TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le lundi 16 novembre 1998
[Traduction]
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughn—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je souhaite à tous la bienvenue cet après-midi.
Comme vous le savez tous, le Comité des finances consulte actuellement les Canadiens d'un océan à l'autre, afin de savoir quelles doivent être les priorités dans le prochain budget fédéral.
Cet après-midi, c'est avec plaisir que nous accueillons des représentants des organisations suivantes: la Canadian Association of Speech-Language Pathologists and Audiologists; la Corporation des associations de détaillants d'automobiles; la Canadian Federation of Apartment Associations; la Federation of Canadian Software Developers; le Comité canadien d'action sur le statut de la femme; l'Association canadienne de soins et services à domicile; et le Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada.
Comme vous le savez, vous disposez chacun d'environ cinq à sept minutes pour faire votre exposé, et ensuite, nous passerons à la période de questions et réponses.
Nous allons commencer par le représentant de la Canadian Association of Speech-Language Pathologists and Audiologists, M. Keith Christopher, directeur exécutif. Bienvenue.
M. Keith Christopher (directeur exécutif, Association canadienne des orthophonistes et audiologistes): Merci beaucoup de nous avoir invités.
J'aimerais parler d'une question qui est chère au coeur de nos membres et de nos consommateurs. Le 1er janvier 1999, l'exemption de TPS-TSH dont bénéficiaient nos services ces dernières années disparaîtra. Cela signifie que nos clients devront verser 7 p. 100 ou 15 p. 100 de plus, selon qu'il s'agit de la TPS ou de la TSH.
Le ministère des Finances a décidé que, pour continuer à bénéficier de l'exemption, il fallait être accrédité dans cinq provinces. Aux termes de ce règlement, nous sommes accrédités dans quatre provinces, le Nouveau-Brunswick, le Québec, l'Ontario et la Saskatchewan.
Le problème se pose au Manitoba, la première province à nous avoir homologués, en 1961, avant le régime d'assurance-maladie, aux termes d'un projet de loi d'intérêt privé. Le ministère des Finances a décidé de ne pas tenir compte de l'accréditation au Manitoba bien qu'il s'agisse du modèle pour toutes les autres provinces, même si nous y travaillons depuis plus de 35 ans et n'avons eu aucun problème en ce qui concerne la réglementation, et même si le ministre de la Santé, Darren Praznik, considère que nous avons l'accréditation professionnelle au Manitoba.
Cette question préoccupe également le ministère des Finances. L'un de ses principaux avocats, Doug Wyatt, nous a dit qu'il n'y a aucune distinction entre un projet de loi d'intérêt privé et un projet de loi dont l'application relève du ministère de la Santé. Néanmoins, notre demande a quand même été rejetée.
Nous estimons, en toute justice, qu'en ce qui concerne le Manitoba, les droits acquis devraient être au moins maintenus. Si cela était acceptable pendant 35 ans, pourquoi tout à coup ne l'est-ce plus?
En rejetant le Manitoba, environ 10 p. 100 de la population canadienne sera touchée et c'est une estimation conservatrice, car avec le vieillissement de la population, les problèmes de communication s'aggraveront. Aux États-Unis, on estime que le pourcentage de ceux qui éprouvent des problèmes de communication se situe entre 10 p. 100 et 20 p. 100.
Les Canadiens seront touchés parce qu'avec la réduction des services de santé, de plus en plus de nos membres sont en pratique privée, ce qui signifie que ceux qui reçoivent les services doivent payer 7 p. 100 ou 15 p. 100 de taxes.
Nous pensons que cette situation découle d'un oubli. C'est malheureux. Nous n'avons pas pu faire changer d'avis le ministère des Finances, même si cela aura un effet marqué. Ceux qui ont besoin de ces services ne sont évidemment pas les plus riches, justement à cause de leurs problèmes. Ou encore leurs parents ont de nombreux coûts supplémentaires, y compris celui de payer des services privés pour leurs enfants.
L'effet se fait sentir sur deux plans. Nous avons réduit les services de santé et maintenant, nous avons créé une situation où ceux qui ont besoin de ces services devront également payer la taxe. Les recettes pour M. Martin sont relativement insignifiantes, mais pour ceux qui doivent verser la taxe, l'incidence est considérable.
Non seulement est-ce injuste, mais nous estimons que cela n'est pas du tout raisonnable. Les avocats du ministère des Finances en conviennent.
Je présente l'exposé principal, mais j'ai demandé à Sandra Short de prendre la parole. Mme Short est une consommatrice qui siège au conseil de notre Association canadienne des orthophonistes et audiologistes. Deux de ses quatre enfants éprouvent des problèmes de communication. Elle aimerait dire quelques mots.
Mme Sandra Short (représentante des consommateurs, Association of Speech-Language Pathologists and Audiologists): Merci, Keith.
Je suis certaine que vous avez déjà eu ici des consommateurs qui venaient vous demander de ne pas imposer une taxe. Je me joins à ce nombre. À vrai dire, l'orthophonie privée est un service que la plupart des parents concernés sont irrités de devoir payer. Nous nous attendons à ce que le service nous soit fourni dans le cadre du régime public de soins de santé et le cas échéant, dans les écoles. Lorsque nous ne pouvons obtenir ce service au nombre des soins de santé financés publiquement, nous sommes obligés de nous le procurer sur le marché privé.
Je l'ai fait moi-même, à titre personnel, pour mon fils de 4 ans, qui parlait en voyelles. Il ne pouvait pas prononcer de consonnes, et pourtant, la liste d'attente à l'hôpital pour enfant de l'est de l'Ontario était d'un an. C'est alors que j'ai décidé de payer pour le service. À l'époque, cela coûtait 80 $ de l'heure. C'est maintenant en général 85 $ de l'heure pour se procurer des services d'orthophonie.
À vrai dire, je serais très contrariée de devoir payer une taxe en sus d'un service qui devrait être, au départ, à mon avis, gratuit.
Comme représentante des consommateurs à la Canadian Association of Speech-Language Pathologists and Audiologists, j'ai étudié la loi manitobaine. Vraiment, je ne comprends pas pourquoi le ministère des Finances prétend que la profession n'est pas accréditée au Manitoba comme une profession de la santé. C'est pourtant le cas depuis longtemps. La profession ne relève pas directement du ministère de la Santé. Toutefois, la loi a été mise en place en 1961. Cela fait plus de 35 ans. Je pense que c'était même avant l'assurance-maladie au Canada. Donc, je pense que le ministère a tort de forcer tous les Canadiens, partout au pays, de payer une taxe sur quelque chose alors que c'est le ministère qui ne se rend pas compte de ce qui se passe au Manitoba. Notre position c'est qu'au Manitoba, la profession est réglementée comme faisant partie du secteur de la santé et qu'à tout le moins, cette disposition devrait donner des droits acquis.
Le ministère des Finances a déclaré que la situation au Manitoba est ambiguë. S'il y a ambiguïté, c'est au consommateur qu'il faut donner le bénéfice du doute. Il faut maintenir les droits acquis et on ne devrait pas payer de taxe sur l'achat de ce service, nul part ailleurs au pays.
J'aimerais également ajouter, en passant, que je constate qu'un des sénateurs a présenté un projet de loi visant à modifier la Loi sur la taxe d'accise afin d'exclure de la TPS toute publication. Je suppose que je suis en faveur de cette mesure. Toutefois, j'aimerais souligner que certains enfants n'apprennent pas à lire parce qu'ils n'obtiennent pas de service d'orthophonie pour les aider. Je pense donc que cette mesure est plus importante.
Merci.
Le président: Merci, madame Short.
Merci, monsieur Christopher.
Maintenant, nous allons passer à la Corporation des associations de détaillants d'automobiles et souhaiter la bienvenue à son président, M. Richard Gauthier, et au directeur des affaires publiques, M. Huw Williams.
M. Richard Gauthier (président, Corporation des associations de détaillants d'automobiles): Bonjour, monsieur le président.
[Français]
Bonjour et merci de nous recevoir ici aujourd'hui.
[Traduction]
Permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Rick Gauthier. Je suis le président de la Corporation des associations de détaillants d'automobiles. Je suis accompagné de Huw Williams, notre directeur des affaires publiques.
Je représente ici 3 500 détaillants d'automobiles neuves et 115 000 hommes et femmes qui travaillent chez les concessionnaires, d'un océan à l'autre.
Monsieur le président, nous aimerions aborder quatre points aujourd'hui. Mon personnel m'a préparé un mémoire de 13 pages. Mais avec votre permission, j'adopterai une approche raisonnable vu que vous êtes ici depuis très tôt ce matin et que vous connaissez deux des questions dont j'aimerais discuter aujourd'hui. Je vais donc essentiellement improviser sur ces questions pour en venir aux faits, si on peut dire.
D'abord, j'aimerais soulever la question de la déduction d'impôt sur les outils à l'intention des techniciens dont on vous a déjà parlé. La Corporation des associations de détaillants d'automobiles a vraiment apprécié votre appui l'an dernier lorsque vous avez recommandé un allégement fiscal dans ce domaine. Toutefois, le ministère des Finances n'a pas jugé bon de donner suite à vos recommandations. Nous aimerions certainement que vous continuiez à faire des pressions sur le ministère des Finances sur cette très importante question.
En fait, monsieur le président, c'est une question d'équité et de création d'emplois pour les jeunes. Les détaillants d'automobiles aujourd'hui n'arrivent pas à trouver de techniciens, à l'orée d'une ère de technologie toujours croissante et de plus en plus compliquée dans le domaine de la réparation des véhicules. La création d'emplois est un aspect très important qui est étroitement liée à cette question. Mais ce qui importe encore plus, comme je l'ai dit, c'est que c'est une question d'équité. Si les musiciens et les opérateurs de scies à chaîne peuvent déduire le coût de leurs outils, pourquoi pas nos techniciens, qui doivent investir entre 15 000 $ et 30 000 $ afin d'obtenir un emploi et de le garder?
Je ne vous ennuierai pas en vous donnant tous les détails. Vous pouvez lire tout ça dans notre mémoire du mois de novembre 1998 dont des exemplaires ont été distribués. Mais nous voulons certainement vous encourager à continuer à nous appuyer dans cette affaire.
J'aimerais maintenant passer à la déduction accordée aux petites entreprises dont nous vous avons parlé, l'an dernier, à peu près à la même époque. C'est vraiment une question d'inflation. La déduction accordée aux petites entreprises est bloquée à 200 000 $ depuis 1982. Des facteurs inflationnistes à eux seuls montrent clairement que nos détaillants, afin de rester en affaires, ont dû investir dans leurs installations, dans leurs outils. Les usines transmettent constamment les coûts de fonctionnement d'une concession à nos détaillants afin de réduire leurs propres coûts. Cette déduction accordée aux petites entreprises, comme je l'ai dit, est bloquée à 200 000 $ depuis 1982. Nous recommandons fortement et nous sommes persuadés qu'il faut relever cette déduction à 400 000 $.
La troisième question, monsieur le président, mesdames et messieurs, est celle qui traite d'une révision de la définition de capital imposable afin d'en exclure les billets de garantie. Bien que j'aimerais improviser sur cette question, c'est un peu plus compliqué que ce que nous avons soulevé ici devant ce comité par le passé. J'aimerais donc me référer à mes notes à ce sujet maintenant.
En 1989, on a ajouté dans la Loi de l'impôt sur le revenu la notion de capital imposable dans la détermination de l'impôt à payer aux termes de la partie 1.3 de la déclaration d'impôt des sociétés. Ce nouvel impôt sur le capital ne visait pas la petite entreprise. Afin d'exclure la petite entreprise du fardeau de ce nouvel impôt, on a mis en place un seuil de 10 millions de dollars de façon à ce que seules les sociétés dont le capital dépassait 10 millions de dollars y soient assujetties.
En septembre 1994, le gouvernement a annoncé d'autres modifications à la loi qui augmentaient la diligence nécessaire de la part des grandes sociétés qui interjetaient appel des avis de cotisation de Revenu Canada. Ces modifications proposées augmentaient encore, à juste titre, la diligence dont devait faire preuve les sociétés qui avaient les moyens de se conformer à cette disposition. Les critères utilisés pour déterminer si une société est une grande société demeuraient les mêmes que ceux utilisés dans la définition originelle du capital imposable dans la partie 1.3 de la loi.
Dans chacune des situations que j'ai mentionnées, la définition de la petite entreprise s'appliquait aux entreprises dont le capital imposable était inférieur à 10 millions de dollars. Nous acceptons tout à fait le raisonnement derrière la modification apportée à la Loi de l'impôt sur le revenu et nous admettons que le capital en cause constitue un paramètre raisonnable pour déterminer la taille d'une entreprise. Toutefois, nous nous inquiétons du fait que la définition actuelle du capital imposable crée une anomalie particulière pour notre industrie qui défavorise les détaillants d'automobiles.
Le paragraphe 181.2(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit, et je cite: «ces dettes... sous forme d'obligations, d'effets, d'hypothèque d'acceptations bancaires ou de titres semblables» font partie du capital d'une société. Contrairement à tous les autres secteurs du détail, les détaillants d'automobile financent l'acquisition de leur inventaire par des titres appelés billets de garantie. Dans d'autres industries, l'inventaire est financé par des comptes fournisseurs. Les obligations dont témoignent les billets de garantie sont incluses dans la définition de capital imposable. Les obligations que représentent les comptes fournisseurs ne le sont pas. Par conséquent, la définition actuelle de capital imposable force les détaillants d'automobiles à inclure le financement de l'inventaire dans le capital imposable. Ce n'est pas le cas dans d'autres industries.
Le problème se trouve exacerbé par la nature de l'industrie. Les automobiles sont des articles à prix élevé dont le roulement se fait sur une période relativement longue. Ainsi, l'inventaire d'automobiles a un effet beaucoup plus grand sur le capital que pour les autres détaillants. Une comparaison de deux détaillants de taille identique, dont l'un est un détaillant d'automobiles, donne deux montants très différents de capital imposable aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu, à cause de la méthode de financement de l'inventaire.
Afin d'éliminer cette anomalie, nous recommandons de modifier la définition de capital imposable afin d'inclure les billets de garantie payables. Cette anomalie a été reconnue par trois des cinq provinces qui prélèvent un impôt provincial sur le capital sur les détaillants d'automobiles.
• 1550
Au Manitoba, les billets de garantie payables sont exclus du
capital dans le cas des détaillants d'équipement agricole, de
camions et d'automobiles, si le billet de garantie représente, à
des fins de financement, un contrat de vente en gros garanti par
des frais spéciaux sur l'inventaire de véhicules à moteurs nouveaux
ou usagés ou d'équipement agricole.
En Colombie-Britannique, les billets de garantie payables sont exclus du capital des détaillants d'équipement agricole, de camions et d'automobiles si la dette en souffrance l'est pour moins de 120 jours, à compter de la fin de l'année financière.
Enfin, au Québec, les billets de garantie payables sont exclus du capital des détaillants d'équipement agricole, de camions et d'automobiles, si la dette en souffrance l'est moins de 180 jours après la fin de l'année financière.
Pour ces raisons, monsieur le président, mesdames et messieurs, nous pensons qu'il faut créer une nouvelle définition dans ce domaine puisque les détaillants d'automobiles qui se trouvent dans une situation très particulière dans ce cas-ci, sont singularisés.
J'aimerais conclure mon exposé en demandant une réduction des cotisations à la caisse d'assurance-emploi et une réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers. C'est conforme au cours d'économie de première année, monsieur le président. Les contribuables, partout au pays, réaliseraient ainsi des économies. Cet argent retournerait dans l'économie, ce qui la stimulerait. C'est la première fois depuis plus de 20 ans que notre gouvernement est en mesure de mettre en oeuvre cette théorie économique fondamentale et nous lui recommandons fortement de le faire.
Voilà donc notre exposé. Ce sont les quatre points qui se trouvent dans notre mémoire officiel: un, la déduction des outils, qui n'est que question d'équité; deux, la déduction consentie aux petites entreprises, car nous en sommes toujours aux années 80 et comme le veut le vieil adage, il faut moderniser cet impôt afin de tenir compte des réalités économiques d'aujourd'hui; trois, une définition équitable du capital imposable; et enfin, mais non le moindre, l'assurance-emploi qui est directement lié à la croissance économique nécessaire et soutenue qu'il faut au Canada.
Je vous remercie beaucoup.
Le président: Merci beaucoup de cet exposé, monsieur Gauthier, monsieur Williams.
Maintenant nous allons passer à la Canadian Federation of Apartment Associations, représentée par M. Tex Enemark, le président du Comité sur la fiscalité. Bienvenue.
M. Tex Enemark (président, Comité sur la fiscalité, Canadian Federation of Apartment Associates): Merci, monsieur le président. J'ai bien peur de ne pouvoir tenir personne d'autre responsable de mon mémoire de 14 pages. J'ai donc préparé autre chose qui n'a que deux pages et j'espère que cela suscitera quelques questions à la fin.
La semaine dernière, la Fédération a publié une étude sur l'incidence de l'impôt sur le revenu fédéral et de la TPS sur l'industrie canadienne du logement locatif. En présentant les résultats de cette étude au comité des finances aujourd'hui, je vous demande d'examiner attentivement l'incidence de l'impôt sur le revenu fédéral sur le sort des locataires de cette province puisque ce sont eux, en dernière analyse, qui paient ces impôts.
La Canadian Federation of Apartment Associations est une organisation à charte fédérale et à but non lucratif créée il y a trois ans. Nous avons 17 membres de par le pays qui représentent environ 600 000 unités résidentielles. Je représente ici le conseil du logement locatif de la Colombie-Britannique. Le consultant qui a préparé notre étude, Frank Clayton, un spécialiste bien connu sur le logement canadien, est ici pour répondre aux questions techniques que vous souhaiteriez soulever. Il y a aussi Robert Orr, le président d'une société de promotion immobilière qui pourra répondre à toutes vos questions sur l'aspect commercial de la question. Milton Bogoch, mon homologue de l'Alberta, est également ici.
Essentiellement, voici ce que nous voulons vous dire: Pour une raison ou pour une autre, malgré la pénurie croissante de logements locatifs dans bien des endroits au Canada, le sort des locataires canadiens n'est pas une question à l'ordre du jour politique national et le temps est venu de changer cela. C'est dans le contexte de ce problème de plus en plus évident que nous avons commandé cette étude dans laquelle on examine l'incidence économique des modifications apportées après 1971 aux lois fiscales fédérales dans les domaines de la construction, de l'exploitation et de la propriété du logement locatif au Canada.
Je vous renvoie au tableau 3-1 du rapport que nous vous avons distribué. Il s'agit de la diminution des investissements dans le logement locatif au Canada au point où nous ne construisons plus que 10 p. 100 du logement locatif que nous construisions il y a 25 ans. Si l'on inclut les démolitions, il y aura probablement moins de logements locatifs disponibles au Canada, certainement dans les principaux marchés.
• 1555
Si nous suivons cette diminution à compter de l'époque où les
unités locatives représentaient plus de 50 p. 100 des nouvelles
unités et aujourd'hui où les unités locatives représentent à peine
5 p. 100 des nouvelles constructions, l'étude explique en détail
notre échec à construire suffisamment d'unités locatives au cours
des deux dernières décennies pour bien loger tous ceux qui ont
besoin ou qui veulent louer un logement. Les projections
démographiques montrent que le Canada ne peut pas répondre au
besoin de la migration interne vers Toronto et l'Alberta, tout
particulièrement ces temps-ci, ni à l'arrivée de 250 000 nouveaux
immigrants chaque année, sans d'autres politiques de logement.
C'est-à-dire qu'il nous faut plus de 40 000 nouvelles unités
locatives à chaque année jusqu'en l'an 2020, mais nous produisons
environ 5 000 unités, et en termes nets, nous n'en produisons
probablement pas du tout.
L'étude révèle que dans plusieurs centres, le taux de vacance est très faible. Dans des circonstances normales, on s'attendrait à ce que le marché réagisse en construisant plus d'unités locatives. Or, ce n'est pas le cas parce que nos lois fiscales jouent contre l'investissement dans le logement locatif et sa propriété.
Dans le rapport, on souligne quelques exemples de discrimination à ce sujet et je vais vous en présenter quelques- uns.
Celui qui investit dans un motel, un hôtel ou une exploitation agricole familiale ne paie pas d'impôt sur les gains en capital lors de la vente de ses actifs, si le produit de la vente est réinvesti dans une installation semblable, dans l'année. Les propriétaires d'appartements ne jouissent pas des mêmes privilèges de roulement. Par ricochet, l'entretien des immeubles se trouve considérablement découragé et de fait en dernière analyse, il y a un incitatif fiscal qui encourage à démolir les immeubles prématurément.
L'exploitant d'un hôtel, d'un motel ou d'une ferme familiale est considéré comme une petite entreprise aux fins de l'impôt. Le propriétaire d'une propriété locative, à moins qu'il ne soit incorporé, n'est pas considéré de la même façon et quelle que soit sa participation quotidienne au fonctionnement de l'entreprise, l'investissement dans un immeuble locatif est considéré un investissement passif à moins qu'il n'y ait six employés ou plus ce qui exclut le plus grand nombre des petits investisseurs au Canada.
Le propriétaire domiciliaire qui se construit une maison—et les propriétaires sont en général mieux nantis que les locataires—obtient une ristourne de 2,5 points sur la TPS. Le logement locatif à but non lucratif se voit remboursé la moitié de la TPS, mais le marché locatif ne jouit d'aucune remise semblable. Dans les provinces où il y a la TSH, cela ajoute 15 000 $ au coût de construction d'une unité de 100 000 $.
Le propriétaire domiciliaire ne paie aucun impôt sur les gains en capital sur sa résidence principale lorsqu'il la vend, et pourtant un locataire qui disons est moins bien nanti que le propriétaire domiciliaire moyen, paiera ce même impôt sur les gains en capital par l'entremise du loyer qu'il verse à son propriétaire. En Colombie-Britannique, à Vancouver, cela représente probablement environ 100 $ par mois de loyer, qui servira en bout de ligne à payer l'impôt. Pourtant, comme je l'ai dit, la plupart des locataires sont moins bien nantis que les propriétaires domiciliaires.
Le rapport attribue deux résultats à cette discrimination fiscale. On construit peu de logements locatifs, ce qui entraîne une pénurie de ce genre de logements et une diminution des normes de logement, et le stock important de logements locatifs antérieur à la loi de 1971 vieillit, vieillit rapidement, surtout dans les régions où il y a contrôle des loyers et où il faudrait des investissements considérables dans la rénovation et l'amélioration.
Une crise du logement locatif se pointe à l'horizon dans de nombreuses localités au Canada et à certains endroits, nous y sommes déjà. Ce sont les locataires qui souffrent de ces politiques. Le problème du logement locatif a attiré l'attention des médias de temps à autre, mais incroyablement, c'est la première fois, en 26 ans qu'on examine le rôle de la politique fiscale dans la création de ces problèmes et de cette pénurie.
La fédération ne demande pas de revenir au régime fiscal peut- être trop généreux d'avant 1972 qui prévoyait une déduction pour amortissement de 10 p. 100 dans le cas des bâtiments à pans de bois et la réduction d'autres revenus par la déduction d'autres pertes pour amortissement. Toutefois, nous soulignons que le climat fiscal actuel augmente les coûts et réduit les normes de logement des locataires et que cela coûte des emplois et des recettes fiscales au Canada parce qu'il n'y a pas de nouvelles constructions locatives et parce que les propriétaires domiciliaires louent leurs sous-sols tout en ne déclarant probablement pas tous les revenus, ce qui créé une grande économie souterraine pour ces propriétaires domiciliaires qui sont également exemptés de l'impôt sur les gains en capital. Ainsi, les gouvernements perdent et la TPS et la TSH ainsi que des recettes fiscales entraînant sans doute des recettes fiscales inférieures à ce que produirait une politique équilibrée. Clayton et nous-mêmes croyons que nos propositions entraîneraient une augmentation nette des recettes gouvernementales et au pire, n'auraient aucune incidence.
• 1600
L'industrie locative, je le répète, ne demande pas de
modifications compliquées ou de traitement spécial, simplement
l'équité. Nous demandons à être traités de la même façon que les
autres secteurs. Les exploitants de motels, d'hôtels et
d'exploitations agricoles familiales profitent du roulement lors de
la vente et du rachat et sont considérés, lorsque approprié, comme
de petites entreprises. Il faut traiter le logement locatif de la
même façon. Chacun doit être traité, également, comme une
entreprise active, et la nouvelle construction domiciliaire
locative doit être considérée au même titre que la propriété
domiciliaire ou la propriété à but non lucratif sur le plan de la
TPS et de la TSH.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, M. Enemark.
Nous entendrons maintenant les représentants de la Federation of Canadian Software Developers. M. Sheldon Wiseman est président- directeur général de Amberwood Productions Inc. M. Larry Whitehead est président-directeur général de Columbia Diversified Software. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Sheldon S. Wiseman (président, Fédération des développeurs de logiciels du Canada): Merci, monsieur Le président. Je vais demander à M. Whitehead de commencer. M. Nifco, M. Whitehead et moi-même avons tous des remarques à vous faire.
M. Larry Whitehead (vice-président, Fédération des développeurs de logiciels du Canada): Bon après-midi, monsieur le président, mesdames et messieurs.
