[Enregistrement électronique]
Le mercredi 25 septembre 1996
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Payne): Bonjour, mesdames et messieurs. Je crois que nous avons quorum.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons l'étude du dossier des changements climatiques et du programme de l'utilisation rationnelle de l'énergie. Je souhaite la bienvenue au sous-ministre adjoint du Service de l'environnement atmosphérique...
Il est plutôt évident que je n'ai pas rencontré M. McBean. Nous accueillons plutôt Mme Louise Comeau. Nous allons écouter votre exposé et suivre le programme de la séance tel qu'il a été prévu.
Mme Louise Comeau (directrice, Énergie et atmosphère, Club Sierra du Canada): Je remercie le comité de nous accorder du temps pour que nous puissions exposer les résultats d'un très important projet dont le Club Sierra est le fer de lance depuis au moins deux ans maintenant. Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous présenter les premiers résultats, je vais passer plutôt rapidement sur cette partie de l'exposé.
Ce que nous avons vraiment la possibilité de faire aujourd'hui, c'est de voir quelles seraient les conséquences sur l'économie canadienne si nous donnons réellement suite à nos engagements relatifs aux changements climatiques. Les études, je suis heureuse de le dire, font ressortir des effets très constructifs sur l'économie canadienne.
Permettez-moi tout d'abord de rappeler la genèse de cette étude, après quoi je vais vous montrer quelques transparents au rétroprojecteur. Je répondrai ensuite aux questions, qui pourront s'adresser à moi ou à Carl Sonnen, qui représente Informetrica.
La vice-présidente (Mme Payne): Excusez-moi de vous interrompre, mais nous avons quelques journalistes parmi nous. Normalement, les médias ne doivent pas être dans la salle. Nous allons leur permettre de rester un peu.
Conformément aux règles de la Chambre, les médias ne sont pas censés se trouver ici. La séance a déjà débuté, et Mme Comeau vient de se présenter.
M. Knutson (Elgin - Norfolk): Puis-je poser une question? Ce sont les caméras qui ne sont pas admises, normalement, mais les journalistes peuvent être présents, n'est-ce pas?
La vice-présidente (Mme Payne): Oui, c'est exact.
Mme Comeau: Madame la présidente, est-ce que Gordon McBean pourrait prendre la parole en premier?
La vice-présidente (Mme Payne): C'est de cette manière que nous souhaitions procéder.
Mme Comeau: Il est arrivé, et j'en suis contente. Si nous pouvions modifier l'ordre et que cela ne dérange personne d'autre, nous entendrons d'abord M. McBean si tout le monde est d'accord.
Des voix: D'accord.
La vice-présidente (Mme Payne): Bienvenue, monsieur McBean. Comme je ne vous avais jamais rencontré, je ne pouvais pas savoir si vous étiez présent ou non. Je vous souhaite la bienvenue. En ma qualité de vice-présidente du comité, je vous invite à faire votre exposé.
Mme McKenzie est-elle présente?
M. Gordon McBean (sous-ministre adjoint, Service de l'environnement atmosphérique, ministère de l'Environnement): Elle n'est pas encore là, madame la présidente, mais je crois qu'elle va venir.
Je suis désolé d'être arrivé un peu tard. Je ne me rendais pas compte que la sécurité était aussi exigeante dans cet édifice, et c'est sans doute pour le mieux.
Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous. Je voudrais, si cela convient au comité, faire un exposé sur la science des changements climatiques. Je vous invite à me poser des questions dès que vous le voudrez. Tout pourra se faire rondement et sans formalités, je l'espère, si cela vous convient.
Ce qui nous préoccupe, c'est l'évolution de l'effet de serre qui régit notre système climatique. Il vaut probablement mieux le reconnaître, il existe un effet de serre naturel qui influence le climat. Le phénomène ressemble à ce qui se passe dans la serre que vous avez peut-être dans votre jardin. Il y a dans l'atmosphère des gaz qui influencent la manière dont l'énergie... [Difficultés techniques - La rédaction]... dans l'atmosphère. Ces gaz ont pour effet d'emprisonner l'énergie dans les couches inférieures de l'atmosphère et de réchauffer ainsi le climat.
Cet effet de serre naturel est pour nous une vraie chance. Si on s'éloigne dans l'espace pour étudier la planète Terre et faire des mesures, on peut croire que la température moyenne y est d'environ moins 18 degrés Celsius. Autrement dit, tout serait complètement gelé. Mais nous nous trouvons au niveau du sol, et nous savons que la température est d'environ 15 degrés au-dessus de zéro en moyenne sur l'ensemble de la planète. Cette différence de 30 degrés Celsius s'explique par l'effet de serre naturel.
Ce qui nous préoccupe, c'est que l'effet de serre naturel, qui est un phénomène indéniable, tous les scientifiques s'entendent là- dessus, est modifié par l'activité humaine. Les principaux gaz qui ont un effet de serre sont la vapeur d'eau, dont le niveau est à peu près stable, ainsi que le gaz carbonique et le méthane dont la teneur dans l'atmosphère augmente rapidement.
La diapositive que voici illustre la concentration de gaz carbonique, qui est le principal gaz à effet de serre dont la production est imputable à l'homme. La période étudiée va de l'an 1000 après J.-C. jusqu'à 1800 et ensuite jusqu'à nos jours. Vous pouvez constater que, pendant fort longtemps - en réalité, la science nous permet d'établir des données qui remontent à 6 000 ou 10 000 ans - la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère a été très proche de 280 parties par million. Elle pouvait varier de plus ou moins dix, mais elle ne s'éloignait pas beaucoup de 280 parties.
Nous remarquons sur les 200 dernières années, en gros, un accroissement rapide de la concentration de gaz carbonique dans l'atmosphère. Cette année, elle dépasse 360 parties par million.
Le diagramme qui a été inséré ici montre non seulement la concentration dans l'atmosphère, mais aussi la quantité de gaz à effet de serre ou de gaz carbonique produite par l'activité humaine. La forte prédominance du gaz carbonique dans les émissions dues à l'activité humaine s'explique par la combustion de carburants fossiles comme le charbon, le gaz naturel et le pétrole. Elle s'explique aussi en partie par la déforestation. À l'époque la plus récente, c'est-à-dire au cours des dix dernières années, à peu près, l'activité humaine émet environ sept milliards de tonnes de carbone par année dans l'atmosphère. Là-dessus, environ cinq milliards et demie de tonnes sont attribuables à la combustion de carburants fossiles sous une forme ou une autre.
Le résultat est très clair. Il se dégage un très net consensus parmi les scientifiques pour dire que cette augmentation rapide de la concentration en gaz carbonique est à mettre directement au compte de l'activité humaine et surtout de la combustion des carburants fossiles.
C'est à peu près la même chose qui se passe dans le cas du méthane.
La vice-présidente (Mme Payne): Avant que vous ne poursuiviez, monsieur McBean, je voudrais m'assurer que M. Asselin peut nous suivre. Auriez-vous la version française de vos diapositives?
M. McBean: Non, pas pour le moment.
La vice-présidente (Mme Payne): Pouvez-vous suivre, M. Asselin?
[Français]
M. Asselin (Charlevoix): Oui, pourvu que j'aie accès à la traduction.
[Traduction]
M. McBean: D'autres gaz, comme le méthane, sont également importants et leur concentration augmente fortement. Alors que la quantité de gaz carbonique s'est accrue d'environ 25 p. 100, celle du méthane a plus que doublé, augmentant de plus de 100 p. 100 en moins de 200 ans. La majeure partie de cette progression est très récente. Elle est également due aux changements dans les activités humaines qui ont influé sur la production des rizières, par exemple.
Comme je l'ai dit, lorsque ces gaz sont émis dans l'atmosphère, ils intensifient fortement ce que nous appelons l'effet de serre. Les scientifiques, qui comprennent les réactions chimiques et physiques qui se produisent dans l'atmosphère, peuvent calculer le rythme du changement climatique qui correspond à la fluctuation de l'effet de serre.
Essayons de voir comment les choses évolueront avec le temps, en nous attardant surtout au gaz carbonique, celui qui est responsable de 60 ou 70 p. 100 de l'effet de serre à l'échelle planétaire. Ce n'est pas le seul gaz, mais c'est de loin le plus important dont la concentration dans l'atmosphère est modifiée par l'activité humaine.
Il existe un groupe appelé Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, qui est parrainé par des organisations de l'ONU, le Programme des Nations Unies pour l'environnement et le Programme météorologique mondial. Il a fait une très vaste revue des acquis scientifiques, dégagé un consensus et rédigé des rapports.
De nombreux scientifiques canadiens et probablement de 1 000 à 2 000 experts de divers pays ont participé à la préparation des rapports du Groupe intergouvernemental. Ces rapports ont été approuvés par les représentants des gouvernements à l'occasion de diverses réunions au cours de l'année, le point culminant étant la réunion de Rome, en décembre dernier. C'est alors que les rapports de synthèse et les résumés, étudiés mot à mot, ont été agréés par tous les pays, même si certains d'entre eux, comme l'Arabie saoudite, avaient des réserves.
Ce que je voudrais montrer au moyen de ce diagramme est une projection sur le prochain siècle. Que se passera-t-il au cours des cent prochaines années? Nous ignorons quelles seront les émissions de gaz carbonique attribuables aux activités humaines. Mais si vous demandez leurs prévisions aux économistes et aux spécialistes des questions d'énergie, vous obtenez des estimations éclairées, qui sont illustrées par la ligne du milieu. Si vous supposiez qu'il y aura une grande consommation d'énergie venant des carburants fossiles et qu'il y aura une forte croissance démographique, vous pourriez tracer une courbe qui va comme ceci. Si vous supposez au contraire qu'il n'y aura presque pas de croissance démographique - hypothèse fort peu probable, mais qui n'est pas à écarter - vous obtiendrez un taux relativement faible. Chacune des hypothèses correspond à un changement dans la quantité de gaz carbonique que l'activité humaine émettra dans l'atmosphère chaque année.
La chose importante sur laquelle je voudrais attirer votre attention, c'est que, si nous prenons n'importe laquelle de ces courbes - mettons que ceci représente le milieu, avec une ligne droite comme ceci - la quantité de gaz carbonique dans l'atmosphère suit une progression beaucoup plus rapide qu'une augmentation linéaire. Il y a en fait une courbe vers le haut. En mathématiques, cela s'appelle une augmentation exponentielle. Cela tient au fait que, en somme, chaque molécule de gaz carbonique émise dans l'atmosphère y reste environ une centaine d'années.
En un sens, on pourrait dire que la relation entre ces émissions ressemble à notre déficit annuel: la quantité présente dans l'atmosphère est la dette totale, et il y a un effet très cumulatif. Comme les émissions de gaz ne s'arrêtent pas, l'accumulation se poursuit. Il existe des processus qui retirent du gaz carbonique de l'atmosphère, mais ils sont beaucoup plus lents que l'apport des nouvelles émissions.
La conséquence, c'est que la concentration dans l'atmosphère, qui se situait ici avant la révolution industrielle, sera peut-être de plus du double d'ici à la fin du siècle prochain.
Revenons à ce diagramme. Ce que j'essaie d'expliquer, c'est que, selon toutes les projections raisonnables, la quantité de gaz carbonique qui se situait autrefois ici sera tout à fait au haut du graphique d'ici l'an 2100.
Un autre fait à signaler est nous avons des conventions internationales. Vous savez sans doute que le Canada a signé la Convention cadre sur le changement climatique, qui prévoit une stabilisation des émissions. Il s'agit de stabiliser la quantité de gaz émise dans l'atmosphère chaque année.
Étant donné l'effet d'accumulation, même si nous stabilisons les émissions, la quantité de gaz présente dans l'atmosphère continue d'augmenter. De la même manière, si nous stabilisons notre déficit à 10 milliards de dollars par an pendant les 100 prochaines années, la dette nationale va continuer de croître. Les choses fonctionnent un peu de la même manière. Par conséquent, même si nous stabilisons les émissions, la concentration dans l'atmosphère doublera presque, par rapport à celle d'avant l'industrialisation, d'ici à la fin du siècle prochain.
Pour simplifier, considérons simplement les émissions. Pour stabiliser la quantité de gaz carbonique dans l'atmosphère, nous devons réduire radicalement nos émissions sur toute la planète. En réalité, il faudrait les réduire de 60 p. 100 à l'échelle planétaire, par rapport au niveau actuel.
