TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 5 novembre 1998
[Traduction]
Le vice-président (M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)): Bonjour; je vais maintenant ouvrir la séance.
Conformément à son mandat selon le paragraphe 108(2) du Règlement, le comité reprend son étude du rapport du groupe de travail sur l'avenir du secteur canadien des services financiers, plus communément connu sous le nom de groupe de travail MacKay. Au nom de mes collègues, ce matin je souhaite la bienvenue à M. Michael Lauber, président de l'Ombudsman bancaire canadien, à Mme Peggy-Anne Brown, présidente du conseil d'administration et à Jim Savary, membre du conseil d'administration.
Comme d'habitude, nous allons vous donner environ 10 minutes pour nous présenter votre mémoire, après quoi les membres du comité auront amplement le temps de vous poser des questions.
Au nom des membres du comité, je vous souhaite la bienvenue et je vous donne la parole.
M. Michael Lauber (Ombudsman bancaire canadien): Merci, monsieur le président.
Nous nous réjouissons de l'occasion qui nous est donnée de rencontrer le Comité permanent des finances pour lui présenter le point de vue de l'Ombudsman bancaire canadien sur les recommandations du Groupe de travail sur l'avenir du secteur canadien des services financiers. Nos observations se limiteront aux recommandations du rapport portant sur le mécanisme d'ombudsman.
Je suis Michael Lauber, l'Ombudsman bancaire canadien et je suis accompagné de Mme Peggy-Anne Brown, présidente du conseil d'administration de l'Ombudsman bancaire canadien Inc. et de M. Jim Savary, membre du conseil d'administration.
Peggy, voulez-vous continuer?
Mme Peggy-Anne Brown (présidente, conseil d'administration, Ombudsman bancaire canadien Inc.): Bonjour.
L'Ombudsman bancaire canadien Inc. est un organisme indépendant chargé d'étudier les plaintes relatives aux services financiers, provenant de particuliers et de petites entreprises. L'OBC ne fait pas partie de l'Association des banquiers canadiens. L'OBC est sous la gouverne d'un conseil d'administration, dont la majorité des membres sont indépendants des institutions financières membres.
Depuis la création de l'OBC il y a deux ans, nous avons apporté une série de modifications à ses règlements pour officialiser les pouvoirs spéciaux des administrateurs indépendants afin de protéger l'indépendance de l'Ombudsman. Ainsi, l'accord unanime des administrateurs indépendants est nécessaire pour démettre l'Ombudsman de ses fonctions; ils sont chargés d'approuver le budget devant assurer l'efficacité du bureau de l'Ombudsman; ils recherchent des candidats au poste d'administrateur indépendant et d'ombudsman, les reçoivent en entrevue et les nomment. L'Ombudsman ne peut pas avoir déjà travaillé pour une institution financière.
Nous sommes bien outillés pour assumer notre principale fonction, soit de rehausser, de garantir et de protéger l'indépendance et la crédibilité du bureau de l'Ombudsman.
Je suis à la tête d'une petite entreprise à Vancouver, le professeur Savary est un protecteur du consommateur bien connu et un bénévole oeuvrant depuis longtemps au sein de l'Association des consommateurs du Canada. Parmi nos membres indépendants on comptait également la présidente du conseil de l'Institut canadien des comptables agréés, un ancien lieutenant-gouverneur de l'Ontario, le directeur de l'École des hautes études commerciales à Montréal et le vice-président de la Commission des valeurs mobilières de la Nouvelle-Écosse.
Le Groupe de travail MacKay endosse la structure et les activités de l'Ombudsman bancaire canadien de même que les mesures visant à protéger l'indépendance de l'Ombudsman. En fait, il ne semble pas avoir formulé une seule critique à notre égard.
Voici quelques citations tirées du rapport:
Dans le document de recherche étayant le rapport, on trouve l'observation suivante: «le système canadien respecte désormais assez bien le critère de l'indépendance». Cependant, le Groupe de travail MacKay s'est montré préoccupé par la «perception d'un manque d'indépendance». Le Groupe de travail a recommandé que le ministre des Finances nomme le conseil d'administration et que l'ombudsman réponde de ses activités au Parlement. De l'avis du conseil de l'OBC, dans le but de résoudre un problème perçu—et non un véritable problème—on risque, en privilégiant la participation obligatoire, de soulever de nombreuses autres difficultés.
Dans son mémoire présenté au Groupe de travail en octobre 1997, l'OBC faisait remarquer que:
Nous constatons avec satisfaction que le Groupe de travail s'est rallié à cette recommandation.
Plus tôt cette année, nous avons apporté des modifications à nos règlements pour ouvrir nos rangs à pratiquement toutes les institutions financières, y compris les sociétés de fiducie, les coopératives de crédit et les prêteurs spécialisés. Le conseil a demandé à M. Lauber de prendre le pouls des autres institutions du secteur financier face à la proposition. De toute évidence, si nous devions accueillir de telles institutions, il nous faudrait modifier notre nom pour en retirer le mot bancaire et le conseil devrait être composé de membres représentant tous les secteurs visés, non seulement des banquiers, et bien sûr les administrateurs indépendants devraient continuer de former la majorité.
Les banquiers siégeant au conseil appuient fortement l'élargissement du mécanisme d'ombudsman et ont sollicité l'avis des administrateurs indépendants à l'égard de chaque enjeu.
Lorsque le conseil a débattu du rapport MacKay, il est apparu évident que le transfert d'autorité psychologique était chose faite et que l'OBC était véritablement un organisme dirigé par les administrateurs indépendants. En réunissant des membres provenant des sociétés de fiducie, des compagnies d'assurance et des coopératives de crédit, le conseil répondrait aux inquiétudes à l'égard de la domination des banques, c'est-à-dire la question de la perception.
Les groupes de consommateurs et de petites entreprises que M. Lauber a rencontrés partagent cette opinion. M. Lauber va maintenant vous entretenir du mécanisme d'ombudsman et des préoccupations juridiques et juridictionnelles que suscite un mécanisme d'ombudsman des services financiers à participation obligatoire.
M. Michael Lauber: Merci, Peggy.
À titre d'Ombudsman bancaire canadien, je suis appelé à régler des différends dans tous les secteurs des services financiers. Nous constituons le mécanisme de recours indépendant des services d'ombudsman interne des banques. Notre mandat s'étend aux banques et à toutes leurs filiales. Dès lors, nous examinons les plaintes en provenance des clients des filiales de services fiduciaires, de placement, d'assurance-vie et autres assurances des banques, de même que de clients achetant d'autres produits bancaires comme les fonds mutuels.
Nous mènerons cette année quelque 200 enquêtes dont environ 20 p. 100 provenant de petites entreprises, c'est-à-dire le double des activités de l'an dernier. Près 1 200 personnes nous contacteront.
Depuis notre création voilà deux ans, nous avons déployé beaucoup d'efforts pour faire connaître le mécanisme d'ombudsman bancaire. Nous sommes très heureux de constater que, selon les conclusions du Groupe de travail, environ 40 p. 100 des Canadiens sont au courant de l'existence du mécanisme d'ombudsman.
L'OBC emploie six personnes, dont une est en poste à Montréal. Quatre de ces personnes sont bilingues et trois sont francophones. Nous sommes bien outillés pour servir les Canadiens.
Il est important de comprendre ce qu'est un ombudsman et ce qu'il n'est pas. La définition du dictionnaire se lit comme suit: une personne qui étudie des plaintes, fait état des conclusions et parvient à des règlements équitables, particulièrement entre des parties lésées et des institutions.
Le mandat de l'ombudsman est axé sur le règlement de différends. Nous offrons notre service aux clients sur une base individuelle. Nous ne sommes pas un organisme de politique publique. Nous avons comme mandat d'évaluer l'équité de la situation et, le cas échéant, de recommander à la banque de prendre les mesures nécessaires pour donner satisfaction au client. Afin de déterminer l'équité, nous consultons divers codes de conduite de l'industrie et nous faisons appel aux bonnes pratiques bancaires et commerciales. Il n'en coûte rien au client et les parties ne perdent pas leurs droits juridiques.
La structure de l'ombudsman bancaire du Royaume-Uni est souvent mal comprise et fait l'objet de comparaisons erronées avec l'OBC. Il s'agit de deux mécanismes sectoriels autoréglementés dont le financement est assuré par leurs membres. L'OBC est une régie interne largement supérieure et les administrateurs indépendants bénéficient d'une autorité beaucoup plus grande en matière de protection de l'indépendance de l'Ombudsman et d'établissement du budget. Vous trouverez un tableau comparatif à cet égard dans votre trousse d'information.
J'aimerais maintenant parler de la fonction de cerbère et de la fonction réglementation. Un ombudsman n'est ni un cerbère ni un organisme de réglementation. La fonction de cerbère appartient à l'Association des consommateurs du Canada, au CCRC, à Option Consommateurs, à la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, aux Chambres de commerce et aux autres organismes similaires. Nous avons besoin de cerbères solides et bien financés pour représenter l'intérêt public. Mais nous ne sommes pas un cerbère, nous ne sommes pas ce cerbère-là.
La fonction de réglementation appartient au gouvernement ou à un organisme de réglementation sectoriel comme l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. Les organismes de réglementation établissent des normes et des codes de conduite et imposent des mesures disciplinaires aux membres qui y dérogent. Les organismes de réglementation ne disposent habituellement pas du pouvoir nécessaire pour offrir un organisme de recours au consommateur. C'est là qu'intervient l'ombudsman.
Permettez-moi de soulever certains des problèmes d'ordre juridique et constitutionnel qu'amèneraient, selon nous, la création et le maintien d'un organisme d'ombudsman des services financiers à participation obligatoire. Au Canada, les autorités fédérales et les provinces se partagent la responsabilité des institutions financières. Par exemple, les banques sont régies par le gouvernement fédéral, tandis que les sociétés de fiducie sont principalement de ressort provincial, sauf Canada Trust qui relève du fédéral. Les compagnies d'assurance-vie et autres compagnies d'assurances sont régies par le BSIF quant à leur solvabilité, mais les provinces sont responsables de l'examen de la conformité des assureurs. La Centrale des caisses de crédit du Canada relève du gouvernement fédéral, tandis que les provinces réglementent les centrales provinciales, les coopératives de crédit et les Caisses populaires. Le secteur des placements est exclusivement de compétence provinciale.
Il y a lieu de s'interroger sur la capacité du gouvernement fédéral d'étendre sa législation à d'autres institutions que les banques et Canada Trust. De plus, toute pression du gouvernement fédéral visant à promouvoir la participation facultative des institutions à charte provinciale pourrait amener les provinces à réagir en établissant leur propre programme d'ombudsman.
• 0915
Le Québec a récemment nommé le conseil d'administration d'une
commission des services financiers qui a la capacité d'élaborer un
mécanisme de recours. L'Ontario a émis un document de travail à
l'intention de sa commission des services financiers qui autorise
également la mise sur pied d'un mécanisme de recours. Ces deux
processus visent principalement le secteur des assurances. Nous
risquons de voir surgir une multitude de programmes partout au
Canada. Cette situation aurait pour effet de dérouter le
consommateur tout en étant très coûteuse pour les institutions qui
auraient à se plier aux divers processus et normes. Ce n'était
certainement pas l'intention du Groupe de travail.
D'après notre évaluation de la situation et les avis reçus, les chances de réussite sont meilleures dans le cas de l'autoréglementation du mécanisme d'ombudsman du secteur financier que dans celui de la participation obligatoire à un tel mécanisme. Les provinces accepteront vraisemblablement plus volontiers l'autoréglementation qu'un organisme de réglementation fédéral.
Depuis combien de temps le Canada tente-t-il de former une commission nationale des valeurs mobilières? Vingt ans peut-être? Et il s'agit principalement d'entreprises et non de consommateurs.
En vertu d'un mécanisme à participation obligatoire, les tribunaux pourraient être appelés à examiner les décisions et les méthodes. La possibilité d'un examen judiciaire exigerait l'établissement d'un mécanisme plus officiel quant à la collecte de preuves, à la tenue d'audiences et à la publication des décisions. Nous estimons que le programme de notre secteur privé permet d'obtenir des résultats plus rapidement et à moindre coût pour le client tout en étant aussi équitable.
État unitaire, le Royaume-Uni est en mesure d'établir un mécanisme étendu d'ombudsman des services financiers à participation obligatoire. Cependant le nouvel organisme créé aura le pouvoir de lier les institutions financières, et la complexité juridique qui en découle met en péril l'efficacité de leurs programmes d'ombudsman et donne naissance à un organisme quasi judiciaire. La British & Irish Ombudsman Association s'inquiète de l'incidence du processus juridique sur le consommateur.
La création d'un organisme à participation obligatoire comporte des risques évidents, tant sur le plan juridique que juridictionnel. Je vous rappelle que je ne suis pas un cerbère—ce qui est incompatible avec le rôle d'un ombudsman.
Le gouvernement a un rôle à jouer dans la réglementation et l'établissement de normes pour assurer la protection du consommateur. Mais le gouvernement a-t-il à intervenir dans un différend commercial entre un client et une institution financière? Pourquoi un ombudsman indépendant du secteur privé ne pourrait-il pas jouer ce rôle?
J'aimerais passer en revue les principales questions que nous avons soulevées aujourd'hui.
Le Groupe de travail a appuyé la structure et les activités de l'OBC. Nous convenons que la mise en place d'un seul ombudsman pour l'ensemble du secteur des services financiers sert mieux les intérêts des petites entreprises et des consommateurs. Il est possible d'atténuer l'apparence de manque d'indépendance en choisissant des membres du conseil représentant tous les secteurs et en faisant participer tous les secteurs au financement de l'organisme. L'approche d'autoréglementation protège le rôle d'enquêteur et de médiateur d'un ombudsman. L'organisme à participation obligatoire aura vraisemblablement besoin d'un mécanisme plus légaliste. Enfin, les provinces accepteront vraisemblablement plus volontiers un mécanisme d'ombudsman autoréglementé et cette option permettra d'étendre le champ de compétence à l'échelle nationale. Pour moi, c'était là la priorité absolue du Groupe de travail.
Peggy.
Mme Peggy-Anne Brown: Nous aimerions terminer notre exposé par une requête. Ce que nous vous demandons, c'est de nous accorder le temps de démontrer que l'OBC peut travailler de concert avec le secteur des services financiers pour mettre en place un mécanisme d'ombudsman national des services financiers, offrant ainsi à tous les consommateurs une protection intégrée.
Nous serions également très heureux de comparaître devant ce comité, soit chaque année, soit autrement, pour présenter le bilan de nos activités. Avec l'appui du ministre des Finances et des membres du Parlement, nous croyons être en mesure de réinventer l'OBC pour en faire un mécanisme d'ombudsman pour l'ensemble du secteur des services financiers.
Merci de nous avoir écoutés. Nous allons maintenant répondre à vos questions.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, madame Brown, monsieur Lauber.
Nous allons donc passer immédiatement aux questions et commencer par M. Paul Forseth.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Merci beaucoup. Vous êtes les bienvenus à la Chambre des communes.
Peut-être pourrais-je commencer par une série de questions très techniques. Tout d'abord, quelle est la source de votre financement?
Mme Peggy-Anne Brown: Ce sont les banques membres qui financent nos activités. Nous avons commencé avec six banques membres, nous en avons aujourd'hui 12.
M. Paul Forseth: Quel est votre budget total approximatif et quelle est l'importance de vos effectifs?
M. Michael Lauber: Notre budget est légèrement supérieur à 1 million de dollars et nous sommes actuellement six personnes; et avec un peu de chance, sept la semaine prochaine.
M. Paul Forseth: Cette somme d'environ 1 million de dollars vous est versée par les membres qui adhèrent à votre organisme.
M. Michael Lauber: C'est exact. À l'heure actuelle, nos membres se partagent les coûts en proportion de leur actif. C'est entièrement proportionné à leur taille. Si nous réussissons à étendre nos services à l'ensemble du secteur financier, si nous pénétrons dans de nouveaux secteurs, il est certain que nous devrons trouver une formule de partage des coûts appropriée.
M. Paul Forseth: Vous avez donc un bureau quelque part au Canada.
M. Michael Lauber: Nous avons un bureau à Toronto et un représentant à Montréal. Cette personne-là ne travaille pas dans une infrastructure, et par conséquent nous n'appelons pas ça un bureau.
M. Paul Forseth: Comment les gens de New Westminster en Colombie-Britannique, de Regina en Saskatchewan, ou de Williams Lake en Colombie-Britannique peuvent-ils profiter de vos services, surtout ceux qui sont dans des communautés éloignées? Pour régler les différends à l'amiable, de façon non officielle, comme vous nous l'avez expliqué aujourd'hui, il est généralement nécessaire de rencontrer les gens en personne, de mettre en présence le plaignant et le sujet de la plainte. On ne peut pas faire ce genre de chose au téléphone, ni par lettre, et c'est tout le pays dont vous devez vous occuper. Comment faites-vous?
M. Michael Lauber: La grande majorité des plaintes que nous recevons sont réglées par correspondance, par des lettres. Évidemment, nous avons aussi un numéro 800. Nous préférons que les clients nous envoient les informations pertinentes par écrit si possible. Notre télécopieur est très occupé, et nous avons aussi un courrier électronique considérable et en pleine expansion.
Par exemple, la semaine dernière j'ai comparu à Vancouver devant le Comité sénatorial des banques et j'en ai profité pour rencontrer à l'aéroport deux personnes impliquées dans un différend dont je me m'occupais. C'était un cas pour lequel une rencontre en personne semblait particulièrement indiquée. J'ai très souvent fait ce genre de chose. Je prends un avion, je vais voir les gens si c'est nécessaire pour me former une juste opinion de la situation.
M. Paul Forseth: Pour l'instant, votre existence n'est pas consacrée par une loi.
M. Michael Lauber: Non. Notre organisme est un organisme d'autoréglementation dans un secteur donné.
M. Paul Forseth: Est-ce que vous préféreriez devenir ombudsman des services financiers, mais sans pour autant relever d'une loi? La première chose qui me vient à l'esprit, c'est le cas de la Commission des droits de la personne. C'est à mon avis un exemple à éviter. QQuant le citoyen moyen compare les coûts de cet organisme et son utilité, il s'aperçoit que c'est un mécanisme très lourd, très entravé par des obstacles que vous souhaiterez probablement éviter. Autrement dit, un exemple à ne pas suivre.
Pouvez-vous décrire de façon un peu plus détaillée comment, sur le plan pratique, vous pourriez arriver à devenir une organisation véritablement nationale sans devenir un organisme prévu par la loi—c'est-à-dire en demeurant davantage un organisme à participation volontaire?
M. Michael Lauber: Dans notre mémoire soumis au groupe de travail l'an dernier, nous avions déjà fait valoir la nécessité et l'utilité de créer un seul et unique poste d'ombudsman des services financiers pour l'ensemble du pays. De fait, j'ai réservé l'appellation «ombudsman des services financiers» il y a un an, ce qui montre bien ce que nous anticipions.
Comment y arriver? Il s'agit de faire valoir aux intervenants des divers secteurs la nécessité de la fonction d'ombudsman aussi bien pour eux que pour le secteur de services financiers dans son ensemble et de les convaincre qu'il serait logique de préconiser un seul organisme national capable d'offrir à tous les secteurs un service et un leadership cohérents.
À moins de créer à brève échéance un poste d'ombudsman national des services financiers, nous allons nous retrouver au bout d'un certain temps avec au moins dix ombudsmans provinciaux, un organisme fédéral et peut-être même certains ombudsmans spécialisés et alors, le consommateur ne saura plus s'y retrouver.
Les responsables de tous les secteurs que j'ai rencontrés jusqu'à maintenant ont été fort réceptifs à un tel argument. Je me bornerai à dire que, même si personne n'a décidé d'embarquer, personne n'a décidé non plus de débarquer. Certains de ceux à qui nous en avons parlé nous ont fait des réflexions très utiles et très valables.
M. Paul Forseth: On dit parfois que toute offre engendre une demande correspondante. À l'heure actuelle votre organisation est très petite et se limite à résoudre à peu près quatre cas par semaine pour l'ensemble du pays. Vous êtes un spécialiste de votre domaine. Estimez-vous vraiment qu'il y a beaucoup de travail à abattre? Il doit y avoir à l'heure actuelle des centaines de plaintes sans réponse. Voilà un bassin de clientèle en puissance, autrement dit. Quel est le son de cloche que vous entendez? Avez-vous une idée de l'ampleur du besoin auquel peut correspondre votre service?
M. Michael Lauber: À l'heure actuelle, nous faisons affaire avec les banques et toutes leurs filiales. Les banques ont déjà des processus pour traiter les plaintes de leurs clients. L'ombudsman de chaque banque règle, à l'interne, environ 70 p. 100 des cas. Ce sont les autres plaintes qui nous parviennent.
Pour ce qui est maintenant des autres secteurs, à savoir le secteur de l'assurance, aussi bien l'assurance-vie que l'assurance générale, sauf pour ce qui est des plaintes que nous pourrions recevoir des filiales de banques, je n'ai pas vraiment d'idée précise du nombre de plaintes. Je pourrais en dire autant des coopératives de crédit et de Canada Trust. Il faudrait réunir les ressources susceptibles de correspondre aux besoins, embaucher des gens, adapter constamment les ressources humaines et les systèmes à la demande. Il faudrait des personnes compétentes dans divers secteurs.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Forseth.
[Français]
J'invite maintenant M. Paul Szabo à poser ses questions.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je vous souhaite la bienvenue ici ce matin et je tiens à vous remercier de votre exposé. Il me semble ressortir clairement de votre exposé que vous estimez jouer un rôle important et que vous avez été en mesure de faire le travail qui vous incombe. Vous n'êtes pas un organisme de réglementation ni un cerbère et vous vous attendez à voir évoluer votre rôle en fonction des besoins des Canadiens.
Cela dit, il me semble que l'activité du bureau de l'ombudsman pourrait servir d'indicateur de la bonne santé du secteur bancaire, selon le nombre, la nature, et la pertinence des cas qui vous seraient soumis. Ainsi, même si vous n'êtes établi que depuis peu et si bon nombre de Canadiens ne sont pas au courant de l'existence d'un ombudsman des banques, il vous serait peut-être possible de dégager certaines tendances d'ordre général—je suppose que chaque cas particulier a un caractère confidentiel—selon les diverses catégories de cas... Je ne vous demande pas une évaluation, mais nous serions peut-être en mesure de déterminer certains domaines où le secteur bancaire n'a pas répondu aux besoins des Canadiens. Comme point de départ, pouvez-vous me donner une idée de l'information que vous êtes disposés à fournir au sujet des données brutes dont vous disposez?
M. Michael Lauber: Même s'il faut reconnaître qu'il s'agit d'un petit pourcentage de cas dans un très vaste secteur, je n'ai pas encore parlé des questions de santé, notamment, puisque l'étude de quelques centaines de cas ne me permet pas de m'ériger instamment en expert de la question.
Mais nous avons néanmoins constaté que la plupart de nos plaintes venant des petites entreprises ont trait au crédit, comme vous le confirmeront les diverses statistiques que nous envoyons périodiquement à votre bureau. La plupart des plaintes portent sur le recouvrement. Autrement dit, on ne conteste pas tant le jugement d'affaires des banques, mais plutôt la façon dont on traite le client en cours de recouvrement. Je n'ai pas pu conclure que les banques avaient fait un mauvais jugement, la plupart du temps.
