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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 28 mars 1996

.1534

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Je profite de l'occasion pour accueillir M. Peter Woolford, vice-président principal des politiques du Conseil canadien du commerce de détail.

Je suis sûr que comparaître devant un comité permanent parlementaire n'a rien de nouveau pour vous. Comme vous le savez, vous disposez d'une demi-heure environ. Pendant ce laps de temps, vous devez nous dire tout ce que vous savez au sujet du projet de loi C-12, ainsi que nous proposer des façons de l'améliorer; nous passerons ensuite à la séance de questions et réponses au cours de laquelle les députés s'attarderont sur certains des points clefs que vous aurez soulevés au cours de votre exposé.

.1535

Je vous souhaite de nouveau la bienvenue et vous remercie.

M. Peter Woolford (vice-président principal des politiques, Conseil canadien du commerce de détail): Merci, monsieur le président. Je crois pouvoir m'en tenir facilement à moins d'une demi-heure et c'est avec plaisir que je vais vous dire tout ce que sais au sujet de l'assurance-chômage.

Je suis heureux de me trouver ici et de pouvoir présenter le point de vue de nos membres à votre comité. Tout d'abord, j'avais espéré me faire accompagner par un de mes membres. Malheureusement, compte tenu du court préavis que nous avons reçu pour produire cet exposé, cela n'a pas été possible, mais soyez assurés que ce n'est pas par manque d'intérêt.

Ceci étant dit, j'aimerais également souligner que le personnel de M. Fortin m'a beaucoup facilité les choses, puisqu'il a trouvé un moment qui cadre avec votre horaire et avec le mien. Je lui en suis très reconnaissant.

[Français]

Je regrette aussi que la soumission ne soit pas disponible en français. Nous n'avons pas eu assez de temps pour la traduire, mais j'essaierai de répondre à vos questions en français si c'est nécessaire.

[Traduction]

J'espère que cela vous aidera.

Notre association représente quelque 7 000 membres de chaque secteur du commerce de détail dans tout le Canada. Ces membres, gros et petits, représentent près de deux tiers de toutes les ventes de détail, ou peut-être un peu plus.

Je devrais souligner que le Conseil du commerce de détail donne parfois l'impression d'être un organisme regroupant de grandes sociétés. En fait, 90 p. 100 de nos membres sont des marchants indépendants qui possèdent leur propre magasin, ou plusieurs. Nous représentons donc la petite entreprise également.

Le Conseil canadien de la distribution alimentaire qui représente toutes les principales chaînes de distribution alimentaire au Canada est affilié à notre Conseil et partage aussi les points de vue énoncés dans l'exposé que nous vous présentons aujourd'hui.

J'aimerais faire quelques observations afin de mieux situer le programme d'assurance-chômage dans le contexte du commerce de détail. C'est une question importante pour nous. Les coûts salariaux comme l'AC, le Régime de pension du Canada, l'indemnisation des travailleurs, etc., sont très importants pour le commerce de détail, étant donné que nos activités sont à forte densité de main d'oeuvre. Les coûts salariaux représentent un coût variable fort important de nos affaires et c'est quelque chose que les détaillants doivent surveiller de très près.

La cotisation est une considération importante également, puisque le taux salarial est relativement modeste. Comme tout le monde le sait ici, les clients sont impitoyables et veulent en avoir pour leur argent. Ainsi, les salaires ont tendance à rester peu élevés. Un coût salarial comme l'AC est important autant pour les employeurs que pour les employés dans ce secteur d'activité.

Nous reconnaissons également que l'AC joue un rôle anticyclique important dans l'économie. Elle permet de soutenir les ventes en périodes de ralentissement économique.

Mon mémoire souligne plusieurs domaines sur lesquels nous nous sommes attardés. Le projet de loi est très étendu; j'ai essayé pour cet après-midi cependant de m'attarder sur deux ou trois points qui sont les plus préoccupants de notre point de vue.

J'aimerais souligner qu'en règle générale, notre organisation appuie les orientations que le gouvernement se propose de prendre. Nous sommes peut-être un peu déçus que le gouvernement n'aille pas aussi loin ou aussi rapidement que nous le souhaiterions, mais nous croyons que les changements successifs apportés à l'AC ces dernières années montrent bien que le gouvernement se rend compte qu'il a perdu la maîtrise du programme et qu'il doit serrer la bride de manière à le faire davantage cadrer avec les principes qui l'ont instauré. Nous sommes certainement en faveur d'un seuil-limite plus élevé, du plafonnement imposé aux gains maximums et de la tendance vers des mesures de soutien plus actives.

J'aimerais maintenant passer à quelques points particuliers, monsieur le président. Tout d'abord, la cotisation à partir du premier dollar. Je voudrais préciser qu'il s'agit d'un point auquel le Conseil du commerce de détail s'est opposé dès le début, surtout à cause de l'effet qu'il aurait sur ce secteur d'activité. Cela s'explique par le fait que nous employons beaucoup d'étudiants et d'employés à temps partiel.

Le premier point que j'aimerais souligner, c'est que les années 1990 ont été, jusqu'à présent, extrêmement difficiles pour ce secteur d'activité. Le commerce de détail n'a pas l'argent nécessaire pour supporter ce coût supplémentaire.

Tout ce qui correspond à un coût supplémentaire à l'égard des cotisations AC sera presque inévitablement déduit du budget des ressources humaines. Cela veut dire moins d'heures de travail, moins de postes et un salaire plus bas. Par conséquent, chaque dollar que vous enlevez au commerce de détail pour payer des cotisations AC sera retiré du salaire des employés qui, nous le reconnaissons en toute franchise, est modique.

Tout cela s'explique par des marges de profit et des marges générales de détail qui ont atteint leur niveau le plus bas, par la concurrence très forte dans notre industrie et par le fait que les marchands se sentent obligés d'offrir le meilleur prix à leurs clients.

.1540

J'aimerais vous donner quelques renseignements sur l'importance du travail à temps partiel, l'importance des employés à temps partiel qui travaillent moins de 15 heures par semaine, ainsi que l'importance des étudiants dans l'industrie. Ces données proviennent d'un travail que nous avons effectué sur plusieurs années pour diverses présentations traitant essentiellement des coûts salariaux; je ne m'appuie donc pas sur des statistiques solides, mais je crois que cela donne une image raisonnable des pratiques de l'industrie.

Environ 60 à 90 p. 100 des employés des magasins de détail sont aujourd'hui des employés à temps partiel et cette tendance semble s'accentuer. Cela reflète simplement la nécessité de contenir les coûts et de répondre aux habitudes de magasinage des Canadiens. Les Canadiens veulent magasiner, lorsque cela leur convient personnellement; le détaillant doit alors s'arranger pour avoir le personnel nécessaire à ces moments-là.

Nous avons également un nombre relativement important d'employés à temps partiel qui en fait, travaillent moins de 15 heures par semaine. L'éventail est vaste. D'après ce que nous ont indiqué nos membres, on retrouve aussi peu que 10 p. 100 d'employés travaillant moins de 15 heures dans certains magasins et jusqu'à 50 p. 100 dans d'autres. Cela dépend du magasin, des genres de produits vendus - du type de magasin. La plupart de nos membres semblent avoir de 20 à 35 p. 100 d'employés à temps partiel qui travaillent moins de 15 heures par semaine.

Il m'a été encore plus difficile d'obtenir des données sur le nombre d'étudiants qui travaillent dans le commerce de détail, parce que la plupart des détaillants se préoccupent peu de la situation scolaire de leurs employés. Nos données sont donc encore moins précises à ce sujet et l'éventail est encore assez large. On peut en retrouver de 5 à 10 p. 100 dans certains magasins et jusqu'à 40 p. 100 et plus dans d'autres, en fonction aussi du genre de magasin. La plupart de nos membres semblent indiquer que le pourcentage des étudiants qui occupent un emploi à temps partiel dans leur magasin représente de 15 à 20 p. 100 du nombre total de leurs employés.

Cela signifie donc que le versement de cotisations à partir du premier dollar du revenu a un effet très lourd sur le commerce de détail et nous ne croyons pas que les mesures palliatives proposées par le gouvernement soient suffisantes pour notre industrie. En fait, elles sont complètement inutiles. Elles ne permettent certainement pas de dédommager les étudiants ou les sociétés des pertes subies. Le montant est plafonné, mesure temporaire seulement, alors que les augmentations ne cesseront jamais.

De toute évidence, nous préférerions qu'il n'y ait pas de changement en matière de cotisations AC; toutefois, si le gouvernement croit devoir, malgré tout, apporter un tel changement, nous avons pensé à quelques moyens qui pourraient lui permettre de le faire. En premier lieu, il s'agirait de permettre aux particuliers de demander une exemption des cotisations AC, mesure qui, d'après nous, donnerait à beaucoup de nos membres - employés à temps partiel - l'occasion de se retirer. Pour beaucoup de ces personnes, il s'agit de la deuxième source de revenu familial ou encore d'un revenu qui leur est très important. Les chances de profiter un jour ou l'autre de ces cotisations sont très faibles, dans le cas des étudiants en particulier.

La deuxième option que nous proposerions au comité, s'il n'était pas prêt à modifier les propositions du gouvernement dans ce domaine, consisterait à accorder aux étudiants à plein temps une exemption générale en matière de cotisations et de couverture; à notre avis, ce serait la chose à faire. Les étudiants ne sont pas vraiment admissibles à la couverture d'assurance-chômage maintenant; cela permettrait également de prendre en compte les besoins particuliers des étudiants qui, je le répète, tiennent beaucoup plus à avoir de l'argent en poche pour défrayer le coût de leurs études qu'à envisager dans un avenir très lointain de profiter d'une protection sociale.

Enfin, nous croyons qu'il n'est pas bon que les étudiants interfinancent d'autres employés de la population active.

Permettez-moi de parler brièvement de l'excédent du compte AC. Nous avons appuyé la création d'un excédent du compte AC de manière que ce fonds ne devienne pas gravement déficitaire au cours d'une période de ralentissement; nous croyons par ailleurs qu'un excédent aux alentours de 5 à 6 milliards de dollars accorde une protection suffisante dans les cas de ralentissements cycliques. Cela permettrait la fluctuation du taux aux alentours de 25c. à 35c. au cours du cycle et nous pensons que cela permettrait de financer des programmes et de les appliquer de manière anticyclique.

Si le taux de cotisation est maintenu, le fonds atteindra rapidement son plafond - nous proposerions un plafond de 6 milliards de dollars peut-être - et l'excédent dépasserait ce plafond.

Nous recommandons fortement de plafonner l'excédent à 6 milliards de dollars; ensuite, nous recommandons au comité de proposer au ministre une réduction des cotisations pour 1997 de l'ordre de 60c. à 70c., suivant les calculs.

.1545

J'ai été heureux d'entendre le ministre déclarer hier qu'il est en faveur d'une réduction draconienne des cotisations AC. Il me semble que lorsque l'on atteint les 6 milliards de dollars, ce comité devrait en fait demander au gouvernement de donner suite à cette promesse du ministre.

