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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 3 décembre 1996

.1105

[Traduction]

Le président: Je déclare la séance ouverte.

Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent des ressources naturelles poursuit son étude sur les ressources naturelles et le développement rural. Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui des représentants de deux ministères, soit le ministère des Transports et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Bon nombre de témoins que notre comité a entendus ici à Ottawa et ailleurs au pays ont abordé des questions qui intéressent ces deux ministères. Nous sommes donc très heureux de vous recevoir aujourd'hui.

Je vous demanderais tout d'abord, tous les deux, de nous faire une déclaration liminaire d'environ dix minutes. Nous donnerons ensuite la parole aux membres de notre comité qui vous poseront des questions. Nous pourrions peut-être commencer par le ministère des Transports. Veuillez tout d'abord vous présenter, messieurs, avant de faire votre exposé.

[Français]

M. André Pageot (directeur général, Politiques maritimes, ministère des Transports): Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

Je m'appelle André Pageot, je suis directeur général du Groupe de la politique et de la coordination du ministère des Transports. Je suis accompagné d'experts qui représentent le transport ferroviaire, les ports et les havres, ainsi que les routes.

Je crois savoir que vous cherchez à relever un défi très intéressant qui consiste à vous assurer que, partout au pays, les Canadiens sont dotés d'une infrastructure et d'installations adéquates. Nous sommes certainement d'accord avec cet objectif. Transports Canada est le principal fournisseur de l'infrastructure au pays. Au fil des ans, depuis le début de l'histoire de notre pays, la qualité des services de transport a toujours été très un enjeu important.

J'aimerais attirer votre attention sur le fait que le Ministère a lancé une réforme très importante. Pour vous donner un exemple du plan d'affaires de Transports Canada, notre ministère, qui comptait plus de 19 000 employés en 1984-1985, n'en comptera plus que 4 000, dans quelques années.

Nous avons transféré certains aéroports. Nous avons transféré les services de circulation et de navigation aériennes. Nous avons un programme de rationalisation dans les secteurs ferroviaire et maritime, ainsi que dans tous les secteurs du transport.

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Pour vous donner une idée de notre infrastructure, le Canada compte plus de 83 000 kilomètres de voies ferrées et 900 000 kilomètres de routes publiques. Nous avons plus de 600 ports et havres et 152 aéroports.

À l'heure actuelle, notre politique vise à s'assurer que nous nous concentrons sur les activités essentielles et que nous tentons de confier aux utilisateurs la gestion de certaines infrastructures de transport. Que ce soit pour les aéroports, les ports ou les havres, nous tentons de faire participer les utilisateurs à la gestion de la structure. Nous tentons de nous assurer qu'il y a un meilleur contrôle local dans la gestion quotidienne de l'infrastructure.

Cependant, le fait est qu'il y a capacité excédentaire. Quatre-vingt p. 100 du trafic ferroviaire utilise un peu plus du tiers du réseau.

Dans le secteur maritime, 80 p. 100 du trafic maritime est desservi par 30 ports principaux. Nous maintenons des sites où la construction des routes et le développement de nouvelles options en matière de transport ont parfois rendu désuètes des installations que nous avions par le passé - ce qui fait que l'infrastructure est devenue excédentaire.

Nous avons de nombreux sites aéroportuaires ou portuaires où il n'y a aucune circulation commerciale depuis de nombreuses années.

Le président: Monsieur Bélair.

M. Bélair (Cochrane - Superior): Sur la liste des témoins, nous avons M. Pageot, directeur général, Politique maritime du ministère des Transports. Depuis le début de votre exposé, vous parlez de Transports Canada en général, n'est-ce pas?

M. Pageot: Oui. On m'a demandé de venir vous donner un aperçu du ministère des Transports, mais, naturellement, je connais davantage le secteur maritime, où je travaille. Au fil des ans, j'ai assumé diverses responsabilités dans des postes...

M. Bélair: Je ne remets pas cela en doute. Je croyais que vous alliez nous parler surtout de la politique maritime, particulièrement en ce qui a trait aux ports pour petits bateaux, ainsi que la possibilité d'une nouvelle politique d'octroi des licences.

Le président: Nos témoins ne sont pas venus ici pour nous parler de cela, Reg. Ils sont ici pour parler de...

M. Bélair: C'est donc le titre - politique maritime - qui m'a induit en erreur.

M. Pageot: Nous parlerons de la politique maritime, qui est un élément majeur, mais le ministère s'occupe également du secteur ferroviaire et de nombreuses autres activités. Vous devez faire attention, lorsque vous parlez d'octroi de licences, car il ne faut pas confondre avec le rôle du ministère des Pêches et Océans.

Le président: J'apporterais là aussi une petite correction. Cette initiative, qui relevait auparavant des Transports - il y a un an et demi, je suppose - a été transférée au ministère des Pêches et Océans.

L'objectif aujourd'hui consiste à avoir une idée générale des initiatives de Transports Canada et si, pendant votre témoignage, vous n'abordez pas la question spécifique du Canada rural, nous vous obligerons à en parler lors de la période des questions. Personnellement, il y a déjà trois questions que j'aimerais voir abordées.

M. Stinson invoque le Règlement.

M. Stinson (Okanagan - Shuswap): Non, je pense que vous avez essentiellement tiré la question au clair. Je voulais m'assurer que nous n'allions pas aborder la question de l'octroi des licences dans le secteur maritime, qui n'a absolument rien à voir avec les ressources naturelles.

Le président: Très bien, vous pouvez continuer.

M. Pageot: Merci, monsieur le président.

Cela nous amène peut-être à la question de la rationalisation du ministère. Vous savez que la Garde côtière canadienne, qui exploitait une flotte très importante, a été amalgamée avec le ministère des Pêches et Océans afin de réaliser des économies d'échelle dans les services à la flotte civile. Le ministère des Pêches et Océans a un rôle important à jouer pour ce qui est de la recherche et du sauvetage, des bateaux de plaisance, des petits ports privés pour les marinas et les ports de pêches, etc.

Mes observations se limiteront donc aux ports commerciaux et aux activités commerciales du secteur des transports.

Je disais donc que dans le cadre de la rationalisation générale, en raison de l'évolution dynamique du secteur des transports et de changements qui s'opèrent sur les marchés mondiaux, nous sommes aux prises avec un problème majeur de surcapacité, qui est évidente pour certains petits havres commerciaux et certaines lignes secondaires.

.1115

Nous sommes convaincus que notre objectif de commercialisation des chemins de fer est une meilleure façon de répondre aux besoins de tous les Canadiens. Vous vous rappellerez qu'aux États-Unis il y a eu une faillite massive des chemins de fer. Les dommages causés par les échecs du marché sont beaucoup plus importants que l'adaptation nécessaire suite à la rationalisation et à des choix que l'on fait soi-même.

Il ne faut pas oublier que pour la plupart des produits que nous transportons, et pour les Canadiens qui voyagent, une bonne partie du coût consiste à se rendre à la destination finale, vers un port, un point d'exportation ou d'importation. Si les tarifs ferroviaires et routiers sont moins élevés, si on a un bon réseau routier, de bons ports et des installations efficaces, les agriculteurs, les producteurs miniers et tous ceux qui vivent dans des petites villes paieront moins cher pour le transport.

Cela est très important, car parfois le danger est de regarder seulement dans un rayon de 25 kilomètres autour d'une municipalité. Or, lorsqu'on transporte le grain d'une exploitation agricole à un point d'exportation, à un point de consommation, on a peut-être 2 000 kilomètres de chemin de fer. Si nos chemins de fer sont concurrentiels avec les chemins de fer américains et que nous avons de bons réseaux routiers, les résidents de ces municipalités paieront moins pour le transport.

Le secteur des transports a connu une réforme très importante. Cette réforme était fondée sur deux aspects principaux, dont l'un est la commercialisation. Reconnaissant la maturité du réseau, nous voulons que les marchés influencent un peu plus les décisions. Nous tentons par ailleurs de faire participer les utilisateurs au processus décisionnel. C'est tout à fait ce que nous préconisons dans le cadre de notre politique de cession des ports.

Par exemple, quand j'étais administrateur de quais et de traversiers sur la côte du Labrador, je peux vous assurer que nous étions très loin d'un immeuble à bureaux d'Ottawa. Si on veut faire installer un écriteau sur un quai ou si on veut faire faire des travaux de dragage, on obtient des résultats beaucoup plus efficaces et les services sont beaucoup moins coûteux si des dirigeants locaux prennent des décisions plutôt que de voir toutes les décisions prises par cinq ministères et administrations différents à Ottawa.

L'une des principales caractéristiques de notre réforme consiste donc à mettre en place un partenariat entre les utilisateurs locaux, les municipalités et le public pour la gestion quotidienne des services plutôt que d'avoir le tout contrôlé par une bureaucratie centrale. Nous croyons que cela est possible.

Nous avons un programme de cession de plus de 300 ou 400 quais dans tout le pays. Nous avons déjà eu des résultats importants, et des lettres d'entente ont été signées par des communautés locales et des utilisateurs de ports à de nombreux emplacements. Nous avons déjà opéré certains transferts au ministère des Pêches et Océans. Douze sites sur la côte sud de Terre-Neuve ont été transférés au gouvernement de Terre-Neuve qui aura davantage son mot à dire au sujet de ces services. Sept sites ont déjà été cédés à des intérêts locaux et 87 lettres d'entente ont été signées avec divers intérêts locaux en vue d'une cession éventuelle.

