Le Comité mixte spécial sur un code de conduite du Sénat et de la Chambre des communes a l'honneur de présenter son
DEUXIÈME RAPPORT
En mars 1996, le Sénat et la Chambre des communes ont adopté des résolutions portant notamment:
Qu'un comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes soit formé et chargé d'élaborer un code de conduite destiné à aider les sénateurs et les députés à concilier leurs responsabilités officielles et leurs intérêts personnels, y compris leurs relations avec les lobbyistes;
[...]
Qu'il soit ordonné au comité de mener de vastes consultations et d'examiner les démarches adoptées à l'égard de ces questions au Canada et dans les régimes gouvernementaux comparables; [...]Un comité semblable avait été institué au cours de la session précédente de l'actuelle législature, mais il n'avait pas encore terminé ses travaux au moment de la prorogation. En conséquence, les résolutions précitées ordonnaient que les documents et témoignages recueillis sur ce sujet pendant la première session de la trente-cinquième législature soient renvoyés au Comité.
Le Comité a entendu des témoins provenant de nombreux secteurs, notamment le conseiller fédéral en éthique, le conseiller juridique parlementaire, des universitaires, des lobbyistes du secteur privé, les représentants des médias, des experts-conseils en matière d'éthique, des conjoints de parlementaires ainsi que d'autres personnes. On trouvera en annexe la liste des témoins. Nous avons aussi consulté un certain nombre de commissaires provinciaux à l'éthique et aux conflits d'intérêts et nous avons sondé des députés provinciaux.
Le Comité a en outre examiné les travaux faits ces dernières années en matière de conflits d'intérêts et de codes d'éthique. Ces questions ont fait l'objet d'études poussées et de débats nourris, aux niveaux tant fédéral que provincial.
Il existe actuellement plusieurs dispositions relatives aux conflits d'intérêts et à l'éthique chez les parlementaires. Elles ne sont pas toutes refondues en une seule loi; on les trouve notamment dans la Loi sur le Parlement du Canada, le Code criminel, le Règlement du Sénat, le Règlement de la Chambre des communes, le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat ainsi que dans d'autres lois. Beaucoup de ces dispositions sont désuètes et ne portent que sur des situations précises. Il est généralement admis qu'il faut adopter des règles plus modernes et plus pertinentes pour éclairer les parlementaires et assurer aux Canadiens que la conduite de leurs représentants est conforme à des normes élevées.
Le Code de déontologie parlementaire que nous proposons ici est le fruit de recherches et de discussions poussées. Nous nous sommes basés sur les témoignages entendus et sur la documentation constituée sur le sujet. Nous avons mené de vastes consultations et avons abondamment discuté de la question entre nous et avec nos collègues.
Nous croyons que le présent Code répond avec fermeté, mais aussi avec justice au besoin de règles claires qui se faisait sentir. Il établira les règles à suivre et sera un guide et une aide pour les sénateurs et les députés tout en assurant aux citoyens que les allégations feront l'objet d'enquêtes et que des mesures seront prises à l'endroit des contrevenants.
Entre autres caractéristiques importantes, le Code présente les suivantes :
- Tous les parlementaires seraient tenus de divulguer en toute confidentialité leurs biens, intérêts financiers, dettes et sources de revenu et les postes qu'ils occupent dans le privé. Un résumé de ces renseignements serait publié. Certains intérêts personnels demeureraient confidentiels; il s'agirait en général de biens de peu de valeur, de biens personnels - comme leur foyer familial et leur automobile - et de biens qui présentent peu de risque de conflits d'intérêts (argent, Obligations d'épargne du Canada, polices d'assurance, etc.).
- Les sénateurs et les députés seraient aussi tenus de divulguer en confidentialité et au mieux de leur connaissance tous les intérêts financiers de leurs conjoints et des personnes à leur charge, et un résumé en serait publié.
- Le Code comporterait des règles sur les cadeaux et les avantages personnels, les honoraires et les déplacements parrainés que les parlementaires seraient autorisés à accepter. Les parlementaires pourraient accepter ces gratifications lorsqu'elles seraient de faible valeur ou que le protocole l'exigerait, mais ils devraient les déclarer si leur valeur excédait 250 $.
- Des règles interdiraient aux parlementaires d'user de leur influence, de commettre le délit d'initié et de favoriser des intérêts personnels.
- Les règles actuelles régissant la participation des parlementaires à des marchés publics conclus avec le gouvernement seraient modernisées et clarifiées.