• 0930
Nous recevons, de la part des consommateurs, toute une gamme
de plaintes dont plusieurs portent particulièrement sur les
investissements. Au printemps, il s'agit de gens qui se plaignent
du temps qu'il a fallu pour virer leur REER ou leur FERR d'une
institution à une autre. À cette époque-là de l'année, les médias
en font d'habitude longuement état. Nous, nous avons soulevé la
question auprès de certaines banques, et allons suivre l'affaire.
Les banques n'adhèrent pas aux mêmes normes que les fiducies ou que les courtiers en valeurs mobilières qui font essentiellement la même chose. Cela illustre le besoin d'imposer une certaine conformité. La plupart du temps, les différences se justifient pour de bonnes raisons d'affaires, mais cette incohérence existe. Nous allons nous occuper de ce genre de problème de plus en plus.
Vous avez mentionné la visibilité. J'ai, sur mon bureau, une ébauche de lettre que j'enverrai aux banques leur demandant d'étaler leur brochure sur la fonction d'ombudsman—c'est-à-dire leur brochure sur la satisfaction des clients—c'est-à-dire de les présenter dans un endroit précis dans leur succursale. Je vais leur suggérer de les présenter au même endroit où ils présentent les documents de la SADC, pour que les clients sachent exactement où aller chercher l'information, de même que le personnel. Vous voyez donc que, outre les plaintes spécifiques auxquelles nous répondons, nous nous intéressons aussi à des questions de politique et de pratiques.
M. Paul Szabo: Revenons à ce que vous avez dit au début au sujet des petites entreprises. Vous savez que l'on pense beaucoup à elles lorsqu'on discute des activités bancaires, et il est donc important d'étudier plus à fond ce secteur.
Vous avez affirmé que la plupart des problèmes se posaient du côté du recouvrement, et que les plaintes des petites entreprises représentaient 50 p. 100 et plus du volume de plaintes. Quel pourcentage des plaintes des petites entreprises touche le recouvrement?
M. Michael Lauber: Depuis nos débuts, presque 50 p. 100 des plaintes provenant des petites entreprises touchent le recouvrement. Dix à 15 p. 100 des autres plaintes touchent l'accès au crédit, le changement des modalités de ce crédit et sa renégociation. Je dirais donc environ la moitié.
M. Paul Szabo: Cela me semble important. Monsieur le président, nous devrions avoir plus de chiffres expliquant la nature des problèmes que signalent les petites entreprises. On parle souvent d'une situation linéaire et on prétend souvent que leur seul problème, c'est l'accès au crédit. Je veux bien comprendre que celui qui se plaint s'estime habituellement lésé ou ne se déclare pas satisfait des résultats d'une demande. Par conséquent, je me serais attendu à ce qu'il y ait plus de plaintes sur le fait que la banque exerce des pressions sur l'emprunteur parce qu'il n'a pas payé ses factures ni fait les paiements exigés sur sa dette ou parce que, par exemple, la banque a refusé de lui consentir un prêt malgré qu'il ait, selon lui, une excellente idée...
M. Michael Lauber: Les ombudsmans internes des banques reçoivent plus de plaintes sur l'accès au crédit que nous. Nous sommes dans la situation inverse, pour notre part, ce qui semble indiquer qu'on règle la plupart du temps les plaintes au niveau de la banque elle-même.
M. Paul Szabo: J'ai une dernière question sur le virement des REER vers un fonds FERR, par exemple.
Lorsque vous faites affaire à des plaintes de ce genre, partez-vous du principe que les déposants devraient être indemnisés pour qu'ils se retrouvent dans la situation où ils auraient été si tout avait marché comme sur des roulettes et si on avait respecté les lignes directrices? Si, par exemple, il a fallu deux semaines pour virer les fonds alors que cela aurait pu être fait en trois jours à peine, indemnisez-vous les déposants en fonction de la valeur de rendement de l'argent?
M. Michael Lauber: Oui, si leurs fonds n'ont pas été investis comme il le fallait pendant ce temps, si le temps qu'ils ont attendu était déraisonnablement long, s'ils ont subi une perte de revenu à la suite de ce retard, nous demandons à la banque de les indemniser.
M. Paul Szabo: Quel pourcentage des plaintes que vous recevez représente des plaintes recevables qui exigent que la situation soit corrigée?
M. Michael Lauber: La moitié, environ. Dans certains cas, on peut très bien expliquer, du point de vue des affaires, pourquoi la transaction a pu prendre deux à trois semaines. Il se peut que cela soit à cause du type de produits financiers détenu par le plaignant. Il se peut que le transfert financier se fasse vers l'extérieur, par exemple.
Par conséquent, dans bien des cas, les raisons du retard sont bonnes et s'expliquent. Parfois, c'est uniquement un problème de lenteur administrative.
M. Paul Szabo: Je pense avoir terminé. D'après ce que j'ai entendu, vous semblez convenir que la grande majorité des clients qui se présentent à votre bureau estiment avoir été lésés. Par ailleurs, il s'agit aussi parfois de gens qui n'ont pas aimé la façon dont une banque donnée s'est comportée lors d'une transaction particulière.
De plus, les plaintes d'environ la moitié de ceux qui viennent chez vous étaient infondées, ou...
M. Michael Lauber: Revenons à nos chiffres généraux. Au cours de l'exercice se terminant en octobre 1997, au cours duquel nous avons lancé une centaine d'enquêtes, nous avons recommandé que des mesures spécifiques soient prises en faveur des clients dans environ 40 p. 100 des cas. Cette année, nos recommandations en faveur des clients sont d'environ 25 p. 100 de l'ensemble. Dans ces derniers cas, nous recommandons de corriger la situation.
En outre, dans 10 ou 15 p. 100 des autres cas, les clients sont satisfaits, ou je devrais dire plutôt qu'ils comprennent que leurs plaintes n'étaient pas fondées. Une fois notre enquête faite, nous devons leur expliquer notre démarche et leur expliquer que même s'ils n'en sont pas satisfaits, la banque a agi correctement dans leurs cas.
Par conséquent, ceux qui ont compris nos explications ou qui ont vu leur situation corrigée représentent environ 40 à 50 p. 100 des plaignants.
Mme Peggy-Anne Brown: Il importe également d'ajouter que les banques ont accepté les recommandations de l'ombudsman dans tous les cas, sans exception.
M. Paul Szabo: Les Canadiens devraient se réjouir de votre existence et de savoir que vous faites de votre mieux pour résoudre les différences de façon objective et, dans la mesure du possible, pour vous assurer que les plaignants ont bien compris ce qui s'est passé et pourquoi. Votre rôle est très précieux, et je vous remercie de votre témoignage.
[Français]
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Szabo.
Je demande maintenant à M. Valeri de poser ses questions.
[Traduction]
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci de votre témoignage. Dans votre mémoire, vous parlez d'une perception, à savoir que d'après le conseil d'administration, l'option législative servirait uniquement à résoudre un problème de perception plutôt qu'un problème réel. Je n'en ai aucune preuve, mais j'aimerais tester votre hypothèse.
La plupart des Canadiens sont d'avis qu'il y a un déséquilibre dans leurs rapports avec les institutions financières, quelles qu'elles soient. Dès lors qu'ils mettent le pied dans une institution financière, que ce soit pour acheter un REER, pour demander un prêt pour une petite entreprise, une marge de crédit ou une hypothèque, ils ont l'impression d'être désavantagés dans toute négociation ou discussion. Je me demande si MacKay ne tente pas de corriger ce déséquilibre, perçu ou réel, en suggérant la voie législative.
La plupart des Canadiens à qui j'ai parlé ne connaissent pas l'existence de l'ombudsman. Ils en ont peut-être entendu parler vaguement, mais ont souvent l'impression que celui-ci travaille pour la banque, en fin de compte. Ils ne sont pas sûrs de lui faire confiance, ni que son jugement sera équitable. Lorsqu'ils entendent dire que votre bureau est financé par les banques, ils en deviennent alors convaincus, même si vous avez un conseil d'administration indépendant dont la majorité des membres ne représentent pas des banques.
• 0940
C'est peut-être un problème de perception, mais je me demande
si la négociation et la transaction ne revêtiraient pas un
caractère différent si le consommateur avait l'impression qu'il
pouvait se tourner vers un arrière-guichet en mesure de mieux le
protéger. Il serait plus à l'aise car il sentirait plus facilement
l'indépendance de ce dernier, et se sentirait protégé par le
gouvernement ou par une loi.
N'est-ce pas ce que tente de faire le rapport MacKay? Comme votre conseil d'administration a refusé cette idée, j'imagine que vous en avez déjà discuté.
M. Michael Lauber: Au départ, lorsque des clients viennent se plaindre chez nous, très peu d'entre eux s'inquiètent de notre indépendance. S'ils nous posent une question, nous leur répondons, et le client s'en tient souvent à cette réponse. Je ne crois pas que la perception d'indépendance soit un grave problème, du point de vue pratique.
Je comprends que le rapport MacKay s'inquiète de la perception. Vous avez parlé vous-même du déséquilibre perçu entre, d'une part, une grande institution financière et, d'autre part, le petit client. Nous comprenons cette perception. Il est difficile de la changer, mais sachez que notre structure est exceptionnelle. La structure du bureau de l'ombudsman est supérieure à toutes les autres que j'ai vues. Elle dépasse de loin celle de l'ombudsman britannique, que tous portent au nues et dont tous vantent l'indépendance.
S'il s'agissait d'une fonction de droit public, j'imagine facilement que les clients pourraient venir non pas me reprocher d'être indépendant, mais plutôt d'être un fonctionnaire.
Il y aura des gens qui se plaindront peu importe la méthode choisie. Je ne vois vraiment pas...
M. Tony Valeri: À l'heure qu'il est, les clients se disent que vous êtes un fonctionnaire du secteur privé.
M. Michael Lauber: Mais nous réussissons à résoudre leurs problèmes.
M. Tony Valeri: Je comprends.
M. Michael Lauber: L'important pour eux, c'est que nous réglions leurs problèmes.
M. Tony Valeri: Bien. Je voudrais vérifier une autre hypothèse.
MacKay prétend que les provinces devraient adhérer volontairement à cette fonction d'ombudsman du secteur des services financiers. Que dites-vous d'une structure ou d'un modèle qui évoluerait jusqu'à proposer une gérance commune de la fonction d'ombudsman national?
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Ce à quoi je songe, c'est de vous éloigner de la structure actuelle. Au fur et à mesure que les provinces adhéreraient au modèle, elles adopteraient des lois qui refléteraient le modèle à l'échelle provinciale. On pourrait envisager le dépôt d'un rapport à l'Assemblée législative provinciale de même qu'au Parlement fédéral. De plus, au fur et à mesure de leur adhésion, les provinces auraient le loisir de nommer leurs propres représentants à ce bureau. Cette personne pourrait représenter le secteur des services financiers de la province, ou un groupe de consommateurs, ou quelqu'un d'autre.
Que dites-vous de l'idée?
M. Michael Lauber: Cela pourrait donner de bons résultats, mais vous et moi serons sans doute à notre retraite avant que votre idée puisse être concrétisée de façon pratique. Mais c'est ce que nous envisageons dans une certaine mesure, voire dans une grande mesure.
Le premier principe auquel nous adhérons, c'est qu'il devrait y avoir un ombudsman pour le secteur financier. Nous étudions ensuite la question des provinces.
Pour avoir parlé à beaucoup de gens dans les provinces et à beaucoup de cadres supérieurs du gouvernement fédéral de la question des relations fédérales-provinciales, je puis vous dire que c'est un véritable enjeu. Il faudra parfois, de temps en temps, inciter les gens à bouger, mais avec un peu d'aide, je crois que nous pourrons instaurer rapidement un système d'ombudsman national sur une base privée.
Si nous options pour la base législative, certaines provinces refuseraient de but en blanc et nous demanderaient de nous retirer. Elles affirmeraient qu'un organisme de droit public n'a pas sa place sur leur territoire, car c'est à elles de veiller au comportement sur le marché des assurances ou des caisses populaires, par exemple. Par contre, elles n'auraient pas les mêmes préoccupations si l'industrie des secteurs financiers choisissait de s'autoréglementer, sur une base provinciale ou même fédérale. Voilà la raison et voilà pourquoi nous mettons l'accent sur ce qui est réalisable.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.
M. Tony Valeri: Une dernière question.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Soyez bref.
M. Tony Valeri: Je vous demanderais d'ouvrir un instant vos horizons. Au fur et à mesure qu'évolue le secteur des services financiers, votre rôle tend à changer. Cela se confirme au fur et à mesure que nous passons du concept de l'ombudsman des banques pour aller vers celui de l'ombudsman du secteur des services financiers.
On a jusqu'à maintenant invoqué un peu partout la doctrine de l'interdiction des fusions entre les grandes institutions. Le rapport MacKay prétend que cette doctrine ne devrait plus s'appliquer autant. J'imagine que l'idée qu'il pourrait y avoir un examen public des fusions ou un examen des répercussions des fusions sur la population pourrait avoir de sérieuses répercussions sur votre rôle.
Qu'en dites-vous? Cela pourrait avoir des conséquences très spécifiques pour vous. Supposons que le secteur des services financiers commence à évoluer et que, à la veille de cette évolution, on se demande quelles en seront les conséquences pour le bien général. Le résultat pourrait être bien différent par rapport à ce qui se passerait si on n'avait qu'à dire oui ou non et si vous n'aviez qu'à en assumer les retombées.
Croyez-vous que le processus d'examen de la fusion telle que décrit par le rapport MacKay soit trop astreignant? Ou est-il suffisant? Que feriez-vous différemment, étant donné votre grande expérience?
M. Michael Lauber: Le gouvernement voudra sans doute régir le processus d'examen des fusions éventuelles. Si des fusions sont approuvées, le gouvernement voudra maintenir son droit de regard. Mais cela ne nous touche pas vraiment, monsieur Valeri. Ce n'est pas notre rôle de nous inquiéter de la fermeture de succursales bancaires, des problèmes d'emploi, des compressions de personnel, etc. Nous n'avons pas cette fonction de chien de garde.
Notre rôle consisterait à continuer de nous occuper des 35 millions de Canadiens et de leurs relations d'affaires avec les banques. Si leur banque fusionne avec une autre, cela veut dire évidemment qu'il y aura moins de banques en ville, mais cela ne fera pas baisser le nombre de clients.
Nous pourrions évidemment recevoir des plaintes qui découleraient des fusions, de la part de clients individuels. Certains clients pourraient avoir été oubliés en cours de route et pourraient venir se plaindre chez nous. Nous pourrions recevoir plus de plaintes, mais nous n'avons aucun droit de regard sur le comportement d'une banque en cas de fusion...
M. Tony Valeri: Ce n'est pas ce que je vous demandais: je voulais savoir si vous aviez une opinion là-dessus.
M. Michael Lauber: Oui.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Valeri.
Il ne nous reste plus que deux minutes. Madame Bennett, puis monsieur Plamondon.
Mme Carolyn Bennett (St. Paul, Lib.): J'aimerais vous dire, au nom de mes commettants, que vous avez fait un travail étonnant depuis deux ans. En effet, 40 p. 100 des Canadiens connaissent votre existence et s'estiment satisfaits de votre travail.
Dans le cadre de cette discussion de l'option que constitue la voie législative par rapport à ce qui existe actuellement, j'aimerais demander à Mme Brown comment elle a réussi à mettre la main sur un conseil d'administration si formidable? Si l'on regarde les titres de compétence de ceux qui siègent au conseil, on comprend que les Canadiens aient l'impression d'être entre de bonnes mains. Cela fait du bien de savoir que des gens de cette compétence font partie d'un conseil d'administration comme le vôtre.
À la lumière de l'avenir qui se dessine pour les institutions financières, comment pouvons-nous nous assurer du calibre des membres du conseil d'administration et comment faire en sorte que les Canadiens n'aient pas l'impression qu'ils sont en réalité des agents secrets des banques? Autrement dit, comment assurer la qualité de votre conseil d'administration?
D'autre part, puisque dorénavant la majorité des directeurs sont de l'extérieur, comment allez-vous établir le budget? Est-ce que vous soumettez une facture aux banques, comment cela fonctionne-t-il? Est-ce que vous commencez par établir le budget pour répartir ensuite les coûts proportionnellement à l'actif de chacun?
J'ai entendu une petite critique, et j'aimerais savoir... Les gens disent qu'ils ne peuvent s'adresser à vous que si la banque a son propre ombudsman. Est-ce que c'est vrai? Comment pouvez-vous être certain d'être à la disposition de tous les Canadiens?
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, madame Bennett.
Une réponse très courte, si vous le voulez bien.
Mme Peggy-Anne Brown: Je pense que les directeurs indépendants continueront à avoir les mêmes qualifications, parce qu'en effet, ils sont choisis par les directeurs indépendants actuels.
Notre processus de sélection est extrêmement sévère, et nous ne recherchons pas des gens qui représentent certains intérêts, mais plutôt des gens qui veulent faire ce travail pour rendre service à la communauté.
Effectivement, nous établissons un budget. Le comité de directeurs indépendants se réunit et décide des besoins après quoi on envoie des factures aux banques-membres.
• 0950
Toutes les institutions financières qui souhaitent adhérer à
nos services doivent nommer un ombudsman à l'interne. Nous
considérons que c'est un élément très important. Grâce à
l'existence de notre service d'ombudsman, nous avons pu constater
que les institutions membres trouvent des solutions beaucoup plus
satisfaisantes aux plaintes qui leur parviennent. À cause de notre
existence, elles sont moins exposées à des pressions. Il y a
également une certaine compétitivité qui s'établit entre les
banques car nous publions des statistiques sur le nombre de
plaintes au sujet des différentes institutions membres.
Mme Carolyn Bennett: Publiez-vous une liste des gens qui ont décidé de ne pas adhérer? Qu'est-ce qui encourage les gens moralement à adhérer à vos services?
Mme Peggy-Anne Brown: Non, pour l'instant nous ne publions pas de listes.
Mme Carolyn Bennett: Est-ce que le public n'aurait pas intérêt à savoir quelles institutions n'utilisent pas vos services?
M. Michael Lauber: Pour l'instant, pratiquement toutes les banques qui servent le public et la petite entreprise ont adhéré au système.
Mme Carolyn Bennett: Mais nous considérons l'avenir?
M. Michael Lauber: Oui, c'est exact.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Nous devons nous dépêcher car nous sommes déjà en retard et nos invités suivants sont déjà arrivés.
[Français]
Monsieur Plamondon, s'il vous plaît. Je vous accorde cinq minutes au maximum. Vous n'êtes pas obligé de prendre tout ce temps.
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Merci, monsieur le président. Je vais laisser cela à mon bon jugement.
Je voudrais vous parler d'un aspect un peu différent de ceux qu'on a abordés dans les autres interventions. Depuis l'âge de 25 ans, j'oeuvre au sein de la petite entreprise en tant que propriétaire ou actionnaire. J'ai 55 ans maintenant; j'y oeuvre donc depuis 30 ans. Je possède actuellement quatre petites compagnies, et près de 125 employés travaillent dans une compagnie dont je suis majoritairement actionnaire.
Je suis en politique depuis 14 ans, et de nombreux commettants viennent à mon bureau non pas parce que je suis député, mais parce qu'ils m'ont connu comme président de la chambre de commerce ou lorsque je participais à différents mouvements dans ma circonscription. Ils me parlent de façon très confidentielle, mais en même temps très ouverte de leurs problèmes avec les banques. Le meilleur conseil que je puisse donner à quelqu'un qui vient me rencontrer à mon bureau et qui me dit qu'il veut se lancer en affaires, c'est que s'il pouvait ne pas avoir besoin de la banque, il serait très heureux en affaires. C'est la pire des solutions que d'être pris comme un esclave de la réglementation d'une banque, surtout lorsque vous avez besoin d'avoir recours à l'occasion à votre marge de crédit.
Vous, vous êtes l'ombudsman. J'ai eu affaire à des personnes qui exercent votre métier parce que j'ai déjà déposé des plaintes auprès des ombudsmen de chacune des banques. Dans un certain cas, l'ombudsman de la banque était un ancien vice-président de la banque. Conflit d'intérêts ou pas, la résolution de ma plainte n'a pas été un grand succès. Dans un autre cas, lorsque je représentais un de mes commettants de Tracy qui voulait déposer une plainte, je me suis buté à un répondeur à Toronto dont le message était unilingue anglais. Dans un autre cas, j'ai eu du succès lorsque j'ai aidé une dame qui avait déposé une plainte auprès de l'ombudsman d'une banque au sujet d'une carte de crédit. Je parle toujours des ombudsmen des banques ici et non pas de votre groupe, bien que vous les supervisiez.
Tout cela m'amène à vous poser la question suivante: est-ce que vous n'auriez pas le devoir de réfléchir sur le comportement des banques ou les habitudes que certaines d'elles ont développées au cours des sept ou huit dernières années, à savoir que quand les choses sont un peu serrées dans une PME et qu'elle rencontre quelque difficulté au point de vue financier, on envoie une compagnie de vérification, un sous-traitant de la banque, pour examiner si l'inventaire est bien correct et si on fonctionne comme il le faut? Or, la plupart de ces compagnies de sous-traitance sont des bandits notoires qui travaillent pour les banques. Je pèse bien mes mots: ce sont des bandits notoires. Ces compagnies s'installent là en patrons et disent à la PME qu'elle peut payer tel fournisseur, mais pas tel autre, parce qu'elles connaissent tel fournisseur, font affaire avec lui, ont déjà vérifié ses activités ou recevront une ristourne. En terminant, je vous donnerai un exemple.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous devriez au moins laisser à nos témoins quelques minutes pour répondre à votre question.
M. Louis Plamondon: À mon avis, cet exemple est pertinent. J'ai calculé que vous aviez accordé sept minutes à l'autre côté; je peux donc avoir au moins cinq minutes.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais vous avez déjà pris quatre minutes. C'est pourquoi je porte ceci à votre attention.
M. Louis Plamondon: Je prendrai mes cinq minutes pour vous parler d'un cas particulier. J'ai collaboré à un projet avec la Banque fédérale de développement, qu'on appelle aujourd'hui la Banque de développement du Canada, et réussi à obtenir un prêt de 150 000 $ au bout de trois mois après avoir travaillé à monter des dossiers, à réaliser des études de marché et ainsi de suite. Quand on a déposé les 150 000 $ dans le compte de la compagnie, les bandits envoyés par la banque se sont approprié 115 000 $ à titre de salaires. On a perdu ces 150 000 $ qui devaient nous permettre de décrocher un fameux contrat de 2 millions de dollars avec la France.
Je trouve cela épouvantable. C'est tout un système qu'on a établi. Les vérificateurs ont l'ordre d'aller auprès des compagnies et de les amener à se servir de leur marge de crédit. En un an, on en est arrivé à imposer des frais bancaires de 300 000 $ à une compagnie dont le chiffre d'affaires est de 3 millions de dollars! J'ai ces chiffres en main. C'est incroyable.
Je me demande si, au lieu de se limiter à l'examen de plaintes individuelles, votre mandat ne consiste pas aussi à effectuer de telles vérifications du comportement des banques.
[Traduction]
Le vice-président (M. Nick Discepola): Très rapidement, car le député vous a laissé moins de cinq secondes pour répondre.
M. Michael Lauber: Je vous remercie pour votre question. Je vais essayer d'être le plus bref possible.
Je suis moi-même comptable agréé et j'exerce depuis 32 ans, je n'ai donc jamais été l'un de ces bandits. Cela dit, j'ai des clients qui ont été victimes de ces bandits, et j'ai une très piètre opinion d'eux. C'est une situation qui est loin d'être confortable.