Je suis le vice-président de la Federation of Canadian Software Developers. Cette fédération s'est constituée au début de 1998 afin de répondre aux préoccupations et aux besoins particuliers de l'industrie canadienne de la conception de logiciels. La fédération a une envergure nationale. C'est la seule association au Canada aujourd'hui qui représente particulièrement les concepteurs de logiciels canadiens.
À l'heure actuelle l'association compte plus de 50 membres et des discussions sont en cours pour que 250 autres entreprises de logiciels situées de Victoria à Halifax se joignent à nous. Un conseil d'administration dirige la fédération. Nous communiquons avec nos membres par Internet, par courrier, et grâce à des réunions mensuelles.
L'industrie canadienne de la conception de logiciels est confrontée à trois principaux problèmes aujourd'hui.
D'abord, les plus grandes entreprises bien établies—par exemple Electronic Arts à Vancouver—ont leur propre perception des problèmes. Si vous parlez à M. Glen Wong, le président de Electronic Arts, il vous dira que ses problèmes, ce sont les impôts, les impôts, et les impôts.
Deuxièmement, si vous vous penchez sur les préoccupations des concepteurs de logiciels petits et nouveaux, vous constaterez que leur plus grand problème, c'est le manque d'investissement aux premières étapes, capital dont ils ont désespérément besoin pour que l'entreprise prenne son envol et afin de commercialiser leurs produits à l'échelle mondiale. La fin du programme d'abris fiscal pour les logiciels de la catégorie 12, en décembre 1997, a encore exacerbé ces problèmes de financement de première heure.
Troisièmement, toutes les entreprises, petites ou grandes, ont vécu les problèmes de l'exode des cerveaux, les ingénieurs et les dirigeants canadiens déménagent aux États-Unis où la rémunération est plus élevée et où les impôts sont beaucoup moindres.
Dans le peu de temps qui nous est imparti aujourd'hui, nous ne pouvons espérer aborder tous les problèmes qui se posent actuellement aux concepteurs de logiciels canadiens. Nous pouvons cependant vous entretenir du deuxième problème en ordre d'importance, soit l'incapacité des concepteurs à trouver du capital pour créer de nouvelles entreprises.
Depuis l'élimination du programme de la catégorie 12, le gouvernement n'appuie d'aucune façon la création de nouvelles entreprises de conception de logiciels au Canada. Le programme de RS et DE vise essentiellement à stimuler la R-D dans le domaine des logiciels. Le problème qui se pose cependant lorsqu'un concepteur crée un logiciel intéressant, c'est de trouver un moyen de le lancer sur le marché. À cette étape du processus, le niveau des ventes est habituellement très faible. Comme l'entreprise existe depuis peu, elle ne peut pas compter trouver du capital chez les banques, les investisseurs de capital-risque classiques, les marchés boursiers ou les fonds à capital de risque de travailleurs.
Si des entreprises de conception de logiciels avaient facilement accès à du capital de démarrage, je vous signale qu'elles seraient ainsi mieux placées pour retenir leurs employés qui sont attirés par les salaires élevés que peuvent leur offrir leurs concurrents américains.
La presse fait grand cas du fait que l'industrie de la technologie de l'information constituera dans l'avenir le moteur de notre économie. Or, cette industrie ne pourra pas jouer ce rôle en l'absence de programmes de soutien de financement.
J'aimerais maintenant vous présenter M. Nathan Nifco, président de la Federation of Canadian Software Developers. M. Nifco est un ingénieur en logiciels qui détient une maîtrise en sciences informatiques ainsi qu'en administration des affaires. Il exploite actuellement sa propre entreprise de conception de logiciels.
M. Nathan Nifco (président, Fédération des développeurs de logiciels du Canada): Je vous remercie, Larry.
Monsieur le président et mesdames et messieurs, en tant que concepteur de logiciels canadiens, je connais personnellement les questions dont on vient de vous parler.
Je représente une société, la Nifco Synergy, créée en 1991. Son mandat est de concevoir et de commercialiser le logiciel. Nous vendons aujourd'hui nos produits et nos services dans trois pays, dont les États-Unis. Nos clients sont au nombre des 500 entreprises que la revue Fortune considère comme étant les plus importantes au monde dans le domaine du commerce international. Nous avons obtenu des capitaux pour nous agrandir par l'intermédiaire du programme de la catégorie 12, ce qui nous a permis de créer des emplois au Canada tout en demeurant propriétaires de l'entreprise. Sans le capital-risque, nous n'aurions pas pu nous développer comme nous l'avons fait.
• 1605
Il importe de situer l'industrie de la conception à
l'intérieur du secteur de la technologie de l'information. Tant la
conception de logiciels que la technologie de l'information
constituent des composantes de la nouvelle économie. Nous sommes
convaincus de l'importance que revêt pour le Canada une industrie
de conception des logiciels solide et dynamique. Or, cette
industrie doit aujourd'hui relever un certain nombre de défis:
mettre fin à l'exode des cerveaux; trouver des moyens de conserver
ses employés attirés par des entreprises étrangères concurrentes;
palier à la pénurie de travailleurs qualifiés; et renverser la
tendance à dépendre de plus en plus de fournisseurs étrangers pour
les applications de logiciels.
Par ailleurs, des occasions inégalées s'offrent à notre industrie, occasions qui découlent du fait qu'il y a de plus en plus de concepteurs canadiens talentueux pouvant créer des produits et des services de calibre mondial, du fait que l'Internet est en train de révolutionner jusqu'à l'industrie des logiciels elle-même, et que l'Internet constitue un important marché pour les logiciels commerciaux. En effet, on constate la conception de plus en plus de logiciels pour répondre au nouveau marché que constitue l'Internet.
Le taux de chômage actuel parmi les jeunes au Canada est de 50 p. 100. L'industrie des logiciels constitue une industrie idéale où créer des emplois pour les jeunes. Il importe de créer un environnement propice au Canada à l'édification d'une industrie de conception des logiciels solide et de calibre mondial. Si l'on favorise le développement de l'industrie de conception des logiciels commerciaux au Canada, non seulement notre économie en profitera, mais il sera possible d'exporter les connaissances et les compétences canadiennes sans que cela mène à un exode des cerveaux.
Les entreprises de conception de logiciels ont besoin de capital-risque. Sans le capital-risque, elles ne peuvent pas prospérer. Le Canada est actuellement à la croisée des chemins: il deviendra soit un leader mondial dans l'industrie de conception de logiciels, soit un pays du tiers monde. La mise en oeuvre de programmes novateurs comme celui que nous vous proposons créerait les conditions voulues pour que l'industrie canadienne de conception de logiciels devienne une industrie dynamique de calibre mondial.
M. Sheldon Wiseman: Monsieur le président, j'aimerais brièvement résumer ce que vous ont dit mes deux collègues.
Sans le capital-risque, l'industrie canadienne de conception des logiciels ne survivra pas. En fait, l'absence ce capital-risque compromet déjà la survie de notre industrie.
Le fait pour notre industrie de pouvoir avoir accès à du capital-risque entraînera quatre conséquences. Premièrement, cela permettra aux entreprises qui se spécialisent dans la conception de logiciels de base de prendre de l'ampleur. Deuxièmement, comme on l'a déjà fait remarquer, les entreprises de conception de logiciels pourront offrir à leurs employés des salaires comparables à ceux qu'on leur offre aux États-Unis, ce qui renversera l'exode des cerveaux dans notre secteur. Troisièmement, l'accès au capital- risque permettra de créer des emplois. Quatrièmement, les logiciels canadiens pourront être mis en marché à l'échelle internationale. Les troisième et quatrième conséquences vont de paire.
La question qui se pose est de savoir comment faire en sorte que l'industrie de conception des logiciels ait accès au capital- risque. Nous proposons au gouvernement de reconnaître par voie législative l'existence de sociétés de placement des logiciels et qu'il leur accorde le statut de personne morale, financées par le secteur privé, à but lucratif et sous la gestion et le contrôle canadiens.
Les investissements des SPL se limiteraient aux sociétés admissibles qui oeuvrent uniquement dans la conception et l'exploitation de logiciels canadiens. En outre, seules les nouvelles sociétés seraient admissibles à du capital-risque provenant de ces fonds.
Afin de créer les conditions voulues pour que les sociétés de placement de logiciels attirent le capital-risque voulu, nous recommandons d'exonérer d'impôt toute croissance de l'actif d'une société admissible dans laquelle des investissements auraient été consentis pendant au moins cinq ans. Nous pensons également qu'il convient de ne pas imposer les gains en capitaux qui pourraient être réalisés par les investisseurs. Les investissements consentis dans ces sociétés devraient aussi pouvoir constituer des REER. Enfin, nous recommandons d'accorder aux sociétés de placement de logiciels des crédits d'impôt semblables à ceux dont jouissent les sociétés appartenant à l'industrie des films et de la télévision.
Nous proposons un crédit d'impôt de 25 p. 100 réparti sur une période de deux ans. En fait, ce que nous réclamons est un régime semblable à celui qui existe dans le domaine de la cinématographie et de la télévision et qui permettrait à l'industrie canadienne de conception de logiciels de se tailler une place enviable sur les marchés mondiaux.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie beaucoup, messieurs Wiseman, Whitehead et Nifco.
J'accorde maintenant la parole à Mme Joan Grant-Cummings du Comité canadien d'action sur le statut de la femme. Bienvenue, madame.
Mme Joan Grant-Cummings (présidente, Comité canadien d'action sur le statut de la femme): Je vous remercie, monsieur le président. Bon après-midi à tous, et à toutes.
Le Comité canadien d'action sur le statut de la femme est, comme vous le savez, le plus important organisme qui défend les intérêts des femmes au Canada. Notre création remonte à il y a 26 ans. Nous comptons des membres répartis dans tout le pays. En fait, 700 groupes de femmes sont affiliés à notre organisme.
Dans son dernier budget et, de fait, dans les quatre derniers budgets, le gouvernement fédéral a réduit les fonds accordés aux programmes des femmes. Les groupes de femmes n'ont jamais été pleinement financés par le gouvernement; nous avons toujours dû mener des levées de fonds pour être en mesure d'avoir les fonds de base nécessaires pour mener nos principales activités. À l'heure actuelle, la participation des femmes à la vie politique, économique et sociale de notre pays est compromise en raison de ces réductions budgétaires. Elles ont également entraîné la disparition de certains groupes de femmes, dont des refuges pour femmes, des centres de counselling et des centres d'éducation et de formation. Dans certaines parties du pays, il n'existe de fait aucun service de soutien pour les femmes.
Nous avons constaté un lien entre l'augmentation de la pauvreté et l'augmentation de la violence faite aux femmes. La Commission des Nations Unies pour le statut de la femme a d'ailleurs confirmé le fait que le Canada avait régressé dans le domaine de l'égalité des femmes.
J'aimerais d'abord vous donner un aperçu de la situation de certaines femmes au Canada. Bien que certaines femmes aient commencé à prendre la place qui leur est due dans la société, ce n'est pas le cas de toutes les femmes. D'après Statistique Canada, la plupart des femmes occupent maintenant des emplois atypiques, c'est-à-dire des emplois à temps partiel, des emplois temporaires ou des emplois qu'on dit autonomes. Certaines femmes occupent plusieurs emplois à la fois simplement pour survivre.
La plupart des mères chefs de famille monoparentale, que beaucoup de gens dans notre société ne tiennent pas en très haute estime, travaillent: 46 p. 100 d'entre elles travaillent à temps plein et 15 p. 100, à temps partiel. En moyenne, les femmes qui travaillent à temps plein et qui appartiennent à un certain groupe de femmes gagnent 73c. quand les hommes gagnent 1 $. Pour leur part, les femmes autochtones, les étudiantes, les femmes de couleur et les immigrantes gagnent dans certains cas 50c. quand un homme gagne 1 $. Ces chiffres proviennent de Statistiques Canada.
Les femmes représentent jusqu'à 70 p. 100 de tous les travailleurs à temps partiel. Elles continuent de faire l'objet de discrimination fondée sur le sexe, la race et l'âge sur le marché du travail. Une étude récente révèle que 90 p. 100 des femmes disent avoir fait l'objet au moins une fois de harcèlement sexuel lorsqu'elles occupaient un emploi rémunéré. Les femmes représentent 55 p. 100 des étudiants à temps plein qui ont contracté un prêt étudiant et on s'attend à ce que 43 p. 100 d'entre elles ne puissent pas rembourser ce prêt.
Il y a 2,9 millions de femmes canadiennes qui vivent dans la pauvreté, ce qui représente 56 p. 100 des pauvres. Le pourcentage de femmes qui vivent dans la pauvreté est encore plus élevé chez les femmes autochtones, les femmes âgées célibataires, les jeunes femmes célibataires et les immigrantes récemment arrivées au pays. Le gouvernement du Canada ne dépense actuellement que 53c. par habitant dans le cadre du Programme de promotion de la femme. Nous pensons que ce chiffre est assez éloquent en lui-même.
Nous espérons que le principe de l'équité économique sera reflété dans le prochain budget. Le Canada a opté pour une économie mondiale fondée sur le libre marché, mais il doit aussi prendre des mesures pour répondre aux besoins sociaux de sa population. Nous ne pouvons pas prétendre être un pays progressiste compétitif à l'échelle internationale quand le salaire moyen des femmes est de 30 000 $ contre 41 000 $ pour les hommes. Il y a de toute évidence quelque chose qui ne va pas. Le Canada se situe actuellement au deuxième rang, parmi les pays les plus riches du monde, pour ce qui est du nombre de femmes qui occupent des emplois mal rémunérés. Voilà une statistique dont nous n'avons pas à être fiers.
Nous tenons également à souligner de nouveau le fait que le gouvernement conteste actuellement la décision rendue par le Tribunal des droits de la personne sur la question de l'équité salariale. Compte tenu du fait que le Canada se classe deuxième pour ce qui est du nombre de femmes qui occupent des emplois mal rémunérés, le gouvernement devrait vraiment s'empresser de payer sa dette envers les femmes.
• 1615
Nous voulons également réitérer ce que nous avons dit en 1996
lorsque 100 000 Canadiennes ont participé à une marche pour lutter
contre la pauvreté, à savoir qu'il faut augmenter le salaire
minimum. On veut que les femmes se servent de leur pouvoir d'achat
pour acheter des produits, mais avec quoi doivent-elles le faire?
Si nous voulons que les femmes puissent stimuler l'économie
mondiale, nous devons leur donner les moyens de se procurer tous
ces merveilleux produits qui leur sont offerts. Nous proposons de
porter le salaire minimum à 7,85 $, ce qui ne constituerait pas
vraiment une augmentation du salaire minimum, mais simplement du
rattrapage pour les femmes qui retrouveraient le pouvoir d'achat
dont elles jouissaient en 1975.
Nous voulons réaffirmer ce que nous avons dit l'an dernier au sujet du crédit d'impôt pour enfants. S'il s'agit d'un premier pas en vue de lutter contre la pauvreté chez les enfants, ce crédit devrait accordé non seulement à ce qu'on appelle les pauvres qui travaillent, mais aussi aux assistés sociaux. Bon nombre de femmes et de familles doivent compter sur l'aide sociale parce qu'elles ne peuvent pas trouver d'emplois qui leur permettront de payer le loyer—et on a mentionné le fait qu'il y avait pénurie de logements à louer—et les produits alimentaires de base. La nourriture et le logement constituent des préoccupations fondamentales pour les femmes et les familles qui dépendent de l'aide sociale. Personne ne rêve d'être une mère assistée sociale.
Nous avons participé en 1998 à l'élaboration d'un budget fédéral de rechange. Nous avons à ce moment-là fait ressortir un certain nombre d'éléments qui, à notre avis, sont à la base d'une économie sociale qui irait de pair avec ce nouveau capitalisme mondial. Pour que tous les membres de la société canadienne puissent participer à part entière au processus politique, à l'élaboration des politiques gouvernementales et en particulier à l'élaboration de la politique économique qui nous touche tous, le gouvernement doit investir davantage pour favoriser leur participation dans la société civile. Nous réaffirmons le fait que le gouvernement doit investir au moins 30 millions de dollars dans le fond de développement démocratique des femmes connu sous le nom de fond du Programme de promotion de la femme. Cet investissement ne représentera qu'un investissement de 2 $ par Canadienne.
Nous répétons également qu'il convient, comme le réclament depuis des années les groupes de femmes, d'investir 50 millions de dollars notamment dans le domaine du logement et des services de counselling pour inverser la tendance vers la détérioration de la situation des femmes. À l'aube du nouveau millénaire, le gouvernement doit s'engager à réserver cette somme pour répondre aux besoins des femmes afin de lutter contre la violence qui leur est faite.
Il n'existe toujours pas au Canada de programme national de service de garde. Comme vous le savez, le problème des sans-abri est grave au Canada qui est pourtant un pays riche, mais il y a des gens qui dorment devant nos très belles banques. L'injection de la maigre somme de 300 millions de dollars permettrait au moins de construire 10 000 nouveaux logements à but non lucratif et de logements coopératifs. Nous avions également réclamer cet investissement en 1996 étant donné que 40 p. 100 de toutes les familles monoparentales dirigées par des femmes n'arrivent pas à se loger. Ce serait une mesure progressiste en vue de favoriser l'égalité des femmes et leur participation à la société.
Les étudiantes abandonnent leurs études à un rythme plus élevé que les étudiants. En outre, les jeunes femmes n'ont pas accès aux mêmes genres d'emplois que les jeunes hommes. Selon l'endroit du pays visé, c'est en fait parmi les jeunes femmes célibataires que le taux de pauvreté est le plus élevé. De concert avec la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants, nous recommandons que 400 millions de dollars soient distribués en bourses aux étudiants les plus nécessiteux.
J'aimerais terminer en abordant certains des principes dont nous traitons dans la partie de notre mémoire qui s'intitule «Bâtir une économie sociale».
Si l'on veut que tous les Canadiens et les Canadiennes participent pleinement à la société canadienne et que le Canada se donne une société fondée sur l'égalité qu'il peut présenter en exemple au reste du monde, le gouvernement doit assurer une participation et une rémunération égales chez les hommes et les femmes. Il doit aussi assurer la participation démocratique des travailleurs et de tous les membres de la société, notamment ceux qui en sont exclus. Il doit faire en sorte que les services et les programmes qui répondent aux besoins de la population et qui sont reconnus dans la Déclaration des droits de l'homme des Nations Unies demeurent dans le domaine public et ne soient ni privatisés ni supprimés. Nous songeons notamment au programme d'assurance- maladie.
Nous insistons sur le fait que les biens et les services qui répondent aux besoins de la collectivité qui les produit constituent aussi un principe sur lequel repose une économie sociale. Si ces biens et ces services sont hors de notre portée, on ne peut pas dire que nous participons à l'économie. Nous réaffirmons qu'il faut améliorer l'assurance-maladie en réservant les fonds voulus à l'assurance-médicaments et aux soins à domicile. À l'heure actuelle, le fardeau des services de soins à domicile incombe surtout aux femmes qui, le plus souvent, ne sont pas rémunérées pour leurs services. Je pense qu'on connaît bien les statistiques des Nations Unies sur la question. À l'échelle mondiale, la valeur de ce travail non rémunéré est évaluée à 3 billions de dollars. Il nous faut régler ce problème.
• 1620
À notre avis, si le budget ne répond pas aux besoins des
femmes, on ne peut pas dire qu'il réponde aux besoins des
Canadiens. Nous exhortons le gouvernement de donner enfin suite aux
recommandations que nous lui formulons depuis quatre ans.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie beaucoup, madame Grant-Cummings.
Je souhaite maintenant la bienvenue à M. Jean-Marc Crevier qui représente l'Association nationale de l'aluminium.
[Français]
M. Jean-Marc Crevier (président, Syndicat national des employés(es) de l'aluminium d'Arvida): Mesdames, messieurs, membres du comité permanent, c'est avec beaucoup d'intérêt que je me présente devant vous aujourd'hui pour aborder la question de l'utilisation des surplus du gouvernement fédéral. À titre de président du Syndicat national des employés(es) de l'aluminium d'Arvida, je représente une organisation syndicale qui, le 30 septembre dernier, a déposé en Cour supérieure une contestation judiciaire de la Loi sur l'assurance-emploi. Cette démarche judiciaire a été initiée à la demande des 3 400 travailleurs et travailleuses membres de notre syndicat, de tous les employés de la compagnie Alcan, et a reçu l'appui de centaines de milliers d'autres Canadiens et Canadiennes au Québec et partout à travers le pays.
Il va de soi que les arguments invoqués pour justifier ce recours judiciaire contre le gouvernement fédéral seront plaidés en temps et lieu en Cour supérieure et il n'est pas de mon intention de faire le débat aujourd'hui. Je me contenterai de dire brièvement que, pour notre syndicat, les surplus enregistrés à la caisse de l'assurance-emploi sont la propriété exclusive de ceux et celles qui y ont contribué, c'est-à-dire les travailleurs et les travailleuses ainsi que les employeurs. Toute tentative du gouvernement fédéral de mettre la main sur ces surplus, peu importe les raisons invoquées, est considérée par les travailleurs comme un vol.
Permettez-moi maintenant d'aborder la question de l'utilisation des vrais surplus gouvernementaux, c'est-à-dire ceux qui appartiennent véritablement au gouvernement fédéral et qui proviennent des économies réalisées dans la gestion de ses propres budgets.
Pour les travailleurs que je représente, une partie importante des surplus gouvernementaux à venir devrait nécessairement être utilisée pour contribuer à créer des emplois au pays, cela dans des programmes qui ont fait leurs preuves, dont celui du partage de l'emploi.
En effet, nous savons tous que l'un des devoirs importants d'un gouvernement est d'utiliser les pouvoirs et leviers qu'il détient pour oeuvrer de façon à réduire le plus possible les inégalités au sein de notre société. À ce sujet, le premier geste sensé à poser est certainement de tout mettre en oeuvre pour procurer un emploi à ceux et celles dont le droit au travail n'est pas respecté.
J'ai toujours trouvé curieux que la plupart des politiciens qui prêchent l'urgence de créer des emplois en campagne électorale relèguent rapidement cette priorité aux oubliettes une fois portés au pouvoir. Pourtant, créer des emplois n'est pas sorcier. C'est à la portée de tout gouvernement qui accepterait de sortir des sentiers battus pour faire preuve d'un peu d'initiative. Je vous livre l'expérience vécue par notre syndicat.
Au début des années 1990, les travailleurs des installations d'Alcan à Jonquière, au Saguenay, faisaient les frais de mises à pied massives: plus de 500 d'entre eux ont été congédiés. Pour la première fois, l'inimaginable se produisait pour des travailleurs d'Alcan: plusieurs d'entre eux se retrouvaient, du jour au lendemain, sur l'assurance-chômage ou dépendants de l'aide sociale pour survivre. On n'avait jamais vu cela chez Alcan. Il était dramatique de voir ses confrères et consoeurs de travail menacés tout à coup de tout perdre, faute d'avoir un emploi. C'est dans ce contexte que notre syndicat s'est penché sur diverses formules de partage du travail, faisant même du sujet un enjeu majeur lors de la négociation de notre contrat de travail avec Alcan en 1995.
Ainsi, le 21 octobre 1995, le Syndicat national des employés(e) de l'aluminium d'Arvida et la compagnie Alcan ont officiellement signé une entente sur les modalités d'application d'une formule de travail partagée, communément appelée 40-38 ou 35-33.
• 1625
Essentiellement, la formule prévoit que les employés
travaillant sur un horaire régulier
peuvent signer individuellement une entente avec
l'employeur selon laquelle ils acceptent de travailler 40
heures par semaine, tout en étant rémunérés pour 38
heures de travail. Les deux heures travaillées non
rémunérées sont versées dans une banque que l'employé
peut utiliser en congés.
En bout de piste, la prise de nouveaux congés accumulés par les employés permanents permet de rappeler les employés mis à pied au cours des dernières années, et même d'embaucher de nouveaux employés permanents.
En théorie, la participation de 20 travailleurs au programme amène la création ou le maintien d'au moins un emploi. La participation des travailleurs au programme de partage du travail se déroule sur une base volontaire. Toutefois, les gouvernements fédéral et provincial ont accepté, à titre incitatif, d'apporter une aide financière aux travailleurs participants de manière à compenser partiellement les pertes subies par ceux-ci. Les montants alloués totalisent 460 $ pour la première année—c'est un projet pilote—, 230 $ pour la deuxième année et 115 $ pour la troisième année. Par la suite, il n'y a plus rien. Ces montants sont pour chacun des travailleurs qui participent au programme. La participation financière des gouvernements prendra fin le 31 décembre prochain puisque, malheureusement, les deux gouvernements se font tirer l'oreille pour renouveler l'entente, malgré des résultats positifs évidents.
Concrètement, plus d'une centaine d'emplois au complexe Jonquière d'Alcan ont été directement créés ou maintenus grâce à la participation des travailleurs au programme de travail partagé. Plus d'une centaine de travailleurs qui ont ainsi évité de se retrouver sur l'assurance-chômage ou l'aide sociale ou qui en ont été retirés, travaillent et contribuent par leurs impôts et taxes à l'enrichissement collectif plutôt que de dépendre des prestations gouvernementales pour vivre.
