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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 5 février 1997

.1534

[Traduction]

Le président: Mesdames et messieurs, nous sommes maintenant prêts à reprendre les audiences de notre sous-comité sur les projets de règlements en vertu de la Loi sur les armes à feu.

Cet après-midi, nous aurons une table ronde qui réunit des spécialistes de renom. Je suis très heureux de vous accueillir parmi nous.

Nous avons avec nous cet après-midi M. René Roberge, directeur général de l'Association de l'industrie canadienne des munitions et armes de sport. Nous accueillons également Al Taylor, vice- président et directeur général de Savage Arms Canada.

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M. René J.J. Roberge (directeur général, Association de l'industrie canadienne des munitions et armes de sport): M. Taylor n'est pas ici pour l'instant, monsieur le président. Au cas où il ne pourrait se libérer - je sais qu'il devait être ici - j'ai une télécopie de son mémoire. Je ne suis pas sûr si M. Taylor l'a distribué aux membres du comité mais si vous me le permettez, je me ferai un plaisir de vous le présenter en son nom.

Le président: Nous garderons la présentation de M. Taylor pour la fin et s'il n'est pas arrivé d'ici là, monsieur Roberge, vous pourrez peut-être alors avoir l'amabilité de nous la lire.

M. Roberge: Très bien. Je vous remercie.

Le président: Nous avons également avec nous Robert J. Nicholls, président de R. Nicholls Distributors Incorporated.

M. Roberge: M. Nicholls n'est pas ici non plus.

Le président: Très bien.

Thanos Polyzos est vice-président de Para-Ordnance Manufacturing Incorporated. Nous sommes heureux de vous accueillir de nouveau parmi nous. Merci beaucoup d'être venu.

M. Thanos Polyzos (vice-président, Para-Ordnance Manufacturing Inc.): Je vous remercie.

Le président: Normand Héroux est directeur de l'administration de la prévention pour Technologies industrielles SNC Inc. Il est accompagné de Claude Daigneault, vice-président des ventes nationales et de Denis Renaud, technologue. Je vous souhaite la bienvenue.

Je tiens à vous remercier, messieurs, de vous être joints à nous. M. Taylor est absent, ainsi que certains de nos membres. Oh, je vois que M. de Savoye vient d'arriver. Nous avons donc le quorum. J'aimerais commencer.

Nous laisserons chaque témoin faire une présentation après quoi nous aimerions vous poser des questions. Qui aimerait commencer?

[Français]

M. Claude Daigneault (vice-président, Ventes nationales, Technologies industrielles SNC Inc.): J'aimerais vous dire que j'ai l'intention de faire ma présentation en anglais pour m'assurer d'être bien compris et d'y mettre toute la passion et l'émotion nécessaires. Par la suite, je répondrai aux questions dans la langue de votre choix.

[Traduction]

Tout d'abord, permettez-moi de vous dire que je suis le fier époux d'une femme merveilleuse et le père de deux beaux enfants. Personnellement, la loi telle qu'elle existe et ses règlements ne me posent aucune difficulté et je souscris entièrement à l'objet et l'esprit de la loi, qui est de réduire la violence dans ce pays et de protéger les citoyens du pays contre le comportement violent d'individus irrationnels qui ont facilement accès à des armes à feu mortelles.

Cela dit, laissez-moi présenter la position de notre entreprise. Je fais partie de Technologies industrielles SNC; il s'agit d'une filiale en propriété exclusive de SNC-Lavalin, la plus importante firme d'ingénierie au Canada. Nous aborderons brièvement l'historique de la société et de ses activités, l'objectif de notre présentation, la sécurité et la sûreté de notre exploitation, nos préoccupations particulières et les solutions que nous proposons ainsi que certaines recommandations. Nous terminerons par un résumé de notre présentation.

Le groupe SNC-Lavalin existe depuis 1911. Il s'est lancé dans la fabrication de munitions au début des années 1980, lorsqu'il a fait l'acquisition de IVI Industries à Valcartier, qui fabriquait des munitions de petit calibre. Puis, en 1986, par suite d'un processus d'appel d'offre, il a acheté les Arsenaux canadiens du gouvernement canadien pour la somme de 92,5 millions de dollars.

Il possède donc une gamme complète de capacités de fabrication mais ne traite ni avec le public, ni avec les entreprises. Il fait affaire avec le gouvernement, les corps policiers et d'autres forces paramilitaires autorisées.

.1540

SNC-Lavalin emploie 6 000 personnes au Canada et Technologies industrielles SNC Inc., sa filiale en propriété exclusive, est un actif très important de SNC-Lavalin; en fait, c'est son actif le plus important. Nous avons des investissements de 135 millions de dollars, en immobilisations, en besoins de trésorerie, en inventaire et ainsi de suite pour assurer notre fonctionnement.

Les produits fabriqués par Les Technologies industrielles SNC sont destinés au marché national et, dans une certaine mesure, aux marchés internationaux. Manifestement, nous devons satisfaire à toutes les exigences des Affaires étrangères en ce qui concerne les permis d'exportation. L'entreprise exploite deux usines de fabrication, l'une à Le Gardeur, dans l'est de Montréal et l'autre à St-Augustin de Desmaures, près de Québec. Elles emploient plus de 700 personnes dont 60 exécutent des contrats de recherche et développement pour le compte de l'armée canadienne et de l'armée américaine. Ses frais de personnel s'élèvent à 40 millions de dollars par année et 80 p. 100 de sa production est destinée au marché canadien.

Voici un aspect très important: son existence, comme celle de quatre autres entreprises canadiennes - à savoir Expro, Diemaco, Ingersoll Machine Tool et Bristol - est protégée pour des raisons de sécurité nationale par un décret permanent adopté par le Parlement en 1978. Il s'agit du programme d'approvisionnement en munitions. Depuis 1986 et jusqu'en l'an 2006, elle est désignée, par contrat du gouvernement, comme source d'approvisionnement des Forces canadiennes pour plus d'une centaine de produits et services. Sa gamme de produits comprend des munitions de gros, moyen et petit calibres, des munitions d'instruction pour les forces paramilitaires et des produits connexes tels que des vestes pare-éclats, des masques à gaz, des couvertures anti-projectiles et des filets de camouflage.

Nous avons certains échantillons des munitions que nous fabriquons pour le marché paramilitaire. Ne craignez rien. Il n'y a aucun danger. Nous avons également des pièces d'armes à feu que nous fabriquons à des fins d'entraînement et j'en parlerai tout de suite.

Depuis 1990, nous travaillons activement à la mise au point et à la commercialisation d'une nouvelle gamme de munitions d'instruction pour la police et d'autres forces spéciales, pour nous aider à réduire notre dépendance vis-à-vis du gouvernement du Canada. Dernièrement, nous nous sommes associés avec Bombardier ainsi qu'avec Shorts en Irlande et Frontec au Canada pour pénétrer le créneau de l'entraînement sur simulateur électronique. Certains d'entre vous savent peut-être que le ministère de la Défense nationale cherche à acheter maintenant 100 simulateurs d'entraînement qui seront installés un peu partout au pays.

Pour pouvoir fabriquer et livrer des produits qui répondent aux besoins de nos clients, nous devons pouvoir tester ces produits en nous servant des mêmes armes que nos clients. En ce qui concerne notre nouvelle gamme de produits utilisant des munitions d'instruction sous-calibrées, nous devons fabriquer et fournir un lot de conversion de canon requis pour des raisons de sécurité. Il s'agit d'un sous-calibre. Dès qu'on met le canon dans l'arme, il devient impossible d'utiliser des munitions chargées. Dans le cas des simulateurs électroniques, nous devons transformer des armes ordinaires en armes marquant des cibles au laser.

Nous faisons également beaucoup de recherche et de développement dans le domaine des munitions de petit calibre, souvent à contrat pour le MDN et d'autres pays alliés. Par conséquent, nous devons posséder et utiliser, pour les tirs d'essai, une série d'armes à feu de fabrication différentes et de calibres variés.

De plus, on nous demande souvent de faire la démonstration de nos produits à des fins de commercialisation sur le marché international, par exemple à des foires commerciales. Nous devons alors fournir et utiliser nos propres armes à feu.

Par conséquent, nous nous intéressons aux changements aux lois, aux politiques et aux pratiques d'exportation en vigueur au Canada qui pourraient faciliter l'importation d'armes à feu prohibées et d'armes à feu à autorisation restreinte, ce qui nous permettrait de conserver, à des fins industrielles, une bonne variété d'armes pour les tirs d'essai et faciliterait l'exportation et la réimportation temporaires de ces armes à feu pour soutenir les initiatives de commercialisation internationale.

J'aimerais maintenant vous présenter notre objectif. Nous voulons exposer nos préoccupations au sujet des répercussions que certains des règlements proposés auront sur notre industrie et proposer des solutions précises, de la part du gouvernement et de notre part, qui assureraient le respect de l'objet et de l'esprit de la loi.

.1545

Sur le plan de la sécurité et de la sûreté, en 50 ans nous n'avons jamais eu à signaler d'incident découlant de la présence et de l'utilisation d'armes à feu dans nos installations. Nous avons mis en place un système de sûreté et de sécurité très perfectionné qui répond aux exigences les plus rigoureuses de la police locale, de la Sûreté du Québec, de la Gendarmerie royale du Canada et du ministère de la Défense nationale.

Nous avons un système de surveillance permanente des lieux, à longueur d'année. Nous avons des chambres fortes pour l'entreposage des armes; des détecteurs électroniques d'intrusion; des cours sur le maniement sécuritaire des armes à feu à l'intention de tous ceux qui touchent à nos armes; un contrôle permanent de notre inventaire d'armes; des tests psychométriques effectués auprès des utilisateurs d'armes; des vérifications des antécédents des utilisateurs d'armes; une télésurveillance au moyen de caméras; des locaux clôturés dont l'accès est contrôlé; un concept de sécurité totale approuvée par la Sûreté du Québec et un système de verrouillage des portes à accès limité.

Dans le document ci-joint, nous résumons nos préoccupations au sujet de 6 des 11 projets de règlements et proposons des solutions. Je demanderais à mon collègue de vous les présenter. Même si des modifications tenant compte de nos activités peuvent être apportées à ces règlements, nous estimons qu'elles risquent d'en compliquer le libellé et d'embrouiller le grand public. Vous constaterez que dans certains cas, les règlements, tels qu'ils sont libellés, imposeraient beaucoup de paperasserie et un lourd fardeau financier à notre entreprise et au gouvernement, ce qui menacerait notre compétitivité et, partant, notre survie. Ce qui est encore plus inquiétant, c'est que nous serions obligés de faire en sorte que bon nombre d'employés qui, autrement, ne se seraient jamais intéressés aux armes à feu de leur vie, reçoivent une formation et détiennent un permis d'acquisition d'armes à feu.

J'aimerais maintenant demander à Normand de vous faire part de nos préoccupations et des solutions que nous proposons. Il le fera en français.

[Français]

M. Normand Héroux (directeur, Administration de la prévention, Technologies industrielles SNC Inc.): Monsieur le président, en ce qui a trait aux armes à feu, la loi et le règlement ne tiennent compte nulle part des armes et des munitions destinées à l'entraînement.

Nous vous demandons tout simplement d'inclure dans ce règlement la notion de munitions et d'armes d'entraînement en ajoutant à l'article 21 une fin industrielle pour couvrir certaines de nos activités telles que la recherche et le développement, la fabrication et la mise à l'essai de munitions d'entraînement, ainsi que la modification, la fabrication et la mise à l'essai de pièces et d'armes d'entraînement avec ou sans émission de projectiles.

On est conscients que toute personne qui manie une arme complète - je dis bien complète - devrait avoir tous les permis et tous les cours nécessaires, spécialement si cette personne doit sortir de l'usine avec des armes.

En ce qui a trait au règlement sur l'entreposage, l'exposition et le transport des armes à feu et autres armes par des entreprises, notre préoccupation se situe au niveau de l'entreposage des armes prohibées dans une chambre forte, dans un coffre-fort bien verrouillé ou dans un local équipé d'un système électronique d'alarme antivol. On vous dit tout simplement que nous sommes en mesure, en ce qui nous concerne, d'élaborer nos mesures de sécurité pour assurer la sécurité de nos employés et du public et en faire la démonstration.