Enfin, permettez-moi de parler très brièvement de la question de la discontinuité de l'emploi que M. Young a soulevée, je crois, devant ce comité, lorsqu'il a présenté ce projet de loi. Il s'inquiétait du nouveau mode de calcul qui risque de diminuer les gains des particuliers en cas de versement d'une prestation.

Nous sommes conscients de ces préoccupations qui découlent, de toute évidence, du fait que le gouvernement a choisi de modifier la base de calcul des cotisations; le problème serait résolu si le gouvernement ne modifiait pas ce mode de calcul des cotisations. Là encore, si le gouvernement doit aller de l'avant, nous devons vous avertir que cela sera très pénible pour les sociétés.

Si l'on a encouragé les entreprises à appuyer le mode de calcul des heures, c'est, entre autres, parce que cela devait faciliter leur travail administratif. Nous nous inquiétons, surtout dans le commerce de détail, du fait que si nous devons comptabiliser les heures et les semaines de travail, tous les avantages administratifs que garantissait le calcul des heures seront perdus.

Il est important que le comité comprenne le fonctionnement d'un commerce de détail. Le concept de bassin d'employés dans le commerce de détail est fort différent du concept d'un groupe d'employés dont vous disposez dans la plupart des autres situations d'emploi.

Beaucoup d'employés du commerce de détail ne travaillent pas de manière régulière; ils ont par ailleurs le droit de refuser du travail sans que cela ne porte à conséquence. Le résultat de tout ceci, c'est que la société et les employés disposent de beaucoup de souplesse et peuvent se permettre de faire cadrer les heures de travail avec les besoins de la société et ceux de l'employé.

Les employés s'échangent leurs postes. Des étudiants peuvent dire à l'employeur qu'ils ont des examens et qu'ils ne veulent pas travailler pendant un mois. En ayant accès à un bassin beaucoup plus vaste d'employés qui sont prêts à travailler, l'employeur peut continuer à fonctionner grâce à cette souplesse; par contre, essayer de comptabiliser tous ces mouvements dans le cas des employés à temps partiel devient très pénible. Dans le cas des petits détaillants indépendants en particulier, ce serait un très lourd fardeau.

À notre avis, si un plan du genre est adopté, les détaillants ne manqueront pas d'y réagir rationnellement. Ils diminueront le nombre de leurs employés et limiteront la souplesse dont jouissent ceux-ci. Rien de tout cela ne sera à l'avantage de l'employeur ou de l'employé, mais nous croyons que tels seraient les résultats assez naturels des mesures prises par le gouvernement dans ce domaine, si elles se traduisent par un lourd fardeau administratif.

Monsieur le président, ainsi se termine mon introduction. Je me ferais un plaisir de répondre à toute question que vous voudrez bien poser.

Le président: Merci, monsieur Woolford.

Nous allons accorder cinq minutes par personne et nous commençons par M. Dubé.

[Français]

M. Dubé (Lévis): Merci de votre exposé. D'entrée de jeu, vous affirmez que vous êtes plutôt favorable à la réforme du gouvernement. Pourtant, au fur et à mesure que je vous écoutais, je voyais que vous aviez plusieurs réserves et même des objections assez importantes, notamment en ce qui concerne les étudiants. Vous dites entre autres être plutôt favorable au statu quo, soit que ceux qui travaillent moins de 15 heures par semaine n'aient pas à cotiser.

Le deuxième élément sur lequel vous avez beaucoup insisté est le nombre de personnes qui, dans votre secteur, travaillent à temps partiel. Même si vous n'avez pas, comme vous l'avez précisé, toutes les données portant sur les étudiants notamment, vous avez des préoccupations.

Beaucoup d'intervenants nous ont dit, jusqu'à maintenant, que le fait de pouvoir cotiser dès la première heure de gain, contrairement à 15 heures et plus comme c'est actuellement le cas, donnerait accès à l'assurance-chômage à plusieurs personnes.

.1550

Cependant, quand on calcule bien... Vous avez clairement dit que 10 p. 100 des membres de votre association travaillent moins de 15 heures. Je voudrais vous donner l'occasion de vous expliquer sur ce point. Comment pouvez-vous déclarer que vous êtes favorable à cette position du gouvernement quand vous constatez que les gens qui sont à temps partiel, particulièrement les étudiants qui travaillent moins de 15 heures, n'auront jamais la chance d'en bénéficier?

C'est majeur! Ce n'est pas rien.

M. Woolford: Oui, c'est bien ça, et c'est pourquoi je l'ai indiqué.

J'ai fait remarquer, au début, que nous étions d'accord sur la proposition concernant la hausse du seuil d'entrée pour avoir droit aux avantages du programme.

Nous préférons les propositions sur les maximum insurable earnings et aussi quelques-unes des grandes lignes qui rendent plus efficaces les mesures d'aide contenues dans le programme.

Les grandes lignes vont dans la bonne direction. Cependant, selon nous, la proposition nous cause un grand problème par rapport aux étudiants et à ceux qui travaillent à temps partiel. En effet, ce problème se pose non seulement à 10 p. 100 de nos membres, mais à la majeure partie d'entre eux.

Comme je vous l'ai dit, nos membres vivent une grande variété de situations. Il y en a quelques-uns qui expérimentent... Certains ont seulement quelques employés à temps partiel qui font moins de 15 heures par semaine. Quelques autres ont environ 40 p. 100 d'employés qui font moins de 15 heures par semaines.

Il y a quelques entreprises, dans le secteur du détail, à qui la proposition fait craindre de grands problèmes en rapport avec les travailleurs à temps partiel et les étudiants. C'est la question qui nous préoccupe le plus. C'est celle qui est très importante pour nous.

M. Dubé: C'est le point le plus important.

[Traduction]

M. McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): J'aimerais vous remercier de tout coeur pour cet exposé. Je tiens à vous dire que d'après mon expérience personnelle de quelque 30 ans dans le commerce de détail, je crois que tout ce que vous avez dit est absolument vrai, surtout ce que vous avez dit au sujet des coûts salariaux qui ont un effet sur l'emploi.

M. Woolford: Je suis heureux de l'entendre.

M. McClelland: L'augmentation des coûts salariaux entraîne la diminution de l'emploi.

En ce qui concerne ce projet de loi particulier, je crois également qu'il permet de s'engager sur la bonne voie, puisqu'il se rapproche davantage du rapport de la Commission Forget et souligne le concept d'assurance. Il faudrait examiner l'aide au revenu sous un angle différent et ne pas se servir de l'assurance-chômage comme d'un principe de sociologie appliquée, etc. Pour rendre ce projet de loi efficace et pour l'améliorer, il ne faut pas oublier que beaucoup de personnes travaillent à temps partiel, parce qu'elles le souhaitent. Ce n'est pas le cas de tout le monde, mais beaucoup de personnes le font pour jouir d'une certaine qualité de vie.

Faudrait-il travailler un minimum d'heures avant de cotiser à l'assurance-chômage et cela permettrait-il d'améliorer ce projet de loi? Si la moyenne s'élève à 15 heures par semaine, ce qui, à mon avis est un chiffre assez exact, on arrive à 780 heures pour une année de 52 semaines. Un employé n'aurait pas à cotiser à l'assurance-chômage tant qu'il n'aurait pas atteint ce seuil de780 heures.

Ce serait un revenu net, surtout pour les étudiants, dans les cas d'emplois d'été en particulier. Cela permettrait également d'éliminer la nécessité de rembourser les cotisations du gouvernement. Cela serait beaucoup plus efficace et causerait beaucoup moins de problèmes. Seriez-vous d'accord avec ce genre de recommandation?

M. Woolford: Certainement, c'est une option qui nous conviendrait également. En Saskatchewan, au niveau provincial, je crois que plusieurs programmes visant les employés à temps partiel ne se mettent pas en train avant le seuil de 700 ou 780 heures. Cela permet de reconnaître que beaucoup de personnes participent de façon très marginale au marché du travail. Nous serions donc certainement en faveur d'une telle mesure.

M. McClelland: Nous devons poursuivre. Je ne savais pas qu'en Saskatchewan le seuil était fixé à 700 heures.

M. Woolford: Je ne me souviens pas du chiffre exact. Nous avons travaillé là dessus il y a déjà plusieurs années.

.1555

M. McClelland: Si l'on prévoyait un seuil commun pour tout le pays, cela serait certainement avantageux. Le concept de seuil est donc pertinent et nous devrions essayer de... je ne veux pas utiliser le mot «harmoniser», mais si c'est possible...

M. Woolford: En ce qui nous concerne, ce mot convient parfaitement.

Le président: C'est un mot à forte connotation politique.

J'imagine que c'était une observation faite en passant.

M. McClelland: Non, j'ai terminé.

M. Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur Woolford, j'ai du mal à comprendre le Conseil du commerce de détail, ainsi qu'un autre groupe qui nous a présenté les mêmes points de vue. Ces 20 dernières années, le commerce de détail s'est attaché, de toute évidence, à transformer beaucoup de ses emplois à plein temps en emplois à temps partiel. Je ne parle pas ici des petits commerces de détail, mais de Eaton, de La Baie, et d'autres grands détaillants du même ordre. Je peux comprendre qu'ils puissent le faire pour des raisons de saine gestion commerciale, mais je ne peux pas comprendre pourquoi ils s'opposeraient à un système prévu pour tous ceux qui travaillent moins de 15 heures par semaine et permettant à ces employés à temps partiel de payer leur loyer et leur nourriture, si jamais ils se retrouvaient au chômage.

Vous admettez vous-même que l'on tend de plus en plus - et je dirais que c'est délibérément - à préférer des employés à temps partiel. Comment le Conseil du commerce de détail s'attend-il à ce que ces gens-là survivent, lorsqu'ils perdent leur emploi? Proposez-vous que l'on ouvre davantage de soupes populaires ou que l'on injecte plus d'argent dans le système d'aide sociale? Comment ces gens-là vont-ils survivre? Je ne le comprends tout simplement pas.

Je peux comprendre que vous essayez d'obtenir la meilleure marge de profit possible et que par conséquent, vous privilégiez les employés à temps partiel. En tant que gouvernement toutefois, nous devons prendre soin de ces gens, prendre des mesures pour les aider et inclure ceux qui travaillent moins de 15 heures par semaine - bon nombre d'entre eux ayant deux ou trois emplois, s'ils peuvent les trouver... Que va-t-il arriver à ces gens si nous n'essayons pas de prendre soin d'eux? Quelle solution proposez-vous?

M. Woolford: Je décèle quelques erreurs dans votre question.

Premièrement, vous remarquerez que notre première proposition vise à permettre au particulier lui-même de décider s'il souhaite être couvert ou non. C'est donc au particulier, et à lui seul, de faire ce choix. S'il souhaite être couvert par l'assurance-chômage, il va tout simplement l'être, qu'il travaille une heure ou 40 heures par semaine.

S'il travaille moins de 15 heures par semaine et que l'argent qu'il gagne compte beaucoup pour lui - s'il est la 2e source de revenu familial ou s'il fait ce travail alors qu'il est à la retraite et qu'il souhaite un peu plus d'argent liquide - beaucoup de ces gens-là ne sont pas intéressés à être couverts par l'assurance-chômage. Vous leur donnez en fait l'option de maximiser leurs gains.

