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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 13 juin 1996

.0905

[Traduction]

Le président: Bonjour.

J'ai quelques annonces à faire.

[Français]

La première annonce concerne les notes qui ont été préparées par Kristen Douglas et qui portent sur les réunions tenues par notre Comité permanent de l'environnement et du développement durable sur le budget des dépenses de 1996-1997.

Après l'introduction, nous passerons à une liste des sources de préoccupations et des recommandations.

.0910

[Traduction]

Ce rapport vous sera soumis pour que vous en preniez connaissance et que vous nous fassiez part de vos commentaires ou propositions de changement lundi lors de notre séance de l'après-midi. Il sera ensuite envoyé, avec une lettre d'accompagnement, au ministre de l'Environnement et aux leaders à la Chambre.

C'est une façon de rendre plus significatives les séances que nous avons tenues sur le budget en vertu du nouveau régime et de transmettre certaines observations que vous avez faites au cours des audiences. Ces observations ont été notées par votre attaché de recherche qui les a colligées sous la forme du rapport que vous avez devant vous.

Pour ceux d'entre vous qui viennent d'arriver, vous aurez le document en main jusqu'à la séance de lundi après-midi pour que nous puissions, s'il y a lieu, y apporter des changements. Ensuite, il sera envoyé, avec une lettre d'accompagnement, au ministre de l'Environnement et aux leaders à la Chambre. Il renferme le résultat des observations des membres du comité au cours de ses séances.

Deuxièmement, demain, les membres du comité recevront en anglais et en français une ébauche de rapport. Du point de vue de la présidence, il me semble que c'est la suite logique de la séance que nous avons tenue le... Il me semble que cela fait des siècles, mais je crois que c'était mardi seulement. Oui.

Dans ce rapport, nous signalons simplement qu'il serait souhaitable de produire un rapport préliminaire à la suite de nos audiences sur la biotechnologie, suivi d'un rapport à long terme, et nous expliquons pourquoi.

Comme je l'ai déjà dit, il vous sera remis demain dans les deux langues officielles et nous pourrons en discuter lundi pour voir s'il y a lieu d'y apporter des changements. Encore une fois, je vous invite instamment à le lire au cours du week-end pour que nous puissions faire de réels progrès lundi.

Hier, nous avons adopté une motion autorisant M. Curran à assister à une conférence ici à Ottawa. Il va sans dire que si un des thèmes de la conférence semble devoir intéresser les membres du comité, vous êtes tout à fait libres de faire distribuer par la suite une note de service à ce sujet. C'est une décision qui vous appartient entièrement.

Il y avait un quatrième point qui m'échappe et dont je ne peux me souvenir pour l'instant. Ah, oui. Je voulais soulever la question, mais nous avons tellement de choses à faire et à étudier que le temps devient une denrée précieuse ici à Ottawa. Il n'y a rien de plus... Bon, j'exagère. Pour quiconque s'intéresse à la pérennité de l'environnement, il est extrêmement instructif de prendre le temps de visiter une usine de purification d'eau et de traitement des eaux usées pour voir comment le système fonctionne. Comment la boucle est bouclée, si vous voulez. Si un nombre suffisant de personnes sont intéressées, j'essaierai d'organiser en septembre une visite dans les usines de la région qui sont considérées assez bonnes ou moyennes. Il s'agirait de deux visites, et cela serait sans doute utile à ceux d'entre vous qui n'ont jamais visité de telles installations auparavant. Évidemment, si vous l'avez déjà fait, il est inutile de participer.

.0915

D'ici à la fin de juin, le greffier vous demandera si vous souhaitez participer à une visite de ce genre la première semaine de notre retour. Les visites auront lieu deux jours séparés et prendront environ une heure et demie. Nous organiserons cela pour ceux que cela intéresse. Je laisse au greffier le soin de sonder les députés.

Y a-t-il des commentaires ou questions au sujet de ces quatre points avant que nous commencions la séance?

[Français]

Mme Guay (Laurentides): Monsieur le président, vous parliez des usines de traitement d'eau. Il y a plusieurs façons de traiter les eaux usées. Je ne sais pas combien de types d'usines existent. Avez-vous une idée des différents traitements et du nombre d'usines qu'on pourrait visiter?

Le président: À ma connaissance, il n'y en a qu'une du côté d'Ottawa. Si vous voulez, on pourrait en visiter une ailleurs.

Mme Guay: Oui, j'aimerais que ce soit possible.

Le président: Nous devrions en discuter avec M. Radford et si vous avez des recommandations...

[Traduction]

Étant donné que cela ne figure pas dans l'agenda de vos secrétaires respectifs, veuillez noter que le comité se réunira lundi après-midi, ainsi que mardi, comme cela est déjà prévu à l'horaire. C'est la réunion du lundi après-midi qui ne figure pas au programme de votre bureau.

Nous nous excusons de ce retard auprès des témoins. Nous sommes maintenant prêts à commencer. Nous vous souhaitons la bienvenue à ce marathon sur la biotechnologie.

Monsieur Banigan, veuillez vous présenter ainsi que les membres de votre équipe.

M. John Banigan (sous-ministre adjoint, Secteur de l'industrie, Industrie Canada): Merci, monsieur le président.

Mon nom est John Banigan, et je travaille à Industrie Canada à titre de sous-ministre adjoint pour le secteur de l'industrie. Le secteur regroupe 12 directions qui s'intéressent à la politique industrielle, ainsi qu'au commerce et à la technologie. L'une de ces directions se spécialise dans les produits chimiques et la biotechnologie. À ma gauche, M. Terry Walker est un spécialiste en biotechnologie qui travaille dans cette direction.

Je dois vous mettre en garde: je ne suis pas un spécialiste de la biotechnologie de sorte qu'avec votre permission, d'autres témoins m'aideront à répondre aux questions. À ma droite, je vous présente Margaret Kenny qui représente Agriculture et Agroalimentaire Canada. Elle est directrice associée du Bureau des stratégies et de la coordination de la biotechnologie. À sa droite, M. Desmond Mahon, représente Environnement Canada. Il dirige la Division des nouvelles substances, Direction des produits chimiques commerciaux.

Je crois savoir, monsieur le président, que vous souhaitez en savoir plus long au sujet de la stratégie nationale de la biotechnologie, et de la coordination interministérielle qu'elle implique. Par conséquent, je vais essayer de cerner ce sujet.

Le président: Au sujet de la coordination interministérielle, vous pourriez peut-être nous expliquer pourquoi c'est à Industrie Canada qu'on a confié la tâche de coordonner tout cet exercice, par opposition à d'autres ministères. On a dû se fonder sur certaines raisons que nous voudrions bien connaître.

M. Banigan: Oui, monsieur le président. J'aborde cet aspect dans ma déclaration liminaire.

Je suis heureux de vous donner un bref historique sur la Stratégie nationale de la biotechnologie et le rôle de coordination que joue Industrie Canada dans la structure des différents comités interministériels qui soutiennent et guident la stratégie. Des copies de mon exposé sont disponibles dans les deux langues officielles, et je répondrai volontiers à vos questions sur la stratégie, sur les comités interministériels et le rôle d'Industrie Canada.

La stratégie nationale de la biotechnologie a été approuvée par le gouvernement en 1983. Un fonds spécial de financement d'un montant de 11,9 millions de dollars annuellement a été réservé pour le soutien de la SNB.

.0920

La stratégie a pour mission quatre objectifs: orienter la recherche et le développement de la biotechnologie dans les secteurs ayant une importance stratégique pour le Canada; s'assurer qu'il existe un nombre suffisant de ressources humaines hautement qualifiées en biotechnologie; encourager la communication et la collaboration entre les scientifiques des différentes disciplines et les différents secteurs; et créer un climat favorable aux investissements de l'industrie en biotechnologie.

À l'appui de ces objectifs, le gouvernement a recommandé (1) qu'un comité consultatif national de la biotechnologie soit créé pour faire des recommandations au ministre des Sciences et de la Technologie sur les politiques nécessaires pour promouvoir le développement de la biotechnologie au Canada; c'est d'ailleurs le ministère des Sciences et de la Technologie qui s'occupe du secrétariat du comité; (2) qu'un comité interministériel de la biotechnologie soit créé au niveau du sous-ministre adjoint, sous l'égide du ministère des Sciences et de la Technologie, qui fera aussi fonction de secrétariat pour examiner les activités gouvernementales proposées et suivre les progrès de la SNB; (3) que l'on renforce la capacité de recherche et de développement du gouvernement fédéral en biotechnologie dans les domaines prioritaires; (4) que l'on crée des réseaux de R et D dans les domaines prioritaires pour favoriser la collaboration et la communication entre les chercheurs et les utilisateurs de la recherche; (5) qu'on encourage et appuie financièrement les échanges de personnel entre les laboratoires de recherche fédéraux, provinciaux et universitaires et ceux de l'industrie; (6) que l'on mette sur pied un programme de partage des coûts à l'intention de l'industrie pour formuler conjointement avec les universités et les organismes de recherche provinciaux des projets de recherche et de développement; (7) que l'on établisse à Montréal, sous la tutelle du Conseil national de recherche, un institut de recherches de la biotechnologie; et (8) que le ministère des Sciences et de la Technologie, en consultation avec les ministères intéressés, examine les changements qui s'imposent à la réglementation actuelle ou planifiée à la lumière des progrès réalisés dans le domaine de la biotechnologie.

Le rôle de coordonnateur de la stratégie a été confié au ministère des Sciences et de la Technologie en 1983, en raison de son rôle général de coordonnateur du développement de la science et de la technologie au Canada. En 1988, lorsque le ministère a été fusionné avec le nouveau ministère de l'Expansion régionale et industrielle à l'époque, pour former le ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie, le rôle de la coordination de la biotechnologie a été repris par la Direction des sciences et de la technologie, Secteur des politiques.

En 1995, en application de la loi C-46, loi qui a donné naissance au ministère de l'Industrie, le ministère a reçu le mandat de «développer, d'utiliser et d'encourager de la façon la plus efficace et constructive la science et la technologie» et de «promouvoir et de favoriser la science et la technologie au Canada». Dans le contexte de ce mandat, le ministère a continué d'exercer une fonction de coordination des activités fédérales dans le secteur de la biotechnologie en s'occupant du secrétariat pour les comités interministériels, en convoquant des réunions et en informant les ministères de l'évolution internationale du dossier à l'OCDE.

Voici quelle est la structure des comités qui appuient la stratégie nationale de la biotechnologie.

Il y a tout d'abord le comité interministériel de la biotechnologie, qui a tenu sa première réunion, sous l'égide du ministère des Sciences et de la Technologie, en mai 1983. Les participants au comité étaient des sous-ministres adjoints provenant des ministères suivants: Agriculture; Énergie, Mines et Ressources, etc. La liste en est fournie. Les conseils de recherche étaient représentés par leurs présidents et les ministères par leurs sous-ministres adjoints. En 1985, le comité a été élargi pour englober les ministères dont la liste figure dans le mémoire.

Au début, les CIB se réunissaient régulièrement pour prendre les décisions stratégiques, mais lorsque la SNB a été bien implantée, un deuxième comité, appelé groupe de travail interministériel en biotechnologie, maintenant intitulé groupe de coordination de la biotechnologie, a été créé au niveau du directeur ou du coordonnateur de recherche pour régler les problèmes courants et s'occuper de la coordination des activités ministérielles.

