou bientôt la construction de toutes les routes sera financée autrement que par le passé. Comme vous l'avez dit, Moya, les capitaux sur le marché ne suffiraient pas à la tâche.
Je crois qu'il conviendrait d'établir des priorités très bientôt pour ce qui est de la réfection du réseau routier. On a fait remarquer que toutes les routes n'ont pas à être reconstruites. Il y a des dizaines de bonnes raisons pour procéder ainsi. Le réseau routier revêt une importance en ce qui touche l'édification de la nation. On peut tirer parti de l'expérience de la Grande-Bretagne et d'autres pays à cet égard. Il suffit d'appliquer les mêmes principes.
Tout ne va cependant pas survenir immédiatement à l'échelon local. Premièrement, il y a trois paliers de gouvernement avec lesquels il faut traiter. Si on ne parvient pas à s'entendre sur la façon dont le financement doit être assuré, je crois qu'on décidera tout simplement de reporter toute l'affaire. On risque d'attendre longtemps dans ce cas avant que toutes les routes soient construites, financées et exploitées de cette façon. Je ne pense pas que ce soit jamais le cas.
Je pense qu'il faut veiller à ne pas donner au public l'impression qu'à partir de maintenant tout va se faire autrement. La plupart d'entre nous ne seront pas là lorsque ce sera le cas. Il y aura peut-être certains changements qui se produiront bientôt dans certaines régions, mais je pense que c'est aussi loin qu'on pourra progresser pour l'instant.
Je veux donc simplement m'assurer que... Il importe, monsieur le président, que nous ne nous lancions pas dans toutes les directions à la fois parce qu'il nous sera impossible de répondre aux attentes pour la raison que vous a donnée Moya, c'est-à-dire qu'il n'y a pas suffisamment de capitaux sur le marché.
Le président: Vous insistez sur l'importance, si je ne m'abuse, du tronçon entre Wawa et Winnipeg.
M. Jordan: Non, du tronçon entre Ottawa et la 401.
Le président: Nous revenons à la discussion. Monsieur Keyes, vous avez une brève question à poser.
M. Keyes: J'ai une brève question qui s'adresse à Moya, monsieur le président. J'ai aussi une question supplémentaire à poser au sujet de l'intervention de mon collègue M. Jordan.
Moya, quel moyen pouvons-nous prendre pour atteindre notre objectif? Lorsque vous parlez d'une entité privée-publique, qui déterminerait les priorités quant à la façon de dépenser l'argent fourni par le gouvernement fédéral ou le secteur privé, ce qui m'inquiète - et à cet égard, je fais suite aux observations de mon collègue, car à mon sens, c'est vraiment là le noeud du problème - c'est que si l'on doit décider de construire certains tronçons d'autoroute et que le secteur privé est un investisseur, il voudra recevoir un certain rendement sur son investissement. Autrement dit, ces gens-là nous diront qu'étant donné qu'ils paient la note, c'est à eux de décider quelles sont les priorités.
Le problème qui se pose, c'est que si nous voulons construire un tronçon d'autoroute dans le nord de l'Ontario, ou, dans le cas évoqué par le président, entre Wawa et Winnipeg, cela ne semblera guère un investissement rentable pour le secteur privé. Si le gouvernement fédéral investit 200 millions de dollars et que le secteur privé se retrouve à payer le reste, soit environ 3 milliards de dollars, qui aura le dernier mot? Si c'est le secteur privé, qui verra cela en termes de rendement, étant donné qu'il souhaitera un rendement sur son investissement, ne courons-nous pas le risque de nous retrouver avec des autoroutes plus larges, plus propres et plus modernes à Toronto, par exemple, et d'abandonner le tronçon reliant Wawa à Winnipeg?
Le président: C'est une bonne question, monsieur Keyes.
Mme Greene: Je pense que si l'on confie à cette entité, comme nous-mêmes, vous-même, monsieur Anderson, monsieur Young, l'avons fait pour la cession des aéroports et de la responsabilité des tours de contrôle du trafic aérien... il était mentionné dans la politique du gouvernement qu'il y aurait un certain nombre de sites qui, même s'ils n'étaient pas parmi les plus achalandés, recevraient du financement d'investissement sous la forme d'une autre contribution gouvernementale. J'envisage donc une entité qui serait composée surtout de représentants du secteur privé, mais aussi du secteur public, ce qui permettrait au gouvernement de réserver un certain pourcentage de l'argent disponible pour des routes qui ont un besoin urgent de réfection, mais qui ne sont pas susceptibles de générer d'autres sources de revenus importants. Tout dépend de la façon dont on structure cette entité.
M. Keyes: À votre avis, cela peut marcher?
Mme Greene: Oui.
Le président: Je vais laisser M. Crête intervenir et ensuite, je demanderais à tout le monde de rester à sa place, car je dois vous donner des directives.
[Français]
M. Crête: J'aimerais faire un très court commentaire. On a présenté beaucoup d'éléments de ce que devrait être une stratégie de l'intervention. Pour ma part, j'aimerais que tous les gens, à la fin de ce colloque, puissent retourner chez eux en pensant à ce qu'ils peuvent faire pour que le secteur qu'ils représentent puisse réaliser ce qu'il peut faire.
Je vais vous donner des exemples. Monsieur Hunt, en ce qui a trait à la taxe de deux cents et de dix cents, il faudrait être capable de répondre à MM. Martin et Brassard, aux différents ministres des Transports ou des Finances surtout, qui n'ont pas tendance à favoriser une taxe spécifique comme celle-là.
Ce sont des gens comme M. Bélanger qui vont décider, lors de la prochaine élection, s'ils votent pour tel ou tel type de projet. Comment les routiers assument-ils leur part des problèmes des routes? De quelle façon pourrait-on rendre cela plus comestible pour l'ensemble de la population? On dit qu'une remorque représente l'équivalent de 15 000 autos sur une route donnée. Est-ce vrai? Comment réagissez-vous à cela? M. Redfern a posé au départ la question de l'engagement gouvernemental. Comment fait-on pour l'obtenir?
Mme Pelletier, qui parlait au nom de l'Association des transports du Canada, a dit de ne pas jeter par-dessus bord tout ce qui existe déjà. Il existe peut-être certains outils qui devraient être mis à contribution.
Donc, qu'est-ce que chacun de nous est prêt à faire pour que dans cinq à dix ans, on puisse faire la démonstration qu'on a progressé?
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Crête.
Nous allons faire une pause pour le repas et j'invite tous les observateurs à se joindre à nous.
Les autres membres du comité et moi-même venons de vivre une expérience d'apprentissage fascinante. On nous a présenté énormément d'informations et d'idées nouvelles.
Une partie de ce dossier n'a pas de rapport direct avec le problème du financement des routes, mais elle est intimement liée à deux choses: premièrement, la construction d'une nouvelle infrastructure et, deuxièmement, ce que M. Swain a mentionné dans le contexte britannique, la création de nouveaux marchés d'exportation. Il existe un peu partout dans notre pays, un nombre de personnes beaucoup plus imposant que je ne l'aurais jamais cru, qui font des recherches sur des technologies nouvelles, de nouvelles façons de construire des routes et des surfaces, etc.
Nous avons invité ici des représentants de l'un des réseaux d'excellence, ISIS, que M. Swain connaît sans doute très bien, puisque je crois que ce dernier a été créé pendant son mandat de sous-ministre. Nous accueillons des représentants des universités du Manitoba et de Sherbrooke qui nous parleront aujourd'hui de certaines des nouvelles technologies qui sont mises au point ici au Canada, et de nouveaux brevets canadiens, qui nous permettront de bâtir des structures plus solides, plus intelligentes, y compris des routes et des ponts, et même de reconstruite certains des ponts existants, en faisant des économies. En outre, ce genre de technologie donnerait au Canada l'accès au marché mondial des nouvelles infrastructures, évalué à quelque 900 milliards de dollars.
Nous avons donc 45 minutes pour dîner et ensuite nous reviendrons pour discuter de cela.
Mais avant de partir, voici le travail qui vous attend. Parfois, les comités sont des créatures indépendantes. Etre le président d'un comité, c'est un peu comme rassembler un troupeau. Cela dit, au cours des deux premières semaines de session, le comité va mettre la dernière main à son rapport préliminaire et faire rapport à la Chambre des communes. Dans le rapport en question, nous allons présenter un certain nombre de recommandations très précises fondées sur le travail que nous avons effectué l'année dernière sur le sujet, ainsi que sur les résultats de la présente table ronde.
Nous avons inclus à l'annexe ou à la dernière page de ce document de travail, une liste de sujets. Il ne s'agit pas de sujets définitifs et ce ne sont pas nécessairement les seuls. Je vous demanderais de réfléchir aux recommandations précises que vous souhaitez que notre comité fasse à la Chambre des communes d'ici les trois prochaines semaines, comme par hasard, avant le prochain budget.
Pour conclure, j'aimerais vous lire quelque chose. Tous les matins, je lis le problème de bridge du journal The Globe and Mail et pour une raison ou une autre, mon oeil a été attiré par mon horoscope qui se lit comme suit:
- Vous devez être réaliste quant à ce que vous pourrez réaliser aujourd'hui. Il n'est pas bon de
viser les étoiles, si vous n'avez qu'une trampoline pour vous y rendre. Un jour vous volerez,
mais pour l'instant, vos objectifs devraient être plus terre-à-terre.
Le président: Reprenons la séance. Je suis convaincu qu'au cours de ce repas somptueux - et je vous prie de constater comment le gouvernement définit le terme «somptueux» - les divers protagonistes de ce drame ont pu échanger et résoudre la majorité des problèmes auxquels nous faisons face.
Comme je faisais le tour des divers participants, comme c'est mon habitude, pour leur expliquer le travail du comité, on m'a fait remarquer que le réseau routier était un sujet plutôt ennuyeux, dénué de tout attrait, et qu'on avait du mal à comprendre qu'on veuille y consacrer du temps. Or voilà ce qui est accrocheur, l'énorme quantité de travail pour mettre au point certaines nouvelles technologies très intéressantes. Et ce n'est qu'une technologie parmi toutes celles dont le comité a été saisi. Chose certaine, on m'a parlé d'un grand nombre d'autres en privé.
Je suis particulièrement heureux, toutefois... je ne sais pas si j'ai mentionné la route de Wawa à Winnipeg, mais le groupe ISIS, qui est l'un des centres d'excellence, constitué par le gouvernement fédéral, un réseau d'universités disséminées dans le pays, a effectué un travail considérable sur la question des nouveaux matériaux composites. Nous accueillons aujourd'hui Chris Lorenc qui est de l'ISIS, à l'Université du Manitoba, et Sandra Martel, de l'Université de Sherbrooke, qui vont comparaître ensemble. Ils font tous deux partie du réseau.
J'ajouterais que je connais Chris Lorenc, depuis 20 ans. Je l'ai connu à l'époque où il était un danseur de Veselka. Nous lui demanderons de danser après le repas.
Chris, vous avez la parole.
M. Chris Lorenc (directeur général, ISIS Canada (Le Réseau canadien de Centres d'excellence sur les innovations en structures avec systèmes de détection intégrés)): Merci beaucoup, monsieur le président.
Bon après-midi, membres du comité, mesdames et messieurs. Je suis très heureux de comparaître devant vous cet après-midi, à titre de directeur général d'ISIS Canada. Je suis accompagné de Mme Sandra Martel.
[Français]
Mme Sandra Martel (directrice du développement et de l'application, ISIS Canada): Bonjour, mesdames et messieurs, monsieur le président. Je m'appelle Sandra Martel et je travaille au Réseau canadien de centres d'excellence sur les innovations en structures avec systèmes de détection intégrés depuis août dernier. Je suis ici à titre d'agent de développement et d'application.
[Traduction]
M. Lorenc: Monsieur le président, avec votre permission, j'aimerais faire quelques observations liminaires avant d'entrer dans le vif du sujet.
Tout d'abord, j'attire votre attention sur le fait qu'on vous a remis une chemise dans laquelle vous trouverez non seulement le texte intégral de notre exposé, mais aussi des renseignements supplémentaires au sujet d'ISIS Canada, ainsi que des techniques et des projets que nous avons à offrir. Deuxièmement, monsieur le président, à propos d'attrait, nous espérons vous vendre notre attrait technique.
Je voudrais aussi revenir à deux observations que nous avons entendues au cours des délibérations de la matinée et faire certains commentaires.
Premièrement, j'espère qu'après avoir entendu notre exposé, vous serez convaincus qu'ISIS Canada peut jouer un rôle d'expert-conseil dans l'élaboration de pratiques de réfection des ponts. Je crois savoir que dans les rapports sur les routes nationales, on identifie 790 ponts qui, déjà en 1994, avaient besoin de travaux de réfection importants au cours des cinq années suivantes, qui se terminent en 1999.
Certaines techniques dont nous ferons la démonstration permettent aux propriétaires d'une infrastructure de faire des économies allant de 40 à 60 p. 100. Si l'on considère qu'on a calculé qu'il en coûterait de 2,3 à 2,7 milliards de dollars pour réparer les ponts du réseau routier national, une économie ne serait-ce que de 40 p. 100 seulement représente un peu moins de 900 millions de dollars.
Deuxièmement, en ce qui a trait aux observations de M. Swain, selon lesquelles l'industrie de la construction routière et des services afférents est prête à s'attaquer au marché international, j'espère qu'après avoir pris connaissance de la technologie que nous vous montrerons, vous conclurez que nous sommes en mesure d'offrir une technologie canadienne qui donnera à notre industrie, à nos bâtisseurs de routes, à nos architectes, à nos ingénieurs et à tous ceux qui gravitent dans les services et l'entretien des routes, un avantage inégalé dans le monde, c'est-à-dire l'avantage que confère une technologie de pointe faisant appel à des matériaux composites d'avant-garde et à des systèmes de détection intégrés à fibres optiques.
Monsieur le président, voici notre exposé.
Le Réseau canadien de Centres d'excellence sur les innovations en structures avec systèmes de détection intégrés, ISIS Canada, est comme vous l'avez dit, monsieur le président, un réseau de centres d'excellence financé sous forme de partenariat par le gouvernement fédéral, avec une contribution correspondante des gouvernements provinciaux et municipaux et du secteur privé. Sa mission consiste à permettre au génie civil canadien et à l'industrie de la construction de jouer un rôle de premier plan au niveau international et ce, grâce au développement et à l'application de nouvelles technologies particulières, soit le recours à des matériaux composites d'avant-garde accompagnés d'innovations en structures avec systèmes de détection intégrés.
[Français]
Mme Martel: ISIS Canada, dont les bureaux principaux se trouvent à l'Université du Manitoba, fait appel à la collaboration étroite, non seulement des meilleurs chercheurs canadiens, mais également des meilleurs spécialistes au monde dans le domaine des sciences et du génie civil. Grâce à l'appui financier de trois paliers de gouvernement et à l'établissement d'un solide partenariat avec le secteur privé de l'industrie, ISIS Canada possède les atouts nécessaires qui permettront au génie civil canadien de jouer un rôle de premier plan au niveau international.
[Traduction]
M. Lorenc: De façon plus particulière, ISIS Canada est responsable du développement et de l'application d'une technologie qui, une fois sa mise au point terminée, favorisera à l'échelle mondiale, la promotion et l'adoption de «solutions canadiennes aux problèmes mondiaux des infrastructures» et pourrait bien produire une incidence égale à celle qu'a eue l'invention de la micropuce dans le secteur des communications.
[Français]
Mme Martel: Un nouveau groupe puissant de technologies d'avant-garde fait son apparition dans le domaine du génie civil et les chercheurs canadiens, qui se trouvent au premier plan de la recherche internationale, s'apprêtent à guider les pas de l'industrie vers le XXIe siècle. En cherchant à relever la multitude de défis que présente l'infrastructure, les ingénieurs civils canadiens se sont déjà trouvé un partenaire puissant grâce à l'application d'une nouvelle technologie en évolution rapide appelée «innovations en structures avec systèmes de détection intégrés», technologie qui a mené à la création d'ISIS Canada.
[Traduction]
M. Lorenc: Nous proposons l'application de matériaux composites d'avant-garde pour la réfection et le renforcement de ponts et de structures vieillissants. Les solutions fondées sur la technologie mise au point par ISIS Canada ouvrent la porte à de nombreuses applications et un grand nombre sont au stade du développement. De façon générale, elles comportent quatre caractéristiques.
Premièrement, qu'entend-on par matériau composite d'avant-garde? Comme vous le voyez, j'ai en main un renfort de fibre de verre et de l'autre, un renfort de métal. On peut s'en servir de la même façon. La différence, c'est que le renfort de fibre de verre a deux fois la force de celui de métal, qu'il est 20 p. 100 plus léger que celui de métal et qu'il n'est pas sujet à la corrosion.
J'aimerais faire circuler ces objets. Vous pourrez sentir vous-mêmes la différence.
Le deuxième, qui est aussi fabriqué à l'aide de matériau composite d'avant-garde, est fait de fibre de carbone. Il a dix fois la robustesse de l'acier, selon son application, et 20 p. 100 de son poids. Il n'est pas sujet à la corrosion et supprime le problème que pose le sel dans son application sur nos routes et nos ponts.
[Français]
Mme Martel: L'utilisation de détecteurs à fibres optiques appelés «détecteurs intelligents» rend les structures «intelligentes» en permettant la transmission continue des données relatives à celles-ci. Ainsi, la transmission par téléphone ou par satellite est possible. On transmet les données recueillies par les détecteurs à une unité centrale de télésurveillance. Autrement dit, c'est de la surveillance à distance.
[Traduction]
M. Lorenc: La mise au point de nouvelles techniques ne découle pas seulement de la nécessité de réparer notre infrastructure au niveau national, ce qui s'inscrit dans le contexte de l'infrastructure urbaine ou, comme nous en avons discuté aujourd'hui, du réseau routier national, et même de la demande internationale. Les coûts associés à la réparation ou au remplacement de notre infrastructure en voie de détérioration rapide, non seulement ici au Canada mais partout dans le monde, se chiffrent littéralement dans les milliards de dollars. À la suite d'une récente étude menée par l'Université McGill, la Fédération canadienne des municipalités a estimé récemment que le déficit en infrastructure, c'est-à-dire le fossé entre ce que notre pays investit dans son infrastructure et le niveau approprié d'investissement dans cette infrastructure, s'élève à environ 44 milliards de dollars. Cette somme, qui est une estimation prudente, est ce qu'il en coûte uniquement pour entretenir notre infrastructure actuelle.
[Français]
Mme Martel: L'Association des transports du Canada a suggéré que, selon les options choisies, le pays devrait investir environ 18 millions de dollars pour mettre sur pied un réseau routier national en se servant de la Route transcanadienne comme point de départ.
[Traduction]
M. Lorenc: L'Association canadienne de la construction a fait des calculs, encore une fois très prudents, selon lesquels le déficit international en infrastructures s'établirait à 900 milliards de dollars.
[Français]
Mme Martel: Le Comité permanent des transports se trouve donc dans l'obligation de recommander un plan d'action en vue de mettre sur pied un réseau routier national.
[Traduction]
M. Lorenc: Comme vous l'affirmez dans votre propre rapport, la compétitivité commerciale du Canada est d'une importance cruciale compte tenu du fait que le commerce que nous faisons avec nos partenaires de l'ALENA constitue environ 80 p. 100 de toutes nos exportations. Nos deux partenaires, les États-Unis et le Mexique, font actuellement des investissements stratégiques d'importance dans le but d'améliorer leurs infrastructures et de désigner certaines routes transcontinentales à titre de corridors routiers dans le cadre de l'ALENA.
[Français]
Mme Martel: Les ressources financières étant limitées, les gouvernements et les entreprises privées sont à la recherche de technologies innovatrices pour réparer ou remettre en état leurs infrastructures existantes ou pour en construire de nouvelles. Ces nouvelles structures sont de construction solide et durable, et permettent de réaliser des économies relativement à la réparation, à la construction et à l'entretien.
[Traduction]
M. Lorenc: Par conséquent, notre exposé ne vise que l'un des sujets abordés dans votre document de travail. Il s'agit du rôle de la technologie dans le contexte de partenariats publics-privés et la façon dont la fusion de ces deux champs de compétence peut faciliter la construction d'un réseau routier national «intelligent».
[Français]
Mme Martel: Le document de travail du comité, intitulé Le renouvellement du réseau routier national, fait état d'un certain nombre d'observations importantes qui servent de toile de fond à la discussion.
[Traduction]
M. Lorenc: Vous affirmez par ailleurs dans votre rapport qu'un réseau routier efficace et compétitif constitue l'un des éléments essentiels d'une économie saine. Cette affirmation est suivie d'une observation très importante: les routes ne représentent pas une dépense, mais un investissement.
[Français]
Mme Martel: Votre comité a aussi mentionné qu'il ne fait aucun doute que nous ne pourrons pas tirer le maximum des avantages que nous offre l'ALENA si notre réseau routier n'est pas en mesure de concurrencer nos partenaires commerciaux. Le Canada n'a pas le choix. Il se doit de relever ce défi en raison du fait que le commerce avec nos partenaires de l'ALENA représente environ 80 p. 100, soit 370 milliards de dollars, de notre commerce global et plus de 30 p. 100 de notre PIB.
De plus, au moins 40 p. 100 de ce commerce dépend du transport routier.
[Traduction]
M. Lorenc: Lorsqu'il a comparu devant le comité permanent à l'occasion d'audiences précédentes, l'honorable Paul Martin a fait un commentaire très important. Selon lui, il est de plus en plus évident que les méthodes anciennes ne fonctionnent plus. L'avenir repose sur l'adoption de nouvelles approches innovatrices. Il s'est aussi dit convaincu que le comité permanent et notre table ronde sont sur le point de s'engager dans une nouvelle voie importante.