M. Louis Plamondon: Je vais vous donner le nom de ce bandit.
M. Michael Lauber: D'accord.
Pour revenir à ce que vous avez dit, l'ombudsman est un des vice-présidents de la banque. Dans la plupart des cas, ce sont des employés des banques. Il faut trouver un point d'équilibre entre l'indépendance d'une part et la compétence d'autre part. Personnellement, je pense que la compétence est plus importante.
Quant aux gens qui sont unilingues, c'est regrettable. Je suis désolé de l'être moi-même, mais quand vous téléphonez à mon bureau, il y a quatre personnes sur six qui pourront vous répondre en français. Sur ce plan-là, nous nous débrouillons bien, et toutes les banques ont pris des dispositions pour servir adéquatement les clients francophones.
Vous avez dit que j'exerçais un contrôle sur les ombudsmans. Je n'exerce pas de contrôle. J'accepte les appels qui me parviennent de leur bureau. Je n'ai aucun droit de contrôle sur eux. Nous travaillons en collaboration, mais je ne les contrôle pas.
Quant au comportement des banques, celles-ci me disent qu'elles privilégient le client et les services aux clients, et cela grâce à un système qui met en cause le travail accompli par ce comité et également par le comité de l'industrie de même que les ombudsmans à l'interne et l'établissement de notre bureau. Tous ces développements ont encouragé les banques à porter une plus grande attention à leurs clients et aux plaintes de ceux-ci. Je n'ai pas de données historiques bancaires, mais les gens de ce secteur me disent que la situation a changé, que l'existence de cet ombudsman qui étudie sérieusement et efficacement les plaintes a fait changer l'état d'esprit. Je n'ai pas de raison de ne pas le croire.
Je serai heureux de discuter avec vous du cas de votre électeur après la séance.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Lauber.
[Français]
Monsieur Plamondon, la greffière me dit qu'il nous reste un peu de temps. Je vous permets donc de poser une dernière question, mais sans préambule, s'il vous plaît.
M. Louis Plamondon: Lorsque je parlais de service dans les deux langues officielles, je faisais allusion à un appel téléphonique que j'avais fait au nom d'un client à l'ombudsman d'une banque. J'avais dû communiquer avec le bureau de Toronto parce qu'il n'existait pas de bureau à Montréal, comme cela aurait dû être le cas. Le message que j'ai reçu était uniquement en anglais. Tout ce que je demandais, c'est qu'on nous communique le message dans les deux langues. Lorsqu'on téléphone aux bureaux situés au Québec, le message est toujours dans les deux langues, mais ce n'est jamais le cas hors Québec.
Ça ne me dérange pas qu'à votre bureau, il n'y ait qu'une personne qui parle français, pourvu qu'on puisse me donner un service dans les deux langues et me dire à qui je dois m'adresser. C'est simplement cela que je soulevais.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Plamondon.
[Traduction]
M. Michael Lauber: Je vais transmettre cela à l'ombudsman.
[Français]
Le vice-président (M. Nick Discepola): En tant que Québécois, je demande également que ce service soit offert dans les deux langues au Québec.
M. Louis Plamondon: Le service est toujours offert dans les deux langues au Québec; c'est seulement à l'extérieur du Québec que le service n'est offert que dans une seule langue.
[Traduction]
Le vice-président (M. Nick Discepola): J'aimerais vous poser une question très courte. Nous n'avons vraiment plus de temps.
[Français]
M. Louis Plamondon: Monsieur le président, je voudrais corriger cette perception qu'on a. Appelez n'importe quelle banque au Québec et on vous offrira le service dans les deux langues. Mais si vous appelez n'importe quelle banque en dehors du Québec, le service ne sera pas bilingue.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je n'ai rien dit. J'ai demandé...
M. Louis Plamondon: Vous avez dit que vous vouliez un service bilingue au Québec. Vous l'avez déjà.
Le vice-président (M. Nick Discepola): J'ai dit que j'aimerais avoir le même service au Québec.
M. Louis Plamondon: C'est ça, vous l'avez déjà. Mais quand je quitte le Québec, ce n'est pas le cas.
[Traduction]
Le vice-président (M. Nick Discepola): Comme notre temps est écoulé, je vais poser quelques questions excessivement courtes.
Dans votre modèle, où il y a un ombudsman unique pour les services financiers, vous dites que celui-ci s'occuperait des quatre piliers. Pensez-vous qu'il pourrait y avoir des conflits d'intérêts parmi les représentants au conseil? Comment les plaintes seraient-elles traitées? Est-ce qu'il y a des plaintes qui se ressemblent? Faudrait-il mettre en place des services spécialisés, un pour le secteur des assurances, un pour le secteur des courtiers, ou bien pensez-vous qu'un seul responsable pourrait s'occuper de toutes les plaintes, à condition d'avoir une formation adéquate?
M. Michael Lauber: Je pense qu'avec une formation adéquate une seule personne pourrait se charger de la majeure partie des enquêtes. À l'heure actuelle, nous n'avons pas un service spécialisé dans les affaires bancaires, mais rien ne nous empêche de prendre conseil auprès de spécialistes, de leur demander ce qui constitue une bonne pratique, ce qui est généralement accepté, etc. On pourrait faire la même chose. Il est certain que pour les assurances on aurait besoin de gens qui comprennent bien le secteur des assurances, la façon dont c'est organisé, qui connaissent bien les normes en vigueur dans l'industrie et à défaut, il faudrait pouvoir consulter des spécialistes.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous avez dit que vous n'étiez pas un cerbère. En fait, vous avez dit que le rôle de cerbère était pratiquement incompatible avec celui d'ombudsman.
Il y a une recommandation de MacKay qui me met mal à l'aise, celle où on dit que les banques devraient être autorisées à utiliser des renseignements personnels pour vendre des assurances, à condition qu'il n'y ait pas de coercition. Je regarde vos statistiques et je vois que d'après les ombudsmans des banques, sur 2 471 cas pendant une période de huit mois, il n'y a eu aucun incident, aucune plainte même au sujet de ventes liées. Et pas de plaintes de ce genre non plus parmi les 699 provenant de petites entreprises. Chez vous, c'est la même chose, sur près de 700 plaintes, vous n'avez jamais rien eu au sujet de la vente liée.
Ce qui m'inquiète, c'est qu'une des recommandations de M. MacKay risque de créer une situation qui serait impossible à contrôler. J'ai pensé que votre bureau pourrait peut-être recevoir les plaintes de gens qui considèrent avoir été indûment influencés. En cas de ventes liées avec coercition, à qui ces gens-là peuvent-ils s'adresser? Est-ce que le recours prévu par M. MacKay est celui du système juridique?
M. Michael Lauber: Non. Pour commencer, les statistiques que vous citez remontent à octobre 1997. Ce sont des chiffres qui ont été arrondis, et il y a eu des plaintes, mais tellement peu, qu'elles ne figurent pas dans ces pourcentages.
Quant aux délibérations de ce comité en mars sur la vente liée, à l'époque je crois avoir dit que six personnes étaient venues déclarer des cas de ventes liées, mais nous avons pu constater plus tard que ce n'était pas de la vente liée. Quelques plaintes de cet ordre ont été renvoyées aux ombudsmans bancaires, et c'est ce que j'ai expliqué au comité à l'époque. Quelques personnes nous ont appelés pour nous parler de cette question, mais je pense que depuis lors, nous n'avons reçu aucune plainte officielle. Vous vous souviendrez qu'à la même époque le BSIF vous avait parlé de 20 ou 30 plaintes qu'ils avaient reçues au sujet de la vente liée.
En ce qui concerne la place occupée par la vente liée, maintenant que votre comité a recommandé d'insérer cette disposition dans la loi—et cela a été fait—le client a le droit de s'adresser au processus de règlement des différends de la banque. Il a également le droit de faire appel à notre bureau. À chaque palier, nous tentons de régler le problème et de donner satisfaction au client.
Je dirais aux intéressés qu'un processus s'est appliqué et que s'ils veulent aller plus loin, ils peuvent soumettre la question au BSIF puisque la question tombe sous le régime d'une loi, soit la Loi sur les banques. Je les informerais de leurs droits d'approcher le BSIF aussi bien que de l'existence d'un processus d'autoréglementation destiné à régler ce genre de cas.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Brown, monsieur Lauber et monsieur Savary. Vous nous avez présenté des points de vue originaux et fort importants. Nous vous en remercions.
J'aimerais maintenant suspendre la séance durant une trentaine de secondes pour permettre à nos invités suivants de prendre place.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Nos invités suivants représentent la Fondation canadienne pour la protection du patrimoine. J'aimerais vous présenter M. Brian Anthony, directeur exécutif, ainsi que M. Douglas Franklin, directeur des relations gouvernementales et des relations publiques.
Messieurs, vous n'avez pas de mémoire, d'après ce que j'ai compris, mais vous disposez de cinq à dix minutes pour nous faire part de vos constatations et, par la suite, les membres du comité aimeraient avoir l'occasion de vous poser des questions. Soyez donc les bienvenus.
M. Brian Anthony (directeur exécutif, Héritage Canada Foundation): Monsieur le président, membres du Comité permanent des finances, j'aimerais vous remercier tout d'abord de nous avoir invités à comparaître devant vous dans le cadre de vos délibérations concernant le rapport du Groupe de travail sur l'avenir du secteur des services financiers au Canada, qui a été soumis en septembre au ministre des Finances par son président, Harold MacKay.
Avant d'aller plus loin, j'aimerais vous remercier à nouveau de l'occasion qui m'a été donnée de comparaître la semaine dernière dans le cadre de vos consultations prébudgétaires. Je vous avais alors promis, monsieur le président, de vous transmettre et de transmettre aux membres de votre comité des renseignements additionnels au sujet de la Fondation canadienne pour la protection du patrimoine, ce que j'ai d'ailleurs fait. Pour informer ceux qui n'auraient peut-être pas reçu ces renseignements, ou ceux qui n'ont pas participé aux délibérations de la semaine dernière, et avec l'indulgence du député qui était là la semaine dernière—je me propose de vous donner quelques renseignements d'ordre général au sujet d'Héritage Canada.
• 1010
La Fondation canadienne pour la protection du patrimoine,
mieux connue sous l'appellation Héritage Canada, à ne pas confondre
avec le ministère du Patrimoine canadien, célèbre cette année son
25e anniversaire. L'organisme a été créé en 1973 par le
gouvernement fédéral à titre de fondation de bienfaisance sans but
lucratif aillant pour mandat de favoriser la conservation du
patrimoine bâti du Canada. L'organisme a été créé comme fondation
de manière à ce qu'il puisse être indépendant du gouvernement, tant
sur le plan financier qu'administratif, mais on nous a conféré le
statut de fiduciaire de la Couronne, de manière à ce que nous
puissions, le cas échéant, agir au nom du gouvernement, notamment
en matière fiscale.
Vous vous demandez peut-être en quoi un organisme comme le nôtre peut s'intéresser à vos délibérations. D'ailleurs, certains observateurs ici présents ce matin m'ont déjà posé la question. En bref, je vous ferai valoir qu'une bonne partie du patrimoine bâti du Canada est possédé et exploité par des institutions financières, et nous ne voudrions pas qu'un tel patrimoine soit mis en péril par des changements qui surviendraient dans le secteur bancaire.
Comme le savent très bien les membres du comité, le secteur public a connu des changements importants au cours des dernières années. Par exemple, le gouvernement fédéral a largement repensé et réaménagé ses structures, réduit sa taille, intégré et transféré diverses activités et responsabilités et fait appel à la sous-traitance, comme c'est d'ailleurs le cas d'autres gouvernements. Dans le cas du gouvernement fédéral, la diminution des responsabilités et des activités a rendu excédentaires aux fins des besoins des ministères chargés de leur garde, un nombre important d'immeubles ayant une valeur patrimoniale. Or, nous nous inquiétons de plus en plus des pressions qui s'exercent au sujet de tels biens immobiliers et c'est pourquoi nous collaborons avec le gouvernement fédéral, et tout particulièrement avec le ministère dont l'appellation ressemble malheureusement à la nôtre, pour trouver des façons de conserver pour les générations futures les immeubles patrimoniaux que le gouvernement fédéral entend conserver ou dont il entend se départir.
De la même façon, les modifications proposées ou celles qui se produiront dans le secteur privé—et dans le cas qui nous occupe, il s'agit des services financiers—intéressent tout particulièrement le secteur du patrimoine, car on craint que cette restructuration et cette consolidation ne mettent en péril certains édifices d'intérêt patrimonial. C'est cette question que j'aimerais aborder avec vous aujourd'hui.
Comme les députés ont sans aucun doute pu le constater, certains des meilleurs et des plus vieux exemples de notre patrimoine architectural dans les petites et grandes collectivités du Canada sont les institutions financières, notamment, mais pas exclusivement, les édifices des banques. L'architecture même de ces édifices vise à présenter une image de permanence, de stabilité, de respectabilité et de confiance. À ces édifices viennent s'ajouter d'autres sites architecturaux d'intérêt public comme les églises, les bureaux de poste, les gares et les mairies. Ces édifices ont en fait servi et caractérisé leurs collectivités pendant des générations. Il nous faut donc trouver, dans un milieu en pleine évolution, des façons de préserver ces édifices pour les générations futures.
J'ai été heureux de noter que dans le rapport MacKay on fait mention du fait que les institutions financières devraient travailler de plus près avec le secteur bénévole; nous croyons que la définition de ce secteur devrait être élargie pour inclure les intervenants du secteur du patrimoine dans toutes les régions du pays.
De la même façon, les auteurs du rapport s'inquiètent du fait que certaines collectivités perdront les services financiers auxquels elles sont habituées; à notre avis, il y a également lieu de s'inquiéter de l'avenir des structures et édifices où ces services sont offerts.
Compte tenu des préoccupations du secteur du patrimoine, et à la demande du conseil d'administration, j'ai communiqué par écrit avec les cinq grandes banques pour discuter de la question et j'ai également écrit à l'Association des banquiers canadiens, dont j'ai d'ailleurs rencontré des représentants, afin d'amorcer un dialogue sur la question. Il existe nombre d'exemples d'édifices d'intérêt patrimonial qui appartiennent aux banques et qui ont été restaurés avec beaucoup d'attention ou d'édifices excédentaires auxquels on a trouvé d'autres fonctions. De la même façon, il y a des exemples de bonnes politiques et de meilleures pratiques déjà utilisées par le secteur financier dont nous pourrions nous inspirer.
À la suite des premières rencontres j'espère et en fait je crois que nous pourrons avoir des rapports de travail productifs. Cela dit, j'ai cru qu'il serait bon de vous faire part de cette préoccupation dans le contexte de votre examen, car l'évolution d'un secteur peut, comme c'est souvent le cas, avoir un impact imprévu sur un autre secteur complètement différent.
Merci, monsieur le président, de votre intérêt pour cette question. Je suis maintenant disposé à répondre à vos questions et à celles de vos collègues.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous avez vraiment suscité mon intérêt parce que nous nous demandions en regardant la liste des témoins suivants quel était votre intérêt. C'est pourquoi j'ai demandé à la greffière de vous demander si vous veniez parler du rapport du Groupe de travail MacKay ou des consultations prébudgétaires.
M. Brian Anthony: Vous sembliez vous poser des questions.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je tiens à vous remercier parce que vous avez soulevé une question à laquelle nous n'aurions peut-être pas pensé. Merci beaucoup.
M. Paul Forseth: Merci beaucoup.
Bienvenue. On dit souvent quand on parle de fusions des banques ou des questions connexes que c'est une question d'installations et d'immeubles. Les banques veulent rationaliser leurs activités et se défaire d'installations et d'immeubles ou d'anciennes structures. Elles prévoient que les activités des services financiers évolueront grâce aux satellites et aux réseaux informatiques et qu'un jour ou l'autre on ne se servira plus d'argent comptant ou de monnaie et qu'il y aura des cartes-argent, comme on a des cartes téléphoniques. On ne saurait s'imaginer à quel point le secteur des services financiers évoluera.
Les immeubles constituent l'un des aspects historiques du secteur financier. Avez-vous une liste de suggestions pratiques quant à la façon de préserver une partie de ce patrimoine? Nous pouvons parler des grands projets de comités, de conseils d'administration et de choses du genre, mais il faut quand même avoir une liste pratique de choses qu'on pourrait faire pour changer les choses dans une petite collectivité des Prairies où l'édifice public le plus important, à part l'élévateur à grains, est probablement l'institution financière locale dont les locaux sont actuellement vides.
M. Brian Anthony: Je vous remercie de cette question. Monsieur le président, je suis heureux que M. Forseth ait donné l'exemple des élévateurs à grains puisque le milieu du patrimoine ne s'inquiète pas exclusivement des édifices du secteur des services financiers. Il se produit dans notre société et dans notre économie des changements qui ont mis en péril ce que j'appellerais des curiosités qui définissent les collectivités et les régions du Canada; les changements qui se sont produits dans le secteur des transports ont mis en péril quant à eux les élévateurs à grains. La sentinelle des Prairies est un phénomène qui disparaît, et en raison de la nature même des élévateurs à grains, il est difficile de trouver de nouvelles utilisations et de nouveaux utilisateurs pour ces structures.
De la même façon, à l'extérieur des Prairies, les phares sont un phénomène qui disparaît en raison des modifications apportées aux systèmes de navigation. Tout propriétaire d'un bon bateau a probablement un radar, des écosondeurs et un GPS, si bien qu'il n'est pas vraiment nécessaire de dépendre de cette seule lumière qui provient de ce magnifique vieil édifice sur le promontoire. Il s'agit là d'édifices qu'on trouve sur les calendriers du Canada depuis des années. Pouvez-vous vous imaginer le calendrier illustré du Canada pour 1999 sans phares ni élévateurs à grains?
C'est justement dans ce même contexte que nous étudions les changements qui se produisent dans le secteur des services financiers parce que, comme vous le dites, nombre de collectivités ont été définies et caractérisées par ce genre d'édifices, comme les banques et les immenses édifices appartenant aux compagnies d'assurances comme on en retrouve à Toronto et à Montréal, qui ont été construits par des compagnies qui n'existent peut-être plus ou qui ont été achetées ou ont fusionné à plusieurs reprises.
M. Paul Forseth: Il y a également l'édifice de la Chambre des communes où se trouve mon bureau.
M. Brian Anthony: C'est exact, l'édifice de la Métropolitaine.
M. Paul Forseth: Ce n'est pas sur la colline parlementaire, mais c'est quand même un édifice d'importance patrimoniale; il a été construit par une compagnie d'assurance.
M. Brian Anthony: Comme je l'ai signalé, je crois qu'il y a de bons exemples et de meilleures pratiques qu'on pourrait faire ressortir lors de nos discussions avec le secteur bancaire; nous pourrions les appliquer à l'échelle de la collectivité pour encourager les gens à trouver de nouvelles utilisations et de nouveaux utilisateurs pour les édifices qu'on jugera peut-être excédentaires.
Le gouvernement fédéral peut faire certaines choses, comme le savent sans aucun doute les députés du Comité permanent du patrimoine canadien à qui nous avons fait parvenir copie de notre mémoire. Ce comité étudie actuellement les questions touchant la politique culturelle.
Comme je l'ai mentionné au Comité sur le patrimoine dans le cadre de l'étude prébudgétaire, il y a des modifications au système fiscal qui nous permettraient ainsi qu'à d'autres organismes quasi gouvernementaux de présenter des propositions intéressantes aux institutions du secteur financier qui voudraient donner leurs édifices; on pourrait créer par exemple un genre de convention visant les édifices à valeur patrimoniale afin de protéger à tout jamais ces édifices. Cela nous permettrait de collaborer avec le secteur du patrimoine afin de trouver de nouvelles utilisations et de nouveaux utilisateurs pour ces banques ou autres édifices qui appartiennent au secteur des services financiers. Comme je l'ai signalé, je crois qu'on pourrait s'inspirer d'expériences antérieures fort positives. J'espère qu'à la suite de nos discussions avec l'ABC et ses membres, nous pourrons présenter un programme quelconque.
M. Paul Forseth: Merci beaucoup. C'est tout.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Redman.
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d'être venus aujourd'hui. Comme M. Forseth l'a signalé, nous avons noté qu'il existe une certaine tendance dans le secteur des banques, tout particulièrement en raison des intervenants à créneau américains; ils ne s'intéressent pas aux édifices. Il y aura donc un secteur financier qui ne laissera pas derrière lui le genre d'édifices d'intérêt patrimonial qu'a laissés le secteur des banques au cours du dernier siècle.
Je représente une circonscription urbaine—Kitchener—et nous sommes encore ébranlés par le fait qu'il y a 25 ans notre mairie a été démolie parce qu'à l'époque c'était la mode de louer des locaux et de ne pas avoir de mairie. Plusieurs ne se sont toujours pas remis de cette décision, même si notre mairie aujourd'hui a gagné un prix et a des locaux fort fonctionnels.
Nous avons également dynamisé notre centre-ville. L'une des choses que le consultant en vente au détail nous a dites, c'était: «Évincez les banques des principaux coins de votre rue. Ce n'est pas bon pour la vente; ce n'est pas bon pour la vie de votre centre-ville».
Vu que le secteur financier évolue et que nous avons ces immeubles historiques, j'aimerais savoir quel équilibre il convient que le gouvernement maintienne entre la carotte et le bâton? Comment pouvons-nous convaincre les institutions financières qui souhaitent changer leur apparence, qui n'ont pas besoin de tout cet espace? Vous avez parlé d'incitatifs fiscaux, mais faut-il une réglementation?
Dans le rapport du groupe de travail MacKay, on parle notamment de la question de la surréglementation. Certains des règlements recommandés sont-ils coûteux? On nous dit que oui, on nous dit que non, selon la personne interrogée. Quel rôle approprié le gouvernement peut-il jouer pour s'assurer que ces immeubles historiques demeurent, même si leur vocation change?
Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Anthony, s'il vous plaît.
M. Brian Anthony: Le gouvernement fédéral peut faire plusieurs choses, mais il n'est évidemment pas seul. Il ne faut pas non plus oublier que lorsqu'il est question du secteur des services financiers, on est très sensible à la question des incitatifs.
Si, par exemple, on nous accordait le pouvoir non seulement d'accorder un reçu pour fins d'impôt, pour la valeur de la propriété lorsqu'elle est donnée, comme c'est le cas actuellement, mais de ne pas percevoir l'impôt sur les gains en capital applicable à la plus-value l'appréciation de l'immeuble au cours de la période de propriété—les médias bondiraient probablement en disant que l'on donne de l'argent à des institutions financières déjà riches. Cela dit, j'aimerais quand même donner suite à cette idée, parce que je ne pense pas que les grandes banques, les petites banques, ou quelque institution financière que ce soit, doivent faire exception et se voir refuser l'accès à des incitatifs qui existent déjà.
Toutefois, comme je l'ai dit, le gouvernement fédéral n'est pas le seul intéressé. Il y a des considérations provinciales et même locales. Je suis heureux que vous ayez donné l'exemple de votre ville, parce que j'ai été l'orateur principal à la conférence annuelle de Community Heritage Ontario qui s'est tenue plus tôt cette année dans le nouvel hôtel de ville. Le maire actuel m'a encouragé à revenir dans 95 ans de sorte que nous puissions fêter le centenaire de ce qui sera alors un hôtel de ville historique.
Un gouvernement municipal peut prendre des décisions sur le zonage, la réglementation, les permis, etc., qui changent le centre financier d'une ville. Par exemple, en encourageant ou en permettant les magasins à grande surface en périphérie, on déplace le centre économique.
