Transformation structurelle et

investissements cruciaux dans les Premières Nations afin de promouvoir la prospérité commune

Mémoire prébudgétaire, 2011

UN MÉMOIRE PRÉSENTÉ AU COMITÉ PERMANENT DES FINANCES DE LA CHAMBRE DES COMMUNES

12 AOÛT 2011

www.afn.ca

À PROPOS DE L’ASSEMBLÉE DES PREMIÈRES NATIONS

L’Assemblée des Premières Nations (APN) est l’organisme représentatif, sur les plans politique et national, des gouvernements des Premières Nations et de leurs citoyens au Canada, y compris des Autochtones vivant sur les réserves ou en milieu urbain ou rural. Chaque chef au Canada est admissible à devenir membre de l’Assemblée. Le Chef national est élu par les chefs au Canada, qui sont à leur tour élus par leurs citoyens. 

L’APN a pour rôle et fonction de servir de tribune nationale déléguée pour déterminer et harmoniser la prise de mesures efficaces, collectives et coopératives sur tout sujet que les Premières Nations délèguent à des fins d’examen, d’étude, de réponse ou d’action, ainsi que pour faire progresser les aspirations des Premières Nations.

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© Assemblée des Premières Nations 2011

SOMMMAIRE

L’Assemblée des Premières Nations (APN) apprécie l’occasion qui lui est offerte de passer brièvement en revue ses priorités pour le budget fédéral 2012. À partir de propositions prébudgétaires précédentes, qui étaient axées sur des besoins fermes relativement aux services aux enfants et aux familles, à la santé, au logement, à la gestion de l’eau et aux immobilisations, à la gérance de l’environnement et au développement économique et social, nous faisons maintenant valoir la nécessité d’une transformation fondamentale des relations entre les Premières Nations et le Canada afin d’obtenir de meilleurs résultats pour les Premières Nations.

Il est évident qu’un changement doit s’opérer dans l’approche du Canada envers les Premières Nations. Dans le rapport d’étape de juin 2011 qui examine des recommandations antérieures formulées à l’égard des programmes pour les Premières Nations vivant dans les réserves, la vérificatrice générale conclut que malgré les efforts réalisés, on a observé peu d’améliorations et que dans de nombreux cas, la situation a empiré : « L’écart relatif au niveau de scolarité entre les Premières nations vivant dans les réserves et la population canadienne en général s’est creusé, la pénurie de logements de qualité convenable dans les réserves s’est aggravée, la comparabilité des services aux enfants et aux familles n’est toujours pas garantie et le fardeau de rapports exigés des Premières nations reste lourd. »>[i]

Le rapport présente ensuite les obstacles structurels qui nuisent au processus : « À notre avis, bon nombre des problèmes auxquels les Premières nations se heurtent ont des causes plus profondes que l’inefficience et l’inefficacité des programmes en vigueur. Selon nous, des obstacles structurels nuisent gravement à la mise en œuvre des services publics destinés aux Premières nations et à l’amélioration de la qualité de vie dans les réserves. »[ii]

Dans son approche à l’égard des consultations prébudgétaires, le Comité des finances a demandé des suggestions quant aux moyens de stimuler la création d’emplois et l’investissement des entreprises afin d’assurer à tous la prospérité et un niveau de vie élevé. Les Premières Nations dans l’ensemble du Canada sont à même de contribuer de manière sans cesse croissante au progrès économique global du pays ainsi que de stimuler leur propres économies par le biais du développement à la fois du capital humain et des ressources naturelles. Le discours du Trône de juin 2011 confirmait l’intérêt commun du Canada selon lequel « la contribution des Autochtones sera importante à notre prospérité. Des mesures concertées sont nécessaires pour surmonter les obstacles qui entravent la participation socio-économique de nombreux Autochtones. » 

Des améliorations substantielles ne se produiront toutefois que moyennant un changement structurel et une transformation fondamentale des dispositions relatives aux transferts financiers entre le gouvernement fédéral et les Premières Nations. C’est pourquoi le présent mémoire met en évidence les domaines suivants en tant que secteurs nécessitant des investissements significatifs et soutenus, ce qui déroge de manière marquée aux priorités et aux habitudes de dépenses actuelles du gouvernement fédéral :

1. Transformer la relation financière

2. Investir dans l’éducation des Premières Nations

3. Investir dans l’infrastructure et les services de santé pour favoriser la santé et la sécurité des collectivités

TRANSFORMER LA RELATION FINANCIÈRE

Le Canada a franchi une étape importante en appuyant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) en novembre 2010 et doit maintenant tenir sa promesse et aller de l’avant pour mettre en œuvre la DNUDPA tel que son préambule l’indique, comme « idéal à atteindre dans un esprit de partenariat et de respect mutuel ».

