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Opinion dissidente du Bloc Québécois sur le code de déontologie parlementaire

Le Bloc Québécois se dissocie du rapport présenté par la majorité du Comité. Il ne vise pas des éléments importants qui, nous pensons, font partie intégrante d'une approche plus équilibrée du problème de l'éthique parlementaire. L'approche compartimentée, pièce à la pièce, ne fait que confondre les élus et les électeurs et n'a aucun impact réel sur la perception que le public a de ses politiciens. Il semble que les députés du gouvernement ont préféré s'en tenir, coûte que coûte, à la promesse électorale du Livre Rouge libéral sur la mise en place d'un Code de déontologie parlementaire, plutôt que de prendre les moyens nécessaires pour établir un consensus entre tous les partis politiques sur la question et rendre celui-ci efficient. De nouveau, le gouvernement clamera haut et fort qu'il a tenu une autre promesse électorale, alors que dans les faits, il n'en est rien.

Le Bloc Québécois dénonce avec vigueur et déception ce rapport et, est convaincu que seule une approche globale aurait permis de développer des pistes de solution menant non seulement à un code de déontologie mais à des modifications à la Loi du Parlement qui auraient restreint le pouvoir de « l'argent » sur les activités journalières du gouvernement et des parlementaires.

Notre critique se résume à trois éléments principaux:

Deux codes de déontologie, deux poids deux mesures

Le Comité propose la création d'un poste de Jurisconsulte parlementaire dont la responsabilité serait de surveiller et de mettre en application le Code de déontologie. Certains pouvoirs d'enquête lui seraient dévolus. Puisqu'il aurait été nommé avec l'accord unanime de tous les partis représentés à la Chambre des communes et au Sénat, cette personne serait totalement indépendante de tout influence politique. Son autorité s'appliquerait à tous les députés sauf le premier ministre, les ministres, les secrétaires d'État et les secrétaires parlementaires. Bien que nous soyons en droit de nous attendre à ce que l'éthique de ceux-ci soit au-dessus de tout soupçon, ils seront toujours assujettis au code de déontologie actuel du premier ministre, lequel demeure toujours matière à critiques.

Le Bloc Québécois a dénoncé et dénonce toujours le Code d'éthique du premier ministre. Ce Code, mis en place suite aux années sombres du gouvernement conservateur, devrait être un exemple de transparence. Au contraire, le premier ministre s'est contenté de « mesurettes »:

Le Parlement est souverain dans ses fonctions. Le Conseil des ministres est redevable devant les élus du Parlement qui sont l'expression légitime de la volonté populaire. Comme position de principe, le Bloc Québécois soutient que tous les élus et ce, sans exception, doivent être redevables à un seul conseiller à l'éthique, indépendant, nommé suite à des consultations et avec l'aval de tous les partis politiques reconnus à la Chambre. Surtout, il se doit d'avoir des pouvoirs d'enquête indépendants.

Le Bloc Québécois ne peut, de quelque façon que se soit et surtout en appuyant le rapport du Comité, légitimer un système de déontologie parlementaire parallèle sous la responsabilité exclusive du premier ministre.

Le premier ministre ne doit pas avoir un pouvoir discrétionnaire sur l'éthique ministérielle. Bien que le Bloc Québécois ne mette aucunement en doute l'intégrité personnelle du commissaire Wilson, nous nous préoccupons cependant de celle de ses maîtres politiques présents ou à venir... Seuls la transparence, l'indépendance, des pouvoirs coercitifs suffisants et un code applicable également à tous les élus, plus sévère dans le cas des ministres, secrétaires d'État et secrétaires parlementaires, mais administré par la même personne, saura satisfaire le Bloc Québécois. Nous y voyons là l'unique façon de redonner au public confiance dans ses institutions parlementaires et dans les élus.

Malheureusement, le Comité n'a pas reçu le mandat d'élargir la portée de son étude pour tenir des audiences sur des sujets autres que le Code de déontologie. Nous jugeons qu'une approche plus englobante est nécessaire pour traiter les problèmes, tous les problèmes, reliés de près ou de loin à la fonction de parlementaire.

LE FINANCEMENT DÉMOCRATIQUE DES PARTIS POLITIQUES

La déontologie parlementaire pour les élus est beaucoup plus qu'un simple Code. Elle nécessite, certes, de la bonne volonté de leur part mais aussi la mise en oeuvre d'autres mesures que ce soit par l'entremise de lois, de modifications au Règlement de la Chambre ou de règles de discipline supplémentaires pour chacun des caucus de partis politiques.