Pour que le transfert de ces sites maritimes soit un peu plus efficace, nous avons cri un fonds de transition se chiffrant à 125 millions de dollars et nous avons effectué de nombreuses études sur l'environnement et l'état des lieux. Cela facilitera le transfert soit en rendant les biens portuaires existants conformes à des normes minimales de fonctionnement... Nous pourrons peut-être aider le groupe dans les étapes initiales de la prise en charge.

En fin de compte, il ne faut pas oublier qu'il y aura des rationalisations. Bon nombre de havres ont été construits avant toute route. Pour bon nombre de régions, les ports sont devenus superflus car il y a énormément d'activité sur les réseaux ferroviaires ou routiers. Il y a certains endroits où mon collègue Brian pourrait vous confirmer qu'il n'y a eu aucune activité commerciale depuis de nombreuses années.

Le réseau ferroviaire est un secteur qui a connu une rationalisation importante. Comme vous le savez, nous avons privatisé le Canadien National. Il nous a donc fallu modifier la Loi sur les transports au Canada. Cela donnera lieu à de nombreuses nouvelles initiatives dans d'autres régions du Canada. Par exemple, nous permettons à des groupes privés d'exploiter des lignes secondaires lorsque les compagnies de chemin de fer ont des lignes excédentaires.

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Nous avons défini un processus selon lequel les lignes secondaires peuvent être abandonnées mais reprises par des groupes locaux plus efficients. Nous espérons ainsi que, dans bon nombre de régions, il sera possible de maintenir d'avantages de services grâce à la participation locale qu'en demandant à une grande société de continuer à supporter le fardeau des prêts et des lignes non rentables et risquer la faillite.

Nous avons quelques nouvelles initiatives. Par exemple, dans le nord du Manitoba, un nouveau groupe qui s'appelle OmniTRAX a offert d'exploiter la ligne ferroviaire secondaire. Cela pourrait faciliter le développement à long terme du port de Churchill. La Loi sur les transports au Canada contient des dispositions en vue de faciliter l'accès aux diverses lignes.

Lorsqu'il n'y a qu'une seule compagnie, afin que personne ne soit pénalisé par une position monopolistique, nous facilitons le transfert du fret vers des lignes privées. Il y aura, par ailleurs, un mécanisme qui permettra de revoir certains des tarifs et même de recourir à l'arbitrage dans certains cas.

Je devrais conclure mes observations. Je m'excuse si certains d'entre vous ont reçu un texte qui était incomplet. Nous avons fait imprimer les notes recto verso pour économiser le papier, mais un seul côté a été imprimé. J'espère que vous recevrez tous le texte complet de notre exposé.

En ce qui concerne les routes, vous ne devez pas oublier que 90 p. 100 du commerce inter-provincial et 75 p. 100 du commerce entre le Canada et les États-Unis se fait par route. Il s'agit d'un développement majeur dans le secteur des transports au Canada, par rapport aux 30 ou 40 dernières années.

La grande majorité des dépenses familiales annuelles en matière de transport sont consacrées au camionnage ou aux voitures privées. Le réseau routier est donc très important. Transports Canada investit toujours 300 millions de dollars par an dans le réseau routier, y compris de nombreuses routes fédérales qui se trouvent dans les parcs nationaux et d'autres routes fédérales.

J'attire votre attention sur le fait que le Comité permanent des transports tient actuellement des audiences pour étudier l'infrastructure de surface. M. Alcock, du Comité permanent des transports, est sur la route et rencontre des Canadiens d'un peu partout au pays. Il examine des questions comme le tourisme et les routes.

Les provinces nous disent que l'infrastructure a besoin d'être rénovée. C'est une question que nous avons l'intention de suivre de près. Nous nous efforcerons surtout d'harmoniser les normes entre les provinces et entre le Canada et les États-Unis, mais le réseau routier demeure très important pour Transports Canada.

En conclusion, monsieur le président, le Canada n'est pas un pays seulement pour les citadins, qu'ils vivent à Halifax, Montréal, Toronto, Vancouver ou toute autre grande ville, mais chaque localité et région rurale du pays est essentielle au développement du pays, à l'avenir du pays.

À Transports Canada, nous voulons nous assurer que nous continuons à servir tous les Canadiens. C'est pourquoi nous avons un programme pour les régions isolées et c'est pourquoi nous ferons en sorte que le Canada soit doté d'un réseau de transport concurrentiel, qu'il s'agisse des transporteurs aériens régionaux...

La meilleure politique consiste à ne pas geler le développement et l'infrastructure au niveau des années 60 et 70. Le meilleur développement consiste à prendre des décisions qui nécessitent la rationalisation, laquelle exige des choix de nature commerciale. Ainsi, nous serons en mesure de réduire les coûts de transport pour tout le monde, y compris pour les agriculteurs et pour ceux qui exploitent des mines dans des lieux éloignés.

Un transport peu coûteux est la meilleure façon de s'assurer que ces collectivités sont prospères, actives et concurrentielles. Dans certains cas, au fil des ans, nous avons fait des choix. À Terre-Neuve, où existait un chemin de fer désuet il y a quelques années, et dont l'écartement des voies était plus étroit que dans le reste du pays, nous avons investi plus de 800 millions de dollars dans un réseau routier, dans un service de camionnage et un service d'autobus. Je pense qu'il est beaucoup plus efficace de s'adapter aux forces du marché et de faire des choix de transport fondés sur ce qui est commercialement viable plutôt que d'essayer de conserver l'infrastructure comme elle existait dans les années 50.

.1125

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Avant de passer aux questions, je vais demander aux représentants du ministère des Affaires indiennes de faire eux aussi leur exposé, puis nous pourrons poser des questions à l'un ou l'autre ministère.

Allez-y.

[Français]

M. Paul Cuillerier (directeur général intérimaire, Direction générale des terres et de l'environnement, Services fonciers et fiduciaires, Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Merci beaucoup, monsieur le président, de m'avoir permis de vous parler de l'apport du secteur des ressources naturelles au développement économique des collectivités des Premières Nations et du Nord.

Je m'appelle Paul Cuillerier et je suis directeur général par intérim pour les terres et l'environnement, et mon collègue, à ma droite, est Peter Wyse, gestionnaire principal des ressources naturelles de la Direction de l'environnement et des ressources naturelles.

Je voudrais commencer ma présentation en vous entretenant sur les collectivités des Premières Nations, sur leurs possibilités d'exploitation des ressources naturelles, sur le projet du ministère visant à appuyer ces possibilités, et enfin sur quelques modèles de réussite dans le domaine de l'exploitation des ressources naturelles. En dernier lieu, je vous parlerai brièvement des projets d'exploitation dans le Nord.

[Traduction]

En 1995, le Canada comptait une population approximative de 593 000 Indiens inscrits. De ce nombre, 348 000 ou 59 p. 100, vivaient dans des réserves ou dans des collectivités du Nord. La plupart de ces collectivités sont situées dans des régions rurales, et ce sont celles-ci qui font l'objet de votre étude.

Les membres du comité devraient noter que plus de 50 p. 100 des membres des Premières nations qui vivent dans les réserves sont âgés de moins de 15 ans. Une jeune population en pleine croissance exerce plus de pressions sur les conditions de vie déjà difficiles dans de nombreuses réserves. Il est essentiel de mettre en valeur les économies des Premières nations, et les secteurs d'exploitation des ressources sont et continueront d'être la clé du progrès.

Les tendances sont positives. La proportion des jeunes des Premières nations qui demeurent à l'école jusqu'en douzième année s'est grandement accrue au cours des 25 dernières années. L'année passée, 27 000 étudiants inuit et des Premières nations étaient inscrits dans des établissements d'études postsecondaires, comparativement à seulement 5 000 il y a 15 ans.

En outre, le nombre de membres de Premières nations aptes à travailler, qui était inférieur à 40 p. 100 en 1981, est passé à plus de 46 p. 100 en 1991. Les secteurs d'exploitation des ressources naturelles sont importants aux yeux des collectivités des réserves. En 1991, ces secteurs embauchaient environ 10 p. 100 de la population active. On comptait près de 2 200 Indiens dans le secteur forestier, 1 250 dans l'agriculture, plus de 500 dans le secteur minier et 1 500 dans le secteur de la pêche et du piégeage.

Les répercussions économiques de la chasse, de la pêche et du piégeage sont beaucoup plus grandes que les 1 500 personnes dont il est question dans les statistiques sur la population active. L'exploitation de ces ressources à des fins domestiques demeure la plus importante activité économique et culturelle dans de nombreuses collectivités éloignées.

En plus de ces gens qui oeuvrent directement dans ces secteurs de l'exploitation des ressources naturelles, au moins 2 300 membres des Premières nations travaillent dans les secteurs du logement et de l'alimentation qui dépendent des ressources naturelles. Aussi, les quelque 2 700 membres des Premières nations qui participent au secteur manufacturier dépendent fort probablement de l'exploitation des ressources naturelles qui stimule ce secteur.