- Un fonctionnaire parlementaire, appelé jurisconsulte, serait nommé conjointement par le Sénat et la Chambre des communes. Il serait chargé de recevoir les déclarations des parlementaires, de rédiger les documents à publier, de conseiller les parlementaires à l'égard du Code de déontologie parlementaire, et d'enquêter sur les plaintes relatives à la conduite des parlementaires et de renvoyer au Comité mixte les questions exigeant un examen poussé.
- Le jurisconsulte relèverait d'un nouveau Comité mixte de déontologie parlementaire des deux chambres. Ce comité serait habilité à examiner toutes les questions relatives au Code. Il appartiendrait au Sénat et à la Chambre des communes d'établir les peines à l'endroit de ceux qui contreviendraient au Code de déontologie parlementaire.
CODE DE DÉONTOLOGIE PARLEMENTAIRE
Nous, parlementaires, convenons, à titre individuel et collectivement, de respecter les principes, règles et obligations énoncés dans le présent Code de déontologie parlementaire.
OBJECTIFS
Les objectifs du Code de déontologie parlementaire sont les suivants :
- 1. reconnaître que les fonctions parlementaires constituent une charge publique;
- 2. préserver la confiance du public dans l'intégrité des parlementaires ainsi que le respect
et la confiance que la société témoigne au Parlement en tant qu'institution;
- 3. montrer au public que tous les parlementaires doivent respecter des normes qui font
passer l'intérêt public avant l'intérêt personnel et établir un mécanisme transparent
permettant au public de juger que c'est bien le cas;
- 4. fournir des indications claires aux parlementaires sur la façon de concilier leurs intérêts
personnels et leurs fonctions officielles;
- 5. favoriser l'émergence d'un consensus parmi les parlementaires en établissant des
règles communes et en créant un poste de conseiller indépendant et impartial, chargé
de répondre aux questions d'ordre déontologique.
PRINCIPES
Le parlementaire doit se conformer aux principes suivants :
1. Normes d'éthique
Le parlementaire agira avec honnêteté et selon les normes d'éthique les plus élevées, de façon à préserver et accroître la confiance du public dans l'intégrité de chaque parlementaire et du Parlement.
2. Examen public
Le parlementaire exercera ses fonctions officielles et organisera ses affaires personnelles d'une manière qui résistera à l'examen public le plus minutieux, ce qui va bien au delà d'un stricte observation de la loi.
3. Intérêt public
Dès son élection ou sa nomination, le parlementaire organisera ses affaires personnelles de manière à pouvoir éviter les conflits d'intérêts réels ou apparents qui sont prévisibles, mais si un tel conflit se produit, celui-ci devra être réglé de manière à protéger l'intérêt public.
4. Cadeaux et avantages personnels
Le parlementaire évitera d'accepter des cadeaux ou des avantages personnels liés à son poste et qu'on pourrait raisonnablement considérer comme compromettant son jugement personnel ou son intégrité.
APPLICATION
- 1. Sauf indication contraire, le présent Code de déontologie parlementaire s'applique à
tous les sénateurs et députés, qu'on peut collectivement désigner comme des
parlementaires.
- 2. Rien dans le présent Code n'empêche le premier ministre d'établir des principes, règles
ou obligations supplémentaires pour les parlementaires qui sont titulaires d'une charge
publique, c'est-à-dire les ministres, les secrétaires d'État ou les secrétaires
parlementaires. En cas d'incompatibilité des dispositions ou de l'interprétation du
présent Code et du Code du Premier ministre visant les titulaires d'une charge publique,
c'est le second qui prévaut.
- 3. Rien dans le présent Code ne vise à empêcher les parlementaires de mener des activités
pour défendre les intérêts de leurs électeurs, comme ils le font habituellement. Les
parlementaires pourraient se mettre au courant des dispositions de la Loi sur
l'enregistrement des lobbyistes.
- 4. Il est reconnu que rien dans le présent Code n'affecte la compétence du Bureau de régie
interne de la Chambre des communes et du Comité sénatorial permanent de la régie
interne (tel qu'approuvé par le Sénat) pour ce qui est de déterminer si les parlementaires
ont utilisé convenablement les fonds, biens, services ou locaux mis à leur disposition
pour l'exercice de leurs fonctions parlementaires.
- 5. Il est reconnu que le parlementaire qui mène, en parallèle, une vaste gamme d'activités
autres que ses fonctions officielles est mieux à même de représenter sa collectivité et de
tenir ses connaissances à jour dans les domaines où il a choisi de se spécialiser. En
conséquence, rien dans le présent Code ne vise à empêcher un parlementaire :
- a. d'occuper un emploi ou d'exercer une profession;
- b. d'exploiter une entreprise;
- c. d'occuper un poste d'administrateur ou d'associé, ou une charge quelconque,
- à condition que, nonobstant cette activité, il soit en mesure de remplir les obligations du
présent Code.