[Français]
Mme Martel: Nous avons aussi noté que le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international, M. Lloyd Axworthy, a dit que les projets de corridors routiers proposés par le gouvernement américain relieront les grandes villes importantes du Canada aux centres industriels américains et mexicains.
Une infrastructure efficace de transport terrestre au Canada constituera un facteur important dans la décision du gouvernement américain concernant le choix de corridors routiers.
[Traduction]
M. Lorenc: Chose plus importante, monsieur le président, vous avez tiré une conclusion - c'était dans le rapport - qui cerne très bien la question. Il ne s'agit pas de se demander si nous avons besoin d'un réseau routier national, mais plutôt comment nous allons nous y prendre pour amorcer et terminer cette mission.
[Français]
Mme Martel: La liste suivante met en évidence le bien-fondé de la technologie d'ISIS par rapport au réseau routier national. La technologie mise au point par ISIS Canada a été conçue spécialement pour faire face aux problèmes relatifs à l'adoption d'une politique sur le réseau routier national. L'application de ces nouvelles technologies ouvre la voie à de nouveaux marchés et à de nouveaux débouchés commerciaux.
[Traduction]
M. Lorenc: L'objectif de notre technologie consiste à réparer et à remettre à neuf des ponts dont la construction remonte à plus de 30 à 40 ans et dont la structure d'acier est non seulement visiblement corrodée, mais encore pire, n'a pas été construite, à l'origine, de façon à pouvoir supporter un accroissement de la charge en vue de répondre aux besoins des usagers.
[Français]
Mme Martel: Je ne sais pas si vous pouvez bien voir le tableau qui est ici. Il est divisé en quatre principales sections qui démontrent: les conditions actuelles auxquelles nos ponts sont soumis; les effets qu'ils ont sur les structures des ponts; les solutions proposées par ISIS; et les bénéfices qu'on peut tirer de ces solutions-là.
La première condition a trait au sel qui est répandu sur nos structures. Il a pour effet de corroder l'acier d'armature, entraînant la dégradation du béton et des structures. La solution proposée par ISIS est d'installer des renforcements au moyen de matériaux composites tels que ceux que nous avons fait circuler.
Leur avantage est qu'ils sont non corrosifs et plus forts. Ils rendent la structure plus forte que le béton armé conventionnel utilisant l'acier. Ils entraînent une réduction du coût du cycle de vie et une augmentation de la durée de la vie du pont qui est très significative.
La deuxième condition a trait aux charges accrues sur nos structures, lesquelles augmentent sans cesse. La circulation sur les ponts dépasse la capacité de nos structures prévue initialement dans la conception.
La solution proposée à ISIS est, encore une fois, le renforcement au moyen de matériaux composites munis de détecteurs intelligents. L'avantage est que les structures existantes peuvent être renforcées tout en demeurant fonctionnelles, ce qui procure des économies de temps et d'argent.
Finalement, la circulation accrue sur les ponts crée la détérioration et des défaillances possibles au niveau structurel. La solution proposée est le renforcement au moyen de matériaux composites, ce qui amènera comme avantage l'élimination du besoin d'effectuer des inspections visuelles étant donné les systèmes intelligents de monitorage, ce qui réduit les coûts et les risques de blessures pendant ces inspections.
Quant aux revêtements des chaussées et des parcs de stationnement, nous avons des problèmes causés par la contamination des sels de voirie. Les effets sont la corrosion des armatures et des goujons dans les joints, ce qui entraîne la détérioration.
La solution proposée par ISIS est l'utilisation de goujons renforcés à l'aide de matériaux composites et de revêtements de route en béton utilisant des fibres intégrées au béton, ce qui est beaucoup plus durable et beaucoup plus rigide que les solutions conventionnelles.
Donc, il y a la non-corrosivité, des revêtements plus forts, une réduction des cycles de vie et l'accroissement de la durée de vie des routes ou des stationnements.
À ce même niveau, on voit l'accroissement de la charge de la circulation, qui a les effets que je viens de mentionner. La solution proposée est la même, soit l'utilisation de composites.
[Traduction]
M. Lorenc: Dans votre trousse, vous verrez des exemples d'applications de la technologie d'ISIS Canada qui visent précisément les besoins du réseau routier national. Étant donné le court laps de temps qui nous est imparti pour notre exposé, nous limiterons nos exemples à trois projets parachevés dans la province de Québec.
[Français]
Mme Martel: Avant de commencer la présentation des projets, je voudrais faire circuler les matériaux qui ont été utilisés pour la réalisation de ces projets. Spécifiquement, il s'agit de petites fibres.
Celui-ci est constitué de fibres de verre qui sont tissées pour former le matériau qu'on veut appliquer sur le pont; une fois l'époxy ajouté au composite, on obtient ce genre de rigidité. Faite attention: ce sont de petites fibres.
Nous avons d'autres échantillons. Ici, nous avons du carbone. Celui-ci est basé sur le même principe, mais vous pouvez mieux voir les petites fibres. Il y a aussi un autre type de carbone tissé.
Ici, ce sont des fibres aramides. On les a utilisées, entre autres, pour la toiture du Stade olympique de Montréal.
Comme premier projet, j'aimerais vous présenter un viaduc sur l'autoroute 10, dans les Cantons de l'Est. Sur ce viaduc, la corrosion était très très importante à cause de la proximité des voies de roulement, les chasse-neige poussant la neige directement sur des colonnes et créant la corrosion des aciers et la dégradation du béton.
Lorsque le béton s'est détérioré, il n'est plus attaché correctement à la structure. On enlève donc cette partie de béton.
La première étape consiste à refaire la surface avec un mortier, tout simplement. Ensuite, on peut enduire la colonne ou la surface d'un époxy ou d'une résine et ensuite appliquer le matériau composite, tel qu'il est démontré sur la première feuille que j'ai fait circuler.
Une fois ce traitement appliqué, on obtient une surface rigide. Dans ce cas-ci, ce sont des fibres de carbone qui ont été appliquées. On peut voir ici les premières fibres optiques appliquées sur des structures au Québec. Avec ces fibres, on peut mesurer les déformations dues à la température ou aux charges appliquées sur la structure.
Pour ce projet, il s'agissait de matériaux qui étaient donnés entièrement par l'industrie pour essayer de mettre en oeuvre certains projets. On voit plusieurs types de matériaux qui ont servi à la réparation de ce pont. Ils ont été testés et leur comportement fera l'objet d'observations durant plusieurs années.
En deuxième lieu, j'aimerais vous parler du projet de renforcement et de réhabilitation. Ici on voit une partie du pont Champlain, à Montréal. Nous avons travaillé principalement sur une colonne qui s'était fortement détériorée. La Société de la voie maritime du Saint-Laurent et la Société des ponts Jacques-Cartier et Champlain étaient très inquiètes quant à la résistance actuelle du pont. Donc, on a procédé à un renforcement. L'innovation, dans ce projet spécifique, a été l'utilisation d'une nouvelle machine pour l'imprégnation des fibres.
Dans le projet présenté plus tôt, l'application se faisait manuellement. Cependant, ici on a pu imprégner les fibres avec la résine, qu'on enroule sur un rouleau qu'on déroule ensuite autour de la colonne, ce qui sauve énormément de temps et d'argent.
Dans ce cas-là, on s'est limité à la zone située près de la surface de l'eau, celle qui était le plus attaquée par la détérioration.
Notre dernier projet, réalisé dans le cadre du Programme d'infrastructure Canada-Québec, a été la réhabilitation d'un stationnement à niveaux multiples au centre-ville de Sherbrooke. Dans les stationnements à niveaux multiples, il y a beaucoup de problèmes de corrosion à cause de l'apport des sels par les véhicules, ce qui cause la dégradation des colonnes.
Une première utilisation des composites a été faite en vue de la protection des colonnes. Ici il s'agissait d'un renforcement avec fibre de verre. Dans le cas précédent, on avait utilisé des fibres de carbone.
On peut aussi voir l'état de détérioration des poutres due à plusieurs phénomènes structurels, entre autres une sollicitation très grande des poutres. Donc, on a refait la surface. Dans ce cas-ci, on a utilisé des bétons projetés et on a appliqué des bandes de matériau composite pour vraiment renforcer le niveau supérieur de la poutre, qu'on a ensuite enrobée totalement.
Ici il s'agit d'un autre cas de sollicitation des poutres. Il est à noter qu'il n'y a pas ici beaucoup de renforcement vertical. C'est ce qu'on devrait faire. On a utilisé la poutre telle qu'elle était et refait la surface en y appliquant directement des composites.
Pour ce projet, nous avons aussi utilisé des renforcements qui ont été faits avec des matériaux conventionnels. Dans ce cas, il fallait épaissir la section d'environ deux pouces. Cela ajoute du poids à la structure en plus d'en changer le comportement global. L'utilisation des composites permet aussi une économie à ce niveau-là.
[Traduction]
M. Lorenc: Vous avez pu consulter la documentation qui a été distribuée. Nous avons aussi présenté des diapositives concernant au moins trois projets, et une quinzaine d'autres sont décrits dans la documentation. À mon avis, la question qu'il convient de se poser est la suivante: quels avantages tirerait le Canada de l'adoption des technologies d'ISIS Canada pour de nouvelles constructions et pour combattre la détérioration de l'infrastructure?
Selon nous, ces avantages sont multiples. Citons entre autres: le développement, en particulier pour nos jeunes, de nouvelles connaissances multidisciplinaires et hautement spécialisées dans le domaine de l'ingénierie, ainsi que dans l'industrie de la fabrication et de la construction; le développement au Canada de nouvelles techniques de pointe et de nouvelles connaissances technologiques destinées aux marchés intérieur et international; en outre, l'utilisation de la technologie efficace mise au point par ISIS Canada peut entraîner des économies allant de 50 à 60 p. 100 des coûts des réparations effectuées selon les techniques classiques et peut jusqu'à doubler la durée de vie de nouvelles structures. Cette durabilité se traduira par une réduction des coûts d'investissement et des frais d'entretien pour les propriétaires d'infrastructures.
Je vous donne un exemple. Le pont de la rue Maryland à Winnipeg fait l'objet de réparations à l'aide de la technologie de l'enveloppe. Avec les méthodes traditionnelles, ces réparations auraient coûté 10 millions de dollars à la ville de Winnipeg et exigé la fermeture du pont au cours des travaux de construction et de réfection. Grâce à la technologie de l'enveloppe, le pont peut rester ouvert, le coût des réparations est d'environ 5 à 6 millions de dollars, et les poutres réparées seront plus solides que lorsqu'elles ont été construites à l'origine et en mesure d'accepter une charge plus élevée que celle prévue à l'origine et tout cela, grâce à cette technologie «intelligente» de l'enveloppe que nous vous avons expliquée.
Cela peut donner naissance à de nouvelles industries canadiennes exportant des solutions canadiennes qui répondent aux besoins mondiaux en infrastructures, nous permettant ainsi d'accéder à un marché international émergent dont la valeur dépasse déjà 900 milliards de dollars.
Enfin, l'expertise technologique accumulée par ISIS Canada donne aux entreprises canadiennes une position de chef de file mondial et un avantage concurrentiel parce qu'elles ont le secret, les connaissances, la technologie et le savoir-faire.
[Français]
Mme Martel: De nos jours, le climat économique dans lequel nous évoluons nous oblige à faire de plus en plus avec de moins en moins. La plupart du temps, cette attitude nous pousse à créer des alliances novatrices. Bien que cette pratique ne soit pas très répandue au Canada, il existe plusieurs cas où la création de partenariats entre le secteur public et le secteur privé s'est avérée un succès et a permis de lever les fonds nécessaires pour réparer les routes.
Le rapport du Comité permanent traite de la route 407 en Ontario, dont on a parlé plus tôt, et de la route 104 en Nouvelle-Écosse à titre d'exemples démontrant qu'en réunissant les intérêts du secteur privé et du secteur public, il serait possible de construire un réseau routier national. En fait, nous pouvons reprendre ces exemples et introduire des innovations technologiques dans la formule. Comme par hasard, il existe déjà une formule canadienne qui s'est avérée un succès.
[Traduction]
M. Lorenc: Le Programme d'infrastructure Canada-Québec permet la mise en application de nouvelles technologies. Le Québec est la seule province à le faire et je l'en félicite. L'âme de ce programme est le Centre d'expertise et de recherche en infrastructures urbaines.
Le centre sert de catalyseur et d'intermédiaire pour la recherche et le développement dans la mise en application de nouvelles technologies. L'entente Canada-Québec en matière d'infrastructure a réservé 25 millions de dollars afin d'encourager les municipalités à étaler de nouveaux produits et de nouvelles techniques pour la remise en état de l'infrastructure.
Une politique routière nationale pourrait se donner les objectifs suivants: servir de banc d'essai à des nouveaux produits ou des techniques innovatrices devant servir à la remise en état des routes, ponts et autres ouvrages; démontrer l'efficacité et la rentabilité de nouveaux produits ou de nouvelles techniques qui ne sont pas encore généralisés; accélérer le transfert de la technologie aux entreprises canadiennes; réduire les coûts à moyen terme associés aux infrastructures; et, enfin, renforcer la compétitivité des entreprises canadiennes dans le nouveau marché mondial des infrastructures.
[Français]
Mme Martel: L'application de tels objectifs, provenant de l'entente Canada-Québec, a entraîné la création de projets-pilotes. Les techniques utilisées dans ces projets se sont mérité la confiance des concepteurs et des chefs décisionnels. Les partenaires du projet deviennent les propriétaires de technologies ou de produits innovateurs qui ont subi des effets sur le terrain, qui ont été évalués et qui répondent à une certaine norme. À titre de propriétaires de cette nouvelle technologie, ils deviennent également plus concurrentiels sur le marché.
[Traduction]
M. Lorenc: ISIS Canada possède la technologie et l'expertise voulues pour transformer le dilemme du Canada en matière d'infrastructures en une occasion d'affaires pour les entreprises canadiennes. Les Canadiens, au lieu d'être considérés comme des bûcherons et des porteurs d'eau, peuvent devenir le point de mire du monde entier pour des solutions technologies novatrices.
[Français]
Mme Martel: Le Canada sera le premier pays au monde à commercialiser cette nouvelle technologie et à en tirer profit, spécialement en termes de réhabilitation et de renforcement, ce qui n'est pas le cas ailleurs dans le monde. Permettons-nous de nous fixer l'objectif de nous emparer d'une petite portion de ce marché mondial, évalué à 900 millions de dollars, en appliquant cette nouvelle technologie à des projets locaux et en utilisant ces projets pour renforcer la réputation actuelle du Canada à l'étranger, réputation qui le place à l'avant-garde de cette nouvelle ère technologique.
Par exemple, si nous nous emparons d'à peine 20 p. 100 de ce marché international, soit 18 milliards de dollars, nous pourrons créer jusqu'à 198 000 nouveaux emplois de qualité pour les Canadiens. Ce chiffre ne tient pas compte des 220 000 nouveaux emplois que l'on s'attend à créer dans le secteur de la fabrication et du tourisme lors de la reconstruction de notre réseau routier national. Ces emplois sont le résultat d'un travail de collaboration entre le secteur privé et le secteur public dans la mise au point de nouvelles technologies pour le réseau routier national.
[Traduction]
M. Lorenc: Comme nous en avons fait la preuve, la technologie de ISIS Canada est disponible pour aider à répondre aux priorités du gouvernement et de la société. Oserais-je faire une comparaison entre le Arrow de Avro et la technologie de ISIS Canada? C'est vraiment une occasion en or que le Canada doit saisir. ISIS Canada propose en fait que sa technologie soit mise en valeur dans le réseau routier national; ce serait un moyen efficace de créer de nouveaux emplois pour les Canadiens, de susciter de nouveaux débouchés au Canada et à l'étranger et, surtout, d'offrir des solutions canadiennes à la crise mondiale en matière d'infrastructures.
Monsieur le président, cela met fin à notre exposé. Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de témoigner et nous sommes prêts à répondre à toutes les questions.
Le président: Merci, monsieur Lorenc.
Je vais accepter deux ou trois questions, mais je voudrais d'abord vérifier si j'ai bien compris vos calculs. Harry a dit que nous pourrions économiser 30 p. 100 si nous adoptions la voie des partenariats État-secteur privé, et que nous pouvons économiser encore 40 p. 100 en utilisant ces matériaux. Un peu plus et le programme serait gratuit.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Keyes, vous voulez intervenir.
M. Keyes: Merci, monsieur le président.
Merci pour votre Exposé. Êtes-vous allés jusqu'à calculer ce qu'il en coûterait pour, disons, construire un pont de certaines dimensions en utilisant les matériaux que vous nous avez montrés aujourd'hui?
M. Lorenc: En fait, la documentation que vous avez sous les yeux porte notamment sur des ponts.
M. Keyes: Je veux parler de ponts qui seraient construits à neuf.
M. Lorenc: C'est bien cela.
M. Keyes: D'accord.
M. Lorenc: Le pont de la rivière Salmon en Nouvelle-Écosse en est un exemple. C'était le premier tablier de pont ne comportant pas d'acier. Le pont Headingley, au Manitoba, sera le pont le plus «intelligent» au monde quand il sera terminé. Il est en construction actuellement. Deux technologies seront utilisées dans sa construction, la technologie existante et la technologie de ISIS Canada, ce qui permettra de la mettre à l'épreuve in situ.
Pour ce qui est des composants individuels, l'utilisation de matériaux composites avancés comporte les mêmes contraintes que pour toute autre nouveauté sur le marché, c'est-à-dire que ce sera plus coûteux tant que l'usage n'en sera pas généralisé. C'est tout à fait comme les petites calculatrices mises en marché il y a 20 ans par Texas Instruments, qui coûtaient au début 89 $ ou 100 $ et qui coûtent maintenant 10 $.
Il en coûte de 20 à 30 p. 100 de plus pour utiliser le renfort en fibre de carbone, mais ce n'est qu'une fraction du coût total du pont. De sorte que le coût total net, en utilisant les matériaux composites avancés, pourrait être de l'ordre de 10 à 15 p. 100. Le coût est donc plus élevé, mais il comporte un avantage, à savoir que les coûts d'entretien sur la durée de vie utile ne sont pas les mêmes. Grâce aux capteurs intégrés et à la transmission des signaux par fibre optique et satellite ou téléphone jusqu'au bureau de l'ingénieur, il n'est plus nécessaire pour ce dernier de se rendre sur place pour inspecter le pont. Il ou elle n'a qu'à taper le code du pont sur son terminal d'ordinateur, en posant des questions très précises: comment résiste-t-il au cisaillement, à l'humidité, à la circulation, au passage d'un certain camion.
Par conséquent, le coût réparti sur la durée de vie utile est beaucoup plus bas. On double la durée de vie d'un pont, qui est maintenant conçu pour durer 60 ans et non plus 30.
Le président: Merci, monsieur Lorenc et madame Martel. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui.
Je dois vous dire que juste avant Noël, on m'a demandé d'expliquer au premier ministre où en étaient les travaux du comité sur ce programme routier. Dans mon enthousiasme à l'égard des nouveaux matériaux, je me suis précipité dans son bureau armé de deux pièces d'armature. Vous savez à quel point les agents de la GRC peuvent s'affoler quand on se présente chez le premier ministre armé d'une barre de métal. Ils se sont tous précipités sur leurs sculptures de pierre.
Vous avez eu l'occasion de vous rencontrer pour le déjeuner, de discuter entre vous et de réfléchir un peu au problème. Il reste un volet de la discussion que nous allons entreprendre tout de suite, mais je voudrais vous demander à tous de focaliser votre attention sur une question assez générale. Dans un peu moins de deux semaines, le Comité des transports se réunira. Nous mettrons la dernière main au rapport, dans lequel nous ferons des recommandations précises au gouvernement, et nous le ferons imprimer pour le déposer à la Chambre des communes. Quelles devraient-être ces recommandations?
Pour nos aider à asseoir notre réflexion sur une plate-forme plus solide, pour ne pas dire en béton - je pense à vous, monsieur Redfern - , donnons maintenant la parole au Bureau du vérificateur général. Je me réjouis particulièrement que M. Desautel ait accepté volontiers la participation de son bureau à cet exercice. Pour traduire dans la réalité la vision que Moya Greene vient de nous exposer, il faut absolument s'assurer de bénéficier en tout temps de l'appui de ceux qui surveillent les cordons de la bourse, en plus des politiciens.
Monsieur Rattray.
M. Rattray: Monsieur le président, au nom du vérificateur général du Canada, M. Denis Desautel, je remercie le comité de donner à notre bureau la possibilité de participer aux discussions de cette table ronde sur les options de financement pour un programme de réseau routier national. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Hugh McRoberts, de notre bureau, qui est directeur principal chargé des vérifications dans le secteur des transports.
[Français]
L'étude de la politique sur le réseau routier national indique qu'il faudra des milliards de dollars pour financer la construction de routes au pays. Le gouvernement examine de nouveaux moyens d'y parvenir tout en tenant compte des contraintes financières actuelles. Les vérificateurs législatifs s'intéressent particulièrement à la façon dont les gouvernements gèrent ces importantes responsabilités contractuelles de même que les besoins financiers connexes.
Au cours des prochaines minutes, je vous entretiendrai brièvement d'une vérification récente de notre bureau, qui a un lien très direct avec le document de travail de décembre 1996 préparé pour le comité.
[Traduction]
Je vais vous entretenir particulièrement de la troisième option de financement d'un programme de réseau routier national, telle qu'elle a été présentée dans le document de travail, c'est-à-dire un modèle de partenariat en matière de routes entre les secteurs public et privé canadiens.
Le chapitre 15 du Rapport du vérificateur général du Canada, déposé à la Chambre des communes en octobre 1995, faisait mention de plusieurs aspects de la gestion par le gouvernement fédéral du projet de raccordement dans le détroit de Northumberland, qu'on appelle maintenant Pont de la Confédération. Chaque projet de construction État-secteur privé comportera ses propres caractéristiques, mais les questions traitées dans cette vérification portent sur bon nombre des mécanismes de contrôle essentiels que les corps législatifs et les gouvernements voudront voir en place pour s'assurer que l'on se prémunit adéquatement contre les risques.
