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J'ai posé cette question aux témoins qui sont venus et j'ai eu des réponses, même de la part des chercheurs qui ont fait des travaux pour vous. Ces derniers ont dit qu'on devait élargir l'assiette de l'assurance-chômage et non pas la réduire, et surtout pas réduire le bassin de participation au régime d'assurance-chômage. Quarante-deux mille dollars, c'était un début. Si le gouvernement voulait avoir absolument 1,8 milliard de dollars, qu'est-ce qu'il aurait dû faire? Probablement faire passer le salaire maximum assurable à 46 000 $. À 46 000 $, vous auriez eu 1,9 milliard ou 2 milliards de dollars de plus sans faire subir des souffrances aux gens ordinaires.

Ce n'est certainement pas la fraude qui est à la base de cette réforme. On pourrait probablement réduire encore de 4 p. 100 le taux de fraudeurs, mais on ne peut pas faire une réforme juste pour les fraudeurs. Quand on fait un système pour réduire la fraude, ce sont souvent les gens honnêtes qui y perdent alors que les vrais fraudeurs arrivent à passer au travers. Je suis certaine que ce ne sont pas les libéraux qui voudraient faire un système pour les fraudeurs.

Alors, il y a une possibilité qui n'est sûrement pas très coûteuse. Est-ce que vous avez regardé, comme moi, à combien se monte la réduction annuelle de la cotisation d'une personne qui gagne 42 400 $ quand le salaire maximum assurable passe à 39 000 $? C'est 120 $ par année ou 2 $ par semaine. Est-ce que cette réduction vaut toutes les misères que les jeunes, les femmes, et les travailleurs saisonniers vont subir? Pourquoi devraient-ils payer pour cette réduction de cotisations? Ça n'a pas de bon sens. On est en train de régresser.

Grâce à votre proposition, monsieur le président, nous pouvons faire valoir notre argumentation au complet et nous vous en remercions.

Si le comité voulait convaincre le ministre, non pas de réduire le salaire maximum assurable mais de l'augmenter, on pourrait envisager une réforme qui répondrait aux besoins, parce que, comme nous l'avons souligné, il faut faire une modernisation. Ainsi, on pourrait faire une vraie réforme.

Pourquoi avez-vous décidé d'aller chercher de l'argent dans l'annualisation? C'était la prochaine question que je voulais poser concernant l'article 2. Dans la définition de «rémunération assurable», vous ajoutez:

Mais quand on dit «le total de la rémunération», je ne peux pas, malheureusement, demander ce renseignement aux fonctionnaires du ministère. Mais lors de la séance à huis clos qui nous a permis de nous informer de la réforme, et c'est la seule fois qu'on a eu ce genre d'information, on nous avait dit que par l'annualisation, c'est-à-dire en faisant passer le salaire maximum assurable par semaine au salaire total, on allait trouver un milliard de dollars.

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Prenons quelqu'un qui va avoir un contrat, comme on en trouve dans les nouveaux secteurs. Il y a beaucoup de nouveaux secteurs où il y a des contrats à durée déterminée. Si quelqu'un a la chance d'avoir un emploi assurable et que, dans son année, il ne peut pas avoir plusieurs contrats, mais un seul qu'il exécute en trois mois, si son salaire est assurable, il devra s'entendre avec la personne qui lui donne le contrat pour étaler le nombre d'heures, cela illégalement. Mais il faut se dire qu'en ce moment, c'est ce qui se passe dans les provinces Maritimes. Les gens ont des comportements intelligents. De toute manière, ce travailleur va payer des cotisations sur ses 15 000 $ au complet au lieu d'en payer seulement sur le salaire maximum de la semaine.

C'est un changement très important qui défavorise encore une fois les jeunes, ceux qui sont dans des nouveaux secteurs. Cela n'a pas de bon sens.

Pour que les jeunes s'aident, il ne faut pas les couler. Ils ont déjà assez de difficulté à s'aider et il ne faut pas les couler. Il faut leur donner un coup de main et non un coup de pied. L'annualisation, c'est un problème important pour eux.

Il y a un mémoire que j'ai relu récemment pour répondre à ça. Le Conseil canadien de développement social a fait une étude exhaustive de la situation des temporaires, et on montre bien que le niveau d'éducation des travailleurs temporaires est très varié. On dit que dans la tranche des 25 à 44 ans, par exemple, près de la moitié ont un certificat, un diplôme collégial ou une licence universitaire. Il y en a plein que vous connaissez...

[Traduction]

Une voix: Je pensais que vous alliez dire qu'ils ont besoin de beaucoup de sommeil.

[Français]

Mme Lalonde: Non, ils sont habitués à travailler la nuit. Je peux vous faire une confidence. Mon fils travaille la nuit sur son ordinateur parce que l'ordinateur n'est pas disponible le jour. Les jeunes sont habitués à faire des choses difficiles. Quand ils se trouvent un contrat, au lieu de les aider, on les siphonne.

J'aimerais que les membres du parti au pouvoir soient prêts à se laisser convaincre que ça n'a pas de bon sens.

La définition de «rémunération assurable» dit:

Pour ce qui est du salaire maximum assurable, on ne peut pas apporter en comité d'amendements qui augmentent le produit fiscal. J'ai constaté ça en lisant Beauchesne, et ça m'a beaucoup peinée parce que l'amendement que j'aurais aimé apporter avait pour but d'augmenter le salaire maximum assurable. En faisant ça, on a le même argent disponible. Ce n'est pas grave pour les grandes entreprises, car elles sont favorisées par rapport aux PME, comme les PME nous l'ont dit.

Qu'est-ce qu'une PME va gagner, à part la période transitoire, de la réduction de la cotisation d'un employé? Elle va recevoir 7,28 $, alors que les grandes entreprises, avec la réduction du salaire maximum assurable, vont chercher 500 millions de dollars. Tous, y compris le Conseil du patronat et l'Association des manufacturiers canadiens, l'ont reconnu.

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C'est une situation injuste, et il faut plus de cinq minutes pour débattre de ces articles, parce que c'est sérieux.

C'est curieux que le gouvernement choisisse de donner des cadeaux aux grandes entreprises - tout le monde est d'accord sur ça - et aux hauts salariés et de faire payer les jeunes et les PME. Vous riez, mais nous prenons cette affaire-là très au sérieux. Peut-être que le rire, en vous ouvrant la bouche, vous rendra plus accueillants à nos propos. Cette question du salaire maximum assurable est fondamentale si on veut faire une vraie réforme.

Si vous aviez pu prendre cette orientation, le comité aurait pu faire des propositions qui auraient permis qu'on s'attaque à certains problèmes de la loi actuelle sans être obligés de faire payer un prix aussi élevé aux femmes notamment, parce que les femmes, surtout celles qui vont devenir enceintes, auront plus de difficulté à se qualifier pour le congé de maternité. Ça n'a pas de sens que d'un côté, on fasse un cadeau aux grandes entreprises et aux hauts salariés et que, de l'autre, on prive les femmes enceintes d'un congé de maternité qui déjà n'est pas vraiment généreux.

Je sais que la ligne de partie est exigeante. M. Nunziata l'a vu. Mais notre seul espoir, c'est que, malgré la situation actuelle, vous entendiez nos propos et reconnaissiez qu'ils sont sensés et visent l'amélioration de la situation du monde. Le coeur, ce sont les revenus, et les dépendent du taux de cotisation.

Si on avait pu aller en deuxième lecture et faire les discours qu'on fait normalement à ce moment-là, vous les auriez lus, même si vous ne nous aviez pas écoutés à la Chambre, et on aurait pu commencer à débattre de cette fichue question des revenus dans le but de faire un régime sensé. On aurait pu aussi se parler de la question de l'emploi, parce que c'est grave de dire que les gouvernements ont des politiques contradictoires. D'un côté, ils veulent favoriser l'emploi, notamment l'emploi des jeunes, et de l'autre, ils favorisent un système d'assurance-chômage qui favorise le double emploi et le temps supplémentaire.

En relisant attentivement tout le projet en fin de semaine, j'ai été surprise de voir comment ces articles favorisaient le double emploi et le temps supplémentaire. Quand quelqu'un a deux emplois et fait 50 heures par semaine, il est favorisé de trois manières: il est favorisé par l'accessibilité plus rapide, il est favorisé parce qu'il a plus d'argent et il est favorisé parce qu'il a payé plus de cotisations.

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Trouvez-vous logique, alors que le ministère du Développement des ressources humaines a un comité qui a fait des recommandations sur la réduction du temps de travail, que le système d'assurance-chômage favorise les gens qui ont deux emplois et qui font 55, 60 et 70 heures par semaine? Cela leur donne un meilleur accès au régime, cela leur donne plus d'argent et cela leur donne des prestations d'une plus longue duré. C'est le contraire d'une politique d'emploi. Cela n'a pas de sens.

Alors quand le ministre a dit que les manifestants étaient exploités par des agitateurs professionnels, il faisait injure d'une certaine manière à la compréhension des gens. Ce n'est pas surprenant que la mobilisation ait été la plus forte dans les régions éloignées.

J'ai travaillé longtemps dans les syndicats et j'ai assez pratiqué l'action pour savoir que ce n'est pas vrai qu'on organise de grosses manifestations n'importe quand et facilement. Les organisations syndicales peuvent essayer de réunir le monde, envoyer des lettres, des autobus et s'assurer que les gens soient bien amusés dans l'autobus, mais cela ne suffit pas. Mais quand on réunit à Rivière-du-Loup 5 000 personnes, quand il y a à répétition des manifestations réunissant des milliers de personnes dans les régions éloignées, c'est que les gens comprennent que quelque chose les touche. On ne peut pas les blâmer parce que l'assurance-chômage fait partie de leur vie.

Le Conseil exécutif de l'Île-du-Prince-Édouard - dont je lisais hier soir encore la prestation extrêmement intéressante - disait que le gouvernement se trompe, que ce n'est pas la bonne direction, qu'il ne faut pas pénaliser le monde, que cela ne donnera rien.

M. Regan s'en souvient: il a posé la question, et il s'est fait répondre que son amendement n'empêcherait pas les gens de stocker les heures. Ils ne stockeront pas les jours, mais les heures. Ils vont s'adapter au système.

On est loin d'avoir épuisé le débat sur cette question-là, mais j'ajoute ceci. Il est encore possible que le présent gouvernement réunisse ceux qu'au Québec on appelle les partenaires, qu'il ait avec eux, séparément ou ensemble, une vraie discussion.