De plus, on dit également que les munitions ou les artifices que nous avons en notre possession, les adapteurs, comme les kits, sont des armes prohibées. Cependant, on a une interprétation de la GRC qui veut que la munition FX ne soit pas considérée comme une munition traditionnelle.

Ainsi, nous croyons que les chargeurs de plus de 10 cartouches modifiés pour ne tirer que de la FX ne devraient pas être considérés comme prohibés. Il en est de même pour les adapteurs ou les kits de moins de 105 mm de longueur fabriqués et vendus expressément pour tirer de la FX. On devrait discuter des mesures de sécurité pour l'entreposage avec le contrôleur provincial en fonction du risque - je dis bien en fonction du risque.

.1550

Parlons maintenant des autorisations d'exportation et d'importation d'armes à feu. On doit souvent exporter et importer des armes pour en faire la modification avec les kits FX. Nous demandons de pouvoir continuer notre pratique actuelle sous le contrôle du ministère des Affaires extérieures et de Douanes Canada afin d'éviter une bureaucratie additionnelle et inutile.

En ce qui a trait au règlement sur les droits applicables aux armes à feu, notre préoccupation se situe au niveau des armes en provenance d'autres pays qui doivent entrer temporairement dans notre usine. En ce qui nous concerne, nous n'avons pas à payer l'enregistrement d'armes qui nous sont prêtées, fournies ou cédées pour des essais ou des transformations et que nous devons renvoyer à leurs propriétaires.

Nous sommes donc d'avis que les droits pour chaque autorisation d'exportation devraient être abolis. Nous obtenons déjà une autorisation pour l'exportation de tous nos produits. Demander un droit pour sortir du pays des armes ou des pièces d'armes prohibées ou des munitions nous semble contraire à l'esprit de la loi. Le but de la loi est de limiter les armes au pays. Par conséquent, on devrait en favoriser la sortie.

Il nous faudrait avoir la possibilité de nous entendre sur les permis vraiment nécessaires pour les employés, et on devrait considérer que nous prenons des dispositions et faisons des vérifications afin d'assurer leur sécurité et celle du public, compte tenu que nous travaillons déjà avec des produits que nous considérons beaucoup plus dangereux que les armes et les munitions que l'on veut contrôler avec cette loi. À la limite, un tarif global maximum annuel par entreprise pourrait être fixé.

En ce qui a trait au règlement sur les conditions visant la cession des armes à feu et autres armes, nous vous soumettons respectueusement qu'actuellement, nous faisons régulièrement des échanges d'armes, dont plusieurs sont prohibées, avec les forces militaires ou les forces policières. Certains prêts sont à court terme et d'autres à plus long terme. Toute la bureaucratie et le paperwork qu'exigent ces règlements rend très peu pratiques ces transactions. Dans la plupart des cas, on ne pourra même pas fournir de certificat d'enregistrement, et là on parle d'armes prohibées qui appartiennent à l'Armée.

Cependant, il existe déjà dans l'Armée canadienne des documents pour le transfert des armes. Nous devons également obtenir des certificats d'importation et d'exportation pour les armes étrangères. Il y a donc duplication avec cette loi. En tant qu'entreprise, nous croyons que nous devrions être contrôlés au moyen des registres internes où sont consignées toutes les entrées et sorties d'armes de l'usine.

Finalement, pour ce qui est du règlement sur les registres d'armes à feu, nous sommes disposés à tenir un registre des armes qui entrent et qui sortent de notre inventaire. Il nous ferait plaisir de vous transmettre l'information sur ces transactions. Les modalités peuvent être établies par un accord mutuel. Merci.

[Traduction]

M. Daigneault: J'aimerais maintenant passer aux recommandations.

Ces mesures législatives visent à réduire la violence dans la société canadienne et ses répercussions sur des innocents. La loi et ses règlements d'application doivent être simples, faciles à appliquer, répondre aux objectifs visés et ne pas faire obstacle à des objectifs industriels légitimes. Nous aurions beaucoup de mal à composer avec certains des règlements proposés. Nous recommandons que les industries légitimes soient autorisées à présenter au ministre, par l'entremise du contrôleur provincial, à des fins d'approbation et de surveillance, un plan de contrôle et d'autoréglementation concernant la possession et l'utilisation d'armes à feu, de pièces d'armes à feu et de munitions. Ce plan devrait renfermer des précisions sur les mécanismes de contrôle, les calendriers et la façon dont l'industrie entend répondre aux critères minimums acceptables établis par le ministre pour respecter la lettre, l'objet et l'esprit de la loi et de ses règlements d'application.

Une fois le plan approuvé, sa mise en oeuvre devrait faire l'objet d'une vérification et valoir pour une période déterminée. Nous recommandons également que l'on fixe un tarif global maximum pour les industries qui ont besoin d'un grand nombre de permis.

J'estime par ailleurs important de parler de la possibilité de réactions défavorables. Nous ne voulons pas que vous perceviez ce qui suit comme une menace mais le fait est que si l'industrie est vraiment mécontente de l'application de la loi et de ses règlements, elle le fera savoir. Le risque, c'est que des groupes de pression malintentionnés en profitent pour lancer une campagne visant à dénigrer l'objectif légitime de la loi et de ses règlements.

.1555

En résumé et en conclusion, le gouvernement canadien devrait, comme par le passé, veiller à maintenir un degré minimal d'autosuffisance pour l'approvisionnement des Forces armées en munitions. Les Technologies industrielles SNC est le seul fabricant désigné de munitions pour le gouvernement au Canada. Notre société possède des compétences, un savoir-faire et des installations uniques et a mis en place des mesures complexes d'autocontrôle pour respecter l'objet et l'esprit de la loi et de ses règlements d'application. Elle traverse actuellement une période difficile en raison d'une diminution des besoins du Canada et compte beaucoup, pour assurer sa survie, sur une augmentation des exportations destinées aux forces policières et paramilitaires.

Nous avons donc besoin de l'appui des organismes gouvernementaux appropriés pour accéder plus facilement aux marchés internationaux. Nous voulons maintenir l'autosuffisance du Canada en matière de munitions; garder l'industrie des munitions et ses 700 emplois au Canada - 700 emplois uniquement chez nous; réussir sur le marché international dans les limites du règlement sur les exportations; moins dépendre des besoins de l'armée canadienne; continuer de réglementer nous-mêmes notre acquisition, notre utilisation et notre entreposage d'armes à feu et de munitions; et présenter régulièrement un plan vérifiable au ministre, par l'entremise du contrôleur provincial. Pour cela, nous avons besoin de la compréhension et de l'appui du gouvernement canadien.

Merci beaucoup.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Daigneault. Y a-t-il d'autres présentations?

Monsieur Roberge.

[Traduction]

M. Roberge: Monsieur le président, honorables membres du sous- comité, chers invités, comme l'important, c'est le fond et non la forme, j'espère que vous excuserez mes fautes de frappe.

L'Association de l'industrie canadienne de munitions et armes de sport regroupe des importateurs, des manufacturiers, des grossistes, des agences commerciales et des détaillants de produits reliés aux sports d'armes à feu au Canada, y compris à la chasse. Nos membres représentent une industrie qui distribue un large éventail de produits et services grâce auxquels des millions de Canadiens pratiquent une activité sûre et enrichissante.

Nous nous opposons au projet de loi C-68 depuis le début et notre position n'a pas changé. Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le président, ceci est notre ultime tentative.

Certaines dispositions du projet de loi C-68, par exemple le barème bureaucratique des droits pour les entreprises qui ont un lien direct ou indirect avec notre sport, ont et auront des répercussions néfastes sur notre industrie. Un «je-m'en-foutisme» généralisé règne au ministère de la Justice, qui veut par le contrôle des armes à feu, atteindre des objectifs qui n'ont jamais été définis ni justifiés de manière raisonnable et responsable. Non seulement toute cette démarche a nui à notre industrie et à nos membres, mais si le projet de loi est adopté, il compromettra la viabilité de nos membres au sein de notre industrie.

Nous approuvons toute initiative visant à lutter contre les problèmes associés aux armes à feu et à la violence; néanmoins, nous croyons que le projet de loi C-68, vu son libellé actuel, ne contribuera pas vraiment à les régler. En fait, certaines dispositions du projet de loi C-68 créeront beaucoup plus de problèmes, croyons-nous, qu'elles n'en régleront.

Le gouvernement au pouvoir doit reconnaître que nous sommes non pas les artisans de la criminalité dans ce magnifique pays qui est le nôtre, mais un mécanisme, celui-là même qui empêche une hausse du crime. Nous effectuons des contrôles que nous nous sommes imposés, ce à quoi aspire votre gouvernement.

Nous et vous exerçons déjà un certain contrôle au pays; peut- être qu'en trouvant d'autres mécanismes susceptibles d'être efficaces, nous deviendrons tous des héros.

.1600

Dieu sait, monsieur, si nous avons appris qu'une interdiction quasi absolue entraîne une recrudescence de l'activité criminelle. Lors de la prohibition de l'alcool et plus récemment, lors de la hausse du prix du tabac qui a donné lieu à une contrebande flagrante sur le fleuve Saint-Laurent, on a pu constater que la police était impuissante à faire respecter la loi.

Dernièrement, la police a annoncé que la proportion d'armes à feu volées était passée de 6,3 p. 100 à 16 p. 100 - résultat d'une loi trop sévère. Plus la loi est sévère, plus la criminalité augmente, souvent au détriment de la sécurité du public.

En janvier 1991, la revue Ontario Out of Doors, une filiale de Maclean Hunter, a effectué une enquête sur la valeur du marché de la chasse au Canada, en insistant surtout sur l'Ontario. D'après l'enquête, il y aurait 1,7 million de chasseurs actifs au Canada qui dépensent en tout 1,1 milliard de dollars.

Avant que la loi ne frappe notre industrie, plus de 730 000 personnes, toujours d'après le sondage, étaient intéressées à pratiquer la chasse. Ces données ne comprennent pas l'utilisation des autres produits et services nécessaires à la pratique de ce sport, tels que tourisme, camionnettes, véhicules tout terrain, motoneiges, hôtels et motels, restaurants, camps, pavillons, domaines de villégiature, ce qui se traduit par des emplois, des emplois et encore des emplois. En ajoutant ce type de dépenses, le montant atteindrait fort probablement près de deux milliards de dollars. J'ai d'ailleurs un rapport d'Environnement Canada qui indique qu'en 1991 ce montant se rapprochait davantage de six milliards de dollars. Pour notre industrie, nous évaluons ce montant à deux milliards de dollars.

À peu près à la même époque, soit en 1993, la GRC a signalé au solliciteur général que 7 500 entreprises détenaient un permis de vente d'armes à feu au Canada.

À cette étape ultime du processus législatif, on nous remet un projet de réglementation des armes à feu en nous demandant de nous en tenir à ces règlements dans notre mémoire. Le plus important pour notre industrie, c'est bien entendu la partie consacrée aux «Résumés de l'étude d'impact de la réglementation». Je relève le commentaire suivant à savoir que «les dispositions visent à compléter la Loi en vue d'assurer la protection du public».

En affaires, quand un objectif oblige à engager des dépenses sans jamais se matérialiser, on parle de «châteaux en Espagne». Autrement dit, ce projet de règlement serait la risée de l'industrie, comme l'est déjà presque partout le projet de loi C-68. C'est un peu comme aller rencontrer le président de son entreprise pour lui demander 100 millions de dollars pour sauver des vies, alors qu'on ne peut lui confirmer le nombre de vies que l'on veut sauver. C'est ce que représente pour nous le projet de loi C-68.

Sous la rubrique «Répercussion sur les petites entreprises», il est indiqué que 6 378 permis d'entreprises d'armes à feu ont été délivrés en 1995; c'est 1 122 entreprises de moins qu'en 1991 et, dernièrement, la GRC a déclaré que seulement 5 000 de ces permis avaient été délivrés en 1996, soit au total 2 500 entreprises de moins.

Si Canadian Tire décidait de fermer ses portes au Canada aujourd'hui, ce serait un désastre. La chaîne n'a plus que 400 magasins. Je fais donc la comparaison.

Il faut signaler que plus de la moitié des membres ont abandonné l'industrie depuis l'an dernier et pourtant, il est paradoxal que le gouvernement au pouvoir continue de réclamer la création d'emplois. En fait, le semblant d'industrie qui subsiste sera mené depuis les États-Unis, faisant ainsi disparaître tout contrôle intermédiaire qu'exerce actuellement notre pays.

