[Enregistrement électronique]
Le lundi 18 mars 1996
[Traduction]
Le président: Je vais maintenant ouvrir la séance et souhaiter la bienvenue à Mmes Atkin et Tyrwhitt, qui représentent l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance.
Comme vous le savez, si nous sommes ici, c'est pour tenter d'améliorer le projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada. D'une façon générale, nous travaillons ainsi: nous disposons d'une heure, et vous êtes tout à fait libres de décider combien de temps vous consacrez à votre exposé. Toutefois, les membres du comité apprécient particulièrement la période de questions et de réponses, ce qui ne les empêchera pas, évidemment, d'écouter attentivement la déclaration pleine d'intérêt que vous allez nous faire. La façon dont nous employons cette heure dépend tout à fait de vous, et en particulier du temps que vous consacrerez à votre exposé.
Encore une fois, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie pour votre intervention. Vous pouvez commencer.
Mme Elizabeth Tyrwhitt (coordinatrice, Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance): Merci. Wendy et moi-même sommes très heureuses d'être ici. Pour nous, c'est un baptême du feu, puisque Wendy a commencé à travailler jeudi, et, pour ma part, c'est aujourd'hui la première journée où je travaille officiellement pour l'association.
C'est jeudi après-midi qu'on nous a invitées à comparaître, si bien que le document que vous avez sous les yeux est un avant-projet. Nous avons fait ce que nous pouvions en l'espace de trois jours, mais nous avons l'intention de rédiger une version définitive d'ici quelques jours.
Notre association est une association sans but lucratif dont le but est de mettre à la disposition des Canadiens des services de garde d'enfants accessibles, abordables, sans but lucratif et de haute qualité. Fondée en 1983, l'association mobilise le soutien d'un grand nombre de secteurs dans toutes les régions du Canada, des secteurs qui, tous, cherchent à défendre la cause de la garde d'enfants au niveau fédéral. Le principal objectif de l'association est d'élargir et d'améliorer le système de garde d'enfants en mettant l'accent sur des soins de haute qualité. L'association prône le développement d'un système de garde d'enfants sans but lucratif, un système complet et abordable auquel toutes les familles canadiennes qui le souhaitent peuvent faire appel.
L'association est financée par le Programme des femmes de Développement des ressources humaines, et également grâce à des dons et aux cotisations de ses adhérents. À l'heure actuelle, nous avons 577 membres dans toutes les provinces et territoires.
L'association est particulièrement heureuse de pouvoir donner son opinion au sujet du projet de loi C-12. De nombreux aspects de ce projet de loi ont été commentés de façon constructive par d'autres organismes, et, pour notre part, nous nous intéresserons tout particulièrement aux conséquences du projet de loi pour le travail et pour la famille, aux épreuves des enfants qui vivent dans la pauvreté, et à l'importance d'un programme national de garde d'enfants qui, seul, peut répondre aux besoins des enfants canadiens tout en offrant à tous les Canadiens la possibilité de mener une vie active.
Notre association est convaincue de la nécessité de réformer le programme de l'assurance-chômage. En effet, c'est un programme qui est devenu beaucoup trop complexe et qui essaie d'accomplir trop de choses à la fois. Son principal objectif est de protéger les gains tirés d'un emploi en cas de chômage temporaire. Avec les années, le programme s'est développé et porte maintenant sur des aspects comme la formation, la redistribution régionale des revenus, la création d'emplois et les compléments de revenu.
Un grand nombre de Canadiens sont actuellement ignorés par le système. Le gouvernement reconnaît cela dans son document de discussion intitulé «Programme: Emploi et croissance. La sécurité sociale dans le Canada de demain». Dans un passage consacré à la sécurité sociale, on trouve les observations suivantes:
- À cause des changements survenus dans le marché du travail, le nombre des travailleurs
canadiens qui ne sont pas couverts par l'assurance au titre des règles actuelles de
l'assurance-chômage a augmenté. Cela touche en particulier les femmes et les jeunes, qui ont
tendance à prédominer dans les secteurs non traditionnels.
Mme Wendy Atkin (coordinatrice, Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance): J'aimerais commencer par discuter de la garde d'enfants sur le plan des possibilités d'emploi. C'est un sujet qui me tient particulièrement à coeur, car Liz et moi-même avons passé ces derniers jours à nous débattre pour faire garder nos enfants, puisque nous avons ces nouveaux postes de coordinatrice. J'aimerais parler tout particulièrement des bons qui sont administrés dans le cadre du système d'assurance-chômage.
La garde d'enfants est étroitement liée aux possibilités d'emploi, en particulier dans le cas de mères de jeunes enfants. Chaque année, le gouvernement fédéral dépense près de 100 millions de dollars pour émettre des bons qui constituent une allocation pour la garde de dépendants et qui aident les bénéficiaires de l'assurance-chômage qui sont en cours de formation à payer les frais de garde d'enfants. Il n'y a virtuellement aucun contrôle sur la façon dont cet argent est dépensé. Cette mesure n'a absolument pas servi à créer des places de garderie réglementées, de qualité. En fait, on peut même dire que les parents qui trouvent un emploi après avoir terminé leur formation sont souvent découragés de l'accepter lorsqu'ils ne peuvent pas trouver de bons services de garde d'enfants.
L'alinéa 61 d) du projet de loi C-12 prévoit que la commission peut «émettre des bons échangeables contre des services et honorer ces bons». Est-ce que cette référence à des bons signifie que ces allocations vont continuer, des allocations qui ne font pas grand-chose pour régler la crise actuelle de la garde d'enfants? Ces 100 millions de dollars seraient beaucoup plus utiles s'ils servaient à créer un système national de garde d'enfants.
Au lieu de cela, le gouvernement devrait considérer le secteur de la garde d'enfants comme une méthode de création d'emplois. D'après le Livre rouge des Libéraux, une personne trouve un emploi en moyenne chaque fois qu'on crée cinq places de garde d'enfants. En dépensant l'argent de l'assurance-emploi pour des services non réglementés, des services à court terme de garde d'enfants, on ne produit pas des solutions dites permanentes et on s'attaque à la moitié seulement de l'équation de l'emploi à laquelle se heurtent les parents canadiens.
La question de la garde d'enfants est également une question de pauvreté parmi les enfants. Les services de garde de qualité non seulement ont des avantages pour les parents sur le marché du travail, mais constituent également une solution à une partie des problèmes de pauvreté écrasante des enfants qui existent actuellement au Canada. D'après un récent rapport du Conseil canadien de développement social, 1,4 million d'enfants canadiens vivent dans la pauvreté. Pour les enfants d'âge préscolaire, cela représente un enfant sur quatre, ou 24 p. 100.
Le projet de loi C-12 s'attaque à la question de la pauvreté grâce au supplément du revenu familial qui viendra compléter le revenu des familles qui bénéficient de la prestation fiscale pour enfants. Les prestataires à faible revenu seraient heureux de voir leurs prestations augmenter de 6 p. 100 à 10 p. 100, mais il ne faut pas oublier que le SRF ne touchera que 20 p. 100 environ de tous les enfants qui vivent dans des familles où les gains sont inférieurs à 25 000 $ par année.
Notre association considère que le système d'assurance-chômage n'est pas un vecteur approprié pour déterminer les besoins en matière de revenu des familles et de la sécurité. Le SRF semble compléter le supplément du revenu introduit avec la prestation fiscale pour enfants, dont les versements peuvent aller jusqu'à 500 $ par année. Ce système devait aider ces familles à couvrir les coûts associés à un emploi, transport, garderie, etc., et à compenser une absence de revenu sous forme de prestations dont bénéficient les familles à l'assistance sociale.
Nous avons beaucoup de mal à comprendre pourquoi les prestations dans le cadre du SRF ne pourraient être également allouées dans le cadre de la prestation fiscale pour enfants. Si le gouvernement veut vraiment lutter contre la pauvreté parmi les enfants, il va devoir simplifier l'administration des prestations destinées aux enfants, et cela, sur la base du mécanisme actuel que constitue la prestation fiscale pour enfants.
Passons maintenant aux femmes et à leur droit à l'assurance-chômage. Le gouvernement n'a pas suffisamment tenu compte des besoins des travailleurs qui ont un emploi non traditionnel. Il s'agit des emplois à temps partiel, des emplois temporaires, des gens qui travaillent à leur compte ou qui ont plusieurs emplois. Soixante p. 100 de tous les emplois créés en 1993 étaient des emplois à temps partiel. C'est le secteur du marché du travail qui se développe le plus rapidement. La plupart des travailleurs dans le secteur non traditionnel sont des femmes. Si les femmes dans les familles à double revenu cessaient de travailler, le nombre des familles à faible revenu ferait plus que doubler. Nous nous demandons pourquoi le gouvernement ne crée pas un programme d'assurance-emploi mieux adapté aux besoins des femmes dans un environnement de travail en pleine évolution. Nous avons besoin d'un programme qui permette à tous les travailleurs de contribuer au régime et d'en bénéficier sur une base proportionnelle.
Penchons-nous maintenant sur le projet de loi pour voir comment il aborde le problème du travail non traditionnel. Le projet de loi abandonnerait le système des semaines pour déterminer l'admissibilité et le remplacerait par un système fondé sur le nombre d'heures travaillées. Aux termes du système actuel, dans les régions où le chômage est très élevé, il faut 12 semaines pour avoir droit à l'assurance-chômage. Avec le nouveau système, dans ces régions-là, il faudra 420 heures de travail. De plus, le gouvernement a mis en place des exigences plus sévères en ce qui concerne les nouveaux arrivants sur le marché du travail et ceux qui reviennent après une période d'absence. Pour eux, le nombre minimum de semaines est de 26, et non pas de 20, c'est-à-dire 910 heures. Un système fondé sur les heures aura très peu d'effet sur les gens qui travaillent plus de 35 heures par semaine. Les gens qui font des heures supplémentaires accumuleront facilement suffisamment d'heures pour avoir droit à l'assurance-chômage, et pour y avoir droit plus longtemps. Par contre, ce sont les travailleurs à temps partiel, qui sont souvent des femmes, et qui travaillent de 15 à 34 heures par semaine, qui souffriront le plus de ces changements.
La grande majorité des travailleuses à temps partiel ont de 25 à 44 ans. C'est un facteur important, puisqu'il s'agit d'un groupe qui retire des prestations de maternité et des prestations parentales. Le calcul des heures plutôt que des semaines aura également une incidence sur la durée des prestations. Je répète que ce sont les travailleurs à temps partiel et temporaires qui y perdront, de même que les personnes - particulièrement les femmes - qui auront à quitter le marché du travail pour de longues périodes.
