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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 21 mars 1996

.0906

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

J'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants du Conseil des ressources humaines du secteur culturel. Nous sommes heureux de vous accueillir ce matin. Bienvenue devant le comité, Mme Marie Palmer, directrice administrative du conseil, et M. Peter Weinrich, président du conseil d'administration.

Je vous rappelle que nous étudions le projet de loi C-12, loi concernant l'assurance-emploi au Canada, et nous comptons sur l'aide de nos témoins pour l'améliorer. Nous sommes donc impatients de vous entendre.

Voici la façon dont nous allons procéder. Vous aurez d'abord 10 à 20 minutes pour faire votre exposé, après quoi j'ouvrirai la période des questions.

Je vous remercie beaucoup. Veuillez commencer.

[Français]

Mme Marie Palmer (directrice exécutive, Conseil des ressources humaines du secteur culturel): Monsieur le président, madame et messieurs les députés, je tiens tout d'abord à vous remercier de nous avoir invités à témoigner devant le comité.

En tant qu'organisme s'adressant aux deux grandes communautés linguistiques canadiennes, nous présentons habituellement un visage bilingue. Ce ne sera malheureusement pas le cas aujourd'hui, car ce n'est seulement qu'hier que nous avons appris que nous allions comparaître ce matin. Nous avons préféré investir toute notre énergie dans la préparation de nos documents en anglais puisque c'est la langue dans laquelle nous sommes tous les deux le plus à l'aise. Mais nous ferons amende honorable en vous remettant très prochainement notre mémoire, qui est en cours de traduction.

[Traduction]

Bonjour, mesdames et messieurs. Permettez-moi d'abord de vous remercier de nous avoir invités à vous faire part de notre position concernant le projet de loi C-12. Il s'agit d'une réforme en profondeur de l'une des plus importantes politiques sociales canadiennes. Nous sommes heureux de pouvoir vous faire part du fruit de notre réflexion sur la question ainsi que de nos préoccupations.

Le Conseil des ressources humaines du secteur culturel, soit le CRHSC, est un conseil sectoriel qui a été créé en 1995 par le milieu des arts et de la culture en collaboration avec le gouvernement fédéral. Le CRHSC a pour mandat d'élaborer et d'exécuter une stratégie de mise en valeur des ressources humaines dans le domaine culturel pour le compte des artistes, des créateurs et des travailleurs du domaine culturel au Canada. Des études menées par le secteur culturel dans le but d'identifier les besoins en ressources humaines des divers sous-secteurs culturels et financées par Développement des ressources humaines Canada ont été rendues publiques en janvier 1995.

Ces études ont conclu à la nécessité de créer un organisme qui serait chargé de coordonner à l'échelle nationale la mise en valeur des ressources humaines dans le domaine culturel. C'est pour donner suite à ces études qu'on a créé le CRHSC.

Le document intitulé «La culture à l'oeuvre» constitue une synthèse de ces études. Si vous n'en avez pas encore reçu des exemplaires, nous veillerons à ce qu'on vous en envoie.

La vitalité à long terme du secteur des arts et de la culture, l'un des secteurs économiques canadiens qui croissent le plus rapidement, dépend de la mise en oeuvre de cette stratégie.

Pour votre gouverne, le CRHSC est aussi chargé d'exécuter, pour le compte du ministère du Développement des ressources humaines, le programme de perfectionnement de la formation auquel plus de 1 650 travailleurs du domaine culturel ont participé l'an dernier.

Le CRHSC représente l'ensemble du secteur culturel et compte 161 membres, dont 80 sont des membres ordinaires et 81 des membres associés. Pour leur part, les membres ordinaires représentent 50 000 personnes.

À plusieurs égards importants, on peut dire que le projet de loi C-12 a à peu près le mêmeimpact sur le secteur artistique et culturel que sur l'ensemble de l'économie du fait que lesconditions de travail dans ce secteur ont toujours été très diverses.

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Certains emplois du domaine sont saisonniers, d'autres permanents, et d'autres encore peuvent être considérés comme des emplois autonomes en partie ou en totalité. Notre mémoire s'efforce de faire ressortir les plus importants aspects du projet de loi C-12 ainsi que leurs incidences sur les conditions de travail dans notre secteur.

On ne peut sous-estimer la contribution à l'économie canadienne des 670 000 personnes qui travaillent dans le domaine des arts et de la culture. Qui plus est, notre qualité de vie en dépend largement. Comme le soulignait le dernier discours du Trône, culture et identité nationale sont indissociables. Chaque année, le secteur culturel compte pour 23 milliards de dollars dans le calcul du produit intérieur brut. En outre, des millions de Canadiens apprécient chaque année des spectacles montés par les artistes ainsi que les oeuvres qu'ils produisent. La croissance de l'emploi dans ce secteur dépasse de beaucoup la croissance moyenne dans tous les secteurs d'emploi au pays. En effet, depuis 1981, l'emploi dans le secteur culturel a augmenté de 32 p. 100 contre 12 p. 100 dans les autres secteurs. En termes concrets, cela signifie que 160 000 personnes de plus qu'en 1981 travaillent aujourd'hui dans notre secteur.

Les divers programmes et politiques mis en oeuvre par le gouvernement fédéral pour favoriser le développement de nos ressources artistiques et culturelles portent fruit. De toute évidence, le gouvernement appuie ainsi un secteur gagnant. Or, la partie est loin d'être gagnée, puisque la vente des oeuvres d'art est loin d'être aussi lucrative pour les artistes et les créateurs et loin de rapporter ce qu'elle devrait aux artistes et aux créateurs.

La plupart des artistes ont un revenu extrêmement faible qui dépasse rarement 15 000$ par année. Pour joindre les deux bouts, les artistes et les créateurs doivent souvent occuper un autre emploi, ce qui n'empêche pas leur revenu total d'être relativement bas. Si le revenu familial est de plus de 54 000$, le revenu total moyen des artistes ne dépasse pas 25 400$. Un peintre ou un sculpteur, par exemple, gagnera rarement plus de 14 100$ par année et un danseur 16 300$.

Bien que ces revenus totaux ne soient pas très élevés, les familles des artistes ne peuvent pas s'en passer. L'essentiel, c'est que ces gens travaillent. Ils ne touchent pas de l'aide sociale ni aucune autre forme de soutien du revenu.

M. Peter Weinrich (président du conseil d'administration, Conseil des ressources humaines du secteur culturel): Passons maintenant au projet de loi C-12, que je continue d'appeler le projet de loi C-111. Excusez-moi si je me trompe...

Le président: C'est exactement le même projet de loi qui a été déposé à la Chambre le 1er décembre.

M. Weinrich: Très bien. Cela nous a évité d'avoir à acheter un nouvel exemplaire du projet de loi.

Le projet de loi C-12 propose un nouveau cadre de collaboration fédérale-provinciale pour l'exécution des programmes de formation professionnelle et de développement des ressources humaines. Nous estimons qu'à plusieurs égards ce nouveau cadre risque de se traduire par une diminution des initiatives essentielles prises par le gouvernement fédéral en ce qui touche la formation et le développement des ressources humaines dans le secteur culturel. Plus précisément, l'alinéa 60(5)b) précise que le gouvernement fédéral ne pourra pas fournir d'aide pour la formation liée au marché du travail sans l'accord du gouvernement de la province intéressée. À notre avis, il convient de préciser le sens de cet alinéa. Faut-il comprendre qu'un conseil comme le nôtre, qui met en oeuvre des centaines de projets de formation grâce au financement du ministère du Développement des ressources humaines, devra d'abord obtenir le consentement officiel des provinces?

Si c'était le cas, cela compromettrait grandement les efforts déployés par le conseil pour fournir de la formation aux artistes et aux travailleurs du domaine culturel de façon efficace et efficiente. Ce changement par rapport à la situation actuelle léserait les milliers d'artistes, de créateurs et de travailleurs qui participent chaque année au programme de formation national. Le comité ainsi que le gouvernement du Canada doivent de toute urgence préciser quel sera le rôle futur des conseils sectoriels comme le nôtre ainsi que le rôle du gouvernement fédéral lui-même dans l'exécution des programmes nationaux de formation et de mise en valeur des ressources humaines. Les programmes de formation nationaux sont essentiels au développement continu de la main- d'oeuvre canadienne, et la santé de l'économie, et du secteur des arts et de la culture plus précisément, dépend de la coordination de ces programmes.

Le projet de loi C-12 ne rend pas admissibles à l'assurance-emploi les artistes qui occupent un emploi indépendant même si le document de travail publié par le gouvernement sous le titre Programme: emploi et croissance laissait entendre que, comme ces conditions de travail non typiques, ou hors-norme, sont beaucoup plus courantes, il convenait d'envisager la possibilité de permettre à ces travailleurs de profiter du régime.

Les emplois autonomes représentent une part importante des emplois dans notre secteur. Bien que la proportion du travail hors-norme - ce qui comprend les emplois à temps partiel, les cumuls d'emplois et les emplois autonomes - soit de 21 p. 100 pour l'ensemble de la population active canadienne, elle est de plus de 50 p. 100 pour les travailleurs du secteur des arts et de la culture, et nous n'incluons pas dans ce chiffre les emplois à temps partiel et les cumuls d'emplois.

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Même si le projet de loi C-12 renferme des dispositions s'appliquant aux travailleurs à temps partiel et aux travailleurs qui occupent plus d'un emploi, il prive de l'assurance-emploi un pourcentage important et croissant de la main-d'oeuvre canadienne. Cet état de fait est particulièrement troublant, étant donné que le document technique récemment publié par le ministère concluait qu'on pourrait faire participer au régime d'assurance-emploi les travailleurs autonomes à un coût relativement peu élevé.

Mme Palmer: Comme je l'ai mentionné plus tôt, la plupart des artistes et des créateurs occupent plus d'un emploi pour suppléer aux revenus qu'ils tirent de leur emploi dans le domaine culturel. À l'égard de ces emplois, ils doivent le plus souvent payer les cotisations de l'employé au régime d'assurance-chômage. Qui plus est, leurs employeurs sont aussi tenus de cotiser à la caisse d'assurance-chômage. Cela revient à une forme d'imposition sans représentation, étant donné que les artistes autonomes ne sont pas admissibles à l'assurance-chômage ou à l'assurance-emploi en cas de congédiement.

Nous avions l'intention de nous faire accompagner ce matin par Mme Judith Gouin, une artiste autonome de Témagami. Nous avons communiqué immédiatement avec elle hier après avoir été invités à comparaître devant le comité. Elle s'est organisée pour venir par avion de Témagami à Ottawa hier soir pour nous accompagner devant le comité. Comme on a fermé la route entre Témagami et North Bay - où elle devait prendre son vol - c'est à grand regret qu'elle a dû annuler sa comparution devant le comité aujourd'hui.

Nous avons cependant joint à notre mémoire l'information qui la concerne, puisque sa situation illustre bien le problème auquel font face les artistes autonomes.

Mme Gouin est une artiste autonome. Le Conseil des arts du Canada lui a offert un contrat l'an dernier. Le contrat a commencé le 27 novembre 1995. Lorsqu'elle est entrée en fonction, elle a informé le Conseil des arts qu'elle ne souhaitait pas cotiser à l'assurance-chômage. Elle a spécifiquement demandé qu'on ne fasse pas de déductions à cette fin de son chèque de paie. Le Conseil des arts du Canada lui a répondu qu'elle était tenue de cotiser au régime et que Revenu Canada obligeait le conseil à faire ces déductions. On a donc prélevé des cotisations à l'assurance-chômage de son chèque de paie, bien qu'elle ait demandé qu'on ne le fasse pas. À la fin de son contrat avec le Conseil des arts du Canada, Mme Gouin a demandé qu'on lui rembourse ses cotisations. On a rejeté sa demande. On a aussi rejeté son appel de cette décision.

Vous trouverez l'information se rapportant au cas de Mme Gouin en annexe à notre mémoire. Cet incident s'est produit il y a quelques mois à peine, et il arrive à point nommé pour faire ressortir le problème que pose ce projet de loi aux artistes autonomes.

Le cas de Mme Gouin n'est pas unique. Les artistes cotisent souvent à l'assurance-chômage. Or, ils ne sont pas admissibles au régime. Leurs employeurs versent des cotisations à l'égard d'employés qui ne pourront jamais profiter du régime. À mesure que les emplois autonomes deviendront de plus en plus courants, cette injustice frappera de plus en plus de gens.

Nous sommes d'avis que si les artistes et les créateurs autonomes sont exclus du régime d'assurance-chômage ou d'assurance-emploi, il conviendrait qu'on leur rembourse toutes les cotisations qu'ils versent au cours de l'année. Cette disposition serait plus juste que celle qu'on propose à l'heure actuelle et qui consisterait à rembourser aux travailleurs à faible revenu une partie des cotisations qu'ils versent au régime.

Cette situation préoccupe tout particulièrement les artistes, puisque d'autres travailleurs dont les conditions d'emploi sont semblables aux leurs sont admissibles au régime d'assurance-chômage ou d'assurance-emploi. Les enseignants et d'autres employés des établissements d'enseignement qui travaillent à contrat, par exemple, sont admissibles à l'assurance-chômage pendant les mois d'été, bien qu'il soit très peu probable que des emplois soient disponibles dans ce domaine pendant cette période de l'année. Le revenu moyen d'un enseignant du secteur culturel est de 52 600$, comparativement au revenu moyen des artistes, qui est de 25 400$. Or, un artiste ne peut même pas obtenir qu'on lui rembourse intégralement ses cotisations.

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M. Weinrich: Nous estimons que le gouvernement fédéral doit préciser le sens qu'il donne à «travail autonome» tant dans la loi que dans la réglementation.

À titre d'exemple, l'article 60 du projet de loi, qui porte sur la formation, ne s'applique encore une fois qu'aux personnes occupant un emploi. On y lit que la formation vise à aider les personnes «à devenir ou rester aptes à occuper ou à reprendre un emploi...». «Rester aptes à occuper un emploi» signifie que les personnes visées doivent être sur le point de perdre leur emploi. Par conséquent, comment peut-on dire qu'un travailleur autonome est sur le point de perdre son emploi? Je suppose qu'on pourrait dire que c'est le cas si cette personne est sur le point de faire faillite, mais il n'en demeure pas moins que le projet de loi les prive de la formation qui leur est essentielle pour demeurer compétitifs dans leur domaine.

La décision récente de Revenu Canada de vérifier les comptes de diverses agences de spectacles à Toronto confirme le fait qu'il est nécessaire qu'on précise le sens de «travail autonome». Revenu Canada considère que les agences de spectacles sont les employeurs des comédiens et que, par conséquent, elles devraient payer les cotisations fixées pour les employeurs dans le cadre du régime d'assurance-chômage et du RPC. Or, les agences de spectacles sont plutôt au service des comédiens, et non pas l'inverse. Autrement dit, les comédiens leur versent une commission afin de les aider à trouver du travail. Une fois que le contrat d'un comédien est terminé, la personne qui a retenu ses services envoie un chèque à l'agence de spectacles pour le compte du comédien.

Si je ne m'abuse, un projet de loi visait spécifiquement les agences de placement temporaire. Le cas est évidemment à part. Les agences de placement temporaire ont effectivement des employés qui sont rémunérés par la personne qui retient leurs services. Le cas des agences de spectacles est bien différent et soulève diverses questions fondamentales au sujet de la nature du travail autonome.

Faut-il considérer que les agents de spectacles emploient les comédiens et faudrait-il déduire à la source certaines cotisations à même les chèques de paie des comédiens autonomes? Devrait-on contraindre ce genre d'employeurs à cotiser à un régime auquel ne seront pas admissibles ceux qu'on considère comme leurs employés? En fait, un comédien peut obtenir un contrat d'une agence de spectacles au plus deux ou trois fois par année. On ne peut pas dire qu'il s'agit d'un emploi à long terme.

Nous incitons fortement le comité à étudier cette question dans le cours de son étude du projet de loi C-12 afin d'établir quelles devraient être les déductions obligatoires pour les artistes autonomes et les agents de spectacles et quelles seraient les répercussions de cette mesure sur leur statut d'emploi. Nous collaborerions volontiers avec vous et avec le gouvernement pour clarifier ce point, puisque cela revêt une grande importance pour nous.

Bon nombre de personnes occupent aussi des emplois saisonniers au printemps et à l'été qu'on ne peut pas considérer comme des emplois saisonniers types. Il s'agit cependant effectivement d'emplois saisonniers. Puisque les spectacles de danse, de musique et de théâtre sont présentés au cours de certaines saisons bien précises, les artistes à l'emploi des organismes visés sont mis à pied à la fin de la saison. Un certain nombre de ces personnes sont admissibles à l'assurance-chômage parce qu'elles ont travaillé pendant le nombre d'heures et de semaines requis. Au cours de l'année, le gouvernement a envisagé d'exclure les travailleurs saisonniers de l'application de la loi. Aux termes du projet de loi C-12, ces travailleurs demeurent admissibles aux prestations, mais verront leurs prestations réduites chaque fois qu'ils feront une nouvelle demande d'assurance-emploi.

Nous préférons de loin que les travailleurs saisonniers soient assujettis à la règle de l'intensité à la possibilité qu'on les exclue du régime. Le travail saisonnier est répandu sur le marché du travail au Canada, et nous savons gré au gouvernement des efforts qu'il déploie pour en tenir compte.

En conclusion, le nouveau régime d'assurance-chômage que le gouvernement propose pour le 21e siècle dans le but de répondre de façon plus efficace aux besoins changeants des travailleurs n'aide en rien les artistes et les créateurs autonomes. Le fait que le projet de loi vise les emplois à temps partiel et les cumuls d'emplois ne changera en rien le fait que les artistes autonomes ne sont pas admissibles aux prestations. Le fait de comptabiliser désormais les heures plutôt que les semaines de travail ne change en rien non plus la situation des artistes et des créateurs autonomes.

En 1980, le gouvernement fédéral a signé une recommandation présentée par l'UNESCO à Belgrade concernant le statut de l'artiste. Cette recommandation énonce que chaque artiste doit être admissible aux régimes de sécurité sociale et d'assurance dont jouissent les autres citoyens. À titre de représentant du secteur des arts et de la culture, le CRHSC regrette que le projet de loi C-12 ne reflète pas la teneur de cette recommandation.

.0925

Je vous remercie encore une fois de nous avoir invités à comparaître devant le comité aujourd'hui. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Je vais d'abord accorder la parole à M. Crête.

[Français]

M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): Merci pour votre présentation. J'aurais quelques questions à vous poser et j'aimerais faire un commentaire. Je suis un peu étonné que vous recommandiez qu'il n'y ait pas d'entente formelle avec les provinces en ce qui a trait à la formation de la main-d'oeuvre.

Prétendez-vous représenter l'Union des artistes québécois, qui, selon moi, a adhéré au consensus québécois sur la question de la main-d'oeuvre et ne se retrouverait pas facilement dans la recommandation que vous faites, étant donné que cela ne correspond aucunement au respect du domaine de compétence que convoite le Québec?

J'aimerais que vous nous expliquiez plus précisément comment les choses pourraient fonctionner si les artistes, qui sont à leur propre compte, pouvaient devenir admissibles à l'assurance-chômage. De façon pratique, de quelle façon voudriez-vous que cela fonctionne?