Voici certaines des questions étudiées ou à l'étude: l'allocation des fonds de la SNB, l'examen fédéral de la SNB en 1991, les questions de propriété intellectuelle; la formation d'une stratégie de communication coordonnée en matière de biotechnologie, les conventions sur la biodiversité et la biosécurité, et la collaboration internationale, notamment avec l'OCDE.

Le CIB a réussi à s'acquitter avec succès de ses fonctions de coordination, ce qui contraste énormément avec la situation dans d'autres pays. On ne s'est pas fondé sur la collaboration ou l'échange de renseignements entre ministères habilités à prendre des règlements pour améliorer le processus réglementaire. On n'a pas ou à peu près pas tenu compte des avantages pouvant découler d'une collaboration entre les organismes de réglementation. En outre, il n'existe à l'étranger aucun mécanisme officiel permettant à des entités de secteurs différents de collaborer et de partager leur expérience de la réglementation.

.0925

Une liste à jour des membres du comité de coordination interministériel, ainsi que des ministères invités aux réunions de façon ponctuelle, accompagne le mémoire.

Je vais maintenant vous parler du groupe de coordination de la biotechnologie. À l'origine, le groupe de travail de la biotechnologie était présidé par les membres à tour de rôle. Cependant, cette situation a créé la confusion et a nui aux communications à l'intérieur du groupe. À la fin de 1985, on a demandé au CIB d'accepter que le ministère des Sciences et de la Technologie assure en permanence la présidence et le secrétariat.

Le groupe de travail interministériel de la biotechnologie a changé de nom pour devenir le groupe de coordination de la biotechnologie (GCB) en 1986. Le mandat du GCB - qui est situé davantage au niveau de travail - est de fournir une tribune pour la discussion préliminaire de possibilités d'action et de préoccupations mutuelles concernant le développement de produits commerciaux de la biotechnologie; formuler à l'égard de ces questions d'orientation des recommandations qui seront discutées par le CIB; fournir des conseils scientifiques au CIB sur des projets financés par la SNB en vue de renforcer la R-D du secteur public; établir un lien entre le comité consultatif national de la biotechnologie - c'est-à-dire l'organe externe - , le CIB et le réseau de recherche; et coordonner les activités de réseautage et s'assurer d'un échange approprié d'informations entre les réseaux.

Le GCB se réunit à intervalles réguliers, normalement cinq ou six fois l'an, selon les besoins, pour discuter des problèmes de l'heure liés au développement de la biotechnologie au Canada. Les ministères ont organisé conjointement des ateliers portant sur la réglementation, l'étiquetage, les communications et les questions morales, auxquels ont été invités de multiples intervenants. Ils ont aussi organisé ensemble des colloques d'experts techniques internationaux afin d'échanger sur la réglementation des nouveaux produits issus de la biotechnologie.

Au cours de l'examen de la SNB, en 1991, les représentants ministériels ont travaillé ensemble pour formuler des recommandations significatives que tous les ministères pourraient endosser et adopter dans leurs futurs plans de travail. C'est ainsi qu'on a davantage mis l'accent sur l'aspect réglementation de la biotechnologie. En application du plan de financement de trois ans de la SNB, plus de 34 p. 100 des fonds alloués aux ministères seront consacrés à l'aspect réglementation de la biotechnologie.

Il existe un autre groupe, appelé le sous-groupe de la sécurité et de la réglementation, présidé par Margaret Kenny. Ce sous-groupe a été créé en 1986 pour s'occuper du nombre croissant de produits dont on croyait à l'époque qu'ils allaient atteindre le stade de la mise en marché. Le sous-groupe fait rapport au CIB au besoin. Initialement, les ministères membres du sous-groupe étaient les ministères du CIB chargés de formuler la réglementation des produits de la biotechnologie selon diverses lois fédérales. Le nombre de participants au sous-groupe a maintenant augmenté et, à l'heure actuelle, il englobe les ministères dont la liste figure dans le mémoire. Je ne vais donc pas les lire.

La responsabilité de la présidence du sous-groupe est partagée sur une base bisannuelle entre trois ministères, soit Agriculture et Agroalimentaire Canada, Environnement Canada et Santé Canada. Pour l'instant, c'est Agriculture et Agroalimentaire Canada qui préside le groupe. La fonction de secrétariat, que le ministère des Sciences et de la Technologie assumait régulièrement à une époque, a été dévolue au ministère responsable de la présidence du sous-groupe.

Les ministères membres du sous-groupe envoient également des délégués au groupe de la biotechnologie à l'OCDE, à Paris. Industrie Canada fournit le coordonnateur national de ce groupe, et dirige la délégation à Paris.

En conclusion, voici quelques explications sur le financement de la stratégie nationale de la biotechnologie. À l'origine, c'est au ministre titulaire des Sciences et de la Technologie qu'il appartenait de recommander la répartition des fonds disponibles. Ces derniers étaient alloués tous les deux ou trois ans à la suite d'une demande au Conseil du Trésor préparée à l'issu de consultations et de discussions avec les entités interministérielles.

Dernièrement, ces fonds ont été réduits, dans la foulée des compressions générales du budget fédéral. L'allocation pour 1995-1996 se chiffrait à 10,115 millions de dollars. Une réduction de15 p. 100 par rapport au montant original. Pour les années 1996-1997 et 1997-1998, l'allocation s'établissait à 9,52 millions de dollars, soit 20 p. 100 de moins que le montant original.

Le processus d'allocation a été coordonné par Industrie Canada, avec l'aide d'une tierce personne impartiale venant de l'extérieur. Nous essayons de prendre à ce sujet une décision consensuelle.

.0930

Un groupe de direction a été constitué à partir des ministères représentés au CIB. Chaque ministère qui souhaite se prévaloir des fonds disponibles pour financer des projets soumet une proposition résumée en deux pages. Chaque proposition est évaluée par les membres du comité de direction qui lui décernent une note en fonction du respect des objectifs premiers de la stratégie - développement économique, communications, perfectionnement du personnel qualifié et amélioration du climat d'investissement.

Le groupe de direction attribue une note finale aux projets en additionnant toutes les notes et en se fondant sur leur mérite technique. Cinquante et un projets ont reçu des fonds totalisant 17 millions de dollars sur une période de trois ans. En outre, le programme d'assistance pour la recherche industrielle du CNR a reçu 11,456 millions de dollars. Sur les 17 millions de dollars alloués aux divers projets, Industrie Canada a reçu 1,5 million de dollars, soit 8,7 p. 100 des fonds. Une partie de ces fonds sert à financer le secrétariat.

Monsieur le président, voilà qui met fin à mes remarques sur la stratégie et la structure des comités. Nous répondrons maintenant volontiers aux questions que vous-même ou vos collègues pourriez avoir.

Le président: Très bien. Merci.

Madame Kenny.

Mme Margaret Kenny (directrice associée, Bureau des stratégies et de la coordination de la biotechnologie, Agriculture et Agroalimentaire Canada): Monsieur le président, membres du comité, merci beaucoup.

Comme M. Banigan l'a dit, le sous-groupe de la sécurité et de la réglementation a été créé en 1986. Son mandat consistait à examiner les questions de sécurité et de réglementation liées à la biotechnologie, à prodiguer des conseils quant à l'adéquation de la législation existante et à faire des recommandations pour améliorer le cadre réglementaire, au besoin. On a déjà dit quels en étaient les membres.

L'une des premières initiatives associées à la réglementation des nouveaux produits de la biotechnologie a été amorcée en 1987, lorsque trois ministères - Agriculture, Environnement et Santé - ont entrepris d'élaborer des lignes directrices se rapportant à la dissémination dans l'environnement d'organismes dotés de caractères nouveaux.

Pour assurer la cohérence entre les ministères, à l'aube de la réglementation des produits dotés de caractères nouveaux, ils se sont d'abord entendus sur une définition commune de la biotechnologie. Cette définition, que vous avez déjà entendue à maintes reprises, est celle contenue dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Plusieurs principes de travail ont d'ores et déjà été acceptés par les membres. Chose intéressante, ces principes ont servi de base à l'élaboration du modèle de réglementation fédérale pour la biotechnologie annoncé par le Cabinet en 1993. Cela montre une fois de plus tous les efforts déployés pour assurer l'uniformité entre les divers ministères.

Le sous-groupe a reconnu très tôt la nécessité de rédiger un guide qui décrirait le régime réglementaire utilisé par le gouvernement fédéral dans le domaine de la biotechnologie. On a donc publié en 1988 une ébauche de document intitulée Guide de l'utilisateur: biotech règlements. Ce guide définit la nature et le type de produits réglementés, les autorités législatives, le nom des personnes à qui s'adresser dans les ministères pour obtenir de plus amples renseignements, les types de permis, de demandes, etc. qui sont nécessaires et la marche à suivre pour faire une demande de réglementation.

Le guide a ensuite été mis à jour et complété par d'autres documents ministériels, notamment la Ligne de conduite pour la réglementation de la biotechnologie publiée par Développement des ressources humaines Canada plus tôt cette année. Ce dernier document décrit les règlements et les directives du gouvernement fédéral en ce qui concerne surtout la santé et la sécurité au travail dans le domaine de la biotechnologie. Voilà le genre de document qui est le fruit de la première initiative commune.

Un certain nombre de groupes de travail clés ont été constitués sous l'égide du sous-groupe de la sécurité et de la réglementation. Le groupe de travail sur la biosécurité en est un exemple. Mis sur pied en 1988, il était chargé d'examiner le rôle des comités locaux de biosécurité sur le plan de la surveillance des risques en milieu de travail.

En 1990, une version révisée augmentée des Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire du Conseil de recherches médicales et de Santé et Bien-Être social a été publiée. Ces directives définissent sur les techniques de sécurité en laboratoire. Le mandat de ce comité est terminé.

.0935

Comme je l'ai déjà mentionné, il existe un groupe de travail sur le Guide de l'utilisateur: biotech règlements présidé par Santé Canada. Il s'agit d'une entité permanente.

Il y avait aussi un groupe de travail sur les bonnes pratiques de production industrielle à grande échelle, chargé d'examiner les pratiques industrielles à grande échelle et de déterminer les critères auxquels doivent se conformer les organismes génétiquement modifiés manipulés à grande échelle. En 1995, ce comité a terminé son rapport, qui a ensuite été soumis à l'OCDE. Son mandat est terminé.

Un autre groupe important concerne l'Organisation de coopération et de développement économiques. Ce groupe établit la position du Canada concernant la biotechnologie en vue des réunions de l'OCDE, et particulièrement du Groupe d'experts sur la biotechnologie.

Deux comités relèvent de ce groupe d'experts. L'un s'intéresse à la politique en matière de science et de technologie et l'autre, présidé par Environnement, aux questions de réglementation et d'harmonisation.

Le sous-groupe pour la sécurité et la réglementation est en train d'examiner la possibilité de mettre sur pied un nouveau groupe de travail. En tant que signataire, en 1992, de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, le Canada participera à l'élaboration d'un protocole international sur la biosécurité. Ce protocole devra énoncer des normes minimales de sécurité ainsi que des méthodes de notification concernant le déplacement transfrontalier d'organismes vivants modifiés qui peuvent avoir des incidences sur la diversité biologique.

Le sous-groupe devra asseoir la position du Canada sur une expertise et des données techniques en vue de la rédaction du protocole.