Le maximum de la rémunération assurable passera de 42 380 $ en 1995 à 39 000 $ par année en 1996, ce qui réduira donc les cotisations et le champ d'application pour tous ceux dont les gains se situent au-dessus du seuil et se traduira par une chute de 7 p. 100 de la proportion des gains assurés par le programme. Les hommes seront évidemment touchés par cette disposition, mais les femmes s'en ressentiront aussi, étant donné qu'une plus petite partie de leurs gains seront assurés au titre des prestations spéciales auxquelles 85 000 femmes ont accès chaque année.
C'est depuis les années 70 que l'on parle d'un programme national de services de garde dans le cadre de la politique sociale du Canada. Groupes d'étude, commissions, rapports et comités ont tous recommandé de modifier les politiques actuelles et les ententes de financement. Or, aujourd'hui, seul un petit Canadien sur six d'âge préscolaire a accès à des services de garde de qualité réglementés.
Depuis que les médias ont annoncé le mois dernier que le gouvernement cherchait à se dégager de sa proposition de négocier un fonds national pour les services de garde de 720 millions de dollars, les défenseurs des services de garde ne savent toujours pas si cet argent est toujours mis de côté pour servir aux enfants. Même si le budget fédéral n'a pas annoncé que ces fonds serviraient à d'autres fins, l'Institut Caledon de la politique sociale laisse entendre que 630 millions de dollars ont été réinjectés dans le fonds d'investissement en ressources humaines. Ce fonds permet notamment l'émission de bons pour la garde d'enfants destinés aux personnes inscrites à des programmes de formation professionnelle. Notre association s'inquiète et se demande si les fonds destinés aux services de garde seront limités à ceux qui dépendent du régime d'assurance-emploi.
L'absence de coordination de la politique publique entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires nuit sérieusement aux services offerts aux enfants. Autre épée de Damoclès, la disparition du RAPC et son remplacement par le Transfert social canadien, prévu pour le 1er avril. Pourtant, cette disparition devrait permettre au gouvernement fédéral de fixer des normes élevées pour les services de garde par le truchement d'un nouveau programme national de services de garde.
Les parents, les dispensateurs de services de garde et tous ceux qui ont à coeur le bien des enfants ont du mal à comprendre pourquoi le Canada tire de l'arrière par rapport aux autres pays qui offrent des services de garde de très haute qualité et des services d'enseignement pour la petite enfance. En France, l'État finance les services de garde de 25 p. 100 des enfants de moins de trois ans et de la presque totalité des enfants de trois à cinq ans. Au Danemark, c'est à peu près la même chose, l'État subventionnant les services de garde de 48 p. 100 des moins de trois ans. Quant à l'État suédois, il subventionne les services de garde pour la moitié de tous les enfants de moins de six ans, dans une grande variété de milieux.
Le déficit du Canada en matière de services de garde réduit sa compétitivité à l'échelle internationale, étant donné que les travailleurs canadiens doivent travailler plus fort pour combiner à la fois le travail et les responsabilités familiales. De plus, les entreprises et le système d'éducation canadiens subventionnent indirectement les travailleurs qu'ils ont formés lorsque ceux-ci s'absentent du travail ou démissionnent parce qu'ils n'ont personne pour s'occuper de leurs enfants.
Au lieu de refiler la responsabilité aux provinces, le gouvernement devrait faire preuve d'imagination et trouver des solutions à la crise actuelle dans les services de garde, en vue de permettre le développement d'un système de garde à but non lucratif, complet et abordable, accessible à toute famille canadienne qui souhaiterait y avoir recours.
Merci.
Le président: Merci beaucoup. Vous avez fait le lien entre les services de garde et les problèmes de l'emploi que nous devons résoudre, la pauvreté chez les enfants et le supplément du revenu familial, et vous avez eu raison de le faire. Je suis convaincu que les députés ministériels et de l'opposition sauront vous poser des questions des plus pénétrantes.
Madame Jennings, avez-vous des questions?
Mme Jennings (Mission - Coquitlam): Pas pour l'instant, non.
Le président: Dans ce cas, passons à Mme Augustine, du côté ministériel.
Mme Augustine (Etobicoke - Lakeshore): Merci, monsieur le président.
Mesdames, je voudrais d'abord vous souhaiter la bienvenue, non seulement parce que vous en êtes à votre première fonction officielle, mais aussi parce que même si vous occupez ce poste depuis peu vous avez néanmoins réussi à maîtriser suffisamment votre sujet pour nous en parler éloquemment.
Merci de tous les points de vue que vous nous avez exposés. Vous vous faites les porte-parole non seulement des parents, mais aussi de tous ceux qui, dans une conjoncture socio-économique difficile, se cherchent un emploi ou travaillent déjà, tout en étant obligés de faire garder leurs enfants.
J'aimerais vous expliquer un peu les raisons pour lesquelles nous avons entrepris cette réforme et les aspects que nous considérons comme positifs, et vous suggérer des façons de collaborer avec nous afin d'améliorer encore le projet de loi. Si nous avons entrepris cette consultation, c'est justement pour pouvoir peaufiner le projet de loi et proposer au gouvernement la meilleure façon qui soit d'aider les familles.
Pour bien comprendre le projet de loi, il faut se demander comment il est possible d'aider équitablement tous les Canadiens en difficulté. On sait que 350 000 Canadiens ont reçu le supplément du revenu familial, comme vous l'avez d'ailleurs mentionné dans la troisième partie de votre document. Ce supplément fera en sorte que les prestataires auront les moyens de remplir leurs responsabilités familiales. Autrement dit, les prestataires à faible revenu, qui peuvent avoir de jeunes familles, pourront recevoir des prestations d'assurance-emploi valant jusqu'à 80 p. 100 de leur revenu de travail au lieu du taux normal de 55 p. 100 pour les prestations.
À la page 2 de votre mémoire, vous ne semblez pas d'accord avec l'orientation que nous avons choisie en offrant le supplément du revenu familial afin de pallier la pauvreté. La règle de l'intensité vise à inciter encore plus les Canadiens à travailler, et à travailler le plus possible et le plus souvent possible. J'ai toujours cru qu'avoir un plein salaire vaut mieux que recevoir une prestation ne représentant qu'une fraction de son salaire. Rappelons-nous tous que cette réforme se veut un moyen d'aider les gens, les femmes.
Voici ma question: si nous devions revoir avec soin la règle de l'intensité et si nous devions accepter l'importance des principes d'assurance, nous voudrions aussi pouvoir montrer de la compassion à l'égard de ceux dont les moyens sont limités. Vous avez évoqué fort éloquemment le besoin de protéger les enfants de la pauvreté et des privations. Que proposez-vous pour bonifier le supplément du revenu familial par rapport à ce qui se trouve dans le projet de loi?
Mme Atkin: Deux choses: d'abord, nous ne sommes pas nécessairement contre le supplément du revenu familial. Mais il ne nous rend pas très optimistes. Ce qui nous préoccupe, c'est la baisse des coûts d'administration que représenterait la combinaison de ces prestations avec la prestation fiscale pour enfants.
Ce qui nous préoccupe aussi, c'est que de nombreux enfants pauvres vivent dans des familles dont les parents ne sont même pas admissibles à l'assurance-chômage ou ont épuisé leurs prestations d'assurance-chômage. Ce que nous recherchons, ce sont d'autres mesures qui s'appliqueraient à cette population, de façon plus uniforme.
Vouliez-vous aussi que nous parlions de la question de l'intensité chez les travailleuses?
Mme Augustine: Oui.
Mme Atkin: Cette partie-là de notre mémoire n'est peut-être pas des plus claires; ce qui nous inquiète, notamment, c'est que devant l'insuffisance des services de garde actuels de nombreuses femmes se voient dans l'obligation de ne travailler qu'à temps partiel. Cela semble un peu contradictoire. En effet, ces femmes sont obligées de travailler à temps partiel, soit parce qu'elles ne trouvent pas de travail à temps plein, soit parce qu'elles ne peuvent trouver des services de garde de qualité pour toute la journée. Or, ces femmes devront travailler plus longtemps pour avoir droit aux prestations d'assurance-emploi.
Par exemple, si j'ai bien compris la façon dont fonctionne la règle de l'intensité, si une femme a travaillé pendant le même nombre de semaines qu'une autre personne à plein temps, la femme qui travaille à temps partiel devrait accumuler le même nombre d'heures et, en fait, devrait travailler plus longtemps que l'employé à temps plein pour être admissible aux prestations d'assurance-emploi. C'est une des questions qui nous préoccupent le plus dans ce projet de loi - l'employabilité des femmes.
Mme Augustine: Vous n'êtes pas d'accord avec la proposition actuelle sur la règle de l'intensité. Pensez-vous que la réforme proposée offre de nouvelles perspectives aux femmes qui n'ont pas pu travailler par le passé?
Mme Atkin: Je m'excuse, je n'arrive pas à vous entendre. Je n'ai pas entendu la dernière partie de votre question.
Le président: Nous pouvons poursuivre. Il faudra simplement parler un petit peu plus fort pour que tout le monde puisse entendre. Ces jours-ci, vous n'osez pas dire à personne d'arrêter de travailler.
Mme Augustine: Je veux savoir s'il y a dans cette mesure législative des propositions qui sont à l'avantage des femmes. Vous avez dit qu'on passe d'un régime fondé sur le nombre de semaines à un régime fondé sur le nombre d'heures. Nous savons maintenant que les travailleurs commencent à accumuler dès la première heure travaillée, ce qui est particulièrement utile pour le travailleur à temps partiel. Je veux savoir si vous décelez dans cette proposition des avantages pour les femmes.
Mme Atkin: Je dois dire non. À mon avis, le passage d'un système fondé sur le nombre de semaines à un système fondé sur le nombre d'heures pourrait nuire sérieusement aux femmes, compte tenu de la structure actuelle du marché du travail. C'est notre réponse brève et succincte à cette question, parce que nous n'avons pas vraiment eu beaucoup de temps pour étudier cet aspect du projet de loi.
Le président: Monsieur Easter.
M. Easter (Malpèque): Merci, monsieur le président. Moi aussi j'aimerais étudier plus en détail cet aspect du projet de loi. Cependant, j'aimerais d'abord vous féliciter des nouvelles responsabilités qu'on vous a confiées. Et bienvenue.