Finalement, j'aimerais parler du travail saisonnier. Vous dites que ce n'est déjà pas si mal que le gouvernement continue d'assumer ses responsabilités en matière de travail saisonnier. Mais avez-vous calculé ce que les gens qui ont un travail saisonnier retireraient comme bénéficiaires de l'assurance-chômage selon la nouvelle formule? Si vous avez fait ce calcul-là, vous allez constater que les gens pourraient retirer des prestations inférieures au montant que l'aide sociale leur accorderait.

[Traduction]

M. Weinrich: Vous soulevez évidemment plusieurs questions.

Nous ne nous opposons pas à ce que le gouvernement fédéral conclut des ententes officielles avec les provinces. À l'heure actuelle, par exemple, nous administrons un programme dans le cadre du programme de perfectionnement de la formation, qui est un programme national auquel ont participé des artistes de toutes les provinces, dont le Québec. Il suffit maintenant pour conclure une entente avec le Québec de téléphoner au bureau local d'assurance-chômage pour discuter de la demande que nous avons reçue et souhaitons exaucer. Cela ne nous pose pas de difficulté.

Nous verrions cependant d'un mauvais oeil le fait qu'on nous oblige à entamer des négociations officielles avec chaque province avant de pouvoir mettre en oeuvre le programme national de formation. Voilà la précision que je voulais donner.

En ce qui a trait aux travailleurs indépendants et à leur droit à l'assurance-chômage, encore là il y a deux éléments à prendre en compte. Il y a leur droit de toucher des prestations d'assurance-chômage quand ils sont sans travail, et il y a aussi l'aspect formation, qui est lié aux prestations d'assurance-chômage. Il faut essentiellement occuper un emploi maintenant pour avoir droit à quelque formation que ce soit.

Il me semble que nous n'avons pas vraiment adopté de position là-dessus. On pourrait toutefois prévoir un programme facultatif qui permettrait aux travailleurs indépendants de cotiser à l'assurance-chômage afin d'avoir droit à des prestations de formation ou d'acquisition de compétences s'ils estiment en avoir besoin. De toute évidence, quand on est travailleur indépendant, on ne peut pas continuer pendant un demi-siècle à faire exactement la même chose sans devoir s'initier aux nouvelles technologies ou suivre une formation quelconque.

Je ne sais pas trop si nous avons fait une étude sur le travail saisonnier. Ma collègue pourrait peut-être ajouter quelque chose à ce sujet.

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Mme Palmer: Pour ce qui est de savoir quelle serait l'incidence véritable sur les artistes du calcul des prestations saisonnières, nous dirions sans doute que c'est la communauté culturelle des artistes qui est la mieux placée pour indiquer ce qu'elle souhaiterait à cet égard. D'après les indications qu'elle a données jusqu'à présent, la communauté des artistes estime qu'il s'agit d'un élément auquel elle devrait avoir accès. Nous serions disposés à appuyer cette prise de position par tous les moyens jugés appropriés.

Quant à l'incidence en dollars et en cents de ces calculs, nous serions certainement disposés à approfondir la recherche là-dessus au nom de la communauté, mais nos membres sont précisément les membres de cette communauté, et nous sommes prêts à les appuyer dans leur prise de position.

Si vous le permettez, je voudrais ajouter une dernière chose en ce qui concerne le rôle de la communauté culturelle du Québec dans les activités du Conseil des ressources humaines du secteur culturel.

La communauté culturelle et artistique joue un rôle très actif au CRHSC depuis ses débuts. Les membres de la communauté québécoise sont aussi très bien représentés à notre conseil d'administration. L'Union des artistes est effectivement au nombre des organismes représentés, et les vues que nous vous présentons aujourd'hui correspondent à celles du conseil d'administration.

[Français]

M. Crête: Êtes-vous en train de me dire que, si on demandait à l'Union des artistes si elle est d'accord pour que le gouvernement fédéral dépense de l'argent dans le domaine de la formation de la main-d'oeuvre, sans entente avec le Québec, elle serait d'accord?

[Traduction]

Mme Palmer: Je dis que la communauté culturelle est d'avis qu'il est très important que la formation offerte aux membres du secteur culturel soit soumise à une coordination nationale et que l'élaboration et la prestation de cette formation devraient se faire de façon à ce qu'elle soit efficace aux yeux du conseil et qu'elle ne se heurte pas à des obstacles ou à des entraves qui en limiteraient en fait l'accès à la communauté dans son ensemble.

Comme l'a indiqué mon collègue, M. Weinrich, s'il fallait, chaque fois que nous voulons offrir une formation quelconque, nous engager dans des négociations, cela deviendrait au bout du compte un obstacle important qui nous empêcherait d'offrir à la communauté ce dont elle a besoin.

Nous souhaitons donc que tout soit mis en oeuvre pour faciliter la formation et la rendre le plus efficace possible.

M. Weinrich: Si vous me permettez d'ajouter moi aussi quelque chose à cela, la réponse à votre question est non; naturellement, l'Union des artistes voudrait elle-même avoir un rôle à jouer.

Je crois que c'est là la question principale. Par le passé, beaucoup des programmes de formation offerts par le gouvernement fédéral par l'entremise des divers Centres d'emploi du Canada n'ont pas été très réussis. Cela ne fait aucun doute, il me semble. Le nombre de personnes qui ont trouvé un emploi ou qui ont trouvé du travail après avoir suivi ces programmes n'est pas très élevé.

Les conseils sectoriels, pas seulement le nôtre, mais les autres aussi, ont des résultats infiniment meilleurs. Plus de 50 p. 100 des chômeurs que nous avons formés ont maintenant un emploi.

Si l'idée est simplement de passer, en quelque sorte, d'une formation offerte par des généralistes du Centre d'emploi du Canada sous l'égide du gouvernement fédéral à une formation offerte par d'autres généralistes sous l'égide des provinces, nous ne voyons vraiment pas en quoi - et je crois que l'Union des artistes serait d'accord avec nous là-dessus - ce serait une amélioration.

La formation doit se faire sur le conseil et la recommandation des secteurs. Dans le cas du Québec, l'Union des artistes voudrait, naturellement, participer directement à tout programme provincial qui serait mis en oeuvre.

.0935

Pour tout programme national, nous travaillerions en étroite collaboration avec l'Union des artistes. Cela ne fait aucun doute. Je crois que c'est d'ailleurs très important.

[Français]

M. Crête: C'est peut-être une question de langue. Je n'affirme pas que les artistes ne devraient pas être admissibles, mais ce que j'ai lu à la page 12 me donnait l'impression que vous trouviez normal qu'il y ait une règle qui diminue le pourcentage pour les gens qui bénéficient de l'assurance-chômage d'année en année. Je peux m'être trompé, mais je voulais clarifier cette chose-là.

Quand vous dites, dans la deuxième phrase du petit paragraphe en caractères gras: «While the government has faced criticism over...», etc., cela me donne l'impression que vous trouvez acceptable que les travailleurs saisonniers reçoivent une prestation moindre s'ils utilisent l'assurance-chômage plus souvent, alors qu'il ne s'agit pas nécessairement de cela, mais plutôt de permettre aux artistes d'être admissibles à ce type de régime.

[Traduction]

M. Weinrich: Ce n'est certainement pas le cas. Dans les propositions antérieures qui avaient été faites de façon officieuse, il était question d'éliminer complètement les prestations pour les travailleurs saisonniers. Nous disons que ce qui est maintenant prévu est mieux que rien, mais nous ne sommes certainement pas d'avis que c'est le mieux qui aurait pu être fait.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Nous passons maintenant au côté ministériel, avec M. Easter, suivi de Mme Augustine, puis de M. Allmand.

M. Easter (Malpèque): Merci, monsieur le président.

Je vous souhaite la bienvenue. Tout d'abord, je voudrais obtenir des précisions afin de savoir qui sont au juste les membres de la communauté culturelle et artistique qui ont actuellement droit aux prestations.

Dans ma région de l'Île-du-Prince-Édouard, nous avons beaucoup de petits artisans à leur compte qui travaillent le bois ou d'autres matériaux. Nous avons aussi les artistes de la scène qui travaillent au Centre des arts de la Confédération.

Je crois savoir que les artisans qui travaillent à leur compte n'ont pas droit à l'assurance-chômage, alors que les artistes de la scène y ont droit. Est-ce juste?

M. Weinrich: Je ne connais pas la situation particulière du théâtre de Charlottetown. Je dois toutefois vous dire que dans une autre vie j'étais directeur général du Conseil canadien des métiers d'art, de sorte que je sais exactement quelle est la situation de ces artisans dont vous parlez.

Parmi les artistes de la scène, certains y ont droit et d'autres pas. Tout dépend des conditions auxquelles ils sont embauchés par la compagnie en question. Il en est de même pour les musiciens, les comédiens et les autres. Leur admissibilité dépend de leurs circonstances particulières.

Je crois toutefois avoir raison de dire que c'est dans l'Île-du-Prince-Édouard que nous avons eu un cas très célèbre il y a de cela deux ou trois ans. Il s'agissait de quelqu'un qui était effectivement admissible, qui était comédien et qui avait demandé de l'assurance-chômage; on lui avait répondu qu'il plaisantait sûrement, puisque personne ne pouvait s'attendre de gagner sa vie comme comédien. On lui avait refusé des prestations d'assurance-chômage. La décision a toutefois été renversée par la suite, mais l'attitude à laquelle s'est heurté ce comédien est assez généralisée.

M. Easter: Mais quand vous examinez les nouvelles règles énoncées dans le projet de loi C-12, ne considérez-vous pas qu'il s'agit d'une amélioration?

Vous avez parlé de la faiblesse des revenus, et je sais très bien que c'est un problème dans le secteur des arts et de la culture. Il est malheureux qu'il en soit ainsi, étant donné la grande importance de ce secteur pour notre société. Ne pensez-vous pas, cependant, que c'est une amélioration que prévoir, d'une part, une formule horaire qui permet d'avoir plus d'un emploi assurable et, d'autre part, un supplément fondé sur le revenu familial pour les personnes admissibles? Et je comprends le problème que vous soulevez en ce qui concerne les travailleurs indépendants et les nombreux problèmes qui en découlent.

M. Weinrich: Je ne crois pas que, dans la pratique, le fait de remplacer la formule hebdomadaire par une formule horaire changera grand-chose à la situation des travailleurs. Quelle que soit la formule utilisée, je ne pense pas que la différence soit énorme. Par contre, le revenu familial pourrait peut-être avoir des conséquences importantes.

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Vous avez parlé des artisans. Vous n'êtes pas sans savoir que beaucoup d'artisans exercent leur métier avec leur conjoint. Les deux membres du couple travaillent ensemble, de sorte que leur revenu combiné leur permet de subvenir à leurs besoins. Encore là, nous n'avons toutefois pas fait de projections quant aux conséquences de l'application de la règle du revenu familial, en sus des études que nous avons déjà réalisées.

N'est-il pas question du revenu familial dans ces études sur la population active? Avez-vous vu...?

Dans cette étude sur la population active, on établit différentes catégories: arts et métiers, y compris les arts de la scène et le reste. On y trouve des chiffres sur le revenu familial combiné, et nous pourrions certainement veiller à ce que vous receviez un jeu de ces documents.

M. Easter: Merci, monsieur le président. Je cède le reste de mon temps de parole à d'autres.

Le président: Madame Augustine.

Mme Augustine (Etobicoke - Lakeshore): Merci, monsieur le président.

Madame Palmer, monsieur Weinrich, je suis ravie que vous soyez là.

Je suis cette question de la règle de l'intensité, telle qu'elle est énoncée dans le projet de loi. Je constate que, à la page 12, vous indiquez que:

C'est dans cette optique aussi que j'aborde la règle de l'intensité qui est prévue dans le projet de loi et qui sembler un peu sévère. C'est pourquoi j'essaie de trouver des accommodements et des possibilités d'appui pour cette règle, et quand je lis ce que vous dites au sujet du revenu des travailleurs du secteur culturel à la page 4 de votre mémoire - c'est-à-dire ces personnes qui gagnent moins de 26 000$ - je me demande si la voie dans laquelle je m'engage m'amènerait à exempter les bénéficiaires du supplément familial de cette règle de l'intensité.

Par ailleurs, dans un deuxième temps - c'est une question à laquelle je réfléchis beaucoup et dont j'ai parlé à des particuliers et des collectivités - je me demande si nous pourrions calculer au prorata les semaines de prestations antérieures aux fins de la règle de l'intensité. Je voudrais que vous nous parliez de cela, étant donné ce que vous dites à la page 4 de votre document, à savoir que si les revenus d'activités culturelles «ne sont pas élevés, ils constituent souvent un élément crucial du revenu familial pour les personnes qui font partie d'une unité familiale». Je cherche vraiment à voir comment la règle de l'intensité touche les familles gagnant 26 000$ ou moins et à trouver des moyens de modifier le projet de loi pour qu'il soit plus avantageux pour elles.

M. Weinrich: Si, comme vous le dites, il était possible d'exempter les familles de cette règle de l'intensité, ce serait certainement, selon nous, une amélioration. Bien sûr, et cela est encore plus vrai dans la région atlantique, où les taux de chômage sont élevés, nombreux sont ceux qui se lancent à plein temps dans les arts et métiers parce qu'ils n'ont à peu près aucune autre possibilité. D'après le dernier recensement, de 2 000 à 3 000 personnes sont venues se joindre aux rangs des artisans professionnels à temps plein, la plupart d'entre eux dans la région atlantique, où l'on avait décidé de se lancer dans ce genre d'activités. Ainsi, il serait certainement utile dans un premier temps d'exempter les familles... cela ne fait aucun doute.

Mme Augustine: Monsieur le président, comme vous le savez, je cherche à obtenir l'appui de mes collègues à ce comité pour que les prestataires ayant un revenu familial peu élevé soient exemptés de la règle de l'intensité. J'ai toutefois ajouté quelque chose à ma proposition depuis la dernière fois où je l'ai soumise à mes collègues pour tenter d'obtenir leur appui. Je propose maintenant de trouver une formule qui permettrait de calculer les semaines au prorata aux fins de la règle de l'intensité. Les personnes qui travaillent pendant qu'elles touchent des prestations ont parfois des semaines d'activité intense et d'autres semaines où leur activité est moindre.

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Je voudrais que vous nous disiez si c'est effectivement ce que vous constatez et comment vous pensez que cette formule pourrait aider les personnes dont vous nous avez parlé, par exemple, les peintres, les sculpteurs, les écrivains et les autres.

M. Weinrich: Comme système d'étalement du revenu, oui. Vous parlez d'un calcul au prorata, qui rejoint presque les anciennes formules d'étalement du revenu. Avec le calcul au prorata, comme vous dites... Il y a des semaines d'activité intense et d'autres où l'activité est moindre, et cela ne dépend pas nécessairement des différentes saisons de l'année. Les saisons jouent peut-être un certain rôle, car les artisans sont bien sûr beaucoup plus occupés avant Noël et avant les autres fêtes, mais ils le sont beaucoup moins dans les mois qui suivent. En règle générale, les saisons sont toutefois très différentes, et elles varient d'ailleurs d'une personne à l'autre.

Le président: Monsieur Allmand.

M. Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Merci.

Nous n'avons reçu votre mémoire que ce matin, mais j'ai pu le lire pendant que vous parliez. Je veux simplement obtenir quelques éclaircissements. À la page 5, vous dites, dans la partie qui se trouve en caractères gras, qui est une conclusion et une recommandation:

M. Weinrich: Les 50 p. 100 dont nous parlons sont essentiellement des travailleurs indépendants.

M. Allmand: Bon, d'accord, parce que le travail hors-norme peut être admissible, surtout avec la formule horaire.

M. Weinrich: Nous parlons de travailleurs indépendants.

M. Allmand: D'accord.

Je veux maintenant passer à la page 9 de votre mémoire, où vous parlez de toute cette question de ceux... Je suppose que vous parlez toujours des artistes ou des membres de votre communauté qui ont des emplois: ces personnes travaillent dans le secteur culturel ou comme artistes et ont aussi un emploi comme les autres où elles payent des cotisations. Vous dites que, quand elles perdent leur travail rémunéré, on refuse de leur verser des prestations parce qu'on considère qu'elles travaillent comme artistes.

Au haut de la page, vous dites:

M. Weinrich: Je ne pense pas que la chose ait jamais été présentée à un tribunal d'assez grande instance. On a certainement interjeté appel auprès de tribunaux de différentes juridictions. Je suppose qu'on a pu régler les cas les plus absurdes généralement en faisant simplement appel à Ottawa, ou quelque chose de ce genre. Mais, à ma connaissance, la chose n'a jamais été soumise à un tribunal d'assez grande instance pour qu'on puisse en tirer une jurisprudence qui s'appliquerait à l'échelle du pays.

M. Allmand: Il me semble que ce serait là une façon de régler le problème, à moins que nous ne puissions passer par la voie législative. Je sais que cela s'est déjà produit pour d'autres questions semblables. Vous pourriez vous retrouver devant un arbitre dans une région du pays - comme dans le cas de Mme Gouin - qui rendrait une décision, alors que quelqu'un d'autre dans une autre région obtiendrait une décision favorable.

M. Weinrich: C'est exactement ce qui se produit.

M. Allmand: Je passe maintenant à la fin de votre exposé.

Vous dites que nous devrions inclure les travailleurs indépendants, notamment ceux qui font partie des communautés que vous représentez. Avez-vous des suggestions quant à la façon dont cela pourrait se faire? Quand on sait comment les artistes, notamment les peintres et les sculpteurs, travaillent, on sait que, bien souvent, la plus grande part du travail se fait avant même la création de l'oeuvre. La participation serait-elle volontaire? Les artistes décideraient d'eux-mêmes de cotiser comme membres d'une certaine catégorie? Est-ce à cela que vous pensez?

M. Weinrich: Quand nous avons commencé à discuter de cette question, nous nous intéressions plutôt à la possibilité d'obtenir des prestations pour les travailleurs indépendants en cas de blessure ou de maladie. Autrement dit, leur inactivité ne serait pas volontaire. Je sais bien qu'il est possible d'obtenir une assurance médicale pour se protéger contre pareille éventualité, mais, encore là, il est difficile pour les travailleurs du secteur des arts de s'assurer contre une éventuelle perte de revenus, et ce, pour toutes sortes de raisons.

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Il y a aussi la question de la formation qui entre en ligne de compte. Quand on est artiste en exercice et qu'on a besoin de travailler avec de nouveaux matériaux, notamment avec des matériaux qui pourraient être dangereux, comme le sont beaucoup de matériaux, comment fait-on pour trouver le temps et la formation nécessaires?

M. Allmand: Vous n'avez toujours pas répondu à ma question. Je veux savoir si vous avez des idées sur la façon d'inclure les artistes et les gens de votre milieu...

M. Weinrich: Je vois.

M. Allmand: ...puisqu'ils ne font pas les heures habituelles. Si je suis dans le secteur du détail, je me présente au travail et je travaille 10 heures, et donc les 10 heures comptent.

M. Weinrich: En effet.

M. Allmand: Préconisez-vous de permettre aux gens de votre milieu de dire simplement: «Je peux verser tant par mois; je vais donc m'inscrire volontairement?» Avez-vous une idée? Si nous modifions la loi, avez-vous une suggestion à nous faire sur la façon de les inclure, de les rendre assurables?