Deuxièmement, nous proposons d'adopter cette façon de procéder pour les étudiants à plein temps. Les étudiants à plein temps sont en fait non admissibles à la couverture AC, de toute façon.

M. Allmand: Vous voulez dire, dans les cas où ils ne sont pas disponibles pour travailler.

M. Woolford: Ils ne sont pas disponibles pour travailler. Vous leur demandez de verser de l'argent, dont ils ont besoin pour leurs études, pour en réalité subventionner d'autres membres de la population active. À notre avis, cela n'est pas acceptable.

Les deux options que nous vous avons présentées ne cadrent donc pas avec ce vous essayez de dire.

Nous pensons que de cette manière, vous donnez au particulier la possibilité de décider si l'assurance-chômage lui est utile, s'il arrive en deçà de ce seuil de 780 heures par exemple.

Dans le second cas, pourquoi les étudiants qui, dans la plupart des cas, ne sont même pas admissibles, devraient-ils verser cet argent?

M. Allmand: Permettez-moi d'intervenir.

Au sujet des personnes qui pourraient prendre une décision, je peux entrevoir ce qui se produirait. Si quelqu'un se présente pour un travail et qu'on lui indique qu'il peut choisir de participer au système d'assurance-chômage ou non, c'est celui qui décide de ne pas y participer qui a le plus de chance d'obtenir l'emploi.

Ce qui me gêne à ce sujet, c'est que la plupart de ceux qui ont absolument besoin de l'emploi diront: «Je l'accepte, même si je ne suis pas couvert»; lorsqu'ils sont licenciés, ils se retrouvent dans le système d'aide sociale ou finissent dans les soupes populaires.

Nous ne sommes pas un pays qui laisse les gens mourir de faim dans la rue. Nous devons faire quelque chose à leur sujet.

La question des étudiants est différente; dans ma circonscription toutefois, je rencontre souvent des gens qui ont travaillé pour certains de ces grands détaillants pendant des années; presque toute cette main-d'oeuvre se compose d'employés à temps partiel; lorsqu'ils sont licenciés, ils se retrouvent sans rien.

.1600

Effectivement, un certain pourcentage de ces personnes souhaite travailler à temps partiel; je n'ai pas de problème à ce sujet, mais sûrement... Comme je le dis, je peux comprendre que les entreprises veulent réaliser un profit. Tel est leur rôle. Notre rôle par contre, c'est de faire en sorte que ces gens ne se retrouvent pas sans...

Soit dit en passant, d'après les chiffres qui nous ont été donnés, en 1990, 87 p. 100 des chômeurs étaient couverts par l'assurance-chômage. Aujourd'hui, seulement 46 p. 100 des chômeurs sont couverts. Cela veut dire que dans leur grande majorité, les chômeurs n'ont rien d'autre que l'aide sociale et les oeuvres de bienfaisance privées. L'écart entre les riches et les pauvres de notre pays se creuse de plus en plus, la criminalité augmente et l'alcoolisme, ainsi que toutes sortes de problèmes psychiatriques surgissent, car ces gens ne peuvent aller nulle part.

Je vais terminer par ces observations. Je me souviens des licenciements en masse survenus à Sudbury il y a quelques années à cause de l'effondrement du cours du nickel. Le système d'assurance-chômage a permis à Sudbury de survivre, car les gens disposaient au moins d'argent pour acheter leur épicerie, payer leur logement, acheter des vêtements de base, etc. L'argent a continué de circuler dans le secteur du détail si bien que - contrairement aux années 1930 - les commerces n'ont pas fait faillite. Il me semble qu'un bon système d'assurance-chômage sert les meilleurs intérêts du commerce, puisque pendant des périodes de ralentissement économique, les gens disposent d'un minimum d'argent pour faire leurs achats.

M. Woolford: Si vous vous en souvenez, nous en tenons compte dans notre exposé.

J'ai plusieurs choses à dire. D'après nos membres, un pourcentage assez important des employés à temps partiel souhaitent travailler à temps partiel.

M. Allmand: D'accord. Je n'ai pas de problème à cet égard.

M. Woolford: Deuxièmement, le salaire de beaucoup d'entre eux représente la 2e source de revenu familial; en d'autres termes, il s'agit de l'un des deux conjoints d'un ménage.

Troisièmement, un grand nombre de personnes à la retraite ont un 2e revenu de retraite et travaillent à temps partiel pour s'occuper. Le nombre de personnes qui sont en fait obligées de travailler à temps partiel ne correspond certainement pas à la majorité des employés.

Par ailleurs, je vais revenir au fait que l'on puisse permettre aux particuliers de choisir.

N'oublions pas non plus que nous parlons de gens qui dans ce cas précis travaillent moins de15 heures par semaine. Déjà, leur participation au marché du travail est marginale. La plupart des employés à temps partiel travaillent de 15 à 24 heures par semaine. Ces gens-là seraient automatiquement couverts et ce sont eux qui, dans de nombreux cas, souhaitent être couverts par l'assurance-chômage, puisque le salaire qu'ils gagnent représente une part importante du revenu familial.

La participation au marché du travail de ceux qui travaillent moins de 15 heures par semaine est très marginale. Compte tenu de la réalité démographique de ce groupe, nous avons essayé de minimiser le fardeau de ce programme dans le cas de ces employés et de leurs employeurs, reconnaissant que beaucoup d'entre eux n'en ont pas besoin ou n'en veulent pas. Nous pensons qu'ils devraient, à tout le moins, pouvoir faire un tel choix.

Le président: Merci, monsieur Woolford. Ainsi se termine votre exposé. Au nom du comité, j'aimerais vous remercier. Vous avez soulevé certains points intéressants relatifs à l'exemption. Nous allons bien entendu évaluer vos propositions selon leurs mérites.

J'aimerais également remercier les membres de votre organisation qui ont participé à la rédaction de ce mémoire. Merci.

M. Woolford: Merci.

Le président: Le Conseil des Canadiens avec déficiences est notre prochain témoin. M. Laurie Beachell, coordonnateur national, en est le porte-parole.

Monsieur Beachell, la situation n'est pas nouvelle pour vous. Je me souviens vous avoir vu comparaître devant le Comité des droits de la personne et condition des personnes handicapées.Je vous ai vu dans d'autres endroits. Je ne pense pas qu'il me soit nécessaire de vous expliquer le processus. Nous disposons de 25 à 30 minutes environ, cela comprenant le temps prévu pour votre exposé.

Nous vous souhaitons la bienvenue et sommes prêts à écouter votre intervention.

M. Laurie Beachell (coordonnateur national, Conseil des Canadiens avec déficiences): Merci beaucoup.

Notre présidente, Mme Francine Arsenault, souhaitait être parmi nous aujourd'hui. Malheureusement, pour de raisons de maladie dans sa famille, elle n'a pas pu venir. Elle regrette de ne pouvoir être ici et moi aussi d'ailleurs.

En tant qu'organisme cadre national, nous représentons les personnes handicapées. Des organismes provinciaux, ainsi que six autres organes nationaux sont membres du CCD. Ainsi, l'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire, le Réseau des femmes handicapées du Canada, le Comité national de santé mentale, l'Association des sourds du Canada, les Thalidomide Victims of Canada et Les personnes d'abord du Canada.

.1605

Notre organisme souhaite aujourd'hui vous transmettre deux messages fort simples. Les Canadiens handicapés veulent des emplois et veulent les conserver. Vraiment, ce qui nous préoccupe dans cette mesure législative, c'est que les personnes handicapées n'obtiennent pas d'emploi et ne les gardent pas; telle est la réalité de la vie des personnes handicapées aujourd'hui. Celles qui réussissent à entrer sur le marché du travail n'ont pas la sécurité d'emploi et perdent souvent leur travail au bout d'un très court laps de temps.

Cette mesure législative qui prévoit des prestations en fonction d'une participation importante au marché du travail, ne règle pas vraiment le problème de nos membres. En d'autres termes, si nous continuons à utiliser les fonds AC pour financer et appuyer les initiatives de formation dans ce pays et si, au ministère du Développement des ressources humaines, le Trésor semble diminuer de manière constante, nos membres se retrouveront effectivement exclus de la formation de la main-d'oeuvre dans notre pays.

Nous ne pouvons pas avoir la formation voulue pour obtenir des emplois. La raison en est simple: nous ne sommes pas admissibles à l'AC. Cette mesure législative, en plus d'offrir quelques avantages aux employés à temps partiel, etc., doit prendre en compte les prestations prévues pour la formation des personnes handicapées; malgré l'élargissement de la définition par rapport à la loi précédente, cette mesure législative ne règle pas vraiment le problème de nos membres, dont la plupart sont au chômage depuis plus longtemps - cinq ans ou davantage - dont beaucoup n'ont jamais participé au marché du travail et dont la plupart dépendent de l'aide sociale.

Si aucun mécanisme n'est prévu pour exempter les personnes handicapées de ces critères d'admissibilité à la formation, nous ne pensons pas que la participation des personnes handicapées au marché du travail augmentera.

Deuxièmement, la situation de ceux qui sont sur le marché du travail nous préoccupe. Le taux de cessation d'emploi de ces postes est extrêmement élevé. Les personnes handicapées qui ont été en mesure de trouver un emploi ne trouvent que des emplois à temps partiel, et ce n'est pas nécessairement par choix, ou des emplois d'une durée déterminée; de nouveau, ce n'est pas par choix; elles ne peuvent donc pas rester sur le marché du travail très longtemps.

À notre avis, ce n'est que dans le cadre d'un examen systématique obligatoire de la cessation d'emploi des personnes handicapées que des améliorations pourront être apportées à cette loi. Deuxièmement, nous croyons que ce n'est que si les ressources sont affectées précisément à la formation et aux besoins des personnes handicapées en matière d'emploi que des améliorations seront apportées. Pour l'instant, nos membres sont complètement découragés face aux changements draconiens en matière de politique sociale, ainsi que dans le domaine de la responsabilité du gouvernement fédéral à l'égard des personnes handicapées.

Pour l'instant, la plupart des initiatives semblent indiquer qu'il faudra trouver des moyens d'accès aux programmes provinciaux et en demander l'harmonisation dans tout le pays.

Voici donc ce que nous souhaitons: premièrement, une exemption des critères de manière que les personnes handicapées puissent avoir accès à la formation; deuxièmement, un mécanisme permettant d'examiner le taux inadmissible des renvois dont les personnes handicapées font l'objet; troisièmement, l'affectation de ressources pour répondre aux besoins de formation des personnes handicapées.

.1610

J'aimerais également clarifier un point. Vous remarquerez dans notre mémoire que nos chiffres sont peut-être confus. Ce mémoire a été rédigé au moment où le projet de loi a été présenté lors de la dernière session; nous comparaissons de nouveau aujourd'hui. Je sais qu'il s'agit du projet de loi C-12, mais je ne crois pas non plus que cette loi soit différente; c'est la même. Le gouvernement prévoit-il des amendements? Quand peut-on s'y attendre? Pourrons-nous comparaître une deuxième fois pour examiner ces amendements? Quel est le processus prévu à partir de maintenant?

Le président: Merci beaucoup.