Les banques qui traditionnellement s'étaient installées dans les centres-villes, constatent qu'il y a de moins en moins d'entreprises et de clients qui se servent de leurs services bancaires dans des installations de briques et de mortier qui coûtent beaucoup plus cher que quelque chose de plus modeste dans un centre commercial, en banlieue.
Il n'y a pas de réponses simples. J'ai l'impression que la réglementation ne constitue probablement pas la solution. Je ne pense pas qu'on peut forcer les gens à se conformer. Je pense qu'on peut les encourager à le faire et qu'il doit y avoir un équilibre. Je dirais que s'il faut trouver un équilibre, ce serait en privilégiant les incitatifs.
• 1025
Néanmoins, à mon avis, le gouvernement fédéral a un rôle à
jouer, même s'il n'est pas seul, en donnant au moins l'exemple aux
autres paliers de gouvernement en mettant en place des incitatifs
innovateurs et efficaces qui visent la préservation et la
restauration des édifices historiques de toutes catégories et,
lorsque ces édifices ne répondent plus aux besoins du propriétaire,
par exemple une institution financière, en favorisant de nouvelles
utilisations ou la recherche de nouveaux utilisateurs.
Mme Karen Redman: J'aimerais aborder brièvement ce sujet. Je me suis certainement rendue dans un grand nombre de phares. Je n'en ai pas dans ma circonscription, car celle-ci est plutôt enclavée à l'exception de la rivière Grand. Toutefois, les adeptes des petites embarcations et du yachting me disent en dépendre. Bon nombre d'entre eux ne possèdent pas l'équipement de pointe coûteux dont vous avez parlé, et ils me disent qu'il faut protéger ce genre de patrimoine. Donc, même si ce n'est pas dans ma circonscription, j'appuie fortement ce genre d'initiatives.
[Français]
Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Plamondon, s'il vous plaît.
M. Louis Plamondon: Non, ça va.
Le vice-président (M. Nick Discepola): D'accord.
[Traduction]
Monsieur Anthony, la plupart des édifices historiques ne sont-ils pas déjà protégés soit par une réglementation municipale, soit par des lois provinciales? Je songe à certains édifices dans ma municipalité par exemple; tout immeuble d'un certain âge ou plus a été déclaré site du patrimoine. Je ne sais pas comment on dit ça en anglais, mais je sais que ce n'est pas «historical site».
Est-ce une protection suffisante ou voulez-vous dire qu'il faut tenir compte de l'âge ou de la valeur architecturale de certains immeubles et ensuite demander aux banques de les protéger volontairement même si elles ferment ces succursales? Que proposez-vous?
M. Brian Anthony: Je suis heureux, monsieur le président, que vous me posiez une question sur les mécanismes de protection. Je crois que d'une façon générale, on pense que s'il y a une plaque sur un immeuble, fédéral, provincial ou municipal, alors c'est comme si une force magique protégeait cet immeuble contre la démolition ou la profanation.
En fait, ce n'est pas le cas. Nous ne possédons aucun moyen juridique efficace de protéger les immeubles historiques dans ce pays, du moins rien dont nous puissions être vraiment fiers. Nous pouvons exercer une certaine persuasion morale, mais un propriétaire déterminé d'un immeuble où est apposée une plaque fédérale, provinciale ou municipale, peut entreprendre certaines démarches et, si ses poches sont suffisamment grandes et sa volonté suffisamment ferme, raser l'immeuble.
Je fais partie de cette organisation depuis un peu plus de trois ans et je dirais—Douglas pourra le confirmer—qu'au moins une fois par mois, un immeuble désigné par le gouvernement fédéral ou un gouvernement provincial tombe sous le pic du démolisseur a malgré les protestations du groupe de protestation local. Nous réclamons de tous les paliers du gouvernement, qu'ils mettent en place des mécanismes renforcés de protection, du genre de protection que tous s'imaginent être déjà en place.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Redman, s'il vous plaît.
Mme Karen Redman: Peut-être puis-je poser une question supplémentaire si nous avons encore un peu de temps.
Patrimoine Kitchener est une nouvelle formation qui s'appelait anciennement LACAC, The Local Architectural Conservation Advisory Committee. Je suis persuadée que la même chose existe dans un grand nombre de grands centres urbains, sinon dans la plupart des villes. Nous disposons également d'une politique de réutilisation très créatrice et adaptée qui reçoit un certain financement... Il n'y avait aucune exonération d'impôt, puisque les municipalités ne détiennent pas ces pouvoirs, mais on a adopté une approche très créatrice à l'utilisation des édifices historiques, qu'ils soient ou non désignés comme tels.
D'après ce qu'on me dit, on peut retarder le boulet de démolition pendant environ 200 jours au plus, si on tient bon. Il y a une ancienne école secondaire, un immeuble historique local, que nous avons tenté de protéger en invoquant toutes les dispositions législatives que nous pouvions trouver.
Le gouvernement fédéral pourrait-il jouer un rôle accru, compte tenu du fait, que comme vous l'avez déjà mentionné, il y a plusieurs paliers de gouvernement et plusieurs intéressés dont certains, à juste titre, au niveau local? Y a-t-il autre chose, outre ce que vous avez déjà mentionné, que le gouvernement fédéral peut faire pour améliorer les structures afin d'avoir toutes les chances de garder ces immeubles historiques.
M. Brian Anthony: Merci de cette question. Je vais demander à mon collègue, Doublas Franklin, d'y répondre.
De façon générale, je crois que l'occasion est aussi donnée au gouvernement fédéral de collaborer avec les deux autres paliers de gouvernement, soit les gouvernements provinciaux et territoriaux, pour mettre en oeuvre un ensemble de politiques complémentaires à l'échelle nationale dans le domaine de la protection du patrimoine. Le même genre d'initiatives peut être pris à l'échelle communautaire dans nos villes, petites ou grandes. Nous avons tenu l'an dernier une importante conférence au cours de laquelle nous avons discuté des mesures fiscales et réglementaires pouvant être prises afin de promouvoir la protection du patrimoine. Nous pensons que le gouvernement fédéral peut faire beaucoup dans ce domaine et ainsi servir d'exemple.
• 1030
Force nous est de reconnaître cependant que les municipalités
ont fait preuve d'innovation et de créativité dans le domaine
fiscal et réglementaire, exemples que nous avons signalés aux
gouvernements provinciaux et fédéral.
Doug, vouliez-vous approfondir le sujet?
M. Douglas Franklin (directeur, Relations gouvernementales et publiques, Fondation «Héritage Canada»): Je vous remercie beaucoup, Brian. J'aimerais certainement faire part de mes réflexions à ce sujet à Mme Redman.
Nous réclamons depuis plusieurs années que le gouvernement fédéral modifie sa politique fiscale afin de favoriser la réfection des vieux immeubles. Nous avons constaté que des particuliers et des entreprises privées, et notamment de nombreuses banques, étaient prêts à prendre en charge ces immeubles. Leur remise en état pose cependant de véritables problèmes. Certains de ces immeubles ont été négligés et exigent des travaux de réfection et d'entretien très importants.
Si, comme l'ont fait d'autres pays dont les États-Unis, le gouvernement fédéral modifiait ses politiques fiscales pour permettre aux investisseurs de défalquer une part des coûts de restauration de ces immeubles, un plus grand nombre d'entre eux seraient prêts à investir dans ce domaine. Il existe un véritable marché pour ces investisseurs. On voit bien qu'aux États-Unis, en raison des stimulants fiscaux qui leur sont accordés, des promoteurs sont prêts à acheter de vieux immeubles, en particulier dans les petites collectivités, dans le but de les remettre en état.
Soit dit en passant, aux États-Unis, la majeure partie des vieux immeubles qui sont rénovés servent de logements. On rénove même à cette fin d'anciennes usines ou d'anciennes banques.
La rénovation des vieux immeubles présente donc des avantages pour l'ensemble de la population. Elle ne revêt pas simplement de l'intérêt pour les antiquaires ou les amateurs d'immeubles du patrimoine. La préservation de notre histoire constitue en soi un objectif louable, mais nous pensons que l'adoption de mesures qui inciteraient le secteur privé à s'intéresser à la rénovation des vieux immeubles comporte également des avantages pour l'ensemble de la population.
Comme Brian Anthony l'a fait remarquer, cette formule permettrait aux gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral de coordonner leurs interventions dans ce domaine. Voilà une façon pour la population de constater comment un fédéralisme axé sur la collaboration peut vraiment contribuer à résoudre des problèmes concrets.
Mme Karen Redman: J'aimerais que nous revenions au rapport du Groupe de travail MacKay. Je comprendrai si vous n'êtes pas en mesure de répondre à ma question.
Faites comme si vous aviez une boule de cristal. Les quatre piliers sur lesquels reposent les institutions financières s'effondrent au sens propre comme au sens figuré. Si nous nous projetons 100 ans dans l'avenir et considérons l'héritage que nous avons laissé, que vont nous léguer les institutions financières dans 100 ans compte tenu des progrès technologiques qui surviendront du fait qu'on ne définira plus les institutions financières en termes de structures physiques?
M. Brian Anthony: Je crois que l'optimisme prime chez moi, même si j'ai à l'occasion des moments de pessimisme. Dans 100 ans—et il faudrait que la technologie progresse vraiment beaucoup pour que je puisse à ce moment-là réfléchir à ce moment magique de l'histoire—, je crois que si nous mettons en place les mécanismes voulus à tous les paliers de gouvernement et que nous établissons des partenariats avec les propriétaires d'immeubles du patrimoine, qu'ils appartiennent au secteur des services financiers ou à d'autres secteurs, nous aurons sensibilisé le public à l'importance de ces immeubles et nous en aurons préservé un grand nombre. Notre patrimoine architectural est sans doute l'élément le plus visible et le plus concret de notre histoire et de notre patrimoine. Je me plais à penser que nous aurons pris les mesures voulues pour renverser la tendance à la disparition de ces immeubles que nous avons constatée au cours des 10, 20 ou 30 dernières années. Comme vous et Douglas l'avez mentionné, j'espère qu'on aura pris les mesures voulues pour favoriser la réutilisation de ces immeubles pour que ceux-ci puissent témoigner dans 100 ans de l'évolution de notre société.
• 1035
C'est l'espoir auquel je me rapproche, et si ce n'était de cet
espoir, je ne pourrais pas poursuivre mon travail comme directeur
administratif de la Fondation Héritage Canada. Je suis convaincu
qu'en collaboration avec les intervenants clés du secteur public et
du secteur privé, nous pourrons atteindre cet objectif. Il n'est
pas hors de notre portée. Certaines attitudes doivent cependant
changer parce que comme nous nous considérons comme une jeune
société, nous avons tendance à croire qu'on peut tout remplacer:
l'art, les artefacts et l'architecture. Dans des sociétés plus
vieilles, comme en Europe, par exemple, il serait impensable de
démolir un immeuble du patrimoine, ce qu'on semble ici considérer
comme étant inévitable si l'on ne veut pas s'opposer au progrès.
C'est comme si tout ce qui était nouveau était bon et tout ce qui
était vieux était mauvais.
J'aime croire que les attitudes sont en train de changer et que la possibilité qui est donnée à des organismes comme le mien de discuter de ces questions avec les décideurs permettra au dialogue de se poursuivre et de déboucher sur le type d'avenir dont nous venons de parler.
Je vous remercie.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous remercie, beaucoup, madame Redman.
Je crois que vous avez une question à poser, monsieur Forseth.
M. Paul Forseth: Vous réclamez maintenant depuis assez longtemps d'importantes modifications fiscales. Vous visez un objectif national et vous avez énoncé un certain nombre de mesures qui peuvent être prises pour permettre de l'atteindre. J'aimerais que vous profitiez de nouveau de l'occasion pour expliquer clairement et succinctement les mesures précises que vous demandez au ministère du Revenu et au ministère des Finances de mettre en oeuvre. L'occasion semble bonne de le faire maintenant puisqu'on examine les règles régissant les banques dans le cadre du rapport MacKay. C'est peut-être la meilleure occasion qui vous est donnée depuis des années d'obtenir ce que vous réclamez.
Pouvez-vous donc nous décrire brièvement les mesures que vous aimeriez voir adoptées par le ministère des Finances et par Revenu Canada?
M. Brian Anthony: Je vous remercie beaucoup. Je vous remercie aussi, monsieur le président, de me donner l'occasion de résumer les trois points sur lesquels nous avons attiré l'attention du comité et du ministre des Finances au cours des dernières années. Je me permets aussi de vous remercier ainsi que vos collègues d'avoir appuyé les recommandations portant sur le régime fiscal que nous avons soumises au ministre des Finances.
Voici, en résumé, les changements que nous recommandons.
Tout d'abord, nous aimerions de la charité et un traitement fiscal plus favorable des coûts de restauration des édifices du patrimoine. Pour l'instant, la confusion règne. Certaines activités de restauration sont considérées comme des activités courantes—habituellement il s'agit des activités de restauration qui sont modestes et par conséquent se situent en dessous d'une ligne imaginaire—mais d'autres travaux de restauration, aussi légitimes soient-ils, peuvent être considérés comme trop importants et se voient donc traités comme des dépenses en capital. Même Revenu Canada admet qu'à cet égard, les interprétations varient complètement d'un bureau d'impôt à l'autre de même que l'interprétation de la loi. Nous estimons que Revenu Canada peut éclaircir la situation en apportant des précisions dans son bulletin d'interprétation ou en révisant celui-ci, mais au bout du compte, il incombera probablement au ministère des Finances de modifier le régime fiscal parce que Revenu Canada ne peut qu'interpréter ce que décrète le ministère des Finances. Il serait préférable de donner suite à cette question par la voie législative plutôt qu'au moyen d'interprétation.
Deuxièmement, nous aimerions un traitement fiscal plus favorable des dons de biens culturels immeubles au chapitre des gains en capital. Si, en tant que particulier ou de personne morale, je devais donner à la Couronne sous l'une de ces formes désignées des terres humides écologiquement vulnérables, non seulement je me verrais accorder directement un crédit d'impôt, que je pourrais imputer à mon revenu, mais les gains en capital que j'aurais réalisés pendant que cette propriété m'appartenait seraient complètement exclus, dans leur totalité. Si je donne une oeuvre d'art ou un artefact à une institution désignée de la Couronne, la même chose s'appliquera par le biais des dispositions sur les biens culturels meubles, prévues par la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels. Non seulement je peux obtenir le crédit d'impôt immédiatement, mais tout gain en capital que je serais normalement tenu de payer est exclu en totalité.
• 1040
J'estime que si nous pouvons traiter les terres écologiquement
vulnérables, et les objets d'art et les artefacts comprenant des
biens culturels meubles, de cette façon, nous pouvons aussi prévoir
le traitement identique de biens culturels meubles. En fait, la
Commission d'examen des exportations de biens culturels a déjà
certifié six édifices, qui ne sont pas habituellement considérés
comme des biens culturels mobiliers, à moins que vous partiez du
principe qu'il est possible de déplacer n'importe quoi si on
utilise suffisamment de force. Donc la Commission a déjà certifié
six édifices, qui sont en fait des dons, et pour lesquels on a
renoncé à exiger l'impôt sur les gains en capital. Donc, si on a
agi ainsi dans ce cas, je crois que l'on pourrait facilement
envisager d'étendre cette mesure au don de biens immeubles ou de
propriétés culturelles immeubles et ce, de façon générale. J'estime
que nos discussions avec le ministère des Finances sont
prometteuses à cet égard, lentes mais prometteuses.
Ce sont donc les deux principales mesures que nous recommandons. Nous avons également discuté, comme vous le savez sans doute, de la disposition relative à la perte finale, qui prévoit la défalcation d'un pourcentage de la valeur non amortie d'un immeuble au moment de sa démolition. Le ministère des Finances ne considère pas qu'il s'agit d'une mesure importante susceptible d'encourager la démolition d'édifices du patrimoine. Nous avons sondé nos membres pour voir s'il y a des exemples où un tel facteur est intervenu, et je dois avouer que nous n'en avons trouvé aucun. Bien que nous ayons demandé la modification ou l'élimination complète de la disposition relative à la perte finale, nous devons peut-être nous ranger à l'avis du ministère des Finances selon lequel cette disposition ne présente pas l'intérêt qu'on pourrait lui attribuer en raison de sa formulation.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous remercie beaucoup, monsieur Anthony. Vous avez présenté au comité un nouvel aspect de la question que nous avions peut-être négligé.
Lorsque je me rappelle mon enfance, les silos dans les Prairies que j'escaladais jusqu'au sommet pour plonger dans les céréales, c'était pour moi une expérience incroyable, tout comme les locomotives, ou la gare de la collectivité, les églises, les bureaux de poste locaux et même les banques. Et il ne s'agit pas uniquement de symboles, mais aussi d'éléments qui font partie intégrante de notre culture, de notre histoire et qui méritent tous d'être protégés.
Je pense donc que le comité sera réceptif à vos commentaires, comme vous l'avez déjà dit. Au nom de mes collègues, je tiens de nouveau à vous remercier d'avoir porté cette question à notre attention. Nous vous remercions d'avoir été des nôtres.
Chers collègues, nous allons ajourner jusqu'à l'arrivée de nos prochains invités, dans une dizaine de minutes environ.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Conformément à son mandat que lui confère l'article 108(2) du Règlement, le comité reprend son étude du rapport du Groupe de travail sur l'avenir du secteur des services financiers canadien, mieux connu sous le nom de rapport MacKay.
Ce matin, nous accueillons, du secteur banquier autochtone, M. Ron Jamieson, vice-président en chef, Secteur bancaire autochtone et des collectivités éloignées, Banque de Montréal; de Heraclitus Corporation, M. Howard Greenspan, président; de Sharwood and Compagny, M. Gordon Sharwood, président; et de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada, M. Adrian Bradford ainsi que M. Gino Cozza.
Je suppose que vous êtes au courant de la formule que nous utilisons ici. Je demanderais à chacun d'entre vous de faire une présentation de cinq à 10 minutes, puis j'aimerais laisser suffisamment de temps pour que mes collègues, les députés, puissent vous poser des questions et engager le dialogue.
Au nom de mes collègues, je vous souhaite la bienvenue. Je demanderais à M. Jamieson de bien vouloir commencer.
M. Ron Jamieson (vice-président en chef, Secteur bancaire autochtone et des collectivités éloignées, Services financiers personnels et commerciaux, Banque de Montréal): Je vous remercie, monsieur le président.
Bonjour, mesdames et messieurs, honorables députés. J'aimerais vous dire dès le départ que mes observations n'ont pas été traduites en français car je viens d'y mettre la dernière main ce matin. Cependant, elles vous seront fournies le plus tôt possible en français également.
Je tiens à vous remercier de cette occasion de comparaître devant votre comité pour vous parler de l'un de mes sujets préférés les opérations bancaires autochtones au Canada et les programmes et initiatives entrepris dans ce domaine par la Banque de Montréal.
Notre banque a établi son programme d'opérations bancaires autochtones en 1992. Jusqu'à cette époque, il y avait très peu de services de ce genre offerts par les grandes institutions financières canadiennes. En 1992, la Banque de Montréal a été la première banque à se rendre compte qu'il n'était tout simplement pas bon pour les affaires de négliger un segment du marché représentant plus de 1,2 million de personnes. Étant donné que nous n'avions aucune expérience concrète pour ce qui est d'assurer des services à un tel segment de marché unique, nous savions que nous aurions des défis à relever. Nous savions également que si nous travaillions suffisamment longtemps et suffisamment fort, nous pourrions relever ces défis et nous établir comme les chefs de file dans notre domaine, à savoir le principal fournisseur de services financiers aux Autochtones du Canada.
En 1998, six ans après le lancement de cette initiative, la Banque de Montréal exploite 16 centres bancaires autochtones partout au Canada, y compris dans certains des endroits les plus éloignés du pays. De Nain au Labrador jusqu'à Wemindji au Québec, depuis la côte est de la baie James jusqu'à Inuvik dans les Territoires du Nord-Ouest, nous avons mis sur pied des installations bancaires modernes pour des personnes qui n'avaient jamais eu accès à ce genre de services auparavant.
Plus tôt cette année, en coopération avec notre partenaire, la Société canadienne des postes, nous avons annoncé un plan afin d'étendre nos services à d'autres collectivités éloignées et autochtones. Selon ce plan, 20 collectivités éloignées du nord de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l'Ontario, du Québec et des provinces de l'Atlantique ainsi que le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest auront accès à des services bancaires pour la toute première fois. Grâce à la coopération de la Société canadienne des postes, nous avons l'intention de continuer à desservir encore plus de nouveaux endroits dans les collectivités du Nord.
Laissez-moi vous donner quelques exemples pour vous montrer l'influence positive que notre programme a eue sur la vie des Canadiens autochtones.
• 1110
Avant que la Banque de Montréal n'ouvre ses portes à Nain au
Labrador, il fallait plus d'une semaine pour que les résidents
puissent faire de simples dépôts ou retraits, et ils devaient le
faire par l'intermédiaire d'institutions financières basées à Goose
Bay, à des centaines de milles de là. Aujourd'hui, ils peuvent
ouvrir des comptes et faire des dépôts, des retraits, des
transferts et payer leurs factures dans leur propre ville et
recevoir des services personnels en anglais ou en inuktituk, y
compris des services de planification de retraite et des conseils
en matière d'investissement.
En 1997, nous avons annoncé une entente conclue avec la Première nation de Garden River afin de fournir aux membres de cette collectivité des millions de dollars en prêts au logement. Ce programme est unique en ce sens qu'il fournit des prêts au logement pour les membres de la Première nation de la réserve sans la participation du gouvernement fédéral ou de la Société canadienne d'hypothèques et de logement.
C'est la cinquième collectivité à participer à ce programme, et ce que nous trouvons tellement encourageant, c'est que 19 autres collectivités ont exprimé un réel désir de travailler avec nous. Ce programme a également grandement facilité l'accès à la propriété chez les membres des Premières nations. Avant la mise sur pied de cette initiative, il était impossible de négocier des hypothèques dans la réserve sans garantie suffisante.
Après avoir signé l'accord, le chef de Garden River, Dennis Jones, a exprimé le point de vue suivant:
La Banque de Montréal est fière du rôle de leadership qu'elle joue dans le secteur bancaire autochtone et de pouvoir aider les Autochtones à administrer leurs propres affaires financières. Nous sommes également fiers des services accrus que nous fournirons bientôt—des services qu'aucune autre institution financière canadienne n'assure.
Servir efficacement un segment de marché aussi unique n'est pas aussi simple que d'ouvrir une succursale dans la collectivité. Si vous ouvrez simplement une succursale dans une réserve, il n'est pas évident que les résidents vont s'y précipiter. La clientèle que nous servons a des besoins particuliers qui exigent une démarche conçue sur mesure. Pour bien les servir, notre équipe du secteur bancaire autochtone devait se familiariser avec ces collectivités éloignées et leurs besoins en matière de services financiers. Pour tout dire, nous avons dû instaurer un plus grand climat de confiance à l'égard des institutions financières comme jamais auparavant.
Dans les deux cas, nous étions avantagés dès le départ. L'équipe originale de la Banque de Montréal comprenait plus d'une centaine d'employés qui sont membres de la population autochtone du Canada. Je suis très heureux et fier de vous dire ce matin que nous employons désormais près de 500 Autochtones dans l'ensemble de l'organisation, y compris dans des postes de haute direction.