- 6. Rien dans le présent Code n'affecte les privilèges du Parlement ou des parlementaires, ni
les pouvoirs des Présidents de chaque chambre.
- 7. Le parlementaire contribuera au respect due ce cCode en s'y conformant d'une manière
exemplaire et s'assurera que ses employés, et les autres personnes qui travaillent sous
leur autorité, connaissent les principes du Code et les respectent.
DÉFINITIONS
- 1. Les définitions qui suivent s'appliquent dans le présent Code,
- «Code du Premier ministre», code régissant la conduite des titulaires de charge publique
en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, en date de juin 1994, ainsi
que toute modification publiée de celui-ci.
- «conjoint», une personne :
- a) qui est mariée au parlementaire, ou
- b) qui vit maritalement avec le parlementaire et
- (i) a ainsi vécu avec lui pendant une période d'au moins un an, ou
- (ii) est le parent d'un enfant dont le parlementaire est aussi le parent,
- mais ne comprend pas une personne dont le parlementaire est séparé et dont les
obligations alimentaires et les biens familiaux ont fait l'objet d'un accord de séparation ou
d'u ne ordonnance judiciare.
- «famille», lorsque cette notion désigne une personne,
- a) le conjoint du parlementaire;
- b) un enfant du parlementaire ou de son conjoint qui n'a pas atteint l'âge de 18 ans, ou
qui a atteint cet âge et qui, financièrement, dépend principalement du parlementaire ou
de son conjoint.
- «intérêt personnel»
- a) un bien, une dette ou un intérêt financier,
- b) une source de revenu,
- c) un poste d'administrateur ou de cadre dans une société commerciale, une association
ou un syndicat, un poste d'associé dans une société de personnes, ou de cadre
supérieur dans l'une ou l'autre de celles-ci,
- mais ne comprend pas la rémunération ou les avantages liés au poste de député ou de
sénateur.
- «juriconsulte», le haut fonctionnaire du Parlement nommé en vertu de résolutions
adoptées par le Sénat et la Chambre des communes.
- «parlementaire», un sénateur ou un député.
- «source de revenu»
- a) dans le cas d'un emploi, l'employeur,
- b) dans le cas d'un revenu comme entrepreneur indépendant, l'autre partie au marché,
- c) dans le cas du revenu d'une entreprise ou d'une profession, l'entreprise ou la
profession.
- 2. Aux fins du présent Code, le parlementaire n'est pas réputé favoriser ses intérêts
personnels si la décision dont il est question :
- a) est d'application générale,
- b) concerne le parlementaire en tant que membre d'une vaste catégorie de
personnes, ou
- c) concerne la rémunération ou les avantages accordés à un parlementaire en vertu
d'une loi du Parlement.,
RÈGLES
A. FAVORISER DES INTÉRÊTS PERSONNELS
Dans l'exercice de ses fonctions, le parlementaire ne prend aucune mesure ou décision, ni ne participe à aucune décision, s'il sait, ou devrait raisonnablement savoir, qu'il peut ainsi favoriser, directement ou indirectement, ses propres intérêts, ceux d'un membre de sa famille ou, indûment, ceux d'une autre personne.
B. USER DE SON INFLUENCE
Le parlementaire ne doit pas profiter de l'autorité que lui confère sa charge pour essayer d'influencer la décision d'une autre personne, de façon à favoriser, directement ou indirectement, ses propres intérêts, ceux d'un membre de sa famille ou, indûment, ceux d'une autre personne.
C. DÉLIT D'INITIÉ
- 1. Le parlementaire n'utilise pas les renseignements qu'il obtient en sa qualité de
parlementaire, et qui ne sont généralement pas à la disposition du grand public, pour
favoriser ou chercher à favoriser, directement ou indirectement, ses intérêts personnels,
ceux d'un membre de sa famille ou, indûment, ceux d'une autre personne.
- 2. Un parlementaire ne communique pas à autrui les renseignements obtenus en sa qualité
de parlementaire et auxquels le public n'a pas généralement accès s'il sait ou devrait
raisonnablement savoir que ceux-ci peuvent servir à favoriser ou chercher à favoriser,
directement ou indirectement, ses intérêts personnels, ceux d'un membre de sa famille
ou, indûment, ceux d'une autre personne.