Je suis maintenant convaincu, monsieur le président, que notre industrie et ses membres s'occupaient de faire circuler licitement les armes à feu au pays et que le gouvernement a réussi à tuer ce commerce légitime. Qui plus est, je crois que ce gouvernement a mal jugé son coût.

.1605

En ce qui concerne les importations, Statistique Canada rapporte maintenant que les importations d'armes à feu ont diminué de 30 p. 100 entre 1995 et 1996. C'est un signe patent que la contrebande et les vols d'armes à feu ont augmenté - ce que nous avons toujours prédit.

Le résumé dit encore que de vastes consultations ont été menées. Je peux maintenant conclure sans réserve que tout témoin de ces consultations les qualifiera de réunions des trois singes, ceux qui ont des oreilles mais n'entendent rien, ceux qui ont des yeux mais ne voient rien et ceux qui n'ont vraiment pas envie de parler - un je-m'en-foutisme consommé.

Aucune de nos recommandations n'a été étudiée et encore moins adoptée. D'ailleurs, nous nous sommes rendu compte assez tôt dans les consultations que le gouvernement avait des intentions non déclarées et que, malheureusement, nous n'étions pas dans le secret des dieux. Les textes que vous avez sous les yeux avaient été rédigés bien avant le début des consultations.

Dans un article récent, un chroniqueur du plein air bien connu raconte que le contrôle des armes à feu en soi au Canada n'a rien à voir avec le crime ni avec la sécurité du public; ce n'est qu'un écran de fumée employé par le gouvernement pour mettre en oeuvre une résolution présentée à l'ONU il y a un certain temps déjà, en mai 1995.

Pourquoi les fonctionnaires du ministère fédéral de la Justice se chargent-ils de donner suite à la résolution et non le ministère de la Défense nationale? Et pourquoi ce gouvernement a-t-il qualifié le monde canadien des armes à feu de «méchant» dans le but de faire adopter sa propre résolution présentée à l'ONU? Est-ce une tactique à la mode au ministère de la Justice?

Nous croyons que les règlements sur lesquels on nous a demandé notre opinion sont fondés sur des principes plutôt que sur des faits. Pour étayer cette affirmation, je cite un extrait de «Répercussion prévue»:

J'avoue que ces règlements semblent être avoir été établis au pifomètre parce que, et je cite à nouveau: «Le nombre précis de particuliers et d'entreprises reste inconnu». Comment peut-on affirmer que les entreprises ne seront pas lésées indûment quand on n'a même pas la moindre idée de leur nombre?

En ce qui a trait à l'observation de la loi, une fois que la loi aura détruit l'industrie, y compris le marché de la chasse et du tir sportifs, restera-t-il quelqu'un pour l'observer? Est-ce que les criminels l'observeront? Ce serait étonnant. Les policiers n'ont pas besoin de l'observer puisqu'ils ont leurs propres règlements et qu'il en va de même pour l'armée. Ai-je besoin d'ajouter quoi que ce soit?

Pour résumer - et nous le répétons - les dispositions du projet de loi C-68 concernant le barème des droits à payer pour les entreprises entraîneront un grave recul de l'industrie sinon sa disparition complète. Nous sommes contre des frais supplémentaires décidés selon la méthode des châteaux en Espagne.

Nous sommes convaincus que le cadre financier du ministère de la Justice, y compris le barème des droits, est imparfait et qu'il est fondé sur une supposition dont on ne peut confirmer la justesse. Les frais et l'obligation d'enregistrer les biens personnels vont encore réduire le nombre de clients effectifs et potentiels de nos membres. Il ne restera plus personne pour observer la loi.

On n'a pas laissé aux anciennes mesures législatives le temps de fournir assez de renseignements pour pouvoir contrôler efficacement les armes à feu. L'enregistrement des armes de point introduit en 1934 a été un fiasco et les corps policiers en ont fait état. Notre industrie n'a rien à voir avec la contrebande des armes à feu illégales, pourtant la réglementation supplémentaire des importations et des exportations pénalisera nos membres et fera augmenter inutilement notre prix de revient.

Nous croyons aussi que le gouvernement ne dit pas la vérité aux Canadiens au sujet du contrôle des armes à feu et qu'il commet une nouvelle erreur qui le tourmentera au moment des élections.

Le lobbying n'est pas notre fort et, à coup sûr, il n'est pas le mien. On nous a invités à venir témoigner devant vous et nous vous en remercions. Même si l'industrie des armes de sport est dépeinte comme une composante importante de ce que le gouvernement appelle le lobby des armes au Canada, en réalité elle se compose surtout de petites entreprises qui comptent moins d'une vingtaine de personnes et qui font de l'import-export. Si notre industrie avait une large base manufacturière, il est certain que le problème serait réglé depuis belle lurette.

Contrairement à certains groupes subventionnés par des services gouvernementaux, dont le succès ou l'échec est sans conséquence, nous sommes profondément motivés. Si nous ne réussissons pas à convaincre le gouvernement que ses mesures sont dangereuses pour notre industrie - et je dis comme le président Bush «lisez sur mes lèvres» - nous allons perdre nos emplois.

.1610

Je suis vraiment troublé par l'entêtement du gouvernement, surtout quand j'entends vanter la plate-forme libérale.

Cependant, il y a au pays un vaste groupe de propriétaires d'armes à feu. C'est à eux que le gouvernement devra rendre des comptes aux prochaines élections. Telle est notre intention non déclarée à nous, monsieur le président.

J'ai parlé de «châteaux en Espagne» et maintenant j'aimerais vous faire part de certains faits qui se sont plus ou moins passés au cours de la dernière année. Si l'on compare les chiffres de 1996 à ceux de 1995, la mesure législative proposée a fait chuter de 50 p. 100 les ventes de carabines et de fusils de chasse, ce qui constitue en grande partie notre secteur d'activités. Quant aux permis de chasse, il s'en est vendu 40 p. 100 de moins en 1996.

Combien de fois avons-nous entendu la coalition et le gouvernement au pouvoir nous dire: «Nous ne sommes pas là pour attraper les chasseurs»? Eh bien! Qu'est-ce que cela nous indique? Parmi les commerces reliés à la chasse et au tir combien ont fermé leurs portes ou déménagé chez nos voisins du Sud entre 1991 et 1996? Ils sont 2 500. Quelqu'un a-t-il eu l'idée d'effectuer une étude d'impact sur l'industrie avant d'entreprendre de la détruire? Cette industrie avait un chiffre d'affaires de deux milliards de dollars qui, aujourd'hui, est inférieur à un milliard. Combien d'emplois ont été perdus? Plus de 10 000 et cela continue.

Le gouvernement a-t-il songé que si l'accès aux armes à feu est trop restreint, il y aura un accroissement de la contrebande d'armes? A-t-on fait une étude pour évaluer cette possibilité? Nous savons déjà que la proportion d'armes à feu volées est passé de 6 à 16 p. 100 et que la contrebande a augmenté de 15 p. 100. Quelle en est la cause? Y a-t-il un lien entre les deux? Nous nous inquiétons des pertes de vie qu'entraînera la contrebande accrue des armes à feu et des armes volées.

En outre, si les droits augmentent, les propriétaires d'armes se débarrasseront carrément de leurs armes. Ils ne vont pas dépenser de l'argent pour enregistrer un Enfield qu'ils possèdent depuis 50 ans. Ils vont tout simplement s'en débarrasser, ce qui ne fera que rendre la situation encore plus explosive. L'effet sera tout à fait à l'opposé de l'objet du projet de loi. Où s'en va-t- on?

J'ai joint à mon exposé un article écrit par Steve Cook; l'article porte sur le contrôle international des armes à feu et fournit de l'information. Si vous mettez en doute la recherche, l'auteur dispose de documents justificatifs et sera heureux de vous fournir cette information.

Le Canada remplit au sein des Nations Unies un rôle admirable. Toutefois, nous nous interrogeons sur les moyens utilisés, qui laissent beaucoup à désirer. Les propriétaires d'armes à feu ne devraient pas en faire les frais.

Le dernier article traite de la loi australienne sur le contrôle des armes à feu. La plupart d'entre vous en ont pris connaissance. Nous avons appris que le gouvernement australien compte rembourser aux propriétaires d'armes à feu la totalité ou la presque totalité du prix des armes achetées qui ont été déclarées illégales. Les fabricants, les importateurs, les distributeurs et les détaillants devront dûment enregistrer les pertes subies en raison de la baisse du chiffre d'affaires, et le gouvernement les remboursera.

Le gouvernement australien a également l'intention d'acheter toutes les armes à feu qui se trouvent dans le circuit de distribution - fabrication, importation, vente en gros, vente au détail - , ainsi que toutes les pièces d'armes. Voilà, à mon avis, une mesure législative que l'on peut qualifier de raisonnable.

Or, aucun dédommagement n'a été offert aux particuliers ou aux entreprises qui ont subi des pertes énormes après l'introduction du projet de loi C-17.

La question que nous aimerions poser au comité, en plus de toutes les autres, est la suivante: en vertu de quelle loi ou de quel règlement le gouvernement canadien prétend-il priver les citoyens canadiens de leurs biens, comme le font nos homologues australiens? Nous demandons respectueusement une réponse à cette question.

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Voilà, monsieur le président, qui termine mon exposé. J'aimerais ajouter que le président de la Ontario Federation of Anglers and Hunters, qui regroupe 90 000 membres, a envoyé, le 13 août, une lettre à M. Chrétien. Ce dernier n'y a pas répondu. La lettre explique en gros pourquoi le document de 2 000 pages n'a pu être fourni lorsqu'on a demandé à en recevoir une copie. Je voulais tout simplement vous signaler ce point.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Roberge.

Monsieur Polyzos, vous avez la parole.

M. Polyzos: Vous m'avez pris par surprise, monsieur le président.

Le président: Prenez votre temps.

M. Polyzos: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelle Thanos Polyzos et je suis cofondateur et vice-président de Para-Ordnance Manufacturing Incorporated.

Notre entreprise a été créée en 1985. Nous fabriquons des armes de poing et nous employons environ 70 personnes dans notre usine ontarienne, et 45 dans notre fonderie de moulage à cire perdue qui est située au Québec.

Permettez-moi de passer directement aux articles de la réglementation que nous jugeons particulièrement préoccupants, car ils menacent la viabilité future de notre entreprise.

La première partie de la réglementation traite des permis d'armes à feu. J'aimerais attirer votre attention sur l'article 21 du chapitre intitulé «Fins visées au paragraphe 11(2) de la Loi», qui commence à la page 8. Malheureusement, cet article ne comporte aucune disposition nous permettant de continuer à fabriquer certains produits qui ont été ou qui seront classés dans la catégorie des dispositifs ou armes à feu prohibés, au sens du paragraphe 84(1) de la partie III de la Loi, et pour lesquels nous n'avons pas les licences d'exportation décrites à l'alinéa 21k), page 9.

Notre entreprise conçoit, fabrique et commercialise ces articles sans attendre de recevoir de l'étranger les commandes qui nécessitent l'obtention d'une licence d'exportation avant de fabriquer les produits. En règle générale, nous exécutons les commandes que nous recevons en puisant dans notre stock d'articles fabriqués à l'avance sur la base de prévisions de ventes s'étalant sur l'année ou les mois suivants.

À moins d'ajouter un règlement qui prendrait en compte ce mode de fonctionnement, nous ne pourrons pas continuer à fabriquer les chargeurs à haute capacité pour lesquels nos produits sont conçus, ni deux modèles d'armes de poing dont le canon mesure moins de 105 mm de longueur.

En vertu de la législation actuellement en vigueur, plus précisément de l'alinéa 95(3)b) du Code criminel, nos chargeurs à haute capacité échappent aux sanctions frappant la fabrication, la possession et l'exportation de tels dispositifs. Lorsque cette exception a été incluse dans ce qui est devenu la version finale du projet de loi C-17 - et je crois que vous présidiez, à l'époque, le comité chargé de l'examiner - , nous avons estimé qu'il s'agissait d'une disposition tout à fait raisonnable étant donné que, littéralement, plus de 99 p. 100 de nos produits ont toujours été fabriqués pour l'exportation.