Pour s'acquitter de ses engagements constitutionnels envers l'Île-du-Prince-Édouard, le gouvernement fédéral a décidé de construire un pont au-dessus du détroit de Northumberland. C'était là, croyait-on, un lien permanent plus efficace avec l'île et moins coûteux que la subvention alors versée au service de traversiers.
En octobre 1993, le gouvernement fédéral a signé une série d'accords pour construire un pont de 13 kilomètres. Le pont aura une vie utile de 100 ans, sans travaux de réfection majeurs. Un consortium du secteur privé était le maître d'oeuvre du projet. Le promoteur avait obtenu le marché pour concevoir, construire, exploiter et entretenir le pont pendant 35 ans. Le promoteur est actuellement propriétaire de l'installation, mais il s'agit d'un intérêt à bail. Cette période terminée, le Canada deviendra propriétaire du pont.
Le gouvernement devait veiller à ce que les six caractéristiques importantes soient bien comprises et respectées. La première de ces six caractéristiques était le rendement. L'une des tâches les plus difficiles était de définir des caractéristiques de rendement pertinentes. On jugeait aussi essentiel de régler en premier lieu la question des exigences de rendement c'est-à-dire ingénierie, exploitation et entretien, environnement et gestion, et de demander des soumissions scellées seulement après que les derniers soumissionnaires aient satisfait aux critères de chacune de ces exigences.
La deuxième caractéristique était la concurrence. Le gouvernement souhaitait promouvoir un processus de concurrence loyal, avec au moins trois promoteurs participant à l'étape finale des soumissions. Il désirait surtout que les candidats retenus proposent des prix concurrentiels.
La troisième caractéristique était la subvention irrévocable à date fixe. Le gouvernement a exigé des garanties exhaustives du promoteur en contrepartie de l'engagement irrévocable qu'il prenait d'effectuer le versement de la subvention.
La quatrième caractéristique était le principe du promoteur exclusif. Le promoteur retenu devait intégrer les spécifications, le financement et la construction, puis assurer l'entretien et l'exploitation du pont pendant 35 ans, conformément au plan de gestion environnementale approuvé. Ces exigences encourageraient le promoteur à optimiser la durée de vie du pont et, par conséquent, permettraient de satisfaire au «concept du propriétaire prudent», c'est-à-dire lorsque le constructeur et l'exploitant sont la même personne.
La cinquième caractéristique était la protection de l'environnement. Dès le début du projet, cette exigence a fait partie des principaux critères. Le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement devait s'appliquer et une vaste consultation publique devait en assurer la transparence.
À cette fin, le gouvernement devait prévoir des processus appropriés ainsi qu'une structure élaborée pour les accords. Cela a pris beaucoup de temps et a été très coûteux pour les deux parties. Mais, comme M. Swain l'a dit tout à l'heure, c'est une étape essentielle dans un processus d'une telle ampleur. Nous avons décidé d'effectuer notre vérification dans un délai raisonnable au début du processus. Ainsi, nous pourrions informer le Parlement le plus tôt possible de tout problème potentiel important et formuler des opinions sur la gestion des divers aspects du projet. Dans le cadre de notre vérification, nous avons tenté de déterminer si l'on avait accordé aux aspects économiques la diligence voulue pendant les étapes de planification et de mise en oeuvre du projet, jusqu'en juillet 1995. Nous avons également évalué le cadre général de surveillance et de responsabilisation du projet.
Nous nous sommes penchés sur les questions liées à l'approvisionnement, aux analyses financières, à la fiscalité, à l'environnement et aux rapports présentés au Parlement. Plus précisément, nous avons cherché à déterminer si: les engagements du gouvernement fédéral étaient clairement énoncés dans les accords signés avec le promoteur et les autres participants; le processus d'approvisionnement avait été géré correctement; les garanties et les autres mesures prises protégeaient de façon adéquate les intérêts de l'État et ceux des contribuables; les exigences en matière d'environnement étaient respectées; et, enfin, si l'information sur la gestion, les finances et les opérations était contrôlée et présentée au Parlement de façon appropriée.
Certains autres secteurs auraient aussi pu être vérifiés, mais pour diverses raisons, nous avons décidé de ne pas les inclure dans la vérification initiale. Nous n'avons pas, entre autres, examiné l'information financière portant sur la période d'exploitation de 35 ans du pont, ni certains programmes ou activités prévus dans les accords, notamment l'indemnisation des pêcheurs, les retombées régionales, et l'entente fédérale-provinciale. Nous avons également exclu les aspects techniques de la conception et de la construction du pont. Cette responsabilité incombait à l'ingénieur indépendant retenu, conformément aux accords passés avec lui.
Nos travaux nous ont permis de tirer certaines conclusions que nous avons présentées au Parlement, ainsi qu'aux autres intervenants clés du projet.
Certains éléments positifs ont été observés, par exemple: le processus d'approvisionnement suivi par le gouvernement était transparent et raisonnable; les garanties étaient exhaustives et fournissaient une protection adéquate à l'État; les décisions anticipées en matière d'impôt, rendues à la demande du consortium, n'étaient pas contraires à l'esprit de la Loi de l'impôt sur le revenu; et les exigences relatives au processus d'évaluation et d'examens en matière d'environnement avaient été satisfaites.
Nous avons aussi conclu que le projet de raccordement comportait des améliorations manifestes par rapport aux mégaprojets antérieurs que nous avions vérifiés, tout particulièrement en ce qui a trait à la protection de l'État contre les dépassements de coûts potentiels et le retrait de l'appui des entrepreneurs du secteur privé. En fait, peu de temps après la publication de notre rapport, l'un des partenaires du consortium s'est retiré et les garanties se sont révélées suffisantes pour atténuer tout effet négatif de ce retrait.
Cependant, nous avons aussi conclu que la subvention annuelle au transport que le gouvernement avait convenu de payer pour financer le projet se situait à la limite supérieure du montant prévu de la subvention alors accordée au service de traversiers. En outre, le Parlement recevait peu d'information sur la gestion du projet.
L'une des plus grandes préoccupations notées portait sur le financement du projet. Les dispositions hors bilan complexes, présentées par le biais d'une société d'État provinciale, étaient un moyen inhabituel, plus coûteux que l'emprunt direct auquel le gouvernement avait habituellement recours pour acquérir des infrastructures. Nous avons fait remarquer que le gouvernement devrait examiner attentivement les coûts et les avantages du recours à ce mode de financement pour tout projet futur.
De plus, nous avons indiqué que les 661 millions de dollars dus aux obligataires du secteur privé pour financer la construction du pont ne figuraient pas au bilan du gouvernement fédéral. Après s'être penché sur la question, le gouvernement a par la suite décidé de signaler son obligation à l'égard de ce projet dans les comptes publics de 1994-1995. Le vérificateur général a fait plusieurs observations sur la comptabilité du gouvernement pour de tels arrangements de financement, et j'espère avoir le temps plus tard cet après-midi de revenir sur cette question et de répondre aux propos tenus ce matin par M. Cullen.
[Français]
Nous continuons d'observer l'évolution du projet et nous ferons une vérification de suivi après l'ouverture officielle du pont en mai 1997 et le début de l'opération de péage.
Je crois que certains des principaux points que j'ai illustrés, qui ont été couverts par notre vérification du projet de raccordement permanent, mettent en lumière le genre de questions qui intéresseront les vérificateurs législatifs au moment de l'examen de tout nouvel accord de partenariat en matière de routes entre les secteurs public et privé canadiens.
[Traduction]
Nous nous ferons un plaisir de poursuivre la discussion cet après-midi sur l'un ou l'autre des points traitant de ce projet ou du financement au moyen de dispositions hors bilan. J'aimerais pouvoir y revenir cet après-midi.
Le président: Merci beaucoup monsieur Rattray.
Brian, peut-être pourriez-vous commencer.
M. Hunt: Merci, monsieur le président.
Je voulais soulever quelques questions sur la discussion de ce matin. Depuis un an, nous faisons campagne pour obtenir que l'on consacre deux cents le litre de la taxe d'accise fédérale au réseau routier national. C'est la solution que nous avons trouvée pour obtenir que le gouvernement fédéral assume un rôle de chef de file et prenne un engagement.
Nous avons notamment parlé ce matin de projets durables. Je ne comprends pas exactement comment tout cela va fonctionner, en ce sens que nous demandons un projet durable sur une période de cinq à dix ans. Les péages routiers peuvent convenir dans certaines régions. Ils ne conviennent pas dans la totalité du réseau routier national.
Il me semble que si le gouvernement fédéral... j'ai entendu les propos tenus tout à l'heure par M. Anderson et M. Martin au sujet de notre proposition de prélèvement de deux cents. Si cela n'est pas jugé acceptable, le gouvernement fédéral devra à un moment donné prendre les choses en main et puiser dans le Trésor pour consacrer des fonds à ce secteur.
Si l'on cherche des solutions de rechange et de nouvelles options de financement, nous espérons que le problème ne sera pas aussi aigu chaque année, mais que sur une période de dix ans, on trouvera les fonds quelque part. Quand on fait appel au secteur privé et qu'on lui demande d'investir dans un tronçon de route, on ne peut pas changer d'idée au moment du budget et dire, désolé, mais nous devrons reporter le versement du prêt de deux ou trois ans, faute d'argent.
Je ne vois donc pas très bien comment on peut se passer d'un engagement de fonds à long terme. Si vous n'aimez pas la solution des deux cents, je crois qu'il faudra à un moment donné puiser dans le Trésor et il faut un engagement ferme sur au moins 10 ans pour mener à bien les travaux.
Le président: Merci, monsieur Hunt. Monsieur Thompson.
M. Gordon Thompson (vice-président et directeur, Newcourt Credit Group Inc.): C'est la première fois que j'ai l'occasion de prendre la parole aujourd'hui, monsieur le président, et je veux vous remercier de nous avoir invités.
Je tiens à apporter une précision sur l'anecdote que vous avez racontée au sujet de Warren et moi-même, quand nous vous avons rendu visite à Winnipeg. C'est moi, en fait, qui a dit en quittant votre bureau: «En passant, vous savez que nous pouvons financer la totalité de la route transcanadienne». En sortant du bureau, Warren m'a dit: «Pourquoi diable as-tu dit cela?» Et je lui ai répondu: «Je pense que ce type ne nous écoutait pas».
Or, je sais maintenant que vous nous écoutiez.
Des voix: Oh, oh!
M. Thompson: Je vous remercie également de m'avoir présenté, car certains croyaient peut-être que je remplaçais Donald Macdonald. Je ne possède de noeud papillon et je ne pense pas qu'il m'aurait choisi pour le remplacer aujourd'hui.
Je voudrais aborder rapidement deux points qui traitent des questions soulevées dans le document. En fait, il est regrettable que Donald Macdonald ne soit pas ici aujourd'hui, parce que plusieurs intervenants ont soulevé des questions intéressantes et j'espère que nous aurons la chance d'y revenir plus tard.
Comme vous le savez, Donald Macdonald est le président du Conseil canadien des sociétés publiques-privées. Nous sommes membres de ce conseil. Beaucoup de débats intéressants ont lieu au conseil, de même que dans tout le Canada, au sujet des options qui s'offrent aux gouvernements en ce qui concerne non seulement les routes, mais aussi les installations de traitement d'eau, les communications, la privatisation des installations hydroélectriques, etc. La question de savoir comment financer tout cela et qui va payer est exactement le même débat que celui qui se déroule à votre comité. Il y a cependant une question qui est soulevée fréquemment - nous avons d'ailleurs assisté hier à une conférence sur l'électricité, où Donald Macdonald était l'un des conférenciers - et qui représente un problème très épineux dans le secteur de l'hydroélectricité, c'est le problème des actifs et des dettes qui sont «orphelins».
C'est pourquoi j'étais content d'entendre quelqu'un parler ce matin du réseau routier comme d'un actif national. C'est bien beau de construire une route à péage à Toronto, mais qu'arrive-t-il de Kapuskasing? Partout au Canada, les responsables de la production d'hydroélectricité ont le même problème. On peut en dire autant des responsables des installations de traitement de l'eau. Si l'on fait appel au secteur privé et que le seul objectif poursuivi est de privatiser l'activité, alors il est inévitable que l'on se retrouvera avec des actifs orphelins, parce que le secteur privé ne peut pas prendre à sa charge les éléments d'actif qui ne sont pas rentables et que seul le gouvernement peut gérer.
Le problème des actifs orphelins en matière de route est donc très important et les membres du conseil et d'autres intervenants dans le domaine des partenariats État-secteur privé en ont discuté. Vous n'êtes pas les seuls à vous colleter avec ce problème.
Je pense que Donald aurait pu vous faire part aujourd'hui - et j'espère que vous aurez la chance de lui parler avant de rédiger votre rapport - de certaines solutions novatrices et vous décrire comment d'autres secteurs de l'infrastructure traitent ce problème des actifs orphelins.
Mon deuxième point, qui est plus en rapport avec mon rôle à Newcourt, est la question du financement privé. Je sais que Warren veut ajouter quelques mots à ce que Moya a dit, et je ne vais donc pas lui couper l'herbe sous le pied. Mais je suis d'avis, nous sommes d'avis que lorsque le gouvernement envisage des partenariats État-secteur privé, à supposer que telle est bien la solution recommandée pour la construction d'un réseau routier national, je voudrais faire une mise en garde au comité, ou du moins signaler un problème, à savoir que si vous examinez les partenariats État-secteur privé qui ont été couronnés de succès dans d'autres pays, vous constaterez qu'il y a une différence très nette par rapport à ce qui a été fait au Canada...
Il existe au Canada certains «partenariats État-secteur privé», notamment le pont de l'Île-du-Prince-Édouard dont nous venons de parler et la route 407 en Ontario. Ce sont des «mégaprojets», qui vont coûter des milliards de dollars. À notre avis, ni l'un ni l'autre de ces projets n'est un véritable partenariat État-secteur privé, parce qu'en fin de compte, comme on vient de le dire, c'est le gouvernement qui assume la dette. Il n'y a pas eu partage équitable du risque. Si personne ne va à Île-du-Prince-Édouard, si personne n'emprunte la route 407, qui va payer? Les contribuables du Canada.
Par conséquent, quand vous vous mettrez à la tâche pour concevoir un véritable partenariat État-secteur privé pour la construction d'un réseau routier national, il faudra s'assurer qu'un financement privé suffisant sera prévu dans ce processus. Autrement, rien n'a changé. Tout ce que vous avez fait, c'est d'accorder un contrat pour la conception et la construction, le gouvernement assumant le risque.
J'espère qu'on pourra revenir là-dessus cet après-midi plus en détail, parce qu'il y aurait moyen de structurer le financement de manière que vous, messieurs, puissiez dormir sur vos deux oreilles, des arrangements financiers qui sont vraiment hors bilan, hors crédit, de manière que les partenaires du secteur privé assument la totalité du risque, etc.
Le président: Je vous remercie d'avoir précisé les propos de tout à l'heure, monsieur Thompson.
Monsieur Facette.
M. Facette: Merci, monsieur le président.
Je tiens d'abord à dire publiquement, en réponse aux propos tenus aujourd'hui par Mme Moya Greene, qu'il ne m'a jamais semblé qu'une somme de 250 millions de dollars comme une somme énorme, pour reprendre ses propres termes, quand il s'agit du réseau routier national. J'ose dire que 250 millions de dollars pour le réseau routier national, ce n'est pas beaucoup d'argent. Si l'on tient compte de tous les travaux à faire, ce n'est pas beaucoup.
Or, d'après les derniers renseignements que je possède, il semble bien que les 250 millions ne sont pas totalement consacrés au réseau routier national. Soyons bien clairs là-dessus. Une grande part de cet argent provient de huit ententes différentes signées par Transports Canada avec les provinces. Une partie de cet argent est consacrée aux parcs, une autre partie sert à des projets d'embellissement. La somme n'est pas entièrement consacrée aux routes.
On dépense ces 250 millions de dollars... Voyons ce qui se passera au cours des deux prochaines années, après l'année financière 1997-1998. Les énoncés financiers de Transports Canada semblent indiquer qu'il y aura une baisse de 60 p. 100 des contributions fédérales pour les routes. Ces huit ententes viennent à échéance.
Ainsi, monsieur le président, les décisions que vous prendrez peut-être et les recommandations que vous ferez à la Chambre des communes dans deux ou trois semaines sont d'une importance critique. Nous n'avons pas cinq ou six ans à consacrer à cela. Tout au plus, nous avons deux ans pour régler le problème.
Le président: Merci, monsieur Facette. Je dois dire, toutefois, que si l'on prend 100 millions de dollars ici et 100 millions de dollars là, l'on peut arriver assez rapidement à une somme appréciable.
M. Facette: Si c'est dépensé à bon escient, en effet.
Le président: Ce ne sont pas des miettes.
Maintenant, revenons à l'autre Thomson ou Thompson.
M. Thomson: Mon intervention fait suite aux propos tenus par les représentants du vérificateur général. C'est la question de la dette avec ou sans recours. Cela touche également, en partie tout au moins, à l'idée de revenir aux routes à péage dans les régions rurales, en s'inspirant de l'expérience de la route 104.
C'était un exemple d'une route empruntée par environ 6 000 véhicules par jour. Le total observé était d'environ 4 500 voitures et 1 500 camions. Nous avons été en mesure de structurer cette dette de manière qu'elle soit hors crédit et hors bilan.
Ce qu'il faut absolument comprendre dans tout cela, c'est que ce sont les agences de crédit qui déterminent en fin de compte à combien s'élève la dette totale du gouvernement. Il importe peu que l'on affirme que c'est hors crédit, ou le contraire. Si les agences de crédit disent que c'est à crédit, la somme en question fera partie de l'évaluation totale de la dette et aura une incidence sur la cote de crédit du gouvernement.
Dans le cas de la Nouvelle-Écosse, les agences de cotation participaient aux discussions, avec des représentants du bureau de leur propre vérificateur général, pour vérifier comment, une fois la route construite, se présenteraient les comptes. Ils ont vérifié tout au long; quand cela a été terminé, Moody's et Standard & Poor's ont confirmé que la dette était sans recours pour la province et hors bilan, et c'est ce que la province voulait, car ils avaient une cote de crédit triple B. En cas de rétrogradation, elle ne serait plus dans la catégorie investissable et le coût des capitaux aurait augmenté de façon phénoménale.
Les provinces ayant procédé de cette façon, les agences d'évaluation du crédit ont, en fait, donné leur satisfecit à la dette provinciale et ont même augmenté sa cote de crédit, ce qui a eu pour effet de faire baisser le coût des nouveaux emprunts pour la Nouvelle-Écosse. C'est là effectivement l'objectif, quand on transfère le risque au secteur privé.
Autre corollaire, la durée de la dette, facteur important quand on dispose de sommes limitées, car le coût du service de 250 millions de dollars, par exemple, sur une durée de 30 ans, peut devenir considérable, sur la base de la valeur actuelle. Dans tout partenariat État-secteur privé, il faut donc tenir compte de la durée du financement.
Le Newcourt Credit Group s'adresse en particulier aux compagnies d'assurance-vie, qui constituent l'un des plus grands acheteurs d'emprunts à terme, dans la catégorie de 15 à 30 ans de durée. C'est leur spécialité, car les rentes viagères, pensions et produits de l'assurance-vie que ces compagnies vendent leur permettent de contracter ce genre de dette à long terme.
C'est ainsi qu'un projet comme le pont Charles Wood, au Manitoba, a été financé par une compagnie d'assurances, de même que la route 104. C'est donc là que dans certains cas, vous trouvez à financer votre dette sur 30 ans, voire sur 50 ans, pour le financement à long terme, ce qui gonfle considérablement ces petites sommes annuelles en valeurs actualisées.
Le président: Je vous remercie, monsieur Thomson.
Je vais donner la parole à M. Rattray. Avez-vous un commentaire à faire sur la dette du gouvernement hors bilan, ou en bilan?
M. Rattray: M. Thomson a raison, monsieur le président.
Mais pour revenir sur un point du projet de raccordement permanent, le gouvernement n'a, au début, voulu que transférer tous les risques et le financement au secteur privé. L'offre du financement n'ayant toutefois pas été accueillie comme prévu, il a fallu revenir à la table de négociation avec le gouvernement fédéral en demandant que nous soit garanti, pour l'avenir, ce flux de recettes, afin de placer les obligations à un taux favorable. Le gouvernement fédéral a donc dû décider ce qu'il ferait pour financer cet emprunt.
Le président: Je crois savoir, monsieur Thomson, qu'en ce qui concerne le projet de la route 102, on disposait d'une somme considérable en capitaux anciens, traditionnels, ce qui a diminué la somme à emprunter.
M. Thomson: C'est exact. Pour la route 104, il y a avait des capitaux de risque, provenant du programme d'améliorations routières stratégiques. Les gouvernements fédéral et provincial engageaient 26 millions de dollars en avril 1996 et 29 millions de dollars en avril 1998, soit un total de 55 millions de dollars; il leur fallait encore trouver le reste, mais ils tenaient à ce que cet argent soit sous forme de crédit sans recours.
Le président: Je voudrais vous signaler que nous n'avons toujours pas encore résolu la question de la route de Wawa à Winnipeg. J'aime en effet rappeler l'existence de Winnipeg, mais - et c'est plus important encore - il semblerait que qui peut le plus peut le moins. Le problème consiste en partie à trouver le moyen de financer également les routes longues, coûteuses et à faible volume de trafic.
Je vais demander à M. Beck d'étoffer cela.