Je pense que vous avez souligné trois grands problèmes. En ce qui concerne la question du processus, les députés envoient des amendements. En fait, nous en examinons trois ou quatre que certains députés nous ont déjà transmis. C'est un processus continu.

Y aura-t-il une deuxième série de consultations après celle-ci? Nous allons renvoyer le projet de loi à la Chambre et c'est là qu'il sera débattu. Des amendements peuvent être apportés. Comme pour toute mesure législative toutefois, c'est un processus qui évolue constamment. Cela fait partie intégrante du processus démocratique. Je crois donc que vous ne devriez pas perdre espoir.

Nous allons passer aux questions; chaque personne dispose de cinq minutes et nous allons commencer par M. Dubé, ensuite ce sera le tour de M. McClelland et enfin, de M. Easter.

[Français]

M. Dubé: Merci beaucoup, monsieur Beachell, de votre présentation. Vous regroupez des personnes qui ont besoin plus que n'importe qui d'autre d'aide pour intégrer le marché du travail - vous l'avez bien dit - et pour s'y maintenir. Nous ne vous serons jamais assez reconnaissants de ce travail que vous effectuez en faveur des personnes handicapées.

Plus le marché du travail se restreint, plus les difficultés que vous décrivez s'aggravent. Malheureusement, dans le projet de loi, comme un autre groupe le déplorait également, il y a peu sinon pas de mesures concrètes pour améliorer la situation. Pourtant, vos membres, lors de la préconsultation et lors de la tournée qu'on a faite à travers le pays dans chacune des provinces, avaient présenté le même genre de point de vue que le vôtre. On constate que peu de choses se retrouvent dans le projet de loi. Nous, de l'Opposition officielle, avons de la difficulté à nous engager dans le processus d'amendement parce qu'il y en aurait tellement de choses à changer que...

Dans votre cas, vous signalez plutôt les omissions. J'aimerais que vous les rappeliez. Vous avez apporté des recommandations et vous dites qu'en ce qui concerne l'admissibilité, ça ne va pas.

Est-ce que je me trompe en disant que les handicapés auraient besoin de mesures palliatives concrètes? On pourrait, par exemple, leur fournir de l'équipement, des accessoires, etc. Il y a toute une série de handicaps pour lesquels on devrait prévoir quelque chose quelque part. Si on ne le fait pas...

Il faudrait que la loi comporte une partie III. On a parlé de la partie I et de la partie II sur les services d'emploi. Étant donné cette carence, même si on proposait des amendements, j'ai l'impression qu'on n'améliorerait pas l'accès au travail pour les personnes handicapés. Êtes-vous d'accord avec moi qu'il ne s'agit pas seulement de proposer des amendements?

[Traduction]

M. Beachell: Je dois dire que ce projet de loi ne répond pas aux besoins des personnes handicapées. En fait, ce projet de loi établit un système dans lequel, si vous êtes sur le marché du travail, vous pouvez obtenir de la formation et obtenir également des prestations au cas où votre participation au marché du travail serait de courte durée. Par contre, les personnes handicapées n'y ont pas accès si on ne les exempte pas des critères relatifs à la participation au marché du travail pendant x semaines ou heures de travail, etc. Ces personnes handicapées ne peuvent avoir accès à un programme de formation. Des programmes sont abolis dans tout le pays, car ces personnes ne reçoivent pas d'assurance-chômage; à l'heure actuelle, nous n'avons pas d'autres recours, puisque le Trésor continue de diminuer. Il en résulte que les personnes handicapées sont inemployables et dépendent de l'aide sociale. Vous avez donc parfaitement raison, ce projet de loi ne répond pas aux besoins des personnes handicapées.

.1615

[Français]

M. Dubé: Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur McClelland.

M. McClelland: Je peux comprendre votre frustration, car nous nous sommes déjà rencontrés dans divers comités et c'est toujours la même chose. Dans ce cas particulier, il est malheureusement évident qu'il n'y a pas moyen de s'en sortir. J'aimerais être clair; si vous le pouviez et si vous souhaitiez ne changer qu'un seul élément de ce projet de loi, ce serait celui relatif à la participation obligatoire au marché du travail avant d'être admissible à la formation. Pour vous, c'est le problème numéro un.

M. Beachell: Effectivement.

M. McClelland: C'est donc parfaitement clair.

Il me semble - et peut-être voudriez-vous me donner votre avis à cet égard, car nous essayons en fait d'améliorer ce projet de loi - qu'en utilisant le fonds de l'assurance-chômage pour la formation de la main-d'oeuvre, nous demandons en fait aux personnes qui sont employées de financer des programmes éventuels de formation pour elles-mêmes, au cas où elles auraient besoin de formation dans l'avenir, tout en empêchant ceux qui n'ont jamais été sur le marché du travail, mais qui souhaitent y entrer, d'avoir accès à la formation. Ne vaudrait-il pas mieux diminuer les cotisations d'assurance-chômage pour prendre en compte le coût de la formation de la main-d'oeuvre et ne plus financer cette formation à partir de l'enveloppe AC, étant donné que la formation de la main-d'oeuvre relève de la compétence provinciale et devrait donc être financée par les provinces? Si les provinces décident d'assumer cette responsabilité, elles devraient également accepter de financer la formation. Les cotisations, qui, dans le système de l'assurance-chômage font disparaître les emplois, devraient par conséquent diminuer. Seriez-vous d'accord avec un tel programme?

M. Beachell: Je ne sais pas si je peux me prononcer. En tant qu'organisme recherchant l'égalité d'accès, nous ne souhaitons certainement pas amoindrir les droits, les possibilités ou l'accès de qui que ce soit. Cela nous est égal que des employés et des employeurs constituent un fonds en vue d'avoir accès à de futurs programmes de formation. Par contre, nous disons que ce projet de loi ne répond absolument pas aux besoins des personnes handicapées et qu'il faut trouver des moyens de le faire. Si cela veut dire que l'on affecte des ressources du Trésor à la formation des personnes handicapées, cela nous convient. Si cela signifie que l'on abaisse les critères d'admissibilité prévus dans le système AC...

Franchement, notre organisme a déjà beaucoup à faire. Notre rôle ne consiste pas à cerner les entraves à la création d'emplois ou encore à déterminer si les prestations devraient être plus élevées ou moins élevées. Ce n'est pas notre rôle. Si les employeurs et les employés souhaitent utiliser ces fonds pour combler leurs futurs besoins en formation, tant mieux. Mais cela ne répond pas aux besoins de notre clientèle.

M. McClelland: Si j'ai bien compris, le régime, dans sa forme actuelle, peut pénaliser les personnes qui ne font pas déjà partie de la population active, les handicapés représentant un pourcentage démesuré de ce groupe.

M. Beachell: C'est exact.

M. McClelland: Donc, ce projet de loi, s'il est adopté, ne fera que compliquer la tâche de ceux qui ont déjà du mal à se trouver un emploi.

M. Beachell: C'est exact.

M. McClelland: Merci beaucoup.

Le président: Monsieur Easter.

.1620

M. Easter (Malpèque): Ma question porte essentiellement sur le point qu'a soulevé Ian - c'est-à-dire les prestations prévues pour les personnes handicapées. En vertu de ce projet de loi, est-ce que la disposition qui prévoit qu'une personne doit avoir participé au marché du travail au cours des trois dernières années englobe des personnes qui, autrement, auraient été exclues?

Ensuite, est-ce que votre recommandation numéro 4 peut servir de critère pour l'établissement de partenariats entre le gouvernement fédéral et les provinces?

M. Beachell: Cette recommandation pourrait certainement servir de critère pour affecter des ressources à la formation des personnes handicapées. Mais cela n'a jamais été le cas. En fait, les programmes offerts au niveau local semblent surtout s'adresser aux chômeurs. Si vous voulez suivre un cours de formation à l'échelle locale, il est préférable que vous soyez au chômage.

Le fait de prévoir une période de trois ans permet sans aucun doute d'englober d'autres catégories de personnes. En fait, cette mesure englobe les nombreuses personnes qui ont été mises à pied récemment. Ceux qui ont été embauchés en dernier et mis à pied en premier seront également admissibles. Toutefois, cette mesure exclut les nombreuses personnes handicapées qui sont sans travail depuis trois ans, surtout les personnes qui présentent une déficience intellectuelle. De nombreuses personnes handicapées ont cessé depuis longtemps de chercher un emploi parce qu'elles doivent se déclarer inaptes au travail pour avoir droit à certains avantages sociaux ou prestations.Or, elles ne veulent pas vivre dans ce monde. Elles veulent faire partie de la population active.

Les systèmes ne sont pas intégrés. À l'heure actuelle, il n'y a pas de ressources qui sont affectées de manière précise aux besoins en formation des personnes handicapées, que ce soit au sein du DRH ou des gouvernements provinciaux. Si le gouvernement fédéral et les provinces pouvaient conclure une entente et affecter des ressources - soit 15 p. 100 - , à ce groupe, ce serait merveilleux.

M. Easter: Ce serait un pas dans la bonne voie, n'est-ce pas?

M. Beachell: Absolument, mais ce n'est pas ce qui est en train de se produire.

Les programmes de formation qui ont été mis en place il y a de nombreuses années pour venir en aide aux personnes handicapées sont en train de disparaître.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Easter.

Monsieur Beachell, merci beaucoup pour votre exposé. Nous avons pris en note certains points que vous avez soulevés et nous en tiendrons compte au moment d'apporter des changements au projet de loi.

M. Beachell: Merci.

Le président: Nos prochains témoins représentent l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université. Il s'agit de Robert Léger, Donald C. Savage et Rosalind Riseborough.

Je vous souhaite la bienvenue. Il nous tarde de connaître vos vues sur le projet de loi C-12.Je suis sûr que ce décor vous est familier. Vous êtes sans doute déjà venus ici. Vous disposez d'une demi-heure pour votre intervention. Nous aimerions entendre votre exposé et ensuite vous poser des questions.

M. Donald C. Savage (directeur exécutif, Association canadienne des professeures et professeurs d'université): Nous souhaitons remercier le comité de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant lui.

Nous nous penchons, dans notre mémoire, sur deux questions précises, non pas sur l'ensemble du projet de loi. La première est l'impact que les changements proposés auront sur les professeurs à temps partiel. Cette partie du mémoire traite exclusivement des professeurs d'université, mais elle peut s'appliquer aux collèges communautaires. Comme il n'y a pas de statistiques nationales sur les collègues communautaires, il est difficile pour nous d'être précis.

La deuxième partie du mémoire porte sur l'impact des changements proposés sur les programmes de formation offerts par les collèges communautaires. Je tiens à préciser que nous représentons environ 28 000 professeurs d'université de toutes les régions du Canada, et 5 000 professeurs de collèges communautaires de la Colombie-Britannique.

.1625

Comme nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour préparer ce mémoire - en fait, ce matin encore, des institutions des diverses régions du pays nous faisaient part de leur appui - , nous n'avons pu le faire traduire. Toutefois, notre exposé ce matin sera présenté dans les deux langues. La première partie de l'exposé sera donnée par M. Léger, qui vous parlera de l'impact qu'auront les modifications à l'assurance-chômage sur les professeurs à temps partiel.