En effet, un partenariat véritable entre le gouvernement fédéral et les Premières Nations constitue la pierre angulaire de la réconciliation, de l’espoir et de la prospérité. Agir dès maintenant et faire des investissements stratégiques constitue donc une orientation efficace et raisonnable, qui se veut en définitive le plan d’action le plus responsable qui soit sur le plan financier. Du fait qu’il n’est pas envisageable de maintenir le statut quo du cadre législatif de la Loi sur les Indiens qui perpétue l’écart qui s’accroît entre les Premières Nations et les citoyens canadiens non membres des Premières Nations, une transformation fondamentale des liens entre les Premières Nations et le Canada est nécessaire.

Une nouvelle relation financière est essentielle pour réaliser une véritable autonomie gouvernementale. Le lien actuel des Premières Nations avec le gouvernement fédéral ne leur permet pas une telle indépendance. Les transferts financiers actuels aux gouvernements des Premières Nations :  

comportent trop de conditions. Les transferts actuels n’offrent pas suffisamment de souplesse aux gouvernements autochtones en matière de pouvoir décisionnel.

sont insuffisants. Les fonds fournis aux gouvernements autochtones sont trop faibles pour répondre aux besoins croissants de leurs citoyens. En 2010, les Premières Nations ont reçu moins de la moitié du montant moyen par citoyen canadien (8 750 dollars par habitant comparativement à 18 724 dollars par habitant) aux fins des programmes et des services locaux.[iii]

sont trop incertains. Le financement est trop à court terme et est considéré comme « discrétionnaire » sans protection juridique. Compte tenu que le financement est imprévisible et instable, les gouvernements sont incapables de planifier à long terme.[iv]

ne sont pas fondés sur la véritable population nécessitant les services. Pour de nombreuses Premières Nations, la population nécessitant les services englobe tous les membres des Premières Nations et non seulement les Indiens inscrits vivant dans les réserves. Dans certains cas, l’approche actuelle exclut 50 p. 100 ou plus du nombre réel es membres réels.

Pour ces raisons, les citoyens des Premières Nations ne profitent pas de services comparables à ceux qui sont offerts aux Canadiens. En effet, tandis que les Canadiens reçoivent des services de tous les échelons du gouvernement, au moyen de transferts fédéraux directs aux provinces et aux territoires qui croissent à un rythme annuel moyen de 6,6 p. 100 par an, le ministère des Finances maintient un plafond arbitraire de 2 p. 100 sur la hausse de dépenses liées aux services de base depuis 1996.[v]Pourtant, les gouvernements des Premières Nations offrent une vaste gamme de programmes et de services à leurs citoyens. Le moment est venu de changer la relation financière. Elle doit traduire l’esprit et le but des traités et la compétence fondamentale[vi], servir de mécanisme pour assurer la parité avec les taux de financement provinciaux, refléter les coûts réels des services de livraison et offrir des mesures incitatives pour augmenter les ressources et maximiser les normes de rendement.  

INVESTIR DANS L’ÉDUCATION POUR DES COLLECTIVITÉS DES PREMIÈRES NATIONS EN SANTÉ, SÛRES ET PROSPÈRES

Les investissements stratégiques dans l’éducation sont essentiels pour bâtir des collectivités en santé, sûres et prospères. L’éducation est généralement reconnue comme la méthode la plus efficace pour apporter des améliorations dans tous les domaines économiques et sociaux. Or, on observe un écart important dans le niveau d’instruction des Premières Nations.[vii] Le financement alloué aux Premières Nations en matière d’éducation se heurte à un plafond de 2 p. 100 depuis 1996, tandis que les paiements de transfert aux provinces augmentent de 6 p. 100 par année. Cette disposition discriminatoire, qui privilégie deux poids deux mesures pour des données comparables, existe en dépit i) des nombreux engagements pris par le gouvernement fédéral en vue de rétrécir l’écart dans le domaine de l’éducation, ii) du fait que la population des Premières Nations s’accroît à un rythme deux fois plus élevé que celui de la population canadienne dans son ensemble et iii) que d’ici 2020, plus de 50 p. 100 de la population des Premières Nations aura moins de 25 ans.  