Vous savez fort bien ce que nécessite, en termes d'investissement public et privé, la création d'une centaine de nouveaux emplois par l'implantation d'une nouvelle entreprise. On parle de plusieurs dizaines, sinon de centaines de millions de dollars.
À côté de tels efforts, la création d'une centaine d'emplois par le moyen du travail partagé apparaît si peu coûteuse et tellement facile qu'il faut se demander ce qu'attendent nos gouvernements pour prendre le virage du partage du travail. Le moment apparaît d'autant plus propice pour le gouvernement fédéral que sa situation financière a été passablement assainie et que, pour la première fois depuis longtemps, il entrevoit d'importants surplus budgétaires à l'horizon. Avec des milliards de dollars prévus en surplus, le gouvernement fédéral dispose de toute la marge de manoeuvre financière pour multiplier partout au pays, dans les secteurs privé et public, des expériences de partage de travail telles que celle vécue au complexe Alcan à Jonquière.
Il ne fait aucun doute que c'est la formule la plus efficace pour créer rapidement des milliers d'emplois au pays. Le gouvernement fédéral y trouvera vite son compte, puisque ce seront autant de travailleurs de plus qui paieront leur part d'impôt et de taxes et qui accroîtront les revenus de l'État. En Europe, le partage du travail est l'objet d'un débat important depuis quelques années déjà, et plusieurs gouvernements s'apprêtent à faire des pas importants dans cette direction.
En Amérique du Nord, le gouvernement fédéral canadien a maintenant une belle occasion d'investir dans la création d'emplois en affectant une partie importante de ses surplus budgétaires à des expériences de partage de travail dans différents milieux. Il prouverait ainsi concrètement qu'en matière de création d'emplois, il est sincère et en mesure de passer de la parole aux actes, dans l'intérêt de tous les Canadiens et Canadiennes.
Le partage du travail est une formule qui fonctionne. Ce n'est pas la seule, mais elle est bonne. Les travailleurs et travailleuses d'Alcan peuvent en témoigner. Merci.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Crevier.
Nous accueillons maintenant MM. Phil Gaudet et Lesley Larsen de l'Association canadienne de soins et de services à domicile.
M. Phil Gaudet (président, Association canadienne de soins et services à domicile): Je vous remercie. Bonjour, mesdames et messieurs.
Je suis président de l'Association canadienne de soins et services à domicile. Mon collègue, M. Lesley Larsen, est directeur administratif de notre association. Nous tenons à vous remercier de l'occasion qui nous est donnée de comparaître aujourd'hui devant le comité.
L'Association canadienne de soins et services à domicile est un organisme national qui regroupe des particuliers et des organismes oeuvrant dans le domaine de la prestation de services à domicile au Canada, qu'il s'agisse de services publics ou de services privés. Notre organisme compte parmi ses membres des chercheurs, des enseignants, des étudiants, des analystes de la politique, des planificateurs, des fournisseurs, des organismes nationaux, provinciaux et régionaux, des consommateurs et des gens qui s'intéressent tout simplement à la question des soins à domicile.
Les soins à domicile constituent maintenant une partie intégrante de notre système de santé. En fait, les soins à domicile sont susceptibles de transformer le système et d'en assurer la viabilité et la priorité à l'avenir.
• 1630
Nous aimerions vous convaincre aujourd'hui qu'il est impérieux
que le gouvernement fédéral investisse dans les soins à domicile.
De nombreux intervenants du domaine, et notamment récemment le
Collège des médecins de famille et l'Association des infirmières et
des infirmiers du Canada, ont déjà fait valoir que dans le domaine
des soins de santé, c'est dans le secteur des soins à domicile
qu'il faut investir davantage de fonds. Qui plus est, les sondages
menés auprès des Canadiens au cours de l'année vont dans le même
sens.
Notre mémoire explique pourquoi nous estimons qu'il est à la fois nécessaire et logique d'investir le dividende fiscal dans le secteur des soins à domicile.
Les programmes de soins à domicile ont pris beaucoup d'ampleur au Canada dans la foulée de la restructuration du système de santé. La demande continue de dépasser l'offre de service dans ce secteur. Le financement actuel des soins à domicile est insuffisant étant donné le nombre toujours croissant de gens qui ont besoin de soins à domicile ainsi que l'augmentation continuelle de l'intensité et de la complexité des services dont ils ont besoin.
À mesure que les soins de santé viennent remplacer des soins aigus et à long terme qui étaient autrefois dispensés par les hôpitaux, les clients frêles et âgés qui n'ont besoin que de soins à domicile se voient privés de ces services. Bon nombre de ces clients doivent ensuite être hospitalisés d'urgence.
Les listes d'attente pour les soins à domicile augmentent constamment et des frais d'utilisateur sont exigés dans certaines régions. Par conséquent, les familles et les dispensateurs de soins bénévoles sont de plus en plus mis à contribution. Il est tout à fait normal que les particuliers souhaitent demeurer chez eux et que leurs familles veulent les aider à le faire. J'attire votre attention sur le fait que 70 p. 100 des soins à domicile sont actuellement dispensés par les familles, et en particulier par des femmes. Si la plupart d'entre elles dispensent ces soins de bon gré, elles sont de moins en moins nombreuses à le faire.
Nous reconnaissons le fait que l'avenir de notre système de santé repose sur des particuliers et des familles qui seront bien informées et qui pourront compter sur l'aide nécessaire. Si les services et l'aide financière voulus ne sont pas mis à la disposition des dispensateurs de soins, nous anticipons que cela entraînera deux conséquences négatives. Premièrement, le cynisme dont font preuve les dispensateurs de soins familiaux à l'égard de la capacité du système à leur venir en aide maintenant et dans l'avenir continuera à croître. Deuxièmement, il faudra construire de nouveaux établissements de soins et compter davantage sur les services institutionnels.
Nous sommes heureux que le premier ministre et le ministre de la Santé se soient engagés à investir davantage dans le secteur des soins à domicile. Nous vous exhortons à veiller à ce que le gouvernement fédéral respecte l'engagement qu'il a pris à cet égard.
En particulier, il est nécessaire d'investir de façon urgente dans la remise en état de l'infrastructure du système de soins à domicile au Canada. Ces ressources serviront à créer un système d'information efficace, à établir une politique solide en matière de formation et de rémunération du personnel et à l'établissement d'un système d'évaluation du rendement.
Le gouvernement fédéral devrait au moins exiger qu'on rende des comptes aux Canadiens sur l'issue de la restructuration de notre système de soins de santé. Nous devons intervenir maintenant pour créer un système viable, pour renforcer les soins à domicile et pour faire en sorte qu'on leur accorde la place qui leur revient dans l'ensemble du système de santé. L'injection de fonds dans ce secteur est nécessaire si l'on veut que les programmes de soins à domicile mis en oeuvre par les provinces continuent de reposer sur les principes de l'universalité, de l'accessibilité, de la portabilité, de l'intégralité et de la gestion publique.
Au nom de l'Association de soins et services à domicile, je vous remercie de l'occasion qui nous a été donnée de vous présenter notre point de vue. Je répondrai maintenant volontiers à vos questions.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Gaudet.
Je souhaite maintenant la bienvenue à M. Bill Anderson du Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada.
M. William Anderson (président, Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada): Bonjour, mesdames et messieurs. Nous sommes heureux de participer de nouveau aux consultations prébudgétaires.
Je suis accompagné de M. Joe Maloney, directeur du Conseil canadien des métiers de la construction, dont les membres constituent un groupe important au sein de notre organisme.
Notre mémoire vise à aider le gouvernement à atteindre ses objectifs budgétaires et monétaires ainsi qu'à défendre les intérêts de nos membres. C'est dans cette optique que nous aborderons un certain nombre de sujets qui se rapportent à l'une ou à plusieurs des quatre questions qui nous ont été posées.
Nous voulons d'entrée de jeu féliciter le gouvernement d'avoir équilibré le budget. Le MEBCO est dans l'ensemble d'accord avec les priorités que s'est fixées le ministre des Finances. Nous avons d'ailleurs écrit à l'honorable Paul Martin pour appuyer la vision qu'il proposait du Canada au XXIe siècle dans un discours qu'il prononçait le 6 août 1998.
Le MEBCO consacrait la majeure partie du mémoire qu'il présentait au comité le 5 novembre 1997 à la prestation pour aînés proposée et recommandait qu'on y renonce.
• 1635
Le 28 juillet 1998, le Ministre des finances annonçait le
maintient du système de SV-SRG. Le MEBCO approuve cette décision et
appuie en particulier les déclarations faites par le Ministre des
finances au sujet de la prestations pour aînés.
Le MEBCO appuie les objectifs énoncés par le Ministre des finances concernant la réduction de la dette nationale, une baisse des impôts et le rétablissement et l'amélioration des programmes sociaux. De toute évidence, ces objectifs ne sont pas nécessairement complémentaires et exigeront des choix difficiles.
Qu'est-ce que le MEBCO? Je suis sûr que beaucoup de gens ne connaissent pas notre organisme. Le Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada représente les intérêts des régimes canadiens de retraite et d'avantages sociaux interentreprises. Il représente tous les particuliers et les secteurs qui participent à ces programmes.
Il existe environ 360 régimes de retraite et d'avantages sociaux interentreprises au Canada auxquels participent environ 850 000 particuliers qui y contribuent plus de 1,1 milliard de dollars. La majorité des Canadiens qui participent à ces régimes sont des Canadiens à revenu moyen ou faible.
J'aimerais diviser mon exposé en deux parties. La première portera sur le domaine de la santé et la seconde, sur le domaine des pensions. Dans le domaine de la santé, nous pensons que le gouvernement fédéral devrait réaffirmer son engagement à financer 50 p. 100 des coûts des soins de santé. Le fait pour le gouvernement fédéral de réaffirmer son engagement à cet égard incitera les provinces à assumer leur part des coûts en matière de santé au lieu de s'en remettre au secteur privé ou à compter sur des régimes privés.
Nous exhortons le gouvernement fédéral à étudier à fond l'incidence du vieillissement de la population sur nos politiques économique et sociale. Nous avons déjà attiré l'attention des gouvernements fédéral et provinciaux sur cette question.
Il importe qu'on mène à bien cette étude le plus tôt possible pour que des politiques de rechange puissent être formulées, débattues et mises en oeuvre dans les plus brefs délais. Cette étude devrait porter non seulement sur nos régimes de santé, mais aussi sur les régimes de pension et sur les programmes gouvernementaux comme l'ASV et le Régime de pensions du Canada.
Le MEBCO approuve la décision prise par le gouvernement dans le budget de 1998 de permettre aux travailleurs autonomes de déduire une partie de leurs frais de santé et de leurs frais dentaires supplémentaires puisque cette mesure va dans le sens d'une plus grande équité entre les employés et les travailleurs autonomes. Le MEBCO continue de s'opposer à l'imposition de programmes collectifs de prestations. Cette mesure découragerait les particuliers de participer à ce genre de programme, ce qui imposerait un fardeau accru au régime public de soins de santé.
Dans le domaine des pensions, nous voulons surtout veiller à ce que les bénéficiaires continuent à toucher leurs prestations de retraite et que les cotisations au régime de pension continuent d'être déductibles d'impôts. Les revenus de placement acquis devraient être exonérés d'impôts et ce n'est que lorsque l'employé ou le particulier retire les sommes investies au moment de sa retraite que cet argent devrait être imposé.
Nous pensons également que le gouvernement devrait permettre aux particuliers d'économiser autant d'argent que possible soit individuellement, soit collectivement par l'intermédiaire d'un régime de retraite ou d'un REER. À cette fin, nous pensons que le gouvernement devrait envisager de modifier le montant maximal qui donne le droit à une déduction d'impôt. Enfin, le niveau de cette déduction devrait être ramené au niveau où elle se situait il y a des années.
Également, en ce qui concerne les programmes que nous avons en Ontario, on impose désormais une taxe de vente au détail sur nos programmes de prestations. Nous espérons qu'advenant l'harmonisation, les programmes de prestations seront exemptés d'une telle taxe. Car une taxe de 15 p. 100 sur des programmes de prestations ne fera que décourager la participation à ces programmes et imposera ici encore un plus lourd fardeau au secteur privé.
J'aimerais aborder un autre domaine, à savoir l'économie souterraine. Nous travaillons de façon soutenue avec le gouvernement à ce dossier de l'économie souterraine, comme l'ont fait les collaborateurs de Joe et tous les syndiqués de notre pays, afin de nous assurer que les taxes et impôts appropriés soient payés et ont été payés. Nous applaudissons les efforts déployés par les métiers de la construction au Canada en ce sens.
Enfin, notre programme de prestations dépend des emplois disponibles. Je ne crois pas tellement me démarquer à cet égard des autres personnes ici présentes. L'infrastructure et la création d'emplois sont des éléments très importants pour nos membres afin qu'ils puissent mettre de côté de l'argent pour se doter de programmes de prestations et de retraite. Nous demanderions au gouvernement de poursuivre ses efforts en vue d'assurer de tels programmes et, en particulier, dans le bâtiment.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Anderson. Je tiens à remercier tous les membres du groupe.
Nous passerons maintenant aux questions de M. Epp.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Je vous remercie, monsieur le président et je tiens à remercier tous les témoins qui ont comparu devant notre comité aujourd'hui.
Nous avons entendu les témoignages très variés de nombreux groupes divers aux points de vue différents, qui n'en comportent pas moins certains éléments communs.
Tout d'abord, j'aimerais m'adresser à Keith Christopher et Sandra Short en ce qui concerne leur exposé. Il me semble que vous faites une proposition simple à savoir qu'il ne devrait pas y avoir de TPS sur les services que vous devez fournir et que l'on pourrait qualifier probablement de services médicaux. C'est donc le résumé de la situation. Mais vous n'avez pas parlé de modifier la définition pour que ce genre de service soit effectivement visé par l'assurance-maladie. Vous vous êtes plaints de cet état de choses mais vous n'avez pas proposé qu'on y apporte des changements pour que ce service soit couvert par l'assurance-maladie. Vous ai-je mal interprétés à cet égard?
Mme Sandra Short: Vous ne nous avez pas mal interprétés. Je pense que dans mon exposé j'ai dit que nous avions de la difficulté à accepter le fait que ce service soit rarement couvert par le système de financement public. Il ne fait aucun doute que nous tenons à ce que ce service relève du secteur des services subventionnés par l'État, mais la réalité à laquelle nous faisons face à l'heure actuelle, compte tenu des compressions dans le domaine des soins de santé et de l'éducation, c'est qu'en tant que consommateurs nous sommes parfois obligés maintenant de nous tourner vers le secteur privé pour acheter ce genre de service. Si nous sommes obligés à continuer de faire appel au secteur privé, ce serait vraiment le comble que nous ayons à payer une taxe lorsque nous devons payer 85 $ l'heure pour des services d'orthophonie. Mais effectivement, nous préférerions nettement ne pas avoir à payer du tout pour ce service.
M. Ken Epp: Je partage votre indignation dans une très faible mesure. On m'a demandé il n'y a pas très longtemps par téléphone de faire une contribution à une oeuvre de charité. On m'a dit «Est-ce que vous voulez que nous vous facturions, ou est-ce que vous nous enverrez simplement votre contribution?» J'ai répondu «Il est préférable que vous me facturiez pour que je n'oublie pas». Lorsque j'ai reçu la facture, elle comprenait la TPS. Donc, ce gouvernement taxe même les dons de charité. Je suis tout à fait d'accord avec vous à ce sujet.
Merci beaucoup. Je pense que nous avons compris votre message.
Aimeriez-vous ajouter quelque chose?
M. Keith Christopher: J'ai une observation.
Ce qui nous contrarie, c'est que nous avons toujours eu l'exonération, et en fait tout ce que nous demandons au gouvernement, c'est de continuer à accorder cette exonération comme par le passé. Donc, pour toutes les raisons que nous avons mentionnées, cela ne fait qu'aggraver le problème. Or, cette exonération nous a déjà été accordée, nous l'avons toujours eue et il semble arbitraire de vouloir l'éliminer, surtout à cause du Manitoba. Nous n'arrivons toujours pas à comprendre pourquoi ceux qui ont été les premiers à montrer la voie à tous les autres, devraient être pénalisés parce qu'ils ne satisfont pas aux règles qui s'appliquent désormais et qui n'existaient pas en 1961.
À tout le moins, en toute justice, il faudrait maintenir les avantages acquis. Le problème se trouve aggravé parce que toutes les autres provinces qui ont emboîté le pas—l'Ontario, le Québec, la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick—ont calqué leurs lois sur celle du Manitoba. Donc à tous les niveaux, et même parmi les avocats du ministère des Finances, on s'entend pour dire qu'il n'existe aucune différence entre ce qui était un projet de loi privé et ce qui a été présenté par la suite. Donc, ce qui a été proposé ne présente absolument aucun mérite. Les répercussions sur ceux qui achètent le service sont assez graves et les recettes réelles qui en découlent sont, au mieux, modestes.
C'est donc une mesure qui a d'importantes conséquences sur les particuliers ou les petites entités, mais pour ce qui est des recettes générées, son impact général est très insignifiant.
M. Ken Epp: Merci. Nous pourrions en parler longtemps mais j'aimerais commenter ce qu'ont dit certains autres témoins également.
En ce qui concerne la Corporation des associations de détaillants d'automobiles, vous voulez réduire les primes d'assurance-emploi, vous voulez réduire l'impôt sur le revenu des particuliers, vous voulez faire en sorte que les petites entreprises n'aient pas à payer d'impôt sur leurs 400 000 $, c'est- à-dire la déduction d'impôt de base pour la petite entreprise, et vous voulez que les mécaniciens n'aient pas à payer de taxes, ou du moins qu'ils puissent déduire le coût de leurs outils de leur revenu imposable—en d'autres mots, vous réclamez des allégements fiscaux à n'en plus finir. D'où proviendra cet argent selon vous?
M. Richard Gauthier: Nous estimons que le gouvernement est en mesure à l'heure actuelle comme il ne l'a jamais été de le faire, compte tenu l'importance qu'il attache à la création d'emplois. Nous estimons que sa situation actuelle lui permettrait de donner suite à toutes ces demandes.
M. Huw Williams (directeur, Affaires publiques, Corporation canadienne de détaillants d'automobiles): Si vous me le permettez, je pense qu'il faut aussi examiner l'établissement du coût de ces mesures. Si vous examinez la possibilité de déduire la taxe sur les outils, c'est un très petit chiffre. Nous parlons d'une cinquantaine de millions de dollars. Il s'agit d'une taxe ciblée, en fait, et c'est clairement notre grande priorité.
À partir de là, on peut envisager un allégement fiscal plus général, et le gouvernement a clairement des décisions à prendre. Mais lorsque l'on établit des priorités pour favoriser la croissance économique, au niveau de l'emploi, il est clair qu'il faut accorder la priorité à la petite entreprise.
Toutes les réductions d'impôt et l'allégement fiscal que nous réclamons visent à créer de l'emploi. Examinez en particulier la réduction des cotisations de l'employeur et de l'employé aux primes d'assurance-emploi. Il s'agit de toute évidence d'une taxe sur les emplois. Il existe un excédent qui ne fait pas partie de l'excédent normal du gouvernement. Cela empêche en particulier la petite entreprise d'engager des employés. Si vous examinez la situation de nos membres, qui comptent en moyenne 55 employés, il y a eu un véritable recul pour ce qui est d'engager des employés supplémentaires à cause du fardeau fiscal qu'ils doivent assumer chaque fois qu'ils inscrivent un employé sur la feuille de paye. Je pense que le gouvernement doit essentiellement réévaluer les mesures fiscales en ce qui concerne l'emploi.
M. Ken Epp: Ici encore, je suppose que nous sommes du même avis que vous. Voici un message politique payé. Mon parti est tout à fait favorable à la réduction des primes d'assurance-emploi. Ces dernières semaines, nous avons tâché de persuader le gouvernement d'agir en ce sens. Par ailleurs, l'un de nos membres a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire sur la déductibilité des outils de mécaniciens. Donc je pense que nous sommes nettement du même avis que vous à ce sujet.
Passons maintenant aux gens qui vivent en appartement. Je dirais que les mesures fiscales du gouvernement ont détruit l'industrie, sans compter la TPS et les politiques d'investissement.
Je pense que votre exposé est très clair, mais j'ai quelques questions précises à vous poser. Tout d'abord, comment se fait-il que lorsque vous louez une maison...? Par exemple, je loue une chambre d'hôtel lorsque je vis à Ottawa. Pourquoi les hôtels et les motels sont-ils traités différemment, sur le plan fiscal, des agences de location? Comment s'explique cette situation selon vous?
M. Tex Enemark: Nous venons tout juste de rencontrer les responsables de la politique fiscale au ministère des Finances. Je crois que l'on ne comprend pas vraiment la nature du secteur de la location. J'espère que nous avons pu éclaircir la situation à cet égard.
Ils semblent considérer que la propriété d'immeuble à usage locatif est un investissement entièrement passif tout comme un investissement dans des actions et des obligations par exemple, de telle sorte que la plupart de votre revenu pendant la durée de l'investissement provient d'un gain en capital et non pas de recettes d'exploitation. Je pense que nous avons peut-être essayé de rectifier la situation. Cela semble être le problème. Ils comprennent simplement mal la nature de ce secteur depuis 26 ans.
M. Ken Epp: Très bien. Quant aux mesures que vous avez proposées, j'en ai noté dix. J'en ai probablement manqué quelques- unes, mais elles seront plus détaillées dans votre mémoire, que nous avons d'ailleurs. Essentiellement, vous nous dites qu'à cause des politiques en vigueur à l'heure actuelle, même de vieux logements qui devraient être remplacés sont simplement démolis et remplacés par d'autres commerces. Est-ce bien ce que vous voulez dire?
M. Tex Enemark: La structure fiscale qui a été établie en 1971 convenait peut-être à la situation en 1971. Au cours des 20 années précédentes, il y a eu des encouragements considérables à investir dans des logements locatifs.
Puis, la politique fiscale a amorcé un mouvement inverse qui a nettement découragé l'investissement dans les logements locatifs.
Le résultat, c'est que nous avons un énorme stock d'immeubles locatifs qui ont 20, 30, 40 et 50 ans. Ces immeubles vieillissent. En raison de la nature de l'investissement et comme la disposition de roulement a été éliminée en 1971, les gens ont investi dans les années 50 ou 60. Au fur et à mesure qu'ils vieillissent, ils ne les vendent pas parce que la pénalité fiscale est très élevée. Mais il y aura une pénalité fiscale très importante à payer lorsque ces gens mourront et qu'il y aura une disposition présumée. À ce stade, la pénalité financière est tellement importante, et comme dans bien des régions, seul le terrain possède une valeur résiduelle, non pas l'immeuble, que cela incite le propriétaire à simplement démolir l'immeuble, à déclarer une perte finale et à remplacer un immeuble locatif par un condominium.
• 1650
Nous sommes assujettis à un régime réglementaire très lourd et
très sévère au niveau provincial. Les gens veulent tout simplement
se débarrasser des logements locatifs qu'ils possèdent, construire
des condominiums, les vendre et utiliser cet argent pour faire
autre chose.
M. Ken Epp: Êtes-vous en train de dire que ce que vous comptez faire permettra en fait de régler ce problème?
Je pense que le roulement et le traitement fiscal équitable en ce qui concerne le coût d'exploitation et la dépréciation, sont vos thèmes principaux. Que préconisez-vous, le rétablissement d'un taux de dépréciation de 10 p. 100 des appartements? Que voulez-vous au juste?
M. Tex Enemark: Non, nous demandons trois choses.
Nous comprenons la situation financière dans laquelle se trouve le pays, et nous ne voulons pas toucher au cadre financier établi par le gouvernement. Nous ne pensons pas être suffisamment importants pour obtenir gain de cause avec ce genre d'argument. Mais nous pensons que la crise actuelle se prépare depuis longtemps et que des mesures modestes prises dès maintenant empêcheront que se produise une véritable crise à l'échelle nationale, et permettront de commencer à construire suffisamment d'immeubles.
Essentiellement, nous réclamons trois mesures qui permettront de mettre le logement locatif sur le même pied d'égalité que l'accession à la propriété et d'autres types d'investissement semblables. L'une de ces mesures est le roulement, la possibilité d'acheter un duplex et de le vendre, et si vous souhaitez investir dans un logement quadrifamilial d'ici un an, vous disposez d'un capital intact pour le faire. C'est simplement une façon de reconnaître comment croît votre entreprise dans le secteur des logements locatifs. Certaines entreprises prennent de l'expansion en achetant une autre propriété qu'elles agrandissent et ainsi de suite. La croissance dans le secteur locatif s'effectue en achetant à un cran supérieur et en faisant fructifier vos capitaux propres. Nous considérons que le roulement est la mesure la plus importante. Nous pensons que le gouvernement fédéral ne tire pas tellement de recettes à l'heure actuelle de l'impôt sur les gains en capital en ce qui concerne les logements locatifs, parce que personne ne vend étant donné que personne n'en a les moyens, et la nouvelle construction qui résultera de la disposition de roulement sera nettement avantageuse pour le gouvernement sur le plan fiscal.