Le ministre Martin n'est pas pressé. Il aura un milliard de dollars de plus cette année s'il n'y a pas de réforme. On ne peut pas dire qu'il faut faire vite, qu'il est important d'adopter le projet loi, parce qu'autrement, il va y avoir moins d'argent pour M. Martin.

Si on adopte le projet de loi, il va y avoir un milliard de dollars de moins. C'est cela, la vérité. C'est écrit ici, en toutes petites lettres, qu'il faut vérifier auprès des hauts fonctionnaires. Alors on peut prendre le temps qu'il faut pour faire une vraie réforme. Pourquoi le ministre est-il si pressé? Pourquoi ne rencontrerait-il pas les parties ensemble?

En prenant les PME d'un côté et les grandes entreprises de l'autre, les syndicats, les groupes, il y aurait possibilité d'accroître les revenus ou, du moins, de ne pas les diminuer. Il est possible de les accroître et de réduire ensuite la cotisation d'assurance-chômage de toutes les entreprises. Pourquoi commencer par faire un gros cadeau annuel de 900 millions de dollars aux gens qui gagnent de 39 000 $ à 42 400 $ et faire payer le petit monde en bas? Pourquoi commencer par leur faire un gros cadeau et ensuite dire que, parce qu'on va couper le petit monde, il va rester un surplus qui va permettre de réduire les cotisations de tout le monde? C'est contraire au bon sens.

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Le bon sens voudrait qu'on augmente le salaire maximum assurable jusqu'à 45 000 $ ou 46 000 $. Vous permettriez alors de réduire substantiellement les cotisations de tout le monde, sans faire souffrir les gens ordinaires. Il me semble que c'est simple.

Je n'ai pas le goût d'être au pouvoir à Ottawa, mais je vous dirai qu'au sujet de l'assurance-chômage, je souhaiterais que quelqu'un écoute ce que nous disons, parce qu'il est possible de faire quelque chose pour avoir un système adéquat. Il me semble que cela requiert plus de cinq minutes.

Les citoyens qui ont actuellement un emploi espèrent ne pas avoir recours à l'assurance-chômage. Souvent, quand ils travaillent chacun de leur côté dans leur entreprise, ils ne suivent même pas ce qui se passe à la Chambre des communes. Nous ne serons pas peinés de vous le dire. Ce n'est donc pas étonnant que les gens ne participent pas aux manifestations, ne descendent pas dans la rue. Ils ont toutes sortes d'autres problèmes. Il est de notre responsabilité, de celle de l'ensemble des parlementaires et, en l'occurrence, de l'Opposition officielle, de veiller au grain. En effet, ce projet de loi n'a pas de bon sens. J'ose espérer que c'est parce qu'on ne l'a pas étudié comme il le faut.

Il n'a pas de bon sens. Michel Chartrand, autrefois, aurait employé l'expression «cul par-dessus tête». On fait des cadeaux aux hauts salariés et aux grandes entreprises, on fait payer le petit monde, on donne des primes à ceux et celles qui ont deux emplois, dans la période que nous vivons actuellement, en 1996. Cela n'a pas d'allure. Cela n'a pas de bon sens. On ne peut pas se taire et on ne peut pas prétendre que nous ferions notre travail avec une allocation de cinq minutes par article pour l'étude article par article de ce projet de loi.

Nous aurions à notre crédit une petite réussite; je ne sais pas combien de temps il faudra pour cela. Si vous vous demandiez seulement si ce que nous disons a du bon sens! Si vous alliez voir... C'est parce que nous le voyons, parce que nous le savons que nous vous demandons d'examiner le sujet, d'essayer de convaincre le ministre. Rien n'empêche cela. Le ministre des Finances ne serait pas empêché d'atteindre ses objectifs, bien au contraire. Je l'ai déjà dit.

Les grandes entreprises vont-elles crier? Elles seraient bien mal placées pour le faire, car elles paient moins proportionnellement pour l'assurance-chômage que les PME. Cela n'a pas de bon sens. Les PME soutiennent que ce sont elles qui vont devoir payer. C'est ce qu'elles disent et cela non plus n'a pas de bon sens. Ce sont elles qui sont créatrices d'emplois.

Les grandes entreprises n'auraient pas à souffrir de ce que nous proposons. À l'Alcan, comme vous le savez sans doute, les travailleurs qui font des heures supplémentaires se font facilement 70 000 $ par année. Il en va de même pour toutes les grandes entreprises de vos circonscriptions, et vous le savez.

Lorsqu'on réduit de 42 400 $ à 39 000 $ le salaire maximum assurable, on fait quelque chose d'illogique, d'inconséquent, d'incohérent. Si on croit que les cotisations sont trop élevées, eh bien, augmentons le salaire maximum assurable, mais réduisons la cotisation de tout le monde. Il y a quelque chose d'incohérent dans la position du gouvernement, et il faudra sûrement plus que cinq minutes pour me l'expliquer.

Je me suis demandé quelle est la raison ultime qui explique que le gouvernement se lance dans cette réforme contraire au bon sens. Il est certain qu'on pense à ce que dit l'OCDE, à savoir qu'il faut des réductions ici et là. Par ailleurs, on s'est fait dire que, dollar pour dollar, l'assurance-chômage était le meilleur instrument de stabilisation économique.

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Si la cotisation d'assurance-chômage est trop élevée, il y a une solution. Et quand j'ai posé la question, personne ne s'est opposé à ce qu'on augmente le salaire maximum assurable parce que ça permet de réduire la cotisation de tout le monde.

Je me suis demandé pourquoi le gouvernement faisait cela. La seule réponse que j'ai trouvée, c'est qu'il veut réduire la tendance à la hausse des salaires. Il veut «régler la question des saisonniers»; c'est sûr qu'il faut la regarder. On a parlé de la dépendance. La dépendance, ce n'est pas la dépendance des gens, mais celle des industries saisonnières. Il faut voir ce qui est possible et ce qui n'est pas possible. Mais ce n'est pas en coupant les prestations maintenant que l'on va s'assurer que ces gens-là vont, par miracle, découvrir des emplois quand il n'y en a pas et quand les dirigeants disent qu'il n'y en a pas.

Cette réforme de l'assurance-chômage, qu'on ne peut pas étudier en 15,8 heures, est une réforme majeure qui change l'orientation du régime. Non seulement elle réduit encore le nombre de chômeurs qui vont être couverts par l'assurance-chômage, mais ses effets structurants sur l'économie seront complètement différents.

D'autres chercheurs sont venus nous dire que, finalement, le régime ne fonctionnait pas si mal. D'autres, qui étaient d'accord sur un certain nombre de propositions, nous ont dit d'y aller avec prudence car les coûts sociaux pouvaient être énormes. M. Van Audenrode, le professeur de Laval, disait que la réforme, par son ampleur et sa complexité, était telle qu'aucun économiste ne pouvait en prédire les effets. Avec tout le respect que j'ai pour le modèle mathématique du ministère, je suis certaine que les limites du modèle mathématique sont les limites du modèle mathématique. Quand on parle d'effets structurants, ils dépassent largement les réponses que peut nous donner le modèle mathématique.

Le régime des heures comporte beaucoup de problèmes. C'est, à première vue, une bonne réforme. En tout cas, c'est ce que certains nous ont dit. Mais plus on creuse, plus on s'aperçoit que, dans le fond, c'est un cataplasme qui est mis là pour compenser une disposition qu'on aurait pu mettre. Tous les emplois qu'on occupe en même temps peuvent être comptabilisés aux fins de l'accès au régime. Les emplois peuvent aussi être comptabilisés pour les prestations, mais là on favorise ceux qui ont un emploi permanent plus un emploi temporaire. On leur donne un meilleur accès, plus d'argent, et des prestations pendant plus de temps, ce qui a des effets imprévisibles.

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Quand on parle de microéconomie et de macroéconomie, il ne s'agit pas de la même chose. Si on incite les gens à occuper deux emplois, est-ce que la situation du chômage en sera améliorée? Comment cela pourrait-il être?

Peut-être qu'après tout il faudra remercier l'auteur de la proposition que nous devons étudier puisqu'elle nous permet enfin de parler du fond de la question. Nous continuerons à le faire, parce que pour en parler, nous ne pouvons accepter cette motion visant à limiter les débats à cinq minutes. Il me semble que cela vaut aussi pour les libéraux membres de ce comité. Expédier la réforme de l'assurance-chômage en 15 heures, à l'étape de l'étude article par article, ne serait pas une belle plume à mettre à votre chapeau. C'est le moins que je puisse dire.

La documentation est abondante. Nous avons fait nos devoirs et nous espérons que vous comprendrez que nous voudrions vous convaincre de convaincre le ministre. En effet, tout amendement qui comporte une dimension financière doit être proposé par le ministre. En lisant Beauchesne, je me suis rendu compte qu'il en était ainsi. En cette matière, il n'y a pas grand-chose qu'on puisse toucher sans toucher à un aspect financier. Si on modifie les heures, ou n'importe quelle dimension importante comme l'annualisation, il y a toujours de l'argent en jeu.

Si vous convainquez le ministre que la réduction du salaire maximum assurable n'a pas de bon sens, vous pourrez obtenir que le comité fasse un vrai travail. Je vous assure que nous serions prêts à le faire et je suis certaine que les témoins et les groupes qui ont comparu devant nous le seraient aussi.

Les entreprises, grandes et petites, ont tenu des propos différents. On pourrait croire qu'elles avaient fait une étude exhaustive, mais je les ai assez fréquentées pour savoir qu'elles font parfois les coins ronds. C'est dans l'échange entre les entreprises, grandes et petites, et avec les autres partenaires qu'on peut arriver à savoir où se loge ce qu'on pourrait appeler la vérité sociale, une espèce de consensus qui permettrait d'éviter le gâchis que va créer ce projet de loi. Ce sera sûrement un vrai gâchis.

Je termine en espérant vous avoir convaincus. Je continuerai à chercher à le faire.

[Traduction]

Le président: Peut-on procéder à la mise aux voix?

[Français]

Mme Lalonde: Non! Oh, non!

[Traduction]

Le président: Vous n'êtes pas prêts à voter?

[Français]

M. Fillion (Chicoutimi): Monsieur le président, vous m'accordez la parole?

[Traduction]

M. Nault: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Ces députés sont-ils officiellement membres du comité?

Le président: Oui, ils remplacent leurs collègues.