D. DÉCLARATION D'INTÉRÊTS
- 1. Un parlementaire qui a de bonnes raisons de croire qu'il a des intérêts personnels dans
une affaire dont est saisie l'une ou l'autre chambre du Parlement, ou un de leurs comités,
et qui assiste à l'étude de cette question, révèle la nature générale de ces intérêts
personnels.
- 2. Lorsque le parlementaire s'est conformé au paragraphe 1, le Greffier de la Chambre ou
du comité prend acte de la nature des intérêts personnels qu'il a divulgués et
communique l'information au jurisconsulte, qui la fait publier.
- 3. Un parlementaire s'abstient de voter sur toute question dans laquelle il a un intérêt
pécuniaire direct.
E. CADEAUX ET AVANTAGES PERSONNELS
- 1. Le parlementaire n'accepte ni directement ni indirectement des cadeaux ou avantages
personnels, liés à son poste ou à ses fonctions parlementaires, sauf s'il s'agit d'une
rétribution autorisée par la loi.
- 2. La règle énoncée au paragraphe 1. ne s'applique pas aux cadeaux ou avantages
personnels qui sont des marques normales ou habituelles de courtoisie, de protocole ou
d'accueil, reçues dans le cadre des fonctions ou responsabilités d'une charge publique.
- 3. Lorsque la valeur d'un cadeau ou avantage personnel pouvant être accepté
conformément à l'exception prévue du paragraphe 2. dépasse 250 $, ou que les
cadeaux et avantages de même provenance dépassent 250 $ sur une période de 12
mois, le parlementaire, dans les 30 jours suivant la date de réception, dépose auprès du
jurisconsulte une déclaration indiquant la nature des cadeaux ou avantages, leur
provenance et les circonstances où ils ont été donnés, dont une copie est annexée à la
déclaration publique du parlementaire et rendue publique.
F. DÉPLACEMENTS PARRAINÉS
- 1. Le parlementaire déclare au jurisconsulte tous les déplacements qu'il effectue en sa
qualité de parlementaire, lorsque le coût de ces déplacements dépasse 250 $ et qu'il
n'est pas entièrement assumé par le Trésor, par lui-même personnellement, par une
association interparlementaire, par un groupe d'amitié reconnu par l'une ou l'autre
chambre, ou par un parti officiel.
- 2. Le parlementaire indique dans sa déclaration le nom de la personne, société ou
organisation qui a parrainé le déplacement, la ou les destinations, le but et la durée du
déplacement et la nature des avantages reçus; la déclaration est faite dans les 30 jours
suivant la fin du déplacement et est annexée à la déclaration publique du parlementaire.
G. MARCHÉS PUBLICS
- 1. Il est interdit à un parlementaire d'être sciemment ou délibérément partie à un marché
conclu avec le gouvernement du Canada lorsque ce marché lui procure un avantage.
- 2. Il est interdit à un parlementaire d'avoir des intérêts dans une société de personnes ou
une société fermée qui est partie à un marché conclu avec le gouvernement du Canada
et qui procure un avantage à cette société.
- 3. Les dispositions des paragraphes 1. et 2. ne s'appliquent pas à un marché qui a été
conclu avant l'élection ou la nomination du parlementaire, mais s'appliquent au
renouvellement ou à la prorogation de ce marché.
- 4. Les paragraphes 2. et 3. ne s'appliquent pas si le jurisconsulte estime que ces intérêts ne
risquent pas de nuire aux obligations du parlementaire aux termes du Code.
- 5. Les paragraphes 2. et 3. ne s'appliquent pas si le parlementaire a confié ses intérêts à un
ou plusieurs fiduciaires aux conditions suivantes :
- a) Les dispositions de la fiducie sont approuvées par le jurisconsulte.
- b) Les fiduciaires n'ont pas de lien de dépendance avec le parlementaire et sont
approuvés par le jurisconsulte.
- c) (i) Sous réserve de l'alinéa ii), lLes fiduciaires ne doivent pas consulter le
parlementaire à propos de la gestion des biens en fiducie. Ils peuvent toutefois consulter
le jurisconsulte.
- (ii) Les fiduciaires peuvent consulter le parlementaire, avec l'autorisation de juriconsulte
et en sa présence, lorsqu'il se produit dans la société un événement extraordinaire qui
pourrait avoir des répercussions considérables sur l'actif.
- d) Lorsque le bien en fiducie est une société, le parlementaire démissionne de tout
poste d'administrateur ou de tout autre poste au sein de la société.