Malheureusement, cela ne va pas se produire, mais il faut être réaliste. Si nous stabilisons les émissions, nous obtenons cette ligne. Le résultat, dans un diagramme semblable, est que, si nous stabilisons les émissions, la concentration dans l'atmosphère augmentera.
Qu'est-ce que cela veut dire? Si la concentration dans l'atmosphère augmente, l'effet de serre sera de plus en plus intense. Il sera plus fort d'année en année. La climatologie nous dit que le réchauffement s'accompagnera d'autres changements dans le climat du globe.
Je vais maintenant vous donner des exemples de valeurs de changement climatique à l'échelle planétaire correspondant aux émissions illustrées dans le diagramme précédent. Le moment présent se trouve ici, et le diagramme montre que, au fur et à mesure qu'on avance vers l'an 2100 ou disons seulement l'an 2050, la température de la planète augmentera de un à deux degrés Celsius, et, d'ici à la fin du siècle prochain, de un à quatre degrés Celsius.
Vous vous direz peut-être que c'est bien peu de chose, un degré Celsius. Nos observations nous montrent que le climat de la planète a été très stable par le passé. Au cours des 10 000 dernières années, la température moyenne de la Terre n'a probablement pas changé de plus de un demi-degré. Nous discutons ici par conséquent d'un changement de température, en une centaine d'années, supérieur à celui qui s'est produit au cours de 10 000 ans. On peut dire non seulement qu'il est plus important même selon l'hypothèse la plus faible, mais aussi que les changements qu'entraînerait une hausse pouvant aller jusqu'à quatre degrés Celsius seront phénoménaux.
Il peut être intéressant de savoir que, lors de la glaciation qui a couvert tout le Canada et l'Amérique du Nord, quand Ottawa était enseveli sous trois ou quatre kilomètres de glace, la température de la planète n'a changé que de cinq degrés Celsius. Quand on parle d'un réchauffement de quatre degrés, il s'agit d'un changement semblable à celui que la Terre a connu en entrant dans l'ère de glaciation et en en sortant, ce qui a eu des conséquences catastrophiques, nous le savons.
D'autres phénomènes se greffent à cette évolution. La température monte, mais il y a aussi d'autres conséquences.
L'un des phénomènes dont nous parlons et qui est très important est l'élévation du niveau des mers. Là aussi, les possibilités sont diverses. Le niveau pourrait ne monter que de 20 centimètres, mais c'est peu probable. La valeur moyenne est d'environ un demi-mètre, mais le niveau pourrait aussi monter de plus d'un mètre.
Si le niveau des mers monte d'un mètre, ce qui est dans la gamme des possibilités que j'évoque ici, un pays comme le Bangladesh verra 17 p. 100 de sa masse terrestre inondée, et 71 millions de personnes seront touchées. Dans le cas des Pays-Bas, la proportion inondée n'est que de 5,9 p. 100, mais une partie plus importante de la population sera touchée.
La vice-présidente (Mme Payne): Pouvez-vous nous dire ce qui se passerait au Canada?
M. McBean: Au Canada, le phénomène aurait sûrement des conséquences sur des régions comme l'Île-du-Prince-Édouard. Le territoire ne va pas être transformé en une multitude d'îles, mais les régions côtières seront certainement touchées. J'ai habité autrefois à Vancouver. La région de l'île Lulu, près de Vancouver, dans le delta du Fraser, sera une autre région touchée.
M. Knutson: Et St. John's?
M. McBean: Dans l'ensemble du pays, tous les endroits situés à environ un mètre d'altitude se retrouveront au niveau de la mer.
Il faut bien se dire que tout cela n'arrivera pas seul. Il faut en prendre conscience. Il y aura plus de tempêtes, et j'en reparlerai tout à l'heure. Il y aura donc plus de risques que des tempêtes déversent l'eau des océans sur la terre ferme.
Si je tenais à parler de ce problème à propos de ces pays, c'est que l'une des questions clés, à mon sens en tout cas, comme citoyen du Canada et du monde, est celle de l'équité internationale. Les citoyens des îles Marshall verront leur pays disparaître à peu près complètement, victime des avantages que les habitants de la planète, surtout dans les pays développés, tirent de la combustion des carburants fossiles. On peut présumer que nous avons tiré des avantages de l'utilisation de ces combustibles, ce qui a modifié le climat et intensifié l'effet de serre, mais les pauvres autochtones des îles Marshall, dont environ 80 p. 100 du territoire disparaîtra si le niveau des mers s'élève d'un mètre... Ce sera insurmontable pour eux.
Le Canada a l'infrastructure, la technologie et, dans une certaine mesure, la capacité d'observation pour pouvoir construire des digues, et nous le faisons. Le pont de l'Île-du-Prince-Édouard a été construit environ un mètre plus haut pour tenir compte de ces prévisions. Cela comporte des coûts financiers, mais, pour d'autres pays, c'est une question de vie et de mort.
Autre fait que je voudrais faire remarquer - je ne veux pas trop m'étendre, car il m'est arrivé de prolonger ce discours pendant trois heures, Louise peut en témoigner - , c'est que le changement de température ne sera pas uniforme. Ces données viennent du Centre climatologique canadien, une partie du groupe de modélisation d'Environnement Canada. Nous avons élaboré un modèle de prédiction climatique de calibre mondial. Si nous utilisons des prévisions raisonnables sur les émissions de gaz à effet de serre et d'autres facteurs, nous pouvons prévoir les changements de température à tout moment et à n'importe quel endroit du globe.
Ces modèles ne sont pas parfaits. Il faut vraiment considérer leurs résultats comme un tableau tracé à grands traits, mais ce qu'il importe de signaler, c'est que les régions qui se réchaufferont le plus sont celles des hautes latitudes de l'hémisphère nord. Les îles de l'Arctique et le centre de l'Amérique du Nord sont les régions qui se réchaufferont le plus, et les régions tropicales celles qui se réchaufferont le moins. Il y a aura toutes sortes de différences, à un point tel que même au milieu du siècle prochain - il s'agit ici de la carte de 2047, dans une cinquantaine d'années - , certaines régions seront encore en train de se refroidir. Dans l'ensemble, nous observerons avec le temps cette évolution progressive du climat à l'échelle planétaire.
Comme pour d'autres phénomènes, il n'y aura pas un simple réchauffement. Les modèles et notre compréhension du fonctionnement du système climatique nous révèlent que les précipitations augmenteront pendant l'hiver sous les hautes latitudes. Selon les prévisions de notre modèle, la côte de la Colombie-Britannique recevra encore plus de pluie en hiver. Mais en été, dans la plupart des cas, les régions continentales de l'intérieur, soit la région productrice de blé des Prairies, verront diminuer les précipitations en été. En tout cas, elles n'augmenteront pas. Comme l'évaporation sera plus forte à cause de la chaleur, il y aura perte nette de l'humidité du sol, de l'humidité disponible pour la culture.
Les autres phénomènes à prévoir concernent davantage ce que nous appelons les «extrêmes». Au cours de l'été dernier, nous avons vu des phénomènes extrêmes divers. Je ne prétends pas que tous, comme les inondations du Saguenay et les tempêtes de grêle de Calgary, sont attribuables au réchauffement de la planète, mais ils donnent une indication de ce à quoi nous pouvons nous attendre, plus fréquemment, dans un climat plus chaud.
Par exemple, il pourrait y avoir des précipitations plus intenses. Nous avons des raisons de croire que, dans diverses régions du globe les sécheresses seront plus fréquentes et plus graves. En somme, si le climat se réchauffe, de légères modifications de la température provoqueront davantage de phénomènes extrêmes.
Permettez-moi de vous donner encore quelques résultats révélateurs. Nous avons déjà vu, par exemple, les pertes économiques attribuables aux catastrophes naturelles. Dans notre coin de la planète, la plupart de ces catastrophes sont dus à ce que nous appelons des phénomènes météorologiques: inondations, sécheresses, tornades, tempêtes de toutes sortes - il y aura une augmentation très marquée. Les assureurs s'inquiètent beaucoup de cette évolution. Parmi les changements, nous pouvons nous attendre à une augmentation des risques de tempête de neige si le climat est plus chaud.
Il y a encore d'autres faits à signaler du côté des effets indirects. En ce qui concerne les effets biologiques, nos hivers froids nous ont en un sens protégés d'un certain nombre de maladies parasitaires ou virales qui sont rares, voire inexistantes, au Canada. Si le climat se réchauffe et si, plus particulièrement, les hivers se réchauffent - et ils se réchaufferont plus que les étés - il y aura accroissement des risques que diverses maladies contagieuses et les virus qui les provoquent ne disparaissent pas avec l'hiver et continuent de se propager au point de menacer davantage la santé. Si nous traçons la carte mondiale de l'avancée de la malaria, nous constaterons qu'il est possible que des problèmes semblables à la malaria se produisent au Canada et que des insectes différents se propagent dans les écosystèmes forestiers.
Dans le nord du Canada, nous constatons déjà, par nos études d'impact dans le bassin du Mackenzie, un recul du pergélisol. Les autochtones nous disent qu'ils ont déjà constaté des changements dans la répartition de la faune et des effets sur les activités en forêt qui modifient de toute évidence leur mode de vie. Ce genre de phénomène risque de devenir plus fréquent à l'avenir. Le niveau des Grands Lacs devrait baisser, par exemple.
Nous faisons quelques études suivies pour mieux documenter l'ampleur et leurs effets socio-économiques et environnementaux. Les rapports sont publiés au fur et à mesure qu'ils sont terminés. Je crois que l'étude sur le bassin du Mackenzie a été mise à votre disposition. Dans un avenir plutôt rapproché, nous allons terminer d'autres études, dont une sur les Grands Lacs et une autre qui porte sur l'ensemble du Canada et dont l'objet est de décrire avec plus de précision les différentes conséquences.
En guise de conclusion, les effets du changement climatique sont importants. Nous les constatons déjà. Un consensus se dégage maintenant chez les scientifiques: les changements climatiques attribuables à l'activité humaine sont une réalité, et ces changements vont s'accélérer au cours des années à venir.
Merci.
La vice-présidente (Mme Payne): Merci beaucoup, monsieur McBean.
Nous allons passer aux questions avant l'exposé de Mme Comeau. Je signale que nous avons un vote à 17 h 30. Nous devrons peut-être accélérer un peu le mouvement.
Avant de poursuivre, je voudrais souhaiter la bienvenue à deux nouveaux membres de notre comité, Mme Daphne Jennings, du Parti réformiste, et à M. Jack Anawak, député ministériel. Tous deux sont de nouveaux membres en titre du comité.
Monsieur Asselin.
[Français]
M. Asselin: Nous sommes en mesure de le constater. Je me rappelle tout particulièrement qu'au Québec, on avait plus de précipitations de neige lorsqu'on était jeunes. Les routes bloquaient. Aujourd'hui, on a de moins en moins de neige et elle tarde à venir à l'automne et, le printemps venu, on dirait qu'elle hésite à repartir. Ceci se traduit par des températures très froides au printemps qui se réchauffent vers le début de juin.
Cette année a été spéciale. Si on compare la température de juin à celle du début de juillet, elle a quand même été très froide.
Des répercussions ont pu se faire sentir sur l'ensemble des activités, dont l'agriculture. Aujourd'hui, l'agriculteur qui fait ses semences au printemps fait face à des problèmes, ne connaissant pas la température qui prévaudra pendant la saison qui vient. Il ne sait pas s'il devra faire face à une sécheresse ou à une inondation comme celle qu'il a connue l'été précédent.
L'exploitation forestière rencontre aussi des problèmes. Ou bien on a un été très pluvieux qui pose des difficultés au niveau des chemins d'accès en forêt, ou bien on a un été de sécheresse qui cause des feux de forêt.
Comment pourriez-vous nous expliquer qu'en même temps, au Canada, il y ait eu une tempête de grêle à Calgary et une inondation au Québec? Mon secteur a été touché par ces inondations. On sait que le Saguenay a été touché, mais la grande région de Charlevoix l'a aussi été. Comment expliquez-vous ce phénomène qu'on observe dans un secteur particulier? Il est certain que les inondations ont été principalement causées par le bris du barrage du lac des Ha! Ha!. Si le barrage a cédé, c'est parce qu'il y a eu un manque de contrôle relativement à l'élévation du niveau d'eau dans les barrages. J'aimerais que vous nous expliquiez cette question que nous inquiète drôlement.