Nous sommes convaincus que, si cette réglementation comportait la même exemption, qui s'appliquerait à nos chargeurs à haute capacité, à nos armes de poing munies d'un canon mesurant moins de 105 mm de long, ainsi qu'à ces canons eux-mêmes, les objectifs poursuivis par le biais de cette législation pourraient toujours être atteints et nous pourrions, nous, continuer à fabriquer nos produits au Canada.

J'aimerais, à ce moment-ci, ouvrir une parenthèse. Je présume que nous avons tous l'impression qu'on a oublié d'inclure quelque chose dans le texte qui a été soumis au comité

Les canons eux-mêmes - seulement les canons, sans aucune autre pièce, et M. Daigneault, de SNC, vous en a montré un - , seraient considérés comme des dispositifs prohibés. Si l'on voulait faire traiter thermiquement un canon, il faudrait que l'opérateur de four de traitement thermique se conforme à toutes les exigences du règlement adopté.

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Il serait tout de même incroyable qu'un dispositif aussi inoffensif qu'un canon - que M. Daigneault voudra bien vous montrer encore une fois - puisse, à lui seul, mettre un terme aux activités de notre entreprise.

Je vais maintenant revenir au texte.

Nous aimerions d'ailleurs demander également que, dans ce même chapitre, on ajoute une disposition qui nous permettrait d'acheter et de garder en stock des munitions à pointe creuse, afin de pouvoir tester nos armes de poing. En effet, un grand nombre des personnes qui utilisent nos armes de poing - dans la police et dans l'armée - , se servent de munitions à pointe creuse, et vérifier le fonctionnement de nos armes avec le même genre de munitions est essentiel pour pouvoir fabriquer un produit de qualité.

À la page 11 du règlement, l'alinéa 23(1)d)i) stipule que l'on doit tenir un inventaire des dispositifs d'armes à feu qui ne sont pas en état de fonctionnement, ce qui comprendrait les chargeurs et les canons. Il s'agit d'une disposition lourde de conséquences pour un fabricant comme nous, alors que cela ne se traduit par aucun avantage tangible en ce qui a trait aux objectifs de la législation. Si l'on inclut les munitions prohibées, la tâche deviendra impossible.

Je me permets de demander aux membres du comité de prendre en compte le fait que nous ne traitons pas avec le public et qu'en conséquence nos opérations ne posent pas les problèmes de sûreté et de sécurité que cette partie de la réglementation cherche à résoudre.

Le chapitre sur l'entreposage, l'exposition et le transport des armes à feu commence à la page 23. Je me permets d'attirer votre attention sur l'alinéa 3c), qui requiert que l'on entrepose séparément les différentes catégories de produits que nous fabriquons - les armes sans restrictions, les armes à autorisation restreinte, les armes de poing prohibées.

Encore une fois, ce règlement semble être conçu pour répondre aux préoccupations que pourraient avoir les législateurs vis-à-vis quiconque traite avec le public, ce qui n'est évidemment pas le cas de notre entreprise. En ce qui nous concerne, il s'agit uniquement d'une autre disposition pratiquement impossible à appliquer, qui compliquerait notre tâche sans pour autant présenter d'avantages.

M. Daigneault a parlé du système de sécurité que SNC a mis en place et que divers organismes d'application de la loi ont approuvé. Nous avons, nous aussi, adopté de nombreuses mesures de sécurité qui ont été approuvées par les autorités qui se chargent, tous les ans, de nous délivrer une licence.

Nous estimons que ces dispositions ne devraient pas être appliquées, du moins aux fabricants comme nous qui ne traitent pas avec le public. Personne ne peut entrer chez nous et prendre ce qui est maintenant considéré comme dispositif prohibé, un canon court, parce qu'il traîne sur une tablette. Tous nos produits sont gardés en lieu sûr, même s'ils ne sont pas entreposés séparément, comme le voudrait le règlement.

Si l'on passe à la page 31, l'article 12, dans le même chapitre de la réglementation, nous empêcherait d'expédier un chargeur à haute capacité ou un canon qui mesurerait moins de 105 mm, sans prendre les mesures de sécurité extrêmes qui sont décrites dans cet article. Or, en vertu de l'article 10, à la page 28, nous pourrions expédier une arme de poing prohibée, en état de fonctionnement, déjà munie dudit canon, dans les mêmes conditions que celles qui existent actuellement.

L'autre partie de la réglementation sur laquelle j'aimerais attirer votre attention commence à la page 41 et porte sur les autorisations d'exportation ou d'importation. Plus précisément, à la page 42, les alinéas 3j) et 3k) traitent respectivement de l'obligation de fournir les noms et numéros de permis des transporteurs auxquels on a l'intention de faire appel pour exporter les marchandises, et de l'obligation d'indiquer si les articles exportés seront éventuellement réimportés au Canada.

.1625

Ces renseignements peuvent ne pas être disponibles au moment où l'on fait la demande d'autorisation d'exportation, et l'impact que cela peut avoir sur les exportations d'une entreprise devrait être minimisé.

Même si l'objectif poursuivi nous échappe, nous nous permettons de signaler que, à la même page, l'article 4 stipule que nous devons étiqueter les contenants dans lesquels nous expédions nos marchandises, ce qui est contraire aux dispositions relatives à l'entreposage, à l'exposition et au transport des armes à feu.

Nous pourrions sans doute adopter l'une ou l'autre méthode, mais l'on devrait apporter des précisions sur ce point. Le comité a peut-être déjà examiné la question au cours d'audiences précédentes, et je ne vais donc pas m'y attarder longtemps.

À la page 44, l'alinéa 7(1)h) semble nous obliger à savoir si un objet contrôlé par le biais de la loi va nous être expédié de l'étranger. Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, il est assez difficile de savoir quand une commande à livrer va quitter l'entrepôt d'un fournisseur ou, dans notre cas, quand un client étranger va décider, sans que nous l'ayons nous-mêmes incité à le faire, de ne pas s'adresser aux représentants étrangers qui sont responsables de nos marchandises sous garantie et de renvoyer directement un produit à l'usine pour être inspecté.

Nous avons quelques réserves à propos de l'article 9, à la page 45. En vertu de cette disposition, on envisage de détruire les marchandises confisquées qui se trouvent toujours dans un bureau de douane dix jours après qu'on a tenté, sans succès, de les importer, suivant les dispositions du paragraphe 47(4) de la Loi. Permettez- moi de souligner que cette période peut ne pas être suffisante pour se prévaloir des recours disponibles lorsque l'autorisation d'importer est refusée, et que l'on risque d'empêcher les intéressés d'avoir accès à une procédure équitable.

Enfin, et c'est la mesure qui appelle le plus de réserve étant donné qu'elle n'a pas pour objectif d'améliorer que quelque façon que ce soit la sécurité de la population canadienne, nous nous élevons contre l'imposition des droits que l'on envisage de percevoir pour émettre des licences d'exportation, comme on le note dans la dernière partie de cette réglementation.

Je trouve absolument étonnant que le Canada envisage sérieusement de pénaliser les entreprises qui exportent une marchandise particulière, soit les armes à feu, alors qu'un grand nombre de pays du monde cherchent continuellement à éluder les accords commerciaux - en subventionnant ou en aidant d'une façon ou d'une autre leurs exportateurs - , et vont même parfois jusqu'à se livrer de véritables guerres commerciales ou faire appel à des tribunaux commerciaux internationaux pour régler ce genre de question.

Permettez-moi de vous faire respectueusement remarquer qu'à un moment ou à un autre, il faudra cesser de considérer que nous faisons un commerce démoniaque, et en supprimant cette taxe, on a peut-être l'occasion de le faire.

Je sais que certains demanderont que l'on impose des droits d'utilisation; qu'il en soit donc ainsi pour tous les exportateurs. D'autres prétendront qu'à cause des dispositions de la loi, il va falloir prévoir une manutention spéciale des armes à feu, ce qui justifie l'imposition de ces droits.

Il existe certainement d'autres marchandises qui ne sont frappées d'aucun droit, même si leur manutention requiert une attention spéciale de la part d'organismes gouvernementaux, par exemple, les substances contrôlées que l'on trouve dans les produits pharmaceutiques et chimiques ainsi que dans les matériaux nucléaires.

Cela fait douze ans que notre entreprise a été créée et, au cours de cette période, nous n'avons jamais eu à déplorer d'incident qui aurait pu être évité si ces mesures touchant la manutention de nos produits à l'exportation par les douanes canadiennes avaient été en place. Personnellement, je ne connais aucun autre fabricant pour qui il en a été autrement.

Notre entreprise et ses employés tiennent à remercier le comité de prendre en considération les questions que nous avons soulevées aujourd'hui. Par ailleurs, nous espérons que toute modification jugée justifiée et nécessaire sera apportée à ces règlements afin que nous puisions continuer à mener des activités qui contribuent à l'économie canadienne, principalement à Toronto et à Montréal.

Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Polyzos.

Nous aimerions maintenant souhaiter la bienvenue à M. Taylor. Nous sommes heureux de vous revoir. La parole est à vous.

M. Alan Taylor (vice-président et directeur général, Savage Arms Canada): Je m'excuse de mon retard; je me suis trompé de salle

Monsieur le président, honorables membres du comité, depuis 1969, Savage Arms Canada fabrique à Lakefield, en Ontario, des carabines de calibre .22 utilisant des cartouches à percussion annulaire. Elle produit dix-neuf modèles différents, dont des armes à répétition à verrou, des armes avec chargeur semi-automatique, des magnums, des armes à âme lisse, des armes à canon lourd, des armes pour le tir à la cible, des carabines pour le biathlon, des armes pour le tir sur silhouette et des armes pour les jeunes. La plupart de ces modèles sont offerts pour gauchers et pour droitiers.

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En 1996, nous avons exporté 95 p. 100 de notre production. Nos principaux marchés sont les États-Unis, l'Europe, l'Amérique du Sud et l'Amérique centrale. Nous avons actuellement un effectif de 49 employés, qui devrait être de 65 d'ici la mi-mai.

J'aimerais vous parler des droits d'exportation et d'importation. Nous sommes fermement opposés à tout droit de ce genre. D'après nos prévisions pour 1997, ces droits nous coûteront plus de 15 000 $. À un moment donné, c'était 240 000...

Depuis que j'ai donné ce chiffre au comité qui étudie la législation sur les armes à feu, l'un de nos principaux clients, K Mart, aux États-Unis, nous a fait savoir qu'il envisageait de fermer son entrepôt central et de faire expédier les marchandises par les fournisseurs directement à chaque magasin. C'est une décision qui décuplera les droits d'exportation à payer puisque K Mart a 2 300 magasins aux États-Unis. Si nous expédions les armes en lots de cinq, nos coûts augmenteront de 4 p. 100. En ce moment, nous avons un avantage sur nos concurrents américains, mais ces frais supplémentaires et une légère hausse de la valeur du dollar canadien nous le feront perdre. Cela entraînera la disparition de certains emplois.

Ces coûts supplémentaires nous obligeront à fermer l'usine. Le gouvernement tente peut-être de lever une taxe qui lui permettra de gagner des milliers de dollars, mais, ce faisant, il perdra des millions de dollars en salaires et en impôts dans la région de Peterborough-Kawartha. Les petits marchands et les particuliers seront vraiment pénalisés lorsqu'ils exporteront et importeront des armes à feu. L'achat d'une arme à feu pourrait coûter de 4 à 20 p. 100 plus cher. D'après mon interprétation des droits de douanes, quelqu'un qui enverrait son arme à l'étranger pour la faire réparer serait obligé de payer 20 $ à l'aller et le même montant au retour.

L'industrie de la chasse et du tir à la cible est une entreprise légitime qui se voit imposer une taxe d'exportation alors qu'aucun commerce au Canada n'est obligé de payer les mêmes droits.

Nous avons démontré au comité que nous étions en mesure de déclarer toutes les exportations, y compris les numéros de série des armes à feu, au besoin. Cela peut se faire par ordinateur sans qu'une inspection soit nécessaire à la douane, sinon, ce serait l'enfer tant pour les douaniers canadiens que pour les entreprises de camionnage.

Comment peut-on donner des millions de dollars à des entreprises pour promouvoir les exportations, et ensuite taxer l'industrie des armes à feu, la seule industrie au Canada qui soit obligée de verser des droits d'exportation? C'est incroyable.

J'ai avec moi une lettre du propriétaire de l'entreprise. Je ne vous en ferai pas la lecture. On vous l'a distribuée. Elle dit tout simplement que si nous ne sommes pas compétitifs, ils vont aller s'installer ailleurs.