Il est très évident que l'exploitation des ressources naturelles compte pour une grande part de l'activité économique dans les collectivités indiennes. L'exploitation des ressources naturelles peut aussi générer un fort pourcentage d'exportation de produits communautaires. Ces exportations servent à payer les biens et services venant de l'extérieur de ces collectivités et contribuent à leur autosuffisance.

[Français]

Permettez-moi de vous donner une idée des ressources disponibles pour les collectivités des réserves. Les réserves renferment environ 2,7 millions d'hectares de terres de réserve. De cette superficie, environ 1,4 million d'hectares sont recouverts de forêts. Près de 270 Premières Nations ont établi des plans d'aménagement des forêts pour leurs forêts et 800 000 hectares de ces terres ont été répertoriés.

Prise ensemble, la taille des forêts des réserves semble impressionnante, mais, dans la plupart des cas, les forêts des Premières Nations prises individuellement sont trop petites pour constituer des ressources économiques viables.

.1130

Bien que les forêts des réserves puissent servir de base à la formation des membres des Premières Nations dans le domaine forestier, la véritable viabilité économique viendrait de l'accès qu'on leur accorderait aux forêts à l'extérieur des réserves.

Certaines Premières Nations ont découvert du pétrole et du gaz, mais ces ressources ne sont pas la solution économique pour la plupart des Premières Nations. Dans le cas des minéraux métalliques et non métalliques, la production minière a sa place dans environ 150 des quelque 2 400 réserves. Près de 550 réserves semblent renfermer un potentiel modéré pour l'exploitation minière, tandis que 132 autres recèlent de plus grandes possibilités.

Néanmoins, seulement quelques Premières Nations bénéficieront d'un grand projet d'exploitation dans un proche avenir, puisque les chances de découverte d'un important gisement minier sont relativement faibles. Certaines autres Premières Nations pourraient entreprendre d'importantes exploitations de carrières. Un plus grand nombre pourra satisfaire ses besoins en sable et en gravier à même les ressources situées dans la réserve. Dans l'ensemble, toutefois, les minerais dans les réserves ne formeront pas la base économique de la plupart des collectivités.

[Traduction]

J'ai parlé brièvement des ressources naturelles dans les réserves afin d'indiquer que, bien que les réserves renferment des possibilités, celles-ci sont limitées et le progrès économique dépendra en grande partie des terres situées à l'extérieur des réserves. La plupart de ces terres relèvent de la compétence des provinces et des territoires.

Je suis mal placé pour discuter des possibilités d'exploitation axées sur les ressources relevant des provinces, cependant, je dois dire que les Premières nations perçoivent les processus de certification sylvicoles qui sont établis actuellement partout au Canada comme un moyen pour elles non seulement d'élargir leur rôle dans l'aménagement forestier à l'extérieur des réserves, mais aussi d'aider à protéger leurs occupations traditionnelles telles la chasse et le piégeage.

Quelles mesures le MAINC prend-il pour accroître l'apport des secteurs d'exploitation des ressources naturelles au développement des collectivités des réserves? Tout d'abord, le ministère respecte ses obligations juridiques de gestion des terres et de ressources en vertu de la Loi sur les Indiens. Nous examinons avec les Premières nations diverses options concernant l'autonomie gouvernementale des Indiens. Nous reconnaissons que de nombreuses Premières nations peuvent gérer leurs ressources naturelles plus efficacement que le gouvernement fédéral.

Le MAINC participe à de nombreux processus qui pourraient ultimement accroître la quantité des terres des réserves ainsi que des ressources. Il s'agit de discussions concernant les droits fonciers issus des traités et des négociations et de la mise en oeuvre des différentes ententes relatives aux revendications territoriales globales. Bien que ces processus aient été établis pour permettre à la Couronne de respecter ses obligations juridiques, ils avantageront les collectivités des Premières nations en élargissant leurs assises territoriales et leurs ressources.

De plus, le MAINC verse des fonds aux Premières nations pour leur permettre de négocier l'accès aux ressources à l'extérieur des réserves, par exemple, pour obtenir des contrats de récolte ou pour conclure des ententes de gestion coopérative, d'aménagement forestier ou d'autres ententes. Puisque ces ressources relèvent pour la plus part de la compétence des provinces et des territoires, le MAINC essaie de faciliter la conclusion d'ententes pratiques en finançant les Premières nations afin qu'elles puissent recourir à des spécialistes techniques et à d'autres ressources semblables pour conclure des ententes.

De la même manière, le MAINC finance les Premières nations pour qu'elles négocient des ententes de développement socio- économique avec des promoteurs de grands projets d'exploitation. Lorsque de tels projets se présentent près des réserves, ils deviennent des sources d'emploi, de formation et de possibilités commerciales pour les collectivités des réserves et offrent beaucoup d'autres possibilités aux exploitants. Le financement qu'offre le MAINC facilite la négociation d'ententes entre les Premières nations et les exploitants. Le projet diamantifère de BHP dans les Territoires du Nord-Ouest et celui de Voisey's Bay à Terre-Neuve, sont de récents exemples de ces types de projets.

[Français]

Comme je l'ai mentionné précédemment, le développement économique axé sur l'exploitation forestière semble être une importante possibilité pour les Premières Nations. Voilà pourquoi, en avril 1986, les ministères des Affaires indiennes et des Ressources naturelles du Canada ont annoncé conjointement l'établissement du programme forestier des Premières Nations dont le but est d'encourager le développement économique des collectivités des réserves grâce à l'aménagement forestier.

.1135

Les fonds consacrés à ce programme peuvent servir à améliorer les capacités des Premières Nations dans des domaines tels les activités forestières, l'aménagement forestier et le commerce. Ils peuvent servir à promouvoir la collaboration entre les collectivités des Premières Nations et à transiger avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Dans certains cas, des représentants des provinces et des territoires siègent à des comités de gestion de ces programmes.

En plus des différents programmes que j'ai déjà mentionnés, le ministère procure aussi aux Premières Nations des fonds pour le développement économique.

[Traduction]

J'aimerais terminer en vous décrivant deux réussites en matière d'exploitation des ressources dans des collectivités des Premières nations. En 1988, la province de la Saskatchewan a vendu une scierie provinciale aux employés de la scierie et au Conseil tribal de Meadow Lake. Aujourd'hui, le Conseil tribal occupe une place importante dans le secteur de l'exploitation forestière.

Le Conseil tribal de Meadow Lake a mis sur pied un programme de formation, a travaillé avec la province afin de créer des équipes de lutte contre les incendies dans les collectivités qu'il représente et participe à la gestion d'une grande partie des ressources forestières en collaboration avec ses partenaires corporatifs. Plus de 125 personnes sont employées dans des domaines tels la coupe du bois, le chargement et le transport des billes et le reboisement.

Au début des années 80, la province de la Saskatchewan a insisté auprès des compagnies d'extraction de l'uranium pour qu'elles embauchent et forment des résidents des collectivités du nord de la province, pour la plupart composées de résidents autochtones. Aujourd'hui ces mines comptent près de 50 p. 100 de leurs employés provenant du nord de la Saskatchewan. Ces exemples montrent le rôle que peuvent jouer les Premières nations dans le domaine de l'exploitation des ressources naturelles au Canada.

Au début, je vous ai dit que je parlerais brièvement de l'exploitation des ressources naturelles au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest. Au Yukon, l'exploitation minière constitue de loin la plus importante activité économique. La mine de Faro, lorsqu'elle entreprendra ses activités de production, sera responsable de près de 30 p. 100 à 40 p. 100 du PIB non gouvernemental. Deux mines ayant récemment ouvert leurs portes constitueront un autre 10 p. 100 du PIB non gouvernemental. Dans les Territoires du Nord-Ouest, la société BHP Diamonds versera plus de six milliards de dollars dans le PIB du Canada au cours des 21 prochaines années et assurera de l'emploi à près de 300 Autochtones.

Selon une récente étude des activités de production de gaz naturel dans la partie sud de la vallée du Mackenzie, on prévoit que les dépenses en capital pourraient créer entre 50 et 200 années-personnes d'emploi dans les deux territoires. Ces emplois s'ajoutent à ceux qui ont été cris à Norman Wells, le quatrième gisement pétrolifère en importance au Canada.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

Nous allons commencer la période des questions avec M. Deshaies.

[Français]

M. Deshaies (Abitibi): Merci. Ma première question va s'adresser à M. Pageot. J'aimerais tout d'abord déclarer que des régions comme l'Abitibi, le Nord de l'Ontario, etc. ont besoin d'un service de transport de qualité minimale afin d'assurer leur développement. Le rail et l'aéroport sont deux outils qui ont permis ce développement et qui devraient permettre de le maintenir.

Mais avec les politiques du gouvernement, les gens se posent beaucoup de questions sur la façon dont l'avenir du rail ou des aéroports sera assuré. Est-ce que votre ministère est conscient qu'il est bien beau de rationaliser, mais qu'il faut aussi une certaine norme minimale pour que le développement continue?

M. Pageot: Oui, absolument. Il est évident que tout est relié à la demande, mais il y a certainement un minimum à assurer dans toutes les régions. Que ce soit dans le domaine portuaire ou ferroviaire, il est certain qu'une infrastructure est requise.