D'un autre côté, je me console en pensant que nos enfants, dans quelques années, vivront peut-être au Canada dans la petite Floride. Ils n'auront pas à pelleter la neige et pourront échanger la souffleuse de leur père contre une tondeuse.
Pouvez-vous nous expliquer le phénomène rare qui s'est produit au Québec cette année, et plus particulièrement les inondations au Saguenay?
[Traduction]
M. McBean: Ce genre de phénomène a toujours existé. C'est une piètre consolation, mais il y a continuellement des inondations et des tempêtes de grêle comme celles-là. Cependant, ces phénomènes deviennent plus fréquents. Nous pensons qu'ils cadrent avec l'évolution à venir, avec ce qui se passe déjà à cause du réchauffement de la planète et des changements climatiques.
Je pense qu'il est important de savoir, comme j'ai essayé de le souligner, que les changements climatiques ne touchent pas tout le pays dans la même mesure et au même moment. Il y aura toujours des différences. Par exemple, si on examine les températures moyennes au Canada au cours de la décennie des années 80 et si on les compare à celles de décennies antérieures, on remarque que certaines régions, comme le Labrador et Terre-Neuve, sont relativement froides. Il peut y avoir un lien avec la disparition de la morue de l'Atlantique Nord. D'autres régions, notamment la vallée du Mackenzie, sont particulièrement chaudes.
L'inondation du Saguenay a été la conséquence de ce qu'on appelle une tempête des latitudes moyennes. Elle s'est produite d'une manière qui est très inhabituelle en été, mais nos modèles informatiques - nous utilisons les mêmes pour prédire le climat et le temps - ont prédit que l'inondation... C'est-à-dire que nous n'avons pas prévu l'inondation. Notre travail consiste à prévoir la quantité de pluie. Je crois que nos prévisionnistes de Montréal ont lancé une alerte de pluies abondantes deux jours avant le début des précipitations. Ils ont effectivement prévu de très fortes pluies.
C'est l'un des phénomènes que nous comprenons assez bien, et nous disons que, selon les lois de la physique, nous pouvons expliquer pourquoi ils se produisent. Nous avons une certaine adresse qui nous permet de les prédire quelques jours à l'avance ou, dans le cas des tornades, quelques heures avant. Ce qui nous préoccupe, dans ce contexte, c'est que, d'après nos modèles, des phénomènes météorologiques comme ceux-là pourraient devenir plus probables à l'avenir.
[Français]
M. Asselin: J'ai une deuxième question, s'il vous plaît.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Asselin, comme le temps presse, pourrions-nous attendre un peu? Pourrions-nous passer à Mme Jennings? Je vous demande de vous en tenir à des questions brèves, et je prierais également M. McBean de répondre brièvement. Merci.
Mme Jennings (Mission - Coquitlam): Merci, madame la présidente.
Bonjour, monsieur McBean. Ce que vous avez dit m'a paru très intéressant. Comme dans le Conte de Noël de Charles Dickens, vous avez presque prédit l'avenir. Mais je ne vous ai pas entendu dire ce que nous pouvions faire pour prévenir ces choses ni quels étaient vos plans. En avez-vous? Sous quel angle est-ce que vous allez aborder la question? Chose certaine, j'espère que vous allez...
La vice-présidente (Mme Payne): Je crois que cela fera partie de la présentation deMme Comeau.
Mme Jennings: Il s'agit d'un exposé à deux? Je suis désolée, mais je n'ai pas entendu votre présentation.
M. McBean: Effectivement. Louise ne travaille pas à Environnement Canada, mais je suis certain qu'elle aura beaucoup de choses à dire à ce sujet. Bien sûr, nous avons élaboré une stratégie pour... Tout se résume sans doute à une seule question. Selon moi, les changements climatiques sont malheureusement inévitables. Il nous faut une stratégie pour ralentir ces changements, et Louise va nous parler de quelques éléments de cette stratégie. Nous devons aussi avoir une stratégie d'adaptation à ces changements climatiques qui, malheureusement, vont se produire de toute façon.
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Knutson.
M. Knutson: Je suis désolé, mais j'ai dû sortir. Excusez-moi si ma question a déjà été posée.
Si on compare le Canada à d'autres pays, quels sont ceux qui prennent les mesures les plus radicales pour limiter les émissions de gaz à effet de serre? Quelles leçons pouvons-nous tirer de leur expérience?
M. McBean: Les réactions varient beaucoup selon les pays, et je pense que Mme Comeau va en parler. Certains pays d'Europe adoptent, pour des raisons diverses, une approche très vigoureuse, tandis que d'autres pays nient le problème, en somme. Ils refusent d'en parler. Entre les deux, il y a toute la gamme des attitudes. Le Canada se situe quelque part entre les deux extrêmes. Nous avons une stratégie visant à réduire les émissions ou au moins à en freiner l'augmentation.
M. Knutson: C'est que je ne vois pas très bien pourquoi... Si le ministre de l'Industrie disait que nous pouvons tirer quelque chose de technologies de pointe dans d'autres pays... Mais il paraît difficile d'amorcer une discussion sur ce que nous pouvons apprendre des autres pays. Je vous demande de nouveau quels pays ou quels États adoptent une approche plus vigoureuse que celle du Canada et ce que nous pouvons apprendre d'eux.
Je sais que le Canada se situe au centre, et nous aimons à croire que nous sommes l'un des chefs de file, dans la communauté internationale, en ce qui concerne l'environnement et toutes ces bonnes causes, mais, à un moment donné, il serait agréable de savoir que tel programme s'applique en Californie ou aux Pays-Bas, que tel type de législation a été adopté dont les Canadiens peuvent peut-être s'inspirer.
M. McBean: Il y en a beaucoup.
M. Knutson: Juste un ou deux exemples.
M. McBean: Il y a en Europe des exemples de technologie. Il y a des exemples d'approche réglementaire dans les lois de nombreux pays. Il n'y a pas qu'un seul exemple. Je pense qu'il faut adopter dans ce dossier une approche qu'on pourrait qualifier de «mixte». Nous pouvons réduire la consommation d'énergie. Par des gains d'efficacité, il y a...
M. Knutson: Pouvez-vous nous donner un exemple de...
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Knutson, Mme Comeau parlera de cela également. Nous avons un vote à 17 h 30, et je voudrais reporter à plus tard les questions dontMme Comeau pourrait parler.
M. Knutson: D'accord.
Vous ne travaillez pas pour le gouvernement, n'est-ce pas?
Mme Comeau: Non.
M. Knutson: Comme parlementaire, je trouve préoccupant qu'un fonctionnaire du gouvernement ne puisse pas me dire ce que nous pouvons apprendre d'autres pays.
M. McBean: Je peux vous répondre.
La vice-présidente (Mme Payne): Si je peux me permettre, M. McBean restera ici pendant l'exposé de Mme Comeau. S'il n'est pas répondu à une question à votre satisfaction au cours de cet exposé, M. McBean pourra répondre. Je sais ce que vous voulez faire, mais, pour aller plus vite, nous essayons d'éviter de revenir deux fois sur les mêmes questions.
M. McBean: Je ne demanderais pas mieux que de répondre, mais je pensais qu'elle allait le faire.
[Français]
M. Asselin: Je suggère que nous passions tout de suite à l'exposé de Mme Comeau, après lequel nous pourrons poser des questions à l'un ou l'autre témoin. Il serait plus facile que la réunion se déroule ainsi.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Payne): C'est probablement une bonne idée. Autrement, nous allons revenir sur les mêmes questions et nous n'avancerons sans doute pas beaucoup. Passons donc à l'exposé de Mme Comeau, et vous pourrez poser des questions sur les deux présentations.
Mme Comeau: Il faut être juste envers M. McBean. Vous demandez aux scientifiques des conseils en matière de politique. D'autres fonctionnaires d'Environnement Canada sont peut-être plus à même de vous parler des politiques. C'est pourquoi je pense qu'il peut y avoir ici une certaine hésitation. M. McBean est excellent dans le domaine scientifique, et il est ici pour vous renseigner, mais les scientifiques répugnent toujours un peu à s'engager dans des discussions de politique.
Pour que les membres du comité sachent à quoi s'en tenir, je vais donner quelques renseignements à mon propre sujet et expliquer pourquoi c'est moi qui suis ici pour faire un exposé au sujet de la politique. Il y a d'autres fonctionnaires à Environnement Canada ou à Ressources naturelles Canada qui pourraient le faire. Toutefois, il y a au Canada des réticences considérables à l'égard des mesures que nous devons prendre pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Le Club Sierra travaille beaucoup depuis cinq ans pour constituer une base solide de renseignements de manière que nous puissions avoir un débat raisonné et éclairé sur les mesures qui s'imposent. Dans le cadre de ce travail, j'ai siégé pendant plus de deux ans à un comité consultatif réunissant les divers groupes intéressés, dont les ministères de l'Énergie et de l'Environnement et des fonctionnaires des quatre coins du pays, ainsi que d'autres intéressés, notamment du secteur de l'énergie.
Nous avons travaillé très fort à l'élaboration d'un train de mesures que le Canada pourrait mettre en oeuvre pour atteindre ses objectifs. Nous n'avons pas pu y parvenir.
Pour donner suite à l'initiative au lieu de se résigner à l'échec, le Club Sierra a approfondi l'analyse et a demandé à Ressources naturelles Canada de lui accorder l'accès à sa technologie informatique. Ce ministère est respecté pour ses prévisions en matière énergétique, et nous voulions que nos modalités d'analyse soient au-dessus de toute discussion. J'ai donc repris exactement l'approche adoptée par les gouvernements dans les études antérieures pour voir comment le Canada pourrait aborder le problème de l'évolution climatique. Nous avons fait un rapport, une analyse qui peuvent être pris au sérieux. Le rapport a été rendu public aujourd'hui. Il utilise l'apport de Ressources naturelles Canada au niveau micro-économique, et nous avons pu recueillir les fonds nécessaires pour retenir les services d'Informetrica afin de faire une analyse globale de l'impact économique.
Les gouvernements ont suivi exactement la même démarche lorsqu'ils se sont interrogés sur ce que le Canada pouvait faire face aux changements climatiques. Je vais donc donner un aperçu très rapide des mesures que nous pouvons prendre.
Pour préciser le contexte, je voudrais informer les députés qu'Environnement Canada vient de publier ses derniers chiffres sur les émissions de gaz à effet de serre au Canada. De 1990 à 1995, nos émissions ont augmenté de 9,5 p. 100. Nous devons les stabiliser d'ici à l'an 2000, mais il est clair que nous n'allons pas dans la bonne direction.
Je signale aux députés que ce taux d'accroissement est deux fois plus élevé que celui des États-Unis et que celui des pays de l'OCDE. C'est là un point important, et je vais y revenir dans un instant pour expliquer comment nous sommes vulnérables aux changements climatiques, qui, je tiens à le signaler se produisent trois fois plus vite au Canada que sur l'ensemble de la planète. Les effets sont très importants dans le bassin du Mackenzie, au Nord-Ouest. Nous sommes aussi vulnérables sur le plan économique.
Je vais également parler de ce que d'autres pays peuvent faire.
Je voudrais vous montrer quelques résultats de cette étude et expliquer nos objectifs. Nous sommes partis de ce que Ressources naturelles et les gouvernements avaient déjà étudié, nous avons essayé de voir à quoi nous arriverions en poussant la recherche un peu plus loin. Je vais donner quelques détails.
Nous avons étudié les gains d'efficacité dans le secteur énergétique, les transports, la construction, le secteur industriel et un recours accru aux énergies renouvelables dans le secteur de l'électricité. J'ai déjà dit que Ressources naturelles et Informetrica avaient réalisé les études micro-économiques et macro-économiques. Sans entrer dans les détails, je vais vous expliquer ce que nous avons essayé de faire. Il y a des programmes qui concernent les immeubles résidentiels et commerciaux, aussi bien les nouveaux que ceux qui sont déjà construits. Le secteur où on peut avoir le plus d'impact au Canada et auquel il faudra s'attaquer un jour ou l'autre, car c'est l'une des mesures les plus importantes que nous puissions prendre, est la modernisation de tout le parc immobilier existant. Il est absolument impossible de respecter nos engagements sans songer à la modernisation de notre parc immobilier.