Je serais très étonné que l'ALENA autorise le gouvernement canadien à imposer une taxe d'importation supplémentaire sur les armes à feu. J'ai discuté de cette question avec les représentants américains, et ils ont des réserves à ce sujet. Ils ne comprennent pas le geste du gouvernement. Nous avons intérêt à nous pencher là- dessus.

J'aimerais vous parler des permis de transport, qui préoccupent aussi beaucoup l'industrie des armes à feu puisque, dorénavant, les transporteurs seront tenus de se procurer un permis pour transporter des armes à feu. Les règles qui régiront les permis des transporteurs nous inquiètent. Il faudra bien que ces derniers se plient à des conditions particulières, sinon il serait inutile d'avoir un permis. Or, personne ne nous en a parlé. S'il y a des problèmes de transport, l'industrie sera paralysée.

Au moins 200 armes à feu ont été transportées au Canada en 1996; ce nombre comprend les importations, les exportations, les expéditions des distributeurs aux vendeurs et les envois pour réparation.

M. Ramsay (Crowfoot): Votre mémoire parle de 200 000 armes.

M. Taylor: D'accord, je suis désolé, qu'ai-je dit? Je suis désolé, c'est effectivement 200 000 armes. Je lis mal. Merci.

Le président: Effectivement.

M. Taylor: J'ai communiqué avec la plupart de nos distributeurs et avec nos principaux détaillants et seulement deux armes à feu ont été perdues ou volées en 1996, soit 0,001 p. 100 du total estimatif des armes transportées en 1996. Je suis sûr qu'il y en a eu un peu plus, mais le pourcentage est extrêmement bas.

Il est difficile de croire que le fait de délivrer des permis aux transporteurs améliorerait les statistiques. Pourquoi les transporteurs et l'industrie des armes à feu devraient-ils faire les frais d'une disposition qui ne changera pas grand chose à ce qui semblerait faire problème?

Notre ministre de la Justice, monsieur Rock, a déclaré que l'industrie et les utilisateurs des armes à feu devront supporter tous les coûts reliés à l'administration du programme. Cela comprend les douanes canadiennes, les bureaux d'enregistrement de la police dans tout le Canada, la construction du nouveau Centre canadien des armes à feu au Nouveau-Brunswick et son personnel, le coût des employés des bureaux de permis de transport dans les provinces, les frais des vendeurs d'armes à feu qui se chargeront de l'enregistrement des armes neuves ou cédées.

Notre ministre des Finances, M. Martin, affirme que le projet de loi C-68 ne sera mis en oeuvre que si son application ne coûte rien au Trésor. Ce sont deux affirmations on ne peut plus contradictoires.

.1635

Certificats d'enregistrement, permis de possession et d'acquisition... Le gouvernement a admis que l'enregistrement initial des quelque huit millions d'armes à feu et le traitement des 300 000 demandes de permis de possession et d'acquisition d'armes à feu vont lui faire perdre de l'argent.

À partir de 1998, le droit d'enregistrement des armes à feu sera de 10 $, mais il augmentera les années suivantes à 14 $, 16 $ puis 18 $. Par la suite et pour toute nouvelle arme enregistrée, le droit à payer sera de 25 $. Les responsables ignorent quel sera le montant réel du droit.

Le ministère de la Justice estime que le traitement d'une AAAF, qui sera remplacée par un permis de possession et d'acquisition, coûte actuellement 82 $. Pour ceux qui ne désirent pas acheter de nouvelles armes à feu, le permis coûtera 10 $ en 1998, 45 $ en 1999 et 60 $ en l'an 2000. Pour ceux qui veulent acheter d'autres armes à feu, le permis coûtera 60 $. Le programme sera encore déficitaire.

L'an dernier, Henry Vanwyk, directeur du groupe de travail sur le contrôle des armes à feu, a déclaré que l'on peut s'attendre à un délai de récupération de 15 ans. Étant donné le nombre d'armes à feu vendues au cours des cinq dernières années, on se demande comment le gouvernement pourra recouvrer ce coût en 15 ans. De 1990 à 1995, le nombre d'armes à feu vendues au Canada est passé de 230 983 unités à 112 927 unités, soit une chute de 51,1 p. 100. De janvier à novembre 1996, le total des importations et des ventes de Savage Arms a été de 76 419, soit une autre baisse de 32,3 p. 100. Le chiffre d'affaires de Savage Arms (Canada) a diminué de 56,2 p. 100 en 1996.

Comme la GRC et la plupart des corps policiers ont équipé leurs agents de nouveaux modèles au cours des trois dernières années, les ventes au grand public ont encore plus ralenti. Pour arriver à ces chiffres, nous avons utilisé les données sur l'importation des armes à feu, publiées par la Direction générale de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice, et le chiffre des ventes de Savage Arms (Canada). Si je me suis servi des chiffres de notre entreprise, c'est parce que nous sommes le seul fabricant important d'armes dont le volume des ventes au Canada est significatif.

Entre 1991 et 1995, il y a eu respectivement, 199 000, 288 000, 35 000, 49 000 et 46 000 AAAF d'accordées, ce qui donne un total de 619 000. Ce nombre va augmenter quand il faudra se procurer un permis de possession, mais on est bien loin des trois millions auxquels s'attend le gouvernement.

Nous avons maintenant une nouvelle loi sur les armes à feu qui va se traduire par des dépenses supplémentaires pour l'industrie des armes à feu, les chasseurs, les tireurs sur cibles, les collectionneurs et le grand public - dans quel but? L'industrie des armes à feu et d'autres Canadiens inquiets ont fourni au ministère de la Justice toutes sortes de preuves indiquant que le nombre des crimes avec violence diminue et que les divers types de mesures de contrôle des armes à feu adoptées depuis les années 30 n'ont pas été efficaces.

Le gouvernement, en revanche, n'a absolument pas démontré que de nouvelles mesures de contrôle allaient améliorer la sécurité des Canadiens. Je dois pourtant présumer qu'il dispose de statistiques puisque, en mars 1995, il a accordé un contrat à Plains Research pour étudier les effets des modifications apportées en 1977 et en 1991 à la législation des armes à feu sur les décès par balle et sur d'autres incidents mettant en cause des armes à feu, les effets de la procédure améliorée pour les demandes d'AAAF et les effets des modifications législatives sur l'usage d'armes à feu dans la perpétration de crimes.

La Bibliothèque du Parlement a demandé le 6 décembre 1995 une copie du rapport final de cette étude et, le 14 décembre 1995, elle a présenté une demande officielle en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. En pratique, on a refusé de lui communiquer le rapport, puisque seulement huit pages lui ont été transmises alors que le rapport en compte plus de 2 000. Ce geste a été justifié en invoquant l'article 22 de la loi, qui autorise le responsable d'une institution fédérale à refuser de communiquer des renseignements si cette communication est susceptible de compromettre les résultats d'une étude de recherche.

Cela nous amène à croire que le gouvernement libéral détient des renseignements qu'il ne veut pas faire connaître aux autres partis politiques ou au grand public. M. Rock aurait dit, selon certains, qu'il n'était pas sûr que son projet de loi allait réduire le nombre des crimes avec violence commis avec une arme à feu. À mon avis, M. Rock sait que cette loi n'aura aucun effet sur la criminalité, mais qu'elle va priver d'armes à feu le grand public, parce que c'est son but véritable.

Nous demandons de nouveau à notre ministre de la Justice et au Parti libéral de laisser tomber le projet de loi et d'adopter des mesures constructives pour réformer notre système judiciaire et la façon dont les criminels sont condamnés et mis en liberté conditionnelle. J'espère que cette fois on tiendra mieux compte de nos craintes que lors de notre dernière comparution devant le comité.

.1640

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Taylor.

Nous allons maintenant passer aux questions des membres du sous-comité et commencer par M. de Savoye.

[Français]

M. de Savoye (Portneuf): Messieurs Roberge, Polyzos, Taylor, Daigneault, Héroux et Renaud, merci de nous avoir présenté vos préoccupations quant à la réglementation sur les armes à feu. J'ai senti dans une couple de présentations une préoccupation sérieuse quant à la capacité de la loi d'atteindre les buts qui y sont prévus.

Je dois vous dire que j'ai assisté à la vaste majorité des audiences qui ont conduit à l'adoption de la loi. Au début, j'étais sceptique parce que je suis d'une nature critique et sceptique, mais je dois vous avouer qu'au fur et à mesure des audiences, au fur et à mesure que des témoins aussi compétents dans leur domaine que vous l'êtes dans le vôtre ont exposé des points de vue qui étaient parfois très différents les uns des autres, il s'est dégagé une convergence qui a fait en sorte que j'ai acquis la conviction que le projet de loi était bien fondé dans ses intentions et dans ses moyens.

.1645

Cependant, je ne peux faire autrement, parce que c'est mon rôle, que de m'assurer que la réglementation qui sera mise en place n'empêchera pas les individus d'exercer le sport de leur choix ou n'empêchera pas des industries d'effectuer, avec toute l'efficacité et la rigueur qui leur sont propres, leurs activités essentielles.

Vous venez aujourd'hui nous exprimer vos craintes. J'ai apprécié énormément l'exposé de M. Daigneault et de M. Héroux, qui ont mis le doigt sur des façons de faire dans leurs entreprises qui ne semblaient pas pouvoir être couvertes par la réglementation telle qu'elle est actuellement. Monsieur Taylor, monsieur Polyzos, monsieur Roberge, vous avez aussi soulevé des éléments de même nature.

J'ai compris que dans vos entreprises, vous aviez déjà mis en place des mesures de sécurité très complètes. Dans votre mémoire, monsieur Daigneault, il y a une énumération:

[Traduction]

une surveillance des lieux en permanence, à longueur d'année, des chambres fortes pour l'entreposage des armes. J'espère que le ministre ne le prévoira pas dans les règlements.

[Français]

Vos habitudes de sécurité, vous les avez acquises et perfectionnées au cours des années, et il me semble qu'il serait très difficile d'avoir une réglementation mur à mur qui pourrait couvrir toutes ces préoccupations. C'est pour cela que j'ai été particulièrement intéressé par une recommandation que vous faites, monsieur Daigneault, à savoir que les entreprises, et je vous cite:

[Traduction]

[Français]

Cela me semble être une approche très constructive. Messieurs Taylor, Polyzos et Roberge, si une approche comme celle-là était envisagée par le ministre, y seriez-vous réceptifs?

[Traduction]

M. Taylor: Je n'étais pas là lorsqu'il a fait son exposé si bien que je ne peux pas vraiment répondre à cette question. Désolé.

M. de Savoye: Monsieur Polyzos.

M. Polyzos: Oui, je suis d'accord, en principe. Je pense que c'est effectivement ce qui se produit. En fait, toutes nos entreprises, comme je l'ai dit dans mon témoignage, sont assujetties à la surveillance et aux règlements des forces de l'ordre locales, qu'il s'agisse des forces municipales ou de la Police provinciale de l'Ontario, par opposition à la Sûreté du Québec.

En fait, les forces de l'ordre viennent nous inspecter pour s'assurer que nous répondons aux normes actuelles. Elles font des propositions, si à leur avis il y a de meilleures façons de procéder. Ce qui ressort de ces rencontres pourrait prendre la forme d'un plan mis sur papier et présenté aux autorités provinciales qui seraient chargées par le procureur général du Canada d'approuver de tels plans. Je n'aurais aucun problème à cet égard.

M. de Savoye: Monsieur Roberge.

M. Roberge: Il faudrait que j'en fasse la lecture et que je demande à mes collègues d'y jeter un oeil avant de pouvoir répondre. Nous sommes réglementés. Je pense que nous offrons un service dont le gouvernement n'a pas à s'occuper. Nous nous réglementons nous-mêmes, non pas à cause du gouvernement, mais par peur. Nos détaillants se protègent, tout comme notre industrie, pour des raisons évidentes.

Je crois que les règlements que nous nous imposons sont parfois plus stricts que ceux du gouvernement. Toutefois, ceci étant dit, nous respectons les lois, les règles et les règlements du gouvernement. Ce que nous disons aujourd'hui, c'est que nous n'avons pas besoin de règlements supplémentaires qui ne changeront pas vraiment la situation. J'aimerais en prendre connaissance. Je ne peux absolument pas prendre d'engagement.