En résumé, le sous-groupe pour la sécurité et la réglementation constitue l'assise du cadre de réglementation fédéral. Les réunions courantes permettent d'échanger de l'information et de discuter des décisions à prendre relativement à des problèmes précis, aux nouveaux projets et aux groupes de travail.

Le sous-groupe oeuvre maintenant dans le domaine de la réglementation des produits de la biotechnologie. Les projets de directives et de règlements sont confiés à ce groupe avant d'être soumis à la consultation générale. Les membres du sous-groupe ont effectivement approuvé les principes qui ont servi de base au modèle de réglementation fédéral.

Le sous-groupe poursuit ses efforts en vue d'assurer la cohérence entre les autorités réglementaires des différents ministères et faire le lien à l'échelle internationale.

Je signale que bien que je préside le comité, je suis accompagnée aujourd'hui de certains membres qui y siègent depuis de nombreuses années. Il s'agit de M. Terry Walker, de M. Des Mahon et de Mme Susan Hasnain, de Santé Canada, qui est assise derrière nous. Avec l'autorisation du président, si nous devions avoir besoin de l'expertise de Santé Canada, et en particulier de la longue mémoire de Susan Hasnain, j'aimerais pouvoir l'inviter à la table si c'est acceptable.

Le président: C'est plus qu'acceptable, c'est souhaitable. Faites, je vous prie.

[Français]

Est-ce que vous voulez commencer, madame Guay?

Mme Guay: Depuis un certain temps, nous avons rencontré plusieurs groupes au sujet du développement de la biotechnologie et diverses opinions ont été émises, peut-être selon les intérêts de chacun. Croyez-vous que la définition de la biotechnologie énoncée dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement soit la bonne? Devrions-nous considérer cette loi comme notre filet de sécurité face au développement et à la biotechnologie?

[Traduction]

M. Banigan: Monsieur le président, je crois que M. Walker ou M. Mahon seraient plus qualifiés que moi pour répondre à cette question sur la définition. Monsieur Mahon pourrait peut-être commencer.

M. Desmond Mahon (chef, Division des substances nouvelles, Direction générale de la prévention de la pollution, Section des produits chimiques commerciaux, Environnement Canada): Merci, monsieur le président.

J'aimerais prendre environ 30 secondes pour vous expliquer quelque chose. La définition de la biotechnologie que nous utilisons provient de la Déclaration de Rio. Elle a fait l'objet de longues discussions pour plusieurs raisons. Il y a quatre raisons fondamentales pour lesquelles nous l'employons. La première, c'est que les organismes présentent des risques naturels, et que ces risques sont aussi fréquents sinon plus fréquents chez les organismes naturels que chez les organismes modifiés grâce au génie génétique. Ainsi, il importait que dans certaines lois, nous englobions à la fois les organismes affichant une transformation spontanée et les organismes devant être modifiés génétiquement.

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La deuxième raison pour laquelle nous avons adopté et étoffé la définition est directement attribuable aux travaux de l'OCDE. Dès le début, on a voulu formuler des règlements à l'égard des organismes modifiés génétiquement. L'OCDE a mis sur pied un groupe d'experts pour tenter de définir quels organismes modifiés génétiquement relevaient de la réglementation. Après quatre ans, le groupe a été démantelé sans être parvenu à s'entendre. En effet, de multiples opinions et conflits d'intérêts entourent la question de savoir quels organismes devraient ou ne devraient pas relever d'une telle loi. L'exemple classique est l'approche très restrictive des États-Unis, selon laquelle seuls les organismes transgéniques qui codent de nouvelles protéines devraient être réglementés. Pour leur part, les Canadiens et maintenant les Suisses estiment que si un organisme est modifié, que ce soit par des moyens dits traditionnels, comme la mutagénèse chimique ou attribuable à la radiation, on est tout de même en présence d'un organisme modifié génétiquement. Par conséquent, aucun accord n'a été conclu.

L'autre raison, c'est qu'à l'examen des organismes, modifiés spontanément ou artificiellement, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il n'y avait pas de différence qualitative sur le plan du risque. Le risque est le même, qu'il s'agisse d'un organisme modifié spontanément ou non. Il peut y avoir une différence notable dans la probabilité que ce risque se concrétise, mais à notre avis, le risque en soi n'est guère différent. Par conséquent, face à cette définition de la technologie, nous pouvions dire qu'elle couvrait tous les angles.

Ensuite, il appartient aux ministères réglementant de prendre en compte des préoccupations précises relativement à un organisme modifié spontanément ou génétiquement, au développement d'un organisme en soi et aux caractéristiques de cet organisme, y compris le fruit de toute modification.

Merci.

[Français]

Mme Guay: Pourriez-vous préciser le rôle que le Canada joue dans la coopération internationale et où il se situe dans le développement de la biotechnologie?

[Traduction]

M. Banigan: M. Walker serait sans doute plus apte que moi pour répondre à cette question.

M. Terry Walker (conseiller spécial, Direction de la biotechnologie, Direction générale des matériaux, produits chimiques et bio-industries, Industrie Canada): Un certain nombre de mécanismes nous permettent de nous tenir au courant de ce qui se fait à l'échelle internationale. Environnement Canada, Agriculture et Agroalimentaire Canada et Santé Canada ont tous des relations étroites avec leurs homologues aux États-Unis. Ces ministères tiennent régulièrement des réunions sur la réglementation des produits de la biotechnologie au moins une fois l'an et très souvent plus fréquemment. En outre, Santé Canada collabore étroitement avec ses vis-à-vis à la Food and Drug Administration dans tous les domaines de la réglementation des médicaments biologiques.

M. Hasnain va me corriger si je me trompe, j'en suis convaincu.

Pour ce qui est de l'OCDE, le Canada participe depuis longtemps au groupe qui s'appelait, à l'origine, le groupe d'experts nationaux sur la sécurité en biotechnologie. Le mandat du groupe a changé récemment et il est devenu le groupe de travail sur la biotechnologie.

Le Canada a collaboré régulièrement avec les 24 ou 25 autres pays de l'OCDE à l'élaboration de cadres de réglementation qui concordent avec ceux qui sont en voie d'élaboration dans les divers pays du monde. Ces pays sont nos partenaires commerciaux, il importe que nous puissions échanger des résultats et des renseignements portant sur la réglementation des produits de biotechnologie. Divers ateliers ont été tenus à ce sujet au fil des ans. Certains d'entre eux l'on été au Canada, surtout à Ottawa. Ainsi, nos ministères responsables de la réglementation sont en mesure de profiter des expériences de leurs homologues un peu partout dans le monde.

.0945

J'estime donc que nous avons appris à collaborer très efficacement avec bon nombre d'organisations internationales.

Le président: Monsieur Lincoln, s'il vous plaît.

M. Lincoln (Lachine - Lac-Saint-Louis): J'adresserai ma question à Mme Kenny et àM. Mahon.

Ce qui me frappe dans la stratégie nationale de la biotechnologie que propose votre groupe, bien que je sache qu'une stratégie n'est pas un énoncé de mission, c'est que rien ne semble relié les quatre grands domaines au bien public. On y parle de domaines d'importance stratégique pour le Canada sans toutefois préciser si ces domaines sont importants en termes de qualité de la vie, de santé ou de développement commercial. Dans la quatrième partie, il est question d'un climat favorable à l'investissement dans le secteur de la biotechnologie. Je me demandais si vous aviez l'impression, surtout depuis que nous avons signé et ratifié la Convention sur la biodiversité - ce qui n'était pas le cas à l'époque - , que l'énoncé de vos grands objectifs devrait être précisé de manière à ce que soit établi un rapport entre la biotechnologie et les aspects de l'éthique, des valeurs, du bien public, de l'environnement et de la santé.

J'en parle parce que, plus loin dans le document, je constate que le mandat de votre groupe de coordination porte sur des questions d'intérêt commun concernant la mise au point de produits de biotechnologie commercialisables. J'aimerais savoir si vous voyez la nécessité d'une stipulation quelconque, d'un énoncé qui préciserait le lien avec le bien public.

Mme Kenny: Je suis du ministère de l'Agriculture, et nous n'envisageons pas la stratégie nationale en matière de biotechnologie de la même manière qu'Industrie Canada, mais certainement sur le plan de la réglementation... Permettez-moi tout d'abord de répondre au premier volet de votre question.

D'après ce que je sais, la stratégie nationale de la biotechnologie va faire très bientôt l'objet d'un examen. Le représentant d'Industrie Canada pourra peut-être vous dire s'il est nécessaire de modifier le cadre dans lequel s'inscrivent les objectifs. Je tiens cependant à dire que, lorsque nous nous penchons sur la réglementation et les lignes directrices visant les produits de biotechnologie, nous avons toujours à l'esprit le bien public et le bien de l'environnement. Nous cherchons tout particulièrement à déterminer si un produit constitue un risque pour l'environnement ou pour la santé humaine. De tels soucis sont d'ailleurs au coeur de toute réglementation.

M. Mahon: Ce que Margaret vient de dire est tout à fait exact. Au sein du GCB et, dans une certaine mesure, du sous-groupe également, il est constamment question de la nécessité de revoir la stratégie. Celle-ci date de 10 ans. Elle a été définie et formulée pour une raison précise. Il s'agissait à l'époque de faire rapport au ministre, c'est-à-dire à la personne dont on pourrait dire qu'elle était ministre de l'industrie et de la technologie à ce moment-là. La stratégie visait à favoriser le développement industriel. On reconnaît volontiers dans tous les ministères qu'une stratégie qui date de 10 ans est probablement désuète et mérite d'être mise à jour.

Les termes dont il est question et la portée de la stratégie restent à définir. Elle en est à sa première étape. Cependant, je crois pouvoir parler pour mon ministère en disant qu'il est tout à fait à propos d'envisager ce genre de questions dans l'élaboration d'une nouvelle stratégie qui tienne compte du bien public. Le bien public est indissociable du bien de l'industrie.

.0950

M. Banigan: M. Lincoln, permettez-moi d'ajouter quelque chose.

Selon le paragraphe 5(a) de la loi de 1995 constituant le ministère de l'Industrie, lequel a englobé le ministère d'État chargé des sciences et de la technologie, le ministre a la responsabilité de renforcer l'économie nationale et de favoriser le développement durable. Le thème du développement durable sous-tend l'ensemble de notre approche en matière de développement industriel et, implicitement, il relève certainement du bien public.

Cela dit, les objectifs du programme remontent à 1983. Cette année, nous allons tenir des consultations interministérielles pour en assurer la mise à jour.

M. Lincoln: Merci de votre réponse. Dans le cadre de votre révision de la stratégie, je vous invite à assurer la participation du plus grand nombre possible d'intéressés, et notamment le public, de manière à ce que leurs valeurs y soient intégrées.

Par exemple, ce groupe de coordination dont vous avez parlé et qui a pris la relève, je sais qu'il a traité de questions relatives à l'étiquetage et aussi à l'éthique. Il me semblerait intéressant d'intégrer ces aspects à la stratégie principale.

J'ai une dernière question. Vous avez déclaré que vous accordez maintenant plus d'importance à l'examen et à l'élaboration de la réglementation, et que plus de 34 p. 100 des sommes affectées aux ministères fonctionnels sont désormais destinées à la réglementation en matière de biotechnologie. Cela veut-il dire que 34 p. 100 des fonds vont à la réglementation en général? Peut-on me répondre à ce sujet?