Pour ce qui est du secteur dont on parlait, ne pensez-vous pas que le simple fait de passer à un système fondé sur le nombre d'heures travaillées permettra d'assurer des prestations à un grand nombre de femmes qui sont actuellement prisonnières de ce ghetto des 15 heures? Grâce au nouveau système elles seront admissibles aux prestations d'assurance-emploi, ce qui n'était pas le cas dans le cadre de l'ancien régime. Il se pourrait qu'elles travaillent, disons, 40 heures à raison de 14 ou 15 heures par semaine, ce qui améliorerait certainement la situation dans laquelle elles se trouvent. Je crois qu'il faut penser aux choses dans ce contexte.
Si j'ai bien compris, le problème pour les gens qui travaillent moins de 15 heures, c'est qu'il n'existe pas vraiment de statistiques, tout au moins à ma connaissance, sur ce secteur parce qu'ils n'ont pas fait partie du système. Si vous étudiez la situation de ceux qui travaillent entre 15 et 35 heures, tout au moins c'est ce qu'on m'a dit - et on peut toujours vérifier les chiffres - certains de ceux qui travaillent ce nombre d'heures seront écartés de l'admissibilité, mais la grande majorité d'entre eux seront admissibles au nouveau système.
Je crois que dans l'ensemble le système fondé sur le nombre d'heures travaillées et le fait d'y admettre ceux qui travaillent moins de 15 heures auront un certain nombre d'effets positifs chez les femmes et les travailleurs à temps partiel en particulier. Premièrement, ils deviendront désormais admissibles, ce qui n'était pas le cas auparavant. Deuxièmement, nous pourrons faire disparaître le ghetto des 15 heures dont les prisonniers sont les jeunes et les travailleurs à temps partiel.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette explication.
Mme Atkin: Lorsque nous avons lu le projet de loi la première fois nous étions conscientes de cette amélioration. C'est une bonne chose pour les femmes, car elles pourront être admissibles aux prestations.
Cependant, je crois tout de même que le système fondé sur le nombre d'heures travaillées nuira à un grand nombre de femmes. Tout cela veut dire que les femmes qui travaillent moins de 15 heures par semaine devront avoir une autre forme d'appui, soit l'aide sociale, soit un autre revenu à la maison. Cela fait donc disparaître en quelque sorte les avantages qui pourraient être offerts aux femmes grâce au nouveau régime. Mais vous avez raison de dire que désormais tout au moins elles seront admissibles aux prestations, ce qui est un changement fort positif.
M. Easter: J'aimerais faire un dernier commentaire sur ce secteur. Je ne veux pas trop insister sur la situation de ceux qui travaillent moins de 15 heures, mais je crois qu'il ne faut pas oublier que certaines de ces personnes qui sont prisonnières du ghetto des 15 heures ont plusieurs emplois, peut-être deux, parfois même trois, ce qui leur permet d'accumuler plus de 35 heures. Je crois qu'il ne faut pas oublier cela.
En terminant, j'aimerais signaler que je m'inquiète un peu de ce que disent certains groupes de défense sociale - et j'ai fait partie de certains de ces groupes déjà - en ce qui a trait au supplément du revenu familial et, dans une certaine mesure, au recours au programme d'assurance-emploi pour aider les familles à faible revenu. Je suis étonné d'entendre dire que nous ne devrions pas avoir recours au système d'assurance-emploi à cette fin, parce que je crois que bon nombre de ces familles à faible revenu participent à la population active. Ces gens n'ont pas toujours des emplois bien rémunérés, je le reconnais, mais je crois qu'il est parfaitement légitime d'avoir recours au système d'assurance-emploi pour les aider, parce que ces personnes font partie de la population active.
Pour être honnête, le fait est que si les groupes de défense sociale s'opposent à ce que le gouvernement aide financièrement à même le programme d'assurance-emploi les familles à faible revenu qui travaillent, je ne crois pas que nous pourrons avoir gain de cause ailleurs. Je pense - et j'espère que vous pourrez nous appuyer - qu'il faut que les propositions touchant le supplément du revenu familial figurent dans ce projet de loi. Cela sera plus avantageux que d'essayer d'obtenir ce supplément d'une autre façon.
Merci, monsieur le président.
Le président: Y a-t-il des commentaires?
Mme Atkin: Non.
Le président: Nous passons maintenant aux députés de l'opposition. Madame Jennings.
Mme Jennings: Merci, monsieur le président.
Wendy et Liz, j'aimerais vous féliciter toutes deux du travail que vous avez accompli. Je tiens à vous souhaiter la bienvenue.
Vous parlez à la première page de votre mémoire du:
- ...développement d'un système de garde d'enfants sans but lucratif, un système complet et
abordable auquel toutes les familles canadiennes qui le souhaitent peuvent faire appel.
- Dites-vous que nous pourrions nous retrouver avec un système à deux volets? En d'autres
termes, dites-vous que ceux qui peuvent se permettre de ne pas avoir recours à ce système
pourraient décider de ne pas le faire? Que se passerait-il si ces familles décidaient de payer pour
un type de service de garderie particulier? Proposez-vous que ces gens reçoivent une déduction
d'impôt, ou quelque chose de ce genre? Quelle sorte de système envisagez-vous?
Proposez-vous un système à deux paliers?
Mme Jennings: Mais en disant «auquel toutes les familles canadiennes qui le souhaitent peuvent faire appel» supposez-vous que tout le monde aura recours à ce système de garderie?
Mme Atkin: Je crois que vous voulez savoir, entre autres choses, si nous appuyons le recours au système fiscal pour aider les familles qui décident de ne pas avoir recours au système à but non lucratif, mais à d'autres services de garderie. Je dois avouer que même si nous appuyons les petites modifications qui ont récemment été apportées dans le cadre du budget fédéral et qui visent à accroître les déductions associées aux coûts des services de garderie, nous nous opposons en général au recours au système fiscal pour financer les services de garderie, parce que la majorité des familles doivent avoir deux revenus pour se tirer d'affaire dans la société d'aujourd'hui.
Dans l'ensemble, nous voulons que les gens aient le choix quand on parle de services de garderie. Nous ne disons pas qu'il faudrait mettre sur pied un programme national de services de garde que les gens seraient forcés d'utiliser. Nous utilisons l'expression «qui le souhaitent» pour illustrer que nous voulons qu'il existe des choix à faire.
Mme Jennings: Dans cette veine justement, qu'en est-il du coût? Je pense que l'on prévoit une dette de 968 milliards de dollars d'ici à l'an 2000. Dans ce contexte, faut-il encore augmenter les coûts des contribuables? Tout nouveau programme entraîne des coûts. Ne pensez-vous pas qu'il nous en coûtera quelque chose, et ne pensez-vous pas qu'à l'heure actuelle ce serait difficile pour le contribuable?
Mme Tyrwhitt: Je pense que lorsqu'il s'agit de dépenses pour les enfants, surtout pour l'éducation des tout jeunes enfants, qui comprend une composante de développement de l'enfant, le coût est amplement justifié, puisque vous aurez ainsi des enfants en meilleure santé, mieux adaptés. Si un enfant sur quatre ou un enfant sur cinq entre les âges de un à six ans vit dans la pauvreté... Si l'on prend soin de ce groupe d'enfants, lorsqu'ils auront 7, 8, 9, 13 ou 14 ans, ils ne seront pas en danger. Pour nous, il s'agit d'un investissement dans nos enfants, une mesure positive pour l'enfance canadienne.
Mme Jennings: Donc, vous prétendez que ce programme est amplement justifié parce qu'il est pour les enfants, et que les contribuables devraient assumer des coûts supplémentaires.
Mme Atkin: Je sais que nous ajoutons toujours quelque chose aux réponses, mais je tiens à souligner qu'une étude que nous pouvons mettre à votre disposition, une étude américaine, révèle que pour chaque dollar versé pour assurer des services de garderie de qualité aux enfants d'âge préscolaire on épargne 7 $ plus tard en coûts de santé, d'éducation spéciale et de services correctionnels. Quant à ce qu'il en coûte au contribuable, si la caisse d'assurance-chômage a un excédent considérable, peut-être pourrions-nous le consacrer à un programme national de garderie.
Mme Jennings: Wendy, pourriez-vous nous procurer ce rapport? J'aimerais bien le lire.
Mme Atkin: Certainement. Je le note.
Mme Jennings: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Madame Lalonde.
[Français]
Mme Lalonde (Mercier): Bonjour. Je tiens à m'excuser. J'avais quelque chose d'urgent et d'imprévu à faire.
Je vous félicite pour votre mémoire. Je suis heureuse de constater que vous trouvez que la réforme de l'assurance-chômage n'est pas un bon véhicule pour s'occuper de la pauvreté des enfants. Donc, vous proposez d'ajouter cet argent au crédit d'impôt pour enfant. C'est bien cela?
[Traduction]
Mme Atkin: Oui.
[Français]
Mme Lalonde: À ce moment-là, ce serait pour tout le monde, n'est-ce pas?
[Traduction]
Mme Atkin: En effet. Nous pensons que les prestations seraient réparties plus équitablement s'il y avait rationalisation au moyen du crédit d'impôt pour enfants plutôt qu'au moyen du régime d'assurance-chômage.
[Français]
Mme Lalonde: Je signale au passage l'identification que vous faites du problème de l'admissibilité en liaison avec les congés de maternité. Je suis certaine que vous avez remarqué qu'avec sa réforme, le gouvernement prive la caisse de 900 millions de dollars en diminuant de 42 400 $ à 39 000 $ le maximum assurable. J'aimerais que vous m'en parliez.
On pourrait dire que ce sont, entre autres, les femmes qui font entre 15 et 34 heures de travail, comme vous le soulignez, qui vont être pénalisées, notamment au niveau du congé de maternité. Ne trouvez-vous pas que c'est absolument indécent et qu'on ne peut pas parler, comme le ministre essaie de le faire, d'équité sociale?
[Traduction]
Mme Atkin: Vous soulevez là un excellent point. Le plafonnement des cotisations au-delà d'un maximum de 39 000 $ nous préoccupe beaucoup, car on décourage ainsi certainement toute tentative de restructuration du marché du travail en vue de permettre des horaires plus souples, le partage des emplois, et diverses autres options qui permettent aux familles de faire de meilleurs choix quand il s'agit de décider qui travaille et quand. J'oublie la formulation exacte dans le projet de loi, mais on semble y récompenser celui qui fait des heures supplémentaires plutôt que le travailleur qui tente de créer un équilibre entre un nombre raisonnable d'heures de travail hebdomadaires et ses autres responsabilités.