M. Beck: J'allais précisément aborder ce sujet, en faisant remarquer que les situations ne sont pas parfaitement tranchées, qu'il est impossible de dire d'un projet qu'il est faisable et d'un autre qu'il ne l'est pas. Avec la notion de partenariat État-secteur privé, on détermine le niveau de faisabilité et on décide si la participation ou l'apport du gouvernement pourrait s'avérer nécessaire. Il peut y avoir d'autres sources de revenus - comme on le disait tout à l'heure - qui ne sont pas liées au péage, mais ce seront là toutes sortes de nuances intermédiaires. C'est grâce à la coopération entre le groupe du secteur privé et l'organisme gouvernemental qui sera constitué pour résoudre le problème que nous pourrons décider si l'apport à demander au gouvernement sera de 26 millions ou de 29 millions, de 55 millions ou de 75 millions de dollars.
Dans le cas de la route de Wawa à Winnipeg, il faudra arriver à fixer la contribution du gouvernement, qui sera inférieure à la contribution totale, le reste étant assumé par le secteur privé, tant en matière de réduction des coûts par l'efficience, etc. que par la création de recettes par péage ou péage fantôme. Tout problème peut toujours trouver une solution.
Le président: Je vous remercie, monsieur Beck. Il se peut que je me trompe, et je vous prie, en ce cas, de me le dire. Ce qui me frappe, c'est certes l'importance de savoir si la dette du gouvernement sera sur ou hors bilan, ce qui constitue un avantage important, mais ce n'est pas l'avantage essentiel, qui réside plutôt dans les diverses façons de construire les routes, de les financer et d'investir à cet effet.
Monsieur Bélanger.
M. Bélanger: Monsieur le président, ce que j'ai à dire s'écarte quelque peu de la dernière partie de la discussion, mais certains membres du comité m'ont demandé de répondre à deux affirmations qui sont souvent faites devant le comité, l'une étant, comme le disait tout à l'heure M. Crête, qu'un camion fait quinze fois plus de dégâts qu'une automobile.
Le président: Je voyais venir cela.
M. Bélanger: L'autre question porte sur la contribution du secteur du camionnage à la construction et à l'entretien des routes.
En ce qui concerne la première question, c'est une affirmation qui provient d'une étude effectuée aux États-Unis, il y a de nombreuses années, par des fonctionnaires de l'American Association of State Highway and Transportation. Se penchant sur la question d'impact sur la chaussée, cette étude attribue une certaine valeur à l'impact d'un véhicule à essieu simple, valeur qu'on a appelée charge équivalant à un essieu simple. Si vous calculez ces valeurs et comparez un camion à essieux en tandem, ou un camion gros porteur à cinq essieux, à une voiture automobile, l'équivalence est de 9 600 à un. Ceci n'a rien à voir avec les dégâts. C'était là le chiffre original, mais il a été utilisé par diverses personnes, et ce faisant les nombres ont tendance à changer. J'ai entendu mentionner jusqu'à 42, mais le chiffre original était de 9 600 à un. Mais ceci ne porte pas sur les dégâts, c'est un simple calcul.
Avec le même raisonnement on interdirait le port de talons hauts, par exemple, parce que l'impact par pouce carré serait plusieurs milliers de fois celui d'un camion, mais la question n'est pas pertinente, et il est tout aussi peu pertinent de dire qu'un camion cause tant et tant de fois plus de dégâts qu'une voiture.
Au Canada, si les normes de construction de routes sont respectées ainsi que le règlement sur les charges ou le poids des véhicules, la distance entre les essieux, les poids et autres, un camion - à condition donc que toutes ces normes soient respectées - ne cause pas plus de dégâts à une route qu'une voiture. On se sert de ces chiffres sans comprendre vraiment leur portée, à mauvais escient.
La seconde déclaration porte sur la contribution du secteur du camionnage aux routes: ce secteur paie en impôt 14 p. 100 de son revenu brut, alors que le secteur industriel en paie 4,9 p. 100. À quoi est due la différence?
Par ailleurs, un camion de transport de ligne paye environ 40 000 $ par an pour le droit de circuler sur les routes. Le fait que cet argent va au bien-être social et autres, n'est pas tout à fait pertinent, c'est la contribution effective à verser. C'est pourquoi, dans certaines régions à trafic intense, c'est le secteur du camionnage qui entretient l'infrastructure, ce qui n'est pas le cas, bien entendu, dans les régions à moindre trafic, ce qui nous ramène à la situation de la route de Wawa à Winnipeg.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: On ne saurait trop souvent revenir sur cette question-là. Je vais également essayer de trouver une réponse à votre question concernant le secteur industriel.
Avant de donner la parole à l'intervenant suivant, j'aimerais faire une remarque: dans l'invitation à cette séance, on vous a dit que celle-ci durerait toute la journée, sans limite imposée. Le greffier, comme il en a coutume, me laisse toujours une certaine latitude, afin d'éviter qu'une intervention ne m'écarte de ce que j'essaye de faire. La feuille de convocation vous indique donc que la séance durera de 9 heures à 17 heures, mais compte tenu du fait que je n'ai pas été saisi de nouveaux documents, compte tenu également du fait que certains membres et témoins m'ont fait savoir que s'ils pouvaient partir à 16 heures, cela leur permettrait de prendre un vol de fin d'après-midi, je vais donc, pour les obliger, clore la séance à 16 heures.
J'aimerais maintenant obtenir certaines réponses, et à cette fin, j'insisterai peut-être un peu plus que je ne le fais d'ordinaire. Je vais demander aux intervenants de répondre de façon aussi concise que possible. Comme le savent très bien les membres réguliers du comité, nos délais sont toujours respectés. Je vous prie donc de m'excuser si je vous bouscule quelque peu.
J'ai sur ma liste Moya, suivie de Roy Cullen. Il y a ensuite place pour d'autres, mais je sais que M. Rafferty brûle d'intervenir et de nous parler des péages fantômes.
Moya, vous avez la parole.
Mme Greene: Monsieur le président, je voudrais étayer un argument et en préciser un autre, relatif à ce que moi-même et d'autres avons dit ce matin.
Si les partenariats État-secteur privé fonctionnent et donnent satisfaction, ce n'est pas parce qu'ils dispensent le gouvernement de payer pour l'infrastructure routière, bien au contraire. Ils fonctionnent et donnent satisfaction parce qu'ils permettent au gouvernement, avec les même ressources, de construire davantage de routes, et des routes meilleures, sur un laps de temps plus court, si le gouvernement procède judicieusement.
Quant à la seconde question, celle de la durée des prêts, qui a été mise au point par Warren, il me semble ridicule à qui que ce soit de penser que le gouvernement va engager des dépenses pendant deux ans pour les routes, et s'en tenir là. Ce n'est pas ainsi que se sont passées les choses. Le gouvernement n'annonce sa contribution que pour deux ans, c'est là le problème. S'il déclarait, dans une année, qu'il s'engage à dépenser une certaine somme chaque année, mais pendant 30 ans, nous disposerions d'un financement considérable, n'est-ce pas?
M. Thomson: C'est exact.
Mme Greene: Il est donc vrai que cette entente ne vaut que pour deux ans, en théorie, mais toute une série de ces ententes sont d'une durée de 18 mois ou de deux ans, et si l'on revient assez longtemps en arrière, on peut constater qu'à aucun moment, cette somme annuelle n'a fait défaut.
Enfin, il n'y a rien à redire aux crédits gouvernementaux. Je suis heureuse que nous ayons mis au point toute cette question de dette hors bilan: si le gouvernement du jour peut s'assurer que ces partenariats ne portent pas préjudice à son crédit, la seule voie à suivre, c'est celle de la Nouvelle-Écosse, mais dans bien des cas, la cote de solvabilité du gouvernement est bonne et le fait de s'engager ou de ne pas s'engager dans un projet n'aura aucun effet sur elle. Il y a tant d'autres facteurs qui jouent sur la cote de solvabilité du gouvernement, dans son ensemble.
Il n'y a pas de mal à ce que le gouvernement, avec sa cote de solvabilité, finance de temps en temps ces projets, en particulier un projet comme la route de Wawa à Winnipeg. C'est exactement ce qui se passe actuellement, l'argent est emprunté, je ne sais pas ce que sera le déficit cette année, probablement de l'ordre de 15 à 16 milliards de dollars. L'argent est emprunté et transféré aux ministères des transports, sur la base de la cote de solvabilité du gouvernement. Je crois que nous ne devrions donc pas ressasser cette question.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie. Tout cela pourrait s'intituler: «De Wawa à Winnipeg», ce qui me plaît beaucoup.
M. Beck: Quelle est la distance de Wawa à Winnipeg?
Le président: Considérable.
Une voix: Plus ou moins.
Une voix: Cela dépend d'où souffle le vent.
Le président: Monsieur Cullen.
M. Cullen: Je vous remercie, monsieur le président.
Nous avons abordé beaucoup de choses et la discussion m'a paru très fructueuse, mais il y a plusieurs questions que j'aimerais examiner plus en détail.
M. Beck, dans ses propos encourageants, disait que nous pourrions - si nous présentons les questions de certaines façons - nous adresser au marché et voir ce qui s'y offre. Il pourrait être intéressant d'obtenir tous les avantages possibles, pour en faire bénéficier le secteur privé. Nous devrions donc, en toute franchise, consacrer un peu de temps, au début, à présenter la question sous une forme attrayante, puis à consulter les marchés et voir ce qui en résultera.
Je voulais simplement remercier M. Bélanger de ses commentaires. Toute cette question de recouvrement des coûts ne devrait pas se limiter simplement au péage, et il est possible de dorer la pilule. Les péages font certainement partie de ce scénario, ou pourraient en être, mais si nous examinons la question de recouvrement des coûts, nous devrions faire preuve de toute l'imagination possible, sans nous limiter simplement au péage.
Quant aux péages fantômes - M. Rafferty pourra peut-être nous en dire davantage là-dessus - , cela me paraît un outil utile, mais en dernier ressort c'est toujours le gouvernement qui paie, il ne faudrait pas le perdre de vue.
Je voudrais préciser les chiffres à ce propos. Mme Greene parlait de 3 à 4 milliards de dollars, mais dans notre rapport il est question de 13 à 18 millions de dollars. Il s'agit là d'une somme considérable, de même d'ailleurs que 3 à 5 milliards de dollars. Je me demande donc si une somme annuelle de 280 millions suffira. Le commentaire de tout à l'heure était juste.
Vous pensiez sans doute, madame Green, à obtenir cette somme par emprunt, en vertu d'un partenariat intéressant. Cette idée n'est pas dénuée d'intérêt.
Quant à ce que disait le vérificateur général, et aux commentaires qui ont suivi, j'en ai conclu qu'en faisant preuve d'imagination nous pouvons mettre en place des scénarios hors bilan qui fonctionnent. La question clé est celle du non recours, entre autres, et de capitaux à un coût compétitif. Newcourt en a fait la preuve, je pense.
Le vérificateur général pourrait peut-être nous parler de l'amortissement des coûts: est-ce faisable, pour le gouvernement fédéral, et dans l'affirmative, va-t-on avoir recours à une organisation non gouvernementale quasi autonome, à une société d'État ou à une sorte d'organisme national?
Ceci dit, plus nous pouvons tirer du rapport, mieux cela vaudra.
Le président: Ciel, nous revoilà aux organisations non gouvernementales quasi autonomes.
Monsieur Rattray, avez-vous à faire un commentaire là-dessus?
M. Rattray: Oui, monsieur le président, il sera bref.
Avec la méthode actuelle de comptabilité publique, mais courante, toute infrastructure acquise est imputée directement au déficit de l'année pendant laquelle les fonds ont été dépensés. C'est là la pratique courante.
Dans le budget de février 1995, le ministre des Finances a annoncé l'intention du gouvernement d'adopter la comptabilité d'exercice pour toutes les opérations. En tant que bureau de vérification, nous avons été très heureux de l'apprendre, parce que cela signifie essentiellement que le gouvernement, à l'instar d'autres gouvernements, s'apprête à adopter de plus en plus des principes comptables généralement reconnus. Cela signifie inscrire un actif au bilan et l'amortir sur la durée de vie de l'actif.
Je crois que cela se fera de notre vivant. Comme conséquence de notre vérification, le raccordement permanent de l'Ile-du-Prince-Édouard est devenu un actif inscrit au bilan, et il est imputé à l'exercice contre le déficit égal au montant des paiements de subventions annuelles garantis comme paiement aux obligataires. Alors, en fait, cela se produit actuellement.
Nous applaudissons à cette intention du gouvernement de passer à la comptabilité d'exercice pour toutes les opérations et d'adopter des principes comptables généralement reconnus. Cela signifie que les arrangements faits selon les options de financement dont il est question aujourd'hui, s'ils résultaient en l'acquisition d'un actif dans une période très rapprochée, feraient en sorte que cet actif ne se répercute pas très rapidement sur le déficit, mais serait amorti ou déprécié dans la même mesure que dans le secteur privé.
Le président: Merci, monsieur Rattray.
Monsieur Rafferty, vos dons d'éloquence peuvent-ils nous aider avec cette notion de péage fantôme.
M. Rafferty: Monsieur le président, j'allais dire, pour ceux qui ont déjà eu la chance de m'entendre témoigner devant un comité ou autre organisme, que la patience dont je fais preuve en n'ouvrant pas la bouche avant 14 h 5 est considérable, comme vous le verrez peut-être au cours de la séance d'aujourd'hui.
L'objectif de mon propos, monsieur le président, est de répondre à l'une des questions figurant précisément à l'ordre du jour de cet après-midi ainsi et d'aborder une deuxième question qui découle des commentaires que vous avez faits au début de cette séance d'après-midi.
Mon but principal est de vous parler de l'application du modèle conception-construction-financement-exploitation pour la construction des routes au Royaume-Uni, financée par une méthode qu'on appelle le péage fantôme, dont il a été question à maintes reprises aujourd'hui. Le deuxième élément de ce point de l'ordre du jour est de parler de l'application de cette méthodologie dans le contexte canadien, ce que je ferai également.
Le but secondaire de mon propos est de répondre expressément à la question que vous avez posée à propos de la route de Winnipeg à Wawa - c'est-à-dire, comment financer une route de longue distance mais à faible circulation? Quelles méthodes sont disponibles dans un tel cas, et pouvons-nous appliquer les choses que nous avons entendues ici aujourd'hui à une situation semblable?
Il y a un modèle qui est disponible, mais je vous ferai quelques mises en garde à son sujet vers la fin. Ce qui importe, comme toujours dans ces cas-ci, est de bien comprendre les éléments de risque inhérents.
Permettez-moi de vous parler un peu du modèle britannique et de vous le mettre en contexte aux fins de la discussion d'aujourd'hui sur le péage fantôme. Dans les années 70, au Royaume-Uni, il a été nécessaire de s'en remettre de plus en plus au financement privé pour l'infrastructure publique. Au cours de ces années-là, des expériences notoires et peut-être moins notoires ont été entreprises, et nombreux sont ceux autour de cette table qui évoqueront dans ce contexte le cas de la régie des eaux du Yorkshire. Harry et moi sommes ici aujourd'hui pour vous signaler que ce n'est pas le modèle dont nous voulons vous parler, qui provient du Royaume-Uni.
Au début des années 90, à cause des pressions exercées par les taux de change au Royaume-Uni, une décision politique a été prise voulant que tout emprunt public de plus de 5 millions de livres provienne du Trésor central lorsque le ministère demandant l'autorisation pouvait démontrer qu'il n'y avait pas de financement privé disponible pour cette dépense en capital. Alors pour la première fois au Royaume-Uni, au niveau de l'approvisionnement, il était obligatoire de passer par le secteur privé et voir dans quelle mesure ce secteur s'intéressait à fournir l'argent nécessaire pour l'infrastructure.
Les routes sont devenues une excellente candidate parce qu'elles rencontrent plusieurs exigences que je pense que nous trouverons, et que nous présenterons certainement comme étant essentielles au succès d'un partenariat État-secteur privé. La plus importante de ces exigences est d'avoir un actif prévisible et bien défini qu'il est possible d'articuler, qui est identifiable, et deuxièmement, vous avez la demande. La demande peut être calculée, elle peut être mesurée, en termes de temps, selon la qualité de l'actif, et la demande peut augmenter.
Les routes présentaient une excellente option pour la prestation de financement privé. Il existait certaines conditions stratégiques au Royaume-Uni qui favorisaient le principe du recours au financement privé dans le régime public. Une des conditions était que ce financement privé soit obligatoirement hors bilan. Le gouvernement n'était pas en mesure à l'époque d'assumer la dette nécessaire pour financer cette infrastructure.
Une deuxième condition pour le financement privé, issue de la première, était que l'apport financier devait être rattaché à un nouveau modèle d'approvisionnement. Voilà l'essentiel de notre message d'aujourd'hui.
Du côté du gouvernement, la définition de ce nouveau modèle d'approvisionnement était que plutôt que d'acheter des actifs - et les commentaires du vérificateur sont importants à cet égard - , sous forme de réseau routier, les gouvernements, utilisant une nouvelle approche conception-construction-financement-exploitation, ont commencé à considérer la prestation de services routiers comme l'achat d'un service. Quelqu'un fournirait une infrastructure de transport pour permettre la circulation entre des points précis.
La deuxième composante de ce nouveau modèle d'approvisionnement était l'idée que le concessionnaire, le financier privé et les constructeurs exploitants qui livreraient cette infrastructure non seulement auraient la responsabilité de déposer une belle route toute neuve sur votre perron à vous en tant qu'organisme gouvernemental, mais aussi auraient en fait la responsabilité de gérer cet actif pendant sa vie utile. Donc, le modèle d'approvisionnement est passé de «construisez-moi une route, envoyez-moi la facture, donnez-moi une garantie et ensuite disparaissez» à «fournissez-moi un service routier selon lequel vous concevez et construisez la route, l'exploitez et entreprenez tout le financement nécessaire pendant toute la durée de la période de concession, conformément au modèle CCFE».
Vous verrez plus tard en m'écoutant que cette exigence change radicalement ce que le secteur privé va vous fournir. Si non seulement vous êtes chargé de fournir une route complète à la fin du contrat de construction, mais aussi que vous en êtes responsable en termes de sa qualité pendant toute sa vie utile, votre approche à l'exécution de cette route doit être très différente. Plutôt que de mettre l'accent sur les coûts réduits, vous songerez d'abord à l'investissement à faire pour assurer des frais d'entretien réduits, une notion dont nous avons parlé ici ce matin.
Une autre exigence de la politique britannique était que l'on démontre que le plus de risque possible était transféré au secteur privé. Comme John Beck l'a dit ce matin, le test ici est de savoir qui est le mieux placé pour gérer et contrôler le risque. Dans bien des cas, vous avez une séquestration absolue du risque du côté du gouvernement et du concessionnaire, tandis que dans certains domaines, les gens s'entendent pour assumer un certain degré de risque dans chaque cas. Dans d'autres cas, la demande, par exemple, la circulation véritable sur une route, sera l'un de ces risques que l'on assume.
Le dernier principe sous-tendant le modèle britannique est que plutôt que d'être un consommateur prescriptif pour la conception, en tant qu'autorité, que vous soyez un gouvernement municipal, provincial ou fédéral dans le contexte canadien, vous devenez en fait un consommateur prescriptif pour le rendement. C'est-à-dire, vous dites au concessionnaire «notre route doit rencontrer certains critères de performance, un certain volume de circulation, être ouverte à toute heure du jour et de la nuit», et vous fixez les normes minimales que les contracteurs et les concessionnaires doivent respecter dans l'exécution de l'infrastructure. Il y a donc des normes de sécurité que nous connaissons et qui sont prescrites comme étant le minimum pour les routes canadiennes. Ce sont certainement là des éléments qui s'appliquent.
Les normes de conception concernant les divers niveaux de qualité étaient disponibles pour les organismes du secteur public, pour bien préciser qu'elles n'étaient pas obligatoires. Donc, en réalité, le micro-travail concernant la conception de l'actif nécessaire pour la prestation du service revenait au secteur privé et non pas au secteur public. Ce principe animait aussi le modèle de l'approvisionnement. Si l'on pense au processus traditionnel d'acquisition de routes ayant recours à la soumission la plus basse, les documents sont empilés haut comme ça sur la table, l'agent chargé de l'acquisition entreprend des analyses détaillées pour chaque élément du projet afin de préciser par le menu détail comment sera faite la route en fin de compte.
Si c'est vous l'agent chargé de l'achat et que vous avez une pile de documents haut comme ça pour expliquer les détails de votre projet, vous garantissez alors que toutes les hypothèses et les données contenues dans les documents d'appel d'offres sont exactes. L'effet net, c'est que du moment où vous déviez tant soit peu des données que vous avez expliquées aux soumissionnaires, les coûts commencent à grimper au-delà de ce qui était prévu dans la soumission la plus basse.
Dans le modèle conception-construction-financement- exploitation qui avait cours au Royaume-Uni, ce qui permettait au gouvernement de prétendre qu'il avait réussi une opération hors bilan et qui permettait au Bureau national de la vérification des comptes du Royaume-Uni de l'approuver, c'était la méthode de paiement. C'est le fameux péage fantôme dont tout le monde a parlé.
Si nous souscrivons à l'idée que le gouvernement avait décidé qu'il achetait un service et non pas un actif, il devient alors raisonnable de payer pour ce service au fur et à mesure qu'il est livré. Dans le cadre de la construction d'une route, l'effet net, même dans le cas d'une construction expéditive comme celle de la 104 par la société CHIC, l'effet net, dis-je, c'est qu'on retarde le début des échéances de paiement de 20 mois, c'est-à-dire jusqu'à ce que la chaussée soit en place.
Tout dépendant du projet lui-même et du temps qu'il faut pour le mener à bien, le premier versement effectué par le gouvernement peut être reporté de trois ou quatre ans, comme on croit que ce sera le cas pour le projet du Nouveau-Brunswick aujourd'hui. L'important, c'est que le paiement n'est pas effectué parce que quelqu'un vient de terminer un projet routier; le paiement est versé parce que le public commence à circuler sur la voie, à la consommer, en quelque sorte, si je puis m'exprimer ainsi.