M. Banigan: Le plan triennal approuvé par le Conseil du Trésor prévoit quelque 29,15 millions de dollars, à répartir parmi les divers ministères.

M. Lincoln: À quelles fins?

M. Banigan: Pour divers projets relatifs à la biotechnologie.

M. Lincoln: C'est pour la biotechnologie?

M. Banigan: Ce sont tous des projets de biotechnologie. La plupart d'entre eux sont exécutés par les ministères participants. Agriculture et Agroalimentaire reçoit par exemple 3,9 millions, le Conseil national de recherches, 3,7 millions.

M. Lincoln: C'est ce que je voulais savoir. Ainsi, me dites-vous, 29 millions de dollars au total sont affectés à la biotechnologie, pour l'ensemble des ministères fonctionnels, et 34 p. 100 de ce montant sert à la mise au point de règlements.

M. Banigan: C'est exact.

M. Lincoln: D'accord.

Hier, nous avons discuté avec M. Bailey du ministère de la Santé, au sujet des règlements et des directives. Mme Kenny et M. Mahon y étaient, je crois. Cherchez-vous maintenant à mettre au point un système qui va rendre possible une réglementation plus efficace et où on ne se contentera pas de recourir à des directives parce qu'elles sont plus simples et plus souples? Est-ce bien ce que vous avez en tête?

Autrement dit, au sein du groupe de coordination et dans vos sous-groupes, cherchez-vous à améliorer et à rendre plus efficace la réglementation?

Mme Kenny: Je vais essayer de répondre pour le ministère de l'Agriculture et je sais bien que M. Mahon voudra en faire autant dans l'optique du ministère de l'Environnement.

Je vous répondrai tout d'abord en un mot que nous cherchons effectivement à rendre la réglementation meilleure et plus efficace. Il s'agit là d'un aspect fondamental de notre processus de mise au point et d'examen des règlements. En fait, l'une des raisons d'être du sous-groupe sur la sécurité et la réglementation est de donner aux ministères participants l'occasion d'étudier ensemble leurs réglementations respectives. Ainsi, nous pourrons tous apprendre des connaissances acquises par les autres ministères en matière d'élaboration des règlements, de leur application, etc.

Nous avons également abordé brièvement aujourd'hui les discussions auxquelles nous participons à l'échelle internationale. Nous ne nous bornons pas à ce que nous avons pu apprendre ici au Canada. Nous nous efforçons d'aller encore plus loin et de tirer parti de ce qui se fait à l'étranger.

M. Lincoln: Si j'ai posé la question c'est que, hier, M. Bailey semblait dire que vous choisiriez des directives plutôt que des règlements parce que ces dernières sont plus souples et faciles à établir et que, selon lui, elles sont tout aussi efficaces. Voilà pourquoi je vous pose la question.

.0955

Mme Kenny: C'est ce que nous faisons dans la mesure du possible, compte tenu de la rapidité de l'évolution technologique. Aujourd'hui, c'est la biotechnologie qui nous préoccupe. Demain, ce sera quoi au juste? Nous nous sommes efforcés de mettre au point une réglementation ouverte et générale qui nous permettra d'évaluer tous les nouveaux produits susceptibles de présenter un risque.

M. Lincoln: Auriez-vous d'autres réflexions?

M. Mahon: Merci, monsieur Lincoln.

Au sein du sous-groupe de la réglementation sur la sécurité, il ne nous est pas arrivé souvent de parler du choix entre des règlements et des directives que peuvent avoir à faire les divers ministères. Nous avons surtout mis l'accent sur le contenu, laissant à chaque ministère le soin de déterminer quelle est la meilleure approche qui lui convient. Évidemment, dans le cas du ministère de l'Environnement, pour diverses raisons, la première étant de la loi elle-même qui nous oblige à prendre des règlements sous le régime de ses dispositions qui visent la biotechnologie, l'identification des nouvelles substances...

D'après moi, la souplesse est possible dans un cas comme dans l'autre. On peut concevoir un système qui assure la souplesse, qu'il soit fondé sur des règlements ou sur des directives. C'est tout simplement la démarche qui diffère. Je crois qu'il en va de même à l'échelle internationale. Dans le cadre de l'OCDE, nous constatons que certains pays comme les États-Unis adoptent plutôt une approche d'ensemble qu'une réglementation, alors que l'UE fait appel à une réglementation très spécifique. Dans ce dernier cas, la marche à suivre est définie en détail dans une directive réglementaire.

Nous estimons qu'on peut arriver aux meilleurs résultats possible en combinant de façon optimale les règlements et les directives. La chose n'est pas facile mais il en ait de plus en plus question dans les discussions de groupes interministériels.

Le président: Merci.

Mme Kraft Sloan, suivie de M. Adams, M. Knutson, M. Finlay et de la présidence.

Mme Kraft Sloan (York - Simcoe): On signalait dans le premier mémoire que vous avez réuni les divers intervenants en ateliers, pour discuter de questions comme l'étiquetage, les communications et les aspects éthiques. Qui sont les intervenants à ces ateliers et quelles sont les questions qu'ils soulèvent? Avancent-ils des solutions ou des moyens d'aborder ces questions?

[Français]

Le président: Monsieur Walker, pouvez-vous répondre?

[Traduction]

M. Walker: Une bonne partie de nos ateliers ont été tenus au cours des quatre ou cinq dernières années. Ils ont été parrainés soit par les ministères de l'Agriculture et de la Santé, par ceux de l'Agriculture et de l'Environnement ou par certains des trois principaux ministères responsables de la réglementation. Les ministères se sont efforcés d'assurer la participation de tous ceux qui souhaitent participer aux discussions concernant les avant-projets de réglementation. Les groupes qui y ont participé ont été aussi bien des groupes de très petite taille que des groupes de très grande envergure comme la FNACQ et l'Association des consommateurs du Canada. Comme représentants du gouvernement fédéral, nous avons cherché à les réunir tous autour de la table, à être à leur écoute et, dans la mesure du possible, à intégrer leurs points de vue à la réglementation.

Mme Kenny: Je vous citerai comme exemple de ce genre d'ateliers celui portant sur l'évaluation du risque dont vous avez parlé hier et auquel M. Curran doit participer.

Mme Kraft Sloan: Quels sont les questions qui sont abordées?

.1000

M. Walker: Je n'ai pas participé à l'atelier sur les questions d'ordre éthique, mais je crois qu'il s'est agit d'un atelier d'une journée complète portant sur les aspects éthiques de la biotechnologie et auquel des groupes d'intérêts publics ont participé. J'ai participé à l'atelier portant sur l'étiquetage des aliments, qui a duré deux jours. Il a eu lieu, si j'ai bonne mémoire, en novembre 1993. Un atelier général se déroulait au même moment sur la dispersion des produits de biotechnologie dans l'environnement.

Mme Kraft Sloan: Mais quelles questions ont été soulevées, au cours de l'atelier sur l'étiquetage, par exemple?

M. Walker: Lors de cet atelier, les associations de consommateurs ont généralement fait valoir que c'est au consommateur de décider s'il veut acheter ou non un produit parce qu'il est issu du génie génétique. Or, comme l'a déjà dit plus tôt Mme Kenny, je crois, étant donné la grande diversité des possibilités technologiques, il n'est pas toujours facile de séparer les produits issus du génie génétique de ceux qui résultent d'autres méthodes d'obtention. Bien souvent, on peut obtenir le même résultat des méthodes d'obtention classiques que du génie génétique. Néanmoins, la question a été traitée à fond.

Mme Kraft Sloan: Il a également été question des conventions internationales en matière de biodiversité et de biosécurité. Le CIB et le GCB ont notamment traité de ces questions. Pouvez-vous nous en parler davantage?

M. Walker: Nous avons essentiellement discuté de la position canadienne qui sera présentée à l'occasion des diverses rencontres des signataires des conventions. D'ailleurs, une rencontre portant sur la biosécurité doit avoir lieu à Copenhague en juillet. Il sera alors question de l'aspect sécuritaire du transfert entre pays d'organismes vivants issus du génie génétique.

Je dois dire que le Canada comprend qu'il faut que les autres pays le sachent lorsque nous exportons des produits mis au point par génie génétique. Les sociétés productrices sont informées régulièrement de la réglementation qui existe à l'étranger et elles veillent très attentivement à ce que tout produit destiné à un autre pays soit approuvé à l'avance dans ce pays.

Mme Kraft Sloan: Le Canada est signataire de la Convention sur la biodiversité. Je ne connais pas cet autre aspect. Le Canada a-t-il signé d'autres conventions en matière de biosécurité?

M. Walker: La Convention sur la biosécurité fait partie de la Convention sur la biodiversité...

M. Mahon: Il y en a plus d'une. Il existe une série de conventions ou d'ententes internationales portant sur la biosécurité des produits de biotechnologie. Celle qui a finalement abouti a trait à l'élaboration de lignes directrices techniques à l'échelle internationale en matière de biosécurité. Il s'agit des lignes directrices qui ont été adoptées par les Nations Unies il y a quatre mois, je crois, pour répondre aux besoins de pays qui n'ont pas encore de structures réglementaires en matière de biosécurité. Il s'agit d'un document des Nations Unies qui a été élaboré par un groupe de travail dont le Canada a fait partie.

Ce document est l'aboutissement de l'une des démarches auxquelles nous nous sommes associés. Le deuxième, dont M. Walker a parlé plus précisément et que vous avez mentionné, a trait à l'obligation aux termes de la Convention sur la biodiversité d'étudier la question de l'élaboration d'un protocole en matière de biosécurité.

.1005

Le PNUE a tenu plusieurs rencontres visant à déterminer si un protocole était nécessaire, quelle devait en être la portée et quel devait en être le contenu. Les deux ou trois premières réunions ont permis de déterminer qu'un protocole était effectivement nécessaire. À Copenhague, on cherchera à déterminer, du moins en partie, la structure ou la portée du protocole.

La position canadienne a été élaborée sous la présidence de M. Herity, le directeur du Bureau de la biodiversité à Environnement Canada. Les divers ministères font connaître leurs besoins ou leurs avis et contribuent ainsi à définir la position canadienne. Voilà ce qui se passe en ce moment.

Mme Kraft Sloan: Merci.

Le président: Monsieur Adams, je vous en prie.

M. Adams (Peterborough): Merci, monsieur le président.

Certains d'entre vous ont déjà participé à nos audiences et, comme vous le savez, nous avons l'impression que la biotechnologie est omniprésente. Selon la définition que l'on retient, je suppose que c'est peut-être le cas.

Une crainte revient sans cesse: il se pourrait bien qu'un produit échappe au système de réglementation, si ce n'est déjà fait. Il me semble que ces structures bureaucratiques - et je ne vois rien de péjoratif dans cette expression - que vous avez décrites au Canada et qui sont établies entre le Canada et d'autres pays visent à colmater les brèches du système. Auriez-vous un commentaire à faire à ce sujet?

M. Banigan: Monsieur Adams, voilà justement, d'après moi, l'objet de ces structures bureaucratiques où le consensus est la règle. Vous constaterez d'après la structure des comités que celui dont est chargé le sous-ministre adjoint est plutôt attentiste. Il exerce un rôle de surveillance du processus. Il est composé d'un groupe d'experts et ce sont eux qui sont les mieux placés, selon moi, pour évaluer les risques, sur le plan tant technique que réglementaire. Voilà à quoi sert le mécanisme.