En deuxième lieu, ce que nous réclamons, c'est un traitement équitable en matière de TPS. Si vous construisez un immeuble locatif à but non lucratif, vous payez la moitié de la TPS. Si vous vous construisez une maison qui vaut moins de 350 000 $, vous payez 2,5 p. 100 de moins de TPS; vous payez une TPS de 4,5 p. 100. Mais si vous êtes un locataire qui loue un nouvel appartement, vous payez la totalité de la TPS à même votre loyer, ce qui équivaut à 20 ou 30 $ de plus par mois. Il y a donc cet aspect d'équité.
Puis, il y a la façon dont on traite ces investissements, lorsqu'ils sont exploités par ceux qui en sont les propriétaires, comme la petite entreprise. Tout comme le motel familial au coin de la rue, le petit immeuble d'habitation de l'autre côté de la rue devrait recevoir le même traitement réservé à la petite entreprise. Nous ne croyons pas que cela comporte d'énormes sommes d'argent, dans l'ensemble, et nous estimons que cela créera suffisamment de nouveaux investissements dans ce secteur pour permettre d'éviter que s'aggrave le problème de gens qui couchent sous les ponts dans ce pays.
M. Ken Epp: Il me semble que cela aiderait aussi considérablement le bâtiment.
M. Tex Enemark: Pendant bien des années, dans les années 50 et 60, lorsque la Société canadienne d'hypothèques et de logement, comme on l'appelle maintenant, était responsable de plus de 55 p. 100 de toute nouvelle construction résidentielle dans le pays par le biais de ses activités de prêt et d'assurance, les politiques variaient d'une année à l'autre quant au montant d'argent accordé à la Société, parce que le secteur de la construction avait un effet multiplicateur énorme, probablement beaucoup plus important que n'importe quelle autre mesure économique prise par le gouvernement.
M. Ken Epp: Je vous remercie. Nous pourrions en parler indéfiniment.
Combien de temps me reste-t-il? Puis-je continuer?
Le président: Non, je pense que nous devons céder la parole à quelqu'un d'autre, monsieur Epp. Je vous remercie.
M. Ken Epp: Puis-je prendre quelques secondes pour parler aux informaticiens?
Le président: Bien sûr.
M. Ken Epp: Le secteur des logiciels m'intéresse beaucoup. En fait, l'un des secrets les mieux gardés au monde, c'est l'existence d'une organisation qui s'appelle Epp Software en Alberta. Elle a d'excellentes idées mais aucune aptitude en commercialisation—c'est une constatation.
• 1655
J'aimerais simplement vous demander ce sur quoi vous voulez
insister surtout. Vous dites que si j'investis dans une société qui
crée des logiciels, je ne devrais pas avoir à payer d'impôt sur
l'argent que je gagne dans cette société. Vous avez parlé d'une
trêve fiscale de cinq ans, et je ne comprends pas bien ce que vous
voulez dire car la plupart des fabricants de logiciels ne font pas
d'argent les cinq premières années.
M. Sheldon Wiseman: Nous parlons en particulier des incidences en matière de gain en capital. Si la valeur de la société où un investissement a été fait augmente, elle ne devrait comporter aucune incidence fiscale si on la détient pendant cinq ans.
M. Ken Epp: Très bien. C'est une idée que j'ai envisagée. Il me semble que nous aurions intérêt au Canada à avoir des gains en capital exempts d'impôt de toute façon, comme autrefois. Êtes-vous d'accord?
M. Sheldon Wiseman: Il est difficile de répondre à cette question. Je suppose que cela soulève beaucoup de questions d'ordre financier qui concernent d'autres industries. C'est difficile à dire.
M. Ken Epp: Cette mesure avait vraiment stimulé l'économie. Nous aurions probablement des recettes gouvernementales plus importantes que le peu que nous rapportent les impôts sur les gains en capital lorsque les gens finissent par mourir et les payent.
J'ai une dernière question en ce qui concerne l'exode des cerveaux. Vous avez dit que les salaires plus élevés et les impôts plus bas attirent les gens aux États-Unis—je pense que M. Nifco l'a mentionné. Je crois comprendre que ce n'est pas le cas et que si l'on tient compte du coût total de la vie aux États-Unis, y compris les soins de santé et ainsi de suite, il revient plus cher de vivre là-bas. Donc, les faits que vous citez ne sont pas exacts. Est-ce que je me trompe?
M. Nathan Nifco: Oui, nous en avons une expérience pratique. Notre société a en fait perdu sept personnes qui nous ont quittés pour aller aux États-Unis cette année. Bien qu'il soit peut-être vrai qu'au bout du compte leur situation demeure neutre si on tient compte du coût de la vie et des avantages sociaux, dans ces circonstances en particulier, ils se sont vus offrir pratiquement le double de leur salaire par une entreprise américaine du qui fabrique des logiciels. Parce qu'ils considéraient être dans une tranche d'imposition élevée au Canada, ils ont pris la décision d'aller s'installer aux États-Unis en quelques semaines.
Notre cas n'est pas unique. Nous avons consulté d'autres fabricants de logiciels, et l'on constate qu'il existe une concurrence féroce pour ce qui est de la main-d'oeuvre qualifiée dans cette industrie. Ce manque de main-d'oeuvre qualifiée produit une dynamique telle que ces entreprises sont obligées de recruter partout dans le monde, et pour attirer des gens dans l'industrie du logiciel, il faut doubler leurs salaires ou leur offrir des avantages supplémentaires si on veut qu'ils déménagent et travaillent pour ces entreprises.
M. Ken Epp: Alors pour les garder ici, pourquoi ne les payez- vous pas tout simplement davantage pour qu'ils quittent les États- Unis et viennent travailler ici?
M. Nathan Nifco: C'est exactement ce que nous proposons. Nous voulons que nos entreprises aient accès au capital-risque pour qu'elles puissent offrir les mêmes salaires et avantages que les autres pays.
M. Ken Epp: D'accord. Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Epp.
Madame Redman.
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.
En fait, j'ai deux questions. La première s'adresse à la Canadian Automobile Dealers Association. Vous avez dit que votre industrie est unique dans l'industrie du détail étant donné que les besoins en capitaux des concessionnaires automobiles comprennent le stock, le financement et le capital imposable. Pourquoi vous traite-t-on comme si vous étiez une anomalie?
M. Richard Gauthier: Pourquoi nous sommes traités comme si nous étions une anomalie?
Mme Karen Redman: Qu'est-ce qui fait que votre industrie a amené le gouvernement à vous traiter différemment?
M. Richard Gauthier: Je pense qu'il s'agissait strictement d'un oubli. Les concessionnaires automobiles, étant donné la nature même de leur entreprise, sont tout simplement victimes de l'interprétation de la loi. Ils sont appelés à avoir un stock excessivement élevé. Le coût moyen d'un véhicule aujourd'hui se situe entre 28 000 $ et 30 000 $. Je crois que c'est tout simplement attribuable au fait que le capital imposable est englobé dans l'interprétation qu'on donne aujourd'hui à la loi. Voilà pourquoi nous voulons qu'elle soit redéfinie afin que l'on exclue les billets de garantie.
Mme Karen Redman: Il se peut que je mêle ici les pommes et les oranges, et il se peut que les deux sujets ne soient pas liés, mais il y a une chose que j'ai apprise du groupe de travail MacKay, et c'est le fait que le marché de la location des véhicules a pris une expansion incroyable, et près de 46 p. 100 des nouvelles acquisitions sont des locations. Comment traitez-vous cela dans vos comptes? Si je loue un véhicule du concessionnaire X, est-ce que le concessionnaire X possède toujours le véhicule, ou est-ce moi qui possède le véhicule parce que je le loue?
M. Richard Gauthier: Si vous louez le véhicule, vous ne possédez pas la voiture. Le locateur possède la voiture, et il se peut qu'il s'agisse du concessionnaire, si celui-ci a sa propre entreprise indépendante de crédit-bail, ou une filiale prêteuse, par exemple une filiale de l'usine, comme par exemple la General Motors Acceptance Corporation. Quel que soit le cas, c'est le bailleur qui possède le véhicule et non le preneur. Le fait que vous louez le véhicule veut dire que vous ne payez que pour le droit d'utiliser ce véhicule.
Mme Karen Redman: Dans les scénarios A et B que vous donnez, si vous êtes le bailleur en votre qualité de concessionnaire automobile, cette voiture fait alors partie de votre stock?
M. Richard Gauthier: Oui.
Mme Karen Redman: Cela se refléterait donc dans le genre de structure fiscale dont vous parlez ici.
M. Richard Gauthier: C'est exact.
Mme Karen Redman: J'ai trouvé intéressant les exemples du Manitoba, de la Colombie-Britannique et du Québec que vous avez mentionnés. Ces provinces semblent être sensibles à cette tendance, et je me demande ce que cela signifie.
M. Richard Gauthier: Je ne suis pas sûr de comprendre votre question?
Mme Karen Redman: Vous avez dit qu'il fallait attendre plus de 120 jours en Colombie-Britannique et plus de 180 jours au Québec.
M. Richard Gauthier: Je comprends maintenant. C'est comme ça parce que ces provinces ont reconnu que ces articles ne bougent pas nécessairement vite, et que par conséquent, ils peuvent faire partie du stock pendant cinq ou six mois, en moyenne.
M. Huw Williams: Je pense que c'est comme ça, essentiellement, parce que ces gouvernements provinciaux ont tenu compte du coût de ces articles individuellement, et du nombre de véhicules qui restent dans le stock dans la mesure où ils ne donnent pas une image juste de la taille de l'entreprise.
Mme Karen Redman: Merci.
Monsieur Crevier, vous avez mentionné le partage de l'emploi dans votre exposé, et je pense que c'est vraiment intéressant et innovateur. Je me demande seulement qui partage l'emploi.
Si je suis le seul gagne-pain dans mon ménage, il me faut une semaine de 40 heures. Comment vais-je gagner l'argent qu'il me faut pour faire vivre ma famille si je partage mon emploi avec quelqu'un d'autre? Il ne doit y avoir qu'un certain nombre de personnes dans n'importe quelle entreprise dont le mode de vie se prête au partage de l'emploi.
[Français]
M. Jean-Marc Crevier: Non, et c'est pour cela que le travail partagé s'est fait sur une base volontaire. On a des salariés qui n'ont pas tous le même salaire, mais parmi plus de 3 000 personnes, les deux tiers ont adhéré au programme sur une base volontaire. Il y a des gens qui, pour toutes sortes de raisons, n'ont pas voulu y adhérer, mais les gens y ont adhéré dans une grande proportion.
Qu'est-ce qui arriverait dans le cas de gens qui sont dans la situation que vous décrivez? On n'en a pas dans l'entreprise où les travailleurs travaillent. Je suis incapable de vous dire dans quelle mesure ces employés pourraient y adhérer. On regardait l'effet d'un tel projet sur l'ensemble de la collectivité. C'était un projet-pilote de trois ans. L'aide financière du gouvernement fédéral était de 1,2 million de dollars. Étant donné que les deux tiers de nos gens avaient adhéré au programme, le gouvernement fédéral a donné à peu près 725 000 $ en trois ans. On avait calculé le retour d'impôt au niveau du gouvernement fédéral; il y avait un retour d'impôt de tout près de 1,7 million de dollars. Pour l'ensemble de la collectivité, il devenait lucratif d'adhérer à des formules comme celle-là, surtout que c'était sur une base volontaire. C'est pour cette raison qu'on demande au gouvernement de continuer cette mesure et même de l'étendre.
[Traduction]
Mme Karen Redman: Merci.
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
• 1705
J'aimerais interroger la CADA au sujet de la location des
véhicules étant donné que cette question a été posée lors de notre
passage à Montréal. Il s'agit de la déduction pour amortissement
pour les véhicules loués. On nous explique essentiellement que la
déduction pour amortissement permet une passation par pertes et
profits plus rapide aux fins de la comptabilité, ce qui veut dire
que cela facilite les rentrées. Et comme Mme Redman l'a dit, il y
a eu une croissance phénoménale, dans la location d'automobiles.
Est-ce que cela s'est traduit par un avantage, étant donné que vous
louez plus de voitures que vous n'en vendez, pour ce qui est des
rentrées qui vous permettent de soutenir votre croissance?
M. Richard Gauthier: Par «avantage», parlez-vous du seuil de rentabilité?
M. Paul Szabo: Eh bien, il est avantageux d'avoir la DPA sur un véhicule loué. Donc entre la location du véhicule et la vente, qu'est-ce qui profite le plus au concessionnaire?
M. Richard Gauthier: Du point de vue du concessionnaire qui ne possède pas sa propre société de crédit-bail, il n'y a aucune différence. Ce n'est qu'un moyen de plus d'écouler les véhicules, de mettre à la disposition du consommateur d'aujourd'hui ces véhicules plus rapidement. Comme Mme Redman l'a dit plus tôt, la popularité croissante de la location des voitures est strictement attribuable à l'augmentation de leur coût ces dernières années par rapport au revenu disponible moyen des Canadiens.
M. Paul Szabo: D'accord. C'est important parce que vous nous dites essentiellement que vous avez besoin d'aide, qu'il s'agisse d'allégements fiscaux, de diminution des primes d'assurance-emploi et tout le reste. Il s'agit donc essentiellement d'un avantage fiscal quelconque, et étant donné que les concessionnaires automobiles louent aujourd'hui presque la moitié de leurs véhicules au lieu de les vendre, cela veut dire que tout à coup, les voitures que vous vendiez ou que vous obteniez de l'usine vont être écoulées très rapidement. Ce n'est pas vous qui allez demander la DPA sur ces véhicules, vous n'en retirez donc pas de rentrées supplémentaires ni d'avantages fiscaux du fait que vos impôts sont reportés.
Ma question est donc celle-ci, étant donné que les gens de Montréal qui ont témoigné devant notre comité ont dit que ce qui est important pour eux, c'est de ne pas perdre la propriété du véhicule en laissant à quelqu'un d'autre le soin de financer l'emprunt, une banque par exemple, est-ce que ça veut qu'en changeant progressivement votre entreprise et en passant de la vente au crédit-bail, on se trouve en fait à accorder un avantage fiscal important aux concessionnaires automobiles canadiens?
M. Richard Gauthier: Sachant que sur les 3 500 concessionnaires automobiles au Canada, environ 1 300 possèdent leurs propres sociétés de crédit-bail, vous comprendrez que la vaste majorité des concessionnaires, de ce fait, ne profitent pas des avantages de la déduction pour amortissement relative au crédit-bail.
En réponse à ce que vous disiez, c'est-à-dire le fait que le roulement est plus rapide, si vous voulez relier cela à la définition du capital imposable, je ne crois pas vraiment qu'il y ait de rapport ici.
En réalité, si la location d'automobiles est devenue si populaire, comme je l'ai dit plus tôt, c'est parce que le prix des véhicules a augmenté énormément depuis 10 ans, et pour le concessionnaire automobile et le fabricant, la location s'est avérée une méthode viable pour l'écoulement des produits dans la mesure où on peut les offrir au consommateur. Au bout du compte, c'est vraiment le consommateur qui est responsable de la popularité du crédit-bail. Il a adopté cette formule pour acquérir un véhicule plus aisément et en changer plus régulièrement.
Huw, est-ce que vous vouliez...
M. Huw Williams: Oui, si je peux me permettre, monsieur Szabo, je crois que l'élément à ne pas oublier concernant la DPA est qu'elle constitue une source de rentrées pour le concessionnaire dans la mesure où sans elles il lui faudrait de toute façon emprunter cet argent. L'effet est donc pratiquement double.
Si vous avez votre propre société de crédit-bail, vous profitez de la DPA qui vous permet d'ajouter immédiatement une rentrée supplémentaire dans votre comptabilité et de ne pas avoir à emprunter cet argent. Dans le cas contraire, non seulement vous perdez les avantages fiscaux liés à cette déduction, mais en plus il vous faut emprunter cet argent et verser de l'intérêt à votre partenaire financier. La DPA a donc en réalité permis aux concessionnaires de réinvestir immédiatement dans leurs entreprises sans avoir recours aux services payants d'un établissement financier.
• 1710
Le troisième facteur est que les banques participent
actuellement aux opérations de crédit-bail mais seulement par le
biais des capitaux qu'elles fournissent aux sociétés de crédit-bail
indépendantes appartenant aux concessionnaires. M. Gauthier l'a
rappelé tout à l'heure. Elles offrent aussi des plans qu'on
pourrait qualifier de crédit-bail comme le dit le Value Lease Plan
de la Banque de Nouvelle-Écosse. Il y a 400 concessionnaires qui
participent à ce plan. La Banque de Nouvelle-Écosse finance le taux
d'intérêt et avance l'argent pour le crédit-bail. Mais elle ne peut
avoir de droits sur le titre, elle ne peut donc ni acheter ni
vendre des voitures car la Loi sur les banques lui interdit. Ce
n'est donc pas elle qui bénéficie de la DPA mais celui à qui elle
revient de droit...
M. Richard Gauthier: Au concessionnaire.
M. Huw Williams: Oui, en toute justice elle vous revient pour que vous puissiez la réinvestir dans votre entreprise. Je crois que c'est un point important et je vous remercie de nous avoir permis de le rappeler.
M. Paul Szabo: Tout à fait d'accord. La réponse à cette question s'est fait longtemps attendre car c'est en fait le droit au titre de propriété qui revêt une importance critique en l'occurrence.
J'ai une toute petite question à vous poser sur la déductibilité du coût d'achat des outils des mécaniciens. Dans l'industrie automobile la pratique veut que ce n'est pas la compagnie qui achète ses outils. Quelle est la pratique dans les autres industries? Y a-t-il d'autres industries où la pratique veut que l'employeur soit achète soit verse une indemnité pour les outils de ses employés si bien que c'est la compagnie qui finance l'achat des outils?
M. Richard Gauthier: Je n'en sais pas assez sur la situation des autres industries pour pouvoir vous répondre, monsieur Szabo. J'aimerais rappeler qu'on nous demande souvent pourquoi les employeurs n'achètent pas les outils des mécaniciens. La réalité est que les employeurs dépensent, en moyenne, de 400 000 $ à 500 000 $ pour entretenir leur propre équipement de diagnostic et pour acheter l'équipement nécessaire pour suivre les nouvelles technologies introduites pratiquement mois après mois par les usines. Mon expérience se limite à notre industrie dans ce domaine, mais je ne crois pas que notre situation soit unique.
Huw?
M. Huw Williams: Je crois qu'il importe de ne pas oublier qu'en matière de déductibilité fiscale du coût d'achat des outils des mécaniciens, si ces derniers travaillent comme indépendants ils peuvent le déduire. Pourquoi dans ce cas les pénaliser puisqu'il leur faut ces outils pour être embauchés? Tout compte fait, le véritable problème pour les concessionnaires est le suivant: nous avons des emplois d'apprentis et de mécaniciens pour les jeunes mais ils n'en veulent pas parce que la dépense initiale à faire les effraie et qu'ils ne peuvent pas la déduire. C'est une des raisons pour laquelle, au sein de la coalition pour la déductibilité du coût d'achat des outils, on retrouve la majorité des collèges de formation professionnelle.
Le président: Merci, monsieur Szabo.
[Français]
Madame Girard-Bujold.
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): J'aurais eu plusieurs questions à poser à M. Jean-Marc Crevier à la suite du dépôt de son mémoire, mais je sais qu'il doit partir dans quatre minutes pour aller prendre l'avion.
L'expérience de travail qu'ont vécue les employés représentés par Jean-Marc Crevier dans le comté de Jonquière a été très concluante.
Vous savez que les politiciens se cassent la tête pour trouver des façons de créer des emplois dans les régions où il y a un haut taux de chômage et où l'on vit l'exode des jeunes. Il faut absolument que les jeunes aient la possibilité de se joindre aux effectifs d'une grande entreprise. Les efforts déployés par les employés, les patrons et les deux paliers de gouvernement ont été très concluants.
J'aimerais que M. Crevier nous donne des précisions et nous dise s'il serait en mesure de déposer ici, devant ce comité, des statistiques qui prouvent que les gouvernements devraient agir de plus en plus de cette façon en vue de créer des emplois.
M. Jean-Marc Crevier: Les statistiques que nous avons en main à l'heure actuelle ont été compilées par le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations de Montréal. Notre syndicat compte 112 travailleurs qui ont retrouvé leur emploi. Notre entreprise compte 200 employés, dont certains appartiennent à d'autres groupes et ont opté pour le travail partagé.
Le Centre interuniversitaire de recherche, le CIRANO, est financé par les gouvernements et les entreprises, et non pas par les syndicats. La recherche qu'a menée le centre démontre clairement qu'une telle formule s'avère rentable pour l'ensemble de la collectivité. On a analysé tous les coûts et constaté qu'on avait facilement et très rapidement récupéré les sommes qu'on avait investies dans le travail partagé. Cela ne coûte rien.
• 1715
Oui, nous serions en mesure de fournir à votre
commission le volumineux rapport que nous avons en
main. Il comprend des annexes qui expliquent le
fonctionnement ainsi que le processus de négociation
entamé avec
les deux paliers de gouvernement et l'entreprise.
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur Crevier, comme vous le savez, nous étudions ce qui se passe ailleurs dans le monde. Lorsque vous veniez me rencontrer, vous faisiez toujours allusion à l'Europe, où cette formule est bien plus avancée. J'aimerais que vous nous en parliez.
M. Jean-Marc Crevier: En Europe, on a entrepris un projet-pilote il y a trois ans et on se propose de réduire de deux heures la semaine de travail. À l'heure actuelle, on débat de la possibilité de fixer le nombres d'heures de travail à 32 par semaine, réduisant ainsi la semaine de travail de 8 heures. Cette réduction représente une importante baisse de salaire, mais il en sont rendus là. En Europe, on semble capable de débattre de cette question et d'apporter les modifications législatives nécessaires. Dans le fond, c'est un débat qui fait intervenir les associations de travailleurs, les associations patronales et le monde gouvernemental.
Tout à l'heure, Mme Redman nous disait que ce ne sont pas tous les travailleurs et travailleuses qui sont en mesure d'appuyer cette formule en raison de ses répercussions au niveau salarial. C'est pour cette raison que le projet-pilote était sur une base volontaire. Pourtant, les deux tiers des travailleurs y ont adhéré. Si nous pouvions étendre cette formule à la grande industrie et à la fonction publique, nous pourrions créer des milliers d'emplois.
Je ne sais pas de quelle façon nous pourrions nous y prendre pour convaincre les gens. Il est regrettable que pour faire avancer ce dossier chez nous et pour faire comprendre à la population que l'essence même de la négociation était la création d'emplois, il ait fallu mobiliser une foule de gens et presque recourir à une grève. Au début, l'ensemble des gens nous percevaient comme des gras durs du système qui ne se battaient que pour s'enrichir. Mais, au bout d'un an ou deux, les gens ont commencé à comprendre qu'on ne se battait pas pour de l'argent, mais plutôt pour donner du travail aux gens. Les gens sont en train de voir que c'est payant. Je viens de la région où le taux de chômage est le plus élevé au Canada. Lorsqu'on crée 100 emplois permanents dans des secteurs où l'on gagne 40 000 $ ou 50 000 $ par année, ce n'est pas négligeable. Les gens en parlent de plus en plus.
Pour quelle raison est-ce que ce seraient toujours les mêmes, soit les travailleurs, qui doivent payer la note? Nous soutenons que, tout comme les travailleurs, l'entreprise et les deux paliers de gouvernement doivent faire leur part. L'ensemble de la collectivité doit faire un effort pour permettre aux gens de travailler.
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Merci, monsieur le président. M. Crevier doit malheureusement s'en aller.
[Traduction]
Le président: Merci.
Y a-t-il d'autres questions? Madame Redman.
Mme Karen Redman: Je tenais simplement apporter une précision. J'espère que c'était clair. J'estime que c'est une solution très créative. Vous me suggérer de l'étendre mais, bien entendu, sur une base volontaire. Il y a des cas dans lesquels cela ne marcherait pas. J'espère donc que vous ne m'avez pas mal comprise. Je trouve l'idée très créative.
[Français]
M. Jean-Marc Crevier: Je ne comprends pas votre question.
[Traduction]
Mme Karen Redman: Non. C'est tout.
[Français]
Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président: Au nom du comité, j'aimerais vous remercier infiniment de vos excellents témoignages.
Je crois que tout compte fait, un thème commun ressort de ces audiences. Ce thème commun est que nous voulons tous améliorer la qualité de vie des Canadiens. C'est un objectif que vous partagez tous. Je crois que c'est l'objectif ultime. Naturellement, le défi pour notre comité est de trouver le cadre qui réponde aux attentes exprimées par tous nos témoins et la voie qui garantira cette amélioration de la qualité de vie des Canadiens.
• 1720
L'autre thème fort qui émerge de ces audiences est celui de
l'amélioration de notre niveau de vie grâce à la croissance de la
productivité. Des études récentes ont montré que le fossé entre les
États-Unis et le Canada s'élargit. J'entends productivité d'une
manière très positive. Comment utiliser au mieux nos ressources
humaines pour obtenir les meilleurs résultats pour tous les
Canadiens, quel que soit leur niveau de revenu et leur région de
résidence car la diversité est une des caractéristiques de notre
pays?
Nous vous remercions infiniment de nous aider à relever ce défi. Soyez assurés que nous n'oublierons pas les points que vous avez soulevés cet après-midi.