Nous nous sommes attardés aussi aux transports, car c'est le secteur où les émissions de gaz à effet de serre augmentent le plus rapidement, et non seulement au Canada, mais aussi dans tous les autres pays industrialisés. Les plus grandes réductions que nous avons pu trouver sont celles que permettraient des normes plus exigeantes d'économie d'énergie pour les véhicules. Si ces normes plus sévères s'appliquaient, des économies de 26 millions de tonnes sont possibles. Nous nous sommes aussi interrogés sur la gestion de la demande: quels résultats pourrions-nous obtenir en investissant dans les trains de banlieue, les transports en commun, etc. Nous avons analysé l'impact, si le secteur de l'énergie électrique absorbait la croissance future de la demande au moyen des gains d'efficacité, de la cogénération et de l'énergie renouvelable. Cela donnerait de très beaux résultats.
En dehors du secteur de l'énergie, il y a deux autres sources de gaz à effet de serre: les sites d'enfouissement et le flux des déchets, ainsi que le méthane de la partie amont de la production pétrolière et gazière.
Bien entendu, nous avons étudié l'effet d'une taxe sur les hydrocarbures et d'une modification de la politique fiscale. Je vais en parler tout à l'heure.
Inutile de regarder tous les chiffres. Je vais seulement vous donner le total.
Selon l'analyse de Ressources naturelles Canada, tout le train de mesures permettrait de réduire les émissions de gaz carbonique de plus de 176 millions de tonnes. C'est considérable. Mais, étant donné les projections au Canada - dans ce monde où tout continue comme si rien n'était, ce monde qui sera vraisemblablement identique au cours des 50 prochaines années à celui que nous connaissons depuis 50 ans - tout ce que nous réussissons à faire, essentiellement, c'est éliminer cette croissance. Nous sommes revenus à environ 8 p. 100 de moins que les niveaux de 1990, tellement l'économie canadienne est énergivore.
Le ministère de l'Énergie prévoit une augmentation de 22 p. 100. Nous avons éliminé cette croissance et ramené les émissions à 8 p. 100 de moins que le niveau de 1990.
Voilà les aspects dont il faut prendre conscience.
La demande d'énergie est inférieure de 25 p. 100 aux prévisions, et la consommation d'énergie renouvelable est accrue de 19 p. 100. C'est la direction à suivre et l'objectif que nous essayons d'atteindre.
Si ces mesures avaient été mises en oeuvre en 1995, elles auraient stabilisé nos émissions de gaz à effet de serre aux niveaux de 1990 d'ici l'an 2000. Nous aurions respecté nos engagements internationaux. Nous aurions pu le faire. Cela est maintenant impossible parce que nous n'avons pas commencé à appliquer ce programme.
Nous savons aussi que nous devons réduire les émissions après l'an 2000. Nous avons donc examiné le rôle que pourrait jouer une taxe sur les hydrocarbures. Nous en avons imposée une qui est très faible. Les pays qui respectent leurs engagements en matière d'émissions de gaz à effet de serre imposent tous cette taxe. La Norvège, la Suède et les Pays-Bas en ont tous une. Elle constitue déjà un élément fondamental de leur système économique.
Ce que nous avons fait, c'est neutraliser l'impact de la taxe sur les hydrocarbures en ramenant le taux de la TPS de 7 à 5,5 p. 100. À cause de cela, les mesures prises pour respecter nos engagements en matière environnementale non seulement créeront des emplois, ce dont je parlerai, mais accroîtront aussi le revenu disponible, ce dont je parlerai aussi.
Simplement pour vous montrer à quel point cette taxe sur les hydrocarbures est minime... Ce type de taxe suscite de vives réactions au Canada. Ce ne devrait pas être le cas. Il s'agit d'assurer le développement durable et de progresser dans cette direction. À dire vrai, je n'arrive pas à comprendre pourquoi nous ne pouvons pas discuter de ce qui, selon les économistes, est le moyen d'action le plus efficace.
Une faible taxe sur les hydrocarbures de 20 $ la tonne en 2000, puis de 25 $ en 2005 feraient augmenter les prix de l'électricité de 2 p. 100, ce qui équivaut à environ 0.12 $ le kilowatt. Les montants en cause sont infimes: 1,3¢ le litre d'essence. C'est donc une taxe très faible. Pour des raisons de stratégie, j'ai opté pour la taxe la plus faible parmi toutes celles qui sont appliquées dans le monde.
Comme nous avons utilisé les recettes ainsi recueillies, qui sont très importantes, soit 77 milliards, ce qui compte beaucoup dans le système... Nous nous sommes servis de ces recettes pour réduire la TPS, ce qui a permis d'accroître le revenu disponible. Selon l'analyse, nous produisons une activité économique par les dépenses de programme. C'est qu'on investit dans l'économie canadienne, qui devient plus efficace: les immeubles, les activités industrielles, les transports et le système de prestation des services deviennent tous plus efficaces. La productivité s'accroît, tout comme la compétitivité. Nous créons une demande de produits qui a une influence plus particulièrement dans les secteurs de la fabrication et des services. En tenant compte de l'effet cumulatif, des emplois de 550 années-personnes pourraient être créés d'ici l'an 2000, et encore un million d'ici 2010. Ce sont des résultats très favorables.
Étant donné que notre économie utilise beaucoup d'énergie, on a beaucoup dit que tout ce que nous pourrions faire au Canada aurait des conséquences catastrophiques sur l'économie. Le résultat le plus important des travaux de Carl, à mon avis du moins, c'est que, peu importe ce que nous ferons au sujet des changements climatiques, ce programme ne modifie que de plus ou moins 1 p. 100 la taille que notre économie devrait avoir en 2010.
L'impact négatif, même en Alberta, est de moins de 1 p. 100. Ce que Carl a expliqué, c'est que, si les choses se passent comme nous le prévoyons tous, l'économie de 2010 devrait être de 35 à 45 p. 100 plus importante qu'aujourd'hui. C'est ce que nous prévoyons. Si nous appliquons ce programme, l'économie, dans la région qui risque de souffrir le plus, l'Alberta, sera tout de même de 34 à 44 p. 100 plus importante qu'aujourd'hui.
Les inquiétudes dont on fait état relèvent donc davantage du mythe que de la réalité.
Sur l'emploi, le résultat est fascinant. Nous ferons progresser l'emploi même en Alberta parce que nous passerons d'une production à forte intensité de capital, par exemple dans l'exploitation des sables bitumineux, à une économie qui reposera beaucoup plus sur les services et l'énergie renouvelable, ce qui demande beaucoup plus de main-d'oeuvre.
Voilà le genre de choses que nous avons essayé d'examiner et de comprendre dans notre étude.
Je voudrais vous faire part des dernières prévisions de Ressources naturelles Canada, pour que vous vous fassiez une idée de l'importance de la dynamique en cause. Je donnerai ensuite mes recommandations et je tirerai une conclusion.
Tous les deux ans, Ressources naturelles Canada analyse l'économie. Comment devrions-nous évoluer? En fait, ce sont les conceptions de Carl Sonnen qui sont reprises, et on essaie de voir quels seront les taux d'intérêt, la croissance économique, la croissance démographique, les cours pétroliers mondiaux. Toutes ces données sont fournies aux modèles informatiques, et on obtient des prévisions en matière de consommation d'énergie. Nous sommes actuellement en train de préparer la prochaine étape, et les résultats seront disponibles en 1996.
On constate que, puisque nous avons relevé les normes d'efficacité énergétique des immeubles, la demande d'énergie ne va pas augmenter. Elle demeurera stable dans le secteur résidentiel. Au lieu d'avoir une demande qui augmente jusqu'en 2020, nous avons dans ce secteur une demande stable.
Étant donné que notre programme prévoit une certaine modernisation dans le secteur résidentiel, la consommation d'énergie sera encore réduite. Ce qu'il y a de fascinant et que je voudrais faire remarquer, c'est que nous prévoyons une augmentation de la demande d'énergie de 21 p. 100 dans le secteur commercial d'ici l'an 2020. Ce que nous pourrions obtenir, en modernisant les immeubles, c'est une réduction de 17,7 p. 100.
L'avenir n'a pas à répondre à un ensemble donné de prédictions. C'est une manière d'envisager le monde, et nous en avons une autre qui pourrait aider le Canada non seulement à contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi à développer une technologie propre à renforcer notre compétitivité internationale.
Dans l'industrie, les experts de Ressources naturelles Canada s'attendent à une augmentation de 60 p. 100 d'ici l'an 2020. Il s'agit d'un secteur énorme, au Canada. Nous avons une industrie à forte intensité d'énergie, et nos initiatives...
M. Finlay (Oxford): Quelle est la différence entre la demande d'énergie et l'intensité d'énergie?
Mme Comeau: La demande d'énergie correspond au total de l'énergie utilisée. L'intensité se calcule en divisant le total par le PIB ou, s'il s'agit d'un bâtiment, par le nombre de pieds carrés. Combien d'énergie utilise-t-on par pied carré dans un immeuble commercial? Combien d'énergie utilisez-vous pour fabriquer un produit d'un dollar? C'est ainsi qu'on calcule l'intensité.
On peut constater que nous améliorons lentement notre efficacité par produit ou par dollar de production, mais la croissance de la population et celle de l'économie, etc. résorbent à peu près tous ces gains. Nous ne parvenons pas à opérer les réductions nécessaires.
Le défi, pour le Canada, consiste à accélérer le processus pour que le rythme de l'amélioration de l'efficacité dépasse celui de la croissance. C'est la tâche qui nous attend. En réalité, c'est ce qui se passe dans l'économie des pays qui agissent dans ce dossier. Nous verrons cela plus tard.
Nous avons réduit la demande industrielle de 5,7 p. 100. Ce n'est pas autant que je l'aurais souhaité, mais c'est le secteur où nous avons eu le plus de mal à voir comment il fallait aborder le problème.
Dans les transports, les experts prédisent que la demande d'énergie augmentera de 32 p. 100 d'ici l'an 2020. Nous avons réalisé une réduction de 26 p. 100.
C'est un défi à relever pour le Canada. Vous voyagez tous au Canada, comme je l'ai fait. On constate à quel point nous dépendons de la voiture. Non seulement nous construisons nos villes en fonction de la voiture, mais c'est aussi la dispersion qui caractérise l'aménagement du territoire. C'est un défi de taille. Mais nous ne voyageons pas tous les jours entre Halifax et Toronto. Nous pouvons accroître notre efficacité dans le transport urbain et utiliser davantage le train pour le transport interurbain. Il y a de vraies possibilités dans le secteur des transports.
Après avoir donné cette vue d'ensemble, je voudrais parler de ce que nous avons essayé de faire au moyen de cette analyse. Voici l'approche que nous proposons.
Soit dit en passant, j'ai déjà commencé à donner des séances d'information à Anne McLellan, parce qu'elle a eu la bonté d'appuyer ces travaux, sans doute parce qu'elle reconnaît la valeur de la contribution que le Club Sierra a faite par le passé.
Nous pouvons lancer un grand débat sur votre étude et la mienne, sur vos hypothèses et les miennes, par exemple. Le Canada a besoin d'acquérir de l'expérience. Nous devons dépasser le stade des argumentations et des discussions pour essayer d'acquérir une expérience concrète sur le terrain.
Bien des gens disent, des économistes me le répètent sans cesse: s'il y a autant de gains d'efficacité à réaliser, tant d'occasions d'économiser de l'argent, pourquoi n'en profitons-nous pas? S'il suffisait de se pencher pour ramasser l'argent, nous l'aurions fait. Dans les faits, il y a des obstacles qui empêchent une pleine compréhension de ces possibilités. Nous proposons donc l'approche du projet pilote.
Ce que l'étude nous a appris, c'est que chaque province, dépendant des types de carburant qu'elle utilise, de la variété de ses activités économiques, a des occasions différentes à saisir pour limiter les émissions. Par exemple, en Colombie-Britannique, au Québec, en Ontario, au Manitoba et même dans les Maritimes, les possibilités sont particulièrement bonnes dans le secteur des transports. En Alberta, en Saskatchewan et en Nouvelle-Écosse, les services d'utilité publique utilisent du charbon; les énergies renouvelables constituent donc des possibilités plus importantes. Dans le secteur industriel, les vraies possibilités se trouvent en Ontario et en Alberta.