Le Bloc Québécois considère que le Code de déontologie aurait tout avantage à être mis en application conjointement avec une loi sur le financement démocratique des partis politiques. Ces deux éléments sont indissociables. L'accroissement des coûts de la démocratie au Canada et la part importante occupée par les interventions du secteur public ou de ses agences constitue un phénomène qui favorise les contributions monétaires politiques au détriment des contributions monétaires idéologiques. Tout le système politique fédéral repose sur la dépense de sommes d'argent énormes pour les dépenses quotidiennes engendrés par l'opération quotidienne des partis politiques et les campagnes électorales. Comme il est plus facile de recourir à de « gros donateurs » pour renflouer les coffres des partis politiques traditionnels, ceux-ci disposent d'une influence considérable comparativement au simple militant politique ou aux électeurs. Cette situation nous permet de conclure que les contributions politiques faites par les « gros donateurs » sont le principal germe de la corruption qui gangrène tout le système politique fédéral.

Le financement démocratique des partis politiques permettrait à ceux-ci de se libérer de l'influence de la grande entreprise et des gros donateurs et permettrait un rapprochement entre les partis politiques, leurs militants et les électeurs. À ce titre, nous proposons à nos collègues du Canada d'observer, d'étudier et d'apprendre de la culture politique québécoise laquelle se démarque clairement de la norme canadienne, entre autres, quand vient le temps de financer les partis politiques.

Depuis ses débuts, le Bloc Québécois dénonce cet état de fait et croit fermement que tant qu'il y aura d'importantes sommes d'argent qui seront versées aux caisses électorales des partis politiques, il sera impossible pour les élus de se soustraire de l'influence de leurs principaux bailleurs de fonds. En maintenant la forme actuelle et archaïque de financement, les partis qui se succéderont au gouvernement se devront de répondre aux attentes des ces groupes privilégiés qui les possèdent. La démocratie ainsi vécue, fait fi des électeurs et électrices qui eux sont garants de la démocratie.

LA LOI SUR L'ENREGISTREMENT DES LOBBYISTES

À la page 90 du Livre rouge du Parti Libéral du Canada, il est mentionné que « L'intégrité du gouvernement est mise en cause chaque fois que la population a le sentiment que les lobbies déterminent les politiques de l'État, en exerçant une influence démesurée dans les coulisses ». Malheureusement, entre les engagements électoraux et la concrétisation législative, force nous est de constater que les lobbyistes ont, sans aucun doute, dicté la version finale de la Loi C-43, sur l'enregistrement des lobbyistes.

Lors du débat en Chambre du printemps 1995, douze failles majeures ont été relevées par le Bloc Québécois:

Le conseiller à l'éthique du premier ministre; les catégories de lobbyistes; l'obligation de divulgation en ce qui touche les contrats; les honoraires de lobbyistes; la prise de contact avec les ministres et les hauts fonctionnaires; les liens politiques des lobbyistes; les coalitions; les honoraires conditionnels; les déductions fiscales pour les frais de lobbying; l'absence de dispositions anti-évitement; le code régissant la conduite des titulaires de charges publiques et finalement un code de déontologie qui ne sera pas applicable.
Le Bloc Québécois a présenté 60 amendements de substance au projet de loi. Le gouvernement libéral les a tous rejetés et a donc dit non 60 fois à l'intégrité gouvernementale. Le Bloc Québécois croit que le gouvernement doit refaire ses devoirs en la matière et se rappeler que les comités Holtmann et Cooper proposaient des mesures allant beaucoup plus loin que celles proposées dans la Loi C-43.

Une autre promesse libéral faite à la sauvette.

EN CONCLUSION

Le Bloc Québécois estime que le Code de déontologie proposé par la majorité du Comité est imparfait. Seule une approche globale et intégrée aurait permis de toucher aux vrais problèmes de la déontologie parlementaire. En procédant comme il le fait, le comité enlève toute crédibilité au processus parlementaire et reconnaît le rôle de plus en plus puissant du pouvoir exécutif et des lobbyistes au détriment du pouvoir législatif et relègue aux oubliettes le Parlement lui-même.

François Langlois,
député de Bellechasse

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