Dans son budget 2010, le gouvernement fédéral s’est engagé à obtenir des résultats comparables en termes d’éducation pour les étudiants des Premières Nations et a fait de la comparabilité une question prioritaire du Panel national sur l’éducation primaire et secondaire des Premières Nations. Mais l’obtention de résultats comparables nécessite des facteurs comparables. Selon des études des Premières Nations, on évalue à deux milliards de dollars le manque à gagner total dans ce domaine. Par exemple, pour appuyer équitablement l’éducation postsecondaire chez les Premières Nations, une hausse de 149 p. 100 (soit 481 millions de dollars) du financement de la part du gouvernement fédéral est requise.[viii] De plus, 126 millions de dollars sont nécessaires pour l’enseignement des langues par les établissements scolaires afin d’égaler le financement offert par le gouvernement provincial.[ix] En décembre 2010, en collaboration avec l’Assemblée des Premières Nations, le gouvernement du Canada a créé un Panel national sur l’éducation des Premières Nations pour diriger un processus d’engagement sur les façons d’améliorer l’éducation des enfants des Premières Nations vivant dans des réserves. Le Panel national fournira des conseils et élaborera des solutions. Il veillera à ce que le travail avance à un bon rythme et que des ressources suffisantes soient fournies pour atteindre les objectifs fixés.  

En outre, la surreprésentation des citoyens des Premières Nations en prison a été condamnée en 1999 par la Cour suprême du Canada comme une « crise d’envergure nationale » et une « injustice flagrante ».[x] Pourtant, les politiques canadiennes continuent de mettre l’accent sur le financement des institutions carcérales tout en refusant aux Premières Nations le soutien financier et législatif nécessaire pour ramener à la baisse le taux d’incarcération chez les Premières Nations. Par exemple, au cours de l’année financière 2008‑2009, il en coûtait annuellement 343 810 dollars pour une détenue.[xi] Par contraste, il en coûte annuellement 20 190 dollars pour un étudiant membre d’une Première Nation qui souhaite suivre un cours universitaire à plein temps.[xii] Autrement dit, pour ce qu’il en coûte d’incarcérer une détenue autochtone pour un an, le gouvernement fédéral pourrait offrir une aide financière à six étudiants afin de leur permettre de mener à bien un programme universitaire de trois ans.

Avant de débloquer davantage de fonds, un cadre permanent d’attribution des ressources doit être adopté pour permettre aux Premières Nations d’exercer un contrôle plein et entier sur leur éducation, y compris des dispositions de financement s’appuyant sur les coûts réels, l’indexation et un traitement approprié pour les collectivités éloignées et du Nord.[xiii]

L’amélioration des résultats éducatifs chez les citoyens des Premières Nations peut se traduire par un rendement économique significatif à long terme pour le gouvernement canadien. De meilleurs résultats permettront de réduire les dépenses en aide sociale et d’autres programmes de rattrapage liés à des sous‑niveaux d’aide sociale. Il pourrait bien en coûter annuellement aux Canadiens, en termes de perte de productivité et de besoins accrus de soutien pour les Premières Nations, plus de 12 milliards de dollars.[xiv]Les épargnes publiques et la hausse des recettes fiscales conjuguées pour le gouvernement canadien, au moyen de réalisations éducatives comparables pour les Premières Nations, pourrait être de l’ordre de 11,9 milliards de dollars d’ici 2026, et les avantages financiers cumulatifs en matière d’éducation et de bien-être social chez les membres des Premières Nations pourraient atteindre les 115 milliards de dollars de 2006 à 2026.[xv]

Au rythme actuel, il faudra 63 ans pour que l’écart dans le domaine des revenus entre les peuples autochtones et le reste du Canada disparaisse.[xvi] Les gens des Premières Nations et le Canada ne peuvent se permettre d’attendre aussi longtemps. Investir dans l’éducation en vue d’améliorer le niveau de scolarité des collectivités des Premières Nations est par conséquent une stratégie axée vers l’avenir qui permettra d’assurer la santé et la sécurité de ces collectivités.