Ce que nous proposons... je fais partie d'un comité auquel participent les ministères fédéraux et provinciaux de l'Énergie et de l'Environnement de tout le pays. Je leur ai soumis cette proposition. Étant donné les compressions et l'attitude des ministères à l'égard des dépenses de programme, il semble que ce soit une approche qui pourrait nous faire avancer. Chaque province - je parlerai du gouvernement fédéral tout à l'heure - accepterait de réaliser un ou deux projets pilotes qui leur seraient très bénéfiques pour effectuer des réductions. L'information recueillie pourrait être communiquée à tous les autres gouvernements et nous choisirions les projets qui semblent prometteurs pour les reprendre ailleurs. L'information serait partagée et utilisée dans tout le pays. De cette manière, nous pourrions peut-être réaliser une dizaine ou une quinzaine de projets dans tout le pays et nous accumulerions une expérience concrète, ce qui nous aiderait à évaluer les coûts et avantages réels. Nous pourrions aussi régler les petits problèmes qui peuvent se poser.
C'est là une approche que nous proposons. Une autre chose qui est en train de se produire maintenant - et le GIEC l'a affirmé très nettement - c'est que nous prenons conscience qu'il ne faut laisser filer aucune occasion. Nous envisageons de permettre au Canada une plus grande concurrence sur le marché de l'électricité. Je crois que c'est excellent. C'est là une possibilité passionnante pour le Canada. Le problème, c'est qu'il faut veiller à ce que les mécanismes, tout en stimulant la concurrence, comportent un cadre réglementaire qui ménage une place aux énergies renouvelables et à la gestion de la demande.
Par exemple, la Californie envisage de réserver pour les énergies renouvelables une part du marché; une partie des besoins serait satisfaite au moyen des énergies renouvelables. Nous ne pouvons pas laisser le marché de l'électricité se restructurer sans prendre cette précaution. L'électricité est l'élément clé indispensable pour les énergies renouvelables.
L'autre grande mesure était celle des normes d'économie d'énergie pour les véhicules. Les Américains ont établi ces normes par l'entremise des «trois grands» de l'automobile, et le Canada les a adoptées volontairement. Il n'y a eu aucune amélioration réelle sur ce plan depuis les années 80. Nous proposons que le gouvernement canadien entame immédiatement des négociations avec les États-unis sur l'adoption de normes plus exigeantes.
Lorsque j'ai remis à Paul Martin un exemplaire de notre rapport à la réunion de la table ronde nationale, vendredi, il m'a dit que nous étions sur le point d'entamer une étude sur la réforme fiscale. Ce que nous voudrions, c'est une taxe sur les hydrocarbures qui soit compensée par une réduction de la taxe sur les produits et services.
Nous proposons aussi que le budget fédéral comporte des modifications de la fiscalité pour que le traitement réservé aux énergies renouvelables soit identique à celui des énergies classiques. Cela est clair, et Ressources naturelles Canada admet qu'il y a un écart entre le traitement des énergies renouvelables et classiques.
Ce que nous espérons, c'est que d'ici novembre, au moment de leur réunion, les ministres de l'Énergie et de l'Environnement reprendront certaines de ces idées et les mettront en oeuvre pour que nous puissions commencer à réduire nos émissions.
Si je m'inquiète, c'est parce que, dans les négociations internationales, nous commençons à remarquer des positions beaucoup plus fermes de la part des États-Unis au sujet de l'éventualité de réductions plus fortes après l'an 2000. Ils viennent de laisser entendre qu'ils ont l'intention d'appuyer un protocole exécutoire après l'an 2000. L'Allemagne tient compte de cette réduction dans le cadre de sa stratégie industrielle, et le Japon aussi. Ce pays sera l'hôte de la troisième conférence, où nous signerons un protocole. Leur opinion est qu'il s'agit d'une question de technologie, et ils réclament un élément technologique très fort à l'intérieur du protocole. On peut comprendre pourquoi. L'enjeu, c'est le commerce, l'économie, les emplois, les affaires.
Comme les émissions du Canada augmentent deux fois plus vite que celles des États-Unis et des pays de l'OCDE et quatre fois plus vite que celles de toute la planète, je crains que nous ne soyons de plus en plus vulnérables devant les demandes qui pourront être faites dans les négociations internationales pour que nous fassions des réductions plus importantes que celles d'autres pays. Nous sommes extrêmement vulnérables.
Ce que nous avons essayé de faire, c'est analyser d'une manière qui puisse être prise au sérieux des initiatives que le Canada peut prendre. Nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions.
La vice-présidente (Mme Payne): Merci.
Avant de passer aux questions, nous devrions probablement écouter l'exposé de M. Sonnen.
Avez-vous une présentation à faire?
M. Carl Sonnen (président, Informetrica): Non, madame la présidente. On m'a demandé de venir à titre de personne-ressource.
La vice-présidente (Mme Payne): Très bien. Merci. Dans ce cas, nous allons continuer les questions de ce côté-ci.
Monsieur Knutson, vouliez-vous...
M. Knutson: Non, je laisse passer.
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Steckle.
M. Steckle (Huron - Bruce): Je relève le défi. Tout cela est plutôt technique, pour nous.
La question qui me vient à l'esprit est la suivante: comment se fait-il que nos émissions de gaz à effet de serre soient plus importantes que celles des États-Unis? Notre population est plus faible. Nous n'avons pas autant d'industries que les États-Unis. Est-ce que c'est à cause de nos conditions climatiques? Parce que nous avons des températures plus froides?
Je voudrais aussi poser une autre question. Le Canada devrait- il envisager de participer au projet ITER, d'être l'hôte de projets de fusion nucléaire? La première étape se déroule en Angleterre, bien entendu, mais le Canada devrait-il envisager la fusion nucléaire comme source d'énergie de l'avenir?
Mme Comeau: À propos des États-Unis, je tiens à être claire. Ce que je dis, c'est que le taux d'augmentation des émissions au Canada est deux fois plus élevé qu'aux États-Unis. Ce pays est celui qui émet le plus de gaz à effet de serre; il est la source de 25 p. 100 des émissions de la planète. C'est énorme. Mais les États-Unis font davantage d'efforts que le Canada pour accroître l'efficience et utiliser les énergies renouvelables. Au Canada, nous n'avons installé qu'une seule éolienne l'an dernier.
M. Finlay: Dans ma circonscription.
Mme Comeau: Si j'avais été intelligente, je l'aurais su.
Des voix: Oh, oh!
Mme Comeau: Les Américains font des efforts plus vigoureux que nous pour utiliser l'énergie plus efficacement. Ils ont un programme feux verts, un programme qui concerne les moteurs, un autre qui porte sur les services d'utilité publique. Il y a plus d'activité, une plus grande acceptation aux niveaux industriel et commercial. Dans les transports, ils n'ont pas progressé. C'est leur talon d'Achille.
M. Steckle: En ce moment, nous sommes sur le point d'interdire le MMT.
Mme Comeau: Oui, mais cela ne va pas m'aider à accroître l'efficacité.
En ce qui concerne le nucléaire, l'approche adoptée par des groupes comme le Club Sierra et même par le groupe intergouvernemental est qu'il vaut mieux rechercher les solutions les moins coûteuses. Nous ne voyons pas pourquoi nous aurions recours aux solutions qui coûtent le plus cher alors qu'il y a abondance d'énergie peu coûteuse. Il y a tant de gains d'efficacité qu'il est possible de réaliser à bon marché. En comparaison, les énergies renouvelables sont préférables, car parce que la technologie nucléaire s'avère tellement coûteuse.
Je n'ai pas d'opinion arrêtée. Je n'ai pas la compétence pour vous parler de la filière de la fusion nucléaire.
M. McBean: Je suis d'accord avec Louise pour dire que l'idée de se lancer dans un programme très coûteux comme la fusion nucléaire n'a pas vraiment beaucoup de sens dans le contexte qui est le nôtre. Il y a des moyens beaucoup plus économiques de réduire les émissions.
M. Steckle: Mais y aurait-il lieu de poursuivre ces recherches scientifiques, étant donné que les résultats ne se concrétiseront probablement pas dans les 50 prochaines années, de toute manière?
M. McBean: Comme scientifique, je dirais que c'est une question que nous devons examiner, mais nous devons le faire dans l'optique du progrès scientifique et non y voir une éventuelle solution au problème qui nous occupe ici.
La vice-présidente (Mme Payne): Merci.
C'est à vous, monsieur Finlay, et ce sera ensuite M. Anawak.
M. Finlay: Merci, madame la présidente. Je voudrais revenir un instant à M. McBean.
Ce sont des augmentations alarmantes qu'on voit sur ces graphiques. Je crois comprendre qu'elles sont prévues en fonction de la situation actuelle et que vous n'avez apporté aucun rajustement pour tenir compte du fait que nous avons dit que nous allions ramener nos émissions, d'ici l'an 2000, au niveau de 1990, et d'ici l'an 2005, au niveau de 1988. Est-ce que ce n'est pas l'engagement que nous avons signé il y a un certain temps?
J'ai soulevé la question à la Chambre parce que nous ne pourrons jamais y arriver. J'ignore si nous continuons à nous leurrer, mais je crois, monsieur McBean, que ces chiffres ne tiennent pas compte de ces réductions.
M. McBean: Nous avons illustré une série de scénarios élaborés à partir de divers niveaux d'émissions à l'échelle de la planète. J'ai essayé de souligner que, même si nous limitons nos émissions, comme il est prévu par la convention sur le climat, la quantité de gaz carbonique dans l'atmosphère aura tout de même doublé un peu après l'an 2100, et il y aura tout de même des changements climatiques. C'est ce qui arrivera même si tous les pays du monde limitent leurs émissions au niveau de 1990 en l'an 2000 et ne les accroissent jamais par la suite.
M. Finlay: La progression atteindra ensuite un palier.
M. McBean: Oui, éventuellement. Ce palier serait atteint au début du XXIIe siècle. C'est réconfortant.
Je ne dis pas qu'il n'est pas important de réduire les émissions. Nous devons les réduire pour freiner les changements climatiques. Mais le climat se réchauffe et continuera de se réchauffer.
M. Finlay: Votre comparaison avec le déficit était excellente, mais elle m'a rappelé un fait qui me paraît véridique à propos de l'appauvrissement de la couche d'ozone. Même si on élimine toutes les émissions de fluorocarbures et d'autres substances qui la détruisent, la couche d'ozone va continuer de s'appauvrir pendant un certain temps, jusqu'à ce que ces molécules se dispersent ou soient détruites.
M. McBean: Effectivement. La molécule de fréon a à peu près la même durée de vie que la molécule de gaz carbonique, c'est-à-dire une centaine d'années. De ce point de vue, le problème est semblable.
M. Finlay: Merci.
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Anawak, s'il vous plaît.
M. Anawak (Nunatsiaq): Merci, madame la présidente.
Lorsque vous présentez une liste de dix provinces sans aucun des territoires, surtout quand il s'agit d'augmenter les taxes sur l'essence ou l'électricité, cela me semble toujours un peu décourageant. Au Canada, c'est dans le Nord, et surtout dans la région que je représente, que la vie coûte le plus cher. Je me demandais si vous préconisiez une augmentation des taxes sur l'essence parce qu'il est possible de faire des économies d'énergie. Est-ce qu'on a tenu compte du Nord, étant donné que c'est chez nous que la vie est la plus chère?
Mme Comeau: Oui. En fait, si vous ne le voyez pas, malheureusement, c'est en partie à cause des modalités d'analyse de Ressources naturelles Canada. L'analyse a porté sur toutes les régions du Canada, mais, pour la faire, on regroupe en une seule entité la Colombie-Britannique, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, tout comme on regroupe les provinces de l'Atlantique. Les uns et les autres se plaignent, mais c'est ainsi que l'analyse se fait.
Nous avons étudié les diverses possibilités. Donnez-moi un instant pour m'y retrouver. Je peux le retrouver rapidement, je connais bien mon rapport.
M. Anawak: Pendant ce temps, je vais continuer.
Je sais que certains programmes expérimentaux en énergie éolienne sont en cours. Votre groupe ou des organismes du gouvernement ont-ils d'autres plans en vue de harnacher l'énergie éolienne ou d'exploiter d'autres sources d'énergie dans le Nord?
En ce moment, la seule source d'électricité dans la région que je représente, ce sont les carburants fossiles et les génératrices alimentées au mazout. Y a-t-il d'autres plans à appliquer?