- e) Tous les ans, les fiduciaires donnent au jurisconsulte un rapport écrit qui précise la
nature et la valeur des éléments d'actif de la fiducie, le revenu net de celle-ci au cours de
l'année précédente et leurs honoraires, le cas échéant.
- f) Les fiduciaires donnent également au parlementaire des renseignements suffisants
pour lui permettre de présenter les déclarations exigées par la Loi de l'impôt sur le revenu
(Canada). Ils donnent les mêmes renseignements à Revenu Canada.
- 6. Le paragraphe 1. n'interdit pas au parlementaire de recevoir des prestations de retraite
en application de toute loi prévoyant des prestations de retraite financées en totalité ou
en partie par le gouvernement du Canada.
- 7. Le paragraphe 2. ne s`applique pas avant le premier anniversaire de l'acquisition si
l'intérêt dans la société en nom collectif ou dans la société fermée a été acquis par
héritage.
- 8. Il est entendu que le parlementaire n'est pas considéré comme partie à un marché
conclu avec le gouvernement du Canada du seul fait qu'il possède des titres d'une
entreprise publique, si le jurisconsulte est d'avis que cet intérêt risque peu de l'empêcher
de se conformer aux exigences du présent Code.
H. DÉCLARATION DES INTÉRÊTS PERSONNELS
Déclaration confidentielle
- 1. Dans les soixante jours qui suivent l'annonce de son élection dans la Gazette du Canada
ou sa nomination et tous les ans par la suite à la date fixée par le jurisconsulte, le
parlementaire dépose auprès du jurisconsulte une déclaration complète de ses intérêts
personnels et de ceux de sa famille.
- 2. Pour ce qui est de l'information concernant les intérêts personnels de la famille du
parlementaire, elle est fournie par le parlementaire au mieux de sa connaissance pourvu
qu'il déploie des efforts raisonnables pour déterminer ces renseignements.
- 3. La déclaration confidentielle :
- a) énumère les éléments d'actif et de passif du parlementaire et de sa famille et en
indique la valeur;
- b) précise tout revenu que le parlementaire et sa famille ont touché au cours des douze
mois précédents ou sont en droit de recevoir au cours des douze prochains mois, de
même que la source de ce revenu;
- c) précise tout avantage que le parlementaire et sa famille, ainsi que toute société
privée dans laquelle l'un d'eux possède un intérêt, ont reçu au cours des douze mois
précédents ou sont en droit de recevoir au cours des douze prochains mois dans le
cadre d'un marché conclu avec le gouvernement du Canada, et décrit l'objet et la nature
du marché en question;
- d) si la déclaration confidentielle mentionne une société privée;
- (i) rapporte tous les renseignements sur les activités et les sources de revenu de
la société que le parlementaire peut obtenir en faisant des recherches raisonnables;
et
- (ii) énonce la dénomination sociale des autres sociétés qui lui sont affiliées;
- e) énumère toutes les sociétés par actions, associations, syndicats ou sociétés de
personnes dont le parlementaire ou des membres de sa famille sont des administrateurs
ou des dirigeants, ou dans lesquels ils occupent un poste semblable;
- f) contient tout autre renseignement exigé par le jurisconsulte.
- 4. Après avoir examiné la déclaration confidentielle déposée par le parlementaire, le
jurisconsulte peut demander de rencontrer le parlementaire, et son conjoint si cela est
possible, pour s'assurer que celui-ci a fait une déclaration suffisante et discuter des
obligations du parlementaire aux termes du présent Code.
- 5. Le parlementaire signale par écrit, dans les trente jours, tout changement important à
l'information devant être déclarée au jurisconsulte.
- 6. Toute déclaration déposée par un parlementaire auprès du jurisconsulte conformément
aux présentes dispositions est conservée par le jurisconsulte et demeure confidentielle.
Déclaration publique
- 7. (1) Le jurisconsulte établit, pour chaque parlementaire, une déclaration publique qu'il
soumet à l'examen de celui-ci.
- (2) La déclaration publique :
- a) précise la source et la nature, mais non la valeur, du revenu et des éléments d'actif et
de passif décrits au paragraphe 3. ci-dessus, à l'exception de ceux qui sont décrits au
paragraphe 4. du présent article;
- b) énumère les nom et adresse de toutes les personnes qui ont un intérêt dans ces
éléments d'actif et de passif, à moins que le jurisconsulte ne soit d'avis que la déclaration
publique n'est pas dans l'intérêt public.