.1140

Dans le domaine des routes, on a défini avec les provinces un plan d'infrastructure national où les routes principales et les questions nationales sont incluses. Mon collègue, M. Cochrane, qui s'occupe du transport ferroviaire, pourrait vous expliquer que chaque compagnie ferroviaire doit présenter un plan visant les besoins essentiels de la compagnie.

Il y a tout un processus qui permet, lorsqu'une ligne ferroviaire devient excédentaire, d'évaluer, même sur une base publique, la nécessité d'un tel tel équipement. On a aussi la capacité d'intervenir dans les régions éloignées.

[Traduction]

C'est une question concernant les lignes secondaires. M. Cochrane travaille pour la direction du transport ferroviaire. Nous avons un processus qui devrait assurer la participation, pas nécessairement d'une compagnie nationale mais de groupes locaux pour maintenir en service ces lignes secondaires.

M. Deshaies: Monsieur Cochrane, nous avons un CFIL en Abitibi. Connaissez-vous le CFIL de la région de l'Abitibi - Lac Saint-Jean?

M. Cochrane (chef, Transport ferroviaire des marchandises, Politiques ferroviaires et programme, ministère des Transports): Ne s'agit-il pas d'un chemin de fer provincial?

M. Deshaies: Non, c'est le Canadien National. Cette partie du Canadien National a été vendue à un groupe d'employés pour lui donner un nouvel élan. Au cours des deux dernières années, les activités et les services ont triplé car les employés ont un intérêt. Cependant, la qualité des rails est très mauvaise, de sorte que le train ne peut rouler à plus de 50 kilomètres à l'heure à certains endroits. La sécurité a récemment obligé le groupe à remplacer certains tronçons de voies qui étaient trop dangereux pour le train. Lorsque j'ai parlé à M. Pageau, je lui ai demandé s'il y avait un mécanisme pour assurer le maintien de services minimum.

M. Cochrane: Si vous parlez de l'élément sécurité, le ministère s'est engagé à veiller à ce que les chemins de fer qui relèvent de la compétence fédérale soient exploités de façon sécuritaire. Les chemins de fer secondaires comme celui que vous mentionnez peuvent souvent être exploités de façon plus économique car en partageant la main-d'oeuvre, ils peuvent réduire les coûts. Nous voulons nous assurer qu'avec le temps, les économies réalisées sur ce plan seront investies dans l'entretien et l'amélioration de...

M. Deshaies: C'est là le problème.

[Français]

Le problème est qu'il y a effectivement une augmentation des profits dans le secteur minier et qu'il y a plus de transports qui sont faits parce que les employés ont intérêt à conserver leur emploi. Mais les profits ne sont pas réinvestis. On n'a pas de plan quinquennal sur la table, par exemple, qui dirait: On va faire la ligne et on va s'assurer... Il y a des sections entre Senneterre et Rouyn-Noranda où on ne sait pas à quel moment le train va sortir des rails tellement ils sont usés.

Il n'y a aucun plan qui dit que, puisque tout va bien, l'on va prendre tel pourcentage des profits pour améliorer progressivement les rails afin qu'on soit compétitifs. Le jour où les rails seront complètement usés, est-ce que le ministère dira qu'il n'a pas d'argent pour installer de nouveaux rails? À ce moment-là, le transport routier se mettra en place, mais le transport routier n'est pas compétitif, spécialement pour l'industrie minière. Le réseau ferroviaire est là pour ça. Les régions se posent des questions. C'est bien beau de rationaliser, mais où est le plan pour qu'il y ait des fonds nécessaires au maintien des infrastructures?

M. Pageot: Il faut dire que le ministère des Transports s'éloigne d'une approche centralisée au niveau de la planification.

.1145

Dans le domaine des transports, où on a une plus grande maturité, il n'y a pas de garantie absolue que toutes les infrastructures ou tous les équipements vont être maintenus. On va laisser les lois du marché jouer jusqu'à un certain point.

M. Deshaies: Alors, le message ne devrait pas être qu'on maintient un service coast to coast, mais plutôt simplement qu'on se retire et débrouillez-vous. Mais votre message n'est pas clair.

Le système est très compétitif et les affaires ont triplé, mais ils ont hérité d'un système ferroviaire qui était usé, les rails ne pouvant plus supporter, à certains endroits, une vitesse supérieure à 50 kilomètres à l'heure. Je suis d'accord pour qu'on laisse le même système, mais il faudrait peut-être partir du bon pied. Lorsqu'on recule et que les profits ne restent pas dans la région, mais partent vers le Sud, c'est grave.

On parle de développement, mais vous n'avez pas de plan.

M. Pageot: La position...

M. Deshaies: Vous n'avez pas de politique.

M. Pageot: Non, la position est plus nuancée.

M. Deshaies: Ah, oui?

M. Pageot: Dans les aéroports comme dans les ports, on a gardé un système national. Par exemple, au niveau de la sécurité, il n'y a aucun compromis négociable. La réglementation sur la sécurité demeure.

M. Deshaies: Et qui va la payer?

M. Pageot: Dans certains cas, il y a des rôles de sécurité qui sont payés par l'État. Pour toutes les questions de recherche ou de sauvetage, il y a beaucoup d'équipements qui sont de responsabilité publique, mais dans la majorité des cas, ce sont les compagnies qui les exploitent qui ont la responsabilité d'observer les normes et les standards.

M. Deshaies: Est-ce que vous convenez que les taxes prélevées sur les billets que les gens achètent en Abitibi, à Rouyn et à Val-d'Or devraient servir, au moins en partie, à assurer le maintien et le développement de leur aéroport?

M. Pageot: Oui. Il est évident que dans une compagnie de short line ou une compagnie de camionnage, la demande existe. Il y a une croissance parce que les gens réinvestissent.

C'est la même chose pour la voie maritime. Quand la demande pour les céréales augmente, les gens investissent dans de nouveaux navires et construisent de nouveaux équipements.

M. Deshaies: Mais où est-ce que la municipalité qui achète l'aéroport va prendre l'argent pour le développer et l'entretenir s'il n'y a qu'une taxe sur les billets d'avion? Est-ce qu'il faudra établir une taxe d'aéroport plus importante?

M. Pageot: Il y a des limites.

M. Deshaies: Oui, il y a des limites.

[Traduction]

Le président: J'aimerais que ce soit les dernières questions et réponses. Allez-y, répondez, puis nous passerons à un autre intervenant.

M. Pageot: Il s'agit d'un problème assez large qui met en jeu l'approche fondamentale consistant à laisser pour les forces du marché, ce qui se traduit par une plus grande réduction des coûts et des tarifs.

Mais voilà le dilemme. Le gouvernement n'a pas l'intention de jouer le rôle de planificateur central et de prendre toutes les décisions, car cela ne fonctionne pas. Nous tentons d'orienter le processus décisionnel, mais en fin de compte, nous espérons que pour les réseaux ferroviaires et ailleurs les coûts de transport seront moins élevés.

Lorsque le bois-d'oeuvre et d'autres produits sont transportés à partir d'une petite ville, 90 p. 100 du transport se fait toujours sur la ligne principale, où il sera beaucoup moins coûteux, où les régions seront plus concurrentielles. N'oubliez pas que malgré tous les efforts pour maintenir le plus d'activités possible, il y aura des régions où il faudra rationaliser.

Il ne nous sera peut-être pas possible de maintenir deux modes de transport dans chaque secteur, s'il n'y a pas une demande minimale, de sorte que rien ne garantit que tout sera maintenu.

Le président: Monsieur Stinson.

M. Stinson: Ma première question s'adresse à M. Pageot.

Je me demande parfois où nous nous en allons en tant que Comité des ressources naturelles.

Vous avez dit que vous tentiez de ramener le processus décisionnel au niveau local, à la base, et je vous en félicite. Je pense que vous allez certainement dans la bonne direction.

Pour ce qui est des ressources naturelles, quel impact ont- elles sur le transport ferroviaire et le transfert en général? Quel pourcentage des services ferroviaires est-il tributaire des ressources naturelles? En avez-vous une idée? Dans le secteur du camionnage, quel est le pourcentage? Les ressources créent-elles de l'emploi dans le secteur ferroviaire ou dans le secteur du transport?

.1150

M. Pageot: Je n'ai pas de statistiques précises, mais nous transportons environ 300 millions de tonnes de vrac chaque année dans nos ports et probablement autant ou même un peu plus par train. La clé, c'est la compétitivité. Nous dépensons environ 100 milliards de dollars par année pour transporter ces 300 millions de tonnes.

Le secteur minier est très sensible aux tarifs des transports. J'ai entendu mon collègue parler de certaines denrées de faible valeur et je sais que pour le charbon, le sable ou le gravier, le coût du transport est un élément très important. En fait, si nous ne réduisons pas les coûts, nous ne serons plus en mesure de vendre des produits miniers à l'étranger, de les exporter.

Nous nous efforçons donc de réduire les coûts en confiant les leviers de commande aux gens qui sont sur place. Ils seront plus efficaces. Quand il faut réparer quelque chose, on a déjà des niveleuses sur place, on a déjà des camions, de l'équipement. C'est beaucoup plus rapide et moins cher de gérer localement.