Je suis un Mohawk des Six nations de Grand River et je vis dans la réserve de Osweken, près de Brantford en Ontario. Je suis à l'heure actuelle président du comité exécutif et coprésident national du Conseil canadien pour le commerce autochtone, ainsi qu'ancien président de la Commission royale sur les affaires économiques qui touchent les peuples autochtones au Canada.
Nous estimons que notre équipe, dès le début, possédait les compétences et les connaissances nécessaires pour communiquer efficacement avec les membres des collectivités autochtones que nous prévoyions servir. Après de vastes consultations avec les membres de ces collectivités, nous avons élaboré une série de produits et de services bancaires pertinents et appropriés.
Nous avons également conçu et administré une série de cours d'information financière dans chaque collectivité. Ces cours étaient destinés à mieux familiariser nos nouveaux clients avec les questions financières et ont été mis au point et assurés avec la pleine collaboration et les commentaires utiles des membres de chaque collectivité.
Cette démarche consultative, axée sur l'établissement de liens, a permis à la Banque de Montréal de nouer des liens de confiance plus étroits avec les membres des collectivités autochtones du Canada et de s'établir comme chef de file dans ce domaine. Mais au fur et à mesure que nous étendons nos services, nous savons que nos liens avec ces clients doivent toujours être fondés sur la confiance mutuelle et une connaissance approfondie des besoins des clients. Depuis 1992, nous avons fait d'énormes progrès pour ce qui est d'élaborer un programme qui répond aux besoins particuliers d'un segment de clients particuliers.
J'aimerais, en terminant, exprimer mon opinion personnelle sur les événements récents. À mon avis, le groupe de travail MacKay et le rapport d'hier représentant les vues de certains députés du caucus libéral accordent peu d'attention aux besoins de la population autochtone du Canada. Si vous réunissez ces deux rapports, vous constaterez qu'environ deux pages sont consacrées aux besoins de 1,2 million de Canadiens. C'est déplorable et, malheureusement, c'est une situation que moi-même et mes compatriotes ne connaissons que trop bien. Bien sûr, c'est peut-être deux pages de plus que ce à quoi nous aurions eu droit il y a quelques années, mais je ne crois pas que cela représente adéquatement les aspirations des Premières nations du pays.
• 1115
Je suis également étonné de constater que dans le rapport du
groupe parlementaire, la recommandation 29 demande que la Société
canadienne des postes joue un rôle plus important dans la
prestation des services financiers canadiens dans les régions
rurales. Comme je l'ai mentionné au début, la Banque de Montréal
travaille en collaboration avec la Société canadienne des postes
depuis deux ans pour assurer ces services, et je suis déçu et
frustré de constater que le groupe parlementaire ne soit pas au
courant de cela.
J'aimerais également aborder brièvement la fusion proposée avec la Banque Royale du Canada. La Banque de Montréal et la Banque Royale ont pris un engagement à l'égard des opérations bancaires autochtones. Nous avons des antécédents compatibles; c'est-à-dire que nous avons toutes deux de longues traditions en tant que banques frontières, pour ainsi dire. Ensemble, nous croyons pouvoir encore mieux servir les besoins des milliers de Canadiens dans les régions éloignées et rurales du pays—des Canadiens à qui je parle et avec qui je travaille tous les jours de la semaine.
Je vous remercie.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous remercie, monsieur Jamieson.
J'invite maintenant M. Greenspan à faire sa présentation. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Howard Greenspan (président, Heraclitus Corp.): Je vous remercie. Mesdames et messieurs, j'ai une déclaration préparée à l'intention du comité.
J'ai comparu hier devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce à Toronto vers 16 h 30. Avant que je prenne la parole, les membres du comité m'ont demandé s'ils pouvaient avoir la déclaration préparée afin d'en faire des copies pour la faire distribuer. Je leur ai bien entendu remis ma déclaration. Ils ont lu la déclaration préparée et m'ont ensuite dit qu'elle n'était pas acceptable. Cette déclaration préparée sera disponible sur le Worldwide Web, sur Internet comme on l'appelle. Si cette déclaration renferme quoi que ce soit de répréhensible, il existe une procédure pour y donner suite.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Êtes-vous en train de parler d'un autre comité?
M. Howard Greenspan: Je parle d'un autre comité.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Nous serons heureux d'entendre votre présentation. Vous pouvez également si vous le voulez nous en remettre un exemplaire pour le greffier. Vous pouvez commencer si vous le voulez bien. Il n'y a pas de censure ici, donc vous avez la parole.
M. Howard Greenspan: Je me rends compte que ce comité n'est pas comme l'autre comité, et je ne tiens pas ce comité-ci responsable des agissements de l'autre comité, mais c'est un même gouvernement. Ma première recommandation au présent comité est...
Le vice-président (M. Nick Discepola): D'abolir le Sénat?
M. Howard Greenspan: Mais sérieusement, ce qui s'est passé hier devant six sénateurs se rapporte directement à ce que j'ai à dire. D'après ce que je crois comprendre, le Sénat a été établi en tant qu'instance de surveillance chargée de s'assurer que les droits et libertés inscrits dans la Constitution ne sont pas bafoués par le secteur législatif de ce pays. Hier, deux membres du personnel que je ne nommerai pas—car pour l'instant leur nom n'est pas important—ont lu ma déclaration préparée et m'ont dit qu'elle était inacceptable et ont proposé d'en censurer certaines parties... j'aimerais terminer ce que j'ai à dire.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je pense qu'il est préférable que vous poursuiviez votre présentation. Vous êtes devant le Comité des finances de la Chambre des communes et...
M. Howard Greenspan: Je propose que la Chambre des communes abolisse le Sénat parce que six sénateurs...
Le vice-président (M. Nick Discepola): Cela ne fait pas partie de notre mandat, monsieur.
M. Howard Greenspan: À mon avis, cela devrait en faire partie.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je pense que vous trouverez sans doute un ou deux députés qui sont d'accord avec vous.
M. Howard Greenspan: Je suis ici afin de parler du mandat de cette commission.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Voulez-vous dire le Comité des finances de la Chambre des communes?
M. Howard Greenspan: Je suis ici pour parler de la Commission MacKay qui est en train d'être examinée.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Faites donc alors votre présentation. Tout comme les autres, nous vous donnons cinq à dix minutes. Vous en avez déjà pris deux.
M. Howard Greenspan: Vous pouvez m'interrompre ou me retirer la parole à tout moment.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je ne vous retire pas le droit de parole, monsieur Greenspan.
M. Howard Greenspan: Je vous dis simplement que vous pouvez le faire si vous le voulez.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous demande si vous êtes disposé à coopérer avec nous...
M. Howard Greenspan: Alors permettez-moi de continuer.
Le vice-président (M. Nick Discepola): ...et à faire votre exposé.
M. Howard Greenspan: Je suis en train de faire mon exposé. Il a changé compte tenu du fait que je ne pouvais pas lire la déclaration que j'avais préparée et qui fait maintenant partie de l'exposé. C'est très pertinent.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Bon, pouvez-vous lire votre exposé.
M. Howard Greenspan: Non, je ne lirai pas mon exposé. Il sera diffusé sur Internet. Il y a d'autres moyens à part...
Je vais parler au comité de la commission et de cette procédure. Si on m'a empêché de parler hier, pour quelque raison que ce soit, j'aimerais savoir combien de personnes ont été empêchées d'exprimer leurs opinions devant ce comité ou devant la Commission MacKay.
Je me suis adressé à la Commission MacKay, et cela concerne directement ce comité. La Commission MacKay s'est réunie à huis clos. Lorsque je me suis présenté, on a fermé la porte derrière moi. J'ai demandé à M. MacKay pourquoi la porte était fermée. Il m'a répondu qu'elle était fermée.
J'ai demandé au comité quel était le produit de cinq fois 200 milliards, et on m'a répondu que c'était un gros chiffre. J'ai très clairement dit au comité que c'était ce dont on parlait dans cette pièce, et que la porte devrait être ouverte.
Hier, j'ai entendu des gens, des représentants du secteur financier, dire—peut-être avec sincérité—qu'ils s'intéressaient à la réaction des banques à ce qu'ils avaient à dire, et qu'ils avaient observé des répercussions. Je ne sais pas si c'est vrai ou non, parce que je ne suis pas à leur place. Mais en me basant sur les faits, je peux affirmer que si on m'avait interdit de dire au comité ce que j'avais à dire... si c'est arrivé à une personne, alors je me demande à combien de personnes c'est aussi arrivé.
Je suis très sérieux. Ce processus a trop de défauts et à mon avis ne devrait pas continuer. Cette commission doit reprendre ses travaux à partir de zéro. Elle doit entendre les gens.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Pour dissiper toute confusion possible, lorsque vous parlez de «cette» commission, est-ce que vous faites allusion au Comité des finances ou au groupe de travail MacKay?
M. Howard Greenspan: Je fais référence tout d'abord au groupe de travail MacKay. La recommandation que j'ai faite au groupe de travail MacKay était qu'on crée une commission d'enquête parallèle à la Commission MacKay. J'estimais que le secteur financier canadien, comme les gens d'affaires, exercerait des pressions pour que des changements législatifs, quels qu'ils soient, soient apportés rapidement. J'ai dit au groupe de travail MacKay que vu ces pressions, il ne serait pas possible de procéder à un examen complet et de faire participer le public. J'ai proposé que parallèlement à la Commission MacKay on procède à une enquête et qu'on écoute des témoins, sous serment, et que cela soit fait avec toute la diligence raisonnable.
Les banques ont réclamé des changements, des changements de fond. Si on demandait aux banques de faire ce genre de changements, elles le feraient avec toute la diligence voulue pour le client. J'ai proposé que la Commission MacKay fasse preuve de diligence raisonnable parallèlement au groupe de travail qui a le mandat de surveiller le tout.
Cette recommandation n'a pas été suivie. Je pense que ces comités sont maintenant obligés de travailler très rapidement, avec un fusil sur la tempe, et nous ignorons si nous pouvons nous fier à ce que les banques vous disent.
Mais ce n'était pas ce que j'allais dire hier. Ce qui me préoccupe, c'est que si on m'a dit de ne pas parler, en toute honnêteté, sait-on à combien de personnes on a interdit de parler? Qui sont les témoins que vous entendez? S'il y avait quelque chose d'inadmissible dans ce que j'ai dit, il n'appartenait pas à un membre du personnel d'en décider.
Je peux résumer la situation très simplement, et ensuite passer au point suivant:
[Français]
nous ne sommes pas des enfants et vous n'êtes pas des patrons.
[Traduction]
Je crois sincèrement que le problème auquel notre pays doit faire face a peu à voir avec les questions qui ont été abordées publiquement. Cela dépend beaucoup du sentiment de pouvoir qui semble être exercé dans les quatre tours au coin des rues King et Bay.
Je pense que les problèmes dans l'Ouest, dans le centre du pays et au Québec sont tous liés à un problème semblable: qui écoutez-vous et quels sont les témoins que vous entendez?
• 1125
D'après ce que j'ai pu voir, ce rapport, publié hier, semble
porter sur certains problèmes. Mais je suggère que les
recommandations de la Commission MacKay soient invalidées parce
qu'il n'y a pas eu d'audiences publiques adéquates.
J'affirme aussi que dans la mesure où on a dit à une personne que ses commentaires doivent être réprouvés et qu'il y a des choses qu'elle ne peut pas dire, le processus d'audiences publiques, le processus d'examen du comité, la procédure publique d'examen sont invalides. Il faudra corriger le processus, et ce, afin de vous assurer que les gens qui ont quelque chose à dire, que ce soit pour ou contre, personnel ou général, aient l'occasion de s'exprimer.
Hier, mon rapport portait sur les remèdes. Le groupe de travail MacKay a proposé trois genres de remèdes. Il a dit qu'il proposait d'accorder aux banques de nouveaux pouvoirs considérables. C'est bien. Il reconnaît dans son rapport que certains de ces pouvoirs pourraient donner lieu à des coercitions et à des abus. Il recommande ensuite trois moyens de faire contrepoids aux banques.
Le premier moyen qu'il propose, c'est la réglementation, essentiellement, l'autoréglementation. Le deuxième moyen, c'est la création d'un ombudsman. Le troisième, c'est la procédure civile avec la possibilité d'exiger des dommages-intérêts punitifs.
La réglementation n'a pas été efficace. Dans la proposition et la déclaration que j'avais hier, j'affirmais que les lois fédérales n'ont pas été appliquées aux banques. J'attends les commentaires du ministre, et il y a eu de longs échanges épistolaires avec le ministre. Ce ne sont pas des observations que je fais à la légère.
Le deuxième moyen proposé, c'est la création d'un ombudsman. En fait, l'ombudsman n'exerce aucun pouvoir.
La troisième proposition porte sur la procédure civile. Comme je l'indique dans ma déclaration, entamer des procédures contre un établissement financier canadien n'est pas une solution pratique ou réaliste. Ma déclaration renferme des données précises plutôt que des généralités, et je pense que c'est ce à quoi le comité du Sénat s'opposait.
Dire à quelqu'un qu'il peut entamer des poursuites contre une banque, après qu'on lui a donné des pouvoirs potentiellement coercitifs ou abusifs, c'est lui dire qu'il peut descendre au Ritz. Un juriste britannique a déjà dit que n'importe qui pouvait descendre au Ritz. C'est un droit qui est accordé à tous. Il en va de même pour le droit de traîner une banque devant les tribunaux. Ces recours sont inefficaces.
Je peux lire la déclaration, ou simplement la diffuser sur Internet.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous ai proposé une troisième solution, soit de la donner au comité. Nous l'étudierons avec toute l'attention voulue, comme ce fut le cas pour les autres témoins.
M. Howard Greenspan: Je vous demande pardon?
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous ai proposé une troisième solution au début de la réunion, soit de déposer votre mémoire auprès du greffier du comité, et nous lui accorderons toute l'attention voulue. Il vous est donc possible de le faire.
Avez-vous terminé votre exposé? Vous avez encore une minute ou deux, si vous en avez besoin.
M. Howard Greenspan: Oui. À moins que vous ayez des questions.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup.
J'aimerais maintenant céder la parole à M. Gordon Sharwood, de Sharwood and Company. Bienvenue, monsieur.
M. Gordon Sharwood (président, Sharwood and Company): Merci beaucoup, monsieur le président. J'ai apporté 30 exemplaires de mon mémoire auquel je vais me référer de temps à autre.
J'ai également apporté 10 exemplaires en français. Malheureusement, les pages ont été agrafées à l'envers...
Une voix: Ce sont des choses qui arrivent.
M. Gordon Sharwood: ...et le temps que je m'en rende compte, il me fallait commencer mon exposé et mes ajouts se trouvaient au début.
• 1130
Si ceux d'entre vous qui suivent dans la version française
veulent bien faire preuve de patience, nous finirons par nous y
retrouver.
Pour répondre à la remarque de M. Greenspan selon laquelle les marchés sont importants, je ne peux pas m'empêcher de dire que c'est vrai, et c'est la meilleure façon de résumer le rapport du groupe de travail MacKay. Je vais vous en faire la preuve.
À la première page du mémoire que j'ai présenté au groupe de travail, vous trouverez quelques notes à mon sujet. J'ai travaillé à la Banque Canadienne Impériale de Commerce pendant 13 ans. J'étais le plus jeune directeur général de l'histoire du secteur bancaire canadien. J'ai eu à l'époque une prise de bec dont on a beaucoup parlé avec le président, Neil McKinnon.
Je suis ensuite devenu président du Traders Group, lequel a fusionné avec Guaranty Trust, car je voyais bien que les banques allaient prendre à leur compte le marché des prêts automobiles, lequel représentait un élément important des activités de Traders.
Depuis 1976, je suis courtier sur le marché des valeurs dispensées. J'offre des services d'intermédiation pour les sociétés de taille moyenne. J'en parle à la même page.
Si vous passez à la page suivante, vous y trouverez la répartition des dépôts en dollars canadiens. Dans un des rapports supplémentaires du groupe de travail MacKay, vous constaterez que les montants sont beaucoup plus élevés pour les quatre grandes banques. En fait, si on additionne leurs investissements de dépôts dans les hypothèques résidentielles et leurs investissements dans les cartes de crédit et les prêts aux particuliers, lesquels portent un taux de 12 p. 100, vous constaterez que pour les quatre banques qui veulent fusionner, cela représente 77 p. 100 du total des dépôts en dollars canadiens.
Quant aux hypothèques résidentielles, elles constituent l'activité la plus simple et la plus rentable des banques. Il faut faire évaluer sa maison, contracter un prêt, conclure un accord quinquennal et un petit électron se déplace et débite le compte chaque mois. À condition que l'électron ne soit pas renvoyé, il n'y a aucun problème. C'est le secteur le plus rentable du système bancaire.
Bien sûr, tant dans le rapport annuel que dans le rapport du groupe de travail MacKay, il est question des merveilleux frais perçus sur les cartes de crédit, les taux d'intérêt. C'est un autre secteur extrêmement rentable des opérations bancaires et des prêts personnels.
Si on examine les données pour les grandes banques—car, comme je le dis dans ma note, la Banque Laurentienne et la Banque Nationale sont beaucoup moins importantes sur le marché des hypothèques résidentielles—on constate qu'elles n'y consacrent que 23 p. 100 de leurs dépôts en dollars canadiens.
Une fois qu'elles se sont occupées d'Alcan, Abitibi et d'autres sociétés, comme je le dis en plaisantant à M. Cleghorn, il ne lui reste pas un sou pour les entreprises de taille moyenne. Et pourtant, elles sont au coeur de mon exposé.
Jusqu'ici, nous avons surtout entendu les interventions des banquiers, qui nous ont donné leur définition des PME. Il n'y a aucune définition de la PME dans ce rapport jusqu'à ce qu'on en arrive au point où il est dit brièvement que les PME sont des entreprises qui ont contracté des prêts d'au plus 1 million de dollars. Eh bien, une société qui a un prêt de 1 million de dollars réalise sans doute des ventes de 5 millions de dollars. Est-ce une société de taille moyenne? Pas à mes yeux.
C'est donc tout à fait ridicule et lorsque les gens parlent de la part de marché des PME, c'est de la foutaise.
Or, il faut dire à la décharge du groupe de travail MacKay que ce dernier reconnaît que cette constatation se fonde sur la donnée statistique de plus de 5 millions de dollars. Lorsqu'on parle de plus de 5 millions, cela veut dire des prêts à une société de logiciels en pleine expansion et qui passe de 10 à 20 et à 30 millions de dollars de ventes, ou de prêts à une scierie. Je le répète, cela inclut également Domtar, MacMillan Bloedel, Alcan et d'autres.
Alors comment savoir qui fait quoi? C'est la question que j'ai posée en fait au groupe de travail MacKay. On m'a répondu en me disant qu'on n'avait pas de statistiques à ce sujet.
• 1135
Les banques englobent donc tout le monde dans cette définition
des PME. Dans un rapport d'économiste rédigé par Tim O'Neill de la
Banque de Montréal, ce dernier indique que la part de marché de la
banque augmente dans ce tout petit secteur qu'est celui des PME.
Permettez-moi de répéter certaines de mes déclarations. J'appuie l'essentiel du rapport. Tout d'abord, c'est selon moi une excellente idée de pouvoir créer de nouvelles banques. J'aimerais bien en lancer une. Je sais que M. Palmer s'inquiète quelque peu du contexte réglementaire car nous avons eu quelques cas de fiasco de sociétés de fiducie ou de banques qui ont fait faillite, mais c'est la nature du marché. Comme quelqu'un l'a dit l'autre jour, je suis un disciple de Schumpeter et je crois dans la destruction créatrice. Si Bell Canada peut créer une banque désormais, et Domtar aussi, c'est fantastique. Allons-y.
J'approuve également les mesures visant à inciter les institutions financières étrangères à venir au Canada, soit la suppression recommandée de la retenue d'impôt de 55 p. 100 sur les prêts à long terme, ainsi que d'autres clauses de libéralisation.
Il y a toutefois une chose qui m'a échappé. On n'a pas parlé de toute la question du crédit-bail. Dans mon mémoire, vous constaterez que tous les ans, aux États-Unis, ce marché représente 188 milliards de dollars. Nous sommes loin de ce montant au Canada, où il n'en représente qu'un dixième. Comme le groupe de travail de Tony Ianno l'explique très bien dans son rapport, c'est parce qu'il n'est pas possible de déduire la déduction pour amortissement par rapport à d'autres prêts. Tout dépend s'il s'agit de location-acquisition ou d'une autre forme de contrat de location. J'ai été surpris qu'il n'en soit pas question dans le rapport du groupe de travail MacKay, car j'avais recommandé que ce soit fait.
Dans mon mémoire, vous trouverez un échange de correspondance entre David Dodge et moi-même. Au comité, j'ai expliqué que ses réponses me faisaient penser à un papillon que l'on colle sur une feuille de papier et qui continue de battre des ailes tandis qu'il agonise. Ce fut le dernier battement d'aile du sous-ministre des Finances.
Si vous lisez la lettre que j'ai adressée à Konrad von Finckenstein, je suis encouragé par l'expansion de la technologie. Mon gros problème, toutefois, est la question de l'accès au capital. J'ai à l'annexe 6 un tableau qui décrit les besoins en investissement et les sources de financement de différentes catégories d'entreprises à différentes étapes de leur développement. Au bas, vous verrez la rubrique «entreprises axées sur le style de vie». J'estime que les banques, qui adorent se mêler de ce qui ne les regarde pas tout en essayant de plaire à tous, favorisent les prêts à ce genre d'entreprise. Faire de notre pays une nation de coiffeurs pour hommes et de restaurants de la chaîne Wendy n'est pas vraiment une façon productrice de dépenser nos maigres ressources en capital. Je ne suis pas d'accord avec certaines recommandations du rapport Ianno à ce chapitre.
Là où le problème est le plus important, c'est dans le secteur des entreprises de taille moyenne. Le rapport en fait fi et dit qu'il n'y a pas de problème. Il n'en demeure pas moins que, je le répète, pour en revenir à ce que je disais au début, pour nous, il n'est pas question des intermédiaires de marché restreint et il est intéressant de voir que la question de l'intermédiation pour les entreprises de taille moyenne n'est abordée dans aucun de ces ouvrages, si ce n'est l'étude McKinsey effectuée pour le groupe de travail.
Il existe 70 fonds de capital de risque à Toronto à l'heure actuelle. Si un entrepreneur veut se débrouiller et trouver du capital de risque, il va devoir frapper à de nombreuses portes. Comment savoir s'il en existe à Sarnia, Lethbridge ou Moose Jaw? Pour le savoir, il faut s'adresser à des intermédiaires comme ma société. Nous n'avons pas utilisé l'une des cinq grandes banques canadiennes pour conclure un marché depuis 18 mois. Nous faisons généralement affaire avec GE Capital, Congress, ABN AMRAO. C'est donc de ce domaine qu'il s'agit.
• 1140
Dans un discours qu'il a prononcé à Calgary, Matthew Barrett
a parlé de créer une banque qui s'occuperait exclusivement des
petites et moyennes entreprises. J'ai constaté avec plaisir qu'il
considérait comme entreprises de taille moyenne celles qui ont une
marge de crédit légèrement supérieure à 1 million de dollars.
Si nous voulons favoriser l'expansion d'entreprises qui permettront de réduire notre taux de chômage, il nous faut des entreprises qui se développent rapidement. Dans ce document, vous trouverez des statistiques au sujet de sociétés qui comptent plus de 20 employés. Cela n'englobe absolument pas les entreprises qui ont une marge de crédit de 1 million de dollars. Dans ce genre d'entreprises, les niveaux de salaire augmentent et il y a également des régimes d'avantages sociaux. La qualité de vie est meilleure, ce qui est l'objectif recherché.