- c) énumère tous les marchés conclus avec le gouvernement du Canada qui figurent
dans la déclaration confidentielle et en décrit l'objet et la nature;
- d) énumère les noms de toutes les sociétés affiliées qui figurent dans la déclaration
confidentielle; et
- e) contient un énoncé de tous les cadeaux et avantages personnels qui ont été
déclarés au jurisconsulte.
- (3) Les intérêts dans une société de personnes ou une société par actions indiqués dans la
déclaration publique peuvent être qualifiés d'«importants», de «symboliques» ou de
«majoritaires» lorsque, de l'avis du jurisconsulte, il est dans l'intérêt public de le faire.
- (4) Les éléments d'actif et de passif et les revenus suivants ne figurent pas dans la
déclaration publique :
- a) un élément d'actif ou de passif d'une valeur inférieure à 10 000 $;
- b) les sources de revenu qui, ensemble, ont rapporté moins de 10 000 $ durant les
douze mois qui précèdent la date pertinente;
- c) un bien immeuble que le parlementaire ou sa famille utilisent principalement à des
fins de résidence ou de loisir;
- d) un bien personnel que le parlementaire et sa famille utilisent principalement à des
fins de transport, domestiques, éducatives, décoratives, sociales ou de loisir;
- e) l'argent en caisse ou en dépôt dans une institution financière qui a le droit
d'accepter des dépôts;
- f) les valeurs mobilières à valeur fixe émises ou garanties par un gouvernement ou un
organisme gouvernemental;
- g) un régime enregistré d'épargne-retraite qui n'est pas autogéré;
- h) un placement dans un régime enregistré d'épargne-retraite autogéré qui ne serait
pas déclaré s'il était détenu hors du régime;
- i) un intérêt dans un régime de retraite, un régime de prestations aux employés, une
rente ou une police d'assurance-vie;
- j) un investissement dans une société de placement à capital variable;
- k) un certificat de placement garanti ou un instrument financier analogue;
- l) tout autre élément d'actif ou de passif et toute autre source de revenu que le
jurisconsulte décide d'approuver comme intérêt personnel exclu.
- 5. Le jurisconsulte peut exclure des renseignements de la déclaration publique s'il estime
- a) que ces renseignements ne sont pas pertinents pour l'application du présent Code;
- b) qu'une dérogation au principe général de déclaration publique est justifiée.
- 6. La déclaration publique de chaque parlementaire est déposée auprès du jurisconsulte et
mise à la disposition du public pour examen pendant les heures de bureau normales.
I. CONTOURNEMENT DES RÈGLES
Le parlementaire ne doit pas vendre ou céder des intérêts personnels à des conditions qui visent expressément à contourner les règles du présent Code.2. Le Comité recommande de modifier le Règlement du Sénat et le Règlement de la Chambre des communes de manière à y prescrire la nomination d'un jurisconsulte et l'institution d'un Comité mixte de déontologie parlementaire, dans les termes suivants :
A. Jurisconsulte
- Le jurisconsulte des déclarations d'intérêts est un fonctionnaire du Parlement.
- Après avoir consulté les chefs des partis politiques reconnus, au Sénat et à la Chambre des communes, et toute autre personne qu'ils jugent indiqué de consulter, les présidents déposent le nom du candidat au Sénat et à la Chambre, et la nomination prend effet sur adoption d'une résolution par les deux chambres.
- Le jurisconsulte occupe ses fonctions pour un mandat de sept ans, qui est renouvable, mais il peut être révoqué à tout moment sur résolution conjointe du Sénat et de la Chambre des communes.
- À l'expiration de son mandat, le jurisconsulte continue d'occuper ses fonctions tant qu'il n'y a pas été reconduit ou que son successeur n'a pas été nommé.
- Le jurisconsulte remplit les fonctions qui lui sont prescrites par le Code de déontologie parlementaire et le Comité mixte de déontologie parlementaire. Le jurisconsulte travaille sous l'autorité du Comité mixte.
- Le jurisconsulte et tous ses collaborateurs s'engagent, par serment ou déclaration solennelle, à ne pas divulguer les renseignements confidentiels sur les intérêts personnels et les biens des parlementaires, qu'ils reçoivent ou obtiennent dans le cadre des fonctions officielles du jurisconsulte.
- Le jurisconsulte présente un rapport annuel sur les activités de sa charge au Président du Sénat et au Président de la Chambre des communes, qui se chargent de le déposer devant chaque chambre. Dans son rapport, le jurisconsulte prend toutes les précautions utiles pour éviter de révéler des renseignements qui pourraient permettre d'identifier un parlementaire ou sa famille.