Au Royaume-Uni, le mécanisme de paiement était fondé tout d'abord sur la circulation et deuxièmement sur l'idée de la disponibilité des voies. Ceux qui circulent sur la 417 à Ottawa savent quelle différence peut faire une voie de plus ou une voie de moins à trois heures de l'après-midi selon que l'on circule en direction est ou ouest, et il en va de même pour tout autre centre métropolitain d'importance au Canada.
La disponibilité des voies, que l'on s'en serve ou non, devient donc une deuxième composante du plan de remboursement et cela revient à l'idée que c'est le concessionnaire qui fournit un service et non pas le gouvernement qui achète un actif.
La disponibilité des voies signifie aussi que vous avez fait un bon travail en construisant cette route et que vous n'êtes pas toujours à creuser tous les deux ou trois ans, pour refaire la chaussée ou remplacer l'asphalte ou le béton de surface.
Ce sont donc là les mécanismes de facturation, et le risque assumé par le secteur privé avec ce modèle CCFE du Royaume-Uni, même s'il s'agit d'un péage fantôme, est toujours un risque du côté de la demande, exactement comme vous trouverez du côté de l'autoroute 104.
Le partenaire du secteur privé qui veut entreprendre la conception, la construction, le financement et l'exploitation de la route doit toujours faire des prévisions. Il sera tenu compte de cette densité de circulation quand on fera la comptabilité analytique des coûts du modèle qui, au bout du compte, sera accepté par le gouvernement et l'organisme du secteur privé, et je dirai quelques mots supplémentaires à ce sujet. En réalité, cependant, cette prévision de la circulation est à la base du financement de la construction d'une route, en vertu du modèle CCFE. Si la circulation ne répond pas aux prévisions, le gouvernement ne paye pas. Au Royaume-Uni, les paiements sont fonction de la circulation, des normes d'une qualité minimale et surtout de la disponibilité des voies.
Maintenant, quelles sont les conséquences du péage fantôme pour le gouvernement. Comme l'a dit M. Cullen, il ne fait aucun doute que c'est le gouvernement qui paie. Ce paiement est fondé sur la consommation et non pas sur la garantie qu'il y aura des dollars à la fin du projet ou que la dette totale du projet sera garantie par le gouvernement du Canada.
Le péage fantôme, tel qu'exercé au Royaume-Uni, est un élément important lorsqu'il s'agit de prédire la responsabilité maximale du gouvernement pendant le cycle de vie du projet, ce qu'on appelle cerclage ou banding au Royaume-Uni. Au Royaume-Uni, on a réussi, dans les projets qui ont été entrepris, à amener le secteur privé à fixer un niveau maximum de circulation à partir duquel plus aucun péage fantôme ne s'applique. Cela sert à limiter la responsabilité du secteur public. Cela permet aussi de prédire avec précision ce qu'il en coûtera aux bailleurs de fonds du projet pendant son cycle de vie.
Le dernier élément important du modèle du Royaume-Uni, puisque nous discutons d'une nouvelle façon d'aborder notre réseau routier national, c'est la façon dont le secteur public reçoit les propositions émanant du secteur privé dans le cadre du modèle conception-construction-financement-exploitation. La première composante capitale en est quelque chose dont Harry Swain vous a parlé ce matin, le comparateur du secteur public. Comment convaincre ses commettants et son vérificateur financier que la solution retenue, soit celle du secteur public ou celle du secteur privé, est en réalité supérieure à l'autre? C'est le critère capital. Si la conception, la construction, le financement et l'exploitation sont confiés au secteur privé, comment peut-on prouver que cela reviendra moins cher?
Au Royaume-Uni, on a conçu un comparateur de vérification-qualité qui comprenait ce qu'il en coûtait traditionnellement au gouvernement pour l'acquisition des routes ainsi que le calcul du risque sur le long terme. Ce risque peut venir de la demande, de l'obsolescence, d'une responsabilité légale à long terme ou toutes sortes d'autres facteurs.
Quand vous demandez au secteur privé de vous présenter sa proposition, calculez votre valeur nette actuelle et demandez-vous, compte tenu du taux de circulation maximale pour la durée de vie de cette concession routière, quel sera votre paiement, ajoutez-y le risque que vous, le gouvernement, devrez assumer à la fin du contrat négocié, et si ce chiffre, en vous servant de la valeur nette actuelle du secteur privé et de votre risque éventuel, est plus bas que votre propre coût traditionnel vérification-qualité, vous pourrez alors faire la démonstration que vous en avez pour votre argent. Et mon collègue Harry Swain en a parlé ce matin.
L'autre question concernant le financement est celle que nous a proposée M. Cullen. Si, en bout de ligne, le gouvernement est le payeur, comment décider quand entreprendre l'aventure ou pas? Dans le modèle du Royaume-Uni, c'est ce qu'on appelle le facteur de capacité financière. Pendant le cycle de vie du projet, pourra-t-on trouver suffisamment de revenus généraux pour pouvoir respecter les exigences contractuelles courantes? Il faut poser cette question parce que peu importe que ce soit l'occasion en or du siècle, tout bêtement, si on n'a pas les moyens de se la payer, ce n'est pas une bonne occasion.
Si je puis me permettre cette franchise, notre but, ici, aujourd'hui, c'est de savoir quel effet multiplicateur peut avoir un investissement du secteur public, qu'il s'agisse d'une mise de fonds unique comme dans le cas de la route 104, où qu'il s'agisse de l'engagement à long terme de respecter un engagement en matière de péage fantôme. Comment fait-on jouer ce pouvoir multiplicateur pour encourager le secteur privé à s'engager rapidement dans d'importants projets de construction de routes partout au pays? Cette question technique va peut-être au-delà du mandat d'aujourd'hui, mais c'est la question déterminante à laquelle il faut répondre lorsqu'il est question d'appliquer un péage fantôme.
Je peux vous dire en quelques mots pourquoi les gens du Royaume-Uni continuent de se servir de ce modèle et pourquoi il commence à percer en Australie, en Finlande et au Portugal, et cela revient tout simplement à ce que disait Harry Swain ce matin: économie vérifiable de coûts. Du côté du Royaume-Uni, au niveau des investissements de capitaux, les soumissions acceptées étaient de 19 p. 100 inférieures au comparateur du secteur public: au niveau de l'exploitation et de l'entretien, de 34 p. 100 inférieures; la diminution globale des frais est de l'ordre de 17 p. 100 pour les soumissions acceptées, par opposition au comparateur du secteur public.
Nous avons entendu parler de la construction accélérée avec eux. Dans un modèle PESP, comme celui qui existe au Royaume-Uni, le gouvernement peut avoir son mot à dire dans la gestion des routes. Le gouvernement a le droit non seulement de surveiller le rendement mais également de dire qu'il faut ajouter une voie selon une formule qui nous permet d'en prévoir le coût.
Le modèle du Royaume-Uni prévoit des incitations à l'innovation, et au moment des offres et plus tard, lorsqu'on encourage le secteur à trouver des mécanismes pour améliorer le rendement et la sécurité de la route pour en accroître son utilisation.
Dernièrement, s'il importe au gouvernement d'avoir un traitement hors bilan - et je pense que Moya a dit que ce ne sera pas toujours le cas - il faut dire que cela a été possible au Royaume-Uni parce que les paiements sont vraiment considérés comme étant conditionnels.
Afin de répondre aux questions concernant l'application de ce traitement au Canada, permettez-moi de faire allusion à certains points qui ont déjà été mentionnés lors de notre discussion. Il faut se demander quel genre de projet routier nous intéresse. Est-ce qu'on veut discuter de nouvelles routes, ou plutôt de routes de rechange pour satisfaire à la demande actuelle? Veut-on discuter de l'élargissement de l'infrastructure, de la transformation des routes à deux voies en routes à quatre voies? Veut-on discuter des façons d'améliorer notre capacité d'exploiter et d'entretenir les routes? Ce sont là des questions qu'il faut poser.
Pour répondre à votre question, monsieur le président, au sujet des routes à faible volume qui couvrent de longues distances, il ne fait aucun doute que les péages, du moins ceux qui existent déjà, ne sont pas considérés la méthode pratique ou correcte de financer les améliorations ou l'élargissement des emprises actuelles.
La méthode des péages «fantômes» permet au gouvernement de faire des améliorations dans les régions qui en ont besoin, mais qui n'ont pas de centre métropolitain avec des volumes importants de circulation.
Le danger des péages «fantômes» c'est que les variations de la demande, évaluées en centaines ou en milliers de voitures, ne sont peut-être pas si importantes dans le cas de l'autoroute 407 de John Beck, mais risquent d'être plus importantes dans le cas d'une route où passent 4 000 à 6 000 voitures par jour. Voilà le risque des péages «fantômes». Il s'agit d'une question économique qu'il faut résoudre dans le cas de la route entre Winnipeg et Wawa. Mais il n'est pas impossible de résoudre ce problème, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Rafferty. Je vous ai donné un peu plus de temps que les autres pour deux raisons. D'abord j'ai toujours trouvé M. Rafferty exceptionnellement clair dans tout ce qu'il dit sur ces questions et en public et en privé. Depuis qu'on discute de ce sujet, je constate que ce sont les péages «fantômes» qui provoquent le plus de questions en public. Ils font l'objet du plus grand nombre de commentaires également. On me demande, par exemple, ce qu'il en est des péages «fantômes». Le principe est important, et je crois qu'il est utile que la population le comprenne.
Permettez-moi de donner la parole à un membre du comité plutôt timide. Il s'agit de M. Byrne.
M. Byrne: Monsieur le président, je propose la candidature de M. Liam Rafferty comme ministre des Finances.
M. Rafferty: Monsieur le président, je suis sur que si vous parliez à mes collègues, ils trouveraient cette idée encore plus drôle que moi. Il s'agit peut-être de la première qualité requise pour occuper ce poste.
M. Byrne: Je n'ai pas beaucoup parlé jusqu'ici car j'écoute les discussions avec beaucoup d'intérêt. Ce n'est pas d'ailleurs la première fois que je parle à Liam.
Du point de vue financier, je trouve que l'idée est excellente. Pour la première fois depuis que l'on discute de l'infrastructure publique et des finances, nous en sommes au point où on parle de la possibilité d'améliorer les services sans parler d'augmentation d'impôts.
Si j'ai été si lent à réagir, c'est parce que je m'intéresse énormément au lien qui existe entre la politique publique et la route entre Winnipeg et Wawa. Je pense qu'il faut aller de Quirpon à Corner Brook, qui se trouve dans mon comté. Je pense d'ailleurs que cela devrait être le titre du rapport, monsieur le président.
Au fond, il y a une différence considérable entre la politique qui vise les régions urbaines et celle qui vise les régions rurales parmi les pays du monde, le Canada est particulier. Les modèles qui s'appliquent au Royaume-Uni ne s'appliquent pas forcément ici. Le Canada est un pays où les volumes sont élevés, mais où la densité de la population est faible, tandis qu'au Royaume-Uni, c'est l'inverse. Autrement dit, le modèle s'applique - sans financement public - aux routes dans les grands centres.
Je tâte un peu le terrain ici. Il faut m'interrompre lorsque je dis quelque chose avec lequel vous êtes en profond désaccord.
Donc le financement public n'est pas nécessaire dans le cas des routes dans les centres métropolitains. Elles peuvent être financées à même les péages fantômes et d'autres mécanismes semblables. Mais nous pouvons apporter des améliorations à long terme à l'infrastructure à un coût très faible, avec des péages de moins de 2 $ par voiture environ, ce qui est raisonnable. N'importe quel consommateur acceptera de payer cela.
Mais prenez le cas d'une route qui traverse le Labrador. On en discute depuis assez longtemps. Le coût de la construction d'une route dans une région où le climat est parmi les plus sévères au pays, où les conditions de construction sont les plus difficiles, et où il n'y a pas déjà de route, serait de l'ordre de 400 millions de dollars à 500 millions de dollars. Puisque la population du Labrador est de 30 000 personnes, le coût par voiture, sans la participation financière du gouvernement, pour construire une telle route serait faramineux. On dit qu'on peut réduire certains coûts parce que la route ne sera pas financée à 100 p. 100 par le secteur privé. S'il y a une contribution financière publique au départ, les péages pourraient être de 2,50 $ ou 5 $. Je pense que cette solution fait partie de certaines des idées dont nous avons discuté.
Voici la dichotomie créée par une telle approche. Nous avons ici une situation très difficile... Vous ne participez pas directement à cette discussion, mais moi et mes collègues au comité allons y participer. La population des grands centres ne va pas bénéficier d'une participation financière de la part du gouvernement. Leur réseau routier sera financé à même les péages, péages que la population accepte de payer. Mais il y aura un financement public pour payer les routes dans les régions rurales.
Il y aura un débat très important au pays au sujet des régions. Si je mentionne l'APECA, je suis sûr que je vais faire frissonner beaucoup de banquiers et beaucoup de résidants du sud de l'Ontario. Mais si je dis «Programme de mise en valeur de la technologie», programme qui ne sera pas utilisé par beaucoup de gens à Quirpon, dans mon comté, peu de gens ici vont frissonner. La raison c'est que ce programme, qui donne du financement public aux entreprises de technologie de pointe, ne vise pas vraiment les régions rurales. Il est destiné aux régions urbaines.
De nos jours, les gouvernements essaient de déterminer qui paie quoi, et combien chacun paie. Si tous ne paient pas le plein prix, pourquoi faut-il en subventionner certains?
Je voudrais simplement signaler que, si l'on ouvre la boîte de Pandore des partenariats entre l'État et le secteur privé, nous ne devrons jamais oublier qu'il y a toutes sortes de régions dans le pays, et je ne parle pas seulement du Labrador, mais aussi de Nunavut. Sinon, nous n'aurions peut-être jamais eu une route de l'Alaska, par exemple, ou un réseau routier dans le Nord. Nous n'aurions peut-être jamais pu exploiter nos richesses naturelles dans la plupart des régions du pays si le secteur public n'avait pas fait certains investissements au départ.
Si quelqu'un peut me rassurer à ce sujet, je lui en saurais gré.
Le président: Il y a autre chose dont je voudrais parler avant que M. Crête ne nous quitte pour prendre son avion.
Avant que vous répondiez à la question de Gerry, Liam, je voudrais ajouter quelque chose parce qu'il me semble que c'est un détail important.
Gerry, vous avez parlé dans votre question d'un premier investissement du secteur public, comme dans le cas de la route 104, mais on pourrait obtenir le même résultat si le secteur public fournissait moins d'argent au départ, en prenant un engagement à plus long terme. Par exemple, si, au lieu de dire qu'il investira tant d'argent immédiatement, le gouvernement fédéral s'engageait à y contribuer tant par année pour un certain nombre d'années, cela permettrait de financer les gros travaux d'infrastructure.
Harry, voulez-vous répondre?
M. Swain: Il y a bien des solutions possibles. On pourrait garantir un niveau d'utilisation minimum; le péage pour la première automobile sera de 10 millions de dollars.
Dans l'industrie pétrolière et gazière, il existe des contrats d'achat avec minimum garanti pour la construction de pipelines qui ressemblent beaucoup à cela. Cela se fait assez régulièrement. Vous pourriez faire ce qui semble convenir le mieux en ce sens.
M. Byrne: Mais du point de vue du gouvernement fédéral, le problème, c'est que l'on aura malgré tout l'impression qu'il y a des injustices vu que le secteur public devra toujours intervenir dans le financement des routes rurales pour lesquelles la structure de financement sera quelque peu différente de celle des réseaux routiers des régions métropolitaines parce que, dans la plupart des cas, celles-ci n'auront pas besoin d'être financées par le secteur public.
Il me semble que cela pourrait créer un sentiment accru de régionalisme au Canada et c'est une chose que nous devrions éviter à notre époque, vu que le public aura l'impression que nous subventionnons encore une fois les régions rurales du pays. Un tel débat entraîne une question à laquelle on pourrait répondre que les provinces, qui ont moins de pouvoir et d'envergure que le gouvernement fédéral, sont individuellement responsables de leur propre réseau de transport et que le gouvernement fédéral n'a aucun rôle à y jouer. À mon avis, c'est faux. Selon moi, le gouvernement fédéral a un rôle très clair à jouer dans ce domaine. C'est pour cela que je veux qu'on aplanisse ces difficultés avant qu'elles ne deviennent vraiment de graves problèmes.
Le président: Merci, monsieur Byrne. Cela pourrait servir d'introduction à M. Crête, qui voudra peut-être ajouter quelque chose sur la question.
[Français]
M. Crête: Je suis certain que les politiciens sont tous pareils. J'avais compris que c'est dans la région de Rivière-du-Loup - Edmundston que pourrait être réalisé le meilleur projet pilote entre le Québec et le Nouveau-Brunswick et j'ai probablement raison.
Plus sérieusement, je lisais plus tôt dans le document que, dans la déclaration du conseil des ministres des Transports, en 1990, on donnait l'exemple de plusieurs pays. À ce moment-là, le seul pays à ne pas avoir de politique de développement des autoroutes était le Canada. On se retrouve sept ans plus tard et on n'a toujours pas de développement en ce sens.
Il me semble évident que, si les autres pays sont plus avancés dans les techniques de financement, c'est parce qu'il y a eu une prise de position, une politique au départ.
Je me permets de répondre en partie pour le moment à la question du président du comité. Toutefois, je voudrais que vous puissiez également jouer votre rôle par rapport à cela. Il est très important qu'au départ, le gouvernement s'engage dans une politique de développement du réseau routier pancanadien et des autoroutes au Canada. C'est la première chose qui doit être faite. Il faut être conscient que le travail du comité en la matière fait qu'il a quelque peu pris les devants en ce qui concerne certains aspects. Cela ne veut pas dire que toutes les composantes du gouvernement ou de la société étaient prêtes au départ à aller très loin.
On aura besoin d'appui pour que le travail de sensibilisation se fasse. Il est cependant fondamental que cette décision soit prise en premier.
Le mode de financement anglais a un avantage majeur: il permet de mettre en place des projets beaucoup plus tôt. Les modes de financement traditionnels retardaient les choses quasiment ad vitam aeternam. Le gouvernement peut dire que pendant une période de quatre ou cinq ans, on fera l'inventaire des choix et on mettra certains projets en place.
À ce moment-là, quel est le critère pour déterminer quel projet sera retenu ou rejeté? Je fais abstraction des choix politiques, des éléments plus partisans qui entrent sûrement en ligne de compte.
En Angleterre ou ailleurs, a-t-on une expérience suffisante pour juger de l'effet de la décision sur le choix des programmes par rapport aux différentes régions du pays?
[Traduction]
Le président: Paul, voulez-vous une réponse de Liam en particulier?
[Français]
M. Crête: Je veux savoir s'ils ont l'information.
[Traduction]
Le président: Je vous reviendrai plus tard. C'est maintenant au tour de Mme Pelletier.
[Français]
Mme Pelletier: Mme Greene a indiqué que, selon ses chiffres ou selon certaines estimations, les routes qui pourraient être proposées maintenant représenteraient un coût de trois à cinq milliards de dollars.
Selon l'étude du réseau national canadien qui a été faite et complétée en 1992, lorsqu'on parle de 13 ou 18 milliards de dollars selon qu'on fait ou non une expansion à quatre voies d'un réseau national qui inclut Wawa, Terre-Neuve et le Bas-Saint-Laurent, doit-on comprendre que la somme de cinq milliards de dollars serait pour les tronçons du réseau qui sont économiquement rentables et viables?
Je pourrais présumer que c'est la réponse, étant donné qu'il manque quelques dizaines de milliards de dollars dans les estimations. Le thème de la séance d'aujourd'hui est le renouvellement du réseau routier national. C'est la grande question que le député de Terre-Neuve et du Labrador a posée. Si c'est un réseau national, que fait-on? Il y avait une volonté politique à certains niveaux lorsque le conseil des ministres a approuvé cette étude. Ils se sont même presque entendus sur un mode de partage des coûts pour la majorité.
Nous sommes à discuter de la source des fonds. C'est une chose, car il faut aussi savoir à quoi vont servir ces fonds.
Les représentants de Hambros Canada Inc. et le député de Terre-Neuve ont partiellement répondu à ma question. Je pense que la question est vaste. Le système de shadow tolling s'applique-t-il à une infrastructure existante qu'on n'a plus qu'à réparer, à améliorer, à réhabiliter? C'est là la question et nous n'y avons malheureusement pas de réponse.
[Traduction]
Le président: Je voudrais ajouter une chose ici, mais c'est une chose importante.
Quand nous avons entamé cette étude, l'une des premières discussions que nous avons prises était de ne pas revenir sur tout le travail accompli déjà par l'ATC. L'ATC avait travaillé très dur pour en arriver à un consensus et nous avions peur que si l'on commençait à discuter de nouveau de la définition du réseau national, chacun voudrait parler de ses propres routes. C'est une première chose.
Il y a cependant aussi le fait que l'industrie des transports a changé à cause de changements de politique. Il faudra peut-être y réfléchir à un moment donné. Par exemple, l'abandon des lignes ferroviaires a entraîné une énorme demande de services secondaires sur les principaux tracés commerciaux de certaines régions du pays, mais nous n'avons pas examiné cette question.
Nous nous concentrons uniquement sur le consensus qui s'est dégagé du travail très important accompli par l'ATC. Je dois vous dire que certains ont exprimé certaines réserves à ce sujet. Gerry a ajouté quelque chose de très important, mais relativement à une route de transport national, certains autres faits nous ont été signalés plus récemment.
Je vais maintenant donner la parole à John.