M. Nault: D'accord.

[Français]

M. Fillion: Monsieur le président, je vous remercie d'avoir accepté que je remplace un membre permanent du comité au grand désarroi des gens d'en face. Vous avez respecté la procédure et je vous remercie de me permettre d'apporter mon point de vue sur la question de la réforme de l'assurance-chômage.

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Je n'ai pas participé à toutes les délibérations de ce comité. Je n'ai pas non plus entendu la contribution des témoins qui ont défilé devant ce comité depuis le début des discussions. Par contre, ayant pris connaissance des documents qui ont été présentés, je suis capable de me rendre compte que, lorsque que quelque 200 témoins ont été entendus par ce comité, ces gens-là n'ont pas dit seulement des sottises.

Il y a plus de 200 organismes qui ont livré des commentaires à ce comité, et je pense qu'on devrait au moins respecter la majorité des dires de ces gens-là. J'aimerais rafraîchir la mémoire à quelques membres du Comité permanent placés en face, en leur signalant l'apport de certains témoins. Ces députés pourraient par la suite en faire part au ministre qui, lui-même, en tiendrait compte dans sa réforme en y apportant des correctifs.

Vous avez peut-être oublié ces gens ou ces organismes, parce que ça fait longtemps qu'ils sont venus; des mois et des mois se sont écoulés depuis ce temps-là. Je vais donc en citer quelques-uns pour vous rafraîchir un peu la mémoire. Par la suite, je vous ferai part des commentaires que j'ai entendus moi-même dans mon comté, puisque j'ai aussi eu l'occasion de rencontrer beaucoup d'organismes qui se sont plaints à ce sujet-là.

Selon le Syndicat des pêches et travailleurs assimilés, la meilleure chose à faire avec ce projet de loi, c'est de le reléguer aux oubliettes. Ils ne peuvent appuyer le programme de réforme de l'assurance-chômage pour les travailleurs du secteur des pêcheries tel qu'il est décrit.

La Fédération du travail de Terre-Neuve et du Labrador a signalé aux membres de ce comité que l'adoption du projet de loi mènera à la destruction du régime d'assurance-chômage et à l'abolition des principes d'assurance. Le projet de loi, selon ces gens, ne tient absolument pas compte du chômage structurel. Je pourrais aussi citer la Fédération des travailleurs et travailleuses du Nouveau-Brunswick. Donc, ce n'est pas seulement au Québec que les gens ont élevé un tollé de protestations par rapport à cette loi-là.

La Fédération des travailleurs et des travailleuses du Nouveau-Brunswick nous signale que ce projet suit l'orientation amorcée par les utilisateurs productifs. Le problème est relié non pas au régime d'assurance-chômage, mais plutôt à la pénurie d'emplois. On signifie simplement que ce n'est pas une façon de créer des emplois. Et l'on pourrait continuer de la sorte assez longuement.

J'aimerais également vous faire part d'un commentaire concernant les définitions sur lesquelles on a achoppé et qui nous ont fait aboutir à cette motion-là. Lorsqu'on regarde un à un les termes qui sont définis à l'intérieur de l'article 2, on voit qu'ils nous renvoient continuellement à d'autres articles de la loi.

Donc, il est difficile pour les gens qui n'ont pas suivi les débats et qui n'étaient pas membres du Comité permanent de faire les liens qui s'imposent. Donc, il était tout à fait naturel de prendre le temps nécessaire pour se faire expliquer dans quel sens était employée la définition de chacun de ces termes, surtout lorsque ces termes s'appliquent dans différentes lois dont il est question dans le projet de loi.

Nous avons perdu du temps au début. Je suis arrivé ici à 19 h 30. Pendant une heure, on a discuté du projet de loi pendant au plus une dizaine de minutes et on a passé le reste du temps à discuter d'une question de procédure.

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Cette question de procédure nous a fait perdre énormément de temps. Si les gens d'en face avaient voulu permettre à l'opposition de poser des questions pour obtenir les renseignements pertinents de la part des gens du ministère, nous aurions pu avancer correctement et graduellement à l'intérieur du projet de loi puisque ces définitions, à mon avis, sont les fondations de tout l'édifice.

On ne peut pas demander à des gens qui ne sont pas des avocats ou des notaires, qui ne travaillent pas régulièrement avec la loi, de bien interpréter ces termes. On nous prive ce soir des explications et des commentaires pertinents que les fonctionnaires du ministère auraient pu nous donner pour nous permettre d'approfondir chacun de ces termes. Nous avons donc perdu énormément de temps à nous expliquer au niveau d'une procédure.

Regardons seulement les termes de l'article 5 au niveau des emplois assurables. Vous avez là une liste d'emplois qui sont qualifiés comme étant assurables. Et un peu plus loin, on dit simplement que:

(7) La Commission peut, avec l'agrément du gouverneur en conseil [...] prendre un règlement en vue d'inclure dans les emplois assurables...

Il y a un, deux, trois ou quatre autres points qui nécessiteraient des éclaircissements.

À ce moment-là, on semble vouloir donner beaucoup, beaucoup de pouvoirs à la Commission et au gouverneur en conseil quand il s'agira d'élargir la notion d'assurabilité. Ce même langage revient pour exclure d'autres emplois des emplois assurables. C'est donner un peu trop de latitude à la Commission et au gouverneur en conseil.

Pour comprendre le sens de cet article, nous aurions pu recevoir de la part des fonctionnaires des commentaires très pertinents.

Si ce projet de loi du gouvernement fédéral est adopté, il aura naturellement un effet catastrophique sur l'emploi à la grandeur du pays, mais j'aimerais profiter de l'occasion qui m'est offerte par cette motion-là, qui voulait réduire à cinq minutes le temps de débat sur chacun des articles, pour vous faire un peu le portrait de ce qui se passe dans ma région, dans la région du Saguenay - Lac-Saint-Jean et le comté de Chicoutimi.

J'ai rencontré beaucoup d'organismes et beaucoup de gens, et je dois vous dire que cette réforme met un frein à l'économie dans une région où la situation économique est déjà très précaire.

Si vous lisez les statistiques provenant d'un organisme que l'on paie avec l'argent des contribuables canadiens, Statistique Canada, vous avez dû remarquer que ma région détenait depuis de nombreuses années le trophée du chômage au Canada. C'est peu dire.

Imaginez l'effet que pourra avoir la réforme sur cette région, si elle est adoptée telle que présentée. C'est, à toutes fins utiles, enlever toute chance de survie à cette population qui, au niveau de l'emploi, est déjà fortement éprouvée. Ce sont des choses que l'on doit prendre en considération.

Si telle est la situation dans mon comté, dans ma région, je suppose que la situation est la même dans d'autres parties du Canada, autant dans les comtés des libéraux que dans ceux des réformistes, ou encore dans les nôtres. Nous avons de ces situations-là. Est-ce que nous avons les moyens de tolérer une telle activité? Est-ce qu'on a le moyen de détruire des formes d'assurance qui donnaient à ces populations-là la possibilité de s'en sortir?

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Le gouvernement reste sourd aux cris que lance la majorité de la population, la majorité des organismes. Je ne pense pas que ceux qui ont manifesté contre le projet de loi sont tous des activistes. Ce n'est pas vrai. Ce ne sont pas des professionnels. Ce ne sont pas non plus des paresseux. Je vais vous en faire la démonstration puisque j'ai regardé un peu partout.

Ce ne sont pas nécessairement des chômeurs qui étaient dans ces manifestations, pas plus que des séparatistes. Mais devant ces manifestations, le gouvernement n'a pas réagi. Pourtant ce n'est pas seulement au Québec que se sont tenues ces opérations-là.

Dans mon comté, il y en a eu dans toutes les municipalités: Saint-Fulgence, Fernand-Boileau, ville de La Baie, dans le Bas-Saguenay. Ça commence à faire du monde. Ce sont des gens élus, eux aussi. Ce sont des gens qui doivent rendre des comptes à leur population.

Pourtant l'assurance-chômage ne fait pas partie des attributions des conseils de ville et des MRC. Ils se préoccupent de l'emploi parce que c'est un moteur économique, mais ces gens-là savent très bien que la réforme de l'assurance-chômage provient du fédéral et que le geste qu'on veut poser actuellement détruira certaines économies.

Ces gens-là se sont appuyés sur des considérants. Ils ont pris le pouls de leur population et ils en sont tous venus à la même conclusion, à savoir que le Québec était l'une des provinces les plus touchées par cette réforme.

Ce projet de réforme touche particulièrement les travailleurs en situation de précarité. Dans la région du Saguenay - Lac-Saint-Jean, il y a notamment deux catégories de travailleurs en situation de précarité: les femmes et les jeunes. Ce sont des travailleurs ou des travailleuses à temps partiel qui ont beaucoup de mal à joindre les deux bouts.

Cette réforme pénalise également les prestataires de l'assurance-chômage en augmentant le nombre de semaines de travail exigées et en réduisant les prestations. On augmente le nombre de semaines de travail, on réduit les prestations, et on va les retirer lorsqu'ils seront admissibles, après des enquêtes qui n'en finiront plus.

Le gouvernement aurait plutôt dû annoncer des programmes de création d'emplois qui auraient permis de faire virer l'économie, de faire tourner la roue. Plus il y a de gens qui travaillent, plus il y a de gens qui participent à la caisse et moins on a de prestations à accorder. À ce moment-là nous développons une économie qui est en santé. D'ailleurs, la caisse d'assurance-chômage, qui va enregistrer un excédent de 5 milliards de dollars, aurait pu en avoir un plus élevé si on avait su créer des programmes d'emploi.

.2250

Cette réforme vient détruire les outils collectifs qu'on avait réussi à se donner avec le temps. Les gens qui étaient là avant nous ont fait des choses. Aujourd'hui, on veut sabrer tout ça. On veut éliminer ce qui a été fait. Il y a des choses qui avaient du bon sens dans ça. Ces outils collectifs de protection sociale avaient été construits sur des consensus et on s'aperçoit que des consensus se sont formés contre le retrait de ce projet de loi.

Je vous assure que les arguments qui ont été employés par les municipalités et les différents organismes sont vrais. Ce fut vérifié à l'intérieur du comté. Ce ne sont pas des gens dangereux, des activistes qui en sont venus à cette conclusion. Ce ne sont pas arguments qui ont été pris en l'air. C'est simplement la réalité, et c'est ce que les gens veulent. Ils veulent avoir des projets concrets et non des projets qui vont tout détruire.