INVESTIR DANS L’INFRASTRUCTURE ET LES SERVICES DE SANTÉ POUR FAVORISER LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ DES COLLECTIVITÉS

Le potentiel économique et la sécurité physique sont étroitement liés et une infrastructure communautaire sûre et sécuritaire est à la base de la prospérité.

Les infrastructures des Premières Nations, plus précisément en ce qui concerne l’eau, le logement et l’éducation et les services d’urgence, nécessitent des investissements significatifs. On évalue que pour combler le manque à gagner quant aux installations éducatives (établissements scolaires) des Premières Nations, 40 nouvelles écoles devront être construites à un coût moyen de 12,5 millions de dollars chacune. Ce chiffre ne tient pas compte de l’écart dans le financement de l’exploitation et de l’entretien, ni des rénovations qu’il faudra effectuer dans les écoles existantes. Selon une analyse réalisée en 2010, les dépenses en immobilisations prévues d’AINC pour les trois prochaines années sont insuffisantes de 169 millions de dollars à 189 millions de dollars annuellement, tandis que les dépenses aux termes de l’exploitation et de l’entretien sont sous-financées de 11 millions de dollars annuellement.

La qualité de l’eau dans les collectivités des Premières Nations constitue toujours une préoccupation nationale. Le rapport de l’évaluation technique nationale publié par le gouvernement fédéral le 14 juillet 2011 estime les besoins à 6,578 milliards de dollars. Cette étude approfondie conclut que 73 p. 100 des réseaux d’alimentation en eau des Premières Nations sont à risque. Cette statistique est plutôt déconcertante compte tenu que ce même rapport révélait en 2003 que 29 p. 100 des réseaux d’alimentation en eau des Premières Nations étaient à risque. Des avis d’ébullition de l’eau sont toujours en vigueur dans 118 collectivités des Premières Nations. Le gouvernement du Canada doit convenir d’un plan avec toutes les Premières Nations pour mettre en œuvre les recommandations, aborder directement les préoccupations soulevées dans cette étude et planifier clairement les investissements à faire. Les Nations Unies ont récemment reconnu l’accès à de l’eau potable salubre comme un droit fondamental de la personne. Le Canada a la responsabilité de garantir cet accès dans les collectivités des Premières Nations.

Il convient également de se pencher sur les besoins en matière de logement. Une évaluation menée en février 2011 sur la question du logement dans les réserves souligne ce besoin continu et conclut que : « même si s'est poursuivie la construction de nouveaux logements dans les réserves, les pénuries persistent et paraissent plus gagner en importance que le contraire » et que « la croissance démographique et la demande de logements excèdent le rythme auquel il est possible de construire et de réparer ».[xvii]Les défis environnementaux actuels tels que les inondations et les feux de forêt ont aggravé les conditions des logements insalubres. À l’heure actuelle, environ 85 000 nouvelles unités d’habitation devront être construites pour alléger la surpopulation et les retards. Environ 44 p. 100 des logements actuels ont besoin d’être rénovés, et 15 p. 100 nécessitent d’être définitivement remplacés, sans compter l’exigence d’offrir le raccordement aux services publics pour chacune de ces nouvelles unités d’habitation. On estime de façon prudente le coût d’une habitation neuve à environ 150 000 dollars, et le raccordement aux services publics à environ 25 000 dollars par service. De plus, les gouvernements doivent s’engager à fournir des ressources additionnelles pour aller de pair avec toute loi qui aurait une incidence sur la demande en matière de logement et d’infrastructure. 

Autre nouveau facteur d’importance : les répercussions du changement climatique, plus particulièrement dans les collectivités éloignées et du Nord. Les dangereux feux de forêt, les inondations et la fermeture précoce des routes praticables l’hiver témoignent de cette réalité. Toutes ces épreuves ont une incidence directe sur la santé et la sécurité des collectivités touchées et  soulignent le besoin critique de protocoles intergouvernementaux et de solides services d’urgence.