M. Weinrich: En réalité, la détermination du chômage chez...

M. Allmand: Lorsqu'ils travaillent et quelles cotisations ils verseraient, etc.

M. Weinrich: Nous n'avons pas examiné précisément cet aspect. La question s'est posée de temps à autre, comme je l'ai dit, dans diverses situations, dans des cas de maladie, en ce qui concerne la formation, etc.

On pourrait peut-être inclure les cotisations sur sa déclaration d'impôt sur le revenu. Les travailleurs à leur compte paient ainsi leurs cotisations au Régime de pensions du Canada, et on pourrait facilement inclure une case pour l'assurance-chômage à leur intention également où ils calculeraient un pourcentage de leurs revenus pour l'année.

M. Allmand: Bonne suggestion.

J'ai des amis qui sont poètes. Ils se réveillent au milieu de la nuit et, tout à coup, commencent à travailler. Ensuite, ils ne travaillent peut-être pas pendant trois ou quatre jours.

L'idée de suivre l'exemple du Régime de pensions du Canada est excellente. Merci beaucoup.

M. Weinrich: Merci.

Le président: Merci, monsieur Allmand. Je ne savais pas que vous faisiez partie du milieu culturel. Merci de nous l'avoir signalé.

M. Allmand: Je vous ferai lire quelques-unes de mes oeuvres. Elles vous inspireront beaucoup.

Le président: Maintenant que c'est noté, je suis persuadé que vous recevrez des demandes à votre bureau.

M. Allmand: Je n'y gagne pas beaucoup d'argent.

Le président: Monsieur Nault.

M. Nault (Kenora - Rainy River): Merci, monsieur le président.

J'aimerais que vous me donniez des exemples ou des idées sur le sens de votre recommandation à la page 7. Vous y dites en effet que le Conseil des ressources humaines du secteur culturel:

À mon avis, l'essentiel, c'est:

Je tiens à savoir tout d'abord quelles sont vos préoccupations en ce qui concerne la remise de la formation aux provinces, dans le secteur culturel, et j'aimerais que vous me donniez quelques exemples pratiques précis de vos craintes, sinon aujourd'hui, du moins au cours des semaines à venir.

Je pense que c'est important. Il est facile pour nous, politiciens, de dire: confions cela aux provinces; elles le feront mieux; elles sont plus près de la population. Or, vous nous avez fait une recommandation qui, essentiellement, va complètement à l'encontre de cette tendance des politiciens provinciaux et de quelques-uns de leurs amis.

Pourriez-vous, en tant que conseil, me donner quelques exemples précis qui expliquent cette crainte et me dire si, par une coordination plus efficace, le gouvernement fédéral et les provinces pourraient vous rassurer?

M. Weinrich: Je pense qu'en partie cette crainte découle d'une longue expérience. Si vous posez la question aux gens du milieu des arts et de la culture, c'est une question fondamentale. En fait, tout le monde les appuie. On accepte les chiffres que nous vous avons cités aujourd'hui, mais d'une certaine façon on ne les croit pas tout à fait. On accepte mal que les gens de ce milieu soient si nombreux et qu'ils produisent ce genre de richesse. On continue à considérer qu'il s'agit d'une activité marginale, dans les écoles, etc.

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D'après nos contacts avec les bureaux de DRHC ou les bureaux provinciaux, dans de nombreux cas les employés qui y travaillent ne comprennent pas bien le secteur ni les possibilités d'emploi qui s'y trouvent. Nous considérons par ailleurs que les conseils sectoriels ont une bien meilleure compréhension des besoins de nos secteurs et sous-secteurs - présentons la chose ainsi - et justement nous avons des conseils de sous-secteurs. Nous avons en fait un conseil pour les travailleurs indépendants, qui, en passant, est présidé par Michel Laurence, de l'Union des artistes.

Nous avons donc un problème généralisé. Toutefois, notre crainte est celle que j'ai exprimée précédemment. Nous craignons que les provinces ne créent tout simplement des bureaux généraux qui devront traiter toutes sortes de demandes de formation pour lesquelles ils ne sont pas compétents vraiment. Ils ne sauront pas y faire face. On se contente simplement de transférer la responsabilité du gouvernement fédéral, dont il ne s'est pas acquitté avec beaucoup de succès, pour en faire une responsabilité provinciale, ce qui ne réussira pas beaucoup mieux. Ce sont les secteurs qui comprennent vraiment ce qui se passe et où sont les besoins.

M. Nault: Puis-je donc en conclure - et je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit - que le problème, si la responsabilité est confiée aux provinces, c'est que dans certains cas le milieu est si petit qu'en fait il est presque impossible de créer un programme de formation qui soit très sensible à l'aspect culturel et dont les normes soient élevées? À cause de la taille du Canada, il faut un programme et des normes de type national.

J'essaie de comprendre la différence qui existe entre par exemple, le gouvernement du Québec qui dit: voici un programme de formation pour un secteur particulier du milieu culturel, et le gouvernement fédéral qui fait la même chose. J'essaie de comprendre pourquoi cela vous préoccupe autant.

Mme Palmer: Peut-être faudrait-il mentionner aussi que si nous souhaitons un programme coordonné à l'échelle nationale, c'est que nous voulons un programme de formation qui puisse être reconnu dans tout le Canada, de sorte que les programmes élaborés dans une province ou une région du pays puissent s'insérer dans un cadre national plus vaste afin de répondre aux besoins du secteur culturel de tout le pays.

Il ne faut pas oublier que l'une des caractéristiques du secteur culturel, c'est qu'il est très mobile et que dans de nombreux sous-secteurs il faut que l'on soit prêt à travailler et à chercher du travail d'un bout à l'autre du pays, d'un contrat à l'autre. Ainsi, il est très clair qu'il faut des programmes de formation et une stratégie des ressources humaines qui tiennent compte de toutes les différentes composantes provinciales afin de les insérer dans un tout national.

Si nous craignons que les provinces ne puissent élaborer quelque chose qui réponde aux besoins du milieu, cela n'a rien à voir avec la taille du secteur culturel dans les provinces. En fait, le problème réel pour nous consiste à continuer à faire reconnaître l'importance de la taille du secteur. Jusqu'à présent, les Centres d'emploi du Canada n'ont pas reconnu cette importance en voulant répondre aux besoins du secteur culturel. Je pense que par l'entremise du conseil sectoriel, nous avons réussi de façon marquée à améliorer cette reconnaissance, et nous aimerions continuer à le faire.

M. Nault: Si vous le permettez, j'ai une brève question à poser concernant l'idée selon laquelle les provinces veulent que le gouvernement fédéral leur envoie un chèque en blanc en leur disant: voici votre part du programme de formation dans le domaine de la culture; faites comme bon vous semble.

Compte tenu de votre recommandation, préféreriez-vous que nous négociions avec les provinces pour nous assurer qu'elles continuent d'accorder la priorité au secteur culturel et qu'elles mettent sur pied des programmes de formation efficaces comme nous essayons de le faire à l'échelle nationale?

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M. Weinrich: Ce serait mieux que rien, je suppose. Mais l'un des problèmes réside dans le fait que, par le passé, plusieurs ministres fédéraux ont dit qu'ils réservaient de 40 à 50 millions de dollars pour la formation culturelle dans toutes les régions du pays. En produisant le rapport intitulé L'art n'est jamais un acquis, on a eu la plus grande difficulté à déterminer exactement ce qu'il advenait de l'argent une fois qu'il avait changé de main. Je pense que l'on n'a pu en retrouver que 30 p. 100. Il y a eu des histoires assez bizarres concernant la conception que les provinces ont de la culture.

Je suppose donc que ce serait mieux que rien, mais, d'après notre expérience, ce n'est pas un moyen particulièrement efficace. L'argent a tendance à disparaître, et l'on espère qu'il est utilisé à bon escient.

Le président: Merci, monsieur Nault.

Je pense que M. Crête a une question, ce qui n'est pas étonnant.

[Français]

M. Crête: Êtes-vous conscients que pour faire cela, il faudrait un amendement constitutionnel, puisque la responsabilité de la formation de la main-d'oeuvre est une responsabilité provinciale? La Constitution le stipule.

Pour ce qui est de la transférabilité d'une province à l'autre, n'est-il pas préférable de faire cela par l'entremise du conseil des ministres de l'Éducation, par exemple, et de s'entendre sur les choses qui peuvent être reconnues équivalentes d'une province à l'autre? Contrairement à ce que madame dit, selon moi, ce ne sont pas les provinces qui doivent s'imbriquer dans une vision nationale; c'est la vision nationale qui doit refléter ce que les provinces auront décidé entre elles sur la question de la main-d'oeuvre.

[Traduction]

M. Weinrich: Je pense que nous parlons de choses différentes ici. Bien entendu, les provinces sont responsables de l'éducation, de la formation et de la reconnaissance professionnelle - peu importe le terme que vous utilisez - des diplômes etc. Mais nous ne parlons pas vraiment d'un niveau aussi élevé, en ce sens que si une personne est formée au Québec par un artiste et de façon informelle, qu'est-ce que cela signifie si la personne formée déménage en Alberta? À moins que les personnes intéressées ne se connaissent, cela ne signifie vraiment rien.

Nous ne parlerons pas d'un établissement officiel de formation relevant d'un ministère de l'Éducation, etc., mais plutôt d'un type de formation beaucoup plus informelle.

Le fait est que les artistes du Québec ont certainement bénéficié de nos programmes nationaux, et vice versa. Des artistes se sont établis au Québec et en sont partis, et nous les avons formés.

Prenons un exemple simple. Nous avons formé six marionnettistes, je crois, à Halifax; cela ne signifie pas que la Nouvelle-Écosse avait besoin de six marionnettistes, mais c'était le meilleur endroit pour les former. Ces artistes peuvent aller dans toute autre province. Il en est de même du Québec. Mais nous avons besoin de savoir quelle est la demande de marionnettistes à l'échelle nationale pour déterminer si un programme de formation doit être financé.

Le président: Étant donné qu'il n'y a pas d'autres questions, je tiens à vous remercier au nom des membres du comité pour votre témoignage et pour les éclaircissements que vous avez apportés sur certaines questions très intéressantes. En particulier, j'ai noté vos commentaires relatifs au travail indépendant et saisonnier. Évidemment, vous aimez bien l'idée de créer des conseils sectoriels, non seulement dans votre secteur, mais dans tous les autres.

M. Weinrich: Absolument.

Le président: Comme vous le savez, en tant que gouvernement, nous avons défini 33 domaines. Je pense que 19 ont déjà été créés. Il s'agit d'une excellente initiative pour l'édification d'une économie moderne.

Une fois de plus, merci beaucoup d'être venus. Nous avons certainement bénéficié de votre contribution.

Monsieur McClelland.

M. McClelland (Edmonton - Sud-Ouest): Si vous le permettez, je vais demander aux témoins et aux membres du comité d'excuser mon retard. J'en suis désolé.

Le président: Vos excuses sont dûment enregistrées et acceptées.

Nous allons prendre une pause de deux minutes, et au retour nous recevrons les représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

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Le président: Nous reprenons nos travaux.

Comme je l'ai dit avant la pause, nous allons entendre la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, représentée par M. Garth Whyte, directeur administratif, Affaires nationales, et par M. Brien Gray, vice-président principal, Politique et recherche.

Je suis sûr que les procédures du comité ne vous sont pas étrangères, mais je vous dirai que nous aimerions vraiment engager un débat avec vous. Vous avez de 10 à 20 minutes pour votre exposé.

Bienvenue. Nous attendons votre témoignage. Le comité veut surtout entendre vos propositions afin d'améliorer le projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada. Tel est notre mandat. Merci.

M. Garth Whyte (directeur administratif, Affaires nationales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Merci beaucoup, monsieur le président.

Brien Gray et moi-même sommes ravis d'être ici devant le comité. Nous tenons à remercier officiellement Luc Fortin et Lise Tierney pour l'aide qu'ils nous ont accordée. Cela a été très utile. Nous remercions aussi le comité de nous avoir donné l'occasion de comparaître.

Vous avez notre mémoire devant vous. Nous allons nous référer à d'autres documents.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ou FCEI, qui représente 87 000 petites et moyennes entreprises, est heureuse d'avoir l'occasion de présenter la position de ses membres en ce qui concerne le projet de loi sur l'assurance-emploi.

La FCEI appuie bon nombre de propositions visant à réformer le régime actuel de l'assurance-chômage. Cependant, si l'on ne modifie pas la proposition actuelle selon laquelle on adopterait un système reposant sur le calcul des heures ou, comme certains l'appellent, un système de «couverture au premier dollar», pour empêcher que les coûts de l'assurance-chômage n'augmentent pour les petites entreprises, la FCEI va s'opposer à ce projet de loi. Nous préférons travailler avec le gouvernement pour réformer le régime de l'assurance-chômage afin qu'il aide les nécessiteux, encourage la création d'emplois et réduise les coûts globaux pour les employeurs et les employés.

Dans notre exposé aujourd'hui, nous allons résumer brièvement les principes de la réforme de l'assurance-chômage et indiquer les conditions nécessaires pour créer des emplois, ce que nous avons déjà fait à l'intention de ce comité et du gouvernement à maintes reprises. Nous allons aussi commenter les dispositions positives du projet de loi C-12 et suggérer des moyens de les améliorer.

La FCEI consacrera l'essentiel de son témoignage à la forte opposition des PME à l'idée d'assujettir l'assurance-chômage au nombre d'heures de travail, et au niveau de l'excédent de l'assurance-chômage. La FCEI considère ces mesures comme étant des ponctions fiscales cachées. Enfin, elle énonce quatre mesures pour réduire considérablement les cotisations d'assurance-chômage et pour accroître la création d'emplois.

Premièrement, en ce qui concerne les principes de la réforme de l'assurance-chômage, nous avons distribué aux membres du comité des exemplaires du rapport de la fédération intitulé «La réforme de la sécurité sociale: Remettre le système sur la bonne voie», qui est notre réponse au Livre vert du gouvernement sur la réforme de la sécurité sociale. Il s'agit d'un document complet qui présente la position des PME en ce qui concerne la réforme de l'assurance-chômage. Les principes et les recommandations énoncés dans ce rapport constituent la base de notre témoignage d'aujourd'hui.

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La FCEI était l'un des rares groupes qui ont appuyé publiquement les propositions gouvernementales du Livre vert. Les PME ont toujours affirmé qu'un emploi est le meilleur programme social qui soit. Par conséquent, il n'est pas surprenant que nous ayons fortement appuyé l'affirmation du gouvernement selon laquelle la création d'emplois est au coeur de la réforme de l'assurance-chômage.

La position de la FCEI, c'est qu'il faut réformer en profondeur le régime de l'assurance-chômage pour assurer sa viabilité financière, réduire ses coûts pour les employeurs et les employés et promouvoir le fonctionnement normal du marché du travail.

Dans un rapport de l'OCDE, on affirme que le régime canadien de l'assurance-chômage a un effet contraire:

La réforme de l'assurance-chômage doit avoir pour objectif de mettre en place un système équitable pour les chômeurs qui ont besoin d'aide et financièrement abordable pour les employeurs, les employés et l'ensemble de l'économie.

Du point de vue du créateur d'emplois, la réforme proposée doit entraîner une diminution des coûts de l'assurance-chômage tant pour les employeurs que pour les employés.

La FCEI appuie les principes suivants qui, à notre avis, doivent guider la réforme de l'assurance-chômage. Ces principes ont été désignés par une coalition de tous les principaux groupes d'affaires dans un rapport publié il y a deux ans.

Premièrement, l'intégrité financière et la simplicité des programmes doivent être les principes directeurs du programme d'assurance-chômage au Canada.

Deuxièmement, il faut réduire le coût de l'assurance-chômage pour permettre une diminution accrue des cotisations de l'employeur et de l'employé. La réduction des cotisations doit être un objectif prioritaire.

Troisièmement, les Canadiens ont besoin d'un régime d'assurance-chômage qui soit abordable et qui contribue à améliorer le rendement de la main-d'oeuvre et de l'économie. Le système d'assurance-chômage doit promouvoir la souplesse et la mobilité de la main-d'oeuvre au lieu de susciter ou de renforcer sa rigidité.

Enfin, il faut offrir des incitatifs aux chômeurs en les encourageant notamment à participer à des programmes de formation et à acquérir de nouvelles qualifications ou à améliorer les qualifications existantes.

Nous croyons que ces principes de la réforme de l'assurance-chômage constituent des lignes directrices dont le comité peut se servir pour évaluer les propositions relatives à l'assurance-emploi.

Je passe la parole à Brien, qui va parler des conditions nécessaires à la création d'emplois.

M. Brien Gray (vice-président principal, Politique et recherche, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Bonjour.

En ce qui concerne la perspective des PME, je pense qu'il est vraiment important de parler un peu des conditions nécessaires pour promouvoir la création d'emplois au sein des petites entreprises.

De nos jours, les décideurs du secteur public savent très bien que les petites et moyennes entreprises ont joué un rôle de premier plan dans la création d'emplois et la croissance économique. En fait, le premier ministre, le ministre des Finances et bon nombre de responsables fédéraux et provinciaux ont déclaré que les emplois dont nous avons si désespérément besoin seront créés non pas par les gouvernements ni par les grandes sociétés, mais par les PME.

En effet, la semaine dernière encore, le premier ministre invitait le secteur privé à créer plus d'emplois dans l'économie. Nous croyons que ces propos s'adressaient essentiellement aux grandes sociétés, car jusqu'ici les PME ont fait un assez bon travail. D'ailleurs, le ministre des Finances a affirmé que les PME ont suscité une croissance assez phénoménale.

Dans notre secteur, le nombre d'emplois augmente constamment. D'aucuns ont affirmé que nous assistons à une «reprise sans création d'emplois». Nous croyons que c'est faux. En fait, le nombre d'emplois créés par les travailleurs indépendants et les petites entreprises est beaucoup plus élevé que les mises à pied dans la fonction publique et les grandes sociétés.

Nous avons relevé le défi lancé par le premier ministre. Récemment, nous avons envoyé un sondage à nos membres. Je crois que vous l'avez dans votre trousse d'information. Il s'agit de demander aux créateurs d'emplois quelles sont les mesures précises qui contribuent ou non à créer des emplois dans l'économie, étant donné que la conjoncture est encore assez difficile. Que faut-il faire? Comment pouvons-nous créer d'autres emplois?

Nous croyons que ce sera l'étude la plus complète jamais réalisée uniquement auprès des créateurs d'emplois. Nous obtiendrons des informations sur les pratiques d'embauche, les répercussions des modifications apportées à l'assurance-chômage, ainsi que la position des propriétaires d'entreprises sur la création d'emplois.

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M. Allmand: Quelqu'un peut-il aller voir ce qui se passe là dehors? Nous n'entendons pas les témoins, malgré l'amplification du son.

Le président: Cela fait partie de la création d'emplois pour les Canadiens.

Monsieur Gray, veuillez nous excuser. C'est qu'on est en train de rénover les édifices du Parlement en ce moment.

M. Gray: Je comprends.

En ce qui concerne le sondage sur l'emploi, je m'excuse vraiment. Malheureusement, il n'est pas encore terminé. Nous avons des résultats préliminaires qui auront, à notre avis, une certaine incidence sur le projet de loi concernant l'assurance-emploi, mais le résultat final ne sortira que dans un proche avenir.