J'ai également eu l'occasion de rencontrer des syndiqués, des gens qui pourraient ne pas s'intéresser à ce projet de loi puisqu'ils cotisent à la caisse de l'assurance-chômage depuis 20 ou 25 ans et ont des emplois permanents. Ils sont chanceux, car ils n'ont pas eu à l'utiliser. Mais ces gens ont tout de même fait sentir leur poids en s'élevant contre ce projet de loi. Ils l'ont qualifié d'inéquitable, d'injuste et d'inefficace. Ils lançaient ce message, non pas pour eux-mêmes, non pas pour leur famille immédiate, mais en pensant aux gens qui seraient affectés par de telles mesures, les gens qui n'ont pas d'emploi ou qui ont des emplois précaires.

Ce sont toujours les mêmes classes de la société qui deviennent de plus en plus pauvres: les femmes, les jeunes, les gens qui ont la responsabilité de familles monoparentales.

Sur ce fait, j'aimerais vous faire part du témoignage d'un chômeur qui, lui, nous dit simplement ceci. Si les gens prennent la peine d'écrire ou d'en parler à leur député, c'est qu'ils veulent que nous puissions débattre de leurs préoccupations. Naturellement, ce n'est pas à l'intérieur de la limite de temps minime qu'on a voulu nous accorder pour discuter de chaque article que l'on aurait pu transmettre le message des gens que nous représentons. On représente des gens qui ont de la difficulté.

Voici ce que ce citoyen me disait. Je lui ai dit de le mettre par écrit et on va voir ce que ça va donner. Pour lui, la réalité est celle-ci:

Ça ne vient pas d'un intellectuel. Ça vient de quelqu'un qui, à l'occasion, se retrouve sur l'assurance-chômage. Il poursuit en disant:

Il faut plus de cinq minutes pour faire passer un message comme celui-là. Ce message, à mon avis, est celui d'une bonne partie de la société.

.2255

Il poursuit en disant:

C'est le commentaire d'un simple citoyen. Il se qualifie lui-même de simple citoyen, de chômeur, mais un chômeur qui a le coeur à la bonne place. Pour lui, le projet de loi que le gouvernement veut faire adopter par le Parlement va le frapper directement à ses tripes, va l'atteindre dans sa dignité. Ce sont tous les gens qui l'entourent - la famille, les enfants - qui auront à subir les effets de la réforme.

J'aimerais également vous entretenir du chômage chez les jeunes. Je suis un enseignant de carrière, et les jeunes et leur situation m'intéressent au plus haut point, d'autant plus que pour eux, avoir un emploi est très difficile.

Autrefois, on n'avait pas le temps de terminer notre cours scientifique que déjà les industries venaient nous repêcher dans nos classes pour un emploi. Aujourd'hui, les jeunes, de plus en plus, doivent poursuivre des études. Il obtiennent de grands diplômes, des maîtrises, mais encore là, ce n'est pas suffisant.

Nous avons des gens qui, à force de courage et parce qu'ils n'avaient pas d'emploi, ont poursuivi leurs études et fait de la recherche. Ils en sont sortis avec des papiers en or, des doctorats, mais ils n'ont pas trouvé d'emploi par la suite. Ils ont obtenu ces doctorats à l'aide de subventions minimes de la part du gouvernement, qui a coupé dans la recherche et du développement dans certaines universités. Les gens ne trouvent pas d'emploi.

Je vais vous citer un économiste de ma région qui travaille pour le ministère du Développement des ressources humaines et qui nous signale qu'au cours des dernières années, le nombre de personnes sans emploi et à la recherche d'un emploi a connu des hausses continues et fort prononcées. Ce sont ses termes mêmes. Ce sont les termes d'un économiste.

Ainsi, au au Saguenay - Lac-Saint-Jean, on a terminé l'année 1995 avec 19 000 chômeurs, comparativement à 17 000 en 1990. Cette augmentation du chômage est attribuable aux jeunes qui ne se trouvent pas d'emploi. Il y en a un fort pourcentage. D'ailleurs, on le signale dans certains documents ou mémoires déposés par des organismes lors de vos consultations. Lorsqu'ils ne se trouvent pas d'emploi dans une région, c'est exode qui les attend un peu partout. On les retrouve dans d'autres provinces. Puis, à un moment donné, ils vont grossir le nombre de chômeurs de l'autre province. C'est une espèce de cercle vicieux qui n'en finit plus. Donc, chez les jeunes, le taux de chômage était beaucoup plus élevé que dans toute autre catégorie de personnes. Et ce n'est pas le coeur qui leur manque.

Pourquoi ne pas prendre les surplus de la caisse d'assurance-chômage pour créer des programmes d'emploi qui permettraient à ces jeunes-là de faire fonctionner l'économie? Un emploi créé peut en créer deux ou trois autres.

.2300

C'est un tableau assez noir de la situation de l'emploi chez les jeunes, mais c'est la réalité. Il ne faut pas s'en cacher. Cette génération-là, au rythme où on l'entretient, est très calme et n'a pas trop de soubresauts, mais faites attention: à un moment donné, elle peut se réveiller. Lorsqu'elle se réveillera, elle nous demandera de répondre de notre inaction. On aura à leur dire si cette réforme-là répond aux besoins de ces jeunes-là.

Pour moi, la réponse est déjà connue. Il n'y a rien pour les attirer. On augmente les heures de travail et on étire. On élève le nombre nécessaire pour être admissible.

À un moment donné, ils auront du mal à payer leur scolarité. Et devant l'inaction, ils continueront à quitter leur région et essaieront de trouver de nouveaux débouchés ailleurs. Cependant, il n'en trouveront pas plus. Ils reviendront et, à ce moment-là, ce seront les parents qui devront assumer la précarité de leur situation.

Ce projet contient-il une mesure pour contrer une telle situation? Je ne le pense pas. Je n'en ai vu nulle part. Pourtant j'ai suivi les débats.

Les députés du Bloc québécois du Comité permanent du développement des ressources humaines ont continuellement informé la population de l'évolution des travaux du comité.

Ce n'est pas qu'on manque d'information, mais il ne nous a pas été démontré qu'il y avait des progrès marqués qui auraient permis aux jeunes de se retrouver quelque part.

Lorsqu'on parle des jeunes, naturellement, on doit penser à la formation professionnelle. J'ai vérifié le Journal des débats. Vous allez voir que le Bloc québécois a maintes fois pressé le gouvernement de faire en sorte que chacune des provinces assume elle-même la formation professionnelle.

Actuellement, on assiste à la création de beaucoup de cours qui ne débouchent pas nécessairement sur des activités de travail. On forme des gens dans des domaines déjà saturés.

Il ne faudrait pas parler de choses comme celles-là pendant plus de cinq minutes? Que les listes d'attente s'allongent dans les cours qui ne débouchent pas sur des emplois, ce n'est pas grave, mais n'en parlons pas. On va essayer de régler le problème en cinq minutes. Plus vite la loi sera adoptée, mieux ce sera, mais on verra les conséquences plus tard. Ce n'est pas de cette façon qu'on devrait agir. Essayons de prévoir les conséquences d'abord.

Qu'est-ce qui va arriver une fois la loi adoptée? On contribue énormément, par ces gestes-là, à faciliter le décrochage scolaire. Le décrochage scolaire engendre d'autres problèmes, des problèmes familiaux, des problèmes d'alcool, de drogue et ainsi de suite.

.2305

Il n'y a rien de pire que de maintenir une personne dans l'oisiveté. Il faut faire travailler les gens, leur donner quelque chose à faire et non les laisser dans la misère.

Notre génération a réussi à passer à travers parce qu'il y avait de l'emploi. Mais voyez ce qui se passe actuellement dans les hôpitaux, dans les écoles, qui sont pourtant des secteurs publics; après 12 ans, les gens qui y travaillent n'ont pas encore de permanence et n'occupent que des emplois précaires. C'est une situation décourageante.

Or, il n'y a rien dans la réforme proposée qui nous permette de croire que ce sera corrigé ou au moins qu'on tentera de trouver des moyens qui permettent de corriger cette situation. Dans les emplois précaires, surtout occupés par des jeunes, qui existent dans la restauration ou ailleurs et où l'on travaille de 10 à 15 heures par semaine, on ne pourra plus avoir droit aux prestations d'assurance-chômage avec la réforme. Donc, il faut y penser.

Quelle est la solution de rechange qui s'offre? Si on veut les tenir à l'école le plus longtemps possible et les empêcher de travailler, eh bien, disons-le. Si on veut que tout le monde s'instruise et obtienne des diplômes sans savoir qu'en faire par la suite et sans trouver de travail, qu'on le dise. Au moins, ils seront parqués quelque part à l'intérieur d'une école, à l'intérieur d'un immeuble. Ils resteront là où on pourra les contrôler. Est-ce cela la solution ou bien est-ce d'abord de leur fournir des possibilités, dans des domaines où il y a de l'emploi, et par la suite, de leur offrir des programmes pour se trouver un emploi?

Nous sommes en train de sacrifier cette génération. Pensons-y à deux fois avant de la sacrifier. Il y a certainement des choses que l'on pourrait introduire dans la réforme à leur intention. Par ces coupures, on tente de récupérer deux milliards de dollars. Avec ce montant, n'y aurait-il pas moyen de concevoir des projets qui permettraient à nos jeunes de s'en sortir? On pourrait en parler longuement. Je demande aux représentants de la majorité d'avoir une pensée pour leurs enfants et leurs petits-enfants qui sont en train de grandir et à qui nous n'avons rien à offrir.

Allons-nous nous contenter de leur transmettre notre dette? Je veux bien oublier cette histoire de dette pour l'instant. Mais, ce faisant, pensons donc à ce qu'il serait possible de faire avec les cinq milliards de dollars pour aider la génération qui pousse. Il est très important de ne pas en faire une génération comme celle des 25 à 35 ans. Actuellement, cette dernière est presque brûlée. C'est une génération qui ne réussira jamais à obtenir une permanence nulle part.

Il y a un autre point très important. L'autre catégorie de personnes que touchent gravement de nombreux articles contenus dans la réforme est celle des femmes. Ces articles font en sorte que les femmes sont énormément affectées par la réforme. Lorsqu'on prive ce groupe de la population des ressources nécessaires à leur survie, l'économie s'en ressent.