Mes collègues des autres ministères ont peut-être des commentaires.

Mme Kenny: Vous soulevez un aspect fort pertinent. J'irais même plus loin. Nos efforts ont probablement permis de colmater des brèches liées aux technologies classiques. Nous avons profité de l'occasion pour faire en sorte qu'aussi bien pour les technologies de recombinaison que pour les technologies classiques, ces brèches soient éliminées, dans tous les cas où un organisme obtenu de quelque manière que ce soit pourrait donner lieu à un risque pour l'environnement ou pour la santé humaine.

M. Adams: Certains d'entre nous, tout au moins, jugent qu'il est important de colmater ces brèches. Estimez-vous disposer des ressources nécessaires? J'ai parcouru la documentation et j'ai pu constater quelles sommes sont en jeu. Je ne veux pas vous faire dire que vous avez besoin d'un milliard de plus. J'aimerais que vous me disiez si, à l'heure actuelle, compte tenu de l'évolution de la structure, vous avez suffisamment de ressources. Par exemple, à l'échelle internationale, avons-nous suffisamment de ressources pour tirer parti de ce qui se passe à l'échelle internationale?

M. Walker: Je vous dirais que, pour l'essentiel, notre action est collective. M. Mahon vous a écrit certaines de ces activités et, pour ma part, je vous ai parlé d'un de mes domaines particuliers d'activité. Par ailleurs, Agriculture Canada agit de diverses façons sur le plan international. J'estime donc que, pour l'essentiel, en combinant nos efforts et, compte tenu du fait que nous nous rencontrons régulièrement pour discuter des activités internationales, nous avons la capacité, grâce à notre personnel, de participer utilement à ce qui se fait à l'échelle internationale.

M. Adams: J'ai remarqué que le ministère de la Défense nationale fait partie du groupe de coordination. Je me demande ce que fait le ministère de la Défense nationale dans le secteur de la biotechnologie.

M. Banigan: J'ai certains détails sur le projet qui a été approuvé par le groupe ministériel pour le ministère de la Défense nationale. Le projet de 191 000$ a été approuvé dans le cadre du plan triennal. Il s'intitule: «Mise sur pied d'une installation de fermentation de niveau C et de régime GMP». Je ne crois pas que nous soyons en mesure de vous donner une meilleure définition.M. Walker l'est peut-être.

M. Walker: Permettez-moi d'ajouter quelque chose. Le ministère de la Défense nationale ne songe pas à établir une installation à l'heure actuelle. La somme en question a été prévue pour que des experts-conseils puissent préparer une évaluation visant à déterminer où une telle installation pourrait être construite, combien elle coûterait et quelles en seraient les implications.

.1010

D'une façon générale, le ministère de la Défense siège aux comités de la biotechnologie parce qu'il doit être au fait de l'évolution dans ce domaine un peu partout dans le monde et parce que, comme vous le savez, les armes biologiques ont déjà servi par le passé et vont servir encore à l'avenir. La Défense nationale doit se tenir au courant de ce qui se passe.

M. Adams: Compte tenu de la probabilité accrue de risques attribuables au génie génétique - c'est ce que j'ai compris - et du fait que nous entendons parler du transfert d'un pays à l'autre d'organismes vivants obtenus par les techniques du génie génétique et compte tenu également de ce que j'ai vu dans les films qui portent sur la biotechnologie, je suis surpris d'entendre dire que le ministère de la Défense nationale siège sur un certain comité mais ne fait pas partie du sous-groupe sur la sécurité et la réglementation.

M. Mahon: Monsieur Adams, je n'ai pas dit que le risque augmentait à cause des modifications génétiques. J'ai dit que, pour un risque donné, il se peut que ce risque augmente ou diminue après une modification. Nous devons le vérifier mais, vraisemblablement, il aura été modifié quelque peu, et nous ne savons pas dans quel sens.

M. Adams: Je m'excuse d'avoir mal compris, mais c'est tout de même intéressant. Je reviens donc à la charge. Compte tenu, donc, des idées préconçues qu'on peut avoir au sujet de la biotechnologie et de ses conséquences et du rôle possible du MDN en la matière dont nous avons parlé, j'aurais cru que le ministère de la Défense aurait été représenté dans le sous-groupe de la sécurité et la réglementation.

M. Walker: Peut-être, mais les organismes auxquels s'intéresserait peut-être le ministère de la Défense - et je dis bien «peut-être» - serait réglementés par Santé Canada, puisqu'il s'agirait d'organismes vivants ayant une incidence réelle ou éventuelle sur la santé. C'est Santé Canada qui est chargé de réglementer ces organismes.

M. Adams: Mais dans les films que j'ai pu voir, il s'agit bien souvent d'un phénomène accidentel. Il ne s'agit pas d'un organisme ou d'un produit mis au point intentionnellement par un pays donné. N'y a-t-il pas de filet de sécurité de dernier recours qui permette d'éviter les conséquences d'accidents.

M. Walker: En effet, le genre de travail expérimental que vous avez en tête doit être évalué à fond avant même d'être entrepris. Tout projet du genre serait évalué par les experts de Santé Canada aussi bien que ceux de la Défense nationale.

M. Adams: Merci.

Le président: Monsieur Knutson, s'il vous plaît, suivi de M. Finlay.

M. Knutson (Elgin - Norfolk): M. Mahon, pour revenir à ce que vous disiez au début, j'ai cru vous entendre dire, au sujet de la mise au point de substances transgéniques je crois, qu'il n'est pas nécessaire que le risque soit modifié mais que vous acceptez que la probabilité des risques soit modifiée. Sans vouloir être impertinent, je dirais que c'est du jargon qui échappe à une personne ordinaire comme moi. Si la probabilité de risques est modifiée, est-ce que cela ne fait pas partie du risque?

M. Mahon: Je voulais dire par là qu'il n'y a pas de risque tout à fait nouveau. Prenons l'exemple qui a déjà été donné au comité, celui d'un gène qui produit le venin du scorpion et qui serait transféré à une noix du Brésil...

M. Knutson: Pourrait-on parler d'un virus?

M. Mahon: - ou un virus... Il se peut qu'un certain nombre de risques particuliers soient associés au virus. L'autre gène, celui du venin, donnerait également lieu à un ensemble de risques particuliers. Si on combine les deux, il se peut que la probabilité de manifestation du risque associé au venin, c'est-à-dire l'empoisonnement d'une personne, soit considérablement modifiée. En effet, il y a beaucoup plus de chances que les gens mangent des noix du Brésil que des scorpions. Il ne s'agit donc pas d'un risque de type tout à fait nouveau. C'est la probabilité du risque qui est modifiée.

Il faut donc se pencher sur le cas pour déterminer si, oui ou non, la probabilité du risque a été modifiée.

M. Knutson: Je ne tiens pas à parler de subtilités sémantiques ou de seuils, mais plutôt à donner satisfaction au public canadien et à faire ce qu'il convient de faire. Qui dit science dit nouveauté et qui parle de l'inconnu ne peut pas savoir ce dont il parle. Il faut donc aborder la chose d'une autre façon - il ne s'agit pas d'avoir peur et de ne rien vouloir savoir puisque les gens reconnaissent toute la valeur et le potentiel que recèlent les découvertes scientifiques pour nous qui souhaitons un21e siècle prospère. Il faut donc aborder la chose avec plus de prudence.

.1015

Cela peut vouloir dire en pratique qu'il faille adopter une loi distincte qui porterait sur l'introduction de substances transgéniques ou de matériel issu du génie génétique. Une telle loi relèverait du ministère de l'Environnement ou du ministère de la Santé nationale et non pas du ministère de l'Industrie ou du ministère de l'Agriculture, qu'on pourrait considérer à cet égard comme des promoteurs dont la santé et l'environnement ne constituent pas la préoccupation principale.

J'aimerais connaître vos opinions au sujet de cette possibilité, dont nous avons parlé hier.

M. Mahon: Je vous prie d'accepter que le simple scientifique qui est devant vous n'est pas un décideur.

M. Knutson: Mais lorsqu'il s'agit du bien public, nous sommes tous des experts, n'est-ce pas?

M. Mahon: Je vous répondrai alors en trois volets. Tout d'abord, d'après ce que j'ai pu apprendre à l'occasion de nos propres réunions et des réunions de comité, nous tous, y compris mon propre ministère, avons vraiment failli à la tâche pour ce qui est d'expliquer au public ce que nous faisons et comment nous le faisons. Voilà le premier aspect. De toute évidence, nous n'avons pas convaincu le public que nous faisons ce que nous sommes censés faire.

Deuxièmement, je suis fermement convaincu que nous gérons les risques et que nous les gérons dans le contexte de la réglementation générale relative à la biotechnologie, mais nous n'avons manifestement pas bien fait notre travail pour ce qui est d'en informer la population. Les risques sont effectivement différents et, quand il s'agit d'un organisme modifié, nous demandons de l'information à ce sujet et nous examinons l'information dans une optique légèrement différente.

Troisièmement, en ce qui concerne l'élaboration d'une loi qui porterait uniquement sur la transgénèse, tout ce que je puis vous dire, c'est qu'il s'agit là d'une question d'orientation de la politique qui dépasse de beaucoup mes compétences et que je n'imaginerais même pas pouvoir vous donner une réponse à ce sujet. Sur le plan scientifique, rien n'exige l'élaboration d'une loi en ce sens. Sur le plan politique, il s'agit d'une question politique qui devrait être laissée aux décideurs et aux politiques.

M. Knutson: Nous avons entendu un spécialiste de l'évaluation des risques qui fondait essentiellement son argument sur le fait que la participation d'un ministère comme le ministère de l'Industrie ou celui de l'Agriculture, qui représente un point de vue particulier sur la création d'emplois ou sur le développement économique, point de vue qui pourrait différer de celui du ministère de la Santé ou du ministère de l'Environnement, donne à tout le moins à première vue l'impression qu'il pourrait y avoir un conflit d'intérêts.

M. Mahon: Encore là, il existe un principe absolument fondamental. Que ce soit au niveau gouvernemental, ministériel ou autre, il existe ce principe fondamental selon lequel l'organisme de réglementation doit manifestement être, et être perçu comme étant, distinct du promoteur ou du producteur. Le ministère que je représente souscrit à ce principe. Nous nous donnons beaucoup de mal pour veiller à ce que ceux qui s'occupent de promotion ne contaminent pas le système réglementaire. Jusqu'où peut-on aller dans la hiérarchie? Encore là, je crois qu'il s'agit d'une décision d'ordre, non pas technique, mais stratégique. Il ne reste pas moins que le principe est absolument valable.

Mme Kenny: Vous demandez si nous devrions procéder de façon différente ou avoir une approche particulière pour ce type de technologie. Nous avons indiqué à deux reprises que de nouvelles directives ont été élaborées et de nouveaux règlements ont été pris en application de chaque loi afin de veiller à bien encadrer la nouveauté de ce type de technologie. Ainsi, nous avons certainement fait quelque chose de nouveau.