La séance est suspendue.
Le président: La séance est ouverte et je vous souhaite à tous la bienvenue ce soir.
Nous avons le plaisir d'accueillir les organismes suivants: la Fédération canadienne des enseignants, l'Employee Share Ownership & Investment Association, Greenpeace, la Société canadienne de la sclérose en plaques, l'Université Western Ontario et World Vision Canada.
Nous commencerons par M. John Staple, le directeur des services économiques de la Fédération canadienne des enseignants et par M. Harvey Weiner, le secrétaire général intérimaire. Soyez les bienvenus.
M. Harvey Weiner (secrétaire général intérimaire, Fédération canadienne des enseignantes et enseignants): Merci, monsieur le président.
[Français]
La Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants est un regroupement de 13 organisations provinciales et territoriales qui représente 240 000 enseignantes et enseignants des écoles élémentaires et secondaires financées par les fonds publics de chaque province et territoire du Canada.
[Traduction]
Nous vous sommes infiniment reconnaissants de nous avoir invités à venir vous présenter certaines de nos réflexions concernant le budget de 1999, et nous sommes de tout coeur avec vous. Nous imaginons que vous avez dû subir un horaire démentiel d'audiences et que vous devez probablement souffrir un peu de psychose du mémoire. Nous espérons cependant que vous pourrez trouver quelques pépites dans notre exposé digne d'être retenues dans les recommandations que vous ferez au ministre des Finances pour le budget de 1999.
Permettez-moi de commencer par dire que notre fédération est consciente des difficultés financières traversées par notre pays et auxquelles il continue à être confronté. Nous mesurons la difficulté des décisions que vous aurez à prendre pour formuler vos recommandations concernant le budget de 1999.
Nous aimerions vous suggérer qu'à nos yeux cet exercice de consultations ne devrait pas concerner uniquement le budget de 1999, mais le budget de l'an 2000 et celui de l'an 2001. Nous aimerions énormément que dans vos recommandations, les engagements concernant certaines questions de priorité courent sur un plus long terme. Le ministre, M. Martin, a lui-même créer un précédent en fixant un objectif mobile à la réduction du déficit. De toute évidence, il a atteint et dépassé cet objectif. Nous ne voyons aucune raison pour laquelle nous ne pourrions fixer des cibles mobiles pour d'autres questions d'importance majeure pour les Canadiens, et sur une base progressive commencer à restaurer les services endommagés par les compressions budgétaires.
S'agissant du dividende budgétaire, notre fédération estime qu'il doit être prioritairement réinvesti dans les programmes sociaux du Canada en mettant spécifiquement et tout particulièrement l'accent sur les enfants et la jeunesse. Qu'il s'agisse de la santé, qu'il s'agisse de l'éducation, qu'il s'agisse de l'emploi, ce sont toutes des questions qui concernent l'ensemble de la population, nous vous incitons à ne pas oublier certains faits. L'éducation commence à la naissance. La bonne santé commence à la naissance. Le développement de membres productifs et actifs de la société civile commence à la naissance.
• 1810
Si notre pays se fixe comme priorité, et il le devrait—de
fournir à chaque enfant canadien tous les moyens possibles et
imaginables pour qu'il atteigne son plein potentiel, commencer à
investir dans cette priorité et en faire un engagement politique,
travailler à l'unisson avec les gouvernements provinciaux dans les
domaines de compétence partagée, travailler à l'unisson avec les
organismes non gouvernementaux tels que le nôtre et les organismes
bénévoles, qui sont les prestataires de services de ces jeunes
enfants, nous permettra alors de faire un grand pas en avant au
niveau de l'amélioration non seulement de l'économie de notre
nation, mais du bien-être social du Canada.
Toutes les études qui ont été faites, y compris l'étude nationale longitudinale sur les enfants et la jeunesse, financée par le ministère du Développement des ressources humaines, démontrent à l'évidence que les mesures d'intervention précoce rapportent d'énormes dividendes à long terme sous formes de réduction des coûts sociaux, de réduction des coûts de santé, et de réduction des risques de non-productivité des futurs participants à la vie active.
Je conclurai sur ce point particulier en disant que nous estimons possible de s'engager beaucoup plus fortement sur la question des enfants et de la jeunesse, de lui donner la priorité dans le prochain budget et d'indiquer les objectifs que se fixe le gouvernement pour les années 2000 et 2001 faisant ainsi la démonstration de la sincérité de son engagement. Nous savons qu'il est souvent très difficile aux politiques de prévoir leur avenir sur trois ou cinq ans et ils n'ont peut-être pas ce genre de vision à long terme. Cependant, ce genre de vision à long terme, quand on considère certaines des études qui ont été faites aux États-Unis, au Canada et dans les pays scandinaves, études qui sont de nature longitudinale, elles fournissent de manière concluante la preuve des arguments que je viens d'avancer.
De plus, la lecture des derniers gros titres des journaux nous fait penser que le ministre des Finances a peut-être un peu plus de marge de manoeuvre qu'il ne l'avait anticipé jusque là. Les prévisions d'excédents avaient été de toute évidence très conservatrices, c'est le moins qu'on puisse dire, et nous estimons qu'un plus gros effort peut être fait à ce niveau. C'est aussi une question de crédibilité pour le gouvernement quand il dépose ses chiffres d'excédents et que ces chiffres sont en fait, dirons-nous, dans le plein champ plutôt qu'un peu perdus dans le champ gauche.
Il y a un certain autre nombre de questions dont nous aimerions vous parler maintenant brièvement—M. Staple et moi-même nous ferons un plaisir de répondre à vos questions sur tous ces sujets. Nous estimons nécessaire dans la conjoncture actuelle, étant donné l'excédent de l'assurance-emploi, d'améliorer les prestations et d'augmenter l'accès aux prestations pour ceux qui ont cotisé à cette caisse. Ce sont les parents des enfants et des jeunes dont nous parlons. Si nous les aidons, nous aiderons également les enfants et les jeunes de notre pays.
Enfin, mon dernier commentaire concerne peut-être un peu plus directement les problèmes spécifiques de nombre d'enseignants qui voient la charge de plus en plus croissante que doivent supporter les enfants jour après jour à l'école. Ils s'aperçoivent qu'ils doivent de plus en plus puiser dans leurs poches pour payer les fournitures et le matériel qu'ils doivent acheter eux-mêmes, conséquences des nombreuses compressions, de l'effet de dominos, et de la manière dont ces compressions ont touché les provinces. Les implications sont réelles sur le plan des dépenses professionnelles pour les enseignants.
Nous ne plaidons pas pour que ce gouvernement fasse ce que le gouvernement coréen a fait il y a de nombreuses années. Pour ceux d'entre vous qui ne le sauraient pas, le gouvernement coréen a totalement exonéré les enseignants de l'impôt, reconnaissant la tâche importante qu'ils accomplissent auprès des enfants du pays. Nous estimons cependant que certaines considérations fiscales fondées sur les dépenses professionnelles des enseignants pourraient être envisagées dans une optique plus équitable que ce n'est le cas actuellement.
Je vous remercie, monsieur le président, et nous nous ferons un plaisir de répondre à votre question.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Weiner.
Nous entendrons maintenant la représentante des Employee Share Ownership & Investment Association, Mme Julia Markus. Soyez la bienvenue.
Mme Julia Markus (directrice exécutive, Employee Share Ownership & Investment Association): Merci, monsieur le président, et merci de me donner l'occasion de participer à votre réunion.
• 1815
Je me suis rendu compte avec intérêt que le Comité des
finances se préoccupait en fait du bien-être du pays. Je croyais
qu'il ne s'intéressait qu'aux questions techniques et financières.
Étant donné ce contexte, puisque je suis ici pour vous parler
d'actionnariat, je suppose que je suis ici pour vous parler du bien
-être économique du pays puisque à mon avis c'est ce que peut
offrir de mieux la libre entreprise.
Il y a déjà, à titre informatif, des programmes d'actionnariat dans plusieurs provinces qui offrent des crédits d'impôt aux employés résidents. Il y a la Colombie-Britannique; le Manitoba; la Saskatchewan; l'Ontario, si on veut; le Québec et la Nouvelle-Écosse.
Le problème est qu'ils ne peuvent offrir ce crédit d'impôt aux employés que pour investir dans leurs compagnies et il y a aujourd'hui tant de preuves qui montrent que l'actionnariat est tellement bénéfique pour tous les intéressés qu'il est nécessaire de l'instituer au niveau fédéral. Ce qui manque pour lancer cette initiative c'est un coup de pouce pour que les compagnies s'intéressent à l'actionnariat.
Je suis heureux de pouvoir dire que c'est une question vraiment non partisane. En Colombie-Britannique, ma province, le programme d'actionnariat a été lancé par les créditistes. Il est soutenu et financé aujourd'hui par le gouvernement NPD et un des membres fondateurs et le critique financier du Parti libéral. Ce n'est pas une question politique.
Je crois que je peux parler au nom de beaucoup de secteurs différents de l'économie car parmi les adhérents de notre association nous comptons des compagnies publiques, des compagnies privées, des syndicats, des ministères gouvernementaux, des membres des professions libérales et des universitaires. Cette évolution intéressante de la composition de notre association, qui se reflète au niveau de notre conseil d'administration, est due au fait qu'au cours de nos dix années d'histoire nous avons toujours joué un rôle impartial, maintenu que l'actionnariat ne devait avantager aucune des parties et que sans collaboration ni effort collectif le résultat est nul pour tout le monde. Nous avons donc toujours maintenu cette position, et je crois qu'elle nous a acquis un grand respect qui s'est traduit par une augmentation de 500 p. 100 du nombre de nos adhérents depuis quatre ans.
Certains d'entre vous ne connaissent peut-être pas très bien ce concept car il reste relativement inconnu au Canada. Je devrais peut-être donc vous expliquer ce qu'on entend exactement par actionnariat. C'est un régime officiel adopté par la compagnie, avec tous les documents juridiques et les règlements sur les titres nécessaires, qui permet aux employés de devenir actionnaires de la compagnie pour laquelle ils travaillent. Au Canada, généralement les employés achètent des actions. Dans beaucoup d'autres pays, surtout aux États-Unis, ces actions sont données aux employés sous la forme d'avantages sociaux.
C'est un système utilisé parce qu'il comporte beaucoup d'incitations fiscales. Les recherches ont démontré que les résultats sont si bons au niveau de la productivité des compagnies concernées que le gouvernement continue de l'encourager bien que cela représente, sauf erreur, pour lui une perte budgétaire annuelle de l'ordre de 12 à 13 milliards de dollars. En revanche, le rapport net généré par l'actionnariat est d'environ 20 p. 100 sous forme de recettes fiscales supplémentaires.
Voilà, c'est ça. Mais ce que ce système permet n'est pas aussi évident. Il y beaucoup d'autres choses que ce système d'actionnariat permet de régler au Canada et je vais simplement vous en dresser brièvement la liste. Je crois que le plus connu de nos jours, ou tout au moins un de ceux qui fait le plus souvent la une des journaux, est celui de l'exode des cerveaux. Il y a beaucoup d'employés qui partent pour le Sud parce que les compagnies là-bas leur offrent plus d'argent.
Il est indubitable que travailler pour une compagnie qui fait de vous un actionnaire est assez séduisante. En conséquence, le secteur des technologies de pointe nous appuie à l'unanimité. Ils estiment que l'actionnariat et les options d'achat d'actions sont un des rares moyens que le Canada peut offrir pour rendre leur compagnie plus intéressante pour les employés.
Il y a aussi la question des revenus complémentaires au moment de la retraite. Il est indubitable que cet élément prendra de plus en plus d'importance. Lorsque les employés sont actionnaires de leur compagnie, les recherches montrent que la valeur de leur participation augmente tout comme la valeur d'une maison augmente. Ils auront donc moins besoin de l'aide du gouvernement quand ils pendront leur retraite et ils encaisseront leurs actions. Il est notoire que si on achète une maison c'est pour faire un placement et que la croissance de sa valeur vous permet de vous en sortir un peu mieux.
Je crois qu'on peut considérer l'achat d'une maison comme un investissement très passif comparé au fait de travailler dans une compagnie dont on détient des actions car, quand on possède un intérêt financier dans la compagnie pour laquelle on travaille, on a vraiment l'impression de pouvoir influer de manière très positive sur sa performance.
• 1820
Je crois qu'il y a un problème légèrement plus isotérique sur
le plan économique, à savoir celui de la concentration des capitaux
dans notre pays. Je n'entrerai pas dans les détails car nous
n'avons pas le temps mais la multiplication des actionnaires
entraîne une plus grande répartition de la propriété des capitaux
ce qui est très positif. Cela réduit également la disparité au
niveau des revenus que connaît notre pays.
Lorsque les employés achètent leurs actions, comme ils le font dans 99 p. 100 des cas au Canada, cela crée une source de capitaux propres pour les petites entreprises, capitaux auxquels il ne leur est pas facile d'accéder. Contrairement aux capitaux à risque, ce sont des capitaux patients et locaux. Cela signifie que ces capitaux de participation restent dans la région et attendent patiemment.
Il y a aussi à l'horizon un problème assez grave provoqué par l'évolution de la démographie. Il y a beaucoup d'entrepreneurs de la génération d'après-guerre sur le marché. Les dix ou vingt prochaines années verront une vague de compagnies qui fermeront boutique parce qu'elles ne pourront trouver acheteur pour leurs entreprises. Ils n'auront pas d'héritiers ou d'enfants prêts comme eux à se mettre les mains dans le cambouis pour leur entreprise.
Encourager l'actionnariat permet aux employés de racheter progressivement ces entreprises. Cela permet aux entrepreneurs de se dégager progressivement, de récupérer leurs investissements sans licencier.
L'autre phénomène que nous commençons à constater à une plus grande échelle, surtout dans le secteur des ressources en Colombie- Britannique, est la fermeture de filiales dont les propriétaires sont désormais étrangers. Leur achat par les employés est le moyen de sauver ces compagnies et ces emplois dont beaucoup sont encore économiquement viables.
La création d'emplois est également l'une des grandes priorités du gouvernement. L'étude montre que la majorité des compagnies par actionnariat crée trois fois plus de nouveaux emplois que leurs concurrentes. En fait, nous avons fait une étude en Colombie-Britannique sur les compagnies privées dont les employés sont actionnaires. Elle nous a montré que pour 56 p. 100 d'entre elles il y avait eu augmentation du nombre d'emplois depuis l'introduction du plan d'actionnariat et que pour les trois-quarts d'entre elles cette augmentation avait dépassé 20 p. 100. La valeur de plus de 80 p. 100 d'entre elles avait augmenté alors que seulement 8 p. 100 avait connu une chute de cette valeur.
La Bourse de Toronto a fait des enquêtes qui montrent que la performance économique des compagnies où l'actionnariat est conséquent devance largement leurs concurrentes dans pratiquement tous les domaines. Elle montre que les indices de société ouverte regroupant les compagnies par actionnariat aux États-Unis et en Grande-Bretagne l'emportent largement sur tous les autres indices principaux, y compris Standard & Poors, Dow Jones et l'indice britannique. Cela se mesure en nombre à deux chiffres.
Quant au soutien national, le Canada et à la traîne de beaucoup d'autres pays. Il est très en retard par rapport aux États-Unis où la loi régissant l'actionnariat a déjà plus de 25 ans. C'est une réalité dans toute l'Europe de l'Ouest. C'est aujourd'hui une réalité dans les lois de privatisation des anciens pays de l'Est comme la Pologne et la Hongrie. C'est le cas au Japon. C'est un outil de compétitivité très puissant qui n'entraîne pas de perdant; tout le monde y gagne.
Heureusement, au Canada il existe des mécanismes qui permettent l'actionnariat. Les REER peuvent être utilisés pour investir dans des actions de compagnies ouvertes ou privées, ce qui est une très bonne chose. Nous avons aussi les régimes de participation différée aux bénéfices qui peuvent être utilisés pour la même chose et qui peuvent même maintenant servir d'instrument d'emprunt. Nous avons ces programmes provinciaux.
Mais c'est ce coup de pouce qui va être nécessaire, parce que ce ne sont pas les employés qui prennent la décision d'introduire ces régimes d'actionnariat, ce sont les compagnies. On me pose souvent cette question tendancieuse: si c'est une si bonne chose, pourquoi faut-il encourager les compagnies? La vérité est qu'elles vivent pratiquement au jour le jour ou que leur horizon financier est limité et pour qu'elles s'intéressent à quelque chose de ce genre il leur faut un résultat immédiat dans leur bilan.
Ce que nous leur proposons c'est un crédit d'impôt. Pour commencer, nous proposons un crédit d'impôt de 10 millions de dollars. C'est une réserve qui serait disponible pour couvrir les dépenses des compagnies qui introduisent des plans d'actionnariat pour leurs employés, ce que nous considérons comme une proposition des plus raisonnables et des plus faciles à gérer. Ce n'est pas une grosse somme d'argent mais en Colombie-Britannique, cette année, la réserve de crédits d'impôt est de 1,2 million de dollars. Si vous extrapolez à l'ensemble du pays, c'est une expérience peu coûteuse que le gouvernement pourrait tenter.
• 1825
Nous suggérons également la nécessité d'encourager
financièrement les propriétaires de compagnies à s'intéresser à
l'idée d'un rachat de leur entreprise par leurs employés quand ils
décident de prendre leur retraite. Un report de l'impôt sur la
plus-value réalisée sur la vente de leurs actions aux employés, à
condition qu'ils l'investissent dans une autre participation
canadienne afin que l'argent reste dans l'économie, a été suggéré.
Il y a aussi les employés dont il faut tenir compte. C'est souvent quelque chose de tout nouveau pour eux et je crois que c'est la raison pour laquelle les provinces ont imaginé ces encouragements. Au niveau national on pourrait offrir aux employés un incitatif fiscal analogue aux crédits d'impôt pour les corporations à capital de risque de travailleurs. Ils pourraient donc choisir entre ce véhicule qui investit également dans des compagnies canadiennes ou investir directement dans leur propre compagnie.
L'autre problème est celui de l'accès à l'argent nécessaire pour acheter ces actions. La solution n'est pas simple. Nous proposons, entre autres, que les règlements, pas la loi, les règlements de la Loi sur les prêts aux petites entreprises soient modifiés pour créer une catégorie de prêts aux employés pour actionnariat. Il y a aussi eu quelques discussions entre Ressources humaines Canada et l'Ontario Workers Co-op Federation à propos d'un fonds de prêts de création d'emplois de 16,5 millions de dollars qui serait également idéal pour financer cet actionnariat.
Le dernier élément réellement nécessaire est une infrastructure de spécialistes de l'actionnariat chargés de conseiller et d'encourager les employés. Il faudra pour commencer former ces spécialistes, ce qui nous ramène à notre première recommandation. S'il doit y avoir un crédit d'impôt pour couvrir les dépenses, il s'ensuit que ces professionnels devront être éduqués et agréés.
Cette idée préparerait le terrain à un essor de l'actionnariat au Canada. Je suis étonnée du nombre d'entreprises qui s'adressent à l'association lorsqu'elles en entendent parler. Elles trouvent que c'est une idée lumineuse: «Pourquoi personne ne nous en a-t-il jamais parlé avant»?
Si vous ne pouvez accepter qu'une seule recommandation, je vous dirais de retenir celle-ci: un crédit d'impôt pour les frais de constitution d'un régime d'actionnariat des employés. Du point de vue stratégique, c'est cela qui a le plus d'effet.
Je sais que vous devez faire le tri entre de nombreuses possibilités de mesures d'encouragement à la création d'une nouvelle économie, mais je pense que le point de départ devrait être le partage de la propriété des entreprises.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, madame Markus.
Nous entendrons maintenant des représentants de Greenpeace à commencer par M. Steven Guilbeault, agent responsable de la campagne relative au climat et à l'énergie. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Steven Guilbeault (agent responsable, Campagne relative au climat et à l'énergie, Greenpeace): Merci, monsieur le président.
Greenpeace tient à exprimer sa reconnaissance au comité de l'avoir invitée à comparaître ce soir.
Je suis accompagné par M. Richard Legault, de Hélimax, et de M. Raye Thomas, de New Sun Energy, qui exposeront tous les deux brièvement le point de vue de leur industrie au sujet de la proposition de Greenpeace pour le budget de 1999.
Je m'appelle Steven Guilbeault. J'appartiens à Greenpeace depuis un an environ et je m'occupe de la question des changements climatiques depuis 1995. J'ai assisté à la première conférence des parties à Berlin en 1995. J'étais aussi à Kyoto l'an dernier et j'ai assisté à diverses rencontres internationales.
[Français]
Nous ferons notre présentation dans les deux langues dans l'intérêt de tous les participants et participantes.
[Traduction]
Pourquoi investir dans les énergies renouvelables? L'énergie éolienne et solaire sont celles qui connaissent le taux de croissance le plus élevé: l'an dernier, le taux de croissance de l'énergie éolienne a été de 25 p. 100 par rapport à 1996 et pour l'énergie solaire, le chiffre était de 16 p. 100. Si vous comparez ces chiffres au charbon, au pétrole ou au gaz, le taux de croissance était dans chaque cas inférieur à 4,5 p. 100 en 1997, par rapport à 1996. Les énergies renouvelables créent de l'emploi et de nouvelles industries au pays et nous aident à atteindre notre objectif de Kyoto. Elles permettent aussi de réduire la pollution atmosphérique et les décès prématurés. D'après une étude réalisée par la Fondation David Suzuki, 16 000 personnes disparaissent prématurément au Canada chaque année en raison de la pollution atmosphérique.
[Français]
Notre première proposition porte sur un programme d'achat d'énergie verte qui est basé sur un programme existant en Alberta, où le ministère des Ressources naturelles et le ministère de l'Environnement achètent leur électricité de sources renouvelables, principalement l'éolien et la biomasse. Je laisserai M. Legault vous présenter plus en détail ce que nous suggérons à ce niveau-là, mais j'aimerais simplement mentionner que lorsqu'on parle d'«externalités», on parle d'un coût non payé associé à une activité, généralement une activité industrielle, comme par exemple les coûts sociaux de la pollution atmosphérique. On a parlé de 16 000 morts tout à l'heure.
• 1830
En utilisant différentes méthodes qui
sont reconnues dans la communauté scientifique,
on peut arriver à
chiffrer le coût de ces «externalités». Dans le cas de
notre première proposition, qui porte sur le programme
d'achat d'énergie verte, on parle
d'économies, pour l'ensemble de la société, de l'ordre de
quelque 5,5 millions de dollars par année en ce qui concerne
la réduction des émissions d'oxydes
d'azote, et d'économies d'un peu plus
de 34 millions de dollars par année
en ce qui concerne le dioxyde de soufre.
[Traduction]
Je vais maintenant passer à la deuxième proposition, le programme d'installation de 100 000 systèmes solaires photovoltaïques.
Comme certains d'entre vous le savent peut-être déjà, le Canada est le seul grand pays industrialisé à ne pas avoir de programme d'installation de panneaux solaires sur les toits des habitations. Les États-Unis, quant à eux, ont annoncé un programme prévoyant l'installation d'un million de panneaux solaires d'ici à l'an 2007. La communauté européenne a également annoncé un programme du même ordre d'ici à l'an 2007. Le Japon a déjà installé 20 000 systèmes photovoltaïques et vise en installer 30 000 d'ici à l'an 2000. Le ministère de l'Énergie des États-Unis a placé une commande de 500 000 systèmes photovoltaïques et les ventes aux États-Unis ont atteint l'an dernier 850 millions de dollars, ce qui se solde par 3 800 emplois créés pour chaque tranche de 100 millions de dollars de cellules photovoltaïques.
J'aimerais maintenant citer M. John Browne, président- directeur général de la British Petroleum, qui a déclaré récemment:
Non seulement la British Petroleum parle du solaire mais elle est aussi l'un des plus gros fabricants de cellules photovoltaïques au monde.
Quant aux avantages économiques d'un programme comme celui-là,
[Français]
Greenpeace demande qu'un crédit d'impôt de 25 p. 100 soit appliqué à l'achat d'un système d'un kilowatt—ou, si vous préférez, 1 000 watts—, ce qui représente à peu près le quart de la consommation d'électricité d'un ménage moyen au Canada. Puisque le coût d'un système d'un kilowatt est de 12 000 $ et qu'on propose d'appliquer un crédit de 25 p. 100, comme on l'a proposé aux États-Unis, on parle d'un crédit d'impôt pouvant aller jusqu'à 3 000 $ au niveau résidentiel. Cela représenterait des investissements de 300 millions de dollars pendant une période de 11 ans, de 1999 à 2010, soit quelque 27 millions de dollars par année. Seulement au niveau de la TPS, le gouvernement pourrait récolter 21 millions de dollars d'ici 2010. De plus, on créerait au moins 1 800 emplois au Canada et on produirait à peu près 100 mégawatts d'énergie solaire à la fin du programme.
Encore une fois, je reviens à la question des «externalités». En termes de kilogrammes pour les différentes composantes, on parle de plus de 200 000 kilogrammes d'oxyde d'azote par année, de 54 000 kilogrammes de dioxyde de soufre par année et de presque 128 millions de kilogrammes de CO2. Lorsque je calcule les économies annuelles, j'exclus le CO2 simplement parce que le débat à son sujet est encore très vivant et qu'on ne s'est pas entendu dans la communauté sur un coût, que ce soit par tonne de CO2 ou par kilogramme. En excluant le CO2, on parle de bénéfices par année ou de coûts évités par année de près d'un demi-million de dollars.