On n'est pas sans savoir que les femmes, la plupart du temps, occupent des emplois traditionnels. Il est temps que cela cesse. Fini le temps où les femmes n'avaient comme métier que celui de secrétaire, de commis de bureau ou de serveuse de restaurant. Elles ont droit à autre chose. Cela ne veut pas dire que ces emplois ne sont pas essentiels, mais ils ne doivent pas être réservés uniquement à ce groupe que constituent les femmes.

.2310

Encore une fois, comme je l'ai démontré pour les jeunes, il y a des efforts à faire au moyen de cette réforme. Pensez un peu plus avec votre coeur qu'avec votre tête. Mettez-y un peu plus d'humanisme. Le facteur humain est important. Il n'y a pas que l'argent qui compte. Il y a d'autres valeurs qui doivent être prises en considération. Comme vous êtes des gens raisonnables, qui avez une expérience vécue impressionnante, qui avez su encadrer vos enfants, qui avez su conserver les liens établis un peu partout, je suis sûr que votre coeur sera sensible à ce qui s'annonce de terrible pour plusieurs groupes de notre société. Je suis sûr qu'en y mettant un peu de coeur, on sera capable d'améliorer la réforme. Vous serez en mesure de le faire en autant que vous y croirez.

Je reviendrai un peu plus tard. Je laisse la parole à quelqu'un d'autre. Merci.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Proud): Merci, monsieur.

Sommes-nous prêts à voter?

[Français]

Mme Gagnon (Québec): J'ai demandé la parole et je remercie le comité de me donner l'occasion de faire valoir les modifications qu'il faudrait apporter à la réforme des programmes sociaux.

[Traduction]

M. Nault: J'invoque le Règlement, monsieur le président. La députée remplace-t-elle nommément un de ses collègues, membre régulier du comité?

Le président suppléant (M. Proud): Oui.

[Français]

Mme Gagnon: Oui, je remplace M. Paul Crête.

Je remercie le comité de me donner l'occasion de faire valoir mon point de vue sur cette réforme. Je comprends mal la motion proposée par les députés du gouvernement qui ferait en sorte que nous n'aurions que cinq minutes pour...

Monsieur le président, pourrait-on demander à monsieur d'aller parler à l'extérieur? Il me dérange. Je pensais que les membres du gouvernement étaient des gens plus respectueux.

Si on n'avait pas mis cette motion de l'avant, on aurait pu étudier au complet l'article 2 sur lequel, justement, on veut nous bâillonner en nous limitant à cinq minutes par intervention. Comme je le disais, si on avait laissé aller les députés de l'opposition qui font leur travail comme on le leur demande...

En effet, je regardais un document qui nous a été remis et qui a été produit pour le Comité permanent du développement des ressources humaines. Je constatais que bon nombre d'intervenants avaient fait des observations dans le même sens que les nôtres.

Ce ne sont pas seulement des gens du Québec ou de mon comté. On y voit des associations de partout au Canada, des associations canadiennes et des fédérations, des chambres de commerce, des rassemblements, des regroupements d'organismes. Je pense que ces gens sont crédibles. Ils représentent une bonne partie de la population du Canada et du Québec.

On devrait avoir au moins la décence d'écouter les observations qui vont dans le même sens que celles qui ont été présentées devant ce comité, auquel je n'ai pas participé. Cependant, la réforme de l'assurance-chômage ou de l'assurance-emploi, tout le monde en a entendu parler. Dans mon comté, on m'a demandé à plusieurs reprises s'il m'était possible d'intervenir pour faire part à ce comité des répercussions que pourrait avoir une telle réforme sur la population de mon comté.

.2315

Je vais seulement reprendre l'ensemble des demandes qui ont été faites par ces organismes, ces comités, ces syndicats, qui disent tous que la meilleure chose à faire est de reléguer aux oubliettes ce projet de loi. On dit qu'on devrait retirer ce projet de loi, qu'il divise les groupes de chômeurs. On répète que c'est un projet de loi qui devrait être retiré, monsieur le président. Ce sont des observations et des recommandations qu'on a faites à ce comité.

On dit encore que ce projet de loi ne propose en fait ni assurance-emploi ni assurance-chômage et ne tient pas compte de l'envergure et des caractéristiques de l'industrie de la construction.

Il y a certainement des gens qui ont fait l'étude de l'ensemble des mesures contenues dans ce projet de loi, lesquelles vont justement à l'encontre de ce que voudrait faire le gouvernement avec un tel projet de loi, soit créer de l'emploi et assurer les prestataires d'assurance-chômage d'un certain appui dans leur recherche d'emploi.

Ce projet de loi ne tient pas compte non plus de l'état du marché de l'emploi en 1996. Ce projet de loi est tout à fait inacceptable, régressif, anti-emploi et plutôt créateur de pauvreté. Plus tôt, mes collègues ont abondamment fait remarquer que ce projet de loi allait affecter certains groupes cibles de la population, comme les femmes et les jeunes. Pour ma part, je pense en particulier au groupe auquel j'appartiens, celui des femmes.

On dit que les femmes occupent 31 p. 100 des emplois où on fait moins de 35 heures. Les mesures contenues dans cette réforme vont faire en sorte que les femmes, qui feront partie des chômeurs fréquents, auront des pénalités à payer lorsqu'elles reviendront sur le marché du travail. Les femmes occupent aussi souvent des emplois de moins de 15 heures par semaine. Dans ce cas, elles ne pourront pas satisfaire aux critères d'admissibilité qui doivent être resserrés.

Je comprends mal qu'alors qu'on a 5 milliards de réserve dans la caisse de l'assurance-chômage, on prenne de telles mesures envers des groupes de la population qui sont actuellement en difficulté et qui n'arrivent pas à se trouver un emploi. Cette réforme ne tient pas compte du marché actuel de l'emploi. Elle va à l'encontre des modifications que le Bloc a proposées au projet de loi sur la réforme de l'assurance-chômage.

Alors qu'on coupera de 640 millions de dollars au cours des trois prochaines années et des 735 autres millions de dollars au cours des années suivantes, comment voulez-vous que les provinces - je vais parler du Québec, mais je sais que d'autres provinces vont aussi subir ce type de coupures - puissent assurer... L'assurance, c'est le fédéral qui l'administre. Pourtant, le fédéral ne met pas un sou dans la caisse de l'assurance-chômage. Par contre, c'est lui qui va condamner un pourcentage de personnes à ne pas être assurables parce que les critères seront resserrés.

Qui va devoir leur venir en aide? Ce seront les gouvernements provinciaux, celui du Québec dans mon cas, parce que ces gens-là vont se retrouver à l'aide sociale. Dans mon comté, il y a un taux assez élevé de gens à l'aide sociale qui sont à la recherche d'un emploi. Il y a plus de 33 p. 100 des gens, dans certains secteurs de mon comté, qui vivent sous le seuil de la pauvreté, qui ont des emplois précaires. Ces gens-là vont se retrouver plus rapidement à l'aide sociale.

.2320

À ce qu'on me dit, monsieur le président, être à l'aide sociale, ce n'est pas très joli. Et ces gens ont beaucoup de difficulté à s'en sortir par la suite. Dans mon comté, plusieurs personnes sont venues me dire que lorsqu'on est à l'aide sociale, même si on fait tout pour s'en sortir, c'est terriblement difficile. Personnellement, je ne sais pas ce que c'est que d'être à l'aide sociale, mais je peux croire les témoignages et les descriptions que donnent ces gens de leur vécu.

Je suis certaine que ces gens-là ne veulent pas nous tromper et qu'ils rapportent avec une certaine vérité la situation qu'ils ont à affronter tous les jours.

Je pense donc que ce projet de loi devrait être repensé. Je trouvais, pour ma part, très intéressant que mes collègues qui assistent au comité à tous les jours puissent poser des questions aux gens du ministère, parce que c'est ce qu'on nous a demandé à nous.

J'ai été très enthousiasmée de voir combien il y avait de gens qui dénonçaient cette réforme des programmes sociaux, cette réforme de l'assurance-chômage et nous demandaient de faire le travail que mes collègues ont fait. Si mes collègues n'avaient pas revendiqué le droit parole sur des articles qui concernent... L'article 2, je pense, est le plus important. C'est celui qui chapeaute toute la loi, qui en définit la structure, et on ne devrait pas passer à côté. Si on n'avait pas proposé la motion d'aujourd'hui, peut-être aurions-nous fini, à cette heure-ci, l'étude de l'article 2.

Je veux féliciter mes collègues d'être intervenus et d'avoir posé les questions qu'ils ne sont pas les seuls à se poser. La population de nos circonscriptions se les pose et je félicite mes collègues d'avoir eu l'audace de le faire.

Il n'est pas facile, en effet, de prendre la parole devant ce comité parce que de l'autre côté, non pas en Chambre mais dans cette salle, on ne semble pas préoccupé par toutes les suggestions qui nous ont été faites et toutes les revendications des différents organismes. Sinon, on essaierait d'écouter ce que l'opposition a à dire.

Si ces gens se trouvaient à notre table, de notre côté, ils auraient tout intérêt à prendre la défense de la population. L'assurance-chômage n'a pas pour but d'aider les gens en manque d'emploi. Quand la caisse de l'assurance-chômage contient plus de 5 milliards de dollars qui vont continuer de s'accumuler au fil des années et que nous vivons une crise économique difficile, je comprends mal qu'on resserre les critères d'admissibilité, surtout quand je sais que les femmes et les jeunes seront les premiers atteints par cette réforme.

Je ne trouve pas cette situation très drôle. Je crois d'ailleurs que si j'étais membre du parti au pouvoir, si je siégeais au gouvernement, je serais sans doute expulsée pour avoir dénoncé le manque de sensibilité de ce gouvernement à l'endroit de gens qui sont sans travail.

Permettre qu'il y ait deux catégories de travailleurs, des chômeurs fréquents et ordinaires, c'est montrer à quel point on est insensible. On crée deux classes de chômeurs; celui qui sera considéré chômeur fréquent va se sentir responsable. Il va sentir que c'est lui qui est de travers parce qu'il n'est pas capable de se trouver un emploi à temps plein, parce qu'il n'a pas la chance d'avoir un travail à temps plein. Ce n'est pas être à l'écoute de ce qui se passe présentement dans le domaine de l'emploi.