Je peux vous donner des exemples. Il nous a fallu 18 mois pour faire l'acquisition d'une grue dans le port de Vancouver. Si l'on gérait localement, avec une certaine latitude commerciale, on pourrait réduire les délais et les dépenses, etc.

Vous constaterez que nous réduisons les coûts et, globalement, nous faisons en sorte que les transporteurs demeurent compétitifs. Par exemple, je suis certain que vous suivez de près la situation des Lignes aériennes Canadien International. Ne perdez pas de vue que nous pourrions nous retrouver dans la même situation dans le secteur ferroviaire, si nous ne faisons pas de changements.

M. Stinson: Je comprends cela. Vous avez mentionné le train qui était surnommé le «Bullet» à Terre-Neuve; le débat se poursuit toujours là-bas, à savoir si c'était une bonne idée de supprimer ce train.

Mais il n'y a pas à revenir là-dessus. Ce que je veux savoir, c'est dans quelle mesure le transport est dépendant. Combien de revenus, combien d'emplois sont cris par les ressources naturelles dans le secteur des transports?

M. Pageot: Il y a une forte dépendance. N'oubliez pas que les transports n'existent pas pour eux-mêmes. Nous existons parce qu'il y a des biens et des personnes à transporter. Dans notre jargon, c'est ce que nous appelons la «demande dérivée». Le secteur des transports n'a aucune raison d'être intrinsèque. Il existe pour servir une clientèle, pour transporter des biens, etc. Pour répondre à votre question, il y a une très forte dépendance, mais c'est un peu la question de la poule et de l'oeuf.

Le transport peut également prospérer dans les secteurs miniers et agricoles et d'autres secteurs sont également tributaires d'un transport bon marché. On peut donner l'exemple du charbon, que l'on peut acheter au Japon, et l'on peut aussi acheter du minerai de fer au Brésil. Il y a d'autres producteurs ailleurs dans le monde. Pour maintenir la productivité et le niveau d'activité dans les secteurs miniers et agricoles, il faut pouvoir compter sur des moyens de transport bon marché.

M. Stinson: On peut donc dire sans risque de se tromper que les ressources naturelles créent des emplois dans les transports. C'est ce que je veux savoir.

M. Pageot: Absolument.

M. Stinson: C'est essentiellement la raison de ma présence ici. J'essaie d'obtenir des précisions là-dessus. Si vous avez des chiffres ou si vous pouviez m'indiquer le moyen de les obtenir, je vous en serais reconnaissant.

M. Pageot: Nous pouvons certainement essayer de nous renseigner. Pour le tonnage transporté par rail, par exemple, nous pouvons certainement trouver des renseignements plus détaillés à votre intention pour les principales denrées.

M. Stinson: Bien.

Je sais que le développement du Labrador a été retardé par l'absence de moyens de transport en bien des endroits, de même que le Nord. Cela touche quelque peu les Affaires indiennes. Je sais que dans la partie septentrionale des provinces, l'absence de routes et de moyens de transport est problématique pour les Indiens dans les réserves, et aussi pour la prospection dans bien des cas.

Vous avez dit que la superficie des réserves est d'environ 2,7 millions d'hectares. Avez-vous une ventilation par province?

M. Cuillerier: Oui, nous l'avons.

M. Stinson: Si vous pouviez me fournir ce renseignement, je vous en serais reconnaissant.

M. Cuillerier: Nous allons vous le faire parvenir, monsieur.

M. Stinson: Je suis content de constater que vous avez également tenu compte de la compétence fédérale dans ce domaine.

Je suis allé au Yukon et j'ai eu la chance de me rendre dans un certain nombre de petites localités et aussi dans des propriétés exploitées par des compagnies minières. Je peux dire que partout où je suis allé, j'ai vu un certain nombre d'Indiens qui travaillaient dans ces endroits, depuis des foreurs dans les mines de diamant jusqu'aux cuisiniers. J'en étais très content.

.1155

Quand on parle de financer certains projets pour leur permettre de démarrer, une fois qu'ils sont viables et que les profits commencent à rentrer, est-ce qu'on obtient un rendement sur cet argent?

M. Cuillerier: Oui, le rendement est excellent.

Nous avons un programme dont j'ai parlé tout à l'heure et qui s'appelle le programme de négociations de l'accès aux ressources. Nous accordons 2,2 millions de dollars par année aux Premières nations qui veulent entreprendre des négociations à l'égard de certaines activités. Les négociations peuvent porter sur la formation et les prestations d'éloignement pour les promoteurs de grands projets. Elles portent aussi sur l'extraction des ressources et les possibilités de contrat avec les ministères provinciaux des forêts et aussi avec le secteur privé. Elles portent sur des arrangements de cogestion avec des ministères provinciaux des ressources naturelles; il y a beaucoup d'ententes de ce genre dans l'Ouest. Et enfin elles portent sur l'achat et la mise en valeur des ressources naturelles.

Nous avons établi le ratio suivant: pour chaque dollar que nous injectons dans ce programme, nous générons en moyenne environ 13 $. C'est un excellent rendement.

Nous sommes très sélectifs. Nous voulons nous assurer que le groupe de sélection fait son travail sérieusement et examine les projets valables. C'est pourquoi nous avons un excellent rendement. C'est un tout petit programme - 2,2 millions pour toutes les Premières nations d'un bout à l'autre du pays - mais il a un excellent rendement.

M. Stinson: Pourrais-je obtenir les statistiques là-dessus également?

M. Cuillerier: Absolument, monsieur.

M. Stinson: Je voudrais aussi savoir pourquoi on injecte si peu d'argent dans ce programme, puisque le taux de rendement est de 13 à 1. Si tel est bien le rendement de ce programme, il doit s'agir de l'un des programmes les plus avantageux que le gouvernement ait jamais lancés.

M. Cuillerier: Je peux répondre à cette question. Le budget officiel que nous avons reçu le 1er avril est de 2,2 millions de dollars. À cause de l'excellent rendement et grâce au Comité des comptes publics et pour d'autres raisons, nous réussissons habituellement à obtenir des fonds additionnels du ministère pour injecter dans ce programme. L'année dernière, nous avons fini par investir plus de 3 millions de dollars dans ce programme.

Nous vous ferons parvenir les statistiques des dernières années là-dessus, monsieur.

M. Stinson: Merci. Je vous en suis reconnaissant.

Le président: Merci monsieur Stinson.

Monsieur Reed.

M. Reed (Halton - Peel): Merci monsieur le président.

Monsieur Cochrane, votre domaine comprend-il le transport des voyageurs par rail?

M. Cochrane: Oui.

M. Reed: J'ai reçu la semaine dernière une lettre au sujet de VIA Rail et de la création d'une ligne traversant les montagnes Rocheuses. Il y a actuellement une compagnie privée qui exploite une ligne franchissant cette chaîne de montagnes. Si l'auteur de la lettre a raison, VIA s'est engagée à ne pas faire concurrence sur cette ligne après avoir annulé sa propre desserte, du moins pendant un certain temps.

M. Cochrane: Pendant un certain temps, oui.

M. Reed: Je me demande si vous pourriez nous expliquer exactement ce qui se passe dans ce dossier, parce qu'il me semble que c'est une situation plutôt intenable, lorsqu'une compagnie subventionnée à même les deniers publics peut faire concurrence à l'entreprise privée, en toute impunité.

M. Cochrane: Je ne connais pas les détails de la situation actuelle, mais je peux vous obtenir ces renseignements et vous les faire parvenir.

M. Reed: Vraiment? Je vous en serais très reconnaissant.

Le président: Si je peux vous interrompre, je vous demanderais de faire parvenir cela officiellement au comité et nous le déposerons.

M. Cochrane: Oui, absolument.

Le président: Merci.

M. Reed: J'ai une question sur les ports.

Il y a un port financé par le gouvernement fédéral sur l'île Cockburn, dans le lac Huron. C'est une île située à l'extrémité de l'île Manitoulin. Il y a là un radiophare et d'autres installations. En ce moment, la population de l'île est de deux personnes, mais elle atteint une centaine de personnes la fin de semaine du 1er août.

Cette localité est essentiellement une ville fantôme, mais est magnifiquement entretenue, parce que l'île Cockburn est officiellement une municipalité, avec un greffier et d'autres administrateurs qui habitent tous sur la terre ferme.

.1200

Pendant des années, l'île était desservie par un traversier, mais depuis de longues années, ce port... Je crois que c'est au début des années 1950 que l'on a mis fin au service de traversier, de sorte que l'entretien est évidemment réduit au minimum. Que fait le gouvernement dans une situation comme celle-là?

M. Pageot: Est-ce l'un de vos ports, Brian?

M. Brian Fogarty (chef, Secrétariat de la cession des actifs, Direction des havres et ports, ministère des Transports): Transports Canada n'a aucune structure sur l'île Cockburn. Depuis de nombreuses années cette île n'est plus sur la liste des sites actifs.

M. Reed: On l'a donc rayé de la liste.

M. Brian Fogarty: Le port pourrait appartenir au ministère des Pêches et Océans. C'est lui qui possède la plupart des petits havres en Ontario et partout au Canada.