[Français]
Mme Lalonde: Certaines prestations sont diminuées de façon importante pour les femmes qui voudraient avoir un enfant. On dit que les femmes qui travaillent moins de 15 heures par semaine vont désormais avoir accès au régime. Il faut bien comprendre que ce n'est qu'une fois qu'elles auront travaillé 910 heures en une année, c'est-à-dire l'année suivante, qu'elles y auront accès. Quand on travaille moins de 15 heures semaine, il est impossible de faire 910 heures dans une année. Donc, cela va considérablement changer la façon dont les couples à revenus modestes vont planifier la naissance de leurs enfants.
[Traduction]
Mme Atkin: Je partage tout à fait votre avis. Merci.
[Français]
Mme Lalonde: Pour ce qui est des services de garde, vous savez qu'au Québec, on veut avoir un programme québécois de services de garde. Vous acceptez, je crois, que le Québec ait son propre régime, mais vous voulez qu'un régime uniforme s'applique dans le reste du Canada. Comment serait constitué ce régime uniforme de services de garde?
[Traduction]
Mme Atkin: Je ne parle que pour le reste du Canada. Nous espérons voir l'élaboration de normes nationales semblables à celles qui existaient au début, lors de la mise en place du Régime d'assistance publique du Canada. Nous serions très déçues si l'on mettait en place le nouveau Transfert social canadien sans y prévoir de normes nationales en matière de budget pour les garderies.
[Français]
Mme Lalonde: Mais ne comprenez-vous pas que les provinces, surtout les plus pauvres, ont des problèmes avec le partage des coûts? Dans l'histoire, ce sont les provinces les plus riches qui ont le plus profité de ces régimes à coûts partagés.
Vous vous attendez donc à ce qu'il y ait, dans le Transfert social canadien, une négociation de normes pour les services de garde?
[Traduction]
Mme Atkin: Il est intéressant, n'est-ce pas, de voir que dans d'autres secteurs le gouvernement fédéral et les provinces ont réussi à s'entendre. Je songe au Service de protection de l'environnement - j'espère que c'est ainsi qu'il s'appelle - au sujet duquel on reconnaît que c'est le mécanisme nécessaire pour traiter d'un problème pressant, ce qui a donné lieu à beaucoup de collaboration. Si l'on juge la question suffisamment importante, et donc si l'on juge que des garderies de qualité sont importantes, alors tout devient possible.
Quant à la péréquation, nous avons déjà en place, si je comprends bien, de nombreuses façons de tenir compte des différents taux de croissance économique dans les transferts aux provinces. Je ne crois pas qu'il soit très compliqué de faire la même chose pour le financement des garderies.
[Français]
Mme Lalonde: Pouvez-vous expliquer davantage pourquoi vous préférez que les services de garde soient accessibles à l'ensemble des familles qui en ont besoin plutôt que d'être surtout destinés aux familles au travail?
[Traduction]
Mme Atkin: Les garderies répondent à toute une gamme de besoins. Souvent, lorsque les enfants sont plus vieux - d'âge préscolaire - les parents choisissent des garderies qui offrent un milieu social et éducatif enrichissant. Souvent les parents tombent malades ou doivent s'occuper de parents malades, et doivent obtenir des services pour leurs enfants d'âge préscolaire. Il arrive aussi que les parents retournent aux études et à ce moment-là leurs besoins sont très différents en matière de garderie et au niveau des horaires et du financement.
Notre organisme réclame depuis 1983 un régime qui inclurait toute une gamme d'approches en matière de garde d'enfants. Il serait certes possible pour chaque province et chaque localité de dépenser le financement disponible selon les besoins locaux, et il y aurait même des normes nationales, tout comme c'est le cas dans le domaine de la santé.
Le président: Merci, madame Lalonde.
M. Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): J'invoque le Règlement, monsieur le président. Puis-je demander une précision?
En réponse à une question de Mme Lalonde, Mme Atkin a répondu qu'elle parlait pour le reste du Canada. Or, dans le premier paragraphe du mémoire, on dit bien que votre association représente toutes les régions du Canada. Je veux donc avoir une précision.
Avez-vous des membres au Québec, ou pas du tout?
Mme Atkin: Nous avons des membres au Québec. Lorsque j'ai dit que je parlais pour le reste du Canada, je voulais dire que je parlais des services de garderie pour le reste du Canada plutôt que des services de garderie pour le Québec.
M. Allmand: Mais vous avez des membres au Québec.
Mme Atkin: Nous avons des membres au Québec.
M. Allmand: Merci.
Le président: Merci d'avoir précisé que le Québec se trouve au Canada, monsieur Allmand.
[Français]
Mme Lalonde: On voulait poser une question. C'est pour cela que j'ai posé la question.
[Traduction]
Le président: Nous avons le temps de faire un autre tour de cinq minutes. Madame Lalonde.
[Français]
Mme Lalonde: Je vais encore vous faire parler du plan national de services de garde. Voulez-vous quand même qu'il y ait des négociations avec chacune des provinces?
[Traduction]
Mme Atkin: Oui.
[Français]
Mme Lalonde: Sur quelle base?
[Traduction]
Mme Atkin: J'ai l'impression de marcher sur des coquilles d'oeuf si j'en dis trop long à ce sujet, car ce n'est que récemment que j'ai assumé ce poste.
Toutefois j'aimerais dire ceci. Nous avons beaucoup de documentation sur les normes que nous aimerions voir incluses dans un programme national. Afin de faire gagner du temps au comité, et parce que je crains de marcher sur des coquilles d'oeuf, j'aimerais vraiment plutôt vous donner de l'information. Nous aimerions en fait vous rencontrer pour en discuter plus avant.
[Français]
Mme Lalonde: Êtes-vous d'accord sur les coupures aux prestations prévues dans le projet de loi C-12? Pensez-vous que c'est une façon raisonnable pour le gouvernement d'intervenir dans le domaine social en ce moment?
[Traduction]
Mme Atkin: Brièvement, non. Nous connaissons certaines des réactions du mouvement syndical à ce projet de loi. À cause des réductions des années précédentes il y a un excédent, et nous sommes d'accord pour dire qu'il est tout à fait inacceptable, à ce moment-ci, de réduire les prestations et l'admissibilité.
Le président: Merci, madame Lalonde.
Madame Jennings.
Mme Jennings: Merci.
Tout d'abord, Wendy, en ce qui concerne les normes nationales que vous aimeriez voir à tous les niveaux, qui devrait les déterminer à votre avis, les provinces ou le gouvernement fédéral? Quel rôle les éducateurs peuvent-ils jouer dans l'établissement des normes? Qu'est-ce que vous prévoyez au juste?
Mme Atkin: Voilà qui est intéressant, car certaines de nos organisations associées, les associations de puériculteurs - qui sont très bien organisées dans tout le pays - ont maintenant des normes communes pour les programmes d'études. Elles ont une contribution intéressante à apporter quant aux normes nationales à adopter dans le domaine de la garde d'enfants. Vu les sommes consacrées par le gouvernement fédéral à la garde d'enfants depuis 1966, il semblerait tout à fait approprié, au palier fédéral, d'accorder plus d'attention aux domaines de préoccupation que nous avons en commun avec les provinces.
Mme Tyrwhitt: J'aimerais ajouter quelque chose. Il y a quelques semaines, notre association a tenu une réunion publique, ici, avec Peter Moss, qui a travaillé dans le réseau de garderies de l'Union européenne. Dans certains pays, le secteur de l'éducation assume la responsabilité de la garde d'enfants, disons, à partir de l'âge de 3 ans, et avant cet âge on considère que c'est là une responsabilité sociale ou un coût de bien-être social.
Dans différents pays, on a vraiment réfléchi pour déterminer quel secteur était responsable de tel et tel âge. On a réfléchi pour déterminer qui était responsable des enfants de moins de 3 ans et des enfants de plus de 3 ans.
Les propos de M. Moss sur l'évolution en Europe depuis de nombreuses années étaient passionnants. Si cela vous intéresse, je peux tenter d'obtenir copie de son exposé. En Europe, on est beaucoup plus avancé que nous. On constate qu'on y a réfléchi à la question de la compétence, à la question de savoir qui est responsable des enfants de moins de 5 ou 6 ans. C'est vraiment très encourageant de voir ce genre de réflexion et de voir les gouvernements assumer ce genre de responsabilité.
Mme Jennings: Savez-vous qu'un enfant qui n'a aucun contact avec ses parents pendant 20 heures peut être manipulé ou formé d'une façon qui peut lui nuire? Il faut faire très attention quand on détermine à qui on confie un enfant.
Mme Tyrwhitt: Je connais bien le sujet. Comme parent, j'ai participé aux travaux de centres de ressources pour parents, à des garderies et à des maternelles. J'ai donc entendu tous les genres d'arguments. Nous savons que les garderies de qualité peuvent être très avantageuses pour les enfants. C'est ce que révèlent actuellement les recherches. Et d'ailleurs, un très grand nombre de parents n'ont pas le choix. Même si nous souhaitons que les gens aient le choix, ce n'est pas le cas. Il nous incombe donc, comme nation, de mettre en place des programmes de garderies de qualité, car c'est important que la qualité y soit. Il est important que le personnel ait l'éducation et la formation voulues, et il est important de bien administrer les programmes, et c'est pourquoi il faut un financement public des programmes de garderies.
Mme Jennings: Merci. J'espère simplement que vous allez continuer à y voir surtout l'aspect éducatif...
Mme Tyrwhitt: Je pense qu'il est intéressant de noter que d'autres pays considèrent la question sous cet aspect et y voient une responsabilité pédagogique. Le programme devient alors universel et fait partie du programme scolaire. Nous pouvons vous fournir la documentation.
Mme Jennings: Merci; je vous en serais reconnaissante.
Le président: Merci, madame Jennings. Nous allons maintenant passer à M. Scott.
M. Scott (Fredericton - York - Sunbury): Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais aborder quelques sujets.
Tout d'abord, j'aimerais examiner la question de l'admissibilité. Je suppose - et c'est ce que laissent entendre la plupart des statistiques - qu'en fait il sera beaucoup plus facile d'obtenir de l'assurance-chômage. Plus tôt, vous avez dit que vous ne compreniez pas pourquoi, à une époque où il y a un excédent, il serait plus difficile d'y être admissible. Or, toutes les données révèlent qu'en fait ce sera beaucoup moins difficile, surtout dans le secteur saisonnier - et je viens de la région de l'Atlantique - parce que le calcul des heures plutôt que des semaines ouvre la porte du système, et ce, aux hommes et aux femmes.