[Français]

M. Robert Léger (agent, Relations gouvernementales, Association canadienne des professeures et professeurs d'université): J'aimerais brièvement parler de la situation des professeurs à temps partiel ou des chargés des cours partout au Canada.

Tout d'abord, il y a un grand nombre de professeurs à temps partiel ou de chargés de cours. Ils étaient près de 28 000 en 1992-1993, et j'ajouterais que leur nombre n'a probablement pas diminué depuis ce temps-là. J'ai plutôt l'impression qu'il a augmenté.

Leur salaire n'est pas très élevé. D'après Statistique Canada, en 1992-1993, la moyenne des salaires des professeurs à temps partiel était de 5 746$ par année. Malheureusement, les données de Statistique Canada ne nous permettent pas de distinguer entre les professionnels, par exemple un avocat qui donne un cours ou deux par année, et les vrais chargés de cours, ceux qui ne font pas autre chose qu'enseigner. On sait que ces derniers, ceux qui ne font qu'enseigner, sont très nombreux et que beaucoup d'entre eux sont des femmes.

Les changements à la Loi sur l'assurance-chômage - maintenant l'assurance-emploi - vont affecter ces personnes-là. Le fait que l'admissibilité aux prestations de revenu soit maintenant fondée sur le nombre d'heures travaillées plutôt que sur les semaines travaillées va affecter les chargés de cours ou professeurs à temps partiel. En effet, beaucoup d'entre eux font beaucoup moins que 35 heures de travail par semaine, et vous savez tous que ce nombre d'heures est à la base de ce nouveau texte législatif.

Nous avons un problème particulier qui est probablement propre aux universités. C'est que la façon dont on va comptabiliser les heures travaillées dans les universités n'est pas du tout claire.

En effet, le travail d'un professeur ne consiste pas seulement à donner un, deux ou trois cours. Il consiste aussi à préparer ces mêmes cours, à corriger les examens et à rencontrer les étudiants. On sait aussi que quelques chargés de cours font de la recherche. Il n'y en a pas beaucoup, mais il y en a. Donc, on doit tenir compte de tous ces aspects dans le calcul des heures travaillées. Nous demandons au comité de se pencher sur cette question précise.

Les nouveaux professeurs à temps partiel, ceux qui commencent, vont aussi être affectés par la limite de 910 heures qui est requise pour avoir droit aux prestations. Il en sera de même pour les femmes chargées de cours qui reviennent au travail après une grossesse, par exemple. Nous croyons donc que cette limite de 910 heures va avoir des conséquences néfastes pour beaucoup de nos membres.

Je vous remercie.

.1630

[Traduction]

M. Savage: La deuxième partie de notre exposé traite de l'impact du projet de loi sur les collèges communautaires au Canada.

Vous savez qu'une des plus grandes réalisations accomplies par le Canada depuis la deuxième Guerre mondiale a été la création d'un important système de collèges communautaires qui avait pour but d'offrir aux Canadiens des programmes de formation technique et professionnelle, ainsi que des programmes de passage à l'université dans certaines provinces, à un coût raisonnable. En effet, les collèges communautaires constituent, depuis une trentaine d'années, un des principaux moyens de favoriser la mobilité au Canada. Il est donc important d'analyser les effets sur la formation des changements apportés à l'assurance-chômage.

On a parlé de l'impact potentiel des changements. J'utilise le mot «potentiel» parce que nous ne savons pas encore ce qui aboutira des négociations entre le gouvernement fédéral et les provinces. J'ai discuté de cette question avec le député de Peterborough, qui compte un collège communautaire dans sa circonscription, et il disait craindre qu'un tiers des cours offerts par le collège communautaire ne soit touché par les changements. Nous avons donc des préoccupations.

Nous savons que le gouvernement fédéral souhaite transférer ce secteur, c'est-à-dire les collèges communautaires, aux provinces. Il semble également vouloir encourager la privatisation des institutions.

Voilà ce que nous voulons demander au comité. D'abord, nous aimerions avoir plus de précisions du ministre au sujet des négociations entre Ottawa et les provinces.

Compte tenu des enjeux, nous ne voulons pas que ces discussions reflètent le côté plus négatif du fédéralisme exécutif, soit la tenue de négociations privées entre Ottawa et les gouvernements provinciaux où les résultats sont annoncés dans les assemblées législatives. Onze gouvernements sont invités à ratifier une entente conclue sans la participation des principaux intéressés.

Par exemple, dans le discours du Trône, le gouvernement a dit qu'il accélérerait les discussions qui ont cours avec les provinces au sujet de la formation de la main d'oeuvre et du développement, afin d'assurer le retrait ordonné du gouvernement fédéral du secteur de la formation, d'explorer de nouvelles approches et d'attribuer de nouveaux rôles et responsabilités à chaque palier de gouvernement en vue de renforcer les marchés à l'échelle nationale et locale.

Je ne sais pas très bien ce que cela veut dire. Il serait utile que le comité demande au ministre de fournir des précisions à ce sujet.

Nous craignons que, au cours de ces négociations, des changements importants ne soient apportés à la façon dont le fonds d'assurance-chômage, et d'autres fonds comme le Trésor, servent à financer la formation. Nous avons des craintes au sujet des réductions qui seront décrétées, et aussi de la responsabilité qui sera imposée non pas aux provinces, mais aux particuliers. Nous ne pouvons demander aux chômeurs de s'endetter pour suivre des cours, que ce soit dans des collèges communautaires ou des institutions privées.

Enfin, nous avons des craintes au sujet de la privatisation. Nous ne sommes pas contre les collèges privés, mais nous avons des craintes au sujet de l'absence, dans la plupart des provinces et territoires, de systèmes d'agrément, d'évaluation de la qualité, peu importe ce que vous voulez l'appeler, concernant ces institutions privées.

.1635

Les gens devront emprunter de l'argent pour suivre des cours dans les institutions privées de la Colombie-Britannique, par exemple, où il n'existe pas de système d'agrément fédéral ou provincial.

Le gouvernement fédéral devrait peut-être, dans ses discussions avec une province comme la Colombie-Britannique, veiller à ce que de telles mesures de sauvegarde sont mises en place avant d'apporter des changements majeurs au programme.

Voilà les deux grandes questions que nous souhaitons aborder avec vous. Je tiens à dire, pour terminer, que ce document a été préparé en collaboration avec le Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public, qui représente un plus grand nombre de collègues communautaires que notre association et qui, en fait, partage notre point de vue sur ces questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Savage. Nous allons maintenant passer aux questions. Le premier intervenant sera M. Dubé, suivi de MM. McClelland et Regan.

[Français]

M. Dubé: Je vous remercie de votre présentation. Elle tombe à point, notamment les précisions que vous avez apportées sur la situation des chargés de cours. Le chiffre que vous mentionnez - 28 000 personnes - est assez impressionnant. La moyenne de 5 746$ en gains annuels me surprend d'ailleurs. Cela veut dire que plusieurs d'entre eux ne donnent qu'un seul cours par session. Toutefois, il y a aussi - et vous l'avez dit - de plus en plus de femmes que je qualifierais de chargés de cours à temps plein. J'en connais personnellement plusieurs.

Le pire est que le même professeur est souvent obligé d'enseigner dans plusieurs institutions, ce qui, du point de vue des statistiques, doit être compliqué. Je connais quelqu'un, dans ma circonscription, qui enseigne dans quatre universités différentes dans trois régions, Montréal, Québec et le Saguenay - Lac-Saint-Jean. Cela lui occasionne des déplacements incroyables.

Vous avez souligné un cas particulier. Je suis très sensibilisé à la question de savoir comment les heures seront comptabilisées. Il faudra des barèmes très particuliers pour le faire. Je suis très content que vous ayez soulevé ce point. Vous l'avez fait assez clairement. Il faudra que le gouvernement soit clair aussi dans les modifications et les précisions qu'il apportera aux barèmes qui serviront à comptabiliser les heures.

J'aimerais que M. Savage s'explique davantage sur ce qu'il a dit à propos d'un tiers des cours dispensés par les collèges communautaires. Il parlait sûrement de la formation professionnelle. J'aimerais qu'il élabore davantage parce qu'un tiers m'a semblé beaucoup. Vous craignez de perdre ces cours au profit d'institutions privées. J'aimerais que vous nous donniez plus de précisions sur ce point, parce que je suis étonné.

M. Léger: Je suis très heureux que vous soyez d'accord avec nous sur la situation des chargés de cours, en particulier sur la situation des femmes. Je suis surtout heureux que vous soyez d'accord pour qu'on étudie un peu plus la comptabilisation des heures travaillées par nos chargés de cours dans les universités.

[Traduction]

M. Savage: Il y aurait lieu peut-être de mentionner un autre point concernant les professeurs à temps partiel et les chargés de cours. Il est vrai que dans des villes comme Toronto et Montréal, les gens peuvent suivre un cours dans une université, et un autre dans une autre institution. Or, on constate que cela ne permet pas à une personne de maintenir un mode de vie très princier. Mais la situation est très différente à St. John's, à Saint John, à Brandon et dans de nombreuses régions du pays où il y a des universités ou des collèges communautaires. Il n'y a pas d'autres emplois; c'est le seul genre de travail qui existe.

.1640

Il est également important de reconnaître que, compte tenu des réductions importantes dont fait l'objet le CHST en particulier, les universités ne seront pas en mesure de transférer bon nombre des employés à temps partiel dans des postes à temps plein dans un proche avenir. C'est plutôt l'inverse qui risque de se produire. Le problème risque donc de prendre de l'ampleur.

En ce qui concerne les collèges privés, j'aimerais dire deux choses: d'abord, il y a à l'heure actuelle environ 900 collèges privés en Colombie-Britannique. Il s'agit-là d'une question importante sur laquelle il faudrait se pencher. Ensuite, il existe des preuves qui montrent clairement, et nous avons fourni un exemple à l'annexe du mémoire, que des programmes de formation offerts par des institutions privées ne sont en fait que des stratagèmes visant à soutirer de l'argent.

J'aimerais attirer l'attention du comité sur le fait qu'aux États-Unis, où l'on trouve un grand nombre de collèges communautaires privés et de collèges techniques qui ont une très bonne réputation, il existe des collèges qui ont mauvaise réputation et qui, depuis des années, escroquent le contribuable américain. Ces collèges recrutent activement des étudiants qui, il est évident, ne seront pas en mesure de terminer leurs cours. Ces étudiants obtiennent des fonds du gouvernement fédéral, paient les frais exigés par le collège, qui s'arrange pour les recaler et, bien entendu, garder l'argent.

Que font-ils avec l'argent? Ils en gardent une partie, bien entendu, mais ils en dépensent une bonne part pour faire élire des membres au Congrès et ainsi compter sur un bassin important de représentants qui s'opposeront à toute réforme du système. Il y a des changements qui sont à l'étude depuis deux ans, et ce n'est que tout récemment que le Congrès s'est enfin décidé à prendre des mesures pour faire en sorte que les stratagèmes de ce genre sont plus difficiles à organiser en vertu du programme fédéral de financement des collèges privés aux États-Unis.

Le président: Monsieur McClelland.