Si le taux de chômage national est si élevé et si le pays ne progresse pas, c'est parce que les hommes d'affaires ne peuvent pas prendre de l'expansion en raison de leur manque de connaissances du marché moyen. Il faut plus d'intermédiaires dans ce marché comme moi, mais il n'en est pas assez question dans les documents que j'ai vus.
Chaque fois qu'une compagnie du marché moyen vient dans mon bureau, elle se plaint du roulement des directeurs de succursales. On peut accorder des prêts de moins d'un million de dollars avec un système de pointage. C'est facile. Mais quand il s'agit d'une entreprise qui a un chiffre d'affaires de 20 millions de dollars qui fabrique des jouets et qui doit écouler la totalité de son stock avant Noël, il faut un banquier qui connaisse son affaire. C'est une question qu'on n'aborde pas assez: comment faire grandir des entreprises et comment financer les sociétés à fort potentiel de croissance. Moi, je distingue toujours entre des entreprises de style de vie et les entreprises de croissance.
J'ai terminé, monsieur le président.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Sharwood.
Les derniers témoins de ce groupe seront MM. Cozza et Bradford. Bienvenue à vous.
M. Gino Cozza (président, Comité des services financiers, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada): Merci.
Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je m'appelle Gino Cozza, et je représente l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada. Je suis accompagné de M. Adrian Bradford, directeur adjoint de l'Association.
L'AIAMC regroupe 17 fabricants automobiles d'Europe, du Japon et de Corée qui vendent des voitures et des petits camions sur le marché canadien et en assurent l'entretien. Trois de nos membres, directement ou par l'intermédiaire d'affiliés, fabriquent des véhicules au Canada destinés à être exportés aux États-Unis et ailleurs. Le travail de l'Association se fait au moyen de 11 comités et je suis le porte-parole du Comité des services financiers dont les membres assurent des services de crédit et de location-bail à chaque concessionnaire et à ses clients au détail. Ces services font partie intégrante de la stratégie axée sur le client de chaque membre de l'Association.
Monsieur le président, les sociétés de crédit affiliées représentent un phénomène relativement nouveau chez les fabricants internationaux de véhicules, puisqu'elles ont toutes été créées au début des années 90. Des sociétés affiliées collaborent directement avec leurs distributeurs pour financer les stocks et le matériel des concessionnaires et pour offrir des prêts hypothécaires pour les fonds de roulement, le financement de gros de baux financiers et des services de location-bail aux clients des concessionnaires. Il s'agit de liens à long terme destinés à faire en sorte que le client puisse acheter et obtenir des services d'entretien dans sa localité en période économique bonne ou difficile. Ce sont des rapports qui seraient sensiblement limités si la recommandation numéro 21 du rapport du groupe de travail MacKay sur l'avenir des services financiers canadiens devait être mise en oeuvre, permettant ainsi aux établissements de dépôt et aux compagnies d'assurance-vie assujettis à la réglementation fédérale d'offrir du crédit-bail pour les véhicules utilitaires légers.
Selon nous, et selon les concessionnaires de partout au pays et tous les fabricants automobiles, le rapport MacKay n'a pas tenu compte de l'effet important que les changements de la politique des services financiers auraient sur d'autres secteurs de l'économie. Si les banques sont autorisées à pénétrer ce marché, on assistera selon nous à une réduction à long terme de la concurrence, une diminution du choix offert aux consommateurs, une augmentation des coûts de crédit-bail, des effets négatifs pour les concessionnaires automobiles en activité dans la quasi-totalité des localités canadiennes et le dérèglement de l'industrie automobile dans son ensemble. Il y a cinq raisons à cela.
• 1145
D'abord, contrairement aux prêts, le crédit-bail exige que le
bailleur soit propriétaire du véhicule et soit tenu responsable du
risque résiduel et de la gestion du risque résiduel. Assumer ces
responsabilités exige un engagement indéfectible du secteur
automobile. Cette exigence, qui n'est pas imposée aux banques, doit
exister en période de prospérité comme en période difficile.
Les banques pourraient se servir de l'avantage—que leur confère la loi—du coût du capital inférieur pour évincer la concurrence. Telle est la particularité du marché canadien, où il est trop coûteux pour d'autres intervenants d'entrer dans le secteur bancaire. De plus, dans le scénario envisagé par MacKay, les banques ne seraient pas tenues d'offrir le crédit-bail au moyen de filiales autonomes, ce qui est le cas pour les banques qui offrent du crédit-bail automobile à l'extérieur de l'Amérique du Nord.
À cause de leur situation dominante dans le secteur des services financiers, les banques ont réussi par le passé à capturer une part du marché et à évincer les concurrents des nouveaux marchés grâce à leurs prix d'appel. Il importe à cet égard de rappeler les propos de James O'Donnell, premier vice-président de la Banque de Nouvelle-Écosse, qui a déclaré en 1994:
Si les banques ont recours à cette stratégie pour écarter la concurrence et dominer le crédit-bail automobile comme elles dominent le secteur des prêts, les sociétés de crédit affiliées ne pourront plus offrir leurs services aux concessionnaires. Si les banques sont autorisées à offrir le crédit-bail directement aux consommateurs au détail, les concessionnaires canadiens devront rivaliser avec les établissements de dépôt chez qui ils trouvent la plus grande partie de leurs crédits à l'exploitation. Ce serait là un conflit d'intérêts surtout en situation économique difficile, lorsque les banques hésiteront peut-être à accorder du crédit à un grand nombre de petits concessionnaires automobiles en difficulté financière.
Le crédit-bail automobile a vu le jour au début des années 90 lorsque la dépréciation du dollar canadien a fait augmenter le prix des véhicules importés et lorsque les clients frappés par la récession ont réalisé qu'ils pouvaient louer un véhicule à meilleur prix que s'ils l'achetaient. Cela a permis aux concessionnaires de traverser ce qui aurait été une baisse sévère des ventes de véhicules, tout en créant de nouveaux emplois dans leurs services de vente et d'entretien.
Mesdames et messieurs, le rapport MacKay constate qu'environ 1 300 concessionnaires offrent du crédit-bail automobile et que 20 sociétés de crédit affiliées et autres établissements de services financiers non bancaires font du crédit-bail automobile. Le marché est donc déjà très concurrentiel. Même si beaucoup de ces sociétés de location appartenant à des concessionnaires sont petites, les 25 à 30 contrats signés par année représentent une partie importante des ventes et du revenu net du concessionnaire.
Monsieur le président, ces contrats peuvent signifier la vie ou la mort des petits concessionnaires, qui se trouvent souvent dans des régions où les fournisseurs automobiles se font rares. La concurrence pour attirer la clientèle est si forte dans le marché du crédit-automobile qu'elle a amené un grand établissement de services financiers non bancaires à retirer ses services aux concessionnaires automobiles dans l'Ouest du pays le mois dernier.
À une époque où les banques cherchent à prendre de l'expansion à l'échelle mondiale, il est regrettable qu'elles aient choisi de s'en prendre aux sociétés de crédit étrangères qui font affaire au Canada, qu'il s'agisse de banques étrangères ou de sociétés de crédit-bail affiliées à des fabricants automobiles. Les fabricants internationaux de véhicules automobiles font dorénavant partie intégrante de l'économie canadienne et donnent du travail à 2 500 citoyens dans des postes d'administration et de distribution et à 6 200 autres dans les usines. Le nombre d'emplois augmentera si les ventes continuent de s'accroître, comme c'est le cas depuis 1996. Les sociétés de crédit affiliées aux membres de l'Association continueront d'investir dans ce marché en expansion. Au lieu de détourner des bénéfices exagérés vers des sociétés étrangères, comme le laissent entendre les banques à charte, les fabricants internationaux de véhicules automobiles vont développer leurs marchés au pays—y compris le crédit-bail—si les restrictions actuellement imposées aux banques sont maintenues.
• 1150
En 1997, toutes les sociétés de crédit affiliées à l'AIAMC ont
adopté un contrat de location à divulgation intégrale qui expose
clairement au client ce qu'il doit savoir avant de conclure un
marché. Nous poursuivons nos efforts pour veiller à ce que les
vendeurs sachent bien qu'ils sont tenus de communiquer au préalable
ces renseignements au client pour que celui-ci puisse examiner
soigneusement les conditions du contrat et comprenne bien les
obligations de chaque partie.
Je vous remercie de l'occasion qui m'a été donnée de comparaître devant vous ce matin. Nous répondrons avec plaisir aux questions.
[Français]
M. Adrian Bradford (directeur exécutif associé, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada): Le texte de la présentation de M. Cozza sera disponible en français cet après-midi.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Bradford.
[Traduction]
Merci, monsieur Cozza.
J'aimerais maintenant passer immédiatement à...
M. Ron Jamieson: Pourrais-je intervenir, monsieur le président?
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous en prie.
M. Ron Jamieson: Je voulais parler du Comité du Sénat. Je sais que nous ne sommes pas devant un comité du Sénat, mais M. Greenspan en a parlé tout à l'heure et je voudrais dire publiquement quelque chose à propos d'une déclaration faite hier par le sénateur Kenny, qui a dit que les banques mentaient à propos des pertes d'emploi.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, comme vice-président en chef de la Banque de Montréal qui est responsable de cette question, et comme employé de la Banque, permettez-moi de vous dire que je suis outré de cette affirmation. Nous ne mentons pas sur ces questions-là. Je voulais le dire publiquement et j'aimerais beaucoup parler à ce monsieur. Comme M. Greenspan a évoqué la question du Comité du Sénat, je voulais faire cette observation.
Merci.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous êtes ici devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Je n'autoriserai plus aucune question concernant l'activité d'un autre comité. Lorsque les membres d'un autre comité n'ont pas la possibilité de défendre leurs points de vue, je trouve que c'est commettre une injustice. Je signale pour les besoins du procès-verbal que le Comité des finances de la Chambre des communes a accepté et continuera d'accepter les mémoires et les témoignages que n'importe quel citoyen, de partout au pays, veut lui présenter. Je vais en rester là.
[Français]
C'est au tour de M. Forseth de prendre la parole. Monsieur Desrochers, je vous accorderai bientôt la parole et vous pourrez en profiter pour poser des questions aux témoins à votre tour.
[Traduction]
Monsieur Forseth.
M. Paul Forseth: Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui.
Ceux qui témoignent devant un comité du Parlement devraient tenir pour acquis qu'ils témoignent sous serment. Certains privilèges sont associés à un témoignage devant un comité parlementaire et il ne faut pas en abuser en diffamant quelqu'un, par exemple, ou en dénaturant l'objet de ses travaux au moment où il peut y avoir des procédures judiciaires ou lorsque d'autres mesures sont envisagées pour l'avenir. Le comité ne veut pas être manipulé. Nous voulons nous en tenir à notre tâche, car le comité a des recommandations à faire. Nous avons du travail à faire ici, et nous ne voulons pas être le jeu d'autres intérêts.
Je veux parler précisément aux fabricants automobiles de la question de la concurrence en matière de crédit-bail automobile. J'estime que le consommateur et la population en général qui veulent acheter un véhicule profiteraient d'une concurrence améliorée. Peut-être pourriez-vous nous parler du climat actuel de la concurrence et de ce qui se passerait si les banques avaient accès à ce secteur.
Certains disent que l'arrivée des banques améliorera la concurrence; ils en donnent pour preuve votre nouveau contrat à divulgation intégrale. Cela remonte à 1997. Pourtant, le crédit-bail existe depuis bien longtemps. Ces mêmes personnes diraient que vous avez entendu venir la concurrence et que vous vous êtes enfin secoués. La perspective de l'arrivée des banques a peut-être accru la concurrence, ce qui a amené un meilleur produit. Il y a donc des arguments pour et contre.
Pourquoi l'arrivée des banques dans le secteur du crédit-bail automobile serait-elle mauvaise et réduirait-elle la concurrence? Comment selon vous pourrions-nous améliorer la concurrence puisqu'il est certain qu'un marché comme celui-là serait plus avantageux pour les citoyens?
M. Gino Cozza: Aujourd'hui, il suffit d'ouvrir un journal pour voir qu'il y a énormément de concurrence et que les fabricants offrent des taux très attractifs. Nous sommes déjà en concurrence indirecte avec les banques. Qu'arriverait-il si elles pénétraient sur ce marché, comme le recommande le rapport MacKay? Elles seraient en concurrence directe avec beaucoup des concessionnaires dont elles assurent actuellement le financement de gros.
• 1155
Permettez-moi de vous donner un exemple très précis. Il y a
des concessionnaires qui empruntent actuellement de l'argent aux
diverses banques au taux préférentiel majoré d'un demi-point ou
d'un point, et ils prêtent ensuite cet argent dans le cadre d'un
contrat de crédit-bail, en essayant de réaliser un profit. Comment
pourront-ils faire cela si les banques peuvent déjà offrir des taux
inférieurs à ceux auxquels ils peuvent emprunter? Cela éliminerait
virtuellement du marché les petits concessionnaires qui offrent du
crédit-bail.
M. Paul Forseth: Je suppose que les concessionnaires ne font pas vraiment cela. Ils confient ces services à des sous-traitants qui fournissent le financement nécessaire à Ford, à GM et à tous les autres. Ce n'est pas un concessionnaire particulier qui se trouve dans une telle situation.
M. Gino Cozza: C'est vrai, mais il y a aussi les concessionnaires qui ont leurs propres services de crédit-bail.
M. Adrian Bradford: Il y a les concessionnaires qui ont leurs propres sociétés de crédit-bail. Ce sont les 1 300 concessionnaires dont M. Cozza a parlé pendant son exposé. Ce sont souvent de très petites sociétés qui concluent peut-être seulement 30 transactions de crédit-bail par année. C'est cependant un secteur très lucratif pour ces sociétés; c'est donc un secteur qu'elles continueront de développer.
M. Paul Forseth: Très bien. Vous affirmez donc que l'arrivée des banques dans ce marché va réduire la concurrence en ce qui concerne les taux offerts, ce qui entraînera une augmentation des coûts pour le consommateur.
M. Adrian Bradford: Étant donné que les banques ont un avantage sur le plan du coût du financement, elles pourraient utiliser cet avantage pour cibler des marchés particuliers à différents moments. Et comme les petits concessionnaires n'ont pas les capitaux nécessaires pour leur permettre de continuer d'exploiter leur entreprise, de patienter en attendant le moment favorable, ils seraient forcés de fermer boutique, et vous verriez donc ces petites sociétés de crédit-bail disparaître.
M. Gino Cozza: Vous verriez diminuer la concurrence par rapport à ce qu'elle est aujourd'hui. Vous verriez beaucoup de gens disparaître de ce secteur. À court terme, cela pourrait par conséquent être avantageux pour le consommateur, mais à long terme, les taux augmenteraient certainement. C'est M. Sharwood, je crois, qui a raconté comment il avait dû se retirer du secteur parce que les banques avaient virtuellement accaparé le secteur du détail.
M. Paul Forseth: Vous laissez donc entendre que les concessionnaires automobiles sont parfois dans une situation précaire et que s'ils sont privés de cet élément supplémentaire de leur entreprise qui leur rapporte des recettes, la viabilité de beaucoup d'entre eux sera peut-être alors menacée.
M. Adrian Bradford: Leur situation est aussi précaire que celle de toute petite entreprise. Ils connaissent des hauts et des bas, selon les fluctuations de l'économie. En période difficile, les banques leur retireront fort probablement leur financement. Dans ce cas, ils doivent se tourner vers quelqu'un d'autre pour continuer d'obtenir les fonds nécessaires, et dans ces périodes difficiles, ce sont les sociétés de crédit-bail associées aux fabricants d'automobiles qui ont fourni ce financement.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous donnerai un peu plus de temps, mais je voulais donner un exemple. Les banques recueillent des dépôts, sur lesquels elles paient tout au plus 3 p. 100, 4 p. 100 ou 5 p. 100. Le taux préférentiel se situe aujourd'hui autour de 7 p. 100 et elles profitent donc de l'écart qui existe entre ces taux. Alors pour obtenir du financement, vous devez payer 7 p. 100 plus un demi de 1 p. 100 ou 1 p. 100.
M. Gino Cozza: D'une façon générale, c'est exact. Le taux se situerait, selon le pouvoir du concessionnaire, entre le taux préférentiel et ce taux majoré de 1 p. 100.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais M. Forseth a allégué que si les banques peuvent entrer sur le marché du crédit-bail, n'offriraient-elles pas des taux considérablement moins élevés que ce que vous pouvez offrir? Leurs coûts de financement sont beaucoup...
M. Adrian Bradford: Leurs coûts de financement sont beaucoup moins élevés.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Justement. Mais n'est-ce pas bon pour les consommateurs? Je me fais l'avocat du diable en disant cela.
M. Adrian Bradford: On peut y voir une bonne chose pour les consommateurs à court terme, parce qu'ils auraient accès à ce marché. Cependant, les banques se sont toujours introduites dans des marchés en réduisant les taux, mais elles se rendaient compte avec le temps qu'elles ne faisaient pas les profits escomptés. C'est un secteur très spécialisé qui exige qu'on soit capable de prévoir la valeur résiduelle future des produits. Si l'on se trompe dans ces calculs, on se rend compte qu'on doit faire marche arrière trois ans plus tard. Une banque pourrait décider qu'elle doit se retirer de ce secteur. Dans ce cas, elle pourrait laisser en plan les revendeurs.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Avez-vous des renseignements sur les taux pour le crédit-bail dans d'autres endroits, ailleurs en Amérique du Nord, par exemple? Vous disiez qu'on permettait ailleurs aux banques de faire du crédit-bail. Quels sont les taux comparativement à ceux du Canada et qu'arrive-t-il à la voiture, une fois le contrat de crédit-bail terminé, si elle appartient à une banque? Pouvez-vous prévoir que les banques entreraient alors sur le marché des voitures d'occasion.
M. Gino Cozza: C'est là le problème. Nous parlons surtout des taux, mais ce n'est qu'un aspect d'une transaction de location. L'élément le plus crucial est probablement celui que vous avez mentionné, soit la valeur résiduelle, et ce qu'il advient des véhicules, une fois le contrat terminé, et la façon dont les banques en disposeraient. Tout d'abord, elles n'ont pas d'expérience dans la détermination de la valeur résiduelle et deuxièmement, elles n'ont pas de moyen de se débarrasser de ces véhicules, une fois la période de crédit-bail terminée. Il ne s'agit donc pas seulement d'une question de taux.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Bien.
Poursuivez, monsieur Forseth. Je vous prie de m'excuser, mais ma question était du même type que la vôtre.
M. Paul Forseth: Il n'y a pas de mal.
Je voulais poser des questions aux représentants de la Banque de Montréal. J'ai été impressionné par certaines de vos observations lorsque vous vous félicitiez d'avoir procédé à des consultations spéciales, d'avoir ainsi obtenu la confiance de vos clients et des connaissances précises vous permettant de répondre aux besoins de certains clients particuliers, et vous disiez tout cela au sujet des Autochtones. J'aurais pensé que vous auriez offert ce genre de services à tout le monde et qu'une banque doit faire cela pour n'importe quel type de consommateur.
Je veux que vous me disiez spécifiquement la façon dont vous procédez pour accorder des prêts résidentiels lorsqu'il y a un problème au sujet du titre de propriété et qu'il n'y a pas de marché. La banque ne peut pas détenir une hypothèque lorsque la personne qui emprunte l'argent n'est pas propriétaire du bien. Il se peut que le gouvernement fédéral soit propriétaire du terrain et que l'immeuble soit situé sur une réserve, ou que le terrain soit détenu collectivement par la bande, et qu'il n'y ait pas vraiment de marché. Je suppose qu'une grande partie de ces prêts consentis pour des résidences sont traités plus ou moins comme un prêt pour l'achat d'une automobile, c'est-à-dire un prêt consenti pour un bien de consommation qui se déprécie et qui sera éventuellement consommé, et il est fondé simplement sur la capacité de l'emprunteur de payer, plutôt que sur la valeur croissante du bien lui-même.
Je veux donc que vous nous expliquiez spécifiquement le problème des titres de propriété et des prêts sur les habitations, ce qui nous amène un peu dans une discussion de sémantique, peut-être.
M. Ron Jamieson: Merci beaucoup.
Premièrement, permettez-moi de réfuter l'une des notions erronées que vous avez formulées, selon laquelle il n'y a pas de marché interne dans une réserve. De fait, il existe un marché actif et croissant dans plusieurs réserves du Canada, mais pas dans toutes. Dans ma propre collectivité des Six Nations, que je connais évidemment très bien, il y a environ 800 personnes dont le nom figure sur une liste d'attente pour un prêt résidentiel. Cela règle donc la question du marché.
En outre, sur plusieurs réserves du Canada, les résidents reçoivent un document qu'on appelle un certificat de possession, qui est très semblable à un titre de propriété. La différence réside dans le fait que ce titre peut seulement être transféré à un autre membre de cette collectivité, de sorte qu'il n'y a pas de pression du marché extérieur. Dans le cadre de la mise en oeuvre de notre programme de prêts résidentiels, il existe des rapports entre l'administration du logement et la banque ou entre le conseil de bande et la banque.
Dieu merci, il y a maintenant plus de gens dans les réserves qui ont un emploi et qui sont admissibles à des prêts résidentiels. Pendant la durée d'un prêt résidentiel, le résident accepte de transférer son certificat de possession pour sa maison à un tiers, qui s'assurera, si vous voulez, que le prêt résidentiel est remboursé.
M. Paul Forseth: Cela me fait penser immédiatement au quota de l'aide des agriculteurs ou au permis de pêche. Il s'agit d'un certificat permettant de posséder une maison.
M. Ron Jamieson: Exact.
M. Paul Forseth: Il semble y avoir un certain parallèle. Ce n'est pas l'article lui-même qui a de la valeur, mais plutôt le bout de papier qui y donne accès.
M. Ron Jamieson: C'est bien cela. Je vous dirai que le système fonctionne très bien. Nous trouvons cela plutôt encourageant.
M. Paul Forseth: Très bien.
Dans ce cas, qu'est-ce qui incite à vouloir posséder la maison avec ce certificat? Est-ce à cause de tous les autres avantages que cela comporte, notamment sur le plan fiscal? Bien sûr, c'est la bande qui décide qui peut être membre de la bande, et cela permet en fait de déterminer l'ampleur du marché.
M. Ron Jamieson: On ne cesse de soulever la question du statut fiscal spécial. Bien sûr, cela fait des années qu'on m'en parle. Je voudrais faire une précision là-dessus.
Les seuls qui ont, comme vous dites, un statut fiscal spécial sont les gens qui habitent et travaillent dans la réserve et qui ont le droit d'y habiter. Autrement dit, ils sont membres. Ce sont les seuls qui ont un statut fiscal spécial. C'est excellent, sauf qu'il n'y a pas d'emploi dans la réserve. Sur le 1,2 million de gens d'ascendance autochtone au Canada, seulement une poignée, relativement parlant, ont un emploi dans les réserves. Je profite de l'occasion pour apporter cette précision, parce qu'il y a beaucoup d'idées fausses qui circulent à ce sujet.
M. Paul Forseth: Chose certaine, je trouve impressionnante l'information et la documentation que vous nous avez présentée dans le but d'essayer de fournir des services financiers spécialisés tenant compte des sensibilités particulières des Autochtones, par exemple dans la conception de l'immeuble, son emplacement, l'embauche et la formation sur place, et tout le reste. Je trouve que c'est tout simplement magnifique. Mais nous devons demander quels avantages vous en retirerez. Il n'y a rien de comparable nulle part et vous devez donc m'expliquer quels en sont les avantages pour vous, à part de bonnes relations.