Toutefois, en ce qui concerne les enquêtes antérieures, je dois dire que nous avons constaté... À l'automne 1995, nous avons fait une étude baptisée «enquête sur des faits incontestables», qui est en fait un rapport sur les indicateurs économiques. Nous en parlons à la page 5, graphique 1 de notre mémoire.

Nous y présentons les conditions primordiales pour embaucher d'autres employés... et ce n'est un secret pour personne; 82 p. 100 des répondants ont dit qu'ils avaient besoin d'une augmentation des commandes ou d'une croissance de la demande. Ensuite, il y a trois facteurs qui dépendent entièrement du gouvernement: la diminution des charges sociales, la stabilité des politiques gouvernementales et l'élimination du déficit.

Les données préliminaires de notre enquête sur l'emploi confirment les résultats obtenus l'automne dernier. Elles nous apprennent que la réduction des charges sociales, la réduction des taxes imposées aux consommateurs et la réduction des formalités administratives sont les trois choses les plus importantes qu'il faut réaliser.

Comme je l'ai dit, les études effectuées ici au Canada montrent constamment que la lourdeur des charges sociales, le coût de l'administration et la rigidité des politiques du travail sont préjudiciables à la création d'emplois. Cela confirme les résultats de l'étude de l'OCDE sur l'emploi, comme Garth l'a mentionné tout à l'heure; je pense donc que c'est très important quand nous parlons de création d'emplois. N'oubliez pas que la plupart des emplois sont créés dans les entreprises ayant de un à cinq employés et de cinq à dix employés.

Si vous étudiez ces domaines et si vous voulez encourager la croissance de l'emploi, vous devez examiner très sérieusement les conséquences de l'augmentation constante des charges sociales dans le secteur privé. Nous sommes ici pour aider. Nous sommes ici pour contribuer au débat. Mais nous voulons vraiment que vous gardiez ces choses-là à l'esprit.

M. Whyte: Maintenant, je vais parler rapidement du projet de loi C-12, qui a 140 pages. Nous n'allons pas le parcourir article par article, mais nous voulons en aborder certains aspects.

Premièrement, parlons des aspects positifs du projet de loi C-12.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, la FCEI appuie fortement l'affirmation du gouvernement selon laquelle le système actuel de l'assurance-chômage a besoin d'une réforme en profondeur. Au fil des ans, nos membres en sont de plus en plus préoccupés, et comme vous pouvez le voir au graphique 2, c'est maintenant notre quatrième préoccupation après la réduction du déficit, le fardeau fiscal, la réglementation et les formalités administratives.

Comme par hasard, ou ce n'est peut-être pas un hasard, dans les régions où le taux de chômage est plus élevé, cette nécessité est encore plus impérieuse. Par exemple, dans les provinces de l'Atlantique, 60 p. 100 de nos membres considèrent l'assurance-chômage comme une grande priorité.

Les employeurs appuient l'objectif primordial du projet de loi: encourager les chômeurs canadiens à trouver un emploi digne de ce nom. Le système actuel de l'assurance-chômage n'encourage pas les gens à retourner au travail.

D'après les résultats préliminaires de notre enquête sur l'emploi, 44 p. 100 des 9 000 répondants disent qu'ils ont du mal à trouver dans leur collectivité des gens ayant les qualifications dont leurs entreprises ont besoin. Quand on leur demande pourquoi ils ont du mal à trouver des employés qualifiés, plus d'un tiers d'entre eux pointent du doigt l'extrême générosité du régime d'assurance-chômage et des autres programmes sociaux. Tel est le message des créateurs d'emplois.

On peut affirmer que les changements proposés dans le projet de loi C-12 représentent le strict minimum nécessaire et que d'autres modifications seront préjudiciables aux modestes effets positifs. Cependant, la FCEI appuie plusieurs propositions qui contribuent de façon importante aux changements structurels qui doivent être apportés au régime de l'assurance-chômage.

En ce qui concerne les prestations d'assurance, la FCEI appuie les dispositions du projet de loi exigeant l'augmentation du nombre d'heures pour être admissible. Nous sommes d'accord avec le nouveau régime qui réduit la période au cours de laquelle on peut toucher le maximum des prestations. Nous appuyons l'introduction d'une nouvelle règle de l'intensité qui réduit graduellement les prestations de ceux qui reçoivent l'assurance-chômage année après année.

Nous appuyons aussi l'augmentation du recouvrement chez les personnes à revenu élevé. Nous appuyons fortement la disposition du projet de loi offrant un supplément du revenu familial aux familles qui ont vraiment besoin de prestations accrues, et nous appuyons l'idée de permettre aux prestataires de travailler pour compléter leurs prestations.

Dans un autre domaine, la FCEI recommande depuis plusieurs années que le gouvernement plafonne le maximum de la rémunération assurable, car chaque année son augmentation dépasse largement l'augmentation du salaire moyen. L'écart est devenu tel que la décision du gouvernement de geler le MRA jusqu'en l'an 2000 est tout à fait justifiée.

.1025

Au niveau des prestations d'emploi, la FCEI et le patronat sont tout à fait favorables à la nouvelle orientation de l'assurance-emploi qui donnera la priorité aux services actifs pour le marché du travail par rapport aux services de simple soutien du revenu. Ce changement, qui incite les intéressés à se prendre en charge et à assumer s'efforcer de trouver des emplois durables, est préconisé depuis longtemps par le monde des affaires. Il est encourageant que le gouvernement fédéral ait annoncé son intention de trouver avec les provinces et les communautés locales le moyen d'éliminer les chevauchements et d'accroître l'efficacité de ces services.

Nous trouvons également très positif, même si l'attente a été longue, que le gouvernement regroupe la myriade de différents programmes d'emploi en cinq mesures qui seront sous haute surveillance pour s'assurer de la matérialisation des résultats. Les employeurs se plaignent de l'inefficacité de nombre des programmes actuels de formation. Il est essentiel qu'on évalue les nouveaux programmes en permanence pour mesurer leur efficacité, leur capacité de faciliter l'atteinte du but ultime, qui est d'aider les chômeurs à trouver un véritable emploi.

C'est pour la raison susmentionnée que l'élargissement du programme d'aide aux travailleurs indépendants nous laisse sceptiques. Il y a deux ans, quand les employeurs ont demandé combien d'emplois durables étaient véritablement créés par ce programme, le gouvernement n'avait pas pu leur répondre. Le gouvernement dit que ce programme d'aide au travail indépendant a rapporté à l'économie en 1993-1994 188 millions de dollars nets. Cependant, plusieurs questions importantes restent toujours sans réponse. Combien d'emplois ont été créés? Combien d'emplois ce programme a fait disparaître?

De nombreux employeurs estiment verser des cotisations d'assurance-chômage qui servent à financer un programme qui subventionne et forme de futurs concurrents. D'autres croient que les programmes d'assurance-chômage de ce genre aident à subventionner l'économie souterraine. Autrefois, les employeurs devaient faire face à une économie souterraine non qualifiée. Aujourd'hui ils sont concurrencés par une économie souterraine hautement qualifiée. Le gouvernement devrait suivre de très près les résultats positifs et négatifs du programme d'aide au travail indépendant.

La FCEI craint également que le programme de subventions salariales ne se transforme en subventions aux entreprises. Il faut que le gouvernement suive ce programme de très près pour s'assurer qu'il n'y a pas d'abus. La majorité de nos membres ne sont pas favorables à des subventions ou à des crédits d'impôt à la formation devant subventionner le coût de la formation des travailleurs.

Enfin, le nouveau Service national de placement laisse la FCEI sceptique. Nous ne disons pas que ce n'est pas une bonne idée, mais nous doutons de l'efficacité de ce nouveau service d'information sur l'emploi, qui coûtera fort cher.

Encore une fois, nous avons apporté certains des résultats préliminaires du questionnaire envoyé à nos membres. Nous leur avons demandé, entre autres, quels étaient les moyens les plus efficaces pour trouver de nouveaux employés, et si vous regardez le graphique numéro 3 vous constaterez que seulement 14 p. 100 d'entre eux s'adressent au Centre d'emploi du Canada et 0,5 p. 100 au service de placement informatisé du gouvernement fédéral. Nous savons que ce programme vient tout juste de démarrer, mais il est crucial de nous assurer également que son efficacité est mesurée pour déterminer s'il aide véritablement les chômeurs à trouver du travail et ne se contente pas simplement de relayer des renseignements.

Nous passons maintenant à un des sujets qui nous tiennent le plus à coeur, car nous y sommes vivement opposés sous sa forme actuelle, à savoir un système reposant sur le calcul des heures. Nous nous opposons à la proposition actuelle de la Loi sur l'assurance-emploi qui vise à étendre la couverture à la première heure travaillée, car cela entraînera une augmentation des coûts d'assurance-chômage pour de nombreux chefs de petites entreprises. Le graphique numéro 4 montre que 83 p. 100 des chefs d'entreprises sont hostiles à un élargissement du champ d'application de l'assurance-chômage pour couvrir un plus grand nombre de travailleurs à temps partiel.

Le Guide de la Loi sur l'assurance-emploi du gouvernement énumère les avantages de ce nouveau système reposant sur le calcul des heures avec couverture de la première heure travaillée. Cependant, il n'énumère pas les nombreux inconvénients qui, à moins d'être supprimés, gêneront sérieusement la création d'emplois dans les petites entreprises. Aujourd'hui la concurrence est très forte.

Nous appuyons nombre des changements structurels proposés dans le projet de loi. Nous estimons qu'un certain nombre de modifications nous permettraient d'être plus favorables à ce projet de loi, mais en attendant permettez-nous d'énumérer certaines des conséquences nuisibles de ce passage à un système reposant sur le calcul des heures.

Pour commencer, ce n'est pas bon pour les petites entreprises. Selon l'analyse du ministère du Développement des ressources humaines concernant le passage du système actuel à un système reposant sur le calcul des heures, plus de 235 000 entreprises, dont plus de 90 p. 100 sont de petites entreprises, c'est-à-dire les créatrices d'emplois, paieront plus. Plus de 400 000 entreprises paieront la même chose, et seulement 65 000 paieront un taux inférieur aux 2,95$ actuels. Autrement dit, un nombre important de petites entreprises verra une augmentation de leur coût d'assurance-chômage et très peu d'entreprises verront ce coût diminuer. C'est la propre analyse du gouvernement.

.1030

Le gouvernement l'a reconnu, puisqu'il a proposé aux petites entreprises un remboursement de cotisations. Cependant, c'est une mesure temporaire qui ne durera que pendant deux ans. Au-delà, ces entreprises devront absorber l'augmentation des cotisations. Signalons également que ce seuil de 500$ n'est pas extraordinairement généreux.

Deuxièmement, cette initiative ne sera pas bonne pour la création d'emplois. Comme Brien l'a dit tout à l'heure, il est évident que ce sont des petites entreprises qui sont créatrices de la majorité des nouveaux emplois. Ce sont les petites entreprises qui seront le plus durement touchées par ce système reposant sur le calcul des heures. Comme nous le montrons dans l'enquête sur l'emploi, réduire et geler les cotisations sont de loin les mesures les plus efficaces pour encourager les employeurs à embaucher.

Troisièmement, nous pensons avoir découvert que ce ne sera pas bon non plus pour les travailleurs à temps partiel. Ce sont les jeunes, surtout les étudiants, qui en souffriront le plus. Souvent, quand une entreprise embauche un nouvel employé, elle l'embauche à temps partiel. Elle lui donne plus d'heures de travail quand les circonstances le requièrent et si l'employé répond à ses attentes. Des chefs d'entreprises nous ont dit qu'ils n'étaient pas prêts à risquer l'avenir de leurs employés à plein temps, à risquer leur entreprise ou leur maison - qui sert de nantissement - pour embaucher un autre employé à plein temps avant d'avoir suffisamment de travail pour le justifier.

Le gouvernement étudie cette question depuis trois ans. L'objectif principal est de rendre le système plus juste envers les travailleurs à temps partiel et d'alléger le fardeau administratif de la gestion des ressources humaines. Cependant, nous n'avons pas vu d'étude sur la nature du travail à temps partiel qui permet d'en comprendre toutes les conséquences.

Nous vous donnons notre rapport, «Le travail à temps partiel et les avantages sociaux dans les entreprises indépendantes au Canada». Nous vous assommons à coups de documents, mais nous pensons que la question est importante. Ce rapport se fonde sur les réponses envoyées par plus de 10 000 chefs de petites et moyennes entreprises indépendantes. Près de 70 p. 100 d'entre eux nous ont répondu avoir compté au moins un temps partiel dans leurs effectifs pendant les 12 mois précédents. Parmi ceux qui embauchaient des temps partiels, les deux tiers nous ont dit embaucher au moins un temps partiel pour moins de 14 heures de travail par semaine. Le graphique numéro 5 donne cependant des chiffres plus optimistes.

Le graphique numéro 5, page 13, donne les raisons invoquées par une entreprise pour engager du personnel à temps partiel. Environ 28 p. 100 nous ont dit que pour eux c'était le moyen de réduire leurs charges sociales, ce qui corrobore l'idée selon laquelle ces prélèvements ne sont pas bons pour la création d'emplois. Cependant, la raison principale, c'était d'avoir la souplesse nécessaire pour pouvoir faire face aux périodes de pointe de la demande de leur clientèle, citée par 58 p. 100 d'entre eux. La raison suivante, à 38 p. 100, c'était que l'entreprise était incapable de garantir des emplois à temps plein durables, étant donné les incertitudes financières. Un sur quatre nous a répondu que ses employés étaient seulement disponibles à temps partiel. Enfin, plus d'un sur cinq nous a répondu que c'était à la demande de ses employés. Il est apparent que la situation sur le marché du travail n'est pas dictée par une volonté d'exploitation d'employeurs cupides; il s'agit d'une harmonisation des besoins des employeurs et des employés, et pour les temps partiels ce type de travail est souvent aménagé pour correspondre à leur style de vie individuel.

Enfin, nous n'avons pas entendu beaucoup de discussions à son sujet, mais c'est une de nos principales critiques de ce passage à un système de calcul reposant sur les heures qu'on veut faire sans y apporter un certain nombre de modifications importantes. Sous sa forme actuellement proposée, c'est une ponction fiscale injuste. Sous sa forme actuelle, cette mesure est injuste pour les petites entreprises, car elle les frappera directement à la caisse. De nombreux employés bénéficieront d'un remboursement de cotisations s'ils gagnent au maximum 2 000$ par année, mais les employeurs ne bénéficieront pas d'un remboursement, et de nombreux employés, surtout des étudiants, ne voudront pas attendre un an pour recevoir leur remboursement; ils voudront leur argent immédiatement.

Qui plus est, cette mesure, selon nous, est une bombe à retardement aux proportions semblables à celle de la TPS - et nous savons à quoi nous en tenir à ce sujet - un fait dont il était très peu question jusqu'à présent. Les employés seront scandalisés lorsqu'ils recevront leur premier chèque de paye de 1997. Imaginez-vous leur réaction lorsqu'ils apprendront que non seulement leurs cotisations au Régime de pensions du Canada ont été augmentées, mais encore que leurs cotisations au régime d'assurance-chômage ont été échelonnées sur les premiers versements, comme pour le Régime de pensionS du Canada. Imaginez combien d'employés seront indignés de s'apercevoir, après avoir obtenu une augmentation de salaire modeste en décembre, que leur chèque de janvier a diminué. Les cotisations des employeurs seront également échelonnées sur les premiers versements, ce qui entraînera des problèmes de liquidités. Ils seront eux aussi hors d'eux-mêmes.

.1035

Le dernier point a trait à l'excédent de la caisse d'assurance-chômage. D'ici à la fin de 1996, la caisse d'assurance-chômage aura accumulé un excédent de plus de 5 milliards de dollars. C'est une marge plus que suffisante pour éviter que les cotisations n'augmentent en période de récession. Si le gouvernement ajoute à l'excédent des cotisations d'assurance-chômage en 1997, il se trouvera à imposer une augmentation de taxe cachée.

Il est essentiel que l'excédent ou le fonds de réserve ne soit pas utilisé comme caisse occulte en vue d'augmenter les dépenses des programmes.

Le gouvernement doit donc adopter une loi garantissant que ce fonds sera utilisé seulement pour que les cotisations restent stables ou seulement pour réduire le déficit de la caisse d'assurance-chômage, et non pas pour augmenter les dépenses des programmes ou pour créer de nouveaux programmes.

Il convient également de corriger l'impression erronée et courante à l'intérieur comme à l'extérieur du gouvernement selon laquelle le déficit de la caisse d'assurance-chômage a un impact négatif sur le budget fédéral.

Certains ont proposé que le ministère des Finances utilise l'excédent de la caisse d'assurance-chômage pour réduire le déficit plutôt que pour diminuer les cotisations. C'est une option illusoire, à court terme, qui n'aurait pas d'impact sur le déficit fédéral à moyen terme.

Le programme d'assurance-chômage est financé à 100 p. 100 par les cotisations des employeurs et des employés. Si la caisse accuse un manque à gagner ou se trouve en déficit, ce déficit est remboursé au Trésor fédéral, avec les intérêts.

Il est temps que le gouvernement cesse de parler du déficit de la caisse d'assurance-chômage - ou de l'excédent actuellement - comme d'un facteur important dans le débat sur la réduction du déficit. C'est plutôt un facteur important dans le cadre du programme de création d'emplois, et la priorité absolue devrait consister à réduire les cotisations d'assurance-chômage pour stimuler l'emploi.

Pour répondre aux préoccupations des employeurs concernant la couverture au premier dollar, l'excédent de la caisse d'assurance-chômage et les coûts élevés de l'assurance-chômage, la FCEI recommande des mesures en vue de réduire de façon importante les cotisations d'assurance-chômage et d'accroître la création d'emplois. Nous en avons quatre.

Nous recommandons d'abord une exemption des cotisations pour les employés qui les demandent et les étudiants. Beaucoup d'employés à temps partiel ne veulent pas être admissibles à l'assurance-chômage ou verser des cotisations d'assurance-chômage; le comité devrait donc recommander un amendement au projet de loi C-12 qui permette à ces employés d'être exemptés des cotisations, mais seulement lorsqu'ils déclarent qu'ils ne veulent pas être admissibles et qu'ils s'attendent à travailler moins de 14 heures par semaine. Cette mesure permettrait de réduire les coûts de façon importante tout en étant juste pour les employés à temps partiel.

Deuxièmement, nous recommandons une exonération temporaire des cotisations d'assurance-chômage pour les employeurs qui augmentent leurs effectifs ou qui embauchent de nouveaux employés. Cette mesure, qui élimine les cotisations d'assurance-chômage pour les employeurs qui augmentent leurs effectifs, a reçu un accueil enthousiaste des entreprises lorsque le gouvernement l'a introduite en 1993. Plus de 18 000 propriétaires d'entreprises ont été interrogés au sujet de l'impact de cette mesure sur leur activité, et 80 p. 100 ont répondu que l'impact avait été positif. Les résultats ont été encore meilleurs dans la région atlantique.

En offrant le remboursement de cotisations aux petites entreprises, le projet de la loi sur l'assurance-emploi confirme qu'il s'agit d'une mesure positive. La proposition ne va pas cependant assez loin, puisqu'elle s'applique seulement après une augmentation des cotisations de 500$ et qu'elle vaut seulement pour deux ans.