M. McClelland: Je suis diplômé d'un collège communautaire et un des membres de mon personnel travaille à temps partiel comme chargé de cours à l'université Concordia. Vous avez soulevé de nombreux points intéressants aujourd'hui. Toutefois, celui qui revient le plus souvent...

M. Easter: Ian vient de faire des découvertes intéressantes.

M. McClelland: Je me demande si le projet de loi permettra de régler les problèmes que vous avez soulevés. J'aimerais avoir votre opinion sur deux questions. D'abord, la formation de la main-d'oeuvre financée à même le fonds d'assurance-chômage et la situation difficile dans laquelle les gens qui ont déjà travaillé et qui ne peuvent obtenir une formation. Voilà pour la première question.

Cette question comporte un deuxième volet: il existe aujourd'hui au Canada, quoique dans un degré moindre, une situation où l'on offre, par l'entremise de l'assurance-chômage, des programmes de formation qui n'aboutiront jamais à rien. Il s'agit d'entrepreneurs qui ont mis sur pied des programmes de formation et persuadé le gouvernement de les financer pour qu'ils puissent disposer d'un bassin d'étudiants. En fait, ils se sont créé un emploi. Un exemple me vient à l'esprit: la formation d'infirmières en médecine holistique et en aromathérapie. Ce programme est financé par le gouvernement alors qu'on menace de réduire les fonds accordés aux collèges communautaires et aux universités.

.1645

Peut-on, à votre avis, faire quelque chose...? Je ne dis pas qu'il faudrait exclure les entrepreneurs du secteur de l'éducation. Mais il doit y avoir un moyen d'évaluer l'efficacité des sommes investies dans cette formation pour éviter que des fonds ne soient alloués à une institution dont 80 p. 100 diplômés ne trouvent pas un emploi dans leur domaine de spécialisation pendant trois ans... quelque chose de ce genre. Est-ce qu'une telle mesure permettrait d'améliorer le projet de loi, surtout si la formation de la main-d'oeuvre continuait d'être financée par les employés et les employeurs? Le projet de loi serait-il plus acceptable s'il prévoyait un système de freins et de contrepoids?

M. Savage: Je vais d'abord essayer de répondre à la deuxième question.

Une des difficultés que pose l'adoption d'une règle nationale, c'est qu'elle risque d'avoir un impact différent dans diverses régions du pays - non seulement dans ce domaine, mais dans d'autres où cette question est déjà à l'étude. Vous pourriez, dans une région où le taux de chômage est très élevé, appliquer une règle qui donnerait de bons résultats à Toronto et à Vancouver, mais des résultats désastreux à Terre-Neuve. Il faudrait d'abord examiner ces règles de très près pour faire en sorte qu'elles ne nuisent pas aux régions les plus pauvres du pays.

M. McClelland: Êtes-vous en train de dire que tous les fonds pour la formation de la main-d'oeuvre devraient être gérés exclusivement par les provinces?

M. Savage: Nous ne sommes pas contre la décision du gouvernement de négocier le transfert de la formation de la main-d'oeuvre aux provinces. Toutefois, ces négociations se déroulent dans le secret. Nous avons eu l'impression, en entendant le discours du Trône, que le gouvernement fédéral continuerait d'assumer un rôle quelconque dans ce domaine.

Je croyais que vous me demandiez s'il faut poser des conditions lorsqu'il y a une forme quelconque de formation continue. En principe, nous n'y sommes pas opposés, à condition que ces modalités soient bien pensées, que l'on tienne compte, entre autres, de leur incidence sur les différentes régions du pays. Toutefois, il ne faudrait pas s'arrêter là. On pourrait peut-être voir ce que les Américains posent comme conditions dans leurs propres lois, par exemple en ce qui concerne les taux d'échec, les programmes de formation et ainsi de suite.

Le président: Monsieur McClelland, je vous remercie. La parole est à M. Easter.

M. McClelland: Je m'excuse. C'est que nous disposons de si peu de temps. Je vous remercie beaucoup.

M. Regan (Halifax-Ouest): M. Easter n'est pas encore arrivé, monsieur le président.

Le président: C'est vrai. Je suis désolé.

M. Regan: Je remercie les témoins d'être venus. J'ai plusieurs questions à leur poser.

Je vois que vous n'avez pas de données qui permettent d'établir une distinction entre le nombre de professeurs qui enseignent à temps partiel et qui ont un autre emploi à temps plein, ceux qui ont d'autres emplois, et ainsi de suite. Vous n'avez pas beaucoup de renseignements au sujet de cet aspect du corps professoral, il me semble, renseignements qu'il aurait été utile d'avoir. Il est malheureux que vous ne les ayez pas, mais vous pouvez peut-être nous dire combien de professeurs d'université, à votre connaissance, réclament de l'assurance-chômage durant l'année.

Vous avez aussi mentionné la situation de ceux qui travaillent 15 heures par semaine. Je sais d'expérience que, dans la population active ordinaire - et je suis curieux d'apprendre si elle diffère de celle des universités - , il n'y a pas de gens qui travaillent 15 ou 16 heures par semaine, car l'employeur préfère leur faire faire 14 heures par semaine afin d'éviter d'avoir à payer des avantages et à cotiser à l'assurance-chômage. Ces travailleurs ne font donc pas 16 ou 18 heures par semaine, mais bien 14.

Il me semble qu'une des difficultés causées par le régime actuellement en vigueur, c'est qu'il incite les entreprises, les grands magasins, etc., à n'engager qu'à temps partiel. C'est ce que nous tentons d'éviter. Nous essayons aussi de simplifier l'administration du système. Je cherche un moyen de tenir compte de vos préoccupations tout en traitant de ces problèmes.

.1650

J'aimerais aussi savoir si vous êtes au courant des changements proposés par des membres du comité en rapport avec la question du dénominateur, des semaines d'inactivité ou de chômage - c'est-à-dire des semaines sans travail - et de la règle d'intensité. Si j'ai bien compris, la question centrale est le dénominateur. Vous parlez de la période fixe, soit de la période de16 semaines, etc., et de 20 semaines. Les changements que j'ai moi-même proposés concernent les régions où le chômage est le plus élevé. En réalité, dans chaque région, c'est la période d'admissibilité qui compte. Donc, si, dans une région donnée, la période d'admissibilité est de16 semaines, vous pourriez la convertir en heures et y ajouter deux semaines pour calculer le dénominateur. Cette formule s'appliquerait partout, alors que, pour l'instant, le nombre d'heures supplémentaires dont vous avez besoin pour avoir droit aux pleines prestations est beaucoup élevé dans les régions à fort taux de chômage que dans les autres, où il est plus facile de se trouver un autre emploi.

Les médias ont parlé de certaines de ces propositions, mais j'ignore si vous avez eu la possibilité de les étudier. Je suppose que vous ne pouvez pas me donner une opinion à ce sujet. Fort bien.

Vous parlez aussi des gens qui semblent parfois avoir un faible revenu. Dans les données, du moins, ils sont rémunérés pour leur travail particulier d'enseignants à l'université. Je sais qu'il n'est pas juste de vouloir savoir quel autre emploi ils ont, mais il me semble qu'il n'est pas juste, non plus, s'ils ont un autre emploi, qu'ils se retrouvent parmi les 350 000 Canadiens bénéficiant d'un supplément du revenu familial. Cela signifie que, s'il s'agit d'une famille biparentale, ils toucheront 7 p. 100 de plus en moyenne et que, s'il s'agit de familles monoparentales, ils toucheront des prestations supérieures de 10 p. 100. Je crois donc que vous seriez favorables à pareille mesure.

Je suis aussi curieux de savoir si vous êtes favorables à la récupération des prestations de ceux qui ont des revenus plus élevés, car, dans ma circonscription, je me suis certes fait dire qu'une personne gagnant 50 000$ par année ne devrait pas pouvoir toucher 10 000$ de plus en assurance-chômage chaque année. C'est beaucoup à la fois. Vous pouvez peut-être me faire connaître votre réaction.

M. Savage: Je vais essayer de vous donner quelques réponses. M. Léger peut peut-être m'aider.

Tout d'abord, en ce qui concerne les universités en tant qu'employeurs pour le calcul des heures de travail et ainsi de suite, elles n'ont jamais vraiment eu à réfléchir à cette question parce que, dans le passé, il n'y avait que deux critères: le salaire et les heures de travail. Le critère du salaire permettait d'établir très vite qui était admissible et qui ne l'était pas. Si, désormais, l'on ne tient plus compte que des heures de travail, le problème dont nous avons parlé se posera. Les administrateurs des universités n'y ont tout simplement pas réfléchi, mais ils devront vraisemblablement... Nous en avons discuté avec l'administration d'une université, hier. Elle prévoyait négocier la question avec le syndicat représentant ses employés à temps partiel. J'en déduis qu'on aboutira à une centaine de définitions différentes dans ces établissements, ce qui créera des difficultés pour l'organisme du gouvernement chargé de traiter de cette question.

Il vaudrait peut-être mieux que ceux qui ont un enjeu dans la question en discutent avec les responsables afin d'en arriver à une certaine entente nationale sur ce qu'est en réalité la charge de travail d'un professeur et d'un chargé de cours à temps partiel. Jusqu'ici, nul ne songeait à réduire les heures de travail pour éviter de payer les cotisations, mais cela pourrait bien se produire maintenant.

M. Regan: Je sais que nous avons entendu ce matin, par exemple, un porte-parole du syndicat des agents de bord selon lequel... Nous avons appris, dans ce cas particulier, qu'il s'agit de travail à la pièce qui est calculé différemment. Ce pourrait bien être la même chose, dans ce cas-ci. Je l'ignore. Nous pouvons peut-être obtenir ces renseignements.

M. Savage: Pour ce qui est des données sur les travailleurs à temps partiel, si vous voulez en discuter plus à fond, Rosalind Riseborough est notre experte des données sur la profession et sur nos relations avec Statistique Canada. Ce n'est que récemment que Statistique Canada a commencé à réunir des données sur les enseignants employés à temps partiel par les facultés universitaires. De plus, cet organisme n'a aucune donnée sur les enseignants des collèges communautaires, qu'ils soient à temps plein ou à temps partiel. Vous me corrigerez si je fais erreur, mais je crois que les données datent de plusieurs années déjà en ce qui concerne les travailleurs à temps partiel. En d'autres mots, la plus récente série de données que nous ayons pu obtenir date de 1992-1993. Elle ne fait aucune distinction entre les professionnels qui ont autre emploi et ceux dont le seul revenu est tiré d'un emploi à temps partiel.

.1655

Il nous semble toutefois évident qu'un assez grand nombre de personnes qui ont commencé à faire carrière constatent qu'en raison des compressions budgétaires imposées aux universités, il est de plus en plus difficile de se trouver un emploi à temps plein. Afin de pouvoir continuer de travailler dans leur discipline et faire carrière à l'université, ils doivent se contenter d'un emploi à temps partiel. Ils ne le font pas par choix, mais par nécessité.

Nous ne pouvons pas vous fournir des données à ce sujet, car Statistique Canada n'en tient pas, non plus. Nous devons donc nous fier à ce que nous rapportent nos associations locales des diverses régions du pays. Cependant, ce groupe de travailleurs grossit rapidement.