M. Ron Jamieson: C'est un bon point et je suis content que vous me posiez la question.
Au départ, nous avons examiné la question des services bancaires autochtones et les diverses initiatives que j'ai tenté de vous décrire ici, non pas comme des entreprises susceptibles de nous faire gagner de l'argent, parce que, franchement ce n'est pas le cas. Nous y voyons plutôt un investissement dans l'avenir. Nous avons constaté qu'il y avait plus d'un million de Canadiens qui n'étaient pas servis et nous nous sommes dits que si nous pouvions tendre la main et concevoir des programmes de prêts particuliers qui répondraient à ces besoins précis, à un moment donné à l'avenir nous en serions récompensés par des affaires. Bien que certains de ces programmes commencent à montrer des indices de rentabilité, ils ne sont pas très rentables, laissez-moi vous le dire. Mais nous espérons qu'à l'avenir, nos efforts seront récompensés. C'est aussi simple que cela.
M. Paul Forseth: D'accord.
Je ne peux manquer d'être impressionné par l'idée de fournir des services financiers dans les localités isolées, mais l'une des banques en question est située dans un très grand centre commercial de l'ouest du Canada, nommément dans l'ouest de Vancouver. À cause de leur emplacement, ces services seraient donc à la disposition de quiconque habite dans la région. Qu'y a-t-il de spécial là-bas, quels services offre-t-on qui ne pourraient pas être fournis par quelqu'un d'autre, 50 pieds plus loin dans le même centre commercial.
M. Ron Jamieson: Je vais vous expliquer.
Comme vous le signalez, ce local se trouve dans un centre commercial; la succursale a été installée à cet endroit dans les années 60. Je ne peux pas vous donner la date exacte, mais je l'ai quelque part. Ensuite, à la suite du règlement couronné de succès des revendications territoriales de la Nation Squamish, nous avons constaté que notre succursale se trouve maintenant sur le territoire de la Nation Squamish. Je dois vous dire que les Squamish sont des très importants clients de la Banque de Montréal et plus spécifiquement de mon groupe. Mais, comme vous le signalez à juste titre, tous les clients sont les bienvenus et peuvent faire affaire dans cette succursale, comme dans toutes nos succursales d'ailleurs.
Enfin, beaucoup de collectivités septentrionales dans les régions beaucoup plus éloignées ne sont pas autochtones à 100 p. 100. À Nain, par exemple, étant donné ce que l'on se propose de construire à Voisey's Bay, il y a beaucoup de clients qui ne sont pas autochtones. Il se trouve simplement que la Banque de Vancouver-Ouest a été implantée à cet endroit à la suite du règlement des revendications territoriales de la Nation Squamish.
M. Paul Forseth: Merci.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Jamieson. Merci, monsieur Forseth.
Monsieur Szabo, je vous prie.
[Français]
M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Les règles changent tous les jours, n'est-ce pas?
Le vice-président (M. Nick Discepola): Non.
M. Odina Desrochers: Vous menez cela comme bon vous semble.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Les règles que nous avons adoptées prévoient qu'on peut alterner, et c'est ce que je fais depuis ce matin.
M. Odina Desrochers: Je vous taquine, monsieur le président.
[Traduction]
Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Szabo, voulez-vous céder votre place et laisser le député du Bloc québécois continuer?
[Français]
M. Paul Szabo: Je vais céder la parole à mon ami Odina.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Allez-y, monsieur Desrochers, on vous cède la parole.
M. Odina Desrochers: Non, non, merci.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Non? D'accord.
[Traduction]
M. Paul Szabo: Je remercie nos témoins de leurs interventions. Il y a toute une gamme de sujets qui nous intéressent et en faisant appel à tous nos collègues, je pense que nous réussirons à les aborder tous.
Monsieur Sharwood, je voulais discuter avec vous. Ayant travaillé à Price Waterhouse et ayant participé à la vérification de Traders pendant de nombreuses années—ainsi que de Canadian General et de Toronto General—, je connais un peu vos antécédents et je sais que vous êtes une mine de renseignements sur l'histoire du secteur des services financiers. Je suis heureux que vous soyez là et j'aimerais avoir votre opinion au sujet de l'avenir du secteur des services financiers.
Dans votre rapport vous avez soulevé certaines questions précises et décrit la situation historique et actuelle et il y a certains domaines que l'on pourrait citer, notamment en ce qui a trait au marché moyen. Et je trouve que c'est très important.
Mais le rapport du groupe de travail MacKay est censé constituer un point de départ pour lancer le débat sur l'avenir des services financiers. La concurrence était une question importante, l'intérêt public également, de même que la conservation ou la protection de la sécurité relative dont nous avons bénéficié jusqu'à maintenant. Et je voudrais donc vraiment entendre ce que vous avec à dire au sujet du secteur des services financiers; à votre avis, ce secteur évolue-t-il de manière à pouvoir répondre aux besoins des consommateurs de demain?
M. Gordon Sharwood: Voici comment je décris le rapport du groupe de travail MacKay: l'éclosion de 100 fleurs. Je trouve que c'est la bonne façon de procéder. J'ai entendu cet exposé et j'ai vraiment versé des larmes sur le sort de la General Motors Acceptance Corporation; je me sentais tout triste en songeant à leur pénible sort. Le fait est que les fonds viennent de GMAC, qui amasse de l'argent sur le marché financier à des taux qui se rapprochent beaucoup de ceux des banques. Cet argument ne tient donc pas debout. Cela va mettre en péril le commerce de certains concessionnaires qui offrent leur propre programme de crédit-bail en se finançant à même les banques; et après?
Nous sommes dans un monde de destruction créatrice et je n'accepte pas l'argument relativement aux pertes d'emploi des banques. C'est du ludisme. C'est comme ceux qui veulent sauver l'emploi des pêcheurs dans les petits ports isolés. C'est impossible, il faut progresser. Et si l'évolution des marchés financiers provoque des pertes d'emploi, c'est une bonne chose. Ces gens-là trouveront d'autres emplois, comme ils le font toujours, et ce sera probablement dans le secteur de la téléphonie.
J'ai vu, quand le rapport de Harold est sorti, qu'il y avait une ouverture et comme je l'ai dit dans mes rapports, pourquoi Bell Canada ne fonde-t-elle pas une banque? Cette compagnie est bien placée pour le faire; elle a toute l'infrastructure câblée en place et elle peut installer des guichets automatiques n'importe où. Voilà ce que je trouve excitant, cette vision d'une grande diversité de sources de services financiers. Le truc, est c'est cela qui me tracasse, c'est ce que je vois surgir à l'heure actuelle dans le secteur—et je veux parler des entreprises de taille moyenne qui ont besoin d'un banquier compétent à Lethbridge pour apprendre qu'il y a à Toronto la Finova qui va financer ses besoins...
Pour ce qui est de l'accès aux capitaux, comme vous le verrez dans ma discussion, j'ai conçu de concert avec MM. Manley et Martin ce que nous avons appelé le Plan d'investissement dans la collectivité canadienne, qui est vraiment conçu pour permettre d'avoir accès au capital. Et nous avons créé quelque chose qui s'appelle le réseau d'accélérateur de croissance communautaire, qui vise à accélérer la croissance dans les localités PICC et ailleurs.
Voyez ce qui se passe aux États-Unis, voyez le grand nombre de nouvelles entreprises. Malheureusement, nous n'avons pas de statistiques sur le démarrage d'entreprises, ce qui est absolument scandaleux; Yvan Fellegi devrait être flagellé pour cela. C'est la ville de Boise, en Idaho, qui vient au deuxième rang pour le taux le plus élevé de nouvelles entreprises aux États-Unis, et au troisième rang, c'est Anchorage, en Alaska. Pourquoi?
• 1215
Et si vous regardez ces collectivités américaines, vous allez
constater qu'elles ont des taux de chômage de 2 p. 100, parce
qu'elles ont beaucoup de nouvelles compagnies et beaucoup de
gazelles, comme je les appelle. Cette nouvelle institution que nous
allons appeler le réseau d'accélérateur de croissance de la
collectivité porte le nom de Gazelles Illimitée. Je veux avoir
davantage de gazelles au Canada et je veux disposer de moyens pour
les financer. Le problème est de savoir comment nous offrons ces
différents produits financiers aux gazelles de Saskatoon etc.? Les
banques vont mettre au point des prêts pour des actifs importants.
Je vais discuter d'une question dont vous avez parlé—c'est-à-dire le contrôle. Il s'agit d'une discussion que j'ai déjà eue avec John Palmer. Une des choses qui arrivent avec un prêteur de ce genre c'est... si le Congrès vous donne 85 p. 100 des sommes à recevoir et 65 p. 100 de l'inventaire à 3 p. 100 de plus que le taux préférentiel, ce qui signifie que vous n'avez pas à trouver le reste des fonds dans vos avoirs propres, ce qui vous donne un prix beaucoup plus intéressant, on vous donne un disque. Le disque est raccordé à votre grand livre, et chaque jour le bureau central de la Banque du Congrès va savoir ce qui a été reçu, ce qui a été expédié, ce qui a été déboursé et ce qui a été encaissé. Si John Palmer ne peut pas utiliser ce mécanisme pour déterminer la qualité des prêts offerts par les différentes institutions financières, eh bien il vit à l'époque des Ténèbres.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Sharwood. Je pense que M. Cozza acceptera votre mouchoir Kleenex, mais j'aimerais permettre à M. Bradford de répondre.
M. Adrian Bradford: Si on voulait verser quelques larmes pour la General Motors également, on pourrait le faire facilement, car elle n'est pas l'un de nos membres.
Mais je pense que l'argument que nous essayons de communiquer c'est qu'en tant que fabricants d'automobiles, nous ne sommes pas intéressés à nous lancer dans les activités bancaires, malgré la vision selon laquelle à l'avenir n'importe qui va pouvoir faire des affaires de ce genre comme bon lui semble. Les coûts en capital nécessaires pour s'établir dans le secteur bancaire sont beaucoup trop élevés, et de plus, il ne s'agit pas d'une activité de base si on est fabricant d'automobiles.
M. Paul Szabo: Monsieur Sharwood, d'après ce que je comprends dans le peu de temps que j'ai eu pour consulter votre documentation, vous pensez qu'on a raté certaines occasions à cause des problèmes de capital de risque, et qu'au Canada, on peut toujours faire beaucoup mieux. Quarante-cinq pour-cent des bénéfices des banques proviennent des transactions internationales.
Nous avons reçu le président et PDG de SNC-Lavalin hier, et je pense que des représentants de Bombardier et de la Northern Telecom nous diraient la même chose: c'est-à-dire qu'il y a énormément de marchés non exploités pour les entreprises canadiennes à l'étranger, et que ces possibilités seraient considérablement accrues si on bénéficiait d'un plus grand appui du système bancaire canadien, lequel serait doté d'une infrastructure et exercerait des activités à l'étranger, qui connaîtrait la culture des différents pays et saurait faire des affaires là-bas et qui pourrait appuyer les activités internationales des entreprises canadiennes. Cela entraînerait la création de plus d'emplois au Canada également. Seriez-vous d'accord avec cela? En plus des possibilités au Canada, faut-il également profiter des possibilités internationales?
M. Gordon Sharwood: Certainement. Nous courrons déjà pas mal de risques. Je finance une entreprise qui est en train de mettre sur pied un système de radiomessagerie par satellite et un système de télévision payante en Tanzanie, au Ghana, au Kenya, en Mongolie extérieure et au Pakistan. Ça fait partie de nos activités normales. Je pense que c'est le point sur lequel j'essayais d'insister; le gouvernement n'a pas reconnu le rôle joué par l'intermédiaire. Toutes les grandes sociétés s'adressent à Wood Gundy, mais qu'est-ce qu'il faut faire pour organiser le financement d'une entreprise qui veut s'établir au Ghana? Il faut que ces entreprises s'adressent à des grands comme moi, et nous ne sommes pas assez nombreux au pays. Voilà un des aspects qu'est effleuré dans certains des rapports, mais on n'en parle pas en détail.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Szabo.
Madame Bennett.
Mme Carolyn Bennett: Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Jamieson. Ceux d'entre nous qui ont eu le privilège d'être à Nunavut cet été pensaient qu'il fallait aider la population de cette région. Je pense aux services interurbains, surtout sur l'Internet, et à partir des bibliothèques vers les institutions financières, les unités de santé ou la GRC, si le seul serveur se trouve à Iqaluit, donc même si les gens se trouvent là, ils vont devoir payer des frais interurbains énormes pour avoir accès au téléservice. J'aimerais savoir si vous pensez que les banques pourraient nous aider à cet égard.
M. Jim Jamieson: La question est très intéressante. Comme vous le savez, beaucoup de ces choses se font maintenant dans le Grand Nord grâce à une liaison par satellite. C'est une façon de transmettre des données à un prix beaucoup moindre.
Par exemple, nous avons des discussions avec des gens à Cape Dorset et à Pangnirtung au sujet de la prestation des services financiers—c'est le genre de services qu'on essayerait d'offrir. Avec une utilisation de plus en plus grande des liaisons par satellite et des systèmes informatiques, ces coûts vont baisser comme on l'a vu dans le cas de toutes sortes de produits, notamment les téléphones cellulaires et les télévisions en couleur. Je pense que vous constaterez que les coûts deviendront un peu plus acceptables.
Beaucoup de gens qui habitent ces collectivités éloignées—et il faut que je précise que la situation varie énormément—ne sont pas aussi à l'aise avec la technologie que le sont beaucoup de gens du Sud. Voilà pourquoi c'était important lorsque nous avons collaboré avec Postes Canada pour leur offrir des services financiers et pour former la population locale à fournir ces services. La technologie existait, on avait la liaison entre ordinateur et les lignes téléphoniques 1-800, etc., mais lorsque les gens voulaient demander un conseil ou faire une transaction ils pouvaient parler directement à quelqu'un. Dans 15 ou 20 ans, la situation aura probablement changé, et les gens vont faire toutes sortes de transactions, y compris des transactions bancaires, par
[Note de la rédaction: Inaudible] satellite et toutes sortes de technologies innovatrices.
Vous soulevez un point très valable. Il s'agit de tout un défi dans cette région.
Mme Carolyn Bennett: Le rapport MacKay parle des investissements dans la collectivité, etc., mais il va sans dire quÂoffrir ce genre de services de façon à ce que... Si les banques s'assurent que les services sont disponibles dans ces collectivités éloignées, tout le monde peut jouer un rôle utile. Vous avez raison de dire que beaucoup de gens ne sont pas à l'aise avec la technologie.
J'ai déjà pratiqué à Armstrong, en Ontario, qui a une forte population d'Autochtones non inscrits. Les gendarmes de la GRC passent la plupart de leur temps à aller dire aux gens qu'ils devraient mettre leur argent dans une banque, plutôt que de le garder dans des boîtes à chaussures rangées sous leur lit. Les gens n'étaient pas à l'aise et ne voulaient pas donner leur argent à une banque et ne pas savoir où il était. Je pense qu'il reste beaucoup de travail à faire dans ces collectivités.
M. Jim Jamieson: Plus tôt j'ai parlé de la patience et des investissements qui sont tellement importants, surtout dans le cas de certaines de ces collectivités où les gens perdent leur argent dans les matelas ou les bas de laine. Cela exige beaucoup de patience et d'effort dans les salles de classe pour faire comprendre aux gens tout ce qui peut arriver.
Une dame est venue à notre succursale et a demandé en cri si elle pouvait voir le coffre-fort où on gardait l'argent. Nous avons accepté volontiers, et nous le lui avons montré. Elle voulait voir où l'argent croissait, parce qu'elle avait compris que l'argent croissait si on le mettait dans une banque. Elle voulait voir exactement comment cela se produisait.
M. Gordon Sharwood: Qu'est-ce que vous lui avez dit?
M. Jim Jamieson: Heureusement, Gordon, ce n'était pas moi qui étais de service à la banque ce jour-là.
Voici donc le genre de questions auxquelles on peut se heurter. Elles peuvent varier entre des questions de ce genre à des questions très complexes. Nous nous occupons de toute une gamme de problèmes, dont l'éloignement n'est pas le moindre, étant donné qu'on est à une heure de vol d'une banque, et que le vol coûterait cher.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, madame Bennett.
Madame Redman, il ne reste que deux minutes. Mais si nous passons au Bloc québécois, je peux revenir à vous plus tard et vous donner le temps qu'il vous faut.
[Français]
Monsieur Desrochers, je vous souhaite la bienvenue.
M. Odina Desrochers: Merci, monsieur le président. J'aimerais faire un commentaire en tant que membre du Comité des finances, lequel poursuit depuis près de deux mois son étude sur le rapport MacKay. Nous avons été déçus hier de voir qu'un autre comité faisait connaître son point de vue, alors que nous délibérons sur ce sujet très délicat et très important.
• 1225
Comme vous le savez, cette question suscite énormément de
commentaires et de remarques. La publication d'un
titre tel que: «Fusion des banques, non. Voici les grandes
lignes du rapport sur les fusions bancaires» vient
discréditer le travail qu'effectue de notre comité.
Je ne comprends pas pourquoi ces gens-là, qui devraient normalement avoir une idée de l'importance et de la délicatesse de toutes les questions dont on discute ici, agissent ainsi. Depuis près de deux mois, on a entendu une foule de gens à ce sujet. Je n'accepte carrément pas qu'on diffuse un tel message auprès de la population.
Nous, les députés du Bloc québécois, avons même demandé qu'on prolonge la période de consultation afin de pouvoir approfondir ce débat. Nous en avons d'ailleurs longuement parlé à Montréal, monsieur le président. Au nom du Bloc québécois et en mon nom personnel, je m'inscris en faux contre ce rapport d'hier. J'espère que les articles ou les commentaires de ce matin ne viendront pas discréditer le travail sérieux et professionnel qu'on fait ici dans cette salle et qu'on a fait partout au pays pendant près de deux mois.
Permettez-moi de demander à M. Jamieson s'il partage, oui ou non, les conclusions un peu loufoques de ce rapport sénatorial publié hier.
[Traduction]
Le vice-président (M. Nick Discepola): Pour mémoire, je tiens à dire que le rapport qui a été publié hier n'est pas un rapport sénatorial. Il a été préparé par un groupe de députés libéraux, qui s'est réuni en novembre pour discuter de leurs préoccupations au sujet du secteur financier. C'était bien avant l'annonce faite par les banques, qui a eu priorité sur le rapport de ce comité et celui du Groupe de travail MacKay. Nous nous référons donc au rapport préparé par le comité du Groupe de travail du caucus libéral, qui n'a rien à voir avec les travaux de ce comité, qui comprend des représentants de tous les partis, et qui ne relègue pas du tout au second plan le travail de ce comité.
M. Ron Jamieson: Je comprends. Merci.
Franchement, je n'ai pas vu ce rapport avant 8 heures, donc je n'ai pas eu le temps de le regarder. Mais aussitôt que je l'ai reçu, j'ai tout de même cherché des références au territoire autochtone. C'est ma spécialisation, c'est pour cela que je suis ici, et c'est pour cela que le ministre des Affaires indiennes m'a demandé à comparaître devant vous.
Comme j'ai mentionné dans mes commentaires, je suis très déçu d'une recommandation qui n'explique pas du tout ce que le gouvernement fédéral devrait faire. Il n'y a que deux lignes, mais nous parlons d'un million de Canadiens. Ça ne suffit pas du tout.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Desrochers.
[Français]
M. Odina Desrochers: Merci. Revenons maintenant aux choses plus sérieuses et mettons de côté ce rapport. Je tenais quand même à faire la mise au point. Option consommateurs a fait une étude très sérieuse selon laquelle 600 000 Canadiens ne sont pas en mesure d'ouvrir un compte ou ont de la difficulté à avoir accès au crédit. Est-ce que vous avez des statistiques sur l'accès au crédit de la population que vous desservez, soit la population autochtone? Est-ce qu'on retrouve malheureusement un certain nombre d'autochtones parmi ces 600 000 Canadiens identifiés par Option consommateurs?
[Traduction]
M. Ron Jamieson: Cela est une très bonne question. En ce moment, l'Association des banquiers canadiens ne surveille pas le volume d'affaires que représente la clientèle autochtone. Moi, j'ai fait une petite étude à l'interne: au Canada, il y a à peu près 1 000 communautés autochtones, à peu près 600 réserves, des communautés métisses, et des communautés inuites et inuvialuites dans l'ouest de l'Arctique. En somme, il y a à peu près 1 000 communautés en tout. À l'interne, j'essaye donc d'identifier la part du marché de la Banque de Montréal en établissant avec combien de communautés nous avons des relations bancaires importantes.
• 1230
J'estime que très bientôt l'Association des banquiers
canadiens, et peut-être d'autres aussi, commenceront à surveiller
le niveau d'activités bancaires dans ces communautés-là. C'est
quelque chose de très positif, et j'aimerais contribuer à cette
activité si possible. Il nous faut plus d'information.
Un peu plus tôt, Gordon Sharwood a indiqué qu'il y a beaucoup de statistiques. Mais quand vous planifiez une stratégie axée sur l'avenir, comme nous le faisons pour faire des affaires dans les communautés autochtones, la capacité de recueillir et de mesurer ces statistiques prend beaucoup d'importance.
[Français]
M. Odina Desrochers: Monsieur Jamieson, vous n'êtes pas en mesure de me dire si ces gens-là ont de la difficulté ou non à avoir accès au crédit. Vous n'avez pas présentement de tels chiffres en main.
Je vous poserai une autre question. Est-ce que le projet de fusion que votre banque défend améliorera l'accès au crédit et les services que vous offrez actuellement à vos clients?
[Traduction]
M. Ron Jamieson: Absolument. Comme je l'ai dit dans mon exposé, actuellement nous avons 16 succursales. En juin, nous ouvrirons encore 20, en coopération avec Postes Canada. Si les deux banques pouvaient fusionner leurs ressources, je pourrais peut-être vous dire dans un an que nous ouvrirons peut-être encore 100.
Ce qui compte, c'est l'accès aux ressources. Tout cela coûte cher. L'investissement initial est élevé, il faut beaucoup de patience. Si j'avais les ressources de la Banque de Montréal et de la Banque Royale, je serais certainement là dans ces communautés. Je pourrais vous dire qu'il y a 100 succursales dans des communautés lointaines qui n'ont jamais encore été desservies par une institution financière.
[Français]
M. Odina Desrochers: Je vous remercie, monsieur le président. Merci, monsieur Jamieson, de vos réponses.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Il vous reste encore deux ou trois minutes.
M. Odina Desrochers: Je les céderai à mes collègues, s'ils le désirent.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Redman.
[Traduction]
Mme Karen Redman: Merci. Je prendrai ses deux ou trois minutes, monsieur le président. Si j'ai le temps, j'aimerais toucher à tous les sujets déjà abordés.
Monsieur Sharwood, en fin de compte, vous nous dites que le Groupe de travail MacKay a fait beaucoup de très bonnes recommandations. C'est ce que je déduis de votre exposé.
M. Gordon Sharwood: Je n'ai pas trop bien compris...?
Mme Karen Redman: D'après vous, les recommandations du groupe de travail MacKay comprennent de très bonnes choses. Ils arrivent à une sorte d'équilibre, dans un contexte où nous cherchons à restructurer les quatre piliers des institutions financières pour passer à un système basé sur l'esprit d'entreprise.