Notre troisième proposition est une réduction importante des cotisations d'assurance-chômage. Elles devraient diminuer de beaucoup en 1997, et ce, pour plusieurs raisons. Cette mesure contribuerait d'abord à réduire le fardeau fiscal de façon générale, ce qui stimulerait l'emploi et les dépenses des consommateurs. Deuxièmement, elle compenserait l'augmentation prévue des cotisations au Régime de pensions du Canada. Troisièmement, elle ferait en sorte que le projet de loi sur l'assurance-emploi n'augmente pas les coûts d'assurance-chômage.

Nos discussions avec la Commission de l'assurance-chômage et le ministère du Développement des ressources humaines nous montrent qu'il est possible de réduire les cotisations d'assurance-chômage de 60c. à 70c. en 1997, ce qui n'est pas négligeable. Une réduction de 10 p. 100 des cotisations équivaut à environ 700 millions de dollars. Puisque le gouvernement s'attend à un autre excédent de 4,5 à 5 milliards de dollars, une telle réduction est possible sans que soit perdu l'excédent de 5 milliards de dollars accumulé en 1996.

Enfin, la FCEI croit que le projet de loi devrait amorcer le processus en vue d'en arriver à une répartition 50-50 entre les employeurs et les employés. Se rapprocher d'une répartition 50-50 pour les cotisations d'assurance-chômage serait une autre façon de soulager le fardeau fiscal des créateurs d'emplois. La structure actuelle des cotisations, qui fixe la cotisation des employeurs à 1,4 fois celle des employés, n'est pas équitable, d'autant plus que le projet de loi accordera environ 4 milliards de dollars exclusivement aux employés pour des programmes de formation et autres. En outre, les employés qui font moins de 2 000$ verront leurs cotisations d'assurance-chômage remboursées, mais ce ne sera pas le cas pour les employeurs.

La grande majorité de nos membres, soit 87 p. 100 d'entre eux, estiment que les cotisations devraient être établies de façon égale.

Nous ne disons pas au gouvernement de faire payer les employés. Nous proposons seulement un processus graduel en vue d'en arriver à une répartition 50-50; en vue de cet objectif, les cotisations des uns pourraient être réduites plus lentement que celles des autres. Le régime n'en serait que plus juste, et les employés auraient quand même droit à une diminution modeste de leurs cotisations.

.1040

En conclusion, monsieur le président, le défi, en ce qui concerne la réforme de l'assurance-chômage, consiste à en arriver à un régime financièrement stable, durable, qui aide les gens dans le besoin sans nuire à la création d'emplois. Un secteur de la petite entreprise en bonne santé, favorable à la création et à l'expansion d'entreprises, non seulement contribuera à la création d'emplois et à la croissance économique, mais soulagera également le régime d'assurance-chômage et le filet de sécurité sociale.

La FCEI fait des suggestions constructives en vue d'améliorer le projet de loi. Elle présente également quatre recommandations en vue de réduire les coûts d'assurance-chômage de façon importante. Ces recommandations peuvent être appliquées sans altérer la réforme fondamentale proposée et peuvent être financées sans réduction importante du régime. Si elles ne sont pas retenues, le projet de loi sur l'assurance-emploi sera perçu comme apte à faire perdre des emplois plutôt qu'à en créer.

Le président: Merci, monsieur Whyte et monsieur Gray. Nous allons maintenant passer aux questions.

Monsieur Crête.

[Français]

M. Crête: La lecture du mémoire, sous certains aspects, nous laisse entendre - et j'aimerais que vous élaboriez là-dessus lorsque j'aurai complété ma présentation - que vous pourriez souhaiter que le programme d'assurance-chômage soit vraiment limité à la question de l'assurance-chômage et que le gouvernement... Par exemple, vous dites, à la page 25, que s'il y a des programmes particuliers à mettre en place pour corriger l'économie des régions, ils devraient l'être à l'extérieur du régime d'assurance-chômage.

Vous dites la même chose par rapport au régime des pêcheurs. Vous dites qu'un tel régime devrait être séparé et administré par un ministère donné, mais pas nécessairement dans le cadre de l'assurance-chômage.

Voulez-vous dire par là que le régime d'assurance-chômage ne devrait être qu'un régime d'assurance-chômage, qu'il ne ferait qu'assurer, comme tout autre régime d'assurance, que les bénéficiaires puissent en retirer des bénéfices et que tous les autres aspects devraient en être retirés?

Si telle est votre orientation, j'aimerais que vous précisiez certaines choses. Pensez-vous qu'on peut faire un changement comme celui-là sans avoir précisé, dans une stratégie globale, l'ensemble des autres éléments qui devront être traités ailleurs et assuré la correspondance dans la mise en place des programmes? Un peu partout, particulièrement dans les provinces maritimes et dans l'est du Québec, le gens veulent travailler, car ils ne sont pas des réitérants volontaires, mais ils ne savent absolument pas quel sera le lendemain de la réforme si on ne modifie pas les effets négatifs qu'elle contient.

Au début de votre présentation, vous avez dit que si le système horaire n'était pas modifié, vous ne pourriez pas appuyer le projet de loi. Vous nous avez parlé un peu plus tard des éléments qu'il serait bon de corriger. Accepteriez-vous la proposition seulement à condition qu'on remplace complètement le système horaire par l'actuel régime des semaines ou par tout autre régime que vous pourriez proposer ou à condition qu'on accepte les autres amendements que vous avez proposés, par exemple en ce qui a trait aux étudiants?

[Traduction]

M. Whyte: Merci beaucoup de vos questions. Elles sont excellentes.

Vous faites allusion au document sur la réforme de la sécurité sociale que nous avons présenté en réponse au Livre vert. Je vais d'abord répondre à votre deuxième question, puis à votre première, puis à votre troisième.

Oui, nous sommes d'accord pour dire que la question doit être envisagée globalement. Nous pensons que l'assurance-chômage n'est qu'un élément de la réforme de la sécurité sociale. Nous ne croyons pas non plus que seul le gouvernement fédéral soit en cause; la question concerne les gouvernements provinciaux et la collectivité de façon générale. Tout le monde doit participer au processus, les employeurs comme les employés.

La question dépasse le seul cadre de l'assurance-chômage. Nos membres nous l'ont clairement fait savoir; ils ont à coeur le bien-être de leurs collectivités. Ils sont près d'elles.

Voilà donc pour ce qui est du premier point.

En ce qui concerne le deuxième, il serait bon idéalement que le régime d'assurance-chômage soit uniquement un régime d'assurance. Nous reconnaissons cependant qu'il y a des mesures auxquelles il serait difficile de mettre fin maintenant, le congé de maternité par exemple. Nous n'avons jamais attaqué le congé de maternité ou réclamé son élimination.

.1045

Nos membres reconnaissent également que si vous réduisez les prestations d'assurance-chômage de façon importante vous devez compenser cette perte par des mesures qui aident les gens à se trouver un emploi raisonnable.

Nos membres sont donc d'accord pour qu'on adopte des mesures de promotion de l'emploi. Mes discussions avec le milieu des affaires et le groupe de liaison avec les entreprises de la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre le confirment. Nous devons cependant tenir compte du fait que jusqu'en 1990 le gouvernement a contribué à la caisse d'assurance-chômage. Il a ensuite mis fin à sa participation. La répartition est devenue, non pas 50-50, mais... 1,4 fois pour les employeurs et 1 pour les employés.

Le gouvernement a donc retiré sa contribution. Mais jusque-là, ils reconnaissaient que l'assurance-chômage était davantage qu'un programme d'assurance et qu'il comportait énormément d'avantages pour la population en général. Ensuite, ils s'en sont retirés. Cependant, ils ont conservé le programme pour les pêcheurs, par exemple. Ils y ont aussi ajouté des choses notamment des initiatives de formation.

Il m'apparaît particulièrement opportun, pour compenser le fait qu'il ne s'agit pas d'un programme d'assurance à strictement parler, d'adopter le partage à parts égales des cotisations. Si l'on ajoute les deux milliards de dollars consacrés aux utilisations productives, si l'on ajoute les 800 millions de dollars pour les programmes de formation, si l'on ajoute les 300 millions de dollars et plus pour les prestations des pêcheurs et si l'on ajoute les prestations de maternité, ainsi que la remise pour les employés qui touchent moins de 2 000$ par an, tout cela représente des avantages considérables, sans compter ceux qu'en tirent les employeurs et qui justifient qu'ils adhèrent à un programme d'assurance. Voilà pourquoi il y a tout lieu d'essayer de formuler, de concert avec le comité et le gouvernement, une stratégie qui se rapprocherait à parts égales d'un partage des primes qui, sans nuire aux particuliers, aiderait les employeurs.

Voilà la réponse à la deuxième question. La troisième question porte sur les heures de travail.

Nous pensons qu'il y a de bonnes raisons d'adopter comme paramètre les heures de travail. C'est une question d'équité. On s'inquiète de personnes qui cumulent trois emplois et qui ne sont pas couvertes par le régime d'assurance-chômage. Il faut leur assurer une protection. Parallèlement, nous ne pensons pas que les gens doivent être pénalisés parce que nous adoptons la couverture à partir du premier dollar. Si l'on considère qui sont les gagnants dans ce projet de loi, ce ne sont pas les créateurs d'emplois ou les petites entreprises. Et c'est bien ce qui nous préoccupe. D'une part, nous parlons de création d'emplois - le titre du projet de loi parle même «d'assurance-emploi» - mais nous estimons que cette initiative nuit à la création d'emplois.

Si l'on pouvait recourir à l'exemption volontaire, il me semble que tout le monde serait gagnant, sauf peut-être le gouvernement. Ce dernier a dit qu'il agissait ainsi pour des raisons de principes. Mais il avoue du même souffle que l'exercice lui permettra une ponction fiscale de 10 milliards de dollars, alors ce n'est plus légitime.

Nous pensons qu'on pourrait modifier certaines choses, dont le critère des heures de travail, pour sauver le projet de loi. Peut-être qu'une exemption pour les étudiants viendrait contrebalancer cela. Mais je peux vous dire une chose. En tant qu'organisation, nous aurons beaucoup de mal à vanter le projet de loi auprès des meneurs de l'opinion dans toutes les collectivités du Canada s'il faut leur faire avaler une augmentation des cotisations.

En outre, si l'excédent prévu de 4,5 à 5 milliards de dollars se concrétise, on pourrait abaisser sensiblement les cotisations en 1997. Cela va au-delà du mandat du projet de loi, mais c'est quand même faisable. À ce moment-là, on pourrait réussir à faire accepter le projet de loi puisque le montant des cotisations baisserait pour tout le monde.

[Français]

M. Crête: J'ai une courte question complémentaire. À partir de quel montant la diminution des primes aurait-elle un effet d'entraînement suffisant pour vraiment créer de l'emploi? On pourrait penser que si on ne les diminue que d'un faible pourcentage, cela n'aura peut-être pas d'effet réel, mais il y aurait peut-être un montant à partir duquel cela deviendrait vraiment significatif.

[Traduction]

M. Whyte: Vous soulevez deux questions. En fait, dans notre enquête sur l'emploi, nous avons demandé à nos membres si une baisse de 75c. se traduirait par une augmentation de la masse salariale ou de l'emploi. Nous nous posons la question. D'après les indications que nous avons eues, c'est une tendance. Nous avons constaté que toute augmentation des charges sociales est préjudiciable à la création d'emplois.

[Français]

M. Gray: J'aimerais simplement ajouter qu'on parle beaucoup de création d'emplois dans l'économie canadienne. Je dirais en anglais: «We want jobs but...». Beaucoup de politiques sont contraires à cet objectif. Tant au fédéral que dans les provinces, on augmente toujours les taxes sur la masse salariale. Récemment, au Québec, on a ajouté une taxe pour la formation.

.1050

Au niveau fédéral, on a subi des augmentations dans le régime des rentes. On peut avoir comme objectif de créer des emplois, mais les politiques gouvernementales sont souvent contraires à cet objectif. C'est pour cette raison qu'on accorde tellement d'importance aux primes d'assurance-chômage, surtout étant donné qu'à partir de 1997, il y aura, tant au Québec qu'au Canada, une augmentation assez importante en ce qui a trait au régime de rentes.

M. Crête: Prenons votre hypothèse. S'il y avait une exclusion volontaire, par exemple pour les gens qui travaillent moins de 14 heures, et que le gouvernement devait trouver - je ne dis pas que je suis d'accord - la même somme de revenus quelque part, trouveriez-vous acceptable que le montant perdu auprès de ceux qui travaillent moins de 14 heures soit récupéré en remontant le plafond de 39 000$ à 41 000$, ou quelque chose du genre, ce qui aurait en même temps pour résultat d'éviter l'effet anti-emploi de la diminution du plafond actuel?

[Traduction]

M. Whyte: Vous posez de très bonnes questions. C'est ce genre de problèmes que nous essayons de régler. Nous essayons de trouver des solutions qui ne feront pas grimper les coûts.

Faisons le calcul. On dit que le projet de loi permettra des économies de deux milliards de dollars. Et pourtant, on n'en dépense que 800 millions de dollars. Où va le 1,2 milliard de dollars qui reste? Et pourquoi ne peut-on pas s'en servir pour compenser? C'est mon premier point.

Deuxième point. Outre ces deux milliards de dollars supplémentaires d'économies, au taux courant des cotisations, si la tendance se poursuit en 1997, on réalisera des économies de 4,5 milliards de dollars à 5 milliards de dollars qui viendront s'ajouter à l'excédent actuel de 5 milliards de dollars. Il y a donc une question que l'on passe sous silence, soit les liquidités cachées liées à la réduction du déficit.

Nous nous en sommes pris au budget proposé par le Parti réformiste, qui voulait n'utiliser que 3 milliards de dollars afin de réduire le déficit. Nous estimons que ce n'est pas crédible. Nous en avons parlé au ministre des Finances. Selon nous, il y a moyen de s'en sortir. Nous sommes en faveur d'un excédent de 5 milliards comme c'est le cas actuellement, mais nous estimons qu'il serait tout simplement déraisonnable d'y ajouter encore 5 milliards de dollars.

Le président: Merci, monsieur Crête.

Nous allons passer à M. McClelland.

M. McClelland: Merci beaucoup.

Je vous remercie pour votre excellent exposé et, comme vous pouvez l'imaginer, j'approuve à peu près tout ce que vous avez dit.

Je voudrais toutefois m'attarder un instant sur la question du travail à temps partiel et sur la prolifération des emplois à temps partiel. Cela pose évidemment la question de la poule et de l'oeuf. Autrement dit, le fait de compter le travail en heures va-t-il encourager ou décourager cette prolifération des emplois à temps partiel?

Il y a bien des gens, dont moi-même, qui estiment que cette prolifération des emplois à temps partiel est tout à fait nuisible pour la collectivité. Le travail à temps partiel a commencé avec les étudiants et d'autres qui voulaient avoir une plus grande souplesse afin d'entrer dans le marché du travail et d'y sortir à volonté. Depuis une dizaine d'années, la situation a évolué, au point que ce sont maintenant essentiellement les grandes entreprises qui s'en servent pour échapper aux charges sociales, pour se dérober à leurs engagements envers leurs employés, pour échapper à l'emprise des syndicats, bref pour échapper à tous les aspects négatifs de l'embauche, et cela a provoqué une énorme distorsion dans la population active, surtout dans le secteur de la petite entreprise.

La plupart des petites entreprises visées sont à mon avis dans le secteur de la vente au détail et des services. Ce sont pour la plupart des entreprises qui offrent des emplois au bas de l'échelle aux nouveaux arrivants sur le marché du travail.

Je crois que c'est néfaste pour l'ensemble de la société que d'avoir remplacé le travail à temps plein par le travail à temps partiel qui est devenu la norme. C'est impossible pour les gens d'élever une famille. C'est impossible d'avoir un sentiment d'appartenance à la collectivité. Comment obtenir un prêt pour acheter une voiture? Comment peut-on obtenir un prêt hypothécaire si on doit occuper trois emplois différents? On n'a pas le moindre sentiment de stabilité ou de permanence.

.1055

L'aspect tout à fait positif des mesures proposées est que cela enlève certains encouragements aux gens qui seraient tenté de compter exclusivement sur le travail à temps partiel.

Le problème, c'est que les charges sociales de plus en plus lourdes, dont nous avons déjà traité, sont un puissant agent de destruction d'emplois.

Je sais par expérience personnelle que quand les affaires stagnent, quand on ne peut pas augmenter les recettes, le seul moyen de ne pas fermer ses portes est de réduire ses coûts. L'une des rares variables, ce sont les gens, alors on les met à la porte. Ainsi, quand les charges sociales augmenteront en janvier 1997, l'emploi va baisser. Il ne peut pas en être autrement.

Est-il possible de trouver la quadrature du cercle? D'une part, compter le travail en heures permettra d'égaliser les chances entre le travail à temps plein et le travail à temps partiel. Par contre, si l'on tient compte de l'ensemble des coûts, ce sera une mesure destructrice d'emplois. Voilà donc le problème. En proposant de réduire les taxes, vous avez touché le noeud du problème.

M. Whyte: Oui.

L'une des raisons pour lesquelles nous vous avons fait parvenir ce rapport, c'était justement pour vous donner des renseignements de base et pour répondre à certaines questions sur le travail à temps partiel.

Premièrement, il faut tenir compte de la gravité du problème dont on parle depuis une dizaine d'années. Comme on le signale dans le document - , et je crois que cette affirmation est validée par beaucoup d'autres recherches - , en 1984, près d'une personne employée sur sept occupait un emploi présentant certains aspects du travail à temps partiel. En 1994, cette proportion était passée à un travailleur sur six. Il faut donc mettre les choses en perspective. À entendre les médias, on pourrait croire que c'est une tendance très forte. Elle s'est effectivement accentuée, mais ce n'est pas aussi important que certains voudraient le faire croire.

La deuxième observation, c'est que nous avons constaté en faisant enquête auprès de nos membres que c'est d'abord et avant tout dans le secteur des services communautaires que l'on embauche des employés à temps partiel. Dans ce secteur, 84 p. 100 ont dit qu'ils avaient embauché au moins un employé à temps partiel. La vente au détail vient ensuite, avec 79 p. 100. Ensuite l'agriculture, à 78 p. 100, suivie par l'hôtellerie et la restauration. Les services dans le secteur des affaires viennent au sixième ou septième rang.

Il faut le dire. J'ai vécu dans les prairies et c'est au temps des récoltes qu'on embauche. On fait les foins quand il fait soleil. C'est à ce moment-là qu'on embauche des surnuméraires.

C'est pourquoi il est difficile d'appliquer un seul genre de solution au phénomène du temps partiel.

C'est vrai si on compare le petit et le gros employeur. Le petit n'a pas de syndicat. Il les évite. Souvent c'est à la demande des employés qui en sont à leur premier emploi.

C'est dans ce cas-là qu'il y a lieu d'étudier le travail à temps partiel. Cela fera disparaître les sanctions qui frappent le travail à temps partiel mais il faudra demander à nos membres quel effet ça aura dans l'ensemble. Ce n'est pas une raison pour supprimer la création d'emplois.

Deuxièmement, c'est cyclique. On ne commence pas par embaucher quelqu'un à temps plein pour le mettre ensuite au travail à temps partiel. On embauche d'abord quelqu'un à temps partiel pour répondre aux périodes de pointe et à l'augmentation de la charge de travail. Plus on a de travail, plus on fera travailler des gens à temps plein.