M. Reed: C'est bien. Merci beaucoup.

M. Pageot: Je vous signale qu'il y a plus de 2 000 havres pour petits bateaux exploités par Pêches et Océans, sans compter les nombreux quais de pêche. Nos collègues des Pêches et Océans ont aussi un programme visant à limiter... mais pour de nombreux quais, une fois qu'ils sont construits, pourvu qu'ils ne soient pas en trop mauvais état, il ne coûte à peu près rien de les conserver. Nous ne nous précipitons pas pour faire un changement si le quai est en bon état et n'est pas dangereux.

M. Reed: Eh bien, il l'est.

Votre ministère a-t-il son mot à dire au sujet de la route transcanadienne et de son avenir?

M. Brian E. Hicks (conseiller principal en politiques, Génie routier et Environnement, Politiques et Programmes routiers, ministère des Transports): La route transcanadienne appartient aux provinces. Les seuls tronçons de la transcanadienne qui appartiennent à l'administration fédérale sont ceux qui traversent les parcs nationaux de Banff et de Terra Nova. Par conséquent, le gouvernement fédéral a son mot à dire à propos de la transcanadienne seulement à l'égard de ces tronçons que nous possédons et exploitons dans les parcs nationaux.

M. Reed: Donc, toute décision visant à transformer la route 17 qui traverse l'Ontario en une autoroute à quatre voies serait du ressort provincial?

M. Hicks: C'est exact.

M. Reed: Merci de m'avoir éclairé là-dessus.

M. Pageot: Je voudrais ajouter que le Comité permanent des transports a reçu des propositions visant à faire en sorte que le gouvernement fédéral ait davantage son mot à dire relativement à l'infrastructure. La question est de savoir si le gouvernement actuel voudra lancer un programme d'infrastructures, si ce programme sera élargi, s'il sera différent et, en fait s'il y en aura un.

Par conséquent, on peut toujours se présenter devant un comité permanent pour préconiser que le gouvernement actuel ait davantage son mot à dire quant au financement de l'infrastructure. Traditionnellement, nous l'avons fait dans le cadre d'ententes avec les provinces, mais en définissant certains critères. Pour le moment, nous n'avons pas de programmes de ce genre, mais peut-être que dans le cadre de l'étude des besoins d'infrastructures, certaines recommandations seront faites au gouvernement.

M. Reed: J'ai une autre question, monsieur le président, qui concerne les affaires indiennes. Le fait qu'une proportion tellement forte de la population a moins de 15 ans pose parfois certains problèmes, mais je crois que cela offre par ailleurs d'extraordinaires possibilités. On peut bénéficier de l'énergie et de l'ingéniosité des jeunes. Si l'on peut trouver le moyen de canaliser cette énergie, l'avenir peut s'annoncer très brillant pour les Premières nations.

Que faites-vous pour ce qui est de donner à ces jeunes les outils voulus? Quel genre d'outils leur donnez-vous pour leur permettre d'utiliser pleinement les ressources?

M. Cuillerier: Nous avons un programme d'éducation très étoffé. Nous fournissons des fonds pour faire en sorte qu'ils poursuivent leurs études et le budget de l'éducation postsecondaire pour les Indiens et les Inuit a été porté de 213 millions de dollars à 269 millions de dollars, ce qui représente une augmentation de 26 p. 100, au cours des dernières années. L'argent est versé directement aux Premières nations, pour les jeunes qui souhaitent poursuivre leurs études.

Dans beaucoup de régions dont nous nous occupons maintenant, le ministère s'attend à ce que les Premières nations gèrent ces dossiers elles-mêmes. C'est ainsi que nous voyons les choses pour ce qui est de travailler avec les Premières nations. Les projets devraient viser davantage à la formation et à l'acquisition de compétences, notamment dans le domaine forestier.

.1205

Si l'on a des gens bien formés qui comprennent bien la forêt et qui savent comment la gérer, la forêt sera probablement en très bon état. C'est le point de vue du ministère. Nous déployons donc beaucoup d'efforts en ce sens maintenant. Nous mettons l'accent sur la formation et l'acquisition de compétences, afin que les gens des Premières nations aient la capacité, l'expérience et les outils voulus pour gérer eux-mêmes leurs propres affaires avec succès.

M. Reed: C'est donc un changement assez fondamental par rapport à... D'après ma perception des 25 ou 30 dernières années, vous leur tendiez la main pour les aider à se joindre au monde de l'homme blanc, si l'on peut dire, c'est-à-dire que l'on formait des avocats, des professionnels, etc. Beaucoup en ont profité, comme les statistiques le démontrent...

M. Cuillerier: C'est juste.

M. Reed: ... mais je voudrais revenir sur ce que vous avez dit à la fin de votre réponse. Cela portait sur le désir et la capacité d'utiliser les ressources disponibles.

M. Cuillerier: Le désir existe, à n'en pas douter. Nous avons un programme très poussé de formation en gestion du territoire, pour que les Premières nations commencent à se prendre en main et à gérer leurs propres activités sur le territoire des réserves.

D'après les statistiques dont je vous ai fait part dans ma courte allocution, vous pouvez voir que le pourcentage d'Autochtones a augmenté considérablement dans l'enseignement postsecondaire. Ils acquièrent donc de l'expérience, des connaissances et je crois que tout le monde au Canada en bénéficie.

M. Reed: Ils acquièrent la formation voulue pour quitter la réserve.

M. Cuillerier: Nous espérons qu'ils reviendront, mais c'est leur choix. Nous ne nous en mêlons pas.

M. Reed: D'accord, mais je suppose que je veux avoir l'assurance qu'ils ont l'occasion de se former en vue d'utiliser les ressources qui sont à leur disposition, sur place.

M. Cuillerier: Dans leur localité, bien sûr. C'est évidemment l'objectif.

M. Reed: Merci.

Merci monsieur le président.

Le président: Merci. Madame Cowling.

Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Merci, monsieur le président. Je voudrais donner suite à l'une des questions posées par mon collègue au sujet du réseau routier national.

Vous avez dit que le réseau routier national est de compétence provinciale. Pourriez-vous indiquer au comité combien d'argent est attribué aux provinces à ce chapitre, en précisant le montant pour chaque province? Je crois qu'il serait important que nous le sachions.

M. Hicks: Transport Canada a des ententes à frais partagés avec toutes les provinces. Leur durée et les montants en cause varient, mais nous avons effectivement des ententes avec toutes les provinces.

Les ententes sont à frais partagés, c'est-à-dire que la province et Transport Canada se partagent les dépenses moitié- moitié. Je peux certainement vous donner une ventilation par province de nos ententes actuelles.

Mme Cowling: Excellent.

Mon autre question porte sur la commercialisation du système de transport.

Je crois que nous sommes dans la bonne voie pour ce qui est de créer un système plus rapide, plus efficace et moins coûteux pour transporter nos denrées destinées à l'exportation. Toutefois, compte tenu de la géographie de notre pays et des régions isolées et rurales, je crois que nous butons sur des pierres d'achoppement en opérant cette transition.

Je vais vous donner un exemple tiré de ma propre circonscription. Nous avons des gens qui cherchent à diversifier. Ils veulent transformer les emprises de voies ferrées en un réseau national de sentiers, que ce soit pour la promenade ou la bicyclette en été ou bien pour la motoneige en hiver, mais ils se heurtent à des obstacles. Peut-être pourriez-vous me venir en aide, ainsi qu'à notre comité.

L'obstacle auquel ils se sont heurtés, c'est que la province a des réticences pour ce qui est de leur transférer cette emprise. Nous en sommes au point où des gens sont littéralement en train de clôturer certains tronçons de cette emprise ferroviaire.

Est-ce légal? Cela se passe dans ma circonscription. C'est une nuisance, un obstacle de taille pour ces gens-là. Je voudrais savoir ce que vous en pensez.

.1210

M. Cochrane: Je crois que dans le cas dont vous parlez, une ligne ferroviaire a été abandonnée.

Mme Cowling: C'est exact.

M. Cochrane: Je crois que la plupart des compagnies de chemins de fer ont conclu des ententes avec la plupart des provinces pour la cession de ces terrains. Je crois que, dans bien des cas, la question se pose de savoir si les terrains qui constituaient auparavant une emprise ferroviaire devraient être maintenus comme corridors ou bien être rétrocédés aux propriétaires fonciers adjacents.

Je ne connais pas très bien l'arrangement que la province du Manitoba a conclu avec les compagnies de chemins de fer, mais c'est essentiellement... Je suppose que la question fondamentale qui se pose est de savoir si l'on doit maintenir le corridor ou bien si les terrains doivent être rétrocédés aux propriétaires fonciers qui les ont perdus il y a 80 ou 100 ans, quand le chemin de fer a été construit.

Mme Cowling: C'est important pour les gens des régions rurales du Manitoba qui veulent se lancer dans la diversification. Pourriez-vous nous obtenir ce renseignement et en faire part à notre comité?

M. Cochrane: Oui, je ferai de mon mieux.

Mme Cowling: Mon autre question porte sur la province de la Saskatchewan, qui insiste pour qu'au moins 50 p. 100 de ses employés soient des membres des Premières nations. Combien de ces 50 p. 100 sont des femmes?

Ensuite, on nous a dit, entre autres choses, que nous devons maintenir et consolider une infrastructure en vue d'aider les localités rurales à se diversifier et à ajouter de la valeur à la production locale. L'autre facteur est l'élément humain, qu'on pourrait appeler l'infrastructure humaine.