Mme Comeau: Je crois que le programme dont vous parlez s'appelle PV for the North. Ressources naturelles Canada l'a annoncé l'an dernier. Nous avons encouragé la ministre à... Si vous pouviez nous accorder votre appui... Elle est sur le point d'annoncer une stratégie canadienne des énergies renouvelables qui englobe PV for the North et peut-être l'acquisition de produits verts.
Vous avez peut-être entendu parler de cette notion. Il s'agit d'un programme dans le cadre duquel les gouvernements fédéral et provinciaux exigent du marché qu'une partie de l'électricité provienne de sources d'énergie renouvelables et que des changements soient apportés en matière de recherche et développement.
Comme Ressources naturelles Canada refuse de me donner des indications sur les objectifs visés - le ministère refuse de me dire combien il va dépenser et dans quelle mesure il veut recourir aux énergies renouvelables - nous demandons qu'un objectif soit fixé. Le Canada a besoin d'un objectif en matière d'énergies renouvelables. Si on ne sait pas où on va, on ne va nulle part. Nous espérons donc que, lorsque la stratégie des ressources renouvelables sera annoncée, elle comportera un objectif pour le Canada.
Nous constatons que les gouvernements des Territoires du Nord- Ouest et du Yukon sont très en faveur de l'option de l'énergie renouvelable, étant donné que l'électricité coûte très cher, soit 22¢ le kilowatt-heure dans les Territoires du Nord-Ouest, parce qu'elle est produite au carburant diesel. C'est de ce côté que se situent les vraies occasions d'assurer l'efficacité par rapport au coût.
L'autre raison qui fait que Mickey Fisher et Steve Kakfwi nous appuient tous les deux, c'est que des changements climatiques se produisent dans leur territoire. J'ai reçu de la correspondance du gouvernement du Yukon dans laquelle s'exprime une vive inquiétude quant aux conséquences des feux de forêts sur cette région. Comme je n'ai pas les chiffres sous les yeux, je ne peux pas vous dire quel est le potentiel dans les Territoires du Nord-Ouest, mais on peut certainement se procurer ces chiffres et ces renseignements auprès de Ressources naturelles Canada
M. Adams (Peterborough): Je vous prie d'excuser mon retard.
J'ai écouté avec intérêt la dernière partie de votre présentation et j'ai lu les documents. Une chose m'intrigue. Il s'agit peut-être d'une question technique ou vous avez peut-être déjà abordé le sujet, mais vous parlez de l'augmentation des émissions et vous dites que la part de l'industrie pétrolière atteint peut-être les 50 p. 100. Plus loin, on lit dans le rapport que le secteur des transports «semble» être responsable des autres 50 p. 100 de la croissance des émissions. Étant donné le ton très confiant du reste du rapport, je me demande pourquoi cette affirmation est aussi dubitative.
Mme Comeau: C'est que, étant donné le travail que je fais, je finis par effectuer des sortes d'analyse. Nous sommes maintenant au beau milieu d'une recherche avec Ressources naturelles Canada, qui, avec les gouvernements fédéral et provinciaux, analyse les résultats du Canada. Nous avons eu un programme d'action national sur le changement climatique; quels ont été nos résultats?
Il s'agit de chiffres préliminaires. Nous ne connaissons pas toute la réponse, parce qu'il arrive encore des données. Les premiers chiffres qui ont été donnés, ceux de 1995, par exemple, sont encore plutôt préliminaires. On est en train de les arrêter définitivement. Ensuite, nous voyons comment la croissance a eu lieu, comment nous sommes passés de là à ici, comment cela s'est produit. Il s'agit ici d'une première analyse. Le travail ne sera terminé que plus tard à l'automne. C'est ce qui explique l'incertitude.
M. Adams: Comment se fait-il, donc, que vous puissiez calculer le total de la demande d'énergie dans les transports, son accroissement et ainsi de suite? Si vous connaissez déjà tout cela... Je ne cherche pas la petite bête. Je trouve ce fait assez frappant. Vous m'avez donné une explication, mais, ailleurs, vous donnez le calcul de la demande totale d'énergie dans les transports et de sa croissance. Si les chiffres sont donnés sous toute réserve à un endroit, pourquoi les calculs témoignent-ils d'une telle confiance ailleurs?
Mme Comeau: C'est compréhensible. D'un côté, nous sommes dans le monde des prévisions en matière d'énergie, et de l'autre, nous sommes dans le monde concret. Le monde concret, ce sont les données d'Environnement Canada sur les émissions - 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, 1995. Les prévisions reposent sur un ensemble d'hypothèses. On fournit telle ou telle donnée au système, qui établit des prévisions.
Les prévisions peuvent sembler plus concrètes, mais la réalité, c'est qu'il est difficile de connaître la vérité. Les prévisions ne sont qu'un scénario du monde futur, mais nous ne pouvons pas prédire l'avenir.
Même si Ressources naturelles Canada dit que, au vu de nos hypothèses sur les améliorations et l'efficacité énergétique des voitures, le nombre de milles-véhicules parcourus, la croissance économique... Toutes ces données sont fournies à l'ordinateur, qui calcule la croissance prévue de la demande d'énergie. Cela, c'est le monde de l'avenir. Environnement Canada dit: «D'accord, vous pouvez faire ces calculs», mais ce ministère recueille chaque année des données concrètes, et ces faits sont indiscutables.
Tout ce que je veux dire, c'est qu'il y a encore des données finales qui entrent au sujet de la croissance réelle des cinq dernières années. Le ministère a publié des données partielles. Les experts pensent que les choses se sont passées de telle manière, mais ils restent sur leurs gardes en attendant de mettre la dernière main à leur rapport et de faire examiner les résultats par des pairs. Cela demande beaucoup de temps. Il y a beaucoup d'examens par les pairs, beaucoup de réactions et de réunions dans tout le pays avec des experts, de manière à acquérir la certitude que les chiffres sont justes.
M. Adams: C'est d'une clarté remarquable. Si je puis me permettre, moi qui m'intéresse beaucoup à ce que vous faites et considère tout cela avec beaucoup de sympathie, je voudrais vous rappeler que, lorsque vous nous parlez - sans vouloir manquer de respect aux parlementaires - , vous vous adressez aussi, par notre entremise, à un grand groupe que nous représentons, à l'auditoire, aux Canadiens. Je vous exhorte, à cause de mes collègues... Vous avez pu constater par leurs questions qu'ils essaient de faire la même chose... Si vous pouvez présenter ce dossier de manière que nous puissions comprendre, il y a de bonnes chances que tous pourront comprendre.
Des voix: Oh, oh!
M. Adams: Cela est très important pour vous.
Merci, madame la présidente.
La vice-présidente (Mme Payne): Vous avez tout à fait raison, monsieur Adams.
M. Adams: Elle me met dans le même panier.
La vice-présidente (Mme Payne): Ce sera Mme Jennings, puis M. Asselin.
Mme Jennings: Merci, madame la présidente. Maintenant que j'ai entendu le pour et le contre, je viens de remarquer quelque chose à la page 38, au chapitre intitulé Background. Je remarque que vous avez donné seulement une partie de la réponse. Vous dites que les incendies ont été si graves ces dernières années, dans les cinq dernières années... C'est le pire bilan. Vous ajoutez que les glaces de la mer Arctique ont diminué de 5 p. 100. Il y a des températures exceptionnellement douces, des modifications des courants marins, l'effet El Nino.
Il y a donc tous ces phénomènes. Pourtant, M. McBean a dit, c'est en tout cas l'impression que j'ai eue, que le fait le plus significatif de tous a été l'influence humaine. Faut-il mettre au compte de l'homme tout ce qui s'est passé? Est-ce que c'est nous qui avons provoqué toutes ces choses? Est-ce que c'est en dépit de ce que nous avons fait, ou en plus de tout ce que nous avons fait?
Mme Comeau: Je voudrais m'assurer que mon rapport, au moins, est clair. Je dis que l'influence humaine, notre consommation d'énergie, provoque les changements climatiques, et ce sont là quelques-uns des phénomènes qui commencent à se produire... comme les feux de forêt.
Mme Jennings: À cause de ce que nous avons fait?
Mme Comeau: C'est juste. Il s'agit de la consommation d'énergie, de l'émission des gaz dans l'atmosphère. Cela modifie le climat, qui devient plus chaud, plus sec...
Mme Jennings: Les feux de forêt, dans la mesure où ils sont...
Mme Comeau: C'est exact, et, selon les prévisions, nous pouvons nous attendre à une forte augmentation du nombre de feux de forêt au Canada, parce que le temps sera plus chaud et plus sec. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais c'est de ces phénomènes- là que les scientifiques parlent et que nous devons nous préoccuper.
Mme Jennings: Encore un instant, madame la présidente. Je dois donc conclure que, d'après ce que vous dites, ces phénomènes vont se poursuivre et vont même s'aggraver si nous n'agissons pas bientôt pour corriger le cap.
Mme Comeau: C'est exact.
Je voudrais qu'une autre chose soit claire, car je comprends bien votre point de vue. Une partie de mon exposé d'aujourd'hui a été plus technique que d'habitude, partiellement parce que j'ai déjà fait cet exposé ici et que je craignais de vous ennuyer en me répétant, mais je comprends ce que vous voulez dire. Je viens de perdre le fil de mes idées...
M. Adams: Madame la vice-présidente, pourrais-je faire une autre observation? À propos de votre deuxième point, votre présentation a été excellente. Vous n'avez pas à faire des excuses. Ce sont des conseils qui partent d'une bonne intention. La présentation a été excellente.
Mme Comeau: Merci, je vous suis reconnaissante.
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Asselin.
[Français]
M. Asselin: L'exposé de M. McBean était très intéressant, mais j'aurais souhaité qu'il précise davantage sa pensée. Nous avons manqué d'un peu de temps pour vous écouter. Il est drôlement intéressant de se préoccuper de l'avenir et de l'effet de serre. Si l'on étudie ces deux aspects à la fois, on voit qu'ils peuvent se compléter. Mme Comeau a elle aussi dû considérablement accélérer sa présentation et certains renseignements nous manquent. Le temps nous bouscule.
Madame Comeau, on vient de nous remettre un document daté de septembre 1996 dont vous êtes l'auteure. Le document est encore tout chaud; je pense qu'il sort de l'imprimerie.
Êtes-vous ici aujourd'hui pour faire un exposé sur votre manuel ou si votre participation est conséquente à une invitation du Comité permanent de l'environnement?
[Traduction]
Mme Comeau: Absolument. C'est une présentation dont le but est de vous expliquer les résultats de ces travaux.
[Français]
M. Asselin: D'accord, vous avez été invitée par le Comité permanent de l'environnement. En parcourant ce volume, on peut constater qu'il a exigé énormément de recherche. Il me semble très bien fait. C'est un manuel de référence qui doit être utile à toute personne préoccupée par l'environnement. J'aimerais connaître la participation du gouvernement, soit le ministère de l'Environnement ou le gouvernement lui-même, au niveau de la recherche et de la rédaction d'un pareil manuel. Quelle est la contribution financière du gouvernement?
[Traduction]
Mme Comeau: Oui. Je pense que, si cette étude a été financée, c'est en partie parce qu'elle donnait au gouvernement l'occasion d'obtenir une information qu'il ne pouvait pas, pour des raisons politiques, se procurer lui-même.
Par exemple, on a officiellement empêché Ressources naturelles Canada d'étudier une taxe sur les hydrocarbures à cause d'une déclaration quelconque que, a-t-on cru, le premier ministre aurait faite à l'Association canadienne des producteurs pétroliers. C'est un fait.
Il y a au Canada un débat si intense sur ce que nous allons faire au sujet des changements climatiques que le gouvernement est paralysé. J'estime que l'aide que j'ai reçue pour ces travaux est une manière que les gouvernements ont trouvée pour continuer d'alimenter le débat. Je suis très heureuse de ce soutien. Voici comment les choses se sont passées. Lorsque le...
[Français]
M. Asselin: Je me permets de vous interrompre parce que le temps passe et que je crains de ne pouvoir vraiment vider la question. Vous avez obtenu un contrat en tant que compagnie sous-traitante pour exécuter un travail pour le gouvernement, un travail rémunéré par le gouvernement.
[Traduction]
Mme Comeau: Non. Voici comment cela s'est passé. J'ai fait une proposition à Environnement Canada, lui demandant s'il appuierait le Club Sierra dans ces travaux, et il a accepté. Ce ministère a accordé un soutien financier. J'ai communiqué avec le ministère des Ressources naturelles pour lui demander s'il aiderait le Club Sierra en lui donnant accès à sa technologie informatique, et la ministre a dit oui.