M. Beck: Je ne suis pas expert en politique gouvernementale, mais il me semble qu'il faut faire une distinction entre la façon dont le gouvernement traite ou semble traiter les contribuables et la façon dont il traite les automobilistes ou les utilisateurs de l'infrastructure. Dans une région métropolitaine où l'on applique le principe du paiement par les utilisateurs à l'infrastructure, personne n'est obligé d'utiliser l'infrastructure. On peut prendre d'autres routes qui sont entretenues grâce aux impôts, tout comme ce sont les impôts qui paient pour l'expansion des routes rurales.
À titre de contribuable, il me semble que le principe est équitable puisque je peux me servir gratuitement d'une autre route dans la région métropolitaine. Si je veux un meilleur service, je paierai pour le service, mais je ne suis pas obligé de m'en servir.
M. Byrne: C'est un bon argument.
Le président: Je voudrais poser une autre question à laquelle vous voudrez peut-être répondre, parce que cela rejoint un peu ce que disait M. Byrne.
Si j'ai bien compris la proposition de l'ATC, quand elle parlait d'une route améliorée, elle disait qu'on avait proposé, et je ne suis pas certain si c'est l'ATC qui le propose ou le gouvernement dans sa réponse, que 80 p. 100 du fonds soit utilisé pour améliorer le réseau routier selon le principe de partage égal des frais et que le gouvernement conserve les autres 20 p. 100 pour faire des investissements stratégiques qui pourraient représenter un pourcentage plus élevé de participation du gouvernement fédéral dans certaines régions du pays. Vous n'avez pas réussi à obtenir un consensus à ce sujet. Tout ce que vous avez obtenu, si j'ai bien compris ce qu'a dit le ministre des Finances, c'est un consensus au sujet d'un partage égal des frais. Il y aura un problème dans ce cas puisque certaines provinces n'ont pas les moyens de payer leur part.
Cela ne s'applique pas uniquement à la construction des routes. À l'échelle nationale, on manque un peu de générosité ou de vision en ce sens qu'on ne considère pas le réseau routier comme aussi important... Pourtant, les routes au Nouveau-Brunswick revêtent une certaine importance pour la région de Toronto, si ce n'est que parce qu'elles permettent aux entreprises d'aller s'établir au Nouveau-Brunswick à partir de Toronto.
Si le réseau routier est une ressource nationale, cela veut dire qu'il est important pour tous les habitants du pays, que l'on parle de la route au Nouveau-Brunswick, de la 407 ou de la route entre Wawa et Winnipeg ou d'une route qui traverse le défilé Rogers, un autre long tronçon dispendieux, qui a une certaine importance pour tous les habitants du pays. Les coûts ne sont pas les mêmes partout et la participation du gouvernement fédéral ne sera donc pas la même partout. Il me semble que c'est un principe qu'on oublie parfois dans le débat sur cette question.
Une chose dont on a parlé, c'est que si l'on réussissait à s'entendre, et je veux parler encore de la route entre Wawa et Winnipeg, parce qu'elle pose pas mal de difficultés, et que si vous ajoutez à cela les routes autour de Toronto qui seraient administrées par un seul consortium, et si l'on décidait d'avoir un péage commercial pour un tronçon de la route et un péage fictif payé par le gouvernement pour tel autre tronçon, compte tenu des contrats d'entretien et d'exploitation, on pourrait faire construire l'ensemble de la route à cause des économies d'échelle. Cela voudrait dire que, grâce au péage, l'utilisateur du premier tronçon subventionnerait les utilisateurs et l'entretien de la route pour l'autre tronçon, mais on pourrait grâce à cela avoir une route commerciale de bonne qualité dans tout le réseau.
Moya, je sais que vous êtes au courant de tout cela, mais j'ai pensé que c'était une bonne chose de mentionner ces faits.
Mme Greene: À mon avis, la question dont vous-même, monsieur Byrne et Louise, avez parlé est celle qui complique le plus la situation. Elle surgit chaque fois qu'on essaye de planifier un réseau national.
J'espère que vous vous trompez à ce sujet, monsieur le président, et qu'un nouveau climat ne se dégage pas dans le pays selon lequel les Canadiens ne sont pas prêts à reconnaître que certaines régions du pays ne sont pas en mesure de financer entièrement les coûts d'infrastructure. J'espère que ce n'est pas le cas, mais vous avez peut-être raison.
Je ne crois pas qu'on ait constaté la même chose pour les aéroports. Il y a des gens à Vancouver qui administrent maintenant l'aéroport de Vancouver et qui voulaient vraiment commencer à gérer l'aéroport, à l'améliorer et qui, même s'ils ne le souhaitaient pas vraiment, ont malgré tout accepté de faire payer des droits pour l'amélioration de l'aéroport. Les petits aéroports de la Colombie- Britannique qui ne sont pas aussi occupés que celui de Vancouver peuvent donc profiter de ce petit programme d'amélioration de l'infrastructure d'Air Canada. Dans le cas des aéroports, on accepte donc le principe qu'on peut faire payer des droits dans une région alors que ce ne serait pas pratique dans d'autres.
Tout le monde semble contourner la question de la contribution du gouvernement et de l'importance de cette contribution. Le chiffre que j'ai donné découle simplement des chiffres des impôts. On pourrait entreprendre des travaux de 18 milliards de dollars dès demain, si l'on réussissait à trouver ces 18 milliards. Personne ne dirait que cela va à l'encontre de l'étude de l'ATC. C'est justement ce que disait l'ATC.
Le chiffre que j'ai donné découle d'une série d'études visant à déterminer lesquels de ces projets revêtent le plus d'importance sur le plan des coûts-bénéfices. Il y a des projets en suspens pour le réseau routier national un peu partout dans le pays et dans chaque province, parce que nous n'avons toujours pas trouvé d'argent pour commencer les travaux.
Ce que je vous dirais, monsieur le président, c'est quelque chose que vous m'avez vous-même dit il y a plusieurs mois: nous devons voir jusqu'où nous pouvons aller; nous n'avons pas besoin de tout résoudre immédiatement parce que nous pouvons seulement résoudre 10 ou 20 p. 100 des problèmes.
Le président: Merci.
M. Cullen.
M. Cullen: Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir à ce que disait mon collègue. Je pense que M. Byrne a parlé des questions de politique publique. Il me semble qu'il existe aussi certaines considérations d'ordre politique et, parfois, les deux ne vont pas de pair. Il y a des considérations politiques, relatives aux disparités régionales et à la différence entre les régions métropolitaines et rurales, mais il me semble que les Canadiens ont montré dans le passé qu'ils pouvaient relever de tels défis. Selon moi, ce n'est pas à nous de voir à ce que l'on surmonte ces obstacles.
Je pense qu'il existe aussi des considérations plus égoïstes. Si l'on prend le réseau national routier dans son ensemble, il y a d'excellentes raisons qui militent en faveur d'un réseau national complet. Cela ne touche pas simplement la région métropolitaine de Toronto ou celle de Montréal. Il faut envisager le réseau de façon systémique. Il me semble qu'il y a de bonnes raisons commerciales à cela.
Ce sera peut-être une question de savoir si les habitants de l'Ontario, du Québec ou de l'Alberta, sont prêts à considérer le renouveau du réseau routier comme une question d'importance nationale. Si cela nécessite que certaines régions soient subventionnées par d'autres, il me semble que nous devons voir comment on peut maximiser la contribution du secteur privé. Il me semble que ce que nous avons examiné aujourd'hui, en partie, c'est la façon de glaner les bénéfices de cette contribution du secteur privé et permettre au secteur public de financer la partie nécessaire pour le bien public.
Je remercie M. Rafferty de ses explications au sujet du péage fictif. Cela me semble maintenant un peu plus clair. Il me semble donc que ce serait un moyen d'amortir la contribution du secteur public sur une certaine période, en fonction non pas de l'infrastructure même, mais plutôt du service. Cela permet de contourner certains des autres problèmes qui nous préoccupaient.
Ce n'est pas sans poser de problèmes, mais si nous voulons récupérer certains de ces profits privés sur une plus grande échelle, M. Beck a déjà dit qu'il faudrait une certaine masse critique, surtout pour gérer et entretenir une route.
Comme l'a dit le président tout à l'heure, je suis sûr que d'autres économies et d'autres synergies peuvent être réalisées à plus grande échelle, nous évitant ainsi de recourir autant à l'interfinancement, ce qui nous préoccupait. Il me semble qu'à un moment, nous devrions sonder le marché et voir s'il reste des crédits publics et ce que nous devrions faire. C'est en fait ce que je voulais dire.
Le président: Monsieur Swain.
M. Swain: Monsieur le président, je voudrais aborder deux questions dont l'une est en réponse à une question qui figure sur votre feuillet, ce qui me semblait intéressant.
J'ai beaucoup aimé la présentation faite à midi par l'ISIS. Vous vous demandez comment nous pouvons encourager la recherche et le développement et les concrétiser. Je crois que la réponse se trouve justement dans la question car lorsque vous demandez à des entreprises privées concurrentes de présenter leurs meilleures offres financières pour le coût du cycle de vie d'un projet routier, elles ont alors tout intérêt à faire appel à des gens comme les chercheurs d'ISIS, à récupérer les technologies qu'ils ont inventées, à les breveter et à les concrétiser.
Ces mêmes incitatifs ne donnent rien dans le cas de contrats conventionnels de construction routière. La passation de ces marchés est gérée par d'anciens collègues de Moya et de moi-même qui ne sont pas payés pour courir des risques. En fait, le système de sanctions et de récompenses imposé aux bureaucrates procure une certaine aversion pour le risque: aucune prime ne vous est donnée si vous faites quelque chose de particulièrement bien, mais par contre vous passez devant un comité parlementaire si vous faites quelque chose de particulièrement mauvais.
Je crois que l'adoption de ces diverses techniques de partenariats publics et privés réussira à imposer de nouvelles technologies à la construction routière au Canada. Ensuite cela permet à des entreprises comme celle de M. Beck de devenir encore plus compétitives sur les marchés d'exportation. C'est finalement un cercle très vertueux.
La deuxième observation que je voulais faire n'est pas du tout en réponse à M. Byrne, car je ne pense pas qu'il y ait de réponse à ce qu'il a dit. Comme l'a dit une fois un homme sage, être Canadien entraîne plusieurs conditions permanentes. L'une d'entre elles est d'être voisin des États-Unis et une autre est de composer avec la diversité régionale de ce pays, avec les distances importantes, avec une vaste superficie et de grands écarts entre les régions rurales et urbaines du Canada. Mais je voudrais simplement préciser que les régimes de paiements de transfert interrégionaux ont été extraordinairement généreux au Canada; certains de ces régimes sont très connus et font l'objet de nombreuses discussions, comme les paiements de péréquation et ainsi de suite, alors que d'autres le sont moins.
On pense, par exemple, à notre tolérance pour les tarifs du téléphone qui, au fil des ans se sont transformés en une subvention se chiffrant à des milliards de dollars, subvention finalement plus importante, selon certaines mesures, que les paiements de péréquation, en faveur des régions rurales du Canada.
Que ce soit justifié ou non, ce sont là les conséquences des jugements politiques décidés non pas par des experts techniques mais par ceux qui ont été élus. C'est ainsi que ce devrait être.
Je me souviens cependant avoir entendu le premier ministre du Canada, lors des élections de 1962, évoquer avec fierté le programme de M. Alvin Hamilton, le programme «d'établissement des voies d'accès aux ressources», ce qui était sans doute la dernière fois que le pays a eu une politique routière nationale. En jetant son bras en l'air, M. Diefenbaker a évoqué le Nord, «là où la main de l'homme n'a jamais mis pied.»
Le président: Monsieur Atkinson, à vos risques et périls.
M. Atkinson: Monsieur le président, en examinant les questions citées dans le document de travail du comité, je voudrais tout d'abord rappeler la mise en garde de M. Beck au comité selon laquelle aucune formule toute faite ne s'applique à cette situation.
Regardez la toute première question que cite le document de travail: «le gouvernement devrait-il continuer de financer les infrastructures routières de la façon habituelle, à partir de ses recettes, ou est-ce l'usager qui devrait payer?» Essayer de répondre à cette question équivaudrait à s'asseoir sur l'une des bosses d'un chameau: tôt ou tard, vous glisserez au milieu.
Je pense réellement que le comité, si la recommandation que vous ferez à la Chambre tient dans les réponses à ces questions, devrait faire très attention à ne pas opter pour une seule solution, car si j'ai bien entendu ce qui a été dit aujourd'hui, il est très important qu'une certaine souplesse existe compte tenu de la diversité de notre pays et du réseau routier national de Wawa à Corner Brook. Il faut que les choses changent, c'est certain; nous devons nous extirper du carcan dont M. Hunt a parlé, mais pas nous en débarrasser non plus.
Le président: Permettez-moi de préciser que si vous allez de Wawa à Corner Brook, vous ne passerez pas par Winnipeg.
Mais j'en prends bonne note. Nous entamons maintenant la dernière heure de ce débat. J'entends respecter l'heure imposée et je voudrais que tout le monde soit parti d'ici 16 heures.
Les questions qui figurent sur cette liste ne sont pas ancrées dans le béton. Ces questions sont celles qui ont été soulevées par ceux qui ont témoigné devant le comité auxquelles s'ajoutent les problèmes qui ont découlé de cette période de discussion. Nous devons rédiger un rapport. Lors de cette dernière heure, je voudrais avoir vos dernières observations, suggestions ou recommandations. Et nous ne pourrons vraisemblablement pas aborder d'autres questions, vu la verbo-motricité du groupe qui comparaît aujourd'hui.
Par exemple, et je crois que la réponse à cette question va de soi, le comité devrait-il recommander quelque chose de tout à fait radical et dire que le gouvernement fédéral devrait avoir une politique bien définie sur le réseau routier national, que le gouvernement fédéral devrait financer le réseau de manière cohérente et prévisible à long terme? Voilà le genre de recommandation que nous pouvons présenter à la Chambre.
Monsieur Redfern a dit quelque chose d'intéressant en déclarant que dans des projets de ce genre, et les coûts d'immobilisation et les coûts d'exploitation doivent être étudiés lors de la mise sur pied de ces montages financiers.
Quant à l'utilisation des nouvelles technologies, je crois que M. Swain offre une perspective très intéressante: il n'est peut-être pas nécessaire d'imposer des conditions précises, ce qui entraîne nécessairement d'autres types de problèmes, mais tout simplement en laissant la concurrence agir, les intéressés adopteront ces nouvelles technologies; cependant, compte tenu du coût initial qui est très élevé tant que le marché n'est pas établi, il faudrait peut-être prévoir une sorte de compensation.
Monsieur Atkinson, certains de vos membres nous ont dit en privé que c'était bien beau de parler de tous ces marchés lorsque vous avez l'appui financier des banques, de Newcourt et de Hambros et des six ou huit très grosses entreprises. M. Beck peut se permettre de le faire, mais qu'arrive-t-il au petit entrepreneur qui asphalte huit ou neuf kilomètres? N'allez-vous pas perdre une bonne partie de vos membres? Comment répondez-vous à leurs préoccupations? Ce sont, après tout, des Canadiens qui participent à ce secteur de l'économie.
Je crois qu'il faut examiner ces questions de près. Vous avez une heure pour le faire. Si vous êtes éloquents et réfléchis, vous pourrez être cités, mais il faudra alors que vous en preniez l'entière responsabilité.
Je vais commencer par un des membres les plus expérimentés de notre groupe, quelqu'un qui n'a pas besoin d'être présenté, M. Keyes.
M. Keyes: Qui?
De fait, monsieur le président, je dois dire que je suis en train de vivre une véritable aventure, car lorsque nous tenons nos séances de comité et que nous entendons un témoin à la fois, c'est déjà toute une stratégie, mais vous avez réussi brillamment à poser des questions à tout le monde et à obtenir des réponses de tous ceux qui sont autour de cette table. Je crois que jusqu'à présent tout le monde est très satisfait de sa participation car ils ont pu intervenir lorsqu'ils le voulaient. Alors félicitations. Cela a été très instructif.
Je pensais ne jamais dire ce qui va suivre, monsieur le président, mais je vais m'y aventurer.
Je disais tout à l'heure à M. Cullen que si nous faisions ceci, cela pourrait arriver mais si nous faisions cela c'est autre chose pourrait arriver. De toute façon, il y a des conséquences à tout. Le secteur privé pourrait-il collaborer avec le secteur public et avec ceux et celles qui s'intéressent à la chose? Nous avons entendu des choses tout à fait différentes; elles ont été lancées ici et là. Mais elles devraient être rassemblées et c'est à ce moment-là que j'ai pensé au mot «modèle».
Peut-être pourrions-nous créer une commission bipartite, État-secteur privé qui, en l'espace de 3 à 6 mois, préparerait des lignes directrices, mettrait les chiffres à l'épreuve, évaluerait les risques, afin de voir si quelque projet que ce soit aurait autant d'impact dans les régions rurales que dans les régions urbaines du Canada. On aurait alors quelque chose de concret, on aurait rassemblé toutes les idées, on les aurait testées et on présenterait un programme national d'infrastructure routière qui serait financé de telle façon en présentant les risques pour l'État et le secteur privé, les lignes directrices, l'emplacement des routes, etc.; on aurait ainsi un modèle concret qui pourrait être rajusté, rejeté complètement ou mis en oeuvre.
C'est là une simple suggestion en réponse aux questions que je vois sur ce feuillet.
Le président: Merci, monsieur Keyes.
[Français]
M. Laganière: Compte tenu des chiffres qu'on a mentionnés, je suis de ceux qui sont d'avis qu'il faut plus que quatre ou cinq milliards de dollars pour remettre en état le réseau routier national. Si on tient compte non seulement d'un axe transcanadien mais aussi des routes importantes et des réseaux qui ne sont peut-être pas sur la petite carte en rouge mais qui sont très importants pour développer certaines parties du Canada et pour aller chercher des ressources naturelles, comme le disait monsieur en parlant du Labrador, il est évident qu'il faut se servir de l'argent des gouvernements ou des taxes comme levier pour investir ou augmenter la masse critique avec le concours de l'entreprise privée, avec du financement privé. C'est encore plus important dans les réseaux qui ne sont pas autour des grandes villes.
D'autre part, lorsqu'on parle de partenariat, il faut peut-être également penser à des formules qui n'ont pas encore été utilisées de façon officielle, comme celle à laquelle on a eu recours pour les routes de certaines parties du Canada.
Au Québec, la route qui donne accès au territoire de la baie James a été construite en partenariat avec Hydro-Québec. Au Labrador et au nord du Québec, un tel partenariat existait avec les compagnies minières et les compagnies d'exploitation forestière. Ce sont des partenariats qui existent actuellement et sur lesquels on pourrait capitaliser. Ce sont des apports au réseau routier.
Ces exemples pourraient probablement être davantage mis à profit en utilisant le levier que le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial utilise.
Le programme d'infrastructure de ces dernières années a prouvé que, sans une structure additionnelle, sans une institution de plus, on pouvait prendre un levier mis en place par le gouvernement fédéral et le tripler. Les partenaires provinciaux et municipaux ont suivi dans ce cas-là. On a multiplié l'argent.
Dans bien des cas, ce qui n'est pas répertorié dans les rapports, des partenaires privés se sont joints aux entreprises dans les municipalités ou dans les villes pour réaliser des développements immobiliers qui ont encore apporté quelque chose de plus.
Dans le cas du réseau routier régional, je crois qu'il faut aller vers ces solutions-là. Cela n'implique pas un modèle global, mais presque une décentralisation. Il faut demander aux Canadiens qui ont des idées de les faire connaître et adopter plusieurs modèles au lieu d'un seul modèle national.
[Traduction]
Le président: Absolument. Je crois également qu'il est important de garder à l'esprit le fait qu'il s'agit de 25 000 km d'un réseau routier qui en comprend 800 000 et qu'à l'échelon fédéral, il n'est question que de ces 25 000 km. Le reste relève, et a toujours relevé, des gouvernements provinciaux. Mais si nous pouvons préparer certains modèles et établir des moyens utiles d'aborder la question de la prestation d'un service de transport, si je peux reprendre une idée de M. Rafferty, alors c'est un modèle que les gouvernements provinciaux seraient susceptibles de trouver utile également.
Mais pour en revenir à une des questions qui a été soulevées... Je crois que M. Atkinson a été le premier à en parler; En fait, il a été le premier à le faire aujourd'hui, mais elle avait été soulevée auparavant par l'Association des transports du Canada et a fait l'objet de nombreux projets de loi d'initiative parlementaire et autres. Si je comprends bien le problème, et ceci est mon premier mandat à l'échelon fédéral, si bien que je commence tout juste à stimuler... Je suis en train de stimuler quelque chose rien qu'en y pensant. Comment regrouper les provinces et le gouvernement fédéral, car les sommes en question ne représentent que 50 p. 100 des crédits alloués à la construction d'une route, pour permettre un changement radical, dans l'action des pouvoirs publics, de la façon dont on finance et qu'on construit des actifs dans un environnement aussi complexe que le nôtre, avec dix provinces, deux territoires, le gouvernement fédéral et le climat politique changeant? Parfois, je pense que même lorsqu'il y a consensus, une élection peut tout chambarder. Comment dissocier la construction et l'entretien d'un actif économique aussi important des caprices des cycles électoraux et empêcher des gens comme moi-même et d'autres qui sont de ce côté-ci de la table d'essayer d'imposer une priorité donnée qui, tout d'un coup, devient plus importante qu'une autre décision?
Et on vous répond exactement ce que l'on a répondu à Charlottetown et ce que l'on a déjà dit à M. Keyes, à savoir que l'on ne veut pas d'autres sociétés d'État; on ne veut pas d'autres entités. C'est la réponse que l'on entend partout.
Qu'en pensez-vous? Cela vous semble-t-il sensé? Suggéreriez-vous que nous recommandions cela? Mme Pelletier a parlé d'utiliser l'Association des transports du Canada ou une option semblable.