Je passe à notre dernière proposition, qui porte sur la prolongation d'un programme déjà existant qui s'appelle le programme PENSER,
[Traduction]
ou Programme d'encouragement au système d'énergie renouvelable (PENSER). Ce programme de Ressources naturelles Canada accorde un crédit d'impôt de 25 p. 100 pour les applications commerciales et industrielles que nous appelons les systèmes solaires passifs, qui se distinguent du système photovoltaïque, qui crée de l'énergie en captant l'énergie du solaire. Par système passif, on parle davantage de chauffe eau solaire, d'énergie géothermique. Ce programme existe depuis plusieurs années déjà.
Ressources naturelles Canada a examiné le potentiel d'élargissement du programme au secteur domiciliaire, qui n'est pas couvert actuellement. Pour ce qui est des ventes, on prévoit 150 000 unités d'ici à l'an 2010, un investissement de 75 millions de dollars d'ici à 2010, soit 7 millions par an. Cela représente 21 millions de dollars en TPS d'ici à l'an 2010.
• 1835
Les économies d'énergie de ce projet se chiffrent à un demi-
milliard de dollars.
J'aimerais maintenant céder la parole à M. Richard Legault, de Hélimax.
Le président: Un instant. Vous entendez actuellement la sonnerie qui nous appelle au vote. Nous avons sept ou huit minutes. Nous allons entendre vos deux exposés, après quoi nous reviendrons pour entendre les trois autres avant de passer aux questions.
M. Steven Guilbeault: Avant que Richard continue, j'aimerais que notre exposé soit annexé au rapport final du comité.
Le président: Tout ce que vous dites est pris en compte dans la préparation du rapport. C'est ainsi que cela se fait.
M. Steven Guilbeault: Je croyais que pour que notre exposé soit annexé au rapport final du comité, je devais en faire la demande expresse.
Le président: Non.
M. Steven Guilbeault: D'accord. Merci.
M. Ken Epp: C'est que nous avons une pile de documents qui monte jusque-là.
Le président: La teneur de votre message est plus importante que le fait que votre rapport soit annexé ou pas. Soyez assurés que nous écoutons attentivement ce que vous avez à nous dire.
M. Richard Legault (membre, Greenpeace): Bonsoir, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.
Quand M. Guilbeault m'a invité à venir représenter ici l'industrie éolienne, j'ai été très heureux d'accepter son invitation, parce que ce secteur atteint aujourd'hui sa maturité. Je vais donc vous présenter quelques chiffres et vous dire quelques mots de ce que je sais de l'industrie éolienne.
En un mot, Greenpeace propose que tous les bâtiments fédéraux s'alimentent à l'énergie verte: 50 p. 100 de la consommation au début, jusqu'à 100 p. 100, à raison de 10 p. 100 de plus par année sur cinq ans.
Nous allons maintenant vous présenter des acétates.
L'énergie verte désigne l'énergie éolienne, solaire et de la biomasse, même si cela peut comprendre d'autres types d'énergie. On répartirait l'achat d'énergie verte entre toutes les provinces du pays. M. Guilbeault a dit tout à l'heure qu'il y a en Alberta un projet pilote destiné à favoriser l'achat d'énergie verte. Cela a donné naissance à quelques éoliennes et cela fait aussi partie d'un petit projet hydroélectrique ainsi que d'un projet d'énergie de la biomasse.
Le deuxième acétate donne quelques chiffres sur les bâtiments fédéraux dans l'ensemble du pays. Il y a 51 514 bâtiments fédéraux qui occupent une surface de 22 millions de mètres carrés. La consommation annuelle de ces bâtiments dépasse 3,6 milliards de kilowattheures. Il est difficile de convertir ce chiffre en quelque chose de concret, mais cela représente 340 millions de dollars d'électricité par an. Ces chiffres proviennent du gouvernement fédéral. J'ai d'ailleurs été étonné de constater que le prix moyen est de 9c. le kilowattheure, ce qui est en fait très élevé.
[Français]
Si elle provenait en totalité de l'énergie éolienne, cette consommation annuelle représenterait 1 875 mégawatts de puissance installée, ou l'équivalent de 2 500 éoliennes de taille industrielle, soit des éoliennes de 750 kilowatts, lesquelles sont les éoliennes les plus puissantes communément utilisées et installées sur le marché actuellement. Ces installations nécessiteraient un investissement de 3 milliards de dollars, ce qui est une somme substantielle.
[Traduction]
Pour ce qui est des avantages, si le gouvernement fédéral achetait toute son énergie sous forme d'énergie verte ou d'énergie renouvelable, le programme représenterait entre 15 000 et 20 000 années-personnes pour la période de construction et 950 emplois à plein temps pour l'exploitation des éoliennes. Il est certain que cela enverrait un signal à l'industrie.
Il s'agit d'ailleurs d'un secteur qui connaît une croissance très rapide partout dans le monde. Cela commence maintenant au Canada, mais nous avons un peu de rattrapage à faire. La croissance ici est de 20 p. 100 par année. C'est le cas depuis les trois ou quatre dernières années, et on s'attend à ce que cela se poursuive dans l'avenir. C'est une technologie de pointe, évidemment.
Pour l'environnement, cela représente une réduction du CO2. Je siège à la table de consultation sur l'électricité, et notre mandat est de proposer des solutions au gouvernement fédéral pour faire suite au Sommet de Kyoto. Je peux vous dire qu'une réduction de 3,6 millions de tonnes de CO2 est quelque chose de considérable; il y a aussi une réduction de 6 600 tonnes de NOx et 16 000 tonnes de SO2.
Toujours au sujet des avantages, il y a un projet de 100 mégawatts en construction actuellement dans la région de la baie de Gaspé, au Québec. Cela a donné naissance à une usine de montage des turbines les plus modernes du monde à Boucherville, en banlieue de Montréal. Il y a aussi une usine de fabrication des aubes de turbines ici en Ontario.
[Français]
Il est difficile d'évaluer les coûts d'une telle proposition en raison des divergences d'opinion sur le prix de revient d'un kilowatt-heure éolien. Mais dans le cas d'un programme majeur d'achat d'énergie verte, je crois que le coût de l'énergie éolienne seraient inférieurs à ce que le gouvernement fédéral débourse actuellement pour son énergie. En faisant cet exercice, je me suis rendu compte des sommes que débourse actuellement le fédéral et j'ai évalué le coût d'un cent additionnel par kilowatt-heure. Cela représente 300 millions de dollars sur une période de 10 ans, 25 500 personnes-année, moins de 12 000 $ par personne-année et un coût nul après 10 ans, la filière éolienne évoluant à une vitesse assez impressionnante en termes de réduction du prix de revient. Nous croyons donc qu'il s'agit d'un programme qui comporte un coût très limité, si coût il y a, lorsqu'on tient compte de toutes les «externalités».
En résumé, l'énergie éolienne évolue très rapidement. Je vous invite à visiter le Parc de la Gaspésie, l'un des plus importants au monde. Comme il vous sera probablement difficile de vous y rendre, je vous encourage à écouter les reportages ou à lire des articles à ce sujet.
Merci beaucoup.
[Traduction]
Merci beaucoup.
Le président: Merci.
Monsieur Thomas, vous disposez d'environ une minute et demie pour faire vos observations.
M. Raye E. Thomas (membre, Greenpeace): Je suis ici pour appuyer le programme des 100 000 systèmes solaires photovoltaïques. L'effet de ce programme se fera surtout sentir par la création d'industries. À l'heure actuelle, vu le nombre d'emplois créés dans le monde, on estime que d'ici à 2010, 750 000 personnes travailleront dans le secteur des cellules photovoltaïques. Au Canada cette année, 201 personnes travaillent dans ce secteur. Le taux de croissance est de 30 à 40 p. 100 par année, et non 16 p. 100, comme l'a dit Steven. Il n'y a pas de grand fabricant au pays. Toutefois, il s'agit d'un secteur d'exportation fondé sur le savoir.
Par exemple, 90 p. 100 du chiffre d'affaires de mon entreprise est constitué d'exportations. Nous fournissons des usines de production de cellules photovoltaïques à l'Allemagne, par exemple, actuellement, ainsi qu'aux Pays-Bas et à divers pays en développement. Nous voudrions voir la même chose ici au pays.
L'implantation de programmes de ce genre créerait ici un marché qui suffirait sans doute à mettre en service une usine de 10 mégawatts d'ici un an. Une usine comme celle-là donne de l'emploi à une centaine de personnes. En 10 ans, l'industrie pourrait créer 1 600 emplois directs et entre 5 000 et 10 000 emplois indirects.
• 1845
Nous estimons que ce programme est justifié. Nous sommes en
vive concurrence avec d'autres pays dotés de programmes axés sur la
création d'emplois dans le but de dominer le secteur à l'échelle
mondiale. Nous n'avons pas notre juste part du marché, mais nous
pourrions la conquérir. Si l'on agit maintenant et si l'État
canadien défend l'industrie, nous avons de bonnes chances d'être un
leader mondial.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Thomas. Comme vous le savez, il y aura ensuite une séance de questions. Peut-être pourrez-vous à ce moment-là développer votre pensée. Il faut maintenant suspendre la séance parce que nous sommes appelés au vote.
Le président: La séance reprend. Je m'excuse encore une fois du retard. Malheureusement, il nous a fallu voter sept fois ce soir.
Nous entendrons maintenant Mme Nickie Cassidy, représentante de la Société canadienne de la sclérose en plaques. Bienvenue à vous.
Mme Nickie Cassidy (bénévole de l'action sociale nationale, Société canadienne de la sclérose en plaques): Merci, monsieur le président.
Comme vous l'avez dit, je m'appelle Nickie Cassidy et je représente la Société canadienne de la sclérose en plaques. Je soufre moi-même de la sclérose en plaques. Je serai brève, et je vais vous donner les faits saillants de notre mémoire.
La sclérose en plaques est l'affection la plus répandue du système nerveux central qui touche les jeunes adultes canadiens. Ses manifestations possibles sont les troubles de la vision, l'engourdissement, le déséquilibre, une fatigue extrême, des tremblements, et même la paralysie. Le Canada a l'un des taux de prévalence les plus élevés du monde.
Je suis ici pour vous exhorter à envisager d'exprimer votre appui net en faveur de dépenses stratégiques pour, premièrement, offrir de l'aide financière aux Canadiens qui ont des frais de médicaments exorbitants; deuxièmement, adopter un programme d'allégement fiscal plus juste pour les handicapés; troisièmement, améliorer l'aide aux invalides; quatrièmement, améliorer le financement de la recherche médicale; et cinquièmement, améliorer la capacité du secteur du bénévolat à répondre aux besoins de santé et de services sociaux des Canadiens vulnérables comme ceux qui soufrent de sclérose en plaques.
• 1935
En ce qui concerne les coûts exorbitants des médicaments, je
précise que nous ne demandons pas d'assurance-médicaments. Nous
voulons plutôt que le gouvernement fédéral soit un chef de file et
offre un programme juste et global de protection des particuliers
et des familles contre les coûts exorbitants des médicaments.
Par exemple, au cours des trois dernières années, l'arrivée de nouveaux médicaments contre la sclérose en plaques, qui ont reçu l'approbation du gouvernement fédéral, signifie que pour la première fois dans l'histoire du pays il existe des médicaments capables de ralentir la progression de la maladie et de l'invalidité. La sclérose en plaques peut maintenant être traitée, mais comme cela coûte 17 000 $ par année en moyenne, la plupart des gens ne peuvent pas se permettre les médicaments.
La Société de la sclérose en plaques s'est employée à réclamer l'inclusion de ces médicaments dans les programmes provinciaux de remboursement des frais des médicaments. Dans neuf provinces sur dix, nous avons réussi. Toutefois, le niveau de remboursement et les critères d'accès varient d'une province à l'autre. Autrement dit, l'accès à ces pharmacothérapies dépend en grande partie de l'endroit où on habite. C'est illogique. Nous prions instamment le comité de songer à recommander au gouvernement fédéral de jouer un rôle de chef de file pour qu'il offre un programme juste et global qui protège les Canadiens contre le coût exorbitant des médicaments.
Un programme d'allégement fiscal plus juste. Dans le budget de 1997, on a annoncé un certain nombre d'initiatives qui reconnaissent le coût de l'invalidité et dont le but était de réduire les obstacles à l'emploi que rencontrent les personnes handicapées. Ces propositions faisaient partie du rapport du groupe de travail, «La volonté d'agir», et nous prions le comité de réclamer la mise en oeuvre de toutes les recommandations du groupe de travail. En particulier, nous sommes en faveur de révisions importantes de la Loi de l'impôt sur le revenu pour que soient mieux reconnus les coûts extraordinaires de l'invalidité.
La Loi de l'impôt sur le revenu prévoit actuellement deux mécanismes: le crédit d'impôt pour frais médicaux et le crédit d'impôt pour handicapés. Toutefois, l'application des crédits fait qu'il est difficile pour ceux qui soufrent de sclérose en plaques d'être traités sur un pied d'égalité. En particulier, la définition de «handicap» qui ouvre droit au crédit d'impôt est beaucoup trop limitative. Le fait d'exiger que la maladie soit de longue durée et grave exclut quantité de gens dont la maladie se manifeste par poussées, comme c'est le cas de la sclérose en plaques. Nous prions le comité qu'il favorise des changements à la définition de handicap, et s'inspire de celle approuvée récemment dans la loi ontarienne relative aux programmes de soutien aux handicapés (1997).
De plus, les deux crédits d'impôt ne viennent en aide qu'à ceux des membres de leur famille qui ont un revenu imposable. Nous invitons le comité à appuyer la création d'un crédit d'impôt remboursable pour frais relatifs à un handicap qui combine les deux crédits actuels; nous l'invitons également à porter de 17 à 29 p. 100 le taux d'impôt employé pour calculer le crédit à l'intention des bénéficiaires à faible revenu.
Le soutien à ceux qui ne peuvent pas travailler. Beaucoup de personnes atteintes par la sclérose en plaques estiment que les politiques sévères du RPC les laissent sans assurance-invalidité. En 1996, les mesures législatives sont venues resserrer l'administration des prestations d'invalidité. Depuis, nous avons eu des échos de centaines de Canadiens atteints de sclérose en plaques, de partout au pays, qui ont du mal à avoir droit aux prestations d'invalidité du RPC. Il est toujours difficile de convaincre les autorités du RPC que les manifestations de maladies, comme la fatigue, sont effectivement graves et prolongées. Avec notre aide, beaucoup—et je peux presque dire la majorité d'entre eux—ont gagné l'appel, moyennant toutefois un coût personnel élevé. Il n'est pas rare d'avoir à attendre près de deux ans. Certains ont dû hypothéquer leur maison et sont presque morts en attendant leurs prestations.
Nous sommes aussi préoccupés par les nouveaux critères qui exigent des personnes qu'elles aient cotisé au régime pendant quatre des six dernières années. Des personnes atteintes de maladies cycliques comme la sclérose en plaques ont du mal à travailler à plein temps ou pendant une longue période. Comme les compagnies d'assurance refusent souvent, sinon toujours, une police privée aux malades de la sclérose en plaques, ces travailleurs se retrouvent sans la moindre assurance-invalidité. La Société de la sclérose en plaques invite le comité à recommander au gouvernement qu'il rétablisse les critères antérieurs, qui exigeaient des cotisations pendant deux des trois dernières années ou cinq des dix dernières années.
Nous appuyons le Groupe de travail fédéral concernant les personnes handicapées, qui réclame l'instauration d'un programme national de soutien du revenu pour les personnes handicapées.
• 1940
En ce qui concerne le financement de la recherche, les niveaux
des dépenses fédérales actuelles pour la recherche en matière de
santé sont dangereusement bas. Il se produit un nouvel exode des
cerveaux au pays. Nous perdons nos chercheurs médicaux au profit
des États-Unis et d'autres pays. Sur les 76 milliards de dollars
que coûtent actuellement les soins médicaux au pays, à peine
0,3 p. 100 sont consacrés à la recherche. Cela revient à seulement
10,45 $ par habitant au Canada, par rapport à 49,49 $ aux États-
Unis. Même si l'on augmentait ce chiffre de 1 p. 100 seulement,
cela ferait une différence remarquable. En investissant dans la
recherche médicale, le Canada gagnerait sur deux tableaux: une
meilleure santé et une meilleure production de l'économie.
Nous sommes en faveur de l'idée de créer un institut canadien de recherche sur la santé qui centraliserait la recherche médicale au pays. Ce serait un grand pas en avant. Mise en oeuvre comme il se doit, cette idée améliorerait la recherche médicale au pays.
Augmenter la capacité du secteur des bénévoles de répondre aux besoins de santé et de services sociaux. La Société canadienne de la sclérose en plaques a pour mission d'offrir des services aux personnes atteintes de la maladie et de financer la recherche médicale dans ce domaine. Jusqu'à présent, le succès de nos efforts de souscription nous a permis de le faire. Toutefois, les statistiques montrent que le don de charité moyen des Canadiens est inférieur à 200 $. La majorité de nos fonds proviennent de personnes qui donnent entre 25 et 50 $. Le régime actuel de stimulants fiscaux offre très peu d'allégement fiscal à ce groupe, ce qui incite peu le donateur moyen à faire des dons. Cet encouragement devrait être valorisé.
De plus, on fait davantage appel à nos services et à nos programmes, et c'est la raison pour laquelle il nous est plus difficile de remplir nos engagements en matière de recherche. La législation fiscale veille à ce que des sommes minimes soient consacrées à l'administration, mais à cause de ces pressions auxquelles nous sommes soumis, la structure du secteur à but non lucratif comporte des facteurs systémiques d'inefficacité, surtout sur le plan technologique. Il faudrait à notre avis rétablir le financement des coûts de base, comme la gestion de la technologie.
Enfin, pour favoriser l'innovation, l'efficience et le leadership du secteur à but non lucratif, nous invitons le comité à soutenir la création d'un fonds de technologie, éventuellement en collaboration avec de grandes entreprises, auquel des organismes de charité pourraient présenter des demandes.
Dans notre mémoire, nous terminons en demandant au comité d'examiner une liste de dix mesures destinées à répondre aux besoins des personnes handicapées. Je vais vous la lire rapidement. Jouer un rôle de chef de file et offrir un programme juste et global de protection des particuliers et des familles contre le coût exorbitant des médicaments; appuyer la recommandation du Groupe de travail fédéral concernant les personnes handicapées en faveur de la création d'un crédit d'impôt renouvelable pour frais relatifs à un handicap qui remplacerait le crédit d'impôt pour frais médicaux et le crédit d'impôt pour handicapés et pour porter de 17 à 29 p. 100 le taux d'impôt employé pour calculer le crédit à l'intention des bénéficiaires à faible revenu; modifier la définition de «handicap» et l'administration des prestations d'invalidité du RPC pour veiller à ce que les invalides fassent l'objet d'une évaluation rapide et équitable; restaurer les critères d'admissibilité antérieurs pour les prestations d'invalidité du RPC, c'est-à-dire que les particulier aient cotisé pendant deux des trois dernières années ou cinq des dix dernières années; appuyer la recommandation du Groupe de travail fédéral concernant les personnes handicapées qui invite le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces, à veiller à ce qu'un régime adéquat de soutien du revenu pour handicapés soit en place et que l'on songe sérieusement à passer à un programme d'assurance- invalidité qui couvre tous les citoyens; porter à 1 p. 100 des 76 milliards de dépenses médicales annuelles le niveau du financement de la recherche médicale au pays; appuyer l'idée d'établir un institut canadien de recherche sur la santé afin de créer une organisation centrale de recherche médicale au pays; valoriser les encouragements fiscaux destinés aux donateurs à revenu modeste; investir dans l'infrastructure du secteur du bénévolat canadien; et, enfin, majorer le financement des organisations de bénévoles qui assurent la prestation de programmes et de services médicaux.
Je voudrais conclure en vous demandant, au moment où vous êtes appelés à décider de l'affectation du modeste excédent budgétaire de cette année, de songer à mettre en oeuvre des initiatives financières ciblées qui profiteront aux personnes atteintes de sclérose en plaques et à d'autres, touchées particulièrement durement par ce qui a été, par habitant, une baisse de 20 p. 100 des dépenses de programme depuis 1992.
Le président: Merci beaucoup, madame Cassidy.
Nous entendrons maintenant le doyen de la faculté de médecine et d'art dentaire de l'Université Western Ontario, le Dr Robert McMurtry.
Dr Robert McMurtry (faculté de médecine et d'art dentaire, Université Western Ontario): Merci beaucoup, monsieur le président.
Vous avez entendu ce soir une série extraordinaire d'exposés qui vont dans le droit fil de la position que je souhaite exprimer devant le comité. J'y ferai référence tout au long de mon exposé. J'essaierai d'être bref.
Je suis ici pour discuter de recherche médicale en général. Je suis ici pour parler de trois types de recherche médicale qui transformeraient la vie des Canadiens, le système des soins de santé ainsi que notre bien-être et notre avenir économiques. Nous sommes à la croisée des chemins: des décisions doivent être prises au cours des prochains mois. Sous trois rubriques, je parlerai donc de la santé des Canadiens, de l'importance de l'évaluation dans le secteur de la santé et de l'énorme importance de la recherche fondamentale.
Pour ce qui est de la santé des Canadiens, pour moi, il n'est pas sensé, vu l'infrastructure dont le pays s'est déjà doté dans au moins seize centres d'un océan à l'autre - il y en a sans doute vingt-deux - de ne pas en tirer profit pour obliger chacun de ces centres à s'occuper de la santé des populations.
La santé des populations signifie mettre le doigt sur le pouls de la nation. Il y a tant de choses qui vont mal et qui menacent notre population. Cela comprend ce qui arrive aux enfants. De plus en plus d'enfants vivent dans la pauvreté. Vous avez entendu des exposés éloquents sur l'importance énorme des interventions dans la petite enfance. Le témoignage de la Fédération canadienne des enseignantes et enseignants est très convaincant. De fait, l'investissement dans les deux premières années d'existence est l'un des plus importants que l'État puisse faire.
De plus, l'écart croissant de la répartition de la richesse cause aussi des problèmes. Cela aussi a des effets négatifs sur la santé. Les facteurs qui influent sur la santé en souffrent.
Troisièmement, vous avez entendu un exposé très important de Greenpeace. L'organisation a parlé de la dégradation de la qualité de l'air. On peut affirmer que les systèmes qui assurent notre existence au Canada et sur la planète - l'eau, l'air et la terre elle-même - sont en butte à des attaques.
La question qui se pose est de savoir qui mesure et suit ce phénomène. Cela fait peur, parce que nous sommes loin d'avoir la réponse. Mais ce n'est pas par manque de connaissances ou de données. Ce qui nous manque, c'est un dépôt ou une organisation.
Il y a des précédents à cela. Je peux vous les énumérer si vous voulez poser la question. Il faut absolument donner ce mandat à quelque chose comme les instituts canadiens de recherche sur la santé dans la section sur la santé des populations. Il faut absolument un mandat qui suivra la santé et le bien-être dans chacune des régions en collaboration les unes avec les autres et avec une organisation comme l'Institut canadien d'information sur la santé.
Actuellement, nous laissons l'occasion nous échapper. Ce que l'on vous a dit dans ces exposés à propos de l'air est très vrai. Le Sud de l'Ontario a la triste distinction d'être le leader nord- américain en matière d'ozone de la basse atmosphère. On y trouve également une incidence particulièrement élevée d'asthme et d'hospitalisation de personnes souffrant de maladies pulmonaires et d'autres problèmes connexes.
Il y a d'autres questions environnementales. Vous venez d'entendre parler de la sclérose en plaques. Pourquoi l'incidence des maladies neurodégénératives est-elle à la hausse même après ajustement selon l'âge? Nous ne le savons pas. Pourquoi les Canadiens sont-ils atteints si souvent de la sclérose en plaques, qui est la maladie neurodégénérative la plus courante? Nous ne le savons pas.
Nous pourrions, et nous devrions, faire de plus grands efforts pour suivre ces maladies. Que ferons-nous pour contrer des maladies infectieuses et les agents pathogènes qui ressurgissent? Nous ne le savons pas. Faute de profil de la santé de la population préparé par un organisme tel que l'institut canadien de recherche sur la santé, nous resterons dans l'ignorance plutôt que d'être un modèle international. En bref, la santé de la population est d'une importance primordiale.
Je passe maintenant au deuxième des trois grands éléments des recherches qui me concernent, c'est-à-dire l'évaluation dans les soins de santé.
• 1950
Il y a plusieurs années, Judith Maxwell et le Conseil
économique du Canada—qui depuis a payé sa dette à la nature—ont
mené une étude très importante. Son travail continue en
collaboration avec l'Université d'Ottawa et l'Université Queen's.
Selon cette étude, l'utilisation des meilleures pratiques de
gestion pourrait faire économiser jusqu'à 7 milliards de dollars
par année.