En outre, tous ceux qui étaient plafonnés artificiellement à 14 ou 15 heures par semaine, ce qui permettait aux employeurs de ne pas verser de prestations, et donc de se soustraire au régime, tous ces travailleurs sont maintenant admissibles.
Au cours de votre exposé, vous avez mentionné que le programme était devenu un programme de supplément du revenu, de répartition régionale du revenu, etc., ce que j'ai déjà entendu. J'en conclus que vous considérez que l'assurance-chômage est un programme conçu pour aider ceux qui perdent leur emploi, et non pas pour offrir un revenu annuel, comme c'est devenu le cas.
Dans la perspective d'un revenu annuel, alors la conversion au nombre d'heures est avantageuse. Dans l'autre cas, à savoir s'il s'agit d'un supplément du revenu pour la personne qui devient chômeur après une période de travail, alors les 910 heures ne représentent pas un problème aussi considérable qu'on l'a prétendu, puisque, étalées sur deux out trois ans, c'est tout à fait envisageable même pour des périodes de travail où le nombre d'heures est relativement faible.
Ainsi, soit le revenu est envisagé comme un supplément annuel - auquel cas les 910 heures sont tout à fait intéressantes, nettement plus intéressantes que le calcul des semaines - soit il s'agit d'un revenu relatif à une perte d'emploi après un certain nombre d'années de travail, auquel cas les 910 heures ne posent pas grand problème. À l'heure actuelle, bien des gens travaillent de 0 à 15 heures et ne font pas du tout partie du régime; ils n'ont accès à aucun des programmes, un point, c'est tout. Il me semble extrêmement important de le reconnaître.
J'aimerais aborder une autre question - et je vous invite à participer activement à la discussion - à savoir que le régime va faire l'objet d'un contrôle. J'ai depuis longtemps l'impression que la norme de 15 heures par semaine limite artificiellement la croissance et l'emploi. Puisque le projet de loi prévoit des mesures de contrôle durant deux ans, nous allons être en mesure de déterminer jusqu'à quel point cela est vrai. Et les personnes qui sont, à l'heure actuelle, limitées à une semaine de 14 heures pourront élargir leur perspective.
Mme Tyrwhitt: J'aimerais moi aussi vous poser une question. Comment, d'après vous, ce programme vient-il en aide aux femmes qu'on encourage à adopter le travail indépendant? Dans le cadre de l'examen de la sécurité sociale, il a été question du fait que le temps était venu de chercher de nouvelles façons d'aider les gens qui travaillent, compte tenu de l'évolution rapide du marché du travail. Je suppose que le projet de loi vise à donner des occasions d'expérimenter. Parmi les gens qui travaillent, certains travaillent à temps partiel, d'autres choisissent la voie du travail indépendant. Comment le projet de loi va-t-il correspondre aux nouveaux besoins des travailleurs? Nous nous demandons si la mesure législative va être suffisamment souple pour répondre aux nouveaux besoins de la population active.
M. Scott: Je reconnais que le projet de loi devrait être plus souple. Mais il faut aussi reconnaître qu'il comporte beaucoup plus de souplesse qu'il n'en existait auparavant. En gros, donc, nous allons, il me semble, dans la bonne direction. Il y a beaucoup plus de souplesse. Beaucoup plus de gens vont être visés. Le calcul des heures plutôt que des semaines donne beaucoup plus de souplesse.
Je comprends bien que, comme on l'a proposé la semaine dernière, il devrait peut-être y avoir un plafond annuel au temps supplémentaire. Je suis favorable à une telle mesure depuis longtemps. Cependant, cette limite limiterait l'admissibilité à l'assurance-chômage. J'aurais bien peur d'une limite hebdomadaire, étant donné que, dans les secteurs où l'activité est saisonnière, cette limite plafonne les gains qu'on peut faire au cours d'une très courte période.
Je vous serais reconnaissant de continuer à assurer le suivi, une fois levée la limite des 15 heures. Les personnes concernées ne seront plus incitées à se limiter à 14 heures par semaine pour éviter que leurs employeurs ne versent des prestations.
Le président: Merci, monsieur Scott.
À titre de président, permettez-moi de passer quelques minutes à vous remercier. En effet, nous comptons sur les Canadiens pour qu'ils nous donnent de bons conseils pour que le projet de loi soit rendu meilleur. Mais j'ai tout de même été frappé de vous entendre dire que le projet de loi traduit la nouvelle réalité du travail, les nouvelles structures de l'économie, et propose des façons d'aider les gens. Je me demande donc si le fait de reconnaître le travail à temps partiel, les emplois multiples, des phénomènes qui ne sont pas visés par le programme d'assurance-chômage actuel, constitue, à votre avis, une amélioration par rapport au régime actuel.
M. Atkin: Il me semble clair, surtout à la lumière des commentaires formulés aujourd'hui par les membres du comité, qu'il est certainement avantageux d'englober notamment les femmes qui travaillent moins de 15 heures par semaine et d'accroître la souplesse pour les travailleurs saisonniers. Cela dit, le projet de loi doit être nuancé davantage, surtout en ce qui a trait aux femmes et aux travailleurs à temps partiel qui dépassent les 15 heures par semaine. Je continue de croire que ces travailleurs vont faire l'objet d'une discrimination du fait qu'ils devront travailler durant un plus grand nombre de semaines pour être admissibles, pour accumuler le nombre d'heures nécessaire. Il faudrait également revenir, d'après moi, sur la question des prestations de maternité.
Le président: Le comité a pris bonne note de vos commentaires, et nous allons très évidemment nous pencher sur ces questions.
Pour ce qui est du travail indépendant, je me demande si vous avez pris connaissance de la partie du projet de loi relative à ce que nous appelons les mesures de «réemploi» qui visent l'aide au travail indépendant. Au cours des dernières années, ce programme a favorisé la participation de 34 000 personnes, qui, à leur tour, ont créé un emploi supplémentaire. Ainsi, le programme a entraîné la création de 68 000 emplois. Compte tenu de votre très bonne connaissance de l'évolution du monde du travail et de l'économie, je me demande si vous souhaitez que le comité favorise un élargissement du programme visant le travail indépendant.
Mme Atkin: Je préférerais m'abstenir de répondre pour le moment, même s'il s'agit d'une question fort intéressante.
Le président: Est-ce parce que la création d'emplois n'est pas suffisante?
Mme Atkin: Non, c'est plutôt parce que je suis réticente à aborder un aspect du projet de loi qui ne nous touche pas directement.
Le président: Permettez-moi de vous signaler que les femmes ont très bien réussi dans le cadre de l'aide au travail indépendant. Elles ont même mieux réussi que les hommes à assurer la survie de leurs entreprises.
Voilà tout ce que j'avais à dire pour aujourd'hui. Le comité tient certainement à exprimer sa gratitude la plus chaleureuse et la plus sincère pour votre excellent exposé. Nous sommes impatients de collaborer avec vous au cours des prochaines semaines à l'amélioration du projet de loi. Merci.
Nous allons prendre une pause de quelques minutes. Ensuite nous aurons avec nous M. David Pollock, directeur administratif du Conseil canadien de la réadaptation et du travail.
Le président: Mesdames et messieurs, nous avons cet après-midi le plaisir d'accueillir M. David Pollock, du Conseil canadien de la réadaptation et du travail.
Bienvenue. Nous sommes impatients d'entendre vos commentaires. Je suis convaincu que vous proposerez de nombreuses idées qui permettront d'améliorer le projet de loi C-12. Nous en prendrons bonne note, et nous nous en inspirerons même, de manière à améliorer la mesure législative à l'étude.
Comme vous l'avez sans doute compris, nous disposons d'une heure, divisée essentiellement en deux parties, à savoir votre exposé, suivi d'une séance de questions et réponses. La longueur de la deuxième période dépendra de la durée de votre exposé.
Avez-vous un mémoire?
M. David Pollock (directeur administratif, Conseil canadien de la réadaptation et du travail): Merci, monsieur le président. Tout d'abord un petit mot d'explication. Je n'ai pas de mémoire à l'heure actuelle.
Normalement, je ne commencerais pas par une plainte, mais j'espère que l'objet de cette plainte ne reflète pas le degré de sérieux avec lequel on a élaboré les nouvelles mesures qui visent les personnes handicapées du Canada. J'ai reçu un appel au bureau vendredi, puis l'appel a été transféré à Saint-Jean, Terre-Neuve. Je ne suis pas retourné à mon bureau depuis que j'ai reçu votre invitation. Je n'ai pas réussi à obtenir copie du projet de loi C-12, mais, à 23h30, grâce à une organisation non gouvernementale de Saint-Jean, j'ai pu mettre la main sur une copie du projet de loi C-111, qui, je le suppose, est fort semblable au projet de loi C-12, ainsi que sur certains documents historiques et interprétatifs.
J'aurais voulu être en mesure de faire des commentaires sérieux et valables en ayant accès à certains chiffres et à certaines recherches comparatives portant sur des programmes européens du même genre, etc. Il me semble donc que, dans la mesure où on souhaite que les Canadiens contribuent de façon valable au processus, il faudrait faire en sorte que les intéressés soient avisés plus que 24 heures à l'avance.
J'aimerais avoir la possibilité de faire parvenir au comité une information supplémentaire sur ce sujet, que ce soit en déposant un document ou en l'expédiant, mais il m'a été impossible de me préparer à cette audience avec la rigueur qui me semble s'imposer. Je crains, comme je le disais, que l'on n'ait pas suffisamment réfléchi aux répercussions, pour les handicapés de notre pays, des changements qui se préparent.
Je dis cela à titre d'explication sur l'absence, aujourd'hui, d'un mémoire, mais je voudrais pouvoir vous envoyer par la suite un texte plus détaillé.
Le président: Nous vous remercions de vos commentaires. Vous savez sans doute que le projet de loi a été réintroduit tel qu'il a été laissé en suspens il y a quelques mois, et nous pensions - mais le greffier devrait toujours s'en assurer - que les organismes représentatifs et les membres des nombreuses collectivités seraient au courant de cela.
J'examinerai toutefois personnellement votre cas et vous aviserai, mais c'est avec un vif intérêt que je m'apprête à écouter ce que vous avez à dire sur les façons d'améliorer ce projet de loi, que vous avez certainement dû examiner en détail la dernière fois qu'il a été présenté à la Chambre.