M. Thomson: Une option que l'on pourrait envisager, plutôt qu'un nouvel organisme gouvernemental, serait de diviser le pays en un certain nombre de régions. Cela permettrait de régler finalement la question des biens laissés à l'abandon. On demanderait à un groupe de concepteurs, entrepreneurs en construction et autres d'assumer ensemble la responsabilité de toute une région. Toutes les routes qui seraient désignées comme faisant partie du réseau national devraient être entretenues selon certaines normes.
Cela réglerait les questions importantes de caution, d'assurance, de qualité et d'établissement des coûts du cycle de vie ainsi que des techniques de gestion. On pourrait d'autre part imposer des conditions de contenu local. On dirait qu'il faut que 70, 80, 90 p. 100 des travaux soient effectués par de petites entreprises de construction locales. Les sociétés d'ingénierie qui ont recours aux grandes entreprises pour gérer l'ensemble des projets sont tenues responsables.
Le secteur privé gère réellement les choses. Vous décidez d'un certain nombre de lignes directrices que vous confiez au secteur privé qui choisit ensuite entre diverses options la façon de financer les divers travaux routiers de la région.
Lorsqu'il s'agit d'une section de route pour laquelle il suffit d'effectuer quelques travaux d'amélioration pour l'amener au niveau national, on peut envisager une option péage fantôme. S'il y a une autre section de route qui présente de toute évidence un avantage supplémentaire autour d'une région urbaine importante où il y aura beaucoup d'options différentes, on peut envisager un péage explicite.
À partir de cela, on peut dès le début établir les avantages que cela représente pour le gouvernement en terme de coûts, etc, parce que le processus d'appel d'offres est ouvert, transparent, parce qu'il y a un certain nombre de firmes qui soumissionnent à l'échelle nationale en fonction de partenariats constitués dans chaque région, ce qui fait que la soumission la plus économique l'emporte dans chaque région.
On peut ensuite s'assurer que les avantages locaux sont respectés et que l'on peut maintenir les frais d'exploitation à un niveau raisonnable à long terme. Il faut introduire des concepts d'analyse de coût en utilisant les meilleures technologies possibles, etc.
Cela nous amènerait à deux, trois ou quatre entreprises au Canada qui seraient en mesure de soumissionner pour des contrats internationaux importants. Cela faciliterait aussi en fin de compte toute la question de l'exportation de technologie.
C'est donc une option pour ce qui est de faire avancer les choses plus rapidement et demander au secteur privé de regrouper ses ressources et de s'occuper des équipements laissés à l'abandon, des régions rurales du pays, etc.
Le président: Vous savez, j'ai l'impression que ces gens sont très enthousiastes et que ce côté-ci de la table ne dit pas grand chose. Cela vous semble-t-il sensé? C'est vous qui allez devoir payer.
Mme Ward: Oui, tout à fait sensé. J'apprécie que l'on reconnaisse qu'il y a plus d'une solution possible. Que l'on reconnaisse que la composition des partenariats changera selon les enjeux locaux. Que l'on semble lentement accepter l'idée qu'il faut penser globalement et agir localement et que le gouvernement fédéral semble prêt à s'occuper de «penser globalement» à ce que devrait être un réseau national routier dans le contexte des réseaux routiers provinciaux.
Nous sommes totalement d'accord là-dessus. Il n'y a aucun doute. Moya nous a dit comment nous pourrions financer cela à long terme. Le vérificateur général nous a dit que nous avons maintenant une loi qui nous permet de le faire. Je ne vois pas exactement ce que nous faisons ici; nous sommes d'accord. Franchement, je pense que la prochaine étape est de parler aux administrations provinciales afin de savoir ce qu'elles en pensent.
J'ajouterai simplement, un peu égoïstement, que lorsque l'on parle de demande faible, il est toujours possible d'augmenter la demande sur une route. Il faudrait donc y réfléchir. On peut penser au tourisme. Les petits aéroports secondaires, comme le sait bien Moya, songent au tourisme pour accroître le trafic, certains avec beaucoup de succès, comme celui de Kelowna, qui est un aéroport privé.
Nous devrions en faire autant. Devez-vous recommander que le gouvernement fédéral rétablisse une politique routière nationale? Absolument. C'est certain. Allons-y.
Le président: Il est rare qu'on nous dise qu'on est tout à fait d'accord.
Mme Ward: Je sais, je comprends. Mais nous sommes tous d'accord.
Le président: Je vais essayer de ménager un peu plus d'échanges. Brian, je vais essayer avec vous.
M. Hunt: Nous sommes ici, or je crois que la solution se trouve dans la salle. Les points de vue divergent peut-être sur la façon de parvenir au résultat.
Je conviens avec M. Keyes qu'il nous faut un modèle. Je ne suis pas sûr qu'il soit nécessaire de diviser le pays en cinq régions pour le moment, mais peut-être qu'il faut un modèle, qui nous amènera peut-être à la suggestion de M. Thomson, concernant cinq éléments différents. Il faudra alors passer à la mise en application.
Je m'associerais aux propos très éloquents de M. Keyes, quant à la conception d'un modèle comportant des options de financement, des projets, un ordre de priorité et certaines modalités. On pourrait alors se pencher sur certains des points soulevés par M. Thomson, à savoir notamment s'il doit s'agir d'un péage fantôme, sur telle section de route, ou d'un péage implicite sur une autre. C'est, je crois, ce qui est nécessaire. Il nous faut avoir une indication de ce qu'il y a à faire entre aujourd'hui et le moment où l'on pourra vraiment commencer les travaux.
Monsieur le président, vous venez de dire avec beaucoup d'éloquence vous aussi, que nous devons avoir une politique routière nationale. Certes. Nous sommes le seul pays développé du monde qui n'en ait pas. Décidons-nous. Nous avons entendu certaines suggestions excellentes, alors, allons-y. Le problème est que nous pouvons tous nous en aller, mais que si nous n'avons pas de plan d'action nous permettant d'atteindre la prochaine étape... peut-être que la prochaine étape sera votre rapport. Nous pouvons espérer que vous recommanderez que l'on se dote de ce modèle composé de gens qui se trouvent ici, ou d'autres. Et que l'on avance.
Le président: Moya.
Mme Greene: Je ferais simplement une suggestion, monsieur le président. Je suis d'accord avec Debra sur le fait que l'on semble véritablement parvenu à un consensus ici. Il faut un énoncé de politique. Tout le monde est d'accord sur le besoin, et on semble assez d'accord sur le modèle, mais peut-être pas suffisamment. Il nous faut donc un énoncé de politique.
Je suggérerais ainsi que vous annonciez dans le budget une démarche en deux étapes pour la mise en application de cette politique. La première phase comporterait trois éléments. On annonce tout de suite à tout le monde que tout l'argent qui sera dépensé à l'avenir par le gouvernement fédéral pour les routes, sera ciblé sur un réseau routier national. C'est déjà très important. Deuxièmement, vous dites qu'étant donné que le réseau routier national est tellement important pour le gouvernement fédéral en tant que bien d'équipement national, nous allons faire quelque chose que nous n'avons pas fait depuis des temps immémoriaux: nous allons engager des dépenses sur 20 ou 30 ans, par exemple. Le budget indique ensuite que la seconde phase de cette politique est que quelqu'un, peut-être vous, monsieur le président, et le ministre des Transports, ont demandé de réunir des intervenants du secteur privé pour concevoir un mécanisme qui permettra de canaliser ces subventions fédérales soit projet par projet, soit sur une base fédérale-provinciale. Ce n'est pas du tout la même chose.
Louise et Debra, vous nous dites qu'il faut commencer à parler aux provinces et la fonctionnaire en moi, dit oui, bien sûr. Mais je sais aussi que ce peut être très difficile. Comme l'a dit M. Alcock, depuis cinq ans que je suis à Transports Canada, je ne crois pas que l'on soit jamais parvenu à un consensus sur quoi que ce soit de difficile avec toutes les provinces. Du moins pas suffisamment longtemps pour réaliser la chose. Donc, il faut effectivement essayer et ne pas se décourager afin que finalement tous les gouvernements provinciaux partagent cet objectif mais il faut en même temps commencer à agir.
Nos dirigeants politiques vont devoir prendre une décision importante, à savoir, déterminer si les fonds fédéraux seront affectés à des projets précis ou bien adopter l'approche traditionnelle, c'est-à-dire un accord de partage entre les provinces et le fédéral.
Voilà donc ma suggestion. Vous pouvez annoncer ces deux choses maintenant, créer votre groupe et ensuite déterminer une nouvelle façon de dépenser votre argent dans trois ou quatre mois.
Le président: Merci, Moya. Monsieur Bélanger.
M. Bélanger: Je suis d'accord avec plusieurs de vos observations. À mon avis, l'une des premières choses qu'il nous faut, c'est un énoncé de politique. Je pense que c'est un des problèmes qui explique le manque d'intérêt et l'absence de mesures par le passé.
En écoutant les propos de Moya, je me rends compte qu'il y a un aspect très difficile des relations fédérales-provinciales, car c'est le gouvernement fédéral qui décide que de nouvelles routes seraient souhaitables, mais c'est à vous de les construire et de les payer. Prenez le modèle américain. Dans ce pays, les routes relèvent d'un État individuel, mais le financement accordé par le niveau fédéral est suffisamment important pour permettre un consensus rapide dans bien des cas. C'est une différence majeure, par rapport au Canada. Il est clair que nous devons faire participer les provinces.
Je pense qu'il nous faut d'abord un énoncé de politique. Et un certain accord fédéral-provincial. J'estime que la suggestion de Moya est très raisonnable pour ce qui est d'obtenir un engagement de la part du gouvernement fédéral, mais il faut le faire de façon à encourager un certain consensus parmi les provinces. À mon avis, la seule façon de le faire, c'est en offrant de l'argent ou du financement, autrement les provinces vont continuer à faire comme elles ont toujours fait, elles vont discuter sans fin, pour se mettre d'accord de façon provisoire sur certaines questions, tout en restant généralement en désaccord.
Jusqu'ici nous n'avons pas eu de succès et à moins d'obtenir un engagement très fort de la part du gouvernement fédéral, il sera très difficile de créer le consensus nécessaire pour construire un réseau.
Le président: En adoptant la suggestion de Moya concernant la structure de politiques, nous pourrions offrir un cadre avec la possibilité d'une participation provinciale, comme l'ont proposé M. Thomson et d'autres. Si une province décidait d'accepter cette offre, il est bien possible que les autres s'y rallient rapidement.
M. Bélanger: Ce serait très utile.
Le président: Si nous avions une certaine quantité d'argent sur la table. Comme vous l'avez mentionné, l'argent finit curieusement par créer le consensus.
Monsieur Redfern.
M. Redfern: Merci.
Pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui? Pourquoi un plan de réseau routier national n'a-t-il pas déjà été mis en vigueur? L'occasion s'est présentée en 1992. Qu'est-ce qui a mis le holà? Qu'est-ce qui a empêché son exécution? Je pense qu'on n'y a pas donné suite à cause d'un souci financier de la part du gouvernement fédéral, la crainte que le public n'était peut-être pas prêt à l'appuyer autant que nécessaire. Qu'est-ce qui s'est passé pour faire disparaître ces obstacles...
Quelqu'un a demandé si les provinces allaient suivre. Lorsque le programme d'infrastructure a été annoncé il y a quelques années, on disait que les provinces et les municipalités n'avaient pas d'argent et on se demandait si la proposition allait susciter de l'intérêt. Elles se bousculaient pour participer avec leur part d'argent.
Comme d'autres l'ont fait remarquer, la différence maintenant, c'est que le public y est beaucoup plus favorable que par le passé. Les conditions se sont nettement détériorées. Nous avons entendu parler de nombreux exemples de financement novateur, un financement qui a donné de bons résultats dans d'autres domaines. On nous parle aujourd'hui de nouvelles technologies. Alors si c'était déjà le bon moment il y a trois ou quatre ans, maintenant c'est le moment idéal. C'est peut-être un avantage pour nous d'avoir attendu, car nous avons de meilleurs outils et une meilleure méthodologie et nous comprenons mieux la situation.
Nous parlons, comme vous l'avez dit, monsieur le président, non pas du réseau routier dans sa totalité mais du système routier national. Quand on dit national, on parle de tout le Canada. Quand on parle de tout le Canada, on dit que c'est le gouvernement fédéral qui doit assumer la direction. Il doit en prendre la responsabilité. Il doit maintenant s'engager et commencer à agir.
Je reconnais que nous semblons être prêts à nous y mettre maintenant. Je pense que le gouvernement fédéral s'engage, et il pourrait aussi s'en voir attribuer le crédit.
Je pense que c'est le moment d'effectuer ces investissements. Selon moi, nous avons les outils voulus. L'essentiel, c'est de démarrer. Comme Moya l'a dit, nous pouvons le faire dans le cadre d'une entente en deux étapes si nous voulons avoir exactement le modèle voulu, étant bien entendu que nous avons déjà reconnu qu'un modèle unique ne répondra pas à toutes les attentes. Nous allons faire appel à divers outils et systèmes pour en arriver à proposer une structure nationale.
En somme, ce que nous vous disons de faire, c'est de recommander que le gouvernement mette en place ce qu'on appelle le système routier national et que nous utilisions les outils, l'infrastructure et les méthodologies mentionnés et que nous allions de l'avant. Je peux vous garantir que les provinces - comme elles étaient disposées à le faire en 1992 - emboîteront le pas pour en bénéficier.
Le président: Si vous le permettez, j'aimerais proposer une autre variante intéressante à ce sujet. Il y a quelques années j'ai participé à une étude qui portait sur les facteurs de changements au gouvernement. Le facteur le plus déterminant était ce processus de gestion des situations d'urgence.
Si je le mentionne, c'est parce que nous avons ces très grandes pressions financières, et qu'on ne peut plus agir comme autrefois. Si nous n'avions pas de déficit, nous pourrions probablement nous contenter d'affecter des sommes ici et là, de conclure une entente ou une autre. Mais comme nous ne disposons pas d'argent, nous sommes contraints d'envisager une autre façon de gérer nos fonds.
Je demeure persuadé que même si demain le Canada remportait le gros lot et pouvait liquider sa dette, cela demeurerait une façon préférable d'agir.
M. Redfern: Exactement.
Le président: C'est une meilleure façon, une façon plus efficace et plus efficiente de construire des routes. Nous n'aurions pas pu en arriver là si nous n'avions pas subi des pressions politiques qui nous ont finalement forcés à faire face à la situation, et il y a des avantages inhérents à cela, mis à part les simples contraintes financières. En théorie, nous aurons ainsi de meilleures routes.
M. Redfern: Cela nous forcerait à devenir plus concurrentiels et à utiliser plus efficacement nos fonds. Je pense que vous avez parfaitement raison.
Le président: Monsieur Swain.
M. Swain: Je réfléchissais à toutes les occasions où j'ai essayé de favoriser un consensus provincial sur des choses qui semblaient évidentes. Je ne me souviens pas d'un seul consensus provincial sur quelque question que ce soit qui ait duré au-delà d'un déjeuner. Traditionnellement, le gouvernement fédéral tente d'acheter l'assentiment des provinces, une voie que nous ne pouvons plus prendre. Ce genre de crise est inéluctable.
Dans une très large mesure, la plus grande contribution financière que le gouvernement fédéral puisse faire en matière de refinancement de nos infrastructures nationales, c'est la politique financière que nous appliquons depuis deux ou trois ans maintenant, ainsi que la politique monétaire, que la Banque du Canada applique depuis un peu plus longtemps encore.
Ce qui me ramène à ce que Moya disait tout à l'heure. Notre pays connaît maintenant un climat financier qui fait l'envie de la plupart des autres pays du G-7, notamment les États-Unis. Il est maintenant beaucoup plus facile de gérer nos finances qu'on aurait pu espérer le faire encore en 1994.
Il vaut la peine de s'arrêter là-dessus un instant, car nous n'aurions pas pu avoir ce genre de discussion en 1994. Nous faisions face au mur, nous étions au bord du précipice, si l'on peut dire. Ce n'était tout simplement pas possible alors. Ça l'est devenu maintenant. Maintenant, le Canada est l'enfant chéri des marchés boursiers. Même le Financial Times, imaginez donc, a publié un bel article à notre sujet la semaine dernière et causé ainsi une belle petite remontée du marché obligataire.
Au Canada, la courbe de rendement des obligations est inférieure à ce qu'elle est aux États-Unis. On en est maintenant à environ dix ans. On n'avait pas vu cela depuis longtemps. Le dollar subit une forte pression à la hausse.
Voilà quelques-uns des avantages que l'on obtient en maîtrisant des dépenses qui, au fil des années, étaient devenues exorbitantes. Il faut faire bien attention de ne pas remettre tout cela en question. Si on ne dépasse pas quelques centaines de millions de dollars par an, le programme ne devrait pas être préjudiciable au crédit du Canada, c'est-à-dire à nos possibilités d'emprunt.
Mais il me semble peu vraisemblable qu'un gouvernement prudent puisse s'engager, au cours des prochaines années, à financer ne serait-ce que la moitié ou le tiers des montants mentionnés aujourd'hui. Je ne pense pas que cela soit possible.
Il faut être très prudent, en ce qui concerne aussi bien la disponibilité des crédits que les préoccupations légitimes des provinces quant à une utilisation abusive du pouvoir de dépenser du fédéral dans un domaine litigieux au plan constitutionnel; il faut éviter de faire des vagues à ce sujet.
Il existe un certain nombre de mécanismes recommandables. Peut-être à cause des élections qui s'en viennent, j'entends dire de temps en temps qu'il pourrait y avoir un autre programme d'infrastructure. Soyons opportunistes. S'il doit y avoir un autre programme d'infrastructure et qu'on débloque des fonds, comme toujours, pour construire des routes - c'est ce que l'on dit cette année - veillons à ce que tout programme de cette nature comprenne ces nouveaux mécanismes qui assurent un meilleur rendement.
Deuxièmement, nous devons faire un effort d'éducation pour faire connaître ces techniques. Je suis très impressionné par le consensus qui existe dans cette pièce. Je pense qu'ensuite, il faudrait convaincre les professionnels des marchés publics du côté gouvernemental, les experts en approvisionnement et sans doute les experts en transport dans les gouvernements provinciaux, de même que les responsables politiques des gouvernements provinciaux.
À cet égard, M. Keyes a fait une excellente remarque. Nous avons besoin d'une tribune qui permette de rejoindre toutes les autres parties et les gouvernements provinciaux sans donner une impression de menace, et qui fasse nettement appel au secteur privé ainsi qu'à tous les intérêts représentés de ce côté-ci de la table, en mettant l'accent sur les réussites. Il faut considérer les modèles de réussite. Il faut considérer la technique. Il faut l'étudier et la décrire. Il faut en informer les gens qui vont pouvoir l'utiliser.
Il me semble, monsieur le président, que ce que propose M. Keyes est sans doute l'élément le moins controversé, le plus acceptable, que devrait comporter notre politique nationale en matière de réseaux routiers.
Le président: Ce qui montre très bien l'expérience de M. Keyes sur cette question.
Permettez-moi, monsieur Swain, de revenir sur ce que vous avez dit à propos du gouvernement qui, vraisemblablement, ne devrait pas procéder à des investissements importants. Le montant de 1,5c. proposé par l'ATC et les 2c. proposés par l'organisme de M. Hunt devraient donner entre 600 et 700 millions de dollars par an, ce qui correspond à la participation prévue du gouvernement fédéral et qui, avec des versements équivalents des provinces, donneraient un programme de niveau B de 18 milliards de dollars sur une période de 10 ans. Voilà d'où venaient ces chiffres.
Moya et Jim ont raison en ce sens que... Je crois cependant, Moya, qu'au cours des dernières années, le montant annuel de 250 millions correspondait à un engagement permanent à long terme. Même s'il est présenté maintenant à court terme, il peut avoir des effets à long terme. Je crois qu'on en est à environ 350 millions de dollars cette année.
Je suis d'accord avec ce que dit Moya. Si le gouvernement fédéral s'engageait, non pas à consacrer plus d'argent aux routes dans l'immédiat, mais à continuer à verser 250 millions ou 350 millions de dollars, pendant les 20 années à venir - il ne s'agirait pas de mettre plus d'argent, ni d'accroître la pression sur le déficit ou le plan budgétaire, mais simplement de prendre le montant qu'il consacre actuellement aux routes, comme cela s'est toujours fait par le passé, même si les prévisions ne s'échelonnaient que sur deux ans à la fois, et de dire que cet argent sera là pendant encore... Il en résulterait un effet de levier considérable sur le renouvellement du réseau routier.
Quand nous aurons ramené le déficit à zéro et que nous aurons à prendre des décisions quant à l'opportunité de réduire les impôts, d'améliorer les services ou de payer la dette, il serait alors envisageable de hausser le niveau pour qu'il se rapproche de deux cents. Cela viendra peut-être plus vite qu'on ne le pense. Même sans cela, il me semblait que vous pêchiez un petit peu par excès de prudence, quand vous disiez que vous ne prévoyiez pas vraiment de progrès en ce sens. D'après ce que nous entendons ici aujourd'hui, il semble que les choses pourraient bouger plus rapidement que...
M. Swain: C'est toujours une possibilité, bien entendu, mais même quand nous aurons réussi à ramener le déficit à zéro, nous aurons un niveau d'endettement à l'échelle nationale qui sera égal ou à peu près égal à la totalité de notre PIB. C'est là un niveau d'endettement astronomique. À vrai dire, le service de la dette constitue un fardeau écrasant. De plus, une part inquiétante de cette dette est détenue à l'étranger. Nous sommes à la merci des banquiers étrangers, plus que ne devrait l'être, à mon avis, un pays qui se respecte.
Je suppose que l'actuel ministre des Finances, ou toute personne qui pourrait lui succéder, aurait au nombre de ses principaux objectifs financiers à long terme, la réduction de la dette en pourcentage du PIB. J'en conclus pour ma part que nous serons soumis pendant très longtemps encore à des pressions bien réelles, pour ce qui est de limiter les dépenses. S'agirait-il donc de prendre deux cents sur l'actuelle taxe sur le carburant ou de créer une nouvelle taxe? Cette dernière possibilité serait aussi très attrayante pour l'actuel ministre des Finances et pour ses successeurs.