Les Premières Nations éprouvent également le besoin crucial de bénéficier d’une aide financière après‑coup qui s’élève bien au-dessus du plafond actuel d’un milliard de dollars aux termes des immobilisations et de l’entretien. De plus, les programmes d’immobilisations et d’infrastructure municipale régis par les provinces et le gouvernement fédéral doivent être ouverts aux demandes des Premières Nations. Nous devons également examiner sérieusement la protection des citoyens, en particulier les citoyens les plus vulnérables, le fait que certains de nos citoyens vivent loin de leur collectivité natale, et nous attacher à trouver des solutions de logement abordable.

L’APN avait présenté dans son mémoire précédent l’urgent besoin d’investissements nouveaux et suffisants au titre du Programme des services de santé non assurés (SSNA). À moins que ces investissements ne soient réalisés, on estime qu’il y aura un manque à gagner d’environ 376 millions de dollars l’an prochain et de 805 millions de dollars sur cinq ans dans l’ensemble.

Un facteur fondamental de cet accroissement sera l’ajout de nouveaux bénéficiaires aux SSNA. Le budget fédéral devra tenir compte du fait qu’environ 45 000 personnes seront nouvellement inscrites à ce programme en raison des modifications apportées à la Loi sur les Indiens, pour donner suite à l’affaire McIvor, et du fait que 27 000 autres membres de la Première Nation Qalipu Mi’kmaq de Terre‑Neuve‑et‑Labrador ont récemment été reconnus en vertu de la Loi sur les Indiens. Ces chiffres représentent une hausse de 9,7 p. 100 de la population admissible aux SSNA et comprennent environ 200 000 enfants de moins de neuf ans. Par ailleurs, l’APN estime que des augmentations de 6,3 à 9,3 p. 100 sont nécessaires dans différents domaines de prestations lorsque l’on tient compte de la croissance de la population cliente existante, de l’inflation, des changements à l’utilisation des services de santé et à l’état de santé, et de l’incidence des changements technologiques. Du fait de ces facteurs contraignants en termes de santé dentaire, de pharmacie, de transport, de fournitures et d’équipement médicaux, ainsi que de services de santé mentale, et sans moyen de résoudre cette crise financière, les enfants, les adultes et les aînés des Premières Nations devront se retrousser les manches pour avoir accès aux principaux soins de santé dont ils ont besoin. 

Au cours des quinze dernières années, des restrictions et des mesures de compression des coûts ont été activement mises en œuvre pour les SSNA et l’accès aux soins de santé en vertu de ce programme, ce qui présente un risque important pour la sécurité des patients. En effet, plus de 30 p. 100 de nos collectivités sont situées à plus de 90 kilomètres du bureau d’un médecin, et il est commun que les Premières Nations voyagent sur de longues distances pour bénéficier de soins de santé de base, y compris les services de santé dentaire, la dialyse, la mammographie, la chimiothérapie et les services de santé mentale. Or, elles doivent non seulement obtenir une préautorisation pour recevoir un soutien financier en vue d’assurer leur transport et de se voir défrayer les coûts des services de santé dentaire, d’optométrie ou obtenir d’autres prestations, mais de plus en plus de restrictions leur sont imposées en matière de politiques, ce qui signifie davantage de refus pour des services pourtant nécessaires, comme les traitements endodontiques et orthodontiques.

RECOMMANDATIONS :

Les réformes et les investissements susmentionnés aideront non seulement le gouvernement à remplir ses obligations financières et fiduciaires, mais se traduiront par un Canada plus fort et plus prospère grâce au renforcement de la santé, de la sécurité et de la prospérité des Premières Nations. Par le biais d’investissements stratégiques, conjugués à des changements structuraux, le gouvernement du Canada peut optimiser les résultats visés et poser le fondement de notre bien-être collectif, des façons suivantes :

1.   Transformer la relation financière en créant des mécanismes de transferts financiers stables et équitables pour les services offerts aux Premières Nations, et garantir la hausse du financement de manière à ce qu’elle reflète les coûts actuels liés à la croissance de la population et l’inflation.

2.   Résoudre le déficit croissant dans les dépenses en matière d’éducation chez les Premières Nations au moyen d’un cadre financier prévu par la loi qui soutienne les Premières Nations et les encourage à viser l’excellence en éducation à l’aide d’une démarche appropriée sur les plans culturel et linguistique, dans le but d’améliorer considérablement les taux d’obtention de diplôme et les possibilités offertes.