M. Knutson: Y aurait-il des inconvénients à élaborer une nouvelle loi?

Mme Kenny: Il pourrait se produire des situations où le double emploi serait considérable. Prenons le ministère de l'Agriculture, puisque c'est celui que je connais le mieux. Nous assurons la réglementation d'un plant de canola résistant aux herbicides. L'exemple que je vous donne est bien réel. Nous avons un plant de ce genre qui a été mis au point par des moyens traditionnels. Ce plant relèverait donc du ministère de l'Agriculture. Nous avons aussi un autre plant - exemple réel encore là - qui a été mis au point par recombinaison. À l'oeil nu, les deux plants sont identiques. S'il existait une nouvelle loi comme celle que vous proposez, ce dernier plant serait réglementé par cette loi, de sorte que deux plants du même type seraient réglementés par deux organismes tout à fait distincts. Il pourrait donc y avoir double emploi, à mon avis.

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Par ailleurs, nous avons déjà en place une structure qui englobe énormément de connaissances, de compétences et d'expérience relativement au plant en question. Vous vous trouveriez à ajouter un nouvel élément.

M. Knutson: Il s'agit justement d'un nouvel élément qui est loin d'être négligeable.

Mme Kenny: Je répondrais à cela qu'il s'agit néanmoins d'un plant qui a ses racines dans le sol - c'est quand même vert et il reste que c'est une plante.

M. Knutson: Même si la plante comporte un gène de scorpion.

Mme Kenny: Je crois que nous pourrions tirer profit des connaissances et de l'expérience que nous avons.

Le président: Monsieur Finlay, suivi du président, puis nous aurons le temps de faire rapidement un deuxième tour.

M. Finlay (Oxford): J'ai deux questions à vous poser, dont l'une qui découle de l'exposé de M. Banigan. Le premier paragraphe au haut de la quatrième page me laisse perplexe. On peut y lire: «Le succès de la coordination du CIB est très différent de celui des autres juridictions.» Je ne sais pas ce qu'il faut entendre par là. Vous semblez dire que, à votre avis, nous faisons bien les choses. Vous poursuivez toutefois en disant:

J'ai besoin que vous m'aidiez à comprendre ce que vous voulez dire. On a l'impression que le CIB essaie de faire quelque chose en catimini et qu'il ne collabore pas vraiment. Je ne comprends pas.

M. Banigan: Je m'excuse, monsieur Finlay, pour ce manque de clarté du texte. Je crois que nous avons voulu dire que nous avons au Canada un bon modèle de mécanisme de collaboration interministérielle fondée sur le consensus, que nous ne retrouvons pas dans d'autres pays d'après ce que nous avons pu voir. Nous avons voulu signaler le manque de coordination qui existe, non pas au Canada, mais dans d'autres pays.

M. Finlay: Ainsi, la dernière phrase ne s'applique pas au CIB.

M. Banigan: Nous croyons que le modèle que nous avons devrait être suivi à l'échelle internationale.

M. Finlay: Et il ne l'est pas.

M. Banigan: D'après ce que nous avons pu constater, son utilisation n'est pas très répandue.

M. Finlay: Cela me soulage énormément. Je transformerai le négatif en positif.

M. Banigan: Toutes mes excuses.

M. Finlay: Mon autre question concerne la LCPE, et plus particulièrement quelque chose que nous avons entendu tout à l'heure. À l'heure actuelle, les pouvoirs en matière d'avis et d'évaluation des produits de biotechnologie en vertu de la LCPE sont énoncés à l'alinéa 26(3)a) sous la rubrique «Substances nouvelles au Canada». Cette disposition prévoit, en partie, que la LCPE ne s'applique pas à une nouvelle substance «fabriquée ou importée en vue d'une utilisation réglementée aux termes de toute autre loi fédérale et qui prévoit un préavis de fabrication, d'importation ou de vente et une évaluation en vue de déterminer si elle est toxique».

Certains témoins qui ont comparu devant le comité, notamment l'Association canadienne du droit de l'environnement et l'Institut canadien du droit et de la politique de l'environnement, ont indiqué que cette disposition habilitait Environnement Canada, du moins en théorie, à intervenir dans le processus d'avis et d'évaluation mettant en cause un produit de biotechnologie qui, à son avis, n'est pas évalué selon des normes acceptables pour le ministère. Je suppose qu'on entend par là le ministère de l'Environnement aux termes de la LCPE. Les témoins trouvent-ils que cette interprétation de l'alinéa 26(3)a) est juste?

Les ministères fédéraux qui interviennent dans la réglementation des produits de biotechnologie partagent-ils, de façon générale, cette interprétation de l'alinéa 26(3)a)? Cette interprétation est-elle compatible avec le cadre de réglementation de janvier 1993 en matière de biotechnologie qui, selon l'un des principes qui y sont énoncés, doit s'appuyer sur les lois et institutions existantes, préciser les secteurs de compétence et éviter les chevauchements?

M. Banigan: Puis-je demander à mes collègues qui sont plus experts que moi en la matière de vous répondre?

.1025

Mme Kenny: Je vais commencer. Évidemment, personne ne sera surpris d'apprendre que le sens donné à cette disposition était loin de faire l'unanimité. Il me semble donc que la décision d'éviter le double emploi que le Conseil des ministres a prise en décembre visait à préciser le sens à donner à cette disposition.

M. Finlay: Mais le sens s'en trouve-t-il précisé?

Mme Kenny: L'idée que les ministères, en conformité des lois qu'ils appliquent déjà, réglementeront ces produits de biotechnologie qui sont visés par leurs lois respectives et qu'il n'y aura pas de double emploi... Je crois que la proposition qui est venue du Conseil des ministres en décembre 1995 le précise effectivement.

Je ne prétends pas parler au nom de tous ceux qui sont à la table, mais je ne pense pas qu'on s'oppose à l'idée que nous ayons besoin d'un filet de sécurité aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement afin de veiller à ce que certains de ces nouveaux produits - je crois que nous en avons entendu parler hier - comme les produits qui servent à ensemencer les nuages ou les microorganismes utilisés pour accélérer la biodégradation afin d'éliminer les effets des déversements de pétrole... Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut réglementer ces produits et qu'il nous faut un filet de sécurité pour ce faire.

M. Mahon: Monsieur Finlay, étant moi-même d'Environnement Canada, je connais cette disposition par coeur ou presque.

En termes précis, la disposition - et nous avons obtenu un avis juridique à ce sujet - prévoit que tous les produits de biotechnologie visés par l'actuelle LCPE... Les pouvoirs relatifs à tous ces produits sont énoncés, de manière générale, dans la LCPE. Cependant, pour éviter le double emploi et assurer l'optimisation des ressources du gouvernement dans un secteur en évolution rapide - comme certains l'ont indiqué - , le législateur a précisé dans la LCPE que, dans le cas de produits pour lesquels une autre loi exige un avis et une évaluation quant à leur caractère toxique conformément à la définition énoncée dans la LCPE, aux alinéas 11a), b) et c), et pour lesquels il existe un règlement en ce sens, il n'est pas nécessaire de donner le préavis exigé par la LCPE quand ils sont utilisés conformément à la réglementation applicable.

Nous nous sommes entendus, après consultation bien sûr avec nos collègues de tous les autres ministères, sur la façon dont ils pourraient modifier leurs règlements afin de répondre aux exigences de la loi à cet égard. Tant qu'ils répondent aux exigences de la loi à cet égard, ils sont exemptés de l'application de la LCPE. Par conséquent, il ne peut pas par définition y avoir double emploi, étant donné que soit ils sont exemptés de la LCPE, auquel cas elle ne s'applique pas, soit ils ne sont pas exemptés de la LCPE, auquel cas ils doivent s'y conformer.

L'interprétation ou l'impression donnée par l'ICDPE, selon laquelle Environnement Canada peut intervenir dans l'évaluation d'un produit visé par l'article 26 et qui n'est pas soumis à la LCPE, est erronée. Dans la mesure où on satisfait aux exigences de la loi, la LCPE ne s'applique pas. C'est aussi simple que cela aux termes de l'actuelle LCPE.

M. Finlay: Qui en décide? Ou procède-t-on par voie de consensus?

M. Mahon: Non, il s'agit, non pas de dégager un consensus mais de satisfaire aux exigences de la loi. Il existe deux exigences fondamentales. Dans la mesure où on satisfait à ces exigences aux termes de la loi d'un autre ministère - si vous me permettez de me reporter à l'exemple évoqué par ma collègue d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, les amendements qu'il est proposé d'apporter ou que nous cherchons à apporter à la Loi relative aux semences prévoient l'inclusion dans la réglementation de l'obligation de donner un avis et de l'obligation de faire une évaluation. L'évaluation porte sur le caractère toxique, tel qu'il est défini dans la disposition relative aux définitions de la LCPE, à savoir aux alinéas 11 a), b) et c).

Voilà ce qu'exige la loi. Une fois cette exigence satisfaite, toutes les semences sont soumises à la Loi relative aux semences, et la LCPE ne s'applique pas. Il n'y a donc pas de double emploi.

M. Finlay: D'accord, merci.

Le président: À M. Banigan et aux autres témoins, je dirai que les questions que j'ai à poser vont plus ou moins dans le même sens que celles de M. Knutson, car je dois avouer que, plus nous avançons dans nos travaux, plus je m'inquiète de la perspective du public. Tous ceux qui sont ici dans cette salle connaissent bien la profonde méfiance du public à l'égard de la biotechnologie et de ses produits. Nous l'avons constaté à bien des reprises, aux audiences non seulement de notre comité, mais d'autres comités aussi. C'est pourquoi la question de l'étiquetage soulève tellement de virulence.

.1030

Nous devons nous demander pourquoi le public est si méfiant. Je reconnais, monsieur Banigan, que, quand vous dites que nous avons, à votre avis, un bon modèle à l'intérieur du système, vous avez le droit de dire cela. Quand on regarde les choses de l'extérieur, cependant, la réalité ne confirme pas votre opinion.

Je suis très reconnaissant pour la perspective historique que vous avez donnée ce matin. C'est très utile. D'après ce que nous avons appris, nous avons une stratégie fondée sur quatre objectifs en 1983, puis une stratégie fondée sur six principes en 1993. Naturellement, les six principes de 1993 sont, à mon avis, plus complets que les quatre objectifs de 1983. M. Lincoln a tenté d'obtenir des précisions à ce sujet.

Nous avons entendu parler hier ou l'autre jour des mérites de l'exemple en question à la lumière de ce qui s'est passé dans le cas des pesticides il y a deux ans, quand le processus a été mis en branle et que la gestion des pesticides a été réorganisée de fond en comble. Il me semble qu'on avait alors adopté de bons principes, car on a voulu restreindre l'éparpillement des responsabilités pour les confier à un seul ministère, de façon très précise, à un organisme unique, qui n'a aucune ambition ni responsabilité d'ordre économique. Il a une responsabilité à l'égard du public, et le public a confiance en lui. C'est bien le comité de la santé publique, n'est-ce pas?

La première question qui me vient à l'esprit est donc la suivante. Après 13 ans, a-t-on appris quelque chose de l'expérience des pesticides? Deuxièmement, pourquoi le processus n'est-il pas crédible aux yeux du public; il faut nous le demander. Est-ce parce que le pouvoir décisionnel est si largement réparti? Vous nous avez donné ce matin une liste de 21 organismes - 21! Au bout du compte, qui est responsable? Qui doit rendre des comptes? C'est un miracle que vous arriviez à fonctionner. En fait, nous devrions vous féliciter du fait que vous réussissez à gérer ces 21 organismes et à éviter qu'il y en ait qui s'écartent du troupeau. Quand on regarde cela de l'extérieur cependant, on ne sait pas qui est responsable au bout du compte, qui doit rendre des comptes. Voilà sans doute ce qui explique la méfiance du public.