B. Comité mixte de déontologie parlementaire
- Un comité mixte permanent du Sénat et de la Chambre des communes est créé pour s'occuper de la déontologie parlementaire. Un tiers des membres sont des sénateurs et deux tiers sont des députés.
- Le comité est responsable de toutes les questions liées au Code de déontologie parlementaire, mais il n'est pas compétent pour s'occuper des questions de privilège parlementaire, ni des questions, qui, aux termes de la Loi sur le Parlement du Canada, relèvent du Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ou du Bureau de régie interne.
- Le comité prend toutes les précautions raisonnables pour qu'aucun renseignement personnel ne soit divulgué, sauf dans les cas prévus par le Code de déontologie parlementaire.
C. Fonctions et procédures
- Les principales fonctions du jurisconsulte sont les suivantes :
- a. recueillir les déclarations confidentielles des parlementaires et préparer les déclarations
publiques selon les exigences du Code;
- b. après examen de la déclaration confidentielle, s'il le juge utile, rencontrer le
parlementaire pour s'assurer que tous les renseignements utiles ont été communiqués
et pour discuter avec lui de ses obligations aux termes du Code;
- c. après examen de la déclaration confidentielle et des renseignements complémentaires
obtenus lors de l'entretien, aviser le parlementaire des mesures qui doivent être prises
pour qu'il se conforme aux exigences du Code;
- d. afin que le parlementaire remplisse ses obligations aux termes du Code, lui
recommander le cas échéant de vendre des intérêts personnels à une personne sans
lien de dépendance ou de les placer en fiducie, aux conditions précisées au besoin par le
jurisconsulte;
- e. à titre confidentiel, conseiller le parlementaire et le Comité mixte de déontologie
parlementaire sur l'interprétation du Code;
- f. donner des conseils et offrir des cours d'initiation aux nouveaux parlementaires sur des
questions de conduite et d'éthique;
- g. surveiller l'application du Code et, s'il le juge indiqué, proposer des changements au
Comité mixte;
- h. examiner les plaintes au sujet de la conduite des parlementaires et en faire rapport au
Comité mixte.
- En réponse à une demande écrite d'un parlementaire sur toute question concernant les devoirs du parlementaire aux termes du Code, le jurisconsulte pourra faire les examens qu'il juge indiqués et produire un avis écrit et des recommandations. De tels avis sont confidentiels et ne pourront être rendus publics que par le parlementaire ou avec son consentement.
- Le jurisconsulte qui donne son avis à un parlementaire doit s'y tenir dans tout nouvel examen portant sur l'objet de l'avis, pourvu que tous les faits dont le parlementaire avait connaissance aient été communiqués au jurisconsulte.
- Les plaintes doivent être présentées sous la forme d'un affidavit et contenir une description de la nature et du motif de la plainte. Le jurisconsulte aura la latitude de décider si la plainte d'un parlementaire au sujet d'un autre parlementaire ou d'un citoyen mérite un examen ou pas et pourra en entreprendre l'examen de sa propre initiative, sous réserve qu'il devra le faire lorsque le Comité mixte le lui demandera.
- Les examens se feront en privé et dans les meilleurs délais. Une fois l'examen terminé, le jurisconsulte pourra rejeter la plainte, le déclarer fondée et s'entendre avec le parlementaire sur les mesures à prendre, ou décider qu'il y a assez de preuves et en saisir le Comité mixte. Il est entendu que le jurisconsulte devrait rendre publiques les raisons de sa décision dans chacun de ces cas (rejet de la plainte, bien-fondé de la plainte et entente sur les mesures à prendre, ou transmission de la plainte au Comité mixte).
- Le jurisconsulte serait autorisé à convoquer des témoins et à demander le dépôt de documents et il serait appuyé par l'autorité du Comité mixte dans l'exercice de ces pouvoirs. En cas de non-obéissance, le Comité mixte serait saisi de la question, et il pourrait, au besoin, obtenir un ordre du Sénat ou de la Chambre des communes (selon la chambre où siège le parlementaire).
- Une fois que le jurisconsulte aurait décidé qu'il n'y a pas lieu de donner suite à la plainte, le Comité mixte en serait avisé, mais ne pourrait remettre en question ou modifier la conclusion du jurisconsulte.
- Une fois que le jurisconsulte se serait entendu avec le parlementaire sur les mesures à prendre, le Comité mixte en serait avisé. Celui-ci pourrait en faire rapport à la chambre (au besoin) ou renvoyer l'affaire au jurisconsulte pour réexamen.