Au comité, nous avons entendu de nombreux témoins venus de ces régions éloignées et beaucoup d'entre eux sont des Autochtones et ont beaucoup de talent et d'habilités. Que faites-vous pour enrichir ces habilités et faire fructifier ce capital humain? Comment leur permettre de s'affirmer sur le marché international?

M. Cuillerier: Pour ce qui est de votre première question, le recrutement à 50 p. 100 - parlez-vous de la province ou du bureau régional du ministère?

Mme Cowling: Vous avez dit que le secteur des mines d'uranium dans la province de la Saskatchewan...

M. Cuillerier: Oui, bon, nous vous donnerons une réponse là- dessus. Nous allons vous fournir ce renseignement.

Mme Cowling: D'accord.

M. Cuillerier: Pour ce qui est des possibilités dans le domaine de l'éducation... Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît? Je suis désolé, mais je voudrais m'assurer d'avoir bien compris.

Mme Cowling: Nous avons beaucoup parlé d'infrastructure, mais on nous a également beaucoup parlé de l'infrastructure humaine. Peut-être devrais-je parler plutôt d'esprit d'entreprise. Beaucoup de gens des Premières nations ont plein de talents et d'habilités, que ce soit dans la fabrication de mocassins, la peinture, etc. Que faites-vous au ministère pour aider à faire fructifier ces talents? Je crois qu'il y a là des talents que l'on pourrait commercialiser sur le marché international, ce qui serait bénéfique pour ces localités.

M. Cuillerier: En rapport avec ce que vous venez de dire, je vous signale que d'ici décembre 1997, chaque ministère est censé élaborer un plan de développement durable. Cela a beaucoup à voir avec la terre, la population, comment gérer tout cela pour l'avenir. Actuellement, nous faisons des consultations très poussées partout au Canada. Dans chacune des provinces, les Premières nations elles-mêmes prennent l'initiative des discussions dans leurs propres localités sur la façon d'assurer le développement durable à l'avenir.

Ce dossier comporte un élément humain très important et nous apprenons beaucoup. On a parlé de connaissances écologiques traditionnelles et bien des gens diraient que c'est là que réside l'avenir du développement durable dans les collectivités des premières nations - cela dépend de la façon dont on présente les choses - il y a actuellement des discussions très poussées sur la façon d'intégrer l'élément humain dans cet effort.

Je crois que les diverses localités apprennent beaucoup les unes des autres, et aussi les Autochtones et les non-Autochtones. Nous avons aussi un programme de développement économique dans le cadre duquel nous offrons 47 millions de dollars - du moins dans le budget de 1996-1997 - à ces collectivités. En moyenne, si l'on compte plus de 600 collectivités, on obtient donc environ 80 000 $ par Première nation. Une grande partie de cet argent est consacré à l'élément humain et ce sont eux qui établissent leurs propres priorités. Ils décident comment cet argent doit être dépensé.

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D'une façon assez gauche, j'essaie de répondre à votre question. Je ne crois pas pouvoir vous donner une réponse pleinement satisfaisante. Nous fournissons de l'argent, nous discutons avec eux et toutes les collectivités apprennent l'une de l'autre. Nous fournissons de l'argent justement pour enrichir l'élément humain.

Mme Cowling: Bien, merci.

Le président: Monsieur Iftody.

M. Iftody (Provencher): Paul, je veux poser une question sur un sujet qui a été porté récemment à mon attention et qui concerne les Inuit, en particulier dans le nord du Canada.

Sous la rubrique des transports, que ce soit par air, rail, etc., les Inuit ont des problèmes tout à fait particuliers.

Premièrement, vous n'ignorez pas que leurs terres ne sont pas considérées comme des réserves.

Deuxièmement, s'ils sont protégés par la Constitution et jouissent des mêmes droits que les autres Premières nations, puisqu'on les décrit généralement comme telles, ils ne bénéficient par contre d'aucun avantage fiscal, par exemple l'absence d'impôt dans les réserves, etc. Autrement dit, le niveau d'imposition applicable à Montréal, Toronto ou Vancouver est également appliqué de façon très injuste dans ces localités du grand Nord. Ces gens là paient également la taxe de vente provinciale et fédérale sur tous leurs achats.

Compte tenu de tout cela, le coût prohibitif des transports pour acheminer un pain, un litre de lait, un costume de neige ou une pièce de motoneige dans ces régions, ajouté au fardeau fiscal que ces gens-là assument, tout cela est extraordinairement lourd. Si l'on considère que le revenu familial moyen - et les grandes familles comptent cinq ou sept enfants - est d'environ 18 000 $ à 20 000 $, ces gens-là se trouvent à payer de 60 p. 100 de leurs salaires en coûts de transport et en impôts divers.

Vous avez évoqué des possibilités de développement économique. Quel genre d'antidote...? Je vais vous donner un indice pour amorcer votre réponse. Peut-être serait-il utile, pour favoriser le développement économique de certaines localités vraiment isolées, que les provinces et le gouvernement du Canada envisagent des mesures dans le domaine des transports pour aider à absorber une partie de ces coûts extraordinairement élevés, non seulement pour abaisser le coût de la vie là-haut, mais aussi pour y attirer des investissements?

M. Peter Wyse (gestionnaire principal de projets, Direction de l'environnement et des ressources naturelles, ministère des Affaires indiennes et du Nord): Je ne suis pas bien placé pour répondre à vos questions. Je sais que pendant longtemps, le ministère avait un programme de subventions aux transports pour les collectivités du Nord, mais je n'en connais pas les détails.

Nous pourrions peut-être vous faire rapport plus tard sur ce que nous faisons pour atténuer les problèmes de transport dans le Nord.

M. Iftody: Vous ne pouvez donc pas m'en dire davantage, ne serait-ce qu'au sujet de la politique générale du ministère sur ce problème qui est vraiment grave pour les habitants du Nord?

M. Wyse: Je préférerais vous répondre plus tard. Je ne connais pas bien tous les détails de ce dossier.

M. Iftody: D'accord.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Iftody.

J'ai quelques questions à poser.

Premièrement, je m'adresse à nos témoins du ministère des Transports et ma question porte sur la question de la commercialisation comme politique gouvernementale. L'application de la politique de commercialisation diffère-t-elle selon qu'il s'agit d'une région rurale ou urbaine?

M. Pageot: Pas vraiment. Le principe demeure le même. Nous voulons que les forces du marché interviennent. Nous voulons que les décisions soient prises sur place. Il y a probablement une exception dans le cas des aéroports et des ports en régions éloignées. C'est un cas spécial.

Le président: L'économie et le marché du Canada rural et du Canada urbain sont-ils différents?

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M. Pageot: Il y a des différences, mais pas nécessairement pour le marché des biens que l'on produit. Quand les gens voyagent ou envoient leurs produits... la plupart des produits ne sont pas vendus dans la ville ou le village le plus proche. Ils sont vendus partout au Canada et même à la grandeur de l'Amérique. Ils sont vendus dans le monde entier. Donc, pour la plupart des biens que l'on vend, que ce soit des denrées agricoles, des produits miniers, etc., il n'y a pas de différence fondamentale entre ce que l'on peut appeler une région rurale et une zone urbaine; très souvent, la clientèle se trouve dans la zone urbaine.

Le président: Je comprends cela, mais vous admettrez que l'économie du Canada rural est très différente de l'économie d'un grand centre métropolitain.

M. Pageot: Absolument.

Le président: À mon avis, si l'on prend l'exemple d'une politique générale comme la commercialisation, qui est l'une des questions qui intéresse notre comité, cette politique aurait une application différente dans le Canada rural. Pour moi, il existe une énorme différence entre une politique de commercialisation qui s'applique à l'aéroport Pearson et une autre qui s'applique à une localité éloignée. Il y a une différence énorme entre le port de Toronto et le port de Parry Sound, bien qu'il s'agisse dans les deux cas de ports commerciaux.

M. Pageot: Tout à fait, mais vous constaterez que, pour cette raison, notre politique produira davantage d'économies dans les petites localités. Si vous versez un salaire de niveau fédéral et que votre projet passe par l'entremise d'Approvisionnements et services par un processus d'approbation de principe puis de sous- traitance locale, vous ferez sans doute beaucoup plus d'économies dans un grand nombre de ces endroits.

Le président: Je ne conteste pas, mais comme vous l'avez dit dans votre témoignage, la commercialisation comporte un volet assujetti aux forces du marché. Je sais que cela est vrai dans une certaine mesure, mais il faut ajouter à cela le fait que nous sommes le gouvernement du Canada. Nous ne sommes pas l'entreprise XYZ. En tant que gouvernement, en tant que groupe collectif, nous devons aller au-delà des simples calculs économiques. Il est de notre devoir de nous assurer qu'il existe une infrastructure de transport suffisante pour desservir le Canada rural.

Personnellement, j'appuie le programme de commercialisation, mais je crains que si nous ne l'appliquons pas en tenant compte des besoins spécifiques du Canada rural, nous nous retrouverons privés d'une infrastructure essentielle. Et ce parce que nous n'aurons pas voulu accepter le fait que nous sommes investis d'une responsabilité collective qui transcende les forces du marché lorsqu'il s'agit du Canada rural.