Il y a aussi un autre élément qui ressort de tout cela et qui est un peu inquiétant en ce sens que dans le système que vous avez conçu, certains ou beaucoup d'entre vous - je ne sais pas combien - sont à la fois des responsables de la réglementation et des promoteurs. N'est-ce pas? C'est du moins l'impression que nous avons. Qu'Industrie Canada, par exemple, est à la fois un promoteur et un régulateur. C'est quelque chose qu'il faut tirer au clair, car telle est l'impression que nous avons.

.1035

Enfin, Industrie Canada est le ministère coordonnateur. Il n'y a pas d'organisme comme tel qui ait la responsabilité ultime de tout cela. Il s'agit encore une fois d'une responsabilité diffuse, ce qui nous ramène au modèle de la gestion ou de la réglementation des pesticides.

Dans le processus en tant que tel, dans l'explication qui en est donnée, d'après ce que j'ai appris au cours de nos audiences ces dernières semaines, on établit une distinction entre produit et procédé, distinction à laquelle nous nous sommes quelque peu attardés hier. Je crois que c'est M. Knutson qui a demandé pourquoi on faisait une distinction entre les deux. Dans le cas de la viande, produit et procédé sont tous deux soumis au processus de réglementation. Pourquoi établirait-on une distinction entre les deux dans le cas de la biotechnologie?

Pourriez-vous également nous dire ce que vous pensez de la question de la crédibilité du processus, de sa raison d'être, de l'absence apparente de responsabilité et des raisons pour lesquelles le public est si méfiant à l'endroit de la biotechnologie? Ce serait très utile.

M. Banigan: Monsieur le président, je partage certainement votre avis quant au manque de crédibilité du public. Les consommateurs sont préoccupés par la biotechnologie, et nous avons été à même de le constater dans plusieurs dossiers récents, comme celui de la somatotropine bovine. Il y a peut-être là une question de crédibilité.

Ce qui fait notamment problème, à mon avis, c'est que notre ministère s'appelle le ministère de l'Industrie, mais qu'il s'agit en fait d'un ministère à vocation très générale. Il est le fruit de la fusion de Consommation et Affaires commerciales, d'Investissement Canada et d'Industrie, Science et Technologie, et d'une partie du ministère des Communications. Le nom est trompeur, car le ministère s'occupe non seulement de commerce et d'industrie, mais de consommation et de sciences. C'est d'ailleurs Industrie Canada qui assure la coordination interministérielle de la stratégie canadienne relative aux sciences et à la technologie, mais en fonction d'une perspective, non pas forcément industrielle, mais scientifique.

Nous sommes, à bien des égards, un ministère de réglementation. Je crois que nous assurons l'application de quelque 47 lois, mais pas dans ce domaine. Ces lois concernent la métrologie légale, les sociétés commerciales, la faillite, les poids et mesures et d'autres questions comme cela. Nous ne jouons toutefois pas un rôle de réglementation dans ce domaine en particulier.

Vous avez dit, monsieur le président, que nous gérons le processus. Permettez-moi, sans vouloir vous manquer de respect, de ne pas partager cet avis. Nous n'avons aucune autorité juridique à l'égard du processus. Notre rôle se limite à la coordination. Les fonds affectés à la stratégie nationale en matière de biotechnologie proviennent, non pas de services votés d'Industrie Canada, mais d'un montant fixe qui est prévu à cette fin par le Conseil du Trésor.

Nous assurons la coordination des activités de divers ministères, et nous présentons les soumissions en bloc au Conseil, qui approuve les fonds. Ainsi, notre rôle se limite vraiment à la coordination, et c'est un rôle qui pourrait être accompli par quelqu'un d'autre, mais c'est toujours notre ministère qui s'en est occupé et, que je sache, personne dans l'administration ne s'y oppose. En réalité, la gestion est confiée à deux organismes.

En ce qui a trait à la stratégie, la gestion est confiée au Conseil du Trésor, qui approuve les fonds demandés par les différents ministères, et c'est bien sûr le ministre qui signe la soumission qui est présentée au Conseil du Trésor. L'autorité juridique appartient donc aux ministères mêmes chargés de la réglementation.

Le président: Nous savons tous, monsieur Banigan, à quel point le Conseil du Trésor est visible pour le public, n'est-ce pas?

M. Banigan: Oui, monsieur.

Le pouvoir de réglementation appartient aux divers ministères: Santé, Environnement, Agriculture, etc. On est forcé de conclure à un manque de transparence. Il serait possible d'adopter le modèle qui a été adopté dans le cas des pesticides et, si cela contribuait à dissiper certaines des inquiétudes du public au sujet de l'absence de responsabilité, c'est peut-être une idée qu'il faudrait retenir. J'ajouterai toutefois à cela que même l'industrie est préoccupée par le manque de confiance des consommateurs...

Le président: C'est juste.

M. Banigan: ...parce que l'absence de consensus parmi le public constitue l'entrave à l'établissement d'une industrie de la biotechnologie. L'industrie a donc à coeur, elle aussi, que nous ayons un régime de réglementation sûr et prévisible.

.1040

Si vous le permettez, monsieur, je vous dirai que votre comité pourrait peut-être faire des recommandations au gouvernement en ce qui concerne les structures. Je me heurte souvent au fait que les structures sont l'apanage, non pas des fonctionnaires, mais du gouvernement lui-même, du ministère, et que nous devons fonctionner à l'intérieur des structures que le gouvernement nous donne. Si toutefois vous recommandiez une structure qui serait plus transparente, c'est une suggestion qui, je crois, serait peut-être bien accueillie dans un certain nombre de milieux.

Mme Kenny: Si vous me permettez de répondre à tout le moins à la première partie de votre question en ce qui concerne l'agriculture, je vous dirai qu'à Agriculture et Agroalimentaire Canada, nous ne nous considérons pas comme des promoteurs de la biotechnologie. Évidemment, nous avons la responsabilité de veiller à ce que les Canadiens puissent continuer à se nourrir eux-mêmes, mais nous ne sommes pas les promoteurs d'un type de technologie en particulier.

Quand nous élaborerons les directives qui réglementeront cette technologie, cela ne se fera certainement pas à l'interne. Nous réunirons un groupe de spécialistes et de représentants de l'extérieur.

C'est ce que nous avons fait dans le cas des directives sur les plantes que nous avons commencé à élaborer au début des années 90. Nous avons fait appel à un professeur de l'Université de Guelph qui s'est rendu dans tout le pays pour recueillir de l'information et qui a ensuite mis au point un modèle. Nous avons aussitôt présenté le modèle à Environnement Canada et nous avons travaillé de concert avec ce ministère à l'élaboration de directives qui ont plus tard fait l'objet de consultations.

Comme nous l'avons indiqué, nous travaillons également à l'échelle internationale pour recueillir l'information qui pourrait être utile à l'élaboration de ces lignes directrices. Une fois que les directives sont établies, nous devons les respecter.

Il nous est arrivé de refuser des essais au champ. Il nous est arrivé de labourer des champs d'essai qui ne respectaient pas les conditions que nous avions établies. Et je puis vous dire que nous avons même fait cela à des stations de recherche d'Agriculture Canada.

Le président: Excusez-moi de vous interrompre. Ces directives ont-elles fait l'objet d'un examen public?

Mme Kenny: Oui.

Le président: De quelle façon?

Mme Kenny: Nous avons des listes d'envoi et des ateliers.

Le président: Non, je voulais parler de notre comité parlementaire.

Mme Kenny: Non, je ne crois pas que nos directives aient été soumises à l'examen de votre comité. Nous suivons à cet égard le processus habituel d'examen de la réglementation.

Il y a un point que je voudrais aborder. Je ne prétends pas du tout savoir comment les choses se déroulent à cet égard, et il se peut qu'on réussisse ainsi à améliorer la perception du public, qui, j'en conviens, doit être améliorée. Dans le dernier budget, on a annoncé que les ministères de l'Agriculture, des Pêches et de la Santé collaboraient à l'établissement d'une agence unique d'inspection des aliments. D'après ce que j'en sais, Santé Canada s'occuperait d'établir les politiques et les normes en matière d'innocuité des aliments et l'agence, cette agence conjointe qui regrouperait d'anciens employés des trois ministères, s'occuperait de l'inspection comme telle des aliments.

Je ne prétends pas du tout savoir où en sont les choses. Ron Doering et M. Olson d'Agriculture et Agroalimentaire Canada seraient certainement en mesure de vous fournir de plus amples informations à ce sujet.

Le président: Très bien. Autres observations? Pour le deuxième tour, madame Guay.

[Français]

Mme Guay: M. Walker pourra peut-être répondre à ma question. J'ai ici un article sur la somatotrophine bovine où l'on dit qu'il n'est peut-être pas souhaitable que cette hormone soit mise sur le marché. On dit ici que les États-Unis l'ont commercialisée en novembre 1993 alors que la Communauté européenne a adopté un moratoire de sept ans sur ce produit. On dit aussi que si on utilise la STBr, on risque que plusieurs petites entreprises productrices de lait ferment leurs portes en raison d'une inévitable augmentation des coûts.

Nous parlions plus tôt d'étiquetage. Beaucoup de gens nous disaient que les consommateurs ont le droit de savoir ce qu'ils boivent. Certains s'opposent toutefois à l'étiquetage. Est-ce que les membres du comité sont prêts à exiger un étiquetage précis pour les produits issus de la biotechnologie?

.1045

[Traduction]

M. Walker: Merci. Je tâcherai de répondre à la question du mieux que je peux.

Si vous me permettez de répondre d'abord à la dernière partie de votre question, je suis certainement d'accord pour dire que, dans la mesure du possible, il faudrait que les produits issus de la biotechnologie soient étiquetés afin que le public puisse faire un choix éclairé. Pour ce qui est plus précisément du lait produit à l'aide de la STBr, je crois qu'aux États-Unis il est possible d'isoler le lait produit sans le recours à la STBr, autrement dit, le lait naturel, si vous voulez, de façon qu'il puisse être étiqueté en tant que tel.

Si jamais le Canada devait approuver l'utilisation de la STBr, et rien n'est moins sûr à l'heure actuelle, je suis certain que les producteurs laitiers voudraient mettre sur pied un système semblable au Canada.

Pour ce qui est de la communauté européenne, elle a imposé un moratoire jusqu'à la fin du siècle sur l'utilisation de la STBr, sauf à des fins expérimentales. Le moratoire vise en fait à permettre aux Européens de satisfaire leurs besoins d'en savoir davantage sur les effets éventuels de la STBr, sur la santé des vaches. C'est pour cette raison qu'ils ont opté pour un moratoire aussi long, à savoir un moratoire de sept ans.

Merci.

[Français]

Mme Guay: Vous dites que lorsqu'il est possible de mettre une étiquette, on devrait le faire. Quant à moi, je pense que ce n'est pas seulement une question de possibilité, mais d'obligation. Les gens doivent savoir quand un produit est issu de la biotechnologie ou quand un produit est naturel. Ce n'est pas seulement «possiblement»; c'est «tout le temps».