Estimez-vous que toutes les recommandations sont bonnes, ou devrions-nous en appliquer certaines mais pas d'autres?
M. Gordon Sharwood: Comme vous savez, le rapport contient beaucoup de recommandations. Certaines d'entre elles prendront du temps.
Je suis d'accord avec M. Jamieson au sujet de la technologie. Dans 15 ou 20 ans, je ne vois pas ce qui m'empêcherait d'introduire un système fonctionnant par satellite dans les communautés inuvik, qui me permettrait d'effectuer des transactions bancaires par téléphone. Par exemple, je pourrais changer mes fonds mutuels, ou modifier mon REER. Mais n'oublions pas qu'il y a des gens... Les gens plus âgés par exemple sont moins habitués à la technologie. Il faut aller assez lentement. Cela prend du temps, et les résultats ne sont pas instantanés. Mes enfants savent bien mieux que moi actionner les ordinateurs. Quand ils grandiront ils n'auront aucun problème avec les guichets automatiques bancaires, par exemple.
Mais je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas agir rapidement pour mettre en oeuvre les recommandations sur la modification des dispositions permettant l'établissement de nouvelles banques. Il n'y a aucune raison pour ne pas permettre rapidement aux caisses populaires de devenir des banques.
Cela est une question importante: si on pouvait former les agents des caisses populaires pour qu'ils deviennent de bons agents de crédit... En ce moment, ils ne le sont pas. Ils savent comment consentir un prêt hypothécaire, et c'est à peu près tout.
Un avantage des caisses populaires c'est que le gestionnaire reste normalement en place pendant bien longtemps. Par exemple, il n'est pas promu de Minden à Peterborough au bout de deux ans. Ils forment donc une base communautaire, et très souvent connaissent tout le monde dans la collectivité. Ils sont perçus comme ayant de l'intégrité, quelque chose dont on me parle tout le temps.
Dans mon métier, quand quelqu'un de Guelph vient me voir et fait une présentation, je dois téléphoner à quelqu'un de Guelph et je demande, «Qui est cette personne? Est-ce qu'elle est fiable?» Dans ce sens-là, les caisses populaires ont un avantage dans le secteur des prêts.
• 1235
Il y a donc beaucoup de choses à prendre en compte. Je ne peux
pas les mentionner toutes une à une.
Mme Karen Redman: Je ne vous demande pas d'indiquer si toutes les 124 recommandations sont négatives ou positives. Mais d'après ce que vous dites, vous estimez qu'il faudrait aller de l'avant avec les recommandations touchant la concurrence croissante, et peut-être les règlements bancaires internationaux.
M. Gordon Sharwood: Absolument. J'estime que les banques canadiennes sont tout à fait capables de résister à des concurrents comme Finova, ABN AMRO et la Banque d'Amérique. Donc allons-y.
Mme Karen Redman: Vous dites que vous n'êtes pas contre la technologie, et que vous avez une vision pour l'avenir. Je considère que notre comité doit toujours garder un oeil sur l'avenir. Puis, on parle de changement dans le secteur.
J'aurais aussi une question pour M. Jamieson. Vous avez travaillé avec la Banque Royale. Vous soulignez les services bancaires autochtones, un sujet qui préoccupe beaucoup les gens de ma circonscription.
Ils sont inquiets par les changements qui se produisent dans les institutions financières. Ils ont l'impression que si on donne notre approbation aux fusions bancaires, le résultat serait une perte de services dans les régions rurales du Canada, et certainement dans les régions lointaines que vous avez mentionnées.
Pourquoi la Banque de Montréal a-t-elle décidé d'aller dans ces régions? Est-ce que c'était la bonne décision? Vouliez-vous capter une partie du marché qui n'est pas desservi?
M. Ron Jamieson: Nous avions quelques raisons qui ont motivé cette décision. Si vous vous y prenez comme il faut, c'est une bonne affaire. Si vous offrez des services financiers, et les 1 000 personnes de la communauté s'habituent un peu plus à faire affaire avec une banque, et découvrent la vaste gamme de services auxquels elles peuvent avoir accès, y compris les prêts, alors vous stimulez une activité économique. Votre point de services dans la communauté peut donc devenir beaucoup plus rentable.
Alors ça va à l'encontre de la mentalité des entreprises dans une bonne partie du Canada, où votre survie dépend des résultats du prochain trimestre. On a dû adopter une vision beaucoup plus élargie dans les opérations bancaires des Autochtones. On a dû décider de dépenser de l'argent et de s'engager dans des activités externes. Peut-être dans cinq ou dix ans on va commencer à voir un bon rendement sur cet investissement.
Je peux vous dire que la Banque de Montréal était fermement de mon côté dans ce dossier, et jusqu'ici on a pas mal réussi.
Mme Karen Redman: Alors, quel est le juste milieu entre l'esprit d'entrepreneur dont M. Sharwood a parlé...? Je crois que les consommateurs et les Canadiens en général l'exigent dans leurs institutions financières. Quel est le juste équilibre entre cela et les décisions bancaires comme quoi X étant bon pour les actionnaires de notre banque, et c'est donc une bonne décision du point de vue des affaires. Où est le rôle du gouvernement dans la décision de desservir ces régions éloignées? Est-ce qu'il y a des lois, ou comment atteindre cet équilibre? Je crois que c'est le rôle du gouvernement de protéger tous les Canadiens, ceux qui habitent dans les régions rurales du Canada, aussi bien que ceux qui résident dans les régions éloignées. Où se situe l'équilibre pour le gouvernement? Quelle est la solution parfaite?
M. Jim Jamieson: Laissez-moi simplement noter qu'on favorise une concurrence accrue. J'ai trouvé très intéressantes les remarques de M. Sharwood comme quoi les banques avaient 70 p. 100 du commerce. Il a aussi dit qu'il y avait 70 compagnies de capital de risque au centre-ville de Toronto seul. Alors ces gars doivent être très actifs.
Personnellement, j'inviterais toutes les institutions dont Gordon a parlé et d'autres à venir nous faire concurrence. Mais par ailleurs, notre fusion avec la Banque Royale nous donnerait la force de concurrencer des marchés autres que celui-ci—mais comprenant celui-ci. Cela permettrait de maintenir ces emplois grâce à l'augmentation du niveau d'emplois au Canada et non ailleurs.
Mme Karen Redman: Le rôle du gouvernement n'est-il pas d'exiger que ce genre de services soient offerts par qui que ce soit?
M. Jim Jamieson: À mon sens, le rôle du gouvernement est de faciliter cela. Donc «exiger» n'est pas un terme que j'approuve.
Mme Karen Redman: D'accord. Est-ce que «sauvegarder» serait mieux?
Monsieur Sharwood, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Gordon Sharwood: Eh bien, je crois que le terme «faciliter» de M. Jamieson est bon, parce que ce sera une activité commerciale payante parce que les coûts vont baisser du fait de l'automatisation.
Je voulais faire valoir un autre argument. Certains d'entre vous ont peut-être vu une étude faite par le professeur Don Daly de la Schulich School of Business, au sujet de l'écart de productivité dans le secteur manufacturier. M. Chrétien en parle tout le temps. Ce document montre que depuis l'Accord de libre-échange, les grandes compagnies, qu'elles soient de propriété américaine ou canadienne ont éliminé tout écart en productivité qui existait avant le libre-échange. Les compagnies de propriété canadienne ont accusé une baisse de productivité, et la productivité des petites compagnies de propriété américaine—je parle des petites compagnies de propriété canadienne et américaine—ne s'est pas améliorée, mais n'a pas baissé non plus.
On commence à faire une enquête de cela. Monsieur Martin m'a demandé de lui envoyer une copie quand je l'ai rencontré l'autre jour, mais je ne l'ai pas encore fait. Mais l'une des raisons était de savoir si on pouvait acheter des machines à commande numérique—si elles ont les moyens de le faire, si le financement est disponible pour les petites compagnies manufacturières de propriété canadienne. Ce serait peut-être plus facile à obtenir pour les compagnies de propriété américaine qui ont peut-être une compagnie mère américaine.
Voilà donc les questions qui comptent, et il est très significatif que les chiffres de productivité sont lamentables. C'est la raison pour laquelle de temps en temps, Paul Martin et Jean Chrétien disent que nos chiffres de productivité ne sont pas ce qu'ils devraient être. C'est à cause d'un manque de structure financière pour les entrepreneurs.
Ce qui se passe, c'est ce que Don Eastwood, qui gère le PICC pour Kitchener—Waterloo—Cambridge, appelle le facteur geek. Cela veut dire que le gars a toutes les connaissances voulues pour inventer un truc fantastique, mais qu'il ne connaît rien au marketing, au financement, à la gestion ou aux ressources humaines. Alors il y a une demande énorme de mentorat dans ces entreprises moyennes.
Le style de vie a peu d'importance. Si on ouvre une épicerie, ça va. Si on ouvre un salon de beauté, ça va. Ce sont des questions que les banques n'abordent pas, et que les gouvernements négligent.
Mme Karen Redman: Je le comprends, et j'aimerais poser une question à M. Cozza et à M. Bradford.
Selon les statistiques que j'ai entendues par l'entremise du Groupe de travail MacKay, 47 p. 100 des acquisitions des automobiles neuves sont des crédits-baux et non des achats. Alors il est clair que cela devient de plus en plus populaire, et c'est une activité commerciale importante.
Il y a deux côtés à l'équation si je veux louer une voiture. L'un, c'est le prix, et l'autre, c'est la capacité de financer et la compétitivité du taux. J'ai sous les yeux une annonce; je ne pense pas qu'elle a été produite par une de vos compagnies membres. On y dit que je peux avoir du financement à 2,9 p. 100. Est-ce qu'on craint que si le crédit-bail d'autos se fait dans les succursales des banques, elles pourront être plus efficaces et ainsi mettre les concessionnaires en danger?
M. Gino Cozza: Je ne crois pas que ce soit le cas du tout. Pour que les banques accordant du crédit-bail, elles doivent se lancer dans le commerce de l'achat et de la vente des voitures. Est-ce que les banques ont les compétences nécessaires pour le faire? Je pense que non.
Mme Karen Redman: Quand je loue à bail mon auto par l'entremise d'une banque, qui en sera propriétaire?
M. Adrian Bradford: Ce sera la banque.
Mme Karen Redman: Alors les banques, en se lançant dans le crédit-bail, vont devenir...
M. Gino Cozza: Elles vont devenir propriétaires, et par conséquent, des vendeurs—et des acheteurs—d'autos. Ils devront acheter l'auto afin de pouvoir la louer.
Mme Karen Redman: D'où obtiendraient-elles les voitures? C'est en fait la question que Paul a posée, mais c'est moi qui la pose.
M. Gino Cozza: D'un concessionnaire.
Mme Karen Redman: Alors essentiellement, les concessionnaires continueraient à vendre des autos, mais aux banques, qui à leur tour les loueraient à crédit-bail à des individus, au lieu de les vendre à des particuliers qui seraient financés par le biais du GMAC ou qui que ce soit, ou par le biais de la banque.
M. Gino Cozza: Je suis désolé, pourriez-vous répéter la question? J'ai compris la première partie...
Mme Karen Redman: Les banques, et non plus les particuliers, achèteront les autos, et ensuite les loueront à crédit-bail.
M. Gino Cozza: Exact.
M. Adrian Bradford: Elles achèteront un parc d'autos, par exemple, et essaieront de le faire à un taux spécial, pour pouvoir les louer à crédit-bail à un taux d'intérêt plus bas.
Mme Karen Redman: Est-ce l'une des options qui s'offrent maintenant aux concessionnaires, quand on envisage... je pense que quelqu'un a déjà parlé d'«articles sacrifiés».
M. Gino Cozza: Vous voulez dire les concessionnaires qui achètent des autos?
Mme Karen Redman: Oui.
M. Gino Cozza: Les concessionnaires obtiendraient les voitures du fabricant au prix coûtant puis à leur tour ils vendraient le crédit-bail.
Mme Karen Redman: Mais si j'ai une voiture que je n'arrive pas à vendre, je peux offrir un taux de crédit-bail très attrayant et ajuster le prix de l'auto afin de la vendre. C'est une des solutions offertes aux concessionnaires aujourd'hui, n'est-ce pas?
M. Gino Cozza: La marge de profit est très mince. Un bon nombre de personnes croit que l'écart entre le coût et le prix du détail des voitures est énorme, ce qui n'est pas le cas.
Le vice-président (M. Nick Discepola): M. Sharwood aimerait faire une observation supplémentaire.
M. Gordon Sharwood: Je tiens simplement à signaler qu'il faut faire une distinction entre un contrat de location-acquisition et un contrat de location-exploitation. Je ne sais pas si vous comprenez bien la distinction, mais dans le cas d'un contrat de location-exploitation, vous êtes propriétaire de la voiture, pas eux.
Cela fait une grande différence. Au Canada, nous avons opté en faveur d'un contrat de location-acquisition en raison de la déduction pour amortissement ainsi que d'autres questions fiscales, qui sont très bien expliquées dans ce document particulier du groupe de travail. De plus, j'ai soulevé ce point parce que, aux États-Unis, il est possible d'avoir des contrats de location énormes pour acheter des avions et toutes sortes de choses parce que là-bas on a droit à une déduction pour amortissement par l'entremise d'un bail à effet de levier et d'un contrat de location-exploitation. Ces contrats ne sont pas des contrats de location-acquisition résiduels, où vous êtes responsables de la partie résiduelle à la fin. Le système fiscal au Canada encourage le contrat de location-acquisition plutôt que le contrat de location-exploitation. Si jamais on décide de modifier les lois fiscales, on aura, à ce moment-là, des contrats de location-exploitation, et les mêmes règles s'appliqueraient dans tous les cas.
M. Gino Cozza: Je ne suis pas d'accord. On fait la plupart de nos contrats de location avec des consommateurs, et ils veulent surtout un contrat de location-acquisition pour ne pas se trouver avec un risque au bout du compte. Aujourd'hui, en raison de la concurrence, la plupart de ces voitures ne valent pas le montant résiduel.
Ce n'est pas du tout le cas aujourd'hui. Les contrats de location-acquisition existent dans le but de protéger les consommateurs qui, dans le passé, ont subi un préjudice découlant des contrats de location-exploitation. Lorsque ces contrats ont expiré, on a annoncé à ces gens-là que la valeur de la voiture était de l'ordre de 1 s500 $ et qu'ils devaient 1 800 $, alors ils devaient 3 000 $. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Le but du contrat de location-acquisition est de protéger le client.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Sharwood, est-ce que je peux enchaîner là-dessus?
D'accord. Allez-y, madame Redman.
Mme Karen Redman: Je n'ai qu'une question dernière.
Vous ne voulez pas donner la possibilité aux banques de se lancer dans le crédit-bail automobile parce que, d'après vous, il y aura une perte d'emplois, parmi d'autres choses. Est-ce cela est exact?
M. Adrian Bradford: Oui, les concessionnaires vont perdre des emplois.
Mme Karen Redman: Merci.
Le vice-président (M. Nick Discepola): J'aimerais revenir à l'observation de M. Sharwood.
J'ai dit auparavant que, grâce à leur coût d'emprunt inférieur, les banques vont avoir un avantage considérable. Par conséquent, elles devraient être en mesure d'offrir aux consommateurs des modalités fort intéressantes de crédit-bail automobile.
Vous avez fait allusion à la question très importante de la déduction pour amortissement. Les banques vont désormais pouvoir camoufler leurs profits de 5 ou 6 millions de dollars grâce à cette déduction pour amortissement qui s'appliquerait à tous les véhicules qui leur appartiennent. Les banques vont maintenant pouvoir se servir de cette déduction pour défrayer le coût total de l'automobile au cours de deux ou trois ans, c'est-à-dire la durée de vie de la voiture. En éliminant la contrainte qui existe à l'heure actuelle, soit d'interdire aux banques d'être propriétaires d'un prêt, elles feront des profits énormes.
Alors il faut s'attendre à des taux de crédit-bail fantastiques si jamais on donne aux banques la possibilité de se lancer dans ce secteur. Comment se fait-il que ce n'est pas le cas dans les autres pays? Comment se fait-il que les taux de location aux États-Unis, par exemple, sont comparables aux autres taux de location? Il serait logique de s'attendre à ce qu'elles nous donnent des taux fort intéressants au Canada n'est-ce pas?
M. Gordon Sharwood: En revanche, je vous demanderai pourquoi la société GE Capital est parmi les plus grands intermédiaires financiers au monde, de même que la Ford Motor Credit Company et la GMAC?
Le vice-président (M. Nick Discepola): Parce que ces entreprises offrent les mêmes taux que tout le monde.
M. Gordon Sharwood: Oui.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais je dis que si on permet aux banques de se lancer dans ce secteur, le corollaire serait...
M. Gordon Sharwood: Elles seraient tout comme la GMAC, la Ford Motor Credit Company ainsi que la société GE Capital.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Par conséquent, l'argument...
M. Gino Cozza: J'aimerais intervenir. Vous avez fait allusion à cette question dans votre exposé. Lorsque je me suis lancé en affaires il y a 20 ans, il y avait une concurrence féroce dans le secteur du financement de détail. Aujourd'hui, ce sont les banques qui dominent dans ce secteur. Personne, aucune captive, ne fait de la concurrence dans le secteur du financement du détail pour les voitures.
Je vous suggère que la même chose va se produire dans le secteur du crédit-bail à l'avenir. Les captives seront toujours des joueurs et ensuite vous aurez les banques. Les autres participants qui existent aujourd'hui—la GE, la ATT et les petits concessionnaires—ne pourront pas soutenir la concurrence.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.
M. Forseth voudrait poser une petite question. Je n'aime pas dire «petite» lorsqu'il s'agit d'une politique, parce qu'il n'y a pas de petite question pour ces gens-là.
M. Paul Forseth: Les banques, tout comme toutes autres sociétés, doivent divulguer leur bilan financier dans des rapports annuels et ainsi de suite. J'aimerais demander au représentant de la Banque de Montréal si jamais sa banque a pleinement divulgué les coûts et les profits précis des guichets automatiques en tant quÂarticles distincts, et si la réponse est affirmative, où? Est-ce que les chiffres sont publiés quelque part? Pourrez-vous me donner quelques chiffres en ce qui concerne le rendement de ces guichets automatiques parce que ce sont soit des articles distincts, ou un centre de profits de votre banque?
M. Ron Jamieson: Je suis convaincu que vous posez une très bonne question, mais je ne suis pas en mesure d'y répondre. Je peux certes vous obtenir la réponse.
M. Paul Forseth: C'est une question sérieuse...
M. Ron Jamieson: Absolument.
M. Paul Forseth: ...et j'aimerais savoir, quel est le rendement et le bilan financier des guichets automatiques de votre banque en tant que centre de coûts ou centre de profits, ventilés avec précision dans vos états annuels.
Le vice-président (M. Nick Discepola): M. Jamieson est prêt à nous fournir la réponse à cette question. Je vous invite à soumettre votre réponse, par écrit, au greffier et ensuite nous pourrions en remettre un exemplaire aux membres du comité.
Est-ce qu'il y a d'autres questions? Je n'ai qu'une seule—j'allais dire petite—question.
Monsieur Jamieson, vous avez exprimé votre surprise en ce qui concerne la recommandation no 29 du rapport publié par le Groupe de travail du caucus libéral. Ensuite, vous avez ajouté que vous avez seulement reçu le rapport ce matin. Vous avez peut-être lu très rapidement les recommandations, mais je vous encourage à lire deux paragraphes qui précèdent la recommandation no 29. Cela se lit comme suit:
Mme Karen Redman: Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le vice-président...
Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais il a dit qu'il n'est pas d'accord...
Mme Carolyn Bennett: Vous ne pouvez pas faire ça en tant que président.
[Français]
M. Odina Desrochers: Je sais que j'ai...
[Traduction]
M. Ron Jamieson: Je n'ai pas lu le nom de la Banque de Montréal dans ce rapport. C'est nous qui le faisons. D'accord? Je ne vois pas le nom de la Banque de Montréal. De plus, nous devrions tous garder le sens des proportions. Il ne s'agit que d'un rapport parmi d'autres qui sont à venir. C'est comme ça que je le vois.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Je suis d'accord avec vous là-dessus. Mais j'avais l'impression que vous étiez contre l'idée de trouver des sources de rechange.
M. Ron Jamieson: Pas du tout.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous avez dit ne pas être d'accord avec la recommandation no 29.
M. Ron Jamieson: Non. J'ai dit que je suis déçu de voir que nous le faisons déjà, et cela depuis deux ans, et que maintenant quelqu'un vient nous recommander de le faire maintenant. Ça fait déjà deux ans.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Très bien, c'est votre point de vue.
Deuxièmement, vous avez dit que ce n'était pas une bonne façon de faire des affaires que de négliger un marché de plus d'un million de gens faisant allusion aux transactions bancaires des Autochtones. Je suis tout à fait d'accord là-dessus. Votre président vient de dire qu'il va ouvrir une nouvelle banque pour les petites et moyennes entreprises. Dites-vous par là que le secteur bancaire n'a pas bien répondu aux besoins des petites et moyennes entreprises, qui sont au nombre de plus d'un million?
M. Ron Jamieson: Je dis sans hésitation que nous avons travaillé de mieux en mieux. Mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Notre président, M. Barrett, dit qu'il veut mettre sur pied un groupe spécialisé pour travailler de manière spécifique à ce marché très important, comme Gordon Sharwood l'a si bien dit.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais il ne s'agit pas d'une nouvelle banque. C'est impossible.
M. Ron Jamieson: Non, ce sera une filiale.
Le vice-président (M. Nick Discepola): Ce sera une division des activités courantes des deux banques générales.
M. Ron Jamieson: Oui.
Le vice-président (M. Nick Discepola): D'accord. Merci.
Je voudrais conclure maintenant et remercier les intervenants.
Simplement pour mémoire, je voudrais corriger l'impression qui pourrait encore subsister à savoir que le travail de ce comité a été placé au deuxième plan. Comme l'a bien dit M. Jamieson, cet ouvrage est l'un d'une série d'ouvrages qui doivent être publiés. M. MacKay et son groupe de travail ont passé plus de 18 mois à formuler les 124 excellentes recommandations que nous allons étudier, et que nous étudions déjà. Le groupe de travail libéral qui a mis 11 mois, en tant que groupe de membres d'un parti en particulier, a étudié l'influence du secteur des services financiers. Je suis porté à croire que le Parti réformiste en a fait autant. Le Nouveau Parti démocratique en a fait autant. Si d'autres partis ont décidé de ne pas le faire, libre à eux.
• 1255
Il y aura encore d'autres étapes à franchir. Le Bureau du
surintendant des institutions financières devra faire une
recommandation. Il devra y avoir une recommandation très importante
du Bureau de la concurrence, par exemple. Notre propre comité va
présenter un rapport provisoire au cours du mois de décembre, et
nous l'espérons, un rapport final au cours de la nouvelle année.
Il y a énormément d'occasions pour les Canadiens de faire valoir leur point de vue. Je crois, comme l'a dit M. Jamieson, que tous ces rapports ne feront qu'améliorer la capacité du premier ministre de prendre la meilleure décision dans l'intérêt de tous les Canadiens. Je crois que c'est bien là notre objectif—nous voulons nous assurer d'avoir un secteur des services financiers de classe mondiale qui soit le plus concurrentiel de tous à l'échelle globale. C'est l'objectif de notre rapport et nous allons faire connaître notre rapport sans qu'il soit biaisé par aucun autre rapport.
Merci encore une fois à tous les membres du comité. La séance reprendra à 15 h 30.