M. Pollock: Compte tenu du temps de préparation que j'ai eu, je m'efforcerai de faire de mon mieux, monsieur le président.
J'ai une autre remarque préliminaire à faire, qui porte sur le contexte législatif. J'écoutais tout à l'heure un commentaire de la secrétaire d'État responsable de la situation des femmes au Canada: s'adressant à un public, elle déclarait qu'une partie de son mandat et de ses responsabilités consiste à examiner tous les projets de loi pour voir quelles seraient leurs incidences sur les femmes canadiennes, et que c'est ce qui l'avait amenée à proposer de passer, pour bénéficier des prestations, du calcul des heures de travail au calcul des semaines, ce qui serait à l'avantage d'un bien plus grand nombre de femmes. C'est tout à l'heure que je l'entendais dire cela.
La question que l'on devrait se poser, c'est de savoir qui, au Canada, assume le même genre de responsabilités pour les 15 p. 100 de nos citoyens qui, à l'un ou l'autre moment de leur vie, souffrent d'un handicap? Il n'y a personne, à l'heure actuelle, qui soit spécifiquement chargé de cette mission. Le ministère du Développement des ressources humaines englobe une grande diversité de problèmes et de mandats, et l'on peut se demander si ce segment de notre population, ces 15 p. 100 de membres les plus vulnérables de notre société, ne mériterait pas d'avoir un secrétaire d'État responsable des problèmes des personnes handicapées, de sorte que les propositions législatives puissent être examinées dans cette perspective. Il serait alors possible d'user à l'égard des personnes handicapées de la sagacité dont on a fait preuve, à propos de ce projet de loi, en décidant d'adopter pour les femmes le calcul des heures de travail plutôt que des semaines de travail.
Là encore, je le répète, c'est une question de savoir où se situent vraiment les responsabilités.
Plutôt que de vous faire une proposition précise - car je ne sais pas au juste que proposer en matière d'économies, économies que cherchent à réaliser tous les législateurs - je vais faire une réflexion: il me paraît important d'examiner le lien entre le fardeau de notre dette et la croissance de notre produit intérieur brut et de faire la comparaison avec divers pays européens.
À l'instar d'un grand nombre d'observateurs je suis quelque peu inquiet de voir avec quel empressement nous avons, en adoptant des modifications à nos lois et programmes sociaux, importé des modèles des États-Unis. Je crois savoir que le Canada est en queue de liste quant au pourcentage du produit intérieur brut qui est consacré aux programmes sociaux et quant à la relation de celui-ci avec la dette, mais comme je n'ai pu consulter les documents de recherche, je voudrais soigneusement vérifier cette thèse avant d'en faire une assertion.
Mais je voudrais vous demander s'il serait possible de prévoir une exemption à ce programme et au projet de loi tel qu'il se présente actuellement. Il serait peut-être possible de réduire quelque peu l'excédent actuel de 5 milliards de dollars, bien que je sois le premier à être en faveur de l'établissement d'un fonds de réserve en prévision de récessions futures. Et je ne voudrais pas que cet argent soit utilisé à d'autres fins.
Je me réfère à un communiqué de presse daté du 1er décembre, lorsque le ministre en fonction était encore M. Axworthy, qui a paru à propos du nouveau projet de loi et dont il est dit, à la page 5, sous la rubrique «prestations de chômage»:
- Il y a des gens qui ont besoin d'une aide plus directe pour se préparer à un nouvel emploi et le
trouver. Ceux qui ont bénéficié régulièrement de prestations d'assurance au cours des trois
dernières années ou de prestations parentales ou de maternité au cours des cinq dernières années
peuvent être admissibles à une aide supplémentaire sous forme de prestations de réemploi.
La question sur laquelle le projet de loi est le plus vague - et je comprends pourquoi: c'est parce qu'il nécessite des négociations avec les collectivités et avec les provinces - c'est l'aspect prestations d'emploi.
C'est que nous avons vu tant de changements, que ce soit dans le monde médical ou dans les prothèses et appareils pour handicapés, que nous trouvons de plus en plus de gens de 45 ans au Canada qui ont pu subir l'une ou l'autre opération, qui touchent encore des prestations sous l'une ou l'autre forme, qui ne peuvent assurer tous leurs besoins, mais qui voudraient se remettre au travail et qui n'ont eu aucun emploi au cours des trois, voire des cinq dernières années. Mais on pourrait décider d'un âge - 45 ou 39 ans, par exemple - pour les personnes handicapées dont les circonstances auraient changé et qui seraient maintenant en mesure de réintégrer le marché du travail. Si le sort de nos membres les plus faibles nous tient à coeur, nous devons vraiment leur permettre de chercher à obtenir une formation et de bénéficier de ce genre de prestations.
Ce que je vous propose donc d'envisager, ce sont soit des mesures incitatives pour les provinces, soit un fonds spécial qui serait constitué pour permettre une exemption pour les personnes handicapées qui n'ont pas travaillé, mais qui voudraient en avoir la possibilité. Je ne peux pas vous dire exactement comment je conçois la chose, mais je m'en remets, pour les détails pratiques, à ceux qui ont des moyens à leur disposition, sachant qu'il s'agit là d'une question d'une grande importance.
Ajouté à cela, par exemple, dans les programmes que nous administrons... Ce ne sont pas ceux que nous préconisons, mais il y a plusieurs années déjà qu'ils existent et qu'ils ont donné satisfaction. Je crains personnellement que les nouvelles prestations et les négociations en cours sur la formation et la façon dont celle-ci sera donnée ne rendent très difficile l'exécution de certains programmes.
C'est ainsi qu'autrefois une personne qui avait besoin d'un logement pouvait recevoir jusqu'à 10 000 $ pour pouvoir habiter un logement lui permettant de trouver un emploi. J'aimerais savoir si cette disposition sera maintenue, car ces 10 000 $ font souvent toute la différence entre le handicapé qui ne peut travailler ou celui qui peut être utilement employé.
Il y a une autre question qui me préoccupe, et qui va à l'encontre de la tendance vers une décentralisation à outrance et une dévolution des décisions: c'est ainsi que notre conseil, constitué d'organismes grands et petits, aura à son conseil d'administration des sociétés telles que Imperial Oil ou la Banque Royale du Canada, qui sont de grosses entreprises canadiennes. Nous avons en place un programme appelé programme de partenariat pour l'acquisition de nouvelles compétences, qui a bénéficié autrefois d'une aide du gouvernement fédéral; nous nous adressons, par exemple, au secteur de la restauration et de l'hôtellerie de Toronto en leur soumettant la proposition suivante: «Si nous vous présentons 70 personnes handicapées et que vous les examinez pour en choisir une quinzaine ou une vingtaine, et que nous passons un contrat avec le collège George Brown pour assurer leur formation serez-vous disposés, si elles suivent avec succès ces cours de formation, à leur assurer des emplois permanents et à plein temps?»
Nous avons eu beaucoup de succès avec ce genre de programme, réfutant ainsi les critiques qu'on leur adresse souvent, à savoir qu'ils ne servent à rien et ne débouchent pas sur des emplois. Ce que nous sommes parvenus à faire en attirant d'emblée l'employeur, c'est obtenir d'avance son consentement et le faire participer au processus de sélection préliminaire. Le problème, c'est qu'il est très difficile pour un petit organisme comme le nôtre, avec une présence régionale limitée, et qui n'a ni le temps ni l'énergie nécessaires, de parvenir à négocier 10, 15, 20 ou 25 de ces ententes. Ce genre de partenariat est le fruit de négociations et d'un climat de confiance.
Nous avons besoin à cet effet d'un dispositif que pourrait, je pense, fournir le gouvernement fédéral avec certaines prestations, un dispositif prévoyant que si une société canadienne participe à ces programmes dans plus d'une région du pays, ou si une organisation nationale caritative, sans but lucratif, comme la nôtre sert d'intermédiaire, ou facilite... Nous ne disposons simplement pas des ressources nécessaires, et les sociétés nous font souvent savoir qu'elles n'ont pas le temps de mettre sur pied une dizaine ou une quinzaine de ces ententes, et nous avons donc besoin d'un dispositif qui simplifie les formalités et constitue une sorte de guichet unique pour la mise sur pied de ces programmes de partenariat.
C'est un autre domaine que je voulais vous recommander d'examiner dans ce processus de décentralisation, à savoir empêcher que certains programmes ne soient engloutis, des programmes qui fonctionnent actuellement de façon satisfaisante et qui ont fait leurs preuves depuis longtemps.
Le financement pour la formation existe dans le budget actuel, mais on le trouvera sans doute à l'avenir dans les programmes destinés aux jeunes entre autres. Je voudrais toutefois vous demander de réexaminer ce qu'on entend actuellement par la jeunesse et d'envisager d'étendre cette définition quand il s'agit de personnes handicapées. Je connais en effet des administrateurs qui...
Pas plus tard que la semaine dernière je m'entretenais avec un fonctionnaire des Ressources humaines de la province de l'Ontario qui me disait qu'il serait disposé à repousser les limites jusqu'à l'âge de 39 ans dans le cas d'une personne handicapée qui voudrait bénéficier d'un programme destiné à la jeunesse.
Ceux d'entre nous qui ont atteint une certaine catégorie d'âge préféreraient peut-être voir cette limite poussée encore un peu plus loin.
C'est là un autre dispositif possible. Selon les ressources dont vous disposez vous pourriez aller jusqu'à l'âge de 45 ans pour les handicapés, en raison, comme je le disais tout à l'heure, des progrès de la médecine et des possibilités nouvelles qui s'offrent aux handicapés.
Une autre question que j'aimerais aborder n'est qu'apparentée à ce projet de loi, mais n'est pas sans rapport: il s'agit des mesures incitatives prises en faveur de ces nouveaux partenariats quand on en arrive aux prestations d'emploi dont vous parlez.
L'idée m'échappe pour le moment, mais j'y reviendrai si je retrouve le fil de ma pensée.
Il y a un autre projet dont je voudrais parler, au risque de nous mettre en vedette, car c'est un projet auquel nous participons en collaboration avec le gouvernement fédéral, qui le juge très utile. Ce projet est appelé réseau d'emploi à grande distance, et à titre de projet pilote nous l'avons étendu à quatre centres dans tout le pays. Il résout l'un des problèmes que connaissent de longue date les handicapés, à savoir celui de trouver des employeurs qui veulent d'eux, et il résout également le problème des employeurs qui voudraient donner une chance aux handicapés tout en constituant - reconnaissons-le - le meilleur réservoir de compétences auquel s'alimenter.