M. Gray: Je voudrais dire quelque chose qui n'est pas directement lié au travail à temps partiel. Il y a environ deux semaines, nous avons publié au Québec un travail de recherche. Nous l'avons fait au Québec parce qu'on a étudié là, comme le comité l'a déjà fait, l'idée de réduire le nombre d'heures de travail par semaine ou celui des heures supplémentaires. Ce qui ressort d'intéressant de cette étude, selon les données de Statistique Canada, c'est que s'il y a de la croissance dans l'économie, il y a plus d'emplois.

Souvent, l'augmentation des heures supplémentaires laisse présager un redressement de l'économie. C'est un peu comme Garth vient de le dire. Que l'on parle d'heures supplémentaires ou de temps partiel, c'est un signe avant coureur d'une augmentation des commandes, d'un regain de confiance et d'un plus grand nombre d'emplois à temps plein.

Au fait, il n'y a aucune corrélation entre le taux de chômage et le recours aux heures supplémentaires ou au travail à temps partiel. Il n'y a pas de lien de cause à effet. Mais il ne faut surtout pas que vous y voyiez-là des solutions de plein emploi.

Du côté fiscal, j'ai parlé tout à l'heure en français du fait que vous voulez des emplois mais que nous allons passer à un régime d'assurance sans franchise. C'est une taxe qui vise les véritables créateurs d'emplois dans l'économie, ceux qui ont de un à 10 employés. Vous voulez des emplois, mais ajouter des coûts aux entreprises soit sous forme d'une diminution des heures de travail ou de taxe à la formation fait retomber le problème sur le dos des provinces et des municipalités. Ça se répercute sur les taxes foncières et sur les résultats de l'entreprise.

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Il y a des entreprises à court de liquidités qui s'agrippent encore. La structure fiscale a changé et l'accent est mis davantage sur les taxes qui n'ont pas d'effet sur les bénéfices que sur celles qui en ont. Ces entreprises ne peuvent donc pas se tirer du bourbier. Elles ne peuvent pas se servir de fonds d'origine interne pour rééquilibrer leur bilan financier et calmer leur banquier.

Les entreprises à court de liquidités qui se voient infliger ces nouveaux coûts ne seront pas portées à embaucher. C'est plutôt une façon de les inciter à licencier du personnel. Cela va dégager des fonds et augmenter les liquidités.

Regardez-y donc de près.

Le président: Monsieur Allmand.

M. Allmand: Je dois dire qu'il y a beaucoup de propositions dans le mémoire dont le sens m'échappe. On y dit que la fédération est opposée aux passages du projet de loi qui incluraient un plus grand nombre de travailleurs à temps partiel. Pourtant, ce sont les entreprises qui poussent de plus en plus les travailleurs à temps plein à travailler à temps partiel et à accepter d'autres formes de travail atypique, comme le travail temporaire. De fait, j'ai vu récemment des chiffres qui montrent que le travail à temps partiel et le travail atypique représentent près de deux fois ce qu'ils étaient il y a quelques années.

Vous repoussez de plus en plus d'emplois dans le secteur du travail à temps partiel et vous dites que ces gens ne devraient pas bénéficier de l'assurance-chômage. Comment ces travailleurs vont-ils survivre lorsqu'ils perdront leur emploi, qu'ils seront congédiés et qu'il n'y aura pas de travail pour eux? Recommandez-vous de créer d'autres soupes populaires? Dites-vous qu'il faut augmenter l'assistance sociale provinciale? Vous les reléguez de plus en plus dans des emplois à temps partiel ou atypiques, mais vous ne voulez pas qu'ils soient assurés.

De plus, comme entreprises, comment allez-vous maintenir le pouvoir d'achat en période de récession? Il y a quelques années, à Sudbury, lorsque le cours du nickel a baissé, il y a eu des licenciements massifs. C'est l'assurance-chômage qui a assuré la survie des petites entreprises puisqu'elle a permis aux gens de payer leurs loyers, de faire leur épicerie, d'acheter leurs vêtements et de se nourrir. Le pouvoir d'achat a été maintenu à un certain minimum. Si le pourcentage des travailleurs à temps partiel augmente - et ça semble être la tendance, les travailleurs atypiques - s'ils ne sont pas couverts par l'assurance-chômage et n'ont plus de pouvoir d'achat, cela va sûrement favoriser la récession, causer plus de faillites et de difficultés aux entreprises.

J'ai donc deux questions. Comment pensez-vous que ce nombre croissant de travailleurs à temps partiel puissent payer leur loyer, acheter de quoi se nourrir, s'ils ne sont pas couverts? Comment pensez-vous que les entreprises vont survivre s'il y a baisse du pouvoir d'achat, ou s'il n'y en a plus, parce qu'il n'y a plus ou presque pas d'assurace-chômage?

Le président: Monsieur Regan.

M. Regan (Halifax-Ouest): Moi, je veux parler de la réserve d'assurance-chômage dont vous avez parlé. Vous dites qu'elle ne devrait pas dépasser cinq milliards de dollars. Pour moi, avoir une réserve confortable, c'est une façon d'éviter les augmentations fortes du taux de cotisation en temps de récession. La dernière fois, il y avait au début de la période un excédent de deux milliards de dollars dans la caisse. Puis cela s'est transformé en déficit de six milliards de dollars. Il y a donc eu un mouvement de huit milliards de dollars. Avec votre proposition, le déficit serait de trois milliards de dollars. Cela pourrait aussi aboutir à de fortes augmentations des cotisations. Lors de la dernière récession, l'augmentation a été de 33 p. 100, soit du tiers, et cela nous a coûté 200 000 emplois.

Le président: Monsieur Nault.

M. Nault: Ma question porte sur l'impression que vous avez laissée autour de la table selon laquelle le gouvernement essaie encore d'augmenter les impôts au moyen de l'assurance sans franchise. À ce que je sache, le maximum de la rémunération assurable, dont vous avez réclamé vigoureusement la stabilisation et la réduction, grâce à cette réforme, va se solder par une économie d'environ 900 millions de dollars pour vous, ce qui est une réduction du taux de cotisation de l'employeur, qui passe de 4,20$ à 4,13$ par tranche de 100$, ce qui se traduit par une réduction supplémentaire des cotisations de l'ordre de 350 millions de dollars. Ce que vous économiserez en 1996 grâce au maximum de la rémunération assurable c'est, me dit-on, 1,25 million de dollars.

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Vous avez dit que cela allait être une ponction fiscale parce que cela va s'appliquer aux travailleurs à temps partiel. Mais quand je vois la réduction du maximum de la rémunération assurable, honnêtement, dans l'ensemble, les petites entreprises vont économiser une jolie somme. Pour être honnête, ne pourrait-on pas dire que ce que nous faisons grâce à l'assurance sans franchise, c'est répartir la douleur - si les charges sociales pour vous sont douloureuses - entre tous les employeurs et employés des petites entreprises, que l'on n'accorde pas de traitement de faveur à ceux qui décident de s'exempter du système en embauchant des gens pendant moins de 14 heures? C'est bien une question de justice et cela ne vient pas fausser l'économie en forçant les gens à se faire la concurrence en essayant de se soustraire aux charges sociales.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de cela, parce que si j'étais en affaires et que je ne recrutais que des employés à plein temps et que vous me représentiez ici aujourd'hui, je ne serais pas du tout content. C'est parce que vous dites clairement que nous voulons des exemptions pour ceux qui déjouent le système, alors que les entrepreneurs qui doivent engager des employés à plein temps ne peuvent pas en faire autant.

Le président: Merci, monsieur Nault.

Il faut maintenant répondre à toutes les questions d'un seul coup.

Monsieur Whyte.

M. Whyte: Je vais commencer par la première.

Le taux de renouvellement de nos membres est de 90 p. 100, ce qui signifie que nos membres sont très contents de nous. Chez nous, c'est un membre un vote, et nous avons la certitude que nous représentons très bien les vues de nos membres.

Nous disons dans notre mémoire que la couverture au premier dollar et l'augmentation du déficit au-delà de 1997 seraient perçues comme des hausses d'impôt. Alors parlons-en.

Nous sommes très favorables à une diminution de 5c. cette année et au plafonnement du maximum de la rémunération hebdomadaire assurable. Nous pourrions vous parler plus longuement de la formule du maximum de la rémunération hebdomadaire assurable, et j'invite fortement le comité à examiner de près cette formule, son fonctionnement depuis dix ans. Vous avez constaté que les personnes en profitent lorsqu'il y a gel parce que la formule va nous pénaliser dans les années de récession. Donc, disons-le clairement.

Deuxièmement, qui profite du plafonnement du maximum de la rémunération assurable? Nous sommes d'accord; 30 p. 100 de nos membres en profiteront. Mais qui profite vraiment du plafonnement? Les créateurs d'emplois? Non. Ce sera la grande entreprise et les gouvernements tentaculaires. C'est vous qui avez profité le plus du plafonnement du maximum de la rémunération assurable.

Maintenant, qui va profiter de la couverture au premier dollar? Est-ce la petite entreprise, sont-ce les créateurs d'emplois? Non, encore là, ce sont la grande entreprise et le gouvernement qui en profiteront le plus.

Nous sommes d'accord, et je l'ai dit en réponse à vos questions, il s'agit-là à notre avis d'une question d'équité. Si quelqu'un a plusieurs emplois à temps partiel, il ou elle devrait être protégé. Il est vrai que la notion des heures de travail est bonne. Mais nous ne croyons pas que 90 p. 100 des petits entrepreneurs... Si l'on en croit les statistiques du ministère du Développement des ressources humaines, les grands perdants seront les petits entrepreneurs, soit les créateurs d'emplois.

Donc, comment pouvez-vous dire que cela va favoriser la création d'emplois, alors que les créateurs d'emplois vous supplient de ne pas hausser les cotisations sociales, mais est-ce le cas ici? C'est le cas.

Nous tâchons de vous aider à résoudre ce problème. Nous croyons qu'il y a amplement matière à amélioration.

Parlons maintenant de la réserve. La dernière fois, il y avait un déficit de 6 milliards de dollars. La dernière fois qu'on a augmenté les cotisations, nous approuvions la création de cette réserve. La question est celle-ci: combien et quand? Le fait est qu'il y a eu beaucoup de compressions. Le coût du programme se situait à 20 milliards de dollars; il se situe maintenant à 16 milliards de dollars. Je doute donc très fort que nous reverrons un jour un excédent de 6 milliards de dollars.

L'autre chose, c'est qu'avec l'excédent de 5 milliards que nous avons aujourd'hui, on va économiser une tranche. Les fonctionnaires vous diront que ce sera une tranche de 50c., donc on est sûr que les taux de cotisation ne seront jamais augmentés de 50c. Eh bien, voyons-y de plus près.

Ce qu'on dit, c'est qu'on préfère maintenir les taux de cotisation à 2,95$ afin de créer un excédent de 10 milliards de dollars afin d'éviter l'augmentation des taux, au lieu de les réduire de 2,95$ à 2,30$, pour ensuite les augmenter à 2,80$ lorsqu'il y a une récession. Nous croyons que la meilleure façon de stimuler l'économie, ce n'est pas de donner de l'argent au gouvernement qui nous le redonne ensuite, mais de confier cet argent d'emblée aux consommateurs et aux employeurs qui le feront fructifier.

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Il faut être juste ici. Oublions les 5 milliards de dollars, on n'a pas fait cela pour obtenir un excédent. Voyez le budget, vous allez voir qu'on veut se servir de la trésorerie pour combler le déficit. Et si cela continue, ce sera perçu comme une taxe de 10 milliards de dollars, et non comme un excédent de 10 milliards de dollars pour l'assurance-chômage.

La troisième question avait trait aux travailleurs à temps partiel. Nous ne nous opposons pas à l'assurance-chômage pour les travailleurs à temps partiel. Ce n'est pas ce que nous disons. Mais dans une récession...

M. Allmand: Eh bien, vous dites que 83 p. 100 des petites entreprises ne sont pas favorables à l'inclusion d'un plus grand nombre de travailleurs à temps partiel dans le régime d'assurance-chômage.

M. Whyte: C'est exact. Nous ne sommes pas favorables à l'assurance-chômage pour les travailleurs à temps partiel qui, à leur propre demande, veulent travailler à temps partiel, ou qui travaillent dans les périodes de pointe. De même, lorsqu'il y a récession, nos membres abaissent leur propre salaire et le salaire de leurs employés, mais ils conservent leur personnel. Les chiffres que vous mentionniez se rapportent aux entreprises qui gardent leurs employés en temps de récession.

Un de nos membres possède un magasin de chaussures rue Main à Winnipeg. Au cours de la dernière récession, il y avait des jours où pas un seul client n'entrait dans son magasin, mais il conservait tout de même trois employés.

Dire que les employeurs ne se soucient pas de leurs employés et dire qu'ils exploitent le système est faux. Sortez d'ici, allez vous promener rue Main, parlez à nos membres, et vous allez voir qu'ils se soucient de leur milieu et de leurs employés.

M. Allmand: J'ai des travailleurs à temps partiel dans mon bureau.

M. Whyte: Eh bien, voilà. Vous engagez-vous aussi des travailleurs à temps partiel. Cela ne fait pas de vous un méchant homme.

M. Allmand: Non, je veux dire qu'il y en a dans nos bureaux.

M. Gray: Oui, mais parlez aux employeurs aussi, et vous allez voir ce qu'ils font et pourquoi ils le font. Ne vous contentez pas d'écouter seulement les personnes qui vont vous voir, qui sont des employés et qui ont déjà été dans cette situation. C'est comme si le ministère chargé des relations avec les consommateurs de l'Ontario mettait au point une loi sur les relations avec les consommateurs qui ne serait fondée que sur les plaintes des consommateurs. Chose certaine, vous devez voir un peu plus large pour déterminer quels sont les problèmes, et vous ne devez pas demander seulement au plaignant quel est le problème.

J'en reviens toujours à la question fiscale, et je tiens à préciser que nous avons fait des recherches. Nous avons pris l'exemple d'un manufacturier ontarien ayant 25 employés. De 1990 à 1996, la croissance salariale dans ce secteur, en moyenne, était d'environ 16,7 p. 100. Mais la croissance des cotisations sociales en Ontario pour un manufacturier de cette taille, dans notre exemple typique, était de 45,88 p. 100. C'est énorme. Les taux de cotisation à l'assurance-chômage au cours de cette période ont augmenté de 53,1 p. 100.

Vous ne pouvez pas tout avoir. Vous ne pouvez pas dire que vous voulez que notre secteur crée des emplois - et nous en créons beaucoup, croyez-moi - et ensuite nous imposer un programme qui va hausser nos coûts aujourd'hui ou demain.

Nous sommes ici parce que nous voulons coopérer, parce que nous voulons être justes, et parce que nous voulons faire notre part pour l'économie; nos membres ont fait leur part consciencieusement. La vaste majorité des petites entreprises n'ont aucune intention de refuser du travail à leurs travailleurs ou de les déplacer.

Le président: Monsieur Gray et monsieur Whyte, au nom du comité, je tiens personnellement à vous remercier chaleureusement. Je ne veux pas vous donner l'impression que nous ne comprenons pas les défis qui attendent les petits entrepreneurs. D'ailleurs, nous savons qu'il n'y a à peu près rien de plus difficile que d'être un petit entrepreneur dans notre économie en mutation.

Nous espérons que nous pourrons améliorer ce projet de loi afin de collaborer à la création d'emplois, qui demeure notre priorité numéro un ou numéro deux, cela dépend à qui vous parlez - dans la gamme des grandes questions que le gouvernement et les députés doivent régler.

Je tiens aussi à féliciter vos membres pour leurs états de service en matière de création d'emplois. Nous pouvons tous faire davantage. Les gouvernements peuvent faire davantage, les petites entreprises peuvent faire davantage, les syndicats peuvent faire davantage. Mais ce n'est que par l'esprit de coopération que nous pourrons relancer notre économie et améliorer la qualité de vie des Canadiens. C'est là notre but ultime, et c'est l'obligation que nous avons.

Merci.

M. Gray: Merci, monsieur le président.

Le président: Nous allons maintenant faire une pause de deux minutes. Nous entendrons à notre retour les représentantes de l'Association nationale des femmes et du droit.

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.1121

Le président: Avant d'entendre les représentantes de l'Association nationale des femmes et du droit, je tiens à rappeler à tous les députés, tant à ceux du gouvernement que de l'opposition, que je vous ai dit à plusieurs reprises que si vous avez des propositions visant à améliorer le projet de loi, veuillez me les faire connaître pour que nous puissions analyser vos idées. À ce jour, M. Scott,M. Regan et Mme Augustine m'ont adressé des propositions. Si d'autres membres du comité ont des propositions, veuillez me les transmettre.

Ce matin, Mme Augustine nous a expliqué le rapport qu'elle voit entre le supplément du revenu familial et le calcul au prorata des semaines d'assurance-chômage dans le contexte de la règle de l'intensité. Ceux qui travaillent tout en touchant de l'assurance-chômage seraient d'autant plus encouragés à travailler parce que cela atténuerait l'effet de la règle de l'intensité sur les prestations futures. Bien sûr, il faut songer à cela un peu plus, et j'ai demandé à Mme Augustine de compléter sa réflexion d'ici lundi.

Monsieur Nault.

M. Nault: Monsieur le président, un simple rappel, on a demandé aussi qu'on examine les prestations de maternité et le nombre d'heures pour être admissible. Certains témoins nous ont demandé la semaine dernière de résoudre ce problème.

Le président: J'ai reçu de la documentation supplémentaire du ministère, et je vous la remettrai plus tard cet après-midi.

Monsieur Allmand.

M. Allmand: J'aimerais que notre personnel de recherche examine les propositions qui ont été faites par les premiers témoins ce matin, à savoir le groupe qui représentait les artistes et les communautés culturelles, en particulier les artistes qui sont travailleurs indépendants, propositions qui sont très semblables à l'inclusion dans le Régime de pensions du Canada. Il me semble que le système qu'ils proposent est très injuste. Les vrais cotisants ne pourraient jamais toucher de prestations. J'aimerais que nous examinions cela pour voir s'il n'y a pas moyen de proposer un amendement.

Le président: J'en prends bonne note.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Lalonde (Mercier): J'ai reçu une lettre de Mme Augustine disant qu'elle allait déposer un amendement. A-t-elle effectivement déposé cet amendement? Si oui, ne devrions-nous pas l'avoir?

Au nom de l'Opposition officielle, j'ai demandé au ministre Young de déposer les amendements dont il avait parlé. Il a répondu qu'il les déposerait à la fin des travaux. Je voudrais savoir comment vous avez l'intention de procéder.

.1125

[Traduction]

Le président: Voilà ce qui s'est passé. Chaque fois que j'entends des idées qui, à mon avis, pourraient améliorer le projet de loi - parce que c'est justement le but de notre comité - , je demande aux membres du comité de nous dire sur quoi se fondent leurs idées. Dans le cas deM. Scott, c'était l'écart, dans le cas de M. Regan le dénominateur unique, dans le cas de Mme Augustine, c'était la règle de l'intensité et son application au supplément du revenu familial. Ces députés m'ont remis leurs textes, qui seront distribués par le greffier à tous les membres du comité. Voilà où nous en sommes.