J'ai ensuite pressenti les responsables du fonds communautaire d'Ontario Hydro. Notre groupe environnemental est reconnu comme organisme de charité et fait appel à divers programmes gouvernementaux, fondations ou programmes de soutien communautaire des sociétés pour obtenir les ressources nécessaires à l'exécution de ses travaux. Je me suis adressée à Ontario Hydro. J'ai ainsi pu engager Carl et lui confier l'analyse macro-économique, parce que les responsables du programme communautaire d'Ontario Hydro ont accepté ma proposition et ont accordé une aide financière au Club Sierra pour faire ce travail.
Trois groupes ont donc contribué: Ressources naturelles n'a pas donné d'argent, mais une contribution en nature; Environnement Canada a consenti une aide financière dans le cadre des programmes qui lui permettent d'aider les groupes environnementaux à faire divers travaux; et enfin le programme communautaire d'Ontario Hydro, qui a soutenu l'étude macro-économique. Voilà comment nous avons pu faire l'étude.
[Français]
M. Asselin: D'accord. Puisque le gouvernement fédéral a participé à la réalisation de ce document, sera-t-il traduit en français dans un deuxième temps?
[Traduction]
Mme Comeau: En fait, le rapport sera probablement traduit par le gouvernement québécois grâce à mes contacts au Québec. Je travaille en étroite collaboration avec les écologistes québécois. Nous allons veiller à ce que le rapport soit traduit.
[Français]
M. Asselin: Dans ce dossier, le gouvernement fédéral n'exigeait-il pas dès le départ le dépôt d'un document dans les deux langues officielles du Canada?
[Traduction]
Mme Comeau: Non.
[Français]
M. Asselin: Strictement en anglais?
[Traduction]
Mme Comeau: Non. Bien sûr que non. C'est une chose qu'on ne prévoit jamais dans un contrat. Je n'ai eu qu'un très faible montant pour faire l'analyse. Malheureusement, le Club Sierra n'a pas... Pour vous montrer que la question me préoccupe, je vous dirai que j'ai dépensé 1 000 $ pour traduire des documents, pour que vous puissiez avoir dès aujourd'hui le communiqué et les faits saillants.
Nous faisons des efforts, mais j'explore aussi d'autres avenues pour veiller à faire traduire l'ensemble du rapport. J'ai bon espoir que le gouvernement québécois le fera pour venir en aide aux environnementalistes du Québec.
M. McBean: Personnellement, je n'ai rien eu à voir avec ce contrat. Sauf erreur, Environnement Canada a versé de l'argent au Club Sierra pour qu'il fasse certaines études, mais pas pour rédiger un rapport et pas nécessairement non plus pour faire une présentation à votre comité. Le greffier m'a invité à titre individuel, tout comme Louise Comeau a été invitée. Il ne s'agit pas d'un contrat qu'Environnement Canada aurait accordé au Club Sierra. Dans le cadre de nos activités courantes, nous aidons un certain nombre de groupes environnementaux dans leurs activités qui nous semblent utiles, menées par des organisations non gouvernementales écologistes. Cette aide s'inscrit dans ce type de soutien.
La vice-présidente (Mme Payne): Monsieur Knutson.
M. Knutson: Monsieur McBean, je ne sais pas si je suis le seul à avoir été frappé par ce que vous avez dit, mais est-il vrai qu'on a déjà empêché Environnement Canada de faire des recherches de politique au sujet d'une taxe sur les hydrocarbures?
M. McBean: Non, je ne pense pas qu'on nous ait jamais empêché. Nous avons envisagé divers moyens économiques. J'hésite à commenter parce que ce n'est pas le domaine dont je m'occupe à Environnement Canada. Je m'occupe des sciences des changements climatiques et du service météo. Mme McKenzie, qui représente ici Environnement Canada, s'occupe des services où on fait ce genre de travail. Je sais pour sûr qu'Environnement Canada a étudié toute une gamme de moyens économiques, de taxes sur les hydrocarbures et autres moyens dans ce cadre. Nous avons estimé qu'il convenait d'examiner comment on peut encourager ces types d'utilisation de l'énergie, des énergies renouvelables notamment, par des moyens économiques, pour pouvoir réduire la consommation d'autres types de carburant. Mais on ne nous a pas demandé expressément d'examiner un type de mesure de préférence à un autre.
M. Knutson: C'est rassurant.
Vous dites qu'il est certain que Ressources naturelles...
Mme Comeau: Ce que je dis au comité, c'est que, pendant deux ans, j'ai participé à des travaux portant sur les moyens que le Canada pourrait prendre pour réduire ses émissions. Lorsque ce comité a établi une liste de mesures à examiner, la taxe sur les hydrocarbures y figurait. Mais elle a été retirée de cette liste à cause d'une observation que le premier ministre a faite à un rassemblement libéral de levée de fonds à Calgary.
Je peux vous procurer les documents. Je me trouvais là. On m'a dit que c'était sur la liste. Deux semaines plus tard, le sujet était disparu. On nous a dit officiellement qu'une taxe sur les hydrocarbures n'était pas politiquement acceptable et qu'on ne pouvait donc pas l'analyser. Je vous jure que c'est la vérité.
C'est ainsi que vont les choses. Nous sommes dans une situation très difficile. Officiellement, vous ne verrez nulle part un document officiel du gouvernement du Canada qui propose une analyse d'une taxe sur les hydrocarbures. Je puis vous le garantir. Et ce n'est pas demain que vous en verrez non plus, venant du gouvernement du Canada, d'Environnement Canada ou de Ressources naturelles Canada.
M. Knutson: Un sous-ministre adjoint dit qu'Environnement Canada a les mains liées.
Mme Comeau: Environnement Canada n'a pas la technologie informatique nécessaire pour évaluer une taxe sur les hydrocarbures. Ressources naturelles Canada possède cette technologie.
Je ne suis pas en désaccord avec Gordon. Bien sûr, tous les moyens sont étudiés. Mais, dans ce dossier, le pouvoir appartient à Ressources naturelles Canada. Les sciences, la sensibilisation de l'opinion, le soutien de ce travail, le travail accompli par Environnement Canada sont excellents et c'est là qu'il peut vraiment contribuer. Nous aider à signer des accords internationaux, assumer le leadership dans les domaines de la sensibilisation, de l'environnement, des sciences, voilà ce que fait Environnement Canada, et il le fait bien. Ressources naturelles Canada détient le pouvoir quand il s'agit de freiner les changements climatiques, d'accroître l'efficacité dans l'utilisation de l'énergie et de promouvoir les énergies renouvelables. Ce ministère a les moyens informatiques voulus. Nous voudrions bien qu'Environnement ait les mêmes.
M. Knutson: C'est une affirmation dévastatrice, au sujet d'Environnement Canada que de dire qu'il faut en fait compter sur Ressources naturelles Canada pour assurer le leadership en matière d'assainissement de l'environnement; c'est en tout cas ce que j'ai compris.
Mme Comeau: Quant au partage de pouvoirs, malheureusement, les codes du bâtiment, les normes d'économie de carburant pour les voitures, le secteur des services d'utilité publique, le pouvoir de légiférer, tout... Mon seul autre recours est le ministère des Finances, en ce qui concerne la réforme fiscale, les subventions, etc.
C'est exaspérant pour quelqu'un qui travaille fort dans ce dossier depuis six ans. C'est un fait. Quand on veut discuter des codes du bâtiment, des problèmes commerciaux, des activités industrielles ou de n'importe quoi se rapportant à cette question, c'est à Ressources naturelles Canada qu'il faut s'adresser. Pour n'importe quoi.
La vice-présidente (Mme Payne): D'autres questions?
M. Finlay: Inutile de faire remarquer que le témoin a exposé son point de vue avec vigueur et que son témoignage et probablement plutôt exact. Je travaille au sein de ce comité depuis 1994. Ce genre de scénario revient sans cesse lorsque nous étudions certaines de ces questions. C'est à peu près comme sous le gouvernement précédent.
J'ai visité ma circonscription pour observer les problèmes environnementaux, et j'ai demandé au secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement quand nous allions commencer à agir pour garantir un développement durable. Sa réponse? Nous avons les emplois dans un coin, l'environnement dans l'autre, et c'est entre les deux une sorte de match de boxe. J'ai dit, avec raison, que l'embauche et les emplois, ou Industrie Canada ou bien Ressources naturelles Canada - qui s'occupe de certaines de nos industries les plus importantes comme l'exploitation forestière, les mines, le pétrole, etc...
C'était autrefois mon attitude. Je crois qu'elle est en train de changer, et une partie du travail du comité consiste à la faire évoluer, à nous saisir des problèmes importants. Il faut persévérer. Mais ce que dit le témoin est malheureusement vrai dans une certaine mesure. Nous faisons des progrès ponctuels ça et là, et j'espère que nous pourrons continuer à avancer.
Mme Comeau: Est-ce que je pourrais préciser un point?
La vice-présidente (Mme Payne): D'accord, allez-y, et j'aurai une autre question.
Mme Comeau: Je ne veux pas laisser une impression trop négative. Je crois que cela ne conviendrait pas.
Le ministère des Ressources naturelles est présent aussi dans les domaines où se situent nos possibilités d'action. Nous devons adopter une approche constructive, continuer à travailler sur ces idées et garder une attitude positive face aux diverses possibilités. Nous avons parlé aujourd'hui de l'approche des projets-pilotes, et Anne McLellan s'y est dite favorable. Je veux vous laisser une impression positive.
Ce n'est pas une question facile, mais il est vraiment important d'enregistrer des progrès et d'adopter un esprit constructif face aux diverses possibilités. La ministre vient de dire qu'elle était disposée à appuyer certaines activités, et il nous faut simplement insister sur l'aspect positif plutôt que sur le négatif. Mais la situation est difficile.
La vice-présidente (Mme Payne): Compte tenu de ce qui s'est dit au sujet de la taxe sur les hydrocarbures, je me demande si Mme McKenzie, qui se trouve dans la salle, pourrait commenter, pour que la position d'Environnement Canada soit connue de tous.
Mme M. Ann McKenzie (directrice, Direction des questions atmosphériques globales, Service de la protection de l'environnement, ministère de l'Environnement): Merci. Permettez- moi de me présenter. Je dirige la Direction des questions atmosphériques globales, à Environnement Canada.
Je tenais à débrouiller le mandat partagé concernant les changements climatiques. En fait, le partage se fait selon deux axes à l'intérieur du gouvernement fédéral. Au plan international, le partage se fait entre Environnement Canada et les Affaires étrangères. Lorsque nous allons à Genève pour des négociations internationales, les deux ministères sont représentés.
Au plan intérieur, à propos des mesures à prendre chez nous, le partage se fait entre Environnement Canada et Ressources naturelles Canada. Le mandat est partagé. On ne peut pas dire qu'Environnement a la responsabilité à l'égard des changements climatiques et que Ressources naturelles n'a pas sa place. Bien au contraire. Cet autre ministère assume à part égale ce mandat, et nous travaillons en étroite collaboration avec lui.
Les ministres Marchi et McLellan ont un certain nombre d'entretiens et de réunions prévus et ils comptent certainement sur la réunion de décembre prochain avec les ministres provinciaux de l'Énergie et de l'Environnement pour décider comment nous allons progresser dans ce dossier au Canada et ce que le gouvernement fédéral lui-même peut faire.
Comme vous l'avez dit avec beaucoup d'éloquence, c'est un défi. Il n'y a pas de remède miracle. Il existe tout un ensemble d'intérêts à l'intérieur de notre économie et de notre structure sociale. Il s'agit de trouver le dosage qui convient, qui soit applicable en cette période d'austérité et aussi, bien sûr, respectueux du partage des compétences avec les provinces. Celles- ci détiennent beaucoup de leviers de politique dans les domaines touchés par l'amélioration de l'efficacité dans l'utilisation de l'énergie. Cela doit être bien clair.
Ajoutons à cela le fait qu'il y aura le 6 novembre, je crois, un symposium sur les changements climatiques. J'ignore si les députés sont au courant, mais certaines de ces questions seront discutées plus à fond à cette occasion. Merci.
La vice-présidente (Mme Payne): D'autres observations?