.1650

[Français]

M. de Savoye: C'était votre opinion que je voulais et non pas un engagement à ce moment-ci.

Monsieur Héroux, je suis curieux. Vous nous avez parlé de munitions FX. Qu'est-ce que c'est, des munitions FX?

M. Héroux: On en a justement ici quelques boîtes qu'on peut vous montrer, mais je préférerais laisser M. Renaud, qui est un spécialiste dans le domaine, vous expliquer au juste ce qu'est la munition FX.

M. Denis Renaud (technologue, Technologies industrielles SNC Inc.): Spécialiste, c'est un très grand mot. La munition FX est une enveloppe de projectile de plastique à l'intérieur de laquelle on retrouve une matière colorante. Elle a été développée il y a quelques années. On a commencé le développement en 1990 à la suite de demandes provenant des Forces armées et des forces policières.

À l'époque, les groupes d'intervention n'avaient pratiquement rien pour s'entraîner, pour faire un entraînement réaliste, ce qu'on appelle un entraînement force contre force, personne contre personne. À ce moment-là, ils nous ont demandé s'il était possible de développer une cartouche.

Finalement, tout ce que c'est, c'est une paint ball. C'est une cartouche de peinture, mais qui est utilisée à l'intérieur d'une arme conventionnelle. Cela demande un canon de conversion, ce que M. Daigneault montrait plus tôt. Le canon de conversion lui-même empêche qu'on puisse tirer une cartouche réelle avec une arme qui a été convertie pour les besoins de l'entraînement.

À partir du moment où on a installé le canon de conversion dans l'arme, certaines mesures de sécurité y sont introduites. Une fente coupée dans le côté du canon empêche la décharge dans le cas d'un chargement accidentel avec une cartouche réelle. La pression nécessaire pour pousser un projectile conventionnel à travers un canon serait supérieure à la pression qu'il faut pour déchirer l'étui de façon à décharger ce projectile. Donc, il y a là un facteur de sécurité. Tout ce que c'est, c'est une enveloppe de plastique préfragmentée. On peut en faire circuler quelques-unes, si vous n'y voyez pas d'objections.

M. de Savoye: Elles ne sont pas dangereuses?

M. Renaud: Elles sont chargées; ce sont des cartouches réelles. Ce sont des cartouches amorcées, qui ont une charge à l'intérieur, mais il n'y a absolument aucun danger.

M. de Savoye: C'est ce que je voulais vous entendre dire.

M. Renaud: Il n'y a absolument aucun danger. Si vous regardez bien, vous verrez que ce n'est qu'une enveloppe de plastique. Il y a un bouchon à la base et une matière colorante à l'intérieur. Si vous regardez la douille, vous verrez qu'elle est fabriquée en deux parties. La partie blanche est en plastique blanc et la douille conventionnelle est en laiton. La fonction de la douille de laiton et de ce qu'on appelle le sabot en plastique blanc est de recycler l'arme de service. C'est le seul but de ces cartouches. C'est tout simplement un paint ball sophistiqué pour les armes de service.

M. de Savoye: Donc, si je vous comprends bien, ce sont des munitions sans être des munitions. Si quelqu'un est touché par cet objet, il ne sera pas blessé. Cela pourrait-il être dangereux?

M. Renaud: Cela réveille. Disons que cela sensibilise son homme. Cela demande certains équipements de protection, parce que le visage et les yeux sont des parties très sensibles. Avec les équipements appropriés, il n'y a pratiquement aucun danger.

M. de Savoye: Donc, vous me dites que ce n'est pas un jouet. C'est une chose sérieuse, pour laquelle vous avez élaboré des mesures de sécurité qui font en sorte que les forces policières, paramilitaires ou militaires sont capables de l'utiliser avec profit pour leur entraînement mais sans danger pour leur personnel.

M. Renaud: C'est exactement cela.

M. de Savoye: Vous me dites également que les armes qu'on utilise avec ces cartouches ne peuvent être reconverties ou ne peuvent tirer des munitions normales.

M. Renaud: Les armes peuvent être retournées au service. En fait, on vend le canon lui-même. On ne vend pas d'armes en tant que telles; on vend seulement des canons de remplacement. On en vend seulement à des agences policières et à des forces militaires reconnues. On n'en vend pas au public en général. On s'est toujours refusés à vendre au public en général, justement à cause de la très mauvaise presse qu'on pourrait recevoir et aussi à cause de la responsabilité qui est rattachée à un produit comme celui-là. On s'est toujours limités aux besoins policiers et militaires.

M. de Savoye: Tenez-vous un registre de ce que vous vendez et de ceux à qui vous le vendez?

.1655

M. Renaud: À l'heure actuelle, tous nos bons de commande font état des personnes à qui on a vendu. À un moment donné, on reçoit des commandes par télécopieur, mais sur papier à en-tête du service de police. Il faut aussi une personne... On vend par l'intermédiaire des distributeurs sur le réseau américain et international.

M. Daigneault: Un numéro de série. C'est cela qu'il veut savoir.

M. Renaud: Le numéro de série pour les armes?

M. Daigneault: Non, pour les canons. Tient-on des dossiers des canons que l'on fabrique?

M. Renaud: Chez nous, on tient de tels dossiers, mais on ne peut les retracer à l'heure actuelle. Je m'excuse. On ne va pas jusque chez le client avec le numéro de série à l'heure actuelle.

M. de Savoye: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur de Savoye.

[Traduction]

Monsieur Ramsay.

M. Ramsay: Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier nos témoins qui nous ont présenté leur exposé aujourd'hui.

Je regarde le mémoire que vous avez présenté, monsieur Daigneault, et que vous nous avez lu. À la page 6, vous dites:

Voyez-vous des groupes de pression mal intentionnés aujourd'hui?

M. Daigneault: Non, pas à ma connaissance.

M. Ramsay: En connaissez-vous dont vous pourriez parler au comité?

M. Daigneault: Non.

M. Ramsay: À ses débuts, il y a 20 ans environ, la loi visait les propriétaires de mitrailleuses et d'armes automatiques. Ceux qui avaient des armes à feu autres que celles-ci n'étaient pas visés. Ensuite bien sûr, les lois ont gagné du terrain. Toutes ces armes d'épaule qui ressemblaient à une arme militaire, y compris les 22, ont été interdites. Ce projet de loi interdit maintenant 58 p. 100 des armes de poing légalement acquises. Maintenant, vous êtes directement visés et comme les règlements du projet de loi lui-même auront un effet négatif sur vous au plan économique, vous venez nous parler.

Je me demande si les groupes qui utilisent des armes à feu en toute légalité sont prêts à se sacrifier. Il me semble que c'est l'intention, ou tout du moins ce que je comprends de vos propos. Je voulais que cela soit clair avant d'aborder d'autres questions. Allez-y, si vous avez des commentaires à ce sujet.

M. Daigneault: Non, non, pas de problème. S'il faut un sous-comité pour examiner les règlements, j'imagine que dans un pays démocratique comme le Canada, la loi et ses règlements

[Français]

ne faisaient pas l'affaire de tous les citoyens canadiens.

[Traduction]

À mon avis, il y a sûrement des gens dont les intentions ne sont pas aussi légitimes que les nôtres lorsque nous fabriquons des munitions ou manipulons des armes à feu. Si ces gens n'existaient pas, nous n'aurions probablement pas besoin d'une loi ou de règlements comme ceux-ci. Ce que je ne veux pas, c'est que certains de ces groupes, s'ils existent, lancent une campagne en reprenant certains de nos arguments qui, à notre avis, sont légitimes. C'est l'intention.

.1700

M. Ramsay: D'accord. De toute évidence, le gouvernement réglemente votre entreprise. Il réglemente d'autres entreprises également, par l'entremise du projet de loi et des règlements. Il décide que plus de la moitié des armes de poing enregistrées au Canada sont interdites, sans aucune justification statistique.

Pensez-vous que si le gouvernement est prêt à procéder de la sorte, il a besoin de justification statistique pour réglementer votre entreprise - comme il le fait? J'aimerais également vous poser une question plus importante - plus importante aux yeux du comité je crois, et à mes yeux certainement: quel impact économique cela aura-t-il sur votre industrie, sur votre entreprise?

M. Daigneault: Je n'ai pas calculé le nombre d'importations et d'exportations multiplié par le montant qui sera imputé. Je n'ai pas ces chiffres ici.

Par contre, ce qui nous préoccupe beaucoup, c'est qu'aujourd'hui beaucoup de nos employés manipulent des pièces d'armes qui seront déclarées interdites et que ces employés n'ont jamais pensé acheter des armes. Si le règlement est adopté tel quel, tous les employés de notre société qui manipuleront une de ces pièces interdites - qui n'est rien d'autre qu'une autre pièce de métal - devront suivre des cours de maniement des armes et avoir un permis d'acquisition.

Pourquoi donner aux gens la possibilité de comprendre le fonctionnement d'une arme et d'acheter une arme interdite? Nous les obligeons à s'intéresser à des armes et à en acheter, éventuellement. Je ne crois pas que ce soit l'objet de la loi et des règlements.

M. Ramsay: Est-ce que ce projet de loi et les règlements, adoptés tels quels, - nous allons en avoir plus, car nous n'avons pas encore traité de la partie du projet de loi C-68 sur l'enregistrement - ont un impact économique négatif sur votre entreprise?

M. Daigneault: Oui.

M. Ramsay: Avez-vous consulté les fonctionnaires du ministère de la Justice pour leur faire part de ce sujet de préoccupation?

M. Daigneault: Récemment, oui.

M. Ramsay: Cela s'est-il passé avant que les règlements ne soient déposés?

M. Daigneault: Non.

M. Ramsay: Vous ne les avez pas consultés avant?

M. Daigneault: Non.

M. Ramsay: Est-ce que les fonctionnaires du ministère vous ont assuré que l'on se pencherait sur un tel point de préoccupation?

M. Daigneault: Oui.

M. Ramsay: Pourriez-vous faire part au comité de ce que l'on vous a dit?

M. Daigneault: Je vais demander à M. Héroux de prendre la parole, puisque je n'ai pas passé toute la journée avec les fonctionnaires, lorsqu'ils sont venus dans notre entreprise, contrairement à M. Héroux. Je leur ai souhaité la bienvenue, je leur ai brossé un tableau de notre entreprise avant de les laisser avec des personnes techniquement qualifiées. Normand?

[Français]

M. Héroux: On nous a donné certains renseignements qui pourraient nous aider. En fin de compte, certaines dispositions de la loi pourraient nous aider. Par exemple, l'article 97 permet au ministre de faire certaines exemptions.

Cependant, on ne sait pas encore de quelle façon ces dispositions vont s'appliquer et quels seront les règlements qui vont découler de cet article de la loi. C'est pour cela qu'on ne peut véritablement accepter que le ministre...

Si chaque personne qui entre dans l'entreprise pour un contrat temporaire et qui doit manipuler des pièces d'armes telles que celles qu'on vous a montrées aujourd'hui doit aller suivre des cours et chercher un permis, on ne voit pas de quelle façon on pourra rencontrer les échéances des contrats en question.

.1705

S'il faut s'adresser au ministre pour lui demander une exemption pour la personne en question, combien de temps cela prendra-t-il? On ne connaît pas le mécanisme. Même si on nous a donné certaines indications qui nous permettraient de nous faufiler quelque part, on sent qu'on a les poings liés par rapport aux articles qui sont très contraignants.

[Traduction]

M. Ramsay: D'accord, merci.

Le président: Monsieur Kirkby.

M. Kirkby (Prince-Albert - Churchill River): J'aimerais remercier les témoins qui sont venus nous présenter leur exposé aujourd'hui.

Vos employés doivent-ils actuellement subir un contrôle policier ou suivre un cours avant leur embauche, en plus des mesures que prend votre société? Pouvez-vous me décrire votre processus d'embauche?

[Français]

M. Héroux: D'abord, on est assujettis à la Loi sur les explosifs. De par la Loi sur les explosifs, tous les employés qui doivent travailler avec des explosifs ou qui ont le contrôle d'explosifs dans l'usine doivent avoir un permis d'explosifs. Il y a donc un contrôle qui est assuré par la Sûreté provinciale.