- Lorsque le jurisconsulte est d'avis que la plainte semble fondée mais qu'il n'a pu parvenir à une entente, il en saisirait le Comité mixte; celui-ci ferait enquête et, s'il est d'avis qu'une sanction s'impose, il ferait une recommandation à la chambre.
- Le Comité mixte aurait un rôle de surveillance. Les examens seraient la responsabilité du jurisconsulte et le Comité n'interviendrait que dans des cas particuliers lorsque le jurisconsulte lui soumettrait un cas pour enquête.
- Le Comité mixte se réunirait habituellement à huis clos pour protéger le caractère personnel et confidentiel de l'information qui lui est communiquée. Toutes les décisions du Comité seraient rendues publiques en temps opportun, mais elles ne renfermeraient pas de détails permettant d'identifier le parlementaire, sauf si cela est essentiel à la décision. Les règles habituelles s'appliqueraient au comité, y compris le pouvoir de créer des sous-comités.
- Lorsque le Comité mixte ou le jurisconsulte constate que le sujet d'une enquête imminente ou en cours fait aussi l'objet d'une enquête policière ou qu'une accusation a été portée, l'un ou l'autre, selon le cas, interrompt immédiatement l'enquête jusqu'à ce que l'enquête policière ou l'accusation ait été réglée.
- Si, au cours d'une enquête, le Comité mixte ou le jurisconsulte est persuadé qu'il y a assez de preuves pour croire qu'il y a eu infraction à une loi du Parlement, l'un ou l'autre, selon le cas, saisira immédiatement les autorités compétentes de la question et suspendra l'enquête jusqu'à ce que l'enquête policière ou l'accusation éventuelle ait été réglée.
- Lorsque le Comité mixte a été saisi d'une affaire et qu'une enquête a été menée, le Comité peut déposer son rapport dans les deux chambres. Dans le cas de la chambre où siège le parlementaire concerné, il serait considéré que le rapport a été accepté, à moins que, dans les dix jours de séance qui suivent, il ait été décidé par vote de modifier ou de rejeter le rapport.
- Avec l'autorisation du Comité mixte, le jurisconsulte pourra établir des règles pour l'exécution des intentions et des dispositions du Code. De telles règles seraient déposées au Sénat et à la Chambre des communes et elle n'entreraient en vigueur que s'il n'y a aucune résolution contraire de l'une ou l'autre chambre au cours des dix jours de séance qui suivent.
- Le jurisconsulte et le Comité mixte conserveraient les documents relatifs à un parlementaire ou à sa famille pendant douze mois après que le parlementaire a quitté ses fonctions; les documents seraient ensuite détruits, sauf s'il y a une enquête en application du Code ou qu'une accusation a été portée contre le parlementaire ou sa famille en vertu du Code criminel et que les documents concernent ou pourraient concerner cette affaire.
- Le jurisconsulte et le Comité peuvent organiser des activités éducatives afin de renseigner les parlementaires et le grand public sur le Code de déontologie parlementaire, sur le Comité mixte ou sur le bureau du jurisconsulte.
- a) Les dispositions du Code de déontologie parlementaire font l'objet d'un examen
permanent par le Comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes sur le Code de
déontologie parlementaire ou par tout comité chargé de l'examen des règles édictées
par le jurisconsulte.
- b) Dans les cinq ans suivant l'adoption du Code, le ou les comités compétents examinent à
fond toutes les dispositions du Code, ainsi que son application, et présentent un rapport
dans lequel ils recommandent les changements jugés nécessaires.
- a) Il y aurait lieu de modifier le Règlement du Sénat et le Règlement de la Chambre des
communes de manière à en abroger les dispositions incompatibles avec le Code de
déontologie parlementaire.
- b) Il y aurait lieu d'abroger les dispositions de la Loi sur le Parlement du Canada qui traitent des
marchés conclus entre les parlementaires et le gouvernement du Canada, puisqu'elles
seront remplacées par les dispositions pertinentes du présent Code.
- c) Le gouvernement devrait examiner les modifications que le Comité mixte spécial relatif aux
conflits d'intérêts a recommandé d'apporter, en 1992, aux dispositions du Code criminel
portant sur les infractions de corruption, de trafic d'influence et d'abus de confiance en
vue de préciser le sens du terme «officiel» dans le contexte parlementaire.
- d) Le Code de déontologie parlementaire devrait entrer en vigueur au début de la
trente-sixième législature, trois mois jour pour jour après la nomination du juriconsulte.
DONALD H. OLIVER, CR, SÉNATEUR
PETER MILLIKEN, DÉPUTÉ