Il est regrettable que nous ne puissions vous préciser leur nombre. Toutefois, il s'agit d'un groupe important dans le milieu universitaire. Il s'agit, à mon avis, d'un groupe particulièrement important parce que, souvent, ce sont ces personnes qui aimeraient former la prochaine génération de chercheurs, de scientifiques et de professeurs.

Le président: Monsieur Savage, je vous remercie. Monsieur Proud, vous avez la parole.

M. Proud (Hillsborough): Je veux seulement obtenir une précision concernant l'un des points que vous avez soulevés, monsieur Savage, au sujet de la privatisation. Vous avez entre autres mentionné que la Colombie-Britannique compte 900 collèges. Pouvez-vous me donner une idée du genre de collèges dont il est question?

La raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que dans ma propre région, le personnel d'un collège communautaire local a exprimé des inquiétudes au sujet de l'ascension de CompuCollege et d'autres établissements du genre. Lorsque nous avons interrogé ceux qui achètent leurs services, ils nous en ont fait connaître les raisons. Je me demande toutefois quels genres d'établissements vous classez dans ce groupe de 900 collèges et autres établissements privés.

M. Savage: Ils sont aussi variés que le sont les cours offerts par les collèges communautaires. Nos collègues de la Colombie-Britannique nous disent qu'ils ont tendance à se spécialiser dans certains genres de formation technique et dans l'enseignement de l'anglais langue seconde.

Je ne voudrais cependant pas vous induire en erreur. Tous les collèges privés ne sont pas mauvais. De toute évidence, il en existe de très bons, qui ont excellente réputation. Nous affirmons cependant qu'en Colombie-Britannique, ni le gouvernement provincial, ni le gouvernement fédéral ne pourrait dire si tous ces collèges offrent en fait un produit honnête, viable, etc. Il me semble que si nous repensons tout le système d'enseignement au niveau des collèges communautaires, nous devrions nous poser cette question. C'est tout.

M. Proud: Je vous remercie.

Le président: Monsieur Savage, monsieur Léger et madame Riseborough, je vous remercie de cet exposé et des conseils que vous nous avez donnés sur la façon d'améliorer le projet de loi à l'étude.

J'aimerais profiter de l'occasion, avant notre départ pour le congé de Pâques, pour remercier tous les membres du comité de l'excellent travail qu'ils ont fait. Cette consultation des Canadiens a été à la fois intense et exhaustive.

Comme vous le savez, nos travaux reprendront le 15 avril. Du 15 au 18, à moins de faire erreur, je crois que nous tiendrons des audiences, après quoi nous passerons à l'étude article par article,le lundi 22 avril.

Je veux que vous sachiez tous qu'à notre retour, une autre semaine intense de consultations nous attend. La semaine suivante sera consacrée à l'étude du projet de loi, article par article. Je m'attends que les membres du comité travailleront dans le meilleur esprit de coopération possible pour faire en sorte de tenir compte de ce que nous avons entendu et de réellement améliorer la mesure législative à l'étude. En tant que président, je m'attends que les deux côtés de la table coopèrent pleinement. J'aimerais que l'étude article par article se déroule sans accroc et qu'elle tienne compte de tout ce que nous avons entendu.

.1700

Étant donné ce qui précède, j'aimerais aussi dire que, si vous prévoyez déjà proposer des amendements, par simple courtoisie, je vous demanderais de commencer à en discuter avec les autres membres du comité pour que tous aient le temps d'y réfléchir. Je sais qu'il va y avoir un débat, comme il se doit en comité, mais je compte sur la collaboration de tous.

Cela étant dit, je vous souhaite tous de très joyeuses Pâques.

Si vous avez des commentaires, je suis maintenant prêt à les entendre. Monsieur Dubé, vous étiez le premier; vous serez suivi de M. Allmand, puis de M. McClelland.

[Français]

M. Dubé: Monsieur le président, un organisme qui s'appelle la Coalition gaspésienne vous a fait parvenir une lettre demandant que le comité aille sur place pour rencontrer ses membres. Il s'agit d'une lettre que vous avez reçue ces jours-ci, je crois.

Le président: Oui, de même qu'une lettre de gens des Maritimes.

M. Dubé: J'aimerais soulever cela pour que l'on en dispose.

Évidemment, nous appuyons ce principe parce que c'est de toute évidence dans ce coin du pays que la réforme a soulevé le plus de questions et de préoccupations.

Cela dit, je demande qu'on étudie cette possibilité. Cela s'ajouterait aux travaux prévus pour la semaine du 15 avril.

[Traduction]

Le président: Malheureusement, nous n'avons pas un tel choix, puisque les membres du comité ont décidé, au début des audiences, que nous ne nous déplacerions pas, que nous nous servirions plutôt des conférences téléphoniques et des vidéoconférences pour joindre le plus grand nombre de Canadiens possible.

Il ne faudrait pas oublier, non plus, que ce projet de loi particulier est issu de l'examen des programmes sociaux auquel ont participé plus de 100 000 Canadiens.

Je comprends les grandes difficultés avec lesquelles sont aux prises certaines personnes de la Gaspésie, de parties du nord de l'Ontario, de certaines régions des Maritimes et de quartiers de Montréal. Or, la question est nationale. Il ne serait pas juste pour les autres Canadiens que nous nous rendions en Gaspésie sans aller à Vancouver ou à Montréal.

Il vaut mieux, je crois, s'en tenir au plan. C'est la raison d'être des plans: savoir qui nous entendrons par conférence téléphonique, par vidéoconférence et au moyen de mémoires. Si les Gaspésiens ont des préoccupations particulières, ils peuvent nous les communiquer par écrit. J'ignore s'il est possible de les joindre par conférence téléphonique ou par vidéoconférence. De plus, un député de la Gaspésie m'a fait valoir, avec beaucoup d'éloquence, certaines préoccupations concernant l'assurance-emploi, et je suis sûr qu'il a fait la même chose auprès d'autres députés. Cela fait partie de la façon dont se déroule le processus.

Toutefois, je pourrais aussi vous dire que les semaines d'inactivité, le dénominateur et la règle d'intensité sont des questions qui, dans les amendements proposés par les députés, font partie des préoccupations des Gaspésiens. Je suis convaincu qu'en votre qualité de député, vous êtes au courant de ces préoccupations. Si c'est ce que vous pensez, proposez des amendements qui permettront de régler les problèmes.

.1705

[Français]

M. Dubé: Monsieur le président, vous avez raison de rappeler la décision première et vous vous rappellerez aussi que l'Opposition officielle était favorable à la tenue d'audiences.

Vous parlez de vidéoconférence. Serait-il possible de réserver un endroit comme celui-ci, par exemple une salle dans un hôtel? Comme plusieurs organismes se sont manifestés, on pourrait les regrouper et tenir une vidéoconférence où ils pourraient témoigner collectivement. Je suis sûr que les organismes en question pourraient trouver des locaux communautaires qui coûteraient moins cher. Cela permettrait à la communauté de participer à cet échange.

Je suis un député de l'opposition, mais je suis en politique depuis un certain temps et j'ai l'impression que répondre à cette demande de cette façon-là pourrait être avantageux même pour le gouvernement, puisqu'il donnerait l'impression d'être réceptif aux demandes de gens comme ceux-là.

[Traduction]

Le président: Nous ne sommes pas d'accord sur ce point. Je n'ai pas à donner une impression. Le processus dont nous nous sommes dotés au sein du comité est un excellent point de départ. Je n'ai pas pour habitude de donner une impression. J'essaie d'aller au vif de la question et je m'attends que les députés des deux côtés de la table proposeront des amendements qui permettront d'améliorer la mesure législative à l'étude.

En réalité, la grandeur de la salle n'améliorera pas la qualité du débat, des amendements ou du projet de loi. Ce qui aiderait, c'est que les personnes que vous dites très préoccupées par cette question couchent leurs idées par écrit pour que nous puissions les étudier. Malgré tout le respect que je vous dois, je ne crois pas qu'en ouvrant une salle à 200 ou 300 personnes, celles-ci réussissent à faire valoir leur point de vue en une demi-heure ou une heure. Après tout, c'est le but recherché: qu'elles puissent donner leur opinion et faire connaître leurs préoccupations.

Je vais m'informer de la possibilité de communiquer avec ces personnes par vidéoconférence ou conférence téléphonique. Mais ce qui me préoccupe réellement, c'est comment nous, en tant que députés, pouvons faire en sorte que le projet de loi que nous renverrons à la Chambre des communes tienne expressément compte des préoccupations des gens dont vous parlez. Voilà qui établirait la bonne foi des parlementaires.

Je ne crois pas qu'en remplissant des salles, nous parviendrons à améliorer le sort de ces gens. Il vaudrait mieux que le Bloc québécois propose un amendement valable qui les aiderait et qui serait adopté par le comité. Voilà la question. Voilà la raison de notre présence ici. Nous ne sommes pas des organisateurs de spectacles. Nous sommes ici pour améliorer le sort de la population et le projet de loi à l'étude, point final. C'est notre seule raison d'être.

Vous savez que les 200 personnes qui se trouvent dans le hall ne pourront toutes prendre la parole. Il serait malhonnête de ma part de leur donner cette illusion, et je ne le ferai pas.

M. Regan: Monsieur le président, puis-je ajouter quelque chose? Il me semble que des députés de ce côté-ci de la Chambre ont fait des propositions constructives qui, en fait, dissiperaient bon nombre d'inquiétudes et une grande part des préoccupations de régions comme celle de Gaspé.

Je dois avouer que je suis troublé de constater le manque d'intérêt des députés du Bloc pour les modifications proposées de ce côté-ci, car il est clair à mes yeux que si le comité n'appuie pas les modifications que nous - M. Scott, Mme Augustine et moi-même - avons proposées, elles ne seront pas adoptées et nous nous retrouverons avec un projet de loi qui ressemblera probablement beaucoup au projet de loi actuel. Ces modifications présenteraient de très importants avantages pour des régions comme Gaspé.

J'espère qu'au cours du prochain congé de deux semaines, nos collègues du Bloc examineront de très près ces propositions et constateront les avantages qu'elles offriraient à ces régions. Je n'ai constaté aucun appui de la part de ces députés pour ces propositions.

Le président: M. McClelland, suivi de M. Crête.

.1710

M. McClelland: J'aimerais informer le comité que j'ai l'intention de recommander à notre porte-parole que le comité envisage certains changements. L'un concerne la nécessité d'avoir participé au marché du travail pour avoir accès à une formation professionnelle. Les témoins ont mentionné à maintes reprises que ce serait une grande amélioration au projet de loi si une participation préalable au marché du travail n'était pas exigée pour la formation professionnelle. Le deuxième serait d'établir un nombre minimum d'heures, en plus de l'option de la participation facultative, comme il a été proposé à quelques reprises. Ce sont les options que j'aimerais que notre comité envisage.

Le président: L'usage veut que chaque proposition me soit transmise au moyen d'une lettre officielle. Je soumets alors la proposition au Développement des ressources humaines; si nous estimons que c'est une proposition qui pourrait être acceptée, nous l'envoyons au Développement des ressources humaines pour qu'elle y soit analysée. Puis, le comité vous indiquera si cela est faisable ou non. Je vous remercie.