Que les gens soient pénalisés parce qu'ils n'ont pas un travail à temps plein, parce qu'ils n'ont pas un travail... Vous êtes chanceux ici. Peut-être que, pour la plupart, vous avez un travail annuel et n'êtes pas obligés de demander l'aide de l'assurance-chômage. La suggestion de diminuer de1 p. 100 chaque année le revenu d'un chômeur parce qu'à toutes les 20 semaines il se retrouve en quête d'emploi n'est pas le fait d'un gouvernement très sensible au marché de l'emploi.

.2325

Monsieur le président, quand on parle de resserrer les critères d'admissibilité, d'augmenter le nombre d'heures de près du double, cela signifie qu'il sera très difficile d'accéder à l'assurance-chômage. Neuf cent dix heures pour un jeune qui arrive sur le marché du travail ou pour une femme qui a été absente du marché du travail, c'est une autre forme de resserrement des critères à laquelle les gens auront à faire face.

On nous parle de coupures, de resserrement de critères, mais quand je vois que les recettes sont de 5 milliards de dollars, je me dis... Le gouvernement ne donne pas un sou à la caisse de l'assurance-chômage. Je me dis que ces 5 milliards de dollars devraient servir aux travailleurs et aux travailleuses. Ce sont les employés et les employeurs qui paient les cotisations, Or, c'est le gouvernement fédéral qui propose des mesures qu'il n'appelle même plus de l'assurance-chômage mais de l'assurance-emploi. Pourquoi? Je trouve que c'est assez pernicieux. Ce doit être pour en venir à instaurer certains programmes qui empiéteront sur les champs de compétence provinciale.

Le Québec doit faire face à des coupures de 735 millions de dollars et à des coupures éventuelles de 531 millions de dollars annoncées pour les années 1997-1998. Ce sont les gouvernements provinciaux, dont celui du Québec, qui auront à combler ces manques à gagner. J'ai entendu le président du Conseil du Trésor dire qu'il va attendre que les gouvernements provinciaux, dont celui du Québec, annoncent leurs coupures. Ils seront alors très impopulaires, et le fédéral pourra alors démontrer qu'il est le seul gouvernement capable d'assurer le filet de sécurité sociale au Canada. Je trouve que c'est de l'hypocrisie.

Les gens ne sont peut-être pas aussi niais qu'on se plaît à le penser parce qu'ils se rendent compte des tactiques. Les gouvernements qui seraient peut-être en mesure de proposer d'autres types de réforme sont aussi en mesure de faire une lecture juste, monsieur le président. Ils ne sont pas dupes. Ces coupures, on sait maintenant d'où elles viennent. On sait qu'on fait des bénéfices sur le dos de personnes qui ont déjà payé des cotisations, mais qui ne pourront plus désormais avoir accès à l'assurance-chômage.

Une autre mesure que je trouve difficile à accepter, c'est celle qui veut que, dès la première heure de travail, on ait à payer des cotisations. C'est une façon d'aller chercher plus de cotisations dans la poche des travailleurs précaires parce que, bien souvent, ces derniers n'auront pas un travail à long terme. Ils vont avoir payé des cotisations et ils n'auront probablement jamais droit à des prestations. C'est donc une autre mesure que je trouve un peu difficile à admettre.

On sait que les femmes travaillent souvent moins de 35 heures semaine ou même moins de15 heures par semaine. Alors qu'elles auront cotisé dès la première heure de travail, elles ne pourront pas avoir droit à l'assurance-chômage, parce qu'avec le resserrement des critères, le nombre d'heures et de semaines de travail nécessaire aura doublé. C'est donc une mesure que je trouve inacceptable et que nous allons continuer à dénoncer.

Plusieurs clientèles seront inadmissibles à ce programme en raison de cette réforme tant souhaitée par le gouvernement. Nous ne devons pas avoir tout à fait tort puisque tant de personnes ont dénoncé cette réforme. Dans ma circonscription, on m'a demandé à plusieurs reprises, jusqu'à tout dernièrement, si nous allions intervenir sur ce projet de loi, si nous pensions être capables de faire bouger le gouvernement pour qu'il tienne davantage compte du marché de l'emploi et des conditions de vie sociale que nous vivons.

Il y a des drames derrière tout ça. Il y a des femmes qui vont se retrouver à l'aide sociale. Il y a des femmes qui ont de la difficulté à se trouver de l'emploi. Or, ce n'est pas une assurance-emploi, comme on l'a dit. Je pense qu'on devrait plutôt continuer à l'appeler «assurance-chômage» et non pas «assurance-emploi». Je trouve que c'est un détournement de sens que d'appeler ce programme une assurance-emploi.

.2330

C'est une forme d'assurance que nous déplorons, surtout quand on a fait 5 milliards de dollars de profit sur le dos de gens qui ont payé ces cotisations en pensant qu'un jour ils pourraient retirer des prestations d'assurance-chômage.

Les travailleuses autonomes non plus ne seront pas avantagées par cette réforme, non plus que les personnes handicapées. Quand on dit que la proportion des personnes qui retirent de l'assurance-chômage est passée de 87 à 46 p. 100, monsieur le président, ce n'est pas parce qu'il y a plus de gens qui travaillent. Au contraire, les emplois sont de plus en plus difficiles à dénicher et le taux de chômage a augmenté. C'est parce que les critères d'admissibilité sont devenus tellement étroits qu'il y a de moins en moins de personnes qui peuvent avoir accès à l'assurance-chômage.

Je le répète: diminuer les prestations maximales de 448 $ à 413 $ quand on a fait des recettes de 5 milliards de dollars, c'est assez difficile à accepter pour celui qui se retrouve sans emploi. Avec de telles recettes, j'aurais plutôt tendance à me dire qu'étant donné les conditions du marché de l'emploi, il ne faut pas resserrer les critères mais plutôt trouver d'autres méthodes pour que ces gens puissent retirer leurs prestations d'assurance-chômage, parce que ce n'est pas leur faute s'ils n'ont plus d'emploi.

Cette réforme va, au contraire, pénaliser les chômeurs; c'est une réforme qui ne tient pas compte des chômeurs et qui fait en sorte qu'ils se sentiront mal dans leur peau parce qu'ils n'auront pas d'emploi. Il leur sera peut-être très difficile d'en trouver un autre.

On voit toutes les fermetures qui se produisent et que rapportent chaque jour les journaux: fermetures d'usine, fermetures d'entreprise, etc. Je suis certaine que les gens se demandent quand ce sera leur tour de perdre leur emploi. Telle personne, qui a toujours eu un emploi, deviendra peut-être, au cours des années prochaines, un chômeur fréquent. Pour ma part, il m'arrive d'y penser. Je suis certaine que plusieurs autres personnes y pensent aussi et se disent qu'elles auront peut-être droit un jour à l'assurance-chômage. Mais peut-être ne seront-elles plus capables de se trouver un emploi stable; elles trouveront sans doute un emploi précaire, intermittent ou saisonnier.

C'est ce à quoi ce projet de loi n'est pas sensible. C'est comme si la société ne s'était pas aperçue qu'il existe des chômeurs saisonniers et d'autres types de chômeurs. Un chômeur saisonnier est un chômeur qui n'a pas de choix. Un travailleur saisonnier ne se retrouve en chômage par choix, mais parce qu'il n'y a pas d'emploi pour lui durant toute l'année. Pour nous, députés, qui avons un emploi 12 mois par année, ce n'est pas fatigant. Mais un jour, on pourrait occuper un autre siège, celui d'un emploi saisonnier, monsieur le président.

Je remercie mes collègues d'avoir voulu poser des questions. Il est important qu'on puisse y répondre afin d'apporter par la suite des amendements au projet de loi. Je ne comprends pas le gouvernement d'avoir proposé une telle motion.

C'est un motion qui, à mon avis, bafoue quelque peu la démocratie. Le rôle de l'Opposition officielle, c'est d'apporter des amendements à des projets de loi. Nous sommes, en effet, à l'écoute de la population et la population nous dit que cette réforme n'a pas de bon sens, qu'elle ne tient pas compte des intérêts des gens qui perdent leur emploi. Il n'y a pas que les gens sans emploi qui nous en parlent; il y a aussi les gens sensibles à la situation de ceux qui le perdent.

Donc, c'est du détournement et un manque de responsabilité. On se «pète les bretelles» en disant que ce gouvernement est là pour nous garantir la sécurité sociale, le filet de sécurité sociale, l'unité canadienne, que nous vivons dans le meilleur pays au monde. On est pourtant capable de s'emparer de 5 milliards de dollars payés par les travailleurs et les travailleuses et de ne pas les leur remettre.

.2335

Par ailleurs, on n'est pas capable de se serrer les coudes, d'en donner un petit peu plus à la population qui se retrouve sans emploi ou qui travaille présentement et qui paie des cotisations.

Une autre mesure que je trouve tout à fait inacceptable, c'est celle qui fait passer le plafond assurable de 39 000 $ à 42 000 $ par année. Abaisser le plafond équivaut à une somme de900 millions de dollars. Or, on sait très bien que ce sont les grandes entreprises qui vont en bénéficier parce que ce sont les entreprises qui paient de hauts salaires. Donc, au-delà de 39 000 $, ni l'employeur ni l'employé n'auront à payer de cotisations. C'est une incitation à faire du temps supplémentaire.

Je trouve cela inacceptable pour les PME et les petits salariés qui, eux, n'auront pas cet avantage-là. Ils vont avoir un plus petit avantage, parce qu'on a essayé de farder la situation en leur faisant un petit cadeau qui se chiffre globalement à près de 200 millions de dollars; on diminue la prime de 3 $ à 2.95 $. C'est totalement ridicule.

Je ne pense donc pas, pour toutes les raisons que j'ai énumérées, que ce soit une réforme qui tienne compte de la réalité du marché et des...

Quoi, cinq minutes? Demander par une motion qu'on diminue le temps d'intervention des députés qui prennent leurs responsabilités... Cinq minutes, c'est insuffisant parce que mes collègues ont parlé pendant des périodes allant de 20 minutes à une heure et nous n'avons pas fini. Nous n'avons pas étudié paragraphe par paragraphe toute l'orientation de cette réforme.

Je suis un peu déçue. C'est ma première expérience à ce comité. Je croyais que le Comité du développement des ressources humaines était sensible à l'opinion publique et à l'opinion des députés. Le ministre responsable de la réforme nous dit toujours d'apporter des amendements et de nous faire entendre. C'est ce que nous voulions faire ce soir, mais voyez ce qu'on fait avec cette motion.