[Traduction]

M. Walker: Vous parlez de «biotechnologie», mais comme Mme Kenney l'a fait remarquer tout à l'heure, c'est un terme qui peut être utilisé dans divers contextes. Il ne s'agit pas uniquement du transfert de gènes d'un produit à un autre; il peut s'agir de changements qui sont opérés dans la plante elle-même par des techniques de métagénèse chimique ou physique. Beaucoup des produits que nous mangeons aujourd'hui résultent de techniques semblables, et il serait extrêmement difficile d'essayer de les distinguer tous.

Le président: Nous entendrons Mme Payne, puis nous entendrons M. Lincoln.

Mme Payne (St. John's-Ouest): Merci, monsieur le président. Je vous demande de bien vouloir m'excuser et d'avoir été obligée de quitter la salle pendant un certain temps; il reste que les électeurs sont très importants, et je devais justement rencontrer de mes électeurs.

Je tiens à dire que j'ai moi aussi été quelque peu étonnée par le nombre de ministères et d'organismes dont il est question dans le texte de l'exposé de M. Banigan. Je me suis dit aussi qu'il doit être assez lourd de devoir traiter avec tous ces organismes.

Ma question ne concerne pas la biotechnologie en tant que telle, mais plutôt l'étiquetage. À Terre-Neuve, par exemple, nous avons un problème relatif à l'exportation de viande de phoque. Je crois que Mme Kenny a parlé de l'agence unique d'inspection des aliments qui doit être mise sur pied. Je sais comme c'est une question importante, du fait que nous avons du mal à exporter la viande de phoque aux États-Unis, parce que nous disons que c'est du poisson, alors qu'eux disent que c'est de la viande.

Je voudrais simplement que vous me disiez un peu ce que vous pensez de cela et ce que vous feriez pour régler le problème. Même s'il n'est pas question pour l'instant de biotechnologie, ce n'est toutefois pas exclu pour l'avenir, et j'estime qu'il faudrait tirer les choses au clair.

.1050

Mme Kenny: Vous soulevez là un excellent point, qui montre bien pourquoi nous nous efforçons de collaborer avec nos partenaires commerciaux à l'étranger, comme les pays de l'OCDE, quand nous élaborons des directives et des règles, etc. Je ne suis malheureusement pas spécialiste en la matière, mais je sais qui l'est. Je pourrais vous obtenir une réponse écrite à votre question, si vous croyez que cela serait utile.

Mme Payne: C'est simplement que c'est toute la question de l'étiquetage qui est en jeu, et je suppose que j'essaie de faire le lien avec l'étiquetage des produits issus de la biotechnologie et l'importance de bien indiquer ce qui entre dans la composition des produits que nous exportons.

Mme Kenny: En effet. Le Canada préside le Comité international du groupe d'établissement des normes alimentaires du Codex Alimentarius sur l'étiquetage des aliments, de sorte que nous nous intéressons de près à cette question. L'étiquetage selon des normes reconnues est d'une importance critique, sinon on risque de se heurter à des barrières commerciales artificielles.

Mme Payne: J'ai comme l'impression que votre question se rapproche sans doute de celle que j'ai moi-même en tête.

Le président: Poursuivez, madame Payne, si vous le voulez.

Mme Payne: Je me demandais simplement à quelle étape nous en sommes dans ce processus et quels sont les progrès qui ont été accomplis dans l'identification de ces produits ou des ingrédients qui entrent dans leur composition.

Mme Kenny: Cette réunion à l'échelle internationale du Comité de l'étiquetage des aliments a eu lieu ici à Ottawa, il y a de cela quelques semaines ou un mois. Il y a été question de l'étiquetage des aliments issus de la biotechnologie.

On a décidé que le secrétariat serait chargé de rédiger les directives à ce sujet mais on en est encore qu'au tout début. Les pays membres recevront les directives dès leur rédaction. Il y aura ensuite une consultation nationale après quoi les directives feront l'objet de nouvelles discussions. Il s'agit d'un processus en huit étapes et nous n'en sommes qu'au début.

Mme Payne: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci. Monsieur Lincoln.

M. Lincoln: J'ai quelques questions rapides à poser à M. Mahon. La première concerne les dispositions actuelles de la LCPE concernant la biotechnologie; à ce sujet vous avez parlé de certaines erreurs d'interprétation de l'ICDPE ou l'ACDE. La loi ne s'applique pas à toutes les substances issues de la biotechnologie dans la mesure où elle fait intervenir d'autres lois. Mais n'est-ce pas qu'il existe une distinction importante entre la disposition actuelle et ce qui est proposé dans la mesure où désormais il y a inversion de la charge de la preuve?

Autrement dit, la LCPE s'applique à tout ce qui relève de la définition de substance toxique. Elle s'applique donc à toutes les importations, à tous les procédés de fabrication et toutes les modifications. Elle renferme une condition en matière d'innocuité pour les humains et pour l'environnement à moins - et à mon avis c'est la grande question - qu'elle ne s'applique à tout. Êtes-vous d'accord? C'est une différence très importante.

J'ai vu moi-même des projets de règlements qui ne prévoyaient rien en matière de sécurité et santé environnementale. C'étaient des règlements proposés par les ministères concernés, qui ne relevaient pas de la LCPE, mais cette loi s'applique quand même automatiquement, n'est-ce pas?

M. Mahon: Oui, Monsieur Lincoln, c'est tout à fait exact. Cela a été qualifié d'autorité résiduelle mais elle est quand même bien importante. L'autorité résiduelle s'applique entièrement s'il n'y a pas de mesure d'exception.

M. Lincoln: Exactement. Je pense qu'il est essentiel de faire la distinction.

M. Mahon: C'est en vertu de la LCPE actuelle.

M. Lincoln: Très bien, nous sommes d'accord.

En réponse à M. Knutson concernant la probabilité d'un risque, si je vous ai bien compris, vous prenez le virus ou le venin d'un scorpion et vous l'ajouter à une noix du Brésil. Vous semblez dire que le risque cumulatif ne change pas malgré la combinaison des deux risques, que le risque total reste le même. Est-ce que je vous ai bien compris?

.1055

M. Mahon: Non, monsieur. J'ai parlé d'une situation où il y a le risque d'une toxine d'une part et aussi, mettons, le risque d'un allergène dans une noix. Quand vous mettez les deux ensembles, vous pouvez arriver à une certaine conclusion concernant la toxine et aussi concernant l'allergène, mais il faut aussi faire une évaluation du risque global.

Nous disons qu'en mettant la toxine et l'allergène ensembles, on ne crée pas un genre de risque totalement différent. Les risques qualitatifs seront les mêmes. Il est très peu probable que la combinaison de la toxine et de l'allergène crée un nouveau genre de plante. Il ne s'agit pas de créer quelque chose de nouveau. Mais il y a quand même changement de probabilité quand la toxine se trouve dans une noix et aussi la possibilité que l'allergène soit plus prononcé.

M. Lincoln: Mais est-ce qu'il n'existe pas des exemples dans d'autres domaines où le fait de combiner deux substances crée un genre de risque tout à fait nouveau qui nous est inconnu? Et n'est-ce pas là où réside le problème avec la biotechnologie et la raison pour laquelle le public a des soupçons et des réticences?

M. Mahon: Je suis tout à fait d'accord avec vous, c'est effectivement une crainte du public. Mais pour vous répondre à une question qui revient régulièrement, les scientifiques estiment que ce phénomène n'est pas probable et je dis bien probable.

M. Lincoln: Mais il est quand même possible.

M. Mahon: Il existe une possibilité limitée, effectivement. On parle d'effets secondaires lorsque l'insertion de fragments de gènes dans d'autres gènes crée ce que l'on appelle la co-activation. On risque de déclencher un phénomène qui n'était pas normalement actif. La probabilité est extrêmement faible mais nous avons très mal informé la population des probabilités minimes qui existent dans l'état actuel de nos connaissances et il est vrai qu'on ne peut juger qu'en fonction de l'état actuel de nos connaissances.

Le président: Dans les deux minutes qui restent, pourriez-vous nous expliquer un peu la logique de votre distinction entre le procédé et le produit?

Mme Kenny: Est-ce à moi que vous posez la question, monsieur le président.

Le président: À qui veut répondre.

Mme Kenny: J'ai essayé hier.

Le président: Oui, mais il faudrait essayer encore aujourd'hui.

Mme Kenny: D'accord.

Le président: Et pourquoi appliquez-vous cette distinction à la biotechnologie mais pas à certains produits agricoles traditionnels?

Mme Kenny: Si je devais recommencer, personnellement je ne ferais pas une distinction entre le procédé et le produit car cela crée beaucoup de confusion.

Le président: Effectivement. Alors que feriez-vous?

Mme Kenny: Je pense que je décrirais le phénomène sans essayer de lui mettre une étiquette.

Ce que nous faisons...

Le président: Je ne comprends pas.

Mme Kenny: Permettez-moi de vous donner une explication. Notre examen d'un nouveau produit pour déterminer son innocuité tant pour les humains que pour l'environnement ne dépend pas d'un seul procédé utilisé pour élaborer ce produit mais dépend du risque que pose le produit en question.

Cela dit, que ce soit un produit traditionnel ou le produit d'une nouvelle technologie, s'il pose un risque potentiel nous allons faire un examen. Au cours de cette analyse, il faut examiner le procédé utilisé pour élaborer le produit.

Dans toutes nos directives et dans nos règlements, il existe une description détaillée des éléments qu'il faut examiner. Il faut répondre à des questions comme d'où provient le gène; comment le gène a-t-il été encodé; comment le nouveau gène a-t-il été incorporé à la plante; quel genre d'expériences ont été faites pour prouver qu'il est stable et qu'il se trouve où le scientifique pense l'avoir mis. Voilà les questions que l'on pose chaque fois qu'il s'agit de technologies de recombinaison. Si c'est un autre genre de technologie, on poserait des questions sur la technique en question.

Mais le critère qui déclenche l'examen n'est pas la technologie comme telle mais le risque potentiel que présente le produit.

Le président: S'il s'agit d'un produit traditionnel, avez-vous dit.

Mme Kenny: Oui.

Le président: Et si ce n'est pas un produit traditionnel?

Mme Kenny: Nous l'examinerions aussi.

Le président: Et feriez-vous une distinction entre le procédé et le produit?

.1100

Mme Kenny: Nous ferions une distinction dans notre examen car la question pourrait porter sur la dérivation du produit, la façon dont il a été élaboré ou fabriqué. Et il faudrait poser des questions très précises sur ou le procédé en question.

Le président: Est-ce que vous dites que vous examineriez le procédé et le produit dans le cas des produits transgéniques?

Mme Kenny: Nous examinons certes le procédé mais ce n'est pas lui seul qui déclenche la décision de faire un examen.

Le président: Qu'est-ce que vous faites dans le cas de la viande? Dans ce cas-là, vous examinez le procédé, n'est-ce pas?

Mme Kenny: Nous examinons effectivement le procédé dans le cas de ces produits. Ils font l'objet d'un examen approfondi.

Le président: Nous devrons revenir à cette question plus tard puisque nous devons quitter la salle. Mais nous avons passé deux heures très fructueuses et nous allons vous entendre de nouveau.

Nous vous remercions d'être venus et de nous avoir fait des exposés exhaustifs qui nous ont été très utiles.

La séance est levée.

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