M. McClelland: Dans les deux langues officielles? Est-ce que cela en vaut la peine?

Le président: Cela en vaut la peine. Je m'attends donc à en recevoir une copie en français.

M. Allmand: Comme nous allons commencer l'étude du projet de loi article par article le 22 avril, c'est-à-dire une semaine après notre retour, je me demande si le personnel nous aura préparé les résumés habituels des témoignages, peut-être même pour le 15. Je constate que nous venons d'entendre notre 37e témoin sur ce projet de loi cet après-midi. Nos bureaux sont submergés de documents et de mémoires. Habituellement, on prépare un résumé des principales propositions que renferment les mémoires pour nous permettre de voir rapidement ceux qui sont pour ou contre différentes options. Par ailleurs, nous avons reçu un grand nombre de mémoires de groupes qui n'ont pas comparu. Ces résumés seraient donc utiles car il nous est très difficile de lire tous ces mémoires.

Le président: Vous les recevrez.

M. Crête.

[Français]

M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): Premièrement, monsieur Regan, nous ne vivons pas dans un pays totalitaire et nous avons le droit de penser différemment du parti ministériel. La bonne foi ne se manifeste pas nécessairement en proposant des amendements, comme le voudrait le gouvernement, mais en faisant en sorte que la réforme soit la meilleure possible pour les Québécois et les Canadiens. Je peux très bien voir que la façon dont vous faites les choses est totalement inacceptable. C'est mon droit strict de le dire.

Cela dit, je voudrais proposer formellement que le comité tienne des audiences pendant une journée dans les Maritimes et une journée en téléconférence, comme M. Dubé l'a proposé. J'en fais une proposition formelle et je voudrais qu'on tienne un vote par appel nominal là-dessus. Étant donné l'opposition qui s'est manifestée dans les régions, il est très clair qu'une partie du message ne nous parvient pas dans nos séances de comité.

[Traduction]

Le président: Je vais accueillir votre proposition mais il y a quelque chose que j'aimerais que vous sachiez, monsieur Crête. Je trouve ironique que vous fassiez cette proposition si tard dans le processus après que le comité s'est entendu pour recourir aux téléconférences comme moyen d'atteindre la population. En tant que membre du comité, vous êtes toutefois en droit de le faire et j'accepterai donc votre proposition comme une motion officielle - essentiellement, vous aimeriez que nous nous rendions dans les Maritimes et que nous tenions une téléconférence à l'intention de la population de la Gaspésie. Est-ce exact? Est-ce le sens de votre proposition?

[Français]

M. Crête: J'ai proposé qu'on se rende dans les deux régions concernées.

.1715

Je propose qu'on aille dans les deux régions concernées et que, si jamais ce n'était pas possible, qu'on tienne au moins des téléconférences avec des groupes.

[Traduction]

Le président: C'est tout à fait différent. Nous reviendrons peut-être alors uniquement à la tenue de téléconférences.

Est-ce que tout le monde comprend bien que s'il est hors de question de nous déplacer, nous devrons alors avoir recours aux téléconférences? J'avais l'impression que c'était déjà ce que nous faisions.

M. McClelland: Monsieur le président, il nous faut donc deux motions.

Le président: D'accord. La première motion portera sur ce que vous avez dit: que s'il nous est impossible de nous déplacer, nous devrions au moins tenir une téléconférence dans ces régions. Est-ce clair?

[Français]

M. Crête: Oui, mais en premier lieu, il faudrait savoir si on pourra se déplacer. Si c'est non, il faudra qu'on sache si on pourra au moins tenir les téléconférences.

[Traduction]

Le président: En ce qui me concerne, le comité a déjà pris sa décision sur la question des déplacements mais si vous voulez que cela fasse l'objet d'une motion formelle, nous voterons à nouveau. Je n'aime pas tellement ça, car lorsque le comité a pris une décision, je préfère m'y tenir, mais je le ferai cette fois-ci. Je n'ai toutefois pas l'intention de le refaire; je tiens à vous le dire tout de suite.

M. Allmand: J'aimerais soulever une question de procédure. La plupart des comités ont adopté une règle et j'ignore si ce comité l'a lui aussi adoptée lors de ses travaux d'organisation, à savoir qu'en ce qui concerne les affaires qui ne sont pas inscrites à l'ordre du jour de la séance, il faut présenter un avis de motion. En d'autres mots, la motion peut être déposée mais ne peut pas être abordée dans les 24 heures. Autrement, nous pourrions tous présenter des motions et prendre les gens par surprise.

Plusieurs comités de la Chambre ont adopté cette règle mais peut-être pas le nôtre. La seule façon d'en être exempté, c'est par consentement unanime.

Le président: Monsieur Allmand, malheureusement nous n'avons pas adopté cette règle.

J'aimerais que l'on dispose de cette question. Par conséquent, mettons aux voix la première motion.

M. Allmand: Quelle est cette motion? Pourriez-vous nous la lire?

[Français]

Le greffier du Comité: Que le comité tienne des séances une journée dans les Maritimes et une journée en Gaspésie et, si ce n'est pas possible, qu'il tienne des vidéotéléconférences collectives dans les deux régions.

[Traduction]

M. Allmand: Je suis d'accord pour que l'on tienne des téléconférences, ce sur quoi nous nous sommes déjà entendus, mais je suis contre...

M. McClelland: Monsieur le président, par souci de clarté, je propose que nous en fassions deux motions distinctes et que nous mettions d'abord aux voix la motion concernant les déplacements. Puis nous pourrons voter sur la motion relative aux téléconférences, si cela est nécessaire.

M. Easter: Monsieur le président, j'aimerais invoquer le Règlement. Je crois que vous avez déclaré que le comité a déjà pris une décision. Par conséquent, la motion est de toute évidence superflue et ne devrait pas être prise en considération. Si le comité a adopté une motion et a déjà pris une décision, cette décision-ci est superflue.

Le président: Monsieur Crête, l'objet de votre motion est d'exprimer publiquement ce que vous pensez de l'opportunité pour le comité de se rendre dans les régions pour y rencontrer les Canadiens. Je crois que vous avez présenté votre argument, et c'est très bien.

Votre motion indique essentiellement que s'il est impossible pour le comité de se déplacer, vous vous contenterez de la tenue de téléconférences. Nous sommes déjà en train de tenir des téléconférences. Cette décision a donc déjà été prise mais pour ce qui est des déplacements, cette proposition ne sera pas retenue puisque nous avons déjà établi les paramètres dans lesquels nous allions fonctionner.

Est-ce que cela vous va?

[Français]

M. Crête: Si le comité donne son consentement, je suis prêt à proposer tout simplement qu'il y ait des vidéoconférences tel qu'on l'avait prévu, mais avec un auditoire plus large, en autant que ce soit possible techniquement. À ce moment-là, il n'y aurait pas de voyage.

[Traduction]

Le président: Par conséquent, est-ce que vous retirez votre première motion?

[Français]

M. Crête: Si je la retire? Je vais la retirer si on peut m'assurer que la deuxième est acceptable. D'accord, je vais retirer la première.

[Traduction]

Le président: Donc maintenant la motion porte sur la tenue de téléconférences dans ces régions. Est-ce bien cela?

[Français]

M. Crête: Avec un auditoire élargi. Monsieur le président, dans l'Est du Québec, par exemple, les gens pourraient se réunir dans l'auditorium d'une université qui pourrait accommoder entre 100 à 150 personnes.

.1720

[Traduction]

Le président: C'est donc la motion. Nous allons procéder au vote.

M. Nault (Kenora - Rainy River): Monsieur le président, avant de voter, il faudrait tenir compte de deux choses. Tout d'abord, si nous décidons de tenir des téléconférences dans chacune de ces petites régions, vous pouvez être sûr que nos collègues des autres régions du pays ne manqueront pas de nous demander pourquoi nous ne le faisons pas aussi dans le nord de la Colombie-Britannique qui, à leurs yeux, est une région tout aussi importante que Gaspé.

L'autre question, c'est que nous avons décidé, il y a quelques semaines, d'accorder un nombre donné d'unités à chaque parti de l'opposition et au parti ministériel. À ma connaissance, le Bloc a utilisé toutes ses unités. Vous avez sans doute constaté que nous avons eu beaucoup plus de témoins du Québec que de toute autre province au Canada.

L'un des problèmes en ce qui me concerne et en ce qui concerne les députés d'un peu partout au Canada, c'est qu'il nous est impossible de faire comparaître nos témoins en raison du nombre limité d'unités qui restent puisque l'opposition a fait comparaître tous ses députés et ses témoins du Québec. Nous avons l'impression d'assister aux audiences du Québec, pour ainsi dire.

C'est pourquoi, monsieur le président, j'estime que la tenue de téléconférences spéciales au Québec créerait un très mauvais précédent, après que nous avons entendu un aussi grand nombre de témoins du Québec. Je pense que nous devrions mettre cette proposition aux voix et en tant que gouvernement, j'estime que nous devrions voter contre.

Ils auront fait connaître publiquement leur position et ils seront contents. Mais je dois avouer que ces trois semaines ont été longues et j'aimerais qu'on en finisse.

Le président: Vous appuyez la motion?

[Français]

M. Dubé: Je dis pourquoi pas à ce qu'a dit M. Nault. Je vais rappeler à ceux qui étaient là l'année passée, dont M. Scott et vous, monsieur le président, que lorsque le comité s'est rendu à Lévis, par exemple, cela ne lui a coûté rien. Nous demandons seulement que vous permettiez au public d'être présent lorsqu'une coalition ou des groupes se réuniront dans une ville quelconque pour témoigner.

Pourquoi? Parce que dans les régions, notamment en Gaspésie, d'où je suis originaire mais non député, les gens n'ont pas le câble et n'ont donc pas accès à nos délibérations. Lorsque le ministre est venu ici hier, on ne pouvait capter la diffusion de la séance à beaucoup d'endroits.

Donc, au moins dans ces régions où il n'y a pas de câble, laissons les députés répondre aux gens. Cela ne coûterait pas plus cher.

[Traduction]

Le président: D'accord, je présente la motion. Allons-nous la mettre aux voix?

[Français]

M. Crête: Je demande un vote par appel nominal.

Le président: Un vote par appel nominal?

M. Crête: Oui. Je veux que les gens sachent qui a accepté et qui a refusé de les rencontrer.

[Traduction]

Le président: Oui, c'est un point très important.

[Français]

M. Crête: Ce n'est pas un jeu. C'est la vraie vie.

[Traduction]

Le président: Tous ceux qui veulent adopter la motion.

M. Allmand: S'agit-il d'un vote par appel nominal?

Le greffier: C'est un vote par appel nominal.

M. Allmand: Je ne comprends pas bien. Quelle est la question maintenant? S'agit-il de tenir des téléconférences plutôt que...

[Français]

M. Dubé: Une téléconférence collective.

Le greffier: Une téléconférence avec auditoire.

[Traduction]

M. Allmand: Nous avons déjà pris cette décision. Nous nous sommes déjà entendus sur la tenue de téléconférences.

La motion est rejetée par 5 voix contre 2

Le président: La séance est levée. Passez de joyeuses Pâques.

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