De toute façon, on en parle, on en parle un peu tous azimuts. Ce que j'aurais aimé, c'est qu'on étudie le projet de loi article par article. On en discute de toute façon et vous êtes là à nous écouter. Au contraire, on aurait pu avoir une saine discussion entre les membres du gouvernement et ceux de l'opposition, article par article. Ce ne sont pas les questions qui ont été soulevées qui ont pris du temps, monsieur le président, mais plutôt l'objection des députés du gouvernement.

En tout cas, j'ai calculé qu'on a dû perdre une bonne heure et demie. C'est maintenant terminé et on ne veut pas en discuter. Je n'ai pas vu qu'une seule question ait fait l'objet de deux et trois interventions, monsieur le président. Plusieurs questions ont été posées auxquelles nous cherchions à avoir des réponses des gens du ministère. Si on avait abordé le processus sérieusement, on aurait permis d'adresser les questions aux membres du ministère, du gouvernement.

C'est incroyable de voir comment cette réforme est inadmissible pour les femmes, les jeunes et pour les gens qui ont des emplois précaires, des emplois à temps partiel, soumis à des horaires irréguliers et qui se retrouvent sans salaire, encore une fois dans des conditions précaires. C'est cela, le marché actuel de l'emploi.

J'ai une jeune à la maison. Je vois que c'est difficile même quand on a des diplômes. Autrefois, on nous disait que s'instruire c'était la richesse. On pouvait normalement espérer trouver du travail. Maintenant, les jeunes finissent à l'université et ne trouvent pas d'emploi.

.2340

On dit encore, il est vrai, que ceux qui sortent de l'université ont peut-être plus de chances de se trouver un emploi. Il faut penser aussi aux autres et les autres, ce sont les chômeurs précaires, les gens qui se retrouvent trop souvent sans emploi.

Quand on emploie l'expression «assurance-emploi», on joue sur les mots. C'est une formule très ironique. Il ne s'agit pas d'une assurance-emploi, parce qu'une assurance-emploi comporterait des aspects de formation professionnelle, domaine qui relève des provinces. Ce projet de réforme ne tient pas compte aussi de la volonté du gouvernement du Québec et de l'ensemble des intervenants du milieu du travail, des syndicats, de la CSN, de la FTQ. Il y a plusieurs intervenants, dont le Conseil du patronat. On ne tient pas compte de la volonté du Québec. Ce sont eux qui feront la politique de l'emploi, parce que cette politique devra être souple et adaptée aux réalités du marché et du milieu. Celle que nous avons ici ne permettra pas cela.

Tout ce que cette réforme-là va permettre, c'est de faire des programmes. C'est pourquoi on l'appelle l'assurance-emploi, parce qu'une assurance-emploi donnerait le feu vert à des programmes qui viendraient empiéter sur les compétences des provinces, qui créeraient des chevauchements avec les organigrammes provinciaux, de même que le feu vert à des ententes avec les organismes communautaires. C'est une réforme pernicieuse.

Les députés du Bloc québécois ont été élus pour parler de la souveraineté mais aussi des chevauchements et des dédoublements, du gaspillage et de la mauvaise gestion de ce type de programmes. C'est donc faire fi de la volonté du Québec, de la volonté de la population du Québec, et vous en paierez le prix lors d'une autre élection.

J'inviterais plutôt ce gouvernement à examiner attentivement tous les amendements, les observations et les recommandations faits en comité afin que cette réforme soit bonifiée.

Vous savez, j'ai regardé aller les choses. La réforme des programmes sociaux a commencé lentement. Puis on a vu de plus en plus de groupes s'y opposer. Eh bien, ils ne peuvent avoir tous tort. Si on pouvait dire que ce sont seulement les députés du Bloc québécois qui s'opposent à cette réforme, peut-être aurais-je essayé de voir si elle n'était pas souhaitable. Au contraire, monsieur le président, cette réforme n'est pas souhaitable. Ce n'est pas ce qu'on veut. Elle ne va pas tenir compte de la situation précaire de plusieurs travailleurs et de chômeurs en augmentant les semaines et les heures de probation et en diminuant les prestations. Ce n'est pas une réforme qui va permettre à nos gens pénalisés par le manque d'emploi et la fermeture d'usines...

J'inviterais plutôt ce gouvernement à être plus attentif et plus solidaire. On parle de filet de sécurité sociale, d'unité nationale. Si ces principes vous tiennent tant à coeur, essayez de comprendre ce qui se passe dans la population en présentant une vraie réforme - vous avez cinq milliards de dollars en surplus - , une réforme qui tiendrait compte des travailleurs et de ceux qui se retrouvent au chômage.

Je termine ici mon intervention. Je suis certaine que mes collègues auront d'autres bonnes suggestions à vous faire et que vous serez à leur écoute. Merci, monsieur le président.

[Traduction]

M. Nault: J'invoque le Règlement, monsieur le président.

Le président suppléant (M. McCormick): Monsieur Nault, pour un rappel au Règlement.

M. Nault: Le député a-t-il rempli le formulaire requis pour remplacer un membre régulier du comité?

Le président suppléant (M. McCormick): Oui, monsieur Nault, il l'a fait.

[Français]

M. Crête: J'invoque le Règlement, monsieur le président.

[Traduction]

M. Nault: Avant que l'on donne au député la parole pour qu'il invoque le Règlement, je tiens à dire qu'il n'est pas membre en règle du comité parce qu'il a changé de place avec le député qui se trouve là-bas, de sorte qu'il n'a pas le droit de parole.

Le président suppléant (M. McCormick): Je suis désolé, mais pour l'heure, il est membre en bonne et due forme du comité.

[Français]

M. Crête: Monsieur le président, il est clairement indiqué au Règlement que tous les députés de la Chambre ont le droit de participer aux débats. C'est très clairement indiqué dans le Règlement. Nous l'avons lu tel quel plus tôt dans Beauchesne. On peut retrouver le passage en question.

.2345

Tous les députés à la Chambre des communes s'intéressent à la réforme de l'assurance-chômage. Qu'on demeure dans n'importe quelle province du Canada, elle aura un impact. Il y a des décisions qui vont avoir des effets dans chacune de nos circonscriptions. Je pense qu'il serait très malveillant de vouloir empêcher un député qui veut intervenir, qui prend le temps de venir ici à une heure indue, de participer au débat. Il serait important que chacun des députés intéressés puisse obtenir le droit de parole.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McCormick): Monsieur Allmand, vous voulez invoquer le Règlement?

M. Allmand: Je crains que ce qu'a dit le député soit inexact. N'importe quel député de la Chambre des communes peut siéger au comité et participer aux délibérations, dans la mesure où les autres membres du comité lui en donne la permission. D'ordinaire, cette permission est automatique, mais ce sont toujours les membres réguliers du comité qui ont la priorité pendant les discussions. Une fois que les membres réguliers ont posé leurs questions, avec l'assentiment de tous, d'autres députés peuvent en poser. D'habitude, c'est ainsi que l'on procède mais il y a des exceptions.

Le président suppléant (M. McCormick): Merci, monsieur Allmand.

Monsieur Nault, pour un rappel au Règlement.

M. Nault: Monsieur le président, je vais être très clair et dire les choses simplement. Si ce que vient de dire le député était vrai, chaque fois qu'un député néo-démocrate ou conservateur décide de participer à nos délibérations, le comité n'aurait qu'à s'incliner, n'ayant pas le droit de les en empêcher, et ils pourraient poser toutes les questions ou faire toutes les remarques qu'ils veulent.

Si le greffier lisait l'article en entier, vous verriez que la dernière phrase explique bien que c'est aux membres du comité de décider si des députés peuvent intervenir. Si les membres du comité s'y opposent, seuls les membres réguliers ou les remplaçants de membres réguliers sont autorisés à faire des interventions.

Il y a longtemps que cet usage est en vigueur à la Chambre et tout le monde interprète cet article du Règlement de cette façon-là. Je m'étonne que les gens au bout de la table ne le comprennent pas, car l'autre jour encore, on a bien vu que les Néo-démocrates qui ne sont pas des membres réguliers n'ont pas pu poser à Bob White toutes les questions qu'ils souhaitaient lui poser. Peu importe qu'un député soit membre associé ou rien du tout, il faut qu'il remplisse les papiers d'usage pour être reconnu comme membre régulier ou remplaçant.

Le président suppléant (M. McCormick): Merci, monsieur Nault.

[Français]

M. Crête: Monsieur le président, je ne suis pas du tout étonné que le député ne connaisse pas le Règlement, car nous avons pu réfuter ses propos quatre fois aujourd'hui. Que cela arrive à un député qui a beaucoup d'expérience, je trouve cela très étonnant.

Je vais vous lire l'article 119.

119. Tout député qui n'est pas membre d'un comité permanent, spécial ou législatif peut, sauf si la Chambre ou le comité en ordonne autrement, prendre part aux délibérations publiques du comité, mais il ne peut ni y voter ni y proposer une motion, ni faire partie du quorum.

Donc, il peut intervenir autant qu'il le veut et le secrétaire parlementaire se fourvoie complètement.

[Traduction]

M. Nault: Excusez-moi, mais vous oubliez une partie de l'article.

Le président suppléant (M. McCormick): D'accord, pour l'instant...

[Français]

M. Crête: C'est mon droit de parole, monsieur le président, qui est en question ici. J'ai pris plusieurs fois la parole aujourd'hui pour invoquer le Règlement. C'est la quatrième fois, je pense, qu'on le réfute. C'est un député d'expérience qui tente de profiter du fait qu'on a moins d'expérience. Il pense aussi qu'il va manipuler l'opposition de la façon dont il le désire. Nous l'avons remis à sa place à plusieurs reprises. J'espère qu'il va le comprendre une fois pour toutes.

Reconnaissez-vous, monsieur le président, que le passage dont j'ai donné lecture autorise le député à prendre la parole?

L'article que j'ai lu n'accorde-t-il pas le droit de parole à mon collègue?

[Traduction]

Le président suppléant (M. McCormick): Monsieur Crête, les greffiers vont prendre cela en délibéré, mais pour l'heure, M. Brien a la parole - et il est remplaçant en règle d'un membre du comité.