Ensuite, les gens qui doivent travailler avec des armes à feu doivent suivre des cours, et on leur fait également passer des tests psychométriques afin de déterminer leur niveau de dangerosité. On les suit par la suite au cas où il y aurait un problème particulier dans leur vie personnelle ou quand quelqu'un sent qu'un de ses confrères a un problème. Il nous est même arrivé de retirer un employé de l'utilisation des armes pour lui donner le temps de régler ses problèmes personnels parce qu'il constituait, à notre avis, un risque potentiel pour ses confrères.

[Traduction]

M. Kirkby: D'accord. Monsieur Taylor et monsieur Polyzos - je vous pose la même question.

M. Taylor: Tout employé que nous embauchons doit obtenir une AAAF, mais la police ne fait pas de recherche. Nous ne sommes pas tenus, en vertu des règlements, de demander à la police de faire une vérification judiciaire de nos employés, mais les employés doivent obtenir une AAAF, ce qui permet un genre de vérification. Les employés commencent cependant à travailler à l'usine avant d'obtenir l'AAAF.

M. Kirkby: D'accord. Monsieur Polyzos.

M. Polyzos: Étant également implantés à Toronto, notre situation n'est pas différente de celle de M. Taylor. Les employés qui manipulent des armes à feu terminées - ceux qui font des essais probatoires avant la sortie d'usine - ont tous des AAAF et, dans de nombreux cas, beaucoup plus que cela. Il arrive qu'ils aient leur propre permis d'armes à autorisation restreinte.

Je pense que le problème abordé est plus vaste et ne vise pas uniquement les employés qui manipulent des armes à feu terminées. La question qui se pose de nouveau est celle du canon, cette petite pièce de métal inoffensive qui peut, en vertu de ces dispositions, nous mettre en mauvaise posture vis-à-vis la loi et nous exposer à des poursuites - si, par exemple, je permets à ma secrétaire de manipuler une pièce, parce qu'elle se trouve dans l'usine et qu'elle cherche des documents joints à un envoi - une situation aussi simple que celle-ci. Bien sûr, cela n'arrive pas couramment, mais c'est la situation, compte tenu des règlements qui nous sont présentés ici.

M. Kirkby: Est-ce qu'il est arrivé que des employés de votre société aient volé des armes à feu ou des explosifs ou les aient utilisés pour perpétrer un acte criminel ou quelque chose du genre? Je pose la question aux trois témoins. Monsieur Daigneault?

M. Daigneault: Je fais partie de ma société depuis 1990 et mon collègue depuis plus de 13 ans et nous n'avons jamais eu d'incidents mettant en cause des explosifs ou des armes à feu.

M. Taylor: C'est la même chose pour nous; il n'y a jamais eu de vols dans notre usine ni de problèmes criminels.

M. Polyzos: Je suis l'exception; il en faut toujours. Nous avons eu un incident. Toutefois, je dois bien vous faire comprendre, ainsi qu'aux autres membres de ce comité, que je ne crois pas qu'une autorisation d'acquisition d'armes à feu aurait changé les choses.

.1710

Par analogie, prenons l'exemple des services de sécurité qui, pendant de nombreuses années passent des gens au crible et leur font subir des contrôles de sécurité; pourtant, il arrive que des gens dénoncent des agents étrangers du FBI. Tout peut arriver dans quelque industrie que ce soit; c'est le cas des agences de sécurité - si tant est que l'on puisse les assimiler à une industrie - où les vérifications judiciaires sont beaucoup plus poussées.

Nous avons certes pris des mesures de prévention depuis lors. Par exemple, nous avons installé des détecteurs de métaux aux sorties de l'usine en vue d'empêcher que ne se reproduise l'incident. Nous estimons avoir réussi à stopper ce genre d'incidents.

M. Kirkby: Qu'est-il arrivé, au juste?

M. Polyzos: Un employé a réussi à sortir de l'usine une carcasse sans numéro de série dont il s'est servi pour fabriquer un pistolet qu'il a utilisé pour commettre un crime.

M. Kirkby: Je vous remercie beaucoup de ces explications.

Monsieur Roberge, vous avez dit que les ventes d'armes à feu régressent et qu'il y a de moins en moins d'endroits où en acheter. Vous dites que le phénomène est dû aux lois et vous avez essayé de dire qu'elles étaient la seule cause de vos maux. N'y a-t-il pas d'autres causes probables?

Je puis aisément concevoir la réaction de certains quand ils vous entendent dire, comme aujourd'hui, que le but ultime du gouvernement est de confisquer toutes les armes à feu. Pourquoi irait-on s'en acheter une quand on entend de pareilles affirmations? Ce n'est pas le gouvernement qui le dit. Pourquoi le consommateur voudrait-il se procurer une arme à feu si on lui dit que le gouvernement va la lui confisquer de toute façon? Pourquoi voudrait-il le faire?

M. Roberge: Pourquoi le gouvernement voudrait nous retirer nos armes à feu?

M. Kirkby: Justement, il ne le veut pas. Alors, pourquoi l'affirmez-vous?

M. Roberge: Ah! Je comprends. Tout d'abord, les entreprises dont j'ai parlé sont celles qui sont autorisées à vendre des armes à feu. En 1993, la GRC a remis au Solliciteur général un rapport dans lequel elle affirme avoir délivré 7 500 licences autorisant des détaillants à vendre des armes à feu. En 1996, ce nombre avait baissé à 5 000. Je ne fais donc pas un lien avec ces lois uniquement, mais aussi avec le projet de loi C-17 et les règlements projetés à l'étude qui ont fait fuir tous ceux qui s'intéressaient au commerce des armes à feu.

M. Kirkby: Vous dites que les lois font fuir les intéressés. Toutefois, ce que vous dites en réalité, c'est que les consommateurs n'achètent pas d'armes à feu parce que... Ne croyez- vous pas que vos déclarations, par exemple que le gouvernement va nous retirer nos armes de toute façon, auront une influence sur celui qui envisage de s'adonner à la chasse. Il se dira: «J'aimerais bien chasser, mais toutes les associations d'armes à feu du pays disent que le gouvernement va confisquer nos armes de toute façon». Pourquoi voudrait-il acheter une arme? Si vous tenez à assurer l'avenir du sport, n'est-il pas plutôt absurde de faire de pareilles affirmations?

M. Roberge: Pas du tout, parce que, selon moi, le gouvernement cherche avant tout à faire du Canada une zone libre d'armes à feu. M. Rock l'a affirmé. Il croit...

M. Kirkby: Non, il n'a pas dit cela.

M. Roberge: Je suis désolé, mais il l'a bel et bien dit.

M. Kirkby: Non, il n'a jamais affirmé...

M. Roberge: Il a déclaré que les seules personnes qui devraient avoir des armes à feu au Canada sont les policiers et les militaires. Il l'a dit, puis il s'est dédit. Il l'a toutefois bel et bien dit. Ensuite, il a affirmé qu'il avait fait erreur, qu'il ne voulait pas vraiment dire... Cependant, il l'a dit. On l'a même cité. On l'a vu le dire à la télévision. Comment peut-on revenir sur une telle déclaration?

M. Kirkby: Je persiste à dire qu'il n'a pas dit cela.

Le président: Monsieur Taylor, vous aviez quelque chose à dire?

.1715

M. Taylor: Je l'ai moi-même lu en citation dans le journal. Il a effectivement dit...

M. Kirkby: Je suis au courant de cela; on cite souvent des déclarations hors contexte et...

M. Taylor: Toutefois, si vous regardez ce qui se passe à l'échelle mondiale...

M. Kirkby: Quoi encore... J'aimerais...

Le président: Laissez-le répondre à la question.

M. Kirkby: Non; j'aimerais...

Le président: Laissez d'abord le témoin répondre à votre première question, puis vous en poserez une autre.

M. Kirkby: D'accord.

M. Taylor: Si vous regardez ce qui se passe à l'échelle mondiale et ce que font les Européens, vous constaterez que les gouvernements d'Europe, du Canada et du Japon déploient des efforts concertés en vue d'éliminer les armes à feu. Ils sont vraiment en train de le faire. Nous exportons partout dans le monde et nous sommes au courant des règlements; attendez de voir. Ils s'y prennent très lentement. Depuis 1979, le gouvernement du Canada resserre graduellement les exigences. Voilà la cause de la baisse de notre chiffre d'affaires.

Il est vrai que les chasseurs vieillissent jusqu'à un certain point. Cela expliquerait un lent recul des ventes, mais pas la baisse de 50 p. 100 qui a été observée. Cette baisse est due au contrôle des armes à feu. En son absence, les chiffres d'affaires auraient peut-être diminué de 3 ou de 4 p. 100, mais certes pas de 50 p. 100 comme ce que nous constatons depuis cinq ans.

Le président: Dernière question, monsieur Kirkby.

M. Kirkby: Ce que je sais, ce que j'ai entendu le ministre dire - et vous admettrez qu'il l'a dit et répété maintes fois - , c'est qu'il souhaite protéger les utilisations légitimes d'armes à feu, y compris la chasse. Vous ne pouvez pas nier qu'il l'a déclaré à de nombreuses reprises aux utilisateurs d'armes à feu et devant les associations de tout le pays, ainsi que dans les médias nationaux.

J'essaye cependant de faire comprendre que, si vous voulez encourager votre sport, ne vaudrait-il pas mieux - plutôt que de se faire l'apôtre de l'apocalypse - encourager les gens de manière constructive et sécuritaire à s'adonner au sport?

M. Taylor: Ils ont...

M. Kirkby: Ne serait-ce pas...

M. Roberge: Nous avons des dépliants qui expliquent les mesures de sécurité à adopter pour protéger les enfants. Nous avons aussi des brochures qui décrivent comment devenir collectionneur. Nous avons des brochures qui font la promotion des femmes dans les sports de tir. Nous faisons tout cela. Cependant, notre problème est le gouvernement qui nous a fait passer pour de beaux salauds.

M. Kirkby: Eh bien, moi, je ne crois pas être un salaud!

M. Roberge: Êtes-vous propriétaire d'une arme à feu?

M. Kirkby: Oui.

M. Roberge: Et vous ne vous sentez pas mal dans votre peau?

M. Kirkby: Pas du tout.

M. Roberge: Eh bien! Il faudra que nous parlions - en compagnie d'un autre qui n'est peut-être pas dans la même position que vous...

M. Kirkby: J'ai même utilisé des douilles IVI. Elles sont très bonnes.

Le président: Monsieur de Savoye, avez-vous d'autres questions?

[Français]

M. de Savoye: Oui, monsieur le président.

Le président: Vous avez cinq minutes.

M. de Savoye: Monsieur Daigneault, j'ai compris plus tôt que M. Héroux avait eu pour mission de passer une journée avec du personnel du ministère de la Justice pour que ces personnes puissent apprécier les difficultés que vous entrevoyiez dans la réglementation qui était devant vous.

Avez-vous trouvé un terrain d'entente avec les gens du ministère de la Justice? Sinon, un tel terrain d'entente vous paraît-il possible ou probable, selon l'état de vos conversations avec ces personnes du ministère de la Justice? Autrement dit, est-on dans la bonne direction ou des problèmes sérieux font-ils en sorte que votre recommandation deviendrait une alternative?

M. Daigneault: Disons qu'on nous a prêté une oreille très attentive, parce qu'il est difficile d'être contre la vertu quand on fait face à une industrie comme la nôtre qui opère de façon légitime pour les gouvernements.

Je n'aimerais pas être à leur place, parce que la loi et les règlements n'ont pas été faits pour nous empêcher de faire des affaires, bien évidemment. C'est involontairement, je crois, que certains de ces règlements ont été rédigés de manière à taxer notre opération.

Lorsqu'on s'est assis avec eux, ils ont dit: «Oui, on comprend votre problème. Maintenant, qu'est-ce qu'on va faire de nos textes de loi?» Pour nous accommoder, parce qu'il est logique de nous accommoder, ces textes-là vont peut-être inclure des choses qui ne touchent absolument pas le citoyen normal qui devrait être visé par le règlement. Est-ce que cela va compliquer les choses au point où personne ne pourra y comprendre quoi que ce soit? Je ne voudrais pas être à leur place.

.1720

On est déjà très réglementés. On se sent clôturés. On ne vend pas au public. On est prêts à vous dire comment on va se contrôler, se réglementer; non pas comment on va le faire, mais comment on va continuer à le faire. Fixez-nous des barèmes minimums et on va s'y conformer et même plus. On n'a aucune mauvaise intention. On veut tout simplement continuer à faire des affaires légitimes, sans carcan, de façon simple. On ne veut rien contourner.