Pour ce projet de réseau d'emploi à grande distance auquel nous participons avec le gouvernement fédéral un logiciel a été créé qui contient un système de rédaction de curriculum vitae, projet auquel a participé McGill Multimedia. On constitue de la sorte une banque de données spécifique pour les gens qui ont des C.V., et les employeurs trouvent ces renseignements sur logiciel. Supposons que vous cherchez un instituteur à Brampton pour enseigner la musique et le français; vous faites votre demande, et si vous ne trouvez que cinq candidats vous pouvez répéter votre demande pour tout l'Ontario, et bientôt, nous l'espérons, pour tout le Canada.
Ce serait là un outil très précieux et un progrès certain pour cette main-d'oeuvre potentielle, ces 15 p. 100 de Canadiens handicapés, si, au lieu de notre petit organisme qui essaie de négocier avec les agents qu'il connaît dans les centres d'emploi du Canada, la plupart de ces centres - et certainement les plus importants - étaient invités à mettre en place chez eux cette banque de données, outil technologique qui n'est pas coûteux une fois qu'il est mis en place et fonctionne, et qui ouvre tant de débouchés pour ceux que nous voudrions aider.
J'en arrive à ma conclusion, et nous pourrons ensuite entamer un dialogue riche de possibilités. Il s'agit des mesures incitatives en matière de prestations d'emploi.
Le gouvernement fédéral a récemment entrepris, avec quatre ministères, un projet pilote portant sur la gestion des cas de personnes handicapées, des mesures encourageant le retour au travail, et les millions de dollars qui pourraient être économisés par le Régime de pensions du Canada ou par la Commission des accidents du travail, ou, d'une façon plus générale, par l'employeur, tout en préservant la dignité des travailleurs qui ont été handicapés, et en leur rendant le sens de l'utilité de leur travail.
S'il était possible d'imaginer des mesures d'incitation pour les sociétés désireuses de se charger de tels cas... Nous disposons de toutes sortes de données pour les États-Unis, et nous en recevons maintenant du Canada, toutes tendant à montrer qu'un travailleur accidenté qui participe, dans les deux mois qui suivent l'accident, à un programme a de fortes chances de retourner au travail, ce qui n'est pas le cas s'il ne participe à aucun programme pendant six mois. Ces mesures s'adressent aux gens appelés à bénéficier soit de l'assurance, soit des prestations d'emploi.
Ces mesures incitatives devraient encourager les employeurs à préparer des programmes de formation longtemps avant que ne se produisent des accidents, afin que, si ce cas se produit, chacun sache exactement quelles sont les démarches à faire et les mesures à appliquer. Le programme pilote du gouvernement fédéral a représenté, d'après le ministère du Développement des ressources humaines, une économie de l'ordre de dix contre un, c'est-à-dire qu'en investissant 100 000 $ dans l'un de ces programmes vous pouvez, avec le temps, réaliser un million de dollars d'économies. Il s'agit donc là d'économies potentielles considérables pour la société. C'est une catégorie de mesures incitatives que je ne peux que vous recommander dans la voie où nous nous engageons, celle du partenariat entre les divers gouvernements, fédéral, provinciaux et locaux, en matière de formation.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur McCormick.
M. McCormick (Hastings - Frontenac - Lennox and Addington): Je vous remercie beaucoup d'être venu, David, et regrette vivement les difficultés que vous avez rencontrées pour comparaître.
C'est une question qui retient certes toute notre attention, ce secteur de 15 p. 100 de la population. Il y a un an, ou un peu plus, nous avons procédé à un examen de la sécurité sociale. Nous avons entendu des centaines de témoins, ici, à Ottawa, et dans tout le pays, beaucoup d'entre eux étant des handicapés et des groupes les représentant. Je crois que ce projet de loi répond à certaines de leurs demandes et de leurs attentes.
Je ne sais pas si ce que je vais dire s'applique à cette loi, mais ce qui m'a souvent surpris, venant de ces 15 p. 100 de notre population, c'est qu'ils n'ont pas toujours besoin de plus d'argent. Ils réclament plus de responsabilités et plus de choix dans leurs programmes.
Le projet pilote que vous avez à l'heure actuelle est implanté dans quatre villes, et j'aimerais en savoir davantage là-dessus. En effet, un grand nombre de nos témoins, l'an dernier, ont mentionné l'accessibilité du lieu de travail, et cette loi, en particulier la subvention salariale, devrait donner une aide à cet effet. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec cela.
Mais je veux également vous féliciter du partenariat que vous avez avec ces grandes sociétés pour assurer une formation professionnelle.
Vous avez aussi parlé de ce programme d'incitatifs appliqué aux États-Unis.
Dans chacun de ces cas, il y un certain chevauchement avec les projets pilotes en cours. Je pense que les projets pilotes en question ont été financés partiellement par le ministère, et je suis sûr que personne ne songe à les interrompre. Nous attendons impatiemment vos rapports et le fruit de vos efforts pour rassembler tout cela. Je voudrais savoir deux choses. Approuvez-vous les subventions salariales et croyez-vous que la mesure renferme une foule d'éléments positifs pour les personnes handicapées.
M. Pollock: Lorsqu'on a peu de temps, on a davantage tendance à mettre l'accent sur les trous, sur ce qui manque dans le projet de loi, qu'à souligner ce qui semble très intéressant ou utile. La distinction que je faisais, mon plaidoyer en faveur d'une exemption spéciale pour un groupe très vulnérable, avait tout à voir avec l'ampleur et la durée de l'intégration au marché du travail.
Il y a, dans notre bureau, une personne dont je savais qu'elle ne pourrait pas donner son plein rendement avant deux ou trois mois. Par conséquent, il nous a été utile de pouvoir toucher une subvention salariale pour aider cette personne à atteindre un rythme de croisière. Je pense que d'autres employeurs considèrent aussi cette subvention comme une bouée de sauvetage pour les aider à traverser une période difficile.
Toute forme de subvention salariale pour ceux qui sont déjà intégrés à la population active est donc très utile. À cet égard, je n'ai que des louanges à faire.
Cependant, ce qui me préoccupe, c'est qu'un pourcentage très élevé de Canadiens handicapés n'ont pas encore rejoint les rangs des travailleurs. Je crois savoir que la médecine et l'informatique ont déjà donné lieu à des changements qui le leur permettent. En outre, il est maintenant possible de travailler chez soi, ce qui a permis le développement d'une multitude d'entreprises gérées de la maison. Il peut arriver qu'une personne n'ait pas été suffisamment motivée pour sortir de chez elle et trouver un emploi, mais si cette personne peut maintenant travailler chez elle... Trois facteurs se conjuguent. Les progrès de la médecine, qui permettent aux gens de mieux se déplacer, la technologie de l'informatique et la création d'un nombre croissant d'entreprises résidentielles. Tout à coup, nous sommes en présence d'une nouvelle clientèle parmi laquelle d'aucuns ont déjà une certaine formation alors que d'autres risquent d'avoir besoin d'une formation supplémentaire pour être en mesure de faire le pas décisif.
Il ne faut pas les exclure étant donné que c'est coûteux, que ce soit au niveau fédéral, provincial ou municipal.
Voilà pourquoi j'avais mis l'accent sur ce volet. Mais pour répondre à votre question, il y a bel et bien des éléments positifs dans la mesure.
M. McCormick: Il va de soi qu'il est nécessaire de faire des exceptions à la loi, et peut-être même au programme d'encouragement au travail indépendant. On pourrait peut-être appliquer ces exceptions à un groupe plutôt qu'à des particuliers, et notamment à des personnes qui ont des rapports différents avec le milieu de travail. Je suis impatient de lire les suggestions que vous ferez à ce sujet lorsque vous nous enverrez vos rapports.
M. Allmand: Monsieur Pollock, vous n'avez pas apporté avec vous de mémoire écrit. Or, je pense qu'il est extrêmement important que vous présentiez un mémoire écrit au nom de cette très importante communauté que vous représentez. Vous devriez vérifier la date butoir avec le greffier pour faire en sorte qu'il n'arrivera trop tard.
J'ai eu l'occasion de siéger au Comité des personnes handicapées au cours de la dernière session. Au début de votre intervention, vous avez demandé si l'on avait examiné l'incidence de la mesure sur les personnes handicapées. Les membres de ce comité ont recommandé à l'unanimité que toutes les mesures législatives fassent l'objet d'un examen pour en déterminer l'incidence sur les personnes handicapées. Nous n'avons pas encore eu de réponse du gouvernement, mais je pense que vous avez raison: le projet de loi n'a pas été examiné sous ce rapport.
Je voudrais vous poser quelques questions. Si vous ne pouvez me fournir les réponses aujourd'hui, vous pourriez peut-être nous les envoyer. Mes questions portent sur les arguments que vous avez avancés.
Vous dites que 15 p. 100 de la population canadienne est composée de personnes handicapées. Pourriez-vous nous dire quel pourcentage de ce 15 p. 100 sont des chômeurs?
M. Pollock: Je peux vous dire aujourd'hui, aux fins du compte rendu, que cela représente à peu près le double du taux de chômage dans le reste de la population. Cependant, je vous enverrai à ce sujet des données plus détaillées.
M. Allmand: Aux termes de la loi actuelle sur l'assurance-chômage, qui prévoit un critère de 15 heures de travail par semaine, quel pourcentage de la communauté des personnes handicapées travaillent suffisamment d'heures pour toucher des prestations?
M. Pollock: Vos questions, très valables, m'aideront à rédiger mon mémoire.
Pour ce qui est de statistiques et de données comme celles-là, au lieu d'être approximatif... je ne voudrais pas faire consigner au compte rendu quelque chose qui ne serait pas... Mais je vous communiquerai ces renseignements dès que je les aurai.
M. Allmand: Je vais dresser une liste de questions auxquelles j'aimerais obtenir une réponse pour évaluer quelle sera l'incidence de cette mesure législative sur les personnes handicapées.
Ma prochaine question est la suivante. Une fois que nous saurons quel pourcentage d'entre elles sont admissibles à l'assurance-chômage à l'heure actuelle, je voudrais savoir comment les personnes qui composent le 15 p. 100 gagnent leurs revenus. Autrement dit, quel pourcentage tirent leurs revenus de l'assurance-chômage, quel pourcentage le tirent du bien-être social et quel pourcentage le tirent de leur travail, d'investissements, des profits d'une entreprise, etc. J'aimerais aussi savoir quel pourcentage participent à des programmes de formation du gouvernement dans le cadre du système actuel.