Mais je veux seulement situer cela dans le contexte voulu. Il faut se rappeler tous les jours que nous sommes ici pour améliorer le projet de loi, et il nous appartient à nous, les membres du comité, de proposer des amendements ou des idées qui vont améliorer le projet de loi.

[Français]

Mme Lalonde: Monsieur le président, vous savez que notre débat porte essentiellement sur les coupures. Nous nous opposons aux coupures prévues dans ce projet de loi, mais nous ne nous opposons pas à ce qu'on réforme l'assurance-chômage. Nous sommes en désaccord sur le fait que, compte tenu de la réserve actuelle, il faille procéder à de nouvelles coupures pour modifier l'assurance-chômage.

Pourrons-nous débattre de cela à un moment donné?

[Traduction]

M. Nault: Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président: Un instant. Je vais répondre à la question.

M. Nault: C'est manqué d'égard envers les témoins que de s'engager dans un long débat pendant qu'ils attendent. Pourquoi ne pas écouter les témoins, après quoi nous pourrons reprendre cette discussion cet après-midi avant d'entendre le prochain témoin?

Le président: Oui. J'aimerais seulement faire une petite observation.

Sachez que je tiens à produire un meilleur projet de loi pour les Canadiens et que c'est dans ce but que je dirige le présent comité. Les députés vont proposer des amendements. Il appartient aux membres de notre comité d'améliorer le projet de loi.

C'est mon seul but. C'est le seul but que j'ai en tête, et je n'en dérogerai pas. Je veux que le projet de loi que je vais remettre à la Chambre soit un meilleur projet de loi pour les Canadiens.

Monsieur Crête.

[Français]

M. Crête: Tout le monde veut une réforme de l'assurance-chômage qui soit adéquate, et cela va se traduire quelque part par un projet de loi. Cependant, il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas eu de débat en deuxième lecture sur ce projet de loi et que les amendements qu'on pourrait proposer pourraient nécessiter une approche très globale. On veut simplement connaître la façon dont les choses se dérouleront afin qu'on n'en arrive pas à une série de petits amendements techniques et que, de l'autre côté, on dise que les députés de l'opposition n'ont pas fait leur travail parce qu'ils ne présentent pas d'amendements factuels. Vous devez savoir qu'il y a d'abord une question fondamentale à régler.

Je suis d'accord avec M. Nault qu'il ne faut pas régler cela avant d'avoir entendu les témoins. Mais il faudrait peut-être réussir à avoir l'heure juste afin qu'il n'y ait pas imbroglio. Quand on parle de modifications à la règle de l'intensité, il faut commencer par s'entendre sur la règle d'intensité avant de faire un sous-amendement.

[Traduction]

Le président: Je suis d'accord avec vous deux, monsieur Crête et monsieur Nault, mais nous devons entendre maintenant les témoins suivants, qui ont patiemment attendu leur tour. Mais je tiens aussi à vous rappeler ce que j'ai dit au début des audiences, et je crois avoir à ce moment-là bien défini le cadre du débat.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Lalonde: Nous avons reçu quelques mémoires en anglais seulement. Je ne blâme pas du tout les gens qui les préparent. Ils les rédigent dans la langue qui est la leur et c'est normal. Mais le comité a la responsabilité de fournir aux députés une traduction. Certains membres de notre parti ne sont pas bilingues. Je pense qu'ils ont aussi le droit de recevoir les documents dans leur langue.

.1130

[Traduction]

Le président: Il s'agit d'une question administrative, c'est aussi une question très importante, que nous débattrons, soit dit en passant, à la réunion du comité directeur qui aura lieu bientôt.

J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à Martha Jackman, membre de l'Association nationale des femmes et du droit et professeure de droit à l'Université d'Ottawa, et à Louise Shaughnessy, directrice des Affaires juridiques.

Comme vous le savez, nous étudions en ce moment le projet de loi C-12, la loi concernant l'assurance-emploi au Canada. Vous le savez sans doute, nous sommes ici essentiellement pour améliorer le projet de loi, et les députés comptent sur des expertes comme vous pour améliorer le projet de loi.

Nous avons environ une heure. Nous aimerions vous poser des questions, alors si vous pouvez nous donner un aperçu de votre argumentation, nous aurons plus de temps pour les questions. Bienvenue et merci. Vous pouvez commencer.

Mme Louise Shaughnessy (directrice des Affaires juridiques, Association nationale des femmes et du droit): Nous savons gré au comité de nous avoir invitées aujourd'hui. Il s'agit d'une question qui nous intéresse vivement.

Notre mémoire n'est qu'en anglais, et nous tenons à vous faire nos excuses. Il en est ainsi parce que nous avons subi des compressions budgétaires. Nous tenons à voir aussi la traduction des procès-verbaux du comité.

L'Association nationale des femmes et du droit est une organisation nationale sans but lucratif qui s'emploie à réaliser l'égalité pour les femmes par son travail au niveau la réforme du droit et des politiques gouvernementales. Notre organisation existe depuis plus de 25 ans, et au cours de cette période, nous avons témoigné à de nombreuses reprises devant des comités parlementaires sur une foule de questions, entre autres au moins trois fois au cours des six dernières années sur l'assurance-chômage.

L'Association a de très sérieuses réserves quant à l'effet du projet de loi C-12 sur les femmes. Nous avons deux remarques à caractère général.

Premièrement, nous nous opposons à la visée générale du projet de loi parce que ce seront les travailleurs les plus vulnérables de notre pays, dont un grand nombre sont des femmes, qui auront à subir les effets des mesures d'austérité.

Deuxièmement, nous avons des préoccupations précises quant aux effets de certaines dispositions sur les femmes. Ces dispositions omettent de prendre en compte les circonstances particulières des travailleuses, et elles auraient dans bien des cas un effet négatif disproportionné sur les femmes.

Chose intéressante, on dit que ce projet de loi favorise les femmes. L'Association est d'avis que cette proposition de loi est contraire au programme d'équité en matière d'emploi du Canada, et nous croyons que les changements qu'on envisage vont à l'encontre des articles de la Charte canadienne des droits et liberté qui garantissent l'égalité.

Nous allons maintenant vous expliquer comme les femmes seront particulièrement défavorisées si on adopte ce projet de loi.

À notre avis, le gouvernement a adopté une approche qui consiste à dire que ceux qui sont les plus vulnérables aux bouleversements économiques et à la récession sont responsables de leur propre infortune. La plupart sont des femmes. Les propositions d'introduire une règle de l'intensité pour réduire la durée des périodes de prestation, d'accroître le nombre d'heures requises pour être admissible et de compter les semaines de rémunération nulle pour établir le niveau de prestations sont régressives. Ces mesures sont punitives pour celles qui ont le plus grand besoin de prestations d'assurance, qui sont dans le besoin à cause d'une discrimination systémique qui les défavorise.

On propose ces changements pour réduire les cotisations payées par les participants qui sont relativement avantagés, pour réduire les dépenses et pour contribuer à la réduction du déficit. L'ANFD est d'avis que cette approche est à la fois injuste et économiquement malavisée. Elle menace de saper le rôle stabilisateur du système d'assurance-chômage dans notre économie et d'imposer un fardeau économique accru et un stigmate social à celles qui sont les moins capables de l'assumer.

Le gouvernement a reconnu l'importance de faire subir à toute nouvelle politique une analyse en fonction d'une grille sexuelle afin d'écarter toute politique qui défavoriserait les femmes ou qui ne répondrait pas à leurs besoins. Dans son plan fédéral pour l'égalité des sexes, le gouvernement s'est engagé de façon générale à faire en sorte que les nouvelles lois et politiques comprennent, le cas échéant, une analyse des répercussions potentielles sur les femmes et les hommes.

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Le gouvernement a promis en particulier que dans la refonte de l'assurance-chômage, on tiendrait compte des réalités sociales, familiales et professionnelles particulières des femmes. Nous pressons le comité de forcer le gouvernement à honorer cet engagement en recommandant de réexaminer et, au besoin, de modifier le projet de loi C-12 à la lumière des problèmes que nous avons décelés à ce jour.

Les femmes ne bénéficient toujours pas d'un accès égal au marché du travail rémunéré au Canada ni aux avantages qui en découlent. Le gouvernement lui-même a reconnu dans le plan fédéral pour l'égalité des sexes que les femmes continuent d'être sur-représentées dans les emplois atypiques, notamment les emplois à temps partiel, instables, temporaires, saisonniers et mal rémunérés, et que la réorganisation de l'économie force les femmes à accepter de tels emplois. Il leur est donc très difficile d'être admissibles aux prestations d'assurance-chômage et aux cours de formation. En outre, les femmes autochtones, les femmes qui font partie de minorités visibles, les femmes immigrantes et les femmes handicapées risquent plus que les autres femmes canadiennes de se retrouver dans des emplois de travail physique, mal rémunérés et offrant peu ou pas d'avantages.

Quelque 69 p. 100 de tous les travailleurs à temps partiel au Canada sont des femmes. Il est important de signaler que ce n'est pas par choix que beaucoup de ces femmes travaillent à temps partiel: 34,6 p. 100 des femmes qui travaillent à temps partiel auraient accepté un emploi à temps plein s'il y en avait eu de disponible. Une autre tranche de 16,7 p. 100 ont dit qu'elles travaillaient à temps partiel seulement en raison de leurs responsabilités familiales. De plus, autant dans les emplois à plein temps qu'à temps partiel, les femmes continuent de gagner moins que les hommes.

Tous ces facteurs contribuent au nombre disproportionné de femmes qui vivent sous le seuil de la pauvreté.

Il est vital de comprendre le lien entre ces statistiques sur la population active selon les sexes et la contribution disproportionnée des femmes à l'économie et à l'ensemble de la société sous forme de travail d'aide à autrui non rémunéré. Par ailleurs, ni les employeurs ni l'État n'ont résolu, par un réaménagement du travail ou par des politiques sur la garde des enfants et autres questions, le conflit potentiel entre le travail rémunéré et les responsabilités familiales.

En 1992, les femmes ayant un conjoint et des enfants consacraient environ deux heures et demie par jour à du travail domestique non rémunéré, soit environ une heure de plus que leurs homologues masculins. Les mêmes femmes consacraient encore 2,2 heures à la garde d'enfant si elles avaient au moins un enfant de moins de cinq ans, soit le double du temps consacré par les hommes à cette activité.

Ce travail domestique non rémunéré effectué par les femmes dresse de nombreux obstacles entre les femmes et la main-d'oeuvre rémunérée: absence prolongée du travail rémunéré, entrée tardive sur le marché du travail, perte d'occasions sur le plan de la formation, de l'éducation, de l'expérience professionnelle, des promotions et de la carrière en général. Cela limite souvent le nombre d'heures que les femmes peuvent travailler à l'extérieur de la maison, ainsi que leur mobilité et donc leur accès à des emplois dans d'autres régions. En fait, les femmes qui ont des enfants travaillent plus souvent à temps partiel que les autres femmes.

En outre, les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à quitter leur emploi en raison de responsabilités personnelles ou familiales. En 1993, 6 p. 100 des femmes qui étaient en chômage avaient quitté leur emploi pour cette raison, tandis que le nombre d'hommes qui étaient dans cette situation étaient près de zéro. Par ailleurs, les femmes qui font parties de la population active s'absentent presque trois fois plus que les hommes de leur travail à cause de leurs responsabilités personnelles ou familiales.

Tout cela veut dire que les femmes ont, de façon disproportionnée, une vie professionnelle précaire, mal payée et marquée par de fréquentes interruptions.

Non seulement on n'a jamais tenu compte de ces réalités de la vie des femmes au travail dans la conception du projet de loi C-12, mais aussi ce projet de loi impose des obstacles encore plus grands aux femmes qui tentent d'accéder à un emploi et à la stabilité économique. L'ANFD maintient que si les changements recommandés ci-dessous ne sont pas adoptés, le projet de loi sera très préjudiciable pour les femmes et pour leur égalité sur le plan économique.

D'après le projet de loi, l'admissibilité aux prestations est établie d'après les heures et non les semaines de travail. L'ANFD souscrit au principe d'inclure dans le régime un plus grand nombre de travailleurs à temps partiel. Toutefois, dans sa forme actuelle, le projet de loi retrancherait aussi bon nombre de travailleurs à temps partiel qui sont actuellement admissibles aux prestations d'assurance.

Aux termes du projet de loi, des gens qui travaillent de 15 à 34 heures par semaine seraient exclus du bénéfice des prestations, à moins qu'ils ne puissent trouver et conserver un emploi pendant un plus grand nombre de semaines. Actuellement, ils sont tenus de travailler seulement de 12 à 20 semaines, pourvu qu'ils travaillent plus de 15 heures par semaine. Pour certaines personnes, le nombre de semaines nécessaires pour avoir droit aux prestations serait doublé et même davantage. Cela aurait des répercussions particulièrement dures pour les femmes qui constituent la plus grande partie de la main-d'oeuvre à temps partiel. Beaucoup de femmes qui sont actuellement admissibles aux prestations n'y auraient plus droit, même si elles continuaient de payer des cotisations.

En général, les femmes ont moins de semaines d'emploi que les hommes. C'est lié au faitque les femmes assument la plus grande partie du fardeau du travail domestique non rémunéré.Des femmes qui travaillent, 44 p. 100 sont employées moins de 49 semaines par année et de ce groupe, 44 p. 100 sont dans la catégorie des 14 à 26 semaines.

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L'alinéa 7(2)b) du projet de loi et le tableau qui l'accompagne doivent être modifiés afin d'éviter de léser les travailleuses et travailleurs à temps partiel qui ont actuellement droit aux prestations d'assurance-chômage. Cela pourrait se faire en accordant les prestations aux personnes qui ont travaillé 180 heures ou 12 semaines dans les régions de chômage élevé. Pour les régions où le chômage est faible, cela se traduirait par 300 heures ou 20 semaines. Cela permettrait aux gens qui ont moins de 15 heures d'emploi par semaine d'accéder au système en accumulant de 180 à 300 heures, selon la région, sans pour autant exclure les travailleuses et travailleurs à temps partiel qui ont actuellement droit aux prestations.

Le projet de loi fixe une exigence encore plus rigoureuse pour les personnes qui sont qualifiées de nouveaux arrivants ou qui redeviennent membres de la population active, c'est-à-dire les gens qui ont accumulé moins de 490 heures de travail au cours de l'année précédente. Cela revient à diminuer le nombre de travailleuses et travailleurs à temps partiel qui accéderaient au système. L'incidence serait particulièrement négative sur les femmes qui redeviennent membres de la population active rémunérée après une période d'absence en raison de responsabilités familiales et sur les femmes qui reviennent au marché du travail rémunéré à la suite d'un divorce ou d'une séparation. En outre, ce resserrement des exigences d'admissibilité ne tient pas compte du taux d'emploi variable selon les régions.

Les femmes qui ont des enfants risquent beaucoup plus d'être retranchées de la population active rémunérée que les hommes qui ont des enfants. Environ la moitié des femmes actuellement sans emploi n'ont pas travaillé à l'extérieur de la maison au cours des cinq dernières années ou bien n'ont jamais été membres de la population active rémunérée. Parmi l'autre moitié, 9 p. 100 ont quitté un emploi rémunéré pour assumer des responsabilités personnelles ou familiales. Ces faits mettent en lumière la réalité toujours présente que ce sont essentiellement les femmes et non pas les hommes qui font des sacrifices financiers et de carrière pour s'occuper des enfants. Elles ne devraient pas être pénalisées pour cela.

L'ANFD soutient que ces dispositions sur les nouveaux actifs ou les personnes qui réintègrent la population active ne feraient qu'exacerber les actuelles inégalités entre les hommes et les femmes. Elles érigeraient un autre obstacle empêchant les femmes de s'assurer une sécurité financière à des étapes de leur vie où elles se débattent déjà pour surmonter les désavantages imposés à celles qui ont du travail domestique.

En particulier, c'est un fait bien connu que les femmes subissent déjà une baisse de leur niveau de vie moyen comparativement aux hommes à la suite d'un divorce. De plus, la tendance en droit de la famille est d'accorder moins d'aide aux femmes après leur divorce et de les encourager plutôt à devenir autonomes. Le gouvernement ne devrait pas légiférer de manière à réduire encore davantage l'aide transitoire disponible pour les femmes qui sont dans cette situation.

L'ANFD proteste quand on laisse entendre que les personnes qui intègrent ou réintègrent la population active abusent d'une façon ou d'une autre du régime d'assurance-chômage.

Pour beaucoup de femmes, le projet de loi augmenterait considérablement le nombre de semaines d'emploi nécessaires pour être admissible aux prestations de maternité aux termes de l'article 22. On peut en dire autant des prestations parentales, qui sont exclusivement réclamées par des femmes.

Pour avoir droit à ces prestations, une personne doit être un «prestataire de première catégorie». À l'heure actuelle, on peut accumuler les 20 semaines d'emploi assurable nécessaires pour faire partie de cette catégorie en travaillant au moins 15 heures par semaine. Le projet de loi remplacerait cette exigence par un total de 700 heures. Une femme qui travaille 15 heures par semaine aurait maintenant besoin de près de 47 semaines pour être admissible aux prestations de maternité.

Le gouvernement n'a donné aucune justification de cette réduction de la portée des prestations de maternité ou parentales, qui sont toutes deux essentielles pour assurer l'égalité financière des femmes. L'ANFD s'oppose fortement à toute mesure qui réduirait l'admissibilité à ces prestations.

Le gouvernement a également jugé bon de conserver le délai de carence de deux semaines pour les prestations de maternité et parentales. C'est illogique si le but est de donner à la prestataire deux semaines pour trouver un autre emploi. Une personne qui demande des prestations de maternité ou parentales ne cherche pas un autre emploi.

Nous recommandons de modifier la définition de «prestataire de première catégorie» afin d'exiger au moins 300 heures ou 20 semaines à 15 heures par semaine d'emploi assurable. Cela permettrait à certaines travailleuses à temps partiel qui accumulent moins de 15 heures par semaine d'être admissibles aux prestations de maternité ou parentales sans pour autant compromettre les droits des gens qui sont actuellement admissibles. Nous recommandons également de supprimer le délai de carence pour les prestations de maternité et parentales.

Le calcul du montant des prestations en fonction des 14 à 20 dernières semaines d'emploi sera également préjudiciable pour les travailleuses. En effet, on tiendra compte des semaines de rémunération réduite ou nulle. Ce sont surtout les travailleurs saisonniers qui en subiront les conséquences, eux qui sont déjà parmi les plus pauvres, de même que les travailleurs du secteur des services, dont 53 p. 100 sont des femmes. De toutes les femmes qui travaillent, 86 p. 100 sont dans le secteur des services, en comparaison de 63 p. 100 des hommes.

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La mesure proposée réduirait le montant des prestations dans une proportion pouvant atteindre 5 p. 100, selon le nombre de fois qu'un travailleur a demandé des prestations d'assurance-chômage au cours des cinq dernières années. Cela aurait également des conséquences négatives pour les femmes, parce qu'elles sont plus nombreuses à prendre des congés pour raisons familiales et que leur stabilité d'emploi est généralement moindre, pour les raisons expliquées ci-dessus. Cela aurait également des conséquences pour certaines régions où la conjoncture économique est la plus difficile, notamment parmi les travailleurs des pêches de la côte est et d'autres travailleurs saisonniers.