[Français]

M. Brien (Témiscamingue): Merci, monsieur le président. Malgré le harcèlement de nos collègues d'en face qui veulent m'empêcher de parler, je vais quand-même m'exprimer, brièvement, je l'espère. Mais, j'ai beaucoup de choses à dire et je vais parler assez lentement pour m'assurer que tout le monde puisse m'entendre.

Je trouve dommage, par exemple, qu'un de mes collègues utilise l'expression «maudit baveux» pendant que je parle, ne sachant pas à qui il s'adresse exactement.

Mais, vous savez, si ce sont des mots qui ne sont pas parlementaires, peut-être qu'ils le sont dans les comités.

Je trouve aussi dommage que, pendant qu'on s'exprime sur un sujet aussi important, certains députés s'amusent à jouer aux cartes sur leur ordinateur plutôt que de porter attention à un débat aussi important.

.2350

J'étais dans mon bureau quand j'ai entendu parler du débat qui avait lieu ici ce soir et quand j'ai entendu dire qu'on voulait limiter mes collègues qui voulaient, comme tout parlementaire, s'exprimer et analyser plus à fond chacun des articles d'un projet de loi aussi fondamental. Je me suis dit alors que je ne pouvais pas rester sans intervenir et sans m'exprimer.

Vous savez, c'est probablement le projet de loi le plus important depuis les élections . Il touche bon nombre de citoyens dans leur vie quotidienne. Monsieur le président, y avez-vous pensé? Limiter l'analyse de chacun de ces articles-là à cinq minutes de débat est complètement insensé. C'est ridiculiser le système parlementaire qu'on disait vouloir modifier, dans le Livre rouge, livre rouge que vous devez connaître puisque c'était votre document de campagne électorale.

Je vous le montre pour être certain que vous vous en souvenez vous. C'était votre bible électorale: réforme parlementaire, respect, dignité des élus et tout le reste. C'est vrai que vous étiez dans l'opposition au moment où vous avez conçu ce document. Vous avez probablement changé d'idée pour plusieurs... Non merci, je n'ai pas envie d'avoir d'autographe. Si je le fais autographier, ce ne sera certainement pas par vous.

Je ne sais pas ce que vous dites là mais je vous sens très préoccupé par le débat qui se déroule.

Monsieur le président, limiter chaque intervention sur chacun des articles à cinq minutes, au moment même où bon nombre de citoyens, à l'heure où l'on se parle, descendent dans la rue, est profondément arrogant de la part du gouvernement. Ils étaient 5 000 à Rivière-du-Loup, en fin de semaine, à manifester contre cette réforme. Ils ont été très nombreux à le faire, au cours des derniers mois et des dernières semaines, principalement dans les Maritimes mais également à Shawinigan. Si vous ne connaissez pas Shawinigan, je vous rappellerai que c'est la circonscription de votre premier ministre.

Ces gens-là se demandent qui va les représenter, qui va les défendre, s'il y a des gens au Parlement qui vont prendre sérieusement en compte leurs considérations, leurs revendications, et ce sans nécessairement qu'on use de représailles s'ils manifestent contre le gouvernement. On a vu toutes sortes de choses au cours de ces manifestations, qui démontrent une certaine intolérance de la part du gouvernement. On a vu même notre premier ministre s'en prendre à des manifestants. C'est assez scandaleux.

J'aurais aimé voir la réaction des membres du Parti libéral si un premier ministre conservateur avait fait la même chose il y a quelques années, pour voir jusqu'à quel point leur réaction à un tel geste de la part d'un premier ministre aurait été virulente.

Mais cela démontre que la chose a touché un point sensible chez quelques députés qui doivent faire pression, j'imagine, à l'intérieur de leur caucus. Effectivement, la pression exercée sur le premier ministre et sur les ministres monte. Ils finissent par devenir un peu agacés de voir qu'ils ont peut-être fait une erreur.

Ce soir, je parlais au téléphone avec une amie qui m'apprenait qu'elle allait bientôt perdre son emploi, comme c'est le cas de bon nombre de jeunes qui occupent des emplois précaires, contractuels, dont ils ne savent pas s'ils seront renouvelés. La personne, qui est quand même de nature assez optimisme, me disait qu'elle ne savait pas si elle allait réussir à se trouver un autre emploi, mais qu'elle croyait que oui. Cependant, elle comptait recevoir pendant un certain temps des prestations d'assurance-chômage. Elle était très inquiète quant aux modifications qui allaient être apportées. Ce n'est pas tout le monde qui connaît les conséquences réelles de la réforme. Souvent, les gens les apprennent à l'usage. C'est pourquoi cette personne voulait avoir des informations. Dans son malheur, elle a la chance de perdre son emploi avant le 1er juillet. Je lui ai dit que son cas tombait sous le coup de la loi actuelle. Bien mince consolation!

Ces gens-là sont inquiets. Cela démontre une chose, monsieur le président, à savoir qu'il existe de l'inquiétude. On se dit qu'il se passe des choses, que ça deviendra de plus en plus difficile. On se demande comment faire pour maintenir un niveau de vie acceptable durant l'intervalle, ou lorsqu'on sera assujetti à un nouveau processus.

Quant aux jeunes, lorsqu'ils perdent un emploi, il leur faut souvent se former davantage, se spécialiser dans un domaine plus pointu pour se trouver un emploi avec des moyens encore moins grands qu'avant, sans parler de toutes les difficultés d'arrimage entre les programmes fédéraux et provinciaux, du système de prêts et bourses, etc.

.2355

.2355

[Français]

Ce n'est qu'une introduction. J'y reviendrai en abordant la question d'un point de vue plus vaste et en ciblant mieux quelques mesures en particulier. J'y reviendrai plus tard, monsieur le président, parce que je trouve inacceptable qu'on veuille limiter ces débats-là.

Donc je vais profiter du temps à notre disposition, pendant le débat sur la motion, pour faire valoir certains points de vue. Dans ma circonscription, comme ailleurs, il y a un certain nombre de personnes que l'avenir du régime d'assurance-chômage préoccupe.

Comment en sommes-nous arrivés là? Comment se fait-il que nous soyons réunis ici ce soir, peut-être pas tous intéressés mais certains oui, en tout cas les membres de l'opposition, pour discuter de la réforme de l'assurance-chômage? Peut-être dois-je vous inclure, monsieur le président? Je sais que vous suivez avec beaucoup d'attention tout le débat et j'ai beaucoup de respect pour le travail que vous faites à l'heure actuelle. Je souhaiterais simplement avoir la même écoute et la même compassion de tous vos collègues. Bref, il y a parfois des espérances irréalistes. Donc, comment se fait-il qu'on en soit là?

Moi, monsieur le président, j'ai une formation d'économiste. J'ai étudié en économie. À un moment donné sont apparus toutes sortes de courants économiques. On a senti la main invisible d'Adam Smith et puis un courant plus keynésien, du nom de John Maynard Keynes, dont les théories économiques sont appliquées, en partie, dans la plupart des pays industrialisés aujourd'hui.

À cet époque-là, on a retenu simplement une partie de sa théorie pour en faire l'application, comme on le fait très souvent d'ailleurs. C'est la même chose avec Marx. Le concept de valeur ajoutée utilisé par les capitalistes a été puisé chez Marx ou a été inspiré par lui en grande partie. C'est sûr que certains capitalistes n'aimeraient pas se faire traiter de disciples de Marx, mais c'est tout de même un peu ça, la réalité.

Pour en revenir à mon ami Keynes, il disait que l'État était un levier très puissant et qu'il y avait, lorsque l'État dépensait de l'argent, des effets multiplicateurs. L'argent investi par le gouvernement dans l'économie pouvait avoir des effets multiplicateurs et le gouvernement devait, en période difficile, injecter des sommes d'argent dans l'économie. En contrepartie, en temps d'abondance, il devait s'assurer de réduire les niveaux d'endettement et ses déficits pour les ramener à un niveau tolérable.

Le gouvernement a retenu seulement la première partie, à savoir dépenser durant les périodes de récession, ce qui fait qu'à la suite de plusieurs cycles économiques, on se retrouve avec un niveau d'endettement très élevé.

Nous faisons face à un problème majeur. Personne du Bloc québécois ne songe à nier le problème des finances publiques. Personne ne nie ce problème-là. Le problème réside dans l'approche employée pour ramener notre endettement à un niveau tolérable.

Depuis que nous sommes au gouvernement, nous avons vu cibler deux grands secteurs. On pourrait parler de trois, puisqu'il y a eu une restructuration de la fonction publique. Cependant, les deux secteurs particulièrement ciblés ont été les paiements de transfert aux provinces et l'assurance-chômage. Or, vous pouvez calculer des pourcentages, dresser des tableaux, ajouter la péréquation, faire tout ce que vous voulez, produire des statistiques toutes plus inutiles les unes que les autres, il n'en demeure pas moins qu'en dollars réels et en nombres absolus, les transferts aux provinces seront moins élevés aujourd'hui qu'ils l'étaient quand nous sommes arrivés au gouvernement. Les transferts aux provinces, monsieur le président, servent à la santé, à l'éducation et à l'aide sociale.

Le gouvernement fédéral fait à peu près le tiers de ses réductions budgétaires dans ce secteur-là, et un autre tiers, dans l'assurance-chômage. Savez-vous, quand on fait des coupures dans l'assurance-chômage, quelle en est la conséquence?

Si la personne qui m'a appelé et dont j'ai parlé plus tôt ne se trouve pas d'emploi après épuisement de ses semaines d'assurance-chômage, qu'est-ce qui va lui arriver? L'aide sociale? Qui paie l'aide sociale? Le gouvernement des provinces. À une époque, le fédéral en assumait la moitié. Ce n'est plus le cas.

Les provinces feront donc face à un problème supplémentaire. On leur met davantage de pression sur les épaules. Ici, on se vante, on «se pète les bretelles», notamment «Superman» ministre des finances, en disant qu'on a réduit le déficit à 3 p. 100 du produit intérieur brut. Je nous vois déjà au Parlement, au mois de février ou mars de l'an prochain, à l'aube d'une campagne électorale probable, alors qu'il annoncera qu'il vient d'atteindre la cible de ramener le déficit à 3 p. 100 du produit intérieur brut. Et je vous vois tous, chers amis du gouvernement, vous lever et lui faire une ovation monstre, sans considération pour la façon dont cela s'est fait ni pour les conséquences à moyen et à long termes.

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