3.   Investir dans les infrastructures pour favoriser la sécurité et la santé des collectivités, y compris la construction de 40 nouvelles écoles et de 85 000 unités de logement, remédier immédiatement à la situation des 118 collectivités des Premières Nations ayant reçu un avis d’ébullition de l’eau et élaborer un plan d’investissement complet en réponse au rapport de l’évaluation technique nationale, renforcer les réseaux des services d’intervention en cas d’urgence et prévoir des routes d’accès qui soient praticables toute l’année; faire des investissements pour veiller à la viabilité des SSNA en comblant le manque à gagner prévu de 376 millions de dollars l’an prochain et de 805 millions de dollars sur cinq ans dans l’ensemble.

NOTES EN FIN DE TEXTE :

[i] Bureau du vérificateur général du Canada, rapport Le Point de la vérificatrice générale du Canada, juin 2011, chapitre 4 : Les programmes pour les Premières nations dans les réserves.

[ii] Bureau du vérificateur général du Canada, rapport Le Point de la vérificatrice générale du Canada, juin 2011, chapitre 4 : Les programmes pour les Premières nations dans les réserves.

[iii] APN, New Fiscal Relationship between First Nation Governments and the Government of Canada, 2011, document de travail présenté au Forum de planification et de dialogue au printemps 2011. http://www.afn.ca/uploads/files/policy_forum/spring_2011_planning_%26_dialogue_forum_fiscal_relations_fe.pdf

[iv] Le Groupe d’experts indépendants sur les subventions et contributions appuie grandement l’opinion selon laquelle les subventions et contributions ne sont pas des mécanismes financiers adéquats pour les services essentiels. Bien plutôt, les relations financières entre les gouvernements des Premières Nations et le gouvernement fédéral doivent s’apparenter aux transferts intergouvernementaux plutôt qu’à des subventions et contributions habituelles. Voir le rapport du Groupe d’experts indépendants sur les subventions et contributions de 2006, Des lourdeurs administratives à des résultats clairs – rapport du Groupe d’experts indépendants sur les subventions et contributions, Ottawa, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, p. 8.

[v] Il convient de noter que bien que le budget dévolu à AINC se soit accru à un taux global de plus de 2 p. 100, cette hausse est en grande partie attribuable au fait de répondre à des obligations légales découlant de revendications territoriales globales, de traités et de litiges précis.

[vi]Cornell, Stephen et Joseph Kalt (eds.), What Can Tribes Do? Strategies and Institutions in American Economic Development, Los Angeles, American Indian Study Centre, 1992.

[vii]Mendelson, M., Aboriginal Peoples and Postsecondary Education in Canada, Ottawa, The Caledon Institute of Social Policy, 2006.

[viii]Conseil en éducation des Premières Nations, Paper on First Nations Education Funding, Wendake, Québec, 2009, p. 43.

[ix]CEPN, 2009. Veuillez noter que ces chiffres ne tiennent pas compte des investissements supplémentaires nécessaires pour la renaissance de la langue autochtone, l’élaboration de programmes et les programmes d’immersion.

[x]R c.Gladue, 1 S.C.R., 1999, 688 à la page 114.  

[xi] Bureau du directeur parlementaire du budget, The Funding Requirement and Impact of the “Truth in Sentencing Act” on the Correctional System in Canada, Ottawa, Bibliothèque du Parlement, 2010, p. 9; consulter également le rapport à l’adresse http://www.csc-scc.gc.ca/text/rsrch/reports/r208/r208-fra.shtml.

[xii]Waslander, B., Focusing INAC’s PSE Program: Targets and Impacts, Ottawa, APN, 2009.

[xiii]CEPN, 2009, p. 46.

[xiv]Canada, Report of the Royal Commission on Aboriginal Peoples (vol. 5, chap. 2), Ottawa, Commission royale sur les peuples autochtones, 1996.

[xv]Centre d’étude des niveaux de vie, The Effect of Increasing Aboriginal Educational Attainment on the Labour Force, Output and the Fiscal Balanc, Ottawa, 2009, vii.

[xvi] Wilson, Daniel et David Macdonald, The Income Gap Between Aboriginal Peoples and the Rest of Canada, Ottawa, Centre canadien de politiques alternatives, 2010, p. 3.

[xvii] Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen, Secteur de la vérification et de l'évaluation, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, Évaluation du Programme de logement dans les réserves d’AINC, février 2011.