M. Knutson: Une question, puisque vous m'en donnez l'occasion. Je ne siège au Parlement que depuis deux ans et demie. Je suis relativement nouveau dans ce comité. J'ai demandé au nouveau sous- ministre, à la séance de la semaine dernière, si on l'avait informé de ce que font d'autres pays pour essayer d'assainir leur environnement. Cela me semblait être une question élémentaire et pleine de bon sens. Il a dit qu'on ne l'avait pas renseigné.
Pour ce qui est de la taxe sur les hydrocarbures - je le répète, je n'étais pas ici l'an dernier et j'ignore tous les dessous politiques - c'est simplement un exemple de ce que d'autres pays font. Pourtant, ce n'est pas une idée que le sous- ministre garde en réserve pour donner un exemple de ce que nous pourrions faire, malgré l'opposition de Ralph Klein ou de qui que ce soit d'autre.
Cela m'inquiète, comme député et comme citoyen canadien assez limité que ce flot d'idées et cet enthousiasme - il y a des choses passionnantes que nous pourrions faire pour assainir l'environnement - ne semblent pas venir du ministère, mais d'un organisme de l'extérieur.
J'ai tout le respect du monde pour les sciences et ceux qui étudient le problème et veulent attirer l'attention en en faisant remarquer la gravité. J'ai entendu David Suzuki en parler il y a quelques années. Ce n'est donc pas nouveau, mais il semble y avoir un manque réel de choix de politiques. Les options ne semblent pas abonder.
On parle de partage du dossier entre ministères. Il est aussi partagé avec les provinces. Nous allons travailler en partenariat là où nous voulons nous porter à l'avant-garde par rapport au reste du monde. Mais ce que le témoin m'a dit aujourd'hui, c'est que, au fond, le Canada va se laisser entraîner dans cette voie par d'autres pays. Nous allons être forcés à assainir notre environnement. Ce n'est pas parce que nous ne sommes plus des bons gars, mais nous allons nous faire dicter notre conduite, en fin de compte.
Ce n'est sans doute pas le message que nous livre Environnement Canada quand ses représentants comparaissent devant le comité. Ils nous disent plutôt qu'ils font de leur mieux.
J'ai sans doute l'air de lancer beaucoup... j'espère que mes propos ne semblent pas trop accusateurs. En un sens, ce sont des accusations qui s'adressent aux institutions. On ne doit pas croire que ce sont des accusations contre des personnes en particulier.
Vous m'avez dit que vous n'étiez pas limités dans vos sujets de recherche. C'est excellent, et cela me rassure. Le témoin ne pense pas que vous avez des ordinateurs assez gros pour faire le travail, cependant. Je ne sais pas trop...
M. McBean: Ce n'est pas tellement une question d'ordinateurs, mais poursuivez.
La vice-présidente (Mme Payne): En toute justice pour les fonctionnaires qui comparaissent, il faudrait peut-être signaler que ce sont les ministres qui établissent les politiques. Le rôle des fonctionnaires est de mettre en oeuvre ces politiques. Il vaudrait peut-être mieux poser ce genre de question aux ministres.
M. Knutson: J'essaie simplement de savoir quelles sont les différentes possibilités.
[Français]
C'est un moyen comme un autre de couvrir le ministère de l'Environnement.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Payne): Qu'on prenne cette observation pour ce qu'elle vaut.
M. Sonnen: Je ne vous ai donné aucune raison pour que vous me fassiez confiance, mais, la dernière fois que j'ai rencontré des parlementaires, c'est à titre de personne-ressource pour le groupe de travail sur les sables bitumineux.
Cela peut vous aider à comprendre la dimension commerciale. J'ai essayé de faire le travail à partir de la part limitée de science que je peux appliquer dans le domaine économique.
Il y a un passage de la page 55 de ce document qui sera probablement important pour vous. On y dit que, au cours des 15 prochaines années, dans le cadre de ce programme, quelqu'un va devoir débourser 150 milliards de dollars. J'ignore ce que cela représente dans votre circonscription, mais, dans mon ménage, ce n'est pas précisément de l'argent de poche. Là-dessus, 75 milliards sont du côté des hydrocarbures et le reste se répartit entre toute une série d'activités spécifiques.
Voici ce que je voudrais faire. Cette observation a pour but d'aider le comité à faire d'autres évaluations. Nous avons eu une taxe sur les hydrocarbures qui s'est appelée la taxe de l'OPEP. C'était la pire taxe sur les hydrocarbures qui soit, car le percepteur ne se trouvait pas ici, mais dans le Golfe. Il était impossible de prendre ces recettes et de les retourner aux contribuables. Nous avons une grande expérience de la taxe sur les hydrocarbures.
La première chose que je propose, c'est que vous cessiez d'avoir peur des mots - la commission d'enquête sur les incidents de Somalie s'occupe de mots obscènes. Oubliez toutes les idées préconçues. C'est simplement une taxe. Nous avons des taxes sur le carburant des voitures. Nous avons des taxes sur les hydrocarbures qui n'en sont qu'une variante. Nous avons des taxes de tous côtés. La question qu'il faut se poser est la suivante: est-ce que 75 milliards de dollars nous permettront de réaliser de grandes économies d'énergie? Comment allons-nous recycler ces recettes?
Je voudrais en revenir à la question de M. Knutson, qui a demandé de présenter l'information simplement. La difficulté réside dans les détails. À cause de la taxe sur les hydrocarbures de 1973 et de 1980, à cause des chocs pétroliers de l'OPEP, nous avons mis en place beaucoup de moyens de recherche pour essayer de voir quelles solutions marchaient ou ne marchaient pas.
Cela fait partie d'un ensemble de recherches qui sont entamées depuis maintenant quatre ou cinq ans et auxquelles ont participé des ministères fédéraux et provinciaux. Elles reposent sur les résultats technocratiques de la taxe de 1973 sur les hydrocarbures.
Je suis un agnostique, en matière de recherche. Je pense qu'on peut travailler sur cette question jusqu'à ne plus en pouvoir sans pourtant arriver à comprendre des éléments vraiment importants, mais même un cynique doit reconnaître - je suis propriétaire d'une maison isolée à la mousse d'urée formaldéhyde, ce qui peut vous rendre cynique envers les gens - qu'il y a une importante infrastructure de recherche en place.
Cela se rapporte directement au point que vous avez soulevé, monsieur Knutson. Il a été question de 120 initiatives précises, puis quelqu'un a demandé: que va-t-il se passer si nous disons aux agriculteurs qu'ils doivent faire ceci ou cela? Si nous disons à quelqu'un - vous savez, ce fameux chef de petite entreprise et tous les autres comme lui - qu'il doit moderniser son bâtiment? Comment va-t-il aborder sa banque à ce sujet, par exemple?
Bien des gens s'en sont retournés avec une importante infrastructure de recherche et en se demandant ce qui se passerait s'ils passaient à l'action. Combien cela coûtera-t-il? Quelles seront les économies d'énergie?
Je le répète, je suis un peu cynique, mais il faut reconnaître que la question est très complexe. Si on veut arriver à comprendre, il est impossible de rester simple. La difficulté réside dans les détails. Que faut-il penser de la modernisation de tel ou tel bâtiment?
La taxe sur les hydrocarbures n'est qu'une mesure sur 120. La question est constamment à l'étude.
Voici ce que je dirais. Si vous commencez à vous inquiéter de savoir quel ministère fera ceci ou cela, imaginez le problème qui était le nôtre. Quelqu'un impose une taxe qui a un nom quelconque. Elle rapporte 75 milliards. Qu'allez-vous faire de ces recettes?
Je puis vous dire que la priorité du ministre des Finances est la réduction du déficit. Il y a toutes sortes de positions idéologiques et partisanes à ce sujet. Ces 75 milliards sont sortis directement de la poche de quelqu'un. Vous, comme parlementaires, devez consulter les contribuables.
Un groupe va réclamer ces 75 milliards et construire un réseau de transport urbain, etc. Tout le monde a ses objectifs. Il y a aussi les objectifs des électeurs, qui diront qu'il faut leur rendre cet argent par une réduction des impôts. Et ainsi de suite. Nous avons utilisé un certain mécanisme pour nous attaquer à ce problème.
Je vous dis par conséquent que le débat au sujet de la taxe sur les hydrocarbures ne concerne pas uniquement Ressources nationales Canada et Environnement Canada. Le débat est beaucoup plus large, car il faut savoir ce qu'on fera des recettes. Qui peut prétendre mettre la main sur ces 75, 150 ou 28 milliards?
Il y a des questions de compétences qui sont en jeu. Nous avons au Canada des taxes sur les hydrocarbures. Voyez Toronto. Le conseil municipal en a imposé une.
Il y a également des questions de compétence qui se posent. À propos de cette taxe, qui est un problème artificiel, le gouvernement central, le gouvernement du Canada décide d'imposer une taxe, et tout le monde se soumet, acceptant de la payer. Les provinces ont-elles des droits sur les recettes? La réponse est non. Mais si on impose une taxe sur les hydrocarbures là où il est entendu qu'il y aura une taxe fédérale conjointe... Quant à savoir si on y arrivera au moyen du fédéralisme exécutif et comment cela pourra fonctionner, je l'ignore. Mais plusieurs gouvernements sont là, à faire recueillir des recettes fiscales par leurs percepteurs. Nous avons ouvert davantage le dossier; les seuls en cause ne sont plus les ministères de l'Environnement, des Ressources naturelles et, mettons, des Finances, peu importe; il y aussi toute une série d'intérêts provinciaux en cause.
Au fond, la question de la taxe sur les hydrocarbures n'est pas une affaire de technocrates. Le problème consiste à savoir qu'on a un imposant système fiscal et comment le mettre en place. Je suis sûr que, d'ici l'an 2015, il y aura des livres blancs, verts, de toutes les couleurs.
La vice-présidente (Mme Payne): Je dirais entre parenthèses que j'espère que, si une taxe sur les hydrocarbures est imposée, ce sera pour quelques raisons bien précises. La principale serait de faire d'autres recherches sur les types d'énergie que nous pourrions envisager d'exploiter. C'est probablement la raison principale: chercher de nouvelles sources d'énergie, et peut-être que la taxe aurait un effet dissuasif sur les entreprises qui produisent des carburants peu souhaitables.
M. Sonnen: Un autre renseignement. La difficulté est dans les détails, c'est-à-dire dans 120 ou 80 initiatives spécifiques. C'est là que se trouvent les renseignements, qui découlent d'un long processus. Je distingue des objectifs particuliers derrière les questions qui sont soulevées. Mais c'est là que la question a été abordée: où nous situons-nous par rapport à ce que quelqu'un d'autre a fait? Savons-nous de quoi nous parlons? Savons-nous comment nous y prendre sur le plan technique, avant même de comprendre les conséquences au plan commercial, les conséquences directes? C'est à ce niveau que les détails se règlent.
Dans les travaux précédents, ceux du Groupe de travail sur les prévisions, on a fouillé tous les détails, une initiative après l'autre. Comme ce travail a été fait par un ministère du gouvernement canadien, je suis sûr que c'est le document que je lirais si je cherchais les réponses à la question que vous avez soulevée avec un certain scepticisme prudent. Ce document est sans doute disponible en français également.
M. Finlay: De quel document est-ce qu'il s'agit?
Mme Comeau: C'est une série de documents, qui ont servi de base à ce rapport-ci - j'ai donné les détails là où cela est important - et qui ont été produits par le gouvernement. Ils ont été produits par le Groupe de travail sur les prévisions, sous le titre Rational Energy Program: Analysis of the impact of rational measures to the year 2010. On peut se le procurer dans les deux langues officielles. Croyez-moi, il faut être très déterminé.
La vice-présidente (Mme Payne): Merci beaucoup. Nous avons terminé plus tôt que prévu. Je tiens à dire...
Une autre question?
M. Finlay: Je tiens à féliciter M. Sonnen de la vue d'ensemble qu'il a présentée, car je pense qu'il a situé les choses dans une perspective qui fait de nous des parties responsables, ce que nous sommes, quant aux mesures à prendre. Les personnes qui ont fait des présentations sont là pour nous aider, mais ce qui sera déterminant, c'est notre volonté politique, notre bon sens, notre dévouement à cette cause, notre attitude à l'égard de notre responsabilité. Tous les rapports du monde ne suffiront pas à faire le travail.
La vice-présidente (Mme Payne): Tout à fait vrai.
Je remercie Mme Comeau, M. Sonnen et M. McBean d'avoir comparu aujourd'hui.
La séance est levée.