Il faut se poser la question suivante: pourquoi la recherche évaluative n'est-elle pas un coproduit des soins donnés au patient? On a entendu parler des bulletins pour les hôpitaux. Il faut aller bien plus loin que cela. Ici encore, il y a un précédent. C'est possible, et les mécanismes sont en place, mais si on avait un principe central d'organisation, tel que les instituts canadiens de recherche sur la santé, on serait certain que les fonds ont été dépensés sagement et qu'il ne s'agissait pas d'un coût d'opportunité. On serait confiant que, en se développant à l'avenir, cet investissement que nous faisions était bien fondé.
Vous avez entendu Nickie Cassidy parler de l'investissement de 0,3 p. 100. Ce 0,3 p. 100 de 75 milliards de dollars équivaut à nos dépenses actuelles. Dans ce document, je lis que les États-Unis envisagent d'augmenter leurs investissements dans la recherche. Ils sont consternés parce que les fonds dépensés par les instituts nationaux de la santé équivalent aux dépenses de seulement 10 jours dans le réseau de la santé. Au Canada, nous ne dépensons pas l'équivalent d'un jour. Nous ne sommes même pas dans les rangs des autres pays, ce qui est extraordinaire.
Alors, pour quoi dépensons-nous, pourquoi dépensons-nous, et est-ce qu'il faut parler d'un coût d'opportunité? Les sciences évaluatives dans le domaine de la santé sont essentielles pour dépenser plus sagement à l'avenir et pour éviter de répéter les erreurs du passé. Nous avons l'occasion d'utiliser les meilleures pratiques et de réaliser des économies. Nous avons l'occasion d'utiliser une médecine fondée sur l'expérience clinique d'une façon nouvelle, tout en conservant les soins axés sur la personne, afin que chaque client reçoive un traitement individuel.
La troisième et dernière partie de mes observations sur la recherche concerne la recherche fondamentale. Il y a de très tristes histoires reliées à l'exode des cerveaux, et vous les avez entendues à maintes reprises d'autres témoins ayant des points de vue différents. Je peux vous raconter cinq histoires qui datent de l'an passé.
Il y a en ce biochimiste qui a accepté un emploi à Hong Kong parce que les ressources disponibles là-bas étaient quatre fois plus grandes que celles qu'il y avait ici. Je pourrais vous raconter l'histoire de l'oncologue qui vient de partir pour le Sud- Est des États-Unis pour des raisons de financement semblables, et surtout parce qu'il voulait poursuivre ses recherches scientifiques. Je pourrais vous raconter l'histoire d'un chirurgien transplantologue qui est parti à Saint-Louis et d'un neurochirurgien qui est parti à Detroit. Leurs histoires ont été répétées et racontées de nouveau. Nous venons de perdre un pharmacologue et un toxicologue—des domaines très importants—qui sont partis pour Pittsburg. Combien de fois faudrait-il répéter ces histoires dans tous les coins du Canada pour se réveiller et offrir des perspectives intéressantes à nos jeunes chercheurs? Nous sommes simplement non concurrentiels.
Qu'est-ce qu'il faut pour nous réveiller? Qui nous donnera les réponses aux différentes questions qui sont posées ce soir, que ce soit par Greenpeace ou par la Société de la sclérose en plaques?
Nous laissons passer des occasions. Nos jeunes les plus doués et les plus intelligents quittent l'équipe canadienne et se joignent à nos concurrents. Il faut se demander pourquoi.
J'aimerais conclure mes observations sur la recherche fondamentale en vous disant qu'elle est souvent considérée comme subsidiaire plutôt que comme essentielle. Je peux vous dire sans crainte de contradiction qu'il n'existe pas de programme complexe de soins tertiaires ou quaternaires qui n'est pas tributaire de la recherche. Cela n'existe pas. Les missions de la recherche, de l'éducation et des soins sont entrelacées, et ce serait une erreur monumentale que de ne pas investir dans chacune. Ce sont les soins de santé de demain qui sont en jeu.
Dans le domaine de la recherche fondamentale dans les soins de l'avenir, dans les domaines de la santé de la population, quels secteurs devrait-on cibler, quels besoins devrait-on souligner? C'est ce qu'on veut dire par une analyse axée sur les besoins. Quand on parle des sciences évaluatives, on parle d'éviter le coût d'opportunité dans les secteurs que nous avons créés par le passé.
Donc, en bout de ligne, nous parlons de l'avenir. Il faut investir maintenant, ou nous serons condamnés à raconter de nouveau l'histoire de l'Arrow, l'aéronef le plus sophistiqué au monde, que nous avons démantelé. Nous sommes en train de démanteler le meilleur système de santé du monde. Allez-vous passer aux actes? Est-ce que ce gouvernement passera aux actes et tentera de faire une différence? Il a un effet si large et il touche à chaque élément de la société. Il ne s'agit pas de perdre de l'argent en le dépensant; ces fonds créent des emplois parce que les emplois dans les sciences et dans la recherche sont concurrentiels avec ceux des autres secteurs; il est question en effet de 30 000 emplois.
• 1955
Ces investissements peuvent créer de jeunes entreprises ayant
des employés-actionnaires, dont on a parlé plus tôt. Ils peuvent
appuyer le développement. Donc la question qu'il faut se poser, en
fin de compte, c'est la suivante: jusqu'à quel point croyons-nous
dans l'avenir du Canada?
Merci.
Le président: Merci beaucoup, docteur McMurtry.
Nous passons maintenant à Vision mondiale Canada. Mme Linda Tripp n'est pas ici?
Mme Kathy Vandergrift (agente principale de politique, Vision mondiale Canada): Je viens remplacer Linda Tripp, la vice- présidente des relations gouvernementales, parce qu'elle travaille à la coordination des efforts de Vision mondiale Canada pour répondre à la crise en Amérique centrale. Elle vous transmet ses excuses.
Le président: Soyez la bienvenue, madame Vandergrift.
Mme Kathy Vandergrift: Merci. Vision mondiale Canada apprécie la décision qui a été prise dans le budget de l'an passé de réduire les très grandes compressions imposées à l'aide au développement international et de renouveler l'engagement du Canada d'atteindre l'objectif de 0,7 p. 100 du PIB afin d'aider les pays les plus pauvres. Pourtant, si nous envisageons sérieusement de respecter l'objectif de 0,7 p. 100, le budget de 1999 doit inclure une augmentation réelle de l'aide au développement, qui est actuellement à un niveau de 0,27 p. 100—le plus bas niveau depuis 30 ans. C'est le plus bas niveau depuis que les pays ont adopté l'objectif de 0,7 p. 100.
Cela peut intéresser certains membres du comité de savoir que d'autres pays ont réussi à faire face à leur déficit tout en gardant leur niveau d'APD au-dessus de la norme internationale de 0,7 p. 100. Je vous cite quelques exemples: la Suède, à 0,76 p. 100; la Norvège, à 0,86 p. 100; le Danemark, à 0,97 p. 100; et les Pays-Bas, à 0,81 p. 100. Ce sont des pays auxquels le Canada aime se comparer dans le contexte international. Si nous voulons rester dans leurs rangs, nous nous devons d'examiner nos efforts à l'égard de l'aide publique au développement.
Il ne s'agit pas simplement de fixer des objectifs nobles et de se féliciter de notre générosité. De par son expérience de plus de 45 ans dans le domaine du développement international, Vision mondiale Canada reconnaît que l'investissement dans le développement humain fondamental est essentiel pour le programme commercial du Canada et son rôle dans les affaires internationales. Le gouvernement canadien a placé l'expansion du commerce international au premier rang de ses priorités, et nous en retirons les avantages, même dans les pays en développement. De fait, l'écart s'est accru rapidement entre ce que nous recevons des pays en développement et ce que nous y contribuons. À l'heure actuelle, le Canada reçoit 1,65 $ en rendement des prêts et des investissements dans les pays pauvres pour chaque dollar versé à des programmes d'aide dans les pays semblables.
Nous entendons beaucoup parler du principe de règles du jeu équitables en matière de commerce international. Or, l'aide au développement est un facteur clé pour établir des règles du jeu réellement équitables pour le succès à long terme des activités commerciales. Nous nous vantons du fait que nous sommes au premier rang des pays d'après l'indice de développement de l'ONU. Nous devrions aussi être au premier rang en ce qui concerne l'aide aux populations qui manquent des ressources les plus nécessaires à leur développement.
Vision mondiale Canada encourage le Comité des finances à recommander une augmentation de l'APD, mais pas une augmentation générale. Cette augmentation devrait servir à satisfaire les besoins humains fondamentaux tels que l'éducation et les soins de santé chez ceux qui en ont le plus besoin. Cibler les plus démunis parait peut-être évident, mais notre aide destinée à l'Afrique subsaharienne, une des régions les plus pauvres du monde, a chuté de 30 p. 100, ce qui est une réduction plus marquée que celle de l'APD Notre aide aux 48 pays les moins développés a chuté de 33 p. 100 depuis 1992, par rapport au budget global de l'APD, qui a diminué de 21 p. 100.
On ne pourra pas satisfaire les besoins humains fondamentaux de ces pays uniquement par des investissements du secteur privé et du commerce, mais ces pays en ont besoin pour participer pleinement à l'économie mondiale. Au Canada, nous comprenons l'importance de l'éducation et de la santé pour notre avenir. Cela est aussi vrai pour les gens dans d'autres pays qui n'ont pas les mêmes possibilités que nous. Je vous rappelle que l'année dernière le Comité des affaires étrangères a appuyé à l'unanimité une augmentation des fonds destinés aux besoins humains fondamentaux.
Destiner l'aide au développement aux besoins humains fondamentaux et à la réduction de la pauvreté pourrait nous aider à obtenir un plus grand appui du public à cet égard. Les Canadiens appuient fortement les aspects humanitaires du développement international. L'année dernière, les Canadiens ont donné plus de 100 millions de dollars en dons à Vision mondiale pour ce genre d'aide.
• 2000
Lier l'aide au commerce ou aux emplois au Canada a souvent
donné lieu à des inefficacités, à des cibles ratées, et à un
scepticisme chez la population au sujet du développement
international.
Pour finir, nous voulons parler de l'APD et de notre rôle à l'échelle internationale. Vision mondiale Canada se réjouit du fait que le Canada a obtenu un siège au Conseil de sécurité. Nous continuerons à travailler de concert avec le ministère des Affaires étrangères à des initiatives telles que l'élimination des mines antipersonnel et la campagne qui vise à protéger les enfants des répercussions des conflits armés. Notre capacité d'utiliser notre siège au Conseil de sécurité pour créer des alliances et influencer des décisions internationales pour la paix dépendra de nos contributions au développement international.
La sécurité humaine, le but de nos politiques étrangères, est directement liée à nos objectifs de développement social. Afin d'atteindre nos objectifs au plan du commerce et des affaires internationales, le budget de 1999 devrait comporter une augmentation de l'APD qui sera investie dans le développement social fondamental dans les pays qui en ont le plus besoin.
Merci.
Le président: Merci, madame Vandergrift.
Nous passerons maintenant à la période des questions et des réponses. Nous commencerons par M. Epp, qui aura 10 minutes.
M. Ken Epp: Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier tous les témoins pour leurs exposés. Vous avez tous mis l'accent sur les différents domaines que nous devrions examiner dans le cadre de ces consultations prébudgétaires, et j'aimerais commencer par poser une question à la Fédération des enseignantes et des enseignants.
Vous avez dit que le surplus de la caisse de l'assurance- emploi devrait être utilisé dans le domaine de l'éducation, de la santé, etc. Est-ce que vous avez confirmé cela auprès de vos membres? Je sais que vous représentez les enseignantes et les enseignants, et qu'il y a aussi des associations, des administrateurs ou des employeurs, pour ainsi dire. Je me demande si vous exprimez l'opinion de tous les enseignants du pays sur cette question ou s'il s'agit juste d'une idée qu'a eue votre petit groupe. J'essaie juste de déterminer...
Une voix: ...
[Note de la rédaction: Inaudible] ...
M. Ken Epp: Un peu comme le Parti libéral, oui.
M. Harvey Weiner: J'essaierai de ne pas me laisser offusquer par ce commentaire.
Nous avons un assez vaste processus de consultation en place qui nous permet de solliciter la participation de nos associations membres, c'est-à-dire les associations affiliées dans les provinces et les territoires qui représentent nos membres. Les enseignants font probablement la plus grande contribution nette à la caisse de l'assurance-emploi parmi tous ceux qui ont droit aux prestations. À notre avis, nous sommes bien placés pour demander que l'accès à ces prestations soit amélioré pour ceux qui y sont admissibles et pour la catégorie grandissante de gens dans ce pays qui n'ont malheureusement pas d'emploi ou qui ont abandonné tout espoir de se trouver un emploi.
Donc il s'agit d'une position qui a été examinée avec soin et élaborée au niveau national.
Mon collègue, John Staple, voudra peut-être ajouter quelque chose.
M. John Staple (directeur, Services économiques, Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants): Tout comme bien d'autres groupes, je pense que nous nous posons la question quant à savoir si les réformes de l'assurance-emploi marchent comme prévu. À bien des égards, je pense que ces réformes ont manqué le bateau ou ne correspondent pas assez aux régimes de travail non traditionnels de bien des Canadiens, particulièrement des travailleurs à temps partiel.
Dans le cadre d'un système qui prétend offrir des prestations à partir du moment où on gagne son premier dollar, il y a énormément de Canadiens et de Canadiennes qui travaillent à contrat ou qui occupent des postes permanents, mais qui ne travaillent pas à temps plein, disons, et qui ont établi ces régimes de travail depuis plusieurs années, mais qui ne toucheront jamais les prestations pour lesquelles ils ont cotisé.
• 2005
Nos membres ont d'autant plus de difficulté à accepter que ces
individus n'aient pas accès aux prestations habituelles, mais ils
ne peuvent pas non plus avoir accès aux prestations spéciales pour
les maladies ou les congés de maternité auxquelles ont accès
d'autres individus qui occupent des postes permanents à temps
plein. C'est une des failles fondamentales du système.
M. Ken Epp: Je devrais revenir un petit peu en arrière. Je ne remettais pas en question votre processus; je voulais connaître votre processus. Je ne voulais pas vous vexer. Je m'en excuse.
À ce propos, dans le fond, nous avons à l'heure actuelle un budget équilibré au Canada. On pourrait dire que c'est uniquement en raison des versements excédentaires à la caisse de l'assurance- emploi, puisque le surplus accumulé de la caisse de l'assurance- emploi est probablement une fois et demie plus élevé que le surplus accumulé du budget depuis un an ou un an et demi. Je voudrais savoir si à votre avis seuls les employeurs et les employés devraient cotiser ou si ce fardeau devrait être partagé par tous les Canadiens. C'est ma première question.
Vous dites également que dans le fond vous ne voulez pas que l'on réduise les cotisations à l'assurance-emploi. Vous voulez continuer à voir tous les employeurs et tous les employés payer environ 850 $ par an de plus que ce qui est nécessaire pour avoir un programme rentable. Vous voudriez garder les choses telles quelles au lieu d'augmenter l'accès aux prestations. Est-ce que c'est bel et bien ce que vous avez dit?
M. John Staple: Je ne crois pas que nous ayons abordé la question des taux de cotisation du tout. Dans notre exposé et dans nos remarques liminaires, nous avons dit qu'il y a une raison principale pour laquelle la loi, dans sa forme actuelle, a donné lieu à des surplus considérables. Il y a beaucoup plus de gens qui cotisent et trop de gens qui devraient toucher des prestations, mais qui n'y sont pas admissibles. Donc nous n'avons pas du tout parlé des taux de cotisation, mais nous avons plutôt parlé des aspects du système qui empêchent des gens de toucher des prestations auxquelles ils ont droit de façon légitime, d'après nous.
M. Harvey Weiner: Pour répondre à la première partie de votre question, il s'agit d'argent versé par les employeurs et les employés, à moins de considérer ces cotisations comme étant une taxe spéciale qui est fonction des cotisations des employeurs et des employés, qui servira à financer toutes sortes de choses. Il serait plus juste d'augmenter d'autres taxes qui toucheraient l'ensemble de la population.
Donc vous avez raison de dire que d'après nous cet argent appartient aux employés et aux employeurs qui ont cotisé. À notre avis, à l'heure actuelle trop peu de gens sont admissibles aux prestations. On peut élargir le nombre de personnes admissibles et les prestations, ainsi que les conditions pour obtenir ces prestations. On a un taux de chômage qui est assez élevé, mais qui est caché, évidemment, par un pourcentage très élevé d'individus qui ne sont tout simplement pas comptés parce qu'ils ont renoncé à chercher du travail.
M. Ken Epp: J'aimerais poser une ou deux questions à Mme Markus.
Vous avez présenté un exposé fort intéressant. Je ne sais pas si vous avez étudié l'expérience des Japonais. Ils se servent beaucoup de ce modèle dans leurs entreprises... ils établissent également des caisses de retraite. Ainsi, vous accumulez des actions de la compagnie pour laquelle vous travaillez; cela représente en fait votre caisse de retraite. Ainsi, c'est une forme incitative pour vous assurer que vous fassiez des choses qui sont à l'avantage de la compagnie à long terme, au lieu de simplement faire cela à court terme cette semaine ou pour un mois.
Vous avez dit que vous aviez besoin d'incitatifs et vous avez parlé de crédits d'impôt. Pouvez-vous me dire exactement: des crédits d'impôt pourquoi?
Mme Julia Markus: La grande priorité est un crédit d'impôt pour les dépenses d'une compagnie qui met sur pied un régime d'actionnariat des employés. Nous comparons cela par exemple aux crédits d'impôt au chapitre de la R-D, parce qu'un des secteurs qui voudront beaucoup participer à ce programme, c'est celui de la technologie. Nous le savons.
• 2010
Si vous accordez un crédit établi en fonction de
l'investissement, il vous est impossible d'en contrôler la taille
à moins que vous ne limitiez cela en établissant des lignes
directrices de mise en commun. En Colombie-Britannique, où l'on
établit un maximum du montant qui sera offert en incitatifs en
fonction de ce qu'investissent les employés, nous avons constaté
que les employés investiront jusqu'à cette limite, mais pas plus.
Nous voudrions donc qu'il y ait un crédit d'impôt pour les dépenses qui serait assorti de règlements raisonnables établis en fonction de la taille de la compagnie et de la taille de l'investissement obtenu des employés.
M. Ken Epp: Lorsque vous parlez d'un crédit, vous dites simplement qu'on pourrait y parvenir en n'incluant pas ce revenu dans les revenus imposables ou en autorisant un dégrèvement?
Mme Julia Markus: Non, ce serait une déduction.
M. Ken Epp: Je sais que c'est une déduction. Comment déterminer la taille de ce crédit d'impôt? Vous demandez en fait au gouvernement de subventionner les coûts d'une activité qui est à l'avantage de tous.
Mme Julia Markus: Oui. C'est semblable à ce que le gouvernement provincial fait en Colombie-Britannique. Il rembourse directement 50 p. 100 des coûts associés à la mise sur pied d'un régime d'actionnariat des employés. On appelle ça un incitatif à coûts partagés.
Nous avons constaté que ce n'était pas vraiment un incitatif pour certaines compagnies. Un crédit d'impôt pour les dépenses présente un certain avantage parce qu'il encourage les compagnies qui ne réalisent pas encore de profits, et cela serait une offre très importante pour les secteurs de la technologie.
M. Ken Epp: Pour ce qui est des prêts sans intérêts, qui paie l'intérêt? L'argent, ce n'est jamais gratuit.
Mme Julia Markus: La Canadian Worker Cooperative Federation discute actuellement avec Ressources humaines de la question, et cela s'appliquerait au fonds de création d'emplois.
Je crois qu'on pensait que ce fonds pourrait être utilisé pour mettre sur pied ce programme de mise en commun. L'argent serait remboursé au gouvernement sans intérêts, et ce système se perpétuerait lui-même. Les employés ne reçoivent pas cet argent libre d'intérêts. Il s'agit d'une mise en commun de capital libre d'intérêts, et l'intérêt payé sur le financement accordé assure la croissance de ce fonds, comme c'est le cas pour les fonds de développement économique des collectivités.
M. Ken Epp: Si le gouvernement prête de l'argent sans intérêts, qu'il s'agisse d'une mise en commun ou pas, cet argent vient des contribuables, et ce sont ces derniers qui l'ont gagné. Dans certains cas, des entreprises se trouveraient à financer les activités de leurs compétiteurs pour leur permettre de se réorganiser. Est-ce que c'est une façon sage de procéder?
Mme Julia Markus: Je crois que cela les encouragerait à participer au programme.
M. Ken Epp: En d'autres termes, vous voulez essayer de réduire la propriété individuelle d'entreprises et de compagnies et accroître le nombre d'entreprises qui appartiennent aux employés.
Mme Julia Markus: Je suis d'accord avec vous, mais vous ne vous êtes pas exprimé exactement de la même façon que je l'aurais fait. Notre objectif est d'augmenter la participation des particuliers à la propriété des entreprises. Tous les employés posséderaient des actions ordinaires de la société et pourraient continuer d'en acheter. Et s'ils le voulaient, ils pourraient emprunter l'argent dont ils ont besoin.
C'est l'un des problèmes des sociétés de toutes tailles. Les employés n'ont tout simplement pas assez d'argent pour y acquérir un intérêt important. Il faut trouver une formule quelconque pour leur donner accès à l'argent dont ils ont besoin à cette fin.
M. Ken Epp: Il n'y a pas beaucoup de sociétés qui peuvent se permettre de faire ce que IBM fait depuis des années. La société a permis aux employés d'acquérir une part de la société au moyen de contributions régulières pour acheter des actions, et elle leur assurait un prix garanti.
Mme Julia Markus: En réalité, un très grand nombre de sociétés ouvertes au Canada encouragent leurs employés à acheter des actions en leur offrant un marché à deux pour un ou un pour un. C'est une chose un peu difficile à faire pour les sociétés privées, parce qu'elles ont si peu d'actionnaires.
M. Ken Epp: C'est intéressant. Je pense vous avoir bien comprise.
Je vais maintenant poser des questions à Mme Cassidy. Étant donné que j'ai deux amis qui souffrent de sclérose en plaques, votre position n'avait vraiment rien de nouveau pour moi. J'entends régulièrement ces personnes et d'autres dire à quel point il leur est difficile de faire face à cette maladie et aux coûts qu'entraînent leurs besoins particuliers.
Nous allons encore une fois parler un peu des crédits d'impôt. Vous avez mentionné que vous vouliez voir passer le crédit d'impôt à 29 p. 100 pour quelque chose de précis, mais j'ai manqué d'encre à ce moment-là.
Mme Nickie Cassidy: Le crédit d'impôt augmenterait pour les personnes à faible revenu. La Société canadienne de la sclérose en plaques recommande que le crédit d'impôt passe immédiatement de 17 p. 100 à 29 p. 100.
Il existe actuellement deux crédits d'impôt distincts. Il y a celui qui porte sur les dépenses liées directement à une maladie—dans notre cas, la sclérose en plaques. Il y en a un autre qui est un crédit d'impôt à l'emploi; autrement dit, j'ai un emploi et je peux donc réclamer ce crédit d'impôt pour personnes handicapées, et si je n'ai pas assez d'argent, mon conjoint ou un autre membre de la famille peut le faire. Une telle mesure n'aide pas beaucoup les personnes qui n'ont pas d'emploi actuellement.
Nous proposons qu'au lieu d'avoir deux programmes distincts, on les combine, et dans le cas des familles à faible revenu, ou des familles dont un membre souffre de sclérose en plaques, nous proposons que le crédit passe de 17 p. 100 à 29 p. 100.
M. Ken Epp: Je vois; et il s'agirait d'un crédit d'impôt remboursable.
Mme Nickie Cassidy: Remboursable, en effet. C'est le mot clé. Merci.
M. Ken Epp: Très bien.
Vous avez parlé des coûts exorbitants des médicaments et vous avez ensuite ajouté que vous ne prôniez pas l'application d'un régime d'assurance-médicaments. Pourquoi avez-vous ajouté cela?
Mme Nickie Cassidy: Quand on parle de coûts exorbitants des médicaments, on ne veut pas nécessairement parler aussi d'un régime d'assurance-médicaments. D'après ce que j'ai pu comprendre, un régime d'assurance-médicaments s'appliquerait à tous les médicaments. Or il s'agit en l'occurrence d'un médicament comme le Betaseron, soit le premier médicament approuvé par le gouvernement fédéral. À l'heure actuelle, tout dépend de l'endroit où l'on habite. La seule province qui ne paye pas les coûts de ce médicament à l'heure actuelle est le Nouveau-Brunswick. Dans les neuf autres provinces, il est possible de faire une demande, il y a certains moyens pour obtenir qu'on paie ce médicament. Mais en fin de compte, pour obtenir ce médicament, qui permet de traiter la maladie, il en coûte aux particuliers ou à leur famille environ 17 000 $ par année. Nous disons que c'est beaucoup trop.
Notre société s'autofinance. Tous nos fonds proviennent de nos campagnes de financement. Nous ne recevons aucune aide financière d'un gouvernement. Mais les demandes provenant de personnes qui ont besoin d'aide en attendant, dans la province d'Ontario, par exemple, que la Fondation Trillium parvienne à les aider à payer leurs médicaments... Dans d'autres provinces, il y a d'autres moyens.