Le président: Excusez-moi, je ne veux pas monopoliser la discussion et je sais qu'il y en a beaucoup qui n'attendent que l'occasion d'y participer, mais le niveau de deux cents correspond simplement au niveau de dépenses qui a été établi, à savoir 700 millions de dollars. Si toutefois, les dépenses demeurent au niveau actuel, soit de 250 ou de 350 millions de dollars, le plan financier du gouvernement ne se trouvera soumis à aucune pression additionnelle. On ne fera que maintenir les dépenses au niveau actuel.
Bon, avant que Warren ne fasse une crise cardiaque...
M. Thomson: J'ai ici quelques chiffres qui peuvent nous guider. Si le niveau de dépenses exigé était de 5 milliards de dollars, le gouvernement fédéral aurait à verser 2,5 milliards de dollars. Si le gouvernement fédéral était prêt à prendre un engagement financier de cet ordre sur 30 ans, il en coûterait entre 250 et 350 millions de dollars. En mettant les dépenses au maximum, c'est-à-dire à 18 milliards de dollars, la part du gouvernement fédéral serait de 9 milliards, ce qui entraînerait des dépenses fédérales d'environ 900 millions de dollars.
Ainsi, selon qu'on se situe à l'extrémité inférieure ou à l'extrémité supérieure de la fourchette, on s'engagerait simplement à maintenir pendant 30 ans les dépenses à leur niveau actuel ou à verser environ 900 millions de dollars. Mais il faut absolument prendre un engagement sur 30 ans.
Le président: Attendez un instant, Warren; 900 millions de dollars, c'est environ 200 millions de plus que ce à quoi je suis arrivé dans les calculs que j'ai faits sur le dos de mon enveloppe. C'est donc que les droits que vous incluez dans votre équation sont trop élevés, mais nous en reparlerons.
Alors, monsieur Patten, vous êtes le seul qui n'ait pas encore pris la parole, et je vous suis reconnaissant d'être là. Je sais que vous avez eu du mal à vous rendre. Je vous accorderai plus que les 60 secondes que j'accorde à tous les autres, mais guère plus.
M. Mitch Patten (Canadian Highways International Corporation): J'essayerais de ne pas prendre beaucoup plus de temps que cela.
Permettez-moi tout d'abord de vous demander d'excuser mon retard. J'ai passé la matinée, à partir de 6 h 45, à enquêter sur un autre aspect de notre secteur des transports, à savoir les différents salons d'aéroports.
Je veux traiter de deux points. Premièrement, je voudrais renchérir quelque peu sur ce que John Beck a dit tout à l'heure, à savoir qu'il ne s'agit pas vraiment ici de décider du meilleur scénario à suivre. M. Hunt a dit il y a quelques minutes que ce qu'il nous fallait faire en fait, c'était de trouver le modèle. Je ne suis pas tellement sûr que c'est ce que nous devrions faire ici. Je crois que nous devrions plutôt chercher à comprendre quelle est la gamme de possibilités qui s'offre à nous, pour ensuite nous engager à appliquer celle qui convient le mieux selon les circonstances.
Si, par exemple, la question est de savoir si nous devrions faire comme ce qu'a fait le gouvernement de l'Ontario dans le cas de la 407, le gouvernement ayant assumé le financement initial du projet pour ensuite en faire payer la note aux automobilistes au moyen de péages, ou comme l'a fait la Nouvelle-Écosse dans le cas de la 104, le secteur privé ayant participé au financement initial pour ensuite recouvrer ses frais directement des automobilistes, ou encore opter pour la formule du «péage fantôme», selon laquelle le secteur privé assume le financement initial et est ensuite remboursé par le gouvernement, la réponse serait sans doute affirmative. Il ne s'agit pas de choisir entre les différentes possibilités, mais bien d'appliquer celle qui convient dans les circonstances.
Même après que nous avons décidé du modèle qui convient à un projet en particulier, il y a un certain nombre de gradations possibles. Si, par exemple, le gouvernement de l'Ontario optait pour le modèle selon lequel il assumerait le financement initial pour ensuite imposer des droits de péage et qu'il constatait que le montant qu'il pourrait raisonnablement imposer ou que les automobilistes seraient prêts à payer comme droit de péage ne lui permettrait de recouvrer que 80 p. 100 ou 60 p. 100 de son investissement, cela serait-il mauvais? Il me semble que non. La formule ne permettrait peut-être pas de recouvrer la totalité des frais, mais ce n'est pas une mauvaise formule.
Le nombre de possibilités est donc pratiquement infini, et je ne crois pas qu'il s'agisse ici de trouver le modèle. Il s'agit de s'assurer que nous comprenions les possibilités qui s'offrent à nous et que nous nous engagions à les appliquer - si bien qu'au bout du compte, il s'agit de recueillir l'information nécessaire pour ensuite faire preuve de leadership et donner l'élan voulu.
C'est pourquoi, en réponse à la question de savoir si nous avons besoin d'un énoncé de politique, je dirais que oui, nous en avons besoin; mais ce n'est pas parce que nous avons besoin de choisir entre les différents modèles ou de décider de... C'est parce que nous nous devons de faire preuve de leadership et de donner l'élan voulu pour que nous allions dans la direction ou dans les directions choisies. Le comité s'est d'ailleurs déjà engagé dans cette voie. Il a déjà fait preuve de leadership et a donné le coup d'envoi, et l'énoncé de politique dont parlait Moya Greene serait un autre exemple de ce qu'il faudrait faire.
Deuxièmement, je voudrais revenir à ce que vous disiez il y a un moment, monsieur le président, au sujet du cycle électoral et de la mesure dans laquelle cela pourrait poser un problème. À ce propos, nous avons constaté quelque chose d'intéressant au sujet du consensus auquel il est possible d'en arriver entre les partis. C'est un gouvernement néo-démocrate qui a lancé le projet de construction de la 407 en Ontario; ce sont des gouvernements libéraux au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse qui étaient à l'origine des projets dans ces deux provinces; et c'est un gouvernement conservateur qui a en quelque sorte fait sien le projet que les néo-démocrates avaient lancé en Ontario.
Bien entendu, il n'existe aucune garantie dans notre régime quant à la façon dont réagiront les partis qui se succéderont au pouvoir, mais le cycle électoral ne posera peut-être pas autant de problèmes dans le domaine qui nous intéresse que dans d'autres domaines relevant des orientations gouvernementales, et ce, en raison du consensus qui semble vraiment se dégager à ce sujet. Le cas de l'Ontario l'illustre parfaitement. Le gouvernement actuel ne s'est pas du tout gêné pour renverser les décisions politiques prises par le gouvernement qui l'a précédé, mais dans ce cas-ci, il a fait sienne une des décisions de l'ancien gouvernement.
La même chose s'est produite dans le cas des trois partis politiques, de sorte que le cycle électoral pourrait ne pas poser autant de problèmes qu'on pourrait le penser.
Voilà ce que je voulais ajouter à ce qui avait déjà été dit.
Le président: J'ai sur ma liste M. Beck, M. McRoberts, M. Atkinson, M. Redfern, et je n'ai que 19 minutes. Allez droit au but, mesdames et messieurs, je vous en prie.
M. Beck: Je serai bref, monsieur le président.
Vous avez interrogé M. Atkinson quant aux préoccupations des membres de son association relativement aux rapports entre ces grandes entreprises et les acteurs locaux. En Nouvelle-Écosse, où on nous a confié la construction d'un élément de l'infrastructure à petite échelle, nous avons accordé plus de 80 p. 100 de tous les travaux en sous-traitance à des entreprises locales. Ainsi, la participation des grandes entreprises n'exclut pas le recours aux ressources locales. Au contraire, partout où nous n'avons pas de présence, nous faisons appel à ces ressources locales de toute façon.
Pour ce qui est de la façon de nous rendre où nous voulons être, je suis d'accord avec M. Keyes pour dire qu'il faudrait créer une commission qui inclurait des représentants du secteur public et du secteur privé. Je ferais toutefois une mise en garde en ce qui concerne le choix de représentants du secteur public; si parti pris il y a, il faudrait qu'il s'exerce en faveur de personnes qui se sont montrées disposées à envisager une certaine participation du secteur privé à l'infrastructure routière.
Le président: Y a-t-il quelqu'un qui ne réponde pas à cette description?
M. Beck: Il me semble par ailleurs qu'il faudrait aller encore plus loin que ce que vous proposez et confier à la commission le mandat de mettre le secteur au défi de venir lui présenter des solutions aux problèmes dont nous avons discuté aujourd'hui, afin de stimuler la réflexion parmi les membres de la commission.
Je souscris entièrement aux propos que j'ai entendus ici aujourd'hui. Je crois qu'il y a consensus. Mettons-nous donc au travail.
Le président: Merci, monsieur Beck. M. McRoberts.
M. McRoberts: Il s'agit d'un tout petit point en ce qui concerne la question de la comptabilité dont nous avons parlé tout à l'heure, et je vous le présente très rapidement.
Quand on a à choisir entre diverses possibilités, il est important de pouvoir en calculer le prix selon des données comparables. Pour cela, nous croyons qu'il serait utile que votre comité envisage de recommander encore une fois au gouvernement de s'empresser de donner suite à son engagement de 1995 visant la capitalisation dans son système de comptabilité des biens de production.
Nous avons été à même de constater que la politique actuelle en matière de comptabilité décourage en fait les investissements à long terme dans les immobilisations en raison de la façon dont ces biens sont comptabilisés. Cette politique crée aussi des problèmes en ce sens qu'elle fausse les comparaisons, les données n'étant pas vraiment comparables.
Quand un investissement est considéré comme une dépense, il en résulte des problèmes. Si le gouvernement donne suite à son engagement de modifier ses règles comptables, il sera alors possible d'en arriver à une comparaison plus exacte des différentes possibilités - de mieux comparer, par exemple, les avantages d'un investissement direct par l'État dans un bien immeuble par opposition aux avantages d'une formule prévoyant un péage fantôme. Les décideurs pourront aussi se faire une meilleure idée de la situation réelle.
Le président: Merci pour cette intervention, monsieur McRoberts. Je suis entièrement d'accord avec vous. Nous avons constaté à notre comité qu'il est très utile de recommander au ministre des Finances de faire ce qu'il s'est déjà engagé à faire. Le taux de mise en oeuvre est bien plus élevé que pour les autres recommandations que nous faisons.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Atkinson.
M. Atkinson: Merci, monsieur le président. Je serai très bref.
Tout d'abord, avons-nous besoin que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership et qu'il adopte une politique nationale sur le réseau routier? Absolument. Il y a longtemps que cela aurait dû être fait. J'aime bien aussi la proposition de M. Keyes.
Il y a deux choses qu'il ne faut pas oublier, et je crois que Moya Greene y a fait allusion. Nous partons tous du principe que le partage serait 50-50 du moins dans les études fiscales, etc., et nous nous demandons comment diable le gouvernement fédéral arrivera à payer sa part.
Au moment de nous engager dans le processus, je suis entièrement d'accord avec M. Patten pour dire que la même formule ne convient pas dans toutes les circonstances. Il ne faut toutefois pas oublier que l'important, c'est de savoir qui décidera au bout du compte du modèle qui sera adopté pour tel ou tel projet. C'est là une question sur laquelle la commission devra se pencher.
Deuxièmement, vous savez quoi? Même quand la part fédérale est de 50 p. 100, c'est normalement la province qui donne les marchés. Dans cette optique, et si nous revenons à ce que disait Moya Greene, allons-nous maintenir les ententes de contribution 50-50, même si ce n'est pas le modèle qui convient, quitte à renégocier le tout plus tard, ou le gouvernement fédéral devrait-il aller jusqu'au bout de ses convictions et dire: «Ce réseau routier national est tellement important qu'il faut procéder de telle façon. En nous fondant sur les avis que nous avons reçus du secteur privé, des spécialistes du domaine, des usagers, etc - du public canadien finalement - voici ce que nous avons décidé qu'il fallait faire»?
Voilà des éléments d'une extrême importance. Ils sont cruciaux. Monsieur le président, votre comité devrait probablement dans vos recommandations, envisager le mandat d'une commission comme celle que semble évoquer M. Keyes.
Le président: Merci, monsieur Atkinson. Monsieur Redfern.
M. Redfern: Quelques commentaires rapides.
Nous parlons de déficits en termes de dollars. N'oublions pas que nous avons un déficit en termes d'infrastructure. Puisque nous tentons de faire le rapport entre le coût du financement, dans la mesure où nous retardons la rénovation ou l'entretien des routes, nous pouvons considérer que les coûts pourraient aller jusqu'à quintupler pour l'entretien de base ou la reconstruction. À mesure que le temps passe, la prudence budgétaire impose d'agir au moment opportun.
Deuxièmement, M. Keyes parle de créer un groupe modèle. Or, il existe déjà un groupe du genre en Colombie-Britannique. Il vaudrait peut-être la peine de savoir ce qu'il a pu faire à l'échelle provinciale. Ce serait peut-être utile.
En troisième lieu, je tiens à dire que, puisque nous parlons de chiffres, Michael, j'estime que c'est le 50-50 que nous envisageons. En termes d'engagements à longue échéance, il est question d'environ 500 millions par années pour 20 ou 30 ans, si on englobe aussi bien la participation provinciale que fédérale.
Le président: Madame Ward, aviez-vous un commentaire?
Mme Ward: En effet, très rapidement. Merci.
Je ne voudrais pas susciter un tollé et je sais qu'il y a consensus ici. Cependant, je ne crois pas qu'il sera total lorsque nous quitterons cette salle. Plus tôt, à l'extérieur, nous parlions de l'appui au Programme d'infrastructure. Tout n'est pas clair et net à ce sujet. La mise en oeuvre de 1994 l'a bien montré. Et les provinces ont fait savoir qu'elles ne voulaient pas de routes, mais qu'elles voulaient plutôt collaborer avec les municipalités. Elles voulaient des égouts et des centres des congrès. Et à ce moment-là, le gouvernement fédéral a reconnu que les municipalités auraient le dernier mot.
Évidemment, l'avantage d'un tel système - et M. Swain et Mme Greene pourront corriger mes erreurs de détail au besoin - était de permettre au gouvernement fédéral d'affecter 30 cents par dollar de financement, ce qui permettait d'aller beaucoup plus loin, et, à cette époque de l'année, au moment des élections, c'était là une très bonne chose, aussi bien sur le plan politique que sur le plan de la politique gouvernementale.
Nous aurons donc à faire valoir nos points de vue. Ne nous faisons pas d'illusions. Ce ne sera pas facile. Les provinces ont effectivement leur mot à dire et, soyons réalistes, elles ne vont pas être d'accord. Cependant, j'ai rarement participé à un comité permanent qui était allé si vite et si loin. Voilà qui me réconforte et qui me donne confiance pour l'avenir.
J'appuie l'idée de M. Keyes. J'aimerais que cela se concrétise rapidement. S'il faut jouer à la carotte et au bâton avec chacune des provinces et travailler projet par projet, soyons réalistes et commençons dès maintenant par ce qui doit être fait le plus tôt possible.
Merci.
Le président: Merci, madame Ward.
Avant de passer au prochain commentaire, je dois signaler qu'il ne nous reste que 12 minutes environ. Le greffier s'apprête à appeler un taxi pour un des membres du comité qui doit se rendre à l'aéroport. Y a-t-il quelqu'un d'autre qui souhaite faire appeler un taxi?
Merci.
M. Keyes: On donne dans le covoiturage, monsieur le président.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Roy, vous avez 60 secondes.
M. Cullen: Merci, monsieur le président.
C'est de l'art du possible qu'il est question, en ce moment, me semble-t-il. Nous avons fait aujourd'hui un travail fort utile. L'idée de créer une sorte de commission est excellente, dans la mesure où nous n'aboutissons pas à quelque chose comme l'enquête sur la Somalie.
Une voix: Il n'y aura pas d'avocats.
M. Cullen: Un aspect qui vient s'ajouter à celui des disparités régionales et des oppositions entre le milieu rural et le milieu urbain est celui du financement. Il nous faut trouver des solutions novatrices en la matière, sans quoi, il n'y aura pas autant de construction routière qu'il le faudrait.
Je vous remercie de votre apport d'aujourd'hui.
Le président: Gordon Thompson, à vous le dernier mot pour ce côté de la table. Évidemment, c'est moi qui aurai le dernier mot.
M. Thompson: Je tiens simplement à dire, monsieur le président, que je consacre tout mon temps au domaine du financement du secteur public, en rapport avec les provinces et ainsi de suite. Je tiens tout simplement à faire observer que les provinces ont réussi à faire porter leur attention sur autre chose que la réduction du déficit - autrement dit, elles maîtrisent leur déficit, ou encore elles l'ont éliminé ou s'apprêtent à le faire l'année prochaine - de sorte que leur façon d'envisager de telles initiatives n'est pas du tout la même. Lorsqu'on pense en termes de gestion de la dette plutôt que de réduction du déficit - autrement dit, en termes de transfert de dépenses d'une génération à l'autre - et que les contribuables tiennent mordicus à ce que le problème de la dette soit réglé, les idées qui ont été exprimées autour de cette table prennent une toute autre connotation.
Aujourd'hui, Moya a dit quelque chose qui m'a horripilé. Sans vouloir être critique, lorsque j'entends quelqu'un dire que le Canada n'a pas de problème de crédit, alors je dois dire pour ma part que les contribuables ne pensent pas du tout la même chose. Nous avons trop de crédit.
Ce que j'ai à dire, essentiellement, c'est que les provinces qui maîtrisent leur déficit et qui désormais se consacrent plutôt à la gestion de la dette vont être beaucoup mieux disposées que vous ne pensez à accueillir le modèle que proposerait ce comité, à savoir la construction d'un réseau routier national selon des modalités qui font qu'elles n'auront pas à emprunter - tout comme le gouvernement fédéral n'aura pas à emprunter - puisqu'il s'agira de faire appel au secteur privé.
Le président: Merci, Gordon. Nous avons discuté de cette question avec un certain nombre de ministres provinciaux responsables des routes ainsi qu'avec un certain nombre de premiers ministres. Je crois que vous traduisez très bien l'esprit qui semble régner parmi nos interlocuteurs. Cependant... Moya et Harry ont beaucoup plus d'expérience de ce genre de chose que moi. Il semble que le fait de réunir tout le monde ensemble donne un résultat très étrange.
Mais, permettez-moi de faire le point brièvement, au moment où nous terminons nos travaux. Pour la suite des choses, nos deux recherchistes et rédacteurs très compétents vont s'efforcer de faire la synthèse de tout ce qui a été dit jusqu'à maintenant et de formuler une série de recommandations dont le comité sera saisi dès la première semaine de notre retour.
Il s'agira de voir jusqu'à quel point nous pourrons dégager un consensus parmi les divers partis qui siègent à la Chambre... Je dois dire que le comité s'est grandement efforcé d'assurer le consensus, d'éviter les questions de politiques régionales pour plutôt faire porter la discussion sur cette grande question de savoir comment on peut bâtir un réseau routier très efficace. Nous avons été en mesure de le faire. Et je crois que nous allons pouvoir poursuivre dans la même veine et déposer devant la Chambre un rapport unanime. J'espère bien que nous pourrons déposer un tel rapport - sans vouloir causer chez le greffier une crise cardiaque - vers la fin de la deuxième semaine après notre retour, la troisième au plus tard, selon les échéances d'impression et ainsi de suite.
Je dois dire pour ma part que j'ai toujours constaté, lorsque je participe à des réunions de ce genre, que ma véritable trouvaille ne me vient pas avant la soirée. C'est au moment où je suis au lit à la maison, ou dans l'avion, ou dans la douche, que l'idée surgit. Si ce genre d'idée vous vient et que vous vous sentez tout à fait obligé de la partager avec moi, de grâce faites vite. Je suis tout à fait sérieux. Si vous estimez que nous avons oublié quelque chose et qu'il vous semble essentiel de nous en saisir, écrivez-moi une lettre. Nous allons l'intégrer à ce qui est en cours.
Lorsque vous aurez reçu le document, lorsque nous aurons déposé le rapport devant la Chambre, j'ose dire que, dans une certaine mesure, tout dépendra de vous. Vous devez bien comprendre que nous participons à un processus de comité et non pas à un processus gouvernemental.
Quelqu'un m'a approché l'autre jour pour me demander s'il devait investir dans l'achat de nouveau matériel, étant donné que j'étais le président du Comité des transports et que la question routière m'intéressait. Je lui ai répondu que toute décision qu'il pourrait fonder sur mes opinions ou mon pouvoir risquerait de mettre en danger son avenir économique.
Donc, si nous avons une idée valable, une idée qui tient debout... c'est ce que je crois. Il faut bien dire que le ministre des Finances, le président du Conseil du trésor, le ministre du Commerce, le ministre des Transports et le ministre du Tourisme n'auraient pas comparu devant nous et n'auraient pas passé le temps qu'ils ont passé à étudier cette question s'ils n'étaient pas d'avis qu'il s'agissait d'une question importante. J'ai donc bien confiance que nous allons aboutir à quelque chose, mais il importe que vous portiez les débats encore plus loin.
Je dirais, pour terminer, que nous sommes tous des gens fort occupés. Nous travaillons tous très fort. Vous avez des postes très importants. Je vous suis bien reconnaissant d'être venu aujourd'hui et d'avoir pris le temps de réfléchir sur ces questions. L'enjeu est important. J'ai trouvé le processus fascinant et je suis convaincu que mes collègues sont du même avis. J'espère que nous allons rédiger un rapport susceptible de faire avancer le débat.
Merci beaucoup.
Voici qui met un terme à notre réunion.
La séance est levée.