Il est bien que le gouvernement cherche à d'offrir un complément de revenu aux familles des travailleurs pauvres, mais nous estimons que cela ne doit pas se faire au détriment des pauvres qui sont sans emploi.

De plus, l'ANFD croit qu'il serait problématique de rendre l'admissibilité dépendante du revenu familial total. Cela aurait pour effet de forcer les femmes sans emploi à dépendre des hommes. Cela nuit à l'autonomie des femmes et c'est particulièrement dangereux pour les femmes battues par leur conjoint.

La raison d'être du régime d'assurance-chômage est de remplacer la rémunération d'un travailleur individuel. Tenir compte du revenu familial, c'est changer en profondeur les caractéristiques du régime tel que prévu à l'origine.

Si toutefois le supplément devait être conservé, nous croyons qu'il faudrait l'accorder à toutes les personnes à faible revenu afin d'aider à compenser les conséquences négatives pour les plus démunis. En outre, les chèques devraient être libellés au nom de la femme du ménage; ainsi, il y aurait plus de chance que l'argent soit partagé équitablement.

Il faudrait que le supplément soit pleinement indexé afin que les gens ne perdent pas de prestations uniquement à cause de l'inflation.

Dans la partie II du projet de loi, des dispositions permettent à Développement des ressources humaines Canada de continuer le service national de placement et de négocier avec chaque province pour la mise en place de prestations d'emploi qui remplaceraient les programmes de formation et d'orientation actuellement offerts par DRHC.

Non seulement les changements proposés éliminent les normes nationales relatives aux programmes de formation, mais aussi ils menacent l'existence même des programmes de formation dans les provinces qui ne souhaitent pas y participer ou qui n'en ont pas les moyens.

De plus, en éliminant l'achat de programmes de formation par les autorités fédérales, le gouvernement fédéral renonce au pouvoir de négociation intéressant qui est l'apanage de l'achat en gros. Cela nuira à la disponibilité et à l'accessibilité des programmes privés et publics de formation, touchant surtout ceux qui habitent dans les régions rurales et éloignées.

Les femmes constituent une proportion importante des personnes qui suivent les cours de formation dont elles ont besoin pour assurer leur employabilité actuelle et future. Souvent, c'est uniquement grâce aux normes nationales et au financement fédéral que les programmes peuvent répondre de près ou de loin aux besoins des femmes.

En outre, un seul des programmes d'emploi proposés est un programme de formation, à savoir celui des prêts et subventions de perfectionnement.

Le paragraphe 61(2) signifie que s'il n'y a pas partenariat avec le gouvernement provincial, il pourrait ne pas y avoir de programmes de formation du tout. Compte tenu de l'importance de la formation et du recyclage à une époque où le marché du travail au Canada connaît de profondes mutations, l'abrogation de la responsabilité nationale dans le domaine de la formation, qui pourrait compromettre l'existence même des programmes de formation dans une province donnée, est inacceptable.

En bref, l'ANFD croit que les changements proposés en vue d'éliminer la responsabilité du gouvernement fédéral à l'égard de la formation vont nuire gravement à la disponibilité et à l'accessibilité de la formation au Canada.

Les femmes sont souvent les premières à être mises à pied en période de changement économique. Beaucoup sont par ailleurs confinées dans des emplois essentiellement à temps partiel dans le secteur des services et sont marginalisées, en grande partie à cause de la nécessité d'intégrer les activités de travail rémunéré et les responsabilités de la garde des enfants.

Des programmes réalistes et abordables de perfectionnement et de recyclage sont d'une importance cruciale pour maintenir l'employabilité et pour permettre au gouvernement d'honorer ses engagements dans le cadre du programme d'équité en matière d'emploi.

L'ANFD a fait de nombreuses recommandations sur la formation dans le passé, encore récemment à votre comité, dans le cadre de l'examen de la sécurité sociale lancé par M. Axworthy.

Nous croyons que les programmes d'emploi proposés sont très loin d'aider à ce processus.

Si le gouvernement fédéral estime qu'il doit se retirer de la formation, alors nous devons recommander des sauvegardes: que toute entente relativement à la mise en place de programmes de formation par les provinces, par les autorités locales ou par le secteur privé comporte un transfert de fonds fédéraux suffisants pour assurer la qualité et la disponibilité des programmes; que le gouvernement fédéral exige également, comme prérequis pour la conclusion de telles ententes, que la formation soit assurée d'une manière qui favorise l'équité d'emploi pour les femmes et qui tienne compte de leurs besoins particuliers en matière de formation, y compris les besoins des femmes handicapées et des immigrantes.

Enfin, l'ANFD est extrêmement préoccupée par le fait que ce projet de loi changerait fondamentalement l'essence même du système à titre de régime d'assurance. Le gouvernement aurait semble-t-il déclaré que les deux milliards de dollars d'économies qui seront réalisées grâce aux compressions opérées dans le programme d'assurance et d'emploi seront essentiellement versés au Trésor, même si une partie sera réinvestie dans la formation et dans des programmes d'adaptation pour l'est du Canada et le nord de l'Ontario. Ainsi, un programme qui était complètement autofinancé par les employeurs et les employés servira maintenant à financer les dépenses générales du gouvernement. Cela se rapproche plutôt d'une taxe.

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De plus, nous croyons que les répercussions que la mesure proposée aurait sur les femmes constituent une atteinte aux dispositions de la charte en matière d'égalité. Des changements comme l'accroissement du nombre de semaines pour être admissible aux prestations, la réduction du montant des prestations, et le fait de pénaliser les nouveaux actifs, ceux qui réintègrent le marché du travail et les utilisateurs fréquents, tout cela frappe le plus durement les femmes à cause de la situation professionnelle précaire des femmes, laquelle est attribuable à la part disproportionnée qu'elles assument des responsabilités familiales et aussi en raison d'autres formes de discrimination systémique.

Ces mesures imposeront la perpétuation de ces tendances. Les femmes continueront d'occuper des emplois précaires et mal payés. Les travailleuses et les travailleurs seront découragés d'accepter du travail à temps partiel, ce qui semble une tendance régressive, étant donné qu'il y a de moins en moins d'emplois à répartir entre un nombre de plus en plus grand de travailleuses et travailleurs.

Nous exhortons le gouvernement à reconsidérer sérieusement les conséquences qu'aura ce projet de loi pour les femmes et à l'amender en tenant compte de son obligation de promouvoir l'égalité des femmes aux termes de la charte, de son programme d'équité en matière d'emploi et de ses engagements aux termes du plan fédéral pour l'égalité des sexes.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, madame Shaughnessy.

Mrs. Lalonde.

[Français]

Mme Lalonde: Merci beaucoup pour votre mémoire. Vous ne le savez peut-être pas, mais la Fédération des femmes du Québec a aussi - et ce n'est pas une surprise - mis l'accent sur le fait que le projet de loi pourrait ne pas être conforme à la Charte canadienne des droits et libertés, car il pourrait s'agir de discrimination systématique.

Comme votre association a pour nom l'Association nationale de la femme et du droit, pourriez-vous nous dire sur quoi vous vous fondez pour affirmer une telle chose?

Mme Shaughnessy: Je vais laisser cela à notre experte constitutionnelle, Martha Jackman.

Mme Martha Jackman (membre de l'Association nationale de la femme et du droit et professeure de droit à l'Université d'Ottawa): Oui, nous appuyons fortement l'intervention de la Fédération des femmes du Québec.

Si je puis résumer, je dirais que, selon nous, le projet de loi porte atteinte au droit à l'égalité des femmes en vertu de l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés sur quatre points principaux.

Premièrement, comme notre mémoire le révèle, 70 p. 100 des travailleurs à mi-temps sont des femmes. Donc, déjà, toute modification législative qui a un effet disproportionné sur les travailleurs à temps partiel a également un effet discriminatoire à l'égard des femmes.

Donc, nous nous opposons à la modification de la formule pour calculer l'admissibilité à l'assurance-chômage sur la base des heures travaillées plutôt que des semaines travaillées.

Le projet de loi étend le bénéfice du régime d'assurance-chômage à 5 p. 100 des travailleuses qui, antérieurement n'étaient pas protégées parce qu'elles travaillaient moins de 15 heures par semaine. Mais la formule qu'on a adoptée pénalise les 25 p. 100 de femmes qui travaillent entre 15 et 34 heures. Cela a un effet global très, très désavantageux pour les femmes.

Deuxièmement, selon nous, le fait d'augmenter le nombre d'heures pendant lesquelles devront travailler les nouvelles travailleuses ou ceux qui retourneront sur le marché du travail - un nombre important de ces personnes-là sont des femmes, surtout celles qui retournent sur le marché du travail après des congés de maternité ou parentaux - aura un effet disproportionné sur les femmes et, encore une fois, violera les principes d'égalité inscrits à l'article 15 de la Charte.

L'une de nos objections les plus importantes à ce projet de loi porte sur les modifications que Louise Shaughnessy a décrites. Quant aux congés de maternité et parentaux, 99 p. 100 des employés qui bénéficient de ces congés-là sont des femmes. Il est donc évident qu'une modification qui réduit l'admissibilité ou les avantages de ces congés a un effet extrêmement disproportionné pour les femmes. Cela aussi représente une violation des garanties de l'article 15.

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Finalement, le fait de calculer l'admissibilité aux prestations sur la base du revenu familial plutôt que sur le revenu individuel est désavantageux pour les femmes. Nous appuyons fortement les programmes qui ont pour effet de réduire la pauvreté chez les familles les plus désavantagées au Canada, mais nous pensons que le régime d'assurance-chômage n'est pas le moyen le plus efficace pour remédier à la pauvreté, surtout la pauvreté des enfants. Les enfants pauvres ne sont pas moins pauvres parce qu'ils sont enfants de familles qui travaillent plutôt que de familles sans emploi.

Donc, pour nous, l'effet discriminatoire de l'usage du revenu familial comme moyen pour déterminer l'accès à des prestations a peu d'avantages du point de vue de la pauvreté des enfants et cause énormément d'inconvénients du point de vue des femmes.

Quant à notre dernier point - et là nous serons probablement en désaccord - , il porte sur la question des programmes fédéraux de formation. Pour nous, le fait de déléguer aux provinces l'entière responsabilité en matière de formation pose des inconvénients importants. Déjà, dans plusieurs mémoires que nous avons soumis à ce comité et à d'autres, nous nous sommes plaintes du fait que les programmes de formation actuels étaient discriminatoires à l'égard des femmes. Ces programmes-là ne répondent pas aux besoins des femmes qui ont besoin de formation.

Pour nous, l'avantage d'un système qui est géré ou du moins supervisé par le gouvernement fédéral est qu'on peut mieux veiller à l'adoption de normes qui répondent mieux aux besoins des femmes. Lorsqu'on délègue ces programmes à toutes les provinces, on perd la possibilité d'exiger des programmes de formation qui respectent l'égalité des femmes.

Maintenant, comme vous le savez de par les mémoires que nous avons présentés antérieurement au comité, l'ANFD reconnaît les besoins distincts du Québec en matière sociale. Donc, nous n'avons jamais insisté sur l'application de normes nationales au Québec. Mais pour les provinces autres que le Québec, nous insistons sur le maintien de normes nationales favorables aux femmes.

[Traduction]

Le président: Avez-vous d'autres questions?

[Français]

Mme Lalonde: Je vous remercie beaucoup. C'est un exposé que nous allons certainement reprendre, qui a le mérite de mettre en lumière que les femmes, notamment à cause de la maternité, de l'éducation des enfants et de leur place sur le marché du travail, vont être plus touchées que d'autres par ce projet de loi.

[Traduction]

Le président: Merci, madame Lalonde.

Madame Augustine.

Mme Augustine: Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de votre exposé.

Monsieur le président, je pense qu'il est important d'apporter ici un petit éclaircissement. Lorsque je parle de la règle de l'intensité, je n'inclus pas les gens en congé de maternité. Je n'applique pas cette règle aux prestations parentales ou aux congés de maternité.

Les témoins savent-ils que nous avons fait à l'époque une étude de l'impact de l'assurance-emploi et du projet de loi C-111 pour les femmes? Cette étude a été rendue publique. Êtes-vous au courant de l'analyse qui a été faite à cet égard?

Mme Shauhgnessy: Oui.

Mme Augustine: J'ai l'impression que vous dites dans votre mémoire que nous n'avons pas fait ce que nous avions promis de faire à la conférence de Beijing. Je veux tout simplement mettre les choses bien au clair. Nous avons effectivement fait une telle analyse et nous avons respecté nos engagements à cet égard.

Mme Jackman: Oui, nous avons lu l'analyse effectuée par le ministère du Développement des ressources humaines. Malheureusement, cette analyse comporte des lacunes en ce sens qu'elle n'identifie pas les faiblesses du projet de loi dont nous avons parlé aujourd'hui. Nous ne contestons pas le fait que l'étude a été effectuée. Ce que nous contestons plutôt, c'est le ton du document.

.1200

Mme Augustine: Très bien, mais vous n'avez pas dit clairement: «Oui, je sais que vous avez fait cette étude, mais je ne souscris pas à ses conclusions et il y avait certains éléments qui manquaient.» À lire votre mémoire, j'ai eu l'impression que nous avions négligé ou omis de faire ce que nous avions promis de faire à Beijing en matière de politique gouvernementale, et je veux que les femmes sachent que cela a été fait.

Mme Jackman: Oui, merci, c'est un excellent point. Il s'agit d'un mémoire intérimaire que nous allons modifier à la lumière de vos observations, et nous soulignerons certainement que vous avez fait cette étude, mais que nous ne souscrivions pas à ses conclusions, plutôt que de dire que vous n'avez pas du tout fait cette étude.

Mme Augustine: Monsieur le président, avant de laisser la parole à quelqu'un d'autre, il y a plusieurs points que j'aimerais soulever. Tout d'abord, en regardant le système reposant sur le calcul des heures qui est prévu ici, les chiffres qu'on nous a donnés m'ont un peu surpris. On dit qu'il y a environ 500 000 travailleurs à temps partiel dont 270 000 sont des femmes et en outre, que 36 000 femmes qui ne sont pas admissibles aux termes du régime actuel le seront aux termes du programme d'assurance-emploi sans qu'elles n'aient à changer le nombre d'heures qu'elles doivent travailler. J'avais l'impression que c'était avantageux pour les femmes, pourtant vous semblez prétendre le contraire.

Mme Jackman: Ce que nous tentons de dire dans notre mémoire, c'est que même si 40 000 travailleuses de plus pourraient être admissibles, plus de 100 000 travailleuses à temps partiel pourraient cependant être ainsi pénalisées. Donc, bien que nous appuyions à 100 p. 100 les efforts du gouvernement pour faire en sorte que toutes les travailleuses à temps partiel soient admissibles au régime d'assurance-chômage, nous aimerions que le gouvernement le fasse d'une façon qui ne pénalise pas la grande majorité des travailleuses à temps partiel, celles qui travaillent entre 15 et 34 heures.

Le président: Merci, madame Augustine.

Monsieur Regan.

M. Regan: Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.

J'aimerais savoir ce que vous pensez d'un autre aspect du projet de loi, c'est-à-dire de la récupération fiscale pour les contribuables à revenu élevé. J'aimerais savoir si vous appuyez une telle mesure. Êtes-vous d'avis que le projet de loi accorde un supplément au revenu des familles qui ont un faible revenu aux dépens de ceux que vous appelez les pauvres non actifs? Il me semble qu'en fait le gouvernement a pris de l'argent de ceux qui ont un revenu élevé pour le donner à ceux qui ont un faible revenu.

Il est certain que les gens dans ma circonscription et dans ma région par exemple disent depuis des années: «Pourquoi une personne qui gagne 50 000$ ou 60 000$ tous les ans en six, huit ou dix mois devrait-elle pouvoir toucher ce qu'on appelle des prestations d'assurance chaque année et aller ainsi chercher un supplément de revenu alors que son revenu est déjà élevé?»

Êtes-vous d'accord pour que l'on récupère davantage du côté des contribuables à revenu élevé? De toute évidence, ce n'est pas vraiment une assurance, si les gens peuvent recevoir un même montant chaque année sans voir leurs cotisations augmenter.

Deuxièmement, êtes-vous d'accord pour que l'on réduise le maximum de la rémunération assurable, ce qui a un effet semblable?

Mme Jackman: Dans les nombreux mémoires que nous avons présentés au comité des finances, nous disons clairement que nous appuyons sans réserve un système d'impôt progressif. Nous sommes d'avis que pour s'attaquer aux iniquités dans la distribution de la richesse au Canada, il faut passer par le régime d'impôt sur le revenu plutôt que par le régime d'assurance-chômage.

Comme la plupart des témoins, je crois, qui ont comparu devant le comité et qui partagent nos points de vue politiques, nous croyons que le maximum de la rémunération assurable et le taux de récupération fiscale devraient demeurer à leur niveau actuel, vu surtout que les économies ainsi réalisées ne sont pas réinvesties dans le régime que ce soit pour augmenter le nombre de prestataires ou augmenter les prestations aux travailleurs à faible revenu.

Nous avons l'impression qu'en général il s'agit d'une mesure de réduction du déficit dont le seul objectif est la réduction du déficit.

Le président: D'autres questions? Monsieur Easter.

M. Easter: Monsieur le président, j'ai de la difficulté avec la position concernant les heures de travail. Je me demande si vous avez des chiffres pour la catégorie des 15 à 34 heures. On nous a certainement laissé croire qu'en passant à un régime reposant sur les heures de travail, on s'éloignait de ce piège de 15 heures dans lequel tombe un grand nombre de femmes; qu'il était possible d'accumuler le nombre d'heures requises si on avait plusieurs emplois.

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Tout compte fait, nous croyons qu'en passant à un système reposant sur le nombre d'heures - il y aura des perdants et des gagnants, c'est inévitable - mais tout compte fait, il y aura beaucoup plus de gagnants, surtout parmi les femmes, qui pourront dorénavant désormais être admissibles alors qu'elles ne l'étaient pas auparavant. Qu'en pensez-vous?

Mme Jackman: Nous avons utilisé les données de Statistique Canada contenues dans un mémoire du Conseil canadien de développement social. Ces statistiques laissent entendre que même si les changements pourraient faire en sorte que 5 p. 100 de plus de travailleuses soient admissibles - c'est-à-dire 5 p. 100 de la main-d'oeuvre féminine qui travaille entre 1 et 14 heures par semaine - d'un autre côté cela pénalise 25 p. 100 des travailleuses et travailleurs qui accumulent déjà entre 15 et 34 heures et qui sont admissibles à des prestations selon le régime actuel où il faut avoir accumulé 20 semaines de travail.

M. Easter: Je me demande, monsieur le président, si nous pouvons demander au personnel de recherche de nous fournir des chiffres à cet égard, car c'est un point qui a déjà été soulevé. Je crois qu'en fin de compte, il y aura plus de gagnants que ce que laissent entendre les chiffres dont nous disposons. Les attachés de recherche pourraient-ils nous fournir ces chiffres dans une note d'information?

Le président: Oui.

Je tiens à vous remercier au nom du comité. Vous avez soulevé des points qui ont naturellement suscité la discussion, ce qui est un aspect très sain du travail de notre comité. Nous examinerons les points que vous avez soulevés lors de nos délibérations pour améliorer ce projet de loi. Je vous remercie.

J'aimerais informer le comité que nous nous réunirons cet après-midi de 15h30 à 17h30.

La séance est levée.

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