Peuvent-ils nous accommoder avec leurs textes et les délais? C'est tout récemment qu'on a fait venir ces gens-là chez nous, après avoir vu le règlement. On n'avait jamais été consultés. Je ne sais même pas s'ils savaient qu'on existait. Quand on a vu cela, on s'est dit qu'il fallait leur dire que cela n'avait pas d'allure. Je ne sais même pas s'ils pourront nous accommoder ou s'ils auront le temps de le faire. C'est pour cela qu'on a proposé une solution de rechange qui, je pense, est très valable.

M. de Savoye: Monsieur le président,

[Traduction]

nous rencontrerons des représentants du ministère de la Justice demain. Je leur saurais gré de nous livrer leurs impressions suite à leur visite de cette entreprise de SNC-Lavalin et de nous dire s'ils croient pouvoir modifier les textes de manière à dissiper les inquiétudes de ces gens. J'aimerais connaître leur réaction à cette proposition. Je vous remercie, monsieur le président.

[Français]

Merci, monsieur Daigneault.

[Traduction]

Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur de Savoye.

Madame Whelan.

Mme Whelan (Essex - Windsor): Merci, monsieur le président. J'ai une question, mais je ne suis pas sûre qui, de M. Taylor ou de M. Polyzos, voudra y répondre.

Vous faites tous deux des observations. Il y en a plus dans la lettre signée par M. Coburn qui est jointe à votre mémoire, monsieur Taylor, au sujet de l'exportation et du coût des exportations. Je ne suis pas sûre d'avoir bien compris, mais est-ce aux droits comme tels que vous vous opposez?

M. Taylor: Nous sommes opposés à la fois aux droits et aux coûts. Si nous expédions une seule arme à feu à un agent de l'autre côté de la frontière, il faut acquitter un droit de 20 $. Si nous vendons 500 armes à la fois, le droit est le même. Cependant, compte tenu du coût total et du fait que nulle aucune autre industrie ou entreprise canadienne n'a à payer pareils droits d'exportation, comment pouvez-vous nous les imposer? Quelle est leur raison d'être?

Mme Whelan: À titre strictement indicatif, je vous signale que d'autres entreprises acquittent des droits pour obtenir des licences d'exportation et pour exporter à mesure que nous appliquons le principe de recouvrement des coûts. Les entreprises agricoles en sont. Je le sais parce que je reçois bien des plaintes à ce sujet. Je ne suis pas sûre que vous êtes au courant de ce que fait le gouvernement dans d'autres industries.

M. Taylor: Non, je ne suis pas au courant.

Mme Whelan: Par contre, je comprends de quoi vous parlez, qu'il s'agisse d'une seule arme ou de 500.

M. Taylor: Comment le gouvernement peut-il verser une aide financière à certains pour les aider à exporter et l'enlever à d'autres? Il est très difficile de justifier de tels actes.

Nos prix sont très concurrentiels. Le prix que nous exigeons pour une arme de calibre .22 se situe au bas de la fourchette. Marlin est notre principal concurrent. Notre chiffre d'affaires est d'environ 8 p. 100 inférieur au leur. Si notre revenu baisse de 4 p. 100 ici et que le taux de change varie un peu, M. Coburn déménage sa société aux États-Unis. C'est aussi simple que cela. Il est en affaires pour réaliser un profit. Nous sommes actuellement compétitifs, très compétitifs. Nous avons une excellente main- d'oeuvre, mais il ne faudrait pas grand-chose pour détruire cet équilibre.

Mme Whelan: Vous évaluez à 4 p. 100 les pertes?

M. Taylor: Prenons l'exemple de la chaîne de magasins K Mart. Cette année, elle pourrait nous commander jusqu'à 25 000 unités. S'il nous faut expédier ces armes à 2 300 magasins différents, la taxe à l'exportation sera calculée par destination à moins que nous n'établissions un circuit de distribution aux États-Unis. Toutefois, un tel circuit a aussi un prix. Quoi qu'il en soit, il y aura un coût à payer.

Mme Whelan: D'accord. Aviez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Polyzos?

M. Polyzos: Je dirais peut-être ceci. Les entreprises, du moins la mienne, sont obligées d'obtenir des permis d'exportation pour toutes les destinations à l'étranger, à l'exception des États- Unis.

.1725

Nous avons tous en commun le fait que nos expéditions aux États-Unis ont peut-être un caractère beaucoup plus périodique. Bien que l'on puisse parler d'expéditions de volumes plus importants dans une autre industrie, par exemple tous les trimestres, nos expéditions aux États-Unis sont beaucoup plus périodiques.

Les droits sont donc encore plus élevés, ce qui, dans une certaine mesure, nous désavantage tous par rapport à la concurrence. Ils nous placent tous aussi dans une situation peu enviable. À quoi ont servi tous nos efforts visant à trouver des débouchés pour nos exportations et à faire rentrer de l'argent au Canada si on taxe nos exportations uniquement - sans parler des charges salariales, de l'impôt sur le revenu et de tout le reste. Nous n'arrivons pas à comprendre comment on peut s'attendre que nous serons à pied d'égalité avec nos concurrents. J'ai bel et bien mentionné tous les faits, les pays qui contestent les subventions et les autres formes d'aide à l'exportation. Il faudrait nous éviter ces désagréments.

Mme Whelan: Merci.

Le président: Monsieur Ramsay.

M. Ramsay: J'aimerais que nous parlions de cette idée que le gouvernement va retirer à la population toutes ses armes à feu. Il le fait en vertu du projet de loi C-17 depuis notre arrivée à Ottawa, en 1993. Il le fait par décrets en vertu du projet de loi C-17 pour interdire les armes à feu, et des milliers de dollars de biens privés ont été confisqués. Il le fait actuellement. Comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi C-68 interdit 58 p. 100 des armes de poing que leurs propriétaires ont achetées légalement et qu'ils ont légalement en leur possession.

Le processus de resserrement se poursuit. On a interdit les armes à feu militaires. On est certes témoins d'une diminution du genre d'armes à feu autorisées au pays. Cela se poursuivra-t-il? Dans le projet de loi C-68, on trouvait l'article 117.15 qui conférait au ministre de la Justice ou au gouverneur en conseil le pouvoir d'interdire toutes les armes à feu qui, à son avis, ne pouvaient raisonnablement servir à la chasse ou à la pratique d'un sport.

De concert avec certains de nos collègues d'en face, nous avons protesté. On nous a dit qu'il s'agissait d'un article inattaquable, que ce pouvoir ne pouvait être contesté ni par les tribunaux ni par le Parlement et qu'il n'était pas sujet à un examen parce que, entre autres, les tribunaux n'invalideraient jamais une décision du gouverneur en conseil. Nous avons donc retranché l'article. Nous l'avons retranché, mais il a été réinséré à la Chambre, à l'étape de la troisième lecture. Il figure maintenant dans le projet de loi.

Bien des gens nous ont demandé pourquoi, s'il s'agit du dernier décret d'interdiction visant à limiter le genre d'armes à feu autorisées au pays, l'article figure toujours dans le projet de loi? J'ai posé la question au ministre de la Justice qui m'a donné une réponse raisonnable. Il a dit que des armes à feu qui n'étaient pas visées par le règlement pourraient entrer au pays, qu'il lui faudrait à ce moment-là agir rapidement, et ainsi de suite. Cette question en préoccupe beaucoup.

Tout ce que je peux dire, c'est que moi et mon parti ne voyons aucun avantage à ce projet de loi, sur le plan de la sécurité, et que nous y sommes opposés. Tout ce que fait le gouvernement, c'est de réglementer des organismes comme les vôtres. J'ai une liste de neuf organismes différents dont les actes et l'utilisation qu'ils font des armes à feu ne compromettent ni la sécurité publique ni la sécurité personnelle de qui que ce soit. Pourtant, ils sont réglementés.

Quand on demande aux partisans du projet de loi s'ils sont disposés à envisager des exemptions pour des organismes comme le vôtre et pour les groupes de reconstitution historique qui utilisent de vieilles armes à silex et des fusils à poudre noire, ils sont très réticents... En fait, ils ont laissé savoir qu'ils n'appuieraient pas pareilles exemptions. Par contre, ils ont dit que, si le comité souhaitait en faire la recommandation, il était libre de le faire.

Malgré tout le respect que je porte aux membres du comité qui sont d'excellentes personnes, qu'allons-nous faire? Faire au ministère de la Justice de vaines recommandations pour dire que la plupart de ces groupes, y compris le vôtre, nous ont demandé notre aide et nous ont prouvé qu'ils ne compromettaient pas la sécurité publique ou la sécurité individuelle, qu'ils s'autodisciplinaient bien dans le maniement et l'utilisation des armes à feu? Cela ne les empêchera pas de vous imposer ces règlements, quelles qu'en soient les conséquences économiques.

.1730

Nous ignorons combien coûtera la mise en application du projet de loi. D'après le ministère, le coût pourrait atteindre 100 millions de dollars. D'autres soutiennent qu'il sera encore plus élevé. Nous ignorons donc ce coût. Nous savons qu'il n'y a pas eu, du moins que nous sachions, d'analyse de l'impact sur l'industrie. Nous ignorons combien coûtera l'application du projet de loi et nous ignorons son coût économique pour les nombreuses composantes de l'industrie des armes à feu. Nous n'avons aucune idée de ce qu'il en coûtera au pays en termes d'emplois, d'incitatifs économiques, et tout le reste. Nous sommes complètement dans le noir.

Nous avons entendu des propriétaires d'armes à feu - des groupes de chasseurs, des pourvoyeurs et des guides. Il y a quelques jours, nous avons entendu des témoins du Québec qui représentaient 1,2 million de propriétaires d'armes à feu. Ils nous ont dit la même chose au sujet des conséquences économiques. Pourtant, ils sont raisonnablement bien disciplinés et ils ne représentent pas une menace pour la société.

Le président: Monsieur Ramsay, veuillez m'excuser. Je suis obligé de vous interrompre. Il ne nous reste pas beaucoup de temps.

M. Ramsay: D'accord.

Le président: M. Kirkby a deux questions.

M. Kirkby: En fait, je n'en ai qu'une et je promets de ne pas faire de discours.

Je sais que M. Daigneault a affirmé ne pas avoir été consulté pour le compte de SNC-Lavalin. N'est-il pas vrai que M. Héroux a...

M. Daigneault: Je reconnais mon erreur. M. Héroux vient de m'informer que la Sûreté du Québec nous avait identifiés comme une entreprise ayant un enjeu en septembre dernier. À ce moment-là, des fonctionnaires de la Justice nous avaient appelés à Ottawa. M. Héroux leur a expliqué - ils ignoraient la raison de sa venue ici - sa position à l'époque. On lui a dit de la soumettre par écrit, ce que nous avons fait. Le temps a passé. Puis, nous les avons invités à nous rendre visite. Ils sont venus nous rencontrer, il y a quelques semaines.

M. Kirkby: D'accord.

M. Daigneault: Je reconnais mon erreur.

M. Kirkby: Je vous remercie beaucoup. Encore une fois, je tiens simplement à remercier tous les témoins d'être venus aujourd'hui et d'avoir partagé leurs opinions avec nous; cela nous a été très utile.

Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Kirkby.

Messieurs - Roberge, Polyzos, Taylor, Daigneault, Héroux et Renaud - , ce fut un réel plaisir de vous rencontrer, cet après- midi.

En dépit de ce qui a été dit, il n'aurait pas été honnête de notre part de vous inviter ici si nous n'avions pas la sincère intention d'entendre ce que vous aviez à dire et d'essayer de trouver une solution. Comme il a été mentionné, notre tâche consiste à faire des recommandations. Nous pouvons le faire. Avec un peu de chance, nous pourrons être très persuasifs si nous décidons de faire des recommandations.

Vous avez très bien expliqué votre position. Le sous-comité a pris bonne note des points que vous avez fait valoir. Nous vous en remercions.

Nous espérons que votre témoignage d'aujourd'hui ne vous semblera pas avoir été une perte de temps, monsieur Taylor. Ce ne fut peut-être pas le cas la dernière fois. J'espère que vous conserverez un meilleur souvenir de cette rencontre-ci.

Messieurs, je vous remercie beaucoup.

La séance est levée.

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