Étant donné que vous savez comment les choses fonctionnent en vertu du régime actuel, je voudrais que vous me disiez comment les choses se passeront selon vous sous le nouveau régime. Sera-t-il plus difficile ou moins difficile d'être admissible aux prestations d'assurance-chômage? Y aura-t-il plus de personnes en formation ou moins. Y aura-t-il plus de personnes dépendantes de l'aide sociale ou moins?
Si vous n'avez pas ces réponses... Je comprends que vous ne les ayez pas aujourd'hui, mais si nous voulons être en mesure de répondre à la toute première question que vous nous avez posée, c'est-à-dire quelle sera l'incidence sur les 15 p. 100 des Canadiens qui sont handicapés, il nous faut disposer de ces statistiques.
M. Pollock: Je vais faire de mon mieux pour fournir des réponses écrites précises à ces questions, mais je voudrais aborder tout de suite le seul domaine où il n'y a pas de pourcentage précis.
D'après tous les documents que j'ai consultés, il y aura un déclin sensible des sommes que le gouvernement fédéral consacrait dans le passé et qu'il consacrera cette année à la formation des personnes handicapées. Je crois qu'auparavant, on puisait dans le Trésor pour financer une partie de la formation. Or, on le fait de moins en moins. Même pour les organismes qui ont pour mandat d'aider les personnes handicapées à trouver des emplois, le ministère a proposé à l'égard des subventions de base, quelles qu'elles soient, une réduction de 100 p. 100 qu'elles étaient l'année dernière à 90 p. 100, à 70 p. 100, à 50 p. 100 et enfin à zéro au cours d'une période de quatre ans. Cela a peut-être été révisé, mais chose certaine c'est une proposition et elle donne une idée des changements.
Il faudra que je m'attelle à la tâche pour répondre à vos questions en détail. Je le ferai le plus rapidement possible. Il faudra que je vérifie auprès du greffier votre date butoir.
M. Allmand: Très bien.
Soit dit en passant, le comité des personnes handicapées a aussi recommandé que l'on réserve à l'intention des personnes handicapées un pourcentage garanti des fonds destinés à la formation. Comme je l'ai dit, nous attendons toujours une réponse à notre rapport. J'espère que dans le mémoire que vous nous enverrez, vous ferez une analyse des changements qu'apportera la nouvelle loi, notamment pour ce qui est de comparer les heures aux semaines, etc. J'espère que vous analyserez... Si nous continuons à réduire les sommes disponibles pour former les personnes handicapées et les aider à dénicher du travail, elles demeureront bénéficiaires de l'aide sociale pour le reste de leurs jours, alors qu'elles pourraient toucher un salaire et payer des impôts.
M. Pollock: Tout à fait.
Il nous faut aussi des normes nationales qui ne varieront pas selon le caprice des divers gouvernements provinciaux et qui doivent être renégociées chaque fois. Sinon, les handicapés pourraient être victimes de discrimination dans une partie du pays et non pas ailleurs. Il ne faut donc pas oublier la question des normes nationales applicables à des membres très vulnérables de la société.
Le président: Merci, monsieur Allmand. Madame Lalonde.
[Français]
Mme Lalonde: Bonjour, monsieur Pollock. Je voudrais d'abord vous dire que le projet de loi C-12 est identique au projet de loi C-111. En vertu du Règlement, le gouvernement n'aurait pas pu le ramener au comité dans l'état où il était à la prorogation. Il aurait dû recommencer la procédure au complet. Donc, les choses n'ont pas changé.
Je tiens à vous dire également que vous avez raison de demander au gouvernement de nommer quelqu'un qui aurait la responsabilité d'examiner les projets de loi et de les filtrer à partir des besoins des personnes handicapées. Toutefois, je souhaite à cette personne meilleure chance que la secrétaire d'État à la Situation de la femme qui, ou bien n'a pas examiné le projet de loi, ou bien n'a pas été écoutée.
Troisièmement, le Fonds d'investissement dans les ressources humaines, le Human Resources Investment Fund, ne contiendra à terme que 200 millions de dollars d'argent neuf. Les documents que nous avons obtenus des hauts fonctionnaires nous montrent bien que la caisse d'assurance-chômage va contribuer davantage, soit 800 millions de dollars de plus, mais qu'en réalité, il n'y aura que 200 millions de dollars d'argent nouveau.
C'est important de savoir cela parce que vous souhaitez qu'il y ait beaucoup plus d'argent pour les personnes handicapées, et je vous comprends. Mais on ne trouve aucune assurance dans les annonces qui ont été faites.
Je termine les questions que vous avez posées, mais il n'y a peut-être pas de réponse à cela. Estimez-vous que les personnes handicapées seront avantagées ou désavantagées par ce projet de loi?
[Traduction]
M. Pollock: Vous savez ce que j'ai dit à propos de ceux qui sont exclus dans le projet de loi. À moins qu'il y ait des exemptions destinées à les protéger ou, comme M. Allmand l'a dit, que l'on incorpore les recommandations d'autres comités sur les handicapés et on réserve des fonds, je crois qu'ils en pâtiront.
Évidemment, il y a des handicapés sur le marché du travail au pays. Parfois, ils hésitent à retourner au travail parce qu'ils ont peur d'être congédiés à l'occasion d'une opération de rationalisation d'effectifs, sous prétexte qu'ils ne sont pas aussi efficaces que d'autres travailleurs. Souvent donc ils ont peur de retourner au travail. Le fait que le projet de loi prévoie un nombre moins important de semaines et un pourcentage moins élevé de la population active pour y avoir droit pénalise les handicapés.
Mais il y a des améliorations; l'assurance est offerte à d'autres catégories. Je suis aussi en faveur du calcul des heures.
Mme Lalonde: De quelle façon?
M. Pollock: Cela va s'appliquer à un nombre important de personnes qui seraient exclues selon les critères actuels. D'après ce que j'ai compris.
Mme Lalonde: Il faudrait que vous m'expliquiez cela parce que ceux qui travaillent moins de 15 heures ne seront pas admissibles à moins de travailler 62 semaines. S'ils travaillent 14 heures, ils devront travailler 62 semaines. Cela veut dire qu'il leur faut un emploi régulier.
D'après ce que je sais, il est possible pour une personne handicapée d'avoir un emploi régulier si elle négocie avec l'entreprise mais beaucoup ont du mal à trouver un emploi régulier. Dans ce cas-là, la période de travail est très courte, ce qui vient compliquer le problème.
Et puis, ceux qui travaillent 15 heures ou plus ont plus de semaines qu'ils pourront obtenir parce que s'ils travaillent seulement 15 ou 16 semaines, il faudra qu'ils travaillent deux fois plus que ce qu'ils travaillent maintenant pour avoir les mêmes prestations. Alors je ne vois pas où est l'amélioration.
Pour ceux qui travaillent de façon stable, c'est un projet de loi très traditionnel, parce qu'il est bon pour ceux qui ont un travail régulier, un bon patron et qui font beaucoup d'heures supplémentaires.
M. Pollock: Je ne peux pas vous répondre avec certitude parce que ça dépend de la catégorie dans laquelle vous vous trouvez.
Beaucoup de personnes handicapées ont un emploi régulier et stable, mais elles ne peuvent travailler qu'un certain nombre d'heures par semaine. C'est peut-être avantageux pour ceux qui ont un travail régulier mais à temps partiel; mais vous avez raison, pour celui qui... J'arrive de Terre-Neuve et je peux parler de la situation là-bas. Dans le cas où obtenir le nombre d'heures qui rend admissible et où les emplois sont vulnérables, ce sera peut-être plus difficile, je l'admets.
Mme Lalonde: Ce n'est pas mieux s'il faut multiplier par deux la durée de travail pour obtenir les mêmes prestations.
M. Pollock: Je dis seulement que c'est une analyse de l'endroit où se situent les gens dans les diverses catégories.
Mme Lalonde: Il faudra en discuter.
Le président: Et écouter.
Monsieur Pollock, avez-vous d'autres observations?
M. Pollock: Pas en réponse à cette question.
Vous pouvez voir les choses de divers points de vue. Si vous voulez critiquer ou appuyer, cela dépend de la situation et de la catégorie. Il faudrait faire une vaste analyse statistique de toute la population active pour vraiment voir si au bout du compte c'est avantageux ou désavantageux. Je ne suis pas en mesure de le faire.
[Français]
Mme Lalonde: Si l'objectif est de couper 1,9 milliard de dollars par année, il risque d'y avoir plus de personnes désavantagées que de personnes avantagées.
[Traduction]
M. Allmand: C'est justement pourquoi j'ai posé mes questions tout à l'heure. Lorsqu'ils nous envoient un mémoire, est-ce qu'ils font une analyse de la loi pour répondre à la question, compte tenu de ce que nous avons tous dit?
L'autre question importante c'est de savoir si la Loi sur l'équité en matière d'emploi influe là-dessus, parce que pour cette loi, les personnes handicapées sont un groupe cible et elle est censée leur donner de meilleures possibilités de formation.
M. Pollock: En ce qui concerne les compagnies avec lesquelles nous entretenons des liens depuis le plus longtemps, les choses ont beaucoup changé au cours des 20 dernières années. Mais chaque fois qu'il y a un colloque ou une séance de formation, il y a beaucoup d'appuis qui viennent des organismes qui sont assujettis aux exigences fédérales, comme les institutions financières ou les transporteurs ou ceux qui obtiennent de gros marchés fédéraux. Lorsque les provinces commencent à sabrer dans leur loi relative à l'équité, on constate une baisse d'intérêt et de soutien en faveur de la formation.
Il ne fait donc aucun doute que la législation fédérale en matière d'équité influe beaucoup sur le comportement des employeurs en matière de formation à l'intention des handicapés. C'est certain.
Le président: Comme il n'y a pas d'autres questions, permettez-moi, monsieur Pollock, de vous remercier de votre exposé. Je serai heureux de prendre connaissance de votre mémoire augmenté. L'échéance est le vendredi 22 mars qui vient. Si nous pouvons vous aider à obtenir des copies de textes de loi ou quoi que ce soit, n'hésitez pas à communiquer avec le greffier et nous ferons tout en notre pouvoir pour vous faciliter les choses, ce qui nous permettra de recevoir votre mémoire.
M. Pollock: Bien. Je vais peut-être vouloir m'adresser à des gens de la bibliothèque parlementaire.
Le président: La séance est levée.