M. Pageot: Monsieur le président, nous reconnaissons le bien- fondé de ces préoccupations et c'est pourquoi nous avons prévu des fonds de transition. Par exemple, dans le domaine des ports, nous avons prévu 125 millions de dollars car nous reconnaissons qu'il sera sans doute nécessaire de compléter les capitaux levés au niveau local. D'ailleurs, vous constaterez que ce n'est pas nécessaire à Hamilton, Vancouver et Toronto qui auront accès à la plus grande partie de ces fonds; ce seront les résidents des régions rurales du Canada. Je pense que l'on tient compte de cette préoccupation.

Nous avons de nombreux nouveaux projets en cours, y compris des projets d'exploitation minière dans le nord du Québec et au Labrador. Nous les surveillons de près pour nous assurer qu'ils sont appuyés par une infrastructure adéquate et nous sommes confiants de pouvoir trouver un équilibre. Dans quelle mesure doit- on appuyer la transition, combien d'argent cela exige-t-il? Au bout du compte, nous sommes confiants de pouvoir conserver des installations essentielles et nous sommes prêts à fournir les fonds de transition nécessaires pour assurer leur survie. Mais je le répète, si, en fin de compte le déficit du gouvernement est réduit et que nous payons tous moins pour emprunter, nous serons plus compétitifs.

Le président: Permettez-moi de faire en sorte que la question vous concerne directement. Prenons le cas d'une collectivité isolée qui est desservie uniquement par le train et qu'une entreprise privée motivée, comme il se doit, par la quête du profit décide que le trafic voyageur ou marchandise est insuffisant pour financer la voie ferrée de 800 km qui se rend dans cette collectivité isolée. Supposons que cette collectivité compte 1 000 habitants qui ont choisi de résider là et qu'ils ont une économie qui leur permette d'y vivre, bien qu'elle ne soit pas suffisante pour rentabiliser cette voie ferrée. Les dirigeants de cette entreprise, en se fondant sur des motifs strictement commerciaux, vont fermer la ligne puisqu'elle n'est pas rentable.

N'avons-nous pas l'obligation, en tant que gouvernement, d'assurer la survie de cette collectivité, ou cette survie est-elle fondée uniquement sur une décision commerciale?

M. Pageot: Il est difficile de répondre à cette question. Indéniablement, nous devons être très attentifs à tous les cas spéciaux, et nous continuerons de l'être. Il est très difficile de généraliser.

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Dans le nord du Québec, par exemple, certaines mines de fer ont fermé. Je pense que le gouvernement provincial a même fermé toute une ville. Il faut se demander quel est le moteur économique de l'endroit et voir les éléments du dossier. On peut ensuite offrir des mesures d'adaptation ou de transition.

Il est difficile de généraliser car il ne fait aucun doute que nous devrons être plus efficients à l'heure des choix, mais on ne saurait esquiver ces choix. Une certaine rationalisation est inévitable.

S'il y a à Terre-Neuve des gens privés de services ferroviaires, dans une économie en croissance où les services sont adéquats, nous ne pouvons offrir à d'autres régions du Canada la garantie absolue que le statu quo prévaudra et qu'aucun changement n'aura lieu. La nature de notre société exige des changements et une rationalisation.

Tout ce que je peux dire de façon générale, c'est que je suis très sensible à votre argument, et que chaque citoyen de notre pays compte. Peu importe que l'on habite à Toronto ou dans une petite ville, chaque citoyen est important. Nous ferons tout notre possible pour trouver un mécanisme d'adaptation qui donnera des résultats optimaux, mais je ne peux pas vous donner d'assurance absolue sans avoir examiné le cas en question et déterminer s'il existe quelque part un moteur économique viable.

Le président: Je soupçonne que si la commercialisation avait été le seul critère, le chemin de fer du Canadien Pacifique n'aurait jamais été construit.

Passons maintenant à une autre question qui concerne le ministère des Affaires indiennes. Nous nous sommes entretenus avec plusieurs témoins du nord du Canada, et surtout des Territoires du Nord-Ouest, qui nous ont dit souhaiter une dévolution des responsabilités liées au secteur des ressources naturelles vers les gouvernements territoriaux. À leur avis, une telle dévolution leur permettrait de mieux gérer ces ressources. Ils estiment que s'ils pouvaient gérer localement ces ressources naturelles, ils seraient en mesure d'en tirer un plus grand avantage économique. Quelle est l'opinion du ministère des Affaires indiennes à ce sujet?

M. Cuillerier: Le ministère est d'accord et souhaite transférer ses responsabilités aux Premières nations. D'ailleurs, il est activement engagé dans des discussions avec les Premières nations.

Le président: Avez-vous une idée du temps qu'il faudra pour accomplir cela?

M. Cuillerier: Nous n'avons pas d'échéancier. Lorsque nous travaillons avec les représentants des Territoires et les Autochtones, nous ne fixons pas d'échéancier. Nous discutons ensemble et c'est également ensemble que nous arrêtons un processus.

Le président: Cela transcende les négociations avec les Autochtones. Cela concerne l'autre moitié de vos responsabilités, si je puis dire, soit la gestion globale des ressources naturelles.

M. Cuillerier: Oui, c'est exact.

Le président: Vous envisagez également de déléguer cette responsabilité au gouvernement territorial?

M. Cuillerier: C'est juste.

Le président: Vous n'avez donc pas idée du temps que cela prendra.

Ma deuxième question concernant les Affaires indiennes est la suivante. Dans le cas d'un grand projet comme celui de Voisey Bay, que je connais un peu mieux que celui des Territoires du Nord- Ouest, pensez-vous que l'entreprise - en l'occurrence, Inco - a la responsabilité sociale de faire en sorte que les Premières nations du Labrador tirent des avantages économiques, sous forme d'emplois, de création de petites entreprises, etc. dans le cadre de la mise en valeur de ces ressources naturelles? L'entreprise en question a-t-elle une responsabilité sociale et, de l'avis du ministère, tout règlement éventuel des revendications territoriales devrait-il reconnaître cette responsabilité sociale?

M. Cuillerier: Il va de soi que les grandes entreprises qui viennent s'établir dans des régions peuplées par les Premières nations doivent collaborer avec elles et faire en sorte qu'elles tirent tous les avantages qui leur reviennent dans cette région, qu'il s'agisse de territoires traditionnels ou non. Appelez cela un avantage social, si vous voulez - je ne sais pas exactement comment on définirait ce terme en particulier - mais la réponse est oui, absolument. De plus, nous avons des programmes qui encouragent cela et nous collaborerons de très près avec les Premières nations et les entreprises en question pour nous assurer que les choses se passent ainsi.

Le président: Pensez-vous que l'exploitation de Voisey Bay devrait être un sujet de discussion dans les négociations pour régler les revendications territoriales au Yukon?

M. Cuillerier: Quant aux revendications territoriales, je suis désolé, mais ce n'est pas mon domaine. J'hésite à vous répondre, mais je pourrai vous obtenir une réponse.

Le président: J'aimerais bien avoir cette réponse, parce que ça va compter à partir de ce moment-là, lorsque les négociations sont en cours.

M. Cuillerier: Oui.

Le président: J'ai une dernière question, qui s'adresse au ministère des Transports.

L'ACA préconise un programme routier national qui serait financé par une taxe sur le carburant dont les recettes seraient réservées à cet usage. Quel est le point de vue du ministère à ce sujet?

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M. Pageot: Contrairement aux États-Unis, le Canada ne s'est jamais doté d'un fonds fiduciaire national. C'est sans doute en raison de la nature de la fédération. Aux États-Unis, ils prélèvent cet argent et l'investissent dans un fonds central à Washington, et ensuite ils décident l'utilisation. Au Canada, c'est le ministre des Finances qui perçoit la taxe sur le carburant et il lui incombe de décider s'il veut créer de nouveaux outils de financement.

En tant que fonctionnaire du ministère des Transports, je ne suis pas vraiment en mesure d'offrir mon avis sur cette question de taxe sur les carburants comme moyen de financement des routes. Nous percevons un montant assez élevé d'argent grâce à cette taxe sur les carburants, mais étant donné la nature du financement et des responsabilités des gouvernements fédéral et provinciaux, cette taxe sert à financer d'autres choses.

Le président: Merci beaucoup.

Une dernière observation.

M. Cochrane: J'aimerais ajouter un petit peu à la réponse donnée par M. Pageot en ce qui concerne la commercialisation. En ce qui concerne le rail, la Loi sur les transports nationaux ne permet pas à un chemin de fer national de fermer tout simplement une ligne. Il y a tout un processus selon lequel on encourage la création d'un CFIL. Bien que cette loi existe depuis très peu de temps, il y a déjà un certain nombre d'exemples où on a transféré des lignes à des exploitants à coûts moins élevés. Nous espérons qu'on va pouvoir exploiter ces CFIL de façon efficace et, de cette façon, pouvoir desservir les régions rurales où ils se trouvent. Si on n'arrive pas à trouver un exploitant commercial, on donne l'occasion aux provinces et aux municipalités, et dans certains cas, au gouvernement fédéral, d'acheter la ligne à la valeur marchande nette pour les propres fins.

Le président: Encore une fois, je tiens à vous remercier.

La séance est levée jusqu'à 15 h 30 demain.

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