En d'autres mots, à l'heure actuelle, il y a 10 procédures différentes pour 10 provinces. Dans certaines provinces, on paie une certaine proportion des coûts—parfois plus grande, parfois plus petite. C'est ridicule que pour les gens qui sont atteints de la sclérose en plaques au Canada, le type d'aide qu'on peut avoir pour les médicaments dépende de l'endroit où on habite. Et on ne parle pas de médicaments tel le clonazepham, qui coûte peut-être 30 $ par ordonnance; il s'agit de milliers de dollars par mois.
Mais ce qui n'apparaît pas, c'est que beaucoup de nos membres qui ont accès à ces types de médicaments peuvent toujours travailler; ils peuvent toujours payer des impôts; ils peuvent continuer à contribuer à la société. Ces médicaments ne constituent pas une forme de guérison; ce sont des traitements qui permettent aux personnes atteintes de la maladie de vivre beaucoup plus normalement, pour ainsi dire. Je déteste le mot «incapacité», mais je crois que vous me comprenez.
M. Ken Epp: Le médicament allège les symptômes.
Mme Nickie Cassidy: Oui, c'est cela. En fait, il va encore plus loin. Pour certaines personnes, les symptômes sont presque effacés, et pour d'autres cela les réduit.
Évidemment, comme tous les autres médicaments, cela ne fonctionne pas pour tout le monde, mais pour un grand nombre de personnes atteintes de la sclérose en plaques, celles qui souffrent du type qui affiche des poussées actives et des rémissions, ces médicaments fonctionnent, mais ce sont les coûts qui constituent la «catastrophe» lorsqu'il s'agit de plusieurs milliers de dollars par année.
C'est dans ces cas que nous nous attendons que le gouvernement fédéral fasse preuve d'un certain leadership vis-à-vis des provinces. Je ne sais pas exactement comment vous allez vous y prendre; c'est votre affaire, bien sûr. Mais il faut une certaine forme de leadership pour que les gens n'aient pas besoin de passer par 10 procédures différentes dans 10 provinces et une dizaine de façons de trouver le financement nécessaire pour des médicaments qui leur sont tout à fait essentiels.
M. Ken Epp: Il faudrait que les spécialistes de la politique règlent la question du conflit entre la compétence fédérale et la compétence provinciale à cet égard, mais j'estime certainement...
Mme Nickie Cassidy: Il doit certainement y avoir une façon pour le gouvernement fédéral d'assumer un leadership pour quelque chose qui coûte aussi cher que ces médicaments. En vertu de l'ancien RAPC, il y avait des directives à cet égard. On ne vous suggère pas de revenir à l'ancienne méthode, ni même de créer un système d'assurance-médicaments; nous disons que ces médicaments constituent une catastrophe et un vrai fardeau non seulement pour les personnes qui en ont besoin, mais aussi pour la société, qui essaie d'aider les gens au niveau du financement. C'est tout à fait ridicule. Le fait de recevoir de l'aide ou non dépend de votre lieu de résidence.
M. Ken Epp: D'accord. J'ai des questions pour les autres aussi. Dois-je tirer ma révérence, monsieur le président, ou voulez-vous que je continue?
Le président: Non, ne tirez pas votre révérence, mais je crois que vous devriez cesser de poser des questions.
M. Ken Epp: D'accord. Je serai juste envers les autres membres du comité. S'il reste du temps par la suite, je vais revenir à la charge.
Le président: Merci, monsieur Epp. Nous l'apprécions.
Nous allons passer à Mme Bennett, qui sera suivie par M. Fontana.
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Ma première question est pour le doyen McMurtry. Quand vous expliquez la notion de coproduction, est-ce que c'est une espèce d'évaluation de la qualité au fur et à mesure? Que voulez-vous dire quand vous parlez de coproduction?
Dr Robert McMurtry: C'est justement cela—l'élément clé, c'est que les patients participent au processus et sont très bien renseignés. Lorsque cela arrive, le niveau de satisfaction monte. Le modèle dont je parle comprend une évaluation pendant que les soins sont prodigués. Il y a une collecte de données concernant, d'abord, la satisfaction des patients et, deuxièmement, les résultats biologiques mesurables pour démontrer qu'il y a eu une influence sur les années-personnes sans invalidité. Je ne sais pas si vous comprenez ce terme.
Mme Carolyn Bennett: Oui.
Dr Robert McMurtry: On mesure la qualité et la durée de la vie, et vous voulez vous assurer que les soins prodigués donnent un bénéfice optimal pour la personne et, bien sûr, pour les groupes de personnes.
Mme Carolyn Bennett: Les meilleures pratiques et les économies qui en découleraient... est-ce que vous proposez qu'il y ait des normes nationales concernant les meilleures pratiques?
Dr Robert McMurtry: Moi je préférerais plutôt des principes concernant les meilleures pratiques. Une norme nationale, cela n'existe pas. Je crois que la recherche de normes nationales pourrait créer des difficultés. Je crois qu'on peut avoir des normes nationales au niveau des principes, comme c'est le cas pour l'assurance-maladie, mais il ne peut pas y avoir des normes nationales pour le soin d'une personne.
Par exemple, si une personne a une blessure simple, comme un ligament déchiré, il n'est pas logique de dire qu'il y a une norme nationale, parce que, selon qu'il s'agit d'une mère seule, du vice- président d'une société, d'un pianiste professionnel, d'un athlète compétitif, ou d'un retraité, le traitement pourrait facilement varier. C'est cela que je veux dire par «axé sur le patient». On ne veut jamais oublier cela.
Je veux dire que lorsqu'on fait les interventions normales, et qu'on examine le coût et qu'on s'assure, bien sûr, d'opter pour la procédure la moins envahissante pour le patient au meilleur coût possible...
Voilà pourquoi je réagis d'une façon un peu négative lorsqu'on parle de normes nationales. La norme devrait consister à s'interroger sur ce qu'on fait et à faire une évaluation critique de nos procédures. Cela devrait constituer la norme. Il ne peut pas y avoir des réponses pour chaque intervention; c'est impossible.
Mme Carolyn Bennett: Il est intéressant de constater à quel point le secteur de la santé est en retard par rapport aux technologies de l'information. Beaucoup d'entre nous espèrent qu'on aura la possibilité de faire des évaluations au fur et à mesure qu'on se branchera. Croyez-vous qu'il pourrait y avoir une façon d'établir des normes d'acceptabilité pour certaines mesures de qualité, qu'il s'agisse des listes d'attente pour les chirurgies cardiaques ou pour les remplacements totaux des hanches. Si ces choses ne sont pas mesurées de façon cohérente, il sera très difficile d'établir les différences à travers le pays et de pouvoir attribuer des ressources. Alors, pour ce qui est des bulletins de santé, il faut pouvoir mesurer ces choses d'une façon comparable. Il faut qu'il y ait une reddition de comptes pour l'attribution des ressources.
Dr Robert McMurtry: Je ne suis pas certain que vous m'ayez posé une question. Je suis d'accord avec la majeure partie de ce que vous dites.
Mme Carolyn Bennett: Alors, quand je parle de normes nationales, il faudrait savoir qu'on attend deux ans à Halifax pour un remplacement total de la hanche et qu'à Toronto, c'est trois mois. Je dois dire...
Dr Robert McMurtry: Quelque chose ne va pas ici.
Mme Carolyn Bennett: ...que quelque chose ne va pas ici. Ou que dans certaines provinces on paie pour l'interféron et autres médicaments tandis que d'autres provinces ne le font pas... Lorsqu'on parle d'accessibilité, c'est d'accessibilité à quoi? Aux soins les moins chers ou aux soins de haute qualité?
Dr Robert McMurtry: Aux soins appropriés.
Ce qui me préoccupe beaucoup concernant l'utilisation des listes d'attente comme mesure, c'est que très souvent les normes pour être sur la liste d'attente ne sont pas les mêmes. Un remplacement total de la hanche est formidable, mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Il s'agit de personnes qui pourraient avoir un besoin. Il faut qu'il y ait des mesures qui s'appliquent partout pour démontrer qu'il est justifié qu'elles soient sur la liste d'attente, et c'est cela qui manque.
Heureusement, il y a croissance de l'information et de la communication entre, au moins, les 16 centres à travers le pays. On a la capacité de le faire. On veut évaluer les résultats. On a la capacité de faire des examens critiques des résultats, et même des évaluations critiques de qui devrait figurer sur les listes d'attente. Je peux vous dire que dans le passé les listes d'attente ne traduisaient pas toujours des besoins légitimes.
Mme Carolyn Bennett: J'aurais des préoccupations concernant la liste d'attente pour une hystérectomie, s'il s'avérait qu'on en fait 10 fois plus dans un centre que dans un autre...
Dr Robert McMurtry: Quelque chose ne va pas.
Mme Carolyn Bennett: ...pour exactement le même problème; encore une fois, quelque chose ne va pas.
Dr Robert McMurtry: C'est exact.
Mme Carolyn Bennett: Pour ce qui est des choix que le gouvernement pourra faire pour le prochain budget, avez-vous des priorités à proposer? Vous avez présenté de bons arguments concernant la recherche en santé, mais il y aura un débat concernant la hausse du TCSPS, et du financement conditionnel. Avez-vous une opinion à ce sujet?
Dr Robert McMurtry: Comme toujours, mais je vous remercie de me fournir l'occasion de me prononcer.
Je suis d'avis que le gouvernement fédéral a fait une distinction au niveau de la Constitution entre la recherche et les soins. Pour moi, cette séparation n'est pas du tout utile, et le plus grand défi à relever pour le gouvernement fédéral consiste à les réunir. En vertu de la Constitution, le domaine où vous pouvez faire un investissement direct et faire la plus importante différence est le secteur de la recherche, de la santé de la population, des sciences évaluatives, dont vous avez si bien parlé, et, bien sûr, de la recherche fondamentale, qui nous donnera les quasi-guérisons et les méthodes qui atténueront les maladies neurodégénératives telles que la sclérose en plaques.
Mme Carolyn Bennett: Croyez-vous que ces instituts canadiens de la recherche sur la santé, tels que proposés par le Dr Friesen, aborderont ces questions importantes? On a critiqué la proposition du fait que cela s'approche trop près du modèle médical, et que peut-être la santé de la population, la prévention, et les méthodes de prévention qui réussissent ou qui ne réussissent pas, ou les sciences évaluatives... Croyez-vous que la proposition du Dr Friesen, dans l'état actuel, traduit d'une façon adéquate le virage ambulatoire et le virage des docteurs aux soins multidisciplinaires?
Dr Robert McMurtry: En un mot, oui. Je crois que le Dr Friesen serait le premier à dire que si ce n'était pas le cas, on ne devrait pas financer cela.
J'ai un conflit d'intérêts, parce que je suis membre du Conseil de recherches médicales. Mais je veux souligner que nous avons tous utilisé des phrases telles que «de la molécule à la collectivité». Nous sommes tout à fait convaincus du besoin de créer un partenariat avec les régions et les collectivités que nous desservons.
Nous croyons qu'il faut aborder la santé de la population. Et il ne s'agit pas de l'un ou de l'autre. Alors cela comprend l'évolution dont vous avez parlé, d'une profession à une approche multidisciplinaire, du modèle purement biomédical à une vision plus large de la recherche en santé.
On a entendu Henry Friesen dire au Conseil de recherches médicales qu'il aimerait l'appeler au Conseil de recherches sur la santé. Et il est sincère. Alors je crois que ce genre de critiques proviennent peut-être de stéréotypes historiques au lieu d'être ancrées dans la réalité présente. Il n'y a rien de plus rassurant que de parler au Dr Friesen de la façon dont qu'il a créé des partenariats efficaces avec le Conseil de recherches en sciences humaines et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et les organismes bénévoles à cet égard. La Société de la sclérose en plaques l'a dit, et aussi la Fondation des maladies du coeur du Canada, la Société canadienne du cancer et la Société d'arthrite. Je crois qu'il a une vision assez large de la question.
Mme Carolyn Bennett: Pour ce qui est du médicament catastrophe, madame Cassidy, pouvez-vous expliquer comment cela pourrait fonctionner—comment le gouvernement fédéral pourrait en effet aider à cet égard? Ou est-ce que cela fait partie—je ne sais pas comment l'exprimer autrement—de normes nationales qui disent que ces choses doivent être du ressort des provinces?
Mme Nickie Cassidy: Je ne vois pas d'autres solutions que de faire cela.
Mme Carolyn Bennett: Pour un médicament qui coûte 17 000 $ par année, cela n'a pas de bon sens de s'attendre à ce que quelqu'un l'achète et attende trois mois pour se faire rembourser, n'est-ce pas?
Mme Nickie Cassidy: Parfois, ça prend six mois, et même plus, selon l'endroit où vous habitez. Évidemment, je connais mieux la situation en Ontario. Avec dix procédures différentes et dix provinces, je ne peux pas me souvenir de tout. Je n'ai pas pu tout apporter avec moi; alors je ne peux pas vous expliquer comment cela fonctionne dans chaque province. Je peux vous dire qu'il y a une procédure différente dans les neuf provinces sur dix qui le financent.
En Ontario, à l'heure actuelle, les gens atteints de la SP doivent payer pendant les six premiers mois. Ensuite ils font une demande auprès du programme Trillium pour se faire rembourser. Il est question d'apporter des modifications au programme afin de l'améliorer, mais cela ne s'est pas encore produit.
Mme Carolyn Bennett: D'accord. Pouvez-vous nous expliquer la différence entre le crédit remboursable pour frais associés à une déficience et le crédit pour handicapés? Quelles sont les critères de ces deux crédits d'impôt?
Mme Nickie Cassidy: D'accord. Pour ce qui est du crédit remboursable pour frais associés à une déficience, les climatiseurs sont maintenant déductibles aux fins de l'impôt pour les gens atteints de la SP, mais il existe un maximum. À l'heure actuelle, on obtient le crédit de 17 p. 100 sur l'impôt sur le revenu si vous gagnez un revenu ou si quelqu'un dans votre famille gagne un revenu. J'ai un emploi. Il y a un crédit pour handicapés qui vise les personnes qui ont un emploi. À partir d'un certain seuil, on a droit à l'exemption personnelle. Il y a un autre seuil dans le cas du crédit pour handicapés.
Voilà comment cela fonctionne si on est admissible à ces crédits. On demande également un changement de la définition.
Il y a quelques années—je pense que c'était en 1996—le gouvernement fédéral a modifié les critères. Il a tellement resserré les critères que—et je vais dire les choses carrément ici—si ce n'était que de mes problèmes de vessie et d'intestins, je n'aurais pas été admissible au programme. Même si je travaille, j'ai besoin de soins extraordinaires... Je pense qu'aux fins de presque tout autre programme, on me considère comme handicapée; donc pourquoi ne le serais-je pas pour les fins de l'impôt sur le revenu? Sans cette échappatoire, je n'aurais pas droit au crédit pour handicapés d'après la définition actuelle. C'est tout à fait injuste.
Deuxièmement, je paye des dépenses personnelles pour mon appareil de marche et les différentes aides dont j'ai besoin. Auparavant, la province de l'Ontario payait ce genre d'équipement, mais ce n'est plus le cas. La province en paye une partie, mais elle est infime. Ma compagnie d'assurance paye une partie des frais, mais il s'agit de coûts pas mal extraordinaires.
Je souffre de la sclérose en plaques. Mon mari a un problème cardiaque et fait du psoriasis, et il est diabétique également. Ma fille fait de l'asthme et souffre d'allergies. En moyenne, notre famille a une facture de 1 500 $ par mois pour les médicaments. Je ne peux que parler de mon cas personnel en ce moment. À la fin de l'année, on ne me donne que 17 p. 100 de cette somme, ce que je ne conteste pas.
Mais qu'en est-il des familles qui n'ont pas de revenus et qui doivent quand même payer ce genre de coûts? Si elles n'ont pas d'assurance-médicaments, comment font-elles pour payer leurs médicaments? Le fait est qu'elles ne les achètent pas. L'aide à laquelle ces familles ont droit varie selon la province de résidence. Nous soutenons qu'il nous faut une orientation de la part du gouvernement fédéral. Je sais qu'on s'est éloigné de ce principe lorsque le RAPC a pris fin, mais, d'une façon ou d'une autre, il faut remplacer ce régime. Il faut que le gouvernement fédéral dise aux provinces d'élargir le financement de ces programmes.
Mme Carolyn Bennett: Vous aimeriez avoir un crédit remboursable pour frais associés à une déficience. Les gens atteints de la fibrose kystique nous ont parlé d'un autre problème—il paraît que les problèmes de respiration ne figurent pas dans la liste.
Mme Nickie Cassidy: Les fournitures pour stomisés n'y figurent pas non plus.
Mme Carolyn Bennett: Pensez-vous que les différents groupes pourraient travailler ensemble pour trouver une définition d'«invalidité» qui nous serait utile?
Mme Nickie Cassidy: Oui.
Mme Carolyn Bennett: Les gouvernements ne s'occupent pas très bien des problèmes; ils préfèrent les solutions.
Mme Nickie Cassidy: Oui, nous avons parlé de toutes ces questions en Ontario. Lorsque le programme ontarien de soutien aux personnes handicapées est entré en vigueur l'année dernière, il y a eu des querelles concernant toutes ces questions. Chaque groupe de handicapés a présenté un exposé. Nous avons trouvé une définition d'«invalidité» sur laquelle nous étions tous d'accord. Cela est assez rare dans n'importe quel groupe, y compris un groupe de personnes handicapées. Nous sommes tous d'accord pour dire que la définition actuelle d'«invalidité» contenue dans la loi sur le programme ontarien de soutien aux personnes handicapées est celle qu'on aimerait avoir pour les fins de l'impôt sur le revenu.
Le président: Merci, madame Bennett.
Madame Redman.
Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.
Je ne veux pas poser toutes mes questions à un seul témoin, mais il y a un point que j'aimerais soulever avec Mme Cassidy, car il s'agit de quelque chose que j'entends dans mon comté. Je représente Kitchener, où il y a, je crois, une fréquence très élevée de SP. J'ai donc été étonnée de voir que Kitchener ne figure pas sur la liste des villes où sont vos bureaux.
Mme Nickie Cassidy: Kitchener fait partie d'un autre bureau.
Mme Karen Redman: Ah bon, d'accord.
Vous avez parlé du RPC et de la difficulté d'obtenir des prestations d'invalidité. Est-ce qu'on pourrait tenir compte de la nature épisodique de la SP dans la définition ou dans les différents critères? C'est un problème dont j'entends beaucoup parler de la part de mes commettants, et je pense qu'il faut qu'on s'en occupe.
Mme Nickie Cassidy: J'aurais souhaité apporter toute ma documentation, mais je crois savoir qu'il y avait cinq ou six endroits où l'utilisation du mot «ou» plutôt que «et» faisait une différence cruciale. On est atteint d'une certaine maladie, et ensuite la définition—et la définition fédérale actuelle—se lit «et il faut que la maladie soit de longue durée et grave». On n'utilise jamais le mot «ou». La maladie pourrait être «de longue durée et/ou grave», mais dans le cas de la SP, qui est la seule maladie dont je peux parler, elle est parfois de très longue durée. Il s'agit d'une peine à vie. Cette maladie ne va pas disparaître. Est-elle grave? Pas toujours. Je suis ici ce soir, et je me porte très bien dernièrement—surtout parce que je suis enrhumée, même si cela peut sembler bizarre—mais le fait est quÂil y a des jours où je dois utiliser l'appareil de marche et j'ai déjà eu à recourir à un fauteuil tricycle. C'est une maladie dont la sévérité varie, et on ne sait pas pourquoi. Je suis sûre que le Dr McMurtry serait d'accord pour dire que si on pouvait savoir pourquoi, tout le monde serait très heureux. C'est la raison pour laquelle il nous faut plus de fonds pour faire de la recherche.
Pour ce qui est de la définition d'«invalidité», il est très important que la définition utilisée dans la loi fédérale soit la bonne également, pour toutes les raisons dont je viens de vous parler. La définition est déjà bonne en Ontario pour ce qui est de certaines déductions, mais nous aimerions que la définition dans la loi fédérale soit corrigée.
Est-ce que cela répond à votre question, ou est-ce que j'ai perdu le fil en cours de route?
Mme Karen Redman: Oui, c'est très bien, car je voulais surtout savoir si on pouvait régler le problème par l'entremise de la définition.
Mme Nickie Cassidy: Oui, car dans le cas du RPC à l'heure actuelle, on nous dit que nous ne pouvons pas obtenir de prestations, car la maladie n'est pas et de longue durée et grave. Si on avait la bonne définition, peut-être qu'on entendrait moins cet argument de la part des responsables du RPC.
Le genre de fatigue dont on souffre à cause de la sclérose en plaques est presque impossible à décrire. On n'est pas tout simplement fatigué; on est complètement incapable de faire quoi que ce soit. Je n'ai jamais réussi à décrire ce phénomène convenablement. Je ne sais pas s'il existe une bonne définition de ce symptôme, mais il s'agit d'une sorte d'impuissance globale. Comment dire à un responsable du RPC qui voit quelqu'un traverser la salle, qu'en ce moment cette personne souffre d'une telle fatigue chronique et que si elle commençait à travailler, elle finirait par s'endormir sur la table après 10 minutes?
Mme Karen Redman: Vous avez bien répondu à ma question. Je regardais également la recommandation numéro 4, où vous proposez qu'on réexamine le critère selon lequel il fallait avoir cotisé durant deux des trois dernières années ou durant cinq des dix dernières années pour être admissible à une pension d'invalidité.
Mme Nickie Cassidy: Oui, c'est très important également, car dans le cas de maladies cycliques—et non seulement dans le cas de la sclérose en plaques—il y a possibilité de périodes de rémission. Les gens peuvent travailler pendant quelques années des fois, et ils pensent avoir vaincu la maladie parce qu'ils sont en rémission; ils pensent que tout va bien finir. Mais voilà que tout à coup on se réveille un bon matin, et on ne peut plus travailler. Avec les critères plus restrictifs qui existent maintenant, de plus en plus de personnes atteintes de la SP ne peuvent pas toucher de prestations des régimes d'assurance auxquels elles ont cotisé pendant bien des années.
Mme Karen Redman: Donc vous dites que la définition et les critères constituent un élément, mais qu'il faudrait également réexaminer la règle d'admissibilité au régime.
Mme Nickie Cassidy: Oui.
Mme Karen Redman: Merci.
J'aimerais vous poser une question, madame Vandergrift. Je n'ai pas reçu de mémoire écrit, mais j'ai bien aimé votre exposé. Vous avez parlé de la réduction de l'aide pour répondre aux besoins humains fondamentaux qui se fait à un rythme plus rapide que la réduction globale de l'aide. Compte tenu du fait qu'on vise une augmentation du financement au niveau international, si on fait une réaffectation de ces fonds, pensez-vous qu'il faut arrêter de financer certains programmes actuels afin de s'occuper de ces besoins fondamentaux?
Mme Kathy Vandergrift: Certainement, une partie de la somme pourrait provenir d'une réaffectation du budget actuel. Depuis longtemps, l'objectif, c'est d'affecter au moins 25 p. 100 de l'APD aux besoins humains fondamentaux. Si nous devons nous approcher de la cible de 0,7 p. 100, je pense qu'il serait possible de le faire de façon stratégique afin de retirer des avantages maximums pour répondre aux besoins. Avec le temps, on peut s'assurer que ce pourcentage de l'aide est affecté à cette catégorie de besoins. Ce serait le moment le plus facile de le faire.
Mme Karen Redman: Merci beaucoup de votre réponse. Cela cadre très bien avec le genre de réinvestissement stratégique que ce gouvernement a fait par le passé.
Avec votre permission, je vais poser une question rapide au représentant de Greenpeace. Vous avez été interrompu par le vote, ce qui était très malheureux, car je trouvais très intéressant votre exposé. À quelques reprises, vous avez fait allusion en passant au protocole de Kyoto. Comment est-ce que vos recommandations qui portent sur une période de trois ans et sur l'énergie éolienne et solaire nous aideraient à respecter les engagements que nous avons pris à Kyoto?
M. Steven Guilbeault: Une évaluation rapide de la première recommandation concernant un programme d'achat vert pour le gouvernement nous permettrait probablement d'atteindre environ 5 p. 100 de la cible fixée à Kyoto sur une période de 10 ans. Nous avons choisi l'an 2010 pour des raisons stratégiques, car il se trouve en plein milieu de ce que l'on appelle dans le protocole de Kyoto la période budgétaire qui s'étend de l'an 2008 à 2012. Il serait réaliste de penser que l'ensemble des mesures que nous avons présentées ici ce soir nous permettrait d'atteindre entre 7 p. 100 et 10 p. 100 de la cible fixée à Kyoto.
Mme Karen Redman: Merci beaucoup.
Le président: Merci, madame Redman.
Au nom du comité, je tiens à remercier tous les participants à cette table ronde de leurs contributions. Comme vous l'avez sans doute compris, nous entendons des points de vue différents. Nous approchons de la fin de nos audiences, et nous faisons face à un grand défi, qui consiste à rassembler tous les éléments que nous avons entendus. Chaque témoin apporte un point de vue particulier qui est extrêmement utile. Au nom du comité, nous vous en sommes très reconnaissants.
Merci. La séance est levée.